En cours au Siège de l'ONU

En présence du Haut-Commissaire pour les réfugiés, la Troisième Commission discute des moyens de résoudre la crise des réfugiés et déplacés

Soixante-douzième session,
39e & 40e séances – matin & après-midi
AG/SHC/4216

En présence du Haut-Commissaire pour les réfugiés, la Troisième Commission discute des moyens de résoudre la crise des réfugiés et déplacés

Avec plus de 66 millions de personnes forcées de se déplacer dans le monde, dont plus de deux millions rien que depuis le début de l’année, le déplacement forcé de population est devenu un phénomène mondial qui n’épargne aucun continent, a expliqué aujourd’hui, dans un tableau sombre mais réaliste, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, M. Filippo Grandi, venu présenter le rapport d’activité de son agence à la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles.

Des crises récurrentes ou nouvelles ont plongé ces millions de personnes sur les routes de leurs propres pays ou vers les pays voisins, a expliqué M. Grandi, qui a rappelé que les conflits en Syrie et en Iraq comptaient, à eux seuls, pour le quart des déplacements forcés dans le monde.  Pour le Haut-Commissaire, la situation exige non seulement que les États réaffirment les engagements pris dans la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants mais mettent également en œuvre le Cadre d’action global pour les réfugiés, annexé à cette Déclaration et qui souligne l’importance de l’action humanitaire pour les aider.  Tout cela restera toutefois sans effet si les moyens financiers manquent et la résolution des conflits actuels et la prévention d’autres ne sont pas privilégiées comme approches, a-t-il averti.

Lors de la discussion générale qui a suivi cette présentation, l’Union européenne a relevé que la nature prolongée des conflits était à la source de ces chiffres, les plus haut jamais atteints.  En tant qu’un de ses principaux contributeurs, l’Union européenne reconnaît les compétences du Haut-Commissariat pour les réfugiés et partage son diagnostic de même que ses solutions pour répondre aux défis posés par cette réalité.

Sans rejeter ces propositions, la Fédération de Russie, qui accueille notamment un million d’Ukrainiens fuyant leur pays, estime aussi que les crises doivent se régler par la voie politique et non par « l’ingérence irresponsable » des États européens dans les affaires intérieures de pays africains et du Moyen-Orient pour en changer les gouvernements par la force.  Le Bélarus a, pour sa part, estimé que les causes profondes de la crise actuelle sont le résultat de l’incapacité de la communauté internationale à tourner la page de guerre froide et à instaurer un nouvel ordre mondial.

Un autre chiffre du rapport a été relevé, notamment par l’Union européenne, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) ou encore le Brésil: 84% des réfugiés recensés par le HCR se trouvent dans des pays du Sud à revenu faible ou moyen, alors que les budgets alloués à l’Afrique, terrain de plusieurs conflits et de la moitié des déplacés, tendent à diminuer.

Or, beaucoup de ces pays d’accueil ont déjà de grandes difficultés à répondre aux besoins de leur propre population.  La situation devient même insoutenable, a déclaré la République islamique d’Iran, qui elle aussi accueille un grand nombre de réfugiés et en ressent grandement la charge sur son économie, d’autant plus qu’elle est soumise à des « sanctions inhumaines » qui affectent aussi la qualité des services fournis aux réfugiés.

S’il faut soutenir ces pays sur le plan financier, l’aide apportée ne doit en aucun cas constituer une contrepartie pour les pays qui adoptent des politiques restrictives en ce qui concerne l’entrée et le séjour sur leurs territoires, a toutefois averti le représentant du Brésil.

Face à cet afflux ininterrompu et grandissant de réfugiés, qui dure depuis des années et face au déséquilibre entre les besoins et les ressources, déploré par de nombreuses délégations, de nouvelles approches sont nécessaires.  Le représentant de la Suisse, pays qui abrite le siège du HCR à Genève, a ainsi exprimé le vœu que le futur pacte mondial pour les réfugiés vienne renforcer le soutien aux États et aux communautés hôtes qui accueillent ces personnes déplacées.  Pour leur part, les États-Unis se sont dit favorables à des réponses concrètes appuyées sur l’élan créé par le HCR pour aider les réfugiés, les demandeurs d’asile, les apatrides et les personnes déplacées, ainsi que les pays qui les accueillent.

Par ailleurs, la Troisième Commission a achevé ce matin sa discussion générale sur l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, entamée hier, une dizaine de délégations ayant pris la parole.  

Demain, la Troisième Commission achèvera à partir de 10 heures sa discussion générale sur le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, avant de recevoir le Président du Conseil des droits de l’homme.

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE

a) Élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de.l’intolérance qui y est associée (A/72/18 et A/72/291)

b) Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban (A/72/285, A/72/287, A/72/319, A/72/323 et A/72/324)

DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION (A/72/317 ET A/72/286)

Suite et fin de la discussion générale

M. ALEXANDER TEMITOPE ADEYEMI AJAYI (Nigéria) a assuré que l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée demeure des priorités pour son pays, comme en attestent les dispositions de sa Constitution interdisant toute forme de discrimination basée sur la race, la nationalité, l’origine ethnique ou la tribu.  De même, le Nigéria condamne dans les termes les plus forts tous les actes de haine religieuse et d’incitation à la discrimination, à l’hostilité et à la violence et invite tous les États à faire de même.  En effet, a constaté le représentant, la communauté internationale reste confrontée à des défis considérables dans ce domaine.  Aussi le Nigéria se prononce-t-il pour un consensus en faveur d’un monde exempt de racisme.

Pour le délégué, la ratification et la mise en œuvre complète de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ainsi que de la Déclaration et du Programme d’action de Durban constituent une base normative sur laquelle les efforts nationaux peuvent se former pour éliminer la discrimination raciale.

Le Nigéria réaffirme par ailleurs son soutien à la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, laquelle fournit une plateforme effective pour combattre le plus largement possible le racisme, la discrimination et l’intolérance associée.  Le représentant s’est également félicité de la campagne mondiale proposée par le Secrétaire général pour lutter contre la xénophobie.  Enfin, se disant profondément préoccupé par les violations des droits de l’homme dont sont victimes les migrants, il a appelé les pays de transit et de destination à traiter ces personnes avec dignité et respect, indépendamment de leur nationalité et de leur statut migratoire.

Mme DARYNA HORBACHOVA (Ukraine) a rappelé que son pays était partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et s’assurait, au plan intérieur, de l’absence de toute discrimination pour l’ensemble de ses ressortissants, indépendamment de leur statut personnel ou juridique.  Soucieuse de respecter ses obligations en lien avec la Convention, l’Ukraine a adressé deux rapports périodiques sur ce thème au Comité sur l’élimination de toutes formes de discrimination raciale.  Malheureusement, a noté la représentante, ce fléau persiste dans toutes les régions du monde, ce qui oblige la communauté internationale à renforcer ses capacités et à se concentrer, avec tous acteurs impliqués, sur des actions susceptibles de donner des résultats concrets.

Évoquant à ce sujet l’occupation de la république autonome de Crimée par la Russie, Mme Horbachova s’est élevée contre la campagne de discrimination de « grande ampleur » lancée par la Puissance occupante à l’encontre d’une partie de la population de ce territoire.  Elle a rappelé que l’Ukraine avait saisi la Cour internationale de Justice (CIJ) pour dénoncer le sort réservé par la Russie aux habitants de Crimée.  À la suite de cette saisine, la CIJ a notamment demandé à la Russie de s’assurer du droit des citoyens à parler et utiliser leur langue, a souligné la représentante, déplorant que l’occupant néglige toujours ses obligations au regard du droit international et ne tienne pas compte des droits des citoyens ukrainiens. 

M. ROBERT ALEXANDER POVEDA BRITO (Venezuela), qui a d’abord présenté ses condoléances aux familles des victimes de l’attentat terroriste survenu hier à New York, a ensuite jugé « honteux » les discours de haine, de racisme et de xénophobie contre des populations spécifiques que l’on entend dans les pays développés et en développement et qui exacerbent la violence.  Le Venezuela est également préoccupé que les technologies de l’information servent à diffuser ces idéologies d’intolérance et à nourrir les tensions ambiantes qui minent tout effort de paix. 

Alors que la Déclaration et le Programme d’action de Durban célèbrent leurs 16 ans, il faut se saisir de cette occasion pour renouveler la volonté collective de réaliser de façon palpable l’esprit qui a inspiré ce document, a affirmé le représentant.  Pour sa part, le Venezuela a travaillé inlassablement à promouvoir une culture de coexistence pacifique et de tolérance dans sa société multiethnique et pluriculturelle, dans l’esprit de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  En 2011, le pays a ainsi adopté une loi contre la discrimination raciale qui vise à en sanctionner les manifestations, à l’éradiquer et à en prévenir la résurgence, a expliqué le représentant.

M. KOMLAN AGBELÉNKON NARTEH-MESSAN (Togo) a déclaré que son pays restait déterminé à respecter les engagements pris au titre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, qui constituent à ses yeux le meilleur cadre d’action contre le racisme, la discrimination raciale et l’intolérance qui y est associée.  Le Togo, qui a présenté avec succès ses dix-huitième et dix-neuvième rapports périodiques au Comité en novembre 2016, se réjouit que ce dernier n’ait ménagé aucun effort pour améliorer ses méthodes de travail.

Le Togo déplore cependant qu’en dépit des progrès réalisés grâce à l’action du Comité depuis 50 ans, des défis multiples persistent, liés notamment à une certaine réticence à dénoncer et reconnaître les actes de discrimination raciale ou à la montée des incidents à caractère raciste et xénophobe partout dans le monde, visant notamment les groupes vulnérables comme les migrants et les demandeurs d’asile.  Le Togo condamne ses actes, de même que toute manifestation d’intolérance religieuse, d’incitation, de harcèlement ou de violence à l’égard des personnes ou des communautés, en raison de leur race, origine, ethnique, a dit le représentant.

Sur le plan normatif, le Togo a consolidé son cadre juridique, notamment en devenant partie à la Convention de l’UNESCO sur la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement, à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et au Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant l’abolition de la peine de mort.  Il a aussi revu son Code pénal, notamment pour prendre en compte les éléments de la définition de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a assuré le représentant. 

Mme THIRANAT SUCHARIKUL (Thaïlande) a déclaré qu’il était impératif de continuer à travailler pour l’élimination de toutes les formes de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et autres formes d’intolérance liées.  Au plan national, la Constitution de 2017 de la Thaïlande garantit l’égalité de toutes les personnes devant la loi et interdit les discriminations sur la base de différences, notamment de religion, de race, de langue, de sexe et d’âge.  Sur le plan international, le pays est partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale depuis 2003 et a retiré ses réserves concernant l’article 4 en octobre 2016.  En outre, la Thaïlande a ratifié en juin dernier la Convention no 11 concernant la discrimination (emploi et profession) de l’Organisation internationale du Travail.

Mme LILIT GRIGORYAN (Arménie) a déclaré que son pays s’était engagé à éradiquer le racisme, la xénophobie et le racisme qui y est associé, comme en témoigne la présentation de ses rapports périodiques devant le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale.  L’Arménie organisera en outre la prochaine conférence sur la lutte contre les minorités religieuses à Erevan, sa capitale.

L’Arménie constate en revanche que tous les États ne respectent pas et n’honorent pas leurs obligations internationales, comme on le voit dans le conflit du Nagorno-Karabakh, a ajouté la représentante.  On a vu dans les années 80 des pogroms et des actes de barbarie contre le peuple de ce territoire, qui ne cherche qu’à exercer son droit à l’autodétermination, a ajouté Mme Grigoryan, qui a dénoncé la « barbarie » du régime azerbaidjanais, lequel continue de traiter en héros des assassins comme Ramil Safarov, un officier azerbaidjanais qui a tué, en 2004, à coups de hache, un militaire arménien pendant un cours de formation militaire organisé par l’OTAN à Budapest.  

Mme NORA IMANE BELLOUT (Algérie) a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, estimant en outre que la violation des droits des peuples à l’autodétermination était une forme de discrimination raciale.  Ce refus du droit à l’autodétermination constitue également une violation des droits fondamentaux et d’une « règle obligatoire » du droit international consacrée par la Charte des Nations Unies et les deux Pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques, et aux droits économiques, sociaux et culturels, a encore affirmé Mme Grigoryan.

Conformément à ces textes reconnus au niveau mondial, le droit à l’autodétermination est un droit permanent, qui se fonde sur le droit d’éliminer les restrictions qui pourraient avoir un effet négatif sur les droits des personnes à manifester de leur volonté d’autodétermination, a fait valoir la représentante, qui a souhaité que l’ONU mène une consultation libre et intégrée pour mesurer cette volonté chez les différents peuples se trouvant dans une telle situation.  Depuis la Révolution française, qui avait entraîné des élections, nous voyons le vote comme le seul moyen de manifester sa volonté à l’autodétermination, a poursuivi la représentante.  Elle a assuré à ce sujet que l’Algérie continuait de soutenir les droits de tous les peuples qui ne sont pas autonomes et se trouvent en situation d’occupation.  Nous voulons qu’ils puissent se prononcer par le biais d’un référendum, a-t-elle précisé, en disant penser en particulier « aux personnes vivant au Sahara occidental occupé depuis quatre décennies ».  

M. OMAR KADIRI (Maroc) a déploré le double discours de certains pays qui cherchent à figer le droit à l’autodétermination dans une vision passéiste.  Or, ce droit n’est pas statique et a même évolué tant dans les aspects juridiques que dans sa pratique, comme le montre les évolutions observées dans les résolutions 1514 ou 1541, adoptées en décembre 1960 et la résolution 2625 de l’Assemblée générale.  Dans la pratique, ce droit a évolué vers des cadres d’autonomie comme celui mis en place dans de nombreux pays, a dit le représentant, appelant à dépasser la vision passéiste et à reconnaître les nouvelles formes de ce droit.  Le Maroc déplore aussi que tandis que l’Algérie « s’acharne sur le Maroc », elle continue de nier les droits du peuple kabyle.

M. HABIB MIKAYILLI (Azerbaïdjan) s’est déclaré préoccupé par la montée de l’intolérance religieuse et des crimes haineux ciblant des groupes spécifiques, et notamment les discours antimusulmans.  Il a rejeté toute tentative pour assimiler l’Islam avec la violence et le terrorisme.  Dénonçant le rôle des médias dans l’aggravation des stéréotypes discriminants, il a appelé à l’adoption d’un code de conduite pour les journalistes.

Après avoir mentionné certaines mesures prises au plan national par son pays, le représentant a déploré « l’agression militaire continue et l’occupation d’une portion significative du territoire azerbaïdjanais par l’Arménie », ainsi que le nettoyage ethnique et la constitution d’un État monoethnique sur ces territoires.  Il a également regretté la politique du Gouvernement arménien de glorification de Garegin Nzhdeh et d’autres figures qui ont collaboré avec les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. 

M. Mikayilli a également déploré une « mauvaise interprétation » du droit à l’autodétermination par certaines instances, qui l’utilisent pour justifier le droit à l’utilisation illégitime de la force, l’occupation militaire et le soutien extérieur à des sessions unilatérales de territoire appartenant à des États indépendants.  Il a notamment insisté sur le fait que l’Arménie continuait d’agresser l’Azerbaïdjan et tentait d’imposer une sécession unilatérale des territoires azerbaïdjanais où vivent des minorités arméniennes.

Mme ALHAMMADI (Émirats arabes unis) a estimé que la communauté internationale disposait d’outils pour lutter contre la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, notamment la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Aux Émirats, où, a affirmé la représentante, vivent en harmonie plus de 200 nationalités, le Gouvernement souhaite se débarrasser de l’intolérance et a mis dans ce cadre un institut de la tolérance.  Mais il reste préoccupé par les idéologies d’intolérance véhiculées par certains groupes et estime qu’il faut réduire ceux-ci au silence.

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, la représentante de l’Arménie a accusé la délégation de l’Azerbaïdjan de « suivre de très près la propagande nazie » et de proférer des mensonges si gros que certains commencent à y croire.  Le commentaire de la délégation de l’Azerbaïdjan montre, selon elle, que ce pays veut nier le droit du peuple du Nagorno-Karabakh à l’autodétermination et continue d’y violer le droit international.  Les atrocités commises contre des civils ont montré que rien n’a changé pour les Arméniens de ce territoire, a-t-elle dénoncé.  Pour l’Arménie, les faits montrent que Bakou a préféré ces hostilités au lieu de préparer la paix, alimentant au contraire une propagande anti-arménienne et diffusant un discours de haine.  Nous voulons un règlement pacifique et l’Azerbaïdjan devrait participer à la mise en œuvre d’un mécanisme d’enquête sur les violations du cessez-le-feu, a-t-elle conclu. 

Le représentant de la Fédération de Russie a demandé à la délégation de la Géorgie de reconnaître la réalité des faits, à savoir que les territoires de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud sont indépendants et disposent de leurs droits souverains.  Il a aussi demandé à l’Ukraine de faire de même, à savoir reconnaître que la Crimée et la ville de Sébastopol ont librement exercé leur droit à l’autodétermination, tel que reconnu par le droit international.  S’il y a des personnes pour croire que des violations des droits de l’homme sont commises dans ces territoires ou qui en sont victimes, elles peuvent librement saisir les moyens de recours qui existent et sont accessibles à tous, a assuré le représentant. 

En réponse à l’Arménie, le représentant de l’Azerbaïdjan a dénoncé des observations qui ne font que « déformer les faits » et qu’il rejette totalement.  L’Arménie continue d’induire la communauté internationale en erreur, a-t-il accusé, appelant ce pays à renoncer à son « idéologie raciste » et à apprendre à vivre en paix avec ses voisins.  Évoquant des « nettoyages ethniques massifs » perpétrés dans le Haut-Karabakh, il a rappelé que le Conseil de sécurité avait demandé à l’Arménie de se retirer et de respecter l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan, y compris ses frontières.  Il a enfin dénoncé les « relations spéciales » qu’entretient l’Arménie avec des « terroristes », dont certains sont considérés comme des « héros nationaux ».

La représentante de la Géorgie a affirmé que l’attitude de la Fédération de Russie ne servait qu’à détourner l’attention de la communauté internationale, en plus de violer l’accord du 12 août 2008, le droit international et les résolutions des Nations Unies.  La Fédération de Russie a agressé la Géorgie et occupe 20% de son territoire, cela est établi par la mission d’établissement des faits de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et les résolutions des Nations Unies, a affirmé la représentante.

La représentante de l’Ukraine a déclaré que la Fédération de Russie « continuait de s’enterrer la tête dans le sable », bien que la communauté internationale la reconnaisse comme agresseur de l’Ukraine et comme occupant une partie de son territoire, y compris la Crimée.  L’Ukraine rappelle en outre à la Fédération de Russie que le « peuple criméen » n’existe pas et que le droit à l’autodétermination ne se manifeste pas par une occupation de territoires étrangers.  

La représentante de l’Algérie a souhaité répondre à la déclaration du Maroc en indiquant que, pour l’instant, la situation dans les 17 territoires non autonomes reconnus par la communauté internationale n’était pas liée aux « rumeurs de quelques parties qui redoublent d’hallucinations ».  De fait, l’Algérie appelle toutes les parties à régler leurs problèmes à l’intérieur de leur propre pays et les organes des Nations Unies à se pencher sur la situation calamiteuse de ces pays.  En outre, l’Algérie soutient l’autodétermination de tous les peuples, surtout au Sahara occidental, où un peuple vit depuis 40 ans sous occupation et ne peut exercer ce droit librement.

Le représentant du Maroc s’est étonné que l’Algérie ne cherche à appliquer le principe de l’autodétermination qu’au seul « Sahara marocain » et refuse de le considérer pour le plus vieux peuple d’Afrique, les Kabyles, dont elle viole les droits en Kabylie.  L’Algérie reste par ailleurs ancrée dans une lecture passéiste de ce droit et ne tient pas compte de l’évolution historique de ce droit.  Le Maroc observe en outre qu’un rapport de l’organisation Amnesty International montre que l’Algérie se rend coupable d’arrestations massives et arbitraires de ressortissants de « pays africains frères », sur la seule base du profilage ethnique et les expulse dans le désert.  Pour le représentant du Maroc, tous ces agissements de l’Algérie sont contraires au droit international et aux droits de l’homme. 

Dans un second droit de réponse, le représentant de la Fédération de Russie a dit juger très intéressante la thèse ukrainienne selon laquelle il n’y a pas de peuple criméen.  Pour lui, cela montre la conception de ce pays quant au droit à l’autodétermination.  La Crimée a rejoint la Fédération de Russie par le même biais qu’elle avait rejoint l’Ukraine dans le passé, à savoir en exerçant son droit à l’autodétermination, a déclaré le représentant.

Le représentant de l’Azerbaïdjan a rejeté l’affirmation arménienne selon laquelle son pays glorifie des héros nazis ou s’est rendu coupable d’agression.  L’Azerbaïdjan souligne que l’occupation de son territoire n’est pas une solution à la crise entre les deux pays.  L’Arménie devrait au contraire retirer ses troupes du territoire azerbaïdjanais. 

Citant un proverbe, la représentante de l’Algérie a déploré que « le chameau ne voit pas ses bosses ».  Elle a rappelé que les Nations Unies parlent du « Sahara occidental », et non d’un autre Sahara, quel que soit le nom que lui donne le Maroc.

Reprenant la parole pour répondre aux observations du représentant de l’Azerbaïdjan, la représentante de l’Arménie s’est dite « surprise » et a constaté que l’Azerbaïdjan continuait de « mener la communauté internationale par le bout du nez ».  Rejetant en bloc des « affirmations non fondées », elle a rappelé que l’Azerbaïdjan avait reconnu que l’autodétermination devait faire partie du règlement du conflit au Nagorno-Karabakh.  De plus, en ce qui concerne les résolutions du Conseil de sécurité, l’Azerbaïdjan ne parle que de « quelques dispositions » sans tenir compte du fait que ces résolutions confirment que ce territoire est placé sous le contrôle des forces du Nagorno-Karabakh.

Le représentant du Maroc a repris à son tour la parole pour s’étonner que l’Algérie persiste à vouloir évoquer la question du « Sahara marocain », ce qui prouve, selon lui, son manque de « courage politique ».  L’Algérie n’est mue, ici, que par les seuls motifs de son hostilité à l’égard du Maroc et de ses desseins hégémoniques en Afrique du Nord, a-t-il déploré.  Rappelant d’autre part que le Maroc s’était inscrit dans le processus onusien pour parvenir à un règlement du différend sur le Sahara, il a assuré que le référendum dont parle l’Algérie « est mort et a été enterré par le Secrétaire général de l’ONU depuis plus de 18 ans ».  Il a conclu en regrettant la situation désastreuse des populations vivant dans les camps de Tindouf.

RAPPORT DU HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS, QUESTIONS RELATIVES AUX RÉFUGIÉS, AUX RAPATRIÉS ET AUX DÉPLACÉS ET QUESTIONS HUMANITAIRES (A/72/12, A/72/12/ADD.1 ET A/72/354)

Déclaration liminaire, suivie d’une séance de questions

M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a déclaré que le déplacement forcé de population était devenu un phénomène mondial qui n’épargne aucun continent et que certains pays accueillaient à eux seuls plus d’un million de réfugiés.  Des crises durant depuis des décennies jettent une nouvelle génération d’enfants et de jeunes dans des parcours dangereux, et la magnitude de ce phénomène est si complexe qu’elle retient l’attention et est devenu un thème central des débats au sein de la communauté internationale.  Fin 2016, quelque 65,6 millions de personnes à travers le monde étaient déplacées de leur foyer par les persécutions, les conflits et d’autres situations de violence, a rappelé M. Grandi, citant les chiffres du rapport annuel de son agence. 

Rien que depuis le début de cette année, plus deux millions de personnes ont quitté leurs pays à cause d’un conflit récurrent ou émergent, a précisé M. Grandi.  Ce chiffre inclut les 600 000 personnes ayant fui le Myanmar pour le Bangladesh.  La complexité de la situation au Soudan du Sud a fait partir 4,5 millions de personnes qui vivent désormais hors de ce pays pour les pays voisins.  Les violences en République démocratique du Congo, notamment dans les Kasaï, ont provoqué 100 000 réfugiés, alors que le nombre de déplacés internes dans ce pays a doublé depuis 2015, atteignant désormais presque quatre millions, a encore déclaré le Haut-Commissaire.

De même, en République centrafricaine, le nombre des personnes déplacées –réfugiées ou déplacées internes- a bondi de 50%, portant le chiffre à un million, dont 12 000 pour le seul mois de septembre.  En Afghanistan, ce ne sont pas moins de 2,3 millions de ses ressortissants qui sont réfugiés au Pakistan et en Iran, tandis que les conflits en Syrie et en Iraq comptent, à eux seuls, pour le quart des déplacements forcés dans le monde.  En Amérique centrale, des dizaines de milliers d’hommes et de femmes migrent pour trouver un meilleur asile contre la violence, pendant que les routes migratoires vers l’Europe, allant du Sahara et passant par la Libye et l’Italie, sont empruntées par des réfugiés venant d’Érythrée, de Somalie ou d’ailleurs, a poursuivi M. Grandi, qui a déploré que la protection de ces personnes se soit érodée dans de nombreux pays, en dépit de l’obligation faite aux États de protéger ces populations.

Cette érosion est souvent le fruit de mesures fragmentées et unilatérales prises pour répondre à l’afflux de réfugiés, mais inspirées par des considérations politiques à court terme, a également déploré le Haut-Commissaire, qui a dénoncé l’abandon de politiques reposant sur des principes au profit de démagogues irresponsables qui ont fermé les frontières et mis en place des politiques de dissuasion et d’exclusion dans plusieurs pays ou régions.  En même temps, M. Grandi a constaté de grands élans de solidarité envers les réfugiés, souvent renforcés par le rôle de responsables locaux, de dirigeants d’entreprise ou d’autres personnalités publiques.  Plus encore, des pays qui accueillent des réfugiés en grand nombre ont continué de faire preuve d’un niveau extraordinaire de générosité et d’engagement en faveur de leur protection, a-t-il reconnu.

Le Haut-Commissaire a également estimé que la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants avait été l’occasion pour les États de réaffirmer leur solidarité, tandis que le Cadre d’action global pour les réfugiés annexé à cette Déclaration soulignait l’urgence de l’action humanitaire pour les aider.  Ces deux approches sont importantes, a-t-il affirmé, se félicitant que le cadre soit désormais mis en œuvre dans 12 pays, dont le Belize, le Costa Rica, le Guatemala, le Kenya, la Somalie, l’Éthiopie ou l’Ouganda.  Mais sans appui international et un partage équitable des responsabilités, les piliers communs seront fragilisés, a-t-il prévenu, appelant à un soutien financier urgent de la part de tous les acteurs et donateurs nationaux et internationaux.

Le Haut-Commissaire a aussi estimé que chercher des solutions aux crises actuelles est un autre modèle d’approche qui doit être approfondi, d’autant que seulement un demi-million de réfugiés ont pu regagner leurs foyers en 2016, souvent dans des circonstances loin d’être idéales.  Pour M. Grandi, le vingtième  anniversaire des Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays, en 2018, devrait être l’occasion de galvaniser à nouveau le soutien aux États et d’enraciner ces principes dans les lois et pratiques.  Le HCR est disposé à mettre à contribution son expertise, y compris dans les politiques de réinstallation des réfugiés, a-t-il assuré.

M. Grandi a également expliqué que, pour renforcer les capacités d’adaptation du HRC, il avait entrepris une série de réformes, notamment une restructuration de ses processus internes pour atteindre une meilleure efficacité sur le terrain ou pour améliorer la collecte de données et mieux gérer les risques.  Par ailleurs, en 2016, le HCR a reçu presque 4 milliards de dollars en contributions volontaires, soit la plus forte somme jamais atteinte.  Et pourtant, même avec cette manne financière, l’année s’est terminée avec 41% des besoins identifiés non financés.  Cette année, avec 4,2 milliards de dollars disponibles, presque 50% des besoins ne sont pas couverts, a-t-il fait observer, ajoutant que l’agence devait faire des choix difficiles, compte tenu aussi des prévisions peu optimistes pour 2018.  Le financement des crises majeures n’est pas assuré, a-t-il averti, citant en exemple la crise en République centrafricaine, qui n’est financée actuellement qu’à hauteur de 11%, avant de lancer un appel aux donateurs. 

Lors de l’échange entre M. Filippo Grandi, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, et les délégations, l’Éthiopie a félicité le Haut-Commissaire pour sa visite récente dans le pays et lui a rappelé qu’elle était l’un des États accueillant le plus de réfugiés en Afrique.  L’Éthiopie a, à cet égard, déploré l’absence de solidarité internationale, tout en avouant se heurter à de graves difficultés pour financer le Cadre d’action global pour les réfugiés.  Ceci est grave et a un impact négatif sur la situation sur le terrain, a ajouté l’Éthiopie, qui a souhaité connaître les estimations du HCR sur un élargissement des perspectives de réinstallation dans le cadre du nouveau pacte mondial. 

Autre pays accueillant de nombreux réfugiés, le Kenya s’est déclaré préoccupé par les violences persistantes en Afrique, et notamment dans la Corne de l’Afrique et au Soudan du Sud.  S’agissant de celui-ci, il a souhaité savoir, du point de vue du HCR, quels progrès avaient été effectués pour répondre à la crise dans ce pays.  La Turquie a souligné l’importance d’une participation active de toutes les parties prenantes dans le monde entier au processus menant à l’élaboration d’un pacte mondial sur les réfugiés.  Notant que le HCR joue un rôle de chef de file dans la mise en œuvre du Cadre d’action global sur les réfugiés, elle a demandé aux États de le déployer pleinement et a souhaité savoir comment le HCR évaluait les tendances actuelles de réinstallations et leur évolution. 

La République islamique d’Iran a estimé qu’en matière d’accueil et de protection des réfugiés, le partage des charges n’était pas suffisant au niveau international.  Elle a demandé au HCR de lui fournir des informations sur sa capacité à mesurer l’impact lié à l’accueil de grands nombres de réfugiés.  S’agissant de la réinstallation dans des pays tiers, il aimerait savoir si des progrès ont été réalisés par rapport à l’an dernier et pourquoi les pays tiers hésitent tant à accueillir et à assurer la réinstallation de réfugiés.

Le Cameroun a dit tenir compte dans ses actions des personnes en situation de vulnérabilité.  Il a estimé que l’aide humanitaire et l’aide au développement devaient être appuyées politiquement par les États.  Au plan intérieur, l’afflux de réfugiés s’ajoute à des situations de grande précarité et de pauvreté.  Pour y répondre, le Cameroun a lancé un plan de réponse humanitaire en mettant l’accent sur l’éducation pour tous les enfants réfugiés et les communautés hôtes.

L’Azerbaïdjan a exprimé son inquiétude quant au nombre élevé de personnes déplacées à l’intérieur de pays dans le monde.  Il a souhaité savoir comment cela sera reflété dans le futur pacte mondial sur les réfugiés.  L’Iraq a rappelé que la citoyenneté est le droit de tous les Iraquiens.  Tous ceux qui sont nés d’un père et d’une mère iraquienne sont iraquiens automatiquement et ceux qui ont perdu leur citoyenneté peuvent la récupérer, a-t-il expliqué, se disant préoccupé par ce qui est écrit dans le rapport du HCR sur l’apatridie en Iraq.  Il a cependant remercié le HCR pour ses efforts déployés en faveur des réfugiés dans le pays, ajoutant qu’il avait besoin de davantage d’aide en raison des circonstances et parce que l’hiver approche. 

Le Qatar a souhaité que des solutions politiques d’urgence soient apportées pour répondre aux crises et atténuer la pression sur les pays qui accueillent des réfugiés, tout en appelant au respect des droits de l’homme de ces personnes.  Assurant respecter tous ses engagements à cet égard, il a souhaité savoir quelle réponse le HCR conçoit face à ces crises qui entraînent la fuite d’un nombre ne croissant de personnes dans le monde. 

Le Brésil a souligné que, depuis la Déclaration de Carthagène, la région de l’Amérique latine et des Caraïbes était en pointe en matière d’accueil de réfugiés.  À cet égard, il a demandé au HCR ce qu’il pense de la contribution des groupes régionaux aux discussions devant conduire à l’élaboration du pacte mondial sur les réfugiés.  Le Maroc a lui aussi demandé au Haut-Commissaire comment il voyait l’apport du futur pacte sur les réfugiés et comment celui-ci pourrait avoir un impact positif sur le terrain.  Il a aussi demandé plus d’informations sur les orientations du HCR en matière de déplacements de toutes sortes dans le monde.  La Papouasie-Nouvelle-Guinée a, elle, souhaité savoir quelles étaient les attentes des États Membres pour la mise en place du futur pacte mondial sur les réfugiés.  Elle aimerait par ailleurs en savoir plus sur les dispositifs de réinstallation, étant elle-même concernée par cette question.   

Le Japon a jugé que la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants était un texte essentiel au vu du nombre toujours croissant de personnes réfugiées dans le monde.  Il a indiqué qu’il allait continuer à intervenir au niveau humanitaire et s’est engagé à coopérer avec le Cadre d’action global pour les réfugiés.  À ce sujet, il a souhaité avoir l’avis du HCR sur les obstacles qui existent dans la coordination des travaux humanitaires et de développement. 

Pour la Norvège, il est important que les États mettent en œuvre la Déclaration de New York si l’on veut que le Cadre d’action global pour les réfugiés soit efficace.  Évoquant le grand écart entre les besoins et les ressources disponibles du HCR, la Norvège a dit percevoir des signes prometteurs, comme la participation de la Banque mondiale aux efforts internationaux.  À cet égard, la Norvège a demandé au HCR s’il lui serait possible de donner des précisions sur les autres mobilisations futures.  Elle a aussi demandé au HCR comment il pourrait intervenir de façon plus concrète avec d’autres agences de l’ONU pour répondre au phénomène des personnes déplacées.

L’Islande a indiqué avoir signé l’accord-cadre avec le HCR sur le financement et offert des possibilités de réinstallation à de nombreux réfugiés syriens.  Cet accueil est rendu possible par l’action de la Croix-Rouge islandaise et de citoyens volontaires, a-t-elle fait remarquer, avant de demander ce qu’elle pourrait faire pour aider davantage à l’intégration positive des Syriens qui se réinstallent dans de nouveaux foyers.

Le Myanmar a dit essayer de trouver une réponse pour arrêter le flux de réfugiés vers le Bangladesh.  Il a assuré qu’il s’efforçait d’assurer la sécurité de ces personnes et était déterminé à mettre en œuvre les recommandations du HCR dans l’État Rakhine.  Affirmant aussi adhérer aux principes du HCR en matière de retour des réfugiés, le Myanmar a indiqué que ceux qui ont la citoyenneté du pays, qui peuvent présenter un document émis par les autorités du Myanmar, un titre de propriété ou qui ont une adresse au Myanmar ne devraient pas rencontrer de difficultés à cette fin.  Il a conclu en réaffirmant sa volonté d’améliorer le processus de rapatriement. 

Dans ses réponses, M. Filippo Grandi, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, s’est déclaré encouragé par la reconnaissance et le soutien des délégations, unanimes à appuyer le concept et l’esprit du pacte.  Il a rappelé que le pacte était basé sur l’annexe 1 de la Déclaration de New York qui a été approuvée l’année dernière.

Le Haut-Commissaire a expliqué que les orientations stratégiques publiées début 2017 pour une période de cinq ans constituaient les volets d’actions du Haut-Commissariat.  Si le pacte mondial est bien approuvé l’an prochain, on y retrouvera tous les éléments indispensables pour renforcer ces orientations stratégiques, et plus particulièrement pour l’inclusion et l’intégration des réfugiés dans les différents services, notamment l’économie, a expliqué M. Grandi. 

Il a rappelé que le pacte mondial n’aurait pas de portée normative et ne remplacerait ni ne complèterait la Convention de 1951 ou tout autre instrument juridique, mais qu’il permettrait juste de mieux organiser les différentes réponses à donner aux crises.  Le pacte devrait nous permettre de nous concentrer sur la recherche de solution face au déplacement, a-t-il expliqué, en souhaitant que cette plateforme politique complète le cadre existant et garantisse la protection des réfugiés.  Il a félicité les pays ayant déjà mis en œuvre des initiatives complémentaires en faveur du pacte, tels que le Kenya avec l’initiative de Nairobi ou encore le Brésil. 

Face aux défis liés au financement, le Haut-Commissaire a déclaré que la réponse devrait intégrer les acteurs du développement tels que la Banque mondiale et les bureaux chargés de l’aide bilatérale.  Il faut savoir quelles sont les réponses inadéquates d’un point de vue humanitaire et délimiter les éléments qui permettront de changer les choses en ce qui concerne l’utilisation des ressources disponibles, a-t-il ajouté. 

C’est pourquoi M. Grandi s’est dit ravi que le Bangladesh ait déjà demandé à la Banque mondiale d’étudier les possibilités d’appuyer son travail d’accueil des réfugiés du Myanmar, et ce, au début d’une situation d’urgence, ce qu’il a qualifié de « jalon sur la voix du pacte mondial ».  Cela doit être la norme, a-t-il insisté, nous devons appuyer dans les situations de crise humanitaire mais également penser à long terme l’implication du développement.

M. Grandi a enfin insisté sur l’importance des données et a fait état du travail du Haut-Commissariat avec la Banque mondiale pour mettre en place des bases de données plus fiables.  Il s’est déclaré très préoccupé par les déclarations de certains États Membres annonçant une réduction du nombre de réfugiés qu’ils acceptent d’accueillir, estimant qu’ils envoient « un très mauvais message ».  En réponse au Myanmar, il a demandé à ce que le pays laisse s’installer les agences humanitaires dans l’État Rakhine et a insisté auprès du pays, ainsi qu’auprès du Bangladesh, pour qu’ils incluent le plus possible le Haut-Commissariat dans leurs discussions. 

Discussion générale

M. JESÚS DIAZ CARAZO, de l’Union européenne, a rappelé que les 65,5 millions de déplacés recensés à la fin 2016 représentaient le « nombre le plus élevé jamais enregistré », qui inclut 22,5 millions de réfugiés fuyant la guerre, la violence, la persécution et les violations des droits de l’homme.  Pour l’Union européenne, un des problèmes centraux de la question des déplacés est la nature prolongée des conflits, puisqu’en moyenne une personne est déplacée pendant 10 ans et que nombre de ces personnes doivent mettre leur vie entre parenthèses bien plus longtemps.  M. Diaz Carazo a également relevé que 84% des réfugiés sous mandat du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) étaient hébergés dans des États à revenu faible ou moyen.

La communauté humanitaire ne peut agir seule pour prendre en charge le problème, a déclaré le représentant.  Une approche globale à long terme est nécessaire, dans laquelle les acteurs politiques et du développement ont un rôle crucial à jouer.  Prévenir les conflits, les résoudre et éviter leur retour sont les objectifs principaux de la politique extérieure européenne, a expliqué M. Carazo.  C’est pourquoi l’Union européenne a proposé un nouveau cadre pour les politiques concernant les déplacements forcés, qui inclut de l’aide humanitaire, qui a pour but de renforcer la résilience des déplacés et de leurs communautés hôtes à travers des moyens d’existence durable et un accès aux services de base.  L’Union européenne a commencé à mettre en œuvre cette nouvelle approche dans des projets concrets et des programmes et a pour objectif de l’utiliser systématiquement dans les crises impliquant des déplacements.

Reconnaissant le rôle majeur du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés dans un contexte ou l’aide humanitaire est de plus en plus complexe, le représentant a rappelé que l’Union européenne lui avait apporté un financement de 3,9 milliards de dollars en 2016, signe d’une « claire reconnaissance » des compétences de l’agence.  Il a aussi fait observer que les dépenses du Haut-Commissariat avaient quadruplé ces 10 dernières années pour atteindre près de 4 milliards de dollars.  Il a déploré que le financement total ne permette pas de mener toutes les activités identifiées par l’agence qui, en 2017, aurait besoin de 7,8 milliards de dollars de budget, et a appelé les donneurs à accroître leur support. 

M. EPHRAIM LESHALA MMINELE (Afrique du Sud), qui s’exprimait au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a réaffirmé l’attachement de son groupe aux principes consacrés dans la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et son Protocole de 1967, ainsi que dans la Convention de l’organisation de l’Unité africaine régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique de 1969, qui traite des différents aspects de cette question en Afrique.  À ce titre, la SADC s’engage à respecter, aux niveaux régional et national, le principe de non-refoulement et à se conformer aux normes internationales en matière de protection des réfugiés.  Elle invite les autres régions du monde à faire de même.

Se disant préoccupé par le fait que, fin 2016, le nombre de personnes déplacées de force dans le monde s’élevait à 65,6 millions, du fait de persécution, de conflits ou de situations de violence, le représentant a regretté le peu d’attention accordée aux conséquences de l’afflux de réfugiés dans les pays en développement.  Or, a-t-il souligné, ces pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire accueillent 84% des réfugiés recensés par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).  Il a aussi exprimé l’inquiétude de la SADC quant à la baisse continue du budget alloué à l’Afrique, en dépit de ses politiques d’accueil pour les réfugiés et les demandeurs d’asile, lesquelles lui coûtent beaucoup.

M. Mminele a par ailleurs réaffirmé l’engagement de la SADC en faveur de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants et de son Cadre d’action global pour les réfugiés, saluant les pays pilotes qui ont commencé à mettre en œuvre ce dispositif pour répondre aux situations de réfugiés à grande échelle.  Il a également félicité le HCR pour avoir élargi ses sources de financement en faisant appel au secteur privé et aux banques internationales.  La SADC se réjouit en particulier que l’Association internationale de développement de la Banque mondiale ait prévu de fournir une aide de 2 milliards de dollars aux réfugiés et aux pays en développement qui les accueillent.

M. ALMERI (Arabie saoudite) a rappelé que son pays était un des plus importants fournisseurs d’aide aux réfugiés, comme en atteste son action en faveur des personnes arrivées sur son territoire en provenance de Syrie.  Il a ainsi affirmé que le pays avait accueilli 2,5 millions de réfugiés syriens.  Il a ajouté que le nombre d’étudiants syriens en Arabie saoudite s’élevait à 141 000 et qu’aucun d’entre eux n’avait dû payer pour sa scolarité. 

Le représentant a également souligné que l’Arabie saoudite avait soutenu des millions de réfugiés dans les pays voisins et s’était efforcée de fournir une aide humanitaire en coopération avec les pays hôtes.  Il a également fait état d’une aide financière d’un montant total de 800 millions de dollars.  S’agissant des « frères yéménites » de l’Arabie saoudite, ceux qui résident dans le Royaume sont traités comme des ressortissants, a précisé le délégué, notant que 500 000 d’entre eux avaient eu des possibilités d’emploi et que plus de 800 000 étudiants yéménites étaient présents sur le territoire saoudien.  De surcroît, a-t-il dit, nous répondons aux besoins humanitaires du peuple yéménite.

Avant de conclure, le représentant a déclaré que son pays avait aussi apporté, en février 2016, une assistance à hauteur de 59 millions de dollars à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et avait engagé des millions de dollars en faveur du Pakistan et des Rohingya du Myanmar.

M. FURUMOTO (Japon) a salué le travail du Haut-Commissariat pour les réfugiés et a dit être conscient des responsabilités et attentes grandissantes envers l’agence dans le contexte des crises humanitaires actuelles en Syrie, au Soudan du Sud, au Bangladesh et au Myanmar.  Le représentant a rappelé qu’en septembre, la contribution du Japon au budget du HCR s’élevait à 150 millions de dollars au titre de 2017.  Aux yeux du Japon, le Cadre d’action global pour les réfugiés complète la convergence entre aide humanitaire et développement que le Japon promeut.  M. Furumoto a en outre mentionné les actions d’aide humanitaire du Japon en Ouganda et au Soudan du Sud avant de conclure sur l’importance du concept de sécurité humaine, « pilier de la diplomatie du pays ».

M. GILLES CERUTTI (Suisse) a rappelé que les chiffres liés au déplacement forcé n’avaient pas cessé d’augmenter ces dernières années et a déploré que les solutions pour contenir cette croissance et offrir des solutions durables aux réfugiés et aux déplacés demeurent insuffisantes.  Il a insisté sur l’importance du futur pacte mondial pour les réfugiés, qui permettra de renforcer le soutien aux États et aux communautés hôtes qui accueillent ces personnes déplacées.  Enfin, dans l’optique de « ne laisser personne de côté », le représentant a déclaré qu’il était crucial de garantir protection et assistance aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays du fait de conflits ou de catastrophes naturelles. 

M. CARLOS ARTURO MORALES LÓPEZ (Colombie) a rappelé que le pays comptait de très nombreuses personnes déplacées internes, « conséquence la plus grave » du conflit armé qu’a connu le pays.  Le représentant a fait état des mesures prises sur le plan national pour faire face au problème, et notamment du système de réparation.  Il a également mentionné les mesures en faveur du retour et de la réinstallation offertes aux déplacés, ainsi que de l’inclusion dans celles-ci d’une approche ethnique « qui est un réel progrès ».  Faisant aussi état du processus de restitution des terres aux anciens déplacés, le représentant a affirmé que des progrès avaient été faits dans l’adoption d’indicateurs de restitution et que 4 856 familles s’étaient vues restituer leurs terres.

M. ILARIO SCHETTINO (Italie) a relevé qu’alors que plus de 65 millions de personnes sont déplacées de force dans le monde, nombre d’entre elles subissent des abus et des violences pendant leur périlleux voyage.  Celles-ci courent ainsi le risque de devenir les victimes de réseaux de traite des personnes, a-t-il souligné, observant que la crise humanitaire actuelle était clairement la pire que le monde ait jamais connue et que c’était les plus vulnérables qui en payaient le prix.

Relevant par ailleurs que 84% des réfugiés sont accueillis dans des pays en développement, le représentant a jugé essentiel que la communauté internationale reconnaisse que les interventions d’urgence doivent être complétées par des réponses en faveur d’un développement à long terme.  À cet égard, l’Italie appuie les efforts du HCR visant à promouvoir un changement de paradigme dans la réponse apportée aux déplacements forcés, par le biais du développement du Cadre d’action global pour les réfugiés.  L’Italie continuera aussi de soutenir le HCR dans ses opérations d’urgence destinées à sauver des vies, réduire les souffrances humaines et protéger la dignité des demandeurs d’asile, des réfugiés, des déplacés internes et des apatrides dans le monde, a assuré le représentant.

M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a insisté sur le fait que les pays qui recevaient le plus grand nombre de réfugiés étaient des pays du Sud, qui souvent font face à des difficultés pour répondre aux besoins de leur propre population.  Il a demandé à ce que ces pays soient soutenus, de façon à ce qu’ils puissent garantir les droits de base et l’inclusion sociale.

Reconnaissant la nécessité de soutenir ces pays sur le plan financier, le représentant a toutefois insisté sur le fait qu’une telle aide ne devait en aucun cas constituer une contrepartie pour les pays adoptant des politiques restrictives en ce qui concerne l’entrée et le séjour sur leurs territoires.  Il s’est dit préoccupé que certains pays aient mis en œuvre des mesures qui limitent l’accès de leur territoire aux réfugiés, estimant qu’ils violaient ainsi le droit international des réfugiés.  M. de Souza Monteiro a rappelé que son pays s’était engagé à recevoir 3 000 réfugiés syriens.  Le Brésil a en outre adopté une nouvelle législation sur les migrations afin de garantir les droits des migrants et de mieux intégrer les étrangers, ainsi que pour faciliter l’adoption de la citoyenneté brésilienne aux apatrides.

Mme NATALIE COHEN (Australie) a estimé que le total sans précédent des personnes déplacées dans le monde rendait le travail du HCR plus important que jamais.  À cet égard, la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants se révèle un jalon essentiel, a-t-elle souligné, précisant que son pays avait déjà commencé à traduire ses engagements en actions.  En plus de sa propre part au budget du HCR, l’Australie a ainsi contribué à hauteur de 6,9 millions de dollars au soutien apporté par le Haut-Commissariat à la mise en œuvre du Cadre d’action global pour les réfugiés en Ouganda et en Éthiopie.

L’Australie souhaite par ailleurs que le futur pacte mondial pour les réfugiés, attendu en 2018, réaffirme l’engagement des États envers le régime de protection des réfugiés et développe un partage des responsabilités plus équitable au niveau planétaire.

M. NEBIL SAID IDRISS (Érythrée) a déclaré que la distinction entre réfugiés et migrants économiques était critique pour mieux répondre aux besoins des refugiés et qu’une meilleure coopération internationale était nécessaire pour faire face à ce phénomène.  Il a déploré que des camps dans la région, financés et coadministrés par le HCR, soient utilisés comme des « centres d’agitation politique et de recrutement armé ».

Le représentant a également mentionné le fait que l’Érythrée menait une politique de retour volontaire de ses ressortissants nationaux, en les encourageant et les soutenant.  Il a accusé le Haut-Commissariat de présenter une image fausse du pays en accusant son pays de persécuter les retournés volontaires.  Il a enfin demandé à ce que le HCR engage un dialogue avec les pays avant de produire des recommandations les concernant et a appelé l’agence à modifier ses recommandations concernant l’Érythrée. 

M. AL HUSSAINI (Iraq) a rappelé que son pays était frappé par le terrorisme depuis 2013, ce qui a entraîné le déplacement de 3,6 millions de personnes sur son territoire.  Le Gouvernement iraquien fait face à cet enjeu majeur afin de pouvoir atténuer les souffrances des personnes et des familles déplacées, a souligné le représentant, précisant qu’une commission d’accueil des réfugiés avait été créée à cette fin.  Des camps ont aussi été mis en place et une assistance humanitaire distribuée à la population.

Le Gouvernement s’emploie par ailleurs à régler les questions des cartes d’identité et des salaires des personnes déplacées, a poursuivi M.  Al Hussaini, qui a également fait état d’une aide accordée aux étudiants dans les communautés d’accueil.  L’Iraq y parvient grâce à l’aide de l’ONU et de ses agences, a expliqué le représentant, qui a rendu ensuite hommage au « sacrifice » consenti par l’armée fédérale, la police et les forces civiles populaires, lesquelles ont œuvré à libérer les villes détenues par Daech.  Notant à cet égard que l’armée, engagée dans la libération de Mossoul, s’est concentrée sur la protection des civils, il a assuré que les forces de sécurité iraquiennes avaient intégré un volet humanitaire dans leur stratégie. 

M. ROMAN KASHAEV (Fédération de Russie) a rappelé que M. Grandi s’était rendu à Moscou et a expliqué que le pays accueillait des ressortissants de plus de 57 États, dont plus d’un million d’Ukrainiens ayant fui le conflit dans leur pays.  Faisant état des nouvelles lois fédérales en cours concernant l’octroi du statut de réfugiés, le représentant a mentionné un raccourcissement des procédures et une réduction des frais.

Pour la Fédération de Russie, il faut régler les conflits de façon politique et fournir une assistance aux pays d’origine pour favoriser le retour volontaire.  Le représentant a enfin estimé que la situation des réfugiés en Europe est le résultat de « l’ingérence irresponsable » des pays européens dans les situations internes de pays africains et au Moyen-Orient pour en changer les gouvernements par la force.

Mme BROOKS (États-Unis) a constaté qu’avec la crise migratoire actuelle, des millions de personnes étaient confrontées à des violations graves des droits de l’homme dans de nombreux points du monde.  Face à cette situation, il faut trouver des réponses concrètes et s’appuyer sur l’élan créé par le HCR pour aider les réfugiés, les demandeurs d’asile, les apatrides et les personnes déplacées, ainsi que les pays qui les accueillent, a plaidé la représentante.

Mme Brooks a d’autre part rappelé que les États-Unis s’étaient engagés fortement en faveur des travaux du HCR, faisant état de 8 milliards de dollars en assistance pour l’année budgétaire en cours.  En 2017, a-t-elle poursuivi, plusieurs événements ont mobilisé la communauté internationale et il nous faut y répondre en trouvant des solutions durables.  La nature des enjeux doit nous pousser à en faire davantage, a encore affirmé la représentante, qui a enjoint au HCR d’être « le plus transparent possible » pour préserver la confiance de son organisation.  Elle a enfin demandé au Haut-Commissariat d’accroître sa présence dans les environnements les plus dangereux et de continuer à placer les peuples au cœur de ses décisions, tout en renforçant sa culture de responsabilisation.

M. AMJAD QASSEM AGHA (République arabe syrienne) a déclaré que la crise des réfugiés dans son pays n’était qu’un élément de la crise en Syrie et a déploré que des pays arabes « fassent chanter la communauté internationale » à cause de la situation humanitaire en Syrie.  Citant Julian Assange, le représentant a indiqué que les vagues de réfugiés en provenance de Syrie était « une stratégie contre le Gouvernement syrien pour vider le pays de ses citoyens et le faire sombrer dans le chaos ».  Il a regretté que la Turquie utilise les réfugiés syriens pour faire pression sur l’Union européenne afin d’accélérer son adhésion et « alors même qu’elle viole les droits de l’homme des réfugiés dans les camps et notamment ceux des enfants syriens ».

Le représentant a également accusé l’Arabie saoudite de « manipuler » les chiffres en déclarant accueillir 2,3 millions de réfugiés syriens alors que dans son rapport le HCR ne liste que 133 personnes.  S’interrogeant sur les conditions à assurer au peuple syrien pour qu’il puisse retourner dans ses foyers, il a lui-même répondu qu’il fallait mettre fin « au terrorisme qui cible le peuple syrien », notamment en appliquant les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, et mettre aussi fin aux mesures coercitives unilatérales adoptées par certains États à l’encontre du peuple syrien.

M. GHULAM SEDDIQ RASULI (Afghanistan) a déclaré qu’au moment où plus de 65 millions de personnes dans le monde sont déplacées de force, dont 22,5 millions hors de leur propre pays, la recherche de solutions à cette crise devait être au centre des efforts de la communauté internationale.  Cet impératif figure dans la Déclaration de New York ainsi que dans le Cadre d’action global pour les réfugiés, a souligné le représentant, assurant que son pays y accordait une attention particulière dans la perspective du futur pacte mondial sur les réfugiés.  La question des réfugiés est d’une importance centrale pour l’Afghanistan, dont plus de deux millions de ressortissants sont enregistrés comme tels dans les pays voisins après avoir fui les conflits des dernières décennies, a précisé le représentant.  À cet égard, il a indiqué que son gouvernement s’engageait à garantir le retour et la réinstallation durable des réfugiés afghans et qu’il travaillait pour cela en étroite collaboration avec le HCR et d’autres acteurs internationaux. 

Mme PHAM THI KIM ANH (Viet Nam) a rappelé que la moitié des réfugiés dépendant du mandat du HCR se trouvaient en Afrique, et qu’en 2016 la moitié de la population réfugiée était composée d’enfants.  Le problème des réfugiés est étroitement lié à la paix, aux questions de sécurité et aux droits de l’homme, a-t-elle observé.  Citant la Déclaration de New York, la représentante a insisté sur la nécessité de trouver des solutions durables pour les réfugiés, en particulier pour leur permettre d’obtenir un statut juridique durable qui protège leurs droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux.  La représentante a également rappelé la vulnérabilité accrue des femmes et des enfants, plus exposés à la traite des personnes. 

Mme SUSAN WANGECI MWANGI (Kenya) a déclaré partager les préoccupations exprimées par le Haut-Commissaire tout en faisant remarquer que son pays avait gardé ses portes ouvertes aux réfugiés.  Conformément à nos obligations internationales, nous continuerons à assurer la protection des réfugiés en appliquant les dispositions de la Convention de 1951 et son Protocole de 1967, ainsi que la Convention de 1969 de l’Organisation de l’Unité africaine traitant des différents aspects de cette question, a précisé la représentante.

À cet égard, la représentante a souligné que, depuis octobre dernier, le Kenya enregistrait une augmentation du nombre des arrivées en provenance du Soudan du Sud.  Sur les 183 542 réfugiés du camp de Kakuma, quelque 109 000 proviennent de ce pays, a-t-elle indiqué, assurant que son gouvernement travaille en étroite collaboration avec le HCR pour fournir une protection à ces personnes.  Elle a, en revanche, regretté le manque de soutien de la communauté internationale, qui lui a fait assumer seul le poids d’un des plus vastes camps de réfugiés au monde à Dadaab.  Or, avec le temps, ce camp est devenu une base de recrutement pour des attaques terroristes dans le pays, a poursuivi la déléguée, selon laquelle une solution à cette crise consisterait à favoriser la stabilité en Somalie.

M. MOHAMMAD HASSANI NEJAD PIRKOUHI (République islamique d’Iran) a expliqué que les pays à ressources limitées étaient les premiers à accueillir des réfugiés, une situation qu’il a qualifié « d’insoutenable ».  Il a rappelé que, depuis quatre décennies, son pays avait toujours accueilli un grand nombre de réfugiés et en ressentait grandement la charge sur son économie.  Il a insisté sur la nécessité d’une réponse internationale en la matière et a demandé à ce que soient partagées les charges qui en résultaient, réclamant un « mécanisme clair » sur le sujet.

Le représentant a en outre fait observer que son pays subissait des « sanctions inhumaines » qui affectent la qualité des services fournis aux réfugiés.  Il a enfin expliqué que la République islamique d’Iran avait offert des garanties d’emploi aux réfugiés présents sur son territoire, précisant que 700 000 réfugiés travaillaient dans le pays.

M. BENARBIA (Algérie) a dénoncé le caractère asymétrique des réponses apportées à la crise des réfugiés.  Les pays en développement continuent d’accueillir la majeure partie de cette population dans le monde, a-t-il constaté, observant qu’ailleurs, seul un nombre limité d’États ont fait preuve d’hospitalité.  Or cette asymétrie ne peut se justifier par la seule proximité géographique, a-t-il encore fait valoir.  

Au vu de la situation actuelle, beaucoup reste à faire pour assurer un partage équitable du fardeau et mettre en œuvre pleinement les dispositions de la Convention de 1951 qui s’appuie sur les principes de solidarité et de coopération, a estimé le représentant.  Pour l’Algérie, le HCR devrait prendre en compte la durée de séjour des réfugiés dans le calcul de son assistance, ce qui permettrait aux pays hôtes de mieux évaluer leur effort.  Assurant d’autre part que l’Algérie soutient la solution du rapatriement volontaire des réfugiés dans la sécurité et la dignité, M. Benarbia a conclu en appelant la communauté internationale à redoubler d’efforts en matière d’assistance, de protection et de solutions durables, dans la droite ligne de la Déclaration de New York.  

Mme IRINA VELICHKO (Bélarus) a cité les mesures mises en œuvre par son pays, faisant état de consultations avec toutes les parties intéressées pour élaborer une position nationale sur les réfugiés et les migrants.  Pour le Bélarus, le pacte mondial sur les réfugiés est un instrument utile pour résoudre les problèmes des personnes déplacées.  La représentante a estimé que les causes profondes de la crise actuelle sont le résultat de l’incapacité de la communauté internationale à tourner la page de guerre froide et à instaurer un nouvel ordre mondial.  Elle a d’ailleurs proposé que son pays soit au centre d’un dialogue entre les gros acteurs mondiaux pour que soit enfin trouvé ce nouvel ordre mondial.

M. YIĞIT CANAY (Turquie) a dit apprécier le rôle directeur joué par le HCR pour passer avec succès de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants à la création d’un pacte mondial sur les réfugiés, tout en mettant en œuvre le Cadre d’action global pour les réfugiés.  La Turquie, conformément aux engagements pris lors du Sommet humanitaire mondial d’Istanbul, applique un modèle de coopération entre les acteurs humanitaires et du développement, a indiqué le représentant, précisant que, dans ce cadre, l’aide de son pays allait en particulier aux personnes déplacées en Afrique subsaharienne. 

M. Canay a par ailleurs rappelé que son pays accueille près de 3,3 millions de personnes déplacées en raison de conflits dans sa région, dont plus de 3 millions de Syriens.  Cela fait de la Turquie le premier pays d’accueil de réfugiés, a-t-il souligné, assurant qu’il était accordé à ces personnes un accès libre à l’éducation, à la santé et à l’emploi.  Il a précisé qu’à la suite de l’accord conclu le 18 mars 2016 avec l’Union européenne, le nombre de traversées de la mer Egée avait chuté.  Nous sauvons des vies en mer et, dans le même temps, nous luttons contre le trafic d’êtres humains, a-t-il expliqué, avant de conclure en se disant préoccupé par la situation des réfugiés palestiniens et par la tragédie humanitaire que vivent les musulmans rohingya.   

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission achève l’examen du rapport annuel de la Commission du droit international

soixante-douzième session,
26e séance – matin
AG/J/3560

La Sixième Commission achève l’examen du rapport annuel de la Commission du droit international

La Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, a achevé aujourd'hui l’examen thématique complet du rapport de la Commission du droit international (CDI) sur les travaux de sa soixante-neuvième session, entamé le 23 octobre dernier.

Les délégations ont fini de se prononcer sur les chapitres consacrés aux normes impératives du droit international général (jus cogens), à la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, ainsi qu’à la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.  Elles ont encore exprimé des opinions divergentes sur l’approche des rapporteurs spéciaux, allant parfois jusqu’à remettre en question la pertinence des sujets à l’étude.

Par exemple, les États-Unis ont souligné l’intérêt intellectuel considérable de l’étude du jus cogens ainsi que son intérêt pratique pour mieux comprendre certains domaines du droit international, mais ils ont douté qu’il y ait suffisamment de pratique internationale sur des questions importantes, comme par exemple sur la façon dont une norme arrive au statut de jus cogens.  Israël a noté que si le concept existe depuis des siècles, le processus pour atteindre ce statut reste flou.  La Turquie a également émis des réserves quant au besoin de développer et de codifier le concept des normes impératives du droit jus cogens

L’Iran a déploré le silence de la CDI sur la question de savoir qui détermine l’identification du jus cogens.  Alors que la commission s’appuie sur la Convention de Vienne, son représentant a considéré que la Cour internationale de Justice (CIJ) est la seule autorité reconnue sur cette question.

Préoccupés par le manque de clarté sur le jus cogens, les Pays-Bas, rejoints par l’Allemagne, la République tchèque et l’Argentine, ont estimé que le droit international coutumier constitue la source la plus importante pour les normes de jus cogens.  

De nombreuses délégations ont appelé à la prudence.  Le seul point sur lequel elles sont d’accord est que « ces normes existent », a résumé le Royaume-Uni.  C’est pour cette raison que les travaux de la CDI sont susceptibles d’influencer la façon dont la communauté internationale des États règlemente sa propre conduite pour les années à venir, mais qu’ils risquent aussi de diviser les États. 

La question de savoir si la CDI devait dresser une liste indicative des normes ayant le statut de jus cogens a été beaucoup débattue.

L’Allemagne a ainsi mis en garde contre l’inclusion d’une liste énumérant les normes ayant été élevées au rang de jus cogens, ce qui ferait courir le risque d’établir un « statu quo » qui empêcherait les évolutions futures du jus cogens.  Les Pays-Bas ont préféré ne pas inclure la liste de normes car sa nature empêcherait l’émergence d’une pratique des États.  Israël a jugé cet exercice prématuré tant que le travail sur les critères et les implications de ces normes n’est pas achevé.  Selon l’Iran, la  pertinence d’élaborer une liste du jus cogens doit faire l’objet de plus amples consultations.  Établir une liste du jus cogens risquerait de ralentir son principe qui est par nature dynamique, a mis en garde la Thaïlande.  Enfin, le Japon a jugé important de clarifier le fait qu’une telle liste serait « illustrative et non pas exhaustive ».

Les délégations ont également discuté des dispositions générales qui sous-tendraient l’examen du thème « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État ».

La Turquie a indiqué ne pas voir clairement quelle partie de ce sujet relève du droit international et quelle partie est « politique ».  Israël s’est demandé s’il est nécessaire d’inscrire cette question à l’ordre du jour de la CDI « compte tenu de la réalité des États contemporains ».  Les États-Unis ont eux aussi émis des doutes sur l’intérêt des États pour ce travail, vu le faible nombre de pays qui ont ratifié la Convention de vienne de 1978 sur la succession des États en matière de traités et la Convention de Vienne de 1983 sur la succession d’États en matière de biens, archives et dettes d’État.  La Roumanie s’est montrée réticente au développement du droit sur ce sujet, alors que le Bélarus a invité la commission à poursuivre ses travaux sur ce point.

Par ailleurs, le sujet « Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés » a interpellé le Viet Nam, la Malaisie et le Liban.  Le Viet Nam, en particulier, a rappelé son expérience et les dommages importants et durables causés à l’environnement lors des conflits.  Le Liban a souhaité approfondir les questions relatives à la responsabilité et à l’obligation de réparer et aux conséquences humanitaires de l’impact sur l’environnement des conflits.

À ce sujet, la Thaïlande a jugé important de travailler avec les organisations ayant une expertise, comme le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), l’Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

« J’ai le sentiment que la CDI est un organe très dynamique », s’est réjoui le Président de la Commission du droit international, M. Georg Nolte, à la fin de la séance.  « Contrairement à il y a 10 ans, le problème n’est plus de ne pas avoir suffisamment de questions à examiner, mais d’en avoir trop », a-t-il conclu.

La Sixième Commission se réunira jeudi 2 novembre, à 10 heures, pour examiner le rapport du Comité des relations avec le pays hôte.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-NEUVIÈME SESSION (A/72/10)

Mme CARRIE McDOUGALL (Australie) a estimé que le projet de conclusion fournit un cadre utile pour identifier les normes impératives du droit international général (jus cogens) et leur contenu.  L’approche pratique de ces conclusions est nécessaire pour refléter la nature dynamique de la formation et du développement du jus cogens, ainsi que son acceptation et reconnaissance par les États.

La représentante a soutenu le principe d’exigence de la preuve pour savoir si une norme est acceptée et reconnue par le jus cogens.  Elle a noté que cette obligation est incluse dans, par exemple, le projet de conclusion 6(2) et dans les projets de conclusion 8(2) et 9.  Cependant, il y a de nombreuses insuffisances dans cette approche, particulièrement dans le cas où il n’y existe qu’une pratique limitée des États pour identifier le degré d’acceptation et de reconnaissance de cette norme spécifique par les États.

Étant donné le peu de certitude pour savoir si une norme a atteint le niveau de jus cogens, Mme McDougall s’est demandé si l’inclusion d’une liste illustrative de normes aussi impératives serait d’un quelconque bénéfice.  Elle a aussi posé la question de savoir si un consensus doit être trouvé sur ces questions.  En conclusion, elle a recommandé une approche prudente si la décision venait à être prise de développer une liste de normes de jus cogens.

M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a souligné l’intérêt intellectuel considérable de l’étude du jus cogens ainsi que son intérêt pratique pour mieux comprendre, par exemple, certains domaines du droit international et en particulier les droits de l’homme.  Il a cependant rappelé avoir toujours des réserves, notamment sur un aspect méthodologique.  Il n’est en effet pas certain qu’il y ait suffisamment de pratique internationale sur des questions importantes, comme par exemple sur la façon dont une norme arrive au statut de jus cogens.  Après avoir rappelé que les critères d’identification des normes impératives devaient être basés sur l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, il a dit apprécier que le projet de conclusion reflète bien la définition de cet article.  Cependant, contrairement à ce qui est énoncé au paragraphe 2 du projet de conclusion 5, il n’a pas connaissance de normes impératives qui soient basées sur des principes généraux du droit.  Il a donc suggéré de supprimer ce paragraphe.  Concernant le projet de conclusion 9, il a dit que les décisions des juridictions internationales ne devraient pas être utilisées pour prouver l’acceptation ou la reconnaissance, par les États, de normes impératives.

Venant au chapitre intitulé « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État », M. Simonoff a salué l’effort visant à clarifier ce domaine du droit, mais a émis des doutes sur l’acceptation ou même l’intérêt des États pour ce travail, vu le faible nombre de pays qui ont ratifié la Convention de vienne de 1978 sur la succession des États en matière de traités et la Convention de Vienne de 1983 sur la succession d’États en matière de biens, archives et dettes d’État.  Vu en outre la complexité du sujet, qui nécessite un examen prudent et approfondi par les gouvernements, il a exhorté la commission à s’exprimer clairement lorsqu’elle pense codifier le droit existant, notamment s’il s’agit de développement progressif du droit.  Sur le projet d’article 3, il s’est demandé si les différents types d’accord, tels qu’ils y sont décrits, étaient bien compris ou établis dans la pratique des États.  Il a demandé d’examiner plus avant cette question.  En revanche, il a jugé correct que le paragraphe 4 dudit article reconnaisse l’importance centrale des principes reflétés dans les articles 34 à 36 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.

Le représentant a également commenté le chapitre « Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés » sur lequel il a exprimé trois préoccupations.  Il a émis des doutes quant à l’étendue de l’étude qui s’intéresse aux droits autres que le droit international humanitaire, alors que celui-ci constitue la lex specialis dans les situations de conflit armé.  Il a en outre estimé que la commission n’était pas le forum approprié pour examiner si certaines dispositions du droit international humanitaire reflètent le droit international coutumier.  Cette discussion exige un examen rigoureux de la pratique des États et de la doctrine, a-t-il affirmé.  Enfin, il a jugé inappropriés les termes impératifs utilisés dans certains projets de principe, qui dictent aux États ce qu’ils doivent faire, un langage qui ne doit être utilisé selon lui que pour des règles constitutives de lex lata.

M. JOSÉ LUIS FERNANDEZ VALONI (Argentine) a reconnu que les conclusions du deuxième rapport du Rapporteur spécial permettent d’avancer, en s’appuyant sur l’article 53 de la Convention de Vienne, sur la question de l’identification des critères des normes impératives du droit international général (jus cogens).  Il s’est dit en accord avec le rapport, qui estime que le droit international coutumier représente la manifestation la plus claire du jus cogens, qui se reflète dans la jurisprudence des tribunaux nationaux et internationaux.  Concernant l’acceptation et la reconnaissance des normes du jus cogens, il a déclaré, comme le Rapporteur, qu’elles doivent être fondées sur l’acceptation par les États, conformément à l’état actuel du droit international.  Cependant, a-t-il ajouté, la pratique des acteurs non étatiques, les traités, les résolutions de l’Assemblée générale et les décisions des tribunaux internationaux peuvent également contribuer à la reconnaissance et à l’acceptation de normes par certains États.  Il a invité la commission à prendre en compte les réserves des États sur cette question.

Par ailleurs, le représentant a estimé que le projet de conclusion 3, qui considère comme élément descriptif et non constitutif le fait que les normes du jus cogens renforcent les « valeurs fondamentales » de la communauté internationale, n’est pas un élément constitutif de l’identification du jus cogens en vertu de l’article 53 de la Convention de Vienne.  Citant un avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) et de la Cour européenne des droits de l’homme, il a toutefois plaidé pour que la notion de « valeur » soit effectivement considérée un élément constitutif.  L’identification des normes du jus cogens peut avoir un impact pratique important sur l’extradition, l’entraide judiciaire internationale et la pratique des États, a-t-il prévenu. 

Revenant sur les projets d’articles relatifs aux crimes contre l’humanité, il a observé qu’ils sont basés sur d’autres mécanismes internationaux tels que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), limitant d’autant les risques de contredire les accords de la communauté internationale.  Afin de remplir leurs obligations de prévention, d’enquête et de poursuites pour ces crimes, il a jugé fondamental le renforcement de la coopération entre les États.

M. PETER NAGY (Slovaquie) a déclaré avoir exprimé son intérêt de façon constante en ce qui concerne les normes impératives du droit international général (jus cogens).  Cela est dû à la grande importance du sujet, qui est aussi un sujet sensible pour la communauté internationale.  C’est pourquoi, les critères de leur identification, tels que reflétés dans le rapport, devraient faire l’objet d’une attention particulière.

Le représentant a fait part de sa préoccupation concernant le fait que l’acceptation et la reconnaissance jouent un rôle primordial.  À cet égard, il est vital de préciser que l’opinio juris cogentis doit être atteinte par la communauté internationale.  Il a exprimé des doutes sur les projets de conclusions 6 et 9 qui ne répondent pas à cette ambition.  Plutôt, ils laissent toute la place au doute sur la façon dont l’opinio doit être analysée.  En conséquence il a encouragé le rapporteur spécial à travailler de façon plus prudente sur, par exemple, la question de savoir si l’acceptation et la reconnaissance sont « nécessairement et seulement » liées au principe de la non-intangibilité, si oui ou non les États doivent l’exprimer de façon explicite ou s’il est suffisant pour les États de relier leur opinio à d’autres références, comme par exemple, les normes universelles.  De plus, le projet de conclusions emploie le terme « d’acceptation et de reconnaissance » de manière inséparable, ce qui entraîne un manque de clarté.  Le projet de conclusion 9 qui traite de la preuve de l’acceptation et de la reconnaissance ne nous éclaire pas sur ce point, a-t-il regretté.

Par ailleurs, la notion de communauté internationale des États comme un ensemble est aussi importante.  Le projet de conclusion 7 qui limite l’explication à « une large majorité d’États » laisse la question ouverte de savoir ce qui pourrait correspondre à la formule « dans son ensemble », a-t-il conclu.

M. STEFAN RACOVITA (Roumanie) a appuyé les projets de conclusions 4 à 9 sur les normes impératives du droit international général (jus cogens) présentés par le Rapporteur spécial qui, lui semble-t-il, sont fidèles aux normes internationales en vigueur.  Concernant la conclusion 4, il a approuvé l’approche à deux critères et estimé que la modification par une norme du jus cogens ne constitue pas en tant que telle un critère indépendant d’identification du jus cogens

À propos du projet de conclusion 5, le représentant a jugé que la source et l’identification du jus cogens devraient être traitées de façon indépendante et que les sources devraient être indiquées.  Pour lui, le projet de conclusion devrait être éliminé, alors que ses conclusions sont déjà couvertes par les projets de conclusions 4 et 7.  Concernant la reconnaissance du jus cogens, il a fait part de ses réserves sur la mention « large majorité d’États », estimant que les normes impératives reflètent des normes fondamentales partagées par une grande majorité d’États.  À cet égard, il s’est plutôt dit favorable à l’ajout de « très » à « large majorité », soit « très large majorité d’États ».  Il s’est en outre prononcé en faveur du maintien des projets de conclusions 8 et 9, invitant toutefois la CDI à approfondir ce sujet. 

Abordant la question de la succession d’États en matière de responsabilité d’État, M. Racovita a considéré qu’il n’existe pas de cadre normatif unique sur cette question, et que la pratique des États est limitée par la notion de cohérence.  Il faut évaluer la situation relative à la pratique des États pour en faire une règle générale, a-t-il poursuivi.  Il s’est montré réticent au développement du droit sur ce sujet, estimant qu’un projet de règle non contraignant pourrait être développé par la commission, sans plus.  Il faut tenir compte des règles subsidiaires à cet effet, sans élaborer de convention sur cette question, a-t-il ajouté. 

S’agissant de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a estimé que la question de l’environnement est de plus en plus importante.  Il a jugé que les recommandations du groupe de travail sont très utiles, et que cette question doit être traitée en lien avec le droit international et le droit de la mer.  

Selon Mme LISELOT EGMOND (Pays-Bas), les débats concernant les normes impératives du droit international général (jus cogens) ont montré que de nombreux éléments demeurent contestés, alors que leur clarification est essentielle pour arriver à des conclusions constructives à ce sujet.  Elle a partagé la préoccupation de la France concernant le manque de clarté sur le jus cogens.  Elle a estimé que le droit international coutumier constitue la base la plus importante pour les règles de jus cogens et hésité à dire que le jus cogens dérive des principes généraux et des dispositions des traités.  Les principes généraux n’ont pas le caractère non dérogatoire des règles de jus cogens et de nombreux traités manquent d’application universelle, a-t-elle expliqué.  Le caractère universel d’un traité est plus souvent l’exception que la norme.

Mme Egmond a appuyé « un test à deux volets » à cet égard: d’abord la reconnaissance de l’opinio juris, puis celle de l’opinio juris congentis.  Elle s’est posé la question de savoir si les normes de jus cogens protègent ou reflètent des valeurs fondamentales.  Ce qui compte, a-t-elle insisté, c’est que la norme en question soit acceptée et reconnue par la communauté internationale et qu’aucune dérogation à ce sujet n’est envisageable.  Par ailleurs, elle a préféré ne pas inclure la liste de normes ayant le statut de jus cogens, car sa nature empêcherait l’émergence d’une pratique des États.

Passant au chapitre sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, la représentante a estimé que les travaux devraient offrir un ensemble de principes et de directives qui se baserait sur le principe sous-tendant la responsabilité de l’État.  C’est un principe qui fait qu’il ne peut y avoir de disparition.  Le transfert ou non de droits devrait être examiné au cas par cas et devrait faire l’objet d’un accord, car les États successeurs sont généralement conscients de la nécessité de combler le vide.  Tout principe ou directive devrait être de caractère subsidiaire, a-t-elle déclaré.

Pour Mme BATZION BEN DAVID GERSTMAN (Israël), le travail de la commission devrait porter sur la définition et la codification des normes impératives du droit international général (jus cogens), qui sont une doctrine largement acceptée du droit international selon elle.  Elle a remarqué toutefois que si le concept existe depuis des siècles, le processus pour atteindre ce statut reste flou.  À la lumière de cette incertitude, il est important que la commission peaufine cet exercice avant de chercher à élargir la portée de ces normes en développant davantage les projets de conclusion existants ainsi que les commentaires qui y correspondent.

La représentante a réitéré sa position par rapport à la compilation d’une liste, illustrative ou exhaustive, des normes du jus cogens.  Elle a jugé cet exercice prématuré tant que le travail sur les critères et les implications de ces normes n’est pas achevé.  Cela risque même de créer plus de confusion et de débats, au lieu de contribuer à les clarifier et à un consensus, s’est-elle inquiétée.  Alors que les projets de conclusion présentés par le Rapporteur spécial constituent une bonne base pour la suite des discussions, il existe des divergences notables entre les principes et la terminologie utilisés dans ces projets par rapport à ceux qui existent dans le contexte du travail sur l’identification dans le droit international coutumier. 

Mme Gerstman a ensuite demandé des clarifications sur la distinction entre les critères pour le jus cogens tels que stipulés dans le projet de conclusion 4, et les éléments descriptifs qui figurent dans le projet 3.  Dans l’état actuel, ces deux projets de conclusion ouvrent la porte aux débats sur la signification du projet 3, a-t-elle averti.  Elle s’est aussi demandé s’il était judicieux d’inclure des éléments descriptifs, qui ne sont pas de nature normative et dont les ramifications juridiques ne sont pas claires, dans des conclusions de nature juridique.  Par contre, Israël soutient la distinction qui est faite dans le projet de conclusion 5 entre les sources de droit qui peuvent servir de base aux normes jus cogens, comme le droit international coutumier, et les sources qui ne peuvent que refléter de telles normes, comme le droit des traités.

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité des États, la représentante a demandé s’il est nécessaire d’inclure cette question à l’ordre du jour de la commission compte tenu de la réalité des États contemporains.  Notant que ce projet est encore à l’état embryonnaire, elle a estimé qu’il est encore trop tôt pour se prononcer sur sa forme définitive.  Dans tous les cas, sa forme définitive aurait, pour sa délégation, un caractère subsidiaire aux accords passés entre États dans le contexte d’une succession spécifique.

Concernant les normes impératives du droit international général, Mme ELAHEH MOUSAVI-NEJAD (Iran) a déploré le silence du rapport de la commission sur la question de savoir qui détermine l’identification du jus cogens.  Alors que la commission s’appuie sur la Convention de Vienne, elle a fait remarquer que la Cour internationale de Justice (CIJ) est la seule autorité reconnue sur cette question en vertu de l’article 66(a) de la Convention.  En outre, la CIJ considère que cet article n’a pas valeur de droit international coutumier et de nombreux États ont émis des réserves sur cet article.  Concernant le critère pour l’identification qui se réfère aux éléments qui devraient être présents pour qu’une règle soit qualifiée de norme de jus cogens, elle a estimé que le principe d’intangibilité ne peut être considéré comme un critère, étant une conséquence de l’émergence du jus cogens.  Elle a apprécié le changement de nom du sujet, qui est dérivé de la Convention de Vienne.

D’après la représentante, la pertinence d’élaborer une liste du jus cogens doit faire l’objet de plus amples consultations.  Toutefois, si une liste doit être rédigée, elle a appelé à la priorisation de l’article 52 de la Convention de Vienne sur le droit des traités relatif à l’interdiction de la menace ou de l’utilisation de la force.  Elle a considéré qu’en cas de contradictions entre les obligations des États en vertu de la Charte des Nations Unies et du jus cogens, ce dernier doit prévaloir.  Elle s’est déclarée en accord avec la règle de l’acceptation et de la reconnaissance par une « large majorité des États » représentant les principales formes de civilisation et les principaux systèmes juridiques du monde. 

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme Mousavi-Nejad a jugé que, devant la faible pratique des États sur cette question, la conclusion voulant que la règle de non-succession ait changé est « peu convaincante ».  De plus, elle a estimé qu’un accord entre États doit avoir priorité sur des règles subsidiaires générales sur la succession.  Enfin, elle a estimé que l’adoption de projets d’articles sur cette question n’est pas appropriée pour le moment. 

M. SUN THATHONG (Thaïlande) a reconnu l’importance du jus cogens et la grande sensibilité du sujet.  Saluant la mention du jus cogens dans l’article 53 de la Convention de Vienne, qui en donne la définition la plus communément utilisée aujourd’hui, il a cependant estimé que l’interprétation de cette définition devrait se calquer sur celle des articles 31 et 32 de la Convention de Vienne.  Cette approche permettrait que l’objet et le but de la Convention de Vienne soient pleinement pris en considération par l’analyse du Rapporteur spécial.  En outre, il a estimé qu’établir une liste du jus cogens risquerait de ralentir son principe qui est par nature dynamique.

Le représentant a déclaré que l’alinéa 3 du projet de conclusion 7, intitulé « la communauté internationale des États dans son ensemble », laisse entendre qu’une « large majorité d’États » est suffisante.  Il a rappelé que durant les débats sur la négociation de l’article 53 de la Convention de Vienne, il y avait eu des incertitudes concernant justement le terme « dans son ensemble ».  Il a estimé à cet égard que le texte susmentionné ne reflète pas ce que les négociateurs entendaient par « dans son ensemble » et que ce terme requiert plus de preuves concrètes et de pratique des États.  Selon lui, la Commission du droit international devrait continuer d’évaluer la pratique des États.

Concernant le chapitre dédié à la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, M. Thathong a noté que les conflits armés ont un impact à long terme à la fois sur l’environnement et sur le bien-être et le développement des populations.  Il a dit suivre avec intérêt le développement du droit environnemental et du droit humanitaire.  Selon lui, il est important de travailler avec les organisations ayant une expertise, comme le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), l’Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  Cette collaboration permettrait de mieux comprendre l’importance des conflits armés sur l’environnement, a-t-il conclu.

Pour M. RUSLAN VARONKOV (Bélarus), la question des normes impératives du droit international général est de plus en plus importante dans le cadre de l’interprétation des accords internationaux, alors que les normes du jus cogens sont parfois utilisées « à des fins intéressées ».  Il a considéré que le jus cogens devrait être analysé en conjonction avec le droit international, ajoutant que le droit international général doit être mieux défini.  S’agissant des critères définis à l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, il a noté que les normes semblent s’appliquer seulement aux États qui l’ont reconnu et n’ont pas de caractère universel.  Il a invité la commission à développer d’avantage la conclusion de la partie générale des commentaires afin d’en faciliter la mise en œuvre par les États.  Afin d’éviter le recours à une approche fondée sur les valeurs, il a souligné l’importance de tenir compte des éléments objectifs, y compris la teneur de ces normes.  « Il faut éviter des interprétations divergentes des normes jus cogens par les États pour que le caractère impératif des normes ne soit pas contesté », a-t-il ajouté.

Se référant au projet de conclusion 7, intitulé « Communauté internationale des États dans son ensemble », il a déclaré que la notion relative au rôle des États dans l’identification du jus cogens n’était pas suffisamment claire.  Souhaitant conserver l’approche de l’article 53 de la Convention de Vienne, le Rapporteur spécial a fait mention de la communauté internationale dans son ensemble pour dire qu’aucun État ne peut imposer de droit de veto à la reconnaissance d’une norme de jus cogens, a-t-il relevé.  Selon lui, la façon dont les États peuvent contester une norme n’est pas claire.  La différence entre le droit international général et le droit conventionnel n’est pas bien établie, a-t-il ajouté.  Il s’est dit en accord avec le projet de commentaire 9, selon lequel l’acceptation et la reconnaissance du jus cogens peuvent être reflétées dans des documents divers.  De plus, les paragraphes 3 et 4 devraient être précisés, selon lui, car ils ne reflètent pas nécessairement la reconnaissance par les États. 

Se tournant vers la succession d’États en matière de responsabilité d’État, M. Varonkov a estimé qu’il n’existe pas de présomption d’absence de succession.  Devant les difficultés d’établir une tendance dans ce domaine, il a invité la commission à poursuivre ses travaux.  Il convient de définir des catégories dans lesquelles le lien personnel avec l’État successeur ne s’appliquerait pas.  Enfin, il a recommandé de revoir certains des termes définis dans les projets d’articles, dont le projet d’article 2.

Mme KERSTIN PURSCHEL (Allemagne) a recommandé une approche prudente en ce qui concerne la pratique des États sur les critères de formation des normes impératives du droit international (jus cogens).  Elle a appuyé le projet de conclusion 5, à savoir que ce doit être le droit international coutumier, et non les traités ou d’autres sources, qui qualifie la base du jus cogens.  Toutefois, a-t-elle regretté, ceci n’est pas suffisamment reflété dans le projet de conclusion adopté provisoirement et devrait être clarifié dans sa formulation.

S’agissant des critères du jus cogens, la représentante a apprécié que l’acceptation et la reconnaissance par la communauté internationale des États en tant qu’ensemble ne soient pas négociables.  Elle a cependant incité à la plus grande prudence du fait des implications importantes des normes de jus cogens.  D’après elle, il n’est pas nécessaire que la Commission du droit international traite du jus cogens régional à cette étape du projet.  Enfin, elle a mis en garde contre l’inclusion d’une liste énumérant les normes ayant été élevées au rang de jus cogens, ce qui ferait courir le risque d’établir un « statu quo » qui empêcherait les évolutions futures du jus cogens.

Mme KRISTINA HORNÁCKOVÁ (République tchèque) a estimé que les normes impératives du droit international général (jus cogens) ne résultent que de l’assentiment d’un État et qu’elles sont identifiées par toute la communauté internationale des États comme normes impératives.  Elle a appuyé le projet de conclusion 5 selon lequel le droit international coutumier est « le fondement le plus commun » de la formation des normes de jus cogens du droit international.  Elle a au contraire émis des doutes sur l’utilisation de dispositions d’un traité et des principes généraux de droit comme fondement des normes impératives du droit international général comme le prévoit aussi l’article.

La représentante a salué la décision de la commission d’inclure la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État dans son programme de travail.  C’est le moment, a-t-elle dit, d’examiner scrupuleusement l’ancien dogme selon lequel la responsabilité d’un acte illicite commis soit par, soit contre, l’État prédécesseur, ne peut plus être invoquée en cas de succession d’État.  Il est maintenant communément admis, a-t-elle rappelé, que la succession d’États n’entraîne pas nécessairement « une ardoise vierge » dans les relations juridiques internationales.  Elle a fait siennes les vues du Rapporteur spécial selon lesquelles le droit international contemporain n’exclut pas la succession en termes de droits et d’obligations secondaires découlant d’un acte internationalement illicite commis par l’État.  Elle a encouragé le Rapporteur à envisager une disposition générale pour intégrer cette thèse.  Ce serait, à son avis, un point de départ de l’exercice beaucoup plus complexe qui consistera à répondre à la question de savoir s’il y a des règles spécifiques du droit international qui permettent de soutenir cette thèse.

Mme Hornácková s’est par ailleurs déclarée satisfaite du projet d’article 1 sur la portée du projet de texte.  Elle a plaidé en faveur de l’harmonisation entre ce projet et les travaux précédents de la commission sur la succession d’États et la responsabilité de l’État, souhaitant que les mêmes définitions soient utilisées.  Elle a aussi jugé bonne la décision d’enlever la définition du terme « responsabilité internationale » dans le projet d’article 2.  En revanche, elle n’a pas été convaincue de la nécessité d’inclure les projets d’articles 3 (portée des accords relatifs à la succession d’États en matière de responsabilité) et 4 (déclaration unilatérale de l’État successeur).  Pour ce qui est des travaux futurs, elle a recommandé de structurer le projet autour des éléments de la responsabilité de l’État, comme le dédommagement, plutôt qu’en fonction de la nature de la succession.

La représentante a aussi abordé le chapitre relatif à la protection de l’environnement en lien avec les conflits armés en notant que la commission n’avait pas l’intention de contribuer au développement progressif du droit international ni de codifier celui-ci, et donc ne prévoyait à aucun stade d’élaborer un projet de texte qui serait juridiquement contraignant.  Elle a tenu toutefois à préciser que, si le besoin s’avérait d’amender les instruments juridiques existants, ce ne serait pas à la commission de le faire mais aux États parties à ces instruments. 

M. YOUSSEF HITTI (Liban) s’est réjoui de la tenue, en juin prochain à New York, de la première partie de la soixante-dixième session de la Commission du droit international (CDI) qui devrait renforcer l’interaction entre la Sixième Commission et la CDI.  « Il faut veiller à ce que la productivité de la commission ne soit pas mise à mal par un trop-plein de questions à traiter », a-t-il prévenu, en saluant les travaux de la CDI en général.

Intéressé par la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a réitéré sa position, à savoir qu’il faut approfondir les questions relatives à la responsabilité et à l’obligation de réparer; aux principes de proportionnalité et de précaution appliqués au contexte environnemental; aux conséquences humanitaires de l’impact sur l’environnement des conflits; à la protection de l’environnement dans les situations d’occupation. 

M. SEOUNG-HO SHIN (République de Corée) a jugé important que les travaux de la commission sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État soient cohérents.  S’agissant du projet d’article 1, il a appuyé la position de la commission d’exclure les questions de responsabilité internationale pour conséquences préjudiciables découlant d’actes qui ne sont pas interdits par le droit international.  Au sujet de l’article 2 sur l’utilisation des termes, il a noté la cohérence avec les deux Conventions de Vienne sur la succession. 

Le représentant a estimé que la priorité de la CDI devrait être de déterminer si des règles générales de succession des États existent bel et bien, notamment si les deux États sont différents.  Il a identifié deux approches possibles à cet égard, soit l’identification d’un cas où les obligations et les droits d’un État prédécesseur ont été reconnus, soit la recherche d’une règle générale pouvant s’appliquer à différents types de successions d’États.  Cependant, a-t-il reconnu, la catégorisation des États successeurs n’est pas une mince tâche.

M. RAMIS SEN (Turquie) a émis des réserves quant au besoin de développer et de codifier le concept des normes impératives du droit jus cogens.  Il a également privilégié une approche qui permette d’identifier ces normes à la place de l’option d’une liste illustrative.  Sa délégation encourage la commission à se mettre d’accord sur une méthodologie pour l’identification des normes jus cogens.  Il a ensuite réagi aux six projets de conclusion proposés par le Rapporteur spécial sur cette question et a recommandé d’éliminer ou de développer davantage le projet 6 qui, selon sa délégation, est redondant avec le projet 4 dans la mesure où il faut que la communauté internationale reconnaisse et accepte ces normes.  Il a en outre demandé que le deuxième paragraphe du projet de conclusion 7 soit éliminé pour préserver la clarté du premier paragraphe.

Pour ce qui est de la succession d’États en matière de responsabilité des États, le représentant a soulevé la complexité de cette question qui découle, selon lui, du fait qu’elle comprend deux volets qui ne sont pas encore réglés dans le contexte juridique et politique.  Il n’est pas clair, pour sa délégation, quelle partie de ce domaine tombe ou devrait tomber sous le coup du droit international et quelle partie est « politique ».  Par conséquent, il a estimé qu’il n’était pas judicieux de vouloir généraliser ou règlementer cette question d’une certaine façon.  Il en a voulu pour preuve les divergences théoriques entre les points de vue du Rapporteur spécial et de certaines délégations.

Pour M. STEPHEN H.SMITH (Royaume-Uni), les travaux de la commission sur les normes impératives du droit international général (jus cogens) devraient se concentrer sur la façon dont ces normes se forment et opèrent et sur leur effets juridiques.  La complexité et les controverses autour des normes jus cogens tiennent au processus de leur identification et à leur signification une fois qu’elles ont été identifiées.  En dépit de la vaste littérature sur ce sujet, le seul point d’accord, a-t-il reconnu, est que ces normes existent.  C’est pour cette raison que les travaux de la commission sont susceptibles d’influencer la manière dont la communauté internationale des États règlemente sa propre conduite pour les années à venir, mais qu’ils risquent aussi de diviser les États. 

Par conséquent, si le Royaume-Uni réaffirme son soutien au travail de la commission sur cette question, il l’invite à faire preuve de prudence, a poursuivi M. Smith.  Il a jugé le projet de conclusion 2 inutile, car il n’apporte pas de clarification ni l’assistance technique qui serait d’un intérêt pratique pour les États et les juristes.  En outre il n’établit pas de distinction claire entre les éléments descriptifs, d’un côté, et les critères de l’identification et leurs conséquences, de l’autre.  Il a également averti que le terme « valeurs fondamentales » risquait de diluer les éléments constitutifs du jus cogens, voire d’introduire un élément constitutif supplémentaire, ce qui rendrait la formation et l’identification de ces normes encore plus complexes.  Il a même estimé qu’un paragraphe descriptif comme le projet de conclusion 2 risquait de faire passer ce projet pratique « dans le territoire de la politique pure », au risque de perdre le consensus entre États sur les questions pratiques.

S’agissant du projet de conclusion 5, intitulé « normes du jus cogens en tant que normes du droit international général », le représentant a noté que la terminologie est puisée dans l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  Analyser ces termes avec précision est un travail considérable, selon lui.  Par conséquent il a salué l’inclusion, dans le programme de travail à long terme de la commission, du point de l’ordre du jour relatif aux « principes généraux de droit ».  Commentant ensuite les projets de conclusion 5 et 6, il a jugé l’expression « communauté internationale des États dans son ensemble », qui est aussi reprise de l’article 53, difficile à capturer.  Toutefois, la remplacer par l’expression « dans sa grande majorité » ne rend pas service. 

Allant plus loin, M. Smith a pris le contrepied du Rapporteur spécial pour lequel l’article 53 de la Convention de Vienne doit être le point de départ de ce travail, affirmant que pour sa délégation le travail en substance sur cette question ne devrait pas se baser sur la définition qui figure dans l’article susmentionné.  Cette question devrait être traitée dans les limites fixées par l’article et être cohérente avec les règles qu’il contient.

Passant ensuite à la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. Smith a constaté qu’il existait très peu d’éléments en termes de pratique des États pour guider les travaux de la commission.  Les cas identifiés par le Rapporteur spécial sont très spécifiques à un contexte donné et sensibles, a-t-il noté, alors que ce sujet devrait être abordé dans une perspective historique, politique et culturelle, selon l’orateur.  Il a demandé à la commission de préciser clairement si elle établit des normes dans le cas de la lex lata ou dans le cas de la lex ferenda.  Pour sa délégation, « nous sommes dans le dernier cas ».

Enfin, sur la question de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a indiqué que la commission ne devrait pas chercher à modifier le droit des conflits armés.  Même si la définition de principes directeurs pourrait être utile, il ne pense pas que cela mérite de nouvelles dispositions de traité.  Le droit international est le lex specialis dans ce domaine, a-t-il conclu. 

Mme INTAN DIYANA AHAMAD (Malaisie) a salué l’inclusion de la question du jus cogens dans le programme de travail de la Commission du droit international.  Elle a noté que le projet de conclusion proposé par la Rapporteur spécial est basé sur les principes de l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  En ce qui concerne le projet de conclusion 5, une explication plus profonde de l’utilité de l’article 38(1) du statut de la Cour internationale de Justice pourrait servir de base pour déterminer les normes de jus cogens.  S’agissant du projet de conclusion 9, elle a souligné que le travail des experts et des universitaires n’est que secondaire dans l’identification du jus cogens en tant que norme de droit international.

Passant au sujet de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, la représentante a noté l’importance du sujet, en soulignant le rôle du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  Elle a récapitulé la position de sa délégation sur la portée du sujet, l’utilisation des termes, la méthodologie et les droits des populations autochtones.  « Nous attendons que des efforts soient faits pour combler les lacunes dans les projets de principe », a-t-elle déclaré.  Les éléments de protection tels qu’envisagés devraient fournir une analyse et une clarification concernant leur applicabilité et leur relation avec le droit international humanitaire, le droit pénal international, le droit de l’environnemental international, les droits de l’homme et le droit des traités. 

M. NGUYEN NAM DUONG (Viet Nam) a déclaré que les normes impératives du droit international général (jus cogens) sont reconnues par la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 ainsi que dans les législations nationales de plusieurs États, y compris le Viet Nam, par le biais de la loi sur le droit des traités de 2016.  Il a encouragé la CDI à poursuivre ses travaux sur cette question.

Le représentant a souligné le manque de pratique des États sur la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État.  Parmi les éléments dont la commission doit tenir compte sur ce sujet, il a noté la responsabilité envers les organisations internationales, la responsabilité pour les actes qui ne sont pas interdits en vertu du droit international, et les cas où les États prédécesseur et successeur coexistent.  Devant le manque de pratique des États, le principe de non-succession doit être appliqué, selon lui.

Pour ce qui est de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, M. Nguyen a rappelé l’expérience de son pays, où des dommages importants et durables ont été causés à l’environnement lors de conflits.  Il s’est donc dit en accord avec la commission sur l’importance d’établir la responsabilité de l’État sur cette question, en complément des lois internationales existantes, notamment les Conventions de Genève.

Sur les normes impératives du droit international général (jus cogens), M. HECTOR ENRIWUE CELARIE LANDAVERDE (El Salvador) a estimé qu’il serait opportun de reporter l’examen du projet de conclusion 5 afin de parvenir à une position uniforme, étant donné les divergences d’opinions par rapport à la fonction des principes généraux de droit et afin de ne pas affecter l’universalité dans la formation du jus cogens.  Il a suggéré de remplacer le terme « attitude » des États par « conviction » dans le projet de conclusion 3.

Le représentant a jugé important le travail de codification et de développement progressif afin de clarifier les effets de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.  Il serait pertinent de prendre en compte les différentes formes de succession d’États afin d’apporter un meilleur éclairage sur leurs effets juridiques, en particulier en ce qui concerne le maintien ou la perte de la personnalité internationale des Etats affectés. D’après lui, l’expression « succession d’États », définie dans le projet d’article 2, n’identifie pas la forme licite qui sous-tend l’hypothèse de substitution d’un État par un autre, dans la responsabilité des relations internationales d’un territoire.  Or la modification territoriale de façon licite et pacifique revêt un caractère essentiel pour la succession d’États.

M. Celarie Landaverde a approuvé l’idée d’intégrer de nouvelles définitions au projet.  Quant aux projets d’articles 3 et 4, il a été d’avis qu’il faut en poursuivre l’examen.

Au chapitre de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le représentant a considéré qu’il faut abandonner la distinction entre conflits armés internationaux et conflits armés non internationaux puisque les conséquences sont irréversibles pour l’environnement dans les deux cas.  Considérant l’environnement comme un bien public, transnational et même universel, il a jugé préoccupant de ne considérer les attaques contre l’environnement que lorsque celui-ci est devenu un objectif militaire.

M. YUKI HIROTANI (Japon) a soutenu l’approche du Rapporteur spécial sur le sujet des normes impératives du droit international général (jus cogens) concernant les éléments de l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités en tant que base de critère pour l’identification du jus cogens.  Le Japon soutient aussi l’approche consistant à s’appuyer sur la pratique des États et sur les décisions de la Cour internationale de Justice (CIJ).  Cependant, il a souligné que le jus cogens est une norme de droit international général et pas un concept confiné dans le contexte du droit des traités.  Sa portée ne peut être limitée par le droit des traités, a-t-il déclaré.  Il est important de considérer les questions relatives à d’autres domaines du droit, telles que la responsabilité des États, concernant sa définition, ses critères et son contenu.

Pour ce qui est de la question de savoir si la Commission du droit international devrait concevoir une liste du jus cogens, le représentant a estimé que cette liste peut être très utile en pratique si elle inclue les fondements et preuves basés sur ce que la CIJ considère comme étant des normes ayant acquis le statut de jus cogens.  Cependant, a-t-il averti, il faut agir avec prudence dans la préparation de cette liste pour éviter les perceptions erronées.  Ainsi est-il important de clarifier le fait que cette liste est illustrative et non pas exhaustive.  À propos du jus cogens régional, le Japon est pleinement convaincu de la nécessité d’étudier un jus cogens qui ne soit pas universel.  La relation entre les normes de jus cogens internationales et les normes de jus cogens régionales doit être considérée en détail.

Passant à la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. Hirotani a rappelé les difficultés potentielles, eu égard au nombre limité de cas pertinents de pratique de l’État sur ce sujet.  Étudier la pratique des États sur ces questions est crucial selon lui.  Il a souligné que les projets d’articles 3 et 4 ont une structure complexe en raison du manque d’orientation claire en ce qui concerne les principes généraux de succession d’États en matière de responsabilité de l’État.  Si l’on en croit la théorie de la non-succession, les projets d’articles 3 et 4 devraient se concentrer sur les conditions exceptionnelles, là où les accords pourraient donner lieu à un transfert de responsabilité.  Il a souhaité une analyse plus approfondie sur cette question.  En outre, les sujets tels que la responsabilité des organisations internationales ainsi que la succession des gouvernements ne devraient pas être abordés pour éviter de surcharger l’examen en cours.

M. NECTON MHURA (Malawi) a salué le travail de la commission sur la codification et le développement progressif du droit international.  Revenant sur les projets d’articles sur les crimes contre l’humanité, il a exhorté la commission à approfondir son examen des droits des victimes à des réparations.  Il a noté à cet égard que de nombreux États pourraient avoir des difficultés à faire face au fardeau financier découlant de l’imposition de réparations. 

Concernant l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, le représentant s’est dit préoccupé par l’abandon par la commission de la procédure consistant à adopter ses décisions par consensus.  Devant les divisions entourant les exceptions aux immunités de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, il a invité la commission à poursuivre son examen de ce sujet, sans le confondre avec la portée et l’application du principe de compétence universelle.  Notant que chaque tribunal possède des règles qui lui sont propres, il a douté de la pertinence d’ajouter l’administration de la preuve devant les juridictions internationales au programme de travail. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Avec l’année internationale des camélidés et la journée mondiale des abeilles, la Deuxième Commission entend contribuer à la sécurité alimentaire

Soixante-douzième session
24e séance – après-midi 
AG/EF/3488

Avec l’année internationale des camélidés et la journée mondiale des abeilles, la Deuxième Commission entend contribuer à la sécurité alimentaire

Après un mois de travaux et 24 séances de débats, la Deuxième Commission, chargée des questions économiques et financières, a entendu, cet après-midi, la présentation de 36 des 42 projets de résolution au menu de cette session, et sur lesquels elle se prononcera ultérieurement.  Deux de ces textes entendent contribuer à la sécurité alimentaire et nutritionnelle en proposant d’instituer une année internationale des camélidés en 2024 et une journée mondiale des abeilles, qui serait célébrée le 20 mai.

Le représentant de l’Équateur, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine (G77), était chargé de présenter 35 projets de résolution portant notamment sur le commerce; le système financier international; les technologies de l’information et des communications; la science, la technologie et l’innovation; l’éducation; la culture et le développement durable, tandis que sa collègue de la Slovénie a présenté celui qui milite pour une journée mondiale des abeilles.

La représentante slovène, Mme Darja Bavdaž Kuret, a souligné l’intérêt d’instituer une telle journée, qui pourrait contribuer à résoudre d’urgence le problème du déclin, à l’échelle mondiale, de la diversité des pollinisateurs.  Un problème qui résulte de certains facteurs induits en particulier par des activités humaines telles que les pratiques d’agriculture intensive, l’utilisation de pesticides et la pollution, sans oublier des maladies et les effets néfastes des changements climatiques.  Or cette situation pose des risques pour l’agriculture durable, les moyens de subsistance humains et l’approvisionnement en denrées alimentaires, a-t-elle précisé.

Plaidant en faveur de la protection des abeilles et d’autres pollinisateurs, la déléguée a expliqué qu’ils assurent, par leur action, la sécurité alimentaire, préviennent la famine et préservent l’environnement et la biodiversité.  Plus des trois quarts des plantes comestibles du monde dépendent de la pollinisation pour prospérer, affirme l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) qui précise que les pollinisateurs sont constitués de « 100 000 espèces d’insectes, d’oiseaux et de mammifères qui servent à la reproduction sexuelle de la plupart des plantes à fleurs du monde par le biais de la pollinisation ».

On estime à 577 milliards de dollars la valeur annuelle de la production agricole qui dépend de la pollinisation, a encore signalé la représentante de la Slovénie avant d’insister sur l’importance des abeilles qui contribuent aussi à la production alimentaire par le biais du miel, de la gelée royale et du pollen. 

Soucieux également de la sécurité alimentaire, et de la réduction de la pauvreté dans les zones arides, des objectifs qui dépendent fortement des camélidés, le délégué de l’Équateur, M. Andrés Cordova, parlant au nom du G77, a pour sa part expliqué l'intérêt d’une année internationale dédiée à ces animaux.  Il a souligné la nécessité de « sensibiliser le public et les gouvernements à l’importance économique et sociale des camélidés dans les communautés où sévissent la pauvreté extrême, l’insécurité alimentaire et la malnutrition ».

En ce sens, a-t-il ajouté, une année des camélidés contribuerait à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, particulièrement pour l’objectif 1 de développement durable, sur l’éradication de la pauvreté, le 2 relatif à la lutte contre la faim, l’objectif 5 sur l’autonomisation des femmes et le numéro 15 qui renvoie à la préservation, la restauration et l’exploitation durable des écosystèmes terrestres et des écosystèmes d’eau douce et des services connexes.

Les camélidés constituent le principal moyen de subsistance de millions de familles pauvres qui vivent dans les écosystèmes les plus hostiles du monde.  Il existe six espèces vivantes de camélidés, réparties sur les territoires de l’Afrique du Nord, de l’Asie centrale, de l’Asie du Sud-Ouest et de l’Amérique du Sud: le dromadaire, le chameau, le lama, l’alpaga, la vigogne et le guanaco, précise le projet de résolution.

Parmi les orientations contenues dans les nombreux autres projets de texte présentés aujourd’hui, les délégations de la Deuxième Commission entendent encourager les efforts de financement du développement, ceux qui visent l’élimination de la pauvreté, le développement urbain durable, le développement agricole doublé de la garantie de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, ou encore la mise en valeur des ressources humaines.

Au niveau de l’environnement, l’un des facteurs qui influent sur la réalisation du développement, tout effort est encouragé pour la réduction des risques de catastrophe, la sauvegarde du climat mondial, la lutte contre la désertification, la protection de la diversité biologique et la lutte contre les tempêtes de sable et de poussière.

Autre domaine d’action que les délégations de la Commission recommandent vivement aux États Membres d’approfondir: la coopération en faveur du développement, en particulier la coopération Sud-Sud et la coopération internationale en matière de lutte contre les flux financiers illicites.

La prochaine séance plénière de la Deuxième Commission aura lieu mercredi 8 novembre dans l’après-midi.  La Commission entendra la présentation d’autres projets de résolution avant d’adopter ceux pour lesquels les négociations seront terminées.

PRÉSENTATION DES PROJETS DE RÉSOLUTION

Les technologies de l’information et des communications au service du développement

Projet de résolution (A/C.2/72/L.5

Questions de politique macroéconomique 

a) Commerce international et développement (A/C.2/72/L.7 et A/C.2/72/L.17)

b) Système financier international et développement (A/C.2/72/L.19)

c) Soutenabilité de la dette extérieure et développement (A/C.2/72/L.15)

d) Produits de base (A/C.2/72/L.9)

e) Amélioration de l’accès aux services financiers pour le développement durable (A/C.2/72/L.10)

f) Promotion de la coopération internationale en matière de lutte contre les flux financiers illicites pour favoriser le développement durable (A/C.2/72/L.16)

Suivi et mise en œuvre des textes issus des Conférences internationales sur le financement du développement

Projet de résolution (A/C.2/72/L.18

Développement durable

Projet de résolution (A/C.2/72/L.8)

Projet de résolution (A/C.2/72/L.29)

Projet de résolution (A/C.2/72/L.32

a) Mise en œuvre d’Action 21, du Programme relatif à la poursuite de la mise en œuvre d’Action 21 et des textes issus du Sommet mondial pour le développement durable et de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (A/C.2/72/L.39)

b) Suivi et application des Modalités d’action accélérées des petits États insulaires en développement (Orientations de Samoa) et de la Stratégie de Maurice pour la poursuite de la mise en œuvre du Programme d’action pour le développement durable des petits États insulaires en développement (A/C.2/72/L.27)

c) Réduction des risques de catastrophe (A/C.2/72/L.14)

d) Sauvegarde du climat mondial pour les générations présentes et futures

(A/C.2/72/L.26)

e) Application de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification, en particulier en Afrique (A/C.2/72/L.37)

f) Convention sur la diversité biologique (A/C.2/72/L.34)

g) L’éducation au service du développement durable (A/C.2/72/L.24)

h) Harmonie avec la nature (A/C.2/72/L.38)

i) Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes à un coût abordable (A/C.2/72/L.3)

j) Lutte contre les tempêtes de sable et de poussière (A/C.2/72/L.4)

5. Application des décisions prises par la Conférence des Nations Unies sur les établissements humains et la Conférence des Nations Unies sur le logement et le développement urbain durable et renforcement du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat) (A/C.2/72/L.36)

Mondialisation et interdépendance 

a) Rôle de l’Organisation des Nations Unies dans la promotion du développement dans le cadre de la mondialisation et de l’interdépendance (A/C.2/72/L.11)

b) Science, technologie et innovation au service du développement (A/C.2/72/L.6)

c) Culture et développement durable (A/C.2/72/L.13)

d) Coopération pour le développement des pays à revenu intermédiaire (A/C.2/72/L.23)

Groupes de pays en situation particulière 

a) Suivi de la quatrième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés (A/C.2/72/L.31)

b) Suivi de la deuxième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral (A/C.2/72/L.35)

Élimination de la pauvreté et autres questions liées au développement

a) Activités relatives à la deuxième Décennie des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté (2008-2017) (A/C.2/72/L.22)

b) Participation des femmes au développement (A/C.2/72/L.21)

c) Mise en valeur des ressources humaines (A/C.2/72/L.20)

Activités opérationnelles de développement 

a) Activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies (A/C.2/72/L.41)

b) Coopération Sud-Sud pour le développement (A/C.2/72/L.43)

Développement agricole, sécurité alimentaire et nutrition

Projet de résolution (A/C.2/72/L.25

Souveraineté permanente du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe dans le Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles

Projet de résolution (A/C.2/72/L.40)  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: le Groupe des 77 et la Chine appellent à davantage de « précision » dans la gestion financière de la rénovation du siège de la CESAP, à Bangkok

Soixante-douzième session,
10 séance – matin
AG/AB/4250

Cinquième Commission: le Groupe des 77 et la Chine appellent à davantage de « précision » dans la gestion financière de la rénovation du siège de la CESAP, à Bangkok

La Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, a examiné, ce matin, le projet de rénovation du siège de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), à Bangkok, poussant le Groupe des 77 et la Chine à demander de la « précision » dans la gestion des dépenses et l’estimation des coûts.

Le projet « de mise aux normes parasismiques et de remplacement des équipements en fin de vie de la CESAP » a été approuvé en décembre 2016 par l’Assemblée générale.  Actuellement en phase de planification, il doit s’échelonner jusqu’en 2023.

Dans son rapport*, le Secrétaire général indique que le projet est « en bonne voie », les dépenses globales devant rester dans les limites des 40 millions de dollars et ne faire l’objet que de « révisions mineures ».  M. António Guterres recommande donc à l’Assemblée d’ouvrir, pour l’année 2018, un crédit de 4,1 millions de dollars, comprenant l’ajout d’un poste d’architecte chargé de l’aménagement de l’espace et d’un poste d’ingénieur en bâtiment, mécanique, électricité et plomberie, recruté sur le plan national.

Seul le dernier poste est justifié, tranche le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB), dans son rapport**.  Le CCQAB argue que les fonctions de liaison assignées au poste d’architecte pourraient être exercées par l’équipe de projet.  Il recommande donc une coupe d’environ 60 000 dollars, soit un crédit de 4,06 millions.  S’agissant des 750 000 dollars prévus pour 2017, le CCQAB note « avec préoccupation » que 250 000 dollars ont été budgétés « par erreur ».  Après calcul, il recommande une réduction de 82 500 dollars du plan des dépenses.

Il faut de « la précision » dans la planification et la gestion du budget, se sont impatientés le Groupe des 77 et la Chine qui ont demandé au Secrétaire général d’« affiner » la méthode de calcul des imprévus, en identifiant adéquatement les risques associés à chaque phase du projet.  Dans un souci de transparence, le Groupe des 77 et la Chine ont réclamé une présentation distincte des estimations et du coût de base du projet.

Le Groupe a salué les efforts visant à réaliser des économies et gains d’efficience, notamment le financement partiel d’un poste de coordonnateur de l’équipe de projet par le projet « Africa Hall » de la Commission économique pour l’Afrique (CEA).  Il a encouragé le Secrétaire général à réaliser davantage de synergies de ce type.  Il s’est déclaré « très optimiste » quant aux consultations en cours entre la CESAP et le Gouvernement de la Thaïlande pour trouver des locaux où le personnel de la Commission sera amené à travailler temporairement pendant la réalisation des travaux qui doivent être terminés « dans les temps impartis et conformément au plan des dépenses », a insisté le Groupe. 

Il a appelé à « accélérer les négociations finales » des contrats avec la société de conseil principale et le cabinet indépendant de gestion des risques.  Pour le Groupe des 77 et la Chine, le prochain rapport du Secrétaire général doit comporter des informations sur la méthode employée pour fixer le calendrier du projet, notamment des explications détaillées sur son éventuelle révision. 

La bonne gouvernance, la supervision, la rentabilité, la transparence et la responsabilité seront des facteurs clefs pour assurer le succès du projet, a souligné la Thaïlande qui a indiqué que son Ministère des affaires étrangères continuera à travailler en étroite collaboration avec la CESAP.  En tant que pays hôte, nous sommes ravis des progrès, a ajouté la Thaïlande, réaffirmant son intention de coopérer avec l’ONU tout au long de la planification et de la mise en œuvre du projet.  

Le Groupe des 77 et la Chine n’ont pas oublié de demander aux États de continuer de verser des contributions volontaires pour financer le projet de rénovation de la CESAP.

La Cinquième Commission tiendra une autre séance demain jeudi 2 novembre, à partir de 10 heures.  

*A/72/338

**A/72/7/Add.6

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

À une quasi-unanimité, l’Assemblée générale des Nations Unies réclame, une nouvelle fois, la levée du blocus américain contre Cuba

Soixante-douzième session,
38e & 39e séances plénières – matin & après-midi
AG/11967

À une quasi-unanimité, l’Assemblée générale des Nations Unies réclame, une nouvelle fois, la levée du blocus américain contre Cuba

L’Assemblée générale a réclamé, aujourd’hui, à une quasi-unanimité, la levée du blocus imposé depuis 1962 par les États-Unis à Cuba, en arguant qu’il contrevient à l’esprit de la Charte des Nations Unies, alors que le Président américain a durci en juin dernier les sanctions malgré le processus de normalisation des relations entre les deux pays engagé fin 2014.

La résolution* sur la « nécessité de lever le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba par les États-Unis » a été adoptée par 191 voix pour et 2 voix contre, celles des États-Unis et d’Israël.  Aux termes de ce texte, l’Assemblée exprime à nouveau la préoccupation des États Membres face aux « conséquences préjudiciables » de ces sanctions pour la population cubaine. 

Réaffirmant les principes de « l’égalité souveraine des États, de la non-intervention et de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures et de la liberté du commerce et de la navigation internationaux », la résolution « exhorte de nouveau tous les États à s’abstenir d’adopter ou d’appliquer des lois ou mesures » de ce type, « comme leur en font obligation la Charte des Nations Unies et le droit international ».

Ce texte, présenté pour la vingt-sixième année consécutive, avait pour la première fois été adopté par 191 voix pour et 2 abstentions en 2016, après le rétablissement des relations diplomatiques entre les États-Unis et Cuba fin 2014.  Cette année, les États-Unis ont de nouveau voté contre la résolution.

Justifiant cette volte-face, la représentante des États-Unis a rappelé que les Américains se sont choisi un nouveau Président, dont l’administration s’oppose à cette résolution par solidarité avec le peuple cubain, « privé de ses droits et libertés fondamentales ».  Ironisant sur la « pièce de théâtre politique » qui se joue chaque année à l’Assemblée générale, elle a accusé Cuba d’instrumentaliser, depuis 55 ans, ce débat pour mieux détourner l’attention des restrictions qu’il impose à son propre peuple.

En réponse à ces propos « irrespectueux et mensongers », le Ministre cubain des affaires étrangères, M. Bruno Eduardo Rodríguez Parrilla a dénoncé quant à lui le discours « hostile, digne de la pire époque de la guerre froide », que Donald Trump a prononcé en juin 2017 pour renforcer ce blocus, qui constitue une « violation flagrante, massive et systématique des droits humains des Cubains, une transgression du droit international et un acte génocidaire ».

Les délégations ont été nombreuses à déplorer le durcissement des sanctions, qui a douché les espoirs suscités par les jalons positifs posés par la précédente administration américaine en 2015 et 2016.  De Singapour à la Chine, en passant par le Mexique et le Panama, certaines se sont dites optimistes quant à une issue diplomatique à ce différend, par le biais d’un dialogue conduit sur une base juste et équitable.

Dénonçant les plus longues et injustes sanctions unilatérales jamais imposées à un pays dans l’histoire moderne, certains États Membres, dont ceux de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), ont rappelé que ce blocus n’a, à l’évidence, pas eu l’effet escompté mais créé au contraire un véritable élan de solidarité internationale autour de Cuba.  Solidarité illustrée aujourd’hui par la salve d’applaudissements qui a accueilli l’appel du Chef de la diplomatie cubaine à voter en faveur de la résolution.

M. Rodríguez Parrilla a rappelé que le blocus constitue l’obstacle le plus considérable au développement économique et social de son pays et à la mise en œuvre de son plan national, qui s’inscrit dans le droit fil du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Parmi les délégations à s’être inquiétées de ses effets négatifs prolongés sur la population cubaine, celle du Gabon, au nom du Groupe des États d’Afrique, a qualifié le blocus de « violation du droit au développement » du peuple cubain.

Pour le Mouvement des pays non alignés, les dégâts, directs et indirects, infligés par le blocus sont « énormes », touchant la santé publique, la nutrition et l’agriculture, ainsi que le secteur bancaire, le commerce, l’investissement et le tourisme.  Alors que plusieurs délégations ont salué la solidarité des médecins cubains dépêchés dans de nombreux pays en temps de crise, M. Rodríguez Parrilla a mis l’accent sur l’impossibilité pour La Havane de se procurer des articles médicaux auprès de compagnies états-uniennes en raison des sanctions commerciales en vigueur. 

« D’après les estimations officielles, le blocus aurait coûté directement et indirectement 125,8 milliards de dollars à l’économie cubaine entre le début des années 1960 et avril 2016 », indique le rapport**du Secrétaire général dont l’Assemblée générale était saisie aujourd’hui, une estimation fournie par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).

L’Assemblée générale reprendra ses travaux demain, à partir de 10 heures, pour examiner le rapport du Conseil des droits de l’homme.

*A/72/L.2

** A/72/94

NÉCESSITÉ DE LEVER LE BLOCUS ÉCONOMIQUE, COMMERCIAL ET FINANCIER IMPOSÉ À CUBA PAR LES ÉTATS-UNIS D’AMÉRIQUE

Rapport du Secrétaire général (A/72/94)

Projet de résolution (A/72/L.2)

Pour l’examen de cette question, l’Assemblée générale était saisie du rapport (A/72/94) dans lequel le Secrétaire général présente les réponses des gouvernements et des organes et organismes des Nations Unies sur la mise en œuvre de la résolution (71/5) relative à la levée du blocus contre Cuba, adoptée l’année dernière.

Déclarations

S’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a souligné l’importance pour ces pays de la question de la levée du blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba.  Les chefs d’État africains en ont débattu lors de la vingt-huitième session de l’Assemblée de l’Union africaine de janvier 2017 et ont appelé à lever ce blocus vieux de 55 ans.  Cela fait plus de 20 ans que la volonté de la communauté internationale s’exprime par la voix de l’Assemblée générale, qui a appelé à lever ce blocus, a rappelé le représentant, en estimant qu’il est très regrettable qu’après l’amélioration des relations bilatérales entre les États-Unis et Cuba constatée sous l’administration américaine précédente, le blocus ait été récemment renforcé.  Il s’agit d’un recul auquel il faut remédier au plus vite, a-t-il lancé.

Le Groupe des États d’Afrique est préoccupé des difficultés financières occasionnées à Cuba par ce blocus, en particulier pour les plus pauvres et les plus vulnérables, une situation qui rend la réalisation des objectifs de développement durable encore plus difficile et constitue donc un obstacle à la promesse de ne laisser personne de côté.  Ce blocus est une « violation du droit au développement » du peuple cubain, a tranché le représentant.  L’appel du Groupe à lever le blocus est lancé aussi à la lumière des nombreuses contributions positives de Cuba à la communauté internationale, en particulier sa lutte pour la liberté en Afrique ou plus récemment ses efforts pour atténuer les effets adverses des crises sanitaires sur le continent.  Une solution diplomatique et politique peut être trouvée à ce dossier, ce qui serait à l’avantage des États-Unis et de Cuba, a-t-il assuré en conclusion.

S’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. DIEGO FERNANDO MOREJÓN PAZMIÑO (Équateur) a regretté le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba par les États-Unis depuis 50 ans, et qui continue d’être pleinement appliqué et renforcé.  Il a rappelé les jalons positifs posés par la précédente administration américaine en 2015 et 2016 qui étaient néanmoins insuffisants pour mettre fin à l’impact de ce blocus mais allaient dans la bonne direction.

Le Groupe des 77 et de la Chine a ensuite regretté la nouvelle politique de l’actuel Président américain tendant au renforcement du blocus contre Cuba, y voyant un recul du processus de normalisation des relations entre les deux nations.  Il a réitéré l’attachement du Groupe aux buts et principes de la Charte, notamment ceux afférents à l’égalité souveraine des États, à la non-intervention et la non-ingérence dans leurs affaires internes, ainsi qu’à la liberté du commerce international et de la navigation.  Pour le Groupe, a dit M. Morejón Pazmiño, il est de la responsabilité de chaque État Membre de respecter scrupuleusement ces principes.  Toute politique ou mesure bafouant de tels principes, comme les sanctions économiques unilatérales prises contre Cuba, doivent être examinées en vue de leur abrogation, a-t-il ajouté.

Compte tenu de la durée du blocus, le Groupe a exprimé sa préoccupation quant aux effets négatifs prolongés que les sanctions économiques et les restrictions de voyage ont eus sur la population cubaine.  Ainsi, entre avril 2016 et juin 2017, l’impact du blocus sur le commerce extérieur cubain s’est chiffré à plus de quatre milliards de dollars, cependant que l’investissement étranger limité et les difficultés d’accès aux crédits de développement ont des conséquences humanitaires et que les réformes socioéconomiques lancées par le Gouvernement sont grevées par le blocus.  En cas de maintien des sanctions, il est à craindre qu’il devienne impossible pour Cuba de s’attaquer avec succès à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a prévenu le Groupe.

Le représentant a rappelé que pendant de nombreuses décennies, Cuba avait largement prêté assistance à d’autres pays, notamment sur le plan médical, comme en témoigne l’aide d’urgence fournie aux pays d’Afrique de l’Ouest touchées par le virus Ebola.  Le Groupe a donc réitéré son plein appui à la mise en œuvre des recommandations figurant dans la résolution 71/5 de l’Assemblée générale et appelé la communauté internationale à intensifier ses efforts pour mettre fin au blocus.

S’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a rappelé que c’est la troisième année consécutive que cette organisation sous-régionale demande la levée du blocus unilatéral imposé à Cuba.  Pour l’ASEAN, les différends entre États doivent se régler au moyen du dialogue et non par la confrontation et l’isolement.  Saluant le rétablissement des relations diplomatiques entre Cuba et les États-Unis, l’ASEAN a souligné que l’étape la plus importante, c’est pour Washington de lever le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba, de manière à améliorer la qualité et le niveau de vie des Cubains et à contribuer au développement socioéconomique du pays.  La levée du blocus va également participer des efforts de l’Assemblée générale pour mettre en œuvre de manière inclusive le programme de développement durable à l’horizon 2030, a ajouté M. Gafoor.

Prenant la parole au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), M. RUBEN ARMANDO ESCALANTE HASBUN (El Salvador) s’est félicité du début de normalisation des relations entre les États-Unis et Cuba, initié en 2015 et 2016, tout en regrettant que le blocus continue d’entraver le développement du peuple cubain.  Il a ensuite déploré la nouvelle politique de l’actuelle administration des États-Unis, qui a l’intention de renforcer ce blocus, infligeant un revers au processus de normalisation en cours, en violation de la lettre, de l’esprit et des objectifs de la Charte des Nations Unies et du droit international.

La CELAC, a dit le représentant, rejette à nouveau l’application de lois et mesures contraires au droit international, comme la loi Helms-Burton, y compris ses effets extraterritoriaux, et les poursuites visant les transactions financières internationales avec Cuba.  Le représentant a exhorté le Gouvernement américain à y mettre fin, soulignant que le Congrès des États-Unis a l’autorité de lever totalement le blocus et le Président celui d’en modifier substantiellement l’application. 

Le représentant a estimé que la restitution à Cuba du territoire occupé par la base navale de Guantanamo doit faire partie intégrante du processus de normalisation entre les deux pays, dans le respect du droit international.  En 2015 et 2016, l’adoption de la résolution annuelle de l’Assemblée générale par 191 voix pour a confirmé son caractère universel.  La CELAC a annoncé son intention de se prononcer une nouvelle fois pour la levée du blocus.

S’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a considéré que le blocus imposé à Cuba va à contre-courant des aspirations énoncées par les objectifs de développement durable.  La déléguée a rappelé que 73% des Américains et 63% des Cubains vivant aux États-Unis soutiennent la levée du blocus, avant de regretter la décision de la nouvelle administration américaine de durcir les sanctions contre Cuba alors que le processus de normalisation des relations bilatérales était déjà enclenché.  Pour la CARICOM, les progrès accomplis en 2015 et 2016 laissent entrevoir que Cuba et les États-Unis peuvent coexister dans le respect de leurs différences respectives et coopérer pour le bien des deux pays et de leurs peuples.  La Communauté s’est dite optimiste quant au fait qu’une solution diplomatique sera trouvée à ce différend perçu aujourd’hui comme « une relique de la guerre froide ».  C’est pour cette raison que les 14 États membres de la CARICOM voteront en faveur de la résolution d’aujourd’hui, a annoncé Mme King.

S’exprimant au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUE (Côte d’Ivoire) a noté que l’abstention de la délégation des États-Unis en 2016, lors du vote de cette résolution annuelle, avait fait souffler un vent d’espoir au sein de la communauté internationale.  Les États membres de l’OCI réaffirment aujourd’hui leur opposition au blocus économique, commercial et financier imposé par les États-Unis à Cuba il y a près de 60 ans, et qui, à l’évidence, « n’a pas eu l’effet escompté », a déclaré le représentant.  Bien au contraire, ce blocus, a-t-il argué, a créé une véritable solidarité internationale autour de Cuba, comme le laisse voir le dernier résultat du vote de la résolution annuelle sur la question en 2016, avec 191 voix pour et 2 abstentions.  L’OCI estime donc qu’il est temps de lever ce blocus afin de permettre à Cuba et à sa population de bénéficier pleinement des retombées de la mise en œuvre des objectifs de développement durable, qui entend « ne laisser personne de côté ».

Intervenant au nom du Mouvement des pays non alignés, M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) a rappelé que, depuis 26 ans, l’Assemblée générale exprime son appui sans faille au peuple et au Gouvernement cubains par un soutien massif à la résolution demandant la levée du blocus imposé par les États-Unis à ce pays souverain.  Ainsi, en 2016, 191 États Membres de l’ONU ont voté en faveur de ce texte et, cette année encore, « le Mouvement des non-alignés réitère à nouveau son opposition plein et entière à la promulgation et à l’imposition de mesures coercitives unilatérales en raison de leurs implications extraterritoriales et de leur caractère illégal ».  Il a réitéré l’appel au Gouvernement américain pour qu’il mette fin au blocus économique, commercial, financier, unilatéral et illégal imposé à Cuba depuis plus de 55 ans.  Outre qu’il enfreint le droit international, la Charte de l’ONU et les normes et principes régissant les relations pacifiques entre les États, le blocus constitue également une violation du droit de Cuba à pleinement interagir avec la communauté internationale. 

Le représentant a réaffirmé la position « historique » du Mouvement consistant à rejeter les mesures coercitives unilatérales, en particulier celles utilisées comme instruments de pression politique ou économique et financière contre les États, notamment dans le domaine du développement.  Une position réitérée le 20 septembre dernier par les Ministres des affaires étrangères des États membres du Mouvement dans la Déclaration politique de New York.  Pour le Mouvement, les dégâts, directs et indirects, infligés par le blocus sont « énormes », touchant la santé publique, la nutrition et l’agriculture, ainsi que le secteur bancaire, le commerce, l’investissement et le tourisme.  Un blocus qui dénie en outre l’accès de Cuba aux marchés, à l’aide internationale des institutions financières internationales et aux transferts de technologies.  Le manque à gagner pour Cuba se chiffrerait à 822,2 milliards de dollars « si l’on prend en compte la dépréciation du dollar par rapport au prix de l’or sur le marché international ».

Toutefois, le délégué a considéré que le rétablissement de relations diplomatiques entre les États-Unis et Cuba représente un premier pas positif dans le processus de normalisation de leurs relations bilatérales, tout en notant que la nouvelle politique américaine, établie en juin 2017 par le président américain, va dans le sens d’un renforcement du blocus.  D’autre part, les règles fixées le 15 janvier 2015 par les Départements du commerce et du trésor américains, si elles allaient aussi dans la bonne voie, ont une portée limitée et ne modifient que quelques aspects liés à l’application du blocus.  Il a aussi souligné que la décision du Président Barack Obama de notifier le Congrès de sa décision de radier Cuba de la liste des États qui appuient le terrorisme, « liste unilatérale et illégale », n’a pas non plus mené à un assouplissement des interdictions et restrictions fixées par les lois américaines liées au blocus. 

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a déclaré que, depuis 55 ans, Cuba se sert de ce débat à l’Assemblée générale pour détourner l’attention sur les restrictions imposées à son propre peuple.  Même pendant la crise des missiles de 1962, lorsque la dictature de Castro a autorisé l’Union soviétique à installer secrètement des missiles nucléaires sur son territoire, le régime cubain et ses alliés soviétiques ont clamé que la menace réelle à la paix n’était pas les missiles, mais la découverte de ces missiles par les États-Unis.  Aujourd’hui, a-t-elle lancé, le crime réel est la répression constante du Gouvernement cubain contre son propre peuple et son échec à répondre aux exigences minimales d’une société libre et juste.  Mme Haley a affirmé que la réponse des États-Unis a été d’être solidaire de ce peuple et de son droit à déterminer son avenir.  Chaque année, a-t-elle martelé, cette Assemblée perd son temps avec cette résolution, mais les États-Unis ne se laisseront pas distraire et voteront contre, pour la vingt-cinquième fois en 26 ans.

Mme Haley est revenue sur l’abstention de son pays l’an dernier, au prétexte que la poursuite de l’embargo n’isolerait pas Cuba mais les États-Unis.  Il est évident, a dit l’ambassadrice, que certains ne comprendront pas cette nouvelle position: comment nous avons pu accepter passivement cette résolution alors que nous nous y opposons énergiquement cette année.  Mais le peuple américain s’est exprimé et a choisi un nouveau Président, a-t-elle expliqué, et tant que le peuple cubain sera privé de ses droits et libertés fondamentales, nous ne craindrons pas l’isolement au sein de cette Assemblée ou ailleurs, a assuré Mme Haley.  « Soyons honnêtes », a lancé la représentante, cette Assemblée n’a pas le pouvoir de mettre fin à l’embargo, inscrit dans la législation américaine et qui ne peut être modifiée que par le Congrès américain.  Ce qui se joue à l’Assemblée aujourd’hui est en fait une pièce de théâtre politique, comme d’habitude, a-t-elle ironisé.  S’adressant aux Cubains, Mme Haley a dit que les Américains appuient leur rêve de vivre dans un pays où ils peuvent s’exprimer librement, avoir accès à Internet sans censure, nourrir leur famille et choisir leurs responsables politiques.

Si nombre d’entre vous ont placé des espoirs dans le rétablissement des relations diplomatiques entre les États-Unis et Cuba, a-t-elle continué, elles ne changeront pas.  Ce qu’il faut savoir, c’est que le Gouvernement cubain a réagi par une hausse des détentions politiques, du harcèlement et de la violence contre les défenseurs de la liberté politique et économique en 2016.  Votre gouvernement, a-t-elle lancé en s’adressant toujours au peuple cubain, ne veut pas que vous bénéficiez des gains économiques d’une levée de l’embargo.  La Havane a exporté cette idéologie au Venezuela, laquelle n’a fait qu’apprendre au régime de Maduro comment museler les journalistes et l’opposition et appauvrir le peuple.  Aujourd’hui, votre gouvernement s’emploie à choisir un successeur à Castro, essayant de vous faire croire que votre voix compte alors que le résultat est déjà décidé d’avance, a assuré l’ambassadrice, pour qui l’avenir de Cuba est entre les mains de « dictateurs ».

En conclusion, elle a déclaré que les États-Unis s’opposent à cette résolution par solidarité avec le peuple cubain.  « Nous sommes peut-être seuls aujourd’hui, mais quand le jour de la liberté viendra pour le peuple cubain, et il viendra, nous nous réjouirons avec lui comme seul un peuple libre peut le faire. »

Mme NGUYEN PHUONG NGA (Viet Nam) a estimé que le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba était « la plus longue et la plus injuste des sanctions unilatérales jamais imposées à un pays dans l’histoire moderne ».  Elle a salué le fait qu’en dépit des difficultés entraînées par le blocus, le Gouvernement cubain ait toujours répondu aux situations d’urgence en envoyant des médecins, des médicaments et des équipements dans de nombreux pays victimes d’épidémies ou de catastrophes naturelles.  Le rétablissement des relations diplomatiques entre Cuba et les États-Unis en 2015 avait suscité l’espoir d’une nouvelle ère entre les deux pays, a observé la déléguée.  Mais les mesures récemment annoncées par le Gouvernement américain, qui visent à renforcer les sanctions contre Cuba, constituent une volte-face, a-t-elle constaté.  « Une levée immédiate du blocus bénéficierait à Cuba et aux États-Unis et contribuerait à la paix et au développement dans la région et le monde », a argué Mme Phuong Nga en conclusion.

M. JULIO CÉSAR ARRIOLA (Paraguay) s’est prononcé en faveur de la résolution demandant la levée du blocus, manifestant son rejet des mesures coercitives qui contreviennent au droit international et à la Charte des Nations Unies.  Il s’est dit convaincu que le dialogue et la négociation directe et de bonne foi entre les parties sont les voies adéquates pour résoudre les différends entre elles et trouver des solutions durables et justes.  Le représentant a prié les États-Unis et Cuba de ne pas faire machine arrière dans la normalisation de leurs relations diplomatiques et de poursuivre leurs efforts en vue de mettre un terme à ce blocus de longue date et d’ouvrir une nouvelle étape de relations basées sur la confiance, le respect et le développement mutuels.

M. SUDIP BANDYOPADHYAY (Inde) a rappelé que, l’an dernier, l’Assemblée a voté par 191 voix pour la levée de l’embargo et qu’elle a toujours rejeté l’application de lois et de mesures ayant des effets extraterritoriaux ainsi que toutes les autres mesures coercitives unilatérales qui entravent le progrès et la prospérité des peuples.  La persistance de cet embargo rejeté par l’opinion internationale porte atteinte au multilatéralisme et à la crédibilité même des Nations Unies, a poursuivi le représentant.  Il a expliqué que les embargos empêchent la pleine réalisation du développement économique et social du pays touché, en particulier pour les enfants et les femmes.  Ils constituent également une entrave à la pleine jouissance des droits de l’homme, dont les droits au développement, à la nourriture, aux soins médicaux et aux services sociaux.  Le rapport du Secrétaire général, comme les précédents, démontre que l’embargo, en particulier par ses effets extraterritoriaux, a affecté le peuple cubain et les efforts de développement en cours dans le pays.  En dépit de ces conditions adverses, le savoir-faire cubain en matière de santé lui a permis de répondre rapidement et efficacement à l’appel lancé par l’Assemblée il y a trois ans pour répondre à la crise posée par le virus Ebola en Afrique, a rappelé le représentant.  M. Bandyopadhyay a estimé que la communauté internationale doit redoubler d’efforts pour promouvoir un environnement libre de sanctions et d’embargos.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a relevé que le rapport du Secrétaire général détaille tous les aspects de l’impact dévastateur du blocus américain imposé à Cuba.  Il a cité à cet égard l’ex-Président sud-africain, Nelson Mandela, pour qui Cuba était un pays exemplaire et un modèle de solidarité internationale et d’assistance à autrui.  Le représentant a fustigé les donneurs de leçons de démocratie qui ourdissent des coups d’État et s’ingèrent dans les processus politiques d’autres pays.  Il s’est élevé contre celui qui administre une prison extraterritoriale à Guantanamo et tient un discours d’exceptionnalisme dangereux pour le monde entier.  Selon lui, le blocus persiste dans une impunité totale, alors que Cuba a fait preuve d’une « solidarité incroyable » avec la Bolivie mais aussi avec les États d’Afrique de l’Ouest lors de l’épidémie du virus Ebola.  Le délégué a donc exhorté à la levée immédiate du blocus.

M. IHAB MOUSTAFA AWAD MOUSTAFA (Égypte) a déploré le blocus imposé par les États-Unis à Cuba, et ses effets néfastes multiples sur les conditions de vie de sa population.  Rappelant l’engagement de la communauté internationale à « ne laisser personne de côté », il a appelé à la levée immédiate des mesures coercitives unilatérales imposées à Cuba depuis les années 1960 et à la normalisation des relations entre les États-Unis et ce pays.     

M. SABRI BOUKADOUM (Algérie) a rappelé que le processus de normalisation des relations entre les États-Unis et Cuba avait pu laisser espérer une levée du blocus, qui a malheureusement été renforcé.  Ces sanctions injustifiées alimentent les souffrances du peuple cubain, entravant son développement économique et remettant en cause ses efforts de développement durable, a-t-il dénoncé.  L’Algérie, a rappelé son représentant, a toujours affirmé que Cuba, comme tous les États Membres des Nations Unies, a le droit d’exercer sa liberté de commerce et de navigation, et soutenu ce pays ami dans des périodes difficiles de son histoire.  Le représentant a salué l’engagement et le savoir-faire des médecins cubains, qui se sont illustrés par le passé en dehors de leurs frontières, récemment pour lutter contre le virus Ebola en Afrique de l’Ouest.  Il est important de s’appuyer sur cet élan et sur les jalons posés par la reprise des relations entre les États-Unis et Cuba, a préconisé le délégué, pour ouvrir la voie au rétablissement complet des relations diplomatiques et lever enfin ce blocus.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a expliqué que la position de son Gouvernement n’a pas changé et qu’il faut lever immédiatement le blocus imposé à Cuba par les États-Unis.  Son maintien, a-t-il avancé, est une relique du passé et entrave le développement socioéconomique de Cuba et offre le meilleur exemple d’une politique contreproductive et illogique qui fait des sanctions une norme.  Cette politique, a accusé le représentant, a un effet dévastateur sur les capacités de Cuba à réaliser les objectifs du développement durable.  Notant le revirement notable des États-Unis qu’avait été son abstention l’an dernier lors de la mise à voix de la résolution annuelle de l’Assemblée générale, le délégué a déploré un nouveau changement de position de l’administration américaine actuelle.  Aujourd’hui, nous avons encore une fois entendu une rhétorique belliqueuse datant de la guerre froide, a-t-il déploré, dénonçant les « prétextes fantaisistes » invoqués.  Il a annoncé qu’à l’évidence, il votera en faveur de la résolution.  

Mme MARÍA EMMA MEJÍA VÉLEZ (Colombie) a affirmé que le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba est contraire au droit international et à l’esprit et la lettre de la Charte.  Depuis l’adoption, en novembre 1992, de la résolution 47/19 de l’Assemblée générale, la Colombie, à l’instar de tous les États d’Amérique latine et des Caraïbes, ainsi que de la majorité des États Membres des Nations Unies, a voté systématiquement en faveur de la résolution annuelle, qui a recueilli 191 voix en 2016, démontrant qu’il importe de mettre fin à une politique menée depuis plus de 50 ans.  La Colombie a saisi l’occasion pour réaffirmer sa détermination à respecter le droit international et les principes d’indépendance politique, d’autodétermination des peuples, de non-intervention et de non-ingérence dans les affaires internes d’autres nations.

M. JERRY MATJILA (Afrique du Sud) a pris note du rapport du Secrétaire général, qui dresse un état des lieux des effets adverses infligés à Cuba par le maintien du blocus.  Il a fait part de sa déception de voir la nouvelle administration américaine revenir sur les mesures prises par la précédente, exhortant la communauté internationale à agir de concert afin de « libérer Cuba » d’une mesure injuste qui ne devrait plus avoir cours de nos jours.  Ce blocus sape en effet les efforts réels déployés par Cuba pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a argué le représentant.  M. Matjila a mis l’accent sur les relations de son pays avec Cuba, exemple de coopération Sud-Sud mutuellement bénéfique.  Dénonçant les effets extraterritoriaux entraînés par le blocus, il a par exemple expliqué que l’Afrique du Sud n’a pas les mains libres pour exporter ses produits à Cuba, ce qui a pour conséquence d’entraver sa liberté de commerce.  Le délégué a en conclusion appelé une fois de plus la communauté internationale à promouvoir des relations transparentes entre les deux pays et à s’unir pour obtenir la levée du blocus.

M. WU HAITAO (Chine) a affirmé que la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 est essentielle et que tous les pays doivent pouvoir y contribuer.  Dans ce contexte, le blocus imposé à Cuba doit cesser immédiatement, a exhorté le représentant.  Depuis 25 ans, l’Assemblée adopte à la majorité la résolution l’exigeant, mais ce texte n’a jamais été mis en œuvre et le blocus reste en place.  Celui-ci, a poursuivi le représentant, viole les principes de la Charte des Nations Unies, empêche Cuba d’avancer sur la voie de l’élimination de la pauvreté et entrave le commerce entre Cuba et des pays tiers.  La Chine, a rappelé son représentant, a toujours été opposée aux sanctions unilatérales, quelle qu’en soit la forme.  Selon lui, le dialogue sur une base juste et équitable est la meilleure manière de résoudre nos différends.  Aussi a-t-il espéré que les États-Unis et Cuba continueront à faire des progrès sur la voie de la normalisation de leurs relations.  La levée du blocus irait dans le sens des intérêts des deux pays, ainsi que de la région et de la communauté internationale dans son ensemble.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a indiqué que la croissance économique régionale, le développement durable et la résolution pacifique des différends sont des preuves de respect mutuel et des éléments essentiels du bon voisinage.  C’est dans cette perspective que le Mexique a pleinement appuyé le processus de normalisation des relations entre Cuba et les États-Unis, a rappelé le représentant.  Il a rejeté toutes les mesures unilatérales prises contre Cuba, tout particulièrement le blocus, dans la mesure où celui-ci contrevient au droit international et aux principes fondamentaux qui sous-tendent les liens d’amitié et la coopération interétatiques.  Le représentant a vivement exhorté les Gouvernements américain et cubain à s’engager dans un dialogue, dans le respect mutuel et la reconnaissance de leurs souverainetés respectives.

Mme LAURA ELENA FLORES HERRERA (Panama) a réitéré la position de son pays en faveur de la résolution présentée aujourd’hui et de la levée du blocus, convaincue que celle-ci est nécessaire pour permettre le développement du peuple cubain.  Le Panama s’est également déclaré favorable à la reprise du dialogue entre les États-Unis et Cuba, qui représente une opportunité pour avancer vers un programme commun.  Le Panama a réaffirmé son engagement en faveur du multilatéralisme, seul moyen légitime de trouver une solution aux différends entre États.

M. BRUNO EDUARDO RODRÍGUEZ PARRILLA, Ministre des affaires étrangères de Cuba, a condamné les déclarations « irrespectueuses et mensongères » de l’ambassadrice des États-Unis contre Cuba et son peuple.  Selon lui, les responsables d’un pays où les droits de l’homme sont violés et d’un empire qui mène des guerres n’ont pas la légitimité de critiquer le peuple d’un petit pays.  La représentante, a-t-il accusé, a menti en prononçant une phrase prétendument attribuée à une source cubaine lors de la crise des missiles, sans la citer, « donnant plutôt l’impression qu’il s’agissait de l’un de ces tweets qui prolifèrent dans son pays », a ironisé le Ministre.  La politique annoncée par le Président Trump n’est pas nouvelle, elle est ancrée dans le passé, a poursuivi M. Rodríguez Parrilla.  Évoquant la récente déclassification des archives sur l’assassinat du Président J. F. Kennedy, il a conseillé à l’ambassadrice de lire un livre écrit par un agent de la CIA sur les moyens d’assassiner Castro, citant plusieurs opérations montées au fil du temps par les États-Unis contre Cuba.

« C’est Alice au pays des merveilles dans la déclaration de l’ambassadrice: d’abord on prend des déclarations puis on procède au jugement. »  Tout en notant que Mme Haley avait bien reconnu l’isolement total des États-Unis sur cette question, le délégué cubain a toutefois assuré qu’elle sous-estime la force d’une idée juste.  Lorsque Raul Castro et Barack Obama ont surpris le monde le 17 décembre 2014, le Président des États-Unis est allé jusqu’à déclarer que le blocus était un fiasco, a rappelé le Ministre, sans toutefois reconnaître qu’il constituait une violation flagrante, massive et systématique des droits humains des Cubains, une transgression du droit international et un acte génocidaire.  Les États-Unis, a poursuivi le Ministre, se sont abstenus en 2016 lors du vote sur cette résolution, « ce dont vient de se moquer l’ambassadrice, mais le blocus a été maintenu au cours de ces deux années, même si l’administration Obama a adopté quelques mesures visant à en assouplir l’application ».

Le 16 juin 2017, Donald Trump a décidé de renforcer le blocus, prétextant des violations des droits de l’homme à Cuba, dans un discours « hostile, digne de la pire époque de la guerre froide », a dénoncé M. Rodríguez Parrilla.  En outre, l’occupant de la Maison blanche ignore la volonté des électeurs américains et cubano-américains favorables à la levée du blocus.  Le Mémorandum présidentiel de Donald Trump de juin dernier comprend, entre autres mesures, de nouvelles prohibitions applicables aux relations économiques, commerciales et financières des sociétés états-uniennes désireuses de faire des affaires avec des entreprises cubaines.  Ce Mémorandum restreint en outre la liberté de déplacement des Américains et a réitéré qu’il ne lèverait pas le blocus tant que Cuba ne mènerait pas de changements intérieurs.  En outre, arguant de problèmes de santé de quelques diplomates en poste à La Havane et en l’absence de la moindre preuve, l’administration Trump a récemment adopté de nouvelles mesures de rétorsion contre Cuba, qui ne font qu’aggraver le blocus et porter atteinte aux relations bilatérales entre nos deux pays, s’est élevé le chef de la diplomatie cubaine.  En expulsant sans justification le personnel du Consulat général de Cuba à Washington, « le seul aux États-Unis », a poursuivi le Ministre, l’administration Trump a restreint gravement ses capacités à servir les voyageurs états-uniens et les résidents cubains qui ont le droit de se rendre dans leur pays.  Ella a aussi réduit arbitrairement le personnel de l’ambassade, ce qui a eu pour conséquence la fermeture du bureau économico-commercial, dans le but de priver d’interlocuteurs les entreprises américaines qui souhaitent explorer les possibilités d’affaires existant encore dans le cadre restreint du blocus.

Sous des salves d’applaudissements, le Ministre a repris à son compte ce qu’a dit le Président Raul Castro Ruz le 14 juillet dernier: « Cuba est décidée à continuer de négocier avec les États-Unis sur les questions bilatérales en souffrance, à condition que ce soit sur les bases d’égalité et de respect de la souveraineté et de l’indépendance de notre pays.  Qu’on ne s’attende pas à ce que Cuba fasse des concessions sur des points qui relèvent essentiellement de sa souveraineté et de son indépendance ».

Puis M. Rodríguez Parrilla a présenté à l’Assemblée le projet de résolution qui prend cette année une résonance particulière, compte tenu du recul qu’impliquent les actions de la nouvelle administration des États-Unis.  Avant de chiffrer les coûts économiques, il a rappelé que le blocus constitue le plus grand obstacle au développement économique et social de son pays et à la mise en œuvre de son plan national, qui s’inscrit dans le droit fil du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Selon lui, Mme Haley a également oublié de dire que le blocus constitue une violation flagrante, massive et systématique des droits humains des Cubains, et s’avère un acte de génocide selon la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948.  C’est aussi un obstacle à la coopération humanitaire que Cuba apporte à 80 pays du Sud, a-t-il soutenu.  Les dommages humains que cette politique a causés sont incalculables et l’émigration cubaine souffre également de discrimination et de préjugés, a souligné le Ministre.  Il a mentionné l’exemple de Medicuba, l’entreprise cubaine chargée de l’import-export d’articles médicaux, qui s’est adressée en vain à 18 compagnies états-uniennes à des fins d’achat, lesquelles n’ont pas répondu ou ont refusé au motif de sanctions commerciales imposées par le Département du trésor américain.

Le Ministre des affaires étrangères de Cuba est revenu sur les propos « inacceptables » de l’ambassadrice sur le Gouvernement du Venezuela, qui a « insulté son peuple ».  Pour lui, les États-Unis semblent être destinés par la providence à imposer des fléaux à l’Amérique au nom de la liberté, a-t-il dit, en citant Simon Bolivar, le Libérateur de l’Amérique du Sud.  Le peuple cubain ne renoncera jamais à sa décision de bâtir une nation souveraine, indépendante, socialiste, démocratique, prospère et durable.  Assurant que son peuple suivait ce débat avec espoir, le chef de la diplomatie cubaine a demandé aux États Membres, de nouveau sous les applaudissements de l’Assemblée générale, de voter en faveur du projet de résolution A/72/L.2.

Examen du projet de résolution A/72/L.2

Explications de vote avant le vote

La représentante des États-Unis a souhaité tout le bien du monde au peuple cubain, arguant que le problème est le Gouvernement de ce pays qui accuse les États-Unis de ses propres manquements envers sa population.  La situation économique du pays ne résulte pas du blocus américain, mais bien des politiques gouvernementales de La Havane.  Tant que les autorités cubaines n’auront pas ouvert l’accès à Internet et garanti les droits fondamentaux de sa population, le blocus sera maintenu, a-t-elle assuré.  Il continue aussi sa politique de harcèlement, de détention arbitraire et ses pratiques policières et de musellement de toute voix dissidente.  Les États-Unis continueront d’appuyer ce peuple dans sa quête de démocratie, a déclaré la représentante sous les huées de l’Assemblée.

La représentante du Nicaragua a réaffirmé son amitié et sa solidarité avec le peuple de José Marti, de Fidel et de Raul Castro qui a appris aux peuples d’Amérique latine et des Caraïbes et du monde ce que veut dire le terme de solidarité.  Elle a ensuite déploré le recul soudain des États-Unis, juste après les progrès extraordinaires accomplis grâce à la diligence du Président Obama pour progresser vers une levée définitive du blocus.  Par ailleurs, il faut rendre au peuple cubain son territoire légitime de Guantanamo, a réclamé le Nicaragua, pour qui un jour viendra où le blocus inique imposé par l’impérialisme sera vaincu.

Explications de vote après le vote 

La représentante de l’Estonie, au nom de l’Union européenne, a estimé que le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba par les États-Unis avait eu des effets adverses sur la vie des Cubains et sur les efforts de relèvement entrepris dans le pays au lendemain du passage de l’ouragan Irma.  Alors que le commerce extérieur et les investissements étrangers joueront un rôle crucial pour mettre le pays sur la voie d’une croissance durable, la levée du blocus pourrait faciliter la relance de l’économie cubaine.  L’Union a donc regretté, par la voix de son représentant, l’intention de la nouvelle administration américaine de restreindre de nouveau ses relations avec Cuba.  Au-delà de l’impact négatif du blocus sur les Cubains ordinaires, des sanctions unilatérales et autres mesures administratives et judiciaires unilatérales affectent aussi négativement les intérêts économiques de l’UE.  « Nous ne pouvons accepter que des mesures unilatérales entravent nos relations économiques et commerciales avec Cuba », a tranché la déléguée.  C’est en ce sens que le Conseil des ministres de l’UE a adopté une règle et une action communes afin de protéger les citoyens de l’Union, les hommes d’affaires et les organisations non gouvernementales basées, œuvrant ou faisant des affaires à Cuba.

L’UE célèbre aujourd’hui le début de la mise en œuvre provisoire de l’Accord sur le dialogue politique et la coopération avec Cuba.  La déléguée a précisé que ce dialogue et cette coopération seront également renforcés dans des domaines de désaccord avec Cuba, comme sur la question des droits de l’homme.  Elle a invité Cuba à accorder à tous ses citoyens les droits civils, politiques, économiques et les libertés, dont celles d’assemblée, d’expression et de libre accès à l’information.  L’Union a également invité Cuba à ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, souhaitant qu’à la suite du Rapporteur spécial sur la traite des personnes, d’autres rapporteurs spéciaux puissent se rendre dans ce pays.  L’Union a également plaidé pour des réformes socioéconomiques prenant en compte les principales préoccupations de la population cubaine.

Le représentant de la République populaire démocratique de Corée a voté en faveur de la résolution car le blocus enfreint les principes de la Charte relatifs à la souveraineté, aux crimes contre l’humanité, aux droits de l’homme et à la civilisation, plongeant le monde dans une sorte d’obscurantisme médiéval.  Les relations diplomatiques ont été rétablies entre Cuba et les États-Unis mais rien n’a changé dans les sanctions économiques et la politique hostile à l’égard de La Havane.  Elle a rappelé que depuis 25 ans, des résolutions sont adoptées par la communauté internationale, démontrant sur cette question une unité que les États-Unis s’obstinent à ignorer.  La RPDC a ensuite condamné l’hypocrisie de ce pays.  Cette adoption, encore une fois à une majorité écrasante, est une condamnation de la politique « America First », au nom de laquelle des sanctions ont été prises contre la RPDC pour ses essais nucléaires. 

L’Argentine a rappelé sa position de toujours qui consiste à appeler, d’urgence, à la levée du blocus économique, commercial et financier des États-Unis contre Cuba, lequel est contraire au droit international et aux principes d’égalité souveraine entre les États, de non-intervention dans les affaires intérieures, de la liberté de commerce et de navigation et de résolution pacifique des différends.  Le représentant a en particulier regretté le changement de politique du nouveau Gouvernement américain et exigé l’abolition des lois de ce pays à l’encontre de Cuba.

« Nous savons tous que la question des sanctions unilatérales contre Cuba a été réglée depuis longtemps », a déclaré le représentant du Kenya.  L’an dernier, dans cette même salle, les États-Unis avaient reconnu que ces sanctions devaient finalement être levées », a-t-il rappelé.  « La délégation américaine avait estimé qu'en effet, le temps de mettre fin aux sanctions est passé depuis longtemps », a poursuivi le représentant.  Selon lui, il faut laisser le peuple de Cuba être libre de jouir des mêmes libertés sociales, économiques et politiques sans entrave que les autres citoyens du monde.  « Ne laissons pas ces sanctions devenir l’instrument qui marginaliserait Cuba ».  C’est pour cette raison que le Kenya votera en faveur de la résolution, a confirmé le représentant.

Le représentant de la République arabe syrienne a estimé que le résultat du vote, écrasant, montre l’obstination des États-Unis à mettre en œuvre des mesures barbares et injustes contre les États qui défendent légitimement tant leur indépendance que leur souveraineté nationale.  La nouvelle Administration américaine prouve encore une fois que ses désirs d’hégémonie n’ont nullement changé, a-t-il accusé.  Les mesures coercitives unilatérales sont un obstacle majeur à la réalisation des objectifs de développement durable, aux échanges commerciaux et aux droits consacrés dans les instruments internationaux.  L’ambassadeur syrien a dit que ces mesures offrent à l’extrémisme et au terrorisme un prétexte pour prospérer et s’étendre.  Il a appelé à la mise en œuvre d’un mécanisme efficace pour faire cesser ce type de mesures et qui tiendrait pour responsables de leurs actes les États qui y recourent.  Le délégué a donc exhorté à la levée du blocus contre Cuba et à la cessation des mesures coercitives contre des pays comme la République arabe syrienne, qui constituent une violation flagrante et massive des droits de l’homme.

Le représentant de la République islamique d’Iran a considéré le blocus comme contraire à la Charte des Nations Unies qui préconise la coopération et l’esprit de dialogue.  Compte tenu des souffrances occasionnées par le blocus économique, commercial, financier et inhumain, il importe d’y mettre fin immédiatement, a demandé le représentant, qui a évoqué la sympathie croissante pour la cause cubaine partout dans le monde.  Il a noté qu’on continue de prendre pour cible des populations sans défense dans un certain nombre de pays en développement assujettis à ce type de sanctions.  L’Iran, qui reste opposé à l’imposition de mesures coercitives unilatérales contre un pays donné, a appelé à l’application de la résolution adoptée ce jour.

Le représentant d’Angola a indiqué qu’il avait voté en faveur de la résolution, estimant que le blocus est une pratique rétrograde qui inflige des souffrances inutiles.  Il a lancé un appel aux États-Unis pour y mettre fin et laisser Cuba libre de ses propres choix et se développer.  L’imposition d’amendes aux institutions ne respectant pas les mesures prises à l’endroit de Cuba constitue également une entrave au développement, entraînant des incidences négatives sur le bien-être de la population cubaine et d’autres pays.  Le délégué a salué les efforts du Secrétaire général visant à mettre fin au blocus et réitéré son soutien indéfectible aux recommandations de l’Assemblée générale dans ce contexte.  La communauté internationale doit de son côté redoubler d’efforts pour rapprocher les deux pays.  Les progrès accomplis en 2015 et 2016 ont bien prouvé que les relations peuvent revenir à la normale, a-t-il conclu.

Le représentant de la République démocratique populaire lao a voté en faveur de la résolution pour réaffirmer sa position quant à l’imposition du blocus unilatéral qui, avec ses implications extraterritoriales, n’a fait qu’entraver le développement socioéconomique d’une nation.  Il est en outre contraire aux principes et buts de la Charte et à l’égalité souveraine des États, a-t-il ajouté.

Le Costa Rica a mis l’accent sur le tournant historique et significatif pris en 2014 dans le processus d’amélioration des relations bilatérales entres les États-Unis et Cuba, avant d’exhorter les deux parties à préserver les accords conclus et à entamer un dialogue pour que le blocus qui perdure depuis plus de 55 ans se transforme en une rencontre fraternelle de leurs peuples dans tous les domaines de la coopération économique, sociale, technique et politique.  Le délégué a réitéré son rejet des mesures unilatérales et extraterritoriales qu’un État donné impose à un autre, y compris par le biais de ses propres lois et ordonnances à des pays tiers.  Après avoir énuméré les nouveaux jalons posés depuis 2015 dans le raffermissement des relations entre le Costa Rica et Cuba, son représentant a déclaré que « nous vivons dans un monde interconnecté où la solidarité et le respect doivent être les bases de nos échanges », ajoutant que nous ne pouvons confronter les problèmes actuels en nous servant d’outils du passé, surtout si ceux-ci se sont avérés inefficaces.

Le représentant de l’Indonésie a jugé qu’après plus d’un demi-siècle, nous constatons encore les effets négatifs du blocus contre Cuba, un pays qui n’a pas été en mesure de construire des infrastructures adéquates dans plusieurs secteurs.  Le délégué s’est fait l’écho de la majorité des États Membres en votant en faveur de la résolution car le blocus contrevient à la Charte et aux principes de non-ingérence dans les affaires intérieures des pays ainsi qu’à l’esprit du Programme à l’horizon 2030. 

Le représentant de la Namibie a rappelé que lorsque l’ouragan Irma a frappé les Caraïbes en septembre dernier, Cuba faisait face pour la première fois depuis 1937 à un ouragan de catégorie 5.  Dans ce contexte, le blocus contre Cuba affectera gravement le relèvement de l’île, a-t-il prédit.  La réponse humanitaire naturelle devrait être de lever le blocus pour permettre aux Cubains de reconstruire leur pays.  L’adoption de cette résolution en 2016, avec l’abstention des États-Unis et d’Israël, pour la première fois, a été une journée historique, a rappelé le délégué.  Nous étions encouragés par cette avancée ainsi que par l’amélioration des relations en début d’année.  Mais nous avons été découragés par l’annonce, le 17 juin 2017 par le Président Trump, d’une directive établissant de nouvelles mesures de renforcement du blocus.  « Cette décision remet en question les progrès enregistrés par l’ancienne administration et marque un recul dans les relations bilatérales entre les deux nations », a regretté le représentant, qui a exhorté les États-Unis à réexaminer leur position.

La représentante du Myanmar a constaté que la résolution avait été adoptée par une majorité écrasante, preuve s’il en est, de notre ferme opposition aux mesures coercitives unilatérales et au blocus imposé par les États-Unis à l’encontre de Cuba.  En tant que pays sous le coup de sanctions unilatérales, le Myanmar a dit qu’il en mesure tout à fait les répercussions sur les pays en développement, notamment sur les populations pauvres et vulnérables.  Il a encouragé, en conclusion, à remplacer le blocus et les mesures coercitives par le dialogue et la coopération.

La représentante du Bélarus a voté en faveur de la résolution car il importe de lever le blocus.  Considérant que les mesures de coercition économique sont une méthode d’influence politique, elle a rappelé qu’un vent d’espoir avait soufflé ces dernières années, avant l’annonce de nouvelles mesures par Washington.  Convaincue que le dialogue est la seule voie susceptible de régler cette situation, elle a appelé à une levée immédiate, complète et irréversible du blocus.

Le représentant du Tchad a rappelé que son pays avait toujours plaidé pour la levée définitive de l’embargo, estimant que le vote massif d’aujourd’hui vient conforter cette position qui vise à sortir Cuba et son peuple d’une situation qui sape ses efforts économiques depuis des décennies.  La présence des médecins cubains au Tchad et dans d’autres pays est bien la preuve concrète du rôle important joué par ce pays ami dans la solidarité internationale, a justifié le délégué, avant de réitérer son appel au Gouvernement américain à « s’inscrire dans la logique de l’expression des États Membres ».

Jouissant de très bonnes relations avec les États-Unis, Saint-Kitts-et-Nevis, a dit sa représentante, a assuré que son pays respecte le rôle des États-Unis dans les relations internationales.  Elle a cependant fait valoir les recommandations du Secrétaire général visant à ne pas appliquer des mesures susceptibles d’affecter le libre échange commercial et à s’abstenir d’adopter des lois à effet extraterritorial qui enfreignent la souveraineté d’autres États et les intérêts légitimes de personnes ou d’entités sous leur juridiction.  Cuba est également un proche allié de Saint-Kitts-et-Nevis, notamment dans l’agriculture, a rappelé la déléguée, en rappelant qu’aucun pays ne devrait être laissé pour compte, en particulier à cette jonction de l’histoire.  Le sentiment général émanant du vote de ce matin, c’est que le blocus n’est plus de mise, a-t-elle ajouté.  

Le représentant du Brésil a déploré les mesures récentes annoncées par le Gouvernement américain, qui cherchent à renforcer le blocus contre Cuba, y compris ses dimensions extraterritoriales.  Du point de vue de son pays, il s’agit d’une « politique anachronique aux effets négatifs non seulement pour Cuba mais également pour l’ensemble de notre région ».  De surcroît, a-t-il relevé, ce blocus est une violation flagrante des principes de la Charte et affecte négativement le bien-être du peuple cubain, notamment les plus pauvres et vulnérables.  Pour sa délégation, la levée du blocus est une « cause universelle qui jouit du soutien incontestable de la communauté internationale », concrétisé à travers le vote tant dans les sessions précédentes qu’aujourd’hui au sein de l’Assemblée générale. 

La représentante de l’Uruguay a déclaré que, comme à l’accoutumée, il avait voté en faveur de la résolution présentée par Cuba car sa législation nationale rejette et ne reconnaît nullement l’application extraterritoriale de lois domestiques d’autres États et de tout mécanisme, direct ou indirect, qui constitue une mesure unilatérale.  De ce fait, les sanctions imposées et les lois extraterritoriales approuvées contre Cuba ne sont rien d’autre qu’une violation du droit international aux conséquences incalculables pour le développement économique et ne vise rien d’autre que de priver le peuple cubain de son droit au développement.  En votant en faveur, l’Uruguay réitère son engagement en faveur du multilatéralisme en tant qu’instrument légitime  de résolution des différends entre États et efficace dans la promotion de la coopération internationale, des droits de l’homme, de la sécurité et de la compréhension entre les peuples.

La représentante de l’Équateur s’est dite préoccupée par les méfaits prolongés du blocus à cause de son impact sur l’économie et le développement de Cuba et des obstacles qu’il présuppose dans la réalisation des objectifs de développement durable.  Partant, elle a estimé que la levée du blocus relève de l’engagement et de la responsabilité de tous, rappelant au passage la politique solidaire et de coopération maintenue par Cuba pendant des décennies, dans les situations d’urgence sanitaires plus particulièrement.  L’intervenante a en conclusion appelé à la levée immédiate des mesures unilatérales et exprimé sa conviction que cette levée sera non seulement profitable à Cuba, mais à la communauté internationale tout entière. 

Le représentant du Zimbabwe a voté en faveur, fort de sa conviction que le blocus est une violation des droits de l’homme car elle affecte la population cubaine et les droits des autres nations à conduire des affaires avec Cuba.  L’Afrique, a-t-il dit, peut attester de la solidarité de ce pays, notamment au cours de la crise d’Ebola de 2015 après que l’Organisation mondiale de la Santé eut lancé un appel au secours.  La communauté internationale a, une fois de plus, voté en faveur du dialogue et de la coopération, a-t-il conclu, espérant que ce message sera entendu. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Première Commission réitère son appel à la revitalisation de la Conférence du désarmement (CD)

Soixante-douzième session,
27e séance – après-midi
AG/DSI/3593

La Première Commission réitère son appel à la revitalisation de la Conférence du désarmement (CD)

Elle réclame la tenue, du 14 au 16 mai 2018, d’une conférence internationale de haut niveau sur le désarmement nucléaire

La Première Commission a adopté, cet après-midi, 18 projets de résolution sur le désarmement, dont trois sur les armes nucléaires, ainsi que plusieurs textes appelant à la revitalisation du mécanisme de désarmement.  De nouveau, les votes sur les projets de résolution sur les armes nucléaires ont été marqués par de nombreuses oppositions et abstentions, témoignant une fois encore de fortes divergences parmi les délégations quant aux moyens à poursuivre pour parvenir au désarmement nucléaire.  L’adoption d’un projet de résolution relatif à la Convention sur les armes chimiques a été reportée à demain. 

Aux termes d’un projet intitulé « Désarmement nucléaire » adopté par 110 voix pour, 41 contre et 18 abstentions, l’Assemblée générale réaffirmerait que « le désarmement nucléaire et la non-prolifération des armes nucléaires sont intimement liés, que les deux doivent aller de pair et qu’un processus systématique et progressif de désarmement nucléaire est réellement nécessaire ». 

Ce texte exhorte aussi les États dotés d’armes nucléaires à mettre immédiatement un terme au perfectionnement de têtes et de vecteurs nucléaires, tout en soulignant qu’une réduction du nombre d’armes déployées ne saurait remplacer l’élimination totale. 

Cuba s’est réjoui de l’adoption d’un texte traitant du désarmement nucléaire « de la manière la plus ample possible », notant aussi que le projet de résolution salue l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.  Néanmoins, la représentante de ce pays a souligné avec véhémence que l’objectif du désarmement nucléaire ne peut pas être remis « sans cesse à plus tard » par les États dotés d’armes nucléaires ni faire l’objet, par ces derniers, de nouvelles conditionnalités. 

La France, le Royaume-Uni, les États-Unis, la Chine et la Fédération de Russie, soit les cinq détenteurs officiels du plus grand nombre d’armes nucléaires, ont voté contre un texte « se félicitant de l’adoption, le 7 juillet 2017, du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ».  Ces pays l’ont encore répété aujourd’hui, ils ne reconnaissent pas ce traité négocié sans leur participation et en dehors du mécanisme onusien de désarmement.  L’Inde et le Pakistan ont indiqué s’être abstenus sur ce texte pour la même raison.

D’autre part, la Première Commission a adopté un projet de résolution sur le « Suivi de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le désarmement nucléaire de 2013 ».  Par ce texte, adopté par 129 voix pour, 30 voix contre et 12 abstentions, l’Assemblée générale déciderait de convoquer, du 14 au 16 mai 2018, à New York, une conférence internationale de haut niveau des Nations Unies sur le désarmement nucléaire pour faire le point sur les progrès accomplis dans ce domaine. 

Le Royaume-Uni, la France et les États-Unis ont expliqué avoir voté contre ce texte, estimant que l’appel à l’organisation d’une conférence sur le désarmement nucléaire « ne prend pas en compte les menaces que représentent le terrorisme et le non-respect, par certains États, de leurs obligations ».  À leurs yeux, la tenue d’une nouvelle conférence qui ne prenne pas en compte les obligations découlant du Traité sur la non-prolifération, seul un appel à la mise en œuvre de l’article VI sur l’élimination des armes nucléaires étant mentionné dans la version 2017 du texte, donnerait des résultats inconséquents.  Le représentant de la Suisse a exprimé une autre position, sa délégation ayant appuyé le projet de résolution.  Il a en effet noté « que plusieurs approches en matière de désarmement nucléaire étaient à présent sur la table », et estimé, à cet égard, qu’une discussion de haut niveau serait l’occasion d’identifier ces nouvelles étapes et faire converger les vues des États Membres sur celles-ci.  

Par ailleurs, au titre du mécanisme de désarmement, la Commission a notamment entériné sans vote deux textes, l’un sur la Conférence du désarmement, l’organe chargé de négocier les traités internationaux, et l’autre sur la Commission du désarmement. 

Aux termes du premier projet de résolution, l’Assemblée générale demanderait cette année encore à la Conférence du désarmement d’intensifier les consultations et d’examiner les possibilités qui s’offrent à elle de sortir de l’impasse dans laquelle elle se trouve depuis 20 ans en adoptant et en suivant un programme de travail équilibré et global le plus tôt possible pendant sa session de 2018.  En vertu du second projet de résolution, elle féliciterait la Commission du désarmement d’avoir mené à bien en 2017 l’examen de la question intitulée « Mesures de confiance concrètes dans le domaine des armes classiques ».  

Les délégations ont également adopté sans vote un projet de résolution par lequel l’Assemblée générale engagerait les États Membres de chaque région qui sont en mesure de le faire, ainsi que les organisations gouvernementales et non gouvernementales, « à verser des contributions volontaires aux centres régionaux situés dans leur région afin qu’ils puissent mener davantage d’activités et d’initiatives ».  Le Népal a salué le rôle des centres régionaux qui permettent aux populations de mieux comprendre les enjeux du désarmement au niveau local.  Le délégué de ce pays a appelé les États Membres à s’acquitter de leurs contributions afin de permettre aux centres de s’acquitter de leurs activités. 

S’agissant du projet de résolution concernant la Convention sur les armes chimiques, les délégations syrienne et russe ont interpellé le Président de la Commission et leurs homologues en se demandant comment ce texte de la Pologne pouvait être adopté en l’état.  Ils faisaient référence à un paragraphe du texte mentionnant « le dernier rapport non encore publié du Mécanisme d’enquête conjoint de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et de l’ONU ».  Les États-Unis ont en revanche estimé que la gravité des crimes commis en Syrie et leur actualité exigeaient que la Commission se prononce au plus vite sur ce texte.

La Première Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 2 novembre, à partir de 10 heures. 

DÉCISIONS SUR L’ENSEMBLE DES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Autres mesures de désarmement et de sécurité internationale

Suite des interventions après le vote

Au nom du Royaume-Uni et de la France, le délégué français est revenu sur le projet de résolution L.30 « Relation entre le désarmement et le développement ».  Si les deux pays ont rejoint le consensus sur cette question, le représentant n’en a pas moins estimé que la relation symbiotique entre développement et désarmements est discutable.  Il n’y a pas de lien automatique entre les deux, a-t-il jugé, comme le prouvent les dépenses militaires des pays en développement qui favorisent d’ailleurs le maintien de la paix et le renforcement de la stabilité.  Il a aussi considéré que le rapport de Groupe d’experts gouvernementaux ne souligne pas suffisamment l’importance des relations multilatérales dans le désarmement.  À propos du projet de résolution L.31 « Respect des normes environnementales dans l’élaboration et l’application des accords de désarmement et de maîtrise des armements », il a rappelé que la France a rejoint le consensus.  Cependant, a-t-il prolongé, nous ne voyons pas de liens directs entre les standards généraux de l’environnement et le désarmement. 

Commentant ensuite le projet de résolution L.52 rev 1 « Rôle de la science et de la technique dans le contexte de la sécurité internationale et du désarmement », le délégué de la République islamique d’Iran a reconnu l’importance des transferts de produits scientifiques et techniques pour appuyer le développement socioéconomique de tous les pays, avertissant toutefois que l’application militaire de ces évolutions peut contribuer à la fabrication d’armes de destruction massive.  Il faut donc, selon lui, un règlement sur les transferts de technologie de pointe qui sont à double usage et trouver un équilibre délicat entre le respect du droit inhérent des États à transférer des technologies à des fins pacifiques et la prévention de la fabrication d’armes de destruction massive.  Lors de la mise au point de cette réglementation, les exigences des différents États devront être prises en compte pour aboutir à l’élaboration de lignes directrices acceptables par tous, a-t-il ajouté.  C’est à cet égard que la République islamique d’Iran partage les inquiétudes des pays en voie de développement qui craignent d’être privés de droits inhérents et que leur développement soit entravé.  Selon le délégué, tout en considérant que le projet de résolution L.52 Rev 1 n’est pas à la hauteur de ses attentes, la délégation iranienne a rejoint le consensus en espérant qu’il sera réexaminé l’an prochain en tenant compte des attentes de l’Iran.

La représentante de l’Inde a expliqué avoir voté pour le projet de résolution L.7 « Respect des accords et obligations en matière de non-prolifération, de limitation des armements et de désarmement », convaincue que les États doivent se montrer responsables de leurs obligations auxquelles ils ont souscrit de façon volontaire.  Elle a aussi appelé les États à agir dans le respect des mécanismes de conformité en respectant la Charte et les accords internationaux. 

La délégation de la République arabe syrienne s’est abstenue sur le projet de résolution L.7.  Elle a souligné l’importance de respecter les accords internationaux régissant la non-prolifération, notamment le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), déplorant que beaucoup ne le respectent pas ou le violent, « en particulier les pays de l’OTAN ».  Elle a également affirmé que le projet de résolution appelle au respect des accords en matière de désarmement et de non-prolifération alors qu’Israël menace la paix et la sécurité au Moyen-Orient avec son arsenal nucléaire.  Le fait que cet État ait accepté la résolution risque de miner sa crédibilité, a-t-elle mis en garde, déplorant par ailleurs que le projet de résolution ne fasse pas mention du rôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). 

À propos du projet de résolution L.44 « Progrès de l’informatique et des télécommunications et sécurité internationale », la déléguée de Singapour a appelé l’ONU à continuer de jouer un rôle crucial pour affronter les menaces cybernétiques, saluant par ailleurs la qualité des rapports du Groupe d’experts. 

Le délégué de la Fédération de Russie a ensuite avoué être gêné par le projet de résolution L.7, estimant que la nécessité de respecter les accords est une évidence.  « Pourquoi alors présenter ce projet de résolution? », a-t-il fait mine de s’interroger.  Il a estimé que les auteurs de ce projet de résolution cherchent à politiser les choses, ajoutant qu’à plusieurs reprises, en 2002, 2000 et 1996, « l’un d’entre eux » a initié des accords sur les armes de destruction massive avant de finalement suspendre les discussions ou de ne pas ratifier les traités.  Au vu de cela, il a déploré que la Fédération de Russie soit l’objet de toute les critiques et qu’on lui reproche de saper la paix internationale, affirmant que son pays cherche juste à éviter une course aux armements dans l’espace.  « On n’a pas compris pourquoi, il y a quelques jours, ce même auteur a appelé à voter contre notre résolution pour empêcher cette course aux armements », a-t-il lâché.  Selon lui, l’objectif de la Première Commission devrait être de trouver des compromis en matière de désarmement et non pas d’empêcher les délégations de mener leurs travaux.

Déclarations avant les votes sur les projets de résolution sur le désarmement régional et la sécurité

Le représentant de la France a indiqué que son pays voterait contre toutes les résolutions mentionnant le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, auquel la France s’oppose.  Par conséquent, nous voterons contre le projet de résolution L.8 sur le renforcement de la sécurité et de la coopération dans la région de la Méditerranée.  

La représentante de l’Union européenne a indiqué, au sujet du projet de résolution L.8, que les pays membres de l’Union réitéraient son appel à l’entrée en vigueur sans préconditions du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE).  Nous condamnons les essais nucléaires conduits par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) qui sont illégaux au regard de nombreux instruments juridiques internationaux, a-t-elle ajouté. 

Le représentant du Pakistan a indiqué que le projet de résolution L.13 avait été amendé à l’initiative de sa délégation.  Ainsi amendé, ce texte équivaut à la version 2016 du projet de résolution, a-t-il précisé.

Le représentant de la République islamique d’Iran a indiqué concernant le projet de résolution L.8 que son pays ne pouvait rallier le consensus sur ce texte « irréaliste », cela en raison de la poursuite, par Israël, de « l’embargo à Gaza ».  

Adoption des projets de résolution sur le désarmement régional et la sécurité

Renforcement de la sécurité et de la coopération dans la région de la Méditerranée (A/C.1/72/L.8)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale estimerait que l’élimination des obstacles que constituent, notamment, les écarts de développement économique et social, et la promotion du respect et de l’entente entre les cultures de l’espace méditerranéen contribueront à renforcer la paix, la sécurité et la coopération entre les pays de la région, dans le cadre des instances existantes.  

Elle inviterait tous les États de la région de la Méditerranée qui ne l’ont pas encore fait à adhérer à tous les instruments juridiques relatifs au désarmement et à la non-prolifération issus de négociations multilatérales, de manière à créer les conditions nécessaires au renforcement de la paix et de la coopération dans la région.  

L’Assemblée générale engagerait tous les États de la région à favoriser la mise en place des conditions nécessaires au renforcement des mesures de confiance mutuelle en traitant toutes les questions militaires dans un esprit de franchise et de transparence, notamment en participant au Rapport des Nations Unies sur les dépenses militaires et en communiquant des données et informations exactes au Registre des armes classiques de l’ONU.

Adoption de mesures de confiance à l’échelon régional et sous-régional (A/C.1/72/L.11)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale demanderait instamment aux États de respecter rigoureusement tous les accords bilatéraux, régionaux et internationaux auxquels ils sont parties, y compris les accords de maîtrise des armements et de désarmement.  

Elle soulignerait que les mesures de confiance doivent avoir pour objet de contribuer à renforcer la paix et la sécurité internationales, et être conformes au principe d’une sécurité non diminuée au niveau d’armement le plus bas.  

L’Assemblée générale préconiserait la promotion de mesures de confiance bilatérales et régionales mises en œuvre avec l’assentiment et la participation des parties concernées et destinées à prévenir les conflits et à empêcher l’éclatement fortuit et non intentionnel d’hostilités.

Désarmement régional (A/C.1/72/L.12)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale demanderait aux États de conclure, chaque fois qu’ils le pourront, des accords sur la non-prolifération des armes nucléaires, le désarmement et les mesures de confiance aux niveaux régional et sous-régional. 

Elle soutiendrait et encouragerait les efforts visant à promouvoir des mesures de confiance aux niveaux régional et sous-régional afin d’atténuer les tensions régionales et de faire progresser à ces deux niveaux le désarmement et la non-prolifération des armes nucléaires. 

Maîtrise des armes classiques aux niveaux régional et sous-régional (A/C.1/72/L.13/Rev.1)

Aux termes de cette résolution adoptée par 174 voix pour, 1 voix contre (Inde) et 2 abstentions (Bhoutan, Fédération de Russie), l’Assemblée générale, « estimant que c’est tout spécialement aux États militairement importants et à ceux qui sont dotés de vastes capacités militaires qu’il incombe de promouvoir de tels accords axés sur la sécurité régionale », déciderait d’examiner d’urgence les questions que pose la maîtrise des armes classiques aux niveaux régional et sous-régional. 

Elle demanderait également à la Conférence du désarmement d’envisager de formuler des principes susceptibles de servir de cadre à des accords régionaux sur la maîtrise des armes classiques, et attendrait avec intérêt un rapport de la Conférence portant sur ce sujet.

Vote séparé

Le maintien du paragraphe 2 du dispositif a été approuvé par 131 voix pour, 1 contre (Inde) et 38 abstentions.

Application de la Déclaration faisant de l’océan Indien une zone de paix (A/C.1/72/L.29)

Par ce texte, adopté par 126 voix pour, 3 voix contre (France, États-Unis, Royaume-Uni) et 45 abstentions, l’Assemblée générale prendrait acte du rapport du Comité spécial de l’océan Indien, et se déclarerait de nouveau convaincue que la participation de tous les membres permanents du Conseil de sécurité et des principaux utilisateurs maritimes de l’océan Indien aux travaux du Comité est importante et faciliterait grandement l’instauration d’un dialogue bénéfique à tous pour faire progresser la paix, la sécurité et la stabilité dans la région de l’océan Indien.  

Déclarations après les votes sur les projets de résolution sur le désarmement régional et la sécurité

La représentante de l’Inde a rappelé que la Conférence du désarmement était le seule organe de négociation d’instruments de désarmement internationaux.  « Elle n’a pas pour vocation de donner des lignes directrices sur d’éventuelles mesures de désarmement régional », a-t-elle ajouté, expliquant que, pour cette raison, son pays avait voté contre le projet de résolution L.13/Rev.1, « Maîtrise des armes classiques aux niveaux régional et sous-régional ».  

Déclarations avant les votes sur les projets de résolution sur le mécanisme de désarmement

Le délégué du Bélarus a appelé la communauté internationale de s’intéresser de près à la question des armes de destruction massive.  Nous voulons sensibiliser sur les problèmes juridiques qui entourent ce sujet, a-t-il indiqué.  Il a également signalé que les évolutions scientifiques qui permettent d’améliorer les vecteurs font courir de plus en plus de risques, estimant que cette situation souligne l’importance de tenir des discussions de fonds à la Conférence du désarmement.  Il a d’ailleurs rappelé que son pays a mené un débat de fond sur la marche à suivre pour perfectionner les ripostes internationales permettant de faire face aux armes de destruction massive.  « Régulièrement, nous proposons un projet de résolution qui a pour objectif d’empêcher une course aux armements et de mettre en place un mécanisme qui pourrait être lancé si nécessaire », a-t-il insisté, avant d’appeler les États à renouveler leur engagement envers un projet de résolution qui ne présente cette année que quelques changements techniques. 

Le représentant du Pérou a présenté, au nom des 33 États d’Amérique du Sud et des Caraïbes, le projet de résolution L.51 « Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes ».  Soulignant le rôle important que joue ce centre basé à Lima, il a rappelé qu’il servait à organiser des activités de renforcement politique à la demande des États concernant les instruments multilatéraux, les armes et le rôle des femmes.  

La déléguée de l’Indonésie a présenté le projet de résolution L.33 « Convocation de la quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement ».  Elle a expliqué que cette quatrième session extraordinaire illustre l’engagement de tous au multilatéralisme et donne de l’espoir pour les discussions sur le désarmement. 

Le représentant du Népal a présenté le projet de résolution sur le Centre régional pour la paix et le désarmement à Katmandou, soulignant que tous les rouages du mécanisme onusien de désarmement sont complémentaires.  Il a plaidé pour l’adoption de nouvelles mesures de désarmement régional pour renforcer cette complémentarité, et a salué le rôle des centres régionaux qui permettent aux populations de mieux comprendre les enjeux du désarmement au niveau local.  Le délégué a appelé les États Membres à s’acquitter de leurs contributions afin de permettre aux centres régionaux de s’acquitter de leurs activités.  

Le représentant de l’Iran a souligné l’importance cruciale des dispositifs multilatéraux mis en place lors de la première session extraordinaire du désarmement de l’Assemblée générale.  Il faut que les États dotés de l’arme nucléaire et leurs partenaires travaillent plus activement à la relance du mécanisme onusien de désarmement, notamment en concentrant leurs efforts sur la revitalisation de la Conférence du désarmement, a-t-il dit.  À cet égard, nous appuyons la tenue de négociations rapides à la Conférence sur l’élaboration d’une convention interdisant les armes nucléaires, a-t-il dit.  

La représentante du Mexique a indiqué, au sujet du projet de résolution L.14 sur la Conférence du désarmement, que son pays se ralliait au consensus sur ce texte.  Elle a demandé aux pays qui « profitent » de l’impasse à la Conférence de changer d’attitude et de reconnaître l’urgence vitale que la Conférence du désarmement reprenne ses travaux.  Les résultats du Groupe de travail dit de la marche à suivre doivent servir de base à une relance des travaux de la Conférence, cet organe n’étant pas le lieu où lancer des initiatives n’ayant rien à voir avec son mandat, a encore déclaré la déléguée.

Adoption des projets de résolution sur le mécanisme de désarmement

Interdiction de mettre au point et de fabriquer de nouveaux types et systèmes d’armes de destruction massive: rapport de la Conférence du désarmement (A/C.1/72/L.9)

Par ce texte, adopté par 173 voix pour, 3 voix contre (États-Unis, Israël, Ukraine) et 0 abstention, l’Assemblée générale prierait la Conférence du désarmement, sans préjudice de l’examen ultérieur de son ordre du jour, de maintenir la question à l’étude, selon que de besoin, afin de formuler, quand il le faudra, des recommandations concernant les négociations spécifiques à entreprendre sur des types déterminés d’armes de ce genre. 

Elle engagerait tous les États à envisager de donner une suite favorable aux recommandations de la Conférence du désarmement dès que celle-ci les aura formulées. 

Rapport de la Conférence du désarmement (A/C.1/72/L.14)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale demanderait à la Conférence du désarmement d’intensifier encore les consultations et d’examiner les possibilités qui s’offrent à elle de sortir de l’impasse dans laquelle elle se trouve depuis 20 ans en adoptant et en suivant un programme de travail équilibré et global le plus tôt possible pendant sa session de 2018. 

Elle prierait tous les États Membres de la Conférence du désarmement de coopérer avec le Président en exercice et ses successeurs afin de les aider à faire en sorte que la Conférence commence rapidement ses travaux de fond, notamment les négociations, à la session de 2018. 

Elle estimerait qu’il importe de poursuivre, en 2018, les consultations sur la question de l’élargissement de la composition de la Conférence du désarmement.  

Mesures de confiance à l’échelon régional: activités du Comité consultatif permanent des Nations Unies chargé des questions de sécurité en Afrique centrale (A/C.1/72/L.20)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale exhorterait les États membres de la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale de mettre en œuvre la stratégie intégrée de lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes légères et de petit calibre en Afrique centrale ainsi que son plan d’action, et prierait le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale d’appuyer les efforts des États membres de la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale à cet effet.  

Elle engagerait également la Communauté économique des États de l’Afrique centrale et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest à redoubler d’efforts, en coordination avec la Commission de l’Union africaine, pour adopter une stratégie globale destinée à combattre plus efficacement et de toute urgence la menace que représente Boko Haram, et, à cet égard, exhorterait les deux organisations sous-régionales à tenir leur sommet conjoint dans les plus bref délais afin d’adopter une stratégie commune et d’instaurer une coopération et une coordination actives.

Rapport de la Commission du désarmement (A/C.1/72/L.25)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale féliciterait la Commission du désarmement d’avoir mené à bien l’examen de la question intitulée « Mesures de confiance concrètes dans le domaine des armes classiques », et approuverait le texte adopté par consensus à ce sujet. 

Elle constaterait avec regret que la Commission n’a pu parvenir à un consensus sur la question intitulée « Recommandations visant à réaliser le désarmement nucléaire et la non-prolifération des armes nucléaires », et réaffirmerait qu’il importe de renforcer encore le dialogue et la coopération entre la Première Commission, la Commission du désarmement et la Conférence du désarmement. 

Elle prierait la Commission du désarmement de poursuivre ses travaux conformément au mandat qu’elle lui a confié, et, à cette fin, de tout mettre en œuvre pour formuler des recommandations concrètes sur les questions inscrites à son ordre du jour.  

Convocation de la quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement (A/C.1/72/L.33)

Par ce texte, adopté par 170 voix pour, 0 voix contre et 3 abstentions (États-Unis, France, Israël), l’Assemblée générale prendrait note avec satisfaction que le Groupe de travail à composition non limitée sur la quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement, qui a été créé par sa résolution 65/66 et sa décision 70/551 et s’est réuni à New York en 2016 et en 2017, a adopté par consensus les recommandations relatives aux objectifs et à l’ordre du jour de la quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement. 

Elle ferait sien le rapport du Groupe de travail à composition non limitée et les recommandations qui y sont formulées.  

Centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement (A/C.1/72/L.34)

Par ce texte adopté sans vote, l’Assemblée générale engagerait les États Membres de chaque région qui sont en mesure de le faire, ainsi que les organisations gouvernementales et non gouvernementales et les fondations internationales, à verser des contributions volontaires aux centres régionaux situés dans leur région afin qu’ils puissent mener davantage d’activités et d’initiatives. 

Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique (A/C.1/72/L.39)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale féliciterait le Centre pour le soutien constant qu’il a apporté aux États Membres dans la mise en œuvre d’activités de désarmement, de maîtrise des armements et de non-prolifération, grâce à des séminaires et à des conférences, au renforcement des capacités et à des formations, à la mise à disposition de ses compétences dans le domaine des politiques et dans le domaine technique et à des activités d’information et de sensibilisation aux niveaux mondial, régional et national.

Elle exhorterait tous les États, ainsi que les organisations gouvernementales et non gouvernementales et les fondations internationales, à verser des contributions volontaires afin de permettre au Centre de mener ses programmes et ses activités et de répondre aux besoins des États d’Afrique. 

Elle exhorterait les États membres de l’Union africaine, en particulier, à verser des contributions volontaires au Fonds d’affectation spéciale pour le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Afrique, conformément à la décision prise par le Conseil exécutif de l’Union africaine à Khartoum en janvier 2006.  

Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique (A/C.1/72/L.48)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale, qui exprimerait sa satisfaction au sujet des activités menées par le Centre durant l’année écoulée, inviterait tous les États de la région à continuer de les appuyer en vue de bâtir pour l’humanité un avenir commun, notamment en y participant, dans la mesure du possible, et en proposant des thèmes à intégrer dans le programme d’activité du Centre afin de contribuer à la mise en œuvre des mesures en faveur de la paix et du désarmement. 

Elle engagerait les États Membres, en particulier ceux de la région de l’Asie et du Pacifique, ainsi que les organisations gouvernementales et non gouvernementales et les fondations internationales, à verser des contributions volontaires, qui sont les seules ressources du Centre, pour renforcer son programme d’activité et en faciliter l’exécution.  

Elle réaffirmerait qu’elle appuie énergiquement le rôle que joue le Centre dans la promotion des activités menées par l’Organisation des Nations Unies à l’échelon régional pour renforcer la paix, la stabilité et la sécurité de ses États Membres. 

Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes (A/C.1/72/L.51)

Par ce texte, adopté sans vote, l’Assemblée générale se féliciterait des activités que le Centre a menées durant l’année écoulée visant en particulier à prévenir, à combattre et à éliminer le commerce illicite des armes légères et de petit calibre, des munitions et des explosifs, de la non-prolifération des armes de destruction massive, des mesures de confiance, et à réduire et prévenir la violence armée aux niveaux régional et sous-régional.

Elle inviterait tous les États de la région à continuer de s’associer aux activités du Centre, en participant à l’élaboration de son programme d’activités et en optimisant les moyens dont il dispose pour aider à résoudre les difficultés que la communauté internationale rencontre actuellement, en vue d’atteindre les objectifs de paix, de désarmement et de développement énoncés dans la Charte des Nations Unies. 

Déclarations après les votes sur les projets de résolution sur le mécanisme de désarmement

Le délégué des États-Unis a indiqué qu’il avait voté contre le projet de résolution L.9 « Interdiction de mettre au point et de fabriquer de nouveaux types et systèmes d’armes de destruction massive: rapport de la Conférence du désarmement ».  Selon lui, depuis que les armes de destruction massive ont été définies en 1948, aucune nouvelle arme n’est officiellement apparue, « donc on reste au stade de l’hypothèse ».  

Il a aussi expliqué pourquoi les États-Unis se sont abstenus sur le projet de résolution L.33 « Convocation de la quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement », son pays étant sceptique quant à la valeur ajoutée d’une quatrième session étant donné les positions divergentes des États Membres sur certaines questions.  Il s’est aussi inquiété des dépenses consécutives à l’organisation d’une telle session, demandant à ceux qui souhaitent l’organisation de cette quatrième session extraordinaire de faire preuve de transparence sur ce sujet. 

Déclarations avant les votes sur les projets de résolution sur les armes nucléaires

La représentante de Cuba a réitéré son appui au projet de résolution L.45, « Suivi de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le désarmement nucléaire de 2013 ».  Elle a également estimé que le projet de résolution L.18 sur le désarmement nucléaire est celui qui traite cette question de la manière la plus ample, notant que le texte salue l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et reconnaît la Déclaration de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes en tant que zone exempte d’armes nucléaires.  L’objectif du désarmement nucléaire ne peut pas être remis sans cesse à plus tard et faire l’objet de nouvelles conditionnalités, a-t-elle souligné.  La représentante a aussi appuyé le projet de résolution L.57, « Suite donnée à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires », en notant que la seule garantie contre la menace de l’emploi d’armes nucléaires est leur élimination complète.  

Le représentant du Pakistan a rappelé, s’agissant du projet de résolution L.18, que son pays n’avait pas pris part aux négociations sur le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. 

Adoption des projets de résolution sur les armes nucléaires

Désarmement nucléaire (A/C.1/72/L.18)                      

Par ce projet de résolution adopté par 110 voix pour, 41 contre et 18 abstentions, l’Assemblée générale exhorterait tous les États dotés d’armes nucléaires à prendre des mesures effectives de désarmement pour que toutes ces armes soient totalement éliminées dès que possible.  Elle réaffirmerait que le désarmement nucléaire et la non-prolifération des armes nucléaires sont intimement liés et se renforcent mutuellement, que les deux doivent aller de pair et qu’un processus systématique et progressif de désarmement nucléaire est réellement nécessaire. 

L’Assemblée générale exhorterait les États dotés d’armes nucléaires à mettre immédiatement un terme au perfectionnement qualitatif, à la mise au point, à la fabrication et au stockage de têtes et de vecteurs nucléaires.  Elle exhorterait également les États dotés d’armes nucléaires, à titre transitoire, à lever immédiatement l’état d’alerte de leurs armes nucléaires, à les désactiver et à prendre d’autres mesures concrètes pour réduire encore la disponibilité opérationnelle de leurs systèmes d’armes nucléaires, tout en soulignant qu’une réduction du nombre d’armes déployées et de la disponibilité opérationnelle des armes ne saurait remplacer une diminution irréversible des armements nucléaires et leur élimination totale. 

L’Assemblée générale demanderait que, sur la base d’un programme de travail concerté, équilibré et complet, s’ouvrent immédiatement à la Conférence du désarmement des négociations sur un traité multilatéral, non discriminatoire et internationalement et réellement vérifiable interdisant la production de matières fissiles pour la fabrication d’armes et d’autres dispositifs explosifs nucléaires.  

L’Assemblée demanderait aussi que soit adopté un instrument juridique international apportant des garanties de sécurité inconditionnelles aux États non dotés d’armes nucléaires contre l’emploi ou la menace d’emploi d’armes nucléaires en quelque circonstance que ce soit.  Elle demanderait par ailleurs que le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires entre en vigueur rapidement et de manière universelle et qu’il soit rigoureusement appliqué, puisque cela contribuerait au désarmement nucléaire. 

L’Assemblée générale demanderait en outre que soit convoquée, au plus tard en 2018, une conférence internationale de haut niveau des Nations Unies sur le désarmement nucléaire pour faire le point sur les progrès accomplis.  

Votes séparés

Le maintien du paragraphe 32 du préambule a été approuvé par 114 voix pour, 37 voix contre et 11 abstentions.

Le maintien du paragraphe 16 du dispositif a été approuvé par 159 voix pour, 1 voix contre (Pakistan) et 6 abstentions (France, États-Unis, Fédération de Russie, Israël, République populaire démocratique de Corée, Royaume-Uni). 

Suivi de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le désarmement nucléaire de 2013 (A/C.1/72/L.45/Rev.1)

Par ce texte, adopté par 129 voix pour, 30 voix contre et 12 abstentions, l’Assemblée générale déciderait de convoquer, du 14 au 16 mai 2018, à New York, une conférence internationale de haut niveau des Nations Unies sur le désarmement nucléaire pour faire le point sur les progrès accomplis dans ce domaine. 

Elle prierait de nouveau son président d’organiser chaque année, le 26 septembre, une réunion plénière de haut niveau de l’Assemblée d’une journée en vue de célébrer et de promouvoir la Journée internationale pour l’élimination totale des armes nucléaires.  

L’Assemblée générale inviterait les États Membres, le système des Nations Unies et la société civile à célébrer et à promouvoir la Journée internationale afin de mobiliser la communauté internationale au service de l’objectif commun qu’est l’édification d’un monde exempt d’armes nucléaires.

Vote séparé

Le maintien du paragraphe 12 du préambule a été approuvé par 123 voix pour, 26 voix contre et 17 abstentions. 

Suite donnée à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires (A/C.1/72/L.57)

Par ce texte, adopté par 124 voix pour, 31 voix contre et 17 abstentions, l’Assemblée générale soulignerait de nouveau la conclusion unanime de la Cour internationale de Justice (CIJ) selon laquelle il existe une obligation de poursuivre de bonne foi et de mener à terme des négociations conduisant au désarmement nucléaire sous tous ses aspects, assorti d’un contrôle international strict et efficace. 

Elle demanderait de nouveau à tous les États de s’acquitter immédiatement de cette obligation en engageant des négociations multilatérales afin de parvenir sans tarder à la conclusion d’une convention relative aux armes nucléaires interdisant la mise au point, la fabrication, l’essai, le déploiement, le stockage, le transfert, la menace ou l’emploi de ces armes et prévoyant leur élimination. 

Votes séparés

Le maintien du paragraphe 16 du préambule a été approuvé par 117 voix pour, 35 contre et 13 abstentions.

Le maintien du paragraphe 2 du dispositif a été approuvé par 117 voix pour, 35 contre et 14 abstentions.

Traité sur la zone exempte d’armes nucléaires de l’Asie du Sud-Est (Traité de Bangkok) (A/C.1/72/L.58)

Par ce projet de décision, adopté sans vote, l’Assemblée générale déciderait d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa soixante-quatorzième session, au titre de la question intitulée « Désarmement général et complet », la question subsidiaire intitulée « Traité sur la zone exempte d’armes nucléaires de l’Asie du Sud-Est (Traité de Bangkok) ». 

Déclarations après les votes sur les projets de résolution sur les armes nucléaires

La représentante de la Bulgarie n’a pas appuyé le projet de résolution L.45 « Suivi de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le désarmement nucléaire de 2013 », sa délégation estimant que le désarmement nucléaire et le régime de non-prolifération se complètent.  Trouvant regrettable que la conférence d’examen de 2015 ne soit pas parvenue à un document final, la déléguée a considéré que l’organisation d’une réunion en 2018 détournerait l’attention du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) qui, a-t-elle souligné, doit demeurer la pierre angulaire du désarmement.  Elle a aussi appelé à l’entrée en vigueur rapide du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE).  Si elle a convenu que la Conférence du désarmement doit entamer des travaux de fond rapidement, elle a jugé que les travaux cités dans ce projet de résolution ne doivent pas être la priorité. 

Au nom du Groupe des États arabes, le délégué de Mauritanie a expliqué que le Groupe arabe a voté pour le projet de résolution L.18 « Désarmement nucléaire » en raison de son engagement résolu en faveur des efforts de désarmement nucléaire pour qu’on se débarrasse définitivement de ces armes. 

Au nom du Royaume-Uni, de la France et des États-Unis, le délégué des États-Unis a expliqué avoir voté contre le projet de résolution L.45 « Suivi de la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le désarmement nucléaire de 2013 », estimant que l’appel à l’organisation d’une Conférence sur le désarmement nucléaire ne prend pas en compte les menaces que représentent le terrorisme et le non-respect, par certains États, de leurs obligations.  Il a également regretté que la seule référence au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) figure à l’article 6, ce qu’il a jugé insuffisant, ajoutant que la tenue d’une nouvelle conférence qui ne prenne pas en compte les obligations découlant du TNP donnerait des résultats futiles.  Il a aussi noté avec préoccupation les incidences budgétaires de cette résolution. 

La représentante de la Suède a déclaré que son pays et la Suisse s’étaient abstenus sur le projet de résolution L.57, le libellé de la version 2017 laissant entendre que des négociations de désarmement et de non-prolifération pourraient être entreprises dans le cadre du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.

Le représentant du Canada a indiqué, au sujet de ce même texte, que son pays considère que le désarmement nucléaire est une question politique et non juridique.  Par conséquent, nous nous sommes abstenus au moment du vote, a-t-il dit.  L’approche graduelle est la manière la plus efficace d’avancer en matière de désarmement nucléaire, a-t-il ajouté.  

Le représentant de la Suisse a déclaré que son pays avait voté en faveur du projet de résolution L.45, notant en outre que plusieurs approches en matière de désarmement nucléaire étaient à présent sur la table.  Il a estimé qu’une discussion de haut niveau serait l’occasion d’identifier ces nouvelles étapes et faire converger les vues des États Membres sur celles-ci.  

La représentante de l’Inde a indiqué que son pays s’était abstenu sur le projet de résolution L.57, le libellé de sa version 2017 « L’objectif d’un monde sans armes nucléaires » n’étant plus suffisamment explicité.  Elle a ajouté que son pays s’était abstenu sur le projet de résolution L.18, et ce, en raison des mentions faites du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, « auquel nous nous opposons ». 

La représentante des Pays-Bas, au nom d’un groupe de pays, a expliqué avoir voté contre le projet de résolution L.45, le texte ne tenant pas compte des propositions de ces pays pour réaliser un monde exempt d’armes nucléaires.  Il ne prend également pas en compte l’importance de premier plan du cycle d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), a-t-elle aussi estimé.

Le délégué du Pakistan a expliqué s’être abstenu sur le projet de résolution L.18 « Désarmement nucléaire ».  Tout en rappelant son appui à la conclusion d’un accord sur les garanties négatives de sécurité, il a indiqué que n’étant pas partie au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), le Pakistan ne pouvait appuyer ce texte.  Il s’est aussi abstenu sur le vote du paragraphe 32, puisqu’il n’a pas participé au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires à cause de lacunes procédurales. 

Le délégué du Japon a expliqué son abstention sur le vote du projet de résolution L.57 « Suite donnée à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires ».  Étant donné le pouvoir destructeur des armes nucléaires, a-t-il expliqué, nous pensons que ces armes ne respectent pas le droit humanitaire.  Selon lui, des mesures réalistes sont nécessaires pour garantir des progrès en matière de non prolifération.  Après avoir précisé s’être également abstenu sur le projet de résolution L.18, il a assuré attacher une grande importance au renforcement de la confiance entre État dotés et États non dotés. 

Droits de réponse

Réagissant au commentaire de la Fédération de Russie au sujet du projet de résolution L.7, le représentant des États–Unis a expliqué que son pays a présenté ce texte parce qu’il croit en l’importance, pour les États, de respecter leurs obligations internationales.  Il a rappelé que le paragraphe 2 de l’article 15 du Traité concernant la limitation des systèmes de missiles antimissiles balistiques prévoit la possibilité de se retirer en fonction de l’évolution de la situation internationale.  Or, a-t-il expliqué, depuis la signature de ce traité, les États-Unis ont vu comment certains États et organisations non étatiques ont essayé d’obtenir des armes de destruction massive et, estimant que certaines de ces entités sont prêtes à utiliser ces armes contre les États-Unis, ils ont décidé de se retirer de ce traité.  Il a ensuite indiqué qu’un débat est actuellement en cours au sein de l’Administration américaine concernant la non-ratification du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE).  Sur la Convention sur les armes chimiques, il a rappelé que son pays avait mis beaucoup d’argent à la disposition de la Russie pour qu’elle détruise son propre arsenal chimique.  Le représentant des États-Unis a ensuite passé en revue les cas où la Russie ne respecte pas, selon lui, ses obligations internationales, citant notamment l’annexion illégale de la Crimée, des exercices militaires à la frontière des pays baltes, et le non-respect de ses obligations relatives aux vecteurs d’armes, et au Mémorandum de Budapest. 

Le délégué de la Fédération de Russie a assuré que la Russie prenait très au sérieux la situation en République arabe syrienne, et a reconnu « sans problème » que son pays aide le Gouvernement syrien à lutter contre le terrorisme international.  Il a affirmé qu’il n’existe aucune preuve que le Gouvernement syrien aurait utilisé des armes chimiques contre sa propre population.  « Il faut faire preuve d’un véritable cynisme pour accuser de la sorte le Gouvernement syrien alors qu’il mène une lutte difficile contre le terrorisme international », a-t-il lancé.  Estimant que les tentatives des États-Unis et de l’Union européenne de s’immiscer dans le Gouvernement syrien ont échoué, il a considéré qu’il valait mieux soutenir le régime de Damas que de vouloir le renverser.  « Que font les troupes américaines sur le territoire syrien, qui les a appelées à se rendre là-bas? » a-t-il poursuivi, avant de rappeler que la Russie a reçu, elle, une demande d’aide officielle de la part du Gouvernement syrien.  Sur la question de la Crimée, le délégué russe a déclaré qu’elle « fait et fera partie du territoire russe », assurant que c’est en toute légitimité, via un référendum, que les habitants de la Crimée ont voté à 93% « pour se retirer du régime nazi de Kiev ».  Il a appelé à trouver un compromis et tendre la main à ce peuple. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Quatrième Commission appelle à renforcer la dimension humanitaire de la lutte antimines

Soixante-douzième session,
22e séance – matin
CPSD/651

La Quatrième Commission appelle à renforcer la dimension humanitaire de la lutte antimines

La Quatrième Commission (questions politiques spéciales et décolonisation) a adopté par consensus, ce matin, un projet de résolution qui renforce la dimension humanitaire de l’assistance à la lutte antimines.

Intitulé « Assistance à la lutte antimines », ce texte demande instamment aux États de fournir une aide humanitaire aux victimes des mines et des restes explosifs de guerre et de prendre des mesures pour que la population civile soit épargnée.

Si l’Assemblée générale venait à l’adopter, elle encouragerait aussi tous les programmes et organismes multilatéraux, régionaux et nationaux à inclure des activités de lutte antimines, notamment de déminage, dans leurs programmes de consolidation de la paix, d’aide humanitaire, de stabilisation, d’aide au relèvement, à la reconstruction, au maintien de la paix et au développement.

Le projet de résolution a été présenté par le représentant de la Pologne qui a indiqué que ce texte demande, en outre, pour la première fois aux États Membres de respecter leurs obligations internationales respectives en matière de lutte antimines.

Saluant un projet de résolution « qui reflète les réalités du terrain et mentionne l’élimination humanitaire des engins explosifs improvisés », le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité, M. Alexandre  Zouev, s’est longuement attardé, dans un exposé introductif, sur les progrès accomplis ces deux dernières décennies.

Le débat prenait en effet place dans un contexte particulier puisque cette année marque le vingtième anniversaire de la Convention d’Ottawa (Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction), ainsi que celui de la création du Service de la lutte antimines de l’ONU et du Groupe interinstitutions de coordination de la lutte antimines.

M. Zouev s’est ainsi félicité qu’aujourd’hui, 162 États soient parties à la Convention d’Ottawa, et que plus de 51 millions de stocks de mines antipersonnel aient été détruits, précisant que l’année dernière, plus de 185 kilomètres carrés de terres suspectées d’être contaminées ont été débarrassées de mines antipersonnel et de restes d’engins explosifs de guerre.  Mais une des plus belles réussites, à ses yeux, est la diminution notable du nombre de victimes au cours des deux dernières décennies, en Afghanistan et en Colombie notamment.

M. Zouev a également beaucoup insisté sur le fait que la lutte antimines est une composante cruciale de l’action humanitaire, de la construction de la paix, et de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Malgré ces avancées, le Sous-Secrétaire général, rejoint par de nombreuses délégations, a cependant déploré l’augmentation du nombre de victimes liées aux engins explosifs de guerre, aux mines et aux engins explosifs improvisés, qui s’élève à 40% en 2016.  Un phénomène que le représentant de l’Algérie a imputé « au nombre croissant de conflits armés dans le monde, particulièrement en Moyen-Orient, en Afrique et en Asie », tandis que le représentant du Canada mettait en lumière la responsabilité grandissante d’acteurs non étatiques.  Notant la diversification des types de mines utilisées, le délégué japonais a appelé pour sa part à mettre en place des « approches différenciées ».

Rappelant que 22 millions de mines et autres explosifs dangereux ont été posés dans son pays pendant la Seconde Guerre mondiale, le représentant de l’Égypte a souligné pour sa part que le défi technique du déminage restait à relever.  « Il nous faut acquérir les dernières technologies en date de détection et d’enlèvement des mines pour pouvoir continuer de localiser les mines terrestres, qui ont tendance à se déplacer sous l’effet de l’érosion », a-t-il notamment expliqué.

La République démocratique populaire lao et la Thaïlande, deux autres États particulièrement concernés par la persistance de mines et d’engins explosifs, ont tous deux mis en évidence l’importance d’informer les populations sur les dangers des mines antipersonnel et l’assistance aux victimes, « qui mobilisent beaucoup de ressources ». 

Indiquant que 30% des 270 millions de sous-munitions qui ont touché le sol de son pays pendant la guerre n’ont pas explosé, le représentant laotien a aussi mis en exergue les défis importants que représentent ces engins pour le développement socioéconomique du pays.  La République démocratique populaire lao s’est d’ailleurs fixée un dix-huitième objectif de développement durable qui consiste à éliminer l’obstacle des engins non explosés.

Faisant par ailleurs écho aux propos de M. Zouev, qui a observé « un basculement vers des guerres urbaines », le représentant de la Libye a de son côté parlé de la situation à Syrte et à Benghazi, où l’impact des mines antipersonnel, posées entre les maisons et dans les rues, et la persistance de restes explosifs de guerre se font encore ressentir alors que les populations civiles sont revenues.  Il s’est également inquiété de la présence d’engins très développés, pouvant être détonés par téléphone portable ou déguisés en objet insoupçonnables.

Pour sa part, le représentant de l’Autriche s’est dit très préoccupé par l’utilisation des mines antipersonnel par le Myanmar, et a indiqué qu’en sa qualité de Président de la Convention d’Ottawa, il avait demandé l’établissement d’une mission internationale indépendante d’établissement des faits sur ce sujet.

La communauté internationale s’est engagée à créer un monde exempt de mines antipersonnel d’ici à 2025.

La Quatrième Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 2 novembre, à partir de 15 heures.

ASSISTANCE À LA LUTTE ANTIMINES (A/72/226 et A/C.4/72/L.12)

Déclaration liminaire du Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité du Département des opérations de maintien de la paix

M. ALEXANDER ZOUEV, Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité, s’est réjoui du nombre de résolutions des Nations Unies qui reflètent l’action antimines comme une composante essentielle de tous les efforts internationaux liés aux urgences humanitaires, à la consolidation et au maintien de la paix, à la prévention des conflits, aux droits de l’homme et au développement.  « En d’autres mots, le travail des Nations Unies en matière de lutte antimines est une illustration concrète de la réforme du Secrétaire général qui vise à renforcer la synergie et la coordination entre les différents piliers », a déclaré M. Zouev.  Il a noté que 2017 était une année particulièrement significative puisqu’elle marque le vingtième anniversaire de la Convention dOttawa –Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, ainsi que celui de la création du Service de la lutte antimines de l’ONU  et du Groupe interinstitutions de coordination de la lutte antimines. 

M. Zouev a ensuite souligné que les droits de l’homme et le droit humanitaire sont les pierres angulaires de la lutte antimines.  Il s’est félicité que 162 États soient parties à la Convention d’Ottawa, et que plus de 51 millions de stocks de mines antipersonnel aient été détruits, notant que 30 pays s’étaient acquittés de leur obligation.

Poursuivant, il a observé que des progrès significatifs avaient été accomplis ces 20 dernières années, en raison d’un partenariat effectif entre les États Membres, les Nations Unies, la société civile et le secteur privé.  La diminution notable du nombre de victimes au cours des deux dernières décennies, en Afghanistan et Colombie notamment, est une des plus belles réussites, s’est-il félicité.  M. Zouev a aussi voulu mettre en évidence l’impact positif d’une adhésion de plus en plus importante au respect des normes dans ce domaine.  À cet égard, il a salué le leadership, l’innovation et la créativité du Service de la lutte antimines de l’ONU.

M. Zouev a également souligné les progrès liés à l’opérationnalisation de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, et s’est dit satisfait que les programmes de lutte antimines de l’ONU atteignent à présent les plus hauts niveaux d’adéquation aux lignes directrices en matière d’égalité des sexes, ajoutant que le nombre de femmes employées dans le secteur à différents niveaux ne cesse d’augmenter.  Il a cependant estimé qu’on pouvait faire encore plus pour aider les communautés affectées par des conflits, et que la coordination et les partenariats étaient essentiels pour améliorer l’efficacité.  Il s’est donc réjoui que le projet de résolution reflète les réalités du terrain et mentionne l’élimination humanitaire des engins explosifs improvisés, soulignant que  le basculement vers des guerres urbaines rend d’autant plus critique la distribution d’une assistance humanitaire et le retour sûr des personnes déplacées et des réfugiés dans leur foyer.

Enfin, M. Zouev a insisté sur le fait que la lutte antimines était une composante cruciale de l’action humanitaire.  « Elle est aussi essentielle pour la construction de la paix, et pour accélérer la mise en œuvre du Programme de développement à l’horizon 2030 », a-t-il poursuivi en se réjouissant que l’année dernière, plus de 185 kilomètres carrés de terres suspectées d’être contaminées ont été débarrassées de mines antipersonnel et de restes d’engins explosifs de guerre, et que plus de 140 hôpitaux, 220 écoles et près de 500 marchés avaient été sécurisés.

Même quand les activités hostiles se poursuivent, des individus et des communautés bénéficient de l’assistance à la lutte antimines, a aussi fait savoir M. Zouev, citant plus particulièrement l’assistance des Nations Unies en Iraq où l’Organisation soutient les efforts de stabilisation dans les zones libérées des mains de Daech.  « L’électricité et l’eau ont été rétablies à Mossoul peu après le conflit, après l’évaluation du risque d’explosion dans 270 infrastructures », a-t-il expliqué.  « Personne ne doit vivre dans la peur de la mort, même après la fin des combats », a ajouté M Zouev.  À cet égard, il a regretté l’augmentation enregistrée en 2016, de 40% de victimes liées aux engins explosifs de guerre, aux mines et aux engins explosifs improvisés.

Débat général

M. JESÚS DIAZ CARAZO, de l’Union européenne, a rappelé le soutien de l’Union européenne à l’objectif collectif d’un monde exempt de mines antipersonnel, soulignant que tous les pays membres de l’UE étaient parties à la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, et qu’ils coparrainaient le projet de résolution sur la lutte antimines.  Il a souligné que l’UE finançait plus d’un tiers de l’assistance à la lutte antimines, estimant toutefois que les efforts de la communauté internationale n’étaient pas encore suffisants et l’appelant à renforcer encore la coopération entre les Nations Unies, les États et d’autres organisations régionales telles que l’Union africaine ou des organisations non-gouvernementales comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). « Renforcer la collaboration aidera à soutenir les efforts des États affectés d’une manière plus efficace et pérenne », a-t-il insisté.

Le représentant s’est ensuite félicité du fait que le projet de résolution mette l’accent sur la dimension humanitaire de la lutte antimines, notamment sur l’accès humanitaire et la prise en compte de la lutte antimines dans les appels de fonds et les premières réponses humanitaires.  Il a aussi salué le fait que ce texte souligne l’importance de la lutte antimines à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. KITTITHEP DEVAHASTIN NA AYUTHAI (Thaïlande) a indiqué que son pays, qui fut l’un des premiers à devenir partie à la Convention d’Ottawa sur les mines, faisait de l’enlèvement des mines et de la réhabilitation des victimes une priorité gouvernementale depuis deux décennies.  Guidés par un comité national pour la lutte antimines, qui est présidé par le Premier ministre, nos efforts pour honorer les obligations de la Convention sont menés de manière durable, efficace et complète, a-t-il assuré.  Il a expliqué que son pays s’était engagé à faire de la Thaïlande un pays sans mines et, qu’en moins de 20 ans, les services compétents avaient décontaminé plus de 2 100 kilomètres carrés du territoire thaïlandais.  Nous sommes résolus à déminer complètement les 430 kilomètres carrés restants aussitôt que possible, a-t-il indiqué.  Le délégué a fait remarquer que son pays fournissait une assistance active aux victimes des mines, cela en mettant également en œuvre les volets pertinents de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.  Il a souligné qu’en matière de sensibilisation aux dangers des mines, les services de l’État thaïlandais travaillaient en étroite coopération avec les autorités locales, y compris les établissements scolaires des villages, pour tenir informer les plus jeunes. 

M. AHMED ELSHANDAWILY (Égypte) a indiqué qu’au cours des 20 dernières années, les mines terrestres avaient posé un défi sérieux à son pays, qui reste l’un des pays les plus touchés au monde.  Rappelant que 22 millions de mines et autres explosifs dangereux ont été posés en Égypte pendant la Seconde Guerre mondiale, ce chiffre représentant 20% du total des mines terrestres utilisées à travers le monde, il a souligné que le défi technique du déminage restait à relever.  Il nous faut acquérir les dernières technologies en date de détection et d’enlèvement des mines pour pouvoir continuer de localiser les mines terrestres, qui ont tendance à se déplacer sous l’effet de l’érosion, a-t-il précisé.  Il a ajouté que son pays, conscient des conséquences humanitaires liées à la production, au transfert et à l’utilisation de mines antipersonnel, avait instauré un moratoire sur le transfert de mines vers d’autres États dès 1984.  Il a souligné les répercussions néfastes des mines sur le développement du pays, et insisté sur le fait que l’aide apportée à son pays dans le domaine du déminage devait consister en la fourniture d’une assistance technique.  Le représentant a en outre assuré que l’Égypte poursuivait ses efforts dans le cadre du service de lutte antimines des Nations Unies.

M. SOULIKONE SAMOUNTY (République démocratique populaire lao) a félicité le système des Nations Unies et la communauté internationale pour leur travail dans la lutte antimines.  Rappelant que deux millions de tonnes de bombes ont été larguées sur son pays durant la Guerre d’Indochine, il a indiqué que 30% des 270 millions de sous-munitions qui ont touché le sol n’ont pas explosé.  « Cela explique pourquoi les restes explosifs de guerre sont devenus un défi si important pour le développement socioéconomique du pays », a ajouté le délégué.  Expliquant qu’une grande quantité de ressources est nécessaire pour nettoyer, informer et porter assistance aux victimes innocentes, il a rappelé les dispositifs qui ont permis d’avancer dans l’élimination de ce fléau.  Avec l’aide du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et plusieurs organisations non gouvernementales, le Programme national lao d’élimination des munitions non explosées a pu débuter en 1996.  Un fonds d’affectation spéciale a été créé pour financer le travail, bientôt remplacé par le projet multilatéral « Progresser vers la réalisation des objectifs de développement durable 18 -Éliminer l’obstacle des engins non explosés pour le développement en République démocratique populaire lao ».  Parmi les objectifs des arrangements bilatéraux que le pays a passés avec ses partenaires, il a dénombré la surveillance, le nettoyage, l’éducation au risque, l’assistance aux victimes et l’entraînement.

M. KOJI MIZUMOTO (Japon) a rappelé que son pays était co-auteur du projet de résolution « Assistance à la lutte antimines » et qu’il espérait la voir adoptée par consensus.  Jugeant que la Convention d’Ottawa a marqué d’une pierre blanche le combat contre ces armes, il a constaté qu’un certain nombre de progrès avaient été réalisés depuis: 162 pays ont rejoint le traité, 159 d’entre eux ne détiennent plus de mines et en tout 51 millions de ces dispositifs ont d’ores et déjà été détruits. Hélas, le nombre de victimes de mines n’est pas en régression du fait de l’instabilité en plusieurs endroits du globe, a-t-il déploré notant que ces engins ont provoqué la mort de 6 500 personnes en 2015 contre 3 700 en 2014.  La diversification des types de mines nécessite des approches différenciées, ou tout du moins différentes, pour répondre au danger, a-t-il expliqué.

Le représentant a ensuite souligné que les actions humanitaires sont indissociables des opérations de déminage, étant même un prérequis pour permettre le retour des populations dans un environnement de paix et de sécurité.  C’est pourquoi, a rebondit le délégué, le Japon a fait de l’action contre les mines l’une de ses priorités diplomatiques, un volontarisme concrétisé par son statut de second pays contributeur avec 263 millions de dollars dépensés entre 2011 et 2015.  Une somme qui a servi au déminage, mais aussi à la surveillance, à l’assistance aux victimes et à l’éducation aux risques, a-t-il précisé.  Afin d’améliorer l’assistance à la lutte antimines, le représentant a appelé à favoriser les coopérations triangulaires, aider les victimes, augmenter l’éducation au  risque, multiplier les partenariats notamment avec la société civile et accroître l’implication des femmes.

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a rappelé que cette année marque le vingtième anniversaire de la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction.  Il a rappelé l’objectif d’un monde exempt de mines antipersonnel à l’horizon 2025.  Il s’est félicité de la destruction de 51 millions de mines antipersonnel, de stocks passés sous la barre des 50 millions et de la fin du commerce de ces mines.  Il a aussi salué le fait que 162 États sont dorénavant parties à la Convention.  À propos de la Convention sur les armes à sous-munitions, il a indiqué que son pays, qui en avait assuré la présidence, avait initié un dialogue avec des États qui n’ont pas encore rejoint cette Convention.

Le représentant a ensuite fait savoir que l’Allemagne avait consacré 32 millions de dollars à la lutte antimines.  Il s’est toutefois préoccupé de la persistance de « la contamination », citant notamment en exemple le Yémen, l’Iraq ou la Syrie, qui souffrent également de l’impact des engins explosifs improvisés. Il s’est félicité que le projet de résolution prenne en compte cet aspect, ainsi que la dimension humanitaire de la lutte antimines.  

M. MICHAEL DOUGLAS GRANT (Canada) a indiqué que 51 millions de mines antipersonnel avaient été détruites dans le monde et que le nombre de victimes avait baissé de manière « substantielle », constatant toutefois qu’il reste encore beaucoup à faire pour parvenir à l’objectif d’un monde exempt de mines antipersonnel à l’horizon 2025.  Il a rappelé que l’existence de nombreux champs de mines antipersonnel était aujourd’hui le fait d’acteurs non étatiques, déplorant leurs conséquences humanitaires, en particulier pour les réfugiés ou les personnes déplacées par des conflits.  Il a appelé à mieux répondre aux besoins des populations les plus touchées et à promouvoir l’inclusion et l’égalité des sexes dans la lutte antimines.  Il a souligné que les personnes handicapées et les survivants constituaient des populations vulnérables, insistant sur les efforts à déployer pour faciliter leur réintégration, notamment pour les femmes ou les filles qui peuvent avoir besoin de services économiques, sociaux et de réhabilitation adaptés.

Le représentant a ensuite indiqué que son pays avait consacré l’année passée 17,5 millions de dollars au déminage en Afghanistan, en Colombie, en Iraq, au Sri Lanka et en Ukraine.  Il a précisé que pour répondre au mieux aux réalités et aux populations locales, le Canada employait des équipes paritaires de liaison avec les collectivités équilibrées qui forment des femmes locales pour les intégrer dans leurs équipes de déminage.  À ses yeux, les efforts collectifs pour éliminer les mines antipersonnel et les restes explosifs de guerre, l’aide humanitaire, la sécurité et le travail de développement « doivent tenir compte du sexe et de la diversité, afin de contribuer à rebâtir les sociétés et instaurer une paix durable » 

M. MUSTAPHA ABBANI (Algérie) a déploré que la présence continue de mines antipersonnel et de vestiges de guerre ait des conséquences très graves au niveau social et économiques ainsi que sur la mise à disposition de l’assistance humanitaire.  Il a indiqué que son pays avait complété la dernière phase de destruction des stocks de mines antipersonnel qu’il avait gardés à des fins d’entrainement.  Pour ce qui est de la dimension humanitaire, l’Algérie a terminé le déminage du territoire, éliminant les mines antipersonnel posées du temps de la période coloniale.  « Grâce à ces efforts nationaux, nous avons réussi à détruire quelques neuf millions de mines et à déminer 62 millions d’hectares de zones agricoles, entre 1963 et 2016, s’est-il félicité, précisant que ces activités ont permis de lancer des projets de développement le long des frontières est et ouest du pays, des régions autrefois contaminées.

Le représentant a ensuite assuré que son pays accordait une grande importance aux personnes handicapées, victimes de ces mines antipersonnel, et qu’il leur offre une assistance pour leur réintégration sociale et professionnelle, avec l’appui d’organisations de la société civile.  Il s’est dit préoccupé par l’augmentation du nombre de victimes provoquées par des restes d’engins explosifs de guerre, des engins explosifs improvisés et des mines antipersonnel terrestres, notant une hausse de 40% entre 2015 et 2016.  Il a imputé cela au nombre croissant de conflits armés dans le monde, particulièrement en Moyen-Orient, en Afrique et en Asie.  Il a aussi souligné que la lutte antimines participait à la prévention des conflits en nettoyant les terrains de tous engins explosifs, et en empêchant l’accès à des matériaux explosifs permettant de les fabriquer.

Le représentant s’est également félicité des efforts des Nations Unies pour promouvoir des programmes visant à aider les victimes et à sensibiliser les populations au risque des mines et autres engins explosifs.  Plus spécifiquement, il a salué le plan du PNUD de 2016, qui cherche à consolider la paix grâce à la lutte antimines, notant par ailleurs que la lutte antimines joue un rôle essentiel dans la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. ESAM BEN ZITUN (Libye) a rappelé que son pays avait longtemps souffert des mines antipersonnel et des restes explosifs de guerre après l’occupation italienne, rappelant que son peuple avait payé un prix exorbitant pour des conflits auquel il n’était pas partie.  « Les répercussions se font sentir génération après génération, en dépit des efforts déployés, et continuent de provoquer des morts et de nombreux blessés », a-t-il insisté, indiquant que les mines antipersonnel figuraient parmi les armes les plus utilisées dans les guerres qu’a connu la Libye et qu’elles ont touché plus de civils que de militaires. 

Le représentant a ensuite salué l’assistance fourni par les Nations Unies après la libération de villes tombées aux mains de Daech, citant notamment les programmes d’informations à l’intention des populations et les consignes techniques pour les autorités libyennes.  Il a appelé à poursuivre les contributions, citant notamment la situation à Syrte et à Benghazi, où l’impact des mines antipersonnel posées entre les maisons et dans les rues, et la persistance de reste explosifs de guerre se fait encore ressentir alors que les populations civiles sont revenues.  Le représentant a expliqué que ces engins étaient très développés, pouvant être détonés par téléphone portable ou déguisés en objet insoupçonnables.  « On se demande si ces technologies ont été développées dans notre pays et nous demandons aux Nations Unies de faire un rapport sur ces types de mines antipersonnel afin d’améliorer l’information sur celles-ci », a-t-il insisté.

Il a déploré que les ressources ne soient pas encore suffisantes pour faire face à la quantité et au niveau technologique des mines antipersonnel, tout en saluant l’aide apporté par les Nations Unies pour la formation de 200 spécialistes, dont 30 formés à l’évaluation des engins explosifs improvisés et des restes explosifs de guerre, en coopération avec les autorités libyennes.  Le représentant a aussi appelé à davantage de coordination entre Service de la lutte antimines de l’ONU, les autorités locales et la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL).  Il a notamment appelé à l’établissement d’une carte indiquant quelles sont les zones contaminées par les mines antipersonnel afin de limiter les victimes parmi la population civile.  Il a en outre proposé que la Libye devienne un lieu d’entrainement pour le Service de la lutte antimines de l’ONU, espérant qu’elle puisse devenir un exemple de la transition vers un pays exempt de ces armes.

M. HAMADI (Émirats arabes unis), a regretté que les mines antipersonnel et les restes explosifs de guerre tuent des milliers de personnes, endommagent les infrastructures et entravent le développement durable.  « La lutte antimines est essentielle pour protéger les civils, faciliter l’aide humanitaire et faciliter le retour des personnes déplacées » a déclaré le représentant qui a indiqué que son pays avait appuyé nombre d’efforts internationaux et régionaux de déminage pour mettre fin aux répercussions socioéconomiques de ces engins.  Au Liban, il a ainsi contribué à un projet de déminage à hauteur de 50 millions de dollars, qui a permis la dépollution de trois millions de kilomètres carrés et la destruction de 26 000 mines antipersonnel.  « La présence des mines antipersonnel empêchaient les habitants d’accéder aux écoles, de mener à bien leurs activités agricoles », a indiqué le représentant.  Les Émirats arabes unis appuient aussi un projet de déminage à Kandahar, en Afghanistan, qui a permis de déminer 72 champs et aux personnes de rentrer chez elles, et contribuent activement à différentes initiatives telles que la conférence de donateurs, et la réunion des États parties à la Convention d’Ottawa.

M. HUANG DA (Chine) a salué les résultats positifs obtenus ces dernières années dans la lutte antimines grâce aux efforts conjoints de la communauté internationale.  Il a estimé que la lutte antimines devait tenir compte des conditions spécifiques du pays affecté.  Il a aussi insisté sur les efforts à déployer pour aider ces pays à accomplir une transition d’un déminage effectué avec l’assistance des Nations Unies, à un déminage réalisé par leurs propres équipes, afin de renforcer leurs capacités propres et d’assurer un développement pérenne dans ce domaine.  Il a également appelé la communauté internationale à axer ses efforts sur les effets concrets de l’assistance antimines et sur la coopération, en explorant de nouvelles approches.

Le représentant a ensuite précisé qu’en tant qu’État partie à la Convention concernant certaines armes classiques et à son Protocole II tel qu’amendé, son pays remplissait ses obligations et prenait part aux travaux du Groupe d’experts gouvernementaux sur le cadre du Protocole II.  Il a indiqué que son pays ayant été autrefois affecté par les mines antipersonnel, la Chine comprenait « parfaitement les préoccupations des pays touchés » et qu’elle participait activement aux programmes d’assistance dans la lutte antimines, en particulier avec la mise en place depuis 1998 d’un programme qui lui est propre.  « La Chine a offert son assistance à plus de 40 pays des régions d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine », a-t-il indiqué.

M. GEORGE WILHELM GALLHOFER (Autriche) s’est félicité de la destruction de 49 millions de mines antipersonnel, de 10 000 vies sauvées et de l’adhésion de 162 États à la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction.

Se disant très préoccupé par l’utilisation des mines antipersonnel par le Myanmar, qui n’est pas partie à la Convention, le représentant a indiqué, qu’en sa qualité de président de la Convention, il avait demandé l’établissement d’une mission internationale indépendante d’établissement des faits sur ce sujet.  Il a ensuite rappelé que le nombre de victimes était resté élevé en 2016 en raison de l’accroissement de l’usage d’engins explosifs improvisés.  Il a ensuite indiqué que son pays entendait profiter du vingtième anniversaire de la Convention pour redynamiser les engagements de la communauté internationale de parvenir à l’objectif d’un monde exempt de mines antipersonnel à l’horizon 2025.

Décision sur le projet de résolution A/C.4/72/L.12

Par ce projet de résolution adopté par consensus, l’Assemblée générale, demanderait aux États Membres de respecter leurs obligations internationales respectives en matière de lutte antimines.

Elle prierait instamment tous les États, en particulier ceux qui sont le mieux à même de le faire, ainsi que les organismes des Nations Unies et les autres organisations et institutions compétentes en matière de lutte antimines, d’aider les États touchés par le problème des mines en fournissant, à leur demande et selon qu’il conviendra: une assistance aux pays touchés par le problème des mines et des restes explosifs de guerre pour leur permettre de créer ou de développer leurs propres capacités de lutte antimines; un soutien aux programmes nationaux; des contributions régulières et prévisibles en temps voulu à l’appui des activités de lutte antimines; des informations et l’assistance technique, financière et matérielle nécessaires pour localiser, éliminer, détruire ou neutraliser au plus tôt les champs de mines, les mines et les restes explosifs de guerre; ainsi qu’une assistance technologique visant à aider les pays touchés par le problème des mines et des restes explosifs de guerre, et à promouvoir la réalisation de travaux de recherche scientifique axés sur la conception de techniques et de moyens de lutte antimines d’utilisation facile, qui soient efficaces, viables, appropriés et écologiquement rationnels.

L’Assemblée générale engagerait tous les États touchés par le problème des mines à veiller à identifier toutes les zones où se trouvent des mines ou des restes explosifs de guerre, de la manière la plus efficace possible.

Elle inviterait les États touchés par le problème des mines à faire en sorte de tenir compte de l’assistance aux victimes avec les programmes dans le domaine de la santé et du handicap, afin que la lutte antimines fasse partie de leurs priorités de développement et que son financement, notamment celui de l’assistance aux victimes, soit assuré.

Elle encouragerait tous les programmes et organismes multilatéraux, régionaux et nationaux à inclure des activités de lutte antimines, notamment de déminage, dans leurs programmes de consolidation de la paix, d’aide humanitaire, de stabilisation, d’aide au relèvement, à la reconstruction, au maintien de la paix et au développement.

Elle demanderait instamment aux États de fournir une aide humanitaire aux victimes des mines et des restes explosifs de guerre et de prendre des mesures pour que la population civile soit épargnée.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: les délégations souhaitent que les missions politiques spéciales disposent de leur propre budget

Soixante-douzième session,
21e séance – après-midi
CPSD/650

Quatrième Commission: les délégations souhaitent que les missions politiques spéciales disposent de leur propre budget

« Vitales », « cruciales », « essentielles », « indispensables »… À l’occasion du débat de la Quatrième Commission consacré aux missions politiques spéciales, les États Membres ont salué le rôle central de cet outil du Département des affaires politiques (DAP) pour renforcer la prévention des conflits et pérenniser les efforts déployés par les Nations Unies pour consolider la paix, soulevant toutefois la question de leur financement par un budget propre.

Comme l’a rappelé l’Inde, il y a aujourd’hui 25 missions politiques spéciales, dont 14 déployées sur le terrain, avec 10 Envoyés spéciaux du Secrétaire général des Nations Unies, qui interviennent ou qui sont actives essentiellement en Afrique et dans l’ouest de l’Asie.  « Ce nombre élevé donne une idée de la fragilité de la paix et de la sécurité dans le monde actuel », a résumé son représentant, tandis que d’autres délégations ont rappelé l’évolution des conflits et donc des défis auxquels sont confrontées les Nations Unies.  « La croissance continue des menaces transnationales comme le terrorisme, l’extrémisme violent, le trafic d’êtres humains et les migrations irrégulières sont les premiers facteurs de déstabilisation des États », a souligné le représentant du Kenya.

À l’instar des missions en Colombie, en Somalie, en Libye ou au Libéria, les délégations ont mis en valeur l’utilité de ces dispositifs, en particulier pour faciliter les transitions après des opérations de maintien de la paix, pour la reconstruction des institutions, la formation des corps chargés des pouvoirs régaliens (justice, police) ou encore l’accompagnement des processus électoraux.

Dans son intervention liminaire, le Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions, M. Atul Khare a en outre souligné que les missions politiques spéciales, qui sont beaucoup plus petites en taille que les opérations de maintien de la paix, ont également des structures d’appui plus réduites en matière d’administration et de logistique alors qu’elles sont souvent déployées dans des zones reculées ou caractérisées par l’insécurité.  Il a indiqué que, pris dans leur ensemble, ces éléments créent une situation particulièrement complexe, notamment en ce qui concerne la gestion des chaînes d’appui et d’approvisionnement.

Aussi, pour répondre de manière rapide et efficace aux besoins des missions politiques spéciales, a-t-il jugé important d’apporter des améliorations constantes à l’organisation, la planification et la mise en œuvre de la chaîne d’approvisionnement.

De son côté, le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Tayé-Brook Zerihoun, a défini quatre priorités pour le DAP, à savoir la prévention des conflits et pérennisation de la paix, l’augmentation de l’expertise au sein du DAP et dans les missions, l’accroissement des capacités d’accompagnement des processus électoraux et le renforcement de la coopération entre le DAP et les organisations régionales et sous-régionales.

Se faisant l’écho de ces objectifs, le Kenya a d’ailleurs estimé que la Somalie était « l’exemple de ce que peut permettre une mission politique spéciale avec une bonne collaboration entre un pays hôte, une organisation sous régionale (la Communauté d’Afrique de l’Est), une organisation régionale (l’Union africaine), une opération de maintien de la paix (la Mission d’observation militaire de l’Union africaine en Somalie - AMISOM) et les Nations Unies (Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie).

À l’instar de nombreuses délégations comme la Colombie ou la République islamique d’Iran, le représentant kényan a aussi soulevé la question des budgets consacrés aux missions politiques spéciales, rappelant que « plus pourrait être fait » en Somalie si le financement était « pérenne ».  S’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, le Royaume du Maroc a mis en avant l’augmentation exponentielle des financements des missions politiques spéciales au cours de la dernière décennie, déplorant que ces missions ne suivent pas le cycle du budget ordinaire de l’ONU. 

Rappelant que la nécessité de disposer d’un budget propre pour les financer avait été mise en lumière « depuis longtemps par de nombreux États », l’Inde et El Salvador ont demandé la création rapide d’un budget autonome « sur le modèle de celui existant pour les opérations de maintien de la paix, avec les mêmes critères de méthodologies et les mêmes mécanismes de transparence et de responsabilisation ».

Si elle a soutenu l’idée d’une fusion des départements des opérations de maintien de la paix et des affaires politiques, l’Argentine a aussi appelé à des propositions et des progrès concernant les questions de financement, regrettant que ces discussions soient « dans une impasse » depuis six ans au sein de la Cinquième Commission (questions administratives et budgétaires).

À l’occasion du dialogue interactif organisé en début de session, le Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions a précisé que sur les 561 millions de dollars engagés pour les missions politiques spéciales en 2016, 317 millions avaient été consacrés à la gestion et la rémunération du personnel civil et 214 millions aux coûts opérationnels.  Il a également rappelé qu’il était « par nature difficile d’anticiper les coûts des missions politiques spéciales », citant en exemple les attaques terroristes de ces dernières semaines en Somalie qui ont fait près de 400 morts.  Il a cependant rappelé que dans la réforme envisagée par le Secrétaire général, il était prévu de passer à un budget ordinaire annuel pour mieux répondre aux évolutions sur le terrain et qu’un chapitre spécifique serait consacré aux missions politiques spéciales.  L’augmentation du seuil pour les dépenses imprévues ou extraordinaires et également prévues.

La Quatrième Commission (questions politiques spéciales et décolonisation) poursuivra ses travaux mercredi le 1er novembre 2017, à partir de 10 heures.

ÉTUDE D’ENSEMBLE DES MISSIONS POLITIQUES SPÉCIALES (A/72/357/REV.1 ET A/C.4/72/L.10)

Déclaration liminaire du Secrétaire général adjoint aux affaires politiques

M. TAYÉ-BROOK ZERIHOUN, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, a rappelé le rôle clef des missions politiques spéciales dans la promotion de la paix et de la sécurité internationales, soulignant les défis de plus en plus complexes auxquels ces missions sont confrontées dans l’exécution de leurs mandats.  Il a rappelé que l’environnement global était de plus en plus instable et volatile, marqué par des enjeux de plus en plus complexes liés aux ressources naturelles, territoires, crises institutionnelles internes.  Il a aussi évoqué l’apparition d’enjeux de plus en plus régionaux, comme en Libye et en Syrie, et l’apparition d’acteurs non étatiques tels que les organisations terroristes État islamique ou Boko Haram.

Dans ce contexte, M. Zerihoun a souligné l’importance vitale des missions politiques spéciales, qui interviennent dans la diplomatie préventive  et dans les processus de transition, appuyant la reconstruction des États, le renforcement des institutions, et l’identification précoce des risques de conflit.  Il a rappelé les activités de l’année passée, allant de la transformation de la Mission des Nations Unies en Colombie en Mission de vérification du cessez-le-feu, en passant par les travaux des missions politiques spéciales en Somalie et en Libye.  Il a aussi mis en avant quatre priorités pour le Département des affaires politiques (DAP).

Le Sous-Secrétaire général a notamment souligné que la prévention des conflits et la pérennisation de la paix doivent figurer au cœur de la réorientation des efforts des Nations Unies pour la paix et la sécurité internationales.  Il a mis en avant les priorités de la réforme du Secrétaire général pour l’architecture onusienne du maintien de la paix, insistant sur le rôle central des missions politiques spéciales dans ce processus.

M. Zerihoun a aussi insisté sur le renforcement de la coopération entre le Département des affaires politiques (DAP) et les organisations régionales et sous-régionales, afin de mieux déceler les signes avant-coureurs de crises et d’intervenir par la diplomatie préventive.  Il a cité en exemple le rapprochement avec l’Union africaine, via la signature, en avril dernier, du Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité.  Il a précisé que des efforts étaient aussi déployés pour renforcer la collaboration avec l’Union européenne, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et la Ligue des États arabes.

Il a aussi mis en avant la nécessité de renforcer la présence des femmes dans l’agenda de la paix et du développement, appelant au déploiement de plus en plus important d’une expertise féminine au sein du DAP.  Il a ajouté que le quartier général du DAP au Siège des Nations Unies continuerait d’appuyer les efforts des missions politiques spéciales pour encourager la participation politique des femmes dans les processus de prévention et de médiation.

Enfin, M. Zerihoun a indiqué que le DAP avait accru son implication dans l’assistance aux processus électoraux, afin d’augmenter les capacités des missions politiques spéciales dans ce domaine.

Le Sous-Secrétaire général a aussi mis l’accent sur la sécurité des personnels des missions politiques spéciales, rappelant le meurtre de deux membres du Groupe d’experts sur la République démocratique du Congo en mars 2017.

« Je n’ai aucun doute sur le fait que les missions politiques spéciales continueront à jouer un rôle critique pour appuyer la stabilité et la paix; il est donc indispensable de leur prêter attention ainsi qu’aux conditions dont elles ont besoin pour réussir », a-t-il conclu.

Présentation du Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions

M. ATUL KHARE, Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions, a indiqué que l’attentat qui a récemment frappé Mogadiscio était un rappel criant de l’environnement volatile dans lequel évoluent souvent les missions politiques spéciales.  Il a indiqué que ce missions sont beaucoup plus petites en taille que les opérations de maintien de la paix et ont également des structures d’appui plus réduites en matière d’administration et de logistique alors qu’elles sont souvent déployées dans des zones reculées ou caractérisées par l’insécurité.  Il a indiqué que pris dans leur ensemble, ces éléments créent une situation particulièrement complexe, notamment en ce qui concerne la gestion des chaînes d’appui et d’approvisionnement, autant de défis que le Département d’appui aux missions doit faire face lors de l’élaboration de solutions face à la situation de terrain. 

M. Khare a expliqué qu’au cours de l’année passée, son département avait appuyé la réduction des effectifs, puis le retrait de la Mission des Nations Unies en Colombie et sa transition sans faille avec la Mission de vérification en Colombie, qui est en train de se déployer dans l’ensemble du pays pour contrôler la mise en œuvre du nouveau cessez-le-feu entre le Gouvernement colombien et l’Armée de libération nationale (ELN).  Il a indiqué qu’en Libye, son département apportait un soutien particulier à la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) qui se prépare à étendre ses activités sur tout le territoire, mettant en avant un nouveau système innovant de rotation des équipes basées à Tunis, pour permettre à cette mission de disposer d’une base arrière robuste et efficace.  Il a précisé que cette expérience serait utilisée à l’avenir pour appuyer d’autres missions politiques spéciales.

Le Secrétaire général adjoint a aussi indiqué que son département soutenait le Département aux Affaires politiques (DAP) pour l’accroissement des missions en Syrie, au Burundi, et au Yémen, insistant sur le renforcement de la coopération avec les organisations régionales et sous-régionales.

Il a ensuite indiqué que pour répondre de manière rapide et efficace aux besoins des missions politiques spéciales, il importe d’apporter des améliorations constantes à l’organisation, la planification et la mise en œuvre de la chaîne d’approvisionnement.  Il a précisé que des méthodes d’évaluation étaient développées pour améliorer l’efficacité de ce soutien et que ces améliorations seront intégrées à la réforme voulue par le Secrétaire général.  « Ces priorités, qui doivent éviter les doublons, renforcer la redevabilité et la transparence, permettront aux missions politiques spéciales d’être plus efficaces dans leurs résultats et la mise en œuvre de leurs mandats », a-t-il insisté.

M. Khare a indiqué que la réforme du Secrétaire général porte notamment sur la création d’une ligne budgétaire indépendante pour les missions politiques spéciales ainsi que sur l’augmentation du seuil pour les dépenses imprévues ou extraordinaires.  Il a estimé que ces mesures permettraient au Secrétariat de mieux soutenir ces missions, au moment critique de leur lancement, mais aussi d’améliorer la présentation annuelle, devant l’Assemblée générale de leurs besoins.  Il a espéré que la réforme du Secrétaire général permettra à l’ONU et ses missions politiques spéciales de relever plus facilement les défis actuels et à venir.

Dialogue interactif

La question du financement des missions politiques spéciales a largement dominé le dialogue interactif avec les délégations.  Le représentant de la République islamique d’Iran a notamment voulu savoir quelles étaient les activités les plus onéreuses des missions politiques spéciales, tandis que son homologue de la Colombie s’est interrogée sur l’avenir budgétaire de ces missions étant donné leur multiplication.

Suite à cela, le Secrétaire général adjoint à l'appui aux missions a indiqué que sur les 561 millions de dollars engagés en 2016, 317 millions de dollars avaient été consacrés à la gestion et la rémunération du personnel civil, tandis que 214 millions de dollars ont épongé les coûts opérationnels (unités de garde, services d’aviation, préservation de la vie: fourniture d’eau, d’électricité…).  Il a expliqué qu’il est par nature difficile d’anticiper les coûts des missions politiques spéciales, indiquant, à titre d’exemple, qu’il était impossible de prévoir que les attentats terroristes fassent plus de 400 morts à Mogadiscio cette année.  Il a cependant indiqué que les réformes envisagées prévoient de faire du budget ordinaire, qui est actuellement bi-annuel, un budget annuel pour mieux répondre aux évolutions sur le terrain, rappelant aussi qu’un chapitre budgétaire spécifique serait consacré aux missions politiques spéciales.

Les représentants de la République islamique d’Iran et du Venezuela ont par ailleurs demandé des précisions sur les actions de prévention, les interactions avec les États et les difficultés rencontrées sur le terrain par les missions politiques spéciales.

Dans un premier temps, le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques a rappelé que les missions politiques spéciales étaient déployées à la demande des États Membres et qu’elles pouvaient prendre différentes configurations.  Il a ensuite expliqué que le mécanisme de prévention s’appuyait sur deux piliers: les alertes précoces et les actions d’urgence.  Rappelant que la base du travail de coopération des missions est liée à l’appui des initiatives régionales, il a parlé de l’expertise technique que les missions politiques spéciales fournissent durant les élections.  « Je ne vais pas dire que nous sommes considérés comme neutre, mais nous sommes vus en tout cas comme un fournisseur de valeur ajoutée », a affirmé M. Zerihoun.

Sur la question des difficultés rencontrées sur le terrain, le Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions a notamment cité les déploiements effectués alors que les accords ne sont pas complètement finalisés.  Il a également parlé des difficultés liées à l’utilisation des forces de sécurité locale pour effectuer des gardes lorsque les pays ne disposent pas de ressources organisées, citant notamment le cas de la Libye.  Des défis peuvent également jaillir au niveau des contrats conclus avec l’ONU, faute de connaissance des spécificités administratives de l’Organisation.

Débat général

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. HALFOUNI (Maroc) a souligné l’importance du respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique de tous les États dans la conduite des missions politiques spéciales.  Il a ensuite appelé le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale à établir des mandats « clairs et réalisables » pour ces missions, basés sur une « évaluation objective » de la situation.  Le représentant a également exhorté ces deux organes à se prémunir contre l’adoption de mandats « qui manqueraient de soutiens politiques ou ne disposeraient pas de ressources suffisantes ou ne seraient pratiquement pas réalisables ».  Dans ce cadre, il a estimé qu’une approche intégrée de la planification des Missions était primordiale pour garantir le lien entre la formulation des mandats et leur mise en œuvre sur le terrain.  « Nous espérons que la réforme en cours permettra de répondre à ces défis », a-t-il dit.

Par ailleurs, s’il a pris note des efforts du Secrétaire général pour instaurer une parité entre hommes et femmes, le représentant a appelé à garantir également une représentation géographique équitable dans la composition du personnel nommé à des postes de hauts rangs au sein des missions politiques spéciales, en particulier les représentants spéciaux, les envoyés et les membres de groupes de travail sur les sanctions.  En outre, le représentant marocain a exprimé l’attachement de son groupe envers le consensus entre États Membres dans la définition des mandats des missions politiques spéciales.  Selon lui, seules les idées et approches adoptées collectivement par les États Membres doivent être mises en œuvre.  Il a également appelé le Secrétaire général à organiser des dialogues interactifs portant sur les missions politiques spéciales.

Enfin, le représentant a pris note de la complexité et de l’augmentation exponentielle des critères de financements des missions politiques spéciales au cours de la dernière décennie, notamment en raison du fait que l’établissement et le financement de ces missions ne suivent pas le cycle du budget ordinaire de l’ONU.  Pour améliorer l’efficacité et la transparence budgétaire de ces missions, le représentant a appelé à ce qu’elles soient financées en fonction de critères, de méthodologies et de mécanismes identiques à ceux utilisés dans le cadre des opérations de maintien de la paix, notamment en créant un compte séparé pour les missions politiques spéciales.

M. GÜVEN BEGEC (Turquie), au nom du groupe MIKTA, qui regroupe le Mexique, l’Indonésie, la République de Corée, la Turquie et l’Australie, a salué le processus lancé par le Secrétaire général pour réformer l’architecture onusienne de la paix et de la sécurité.  La transition des missions de maintien de la paix vers des missions politiques spéciales doit être financée de façon adéquate et être dotée des capacités nécessaires à cette transformation, a-t-il ajouté.  Selon le MIKTA, rendre la paix durable requiert en particulier que la continuité des efforts de paix soit assurée par le biais de ressources matérielles, financières et politiques adaptées.  Enfin, se référant au rapport du Secrétaire général sur les missions politiques spéciales, le représentant a insisté sur le fait que le dialogue interactif entre la direction des missions et les États Membres était le moyen le plus efficace de renforcer la contribution à une paix durable de celles-ci.

S’exprimant au nom du groupe CANZ (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande), M. MICHAEL BONSER (Canada) a souligné que depuis 2010, le nombre de conflits armés violents avait triplé et qu’en 2016 il y avait plus de pays qui étaient confrontés à des conflits armés qu’au cours des 30 dernières années.  « À ce rythme, en 2030, plus de la moitié des pauvres vivront dans des pays où le niveau de violence est très élevé », s’est-il inquiété.  Dans ce contexte, il a salué les ambitions de réformes du Secrétaire général pour accroître la cohérence et l’efficacité des efforts des Nations Unies pour prévenir les conflits et placer la prévention au cœur des priorités.

Il a estimé que dans cet objectif, les missions politiques spéciales étaient indispensables pour anticiper les conflits et pérenniser la paix et la stabilité, soulignant qu’elles étaient « la meilleure expression opérationnelle des capacités politiques des Nations Unies ».  Il a cité en exemple les Centres régionaux de diplomatie préventive en Asie ou en Afrique, qui sont « des outils efficaces dont le coût est relativement bas ».

Le représentant a aussi insisté sur le rôle des missions politiques spéciales dans la transition aux opérations de maintien de la paix, rappelant que de mauvaises transitions accroissaient le risque de réémergence des conflits.  Il a rappelé le cas de la Sierra Leone où la transition de l’opération de maintien de la paix a duré neuf ans et nécessité plusieurs missions politiques spéciales qui ont fourni un appui politique critique qui a permis de renforcer les capacités nationales de l’État et d’assurer une paix durable, « à un coût bien moindre que l’opération de maintien de la paix qui les avait précédées ».  

Le représentant a ensuite estimé que lorsqu’il s’agit d’évaluer les risques de conflit, les Nations Unies devraient être en mesure de disposer d’un éventail d’outils adaptés aux différentes situations et pays.  Il a encouragé par ailleurs la Commission de consolidation de la paix (CCP) à assister les missions politiques spéciales dans l’exécution de leur mandat, particulièrement dans le contexte d’une transition suite à une opération de maintien de la paix, soulignant qu’elle pouvait faciliter la mise en place de partenariat avec des acteurs extérieurs aux Nations Unies.  Il a aussi souligné que pour être efficaces, les missions politiques spéciales devaient disposer de ressources adéquates.  

Mme INA HAGNININGTYAS KRISNAMURTHI (Indonésie), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a salué le processus de réforme en cours de l’architecture de la paix et de la sécurité, soulignant que celui-ci doit aller de pair avec les processus de réforme du système de l’ONU dans les domaines du développement et de la gestion.  La représentante a ensuite estimé que pour permettre aux missions politiques spéciales de renforcer la prévention et d’offrir des solutions durables tenant compte des besoins au niveau régional, il est essentiel de consolider les partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales.  Les efforts de l’ONU, soutenus par les États Membres et les partenaires régionaux, doivent être pleinement appuyés politiquement, a-t-elle ajouté. 

Par ailleurs, la déléguée indonésienne a souligné l’importance que davantage de femmes soient nommées à des postes clefs des missions politiques spéciales, et en tant que représentantes ou envoyées spéciales au sein des missions de l’ONU et des équipes de pays.  Elle a aussi jugé indispensable que les étapes de transformation des missions de maintien de la paix en missions politiques spéciales soient appuyées financièrement et logistiquement de manière adéquate.  S’exprimant ensuite en sa capacité nationale, la représentante a notamment indiqué que son pays appuyait la restructuration du Département des affaires politiques en un département des affaires politiques et de la consolidation de la paix.

M. CASTANEDES (Guatemala) a appuyé le plan stratégique du Département des affaires politiques (DAP), adopté en 2013, et a salué son extension à la période 2016-2019.  Selon lui, ce plan stratégique constitue un outil de planification utile pour aider à la conception des missions politiques spéciales, afin que ces dernières soient dotées de mandats individuels clairs et conformes à la réalité du terrain.  Il a insisté sur la nécessité pour les Nations Unies de mettre en place des stratégies politiques « plus réalistes et adaptées à la réalité idiosyncratique de chaque pays, ce qui suppose également d’améliorer, au niveau analytique, la stratégie générale et la planification ».

Le représentant du Guatemala a par ailleurs appelé à consacrer davantage de ressources à la prévention des conflits, afin de répondre suffisamment en amont aux causes sous-jacentes, avant l’éclatement des crises.  Pour y parvenir, il a jugé fondamental de renforcer la coopération entre le Département des affaires politiques et les différentes agences de l’ONU, y compris le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), ONU-Femmes, le Département des opérations de maintien de la paix et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH).

Enfin, le représentant a appelé à faire en sorte que l’établissement de missions politiques spéciales se base sur le compromis le plus large possible entre États Membres.  Il a aussi appelé à ce que la réforme du pilier de la paix et de la sécurité du Secrétaire général tende vers l’amélioration de l’efficacité et la cohérence des missions politiques spéciales.

M. GABRIELA MARTINIC (Argentine) a noté qu’au cours des 10 dernières années, les missions politiques spéciales ont assumé un rôle chaque fois plus important dans les efforts de maintien de la paix et de la sécurité internationales.  L’ONU a de plus en plus utilisé cet instrument pour des mandats liés à un large éventail de secteurs, depuis la diplomatie préventive, à l’appui aux processus de paix, en passant par l’assistance à l’établissement de mécanismes de justice, d’observation des régimes des sanctions du Conseil de sécurité et jusqu’à la consolidation de la paix sur le terrain. 

Le représentant a ensuite indiqué que si le projet de résolution négocié cette année représente une révision technique, il suppose une vision à long terme de la paix durable, résultant de l’adoption de résolutions quasiment identiques de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité sur la réforme de l’architecture de la consolidation de la paix.  Il a appuyé le processus de réflexion et de réforme enclenché par le Secrétaire général autour du pilier paix et sécurité et des questions relatives à la logistique et à l’administration y associées.  Il a salué le nouvel accent mis sur la prévention et sur la paix durable, tout en encourageant à éviter la fragmentation et à privilégier une vision stratégique, systémique et intégrale des activités liées à la diplomatie préventive, au maintien et à la consolidation de la paix et au développement.

L’Argentine a soutenu la proposition visant à fusionner les Départements des opérations de maintien de la paix et des affaires politiques et espéré que des progrès seront enregistrés concernant les questions de financement.  Il a rappelé que le Secrétaire général, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB), le Panel indépendant de haut niveau sur les opérations de la paix et le Groupe d’experts sur l’architecture de la consolidation de la paix sont tous favorables à la création d’un compte séparé, à l’établissement d’un cycle budgétaire annuel et à l’accès au compte d’appui pour les missions politiques spéciales.  Il a regretté que les discussions à ce sujet se trouvent dans une impasse au sein de la Cinquième Commission depuis six ans déjà, et encouragé les parties qui négocient à faire preuve de davantage de bonne volonté pour arriver à un accord. 

Pour Mme CARLA ESPERANZA RIVERA SÁNCHEZ (El Salvador) l’origine des conflits a trait aussi bien à des « différences de nature économiques que culturelles, raciales, religieuses et politiques », les différences politiques étant bien souvent celles qui prédominent et conduisent à la violence.  Cela rend les missions politiques spéciales d’autant plus pertinentes, a-t-elle affirmé.  Étant donné le rôle de ces missions, qui va bien au-delà de la participation à un processus de négociations, la représentante a appelé à faire en sorte qu’elles bénéficient d’un appui politique et financier suffisant pour accomplir leur mandat, tout en insistant sur la nécessité de respecter l’intégrité territoriale, l’indépendance politique et la souveraineté des États.

Au cours des dernières années, a par ailleurs constaté la représentante, les missions politiques spéciales ont eu tendance à perturber le budget ordinaire de l’Organisation, étant donné qu’elles représentent une part « considérable » de ce budget.  La représentante a par conséquent appelé à créer un compte spécial pour ces missions.  Cela augmenterait, selon elle, la transparence et mettrait fin aux perturbations majeurs occasionnées pour le budget ordinaire.

La représentante a ensuite appelé le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale à établir des mandats « clairs et réalisables » pour ces missions.  En tant qu’organe le plus représentatif de l’Organisation, l’Assemblée est également, a-t-elle déclaré, l’enceinte où toutes les décisions portant sur la création de missions politiques spéciales doivent être prises.  Enfin, la représentante a appelé le Secrétaire général à promouvoir des mécanismes pour que les pays ayant réalisés des progrès significatifs dans la consolidation de la paix puissent partager leur expérience avec les pays où se déroulent des missions politiques spéciales.

Mme MARÍA EMMA MEJÍA VÉLEZ (Colombie) a rappelé que la première mission politique spéciale déployée dans son pays s’est terminée il y a quelques mois.  Elle a estimé que le succès de cette mission politique spéciale est le résultat d’un processus sur mesure.  Ce besoin de répondre à la réalité sur le terrain, de ne pas se contenter de plaquer des formules toutes faites permet, selon elle, d’établir de meilleurs paramètres.  Elle a aussi insisté sur le fait que la consolidation de la paix est une tâche complexe qui doit inclure les femmes.  « La transversalisation de la perspective de genre permet de relever des défis dans la prévention des conflits et la durabilité à long terme de la construction de la paix », a-t-elle notamment expliqué.  Soutenant la façon dont le Secrétariat général a envisagé sa réforme, elle a assuré qu’on ne peut pas sous-estimer ce type d’engagements quand on est sur le terrain et qu’on doit compter sur des ressources suffisantes.

M. T.K.S ELANGOVA (Inde) a rappelé qu’il y existait actuellement 25 missions politiques spéciales, dont 14 déployées sur le terrain, avec 10 Envoyés spéciaux du Secrétaire général, la majorité des effectifs étant déployés en Afrique et dans l’ouest de l’Asie.  Pour lui, ce nombre élevé donne une idée de la fragilité de la paix et de la sécurité dans le monde, notamment au vu du fait que ces missions politiques spéciales gèrent des conflits internes, impliquant des acteurs non étatiques, ce qui transforme profondément la nature de la réponse que doivent apporter les Nations Unies.  Il a insisté sur l’importance de trouver des solutions politiques qui permettent de prévenir les conflits, en donnant la priorité à la résolution politique.

Il a ensuite déploré la persistance de la fragmentation des opérations au niveau organisationnel et conceptuel, en dépit de la reconnaissance de l’importance d’une approche globale liant le maintien de la paix aux solutions politiques durables, à l’investissement dans les institutions et la gouvernance, ainsi que le développement durable.  Le représentant a également déploré que le processus de réforme des missions politiques spéciales demeure « opaque, alors qu’il nécessite plus de transparence, de consultation entre le Conseil de sécurité et les États Membres ».  Il a souhaité que le Département des affaires politiques organise un dialogue interactif avec les chefs des missions politiques spéciales plus régulièrement afin de tenir au courant tous les États Membres.

Rappelant les inefficacités bureaucratiques et la fragmentation, le représentant a regretté que le rapport du Secrétaire général ne fasse pas mention de la manière dont a été utilisé le budget des missions politiques spéciales, « en dépit du fait que ce soit le mécanisme le plus utilisé des Nations Unies ».  Notant que les missions politiques spéciales ne suivent pas les cycles budgétaires réguliers, il a appelé à les doter de ressources plus pérennes et a défendu « la création d’un budget propre pour les missions politiques spéciales, sur le modèle de celui existant pour les opérations de maintien de la paix, avec les mêmes critères de méthodologies, de transparence et de redevabilité ».

M. OLIVIER MARC ZEHNDER (Suisse) a indiqué le Secrétaire général a relevé dans son rapport que les missions politiques spéciales sont des outils parmi les plus importants dont dispose l’ONU.  Selon le représentant, ces instruments ont joué un rôle clef dans la prévention des conflits grâce à leur flexibilité et leur caractère préventif.  Il est démontré, a-t-il continué, qu’on ne peut pas aborder la paix et la sécurité sans se préoccuper des droits de l’homme et du développement.  C’est pourquoi la Suisse appelle à rapprocher les trois piliers onusiens pour parvenir à une meilleure synergie.  Accompagnée de 70 États Membres, la Suisse a lancé un appel à Genève à ce propos afin d’utiliser le pilier des droits de l’homme pour renforcer la prévention des conflits.  À propos de l’appui et du financement des missions politiques spéciales, le représentant a estimé qu’il fallait renforcer la transparence et éviter le chevauchement d’activités.

M. KAI SAUER (Finlande) a constaté qu’en réponse au contexte sécuritaire mondial, les Nations Unies ont placé beaucoup de pression sur les missions politiques spéciales.  Mais, a-t-il insisté, si on nourrit l’objectif d’une organisation plus réactive et efficace dans sa capacité à prévenir les conflits, il faut que ces missions soient correctement dotées et financées pour remplir pleinement leurs rôles.  Accueillant avec satisfaction le rapport du Secrétaire général sur les missions politiques spéciales, ainsi que ses conclusions sur les efforts nécessaires pour améliorer l’expertise, l’efficacité et la transparence, il a noté que la notion phare de ce rapport c’est celle de la prévention qui doit passer par la diplomatie préventive et la médiation.  Un rôle qui est selon lui dans les attributions des missions politiques spéciales qui bâtissent les capacités et la résilience des sociétés.  Concluant sur le projet de résolution consacré aux missions politiques spéciales, il a assuré qu’il ne s’agissait cette année que d’ajustements techniques et espéré que de nombreux pays le soutiendront.

M. SOSPETER KARANI IKIARA (Kenya) a salué le travail des missions politiques spéciales, particulièrement leur rôle central dans la pérennisation de la paix, la prévention des conflits et la consolidation de la paix.  Il a apporté son plein soutien aux priorités du Secrétaire général pour accroître la diplomatie préventive en faveur de la paix.  Il a insisté sur l’importance de la coopération régionale et sous régionale, rappelant la collaboration du Kenya avec la Conférence internationale des Grands Lacs, l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et la Communauté d’Afrique de l’Est.

Le représentant s’est dit en revanche préoccupé par « la croissance continue des menaces transnationales comme le terrorisme, l’extrémisme violent, le trafic d’êtres humains et les migrations irrégulières », les considérant comme le premier facteur de déstabilisation des États.  Face à cette menace asymétrique, le représentant a insisté sur la nécessité pour les Nations Unies d’être plus « flexibles et proactives », citant les exemples de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), la Mission d’appui en Libye (MANUL) ou du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS).

Il a également salué la création d’un Bureau de lutte contre le terrorisme, « étape utile » pour faire face à ces nouveaux défis.  Il a souhaité que celui-ci coopère directement avec les missions politiques spéciales.  Il a également apporté son soutien à la réforme voulue par le Secrétaire général et a appelé à renforcer la coordination entre les entités des Nations Unies, ainsi que les formations, pour réduire le risque de fragmentation.  Il a aussi souligné que le succès des missions politiques spéciales dépend aussi « d’un financement pérenne et prévisible, avec une coopération appropriée à tous les niveaux ».

Le représentant s’est par ailleurs félicité des « remarquables avancées » en Somalie, avec la tenue d’un processus électoral et le renforcement des capacités sécuritaires de l’État somalien.  C’est là, a-t-il estimé, l’exemple de ce que peut permettre une missions politique spéciale et une bonne collaboration entre un pays hôte (Somalie), une organisation sous-régionale (la Communauté d’Afrique de l’Est), une organisation régionale (Union africaine), une opération de maintien de la paix (AMISOM) et une organisation internationale par le truchement de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie.  Il a toutefois souligné que plus pourrait être fait si le financement de la mission politique spéciale était pérenne.

M. HUMBERTO RIVERO ROSARIO (Cuba) a estimé que les missions politiques spéciales ont été bénéfiques à la sécurité internationale, estimant toutefois qu’elles doivent être définies par des politiques développées conjointement par les États Membres où chacun pourrait faire entendre sa voix.  Il a aussi insisté sur le fait qu’elles doivent avoir des mandats bien définis et disposer des moyens adéquats pour pouvoir les remplir.  Jugeant que ces missions ne doivent pas impacter le budget régulier de l’Organisation et qu’il y a besoin d’identifier un mécanisme de financement différent, il a rappelé que le mouvement des pays non alignés avait proposé que les missions politiques spéciales soient financées grâce à un mécanisme analogue à celui qui finance les opérations de maintien de la paix.

Mme ELSA HAILE (Érythrée) a reconnu l’importance des missions politiques spéciales dans une approche globale de pérennisation de la paix.  Elle a rappelé le rôle crucial de l’Assemblée générale pour guider le Secrétariat dans ses politiques y afférant.  Elle a fermement soutenu la tenue régulière de dialogues interactifs et inclusives avec les États Membres sur l’ensemble des politiques ayant trait aux missions politiques spéciales.  Elle a rappelé que ces dernières devaient être développées, mises en œuvre et contrôlées sur la base de consultations et selon un processus conforme à la Charte des Nations Unies.  Elle a aussi mis en avant le besoin, pour le Secrétariat, d’informer les États Membres de manière complète, en leur procurant des informations détaillées, et dans un délai raisonnable, avant ces dialogues interactifs.  La représentante a en outre souhaité recevoir des rapports plus détaillés sur les mesures prises par le Secrétariat pour renforcer son efficacité, assurer sa transparence et l’équilibre dans la représentation géographique.  

M. YUTAKA SEKITO (Japon) a souligné que les missions politiques spéciales jouent un rôle préventif en appuyant les efforts de consolidation de la paix, de renforcement de la sécurité et de réforme de la justice.  Notant le dynamisme des bureaux régionaux, il a notamment cité le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) qui travaille efficacement avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union africaine pour réduire les tensions électorales en Gambie, ou encore les activités du Bureau du coordonnateur des Nations Unies pour les programmes d’assistance humanitaire et économique concernant l’Afghanistan (UNOCA).  Il a aussi salué le travail de la Mission en Colombie qui a appuyé la mise en œuvre d’un accord de paix « historique », ainsi que de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan et de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq qui répondent à des besoins de reconstruction à grande échelle.  Le délégué japonais a souligné que pour remplir efficacement leurs tâches, ces missions ont besoin de mandats clairement définis.  Notant qu’une perspective de terrain est indispensable pour définir les contours de ces mandats, il a recommandé qu’un examen stratégique régulier de ces missions politiques spéciales soit organisé conjointement par le Conseil de sécurité et les États Membres. 

« Nous reconnaissons le succès qu’ont connu ces missions par le passé, quoique de façon inégale », a déclaré M. NASIR (Maldives).  Selon lui, les missions politiques spéciales continueront d’être des « instruments forts et fructueux » de la diplomatie onusienne, à condition que les États Membres y investissent davantage de ressources financières, d’expertise et de capital politique et que les objectifs de ces missions soient « clairement compris ».  Du point de vue du représentant, les missions politiques spéciales, tout comme les opérations de maintien de la paix, devraient comporter, entre autres, un mandat de renforcement de l’État.  Il a également estimé que l’autonomisation des femmes devait systématiquement être l’un des principaux objectifs des missions politiques spéciales.  En outre, le représentant a insisté sur la nécessité pour ces missions de bénéficier d’un soutien plus large parmi les populations qu’elles sont censées aider, en améliorant leur communication et en entretenant des relations plus soutenues avec ces populations, de même qu’avec les organisations régionales et sous-régionales.  Cela suppose, a estimé le délégué, des mandats clairs et adaptés au contexte politique, économique et social spécifique de chaque pays.  « Les Maldives sont convaincues que cela peut être obtenu via un engagement continu, de la conception à la finalisation de ces missions, et au travers des leçons tirées d’expériences précédentes », a-t-il affirmé.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a estimé que les efforts du Secrétaire général pour réformer l’architecture onusienne de la paix et la sécurité resteraient sans effet sans un appui actif de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité.  Il a ensuite soutenu la priorité accordée par le Secrétaire général au développement de la diplomatie préventive, qui s’accorde parfaitement à la notion de paix durable, a-t-il ajouté.  Le représentant a également souligné l’urgence de rendre le système des Nations Unies dans son ensemble plus cohérent sur le plan institutionnel, cela pour garantir que la prévention des conflits et la paix durable figurent au cœur des activités politiques de l’Organisation, y compris des mandats des missions politiques spéciales.  Évoquant la situation au niveau régional, le délégué a par ailleurs estimé que l’Union africaine et ses mécanismes régionaux avaient démontré la volonté politique nécessaire et l’engagement requis pour répondre efficacement aux situations de crise et consolider la paix.

M. WOUTER HOFMEYR ZAAYMAN (Afrique du Sud) a appelé à établir un partenariat robuste entre les missions politiques spéciales et les organisations régionales et sous-régionales.  Il a indiqué que les envoyés mandatés par les régions peuvent également être utilisés par les Nations Unies afin de renforcer le rôle des missions politiques spéciales, ajoutant que lors de la dernière consultation conjointe entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, ce partenariat a été mis en exergue. 

Le représentant a ensuite souligné que les missions politiques spéciales devaient être dotées de ressources adéquates et prévisibles.  À cet égard, il a demandé l’amélioration des sources de financement, des progrès dans la réforme du financement et de l’appui.  De plus, la création d’un compte séparé devrait non seulement accroître la prévisibilité et la transparence mais aussi accorder aux missions politiques spéciales la reconnaissance qu’elles méritent comme un instrument unique pour résoudre les conflits.  Le représentant a réitéré l’appel des pays non alignés pour que le financement soit assuré par la mise en œuvre des mêmes critères, méthodes et mécanismes utilisés pour financer les opérations de maintien de la paix.  Cela permettra de créer des missions politiques spéciales plus souples dans leurs déploiements et dans l’exécution de leurs mandats respectifs, a-t-il affirmé.

M. TORE HATTREM (Norvège) a jugé que les missions politiques spéciales sont les instruments de terrain de l’ONU aux fins les plus opérationnelles, et qu’à ce titre elles avaient besoin d’un maximum de soutien.  Les missions déployées en République arabe syrienne, en Colombie et en Afghanistan en sont les meilleurs exemples, selon lui.  Il a expliqué que le besoin de ces missions s’est accru du fait de leur bon rapport coût/efficacité.  « Si nous échouons à les appuyer, l’alternative sera souvent de déployer des opérations de grandes échelles », a prévenu le délégué.  C’est pourquoi il a regretté que les États Membres n’aient pas encore pu se mettre d’accord sur un cadre de travail correctement financé, alors même que ce serait synonyme d’économies pour les Nations Unies.  Rappelant que la Norvège soutient la restructuration du pilier de la paix et de la sécurité de l’ONU et partage même l’objectif de « pilier unique », il a estimé qu’inclure les missions politiques spéciales dans l’éventail des opérations de la paix permettrait une approche holistique.

M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) a estimé que le Secrétaire général avait bien défendu dans son rapport la nécessité d’aligner les missions politiques spéciales aux défis qu’elles doivent relever.  Il a estimé que beaucoup dépend de l’appui accordé aux missions et des équipes chargées de la gestion des comptes de ces missions.  Il a appelé à doter ces missions de ressources prévisibles pour les renforcer, réitérant son appui à la tenue de discussions approfondies sur le financement des missions politiques spéciales et à la création d’un budget qui leur serait spécifique.  Si l’analyse et l’alerte précoce sont bien utilisées par les missions politiques spéciales pour prévenir l’émergence ou l’escalade des conflits, le délégué a cependant considéré que la Commission de consolidation de la paix pourrait les assister davantage notamment au niveau des réformes.  Il s’est enfin félicité ce que les femmes avaient pu accomplir au sein de la Mission en Colombie et de la bonne répartition géographique au sein de ces missions en général.

Le Bangladesh a par ailleurs regretté qu’il ait été mis un terme au poste de représentant spécial pour le Myanmar l’an dernier, à l’inverse des recommandations du Bangladesh.  Face à la situation actuelle, il a dit espérer que les Nations Unies se soient rendues compte de leur erreur, et rappelé que le Bangladesh avait proposé une résolution pour l’envoi d’un Envoyé spécial du Secrétaire général au Myanmar.  Il a jugé crucial pour toutes les parties concernées de faciliter le retour volontaire des Rohingya chez eux, déplorant « l’écart immense » entre les engagements pris par le Myanmar et les réalités sur le terrain.

M. EZZIDIN Y. BELKHEIR (Libye) a rappelé que son pays avait une longue expérience de coopération avec les missions politiques spéciales de l’ONU, citant notamment le succès de la Mission d’appui en Libye (MANUL) en matière d’appui aux élections de 2012 et 2014, ainsi que ses contributions au renforcement de l’état de droit, des droits de l’homme et de la société civile.  Il a indiqué que des défis persistent toutefois, qui empêche notamment l’accueil de la MANUL sur le territoire libyen.

Le représentant a noté que le principe d’appropriation n’était pas observé, des rapports étant publiés par la MANUL sans coordinations avec le Ministère des affaires étrangères libyen.  Il a notamment déploré la publication du rapport de 2016 sur les migrants en Libye, estimant qu’un rapport sur un sujet aussi vaste et aussi complexe aurait dû se faire en coopération avec le Gouvernement libyen.  Dans ce rapport, la MANUL se soucie plus de la situation des migrants illégaux et moins sur la situation des Libyens, a-t-il déploré, soulignant que conformément au mandat établi pour les missions politiques spéciales, la MANUL n’aurait pas dû s’emparer de cette question sans concertation avec le Gouvernement libyen.  Il a déploré que cela ait diminué la confiance du peuple libyen dans l’action des Nations Unies, souhaitant par ailleurs que les réseaux sociaux ne servent pas à exprimer des points de vue personnels des membres de la MANUL.

Déplorant les actions qui éloignent les missions politiques spéciales de la population, le représentant a insisté sur l’importance de prendre en compte les spécificités locales, afin d’éviter des erreurs « d’ordre historique, culturelles ou linguistiques ».  Il a notamment regretté que certains éléments de la mission ne parlent même pas la langue locale, mettant en lumière la faiblesse des mécanismes en place.  Pour autant, le représentant a expliqué ne pas vouloir minimiser le rôle des Nations Unies et celui de la MANUL mais mettre en lumière la complexité et les défis nombreux qui existent, afin d’améliorer toutes les missions politiques spéciales. 

Droits de réponse

Réagissant à l’intervention du Bangladesh, la représentante du Myanmar a assuré comprendre la préoccupation de la communauté internationale face à la situation humanitaire des Rohingya.  Elle a indiqué que son pays avait identifié et rapidement adopté des mesures pour améliorer le sort de ces personnes, comme le rapatriement, la réhabilitation et la réinstallation, ainsi que des dispositions humanitaires.  Elle a ajouté que le Myanmar travaille avec la Croix-Rouge et qu’il aide également les Rohingya qui sont réfugiés au Bangladesh.  Elle a aussi assuré qu’un représentant des États-Unis s’est rendu récemment au Myanmar pour voir la situation sur le terrain.  Elle a enfin tenu à rappeler que le Myanmar est parmi les pays les moins développés, mais qu’il a fait de nombreux progrès sur les droits de l’homme au cours des dernières années et qu’il appliquera tous ses engagements.

Le délégué du Bangladesh a estimé que sans l’engagement de la communauté internationale, il y aurait eu beaucoup moins de progrès multilatéraux avec le Myanmar.  « Nous avons vu des signes inquiétants par le passé, a-t-il expliqué. Nous nous étions mis en accord sur un accord en 10 points, mais ensuite nous avons constaté que des dispositions avaient été supprimées ou omis par les autorités du Myanmar dans le document qu’ils ont publié sur les médias sociaux.  Nous aurions aussi aimé entendre le Myanmar dire qu’il apporterait tout son soutien et son aide à l’Envoyé spécial du Secrétaire général qui sera nommé sur cette question », a-t-il indiqué.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sixième Commission: l’examen des normes impératives du droit international général (jus cogens) ne fait pas l’unanimité

Soixante-douzième session,  
25e séance – après-midi
AG/J/3559

Sixième Commission: l’examen des normes impératives du droit international général (jus cogens) ne fait pas l’unanimité

La Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, a entamé aujourd'hui l’examen des derniers chapitres thématiques du rapport de la Commission du droit international (CDI), consacrés aux normes impératives du droit international général (jus cogens), à la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, ainsi qu’à la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés. 

Présentant ces thèmes avant l’ouverture des débats, le Président de la CDI, M. Georg Nolte, a déclaré que le deuxième rapport du Rapporteur spécial, s’appuyant sur l’article 53 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, a cherché à définir les critères d’identification des normes impératives du droit international général (jus cogens).  La commission a décidé de remplacer l’intitulé du sujet « jus cogens » par « normes impératives du droit international général (jus cogens) », et a pris note du rapport intérimaire du Président du Comité de rédaction sur les projets de conclusions 2 et 4 à 7.  M. Nolte a également indiqué que le Rapporteur spécial s’est déclaré indécis sur la pertinence d’élaborer une liste indicative des normes de jus cogens.

Devant les « incertitudes » qui entourent la notion de normes impératives du droit international général (jus cogens), la France a réitéré ses doutes quant à la pertinence pour la commission d’examiner ce sujet.  Selon elle, les débats sur le deuxième rapport du Rapporteur spécial ont témoigné des divisions de la commission sur la « conception même » du sujet à l’étude, qui sont le reflet « des oppositions existantes entre les approches des États ».

Cependant, Trinité-et-Tobago, s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a encouragé la commission à poursuivre l’examen de cette question, en s’appuyant sur l’article 53 de la Convention de Vienne.  Elle s’est en outre déclarée en faveur du changement de nom de ce sujet, contrairement à l’Autriche, qui a estimé que le jus cogens est un concept bien établi qui n’a pas besoin de précision.

Le Danemark, s’exprimant au nom des pays nordiques, a soutenu qu’il convient de gérer les normes impératives du droit international général (jus cogens) à travers l’analyse conceptuelle de la Commission du droit international (CDI) plutôt qu’en élaborant une nouvelle structure normative pour les États.  

Pour l’Espagne, il est fondamental de préserver le caractère ouvert et flexible du processus de formation des normes de jus cogens, un objectif que l’élaboration d’une liste de normes pourrait remettre en question.  Une telle liste devrait être purement indicative et non exhaustive, a renchéri le Mexique.  Si toutefois il devait y avoir une liste, a ajouté le Pérou, il faudrait éviter de donner l’impression d’une liste exhaustive qui pourrait être perçue comme un numerus clausus.

Pour la Grèce, l’acceptation et la reconnaissance d’une norme par tous les États n’est pas nécessaire à la reconnaissance en tant que jus cogens, car aucun État ne possède de droit de veto sur cette question.  Une position partagée par la France, qui a jugé que l’expression « très large majorité » nécessaire à l’acceptation suscite des « incertitudes », certains membres pouvant l’assimiler à « majorité ».  Elle a plutôt suggéré, comme Singapour et la Slovénie, le recours à l’expression « quasi-totalité des États ».

Le premier rapport du Rapporteur spécial de la CDI sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État portait essentiellement sur les dispositions générales relatives à ce sujet, qui concerne deux branches du droit international pour lesquelles la commission a déjà mené des travaux de codification et de développement progressif, soit la succession d’États et la responsabilité de l’État.  La CDI a également cherché à savoir s’il existait des règles de droit international régissant à la fois le transfert d’obligations et le transfert de droits découlant de la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite dans les situations de succession d’États.

L’Autriche a réitéré ses réserves sur l’introduction de cette question controversée, qui avait jusqu’alors été « sagement exclue » des travaux de la commission, ajoutant que les cas retenus par le Rapporteur spécial n’apportent pas assez de substance pour faire valoir des exceptions à la règle bien établie de « non-succession » pour fait internationalement illicite.

De son côté, le Portugal a proposé d’examiner ce sujet sans l’objectif prédéterminé de montrer l’existence de règles et principes généraux relatifs à la responsabilité, ajoutant qu’il est « trop tôt pour décider de la forme finale du projet tant que la partie substantielle du sujet n’a pas été totalement explorée ».

Rappelant qu’il a fait partie récemment des États ayant connu la sécession, le Soudan a soulevé une question qui n’apparaît pourtant pas dans le projet d’article, celle de la nationalité en cas de sécession. 

Pour la Slovénie, la commission devrait examiner la règle « pacta tertiis », selon laquelle un État successeur accepte des obligations découlant de la responsabilité de l’État prédécesseur, avec la possibilité de limiter ou d’exclure cette obligation. 

S’agissant de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le Groupe de travail constitué par la CDI était saisi des projets de commentaires établis par la Rapporteuse spéciale précédente, qui visaient essentiellement à établir la marche à suivre.  Alors que la plupart des conflits actuels sont internes, la CARICOM a pointé du doigt un vide juridique international sur cette question. 

En début de la séance, la commission a terminé ses travaux sur la protection de l’atmosphère et l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.  Prenant la parole à la fin des débats, la Rapporteuse spéciale sur la question de l’immunité a déclaré avoir pris bonne note de la teneur des débats, ajoutant qu’elle en tiendra compte dans la rédaction du rapport consacré aux dispositions et garanties procédurales.

La Sixième Commission poursuivra son examen du troisième groupe thématique du rapport de la CDI demain, mercredi 1er novembre, à 10 heures.

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-NEUVIÈME SESSION (A/72/10)

Suite de l’examen des chapitres VI et VII

M. HECTOR ENRIQUE CELARIE LANDAVERDE (El Salvador) a salué les progrès réalisés par le Rapporteur spécial, M. Shinya Murase, dans la rédaction du projet de directives sur la protection de l’atmosphère et ses commentaires, ainsi que de l’organisation d’un dialogue avec des scientifiques.  Dans ses remarques sur le projet de préambule, El Salvador a appuyé l’idée tendant à reconnaître que l’atmosphère est un élément essentiel pour la Terre, la santé et le bien-être humain, et qu’elle est un bien juridique d’intérêt général pour l’humanité.  Il a aussi appuyé l’identification de principes fondamentaux du droit international de l’environnement comme celui de la responsabilité dans l’équité intergénérationnelle, en vue de garantir la préservation durable de ressources comme l’atmosphère pour les générations futures. 

Le représentant a toutefois critiqué le paragraphe du projet de préambule qui stipule que le projet de directives ne doit pas empiéter sur  les négociations politiques pertinentes en cours.  Il a renvoyé à cet égard au travail de la Commission du droit international en matière de codification et de développement progressif du droit international sur des sujets de transcendance intergénérationnelle.  Ensuite, il a réitéré ses observations sur la portée encore limitée du projet de directive 8 sur la coopération internationale.  Selon lui, il ne fallait pas uniquement mentionner les études de cause à effet ou l’échange d’informations mais ajouter d’autres mesures concrètes de coopération relatives à la prévention, à la réduction et au contrôle de la pollution et à la dégradation atmosphérique. 

M. Celarie Landaverde a également fait des remarques sur le projet de directive 9, paragraphe 2, et sur la corrélation entre les normes du droit international relatives à l’atmosphère et les droits de l’homme, insistant notamment sur la reconnaissance du droit à un environnement salubre.  Dans ce contexte, il a évoqué l’article 11 du Protocole facultatif se rapportant à la Convention américaine des droits de l’homme sur les droits économiques, sociaux et culturels (Protocole de San Salvador).

Passant à l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, il a félicité la Rapporteuse spéciale, Mme Concepción Escobar Hernandez pour son cinquième rapport et les progrès concernant les limites et exceptions à l’immunité, et recommandé une position équilibrée à ce sujet.  Il a en outre partagé la position de certains membres de la CDI sur la liste des crimes figurant au paragraphe 1 du projet d’article 7.  Il a par contre appuyé la décision de la commission relative à l’application de l’immunité ratione personae pour les représentants de l’État ayant commis des crimes figurant sur la liste mentionnée.  Il a enfin fait des remarques sur l’inclusion du crime d’agression, et sur la possibilité d’inclure ou non le délit de corruption, qu’il a jugé inutile pour le moment.

Rappelant que le commerce international a contribué à sortir des milliards de personnes de la pauvreté, Mme HIROKO MURAKI GOTTLIEB Chambre de commerce internationale (CCI), s’est félicitée de la reconnaissance, contenue dans le rapport de la CDI sur la protection de l’atmosphère, que « le libre-échange et les investissements étrangers sont des prérequis au bien-être de l’humanité dans le monde contemporain ».  Notant, comme le rapport, que ces activités peuvent entrer en conflit avec la protection de l’environnement et de l’atmosphère, elle a souligné que le monde des affaires prend « très au sérieux » les défis posés par les changements climatiques et soutient « vigoureusement » la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC).  Le développement durable et les investissements peuvent être complémentaires, a-t-elle affirmé, en prenant en compte, dans les échanges, les facteurs environnementaux, sociaux et économiques.

Mme Gottlieb a salué le projet de directive 10 qui stipule que les mesures de protection de l’atmosphère ne doivent pas constituer un moyen de « discrimination arbitraire ou injustifiable » visant à imposer des restrictions au commerce international et à l’investissement étranger.  Enfin, elle a invité la CDI au dialogue sur les pratiques du monde des affaires relatives à la protection de l’atmosphère afin que les projets de directives ne soient pas élaborés « dans le néant » et contribuent au développement durable.

M. DIRK PULKOWSKI, membre de la Cour permanente d’arbitrage (CPA), a noté que les débats de la Sixième Commission ont traité cette année de nombreuses questions impliquant la Cour.  Concernant l’application provisoire des traités, le représentant a souligné que la plupart des analyses juridiques sur ces arbitrages font désormais partie du domaine public.  Passant à la question de la protection de l’atmosphère, il a noté que le Rapporteur spécial explore dans son rapport les principes juridiques qui gouvernent les relations entre le droit international de l’environnement et les autres règles du droit international.  Il met en lumière les principes de complémentarité mutuelle, selon lesquels les règles du droit international de l’environnement doivent être regardées comme pertinentes.

En ce qui concerne les principes généraux de droit, M. Pulkowsky a rappelé qu’il appartient aux États de décider si oui ou non ces principes doivent relever de la Commission du droit international (CDI).  La Cour permanente d’arbitrage ne prend pas position sur cette question, a-t-il précisé.  Le Répertoire de la CPA comprend plus de 120 cas traités par la Cour, y compris de nombreuses procédures étatiques et toutes ont été rendues publiques.  Ces procédures ont appliqué les principes généraux du droit dans les circonstances où les traités ou encore le droit coutumier ne fournissaient pas de règles décisionnelles, a-t-il expliqué.

Passant à la question de l’administration de la preuve devant les juridictions internationales, l’intervenant a estimé que c’est un sujet particulièrement pertinent pour les décisions internationales.  La pratique des organismes de règlement des litiges a varié considérablement.  Récemment, l’intérêt s’est accru concernant le développement et l’apprentissage des meilleures pratiques des autres institutions, ce qui devrait être encouragé dans un instrument international approprié.  La CPA serait ravie de soutenir de tels efforts, que ce soit au sein de la CDI ou ailleurs, a-t-il assuré.  Après avoir décrit différentes décisions de la CPA en la matière, il a indiqué qu’il se tient prêt à donner des détails de façon plus systématique, comme lors d’une présentation à la CDI durant une session à Genève.

Examen des chapitres VII, IX et X

Venu présenter le troisième et dernier groupe de chapitres thématiques, M. GEORG NOLTE, Président de la Commission du droit international (CDI), a déclaré que, lors de la présente session, la CDI a examiné le deuxième rapport du Rapporteur spécial, qui a cherché à établir les critères d’identification des normes impératives.  La commission a décidé de remplacer l’intitulé du sujet « jus cogens » par « normes impératives du droit international général (jus cogens) ».  La commission a en outre renvoyé au Comité de rédaction les projets de conclusions 4 à 9 proposés dans le rapport, a-t-il précisé. 

M. Nolte a précisé que le Rapporteur spécial a pris comme point de départ l’article 53 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités.  Les membres de la commission sont convenus que les normes du jus cogens se forment sur la base du droit international coutumier, tout en divergeant sur la place à accorder aux règles conventionnelles.  Il a également indiqué que le Rapporteur spécial s’est déclaré indécis sur la pertinence d’élaborer une liste indicative des normes de jus cogens, certaines délégations préférant que la CDI se borne à établir une méthode d’identification.

Le premier rapport du Rapporteur spécial de la CDI sur la succession d’États en matière de responsabilité de l’État portait essentiellement sur les dispositions générales relatives à ce sujet.

Au cours des débats sur le rapport, plusieurs délégations se sont demandé si la thèse « traditionnelle » de la non-succession utilisée par le Rapporteur spécial avait évolué.  Le débat sur les projets d’articles qui a suivi s’est concentré sur la portée de la responsabilité de l’État ainsi que sur des questions de terminologie, a précisé M. Nolte.  Les membres de la commission ont également exprimé des vues divergentes sur le sujet de la « responsabilité internationale », a poursuivi le Président de la CDI.

S’agissant de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, le Président a déclaré que le Groupe de travail constitué par la CDI était saisi des projets de commentaire établis par la Rapporteuse spéciale précédente, qui visaient essentiellement à établir la marche à suivre.

Mme LIZANNE ACHING (Trinité-et-Tobago), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraibes (CARICOM), s’est félicitée du rapport de la CDI sur la protection de l’atmosphère.  Elle a toutefois reconnu qu’il existe un vide juridique international sur la question de la protection de l’environnement lors de conflits armés, alors que la plupart des conflits sont maintenant internes.  Elle s’est félicitée des travaux de la commission en cours sur la protection de l’environnement en période de conflit. 

Revenant sur l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État, la représentante a appuyé l’obligation qui est faite aux États de poursuivre les responsables de crimes graves, sans égard à leur fonction.  Elle a souligné l’importance pour les États d’établir leur compétence en droit interne afin de combattre l’impunité.  Elle a en outre estimé que les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et le crime de génocide méritent un examen par la commission, bien que les crimes contre l’humanité ne fassent pas l’objet de traités internationaux comme les deux autres, sauf dans le cadre du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).

La CARICOM est favorable au programme de travail futur de la CDI sur la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, notamment sur la question de savoir si les actions découlant de faits illicites constituent des « dettes ».  Elle a appuyé le changement de nom du sujet du jus cogens au profit de « normes impératives du droit international général (jus cogens) ».  Elle a appuyé l’utilisation de l’article 53 de la Convention de Vienne comme point de départ des travaux de la commission et l’a encouragée à poursuivre son examen.

M. IB PETERSEN (Danemark), s’exprimant au nom des pays nordiques, a soutenu qu’il convient de gérer les normes impératives du droit international général (jus cogens) à travers l’analyse conceptuelle et analytique de la Commission du droit international (CDI) plutôt qu’en élaborant une nouvelle structure normative pour les États.

Passant au chapitre IX, le représentant a souligné que la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État est pour le moins sujette à controverse.  Le Rapporteur spécial a analysé les pratiques les plus récentes des États et suggère que la traditionnelle règle de la « table rase » a été contestée, ce qui permet d’étudier le transfert des droits et obligations découlant de la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.  C’est une proposition intéressante sur laquelle se pencheront les pays nordiques lorsqu’ils auront en main les analyses de la pratique des États, ce qui donnera de la substance à cette suggestion.  Le représentant a estimé cependant que ce sujet ne permet pas une large catégorisation et que le caractère subsidiaire des projets d’articles tel que proposé par le Rapporteur spécial est une approche réaliste.

En ce qui concerne le chapitre suivant, la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, M. Petersen a noté que les effets négatifs des conflits armés continuent d’être observés dans le monde entier.  Il existe une corrélation claire entre un environnement sûr et la paix et la sécurité internationales.  « Nous continuons à souligner l’importance de ce sujet et partageons l’opinion qu’un travail substantiel a déjà été fait, et qu’il faut à présent le finaliser sans délais, à partir du travail déjà accompli », a-t-il déclaré.  Il a ainsi noté avec satisfaction que le programme de travail pour ce qui reste du quinquennat conduira à une première lecture en 2019 et à la réalisation du projet de principes en 2021.

Mme NADIA KALB (Autriche) n’a pas compris la nécessité de remplacer l’intitulé de la question de « Jus cogens » par celle de « normes impératives du droit international général (jus cogens) » puisque le jus cogens est un concept bien établi qui n’a pas besoin de davantage de précision et que « jus cogens dans le droit international » aurait suffi.  Au sujet du projet de conclusion 2, elle a rappelé que la supériorité hiérarchique des normes jus cogens est plus une conséquence qu’une caractéristique ou précondition pour qu’une norme soit ainsi qualifiée, et elle a suggéré à la commission d’examiner le rapport entre l’universalité de ces normes et la possibilité que certains en refusent l’application.  Sur le projet de conclusion 5, elle a émis des doutes sur le fait que les dispositions de traités pourraient servir de fondement à des normes jus cogens.  Elle a demandé au Rapporteur spécial de donner des exemples de normes jus cogens dérivées à la fois de principes généraux de droit et de règles de traités.

La représentante a réitéré ses doutes sur l’introduction de la question controversée de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, qui avait jusqu’alors été « sagement exclue » des travaux de la commission, d’autant que les quelques cas retenus par le Rapporteur spécial n’apportent pas assez de substance pour faire valoir des exceptions à la règle bien établie de « non-succession » pour fait internationalement illicite.  Elle a également jugé ambiguë la formulation du chapitre et lui aurait préféré « problèmes de responsabilité de l’État dans les cas de succession d’États », qui ne laisse pas entendre que la responsabilité est automatiquement transférée à l’État successeur.  Elle a souhaité que le travail de la commission contribue à clarifier le concept de responsabilité de l’État.

Au sujet de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, Mme Kalb a également souhaité une clarification du rapport entre droit de l’environnement et droit international humanitaire.  Tant que ce dernier est concerné, la question principale n’est pas d’établir de nouvelles règles et normes, mais d’améliorer le respect de celles qui existent déjà.

S’agissant du chapitre consacré aux normes impératives du droit international général (jus cogens), Mme MARIA TELALIAN (Grèce) a estimé que la reconnaissance d’une norme impérative préalable doit être acceptée par la communauté internationale et non dérivée du droit naturel.  D’après elle, les normes impératives du droit international sont fonction du droit international général, qui devrait être défini dans le prochain rapport de la CDI, notamment son lien avec le droit international coutumier.  Elle a ajouté que les dispositions des traités peuvent servir de base à l’établissement du jus cogens

En outre, la représentante a estimé que le terme « général » du droit international général doit être mieux défini et faire l’objet d’une directive par la commission.  À cet égard, elle a jugé que le projet de conclusion 5, qui n’a pas été conservé par le Comité de rédaction, pourrait servir de point de départ.  Pour elle, une norme doit être reconnue par la communauté internationale comme protégeant des valeurs fondamentales pour être acceptée en tant que norme impérative du droit international.  À propos du rôle des traités, elle a déclaré qu’il existe un long débat sur cette question.  Quant au projet de conclusion 7, elle a estimé que l’acceptation et la reconnaissance d’une norme par tous les États n’est pas nécessaire pour la reconnaissance en tant que jus cogens, car aucun État ne possède de droit de veto sur cette question.

Concernant la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, Mme Telalian a prédit que la commission aura des difficultés à établir un droit international précis sur cette question, qui n’a pas fait l’objet d’une pratique étendue par les États.

M. JOSÉ MARTIN Y PEREZ DE NANCLARES (Espagne) a réitéré qu’il est fondamental de préserver le caractère ouvert et flexible du processus de formation des normes de jus cogens, et que l’élaboration d’une telle liste de normes pourrait remettre cet objectif en question.  À son avis, le fait de circonscrire leur portée aux normes impératives du droit international général exclut le jus cogens régional.  Il conviendrait de clarifier que la référence au droit international général n’exclut pas l’existence de normes de jus cogens sur des questions spécifiques, comme le droit humanitaire.

 Le représentant a jugé par ailleurs nécessaire de faire référence à la différence entre la nature de jus cogens d’une norme et sa portée erga omnes, en ayant à l’esprit que la Cour internationale de Justice (CIJ) fait toujours référence au caractère erga omnes dans sa jurisprudence, sans affirmer expressis verbis le caractère de jus cogens de normes et principes que chacun qualifierait ainsi.  L’Espagne est aussi d’avis que les traités ne sont pas les fondements des normes impératives du droit international mais une conséquence.

M. Martin y Pérez de Nanclares n’a pas caché son pessimisme sur l’aboutissement de la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, sur laquelle il n’existe presque pas de normes internationales.

S’agissant des normes impératives du droit international général (jus cogens), M. PABLO ARROCHO (Mexique) a estimé que les projets de conclusions, bien qu’ils représentent une base utile, méritent encore un examen pour éviter les répétitions et les doublons.  De plus, il est important que ces textes ne s’écartent pas des normes énoncées à l’article 53 de la Convention de Vienne.  Il reste à démontrer que cette nature de jus cogens est acceptée et reconnue.  Néanmoins, il serait bon de supprimer le projet de conclusion 6, a-t-il déclaré, car son contenu est déjà pris en considération dans le projet de conclusion 4.

S’agissant des preuves démontrant l’acceptation et la reconnaissance du jus cogens, le projet de conclusion devrait refléter sa nature du droit international coutumier, selon le représentant.  En 1995, le Mexique a présenté des observations écrites à la Cour internationale de Justice (CIJ) concernant la légalité du recours aux armes nucléaires.  Il faudrait par exemple utiliser ce type de matériel pour analyser l’opinio juris des États, a-t-il déclaré.  Concernant la liste, il a noté qu’elle devrait être purement indicative et non exhaustive, afin d’identifier le contenu du jus cogens.  Il lui a paru adéquat de commencer en 2018 l’examen des effets du jus cogens sur le droit des traités.  Il serait bon d’étudier le procédé de gestation de nouvelles normes, pour savoir ce qui détermine l’existence d’un éventuel conflit entre normes.

Passant à la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. Arrocho s’est posé la question de la forme de cet exercice et s’est interrogé sur celle que pourrait revêtir le projet d’articles.  Il s’est dit favorable aux termes définis dans le projet d’article 2.  Dans l’analyse fournie par le rapporteur, ces projets d’articles constitueraient un développement progressif plutôt qu’un exercice de codification.  Il faut donc faire preuve de la plus grande prudence, a-il-il averti.  Quant au projet d’article 4, il doit être réexaminé.  Par ailleurs, il a proposé que dans son prochain rapport, le Rapporteur spécial détaille son analyse des normes primaires et ses effets quant à la succession d’États et d’y inclure une analyse des droits et obligations dans le cadre d’un fait continu dans le cadre de la succession d’États.  Il est important de tenir compte de la pratique des différents tribunaux, ainsi que de la doctrine.  En conclusion, il a prié le Rapporteur spécial d’inclure dans son prochain rapport les décisions de tribunaux extérieurs à l’Europe.

Mme SHERAZ GASRI (France) a réitéré ses doutes quant à l’opportunité pour la commission d’examiner la question des normes impératives du droit international général (jus cogens), en raison des « incertitudes qui entourent la notion ».  Elle a estimé que les débats sur le deuxième rapport du Rapporteur spécial ont témoigné des divisions de la commission sur la conception même du sujet à l’étude, qui sont le reflet des oppositions existantes entre les approches des États.  D’après elle, cette « dissonance » s’est répercutée sur les projets de conclusions adoptés à titre provisoire.  Elle a rappelé que le projet de conclusion 3, sur la définition du jus cogens, a fait l’objet de vives critiques tant au sein de la CDI que de la Sixième Commission, mais se trouve portant dans les projets susmentionnés.  Elle a également réitéré les doutes de sa délégation quant à la référence à la notion de « valeur fondamentale », estimant qu’elle suscite des interrogations. 

La représentante a également questionné l’approche de la commission sur la place réservée à la pratique des États.  Elle a dénoncé à cet égard l’utilisation interchangeable des expressions « communauté internationale » et « communauté internationale des États dans son ensemble », se prononçant en faveur de l’utilisation de la seconde.  Elle a également remis en question l’affirmation voulant que « l’existence d’une pratique n’est pas nécessaire en sus de l’opinio juris ».  Selon elle, une norme de droit international doit, pour acquérir un caractère cogens, être de nature coutumière, ajoutant que c’est principalement la pratique des États qui permet la formation d’une telle norme.  

Mme Gasri a également critiqué la notion selon laquelle les principes généraux de droit peuvent servir de fondement à des normes de jus cogens.  Elle a déclaré que les principes généraux de droit proviennent des ordres juridiques nationaux et non de la pratique internationale, ajoutant que faire des principes généraux de droit une source de normes impératives introduit un « facteur d’insécurité juridique ».  En ce qui concerne l’acceptation et la reconnaissance d’une norme impérative, elle a jugé que l’expression « très large majorité » suscite des « incertitudes », certains membres pouvant l’assimiler à « majorité ».  Elle a plutôt suggéré à cet égard l’utilisation de l’expression « quasi-totalité des États ».

Concernant la Succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. ELSADIG ALI SAYED AHMED (Soudan) a estimé que l’inclusion de ces questions dans le programme de la Commission du droit international (CDI) est opportune car cela pourrait contribuer au développement du droit international.  Il s’est félicité que la CDI ait décidé d’étendre ses travaux malgré les difficultés pouvant mettre à mal les questions qui demeurent en matière de succession d’États.  Le chapitre soulève des questions délicates en matière d’archives et de droit privé, entre autres.  Or, il n’y a pas pour le moment de droit coutumier en raison du faible nombre de cas documentés.  Le manque de pratique des États fait qu’il n’y a pas de norme générale établie et les États se servent des conventions existantes pour régler ces questions, a-t-il poursuivi.

Rappelant que le Soudan a fait partie récemment des États ayant connu la sécession, le représentant a soulevé une question qui n’apparait pourtant pas dans le projet d’article, celle de la nationalité en cas de sécession.  Par ailleurs, il faudrait selon lui réexaminer les projets d’articles 3 et 4.  Il n’y a pas de règle générale de succession d’États générale.  Il faudrait examiner chaque cas de façon indépendante, car les règles à codifier doivent être de nature complémentaire, afin de servir de modèle utile et servir de règle alternative en cas de conflit.  En conclusion, il a jugé prématuré d’avancer sur ces projets d’articles, qu’il serait bon de considérer à une date ultérieure.

Mme SERAPHINA FONG (Singapour) a reconnu que le projet de conclusion 4 sur l’identification du jus cogens devrait être basé sur l’article 53 de la Convention de Vienne.  Selon elle, le projet de conclusion relatif à l’acceptation et à la reconnaissance d’une norme de jus cogens devrait mentionner la nécessité de l’acceptation par une très grande majorité d’États, soulignant l’importance que presque tous les États approuvent une telle norme.  S’agissant des critères d’identification du jus cogens, elle a déclaré que le projet de conclusion présente non des éléments d’identification du jus cogens, mais bien des éléments descriptifs.  Elle a suggéré à la commission de poursuivre son examen de ces questions.

S’agissant de l’élaboration d’une liste indicative du jus cogens, la représentante a relevé l’importance d’adopter des critères déjà acceptés de ce qui constitue une norme impérative de droit.  Par ailleurs, elle s’est dite prête à poursuivre l’examen de la question de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État et de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés.

Mme CRISTINA PUCARINHO (Portugal) a salué l’approche prudente et pragmatique de la commission sur la question des normes impératives du droit international général (jus cogens), estimant que l’idée de règles supérieures dans un système légal horizontal contribue à sécuriser les principes qui en sont l’essence même et donc à préserver celle de l’ordre public international.  Jus cogens est à la fois la marque et le rempart des normes légales minimales communes avec lesquelles les États et les organisations internationales sont d’accord, et elle a pris note que la commission estime que jus cogens peut donc être issu de toutes les sources du droit international, et pas seulement de celui des traités.  Elle a assuré que l’attention portée par la commission à l’identification de critères pour jus cogens entraînera d’importants développements théoriques, ce qui devrait faire la lumière sur la question et rendre jus cogens plus perceptible pour plus d’acteurs.

La représentante a salué l’introduction de la question complexe et sensible de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État dans le programme de travail de la CDI.  Elle a suggéré d’examiner la pratique des États sans l’objectif prédéterminé de montrer l’existence de règles et principes généraux en ce qui concerne la responsabilité.  À son avis, il est trop tôt pour décider de la forme finale du projet tant que la partie substantielle du sujet n’a pas été totalement explorée.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA VELASQUEZ (Pérou) a salué le nouvel intitulé du  chapitre sur les normes impératives du droit international général (jus cogens).  Les normes de jus cogens sont par nature supérieures aux autres et universellement applicables, a-t-il déclaré.  Concernant le caractère de jus cogens qui nécessite « l’acceptation et la reconnaissance de la communauté internationale des États dans son ensemble », il a noté qu’il convient de préciser que ces expressions nécessitent simplement une majorité claire, c’est-à-dire importante.

En outre, le représentant a estimé que plutôt que d’élaborer une liste illustrative des normes de jus cogens, il serait préférable d’établir une méthodologie pour identifier ces normes.  Si toutefois il devait y avoir une liste, il faudrait éviter de donner l’impression d’une liste exhaustive qui pourrait être perçue comme un numerus clausus.  S’agissant des travaux futurs, il a conclu qu’il n’est pas possible d’évoquer un jus cogens régional.

M. HARI BANSH NARAYAN SINGH (Inde) a apprécié le fait que le Rapporteur spécial ait établi des critères d’identification des normes impératives (jus cogens) en prenant comme point de départ la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités.  Il a indiqué que son pays sera en mesure de formuler des observations sur les projets de conclusions 4 à 9 une fois terminé le débat général sur la question. 

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, le représentant a rappelé que le projet d’article premier sur la portée a trait à la responsabilité des États pour des faits internationalement illicites et que plusieurs membres ont suggéré de reformuler la disposition.  Il a appuyé l’approche consistant à examiner la question de savoir s’il existe des règles de droit international gouvernant à la fois le transfert d’obligations et le transfert de droits découlant de la responsabilité des États à cet égard.  La pratique des États étant limitée, il a proposé de continuer l’analyse de cette question en profondeur.

M. BORUT MAHNIC (Slovénie) a dit que la nature des normes impératives du droit international général (jus cogens) est distincte en ce qu’elles  reflètent les valeurs fondamentales communes et généralement acceptées de l’ordre international.  En tant que telle, l’approche adoptée pour les critères d’identification du jus cogens ne peut pas être entièrement fondée sur le consentement.  Bien que l’acceptation et la reconnaissance par la communauté internationale dans son ensemble soient inhérentes à la notion de jus cogens, la Slovénie convient qu’elle ne requiert pas l’acceptation et la reconnaissance par tous les États. 

En même temps, nous estimons qu’il serait utile de définir plus avant la notion de « grande majorité d’États » pour affirmer l’existence du consentement dans le projet de conclusion 7, a poursuivi le représentant.  Selon lui, la majorité devrait être suffisamment large pour éviter les opinions litigieuses quant au caractère d’une certaine norme.  Dans ce contexte, il s’est joint également à ceux qui réclament une phrase plus détaillée du mot « attitude » par rapport à l’identification du jus cogens.

S’agissant de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État, M. Mahnic a réaffirmé son appui à ce thème et félicité le Rapporteur spécial pour son premier rapport bien construit sur le sujet.  En ce qui concerne les accords sur la succession des responsabilités, il a soutenu la suggestion faite par certains membres de la commission d’envisager l’évolution de la règle « pacta tertiis ».  Ces accords confirment qu'un État successeur est prêt à accepter des obligations découlant de la responsabilité de l’État prédécesseur.  Cependant, ils peuvent limiter ou exclure une telle obligation.  C’est la raison pour laquelle le consentement d’une partie tierce est important et ne peut être présumé dans tous les cas.

S’agissant de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés, la Slovénie partagera bientôt avec le Rapporteur spécial et la commission des informations sur son cadre juridique national en la matière. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Troisième Commission: les plus vulnérables sont confrontés au défi grandissant de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale

Soixante-douzième session,
37e & 38e séances – matin & après-midi                
AG/SHC/4215

Troisième Commission: les plus vulnérables sont confrontés au défi grandissant de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale

La Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, a entamé aujourd’hui l’examen de l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée d’une part, du droit des peuples à l’autodétermination, d’autre part.  Les délégations ont dialogué avec divers experts, lesquels ont fait état d’une situation alarmante tant pour les groupes les plus vulnérables, au premier rang desquels les migrants, que pour les personnes d’ascendance africaine, trop souvent laissées-pour-compte.  La Commission a ensuite entamé son débat général sur la question. 

La Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, Mme Anastasia Crickley, s’est déclarée « alarmée » d’avoir à dresser un tableau aussi sombre, 50 ans après l’adoption de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale en 1966.  En dépit de la fin de l’apartheid, de la réalisation des droits civils, des directives européennes pour la protection contre les discriminations et de la ratification de la Convention par 178 États, aucun de ceux-ci n’est arrivé à mettre fin à ce fléau, a-t-elle déploré.

Conscient du caractère complexe du racisme, le Comité s’est ainsi penché sur la situation particulière des femmes migrantes, faisant des recommandations contre l’exploitation abusive des travailleurs migrants, et en particulier des femmes domestiques.  Il a aussi examiné les dangers encourus par les migrants durant leur voyage, ainsi que les difficiles conditions de vie rencontrées dans les pays d’accueil.  Mme Crickley a appelé les États à respecter leurs obligations internationales, y compris celle de non-refoulement, à faire cesser les discours de haine ou encore à rendre les auteurs de violence responsables de leurs actes.

Cette problématique a également été soulevée par le Président du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine, M. Sabelo Gumedze.  Ce dernier a salué les efforts du Canada et de l’Allemagne -pays visités respectivement en 2016 et 2017 par son Groupe de travail– pour combattre la discrimination raciale.  Mais s’il s’est félicité du travail accompli par le Gouvernement canadien pour promouvoir la diversité et l’inclusion, M. Gumedze s’est néanmoins dit préoccupé par la surreprésentation des Africains-Canadiens dans le système pénal, attribuable selon lui à un « biais racial ».  S’agissant de l’Allemagne, il a salué les efforts consentis pour accueillir les migrants mais a aussi exprimé son inquiétude quant au possible renvoi de migrants d’ascendance africaine en Libye et aux attaques dont ces mêmes personnes ont été la cible lors de la dernière campagne électorale.

Président du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, M. Gabor Rona, s’était, à la demande du Conseil des droits de l’homme, concentré sur l’utilisation de mercenaires et de sociétés militaires et de sécurité privées sur les lieux de détention, précisant avoir focalisé son rapport aux lieux détenant des migrants.  Il ressort des travaux de son Groupe de travail que, dans les centres de détention partiellement ou totalement sous contrôle de telles entreprises, il existe un « grand risque » que les droits de l’homme soient violés.  Parmi ces violations figurent, entre autres, la violence de la part du personnel, la négligence médicale, l’usage arbitraire du confinement solitaire ou encore l’imposition de décisions quasi judiciaires, lesquelles affectent le statut légal, la durée d’incarcération et le bien-être des détenus. 

M. Rona note aussi que les politiques migratoires prises par certains pays ont conduit à la création d’un « marché de la détention ».  Ainsi, au cours des trois dernières décennies, la privatisation de la détention des migrants s’est accentuée dans les pays de l’Union européenne, tandis qu’aux États-Unis, 73% des quelque 40 000 migrants détenus l’ont été dans des centres gérés par des entreprises privées, a-t-il fait observer.

Le travail du Groupe de travail présidé par M. Rona a toutefois été critiqué par l’Union européenne, qui s’est dite inquiète de son « manque de clarté » et s’est demandé s’il ne confondait pas les mercenaires avec les militaires privés, une préoccupation partagée par le Royaume-Uni.  En réponse, M. Rona a assuré que le Groupe de travail était « parfaitement conscient » que certains militaires privés ne sont pas des mercenaires.  Il a ajouté que son mandat était « légitime », mercenaires et forces militaires privées endossant « les mêmes fonctions ou presque ». 

Le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, M. Mutuma Ruteere, a pour sa part présenté deux rapports, l’un consacré au combat contre le racisme, la xénophobie et la discrimination dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, le second portant sur la lutte contre la glorification du nazisme, du néonazisme et des autres pratiques contribuant à nourrir les formes contemporaines de racisme.  M. Ruteere a appelé à une meilleure coordination entre pays, estimant que la résurgence du racisme et de la xénophobie à travers le populisme et les mouvements et groupes extrêmes avait fait de la seconde décennie de ce siècle une période très similaire « aux années 1940 » en Europe.

Enfin, M. Taonga Mushayavanhu, Président-Rapporteur du Comité spécial sur l’élaboration de normes complémentaires -à celles contenues dans la Convention de 1966- a présenté un rapport d’étape en constatant l’omniprésence des discriminations dans nos sociétés, lesquelles se transforment si vite que ceux qui en sont historiquement exclus se retrouvent plus que jamais laissés-pour-compte.  Dans ce contexte, il a indiqué que les travaux de son Comité consistaient autant à s’entendre sur de nouvelles normes qu’à réfléchir aux moyens de renforcer la protection de toutes les personnes victimes du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, conformément au Programme d’action de Durban.  Il s’est heurté à l’opposition frontale de l’Union européenne, pour laquelle la Convention de 1966 est et doit rester la base de tous les efforts de lutte contre le racisme, et qui est donc opposée à toute négociations sur des protocoles additionnels.

Demain, mercredi 1er novembre, la Troisième Commission poursuivra à partir de 10 heures son débat général sur l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée d’une part, du droit des peuples à l’autodétermination, d’autre part.

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE

a) Élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de.l’intolérance qui y est associée (A/72/18 et A/72/291)

b) Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban (A/72/285, A/72/287, A/72/319, A/72/323 et A/72/324)

DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION (A/72/317 ET A/72/286)

Déclarations liminaires, suivies de dialogues interactifs

Mme HUI LU, Chef des affaires intergouvernementales à la section des programmes d’appui et plaidoyer au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, est venue présenter quatre rapports à la Troisième Commission.  Trois d’entre eux ont été soumis dans le cadre du point 71 b) de l’ordre du jour -Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban- et couvrent à ce titre la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, la mise en œuvre et les activités de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine et enfin les efforts mondiaux pour l’élimination totale du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée. 

Mme Lu a indiqué que la note du Secrétaire général sur le rapport du Groupe d’éminents experts indépendants sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban faisait suite aux résolutions 50/266 et 71/181 de l’Assemblée générale.

Le rapport du Secrétaire général sur le Programme d’activités relatives à la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine se concentre, lui, sur les droits de l’homme, a poursuivi Mme Lu.  Il reconnaît que les femmes et les filles d’ascendance africaine se trouvent à l’intersection de formes multiples de discrimination, liées notamment à la race, au sexe, au genre, à la nationalité, au statut migratoire et autres statuts.  Il conclut que, même si de nombreux États ont mis en œuvre des approches sensibles au genre dans leurs programmes de réduction de la pauvreté, les femmes et les filles d’ascendance africaine sont souvent exclues de ces programmes en raison des barrières que dressent les différentes formes de discrimination.

Le troisième rapport est celui du Secrétaire général sur les efforts mondiaux menés pour l’élimination totale du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée et pour l’application intégrale et le suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Il présente les cadres législatifs et administratifs ainsi que le rôle des mécanismes nationaux dans la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, a encore indiqué Mme Lu.  Il conclut qu’en dépit des mesures encourageantes adoptées par certains États Membres, des tendances préoccupantes se sont développées ces dernières années, qui encouragent des attitudes de plus en plus racistes, xénophobes et violentes.

Mme Lu a par ailleurs présenté le rapport du Secrétaire général sur le droit des peuples à l’autodétermination, qui résume les discussions et les décisions relatives à la réalisation du droit à l’autodétermination dans le cadre des activités des principaux organes et mécanismes des droits de l’homme de l’ONU, tels que le Conseil des droits de l’homme, ses procédures spéciales et ses organes conventionnels.  Il souligne, a-t-elle précisé, l’obligation qu’ont les États de réaliser et respecter le droit à l’autodétermination, conformément aux dispositions de la Charte des Nations Unies.

M. SABELO GUMEDZE, Président du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine, a présenté le rapport du Groupe de travail, expliquant qu’il présente une vue d’ensemble des travaux menés par celui-ci lors de ses dix-neuvième et vingtième sessions, tenues respectivement en novembre 2016 et avril 2017.  Ces sessions ont d’abord permis au Groupe de travail d’analyser les progrès faits dans la mise en œuvre de son mandat et des activités à venir, puis de discuter, lors d’une session publique, de la thématique « ne laisser personne sur le bord du chemin: personnes d’ascendance africaine et les objectifs du développement durable ».  Le rapport inclut également un résumé des débats thématiques de cette année et les recommandations du Groupe de travail. 

Le Groupe de travail est convaincu que la Décennie internationale pour les personnes d’ascendance africaine et les objectifs du développement durable doivent répondre aux aspirations des personnes d’ascendance africaine.  Et, à cette fin, il estime qu’il faut prendre toutes les mesures pour s’assurer qu’elles ne seront pas laissées sur le bord du chemin, y compris en rendant prioritaires les politiques et programmes taillés pour combattre le racisme structurel et la discrimination à l’encontre de ces personnes.  Il est ainsi recommandé dans le rapport d’améliorer la disponibilité et l’accès aux données statistiques désagrégées par revenu, genre, âge, race, ethnie, statut migratoire, handicap, localisation géographique et autres critères pertinents.  Le Groupe de travail encourage en outre les institutions financières à aider la société civile, les programmes gouvernementaux et les autres projets visant à mettre en œuvre ses recommandations.

M. Gumedze a également indiqué que le Groupe de travail s’était rendu au Canada, du 17 au 21 octobre 2016, et en Allemagne, du 20 au 27 février 2017.  Il souligne que les Gouvernements de ces deux pays ont fait preuve d’une volonté de coopération et de dialogue pour combattre la discrimination raciale et prendre en compte les recommandations reçues dans ce cadre.

Le Groupe de travail se félicite des efforts continus du Gouvernement du Canada pour combattre ces discriminations, promouvoir la diversité et l’inclusion.  Il salue le travail important des institutions nationales et provinciales en ce qui concerne les enquêtes sur des faits rapportés, les amendements des législations ou le suivi des recommandations visant à lutter contre le racisme systémique visant les noirs dans le pays.  Le Groupe reste toutefois préoccupé par la surreprésentation des Africains-Canadiens dans le système pénal, qui peut être attribuée à un biais racial à tous les niveaux.  Il est également préoccupé par l’usage excessif de la force et des décès impliquant la police, en particulier contre les personnes d’ascendance africaine atteintes de maladies mentales.  Il observe aussi un taux disproportionnellement élevé de chômage chez les Africains-Canadiens ou les conditions déplorables dans lesquelles travaillent les migrants saisonniers d’ascendance africaine, entre autres.  Dans ce contexte, le Groupe de travail recommande au Gouvernement canadien de développer et de mettre en œuvre des stratégies pour aborder la question des discriminations dans le système de justice, les taux de chômage élevés parmi cette population, pour favoriser l’intégration ou pour combler les lacunes entre les lois et les pratiques.

S’agissant de l’Allemagne, le Groupe de travail salue les efforts du Gouvernement fédéral et des autorités des Länder pour combattre la discrimination raciale contre les personnes d’ascendance africaine, salue le nombre de demandeurs d’asile et de réfugiés accueillis, le lancement de la Décennie internationale pour les personnes d’ascendance africaine ou encore la reconnaissance à travers un accord de coalition de la vulnérabilité de ce groupe particulier.  Néanmoins, le Groupe de travail reste préoccupé par le possible renvoi de ces personnes en Libye et par les attaques dont elles ont été la cible lors de la dernière campagne électorale.  À cet égard, il recommande la mise en œuvre du Plan d’action contre le racisme et demande au Gouvernement de s’attaquer aux causes structurelles de ce phénomène.  Il lui recommande également d’ouvrir une enquête sur la mort de Oury Jalloh, en prison, de s’assurer que la discrimination raciale est combattue dans le système scolaire ou encore que les diplômes obtenus hors de l’Union européenne sont proprement reconnus.

En conclusion, le Président a tenu à souligner le rôle critique de la société civile, y compris dans la surveillance des phénomènes de discrimination structurelle et raciale.  Rappelant aux États les engagements à lutter contre ces phénomènes pris lors de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, il les a invités à se saisir de l’occasion de la Décennie internationale pour les personnes d’ascendance africaine pour les mettre en œuvre.

Lors du dialogue entre les délégations et M. Sabelo Gumedze, Président du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine, l’Afrique du Sud s’est déclarée d’accord avec les travaux du Groupe de travail et notamment sur les causes d’inégalité qu’ils pointent.  Pour l’Afrique du Sud, le colonialisme a eu des effets négatifs à ce sujet, tout comme la traite transatlantique des esclaves.  Il est essentiel qu’un nouvel ordre économique mondial tienne compte de la pauvreté liée à la persistance de pratiques racistes et xénophobes.  L’Afrique du Sud partage aussi l’idée que les différentes formes de discrimination dont souffrent les personnes d’ascendance africaine doivent être examinées si nous voulons parvenir à une application positive des objectifs de développement durable. 

Le Brésil a rappelé que sa population était en grande partie d’ascendance africaine et qu’il veillait à la promotion des droits de ces personnes.  Saluant les travaux du Groupe de travail, il a demandé à savoir s’il comptait participer aux réunions des groupes de haut niveau sur cette question.

Le Maroc a dit soutenir le mandat du Groupe de travail, voyant dans ses activités un moyen de traquer les pratiques néfastes et de mettre en valeur les bonnes pratiques.  Le Maroc juge regrettable que les personnes d’ascendance africaine continuent de subir une forme de racisme ordinaire sur fond de montée du populisme, alors même que la communauté internationale célèbre la Décennie internationale sur les personnes d’ascendance africaine.  Dans ce cadre, le Maroc a souhaité savoir quel statut aura le futur fonds de contributions volontaires. 

L’Union européenne a affirmé se concentrer sur l’idée qu’il ne faut laisser quiconque sur le bord du chemin.  Pour elle, il faut tenir compte des liens entre les différentes causes de discrimination à l’égard des personnes d’ascendance africaine.  Évoquant les directives opérationnelles prises dans le cadre de la mise en œuvre du Programme 2030, l’Union européenne a souhaité avoir des détails sur ce processus.  Elle a aussi voulu savoir sur quels domaines porteront les prochains rapports thématiques du Groupe de travail.

Le Mexique a relevé que, dans son rapport, le Groupe de travail encourage l’établissement de priorités en faveur de la lutte contre le racisme structurel et la discrimination contre les personnes d’ascendance africaine.  Il a souhaité obtenir des exemples de tels programmes, menés dans le contexte de la bonne mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a aussi demandé l’avis du Groupe de travail sur les normes minimales permettant de mesurer l’intégration des personnes d’ascendance africaine dans ces initiatives.

M. Sabelo Gumedze, Président du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine, a répondu en insistant sur l’importance de l’indice sur l’égalité raciale ainsi que sur la ventilation des données, « une bonne chose pour les personnes d’ascendance africaine », puisqu’elle permet de les identifier afin d’améliorer leur situation.  Concernant les directives opérationnelles, il a expliqué que le Groupe de travail avait examiné les objectifs de développement durable, mis au point ces directives avec des institutions consacrées au développement et les a ensuite mises à l’épreuve sur le terrain dans les États où les programmes sont appliqués.

M. Gumedze a expliqué que le Groupe de travail n’avait pas encore défini son thème d’activité de l’année prochaine, ce qui sera fait lors de sa réunion prévue à Genève en novembre.  Les activités du Groupe de travail sont conformes à la Déclaration et du Programme d’action de Durban mais les États Membres peuvent aussi suggérer des orientations, a-t-il déclaré.

Quant aux liens avec le Programme 2030, M. Gumedze a expliqué qu’après examen de la question, le Groupe de travail avait conclu que les personnes d’ascendance africaine devaient participer à la réalisation des objectifs et même au-delà, puisqu’elles « devaient être au cœur de leur réalisation », de par le fait que ce sont des victimes, qui font face à plus de difficultés.

M. GABOR RONA, Président du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, a rappelé le mandat de son Groupe de travail, à savoir se pencher sur les conséquences des activités des mercenaires et des sociétés militaires et de sécurité privées sur les droits de l’homme.  Au cours des dernières années, beaucoup d’attention a été accordée au plaidoyer pour améliorer la cadre de régulation de ces entreprises et pour accroître la redevabilité pour les violations des droits de l’homme commises par ces entreprises, a fait remarquer M. Rona.  L’an dernier, dans sa résolution 33/4, le Conseil des droits de l’homme a exprimé ses préoccupations quant à l’utilisation de ces entreprises dans les lieux de détention.  Sur la base de ces préoccupations, le Groupe de travail a dédié son rapport de cette année à ce thème, en focalisant particulièrement les lieux détenant les migrants.  Les informations contenues dans le rapport proviennent de plusieurs sources, notamment gouvernementales, de la société civile et d’autres acteurs, a-t-il indiqué.

M. Rona a ensuite rappelé que plusieurs textes internationaux couvrent la protection de ceux qui sont privés de liberté, notamment la Déclaration universelle des droits de l’homme, la Convention contre la torture, les deux Pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques, et aux droits économiques, sociaux et culturels, ou encore nombre d’instruments régionaux et les principes de base sur la protection des personnes détenues ou même les règles internationales pour le traitement des détenus, dite aussi Règles Nelson Mandela. 

Par ailleurs, et même s’il revient en premier lieu à l’État de respecter, promouvoir et protéger les droits de l’homme, il existe de plus en plus d’appels et de soutien en faveur d’une obligation pour les acteurs non étatiques, dont les entreprises, de respecter également les droits de l’homme.  Or les recherches du Groupe de travail montrent que, dans les centres de détention partiellement ou totalement sous contrôle de sociétés militaires et de sécurité privées, il existe un grand risque que les droits de l’homme soient violés.  Parmi ces violations, on compte, entre autres, la violence de la part du personnel, la négligence médicale, l’usage arbitraire du confinement solitaire ou encore l’imposition de décisions quasi judiciaires qui affectent le statut légal, la durée d’incarcération ou même le bien-être des détenus prisonniers. 

Le Groupe de travail observe aussi que dans de nombreuses régions, dont les territoires occupés, des sociétés militaires et de sécurité privées sont utilisées pour priver de la liberté, entraver les mouvements de circulation ou atteindre au droit à l’autodétermination des peuples.  Il note aussi que la montée de politiques migratoires dans certains pays a conduit à la création d’un marché de la détention.  Ainsi, au cours des trois dernières décennies, la privatisation de la détention des migrants s’est accentuée dans les pays de l’Union européenne, tandis qu’aux États-Unis, 73% des quelque 40 000 migrants détenus l’ont été dans des centres gérés par des entreprises privées, a-t-il chiffré, ajoutant par ailleurs que le manque de transparence et de responsabilité est commun dans tous ces pays.  La société civile a, à cette occasion, mis en lumière des plaintes graves concernant le traitement des migrants de demandeurs d’asile dans ces installations privées, y compris à l’encontre des enfants.  Avec d’autres titulaires de mandat de procédures spéciales, le Groupe de travail a ainsi adressé des communications aux Gouvernements de l’Australie, de Nauru et de la Papouasie-Nouvelle-Guinée à propos de violations des droits de l’homme commises par des entreprises de sécurité privée à l’encontre de demandeurs d’asile.

Dans ce contexte, le Groupe de travail fait une série de recommandations aux États, notamment de ne pas livrer au secteur privé certaines tâches, dont les punitions et le placement en isolement; de surveiller les lieux de détention et de s’assurer de la performance du personnel; que les compagnies établissent des mécanismes de responsabilité ou encore qu’elles mettent en place des dispositifs d’enregistrement.  Il recommande par ailleurs aux États d’envisager des alternatives à la détention des migrants.   

Lors du dialogue entre la Troisième Commission et M. Gabor Rona, Président du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le Mexique s’est dit d’accord avec le Président du Groupe de travail sur le fait que les personnes incarcérées dans des institutions gérées par des entreprises privées étaient plus vulnérables que d’autres types de détenus.  Il a demandé à M. Rona s’il avait envisagé d’envoyer ses recommandations au Secrétaire général de la conférence intergouvernementale sur les migrations internationales pour que ses idées soient incorporées au futur pacte mondial des migrations sûres.  Il a également noté que le rapport ne faisait pas état des violations possibles du droit de notification consulaire et a demandé l’avis du Président du Groupe de travail sur la question.  De même, il a demandé ce qui pouvait être fait pour renforcer les capacités consulaires des pays se trouvant dans ces situations.  Et, enfin, il a demandé si cela pourrait avoir un effet positif sur le respect des droits fondamentaux des détenus.

L’Union européenne a demandé si le Groupe de travail ne confondait pas les mercenaires avec les militaires privés.  Elle s’est déclarée préoccupée du manque de clarté du Groupe de travail, qui élargit son mandat pour atteindre les militaires et compagnies privées.  Pour l’Union européenne, cette confusion risque de saper l’objectif fixé au Groupe de travail, qui est d’améliorer les normes de l’industrie de la sécurité.  Le Royaume-Uni a, lui aussi, critiqué les objectifs « peu clairs » du Groupe de travail et s’est dit préoccupé de l’élargissement de son mandat aux fins d’inclure les organisations militaires privées.  Il a ensuite rappelé que, dans le pays, les prisons, privées comme publiques, sont assujetties aux mêmes lois ainsi qu’ont de régulières inspections indépendantes.

Dans ses réponses, M. Gabor Rona, Président du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, a jugé « très utile », la suggestion du Mexique tendant à ce que le Groupe de travail notifie ses travaux à la conférence internationale sur les migrations.  À propos des interrogations exprimées par ce pays sur les notifications consulaires, il a expliqué que le Gouvernement n’avait pas encore examiné le besoin de renforcer le droit bilatéral en ce qui concerne les notifications consulaires.  Il ajouté ne pas être sûr que cette question soit du ressort de son mandat.

M. Rona a en outre pris acte des observations critiques de l’Union européenne et du Royaume-Uni sur le mandat du Groupe de travail et la confusion qu’il aurait, selon ces délégations, créée en élargissant le champ de son mandat.  Il a toutefois estimé que ces délégations faisaient une « erreur de catégorie ».  Il n’y a pas de confusion, a-t-il insisté, assurant être « parfaitement conscient » que certains militaires privés ne sont pas des mercenaires.  Le Groupe de travail couvre bien ces deux catégories, a-t-il poursuivi, précisant que ce champ d’action « n’est pas le résultat d’une décision du Groupe de travail » mais du Conseil des droits de l’homme, lequel a élaboré ce mandat.  Il a donc suggéré que les délégations qui ne seraient pas satisfaites des travaux du Groupe de travail en réfèrent directement au Conseil des droits de l’homme.  À ses yeux, ce mandat est « légitime » parce que les mercenaires et les forces militaires privées « endossent les mêmes fonctions ou presque ».  Dans les conflits armés, il y a des militaires sous contrat et ils présentent les « mêmes risques » pour ce qui est du droit à l’autodétermination et pour les droits fondamentaux.

M. Rona a enfin constaté que la communauté internationale n’avait pas fait montre de bonne volonté pour créer un organe normatif chargé de s’assurer que les sociétés de sécurité privées sont assujetties à des normes strictes.  Ces entreprises, a-t-il constaté, endossent des tâches très délicates qui comprennent notamment l’usage de la force, normalement du ressort de l’État.  Il a conclu son propos en émettant l’espoir que « les États comprendront l’essence de notre mandat ».  

Mme ANASTASIA CRICKLEY, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, a dit être alarmée par le fait de se présenter ici, 50 ans après l’adoption de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, pour parler de ce phénomène.  En dépit de la fin de l’apartheid, de la réalisation des droits civils, des directives européennes pour la protection contre les discriminations, ou de la ratification de la Convention par 178 États, aucun n’est arrivé à mettre fin à ce phénomène, a-t-elle déploré.  L’absence de mise en œuvre des mesures spéciales préconisées par la recommandation générale no 32 du Comité, à savoir la création de conditions pour un accès aux droits économiques et sociaux, diminue les gains enregistrés, a-t-elle regretté, déplorant aussi, « en tant qu’Européenne », l’usage continu du racisme pour attiser les peurs au sein de l’Union européenne.  Cette stratégie politique vise des gains politiques à court terme, a-t-elle prévenu.

Présentant le rapport du Comité, Mme Crickley a déclaré que celui-ci était conscient du caractère complexe et à multiples facettes du racisme.  C’est pourquoi le Comité s’est toujours penché sur l’intersectionnalité entre les diverses formes de discrimination raciale.  Il a ainsi examiné la situation particulière des femmes migrantes et fait des recommandations en vue d’arrêter le travail illégal et l’exploitation abusive des travailleurs migrants, et en particulier des femmes domestiques.  Il a aussi recommandé aux États de lutter contre l’exploitation sexuelle des femmes migrantes.  Il a par ailleurs été heureux de poursuivre son travail de coopération avec ONU-Femmes dans le cadre de la préparation du pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.  Les conflits armés, les changements climatiques, la pauvreté ou même l’instabilité politique, continuent en outre d’être des sujets sur lesquels se penche le Comité, a assuré sa Présidente. 

Au cours de ses travaux, le Comité a aussi examiné les dangers encourus par les migrants, en particulier dans leur voyage, ainsi que les difficiles conditions de vie rencontrées dans les pays d’accueil.  Il a appelé à cet égard les États à respecter leurs obligations internationales, y compris celle de non-refoulement, à faire cesser les discours de haine ou encore à rendre les auteurs de violence envers les migrants responsables de leurs actes.

Le Comité est en outre saisi de la question des minorités, en particulier de celle des Roms et autres gens du voyage.  S’il note l’existence d’un cadre européen établissant une stratégie à l’égard de cette population, le Comité reste cependant inquiet de la réalité quotidienne dont elle souffre, notamment l’exclusion, l’intolérance ou la pauvreté.  Il est également préoccupé par la situation des peuples autochtones, qui paient encore et toujours le prix des injustices historiques nées de la colonisation, de la dépossession de leurs terres ou encore de l’oppression et de la discrimination.  

Mme Crickley a aussi fait observer que si Sao Tomé-et-Príncipe est devenu le cent-soixante-dix-huitième État partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, figurent parmi ceux qui n’y ont pas adhéré le Myanmar, pays en proie avec des discriminations touchant les musulmans rohingya.  Elle a donc appelé ce dernier à urgemment ratifier la Convention.

Mme Crickley a également indiqué qu’à sa dernière session, le Comité avait examiné 20 rapports de pays et 12 autres au titre de sa procédure de suivi.  Il a aussi poursuivi la mise en œuvre de la procédure simplifiée de présentation de rapports, conformément à la résolution 68/268 de l’Assemblée générale sur le renforcement des organes de traités, en adoptant une liste de questions prioritaires.  À cet égard, seuls six États ont pour l’instant accepté cette procédure, a-t-elle indiqué.  Le Comité est enfin engagé à approfondir ses relations avec les autres parties prenantes, et en particulier avec la société civile.  Il a, dans ce contexte, tenu un séminaire sur le thème « mains dans la main contre la discrimination raciale ».  Avec les États parties, il a organisé sa cinquième réunion informelle sur le thème « la Convention dans le monde d’aujourd’hui », a également indiqué Mme Crickley.

Lors des discussions des délégations avec Mme Anastasia Crickley, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, l’Union européenne a déclaré soutenir le travail de Mme Crickley et, plus largement, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Dans le contexte actuel, le Comité est plus pertinent que jamais et la Convention se révèle le meilleur instrument pour lutter contre le racisme, la discrimination, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, a souligné l’Union européenne, qui appelle à sa ratification universelle.  Déplorant par ailleurs que certains rapports périodiques au Comité soient attendus depuis plus de cinq ans, l’Union européenne a fait valoir que tous les États parties devraient répondre à leurs obligations.  Observant enfin que le Comité utilise de plus en plus les procédures d’urgence et d’alerte rapide, elle a souhaité connaître le niveau d’efficacité de ces mesures.

L’Irlande a salué les travaux de Mme Crickley et son opposition à toutes les formes de racisme, de discrimination, de xénophobie et d’intolérance.  Elle s’est également félicitée que le Comité ait adopté plusieurs décisions relatives aux procédures d’urgence.  Dans le cadre de ce travail, elle aimerait savoir quelles tendances politiques et sociales sont des moteurs pour le racisme, la discrimination, la xénophobie et l’intolérance.

Le Brésil, qui a rappelé que sa société était multireligieuse et multiethnique, a qualifié la Convention de repère important, notamment pour les personnes autochtones et d’ascendance africaine.  Il a souhaité que la tradition d’échanges avec le Comité se poursuive et a demandé à la Présidente de celui-ci quelles mesures elle entendait prendre pour éviter une forme de lassitude sur toutes ces questions.

Le Maroc a estimé que la lutte contre l’extrémisme et le racisme sous toutes ses formes devait constituer une priorité pour tous les États.  Soulignant l’importance de la Convention, il a regretté que le racisme soit de plus en plus récurrent, y compris dans les médias et sur Internet.  Il a également déploré les mauvais traitements dont sont victimes les migrants, notamment subsahariens.  Dans ce contexte, il a souhaité savoir quelles opportunités pourraient être saisies dans le cadre du Programme 2030 pour mettre fin au racisme.

L’Iraq a salué le rapport du Comité, rappelant que le préambule de sa Constitution souligne l’égalité de tous les Iraquiens sans aucune discrimination.  S’engageant à prendre en considération toutes les strates de la société dans le cadre de ses plans d’action nationaux, il a dit œuvrer à la protection de toutes les composantes du peuple iraquien et s’employer à permettre une meilleure intégration des victimes.

Le Myanmar a, lui aussi, déclaré être une société multireligieuse et multiethnique.  Dans le nord du pays, a-t-il observé, 90% des habitants sont musulmans.  Il compte certes 222 monastères bouddhistes mais aussi beaucoup de mosquées ainsi que des temples hindous et des églises chrétiennes.  Aussi, les bouddhistes deviennent-ils minoritaires dans leur propre État?  Observant par ailleurs que la crainte et la méfiance entre les communautés sont favorisées par des facteurs internes et externes, le Myanmar a souligné son engagement à appliquer les dispositions de la Commission Kofi Annan afin que les communautés, notamment la communauté rohingya, puissent vivre dans la paix et l’harmonie. 

La Fédération de Russie a félicité Mme Crickley pour son rapport et lui a rappelé que son objectif était de garantir la ratification universelle de la Convention.  Pour la Fédération de Russie, il existe néanmoins un problème qui entrave la mise en œuvre efficace de ce traité, à savoir les réserves relatives à son article 4, par lequel les États, non seulement condamnent toute propagande et toutes organisations qui s’inspirent d’idées ou de théories fondées sur la supériorité d’une race ou d’un groupe de personnes d’une certaine couleur ou d’une certaine origine ethnique, ou qui prétendent justifier mais en plus s’engagent à adopter immédiatement des mesures positives destinées à éliminer toute incitation.  À ce sujet, elle aimerait savoir si le Comité compte organiser des campagnes d’informations pour inciter les États qui ont exprimé des réserves de les retirer. 

Dans ses réponses, Mme Anastasia Crickley, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, a rappelé qu’aucun pays n’était à l’abri des discriminations raciales.  Elle s’est dite préoccupée par les réserves à l’article 4 et a appelé à une ratification universelle de la Convention.  Elle a aussi souhaité que les rapports soient présentés à temps par les États.

Répondant au Maroc, la Présidente du Comité a expliqué que celui-ci avait participé au développement des objectifs de développement durable du Programme 2030.  Mentionnant l’objectif 10 –inégalités réduites-, elle a déclaré qu’il était essentiel que le racisme et les discriminations raciales soient examinés dans tous les objectifs et de manière transversale.

Mme Crickley a dit comprendre la situation dans laquelle se trouvait le Myanmar mais a ajouté qu’il serait difficile pour elle de se prononcer, puisque ce pays n’est pas partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Elle lui a demandé d’y adhérer. 

Mme Crickley a également rappelé que les 18 membres du Comité sont indépendants et originaires de différentes parties du monde, ce qui rend les discussions très intéressantes.  Elle a précisé que toutes les décisions du Comité étaient adoptées par consensus.  Le Comité ne prend pas souvent de décisions, mais il les prend très sérieusement.  Faisant référence à deux décisions prises récemment, elle a mentionné celle qui a fait suite aux événements de Charlottesville, aux États-Unis, dans laquelle le Comité a demandé aux autorités de condamner la manifestation.  Il en a été de même pour la pratique du profilage ethnique dans le nord du Nigéria.

M. MUTUMA RUTEERE, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, est venu présenter deux rapports, expliquant qu’ils étaient liés aux résolutions 71/181 et 71/179 adoptées en décembre dernier par l’Assemblée générale.

Le premier rapport, a-t-il expliqué, concerne les défis de combattre le racisme, la xénophobie et la discrimination dans le contexte de la lutte contre le terrorisme.  Il y explore, entre autres, les diverses manifestations de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie qui émergent des mesures prises par les États dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, ainsi que l’impact sur les droits de l’homme de telles mesures.  Le Rapporteur spécial a rappelé que ces mesures, prises pour protéger les citoyens du terrorisme et poursuivre les coupables, avaient suscité des préoccupations dans le contexte des droits de l’homme.

Une des tendances en lien avec la lutte contre le terrorisme est l’augmentation des mouvements populistes extrémistes qui se nourrissent notamment des craintes concernant la crise économique, la montée des inégalités et l’augmentation des flux migratoires, a expliqué le Rapporteur spécial.

Les titulaires de ce mandat ont déjà exprimé par le passé des préoccupations quant à la complicité des dirigeants politiques et des médias dans la stigmatisation de certains groupes, encourageant ainsi les attitudes racistes et xénophobes, a poursuivi M. Ruteere.  Dans ces contextes, les discours racistes et xénophobes se transforment souvent en crimes racistes et violents envers certains groupes, a poursuivi le Rapporteur spécial, qui s’est dit particulièrement inquiet des crimes commis contre les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile.  De même, l’utilisation par certains gouvernements de la lutte contre le terrorisme comme justification de la répression contre des minorités ethniques est préoccupante, a-t-il ajouté.

Rappelant l’absence de consensus sur la définition du terrorisme, M. Ruteere a déploré que de nombreux États aient adopté des législations basées sur des définitions vagues et larges du terme, en contradiction avec le principe de légalité et l’état de droit.  Ces législations très vagues créent de l’incertitude et ouvrent la voie à des applications disproportionnées et discriminatoires des lois antiterroristes, résultant parfois en des violations des droits fondamentaux, a-t-il fait observer.  De telles législations ont mené à des pratiques policières qui ciblent les minorités raciales et ethniques, et notamment les migrants musulmans ou perçus comme musulmans, en particulier dans les pays où l’identité musulmane est racialisée ou considérée comme étrangère, a encore déploré le Rapporteur spécial.

Le Rapporteur spécial a ensuite présenté un certain nombre de bonnes pratiques pouvant être imitées dans le monde.  Ainsi, des États ont fait des progrès dans le renforcement des droits à l’égalité et à la non-discrimination sur la base de la race, de la religion, de l’origine nationale ou ethnique.  D’autres ont adopté des plans antidiscrimination et un petit nombre de pays ont fait des références directes aux droits de l’homme et à la non-discrimination dans leurs politiques de lutte contre le terrorisme alors que d’autres encore mettaient en place des procédures pour mesurer l’impact sur les droits de l’homme de leur législation antiterroriste.

Enfin, le Rapporteur spécial a insisté sur l’importance de la collecte et la publication de données désagrégées sur les discriminations raciales et xénophobes, ainsi que sur les discours de haine.  S’il reconnaît la nécessité dans laquelle se trouvent les États de prendre des mesures pour combattre le terrorisme, le Rapporteur spécial a dit sa préoccupation face au fait que certains groupes soient plus affectés que d’autres par ces mesures.

Le second rapport de M. Ruteere porte sur la lutte contre la glorification du nazisme, du néonazisme et des autres pratiques qui contribuent à nourrir les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et d’autres formes liées d’intolérance.  Insistant sur le défi que représentent les partis politiques extrêmes pour les droits de l’homme et la démocratie, le Rapporteur spécial a expliqué que toute célébration commémorative du régime nazi et de ses crimes contre l’humanité, officielle ou non officielle, devait être dénoncée et interdite par les États.  De tels événements sont injustes envers la mémoire des nombreuses victimes de l’Holocauste et des crimes commis par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, a-t-il rappelé.

M. Ruteere a par ailleurs réitéré son appel aux États Membres pour qu’ils adoptent les législations nécessaires pour combattre le racisme ou mettent à jour leur législation nationale antiraciste, et pour qu’ils mettent en œuvre leurs obligations au regard de l’article 4 de la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ainsi que des articles 19 à 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le Rapporteur spécial a appelé à une meilleure coordination entre pays pour faire face au défi de l’intolérance et du racisme.  Il est tentant d’assumer que le racisme n’est plus aussi urgent que lorsque les Nations Unies ont été créées, mais en réalité la résurgence du racisme et de la xénophobie à travers le populisme et les mouvements et groupes extrêmes a fait de la seconde décennie de ce siècle une période très similaire aux années 1940, a affirmé le Rapporteur spécial.  Il a enfin souligné le rôle des institutions locales et des gouvernements dans la lutte contre le racisme et la xénophobie, ainsi que les liens entre racisme et pauvreté, cette dernière étant souvent racialisée ou se manifestant le long de lignes raciales.

Lors du dialogue avec M. Mutuma Ruteere, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, l’Union européenne a réaffirmé que la lutte contre le terrorisme ne pouvait en aucun cas servir à justifier la discrimination et s’est déclarée gravement préoccupée par les mouvements populistes dans plusieurs pays du monde.  Elle a demandé comment éviter les actes de racisme et l’incitation à la haine.  La Belgique, convaincue, elle aussi, que les approches purement sécuritaires étaient nocives et contreproductives, a expliqué avoir mis en place un organe de promotion de l’égalité, qui publie régulièrement des rapports basés sur les plaintes racistes, ainsi que des formations du personnel de police à la législation antiraciste.  Le Royaume-Uni a insisté sur l’importance de l’éducation et a demandé comment les États pouvaient mieux collaborer pour lutter contre le racisme.

La Suisse a, elle aussi, déploré que certains gouvernements utilisent des mesures de lutte contre le terrorisme pour justifier de pratiques discriminatoires et a demandé quelles mesures pouvaient être prises pour assurer une politique d’intégration efficace visant à prévenir la marginalisation politique.

Le Brésil a réaffirmé l’importance de protéger toutes les minorités et, entre autres, de lutter contre l’homophobie, tout en insistant sur l’importance du droit à l’éducation notamment pour les minorités.  Le Maroc a, pour sa part, dénoncé les politiques antimigrants comme des violations du droit international.  Il demande une approche globale dans la prévention et est prêt à accueillir le Rapporteur spécial.

Même si protéger les populations contre le terrorisme est un devoir pour les États, les Maldives estiment que rien ne peut justifier le racisme et que les initiatives de lutte contre le terrorisme ne peuvent être alimentées par la haine.  Les Maldives ont souhaité par ailleurs davantage d’information sur les données sexospécifiques concernant les migrants les plus affectés par la lutte contre le terrorisme.  L’Afrique du Sud a déploré les discours haineux entendus dans diverses parties du monde et l’acceptation de ces idées extrémistes, ainsi que le manque de progrès en matière de mise en œuvre des résolutions des Nations Unies portant sur le sujet.

La Fédération de Russie a expliqué que l’on ne pouvait pas laisser proliférer les idées racistes et que le droit à la liberté d’expression était un sujet sensible.

L’Azerbaïdjan a dénoncé les pratiques qui consistent, dans les situations d’occupation, à changer les caractéristiques démographiques de territoires sous occupation, ajoutant que ces « pratiques sont horribles ».  Pour sa part, l’Azerbaïdjan, à travers le processus de Bakou, reste ouvert au dialogue.  L’Arménie a redit la détermination de son pays à défendre et promouvoir la diversité religieuse, comme le montre la tenue prochainement d’une conférence sur le thème de la protection des chrétiens d’orient, à Erevan, capitale du pays. 

Dans les réponses, M. Mutuma Ruteere, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, a estimé que l’une des difficultés rencontrées tient au fait que les médias et certains discours politiques, sous prétexte de lutter contre le terrorisme, arrivent à montrer du doigt ou à marginaliser certains groupes et individus.  Cette tendance est à combattre, a-t-il dit, ajoutant qu’elle avait, par le passé, conduit à des massacres, voire des génocides.  

M. Ruteere a aussi constaté que, souvent, les mauvaises pratiques voyagent plus vite que les bonnes.  Or, des exemples de bonnes pratiques peuvent être observées dans le monde, y compris au niveau municipal, mais elles ont du mal à être exportées.  Le Rapporteur spécial a par ailleurs déclaré qu’il n’y avait pas de modèle unique d’intégration.  La population d’accueil doit aussi comprendre les groupes minoritaires et les intégrer économiquement, car il ne suffit pas seulement d’adopter des lois interdisant les discriminations.  Si l’intégration économique n’est pas réalisée, elle conduira à l’exclusion, a-t-il assuré.  M. Ruteere a également reconnu qu’il n’existait pas d’outils pour le suivi des recommandations portant sur la discrimination raciale.  

M. TAONGA MUSHAYAVANHU, Président-Rapporteur du Comité spécial sur l’élaboration de normes complémentaires, s’est dit honoré de présenter son rapport d’étape sur les travaux du Comité spécial, comme requis par l’Assemblée générale dans sa résolution 71/181.  Ce Comité spécial, a-t-il rappelé, a été établi voilà 10 ans par le Conseil des droits de l’homme aux fins d’élaborer des normes complémentaires à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, lesquelles normes pourraient prendre la forme d’une convention ou de protocoles additionnels à la Convention existante.  

Constatant que la discrimination est omniprésente dans nos sociétés et prend de nombreuses formes contemporaines, M. Mushayavanhu a averti que le développement de ces dernières est tellement rapide que ceux qui en sont historiquement exclus et marginalisés se retrouvent plus que jamais laissés-pour-compte.

Dans ce contexte, le Président-Rapporteur est d’avis que les travaux du Comité spécial consistent non seulement à s’entendre sur de nouvelles normes mais aussi à réfléchir aux moyens de renforcer la protection de toutes les personnes victimes du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, conformément au Programme d’action de Durban.

Ces 10 dernières années et au cours de ses 9 sessions, le Comité spécial a ainsi examiné un grand nombre de questions, délibérant notamment sur la xénophobie, la création de mécanismes nationaux assortis de compétences pour protéger les personnes contre ces fléaux, les lacunes procédurales au regard de la Convention, les programmes d’action positive, la prévention et l’information, le racisme dans le sport, les voies de recours des victimes, les législations antidiscriminatoires, la protection des migrants contre les pratiques racistes, discriminatoires et xénophobes, et la protection des réfugiés et des déplacés internes contre le racisme et les pratiques discriminatoires.

Les défis auxquels fait face le Comité spécial dans le cadre de son mandat ne lui sont pas spécifiques et peuvent être retrouvés dans d’autres forums internationaux, a fait remarquer M. Mushayavanhu.  Cependant, les débats du Comité spécial se concentrent sur deux questions clefs: les différences de point de vue sur l’existence de lacunes dans le droit international et les moyens de répondre à ces lacunes au niveau international, éventuellement par le biais de nouvelles normes.

À cet égard, a noté le Président-Rapporteur, si le Comité est tombé d’accord sur de possibles recommandations, il ne les a pas encore présentées dans le cadre de son mandat.  Il accuse donc un retard de près de 10 ans dans ses travaux entamés en 2007, a-t-il relevé, jugeant urgent de trouver des moyens innovants pour accroître l’efficacité du combat mondial contre le racisme.  Il a ainsi émis l’espoir que le texte qui a résulté de la neuvième session du Comité spécial servirait de base utile aux travaux de la dixième session prévue du 9 au 20 avril 2018.  À cette occasion, a-t-il précisé, le Comité spécial devrait entamer les négociations sur le projet de protocole additionnel à la Convention, relatif à la pénalisation des actes de nature raciste et xénophobe.

Lors d’un bref dialogue entre les délégations et M. Taonga Mushayavanhu, Président-Rapporteur du Comité spécial sur l’élaboration de normes complémentaires, l’Union européenne a répété que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale était et devait rester la base de tous les efforts de lutte contre le racisme.  Elle est donc en désaccord avec ceux qui disent que la Convention comporte des lacunes et qu’elle ne permet pas de faire face aux problèmes de racisme.  L’Union européenne ne peut donc pas appuyer de négociations sur des protocoles additionnels qui criminaliseraient les actes xénophobes.

Au contraire, le Zimbabwe soutient l’idée de normes complémentaires et appelle la communauté internationale à adopter des mesures pragmatiques pour éliminer le racisme et la discrimination raciale.

L’Afrique du Sud a appelé les États Membres à ratifier la Convention et a affirmé que les mouvements extrémistes qui visent à promouvoir la suprématie raciale tombent sous le mandat établi car ils touchent au racisme et à la discrimination raciale.

L’Iraq a attiré l’attention sur la situation des réfugiés qui nécessitent de l’attention surtout durant les crises économiques, durant lesquelles ils sont souvent marginalisés.  

En réponse aux délégations, M. Taonga Mushayavanhu, Président-Rapporteur du Comité spécial sur l’élaboration de normes complémentaires, a expliqué que le racisme et la discrimination raciale attaquaient le cœur même de la dignité de l’individu et essayaient de diviser la famille humaine.  Arriver à un monde sans racisme est un chemin parsemé d’embûches qui nécessite une volonté politique sur le long terme, a-t-il conclu.

Discussion générale

M. FABIÁN GARCÍA PAZ Y MIÑO (Équateur), qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a souligné que, 52 ans après l’adoption de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le problème se posait toujours et de manière plus aiguë encore.  Dans ce contexte, le Groupe des 77 et la Chine réaffirme son engagement en faveur des conclusions de la Conférence mondiale de 2001 et de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Ces conclusions demeurent des bases solides pour la communauté internationale et lui fournissent des propositions holistiques pour lutter utilement contre ces fléaux.

Le représentant s’est déclaré particulièrement préoccupé par le retour des formes de discrimination et d’intolérance dans toutes les régions du monde.  Il a aussi exprimé son inquiétude face à la montée des discours haineux, lesquels sont propagés par les nouvelles technologies de l’information et notamment par Internet.

Pour le Groupe des 77 et la Chine, il est essentiel que les chefs politiques, les autorités religieuses et les médias jouent un rôle face aux stéréotypes véhiculés par des éléments racistes et œuvrent ensemble à l’adoption de mesures contre le racisme, la xénophobie et les discriminations.  M. García Paz y Miño a réaffirmé, à cet égard, le rôle central de l’éducation pour endiguer ces phénomènes.  Il faut, a-t-il insisté, se concentrer sur le « détricotage » des stéréotypes, promouvoir le dialogue interconfessionnel et ouvrir aux autres cultures, notamment les plus jeunes.

Saluant le projet de création d’un forum qui permettrait d’élaborer un mécanisme de contrôle du racisme, de la discrimination, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, le représentant a réaffirmé le soutien de son groupe au Programme d’action de Durban, jugeant cependant que le Fonds d’affectation spéciale devrait être abondé davantage.  Enfin, le Groupe des 77 et la Chine présentera un projet de résolution sur ce thème, en mettant l’accent sur la tolérance et la sécurité.

M. HASBUN (El Salvador), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a fait observer que les États membres de ce groupe régional étaient constitués de populations multiethniques et multireligieuses, ajoutant que l’objectif d’un développement durable ne saurait être atteint si ce dernier ne bénéficiait pas à tous, indépendamment de toute différence ethnique.

La CELAC réaffirme en outre son soutien à la création d’un forum pour les personnes d’ascendance africaine en tant que mécanisme de consultation sur la situation des droits de l’homme de toutes les personnes d’ascendance africaine.  Elle soutient aussi la nécessité de fournir une attention particulière aux personnes d’ascendance africaine et, parmi elles, aux enfants, adolescentes, femmes, personnes âgées et personnes handicapées.  La CELAC défend aussi les mesures de discrimination positive pour remédier aux disparités et inégalités.

Mme SHEILA CAREY (Bahamas), qui s’exprimait au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a encouragé les États Membres à appliquer les recommandations des rapports présentés par le Secrétariat, afin de démontrer leur volonté politique et leur engagement résolu en faveur de l’éradication de ces fléaux que sont le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  La représentante s’est déclarée scandalisée que des millions de personnes de par le monde soient encore victimes de ces maux, qui violent les droits de l’homme et les libertés fondamentales.

La CARICOM se félicite que l’accent soit mis sur la situation des femmes et des filles d’ascendance africaine.  Le groupe est d’accord avec les conclusions du rapport concernant les activités à mener durant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine du Secrétaire général et encourage tous les États Membres à adopter et mettre en œuvre des politiques et programmes garantissant une protection effective pour les femmes et les filles d’ascendance africaine.  Elle appelle notamment à l’abrogation des lois discriminatoires à l’égard des personnes d’ascendance africaine.  En outre, la CELAC soutient la création d’un forum sur les personnes d’ascendance africaine, comme prévu dans le Programme d’activités de la Décennie internationale. 

M. EPHRAIM LESHALA MMINELE (Afrique du Sud), qui s’exprimait au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a exprimé la gratitude de son groupe pour les différents rapports présentés sur la question.  La SADC souhaite que le contenu de ces textes soit reflété dans les mesures que prendront les États Membres.  Rappelant que les pays de la SADC ont été confrontés à la « forme la plus dure de discrimination raciale », à savoir l’apartheid, le représentant a réaffirmé son engagement sans concessions à la lutte contre ce fléau.  Il faut aussi, a-t-il plaidé, restituer la dignité humaine et prendre en compte le sort des victimes de ces crimes.  À cet égard, l’essor de mouvements extrémistes et racistes qui cherchent à promouvoir une supériorité raciale est une préoccupation pour le groupe.

La SADC se félicite par ailleurs de l’ouverture, en 2018, de négociations au Conseil des droits de l’homme sur des normes supplémentaires.  Elle réaffirme son engagement en faveur de la mise en œuvre pleine et entière de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  À cet égard, le représentant a exhorté tous les États Membres à œuvrer pour arriver à la ratification universelle de la Convention et au retrait de toute réserve portant sur son article 4.

Enfin, la SADC soutient la création d’un forum pour les personnes d’ascendance africaine, qui permettrait d’assurer le succès de la Décennie internationale sur les personnes d’ascendance africaine et de fournir à ces personnes un tremplin afin qu’elles soient traitées de manière égale.  Il a enfin encouragé les États qui sont des hôtes de ces personnes à accueillir des conférences régionales en faveur de la création de ce forum.

M. CAMERON JON JELINSKI (Canada), au nom d’un groupe de pays, a expliqué que ledit groupe avait pour objectif de créer des sociétés inclusives où la diversité sera valorisée.  Il a appelé les États Membres non encore parties à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale à le devenir.  Le groupe déplore que, malgré les efforts entrepris, le fléau du racisme, de la discrimination raciale et de la xénophobie continue de peser sur ses victimes de par le monde.  Il note que les mesures prises pour remédier au racisme sont indispensables mais encore insuffisantes, car il devrait être « déraciné des cœurs et des esprits ».  Le représentant a également reconnu que la création de sociétés inclusives demandait du travail, l’inclusion signifiant bien plus que la fin de la discrimination raciale, tout comme la paix est bien plus complexe qu’un simple cessez-le-feu.

Mme DÖRTHE WACKER, de l’Union européenne, a assuré que les politiques de l’Union européenne en matière de lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée étaient totalement en phase avec ses engagements internationaux, au regard notamment de la Charte de l’ONU, et de ses obligations en matière de droits de l’homme, en particulier devant la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  À cette fin, l’Union européenne a développé un cadre juridique robuste, lequel inclut en particulier une directive sur l’égalité raciale qui interdit la discrimination selon des critères de race et d’origine ethnique dans tous les secteurs, y compris l’emploi, la protection sociale, l’éducation, le logement et l’accès aux services.  De plus, la transposition et la mise en œuvre par les États membres des législations européennes sont rigoureusement contrôlées par l’Union. 

La représentante a également rappelé que la Commission européenne avait mis en place un groupe de haut niveau sur la lutte contre le racisme, la xénophobie et toutes les formes d’intolérance, qui rassemble les autorités des États membres, des organisations de la société civile, des représentants de communautés et des agences de l’Union, notamment l’Agence sur les droits fondamentaux de l’Union européenne.  Dans ce cadre, a-t-elle précisé, des coordonnateurs ont été nommés, en 2015, pour faire progresser les actions destinées à combattre l’antisémitisme et la haine antimusulmane au sein de l’Union.

Mme Wacker a également rappelé que, dans le cadre de son action extérieure, l’Union européenne avait pris une part active dans les mécanismes de suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Elle suivra également avec intérêt les consultations régionales sur la création d’un forum pour les personnes d’ascendance africaine, mais met en garde contre une prolifération des rencontres et des instruments juridiques qui ne serviraient pas l’objectif recherché.  La représentante a insisté à cet égard sur le fait que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale restait l’instrument international de référence et contenait toutes les normes nécessaires pour combattre la discrimination raciale.  C’est pourquoi, a souligné la représentante, il est essentiel de continuer à encourager la ratification universelle de cet outil. 

M. MOHAMED MOUSSA (Égypte) a noté qu’en dépit des deux rapports présentés sur cette question lors du présent débat, on assiste à une résurgence mondiale des phénomènes de xénophobie, d’intolérance et de racisme, alimentés par les discours de dirigeants populistes et de mouvements d’extrême droite.  Pour l’Égypte, ces phénomènes nuisent gravement aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales et, de ce fait, constituent des menaces pour la paix et la sécurité internationales, ainsi que pour le développement et la stabilité des États.

Faire face à ces fléaux implique que la communauté internationale fasse des efforts concertés afin de bannir la diffusion du racisme et des idées xénophobes, notamment par le biais des médias et de l’éducation, a affirmé le représentant.  Pour l’Égypte, un effort particulier devrait être consenti pour prévenir une utilisation détournée des technologies modernes, particulièrement des réseaux sociaux, devenus le véhicule privilégié de la haine.

Enfin, affirmant que le droit des peuples à l’autodétermination est une norme de jus cogens du droit international, M. Moussa a rappelé que cette année avait été marquée par le cinquantième anniversaire de l’occupation par Israël des territoires palestiniens.  L’Égypte présentera sa résolution annuelle sur cette question, en réaffirmant que l’ONU a la responsabilité de garantir au peuple palestinien la jouissance pleine et entière de son droit à l’autodétermination, a ajouté le représentant.

M. MAURICIO CARABALI BAQUERO (Colombie) a présenté les mesures mises en place par son pays depuis l’adoption de la Constitution de 1991.  Celle-ci contient notamment plus de 30 articles qui font référence à des groupes ethniques et à leurs cultures particulières et ordonne l’adoption de mesures de discriminations positives en faveur de groupes discriminés et marginalisés, a expliqué le représentant.  Il a précisé ensuite qu’en 2014 la Colombie avait signé la Convention interaméricaine contre le racisme, la discrimination raciale et les formes connexes d’intolérance.

Mme SHILOH (Israël) a reconnu que, face au défi du racisme et de la discrimination raciale, les États étaient tous confrontés à des décisions difficiles.  Nous devons parler d’une seule voix contre les dangers du racisme, a-t-elle plaidé, assurant que tous les membres de la communauté internationale sincèrement engagés dans ce combat auraient toujours l’État d’Israël à leurs côtés.

Mettant l’accent sur l’antisémitisme, qui constitue de manière incessante un fléau pour le peuple juif, Mme Shiloh a indiqué que, pour la seule année 2016, plus de 250 000 messages antisémites postés en ligne avaient été recensés par Vigo Social Intelligence, une start-up de contrôle et d’analyse des réseaux sociaux.  Au-delà de la seule technologie, a-t-elle poursuivi, il est essentiel de s’attaquer aux causes du racisme et des stéréotypes, lesquels découlent souvent de la simple ignorance.  Il convient, par conséquent, de promouvoir l’éducation de qualité, celle qui enseigne qu’il n’existe ni race supérieure, ni religion supérieure, ni culture supérieure, mais seulement une humanité englobant tous et toutes, a-t-elle conclu.  

M. LUKIANTSEV (Fédération de Russie) a déploré que les partis politiques extrémistes et les slogans racistes se développent sans entrave.  Il a accusé certains pays de ne rien faire pour s’opposer à de telles pratiques et de se cacher derrière la liberté d’expression.  Il a dénoncé un climat de sélectivité et cité en exemple l’Europe centrale, où on peut faire librement l’apologie d’anciens SS et de mener une véritable guerre contre les monuments de ceux qui ont libéré l’Europe du nazisme.  Le représentant a également insisté sur la situation des « non-citoyens » et minorités dans les pays baltes, où, selon lui, 300 000 personnes sont privées de leur libertés fondamentales, une situation « inacceptable ».  Il a ainsi déploré le « mauvais exemple » des pays baltes ainsi que de l’Ukraine en matière de protection des langues nationales minoritaires.

M. ACHSANUL HABIB (Indonésie) a constaté que, si des progrès ont été accomplis dans la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, beaucoup restait à faire pour éradiquer ces fléaux.  De plus, a-t-il déploré, cette attitude hostile a trouvé de nouvelles plateformes d’expression avec l’utilisation à mauvais escient d’Internet et des réseaux sociaux, lesquels véhiculent des messages de haine et d’intolérance.

Face à ces défis, dont nul pays ne peut s’exonérer, l’Indonésie appelle au renforcement du dialogue interculturel, au respect de la tolérance et de la diversité.  Le représentant a estimé à cet égard que la Déclaration et le Programme d’action de Durban offraient des plateformes complètes de lutte qu’il serait judicieux de transposer dans les politiques nationales, régionales et internationales.

Plaidant enfin pour un traitement inclusif de ces défis contemporains, avec la participation de la société civile et des médias, le Rapporteur spécial a exhorté la communauté internationale à condamner toutes les formes d’islamophobie, toute glorification du nazisme et toute autre pratique susceptible de véhiculer le racisme et la discrimination raciale, encourageant au contraire les États à promouvoir les programmes d’éducation luttant contre toutes les formes de stéréotypes.

M. ALI MAAN (Iraq) a rappelé que son pays était confronté au terrorisme des groupes armés et des mercenaires étrangers, opposés à la volonté du Gouvernement de restaurer la démocratie.  L’Iraq a donc besoin de l’appui de la communauté internationale pour l’aider à faire face à ce phénomène, a dit le représentant.

M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a salué le programme de la Décennie internationale pour les personnes d’ascendance africaine, ajoutant qu’il fallait répondre positivement aux besoins particuliers de cette population, tenant compte des conditions historiques.  Si l’on ne veut laisser personne au bord du chemin, il faut que les personnes d’ascendance africaine soient intégrées, a dit le représentant, ajoutant que, pour répondre à la dette historique, il fallait au plus vite commencer les négociations pour une déclaration sur les droits des personnes d’ascendance africaine.  Le représentant a également déclaré que l’on ne pouvait pas permettre que les phénomènes de discrimination et de racisme se poursuivent longtemps.  Il faut donc que les droits des migrants soient pleinement défendus dans le cadre du pacte mondial pour des migrations sûres, régulières et ordonnées, a-t-il conclu. 

Mme STEFANIE AMADEO (États-Unis) a rappelé que le racisme se présentait sous divers visages et qu’il était de la responsabilité de tous de se lever contre ces phénomènes et manifestations.  Ceux qui professent la haine sont peu nombreux, mais leurs voix se font entendre, a également constaté Mme Amadeo, qui a ajouté que, même si les États ne doivent pas être seuls à lutter contre ces phénomènes, leurs dirigeants doivent se prononcer clairement contre le racisme.  En ce qui concerne les États-Unis, la haine n’est pas parmi leurs valeurs.

Mme KHALVANDI (République islamique d’Iran) a dit être profondément préoccupée par les attaques contre les migrants, les discours islamophobes et la haine véhiculée par certains dirigeants politiques dans les médias.  Cette pratique ne peut qu’encourager la haine et renforcer l’extrémisme, en plus d’installer un climat pour la commission des divers actes que l’on voit dans le monde, a-t-elle déclaré.  La représentante a aussi estimé que l’occupation de la Palestine, en dépit de tous les appels et des résolutions des Nations Unies, constituait un acte de racisme, nourri par le silence assourdissant de ceux qui disent promouvoir les droits de l’homme.  Par ailleurs, la distinction faite par Israël entre les juifs et les non-juifs constitue une mesure d’apartheid, a encore déclaré Mme Khalvandi. 

Mme NADYA RIFAAT RASHEED, de l’État de Palestine, a dénoncé l’occupation israélienne « sans limite » qui viole les droits des Palestiniens tous les jours.  Elle a rappelé que la moitié du peuple palestinien était réfugiée ou apatride et se voyait refuser le droit au retour.  Affirmant le droit à l’autodétermination du peuple palestinien, Mme Rasheed a déclaré qu’Israël poursuivait son entreprise coloniale, défiait la communauté internationale et portait atteinte au droit international, notamment à la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité.  Elle a enfin demandé de vrais actes pour mettre un terme à la domination d’Israël.

M. MAYANK JOSHI (Inde) a rappelé le rôle joué par son pays dans la lutte contre le colonialisme, lequel est fortement connecté aux discriminations raciales.  Pourtant, les études génétiques montrent que toutes les populations sont mélangées génétiquement, a-t-il ajouté.  Déplorant les actes xénophobes et les tendances nationalistes croissantes, le représentant a ensuite rappelé l’importance de l’autodétermination.  Il a enfin mentionné, parmi les mesures nationales prises par l’Inde, le renforcement du Code pénal et du Code de procédure pénale, afin de s’attaquer à tous les crimes liés à la discrimination raciale.

M. DAVÍÐ LOGI SIGURÐSSON (Islande) a demandé à tous les États qui ne l’ont pas encore fait de devenir partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  L’Islande partage aussi les préoccupations du Rapporteur spécial quant au pouvoir acquis par les groupes et partis politiques promouvant la haine raciale.  Elle constate que ces mêmes entités sont impliquées dans les actes de violence visant les personnes sur la base de leur orientation sexuelle et l’identité de genre.  L’Islande estime qu’il est de la responsabilité de tous de lutter contre ces discours de haine et contre la violence basée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, a conclu le représentant.

Mme DILEYM (Arabie saoudite) a estimé que le rapport du Secrétaire général ne rendait pas assez justice à la situation en Palestine et au droit à l’autodétermination de son peuple.  L’Arabie saoudite, qui a fait de la situation en Palestine un élément central de sa diplomatie, estime que cette question doit être résolue conformément aux décisions des Nations Unies et à la solution des deux États sur la base des frontières de 1967.  L’Arabie saoudite condamne en outre le blocus « immonde » qui pèse sur la bande de Gaza depuis des années et rappelle que Jérusalem ne doit pas être transformée en ville juive.  Sur un autre sujet, l’Arabie saoudite souligne en outre le danger que représentent pour les droits de l’homme les mercenaires et leur utilisation.

Mme KIPIANI (Géorgie) a attiré l’attention de la Commission sur la situation des Géorgiens vivant dans les territoires de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, occupés par la Fédération de Russie.  Dans ces deux régions, l’enseignement en langue géorgienne est interdit et les personnes sont obligées de renoncer à leurs patronymes abkhazes ou de se faire enregistrer comme étrangers, a-t-elle déclaré.  Elles ne peuvent par ailleurs même pas accéder à leurs lieux de culte, ni aux cimetières.  Sans mécanisme de surveillance international dans la région, la situation de ces personnes n’a aucune chance de s’améliorer, a affirmé la représentante.  

Mme OZCERI (Turquie) a souligné l’obligation des États parties à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale de mettre fin à la discrimination.  Si elle a reconnu que les législations qui interdisent le racisme fournissent de bonnes pratiques dans le domaine, la représentante n’en a pas moins jugé nécessaire un budget international destiné à soutenir les législations nationales.  Elle a appelé à agir de façon rapide contre les mouvements antimusulmans, insistant sur les incidents islamophobes, trop peu documentés, selon elle, et sur l’importance de consentir des efforts pour punir les crimes commis à l’encontre des musulmans, des migrants et d’autres groupes vulnérables de la société.

Mme SAMAR SUKKAR (Jordanie) a déclaré que le droit à l’autodétermination était le droit fondamental à la base de tous les autres droits.  Rappelant que la question de la Palestine est une « question pivot au Moyen-Orient », elle a demandé que le processus de paix continue d’avancer vers la solution des deux États, arguant que l’acceptation d’Israël dans la région ne pouvait aller sans la confirmation d’un peuple palestinien.

M. MUHAMMAD ZULQARNAIN (Pakistan) a déclaré que le droit à l’autodétermination, non seulement était une promesse inscrite dans la Charte des Nations Unies, mais était devenu un des principes des deux Pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques, et aux droits économiques, sociaux et culturels.  Or le refus de ce droit est présent dans le Jammu-et-Cachemire occupé depuis des décennies, a poursuivi le représentant, affirmant que le peuple de cette région était victime de la brutalité de l’occupant.  Le Pakistan estime que la question du Jammu-et-Cachemire doit rester au programme des Nations Unies, tant que leurs décisions ne sont pas mises en œuvre et respectées.  Le représentant a également déclaré être préoccupé par les discours de haine véhiculés à travers le monde, y compris par des dirigeants politiques. 

Mme KAITLYN SHELAGH ELIZABETH PRITCHARD (Canada) a déclaré que le racisme faisait peser un lourd fardeau à ceux qui en sont victimes.  Pour déraciner le racisme, il faut reconnaître cette situation et promouvoir la diversité.  Comme beaucoup de pays, le Canada a une histoire faite d’un passé colonial à l’encontre des peuples autochtones mais aujourd’hui, la nation multiculturelle canadienne est composée de personnes venant de tous les pays, a assuré la représentante.  Il est vrai que des problèmes persistent, notamment que les personnes d’ascendance africaine sont surreprésentées dans le système carcéral et peu dans les fonctions administratives au Canada, mais le Gouvernement entend résoudre cette situation, a encore assuré Mme Pritchard.

Mme MKHWANAZI (Afrique du Sud) a déclaré que son gouvernement accordait une importance capitale à la question de la décolonisation.  Estimant que les situations d’occupation sont contraires au droit international, l’Afrique du Sud est préoccupée par l’absence de progrès sur la question sahraouie, et ce, en dépit des décisions des Nations Unies.  Le peuple sahraoui doit pouvoir exercer librement son droit à l’autodétermination.  Pour l’Afrique du Sud, la situation en Palestine est aussi une source de préoccupation.  L’Afrique du Sud demande là encore que son peuple puisse exercer librement son droit à l’autodétermination.

M. MAX HUFANEN RAI (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a déclaré que le colonialisme était indigne et que la décolonisation n’était pas une affaire close.  Le représentant a insisté sur la nécessité de préserver la dignité inhérente et les droits inaliénables des populations vivant dans des territoires sous tutelle.  Ainsi, 17 territoires sont encore soumis au joug du colonialisme dont plusieurs pays de la région du Pacifique, a-t-il rappelé, insistant sur le fait que ces vestiges du colonialisme étaient un affront au droit à l’autodétermination des peuples colonisés.  Citant le référendum d’autodétermination prévu en 2018 en Nouvelle-Calédonie, le représentant a exhorté la Puissance administrante à autoriser une seconde mission avant le scrutin.  Nous devons permettre à la Nouvelle-Calédonie d’être la figure de proue de ces efforts d’autodétermination, a-t-il conclu.

M. ONANGA NDJILA (Gabon) a rappelé que son pays était partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, ajoutant qu’il était aussi attentif aux recommandations des Nations Unies allant dans le sens de l’éradication de ce phénomène.  Le Gabon a ainsi traduit en actes les recommandations contenues au paragraphe 13 du document final de la Conférence d’examen de Durban de 2001, invitant les États à sanctionner et à prendre les mesures législatives contre l’apologie de la haine raciale.  La Constitution du Gabon dispose en outre que les actes de discrimination raciale, ethnique et religieuse sont punies par la loi.

Le Gabon est en outre persuadé qu’il faut s’appuyer sur les institutions nationales spécialisées ainsi que sur les organismes nationaux et régionaux afin de lutter efficacement contre ces phénomènes.  C’est pourquoi, a expliqué le représentant, le Président du Gabon a encouragé le centre national de la recherche scientifique et technologique à entreprendre des études sur la problématique du racisme, de la discrimination raciale et de la xénophobie, ces études s’inscrivant dans le cadre de la prévention.  Le Gouvernement a en outre créé un Ministère de l’égalité des chances et des Gabonais de l’étranger pour concevoir et mettre en œuvre la politique en matière d’égalité des chances et de lutte contre toutes les formes de discrimination, a également précisé le représentant.  

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a déclaré que la Déclaration et le Programme d’action de Durban, comme auparavant la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, avaient montré la volonté et la détermination de la communauté internationale à réparer les blessures du passé et à prendre des mesures à cette fin.  Le Saint-Siège, qui a signé la Convention, en 1966, avant de la ratifier en 1969, estime que le racisme est une grave offense à la dignité humaine, en plus de représenter une menace à la réalisation de la paix et à l’inclusion juste des sociétés.

C’est, entre autres, pour cela que le Saint-Siège estime que le futur pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières représente une occasion de s’opposer à l’intolérance, à la discrimination raciale et à la xénophobie contre les migrants, les réfugiés et les membres de leurs familles, a dit l’Observateur permanent, avant de citer le pape François, pour qui les « migrants et réfugiés ne sont pas des problèmes à résoudre, mais des frères et sœurs à accueillir, respecter et aimer ».

Droits de réponse

Le représentant de l’Inde a répondu au Pakistan en accusant ce pays d’être « l’épicentre du terrorisme ».  Les peuples de l’Inde et de toute la région doivent lutter quotidiennement contre les idéologies en provenance du Pakistan, a-t-il affirmé.  Quant au Jammu-et-Cachemire, il a affirmé que ce territoire était indien et le resterait toujours, quoi que puisse affirmer le Pakistan.

Répondant à son tour, le représentant du Pakistan a expliqué qu’il était malheureux que l’Inde, « une fois de plus », veuille présenter une version différente de la réalité.  L’Inde occupe le Jammu-et-Cachemire depuis 70 ans et en a fait la zone la plus militarisée de la région, a-t-il affirmé.  C’est une occupation que les peuples du Cachemire rejettent, continuant à se tourner vers la communauté internationale pour qu’elle honore ses engagements, a-t-il ajouté.  Il a en outre rappelé les quatre guerres qui ont opposé l’Inde et le Pakistan, mentionnant que les deux pays possèdent l’arme nucléaire et exprimant son souhait de voir les promesses faites au peuple du Cachemire d’être honorées. 

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