En cours au Siège de l'ONU

La Cinquième Commission alertée sur la situation financière « préoccupante » de l’ONU dont un déficit de 365 millions au budget ordinaire

Soixante-treizième session,
5e séance – matin
AG/AB/4293

La Cinquième Commission alertée sur la situation financière « préoccupante » de l’ONU dont un déficit de 365 millions au budget ordinaire

Un déficit de 365 millions de dollars.  C’est ce qu’a appris aujourd’hui la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, de la bouche de la Secrétaire générale adjointe à la gestion qui présentait la situation financière de l’ONU dont le déficit du budget ordinaire, les impayés de plus de 2 milliards de dollars au budget des opérations de maintien de la paix et de 68 millions à celui des Tribunaux pénaux internationaux.

La situation « troublante » du budget 2017-2018 de l’Organisation avait déjà été portée à l’attention des délégations, a rappelé la Secrétaire générale adjointe, dans une lettre que le Chef de l’Organisation, M. António Guterres, leur avait envoyée le 11 janvier dernier.  À ce jour, a expliqué aujourd’hui Mme Jean Beagle, la trésorerie du budget ordinaire « continue d’être précaire », avec des déficits « de plus en plus importants qui interviennent de plus en plus tôt dans l’année ».  Au 30 septembre, le budget accusait un déficit de 365 millions de dollars, épuisant les réserves de 353 millions.  Les 12 millions restants ont été couverts par des emprunts au budget des opérations de maintien de la paix fermées.  Au 30 septembre, les impayés s’élevaient toujours à 1,1 milliard de dollars mais depuis lors, le nombre des États qui se sont acquittés de leurs contributions est monté à 144 sur 193.

Concernant les opérations de maintien de la paix dont le cycle budgétaire va du 1er juillet au 30 juin, la Secrétaire générale adjointe a indiqué qu’il manquait toujours au 30 septembre, un peu plus de 2,5 milliards de dollars sur un budget total de 4,9 milliards.  À la même date, une somme de 221 millions de dollars était due aux États fournisseurs de contingents, d’unités de police constituées et de matériels.  Mme Beagle a promis d’accélérer les remboursements mais a prévenu que tout dépendra de la rapidité avec laquelle les États concernés honoreront leurs obligations financières.  Elle a aussi rappelé que l’Assemblée générale a interdit le financement d’une opération par une autre opération en cours et souligné que le Fonds de réserve sert exclusivement à financer les nouvelles opérations et à l’élargissement des missions en cours.

Pour ce qui est des tribunaux internationaux, au 30 septembre 2018, les impayés s’élevaient à 68 millions de dollars, soit 7,7 millions de dollars pour le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), 30,1 millions pour le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et 30,4 millions de dollars pour le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des deux Tribunaux (MIFRTP). 

À ce jour, 43 États sur 193 ont payé l’intégralité de leurs contributions au budget ordinaire et à ceux des opérations de maintien de la paix et des tribunaux, a indiqué la Secrétaire générale adjointe qui a ajouté que, comme toujours, la santé financière de l’ONU dépend du respect des obligations financières en temps et en totalité.  « Une trésorerie saine est essentielle pour que l’Organisation puisse s’acquitter de ses mandats ».  Pour sa part, le Secrétariat, a affirmé la Secrétaire générale adjointe, s’engage à utiliser les ressources qui lui sont confiées de manière rentable et efficace et à fournir, « avec la plus grande transparence », les informations aux États Membres.

La Cinquième Commission tiendra son débat général sur l’amélioration de la situation financière de l’ONU le mardi 23 octobre, à partir de 10 heures.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Deuxième Commission: les objectifs de développement durable à rude épreuve face à l’urgence climatique

Soixante-treizième session,
12e et 13e séances – matin & après-midi  
AG/EF/3500

Deuxième Commission: les objectifs de développement durable à rude épreuve face à l’urgence climatique

L’important tribut que doit la planète au réchauffement climatique va s’alourdir de façon dramatique selon les experts du climat de l’ONU.  Ces conséquences concrètes, notamment pour les pays à statut particulier, ont nourri les débats de la Deuxième Commission (questions économiques et financières), dont l’ordre du jour était consacré à la mise en œuvre du développement durable dans le cadre du Programme 2030.  La question de l’appauvrissement des populations à la suite des catastrophes climatiques, vue comme une entrave à la réalisation des objectifs de développement durable, a été soulevée à de nombreuses reprises.

Dans son allocution liminaire devant la Deuxième Commission, la Présidente de la soixante-treizième session de l’Assemblée générale, Mme Maria Fernanda Espinosa Garcés, a observé qu’il s’agissait du « programme d’action le plus ambitieux jamais adopté pour éradiquer la pauvreté et réduire les inégalités ».  Elle a en contrepartie cité le chiffre de 783 millions de personnes vivant actuellement dans l’extrême pauvreté pour, selon ses mots, « réveiller les consciences ».

Les pays les plus vulnérables ont raconté la réalité du réchauffement climatique, qui entrave la réalisation des objectifs de développement durable.  Le Bangladesh, par exemple, est un des pays les moins avancés (PMA) et l’une des 10 nations de la planète les plus vulnérables aux changements climatiques.  Il a peu contribué à la détérioration de l’environnement, mais le réchauffement climatique constitue une « menace existentielle » pour ses 160 millions d’habitants.  C’est pourquoi son représentant, à l’instar de nombreuses délégations, a exprimé ses inquiétudes face aux conclusions du récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).

Ces experts mettent en lumière les conséquences dangereuses des changements climatiques sur les efforts d’éradication de la pauvreté, de sécurité alimentaire et de santé publique, si la hausse des températures ne se limite pas à 1,5°C.  Or, comme l’a fait remarquer le Groupe des 77 et la Chine (G77), l’éradication de la pauvreté est le « plus grand objectif mondial » si l’on veut parvenir au développement durable. 

Dans un contexte de tempêtes tropicales et d’inondations, la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, notamment dans la perspective du futur Sommet mondial sur le climat prévu l’an prochain.  « Il faut bousculer le statu quo si nous voulons que les îles et les peuples des récifs coraliens aient une chance, non pas seulement d’atteindre le développement durable, mais de survivre », a affirmé la CARICOM, qui a appelé les délégations à faire reconnaître les Caraïbes comme « zone spéciale de développement durable ».  Un appel appuyé par le G77.

Les délégations auront pu noter que face aux obstacles qui entravent la voie du développement durable, des approches d’intégration régionales des objectifs se développent, au sein de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) notamment.  S'exprimant en leur nom, la Thaïlande a rappelé que l’ASEAN avait adopté en 2015 le plan « Vision 2025 » afin d’avancer sur la voie de « la coopération politique », de « l’intégration économique » et de « la responsabilité sociale », dans le cadre du Programme 2030. 

Renforcer la coopération, pour réduire les risques et pertes liés aux catastrophes naturelles, et renforcer les capacités de réponse: ces objectifs ont engendré l’Accord de l’ASEAN sur la gestion des catastrophes et les interventions d’urgence.  L’ASEAN a aussi adopté un Plan stratégique pour la biodiversité 2011-2020.  De son côté, la Mongolie a lancé une plateforme de réduction des risques et des catastrophes en Asie du Nord-Est; une conférence régionale a eu lieu à Oulan-Bator en 2018 avec les pays voisins pour développer des solutions dans la ligne du Cadre de Sendai. 

Outre la coopération pour la mise en œuvre du Programme 2030, les régions ont un rôle important à jouer en termes de suivi.  C’est ce qu’a dit la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) en soulignant la valeur des examens régionaux et sous-régionaux.  Cette délégation a aussi insisté sur le lien à faire entre ces rencontres régionales et le Forum politique de haut niveau pour le développement durable.

Toujours au sujet du suivi, la Présidente de l’Assemblée générale s’est réjouie que le prochain Forum politique se tienne en septembre 2019 sous l’égide de l’Assemblée, pour la première fois depuis sa création.  Le représentant de la CELAC a, pour sa part, estimé que le format du Forum ne cadrait pas avec la nature intégrée, indivisible et interconnectée des objectifs de développement durable.  Il a souhaité que cet organe aille au-delà des « discussions académiques afin d’offrir une plateforme dynamique pour un dialogue régulier », et devienne un guide politique vers la réalisation du Programme 2030.  Le Mexique a lui aussi voulu revoir la structure du Forum arguant que, pour l’instant, il « fragmente au lieu d’intégrer ».  

Comme autre exigence de la mise en œuvre du Programme 2030, la CELAC a cité une « approche ciblée » qui se détourne d’une stratégie unique, car celle-ci ne convient pas à tous.  Cuba a exprimé la même idée en demandant que soit prise en compte la diversité des approches, des vues et des modèles choisis par chaque pays. 

Tout au long de la journée, les délégations ont témoigné de leur élan vers le développement durable avec optimisme, comme l’Inde, qui a entrepris sa transformation vers des sources d’énergie renouvelables: d’ici à 2022, elle entend produire 175 gigawatts d’électricité à partir de sources renouvelables, dont 100 gigawatts avec l’énergie solaire.  Des efforts reconnus par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), qui a décerné le prix de « Champion de la Terre » au Premier Ministre.

Forte du même enthousiasme, la Mongolie s’est lancée dans le développement durable et le développement vert.  Un parc éolien lancé en 2012 produit 50 mégawatts d’énergie, et un parc de 10 mégawatts de panneaux photovoltaïques a été mis sur pied dans la région centrale; deux projets de parcs éoliens sont également prêts à la construction. 

La Deuxième Commission terminera ses travaux sur le développement durable demain à partir de 10 heures.

DÉVELOPPEMENT DURABLE

Allocution de la Présidente de l’Assemblée générale

Mme MARIA FERNANDA ESPINOSA GARCÉS, Présidente de la soixante-treizième session de l’Assemblée générale, a souhaité s’adresser à la Deuxième Commission pour rappeler que trois ans s’étaient écoulés depuis l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030, faisant observer qu’il s’agissait du programme d’action le plus ambitieux adopté pour éradiquer la pauvreté sous toutes ses formes et réduire les inégalités.  À son avis, les nouveaux accords auxquels parviendra la Commission devront être conséquents pour chercher à améliorer la mise en œuvre des objectifs de développement durable, le chiffre de 783 millions de personnes vivant dans l’extrême pauvreté devant réveiller les consciences. 

D’ici à 2020, nous devons atteindre 21 cibles de ces objectifs, a lancé la Présidente, notamment pour atténuer les changements climatiques, préserver les écosystèmes et rendre plus durable l’exploitation des ressources naturelles.  Elle a souhaité signaler que le prochain Forum politique de haut niveau pour le développement durable qui se tiendra sous l’égide de l’Assemblée générale permettra d’examiner les progrès réalisés.  Cela dit, le succès des programmes est tributaire du renforcement du financement du développement, a fait observer la Présidente, encourageant les États Membres à réfléchir à la manière de mieux mobiliser les ressources financières et non financières pour honorer le Programme d’action d’Addis-Abeba.  « Je sais que vous saurez vous attaquer aux déséquilibres systémiques qui sapent le développement durable » a-t-elle assuré, soulignant qu’elle se consacrerait à sept priorités durant sa présidence, dont plusieurs relevant de l’ordre du jour de la Deuxième Commission.  Une commission dont elle attend beaucoup, a-t-elle précisé. 

L’une de ces priorités est le travail décent, qui est essentiel pour éliminer la pauvreté et réduire les inégalités.  La Présidente a proposé d’intégrer une approche novatrice en ce qui concerne l’avenir du travail, notamment pour les jeunes et les personnes handicapées.  Elle a annoncé qu’elle convoquera en avril 2019 une réunion sur le travail décent, à l’occasion du centième anniversaire de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Elle a encore suggéré aux délégations d’intégrer la perspective de genre dans leurs travaux.  Quant aux pays en situation particulière, Mme Espinosa Garcés a souhaité qu’une attention spéciale continue de leur être accordée. 

Cette soixante-treizième session de l’Assemblée générale sera particulièrement riche en événements de haut niveau, a fait observer sa Présidente.  Elle a souligné l’importance de la Conférence de haut niveau sur la coopération Sud-Sud, qui se tiendra à Buenos Aires en mars 2019.  Elle a espéré pouvoir compter sur la collaboration des délégations pour que ces réunions soient un succès, plaidant pour de la bienveillance et une ouverture d’esprit, de même que pour le consensus et des solutions novatrices et créatrices.  Il est nécessaire d’envoyer un message clair à nos peuples, a lancé la Présidente: « nous recherchons, pays développés et pays en développement, à parvenir à un monde meilleur, où chacun a sa place et dans lequel l’extrême pauvreté n’est plus qu’un mauvais souvenir.  Si nous y parvenons, a-t-elle conclu, nous aurons rempli notre objectif de faire en sorte que l’ONU est pertinente pour tous les êtres humains ». 

Présentation de rapports

M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a présenté plusieurs rapports du Secrétaire général sous le point 20 de l’ordre du jour: Développement durable.

Le premier rapport (A/73/81–E/2018/59), intitulé Intégration des trois dimensions du développement durable dans l’ensemble du système des Nations Unies, évalue les actions prises par les organismes des Nations Unies pour intégrer les dimensions économique, sociale et environnementale du développement durable.  Dans une enquête menée par le Département des affaires économiques et sociales, 36 entités des Nations Unies ont donné des renseignements à jour sur les mesures qu’elles ont prises pour faire avancer l’application du Programme 2030 et la réalisation des objectifs de développement durable.  Le rapport indique qu’une nouvelle vision institutionnelle prend progressivement forme, qui tend à abandonner la gestion cloisonnée et à privilégier les interactions, les partenariats et la recherche de synergies dans l’ensemble du plan de travail de l’Organisation.

Mise en œuvre d’Action 21, du Programme relatif à la poursuite de la mise en œuvre d’Action 21 et des textes issus du Sommet mondial pour le développement durable et de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable.

Le rapport du Secrétaire général (A/73/204) sous ce point présente un bilan actualisé et livre une analyse des objectifs qui n’ont pas encore été atteints, notamment sur la dynamique démographique, les échanges commerciaux, les ressources foncières, les produits chimiques toxiques et la contamination des eaux souterraines, les déchets, le transfert de technologies et la coopération dans ce domaine, ainsi que la promotion de modes de production et de consommation durables.  Le rapport inclut également les enseignements tirés de l’expérience lors de leur réalisation intégrale, les exemples de réussite et les pratiques optimales.

Suivi et application des Modalités d’action accélérées des petits États insulaires en développement (Orientations de Samoa) et de la Stratégie de Maurice pour la poursuite de la mise en œuvre du Programme d’action pour le développement durable des petits États insulaires en développement

M. Liu a présenté trois rapports sous ce point. Le rapport intitulé Assessment resulting from the evolving mandates of the Small Island Developing States Unit, évalue l’évolution des mandats de la Section des petits États insulaires en développement.

Le rapport (A/73/226) intitulé Suivi et application des Modalités d’action accélérées des petits États insulaires en développement (Orientations de Samoa) et de la Stratégie de Maurice pour la poursuite de la mise en œuvre du Programme d’action pour le développement durable des petits États insulaires en développement, donne un aperçu général de l’état de la mise en œuvre des Orientations de Samoa et contient un résumé des mesures prises par les États Membres, les organismes du système des Nations Unies et les autres partenaires internationaux de développement pour soutenir les efforts de mise en œuvre déployés par les petits États insulaires en développement au cours de la période 2017-2018.

Le rapport (A/73/225) intitulé Vers le développement durable de la mer des Caraïbes pour les générations présentes et à venir, met en lumière un ensemble d’activités menées aux niveaux national et régional par les États Membres, les partenaires internationaux de développement et d’autres parties prenantes en faveur du développement durable dans la région des Caraïbes.

Harmonie avec la nature

Le rapport (A/73/221) s’inspire des contributions issues du huitième dialogue interactif sur l’harmonie avec la nature, tenu le 23 avril 2018, qui traitait de la jurisprudence de la Terre dans le cadre de l’instauration de modes de production et de consommation durables en harmonie avec la nature, ainsi que des tendances en matière d’application de la jurisprudence de la Terre dans les domaines du droit, des politiques publiques, de l’éducation et de la mobilisation du public.

Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes à un coût abordable

Le rapport (A/73/267) donne un aperçu des progrès accomplis pour garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable, et expose les mesures prises par les États Membres pour atteindre plus rapidement cet objectif.  Il présente également les principaux messages du premier examen de l’objectif 7 de développement durable (Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable), qui a eu lieu lors de la réunion de juillet 2018 du Forum politique de haut niveau pour le développement durable.

Réduction des risques de catastrophe

Mme MAMI MIZUTORI, Représentante spéciale du Secrétaire général pour le Secrétariat interinstitutions de la Stratégie internationale de prévention des catastrophes (UNISDR), a présenté le rapport A/73/268 traitant de la mise en œuvre du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030).  Citant le rapport, Mme Mizutori a signalé une hausse de 151% des pertes économiques dues aux catastrophes climatiques, ces 20 dernières années.  Ces catastrophes ont tué 1,3 million de personnes, tandis que 4,4 millions ont été blessées, déplacées, ou nécessité des soins d’urgence à cause de catastrophes.  Saluant l’adoption du Cadre de Sendai en mars 2015 comme une initiative ambitieuse, Mme Mizutori a indiqué que « les progrès vont bon train », mais en même temps regretté qu’ils ne soient pas assez rapides.  Le rythme des changements climatiques dans de nombreux pays dépasse celui des progrès dans la réduction des risques, a-t-elle mis en garde.  Le rapport souligne toutefois des progrès grâce à l’aide publique au développement (APD), et préconise d’élaborer des instruments financiers sur mesure.  Notant que le fardeau de la dette entraîne des initiatives de développement à court terme au détriment de la résilience, Mme Mizutori a appelé à agir tout en ayant en perspective la résilience.

Sauvegarde du climat mondial pour les générations présentes et futures

Application de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification, en particulier en Afrique

Mme MONIQUE BARBUT, Secrétaire exécutive de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (CNULCD), a présenté par visioconférence un rapport sur la mise en œuvre de la CNULCD (A/73/255, section II), relatif aux résolutions 71/229 et 72/220.  Le rapport fait état des résultats de la treizième session de la Conférence des Parties à la CNULCD.  Il rappelle la Décennie des Nations Unies pour les déserts et la lutte contre la désertification et informe sur les activités menées pour se conformer aux prescriptions de la résolution proclamant ladite décennie.  Mme Barbut a suggéré que l’Assemblée générale réaffirme que la réalisation de la neutralité en matière de dégradation des terres constitue un moyen d’accélérer celle d’autres objectifs de développement durable. 

Convention sur la diversité biologique

Mme CRISTIANA PAŞCA PALMER, Secrétaire exécutive du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, a présenté le rapport lié à la résolution 72/221, qui appelle à l’action pour atteindre les cibles concernant la biodiversité.  Le rapport donne de nombreux détails sur la mise en place de la quatorzième Conférence des Parties à cette convention.  Selon Mme Palmer, ses conclusions ont été « adoptées dans une atmosphère où dominait le désir d’apporter un changement transformationnel et d’appliquer les cibles pour construire un futur en harmonie avec la nature d’ici à 2050 ».

Rapport de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement du Programme des Nations Unies pour l’environnement

Lutte contre les tempêtes de sable et de poussière

M. JAMIL AHMAD Directeur du Bureau de liaison de New York du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), a présenté le rapport du Secrétaire général sur la troisième session du PNUE contenu dans le document A/73/25, et le rapport sur la lutte contre les tempêtes de sables et de poussière (A/73/306).  Ces rapports donnent des détails sur l’évolution des situations, mettent en exergue des initiatives de toutes les parties prenantes pour s’attaquer au problème, et signalent des réalisations dans différentes activités: suivi des prédictions et alerte rapide; résilience; atténuation des sources.

Développement durable

Mme CHANTAL LINE CARPENTIER, Chef du Bureau de New York de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a présenté le rapport du Secrétaire général sur l’entreprenariat au service du développement durable (A/73/258).  Il comprend une analyse des pratiques optimales et des initiatives menées à l’appui de l’entrepreneuriat aux niveaux national, régional et international, notamment le recensement, la formulation, la mise en œuvre et l’évaluation de mesures cohérentes concernant l’entrepreneuriat et la promotion des micro-, petites et moyennes entreprises.  Il met plus particulièrement l’accent sur les mesures visant à promouvoir l’entrepreneuriat social.

M. MOISÉS VENANCIO, Conseiller du Bureau régional du Programme des Nations Unies pour le développement pour les États arabes (BREA), a présenté le rapport du Secrétaire général sur la marée noire sur les côtes libanaises (A/73/302), concernant la catastrophe écologique qu’a entraînée la destruction par l’armée de l’air israélienne, le 15 juillet 2006, de réservoirs de stockage situés à proximité immédiate de la centrale électrique de Jiyeh (Liban).  Cet incident avait provoqué une marée noire qui s’était répandue sur les deux tiers des côtes libanaises et au-delà.

M. KAZI RAHMAN, Représentant spécial adjoint de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), a présenté le rapport (A/73/283) du Secrétaire général sur l’Année internationale du tourisme durable pour le développement (2017).  Il contient un récapitulatif des principales activités et initiatives que l’OMT a menées avec la coopération d’autres acteurs et un aperçu de celles que des gouvernements, organisations internationales, acteurs du secteur privé et autres parties prenantes ont organisées dans le cadre de l’Année internationale.  Le rapport fait une évaluation des résultats obtenus, des mesures à prendre et des recommandations visant à maintenir le bel élan donné par l’Année internationale et à en tirer parti.

Discussion générale

Au nom du Groupe des 77 (G77) et la Chine, Mme SHEYAM HAMED ABDELHAMIED ELGARF (Égypte) a réaffirmé que l’éradication de la pauvreté est le plus grand objectif mondial, nécessaire au développement durable.  Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 doit être une priorité, a insisté la représentante.  Elle a estimé que les PEID ont des circonstances particulières et qu’il faut veiller à ce qu’ils aient les ressources nécessaires dans le cadre des Orientations de Samoa.  Il en va de même dans le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe, a-t-elle poursuivi, soulignant qu’il est nécessaire de renforcer la résilience et de réduire les risques pour les prochaines années.  Elle a en outre appelé à reconnaître les Caraïbes comme une zone particulière.

S’agissant de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, le G77 et la Chine sont vivement préoccupés par la dégradation des terres, qui sape les efforts menés pour réaliser le développement durable.  Le Groupe s’est félicité de la réunion qui aura lieu en mars sur les modes de production et de consommation durables.  Quant à la coopération internationale, elle doit être renforcée pour permettre aux pays en développement d’atteindre les objectifs de développement durable, a plaidé la délégation.  Les changements climatiques et les catastrophes naturelles ne sont que des symptômes, a souligné la représentante en expliquant que le G77 souhaite une approche plus holistique et davantage de coopération entre les entités onusiennes.  Enfin, le Groupe a exprimé le souhait de coopérer avec ses partenaires pour parvenir à un développement durable qui bénéficie à tous.

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. VITAVAS SRIVIHOK (Thaïlande) a rappelé que les pays membres de son groupe avaient adopté en 2015 le plan « Vision 2025 », pour faire avancer l’ASEAN sur la voie de « la coopération politique », de « l’intégration économique » et de « la responsabilité sociale ».  Les membres de l’ASEAN se sont également engagés, dans le cadre de ce plan, à mettre en œuvre le Programme 2030, a ajouté le représentant.  M. Srivihok s’est toutefois dit conscient des facteurs qui pourraient remettre en cause les progrès réalisés par la région en matière de développement durable.  Les risques de catastrophes naturelles, auxquels les pays de l’ASEAN sont fortement exposés, représentent, selon lui, un véritable « fléau du développement » pour la région, comme en témoigne le séisme et le tsunami qui ont récemment frappé l’Indonésie, causant la mort de plus de 2 000 personnes et détruisant des dizaines de milliers de maisons. 

Dans ce cadre, le représentant a indiqué que l’ASEAN s’attachait en priorité à renforcer la coopération pour réduire les risques et pertes liés aux catastrophes naturelles, ainsi que pour renforcer les capacités de réponse à ces crises.  Ces objectifs ont donné lieu, a-t-il rappelé, à l’Accord de l’ASEAN sur la gestion des catastrophes et les interventions d’urgence.  C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles les pays de la région se sont engagés à lutter contre les changements climatiques, a souligné M. Srivihok.  Il a mis l’accent sur l’importance du financement des actions climatiques, du transfert de technologies et du renforcement des capacités pour une meilleure mise en œuvre de l’Accord de Paris, dans la perspective du Sommet mondial sur le climat, qui sera organisé l’an prochain par le Secrétaire général.  Le représentant a également mentionné l’adoption par l’ASEAN d’un Plan stratégique pour la biodiversité 2011-2020.  « Le destin et le bien-être des générations futures dépendra de notre capacité à mettre en œuvre ou pas le Programme 2030 », a-t-il affirmé.

M. PERKS MASTER CLEMENCY LIGOYA (Malawi), qui s’exprimait au nom du groupe des pays les moins avancés (PMA), a rappelé que les catastrophes, comme les sécheresses ou les inondations, avaient touché 23 millions de personnes dans les PMA cette année.  Il a d’ailleurs exprimé ses condoléances au peuple indonésien, à la suite du séisme et du tsunami dévastateurs qui ont frappé l’archipel.  Les catastrophes viennent saper les progrès fragiles des PMA, a-t-il remarqué en plaidant pour la pleine mise en œuvre du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe.  Notant que les PMA ont besoin de coopération et de partenariats mondiaux forts, M. Ligoya a remercié le groupe de la Banque mondiale d’avoir promis 1,5 milliard de dollars à l’Indonésie pour sa reconstruction.  Il a également suggéré au Secrétaire général d’examiner la façon dont les fonds d’assurance pourraient être utilisés au niveau régional ou sous-régional pour aider les pays à se relever après une catastrophe. 

Dénonçant ensuite l’impact des changements climatiques, qui font des morts et forcent des gens à quitter leur foyer, le représentant a cité le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) qui a fourni les preuves scientifiques de la nécessité de limiter le réchauffement climatique à 1,5o C de plus.  Pour lui, cet objectif est réalisable.  Il a ainsi recommandé une réduction drastique des émissions de dioxyde de carbone, ainsi que la mise en œuvre de solutions durables.  Le programme que contient l’Accord de Paris est une bonne feuille de route, a-t-il estimé.  Rappelant que les PMA sont les pays les plus touchés par les changements climatiques, et que leur accès à l’énergie est limité, il a mis en garde sur le fait que le financement de l’objectif 17         -partenariats pour le développement- était trop faible: il faudrait des millions de milliards de dollars pour parvenir à l’objectif escompté.

Le représentant a ensuite attiré l’attention sur l’importance, pour les PMA, de la réalisation de la cible sur la dégradation des sols: « il faut rétablir les écosystèmes, essentiels pour atteindre les objectifs de développement durable », a-t-il recommandé.  Avant de finir, il a plaidé en faveur du développement de partenariats, qui sont des éléments essentiels selon lui pour parvenir aux objectifs de développement durable.  « Plus que jamais, le monde doit agir à l’unisson pour assurer un avenir à tous les citoyens du monde », a-t-il conclu. 

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Mme ELIZABETH THOMPSON (Barbade) a rappelé qu’il y a quelques semaines à peine, une tempête tropicale avait frappé de nombreuses îles dans l’est des Caraïbes, provoquant des inondations graves sur son passage, notamment à la Barbade, où les eaux sont montées de plus d’un mètre à certains endroits.  Il y a deux semaines, un tremblement de terre a frappé la Martinique, la Guadeloupe et la Dominique, a poursuivi Mme Thompson, avant d’ajouter que, la semaine dernière, Haïti avait une nouvelle fois été touchée par un séisme, alors même que les citoyens du pays se remettent à peine du tremblement de terre de 2010.  Tout cela illustre « la réalité tragique » des petits États insulaires en développement (PEID) qui, tout en n’ayant contribué que très faiblement aux changements climatiques, en subissent le plus les effets négatifs.  Sans compter, a ajouté la représentante, que ces États sont les moins bien équipés pour y faire face.

Dans ce contexte, la représentante a appelé à la communauté internationale à redoubler d’efforts dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, notamment dans la perspective du futur Sommet mondial sur le climat, l’an prochain.  Mme Thompson a jugé que cet évènement serait l’occasion pour les États Membres de s’engager en faveur du maintien de l’objectif de limiter la montée des températures à moins de 1,5o C.  « Il faut bousculer le statu quo si nous voulons que les îles et les peuples des récifs coraliens aient une chance, non pas seulement d’atteindre le développement durable, mais de survivre », a-t-elle affirmé. 

Dans moins d’un an, a poursuivi la représentante, aura lieu l’examen à mi-parcours des Orientations de Samoa sur les modalités d’action accélérées des PEID.  La représentante a appelé à ce que cet examen donne lieu à une déclaration politique « concise et tournée vers l’action, dans le cadre d’un accord intergouvernemental ».  Mme Thompson a notamment regretté que, en dépit des Orientations de Samoa et du Programme 2030, les ressources allouées au Groupe des PEID au sein du Département des affaires économiques et sociales (DAES) et dans l’ensemble du système onusien soient restées limitées.   Enfin, la représentante a appelé les États Membres à soutenir, durant cette session, la reconnaissance de la mer des Caraïbes en tant que « zone spéciale de développement durable ».

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), Mme FARZANA ZAHIR (Maldives) a annoncé qu’en septembre 2019, les PEID organiseront un examen à mi-parcours des Orientations de Samoa pour évaluer les progrès réalisés dans leur mise en œuvre.  La représentante a exhorté les autres États à montrer leur solidarité aux PEID en participant à un haut niveau à cette réunion, et en contribuant activement au processus, notamment pour le partage des meilleures pratiques et la recherche des voies et moyens pour relever les défis.  Elle a aussi souligné la nécessité d’un appui adéquat du système des Nations Unies aux PEID dans la mise en œuvre des Orientations de Samoa et du Programme 2030.  Elle a requis des ressources supplémentaires pour la Section qui s’occupe des PEID au Secrétariat de l’ONU et encouragé les États Membres à appuyer cette demande. 

Rappelant les grandes lignes du rapport du Secrétaire général, le délégué a annoncé qu’il soutenait la recommandation relative à la coopération internationale et à la fourniture de moyens aux PEID pour les aider à mettre en œuvre le Cadre de Sendai.  Elle a en outre demandé des solutions innovantes et de nouvelles stratégies pour les outils de financement, qui doivent être prévisibles et durables.  La représentante a, avant de conclure, exhorté les États Membres à renforcer leur ambition de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs, en vue de réduire l’élévation mondiale de la température à moins de 1,5°C.

M. RUBÉN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Salvador), s’exprimant au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a rappelé que la réalisation d’un développement durable nécessite la mobilisation d’importants moyens financiers et non financiers.  Il a salué le rôle du Forum politique de haut niveau pour le développement durable, tout en précisant que, sous les auspices de l’Assemblée générale ou du Conseil économique et social (ECOSOC), le Forum politique a un format qui, à son avis, ne cadre pas avec la nature intégrée, indivisible et interconnectée des objectifs de développement durable.  Il a ainsi souhaité que le Forum politique aille au-delà des « discussions académiques afin d’offrir une plateforme dynamique pour un dialogue régulier » qui deviendrait un guide politique vers la réalisation des objectifs de développement durable.  Il a aussi souligné l’importance des examens régionaux et sous-régionaux de la mise en œuvre du Programme 2030, insistant notamment sur le lien qui doit être fait entre ces rencontres régionales et le Forum politique, notamment pour lui apporter une contribution spécifique de chaque région.  Il a ainsi rappelé l’importance d’une approche ciblée qui se détourne de la stratégie unique, celle-ci ne convenant pas à tous.

Pour la mise en œuvre du programme de développement international, la CELAC souligne l’importance de l’APD, et elle invite les pays développés à tenir leur promesse en la matière.  La CELAC rappelle également que la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire sont des compléments de la coopération Nord-Sud.  En outre la région, qui est fort vulnérable aux changements climatiques, réaffirme son attachement à l’Accord de Paris et au Cadre de Sendai, et elle attend le lancement du système de suivi de celui-ci.  Le délégué a promis que la CELAC allait continuer de prendre des mesures de protection des écosystèmes et de la biodiversité, notamment en incluant ces problématiques de manière transversale dans tous les secteurs d’activités, y compris l’agriculture, la foresterie, la pêche, l’aquaculture, le tourisme et le commerce international.  Enfin, la CELAC rejette toute mesure unilatérale économique, financière ou commerciale incompatible avec le droit international et la Charte des Nations Unies, et qui sape les efforts d’essor des pays en développement notamment.

M. SMT KANIMOZHI (Inde) a rappelé que son pays attire les regards de la communauté internationale, puisqu’il compte le sixième de la population mondiale.  En Inde, l’agence nationale « NITI Aayog » mesures les progrès dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable en effectuant un classement des États fédérés.  Le classement tient compte de 82 critères et 75 indicateurs, créant ainsi une émulation entre les États. 

L’Inde salue les réformes du système des Nations Unies pour le développement que le Secrétaire général de l’ONU a initiées.  Le pays invite les donateurs à financer le nouveau système de coordonnateur résident.  L’Inde salue également les efforts du Secrétaire général pour focaliser l’attention sur les changements climatiques.  Le pays a entrepris sa transformation vers des sources d’énergie renouvelables.  D’ici l’année 2022, l’Inde entend produire 175 gigawatts d’électricité à partir des sources renouvelables, dont 100 gigawatts avec l’énergie solaire.  Ces efforts ont été reconnus par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) qui a décerné le prix de « Champion de la Terre » au Premier Ministre du pays en début de mois.  L’aéroport de Cochin, qui n’utilise que l’énergie solaire, a également reçu ce prix.  L’Inde a lancé un partenariat avec la France, intitulé l’Alliance solaire internationale, qui compte déjà 70 pays, a encore fait valoir son représentant.

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) s’est dit vivement préoccupé par les conclusions du récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui met en garde sur les conséquences dangereuses des changements climatiques sur les questions d’éradication de la pauvreté, de sécurité alimentaire et de santé publique si l’on ne limite pas à 1,5° C la hausse des températures.  Il est grand temps de redoubler d’efforts pour mettre en œuvre l’Accord de Paris et le Cadre de Sendai, a-t-il lancé.  Il a aussi rappelé que le Bangladesh est l’un des dix pays les plus vulnérables aux changements climatiques, qui posent une menace existentielle à 160 millions de personnes, bien que le pays ait peu contribué à la détérioration de l’environnement.  Engagé dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris, le Bangladesh a soumis sa contribution déterminée au niveau national dès 2016 et a adopté une stratégie pour limiter les émissions de carbone.  Il a aussi investi pour transformer l’agriculture et la rendre plus résiliente afin de garantir la sécurité alimentaire de la population. Les programmes de développement et d’adaptation aux changements climatiques ont été intégrés dans le méga projet Delta Plan 2100, soit à un horizon de 82 ans.

M. IAN S. NAUMKIN (Fédération de Russie) a cité le rapport du GIEC qui insiste sur la nécessité de limiter le réchauffement à 1,5o C.  « Le principal enjeu des changements climatiques est l’application d’un ensemble de règles conçues lors de la signature de l’Accord de Paris » a souligné le représentant en invitant à redoubler d’efforts pour trouver un ensemble équilibré d’accords.  L’énergie, les transports et l’agriculture sont les secteurs où il faut concentrer les efforts, selon lui, en particulier la sylviculture, secteur clef dans son pays qui représente 20% de la superficie forestière mondiale.  La Russie compte adapter ses forêts aux changements climatiques et adopter une meilleure gestion des émissions de gaz à effet de serre, pour les baisser jusqu’à un maximum de 75% des émissions produites en 1990, a annoncé le délégué.

Notant qu’il fallait aider les pays en situation particulière, surtout les PMA, il a rappelé que la Russie avait consolidé ses partenariats avec les PEID, par des projets communs de lutte contre les changements climatiques, ainsi que par le renforcement des capacités et l'aide au relèvement après les catastrophes. Par exemple, le pays a envoyé une aide humanitaire à Vanuatu après le passage du cyclone Pam en 2015, ainsi qu’à Cuba et Antigua-et-Barbuda après l’ouragan Maria en 2017.  Cette même année, des experts russes ont organisé au Centre russo-cubain de La Havane le deuxième séminaire régional de réponses aux situations d’urgence. La Russie a aussi donné 7,5 millions de dollars au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en vue de prévenir les conséquences des catastrophes dans les Caraïbes.

Mme MARTINEZ (Mexique) a fait observer que les objectifs de développement durable ne pourront être atteints que si l’on prend en compte leur nature intégrale et indivisible.  Elle a souligné la nécessité de revoir la structure du Forum politique de haut niveau, qui à son avis « fragmente au lieu d’intégrer ».  La déléguée de la jeunesse, représentante du Mexique, a ensuite parlé des changements climatiques, que le pays considère comme l’une des plus grandes causes de problèmes pour l’humanité.  Se référant aux constats alarmants dressés par le GIEC, elle a estimé qu’il fallait continuer à miser sur le multilatéralisme et, au niveau individuel, changer beaucoup d’habitudes nocives pour l’environnement.  Le destin de nos sociétés sera en jeu lors de la prochaine COP24 en Pologne, a-t-elle fait observer, plaidant pour l’adoption d’un accord applicable à tous, intégrant tous les éléments de l’Accord de Paris et dans lequel personne ne sera laissé de côté.  En tant que Président de la Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique, le Mexique est préoccupé des progrès lents dans la mise en œuvre des objectifs d’Aichi et juge par ailleurs pertinent de continuer à intégrer la perspective de la biodiversité dans des secteurs tels que l’agriculture, la sylviculture, la pêche et le tourisme.

Mme BIANA LEYVA REGUEIRA (Cuba) a dit que l’objectif de « ne laisser personne sur le côté » suppose la reconnaissance et le respect de la diversité des approches, des vues et des modèles choisis par chaque pays dans l’exercice de leur droit à l’autodétermination en fonction des diverses circonstances et responsabilités nationales.  La représentante a souligné que le dernier rapport du GEIC réaffirme les dangers croissants pour la survie de l’espèce humaine.  Paradoxalement, les États-Unis, « l’un des plus grands pollueurs dans le passé et toujours actuellement », refusent de se joindre à la communauté internationale pour se conformer à l’Accord de Paris, a regretté la représentante en accusant ce pays de compromettre ainsi la vie même des générations futures et la survie des espèces y compris l’Homme.  La déléguée a exhorté les États parties à l’Accord de Paris à s’acquitter de leurs obligations et à élargir leur champ d’action en s’appuyant sur leurs responsabilités communes mais différenciées.  Elle a aussi rappelé que le blocus économique, commercial et financier imposé par les États-Unis contre Cuba depuis près de 60 ans constitue le principal obstacle au développement de son pays et à la pleine jouissance des droits de l’homme du peuple cubain.  Ce blocus entrave la mise en œuvre du Programme 2030, a-t-elle déploré en chiffrant à 933 678 millions de dollars le montant total des dommages causés par le blocus.

M. SUKHBOLD SUKHEE (Mongolie) a déclaré que la Mongolie était particulièrement vulnérable aux changements climatiques, à cause de son faible développement économique et de son enclavement.  Néanmoins, elle est enthousiaste dans son engagement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.  Le développement durable et le développement vert sont une priorité en Mongolie, a assuré le représentant, en faisant état d’un parc éolien lancé en 2012 qui produit 50 mégawatts d’énergie et d’un parc de 10 mégawatts de panneaux photovoltaïques mis sur pied dans la région centrale.  Deux projets de parcs éoliens sont également prêts à la construction.  En outre, l’Asie étant particulièrement menacée par les catastrophes climatiques, la Mongolie a créé une plateforme de réduction des risques et des catastrophes en Asie du Nord-Est; une conférence régionale a eu lieu à Oulan-Bator en 2018 avec les pays voisins pour développer des solutions dans la ligne du Cadre de Sendai. 

Pour Mme ROUA SHURBAJI (République arabe syrienne), la réalisation des objectifs de développement durable est très difficile, surtout pour les pays dans une situation particulière, comme la Syrie confrontée à une guerre terroriste, à des sanctions économiques unilatérales et aux pratiques de la coalition internationale.  Malgré tout, la Syrie reste attachée à travailler avec le système des Nations Unies pour le développement, a-t-elle assuré en indiquant notamment que son gouvernement élabore une stratégie de gestion des catastrophes afin de prévoir la reconstruction économique.  La transition, entre l’absence actuelle de développement et un renforcement des capacités, passe par un renforcement des institutions et de la justice sociale, et par le retour des réfugiés.  Le but est de parvenir à un développement économique, social et environnemental.  La représentante a plaidé en faveur d’un soutien accru de la part des États Membres, en évitant la politique du deux poids-deux mesures ainsi que toute politisation ou tentative d’ingérence.  L’aide de l’ONU doit en outre se limiter à l’humanitaire, a-t-elle précisé.  Le rapport sur la marée noire sur les côtes libanaises montre qu’Israël doit assumer ses responsabilités éthiques, a enfin estimé la représentante.

Au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, M. RENNIER STANISLAUS GADABU (Nauru) a dit accorder une importance particulière à ce point de l’ordre du jour, qui concerne ce groupe de pays au premier chef, et a fait part de sa préoccupation au sujet des progrès mitigés vers le développement durable.  Il a souligné l’importance des Orientations de Samoa pour les petits États insulaires en développement.  Le représentant a demandé au Secrétaire général d’allouer des ressources additionnelles aux PEID, arguant que ces pays sont très vulnérables aux changements climatiques; ils ont besoin de fonds supplémentaires pour renforcer leur résilience.  Le représentant s’est dit ouvert à toutes les solutions novatrices à cet égard.  Il a demandé aux partenaires des petits États insulaires en développement du Pacifique et à la communauté internationale de renforcer leur soutien.

M. CHAN GUOLONG (Singapour) a relevé qu’en dépit des avancées, la communauté internationale n’apparaît pas en mesure de réaliser les objectifs de développement durable d’ici à 2030.  Pour rectifier le tir, Singapour propose que l’on s’adapte en « pensant créativité ».  Le délégué a pris exemple sur Singapour qui est passé de pays subissant un stress hydrique extrême à un État qui a su utiliser les technologies modernes pour recycler les eaux usées.  Aujourd’hui, cinq usines principales, les « NEWater », fournissent 40% de l’eau consommée dans le pays.  Ensuite, le représentant a suggéré que les efforts de développement partent du niveau communautaire, puisque le développement durable doit être un effort de toute la société.  Là encore, l’exemple de Singapour a étayé ses propos: la majorité de la population a choisi d’adopter les modes de transports en commun, ou le vélo et la marche.  Singapour comptera 700 km de pistes cyclables à l’horizon 2030, a-t-il promis.  Enfin, Singapour plaide pour un engagement de la communauté internationale à travers des partenariats, une volonté déjà affichée par le pays qui partage son savoir-faire avec d’autres pays en développement.

M. RODRIGO ALBERTO CARAZO ZELEDÓN (Costa Rica) a réitéré son engagement à mettre en œuvre le Programme 2030 et souligné l’importance de prendre en considération le caractère multidimensionnel de la pauvreté et de l’autonomisation des femmes et des filles, ainsi que le rôle essentiel de l’agriculture familiale pour le développement durable.  À ce sujet, il a rappelé que le Costa Rica présenterait au cours de cette session un projet de résolution pour proclamer le 7 juin « journée internationale sur l’innocuité alimentaire », voyant cela comme une étape dans la promotion de pratiques alimentaires durables.  Sur la question de l’environnement, le Costa Rica souhaite partager son expérience en matière de conservation des forêts et de génération d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, dans le cadre du processus de décarbonisation profonde de l’économie.

Mme AL-BAKER (Qatar) a plaidé en faveur d’un partenariat mondial pour le développement durable, soulignant la nécessité de simuler le rôle des coordonnateurs résidents.  Pour sa part, le Qatar renforcera ses efforts, conformément à ses positions et à ses principes, a-t-elle dit.  La représentante a indiqué que la Vision nationale du Qatar avait fixé ses objectifs principaux pour le développement durable du pays.  Elle a souligné en particulier l’importance du rôle de l’éducation pour assurer un avenir meilleur aux générations présentes et futures, précisant que le Qatar investissait pour relever le niveau d’éducation et soutenir les efforts d’autres pays dans ce domaine.  Elle a dénoncé en conclusion « l’embargo injuste imposé au Qatar ».

M. ZOUBIR BENARBIA (Algérie) a exprimé son accord avec les recommandations contenues dans le rapport du Secrétaire général demandant à l’Assemblée générale de réaffirmer que la neutralité en matière de dégradation des terres permet d’accélérer la réalisation des objectifs de développement durable et du Programme 2030.  Pour sa part, l’Algérie est en voie de réaliser ses objectifs de développement, et compte présenter l’état de ses progrès lors du Forum politique de haut niveau.  M. Benarbia a aussi réitéré la détermination de son pays à mettre en œuvre les Conventions de Rio, le Protocole de Kyoto et l’Accord de Paris.  Au niveau régional, l’Algérie poursuit ses efforts afin de renforcer la protection de l’environnement, notamment au sein de la Conférence ministérielle africaine.  Le représentant a déploré en terminant que la Convention de l’ONU sur la lutte contre la désertification demeure le « parent pauvre » des accords multilatéraux sur l’environnement.

Pour M. ZIAUDDIN AMIN (Afghanistan), la mise en place du Programme 2030 exige une plus grande coopération entre les États ainsi que des engagements collectifs plus forts.  L’Afghanistan s’efforce d’incorporer les objectifs de développement durable à son Cadre national sur la paix et le développement, a indiqué le délégué en mentionnant aussi l’intégration de ces objectifs au budget national.  Le but est d’accroître la productivité et la prestation de services à la population.  En tant que membre des pays en développement les moins avancés, groupe qui inclue des pays sans littoral comme des États insulaires, l’Afghanistan considère que l’accès à une énergie propre, peu coûteuse et renouvelable joue un rôle essentiel dans ses efforts de transformation économique, a déclaré le représentant, pour qui le renforcement du lien entre paix, sécurité et développement devrait être une priorité de la Deuxième Commission.

M. E. COURTENAY RATTRAY (Jamaïque) a observé que plusieurs accords internationaux adoptés au cours des dernières années soulignent les « vulnérabilités uniques » des PEID.  Il a estimé que l’examen, en 2019, pour des Orientations de Samoa marquera une étape importante dans la mise en œuvre des engagements pris par la communauté internationale envers les PEID.  Pour lui, la réalisation des objectifs de développement durable et du Programme 2030 dans son ensemble permettra de relever les défis mondiaux et de parvenir à une « prospérité partagée ».  Devant la multiplication des catastrophes naturelles, les PEID comme la Jamaïque font face à des fardeaux financiers qui ont pour effet d’exacerber une situation économique déjà difficile, a déploré M. Rattray, pour qui la lutte contre les changements climatiques est devenue « indispensable ».  Il a souligné, à cet effet, l’importance d’adopter des mesures de réduction des risques, notamment en matière de finances et d’investissements.

M. TIJJANI MUHAMMAD BANDE (Nigéria) a dit que son pays était conscient de la nécessité d’atteindre les cibles fixées; il a développé un cadre institutionnel pour cela, avec un comité interministériel sur les objectifs de développement durable.  En outre, un bureau d’assistant spécial a été créé.  Le représentant a également fait valoir le développement du partenariat public-privé au Népal où les petites et moyennes entreprises (PME) notamment sont encouragées à jouer un rôle dans les efforts nationaux visant le développement.  Le Gouvernement, a-t-il poursuivi, s’est doté d’un programme de sensibilisation et de promotion des objectifs de développement durable, ainsi que d’un programme destiné aux jeunes.  Le Nigéria appelle à continuer de travailler contre la désertification et la sécheresse pour que personne ne soit laissé sur le côté, a ajouté le délégué avant de présenter l’agence de gestion des catastrophes qui a été établie dans la lignée du Cadre de Sendai.

M. NIRMAL RAJ KAFLE (Népal) a relevé que pour la mise en œuvre du Programme 2030 et d’autres accords multilatéraux, il faut d’abord renforcer la cohérence et la coordination au niveau international.  Sur la question des changements climatiques, le Népal appelle à une action urgente pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre.  En tant que pays enclavé et constitué d’un relief montagneux, le Népal invite la communauté internationale à ne pas oublier le lien organique existant entre les montagnes et les océans.  Il a expliqué que des problèmes dans l’Himalaya, notamment des avalanches, des chutes de glaciers, des inondations et des glissements de terrains peuvent affecter des millions de personnes vivant dans les plaines ou du côté des océans, et vice-versa.  Il a appelé à mobiliser les fonds appropriés pour la mise en œuvre du Programme 2030, notamment en faveur des PMA, et surtout pour ceux qui sont également enclavés ou constitués d’îles.  Des partenariats doivent également être renforcés pour la réduction des risques de catastrophe, en droite ligne du Cadre de Sendai.  En guise de conclusion, le représentant a fait remarquer que, en ce qui concerne les objectifs de développement durable, « les actions valent mieux que les paroles ».

Mme CRISTIANE ENGELBRECHT SCHADTLER (Venezuela) a soutenu une vision pondérée des politiques de développement durable, plaidant pour un environnement international et régional propice au développement et une coopération internationale équilibrée quant aux besoins sociaux et économiques des peuples du Sud.  Elle a indiqué que le Venezuela avait adopté un modèle de développement qui place l’être humain au centre et qui repose sur la solidarité, la justice, l’inclusion sociale, l’équité, la promotion et le respect des droits de l’homme, ainsi que la participation citoyenne.  Pays particulièrement vulnérable aux catastrophes naturelles, le Venezuela a souligné la pertinence d’une vision solidaire de la coopération internationale et a conclu que le développement durable a besoin d’une volonté politique, en particulier de la part des pays les plus avancés, pour concrétiser des stratégies orientées vers la mise en œuvre du Programme 2030.

M. VICTOR MORARU (République de Moldova) a demandé que des mesures soient prises à l’échelle internationale contre les changements climatiques qui affectent tous les pays et menacent de saper le peu de gains acquis en matière de développement.  Il faut donc des actions d’adaptation et d’atténuation et surtout, mettre en œuvre l’Accord de Paris, a-t-il recommandé.  Il a dit souhaiter que des actions soient prises à la vingt-quatrième Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP24) prévue en décembre prochain en Pologne.  Au vu des besoins nécessaires pour la mise en œuvre du programme de développement international, Moldova suggère que l’ONU utilise sa force unique pour stimuler les partenariats et mobiliser les ressources nécessaires.  Il faut se servir de la technologie, de la science et de l’innovation, et des fonds disponibles pour pouvoir réaliser les objectifs de développement durable, a-t-il conclu.

M. RIO BUDI RAHMANTO (Indonésie) a souhaité que l’on associe l’action à la parole et a recommandé d’agir au niveau multilatéral.  En matière de protection marine, le pays a encouragé le développement d’une économie bleue durable, en organisant la cinquième Conférence « notre océan » au mois d’octobre.  Le représentant a encouragé le renforcement des capacités de développement, notamment par le biais du transfert des technologies.  À cet effet, a-t-il illustré, l’Indonésie a créé le « zakât » et le « waqf », deux instruments de finance islamique basés sur la solidarité, pour élargir les sources financières sur lesquelles s’appuient les actions visant la réalisation des objectifs de développement durable.  Le représentant a aussi loué l’économie créative, qui a représenté 7,44% du produit intérieur brut (PIB) de l’Indonésie en 2016.

Mme SOFYA SIMONYAN (Arménie) s’est félicitée des efforts consentis par l’ONU pour déployer des synergies afin de réaliser le développement durable.  Encourageant les partenariats publics-privés, l’Arménie a adopté des réformes ambitieuses en termes d’innovation, avec le développement d’un laboratoire national dédié aux nouvelles technologies.  Pays en développement sans littoral, l’Arménie a mis l’emphase sur la problématique des transports, a dit le représentant, qui s’est par ailleurs élevé contre les « mesures coercitives inadmissibles » telles que blocus et fermeture des frontières, qui ajoutent au déficit du pays en matière d’infrastructures.  En tant que pays à revenu intermédiaire et montagneux, l’Arménie a fait de la lutte contre les changements climatiques sa priorité dans la réalisation des objectifs de développement durable, a-t-il enfin témoigné.

M. VITALII BILAN (Ukraine) s’est félicité des initiatives de l’ONU pour réduire la faim de moitié dans le monde et s’est dit prêt à offrir son aide pour répondre aux défis de la sécurité alimentaire.  L’Ukraine est également attachée à ses obligations au titre de l’Accord de Paris, a dit le représentant en soulignant que c’était le premier pays européen à déposer ses instruments de ratification.  Sans paix et sécurité durables, aucun pays ne peut parvenir au développement durable, a poursuivi M. Bilan, mettant en exergue la nécessité d’atteindre tous les objectifs universels du développement durable, dont celui de trouver un règlement pacifique aux conflits.

Mme FADUA ORTEZ (Honduras) a souligné l’importance de l’APD et du maintien du financement consacré aux pays en développement pour réaliser le Programme 2030.  La coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire jouent également un rôle particulier pour le renforcement des capacités et l’échange de connaissances et de bonnes pratiques entre les pays du Sud, en complément de la coopération Nord-Sud.  Le Honduras est d’avis qu’une stratégie effective de financement pour le développement durable demande la mobilisation de ressources financières nouvelles, publiques et privées, nationales et internationales.  La représentante a également relevé que ce sont les pays en développement qui supportent les principaux effets des changements climatiques, tout en s’efforçant de lutter contre la pauvreté et de favoriser la croissance économique.  Le Honduras s’est doté d’un solide cadre juridique en ce sens, dont une législation sur l’environnement, l’eau, les forêts, les zones protégées et la vie sauvage, mais le financement climatique par des ressources complémentaires est essentiel.

M. XU ZHONGSHENG (Chine) a dit que la réalisation du Programme 2030 devait réduire l’écart entre le Nord et le Sud et encourager la prospérité mondiale.  Sa mise en œuvre nécessite cependant des politiques équilibrées et un renforcement des partenariats avec l’ONU, la coopération Nord-Sud devant être le principal moyen, et la coopération Sud-Sud un complément de ce partenariat.  La Chine a été parmi les premiers pays à présenter un rapport sur les progrès accomplis, s’est félicité le représentant, en indiquant que son programme se concentre sur la qualité, ainsi que sur la volonté de sortir les habitants des zones rurales de la pauvreté.  La Chine, a indiqué le délégué, applique activement le plan stratégique du dix-neuvième Congrès du parti communiste, et adhère au concept de développement de l’économie verte et durable. 

Mme ALHOSANI (Émirats arabes unis) a dit que les Émirats recherchaient une politique régionale pour renforcer les objectifs de développement durable.  Sur le plan national, avec la participation de toutes les parties prenantes, y compris le secteur privé, des projets en cours contribuent à la mise en œuvre des objectifs de développement durable, notamment l’objectif 6 (eau et assainissement) et 7 (offre d’énergie à un prix abordable).  Les Émirats arabes unis ont beaucoup progressé sur la base des repères régionaux, y compris la stratégie énergétique, qui prévoit 50% d’utilisation de l’énergie propre dans le pays d’ici à 2050.  Tous ces efforts ont pour but de préparer les Émirats à l’après-pétrole, à atténuer l’impact des changements climatiques, et à développer les énergies renouvelables pour assurer le développement économique et social de la région.  

Mme BERGDIS ELLERTSDOTTIR (Islande) a estimé que la clef de la réussite de la mise en œuvre des objectifs de développement durable est l’implication du secteur privé, de la société civile et des jeunes.  La politique de coopération de l’Islande s’appuie sur les droits de l’homme, l’égalité des genres, l’infrastructure sociale, la consolidation de la paix et la gestion durable des ressources naturelles, a-t-elle indiqué.  L’Islande considère que les changements climatiques sont devenus la plus grande menace à la paix mondiale, la sécurité et le développement, comme le montre le dernier rapport du GIEC qui souligne la nécessité de prendre des actions urgentes.  L’Islande a pris les devants, puisque toute la consommation électrique du pays est tirée de sources d’énergie renouvelables.  Le Gouvernement entend désormais éliminer tout hydrocarbure dans le secteur du transport, tout en augmentant la superficie forestière et en restaurant les zones humides.  Enfin, l’Islande estime que l’égalité des genres est l’élément pivot qui facilitera le développement durable dans tous les pays.

M. ALAMI (Maroc) a indiqué que le pays a entamé un processus permettant d’intégrer les principes de développement durable dans les stratégies à tous les niveaux.  En outre, la Constitution de 2011 a consacré le développement durable comme un droit de tous les citoyens, notamment le droit à l’eau et le droit à un environnement sain.  La prévention et la veille environnementale se font à travers des institutions nationales et l’intégration de la dimension environnementale dans des projets de développement.  Le Maroc a aussi signé plusieurs accords de coopération avec d’autres pays africains sur diverses questions environnementales, a précisé le représentant.

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a plaidé pour des mesures urgentes dans la lutte contre la crise climatique, ajoutant que « l’Accord de Paris ne suffit pas, et encore moins s’il est abandonné par les principaux émetteurs de gaz à effet de serre ».  La représentante a fait valoir que les changements climatiques ne sont que l’un des nombreux symptômes du déséquilibre entre l’humanité et la nature.  De son côté, la Bolivie propose la création d’un modèle de développement en harmonie avec la nature, qui reconnaisse la Terre mère comme un être avec un droit à la vie et au respect de ses cycles vitaux.  Elle encourage aussi la création d’un tribunal international de l’environnement, qui invite à cesser de considérer l’être humain comme le maître et propriétaire de la nature.  Selon ce modèle, la Bolivie est en train de mettre en place le Programme patriotique 2025, basé sur 13 piliers, dont l’éradication de l’extrême pauvreté, l’universalisation des services de base, la souveraineté scientifique et technologique, la souveraineté communautaire financière, la souveraineté productive et la souveraineté alimentaire.

Pour M. AMDE (Éthiopie), il faut prendre des mesures immédiates pour suivre les recommandations du GIEC.  En tant que pays vulnérable aux changements climatiques, l’Éthiopie a mis en place une économie verte pour être neutre en carbone d’ici à 2025, a indiqué le représentant en ajoutant que son pays continue de promouvoir des mesures concertées globales dans les politiques nationales de la région.  Le Cadre de Sendai, les ripostes en cas de catastrophe devraient s’inscrire dans un cadre de développement à long terme, et développer la résilience, a-t-il estimé en précisant que l’appui de l’ONU en faveur des PMA est à cet égard crucial.  Le délégué a plaidé pour un accès aux sources d’énergies modernes, durables et fiable, « condition sine qua non à la réalisation du Programme 2030 ».  L’objectif 7 (énergie propre et d’un coût abordable) reste un vrai défi pour les PMA, a-t-il souligné: le renforcement des capacités, et le transfert de technologies devront s’accélérer. 

Selon M. BOKOUM (Burkina Faso), les investissements doivent être orientés vers l’éducation, la santé, le développement durable, la promotion de la croissance verte et de sociétés pacifiques et inclusives.  Le Burkina Faso a lancé une stratégie d’action avec l’appui du PNUD, ainsi qu'un programme d’utilisation des technologies de l’information et des communications (TIC); il a aussi élaboré un rapport de suivi des objectifs de développement durable.  Le représentant a poursuivi ses explications en indiquant que, grâce à ces initiatives, le Burkina Faso avait bénéficié d’un cadre économique stable.  Il a toutefois reconnu que, mais malgré cela, les défis économiques, sociaux et environnementaux restent élevés.  Garantir un emploi décent pour les Burkinabés reste un objectif primordial, de même que, sur le plan environnemental, exploiter la terre de façon durable et la préserver.  Il a réclamé l’appui technique de tous les partenaires financiers pour parvenir à ses objectifs.

Mme ROSE MAKENA MUCHIRI (Kenya) a relevé que les changements climatiques et la désertification ont conduit à la réduction des terres arables dans le pays.  Le Kenya a adopté une loi interdisant l’usage de sacs en plastique sur son territoire, en vigueur depuis le 28 août 2017, avec un taux de succès dans sa mise en œuvre de 85%.  La représentante a souhaité que la quatrième Assemblée des Nations Unies pour l’environnement, prévue en mars prochain, soit axée sur le renforcement des capacités techniques et le soutien financier, tout comme les innovations et les partenariats.  En tant qu’hôte du PNUE et du Programme des Nations unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), le Kenya promet de continuer d’offrir un environnement propice aux agences onusiennes afin qu’elles remplissent leur mandat.  Le Kenya abritera également la Conférence sur une économie bleue durable, prévue en novembre à Nairobi.

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a estimé que le Forum politique de haut niveau a pour l’instant mené à bien ses activités sous l’égide de l’ECOSOC mais que les examens volontaires nationaux ont montré qu’il reste beaucoup à faire pour atteindre les objectifs ambitieux de développement durable.  Les ressources financières sont de plus en plus difficiles à obtenir et, pire, la volonté politique semble aux abonnés absents.  Aussi, la représentante a-t-elle espéré que la tenue du Forum sous les auspices de l’Assemblée générale, l’année prochaine, permettra de recaler la voie vers les objectifs de développement durable.  Elle a aussi noté que les pays en développement sont souvent les plus vulnérables aux changements climatiques alors que leur empreinte carbone est faible, comme c’est le cas du Pakistan.  Cependant, elle a estimé que la pleine réalisation du Programme 2030 est un énorme défi mais qu’il est possible de le relever si tous les pays s’engagent en ce sens.

M. ANTÓNIO GUMENDE (Mozambique) a constaté avec inquiétude que les catastrophes naturelles précipitent chaque année environ 26 millions de personnes dans la pauvreté et causent des pertes économiques considérables.  Le Mozambique, l’un des trois pays d’Afrique les plus exposés aux catastrophes naturelles, a adopté une approche de gestion des risques de catastrophe pour réduire l’exposition aux événements extrêmes des communautés locales, de l’économie et des infrastructures.  Il a également adopté un plan stratégique 2017-2030 pour la réduction des risques de catastrophes aligné sur le Cadre de Sendai et sur le Programme 2030.  En conclusion, le représentant a appelé les partenaires bilatéraux et multilatéraux à élargir leur partenariat et les moyens mis en œuvre pour aider les pays en développement à mieux faire face aux risques de catastrophe.

Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE (Ghana), en écho à la Conférence de Rio de 1992, a rappelé qu’il fallait « mettre l’être humain au cœur de toutes les activités » et « préserver la planète pour les génération futures », avant de faire part d’un tableau mitigé pour le cas de l’Afrique, où les lacunes entre zones rurales et urbaines et entre hommes et femmes sont prégnantes malgré une croissance économique importante.  Les pays à revenu intermédiaire, comme d’autres pays en situation particulière, ont des défis uniques, et leurs pertes économiques à cause des changements climatiques devraient être mieux évaluées grâce à des données ventilées, a-t-elle suggéré.  Elle a déploré que 12 millions d’hectares dans le monde ne puissent plus être cultivés à cause de la propagation de la sécheresse, et que les niveaux de pollution marine soient actuellement insoutenables; ils nécessitent une action politique d’envergure pour y remédier.  La représentante a réaffirmé l’attachement de son pays à l’Accord de Paris, et s’est joint aux appels pour renforcer la coopération Sud-Sud, la coopération Nord-Sud, ainsi que pour renforcer les capacités des pays et le transfert des technologies.

M. PHILIP FOX-DRUMMOND GOUGH (Brésil) s’est félicité qu’au niveau national, les objectifs de développement durable aient été intégrés pour honorer les dispositions du Programme 2030.  Le travail relatif au développement durable aux Nations Unies découle du Sommet de Rio, a-t-il rappelé, soulignant aussi que le Forum politique de haut niveau pour le développement durable a été lancé au Sommet Rio+20 de 2012.  Le Brésil, a-t-il assuré, continue de respecter « ce patrimoine » en vue de réaliser les objectifs de développement durable.  Il espère que l’Assemblée générale enverra au monde un message vigoureux alors que le rapport spécial du GIEC en a envoyé un qui est sans équivoque.  L’Assemblée générale doit donner suite à ces événements, a-t-il souligné.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est alarmé du constat du GIEC pour la planète et a fait observer que le Pérou est un pays très vulnérable aux effets des changements climatiques avec, entre autres, le recul des glaciers tropicaux andins, le réchauffement de l’océan, les faibles ressources hydriques et la dégradation de la biodiversité.  Le Gouvernement a promulgué une loi cadre sur les changements climatiques, en ligne avec l’Accord de Paris, afin de réduire cette vulnérabilité et d’avancer vers un développement faible en émissions.  Le Pérou reconnaît les femmes, les peuples autochtones, les jeunes, la société civile et le secteur privé comme des acteurs clefs dans l’élaboration de politiques environnementales, a fait savoir M. Meza-Cuadra.  Le pays a aussi intégré la gestion des risques de catastrophe comme composante indispensable du développement durable.

M. VISHAL ANAND LUCHOOMUN (Maurice) a fait savoir que le développement durable est au cœur de chaque secteur d’un PEID comme Maurice.  Le pays est tout à fait engagé dans la mise en œuvre des Orientations de Samoa et du Programme 2030, mais les défis qu’il a à relever ne doivent pas être sous-estimés, a-t-il demandé.  En outre, le changement de catégorie de PMA à pays à revenu intermédiaire fait surgir de nouveaux problèmes, comme la dette et le manque d’accès à des crédits à des conditions préférentielles, ainsi que le manque de capacités pour parvenir à la résilience.  Le soutien aux PEID a été inadéquat pour y faire face, a regretté le représentant, qui a plaidé pour une hausse du financement du Département des affaires économiques et sociales et de sa Section chargée des PEID.

Mme AHMADI (Bahreïn) a qualifié le Bahreïn de chef de file dans la mise en œuvre du développement durable.  Le Royaume a présenté son rapport pour l’examen national volontaire cette année, a-t-il dit en soulignant les défis particuliers que rencontre son pays en tant que PEID.  Le Royaume se heurte notamment à de grandes difficultés à cause des changements climatiques, aggravé par la menace terroriste croissante et la dégradation géopolitique dans la région.  Les énergies renouvelables sont une priorité pour le Bahreïn, et le Gouvernement a adopté un projet avec le PNUD pour développer l’énergie renouvelable.  Il a aussi inauguré la première usine à panneaux solaires du royaume en janvier 2017. 

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a soulevé le problème de la désertification qui sévit en Namibie.  Il a expliqué la course difficile du pays, qui tente de parvenir à la neutralité de la dégradation des sols d’ici à 2020, un objectif prioritaire car ce sont les femmes et les enfants qui subissent le plus la dégradation des sols, a-t-il argué.  Elle compte y arriver grâce à des partenariats publics-privés.  La Namibie demande par ailleurs aux pays susceptibles de subir les effets des tempêtes de sable et de poussière de se concentrer davantage sur les capacités des populations à faire face à la sécheresse.  Les technologies de l’environnement doivent s’enraciner dans les pays en développement, a-t-il aussi recommandé, avant d’appeler à diversifier les ressources et à investir dans les produits forestiers autres que le bois.  Avec 9 milliards d’humains d’ici à 2050, il est important de lutter contre les famines et la désertification, a rappelé le représentant, qui a mis en avant l’idée de « grande muraille verte » pour l’Afrique.

Mme MIRGUL MOLDOISAEVA (Kirghizistan) a dit que le Kirghizistan s’est fixé comme priorité de garantir le bien-être de son peuple et a estimé qu’il est impensable d’engranger des succès sans protéger l’environnement.  La représentante a mentionné l’épisode regrettable de l’enfouissement de déchets radioactifs par l’URSS dans les années 1940 en Asie centrale.  Face au danger de contamination des cours d’eau et des bassins, le Kirghizistan propose des mesures pour prévenir toute émanation radioactive provenant de ces bassins.  Il a aussi élaboré un plan stratégique pour décontaminer les anciennes usines d’enfouissement et, a estimé la représentante, seule une aide internationale permettra à l’avenir de régler le problème dans la région, y compris pour empêcher des organisations extrémistes ou terroristes d’avoir accès à ces déchets dangereux.

M. NURZHAN RAKHMETOV (Kazakhstan) a évoqué la nécessaire évaluation des priorités et des besoins de chaque pays et indiqué que la stratégie 2050 du Kazakhstan met en avant une approche multisectorielle et universelle des questions essentielles dans les domaines économique, social et environnemental.  L’engagement du Kazakhstan envers le Programme 2030 est également visible dans l’organisation de plusieurs centres régionaux et globaux sur les objectifs de développement durable, a fait valoir le représentant.  Il est temps, a-t-il poursuivi, d’améliorer la coopération régionale dans des domaines exigeant une action collective comme les changements climatiques, les répercussions des tensions sociales, telles que la violence extrême, et les questions hydriques transfrontalières.  Le représentant a mis l’accent sur l’importance fondamentale d’une approche régionale pour le développement durable.

M. FRANCIS M. KAI-KAI (Sierra Leone) a rappelé qu’en 2017, des milliers de gens ont perdu la vie en Sierra Leone du fait d’un glissement de terrain et des inondations qui ont fait suite à des pluies torrentielles.  Le pays accorde donc du prix à la mise en œuvre du Cadre de Sendai et insiste pour que les États remplissent leurs obligations découlant de l’Accord de Paris, rappelant que cela est important pour des pays comme la Sierra Leone qui fait partie des plus vulnérables aux changements climatiques.  Il a en outre souligné l’importance des partenariats dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Mme SARVESTANI (République islamique d’Iran) a déploré que l’unilatéralisme sape la réalisation des objectifs de développement durable.  Attaché à relever le défi climatique, une priorité nationale en Iran, le pays a compris qu’il fallait utiliser les énergies renouvelables et développer les centrales électriques tout en prenant en compte les systèmes environnementaux.  L’Iran a pris des mesures contre les risques de catastrophe, mais cela nécessite aussi une coopération élargie au niveau international, a lancé la représentante.  Les tempêtes de sable et de poussière sont aussi une préoccupation en Iran: elles balaient les frontières et ont des répercussions sur toute l’Iran orientale.  « Les populations sont enfouies sous un épais tapis de poussière » a décrit la représentante.  Ces tempêtes sont de plus en plus fréquentes, et l’Iran s’est félicitée d’un dialogue interactif en juillet 2018 pour que les États Membres touchés par ce problème puissent s’exprimer.  Malgré ces contraintes, l’Iran s’est dit « prête à se retrousser les manches » pour réaliser les objectifs de développement durable.

M. TAVARES (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, FAO) a évoqué le rapport du GIEC et s’est félicité de la décision de la COP23 de reconnaître que l’agriculture fait partie de la solution face aux changements climatiques.  Les objectifs d’adaptation et d’atténuation vont de pair avec des systèmes agricoles durables, a-t-il fait valoir, rappelant que nombre de pauvres se trouvent dans les régions rurales les plus vulnérables et que la réduction des risques de catastrophe est essentielle.  Il a donné des exemples de mesures de soutien comme, en Somalie, où 3 millions de familles ont bénéficié de l’aide de la FAO pour lutter contre la mortalité du bétail et accroître leur production de lait.  Il a rappelé en conclusion l’attachement de la FAO à la réalisation des objectifs de développement durable.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Structure binaire ou unique pour la gestion des ressources humaines de l’ONU: la Cinquième Commission lance les discussions

Soixante-treizième session,
4e séance – après-midi
AB/AB/4292

Structure binaire ou unique pour la gestion des ressources humaines de l’ONU: la Cinquième Commission lance les discussions

Structure binaire ou unique?  Les neuf délégations qui se sont exprimées cet après-midi, à la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, ne se sont pas vraiment prononcées sur l’idée du Secrétaire général de répartir la gestion des ressources humaines entre deux départements plutôt que de la regrouper sous une seule bannière.  Seul pays à prendre parti, la Fédération de Russie a, à l’instar du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB), privilégié la structure unique.

La gestion des près de 40 000 employés du Secrétariat de l’ONU est un cadre « massif, fragmentaire, obsolète, lacunaire et parfois contradictoire », a conclu cette année le Bureau des services de contrôle interne (BSCI), après une évaluation dans laquelle il qualifie l’organisation actuelle de « frein important à l’exécution efficace des programmes ».  Pour l’heure, en effet, la gestion des ressources humaines au Secrétariat relève à la fois du Département de la gestion et du Département de l’appui aux missions. 

Ces deux Départements seront bientôt remplacés, dans le cadre de la réforme de la gestion présentée l’an dernier par M. Guterres et approuvée par l’Assemblée générale, par deux nouvelles entités: un « Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité », aux côtés d’un « Département de l’appui opérationnel ».  M. Guterres a proposé en mars dernier de reconfigurer les ressources humaines actuelles entre ces deux nouveaux départements, de façon à séparer la gestion opérationnelle et la gestion stratégique à long terme.  Jugeant peu « rationnelle » cette séparation, le CCQAB a recommandé de regrouper la gestion des ressources humaines en une structure administrative unique, pour adopter une approche unifiée, optimiser la répartition des fonctions et éviter les doubles emplois.  

Dans le rapport dont étaient saisies aujourd’hui les délégations, M. Guterres campe sur ses positions, arguant qu’une « structure monolithique » formerait un ensemble « si large et si disparate » qu’il ne pourrait être efficacement géré.  Tout en saluant le rapport « détaillé » du Secrétaire général, le Groupe des 77 et la Chine ont toutefois souhaité obtenir plus de détails sur les réformes précédentes pour mieux comprendre le « contexte et la logique » qui a conduit à la configuration actuelle.  Le Groupe a dit vouloir comprendre les défis actuels du Secrétariat, s’agissant, entre autres, du recrutement, de la cohérence des politiques entre le terrain et le Siège, de la gestion de la performance du personnel et des raisons pour lesquelles les progrès sont si lents dans la représentation géographique du personnel à tous les niveaux.  C’est essentiel, s’est expliqué le Groupe, pour déterminer la capacité d’une structure unique ou scindée en deux à résoudre les problèmes actuels.

L’Union européenne, la Suisse ou encore les États-Unis ont dit attendre avec intérêt les négociations sur cette question, alors que l’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande prévenaient que la réorganisation du département des ressources humaines n’est que le début d’un processus plus large.  Structure binaire, oui mais qu’en est-il des mécanismes de coordination pour assurer une véritable interaction entre les fonctions opérationnelles et politiques ainsi qu’un point d’entrée permettant aux États de débattre des questions relatives aux politiques en matière de ressources humaines et à leur mise en œuvre? s’est demandé le Pakistan.  Seul pays à prendre parti, la Fédération de Russie s’est prononcée en faveur d’une structure unique, de préférence dans le nouveau Département de l’appui opérationnel.  Le pays s’est toutefois dit prêt à travailler de manière constructive pour examiner ce point de l’ordre du jour en consultations privées.

La Commission tiendra sa prochaine séance publique mardi 16 octobre, à partir de 10 heures, sur l’amélioration de la situation financière de l’ONU.

RAPPORT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR « UN NOUVEAU MODÈLE DE GESTION POUR L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES: ÉTUDE COMPARATIVE DES STRUCTURES DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES » (A/73/366)

Le Secrétaire général rappelle d’abord que dans sa résolution 72/266 B, l’Assemblée générale a approuvé la réorganisation des actuels Département de la gestion et Département de l’appui aux missions en un nouveau Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité et un nouveau Département de l’appui opérationnel, ainsi que la nouvelle organisation.  Elle l’a également prié de lui soumettre une étude comparative du regroupement des fonctions de gestion des ressources humaines en un seul département ou de leur répartition entre deux départements, afin de garantir une approche unifiée, d’optimiser la répartition des fonctions et d’éviter les doubles emplois.

Le Secrétaire général explique qu’actuellement, la gestion des ressources humaines au Secrétariat relève à la fois du Bureau de la gestion des ressources humaines du Département de la gestion et de la Division du personnel des missions du Département de l’appui aux missions.  De plus, la plupart des entités du Secrétariat (départements, bureaux, commissions économiques régionales et opérations de paix) disposent d’une unité ou d’un service administratif qui aide la direction à gérer les ressources humaines.

Le champ de compétences du Bureau de la gestion des ressources humaines recouvre actuellement à la fois les fonctions stratégiques et les fonctions opérationnelles, ce qui l’empêche d’accorder aux unes comme aux autres toute l’attention voulue.  De plus, le chevauchement des responsabilités du Bureau de la gestion des ressources humaines et de la Division du personnel des missions est source de confusion et se traduit par des incohérences dans les pratiques et les interprétations.  Selon le Bureau des services de contrôle interne (BSCI), le cadre de gestion des ressources humaines est « massif, fragmentaire, obsolète, lacunaire et parfois contradictoire ».

Une structure monolithique serait une manière de régler les problèmes mais le Secrétaire général ne privilégie pas cette solution car les fonctions dont elle serait responsable formeraient un ensemble « si large et si disparate » qu’il ne pourrait être efficacement géré.  Une structure unique ne permettrait pas non plus de se prémunir contre le risque de consacrer trop d’attention et de ressources aux besoins opérationnels plus immédiats au détriment des objectifs stratégiques et politiques à long terme.  Par ailleurs, confier à un même département des fonctions administratives relatives aux stratégies et à la conformité compromettrait la séparation des tâches, qui est l’un des aspects essentiels de la réorganisation proposée.

Le Secrétaire général penche donc pour une structure binaire dans laquelle deux branches assumeraient des fonctions distinctes et fourniraient leurs services à toutes les entités du Secrétariat, favoriserait une répartition claire des responsabilités, mais aussi séparerait nettement les fonctions opérationnelles et les fonctions de contrôle de la conformité.  La séparation des fonctions faciliterait aussi la spécialisation requise pour que les aspects stratégiques et politiques des ressources humaines, d’une part, et les fonctions opérationnelles et les services axés sur l’usager, de l’autre, reçoivent les ressources et l’attention voulues de la part de l’administration.

Une structure binaire dans laquelle les responsabilités en matière de ressources humaines seraient réparties entre activités stratégiques et opérationnelles répondrait aux préoccupations suscitées par des méthodes d’exécution incohérentes et les problèmes d’élaboration et d’analyse des politiques.  Elle permettrait aussi de prêter une plus grande attention aux questions stratégiques, notamment l’élaboration des politiques, en y allouant les ressources nécessaires et en les distinguant des services d’appui opérationnel et de traitement administratif.  Néanmoins, une structure binaire risquant d’entraîner des divergences entre les fonctions politiques et les fonctions opérationnelles, il y aurait lieu de réduire ce risque en mettant en place des mécanismes de coordination efficace entre ces fonctions.

Selon le nouveau modèle, le Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité s’emploiera à adapter les ressources humaines de l’Organisation à sa mission et aux mandats dont elle doit s’acquitter en arrêtant et en affinant une stratégie d’ensemble et des politiques novatrices fondées à la fois sur les besoins de l’Organisation et du personnel.  Ce sera le département le plus en contact avec les usagers externes et le principal intermédiaire entre le Secrétariat et les États Membres et les organes de contrôle.  Une nouvelle Division de la transformation opérationnelle et des questions de responsabilité suivra, en temps réel, les décisions prises par délégation de pouvoir dans les entités de l’ensemble du Secrétariat.  Les pouvoirs de décision du Secrétaire général seront autant que possible délégués aux responsables des entités, mais toutes les fonctions opérationnelles relatives aux ressources humaines ne pourront pas être exécutées de façon satisfaisante à un niveau décentralisé.

C’est là qu’entre en jeu le Département de l’appui opérationnel dont la Division de l’administration des ressources humaines exécutera les tâches opérationnelles qui ne peuvent être déléguées efficacement, notamment la gestion des fichiers de candidats au niveau mondial, l’organisation des examens ou le transfert du personnel entre entités.  Grâce au regroupement des fonctions opérationnelles, toutes les entités du Secrétariat auront à leur disposition un département ayant pour priorité de leur fournir directement des services et à même d’élaborer des processus de gestion des ressources humaines de bout en bout.

Afin d’assurer une coordination efficace entre les deux départements ainsi qu’une boucle de rétroaction constante entre les fonctions stratégiques et politiques, d’une part, et les fonctions d’exécution, de l’autre, un haut comité de gestion coprésidé par les secrétaires généraux adjoints des deux départements réunira régulièrement les équipes dirigeantes respectives.  Ce mécanisme de coordination sera distinct, mais complémentaire, du Comité des clients des services de gestion, qui assurera le retour d’informations et la tenue de consultation entre la structure de gestion au Siège et les différentes entités du Secrétariat.  Le Comité des clients des services de gestion sera présidé conjointement par les chefs des deux nouveaux départements et composé de représentants de chacun des différents types d’entités du Secrétariat, siégeant à tour de rôle.

Ce modèle à plusieurs niveaux présente de nombreux avantages par rapport au dispositif actuel, car il définit clairement les services du Département de l’appui opérationnel auxquels adresser les questions relatives à la gestion des ressources humaines.

« Généralités », tranche le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB), dans ses commentaires (A/73/411).  Le CCQAB demande une évaluation exhaustive de l’efficacité des mécanismes de coordination et d’harmonisation mis en place entre les fonctions stratégiques et opérationnelles.  Dans quelle mesure les besoins de toutes les entités du Secrétariat sont pris en compte et satisfaits par les politiques, procédures et processus de gestion des ressources humaines? se demande-t-il.  Il estime aussi qu’un nouveau modèle de prestation de services administratifs pourrait avoir une incidence sur le fonctionnement et les structures de la fonction de gestion des ressources humaines, ainsi que sur la délégation des pouvoirs et l’application du principe de responsabilité.

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. MOHAMED FOUAD AHMED (Égypte) a réaffirmé son appui à la réforme de la gestion de l’Organisation, afin de lui donner les moyens de mener à bien ses mandats, à l’heure où le multilatéralisme est remis en question dans un monde aux défis de plus en plus complexes.  « Le Groupe croit fermement qu’améliorer l’efficacité de la gestion des ressources humaines est un élément crucial du changement de paradigme auquel nous aspirons tous », a déclaré M. Ahmed. 

Dans ce cadre, il a salué le « rapport détaillé » du Secrétaire général, qui comporte une étude comparative visant à déterminer s’il faut regrouper les fonctions de gestion des ressources humaines en un seul département ou les répartir entre deux départements distincts.  M. Ahmed a indiqué que son Groupe souhaiterait plus de détails sur les réformes des ressources humaines précédentes.  Nous comptons, a-t-il précisé, demander des clarifications sur les enseignements tirés de l’expérience ainsi que sur le « contexte et la logique » qui ont conduit à la configuration actuelle, tant sur le terrain qu’au Siège, au cours de ces dernières années.  Nous allons, a-t-il dit, en évaluer les avantages et les désavantages.

M. Ahmed a en outre déclaré que son Groupe chercherait à mieux comprendre les défis actuels du Secrétariat, s’agissant, entre autres, du recrutement, de la cohérence des politiques entre le terrain et le Siège, de la gestion de la performance du personnel et des raisons pour lesquelles les progrès sont si lents dans la représentation géographique du personnel à tous les niveaux.  Nous croyons que c’est essentiel pour déterminer la capacité d’une structure unique ou scindée en deux de résoudre les problèmes actuels, a-t-il dit.

M. Ahmed a également annoncé son intention d’utiliser les conclusions de l’étude conduite en 2018 par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI) sur les principaux problèmes rencontrés dans la gestion des ressources humaines.  Il a souligné qu’il demanderait des précisions sur les conclusions et recommandations formulées dans cette étude.

Mme JOANNE ADAMSON, de l’Union européenne, a rappelé que, l’année dernière, l’Assemblée générale avait adopté avec succès d’importantes résolutions sur la réforme des Nations Unies, notamment celle de la gestion.  L’Assemblée avait alors appuyé la vision du Secrétaire général selon laquelle la réforme doit conduire à la transformation de l’ONU pour la rendre capable d’exécuter les programmes et les mandats, grâce à des structures d’appui plus solides et à une décentralisation plus intelligente.  La réforme doit aussi conduire à un changement complet du leadership et de la culture organisationnelle de l’Organisation.  Nous étions d’accord, a poursuivi la représentante, pour que cette réforme donne plus de responsabilités aux administrateurs et les responsabilise davantage.  Nous étions également d’accord pour qu’elle mène à l’amélioration des performances, lesquelles s’ancreraient sur une gestion des ressources humaines plus souple et plus efficace.  Toutes ces idées sont reflétées dans la résolution 72/266B qui a été adoptée par consensus le 5 juillet dernier, a rappelé la représentante.  Ces éléments, a-t-elle insisté, se renforcent mutuellement et doivent dès lors être appréhendés comme un seul train de mesures.  Elle a vu dans le rapport du Secrétaire général la confirmation que la décision de l’Assemblée d’approuver la réorganisation de deux nouveaux départements et les nouvelles sous-sections du budget-programme 2018-2019 sur la gestion et les services d’appui conduira à une approche unifiée, à une meilleure répartition des tâches et à la suppression des doubles emplois dans la gestion des ressources humaines.  L’Union européenne attend avec intérêt l’examen global de la mise en œuvre de la résolution 72/299 prévue en 2020.  Elle compte se prononcer plus avant sur la manière d’améliorer encore la gestion des ressources humaines.

Également au nom du Canada et de l’Australie, M. CRAIG JOHN HAWKE (Nouvelle-Zélande) s’est dit ravi de la résolution sur la réforme de la gestion et celle sur l’architecture de paix et de sécurité.  Nous attendons avec impatience, a-t-il dit, l’adoption de la résolution sur le repositionnement du système des Nations Unies pour le développement.  Changer la culture de l’Organisation n’est pas tâche facile, a reconnu le représentant, prévenant que la réorganisation du département des ressources humaines n’est que le début d’un processus plus large.  Il s’est dit confiant que le dernier rapport du Secrétaire général apaisera les craintes de certaines délégations.  Il a en effet appuyé la vision et les propositions du Secrétaire général, en particulier l’idée d’aller vers plus de décentralisation et de délégation de pouvoirs, avec une politique d’entreprise solide et des mécanismes de responsabilité.

Également au nom du Liechtenstein, M. FELIX WANNER (Suisse) a rappelé que les deux pays adhèrent « pleinement » à la vision du Secrétaire général.  Nous le félicitons pour son leadership dans ce « processus crucial de réforme », a-t-il dit, estimant que ce qui a été accompli en une année à peine est déjà « impressionnant ».  « Il reste toutefois encore beaucoup à faire », a estimé le représentant, avant de féliciter le Secrétaire général pour son étude comparative.  Nos délégations attendent avec intérêt les délibérations à venir, a-t-il conclu.

M. FELIPE GARCÍA LANDA (Mexique) a estimé que l’Organisation avait besoin de moderniser son système de gestion des ressources humaines, pour éviter les doublons et garantir davantage de transparence, d’efficacité et de résultats.  Le représentant a indiqué son intention d’analyser la question, en gardant à l’esprit l’impératif de mettre en place une « structure cohérente », capable de garantir une « approche unifiée » de la gestion des ressources humaines, dépourvue de doubles emplois et respectueuse du principe de responsabilité.

Mme SHWAN DUNCAN (États-Unis) a estimé que si l’Assemblée générale a soutenu la vision du Secrétaire général et approuvé la création du Département des stratégies et politiques de gestion et de la conformité et de celui de l’appui opérationnel, il reste encore beaucoup à faire.  La réforme doit aboutir à de réelles améliorations dans l’exécution des mandats et à des opérations plus efficaces.  La transformation complète de la culture organisationnelle et du leadership est « essentielle » et comme cette Organisation travaille pour les peuples du monde, la gestion des ressources humaines est un aspect « fondamental et essentiel » de sa réforme.  À son tour, la représentante a vu dans le rapport du Secrétaire général la confirmation que la décision de l’Assemblée générale d’approuver la réorganisation de deux nouveaux départements et des nouvelles sous-sections dans le budget-programme assurera une approche unifiée.  Elle s’est dite impatiente de discuter des éléments pertinents de l’évaluation du Secrétaire général.  Les prochains mois seront capitaux pour parvenir à une pleine mise en œuvre de l’agenda de la réforme dans les trois piliers du travail de l’ONU, a prévenu la représentante qui a salué l’accent placé sur cet objectif, en particulier le processus « critique » de la réforme de la gestion.  

Nous entrons dans la phase de mise en œuvre, a estimé M. NABEEL MUNIR (Pakistan).  Nous devons, s’est-il expliqué, simplifier des procédures compliquées et nous attaquer au chevauchement des pouvoirs et à la fragmentation des approches.  Le Pakistan, a-t-il affirmé, a toujours réclamé un système robuste de contrôle.  Il s’est dit particulièrement intéressé par des informations détaillées sur les mécanismes de coordination entre les deux nouveaux départements pour assurer une véritable interaction entre les fonctions opérationnelles et politiques ainsi qu’un point d’entrée permettant aux États de débattre des questions relatives aux politiques en matière de ressources humaines et à leur mise en œuvre.  Tous les enseignements tirés des réformes passées sont à prendre en compte, a-t-il martelé.  La question de la représentation géographique équitable mérite toute notre attention, y compris celle des pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police et ce, de manière proportionnelle à leur contribution au maintien de la paix.  Il faut aussi assurer une meilleure représentation des femmes des pays en développement qui, « j’en suis sûr », peuvent faire le travail, a conclu le représentant.

Mme YASUKO NISHIMURA (Japon) a réitéré son soutien au Secrétaire général pour « son initiative et son leadership » en matière de réforme de la gestion de l’Organisation, pour construire une ONU « plus forte, plus intégrée, plus cohérente et plus responsable ».  La représentante a rappelé que l’Assemblée générale avait adopté une résolution sur la réforme de la gestion lors de sa précédente session et qu’une mise en œuvre complète de cette réforme était d’ores et déjà prévue pour janvier 2019. 

Mme Nishimura a estimé que la réalisation « continue » et « sans délais » de cette réforme était essentielle pour en garantir les bénéfices, notamment en termes de « gains d’efficience et d’efficacité » dans la gestion.  Il a espéré qu’un consensus puisse rapidement être trouvé pour parvenir à un projet de résolution sur la question.

M. GAO HUIJUN (Chine) a appelé à des « efforts constants » pour mener à bien la réforme de la gestion de l’ONU.  Nous appuyons le Secrétaire général dans sa volonté d’améliorer l’efficacité et la gestion de l’Organisation, tout en renforçant dans le même temps ses mécanismes de contrôle et sa culture de responsabilité.  La réforme de la gestion a bien évolué depuis la soixante-douzième session de l’Assemblée, a-t-il noté.  Nous nous en félicitons et espérons que sa mise en œuvre graduelle aboutira aux résultats escomptés dans les meilleurs délais.

Par ailleurs, le représentant a rappelé son attachement à une approche unifiée de la gestion des ressources humaines, afin d’optimiser la répartition des fonctions et d’éviter les doubles emplois.  Dans ce cadre, il a dit attendre de « plus amples informations » de la part du Secrétariat.  Il a enfin appelé au respect du principe du consensus.  L’un des enseignements tirés du processus de réforme, a-t-il affirmé, est la nécessité pour les États Membres de s’écouter et de tenir compte des préoccupations des uns et des autres.  Chaque voix, chaque point de vue doit être pris en compte « avec sérieux et respect », a-t-il insisté, avant d’espérer que les États Membres parviendront rapidement à un consensus sur la question.

M. OMAR HILALE (Maroc), qui a apporté son soutien au nouveau modèle de gestion présenté par le Secrétaire général principalement orienté vers l’action, a salué un processus ouvert.  La structure actuelle de la gestion des ressources humaines est « caduque », a tranché le représentant voyant là un obstacle au fonctionnement « normal » de l’ONU.  Une structure binaire est la voie la mieux indiquée pour garantir une gestion unifiée des ressources et la responsabilité, a-t-il estimé.

Mme MARIA V. FROLOVA (Fédération de Russie) a dit que tout changement dans la gestion des ressources humaines doit répondre aux nombreux problèmes actuels.  Elle s’est attardée sur ce que pense le CCQAB des propositions du Secrétaire général et s’est prononcée en faveur de la structure unique, de préférence dans le nouveau Département de l’appui opérationnel. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Première Commission: l’Iran appelle au respect des accords multilatéraux

Soixante-treizième session,
7e séance – après-midi
AG/DSI/3602

Première Commission: l’Iran appelle au respect des accords multilatéraux

Avec l’intervention de la République islamique d’Iran, le désarmement nucléaire multilatéral a évidemment occupé une place de choix au cours de cette sixième journée de débat général de la Première Commission (désarmement et sécurité internationale).  Mais d’autres sujets, comme l’espace extra-atmosphérique, les armes classiques et les engins explosifs ou encore le rôle des femmes, ont également pris une part non négligeable dans le débat.

Sur la question nucléaire, le début de l’intervention du délégué iranien a donné le ton: « Nous assistons en fait à une diabolisation des institutions multilatérales et au non-respect des règles et normes mondiales », s’est-il alarmé.  Jugeant illégal le retrait des États-Unis du Plan d’action global commun qui, a-t-il rappelé, avait été le fruit d’intenses efforts, il a rappelé que 12 rapports de l’AIEA avaient pourtant confirmé la conformité de la République islamique d’Iran.  Accusant les États-Unis d’avoir violé les termes de la résolution en se retirant, il les a vertement critiqués pour avoir menacé, selon lui, d’autres pays de sanctions s’ils ne se retiraient pas eux aussi.

La Belgique ne s’est guère montrée plus optimiste lorsqu’elle a souligné que le désarmement est en piteux état.  C’est en ce sens qu’elle a plaidé pour une préservation du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire qui a été un pilier de la défense européenne, exhortant par ailleurs la Fédération de Russie à répondre aux préoccupations soulevées par la mise au point d’un nouveau système de missiles.  Et c’est toujours à ce titre qu’elle a demandé, « au minimum », à ce que la démarche de prolongement jusqu’en 2021 du nouveau Traité START soit entamée.

Pour le Liechtenstein, ces divergences d’opinion ont un effet destructeur sur les traités communs: ainsi une nouvelle course à l’armement a lieu au mépris des normes juridiques et en raison du manque de volonté de relever les défis liés aux nouvelles technologies, a-t-il déploré.  L’inaction a rarement été aussi couteuse qu’aujourd’hui, s’est alarmée cette délégation.

Du côté iranien, le constat global est amer: « Le désarmement nucléaire semble aussi infaisable aujourd’hui que dans les années 1970.  Aucun état doté ne fait les efforts qu’il devrait. »  Compte tenu que le problème central du désarmement nucléaire est son unilatéralisme, il en a conclu qu’il n’y aura pas de désarmement tant que les politiques américaines en la matière resteront les mêmes.

À ce titre, il a jugé « alarmante » l’annonce par les États-Unis de la création d’une force militaire pour l’espace extra-atmosphérique.  « Ils veulent dominer l’espace, en faire leur chasse gardée », a-t-il assuré.  Y voyant le signe avant-coureur d’une course à l’armement dans l’espace, il a d’ailleurs appelé à la création d’un instrument juridiquement contraignant dans le cadre de la Conférence du désarmement.

Usant de leur droit de réponse, les États-Unis ont expliqué avoir souscrit au Plan d’action global commun en misant sur une amélioration du comportement de l’Iran, et ont déploré que « cela ne se soit pas produit ».  « La communauté internationale a toujours voulu un cadre réglementaire plus contraignant mais l’Iran a toujours échappé à ces mesures de contrôle », a regretté la délégation.

Pour Trinité-et-Tobago, l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires de 2017, par une majorité d’États, a pourtant changé la perception que le désarmement est un des objectifs négligés des Nations Unies.

Pour autant, son intervention a surtout mis l’accent sur des armes infiniment moins spectaculaires, mais qui font finalement plus de dégâts comptables: les armes légères et de petit calibre.  Environ 70% des meurtres commis dans les États de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) le sont par le fait d’armes à feu, a-t-elle déploré.  « Le contrôle, la prévention et l’éradication de ce commerce illicite sont une des toutes premières priorités de mon pays », a-t-elle déclaré.

À ses yeux, le Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects (POA) est un instrument important pour renforcer la coopération internationale et faire ployer le commerce illicite de ces armes.  En partant du principe qu’il soit appliqué de bonne foi, a-t-elle insisté, le Traité sur le commerce des armes pourrait quant à lui réduire la souffrance humaine, améliorer la sécurité régionale et la stabilité.

Du côté de la Slovénie, ce sont les engins explosifs qui mobilisent plus particulièrement.  Du fait de la multiplication des armes à sous-munitions, des mines antipersonnel et autres restes de guerre qui infestent, entre autres, le sol d’Europe du Sud-Est, elle a rappelé combien l’assistance aux victimes était centrale.  « Avec d’autres bailleurs de fonds, nous avons tenté d’appuyer les enfants et les adultes touchés par des conflits », a-t-elle assuré.

À ce sujet, le représentant de l’Afghanistan a rappelé que son pays comptait aussi un grand nombre de mines qui sont devenues les armes de premier choix pour les groupes armés non étatiques, provoquant la mort et l’amputation de milliers de civils.  Pour la seule année dernière, a déploré la délégation, elles ont tué ou blessé plus de 2 000 Afghans.

La Belgique s’est, elle aussi, inquiétée de la recrudescence de l’utilisation des engins explosifs improvisés pour la même raison qu’ils frappent d’abord les populations de manière indiscriminée lors des conflits et des attaques terroristes.  C’est pourquoi elle a souhaité la poursuite des travaux sur cette question dans le cadre de la Convention concernant certaines armes classiques.

Enfin, de nombreux États Membres ont fait état de la nécessaire intégration des femmes aux processus de paix et de sécurité.  La dimension sexospécifique est indéniable dans la paix et la sécurité, a noté la représentante de Trinité-et-Tobago.  « Les femmes jouent un rôle majeur pour contrer la violence et l’insécurité dans les communautés.  Elles doivent jouer le même rôle dans le désarmement. »

La Première Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 16 octobre à partir de 15 heures.

DÉBAT GÉNÉRAL SUR TOUS LES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR TOUCHANT LE DÉSARMEMENT ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE

Déclarations (suite)

M. BACHIR AZZAM (Liban) s’est inquiété de l’impasse sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  Malgré de nombreuses décisions prises dans ce sens lors de la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) notamment en 1995 et 2010, Israël cherche à préserver son programme et son arsenal nucléaires sans le moindre contrôle international et multiplie les obstacles à la création d’une telle zone, a-t-il dénoncé.  Or, celle-ci est nécessaire en termes de sécurité et de stabilité dans une région instable et menacée par les conflits et le terrorisme, a-t-il souligné.

Le représentant a demandé que la communauté internationale fasse pression sur Israël afin qu’il se conforme aux règles internationales de non-prolifération et concentre ses efforts pour arriver à créer cette zone exempte d’armes nucléaires.

Il s’est également inquiété de la prolifération des armes de petit calibre et a fait savoir que le Liban vient de signer, il y a quelques jours, le Traité sur le commerce des armes, pas important dans la lutte contre ces armes.  Par ailleurs, il a insisté sur l’engagement du Liban en faveur de la Convention sur les armes à sous-munitions et souhaité qu’elle devienne universelle, rappelant que son pays a été confronté à ces armes depuis 2006 lors du conflit avec Israël.

M. ROLLIANSYAH SOEMIRAT (Indonésie) s’est inquiété du fait que certains pays donnent l’impression de revenir à la guerre froide malgré le renforcement du multilatéralisme et des liens commerciaux.  Cette situation doit nous rappeler que les armes nucléaires méritent la plus haute priorité, a-t-il estimé.  Constatant que les approches étape par étape n’ont pas fonctionné, il a appelé les États dotés à respecter leurs obligations en matière de désarmement.  Le délégué a aussi réclamé la mise en œuvre du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, ainsi que la ratification du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), espérant par ailleurs que la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2020 donne des résultats.

Le délégué a ensuite insisté pour que la région du Sud-Est de l’Asie demeure sans armes nucléaires et s’est dit en faveur de l’établissement d’une telle zone au Moyen-Orient.  À ses yeux, le Plan d’action global commun et les avancées en République populaire démocratique de Corée sont des signaux favorables.  Il a, par ailleurs, vertement critiqué l’utilisation d’armes chimiques et a appelé l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) à poursuivre ses efforts.  Il a également demandé de renforcer les normes pour protéger les civils contre les armes explosives.

Mme NATASCIA BARTOLINI (Saint-Marin) a indiqué que son pays avait déposé son instrument de ratification du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires en espérant qu’il constituera une étape cruciale sur la voie d’un monde sans armes nucléaire.  S’alarmant du fait que 15 000 armes nucléaires sont stockées dans le monde entier, elle a appelé à pleinement mettre en œuvre le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), notamment son article 6, et de s’engager pour garantir la réussite de sa Conférence d’examen en 2020.

La représentante a ensuite réclamé la fin de l’impunité pour l’utilisation d’armes chimiques.  Elle s’est inquiétée des graves conséquences de l’utilisation des armes légères sur les populations et les infrastructures, ainsi que de la prolifération des armes légères et de petit calibre (ALPC) qui « encouragent terrorisme et violence, violations des droits de l’homme, recrutement d’enfants soldats et viols ».  Les groupes vulnérables, femmes et enfants sont souvent les plus touchés par ces violences à caractère sexuel, a-t-elle insisté.  Le manque de contrôle sur les armes légères et de petit calibre (ALPC) est une menace à la sécurité, la paix et la stabilité durables.  La mise en œuvre du Traité en la matière est essentielle, d’autant plus que l’augmentation continue de ces armes entravera la réalisation du Programme du développement durable.

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a salué le Plan d’action global commun, estimant, par ailleurs, que la meilleure garantie pour la paix, c’est l’élimination des armes nucléaires.  À cet égard, il a rappelé que son pays a toujours été pour une approche de la dénucléarisation « par bloc » pour atteindre à l’objectif escompté.  Le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) est, selon lui, l’un de ces blocs et ne sera pas affaibli par l’addition d’autres blocs.  Il a salué le travail du Groupe d’experts de haut niveau sur un prochain traité sur l’interdiction de la production de matières fissiles, y voyant une bonne base pour les discussions qui auront lieu à ce sujet à la Conférence du désarmement.

Concernant la République arabe syrienne, le délégué a demandé à ce que tous les responsables d’attaques chimiques soient poursuivis et à préserver la crédibilité de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  L’usage de telles armes, ou même de cyberarmes, par des organisations terroristes est terriblement préoccupant, a-t-il ajouté.

Le représentant a, par ailleurs, appelé à tenir compte des préoccupations des pays en développement.  Au-delà du programme de désarmement tel que présenté par le Secrétaire général, le délégué a expliqué avoir été intéressé par l’idée d’un cyberespace ouvert à tous.  Évoquant le lancement de son premier satellite, le Bangladesh a souhaité qu’aucune arme ne soit placé dans l’espace et a réclamé la création d’un instrument juridiquement contraignant à cet effet.

Mme MARIA THEOFILI (Grèce) a déclaré que l’environnement sécuritaire mondial et les défis du XXIe siècle ne doivent pas faire perdre de vue la nécessité de respecter le cadre international et l’architecture du désarmement consenti sur le plan international.  Cependant, cela doit se faire par des approches « prudentes et réalistes », et notamment par un dialogue entre États détenteurs et non détenteurs, afin de parvenir à des progrès significatifs dans la réduction des armes nucléaires.  L’objectif final est le désarmement nucléaire complet, a souligné le représentant.

L’approche globale envisagée par la Grèce inclue la pleine mise en œuvre du Plan d’action global commun, afin de s’assurer que l’Iran respecte ses engagements liés à son programme nucléaire et de préserver les intérêts de sécurité de l’Union européenne.  Elle implique aussi que d’autres progrès soient faits dans le contexte du Sommet États-Unis-République populaire démocratique de Corée (RPDC), notamment en matière de vérifications et de garanties de non-prolifération, a encore expliqué le représentant.

M. KARL DHAENE (Belgique) a dénoncé les agissements de certains pays visant à miner l’ordre établi, citant le recours aux armes chimiques, la déstabilisation à travers les cyberattaques, ou encore la violation des traités internationaux.  La Belgique s’engage à préserver cet ordre et pour cette raison s’est engagée comme cocoordonnateur du processus de l’article 14 du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et poursuivra ses efforts afin de faciliter sa mise en œuvre.  Le représentant a appelé les autre États à ratifier et signer le TICE « qui ne saurait être subordonné à l’action d’autres États », a-t-il insisté.  Pour lui, la pertinence de ce Traité a été clairement démontrée lors des essais réalisés par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et malgré les efforts et progrès enregistrés, ceux-ci ne deviendront un engagement ferme que si la RPDC souscrit au TICE. 

Car le désarmement est en piteux état, a-t-il estimé.  Les avancées réelles font cruellement défaut.  Le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire a été un pilier de la défense européenne, a-t-il rappelé.  Sa préservation est cruciale et les deux parties principales à ce Traité doivent absolument poursuivre leurs efforts pour résoudre les différends qui demeurent, a-t-il plaidé.  Il a appelé la Russie à répondre également aux préoccupations soulevées par la mise au point d’un nouveau système de missiles.  S’agissant du Traité New START, « au minimum » la démarche devrait être entamée afin de la prolonger au-delà de 2021, a estimé le représentant, qui a appelé les États-Unis et la Russie à relever le niveau de leurs ambitions en la matière.

Enfin, la Belgique s’est dit préoccupée par la recrudescence de l’utilisation des engins explosifs improvisés qui frappent les populations de manière indiscriminée lors des conflits et des attaques terroristes.  Elle a souhaité la poursuite des travaux sur cette question dans le cadre de la Convention sur certaines armes classiques.

M. PATRICK SAINT-HILAIRE (Haïti) a souligné l’attachement d’Haïti au Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et appuyé la relance des négociations entre les États-Unis et la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  « Mon pays espère fortement que rien ne viendra remettre en question les efforts déployés en vue de la dénucléarisation complète et vérifiable de la péninsule coréenne. »  Le délégué a appelé au renforcement du travail, « ô combien délicat », effectué par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), et souhaité l’universalisation de la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines et sur leur destruction.  Enfin, M. Saint-Hilaire a souligné l’urgence de l’universalisation du Traité sur le commerce des armes et appelé la meilleure attention des États sur les dangers posés par les mines antipersonnel et autres engins explosifs. 

Mme CHARLENE ROOPNARINE (Trinité-et-Tobago) a souligné qu’environ 70% des meurtres commis dans les États de la CARICOM le sont par le fait d’armes à feu.  Trinité-et-Tobago est particulièrement affectée par ce type de violence qui continue à être un fléau de notre société, a-t-elle déclaré.  « Le contrôle, la prévention et l’éradication de ce commerce illicite sont une des toutes premières priorités de mon pays », a-t-elle déclaré.  Nous considérons le Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects (POA) comme étant un instrument important pour renforcer la coopération internationale et faire ployer le commerce illicite de ces armes.  Elle a accueilli avec bienveillance le document de la troisième Conférence d’examen du POA qui représente une étape importante, selon elle, dans le combat contre le commerce illicite des armes légères et de petit calibre.  Elle a réaffirmé que le Traité sur le commerce des armes (TCA), s’il est appliqué de bonne foi, pourrait réduire la souffrance humaine, améliorer la sécurité régionale et la stabilité, ainsi que la promotion de la reddition de comptes et de la transparence.

Pour Trinité-et-Tobago, un monde sans armes nucléaire est le seul qui serait vraiment sans danger.  L’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, en 2017, par une majorité d’États, a changé la perception que le désarmement est un des objectifs négligés des Nations Unies.  L’impact de l’utilisation des armes nucléaires n’est pas confiné au passé, a-t-elle déclaré.  Cela reste une menace dans la poursuite du développement durable, et des objectifs relatifs à la santé, à l’égalité des sexes, à l’environnement terrestre et maritime.  La CARICOM a fait partie d’un groupe d’États qui ont milité pour une « obligation positive » au Traité.  La représentante a également souligné que la dimension sexospécifique est indéniable dans la paix et la sécurité.  « Les femmes jouent un rôle majeur pour contrer la violence et l’insécurité dans les communautés.  Elles doivent jouer le même rôle dans le désarmement », a-t-elle déclaré.

Mme AMIERA AL HEFAITI (Émirats arabes unis) a constaté que l’on recherchait dans cette enceinte un consensus pour la paix et la sécurité alors que dans le même temps des dissensions se font jour sur la planète.  Rappelant que les populations sont toujours les premières victimes de l’utilisation des armes chimiques et du commerce illicite des armes, la déléguée s’est félicitée de l’initiative du Secrétaire général à propos du désarmement et s’est dite convaincue de l’importance des forums pertinents, comme celui-ci, pour avancer sur la cause du désarmement.

Espérant que la prochaine Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires permettra de se mettre d’accord sur un plan d’action, elle a insisté sur la création de zones exemptes d’armes nucléaires partout dans le monde et particulièrement au Moyen-Orient.  À cet égard, elle a demandé à Israël de se joindre au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  Les Émirats arabes unis ont toujours été à l’avant-garde des appels à la dénucléarisation, a-t-elle rappelé, et il faut que toutes les nations accèdent aux différentes conventions internationales et les mettent en œuvre.

Même si elle a espéré que la mise en œuvre du Plan d’action global commun aura des impacts sur la conduite de l’Iran, elle s’est dite inquiète face au désir de L’Iran de créer un arsenal nucléaire.  La représentante a rappelé l’importance du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN) qui, selon elle, peut jouer un rôle majeur dans la promotion du désarmement nucléaire.  Elle a terminé en soulignant l’importance de l’engagement des femmes dans le désarmement à tous les niveaux de prise de décisions.  « Nous devons toucher tous les secteurs de la société si nous voulons faire preuve d’innovation », a-t-elle conclu.

M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a dénoncé la diabolisation des institutions multilatérales et le non-respect des règles et normes mondiales.  Selon lui, le retrait des États-Unis du Plan d’action global commun, qui a été le fruit d’intenses efforts pour réduire une crise fabriquée, est « illégal ».  Dans 12 rapports, a-t-il rappelé, l’AIEA a pourtant confirmé la conformité de l’Iran.  Accusant les États-Unis d’avoir violé les termes de la résolution en se retirant, il les a vertement critiqués pour avoir menacé, selon lui, d’autres pays de sanctions s’ils ne se retiraient pas eux aussi.

Pour le délégué, il faut défendre le multilatéralisme et protéger sa crédibilité.  « C’est une partie de notre mandat, a-t-il insisté.  Comment faire avancer le multilatéralisme dans le cadre de la non-prolifération ? »  Il a estimé que le Secrétaire général a eu raison de dire que la réalité de l’environnement sécuritaire exige que la non-prolifération et le désarmement figurent au cœur des travaux des États Membres.  À cet égard, étant donné que l’existence des armes nucléaires continue de faire peser une menace existentielle sur l’humanité, le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires constitue une avancée historique qui complète en outre le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  « Mais le désarmement nucléaire semble aussi irréalisable aujourd’hui que dans les années 1970, a-t-il déploré.  Aucun État doté ne fait les efforts qu’il devrait. »  Constatant que le problème central du désarmement nucléaire est son unilatéralisme, il en a conclu qu’il n’y aura pas de désarmement nucléaire tant que les politiques américaines en la matière resteront les mêmes.

Le manque de progrès concernant la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient est une autre source de préoccupation pour l’Iran, a poursuivi le représentant.  Les arsenaux israéliens empêcheront toujours la paix et la stabilité dans la région.  Et le passif peu glorieux de ce pays est une menace à la paix et la sécurité internationales, a-t-il ajouté.  Accusant Israël d’avoir spécifiquement menacé l’Iran d’annihilation nucléaire, M. Al Habib a considéré que les Nations Unies auraient dû réagir.

Sur la question des armes chimiques, il a souhaité que les normes internationales soient respectées partout et que l’on évite de polariser l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Quant aux armes biologiques, il a demandé la reprise des négociations sur un protocole juridiquement contraignant et a exhorté les États-Unis à retirer leurs objections.

Enfin, il a jugé « alarmante » l’annonce, par les États-Unis, de la création d’une force militaire pour l’espace extra-atmosphérique.  « Ils veulent dominer l’espace, en faire leur chasse gardée », a-t-il assuré.  Y voyant le signe avant-coureur d’une course à l’armement dans l’espace, la République islamique d’Iran a appelé à la création d’un instrument juridiquement contraignant dans le cadre de la Conférence du désarmement.

M. MAHMADAMIN MAHMADAMINOV (Tadjikistan) a estimé que la prolifération des armes nucléaires demeure une grave préoccupation et salué le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) comme la pierre angulaire du désarmement international.  Il a appelé à la mise en œuvre urgente de toutes les dispositions du Traité et à l’entrée en vigueur au plus vite du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE).

L’entrée en vigueur du Traité portant création d’une zone exempte d’armes nucléaires en Asie centrale est une étape importante qui a permis d’apporter une contribution significative au renforcement de la sécurité régionale et mondiale, a poursuivi le représentant, qui a appelé à accélérer la ratification du Protocole attaché à ce Traité.  Enfin, le représentant a insisté sur l’importance de la Convention d’Ottawa sur les mines antipersonnel et a plaidé pour que l’Asie centrale devienne une région débarrassée de ces engins, grâce au renforcement de la coopération en matière de déminage.

M. ABDOULAYE BARRO (Sénégal) a estimé que les tensions géopolitiques et le risque croissant d’utilisation des armes nucléaires risquent de compliquer le processus de dénucléarisation.  Les négociations n’avancent guère, même si le 7 juillet 2017, les États ont adopté un traité rendant illégal ces types d’armes; a-t-il déclaré.  Il a réaffirmé que le multilatéralisme est plus que jamais l’approche la plus appropriée pour arriver à des résultats concrets.  Il a lancé un appel aux États doté de l’arme nucléaire pour qu’ils agissent et œuvre en vue de l’élimination totale de leurs ogives nucléaires.

En ce qui concerne la prolifération des armes légères et de petit calibre, la troisième Conférence d’examen du Programme d’action des Nations Unies en vue de prévenir, combattre et éradiquer le commerce illicite des armes légères, a été l’occasion de faire le bilan des efforts accomplis et d’identifier les mesures innovantes.  En vue de rendre efficiente la lutte contre le commerce illicite et la prolifération incontrôlée des armes de petit calibre, il s’est réjoui de l’entrée en vigueur, en 2014, du Traité sur le commerce des armes (TCA).  « Nous continuerons d’encourager la coopération régionale; afin de bénéficier du partage des bonnes pratiques ».  Il a appelé les pays qui ne l’ont pas fait à signer ou ratifier le Traité sur le commerce des armes (TCA).

Par ailleurs, le représentant a noté que lors de leur dernière rencontre en juin 2018, le Groupe préparatoire d’experts de haut niveau composé de 25 membres, dont le Sénégal, a réussi à négocier un rapport consensuel recommandant les éléments d’un futur traité interdisant la production de matières fissiles pour la production d’armes et autres dispositifs nucléaires.  En outre, il a appelé à la signature et à la ratification d’une convention sur l’interdiction de la mise au point, la fabrication, du stockage et de l’emploi des armes chimiques et sur leur destruction, ainsi qu’à l’universalisation de la Convention sur les armes à sous-munitions.

M. SAYED MUSADDEQ (Afghanistan) a exhorté les États qui ne l’ont pas fait à ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE).  Il a appuyé le dialogue entre les États-Unis et la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et a plaidé pour l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  Il a rappelé que son pays compte un grand nombre de mines qui ont tué ou blessé plus de 2 000 Afghans l’année dernière.  Il a noté les conséquences catastrophiques des engins explosifs improvisés pour son pays et appelé les délégations à soutenir les efforts visant à remédier à ce fléau.  Ces armes sont devenues les armes de premier choix pour les groupes armés non étatiques et sont responsables de la mort et de l’amputation de milliers de civils, a déploré M. Musaddeq.

M. PETER MATT (Liechtenstein) a estimé que les divergences d’opinion avaient un effet destructeur sur les traités communs: ainsi une nouvelle course à l’armement a lieu au mépris des normes juridiques et du manque de volonté de relever les défis liés aux nouvelles technologies, a-t-il déploré.  L’inaction a rarement été aussi coûteuse qu’aujourd’hui.  Aussi, son pays appuiera les efforts pour mettre en œuvre le programme proposé par le Secrétaire général en matière de désarmement.  Les accords de désarmement et de non-prolifération ont déjà montré leur potentiel pour faire baisser les tensions, a-t-il estimé.  Ce principe est parfois mis à mal dans les relations internationales, avec de graves conséquences quand il s’agit des armes chimiques, s’est-il inquiété.  Notre réaction doit être de renforcer les accords passés et d’accroître la responsabilité des États en cas de violation, a-t-il plaidé.  Hélas, « le Conseil de sécurité n’est souvent pas à la hauteur » a-t-il regretté.

Le représentant s’est félicité de la détente dans la péninsule coréenne, et a espéré que les engagements se traduiraient rapidement par des accords politiques.  À cet égard, l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) constituerait une étape bienvenue, a affirmé le représentant qui a regretté que les accords importants découlant du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) demeurent souvent ignorés, « y compris au sein de cette Commission ».

Il a rappelé que son pays avait signé le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires qui, a-t-il estimé, doit pouvoir renforcer le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) selon lui. 

Le représentant a estimé que les règles régissant l’emploi des armes devaient s’appliquer au cyberespace.  Il s’agit là d’un élément indispensable pour les débats à venir pour identifier les lacunes existantes a-t-il insisté, ajoutant que « La résistance d’une poignée d’État ne doit pas empêcher la majorité d’avancer » sur ce sujet, ni sur les systèmes d’armes automatiques.

M. MARCELO ZAMBRANA TORRELIO (Bolivie) a rappelé que son pays fait partie de la première zone exempte d’armes nucléaires, créée en vertu du Traité de Tlatelolco, et de la première région déclarée zone de paix.  À cet égard, il s’est félicité de l’adoption du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et a lancé un appel à tous les États pour mettre en œuvre ces dispositions.  « C’est la seule solution pour éviter l’utilisation catastrophique de ce type d’armes, a-t-il estimé.  Et nous appelons les États dotés à supprimer le rôle de ces armes dans leur doctrine ».  Selon lui, elles mettent clairement en danger l’humanité puisque, en cas d’erreur de calcul, ou de problème informatique, elles pourraient produire un accident nucléaire aux conséquences imprévisibles.

Rappelant que la Charte des Nations Unies oblige à avancer avec des mécanismes pacifiques, il a plaidé pour le dialogue comme seul moyen d’arriver à une société plus juste.  Selon lui, le Plan d’action global commun est un excellent exemple de la façon dont on peut avancer vers la paix par la construction de la confiance.  Il s’est, à cet égard, dit attristé qu’une des parties se soit retirée de l’accord.  En conclusion, le délégué a déploré les investissements exorbitants consentis par l’industrie militaire.  Selon lui, ces milliards de dollars devraient être utilisés pour lutter contre la pauvreté et pour l’éducation.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a rappelé que son pays est pleinement investi dans la lutte contre le terrorisme nucléaire.  Il a ensuite réclamé la création d’un registre des armes classiques et la mise en œuvre complète du Traité sur le commerce des armes, indispensable selon lui pour garantir la sécurité. 

Il considère que le Programme d’action relatif aux armes légères et de petit calibre est essentiel pour parvenir à un monde plus sûr, soulignant que le trafic de ces armes représente une forte source d’insécurité et entrave le développement économique des droits humains.  Le représentant s’est exprimé avec force contre toutes les formes et manifestations du terrorisme et a indiqué que le Gouvernement arménien avait mis en place différentes mesures pour mettre en œuvre la résolution 2396 du Conseil de sécurité, notamment en établissant un système de contrôle des voyageurs.  Il a jugé important d’identifier les idéologies fondamentalistes et extrémistes provenant de « certains pays », qui encouragent la haine et la discrimination envers les pays voisins et ceux qui ont une opinion différente.  L’Arménie a toujours plaidé pour la coopération régionale et le renforcement de la confiance et souscrit pleinement au principe de l’indivisibilité de la sécurité internationale.

Mme DARJA BAVDAŽ KURET (Slovénie) s’est dite scandalisée de l’utilisation des armes chimiques « un peu partout ».  Selon elle, l’utilisation de ces armes par un État ou un acteur non étatique représente une violation du droit international et doit être condamnée dans les termes les plus forts.

Sur les armes nucléaires, elle a appelé à la pleine mise en œuvre du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  Elle a souligné que la Slovénie appuierait les résolutions qui se concentreront sur des résultats concrets et tangibles comme le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), un traité d’interdiction des matières fissiles et la création de zones exemptes d’armes nucléaires.

Se félicitant du travail de l’AIEA vis à vis de l’Iran, elle a expliqué que la Slovénie appuierait le Plan d’action global commun tant que son pays respectera ses engagements.  Elle appuiera aussi tous les efforts diplomatiques pour parvenir à la dénucléarisation de la péninsule coréenne, a-t-elle ajouté.  Mais d’ici à la concrétisation vérifiable de cet objectif, la déléguée a estimé que les sanctions devaient se poursuivre.

La représentante s’est ensuite longuement attardée sur le sort des victimes des armes légères et de petit calibre.  Se disant concernée par la multiplication des armes à sous-munitions, des mines antipersonnel et autres restes de guerre qui infestent, entre autres, le sol d’Europe du Sud-Est, elle a rappelé combien l’assistance aux victimes était centrale.  « Avec d’autres bailleurs de fonds, nous avons tenté d’appuyer les personnes touchées par des conflits, qu’elles soient des enfants ou des adultes », a-t-elle assuré.  Concernant son propre stock d’armes de ce type, la Slovénie a confirmé sa destruction complète et irréversible, après avoir eu quelques problèmes, en 2011, avec un pays partenaire qui ne s’était pas correctement acquitté de cette tâche.  Sur les armes létales autonomes, elle a insisté sur la nécessité de disposer d’un débrayage humain pour en reprendre le contrôle.

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a appuyé la « noble opinion » exprimée par la Cour internationale de Justice dans son avis consultatif de 1996, selon laquelle l’utilisation et la menace d’utilisation des armes nucléaires sont contraires au droit international.  Pointant la menace existentielle que les armes de destruction massive font peser, le délégué a tout d’abord demandé que les femmes soient présentes dans tous les processus de prise de décisions dans les affaires de désarmement, avant d’appuyer la création d’une zone exempte d’armes de destruction massive au Moyen-Orient.  Il a indiqué que son pays, qui compte parmi les pays producteurs d’uranium les plus importants au monde, participe aux activités de l’AIEA en vue de la promotion d’un emploi pacifique de l’énergie nucléaire, lequel demeure un droit inaliénable des pays en développement. Enfin, M. Gertze a exhorté les pays dotés de l’arme nucléaire à œuvrer à un désarmement nucléaire total.

Droits de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a réagi aux propos formulés vendredi par certaines délégations s’agissant de la sécurité dans le Caucase.  Il a notamment regretté que la Géorgie ait omis de retracer le contexte historique, affirmant par ailleurs que ce pays avait entamé une aventure dangereuse contre l’Ossétie du Sud en 2008, entraînant une tragédie pour les deux pays ainsi que pour les Casques bleus de l’ONU dont plusieurs ont été tués.  En revanche, l’intervention de la Russie, « à la demande des deux États menacés », a permis de rétablir l’ordre et d’éviter davantage d’atteintes à la sécurité.  Cela fait 10 ans déjà que les militaires russes sous contrôle international sont engagés dans la région, qui connaît le calme et permet la coexistence pacifique des habitants d’Ossétie, de Géorgie et d’Abkhazie, s’est-il félicité.  Il a espéré un processus politique qui puisse régler les différends dans la région.

S’agissant de la Transnistrie, il a assuré que les militaires russes déployés ne menaçaient en aucun cas les pays de la région.  La résolution présentée par la république de Moldova concernant le retrait de ces forces armées est un document provocateur, dont l’objectif est d’obtenir l’approbation de la communauté internationale pour mener des actions contre son propre peuple, a-t-il accusé, avertissant que la mise en œuvre de ces plans ouvrirait une nouvelle page meurtrière au Moldova.  Il a souligné que la présence russe dans le Caucase joue un rôle positif dans le maintien de la paix et de la stabilité régionales.

Toute déclaration affirmant par ailleurs que la Russie accroît sa présence militaire en mer Noire pour mener des actions contre l’Europe et l’Afrique du Nord est sans fondement, a-t-il ajouté.  Quant aux accusations selon lesquelles la Russie aurait utilisé des armes chimiques en Angleterre, toute expertise remettrait en cause ce qui a été avancé.  La Russie a été désignée coupable avant même que l’enquête britannique ne débute dans le but, d’ailleurs, de justifier ces accusations, a-t-il martelé.

S’agissant du conflit en Syrie, la Géorgie a rejeté les accusations de terrorisme à son égard.  Elle a souligné que son centre de santé est une institution ouverte qui respecte les obligations au titre de la Convention sur les armes biologiques.  Il a pour objectif de protéger le pays et la région des maladies infectieuses, a assuré la délégation, et les États parties à la Convention sur les armes biologiques ont été invités à procéder à un examen par les pairs, en novembre prochain, afin de renforcer la confiance entre les États parties.  Elle a regretté que les représentants russes aient refusé de participer à cette visite.  La délégation a ensuite appelé la Russie à retirer ses forces de Géorgie.

Les États-Unis ont expliqué avoir souscrit au Plan d’action global commun en misant sur une amélioration du comportement de l’Iran, et ont déploré que cela ne se soit pas produit.  Israël a obtenu des archives iraniennes montrant que le programme nucléaire iranien n’a pas été entièrement démantelé et que les recherches se poursuivent.  C’est la raison pour laquelle le Président Trump s’est retiré et les États-Unis maintiendront leurs sanctions tant que l’Iran ne changera pas de posture.

Israël a ensuite dénoncé les accusations « absurdes » de l’Iran, le « plus grand parrain du terrorisme » dans le monde.  Par le biais de ses intermédiaires dont le Hezbollah et autres milices chiites, il commet des atrocités contre le peuple syrien, menace ses voisins et déstabilise le Moyen-Orient.  On le retrouve bien au-delà du Moyen-Orient, en Afrique du Nord, en Europe et en Asie, a accusé la délégation.

L’Iran a alors affirmé que les États-Unis n’ont aucune leçon à donner en ce qui concerne la violation d’engagements internationaux.  Il a rappelé que se retirer du Plan d’action global commun est une violation de la résolution 2231 du Conseil de sécurité.  C’est une tendance observée de la part des États-Unis qui semblent mélanger toutes les questions: cacher la réalité et raconter des mensonges sur les raisons pour lesquelles ils se défilent devant le droit international.

Il a affirmé que le Plan d’action global commun a été conclu quand les États-Unis cherchaient à nier le droit de l’Iran à mener des activités pacifiques, rappelant dans la foulée qu’il avait été approuvé par le Conseil de sécurité.  Les États-Unis, a accusé la délégation iranienne, cherchent à saper la crédibilité de l’AIEA et à l’affaiblir pour remettre en cause les institutions multilatérales.  La réalité est que l’Iran met en œuvre le protocole additionnel et coopère pleinement avec l’Agence.  Les inspecteurs de l’AIEA passent 300 jours par an sur le terrain en Iran, deux fois plus qu’en 2013.  Ils ont prélevé des échantillons, les ont placés dans plus de 2 000 paquets scellés.  Les États-Unis se fourvoient et, pendant ce temps, ils envoient des milliards de dollars d’armes à l’Arabie saoudite qui les utilise contre les civils au Yémen et déstabilisent la région.

La délégation iranienne a par ailleurs déploré qu’Israël ne respecte aucune des 85 résolutions du Conseil de sécurité qui le concerne.

Le représentant de la République arabe syrienne a accusé la Géorgie de couvrir un grand nombre de terroristes.  Il a également affirmé que des armes biologiques sont cachées en Géorgie et que la Géorgie est le premier État à avoir exporté des armes biologiques en Syrie.

Il est par ailleurs bien amusant de voir Israël accuser d’autres États de violer les normes internationales, a-t-il déclaré.  Différents rapports montrent que cet État a fait usage d’armes chimiques, dont l’uranium et différents types de phosphores depuis 1948 et Israël a créé des groupes terroristes dans mon pays, a-t-il accusé.

Reprenant la parole, la Fédération de Russie, a fait observer que la Géorgie a déjà connu trois épisodes sanglants, depuis son indépendance, il y a 25 ans.  En 1992, puis en 1996, et enfin l’agression de l’Ossétie du Sud qui a mené au quasi-génocide de ce petit État qui a demandé assistance à la Russie.  Nous avons accepté sur la base d’accords bilatéraux, et nos activités sont menées sans contrôle international, par un mécanisme conjoint de contrôle qui comprend l’UE, les Nations Unies et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).  C’est pourquoi parler d’annexion du territoire géorgien est infondé, a—t-il conclu.

Les États-Unis ont dénoncé les commentaires « ridicules » de l’Iran et ont rappelé la prise d’otages de l’ambassade américaine à Téhéran en 1979.  L’Iran finance son addiction au terrorisme en Amérique du Nord, Amérique du Sud, en Europe, en Afrique, en Asie et dans le monde entier et utilise énormément de subterfuges pour financer le terrorisme, usant notamment d’entreprises écrans.  La communauté internationale a toujours voulu un cadre réglementaire plus contraignant mais l’Iran a toujours échappé à ces mesures de contrôle, a regretté la délégation.

Les droits de réponse ont ensuite continué sans interprètes: Israël; Iran; et République arabe syrienne.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission dialogue avec la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et discute de la prévention de la torture

Soixante-treizième session,
17e & 18e séances – matin & après-midi
AG/SHC/4235

La Troisième Commission dialogue avec la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et discute de la prévention de la torture

Devant la Troisième Commission qui entamait l’examen de toutes les questions relatives à la promotion et la protection des droits de l’homme, la nouvelle Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, a réaffirmé aujourd’hui son engagement à défendre ces valeurs dans le cadre des institutions multilatérales mais aussi au travers d’un dialogue approfondi avec la société civile.  La prévention de la torture a par ailleurs alimenté un débat relativement consensuel avec deux Présidents de comités et un Rapporteur spécial, lesquels ont rappelé les États parties à la Convention contre la torture à leurs obligations, notamment en matière de rapports et de traduction en droit interne des engagements souscrits.

« Nous devons nous assurer que les droits de l’homme, tous les droits de l’homme, demeurent l’axe principal du multilatéralisme et les fondements des Nations Unies », a souligné Mme Bachelet, entrée en fonction le 1er septembre à la tête du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  En cas d’échec, les trois piliers de l’Organisation seront sapés, a-t-elle averti, jugeant essentiel de saisir la célébration du soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme pour examiner en profondeur la façon dont les États Membres et le système des Nations Unies peuvent utiliser le plein potentiel des mécanismes des droits de l’homme et de ses organes.

À cet égard, Mme Bachelet a souligné l’importance « amplement démontrée » des alertes précoces générées par les mécanismes de suivi des droits de l’homme.  Elle en a cité pour preuve l’action, des années durant, des Rapporteurs spéciaux successifs et d’autres acteurs, s’agissant de la situation des Rohingya et d’autres minorités au Myanmar.

Cependant, a insisté la Haute-Commissaire le système onusien des droits de l’homme « ne joue pas les Cassandre » en faisant des prédictions alarmistes sans pouvoir empêcher qu’elles se concrétisent.  C’est au contraire « une force de prévention » qui, lorsqu’elle est soutenue par la volonté politique d’acteurs-clefs, atténue et aide à résoudre les conflits. 

Abordant, d’autre part, la question de la protection de l’espace public et des défenseurs des droits de la personne, Mme Bachelet a souligné l’importance du dialogue avec la société civile et le secteur privé, notant qu’elle avait elle-même pris langue avec ces acteurs non étatiques dans le cadre de ses anciennes fonctions de Présidente et de Ministre au Chili.  À ses yeux, la société civile ne doit pas être considérée comme une menace mais comme une ressource susceptible de jouer un rôle important, notamment dans la prévention des conflits.

Le rôle de la société civile a également été salué par M. Jens Modvig, Président du Comité contre la torture, pour ses contributions aux travaux de cet organe d’un traité comptant désormais 164 États parties, au même titre que les institutions des droits de l’homme et les mécanismes nationaux de prévention.  Déplorant que certains États parties ne respectent pas leurs obligations de rapport, M. Modvig a indiqué que la pratique inaugurée par le Comité consistant à examiner la situation d’un État partie, en l’absence de rapport initial de ce dernier, pouvait accélérer la remise dudit rapport.  Il a ajouté que la procédure de rapport simplifié avait été accueillie de manière positive par les États, tout en créant une charge de travail supplémentaire pour le Comité et son secrétariat, ce que la Fédération de Russie a toutefois contesté.

À ce propos, M. Modvig a souhaité que les États soutiennent l’adoption d’une résolution par laquelle l’Assemblée générale ferait siennes les conclusions et recommandations du Secrétaire général dans son rapport sur la situation du système des organes conventionnels des droits de l’homme.  Les ressources demandées devraient être proportionnelles à la charge de travail croissante de ces organes, a-t-il plaidé, rejoint par son homologue du Sous-Comité pour la prévention de la torture, organe du Protocole facultatif à la Convention, lequel a estimé qu’il n’était « simplement pas possible » que son instance poursuive sa mission sans renfort de personnel.

Déplorant, lui aussi, le retard qu’accusent certains États en matière de rapports, M. Malcolm Evans s’est en revanche félicité que plus de 60 mécanismes nationaux de prévention aient, à ce jour, été créés dans le monde.  Quant aux visites aux États parties effectuées par son Sous-Comité, au nombre de huit cette année, il a réaffirmé qu’il ne s’agissait aucunement d’un « acte hostile », comme certains le croient, mais d’une chance de travailler ensemble à la prévention de la torture.  À cet égard, il a regretté que la visite au Rwanda ait dû être interrompue en raison de l’incapacité de ce pays à remplir les conditions du Protocole facultatif.  Ce n’est, d’après lui, que le deuxième cas de ce type sur près de 70 visites effectuées jusqu’à présent. 

Dernier orateur à débattre avec les délégations, M. Nils Melzer, Rapporteur spécial contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, a constaté que l’impunité continuait malheureusement de prévaloir en matière de torture.  Un phénomène qu’il a notamment imputé à l’insuffisance de ratification des traités d’interdiction de la torture par les États et aux écarts fréquents entre les obligations contractées sur le plan international et leur transcription dans le cadre institutionnel national. 

Face à ce fléau, le Rapporteur spécial a préconisé la formation de tous les corps chargés de fonctions de sécurité et de maintien de l’ordre, afin de les sensibiliser contre un usage excessif de la force.  Il a aussi exhorté les États à s’assurer que l’utilisation d’équipements, de technologies ou d’armes ne viole pas l’interdiction de la torture ou des traitements cruels ou dégradants.  Enfin, il a mis en garde contre l’acceptation par certains pans de l’opinion publique, y compris par les politiques, de l’idée que la torture puisse être permise dans certaines circonstances ou contre certains groupes.  Il y a vu une « tendance troublante » qui doit être combattue. 

Demain, la Troisième Commission examinera les questions d’organisation encore en suspens avant de poursuivre ses dialogues interactifs avec des organes de traités de droits de l’homme et des titulaires de mandats de procédures spéciales.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

Déclaration liminaire

Mme MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire aux droits de l’homme, a parlé de « période test pour les principes et les institutions des Nations Unies », dans une intervention qu’elle a intitulée « Promotion et protection des droits de l’homme: mise en œuvre totale de/et suivi de la Déclaration et Programme d’action de Vienne ».

De fait, a déploré Mme Bachelet, le multilatéralisme est en « train de s’éroder » et, avec lui, les « valeurs et les normes » qui sous-tendent l’engagement global partagé pour l’équité et la dignité.  Quant à elle, elle a réaffirmé son profond engagement vis-à-vis du travail du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme pour défendre ces valeurs dans le cadre des institutions multilatérales qui préservent le dialogue et la coopération entre États.  « Nous devons nous assurer que les droits de l’homme, tous les droits de l’homme, demeurent l’axe principal du multilatéralisme, et les fondements des Nations Unies », a-t-elle insisté.  Si « nous échouons », a averti Mme Bachelet, « tous les piliers des Nations Unies seront sapés ».

La Haute-Commissaire s’est dite convaincue qu’une paix durable, la sécurité et le développement ne peuvent être réalisables que « si nous avançons vers une plus grande équité et justice ».  Elle a jugé essentiel de saisir la célébration du soixante-dixième anniversaire de la Déclaration des droits de l’homme, pour examiner en profondeur la façon dont les États Membres et le système des Nations Unies peuvent utiliser le plein potentiel des mécanismes des droits de l’homme et de ses organes.  À cet égard, elle a souligné la grande importance des alertes précoces générées par les mécanismes de suivi des droits de l’homme, importance « amplement démontrée ».  Elle en a cité, pour preuve, l’action, des années durant, des Rapporteurs spéciaux successifs et d’autres acteurs, s’agissant de la situation des Rohingya et d’autres minorités au Myanmar, et qui sont, selon elle, à la fois des exemples tragiques et forts des alertes précoces.

Cependant, a insisté la Haute-Commissaire: « le système des droits de l’homme ne joue pas les Cassandre », faisant des prédictions alarmistes correctes sans pouvoir empêcher qu’elles deviennent réalité.  C’est, au contraire, « une force de prévention ».  Lorsqu’elle est soutenue par la volonté politique d’acteurs clefs, l’action effective et durable des droits de l’homme atténue et aide à résoudre les conflits.  Cela est l’essence même de notre action, a-t-elle affirmé.

De même, le Programme de développement durable à l’horizon 2030, qui est enraciné dans le droit au développement et les autres droits, ne peut être réalisé que dans le cadre des droits de l’homme, à travers le règlement des causes profondes à l’origine de l’insécurité, la réduction des inégalités, des institutions stables, transparentes et inclusives et l’élimination des discriminations.

Mme Bachelet a, par ailleurs, présenté le rapport (A/HRC/37/3) du Haut-Commissariat, qui couvre la période allant du 1er décembre 2016 au 30 novembre 2017.  À cet égard, elle a noté le rôle de plus en plus pertinent du Conseil des droits de l’homme et ses efforts continus pour rendre son action plus visible, plus efficace et plus connectée aux organes basés à New York ainsi qu’à d’autres entités des Nations Unies.

La Haute-Commissaire a également souligné son action plus effective sur le terrain.  À cette occasion, Mme Bachelet a mis en exergue quelques exemples de la coopération technique réalisée par ses services et qui proviennent des multiples formes de présence sur le terrain dans le monde: 17 bureaux locaux, 12 composantes des droits de l’homme dans les missions, 12 bureaux ou centres régionaux ainsi que 30 conseillers au sein des équipes de pays des Nations Unies.

Mme Bachelet a, dans ce contexte, décrit l’action du Haut-Commissariat, que ce soit au niveau de la réalisation du développement durable, de l’égalité des femmes, en matière de justice transitionnelle et des défenseurs des droits de l’homme.  Pour elle, le succès de l’action du Haut-Commissariat dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l’homme est lié au respect par les États Membres de leur engagement en matière de droits de l’homme.  Chaque action de son Bureau vise, en dernier lieu, à soutenir les États à cette fin, a-t-elle conclu.

Dialogue interactif

Le Maroc, au nom du Groupe des États d’Afrique, a noté que, pour la deuxième année consécutive, aucun rapport distinct n’avait été soumis à la Troisième Commission couvrant la période la plus récente des activités du Conseil des droits de l’homme.  Il a suggéré à la Haute-Commissaire de présenter un rapport distinct couvrant une période plus pertinente.  Il a également appelé le Haut-Commissariat à intégrer le développement comme faisant partie des droits fondamentaux.  Le Groupe a dit vouloir recevoir des informations de la Haute-Commissaire concernant ses domaines prioritaires.

Cuba a dénoncé l’attaque à l’encontre de son pays que représente la tenue, demain mardi 16 octobre, d’une réunion au sein du Conseil économique et social (ECOSOC).  Il a insisté sur l’affront que représente cet événement et la campagne qui le soutient, lesquels sont « un affront à la souveraineté du peuple cubain et à son droit à l’autodétermination ».  Pour Cuba, ce n’est pas aux États-Unis de donner des leçons de droits de l’homme à Cuba et « encore moins sous l’administration actuelle qui promeut la suprématie, le racisme et les idées xénophobes ».  Les États-Unis ont remercié Cuba d’avoir rappelé l’événement organisé par leur délégation, avant de regretter la politisation du Conseil des droits de l’homme.  Ils ont appelé la Haute-Commissaire à concentrer son action sur les pays qui violent le plus les droits de l’homme.

La Roumanie a déploré le manque de coopération de certains pays avec la Haute-Commissaire, ainsi qu’avec les mécanismes du Conseil des droits de l’homme, estimant que cela nuit à l’applicabilité des droits de l’homme.  Tenant compte de l’expérience de Mme Bachelet à la tête d’ONU-Femmes, elle lui a demandé si une coopération plus étroite entre les organes conventionnels et les procédures spéciales de l’ONU et les organisations régionales pourrait être envisagée afin de mieux défendre les femmes et promouvoir leurs droits, surtout en zones de conflit.  La Pologne a affirmé qu’elle appuyait, sans réserve, et qu’elle continuerait à appuyer la Haute-Commissaire pour parvenir à une amélioration des droits de l’homme dans leur ensemble.

Le Japon a insisté sur le rôle des États dans la promotion des droits de l’homme et a demandé que la communauté internationale soutienne et accompagne les États Membres dans leur rôle de protection des droits de l’homme.  L’Espagne a souhaité savoir comment renforcer les relations entre Genève et New York.  Elle a, d’autre part, appelé Mme Bachelet à veiller à ce que les informations traitées par le Conseil des droits de l’homme arrivent bien aux organes basés à New York.  Votre action à la tête des droits de l’homme est une bonne garantie à ce sujet, a-t-elle conclu.  La Suisse a salué l’intention de la Haute-Commissaire d’intensifier les échanges avec les États et a jugé essentiel qu’un soutien financier adéquat lui soit fourni pour garantir son succès.  Se prononçant pour l’intégration des droits de l’homme dans tous les domaines d’action des Nations Unies, elle a demandé à Mme Bachelet comment elle voyait le rôle du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme à la suite des réformes lancées par le Secrétaire général.

L’Allemagne a demandé à Mme Bachelet comment elle envisageait la coopération avec le Conseil de sécurité –où elle siégera en 2019-2020- et ce que celui-ci pourrait faire de plus compte tenu des conseils prodigués par le Haut-Commissariat.  S’agissant des situations de pays, elle a aussi demandé à la Haute-Commissaire si elle avait l’intention de retourner au Nicaragua.  L’Albanie a, elle aussi, demandé à la Haute-Commissaire comment elle comptait travailler avec le Conseil de sécurité, notamment pour prévenir les causes profondes d’atteintes aux droits de l’homme.  

L’Argentine a dit avoir toujours défendu l’indépendance du Haut-Commissariat et a assuré que « cela ne changera pas ».  Selon elle, les Nations Unies et le Haut-Commissariat doivent continuer à intégrer la perspective des droits de l’homme, surtout pour les personnes vulnérables.  À cet égard, elle a demandé à la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme si le cadre juridique international des droits de la personne lui semblait suffisamment cohérent pour garantir les droits humains des personnes âgées.

Le Qatar a assuré la Haute-Commissaire de son attachement à la politique de porte ouverte pour ce qui est des mandats spéciaux et l’a assuré de son soutien pour l’application de son mandat en matière de protection des droits de l’homme.

Le Bélarus a estimé que Mme Bachelet n’avait pas hérité d’un leg positif, les droits de l’homme faisant aujourd’hui l’objet de manipulations à des fins de pressions politiques.  Il a proposé au Haut-Commissariat de revoir sa conception des droits de l’homme et lui a suggéré de renforcer le rôle de l’Examen périodique universel dans le cadre de son fonctionnement.  Le Burundi a mis en garde contre la tendance visant à utiliser le Conseil des droits de l’homme à des fins politiques.  La polarisation artificielle qui tend à diviser le monde en deux groupes, les bons et les méchants, doit céder la place à un dialogue universel, a-t-il plaidé.  Il a appelé la Haute-Commissaire à utiliser sa grande expérience pour mettre en être œuvre des réformes approfondies en matière de droits de l’homme.

La République arabe syrienne a estimé que les politiques de confrontation risquaient d’intensifier l’hostilité entre les États Membres.  À son avis, la meilleure chose, à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, serait de s’assurer qu’aucun État n’utilise ces droits à des fins politiques ou partisanes.  À cet égard, elle soutient Cuba face à la tentative des États-Unis de se targuer des meilleures normes en matière des droits de l’homme. 

Le Brésil a souligné qu’à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, aucune atteinte ne devait plus être acceptée et s’est dit confiant dans l’action de Mme Bachelet à la tête du Haut-Commissariat.

L’Islande, au nom des pays nordiques et baltiques, a déclaré que l’indépendance et l’impartialité dans le domaine des droits de l’homme étaient nécessaires, et est revenue sur la complémentarité entre le Conseil à Genève et les activités menées à New York.  Elle a également salué l’action au niveau local du Haut-Commissariat et a demandé ce qui pouvait être fait au niveau de l’ONU pour que les droits de l’homme soient mis en avant dans tous les aspects des travaux de l’Organisation.

Réponses

Dans une première série de réponses, Mme BACHELET a expliqué que son expérience remontait très loin en ce qui concerne les questions sociétales et qu’elle se devait d’élever la voix au nom de ceux qui n’ont pas de voix.  Elle a ajouté que son opinion ne devrait pas se baser sur des avis mais sur des faits et que ses services se devaient d’être impartiaux.  Parfois, le Haut-Commissariat ne dispose pas de toutes les informations nécessaires, a-t-elle expliqué, avant d’insister sur le fait que, pour garantir l’impartialité de ses travaux, il fallait que son Bureau ait accès aux pays et soit en contact avec eux.

En réponse au Maroc, La Haute-Commissaire a expliqué qu’elle présentait un rapport, au lieu de deux distincts, parce que la compilation prend beaucoup de temps.  La décision a donc été prise d’établir un seul rapport.  Mme Bachelet a cependant expliqué que, si ce nouveau format ne satisfaisait pas les délégations, elle reprendrait les pratiques établies précédemment à partir de l’année prochaine.

Sur la prévention des crises régionales, la Haute-Commissaire a expliqué que la coopération avec les mécanismes régionaux présentait un grand potentiel et qu’elle voulait étendre cette coopération a d’autres groupes tels que la Francophonie et le Commonwealth.

En réponse à l’Allemagne, Mme Bachelet a expliqué que pour mieux collaborer avec le Conseil de sécurité, il fallait faire de la prévention.  Elle a déploré le fait qu’il y ait peu d’actions prises avant les violations massives de droits de l’homme, malgré la présence fréquente de signes avant-coureurs.  Il existe des procédures et mécanismes de droits de l’homme qui peuvent aider la communauté internationale à déceler ces signes avant-coureurs, a-t-elle encore insisté, déplorant que rien n’a vraiment été fait et que, maintenant, de nombreux conflits fassent rage.  Sur l’intégration du pilier des droits de l’homme, elle est revenue sur le programme de prévention « Les droits de l’homme avant tout », qu’elle a qualifié d’outil très précieux.  Elle a redit qu’il fallait continuer de repérer toutes les situations de conflit potentiel par le biais du suivi des normes de droits de l’homme et des solutions nationales existantes pour les appuyer. 

Concernant les personnes âgées et leurs droits, la Haute-Commissaire a expliqué qu’il y avait en effet des normes en la matière, mais également des lacunes.  Déplorant les problèmes de violence et de négligence, elle a regretté que, dans les documents des droits de l’homme, il soit si peu fait mention des personnes âgées.

Sur la manière de combler le fossé entre New York et Genève, Mme Bachelet a répondu à l’Espagne que l’Assemblée générale devait être fière de la création du Conseil des droits de l’homme en 2006.  Le Conseil mérite un soutien politique et financier, a-t-elle ajouté.  Rappelant son bilan, elle a cité la prévention des conflits, par exemple en Côte d’Ivoire, pays qui a fait l’objet de 27 organes d’enquête depuis 2006, ainsi que d’un volet de responsabilisation, ou encore les décisions prises récemment à propos du Myanmar et le rapport spécial qui avait donné l’alerte sur la crise alimentaire en 2008.

Dialogue interactif

À l’occasion d’un nouvel échange, le Chili a salué la désignation de Mme Bachelet, ancienne Présidente chilienne, à la tête du Haut-Commissariat et s’est félicité de la coopération et du soutien de cet organe pour certaines initiatives menées dans le pays.  Le Guatemala a rendu hommage au travail déjà accompli par Mme Bachelet dans ses différentes fonctions et a souligné l’importance du renforcement du pilier des droits de l’homme des Nations Unies.  Le Pérou a dit soutenir le travail de Mme Bachelet à New York comme à Genève.  Il a ajouté qu’il donnerait la priorité au droit de la personne dans le cadre de ses travaux au Conseil de sécurité.  Le Mexique a plaidé, lui aussi, pour la collaboration entre les États et le Haut-Commissariat.  Il a dit participé aux travaux du Conseil des droits de l’homme, organe par excellence pour l’échange de vues sur les droits de l’homme.  Il faut rendre cet organe plus efficace pour trouver des points d’entente et ainsi défendre les normes sur les droits de la personne.  Comment renforcer le pilier des droits de l’homme, a encore demandé le Mexique.

L’Union européenne compte sur l’expérience de Mme Bachelet au service des droits de la personne.  Elle souhaite que ses services soient dotés des ressources et capacités nécessaires et rappelle qu’elle compte parmi les principaux contributeurs au Haut-Commissariat.  Les Pays-Bas ont rappelé que le Haut-Commissariat avait pour tâche de construire des partenariats constructifs avec tous les États, la société civile et les organisations religieuses, le monde académique et le secteur privé.  Ils ont demandé à la Haute-Commissaire comment la collaboration entre le Conseil des droits de l’homme et la Troisième Commission pouvait être renforcée et quelles actions devaient être priorisées pour construire des sociétés plus résilientes.  La Grèce soutient le multilatéralisme et estime que la coopération entre la Troisième Commission et le Haut-Commissariat constitue un dialogue essentiel pour promouvoir les droits fondamentaux.  À cet égard, elle a aussi souhaité savoir quelles pourraient être les meilleures pratiques de la Commission pour fournir à ce dialogue une véritable valeur ajoutée.

L’Irlande a dit partager les préoccupations de Mme Bachelet à Genève comme à New York.  Les Nations Unies doivent agir dans l’intérêt des peuples, notamment en mettant en œuvre le Programme 2030.  Dans cet esprit, les États ont la responsabilité de faire en sorte que les victimes de violations restent au cœur des programmes de l’ONU.  Le Portugal a dit compter sur Mme Bachelet pour promouvoir et défendre les droits de la personne pour tous et sans discrimination.  Affirmant vouloir continuer à défendre l’abolition de la peine de mort, il a demandé à Mme Bachelet comment elle envisageait une abolition effective de la peine capitale dans le monde.

Le Liechtenstein a demandé à la Haute-Commissaire ce qu’elle pensait de l’élection de 18 nouveaux membres au Conseil des droits de l’homme.  S’agissant des attaques de plus en plus systématiques visant les journalistes, il a souhaité savoir quelles mesures préconise Mme Bachelet.

L’Érythrée a rappelé qu’il n’y avait pas de hiérarchie entre les droits de l’homme, lesquels doivent être abordés de manière égale.  Dans cet esprit, le Haut-Commissariat doit préconiser un traitement égal de tous les droits de la personne et aider les États à augmenter leur capacité aux fins de protection de ces droits.  L’Égypte s’est dite prête à discuter de façon constructive avec Mme Bachelet.  Elle a estimé que le respect des droits de l’homme devait faire l’objet de mesures pour éviter la politisation, la polarisation et la sélectivité.  Elle a ajouté que les Nations Unies ne sauraient être utilisées par certains État, dans le domaine des droits de l’homme, pour faire avancer leurs intérêts.  La Chine s’est, elle aussi, dite préoccupée par l’activité programmée à l’ECOSOC mardi et ciblant Cuba.  Pour la Chine, il faut respecter la souveraineté des États, conformément à la Charte des Nations Unies; le dialogue et la coopération doivent primer et le Haut-Commissariat doit devenir une instance de dialogue sans confrontation.  Il faut aussi mettre l’accent sur les droits économiques et les droits au développement.

L’Angola a estimé que la paix, la sécurité et la stabilité nécessitaient un ordre international plus démocratique et une vision de droits de l’homme plus interdépendants.  Il a également jugé qu’une assistance technique devait être prodiguée aux États pour promouvoir le droit au développement.

La Géorgie a noté que la Haute-Commissaire, dans son rapport sur les violations des droits de l’homme, indiquait que l’occupation de l’Abkhazie représentait le principal facteur de non-respect des droits de l’homme en Géorgie.  La tendance à la privation de droits dans cette région montre qu’il faut un accès sans entrave des observateurs dans les territoires occupés de la Géorgie, a-t-elle estimé.  Elle a demandé, à cet égard, quelles mesures pourraient être prises pour faire en sorte que les mécanismes des droits l’homme aient accès à ces zones occupées.

La République islamique d’Iran a estimé que les sanctions unilatérales que lui imposent les États-Unis sont en contradiction avec les résolutions du Conseil de sécurité et le droit international.  Ce sont les sanctions les plus dures imposées au pays et elles portent préjudices aux plus vulnérables.  Pour l’Iran, d’autres organes de l’ONU doivent encore se prononcer sur ces violations massives.

La Libye a assuré être attachée à tous les instruments et normes relatifs aux droits de l’homme.  Elle a rappelé qu’elle était un pays de transit pour les migrants et a assuré veiller au respect des droits de ces derniers.  À ce sujet, elle a demandé quelle aide le Haut-Commissariat pourrait accorder aux États en matière de formation afin de faire progresser les droits de la personne pour les migrants.

Réponses

Dans ses réponses, Mme BACHELET a expliqué qu’aucune paix ne saurait être durable sans l’engagement de la société internationale.  Rappelant que le prix Nobel de la paix 2018 avait été décerné à des défenseurs des droits de l’homme, elle a affirmé qu’elle continuerait à promouvoir la reconnaissance due au rôle des défenseurs des droits des femmes.

Sur les questions financières, la Haute-Commissaire a expliqué que les ressources financières devraient provenir du budget ordinaire plutôt que de contributions volontaires.  En outre, elle accueille toujours les fonds pré-affectés pour renforcer les travaux de ses services.  Mme Bachelet a par ailleurs lancé un appel aux délégations pour que ces dernières appuient la cause du Haut-Commissariat devant la Cinquième Commission.

Mme Bachelet a rappelé qu’une partie de son travail consistait à recenser les risques essentiels de conflits.  Dans l’ensemble, il faut chercher comment mieux obtenir et utiliser les informations adéquates pour ne pas réagir après coup, a-t-elle insisté.

Créer des sociétés plus résilientes, c’est faire en sorte d’augmenter la capacité des sociétés à faire face, réagir, ne pas atteindre un point de rupture, ne pas se casser, et donc à créer des systèmes qui reposent sur des institutions qui pourront se relever en cas de difficultés, a expliqué la Haute-Commissaire. Cela s’obtient en tenant compte des besoins en matière d’éducation, de santé et de logement, a-t-elle estimé.  « Il faut créer une égalité des chances, tenir compte de la diversité, avoir des lois veillant au respect des droits de l’homme », a-t-elle ajouté.

Enfin, de manière plus générale, Mme Bachelet a estimé qu’il ne « s’agissait pas de ne pas discuter de nos problèmes mais de prouver que des progrès sont possibles et que nous allons améliorer la situation ».

Dialogue interactif

À l’occasion d’un dernier échange, le Viet Nam a estimé qu’il fallait une approche globale s’agissant des droits de l’homme et que les différents organes de l’ONU devaient être à la hauteur des aspirations des peuples.  À cet égard, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme doit être une instance sans politisation ni polarisation et ne doit pas aggraver la situation des pays au travers de critiques négatives.  Le Nigéria a, lui aussi, souligné l’importance des principes de non-politisation, de non-sélectivité et de dialogue constructif et impartial, estimant qu’il s’agit là les seuls moyens de garantir au Haut-Commissariat la légitimité des résultats obtenus.  De même, l’Indonésie a jugé que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme devait mener son mandat de façon cohérente et non politique.  Le dialogue constructif et un engagement réel des États sont, selon elle, des facteurs essentiels. 

L’Algérie a déclaré que les célébrations, le mois passé, du centième anniversaire de la naissance de Nelson Mandela avaient été l’occasion de trouver une inspiration en matière de protection des droits de la personne.  Elle a estimé, à ce sujet, que le Haut-Commissariat devrait être indépendant et a plaidé pour une collaboration internationale dans le domaine des droits de l’homme.  Elle a enfin demandé à Mme Bachelet ce qui devrait être fait dans un contexte caractérisé par la progression de la faim dans le monde.  L’Inde a estimé qu’à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, le renforcement des capacités des États était une priorité, notamment en vue de la réalisation du Programme 2030.  En tant que membre du Conseil des droits de l’homme, elle entend faire entendre une voix pluraliste.

Le Royaume-Uni a rappelé qu’il incombe à tous les États de protéger et promouvoir les droits de l’homme dans le monde entier.  Il a demandé, à ce sujet, ce que pouvaient faire concrètement les États Membres pour aider le Haut-Commissariat dans sa tâche.  Le Canada a dit soutenir le Haut-Commissariat dans ses efforts visant à ce que tous les États respectent au mieux leurs obligations dans le domaine des droits de l’homme, notamment dans la lutte contre les discriminations visant les autochtones, les femmes, les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes (LGBTI), ainsi que les personnes handicapées. 

L’Arabie saoudite a déclaré vouloir soutenir les mécanismes de droits de l’homme et établir un dialogue avec les autres États.  Elle a estimé que Mme Bachelet devrait réfléchir à certaines situations humanitaires dans le monde et a dit compter sur elle pour que le Haut-Commissariat agisse afin de faire reculer les souffrances.  L’État de Palestine a énuméré les atteintes aux droits de l’homme visant les Palestiniens dans les territoires occupés.  Il a également mis l’accent sur l’importance du rôle des entreprises dans le cadre du régime d’occupation.  Rappelant à cet égard que la résolution 2136 (2015) du Conseil de sécurité prévoit la création d’une base de données pour mettre fin à la complicité des entreprises, l’État de Palestine a souhaité connaître l’état d’avancement de cet instrument. 

L’Azerbaïdjan a déploré que trop peu d’attention soit accordée par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme à la question des déplacés.  Il a demandé l’avis de la Haute-Commissaire à ce sujet.

Bahreïn a affirmé agir pour que la coopération entre les organismes internationaux et les États permette de faire progresser les droits de l’homme.  Sur le plan national, il a indiqué qu’une charte nationale soulignait l’importance de la justice pour protéger les droits de la personne.

La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a constaté que certains pays utilisent les droits de l’homme à des fins de confrontation.  Elle a demandé à la Haute-Commissaire de respecter les principes de non-sélectivité et de non-politisation tout en veillant à que ce que les droits ne soient pas utilisés pour s’ingérer dans les affaires intérieures des États.

La Fédération de Russie a salué l’expérience professionnelle de Mme Bachelet et s’est dite confiante en sa capacité à rétablir un dialogue constructif avec les États.  Elle a par ailleurs déploré que, pour réaliser leurs objectifs, certains États recourent à des mesures coercitives unilatérales.  La Fédération de Russie soutient Cuba dans son opposition à la tenue à l’ONU d’un événement manifestement politisé.  Dans ce contexte, elle estime que le rôle de la Haute-Commissaire, en tant que représentante impartiale de l’ONU, est plus important que jamais.  La Fédération de Russie invite en outre la Haute-Commissaire à respecter la souveraineté des États ainsi que l’identité culturelle et religieuse des différents peuples.

Le Nicaragua a dit soutenir Cuba et la lettre envoyée par la représentante cubaine au Secrétaire général, laquelle rappelle que l’utilisation des locaux des Nations Unies doit avoir un rapport avec la Charte de l’Organisation.  La Bolivie a, elle aussi, dénoncé l’intention d’un autre État Membre d’instrumentaliser l’ONU à des fins politiques.  Le Venezuela a demandé quand le Haut-Commissariat allait condamner les mesures coercitives unilatérales prises par certains pays en violation flagrante de la Charte de l’ONU.  Il a également souhaité savoir comment serait condamné l’usage préventif de la force par ces mêmes pays. 

Les Émirats arabes unis ont réitéré leur volonté de respecter leurs obligations en matière de droits de l’homme.  Ils ont également salué le renforcement des capacités mené par le Haut-Commissariat et se sont félicités des conseils techniques qu’il accorde aux États. 

Les Comores ont demandé comment les différents mécanismes à l’œuvre sur la question des Rohingya pouvaient fonctionner de manière coordonnée.  Le Myanmar a estimé que le Haut-Commissariat devait tenir compte des sensibilités nationales et apporter une assistance constructive et impartiale aux États.

L’Ukraine a souhaité que le Haut-Commissariat devienne plus efficace et mieux à même de relever les défis actuels.  À cet égard, a relevé la délégation, le vieux continent n’est toujours pas débarrassé des conflits, l’agression russe armée ayant créé une grave situation des droits de l’homme en Ukraine.  Elle a également invité Mme Bachelet à se rendre en Ukraine dès qu’elle le pourra.  L’Afghanistan a souhaité savoir comment combattre les causes de conflit pour veiller à ce que les êtres humains puissent bénéficier du droit à la vie.

Le Pakistan a réaffirmé sa volonté de collaborer avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  Il s’est toutefois dit préoccupé par la tendance actuelle à l’islamophobie.  Il a demandé à Mme Bachelet ce qu’il faudrait faire pour encourager une culture de la paix entre les religions. 

Réponses

En réponse aux derniers intervenants, Mme BACHELET a dit vouloir continuer à travailler avec l’ensemble des États Membres dans un cadre très constructif  Elle s’est dite à l’écoute des commentaires et préoccupations, notamment s’agissant du maintien des principes énoncés lors de la création du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme: « Les droits de l’homme sont universels et indivisibles », a-t-elle insisté.

Abordant la question de la protection de l’espace public et les défenseurs des droits de la personne, des questions importantes, selon elle, non seulement pour les droits de l’homme mais également pour le développement et la sécurité, la Haute-Commissaire a expliqué qu’en tant qu’ancienne Présidente et Ministre, elle avait eu l’occasion de prendre langue avec la société civile pour discuter notamment de politique générale.  Elle a insisté, à cet égard, sur l’importance du dialogue avec la société civile et le secteur privé ainsi que d’autres acteurs.  Il faut que ces entités aient « une place à la table pour contribuer dans la prévention des conflits », a-t-elle ajouté.  Pour Mme Bachelet, il ne faut pas considérer la société civile « comme une menace, elle peut au contraire jouer un rôle important et prendre de bonnes décisions.

Évoquant ensuite la question de la liberté d’expression, la Haute-Commissaire a rappelé qu’il fallait « pouvoir critiquer » les politiques des pays, car les gouvernements doivent répondre de leurs actes.  Certes, a-t-elle précisé, aucun pays ne souhaite être critiqué mais les gouvernements doivent aussi s’interroger sur la manière de mieux faire.  Elle a, par ailleurs, dit œuvrer pour que le Haut-Commissariat améliore son action sur la base des principes universels, se disant déterminée à améliorer son efficience et maintenir la confiance dans un espace de défense de tous les droits sans discrimination.  Pour Mme Bachelet, les États Membres sont les premiers responsables pour assurer la participation à la prise de décisions pour la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 (Programme 2030).

Sur la question religieuse, la Haute-Commissaire a indiqué que « nous travaillons sur la tolérance et contre la haine », notamment dans le cadre du Processus d’Istanbul et les résolutions de l’Assemblée générale.  Sur le volet de l’espace numérique, elle a rappelé que chaque État avait l’obligation de protéger la vie privée.  Elle a précisé que, lors de la trente-neuvième session du Conseil des droits de l’homme, en septembre dernier, elle avait présenté un rapport marquant ses préoccupations quant aux tendances sur l’absence de protection des personnes ainsi que sur des ingérences illicites.  « Les États doivent veiller sur cette question », a-t-elle martelé.  Elle a indiqué, à cet égard, qu’un des représentants du Haut-Commissariat s’était rendu aux États-Unis, dans la Silicon Valley, pour « intégrer dans le monde du numérique des principes de sécurité ».

Abordant les questions de l’alimentation et des changements climatiques qui affectent les populations, Mme Bachelet a dit travailler avec le Programme alimentaire mondial, soulignant le lien étroit entre droits de l’homme et sécurité alimentaire et insistant sur la culture de la « bonne consommation » loin de tout gaspillage.

Mme Bachelet a dit suivre la question des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays en coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) pour la recherche de solutions et que cela s’inscrit dans le cadre du Programme 2030, afin de n’abandonner personne sur le bord du chemin.

S’agissant de la situation au Myanmar, la Haute-Commissaire a rappelé l’existence des différents mécanismes, des missions d’établissement des faits et souligné que « nous continuerons d’examiner » les moyens de travail avec le Gouvernement et les mécanismes.  Quant aux régimes de sanctions, ceux-ci doivent répondre à des conditions strictes, préserver les droits de l’homme et être dirigés par des experts indépendants, a encore estimé Mme Bachelet.  En conclusion, elle s’est prononcée contre toute intervention militaire « quelle que soit la cause ou le moment et dans quelque pays que ce soit ».

Déclaration liminaire

M. JENS MODVIG, Président du Comité contre la torture, a d’abord rappelé que la Déclaration universelle des droits de l’homme, dont la communauté internationale célèbre, cette année, le soixante-dixième anniversaire, est un instrument fondamental pour l’abolition de la torture.  Il a ensuite rappelé que la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée en 1984, proposait aux États Membres des mesures à mettre en œuvre pour prévenir la torture.  Cette Convention, a-t-il relevé, compte désormais 164 États parties, les trois derniers en date étant les Bahamas, la Gambie et les Îles Marshall.  Il a profité de l’occasion pour appeler ceux des États qui ne l’ont pas encore fait à devenir parties à cette Convention, ainsi qu’à collaborer avec son Comité.

Déplorant que certains États parties ne respectent pas leurs obligations de rapport, M. Modvig a indiqué que cette question faisait à présent partie du travail de son Comité.  Il a ainsi précisé que, lors de sa dernière session, le Comité avait décidé d’examiner la situation d’un pays en l’absence de rapport initial de sa part, ce qui avait entraîné la remise dudit rapport, avec pour la première fois la participation de la délégation via vidéoconférence.  Il a ajouté que la procédure de rapport simplifié avait été accueillie de manière positive par les États, tout en créant une charge de travail supplémentaire pour le Comité et son secrétariat.  Il a d’autre part souligné que, cette année, le Comité avait invité tous les États parties n’ayant encore jamais soumis de rapport initial à une rencontre afin d’identifier leurs défis.  À l’issue de cet échange, plusieurs États parties se sont engagés à remettre leur rapport initial dans un délai d’un an.

Le Comité a aussi procédé à des communications individuelles, en vertu de l’article 22 de la Convention, a poursuivi M. Modvig.  Depuis 1989, le Comité a ainsi enregistré 885 plaintes individuelles concernant 40 États parties.  Parmi elles, 265 ont été interrompues, 104 ont été jugées irrecevables et 365 ont donné lieu à des décisions finales.  Sur ces 365 cas, 143 -soit 39%- concernaient des violations de la Convention, a précisé le Président du Comité, qualifiant de « modeste » ce pourcentage.  Il a ajouté que le Comité s’était inspiré du Conseil des droits l’homme en créant un groupe de travail intersessions chargé de traiter les communications afin de rendre plus efficaces les travaux de cet organe conventionnel.

S’agissant de la mise en œuvre des décisions du Comité consécutives à des plaintes, 45% des recommandations de suivi aux États parties ont été au moins partiellement mises en application, a observé M. Modvig.  Au total, a-t-il encore noté, 10 enquêtes ont été menées depuis la création du Comité, cette pratique visant à vérifier les accusations de torture systématique dans un État partie.

À propos des ressources allouées à son Comité, M. Modvig a souhaité que les États soutiennent l’adoption d’une résolution par laquelle l’Assemblée générale ferait siennes les conclusions et recommandations du Secrétaire général dans son rapport sur la situation du système des organes conventionnels des droits de l’homme.  Les ressources demandées dans le rapport devraient être proportionnelles à la charge de travail croissante de ces organes, a indiqué M. Modvig, qui a conclu en saluant les contributions des institutions des droits de l’homme, des mécanismes nationaux de prévention et de la société civile aux travaux du Comité contre la torture.

Dialogue interactif

Lors du dialogue interactif entre la Troisième Commission et le Président du Comité, l’Union européenne a relevé que, chaque année, les travaux du Comité permettaient de se rapprocher d’une ratification universelle de la Convention contre la torture.  L’Union européenne considère le Comité comme un acteur clef dans la lutte contre la torture.  Elle aimerait savoir quelles nouvelles mesures pourraient être prises pour diminuer la charge du Comité.  Elle aimerait également connaître le nombre d’États parties à la Convention qui ne respectent pas leurs obligations.  Le Danemark a, lui aussi, demandé quoi faire pour réduire la charge de travail du Comité, avant de demander des informations sur les moyens pour les États Membres de faire face aux intimidations et représailles de façon plus efficace.

L’Afrique du Sud a expliqué avoir présenté son deuxième rapport périodique au Comité contre la torture et devoir bientôt présenter le prochain.  Elle souhaite encourager ce genre d’interactions entre le Comité et les États parties.

En revanche, la Fédération de Russie, qui a expliqué avoir présenté son sixième rapport en juillet, a déploré le « vieux problème des questions qui sortent des dispositions de la Convention » et dénoncé « l’interprétation arbitraire de certaines dispositions contre la torture ».  Elle s’est inquiétée des tentatives du Comité de régler des contradictions entre les États, ce qui est « inadmissible ».  Elle a également insisté sur le fait que les recommandations du Comité étaient des avis d’experts et qu’elles ne s’imposaient en rien aux États Membres.  En outre, le représentant de la Fédération de Russie a dit avoir reproché à la procédure dite simplifiée de présentation des rapports, d’avoir l’effet inverse de celui escompté à l’origine.  Ainsi, il a été exigé de la Fédération de Russie de raconter à nouveau ce qui était déjà présent dans son sixième rapport.  Pourquoi le faire « si les membres du Comité ne prennent même pas la peine d’examiner le rapport? » a demandé le représentant.  La Fédération de Russie demande l’adoption d’un code de conduite pour les organes de traité pour qu’il y ait « un peu plus de discipline dans le comportement des experts ».

Les États-Unis ont déclaré être les leaders mondiaux dans la lutte contre la torture et ont rappelé qu’ils continuaient de financer le Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture et d’aider directement les victimes.

La France a salué les nouvelles adhésions et ratifications à la Convention et a encouragé les États Membres qui n’y sont pas encore parties à le devenir.  Elle a également rappelé l’interdiction absolue de la torture et les traitements dégradants en toutes circonstances.

Le Liechtenstein a posé la question du non-refoulement de personnes menacées de torture dans leur pays et a demandé quelles étaient les tendances générales et la pertinence de ce principe dans le cadre des migrations internationales.

L’Iraq est revenu sur les mesures prises par le pays dans le cadre de la lutte contre la torture et a expliqué que la loi sur la gestion des prisons garantissait le respect des normes internationales pour tous les détenus, ajoutant en outre qu’il pouvait y avoir des enquêtes sur tous les fonctionnaires qui commettaient des actes de torture.

Le Maroc s’est félicité de la tenue, à Dakar, d’un séminaire de rédaction des lois contre la torture, « le sixième du genre en Afrique », une initiative qui a bénéficié d’un regain d’intérêt et a validé les activités menées à Genève.  Il a demandé comment évaluer la dimension et l’ampleur de telles actions de partenariat pour renforcer l’adhésion à la Convention.

Réponses

Dans ses réponses, M. MODVIG a indiqué que l’objectif de la procédure simplifiée pour la présentation des rapports au Comité était d’alléger le fardeau des rapports en l’absence notamment de coordination, ce qui pourrait être évité si l’on fait preuve davantage de souplesse.  En d’autres termes, il est en faveur de rapports plus courts mais plus ciblés.  S’agissant de la liste des questions posées aux États parties, il a estimé qu’elle relevait de la responsabilité du secrétariat.  C’est pourquoi il encourage le recours à la procédure simplifiée qui permet de réduire la charge du travail.  En même temps, le Comité s’est efforcé d’augmenter sa capacité.  Le Comité, a-t-il expliqué, examine actuellement 18 rapports d’États parties par an.

En ce qui concerne les États qui présentent des rapports en retard ou qui n’en présentent pas, M. Modvig a préconisé un renforcement des capacités de la part du secrétariat.  Il existe des fonds disponibles pour renforcer les capacités en la matière des petits États, a-t-il fait observer.

S’agissant des tendances migratoires dans le monde, ce qui frappe, ce sont les procédures utilisées pour faire face à l’afflux des migrants, qui semblent « être superficielles », a déclaré M. Modvig.  Ce que souhaiterait le Comité, c’est que toute victime de torture soit identifiée et traitée en fonction de son statut car, dans le cas contraire, il existe une violation inadmissible du droit des victimes.  En réponse à la Fédération de Russie, le Président du Comité a dit être en désaccord sur le fait que le Comité aurait outrepassé son mandat.

Déclaration liminaire

M. MALCOLM EVANS, Président du Sous-Comité contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, a rappelé que le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture donnait mandat au Sous-Comité pour engager un dialogue constructif avec les États parties sur la réduction des risques de torture ou de mauvais traitement, à partir de ses visites dans des lieux où les personnes sont ou peuvent être privées de liberté.  Le Sous-Comité est également invité à aider les États parties dans l’établissement de mécanismes nationaux de prévention et à coopérer avec les instances internationales, régionales ou nationales, ainsi qu’avec les agences en lien avec la prévention de la torture.

Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention a, pour l’heure, été ratifié par 88 pays de toutes les régions du monde, a relevé M. Evans, qualifiant ce chiffre d’impressionnant, même si près de la moitié des 164 États parties à la Convention n’ont pas encore franchi le pas.  Saluant l’initiative menée par le Chili, le Danemark, le Ghana, l’Indonésie et le Maroc en faveur d’une ratification universelle de la Convention, ainsi que les appels lancés à cette fin au cours de l’Examen périodique universel, M. Evans a regretté que les résolutions de l’Assemblée générale n’accordent pas la même priorité au Protocole facultatif.

S’agissant des mécanismes nationaux de prévention, dont plus de 60 ont été créés dans le monde, M. Evans s’est félicité qu’après des années de travail intense, l’Argentine et le Cambodge aient été retirés de la liste du Sous-Comité des pays accusant un retard en la matière.  Cette liste reste néanmoins trop longue, a-t-il déploré, citant parmi les pays retardataires le Bénin, la Bosnie-Herzégovine, le Burkina Faso, le Burundi, le Chili, la République démocratique du Congo, le Gabon, le Libéria, Nauru, le Nigéria, le Panama et les Philippines.  Il a cependant assuré que le Sous-Comité entendait continuer de travailler de manière constructive avec ces États.

Évoquant par ailleurs les visites aux États parties effectuées par le Sous-Comité, au nombre de huit cette année, M. Evans a réaffirmé qu’il ne s’agissait aucunement d’un acte hostile, comme certains pensent le croire, mais d’une chance de travailler ensemble à la prévention de la torture.  À cet égard, il a regretté que la visite au Rwanda ait dû être interrompue en raison de l’incapacité de ce pays à remplir les conditions du Protocole facultatif.  Ce n’est que le deuxième cas de ce type sur près de 70 visites effectuées jusqu’à présent, a-t-il indiqué.

M. Evans a par ailleurs évoqué les ressources de son Sous-Comité, notant que celui-ci tenait désormais trois semaines de session plénière par an pour décider de son calendrier, actualiser des documents de travail internes, travailler à l’établissement de mécanismes nationaux de prévention dans 20 pays, dialoguer avec 60 autres sur leur projet de mécanisme, adopter 8 rapports de visites et remplir d’autres obligations liées à son mandat.  « Ce n’est simplement pas possible », a-t-il résumé, se disant rassuré par l’ajout d’une semaine supplémentaire mais agacé par l’absence de renforts en personnel.  Malgré cela, le Sous-Comité parvient à poursuivre ses activités et a même été en mesure de conclure un accord avec le Comité européen pour la prévention de la torture, instance créée par la Convention européenne de 1987 pour la prévention de la torture, en vue d’améliorer les travaux menés dans l’espace du Conseil de l’Europe.

Dialogue interactif

Lors du dialogue avec le Président du Sous-Comité, l’Espagne a estimé nécessaires les mécanismes de prévention, afin de combattre les mauvais traitements à l’encontre des personnes détenues.  Le représentant a saisi cette occasion pour parler de l’expérience nationale du Défenseur du peuple, un organe indépendant crée par la Constitution pour superviser les agissements de l’Administration et d’autres corps.  Cet organe, s’est-il félicité, dispose d’une autonomie financière et d’action.  Il a, par ailleurs, salué le professionnalisme des membres du Comité lors de leur visite en Espagne.  L’Union européenne, tout comme la République tchèque, se sont félicitées de l’augmentation du nombre des États parties au Protocole facultatif, avant de demander des exemples de bonnes pratiques et des meilleurs exemples de collaboration, à la suite des récentes visites effectuées par le Comité.  L’Union européenne a, en outre, demandé comment faire pour accélérer l’accès aux personnes détenues, a voulu avoir des précisions sur les mesures de prévention qui pourraient être prises et comment l’Union européenne peut venir en aide au Comité.  Abondant dans le même sens, le Danemark s’est dit préoccupé par le fait que les mécanismes ne peuvent souvent pas mener des entretiens avec les détenus dans des conditions de confidentialité.  Il s’est aussi inquiété du manque de ressources du Sous-Comité.

Réponses

Dans ses réponses, M. EVANS a rappelé qu’il allait de soi que, pour être efficaces, les mécanismes nationaux de protection devaient être indépendants et avoir beaucoup de ressources.  Toutefois, cela ne suffit pas.  Il leur faut un mandat très clair qui soit inscrit dans la loi.  Ce qui est important, c’est de comprendre l’intérêt des visites préventives, a plaidé M. Evans.  Il ne s’agit pas juste d’aller dans les endroits de détention et faire des recommandations.  Le Président du Sous-Comité a, à cet égard, évoqué les obstacles à l’efficacité des travaux qu’il a expliqué, souvent, par une absence de tradition d’ouverture  Il a encouragé les États à rendre ces mécanismes nationaux plus robustes.  Faire en sorte que ces mécanismes soient établis est, à son avis, « le début d’une courbe d’apprentissage », et c’est là où la communauté internationale a un très grand rôle à jouer.  M. Evans a encouragé celle-ci à appuyer la création de réseaux de mécanismes nationaux dans les régions et sous-régions où ils existent déjà.

S’agissant des bonnes pratiques, M. Evans s’est félicité de la diminution des résistances à l’égard de l’exercice du mandat de son Sous-Comité par rapport au passé récent.  Quant à l’idée mentionnée par certains États d’un « paquet de prévention », de nombreux éléments militent en faveur de cette approche.  Il ne s’agit pas uniquement de l’arrivée et du départ de la visite, il y a également la préparation, la conduite et le suivi pour aller de l’avant, a-t-il fait valoir.  Il a, en conclusion, remercié l’Espagne pour l’accueil fait au Sous-Comité et a dit attendre le « développement de notre dialogue », saisissant cette occasion pour encourager les États à rendre publiques les résultats des « évaluations » du Sous-Comité à leur égard.

Déclaration liminaire

M. NILS MELZER, Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants, a déploré que la torture et les mauvais traitements continuent d’être pratiqués dans l’impunité à travers le monde.  Avant de rappeler les 10 recommandations et mesures qu’il a proposées dans son rapport intérimaire, il a expliqué les raisons de ce phénomène par plusieurs éléments, parmi lesquels 5 retiennent particulièrement son attention.  Le premier a trait à l’insuffisance de ratification des traités d’interdiction de la torture par les États.  Il existe, en outre, des écarts fréquents et significatifs entre les obligations contractées sur le plan international et leur transcription dans le cadre institutionnel national.  Le Rapporteur spécial observe aussi des défis croissants directs ou indirects à l’interdiction même de la torture, ainsi que la présence d’environnements politiques violents et discriminatoires.  Enfin, de nombreux États échouent toujours à apporter une protection suffisante contre la généralisation et les abus commis par les acteurs non étatiques. 

Pour M. Melzer, la communauté internationale peine à tenir ses promesses contenues dans la Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée, il y a 70 ans.  Parmi les mesures qu’il a préconisées, le Rapporteur spécial exhorte les États à ratifier sans réserve les instruments internationaux.  De même, les États doivent veiller à ce que les législations nationales soient conformes, a minima, avec les obligations des lois internationales et que leurs politiques, procédures et institutions soutiennent l’éradication de la torture et les traitements dégradants. Les États doivent également établir des mécanismes d’investigation incorporés dans un système judiciaire impartial et indépendant.

Une autre mesure préconisée par M. Melzer est la mise en place de mesures de sauvegarde préventive au sein de toutes les institutions, mécanismes et procédures.  Le Rapporteur spécial encourage la formation de tous les corps: policiers, militaires et autres responsables de la sécurité doivent être sensibilisés pour éviter l’usage de la force excessive.  M. Melzer a également appelé les États à s’assurer que l’utilisation d’équipements, de technologies ou d’armes ne viole pas l’interdiction de la torture ou des traitements cruels ou dégradants.  Il a, de plus, appelé les États à réaffirmer, de manière inconditionnelle, le caractère absolu de la non-utilisation de la torture et à veiller à son application de bonne foi en conformité avec les autres principes pertinents, telle que la dignité humaine.

M. Melzer a enfin appelé à prévenir l’impunité et à promouvoir la non-discrimination.  Par ailleurs, il a déploré qu’aujourd’hui, et malgré des réalisations impressionnantes de la communauté internationale pour développer des normes solides et un cadre institutionnel de soutien à l’abolition de la torture et des traitements dégradants, ces pratiques sont toujours en cours.

Pour finir, le Rapporteur spécial a tiré la sonnette d’alarme contre l’acceptation par certains pans de l’opinion publique, y compris des politiques, de l’idée que cette pratique abominable qu’est la torture puisse être permise dans certaines circonstances ou contre certains groupes.  Il y a vu une « tendance troublante » qui doit être combattue. 

Dialogue interactif

Lors du dialogue interactif avec M. Melzer, le Brésil a dit son accord avec le Rapporteur spécial pour que la migration ne soit pas décrite comme une menace qui empêcherait les États de respecter le droit international applicable, en particulier l’interdiction de la torture ou des mauvais traitements.  Pour le Brésil, « aucun migrant ne devrait être détenu pour être dans une situation irrégulière ».

Le Royaume-Uni a déploré que la torture continue d’être pratiquée avec impunité dans plusieurs régions du monde et a demandé quelles actions les États pouvaient prendre pour assurer une meilleure adhésion au Protocole facultatif.  La Norvège a fait part de sa préoccupation face à la fréquence du recours à la torture et a appelé à une réaction politique ferme.  Compte tenu des recommandations contenues dans le rapport du Rapporteur spécial, la Norvège aimerait savoir comment il comptait faire pour relever ces défis.

L’Union européenne a appelé les États et la société civile à travailler ensemble pour éviter la torture et les mauvais traitements à l’encontre des migrants.  Rappelant la nécessité du multilatéralisme dans l’application du droit international et la protection des individus, elle a demandé s’il était possible de mettre en avant une ou deux recommandations et a souhaité davantage de détails sur la collecte de données dans le contexte des pratiques optimales.  Le Danemark a voulu savoir comment contrecarrer les discours et politiques discriminatoires, ainsi que les actes de torture à l’égard de communautés vulnérables comme les femmes, les enfants, les populations LGBTI, et les handicapés, et comment faire en sorte que les États adhèrent à un mécanisme en ce sens

Cuba a expliqué qu’avant 1959, les mauvais traitements étaient monnaie courante dans le pays, soumis au régime de Batista.  Depuis 1995, le pays a pris toutes les mesures nécessaires contre les actes qui affectent la dignité humaine.  Il souhaite savoir quels moyens peuvent être mis en œuvre pour que ces actes cessent.

La Suisse s’est dite préoccupée de l’externalisation des actes de torture et a exhorté les États à faire preuve de vigilance et à renoncer à tout acte qui contournerait la loi.  Elle s’est inquiétée de la persistance des inégalités face à la torture et a mentionné les femmes et les filles comme étant les plus vulnérables à ces pratiques, de même que les personnes lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT) et les personnes en situation irrégulière.  Elle a demandé quelle approche pourrait être envisagée pour remédier à la situation décrite dans le rapport et quel était le groupe le plus vulnérable aux mauvais traitements.

La Fédération de Russie a mentionné les situations où les États violent l’état de droit et refusent l’accès à la justice, citant l’ancienne prison de Guantanamo qui, « malgré ce qu’affirment les États-Unis, demeure un problème ».  L’Ukraine a rappelé qu’une partie du territoire ukrainien était aujourd’hui occupée par la Russie.

L’Afrique du Sud a pris note de la partie du rapport de M. Melzer consacrée à l’impunité des acteurs non étatiques qui pratiquent la torture.  Elle a également fait la différence entre la torture et des formes de violence qui, si elles ne sauraient être tolérées, ne peuvent pas non plus être assimilées à la torture.

L’État de Palestine a mentionné les mauvais traitements que la population palestinienne subit sous l’occupation et notamment ceux imposés aux enfants placés en détention dans des installations connues pour avoir pratiqué la torture.  Étant donné la poursuite des actes de violence contre les Palestiniens détenus et l’impunité dont bénéficient leurs auteurs, quelles pourraient être les mesures à prendre?  La République arabe syrienne a, elle aussi, mentionné le traitement réservé aux Palestiniens par Israël ainsi que les actions de ce pays dans le Golan occupé, avant de s’en prendre aux « actions de l’Administration américaine » en Syrie, qu’elle a condamnées.  Le représentant a également évoqué les accusations et nombreuses plaintes concernant des tortures commises par les États-Unis, en particulier à Guantanamo.  Il a aussi évoqué sa préoccupation quant au sort des enfants séparés de leurs familles.

Les États-Unis ont énuméré différents pays où des cas de torture avaient été rapportés: Fédération de Russie, République islamique d’Iran, Chine, Venezuela, etc.  Ils ont demandé à ces pays de respecter leurs obligations et leurs engagements.

Réponses

Dans ses réponses, M. MELZER a rappelé les recommandations du Conseil des droits de l’homme relatifs aux systèmes de collectes des données.  Il a expliqué que les pratiques optimales pour cette collecte pouvaient varier, tout comme les besoins, mais que le plus important, pour collecter des données représentatives et de qualité, consistait à prévoir des procédures individualisées pour chaque personne qui pourrait avoir subi des actes de torture et de mauvais traitements.

M. Melzer a expliqué que beaucoup de migrants étaient victimes d’actes de torture ou de mauvais traitements et que le nombre connu des victimes n’était que la partie visible de l’iceberg.  Il faut donc mettre en place une évaluation individuelle pour chaque migrant.  Aux questions de l’Union européenne sur les migrations, le Rapporteur spécial a répondu en soulignant la nécessité pour les États de se concentrer sur le développement de voies légales pour permettre une migration sans discrimination.  « C’est l’absence de ces flux non réglementés qui pousse les gens vers les réseaux clandestins dans lesquels ils peuvent faire l’objet de violences et de mauvais traitements, et commettre des violations du droit, ce qui entraîne un cercle vicieux et mène à des situations inacceptables », a-t-il ajouté, avant de conclure en faveur d’une dépénalisation de la migration ordinaire.  Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas la réglementer, mais que la criminaliser n’est pas la bonne solution.

À la Suisse qui s’interrogeait sur les groupes marginalisés qui courent les plus grands risques de torture, le Rapporteur spécial a répondu que cela dépendait du contexte, parfois aussi de la manière dont sont perçus ces groupes, notamment les personnes lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes (LGBT) ou les handicapés.  Il est donc difficile de donner une réponse générale.

Concernant les actes de violence qui ne seraient pas équivalents à de la torture, M. Melzer a répondu que, quand une pratique de violence privée est connue et que les autorités gouvernementales ne font rien pour protéger les populations, cela ne veut pas dire que la Convention contre la torture pourrait avoir été violée.  Cela étant dit, il a appelé à être plus précis et s’est dit prêt à examiner cette question pour voir quand c’est le cas.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: plusieurs délégations africaines font part de leur appui à l’initiative marocaine d’autonomie pour le Sahara occidental

Soixante-treizième session,
7e séance – matin
CPSD/667

Quatrième Commission: plusieurs délégations africaines font part de leur appui à l’initiative marocaine d’autonomie pour le Sahara occidental

La situation au Sahara occidental s’est une nouvelle fois imposée pendant les délibérations de la Quatrième Commission (questions de politiques spéciales et décolonisation), qui poursuivait, ce matin, son débat général au cours duquel une majorité de délégations africaines à prendre la parole se sont prononcées en faveur de l’initiative marocaine d’autonomie. 

Alors que la représentante du Lesotho et celui de l’Éthiopie ont déploré que le Sahara occidental soit la dernière colonie en Afrique, le Botswana s’est dit préoccupé par le manque de progrès pour trouver une issue à cette question, ainsi que par les violations des droits de l’homme et l’exploitation illégale des ressources naturelles du Sahara occidental.

Si les délégations se sont, dans une large mesure, toutes accordées sur les mérites des efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général, M. Hörst Köhler, pour relancer les pourparlers entre le Font Polisario et le Maroc à Genève, les 5 et 6 décembre prochains, elles ont été tout aussi nombreuses à appuyer l’initiative marocaine d’autonomie qui « répondrait aux normes internationales en matière de délégation d’autorité aux populations locales ».

Pour le Gabon, cette initiative présenterait en outre « des perspectives crédibles et rassurantes » permettant de mettre fin à l’impasse actuelle.  La délégation a également estimé qu’un règlement politique de ce différend passe par la coopération entre les États de la région, notamment les États membres de l’Union du Maghreb arabe.

De son côté, le Kenya a rappelé la décision prise par l’Union africaine, lors du Sommet de Nouakchott en juillet dernier, de mettre en place une « Troïka de l’UA » pour appuyer les efforts des Nations Unies au Sahara occidental.  Il a appelé toutes les parties concernées par ce différend à soutenir ce mécanisme, et a été rejoint dans ce sens par la Namibie, ainsi que par l’Ouganda qui a aussi cité le rôle de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO).

Les efforts des autorités marocaines en faveur du développement du Sahara occidental, les projets socioéconomiques et d’infrastructures, ainsi que les progrès accomplis en matière de droits de l’homme ont été soulignés par de nombreuses délégations africaines, notamment le Sénégal.

De plus, dans le contexte général de la lutte contre le terrorisme, le Burkina Faso s’est déclaré convaincu que la résolution de la question du Sahara occidental permettra aux États de la région d’unir leurs efforts et de lutter efficacement contre le fléau de l’insécurité.

Les débats de cette séance ont également été marqués par l’intervention du Royaume-Uni qui a dit sa volonté d’impliquer pleinement ses territoires au processus de négociation du Brexit pour veiller à leurs intérêts, notamment par le biais d’un Conseil ministériel conjoint.

Étant donné l’intérêt spécifique que cela représente pour Gibraltar, un Conseil ministériel conjoint Royaume-Uni-Gibraltar a également été mis en place pour examiner les priorités du Rocher, a précisé la délégation, qui a par ailleurs souligné que le « Royaume-Uni ne participera à aucun engagement qui ferait passer le peuple de Gibraltar sous la souveraineté d’un autre État sans son consentement ».

Dans le cadre d’un droit de réponse, l’Espagne a fait observer qu’une fois que le Royaume-Uni aura abandonné l’Union européenne dans le cadre du Brexit, aucun accord entre le Royaume-Uni et l’Union européenne ne pourra s’appliquer aux négociations entre l’Espagne et le Royaume-Uni.

Dans son intervention, la délégation britannique a également touché mot de la situation dans l’archipel des Chagos, « qui a été britannique depuis 1814 », mettant en avant l’enveloppe de 40 millions de livres sterling décidée par son gouvernement pour y améliorer les conditions de vie.  Elle a également souligné les enjeux stratégiques de l’archipel, où se trouve un dispositif de défense Royaume-Uni-États-Unis.

Maurice, qui dispute la souveraineté britannique sur ces îles, a toutefois fait part de ses attentes au sujet de l’avis consultatif que doit prochainement rendre la Cour internationale de Justice (CIJ) sur « le droit à l’autodétermination des populations déplacées de l’archipel de Chagos par la Puissance occupante de 1968 à 1971 », après la tenue d’audiences publiques en septembre de cette année.

« Nous sommes convaincus que l’avis consultatif de la Cour international de Justice devra être suivi d’effets pour en finir avec la décolonisation », a affirmé la délégation, avant que le Royaume-Uni ne fasse observer, dans le cadre d’un droit de réponse, qu’aucun tribunal international n’a remis en question sa souveraineté sur les îles Chagos. 

Outre les Chagos, d’autres situations qui ne figurent pas sur la liste des 17 territoires non autonomes ont été abordées aujourd’hui, notamment Porto Rico, Jammu-et-Cachemire, ainsi que le différend dans le Golfe persique.

En la matière, les Émirats arabes unis, soutenus par l’Arabie saoudite, le Yémen et Bahreïn, ont renouvelé leurs réclamations sur les îles d’Abou Moussa, les Grande et Petite Tomb.  Tout en affirmant ne pas reconnaître l’existence d’un litige de souveraineté sur ces îles, l’Iran a fait savoir qu’il reste néanmoins prêt à parler avec les Émirats arabes unis pour dissiper tout malentendu à ce sujet, et cela dans un souci de relations de bon voisinage dans le Golfe persique.

La Quatrième Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 16 octobre, à partir de 10 heures.

DÉBAT GÉNÉRAL PORTANT SUR LES POINTS RELATIFS À LA DÉCOLONISATION (SUITE)

Déclarations

Pour avoir vécu sous le joug colonial, l’Inde a toujours été aux premières lignes de la lutte contre le colonialisme et l’apartheid depuis sa propre indépendance, a expliqué M. DEEPAK MISRA (Inde).  À ce titre, elle a activement participé à l’organisation de la Conférence « historique » afro-asiatique de 1955, et a coparrainé la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux en 1960.  Elle a également présidé la première session du Comité des 24 en 1962, a encore rappelé le représentant, se réjouissant que, depuis la création de l’ONU, plus de 80 anciennes colonies ont pu accéder à leur indépendance.

Il n’en reste pas moins que 70 ans plus tard, le processus de décolonisation n’est toujours pas achevé, alors même que la Troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme touche à sa fin, a déploré M. Misra.  Il a appelé à redoubler d’efforts pour permettre aux 17 territoires non-autonomes toujours inscrits à l’ordre du jour de cette Commission de finaliser leurs processus de décolonisation respectifs « qui se trouvent à des stades plus ou moins avancés ».  Pour cela, il a plaidé pour un engagement actif de tous les membres du Comité spécial de la décolonisation ainsi que pour une approche pragmatique de la décolonisation à travers une plus grande coopération avec les institutions internationales notamment.

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a souligné que le colonialisme est contradictoire avec les principes et valeurs de la Charte des Nations Unies, ainsi qu’avec la Déclaration des droits de l’homme.  C’est, de plus, contradictoire avec l’esprit de l’époque, a-t-il estimé.  L’histoire nous enseigne que le colonialisme s’épanoui avec le commerce des ressources naturelles des territoires colonisés.  De ce fait, les progrès socioéconomiques et politiques des peuples vivant dans les territoires sous domination coloniale sont entravés.  En outre, le représentant a souhaité féliciter la Nouvelle-Calédonie qui va finalement user de son droit à l’autodétermination via le référendum du 4 novembre prochain.

Poursuivant, la représentante a affirmé que le programme de décolonisation des Nations Unies restera incomplet tant que le différend sur le Jammu-et-Cachemire, un des plus vieux sujets de l’ordre du jour des Nations Unies, ne sera pas résolu.  Le droit à l’autodétermination des peuples du Jammu-et-Cachemire a été reconnu et promis par le Conseil de sécurité, l’Inde et le Pakistan, a-t-il rappelé.  Toutefois, ce peuple attend toujours que les Nations Unies remplissent leur promesse de tenir un référendum supervisé par les Nations Unies.  Tant que cet engagement ne sera pas tenu, cela continuera d’être le plus grand échec des Nations Unies, a-t-elle reproché.

L’Inde a déployé des centaines de milliers de troupes dans le Cachemire occupé, afin de supprimer la liberté légitime du peuple cachemire, a accusé Mme Lodhi.  L’Inde, a-t-elle encore dit, a mis en place un régime de terreur, en employant la violence la plus barbare, afin de priver le peuple cachemiri de son droit à l’autodétermination.  L’avenir du Jammu-et-Cachemire doit être déterminé par les résolutions du Conseil de sécurité, ce qui nécessite de respecter la loi, la moralité et l’exercice de leur droit à l’autodétermination, a-t-elle insisté.

Alors que nous approchons de la conclusion de la Troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme, le Comité spécial de la décolonisation doit prendre des actions concrètes, a-t-elle conclu.

Mme ASMA AL HAMMADI (Émirats arabes unis) a exprimé le soutien de son pays au processus politique en cours pour progresser vers une solution réaliste et négociée au Sahara occidental sous les auspices exclusifs du Secrétaire général et de son représentant.  Dans ce contexte, elle a salué l’initiative de l’Envoyé spécial du Secrétaire général d’organiser une table ronde à Genève, les 5 et6 décembre prochains, et réaffirmé l’attachement de son État à l’intégrité territoriale du Royaume du Maroc et son soutien à l’initiative marocaine d’autonomie.

En ce qui concerne plus généralement la violation des droits souverains que constitue l’occupation de territoires en violation de la Charte de l’ONU, la représentante a renouvelé les réclamations des Émirats arabes Unis sur le contrôle des trois îles, Grande et Petite Tomb et Abou Moussa, que l’Iran occupe depuis 47 ans.  Elle a appelé l’Iran à répondre aux « appels sincères » de son pays en vue de leur restitution à leurs propriétaires légaux.

M. FRANCISCO ALBERTO GONZALEZ (Colombie) a réitéré le soutien de son pays au droit légitime de l’Argentine par rapport au litige sur la souveraineté sur les « îles Malvinas ».  Il a appelé à la reprise des négociations entre le Royaume-Uni et l’Argentine à travers un processus de dialogue et de coopération en vue de parvenir à une solution pacifique définitive de ce différend.  La Colombie déplore que ce litige n’ait toujours pas été réglé depuis 1965, date de l’adoption de la première résolution sur cette question.

M. ABDALLAH Y. AL-MOUALLIMI (Arabie saoudite) a regretté le fait que de très nombreux territoires n’ont toujours pas été décolonisés.  Depuis la création des Nations Unies, l’Arabie saoudite a tout fait pour défendre l’autodétermination des peuples.  Il a réaffirmé le droit du peuple palestinien à exercer son droit légitime à créer un État indépendant, conformément aux frontières de 1967.  Les Nations Unies doivent s’acquitter de leur responsabilité et mettre fin à l’occupation israélienne, y compris dans le Golan, a-t-il souligné.

Le représentant saoudien a ensuite insisté sur la bonne foi du Maroc pour trouver une solution à la situation du Sahara occidental.  « Nous soutenons la solution proposée par le Royaume frère du Maroc, a-t-il déclaré, car l’initiative pour l’autonomie est une solution de compromis, consensuelle et conforme à la Charte des Nations Unies ».  Le Maroc, a encore estimé l’Arabie saoudite, garantit le respect des principes du droit à l’autodétermination.  Le représentant a ensuite rejeté tout effort qui viserait à compromettre les intérêts souverains ou la souveraineté du Maroc.

Le représentant a, par ailleurs, dénoncé l’occupation, par l’Iran, de trois îles des Émirats arabes unis.  Nous réaffirmons la souveraineté des Émirats arabes unis sur ces trois iles, a-t-il déclaré.

Pour M. CHENG LIE (Chine), les territoires non autonomes sont « des reliquats de l’histoire » alors que la Charte des Nations Unies « attend de nous que nous aidions ces peuples à parvenir à l’indépendance ».  C’est dans cet esprit que l’Assemblée générale a adopté la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux et qu’elle a créé un Comité chargé de la question de la décolonisation, a souligné le représentant.  À ses yeux, les questions liées au passé colonial sont complexes et la « pensée coloniale » reste toujours évidente dans les 17 territoires non autonomes.  Pour avancer, la Chine demande aux puissances administrantes de prendre des mesures sur les plans socioéconomiques et de l’éducation, de protéger l’environnement de ces territoires et de dédommager la population locale lorsqu’elles y ont fait des essais nucléaires.

Mme LORATO MOTSUMI (Botswana) a exhorté les Nations Unies à redoubler d’efforts pour éradiquer complétement le colonialisme.  Elle a soutenu le droit du peuple palestinien dans leur combat légitime à l’autodétermination.

La représentante a également souligné que le Botswana appuie le peuple du Sahara occidental dans sa quête pour l’indépendance.  Nous sommes préoccupés par le manque de progrès pour trouver une issue à cette question, ainsi que par les violations des droits de l’homme et l’exploitation illégale des ressources naturelles du Sahara occidental.  Elle a salué les efforts déployés par l’Union africaine et l’Envoyé spécial du Secrétaire général, pour relancer les négociations entre le Maroc et le Front Polisario.  La démocratie et l’indépendance sont des valeurs universelles dont tous les peuples devraient pouvoir jouir, a-t-elle déclaré.

M. NEVILLE GERTZE (Namibie) s’est félicité que 80 anciennes colonies, dont son propre pays, aient gagné leur indépendance depuis la création des Nations Unies en 1945.  C’est à ce titre que le délégué est préoccupé de voir que les espoirs placés dans la Mission des Nations Unies pour l’Organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) sont toujours en suspens et que la résolution 658 adoptée par le Conseil de sécurité en 1990 attend toujours d’être mise en œuvre.  « Cet état de fait a été souligné par la récente décision de la Cour de justice européenne qui a stipulé que la situation actuelle déniait au peuple du Sahara occidental le droit souverain sur leurs ressources », a rappelé le représentant.  À cet égard, la Namibie apprécie les efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général, Hörst Köhler, pour relancer les pourparlers entre le Font Polisario et le Maroc, à Genève, en décembre.

Le délégué a ensuite enchaîné sur la situation en Palestine, rappelant qu’on fêtait le cinquante et unième anniversaire de « l’occupation israélienne », pointant l’« échec de la communauté internationale à faire avancer la paix ».  La Namibie a donc exhorté le Gouvernement israélien à mettre en œuvre toutes les résolutions en attente et a appelé à faire tous les efforts possibles pour relancer des négociations sur le statut de ces territoires.  Il a enfin souhaité une réconciliation intrapalestinienne autour de leur gouvernement légitime.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a souhaité que les Nations Unies accélèrent le processus de décolonisation entamé en 1961.  À cet effet, il a appuyé la proposition de la Quatrième Commission d’élaborer, avec les autorités administrantes et les territoires non autonomes, un programme de travail constructif sur la base d’un examen au cas par cas de toutes les situations.

Sur la question du Sahara occidental, il a soutenu le travail en cours mené sous l’égide du Secrétaire général pour parvenir à une solution politique mutuellement acceptable.  Il a notamment félicité la mission de facilitation menée par M. Horst Köhler, l’Envoyé spécial du Secrétaire général.  Aux yeux du délégué gabonais, il faut œuvrer en faveur d’un règlement politique de ce différend régional et promouvoir la coopération entre les États de la région, notamment les États membres de l’Union du Maghreb arabe.  Il a appuyé l’initiative marocaine d’autonomie qui présente, selon lui, des perspectives crédibles et rassurantes permettant de mettre fin à l’impasse actuelle.  « Il importe que les États voisins y apportent des contributions et renforcent leur participation au processus de négociation en cours », a-t-il ajouté.  Relevant les efforts des autorités marocaines en faveur du développement du Sahara occidental, il a notamment cité les projets socioéconomiques et d’infrastructures, ainsi que les progrès accomplis en matière de droits de l’homme.  D’après lui, la visite en juin dernier des villes de Laayoune, Dakhla et Smara par l’Envoyé personnel du Secrétaire général, ainsi que la convocation d’une table ronde qui se tiendra à Genève, en décembre, entre les parties prenantes démontrent la volonté des autorités marocaines de coopérer pour trouver une solution politique à ce différend.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a affirmé d’emblée que la relation du Royaume-Uni avec ses territoires d’outremer est une relation moderne basée sur le partenariat, des valeurs partagées et le droit de chaque peuple de choisir librement de rester britannique.  Le Royaume-Uni et ses territoires reconnaissent que leur relation a des bénéfices et des responsabilités partagés, a expliqué le représentant.

Indiquant que le Conseil ministériel conjoint est le principal forum pour un dialogue politique de haut niveau entre le Royaume-Uni et ses territoires d’outremer, il a précisé qu’il avait pour mandat de promouvoir les priorités collectives dans un esprit de partenariat.  Le prochain Conseil aura lieu en décembre à Londres, alors que son dernier Communiqué de 2017 avait réitéré l’engagement conjoint du Gouvernement du Royaume-Uni et de ses territoires d’outremer envers un partenariat politique moderne.  Citant des extraits de ce communiqué, le représentant a notamment mis l’accent sur l’importance de la promotion du droit à l’autodétermination des peuples de ces territoires et le fait que le Gouvernement britannique s’engage à réfléchir à la manière dont les territoires d’outremer peuvent maintenir le soutien international leur permettant de faire face à des revendications de souveraineté « hostiles ».  Ce communiqué souligne en outre que les territoires qui le souhaitent peuvent demander à être retirés de la liste des territoires non autonomes de l’ONU avec le soutien du Royaume-Uni.  

Le Royaume-Uni a une relation constitutionnelle unique avec ses territoires d’outremer, a poursuivi le représentant expliquant que les pouvoirs sont décentralisés aux gouvernements des territoires autant que possible.  Son Gouvernement reconnaît toutefois qu’il faut continuer à examiner ces arrangements constitutionnels pour qu’ils correspondent aux meilleurs intérêts des territoires et du Royaume-Uni.

Le livre blanc de 2012 relatif aux territoires d’outremer indiquait clairement que la responsabilité du Royaume-Uni est d’assurer leur sécurité et la bonne gouvernance dans ses territoires d’outremer, a rappelé le représentant. 

Alors que le Royaume-Uni négocie sa sortie de l’Union européenne, il s’est engagé à pleinement impliquer ses territoires au processus pour veiller à leurs intérêts, notamment par le biais d’un Conseil ministériel conjoint sur ces négociations.  Étant donné l’intérêt spécifique que cela représente pour Gibraltar, un Conseil ministériel conjoint Royaume-Uni-Gibraltar a également été mis en place pour examiner les priorités du Rocher.  Le Royaume-Uni ne participera à aucun engagement qui ferait passer le peuple de Gibraltar sous la souveraineté d’un autre État sans son consentement, a-t-il précisé.

Le représentant a ensuite affirmé que le développement démocratique dans les territoires d’outremer du Royaume-Uni se poursuit, précisant que des élections avaient eu lieu aux Iles Caïmans en mai 2017, aux Bermudes en juillet 2017, à Ste Hélène en juillet 2017 et dans les îles Falkland en novembre 2017.

Dans la foulée, il a affirmé n’avoir « aucun doute » sur sa souveraineté sur du Royaume-Uni sur les Iles Falkland et les aires maritimes qui les entourent, ni sur le droit à l’autodétermination de la population qui y vit.  Le referendum de 2013 a indiqué que 99,8% des habitants de ces îles souhaitent maintenir leur statut actuel, et, pour le Royaume-Uni, il n’y aura pas de dialogue sur la souveraineté de ces îles tant que les habitants de ces îles ne le souhaitent pas.  « Il faut respecter leur volonté », a-t-il lancé à la salle.

S’agissant de l’archipel de Chagos, « qui a été britannique depuis 1814 », le représentant a rappelé qu’aucun Tribunal international n’avait remis en cause cette souveraineté et a annoncé que le Royaume-Uni avait décidé une enveloppe de 40 millions de livres sterling pour améliorer les conditions de vie sur l’archipel.  Rappelant qu’un dispositif de défense Royaume-Uni -États-Unis se trouve sur ce territoire, il a souligné les enjeux stratégiques pour la sécurité régionale et mondiale.

M. JAGDISH DHARAMCHAND KOONJUL (Maurice) a déploré que trois ans avant la fin de la Troisième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme, 17 territoires non autonomes demeurent toujours inscrits à l’ordre du jour de cette Commission.  Il a pris note de l’évolution de la situation au Sahara occidental, notamment grâce au rôle joué par l’Envoyé personnel du Secrétaire général.  Nous soutenons l’initiative d’autonomie proposée par le Maroc, a-t-il déclaré.

Le représentant s’est également félicité de la décision de l’Union africaine de soutenir une troïka pour trouver une solution et a appelé toutes les parties à soutenir les efforts à cette fin.  Cependant, il s’est déclaré préoccupé par la fin du mandat de la MINURSO à la fin du mois.  À cet égard, il a estimé que son mandat ne devrait pas se limiter au maintien de la paix et devrait permettre d’organiser le référendum.

Le représentant de Maurice a ensuite abordé la question de l’archipel des Chagos.  Il a noté que 20 États Membres ont participé à l’audience publique qui a eu lieu, en septembre 2018, à la Cour internationale de Justice, à La Haye.  Les juges ont délibéré sur cette affaire, concernant le droit à l’autodétermination des populations déplacées de l’archipel de Chagos par la Puissance occupante de 1968 et 1971.  « Nous sommes convaincus que l’avis consultatif de la Cour international de Justice devra être suivi d’effets pour en finir avec la décolonisation », a dit le délégué.  C’est un fléau qui devrait peser sur la conscience des puissances administrantes, a-t-il déclaré.

Mme MARÍA ANTONIETA SOCORRO JÁQUEZ HUACUJA (Mexique), a regretté que le colonialisme ne soit toujours pas relégué au passé et a souligné le travail qui reste à faire pour achever la décolonisation des 17 territoires non autonomes toujours inscrits à l’ordre du jour de la Commission.  Elle a invité la Commission à attirer l’attention de l’Assemblée générale sur le droit légitime de la souveraineté de l’Argentine sur les îles Malvinas et les espaces maritimes environnants, ainsi que sur la nécessité de trouver une solution juste, pacifique et durable à ce différend de souveraineté de longue date.  Dans cet esprit, le Mexique appelle à une reprise des négociations entre le Royaume-Uni et l’Argentine sans plus tarder.

S’agissant de la question du Sahara occidental, la représentante a soutenu le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui à travers un référendum avec toutes les options possibles. 

M. ALI ANDIKA WARDHANA (Indonésie) s’est dit heureux que son pays ait pris part à la mission de visite que le Comité spécial de la décolonisation a effectuée en Nouvelle-Calédonie cette année.  Il a salué le Gouvernement français et le peuple calédonien pour leur « travail exemplaire » et émis l’espoir que le référendum, prévu pour le mois prochain, sera organisé de manière libre, juste et pacifique, conformément à l’Accord de Nouméa.  Le représentant a d’ailleurs accueilli avec satisfaction les mesures prises pour intensifier le dialogue entre le Comité spécial et les puissances administrantes et autres parties prenantes.  Il a notamment salué la proposition du Secrétaire général et de son Envoyé personnel pour le Sahara occidental de tenir des négociations au mois de décembre.  Le représentant a prévenu que ce n’est qu’en se concentrant sur les 17 territoires non autonomes qu’il sera possible de faire des progrès en matière de décolonisation.  Il a mis en garde contre la tentation de « s’aventurer » dans des territoires qui ne figurent pas sur la liste du Comité.  Il est important, a-t-il insisté, de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des États, conformément à la Charte et aux résolutions pertinentes de l’Assemblée générale. 

Le représentant a notamment cité le paragraphe 6 de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et peuples coloniaux: « Toute tentative visant à détruire partiellement ou totalement l'unité nationale et l'intégrité territoriale d’un pays est incompatible avec les buts et les principes de la Charte des Nations Unies ».  Le processus de décolonisation, a-t-il conclu, doit se faire dans le cadre des Nations Unies et au cas par cas.  Il n’y a pas de solution à taille unique et toutes les parties doivent être encouragées à dialoguer avec les organes pertinents de l’ONU ou dans le cadre des relations bilatérales pour trouver des solutions mutuellement acceptables, a ajouté le représentant. 

Mme ALYAA SALMAN (Bahreïn) a regretté que malgré tous les efforts, le peuple palestinien ne puisse être en mesure d’exercer son droit à l’autodétermination.  Elle a insisté sur la nécessité de trouver d’appuyer la solution des deux États.  « Le peuple palestinien doit avoir un État indépendant avec comme capitale Jérusalem. »

Concernant le Sahara occidental, la représentante a soutenu les efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général.  Elle a par ailleurs soutenu les Émirats arabes unis dans leurs efforts pour récupérer les trois îles occupées par l’Iran.

Pour M. MOHAMMAD REZA SAHRAEI (République islamique d’Iran), le processus de décolonisation doit rester une priorité des Nations Unies.  Il les a engagés à s’acquitter de leur responsabilité en prenant des mesures efficaces pour accélérer ce processus, et a exigé des puissances administrantes qu’elles respectent leurs obligations de protéger les ressources humaines et naturelles de leurs territoires.  Les activités de certaines puissances administrantes qui violent les droits des peuples de ces territoires sont une source de préoccupation pour l’Iran, en particulier lorsqu’elles y mènent des activités militaires.  Pour y répondre, il a encouragé l’organisation de plus de missions de visite des Nations Unies dans ces territoires de manière à pouvoir évaluer la situation sur le terrain de première main. Il a appelé les puissances administrantes à coopérer avec le Comité spécial de la décolonisation en ce sens.

Réagissant aux « allégations infondées » des Émirats arabes unis, du Bahreïn et de l’Arabie saoudite concernant les « îles iraniennes » d’Abou Moussa, la Grande et la Petite Tomb dans le Golfe persique, il réitéré la position de principe de son pays, à savoir que l’Iran ne reconnaît pas l’existence d’un litige de souveraineté sur ces îles avec les Émirats arabes unis.  Il reste néanmoins « prêt à parler avec les Émirats arabes unis » pour dissiper tout malentendu concernant l’archipel d’Abou Moussa, et cela dans un souci de relations de bon voisinage dans le Golfe persique.

M. ERIC YEMDAOGO TIARE (Burkina Faso) a apporté son soutien au processus politique en cours sur la question du Sahara occidental mené sous les auspices exclusifs du Secrétaire général et de son Envoyé personnel pour progresser vers une solution réaliste et négociée.  Il a soutenu à cette fin la résolution 2414 du Conseil de sécurité qui souligne la nécessité d’une solution pragmatique et durable et s’est réjoui de l’initiative de l’Envoyé Spécial du Secrétaire général d’organiser une table ronde à Genève, les 5 et 6 décembre prochains.

Dans le contexte général de la lutte contre le terrorisme, le Burkina Faso est convaincu que la résolution de la question du Sahara occidental permettra aux États de la région d’unir leurs efforts et de lutter efficacement contre le fléau de l’insécurité.  En attendant, le représentant a renouvelé son soutien à l’initiative marocaine d’autonomie qui répond, a-t-il estimé, aux normes internationales en matière de délégation d’autorité aux populations locales.  Il a aussi salué les efforts du Maroc en faveur du développement du Sahara occidental.

M. CHEIKH NIANG (Sénégal) a estimé que, concernant le Sahara occidental, l’initiative marocaine d’autonomie demeure un cadre inespéré pour résoudre ce conflit qui existe depuis des années et parvenir à une solution juste.  À cet égard, il a souligné que les pays voisins ont un rôle important à jouer.  Il s’est félicité des invitations de l’Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations Unies, Hörst Köhler, afin de mettre en place la table ronde de la réunion de Genève, prévue en décembre, dans le but de relancer les pourparlers entre le Font Polisario et le Maroc.  En tant que communauté internationale, nous devons garder à l’esprit les avantages nombreux de trouver une solution à ce différend, notamment en ce qui concerne le camp de réfugiés de Tindouf.  Il a en outre salué les progrès faits dans le respect des droits de l’homme et de la démocratie dans le Sahara occidental et a appuyé l’engagement du Royaume du Maroc à trouver une solution pour le Sahara occidental.  

Mme INTISAR NASSER MOHAMMED ABDULLAH (Yémen) a expliqué que le Yémen a toujours dénoncé le colonialisme sous toutes ses formes et encourage des relations pacifiques entre États.  Elle a appuyé les aspirations des peuples colonisés à l’indépendance et à l’autodétermination et a rappelé que le colonialisme entrave la coopération internationale et le développement économique et social des peuples colonisés, « ce qui est contraire à la vocation des Nations Unies ».  Par conséquent, le Yémen appuie les efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour la question du Sahara occidental, et « applaudit » les efforts du Maroc pour parvenir à une solution juste et pérenne à cette question.

La représentante a également exhorté l’Iran à cesser son occupation sur les Îles Abou Moussa, la Grande Tomb et la Petite Tomb dans le Golfe persique

M. COSMOS RICHARDSON (Sainte-Lucie) a dit avoir particulièrement apprécié le fait que les Chefs de gouvernement d’Anguilla, des îles Vierges britanniques et de Montserrat soient venus au Siège des Nations Unies participer à la conférence d’annonces de contributions organisée par la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), après la saison des ouragans de 2017.  C’est dans ce contexte, a dit le représentant, que Sainte-Lucie a approuvé la conclusion du Séminaire régional du mois de mai dernier à la Grenade, qui dit « le changement climatique a exposé de nombreux territoires non autonomes à une vulnérabilité environnementale et économique encore plus grave ».  La conclusion appelle aussi le Comité spécial de la décolonisation à « développer des programmes de collaboration avec les organismes pertinents des Nations Unies, conformément aux résolutions de l’Assemblée générale ».  Sainte-Lucie, a poursuivi le représentant, félicite d’ailleurs la Commission économique pour l’Amérique et les Caraïbes (CELAC) dont les experts ont évalué, en 2017, les chances d’une plus grande intégration de ces territoires dans les programmes et activités des Nations Unies.  L’étude de la CELAC, qui examine la responsabilité de l’ensemble du système des Nations Unies dans le processus de développement durable des territoires non autonomes, doit servir de guide à la mise en œuvre du mandat de la décolonisation dans les deux régions concernées. 

Le Comité spécial, a précisé le représentant, doit faire son travail en tenant dûment compte du « lien organique » entre décolonisation et progrès socioéconomique.  Nous devons, a-t-il estimé, éviter la « répétition des processus » qui consiste à adopter des résolutions sans se préoccuper de leur mise en œuvre.  Le représentant a d’ailleurs cité le Plan de mise en œuvre du mandat de la décolonisation qui, adoptée par l’Assemblée générale il y a dix ans, est toujours « largement ignoré ».  Il a cité, dans la même veine, les trois plans d’action des trois Décennies internationales.  Sans une mise en œuvre des mandats de la décolonisation comme l’analyse au cas par cas de chaque territoire, la liste des territoires non autonomes restera la même, a prévenu le représentant.  Il a demandé au Secrétaire général de soumettre aux États Membres une analyse détaillée des problèmes rencontrés dans cette mise en œuvre et s’il s’est félicité des révisions constitutionnelles entreprises dans certains territoires, il a souligné qu’elles ne sauraient se substituer à un processus « légitime » d’autodétermination menant à une véritable décolonisation et donc à une des trois options à savoir l’indépendance, la libre association ou l’intégration.

M. THOMAS AMOLO (Kenya) a réaffirmé le droit à l’autodétermination des peuples des territoires non autonomes et a appelé à mettre en œuvre les recommandations du Comité spécial de la décolonisation.  Expliquant que le Kenya avait jeté des bases solides pour sa politique internationale depuis son indépendance, il a expliqué que son pays reconnaissait la validité de toutes les options en matière d’autodétermination, à partir du moment où elles sont conformes au souhait exprimé par les peuples concernés.

La décolonisation complète de l’Afrique reste une priorité pour le Kenya, qui respecte les directives de l’UA en ce qui concerne le peuple du Sahara occidental, a-t-il indiqué.  Il a rappelé la décision prise par l’Union africaine, lors du Sommet de Nouakchott, en juillet dernier, de mettre en place une « Troïka de l’UA » qui vise à soutenir les efforts des Nations Unies au Sahara occidental.  Il a appelé toutes les parties concernées par ce différend à soutenir ce mécanisme ainsi que les initiatives de l’Envoyé personnel du Secrétaire général, en particulier son invitation aux parties à participer à des pourparlers à Genève, en décembre prochain.

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a rappelé que le Sahara occidental est le dernier territoire non autonome du continent africain et insisté sur la nécessité de sortir de l’impasse politique par la négociation et de faciliter, à cet effet, la reprise de pourparlers directs entre les parties, qui n’ont, selon lui, pas d’autre choix.  Elle a salué l’engagement du Secrétaire général et du Conseil de sécurité ainsi que les efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour relancer le processus de paix, début décembre, à Genève.  Elle a ensuite encouragé le Maroc et le Front Polisario à confirmer leur participation aux rencontres préliminaires, comme l’ont fait l’Algérie et la Mauritanie.

La représentante a également rappelé que lors de son sommet en juillet, à Nouakchott, l’Union africaine avait établi un mécanisme africain et exprimé la disposition des Chefs d’État et de gouvernement de ses membres à effectivement soutenir le processus en cours sous les auspices de l’ONU.

Considérant que le colonialisme est contraire à la Charte des Nations Unies, M. NTHABISENG MONOKO (Lesotho) a trouvé regrettable que le Sahara occidental demeure la dernière colonie du continent africain.  Son peuple mérite d’avoir le droit de déterminer sa propre destinée, a-t-il insisté.  Il a salué les efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour engager les pourparlers entre le Front Polisario et le Maroc.  Il s’est enfin félicité de la décision de la Cour de justice européenne et de la Haute Cour d’Afrique du Sud à propos de la propriété des ressources naturelles du Sahara occidental.

M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela) a salué le travail de la récente mission du Comité spécial des Nations Unies sur la décolonisation en Nouvelle-Calédonie à l’occasion de la préparation du référendum d’autodétermination et a souhaité que la Commission envoie des missions similaires dans les territoires de Montserrat, Anguila et des Samoa américaines, appelant les puissances administrantes de ces territoires à coopérer avec les Nations Unies.   

Le représentant a appelé à une résolution négociée au Sahara occidental, dans le cadre des résolutions pertinentes de l’ONU, et appuyé les efforts récents de l’Envoyé personnel du Secrétaire général en faveur d’une conférence à Genève les 5 et 6 décembre.  Il a ensuite dénoncé, dans sa région, le cas de Porto Rico, un exemple de « domination coloniale qui dure depuis un siècle », au mépris du droit à l’autodétermination et à l’indépendance de son peuple.  Il a réitéré, par ailleurs, la solidarité du Venezuela avec les peuples des territoires non autonomes des Caraïbes frappés par le passage des ouragans et appelé les puissances administrantes à exercer leurs responsabilités en matière d’infrastructures, d’éducation et d’hygiène dans les territoires affectés.

Rappelant qu’il reste 17 territoires non autonomes sur le globe, M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) s’est joint à d’autres délégations pour demander une évaluation objective de ce qui a été accompli depuis le lancement de la Troisième Décennie internationale de l'élimination du colonialisme et ce qu’il reste à accomplir pour parvenir aux cibles fixées par la résolution 65/119 adoptée en 2011 par l’Assemblée générale. À cette fin, le délégué a souligné l’importance du travail de la Quatrième Commission, et tout particulièrement la visite qu’elle a rendu à l’un de ces territoires non autonomes afin d’avoir une meilleure perspective de l’organisation du référendum à venir.  Remerciant la Puissance administrante concernée pour son accueil, il en a profité pour rappeler à toutes les autres qu’il leur revenait de favoriser les progrès sociaux, économiques et éducatifs des peuples de ces territoires.  Il a particulièrement insisté sur la nécessité de soutenir l’éducation et l’apprentissage des étudiants vivant là-bas.  Quoi qu’il en soit, il les a tous encouragés à coopérer avec cette commission et faciliter son travail sur le terrain, mais aussi à développer un programme de travail au cas par cas se basant sur son mandat et les résolutions des Nations Unies.

M. PHILIP OCHEN ANDREW ODIDA (Ouganda) a apporté le soutien de son pays à la position africaine sur le Sahara occidental en renouvelant sa préoccupation quant au statut toujours non résolu de ce territoire.  À cet égard, il a accueilli avec satisfaction l’établissement d’un mécanisme incorporant la Troïka de l’Union africaine pour mieux soutenir les efforts des Nations Unies.  Le délégué s’est dit résolument convaincu de la nécessité de parvenir à une solution politique en impliquant le peuple sahraoui sous la supervision de la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO).  C’est d’ailleurs pourquoi l’Ouganda soutient le prolongement du mandat de ce dispositif onusien, « tout particulièrement à un moment où il semble y avoir de nouveaux développements dans le paysage politique. »

M. MICHEL TOMMO MONTHE (Cameroun) a réaffirmé le soutien de son pays au processus politique en cours au Sahara occidental, sous l’égide du Secrétaire général, ainsi qu’aux efforts de son Envoyé personnel, M. Horst Köhler, qui, « depuis sa prise de fonctions, a su imprimer un nouvel élan à ce processus ».  Le Cameroun encourage les États voisins à participer à ces efforts, estimant que « la paix au Sahara occidental, c’est renforcer l’entente, l’amitié et la fraternité entre le Maroc et l’Algérie, mais c’est aussi construire cette grande région en y renforçant la coopération entre ses pays et ses peuples ».  Pour M. Tommo Monthe, cela contribuerait également à l’unité africaine, au développement durable et au grand marché commun africain qu’appelle de ses vœux l’Union africaine dans l’Agenda 2063.  Il a salué l’adoption de la résolution 2414 (2018) du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental.

Mme DULCE SÁNCHEZ DE OROZCO (Honduras) a rappelé son appui à l’Argentine dont elle reconnaît le droit souverain sur les îles Malvinas, les îles de Géorgie du Sud et Sandwich du Sud, ainsi que les zones maritimes afférentes.  S’agissant des Malvinas, elle a appelé à une résolution pacifique du conflit dans le cadre des bons offices du Secrétaire général et de l’Assemblée générale des Nations Unies.

Elle a ensuite indiqué qu’au plan régional, lors de leur Cinquième Sommet, qui s’est déroulé en République Dominicaine, les Chefs d’État et de gouvernement de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) ont souhaité que la région devienne un territoire libéré de la colonisation et ont appelé les États à appuyer les efforts de l’organisation en ce sens.

Droits de réponse

Réagissant à l’intervention du Royaume-Uni sur Gibraltar, la représentante de l’Espagne a rappelé que l’ONU a soutenu à de nombreuses reprises que Gibraltar est une colonie et qu’il doit être possible de trouver une solution à sa situation.  La représentante a reparlé de la résolution 2353 de l’Assemblée générale qui explique que toute situation qui met à mal l’intégrité territoriale d’un pays est contraire aux buts de la Charte des Nations Unies.  Elle a réclamé la tenue de négociations avec le Royaume-Uni.  De plus, a-t-elle ajouté, les négociations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne dans le cadre du Brexit auront des conséquences sur Gibraltar.  Une fois que le Royaume-Uni aura abandonné l’Union européenne, aucun accord entre le Royaume-Uni et l’Union européenne ne pourra s’appliquer aux négociations entre l’Espagne et le Royaume-Uni, a-t-elle rappelé.

Le représentant du Royaume-Uni a affirmé que le peuple de Gibraltar s’était prononcé en faveur de son engagement envers le Royaume-Uni.  Il a réitéré que le gouvernement du Royaume-Uni ne rentrera pas dans un processus de négociation avec l’Espagne sur cette question.  Il a déploré que le Gouvernement Espagnol se soit retiré des négociations sur cette question en 2011.

Le représentant de l’Argentine a souligné que les îles Malvinas font partie intégrante du territoire national argentin et qu’elles sont occupées de manière illégale par le Royaume-Uni « ce qui a été reconnu par différentes organisations internationales » et une série de résolutions de l’ONU qui reconnaissent l’existence d’un litige de souveraineté et exhortent à la reprise des négociations entre l’Argentine et le Royaume-Uni pour y trouver une solution pacifique. 

L’Argentine rejette le Livre blanc pour les îles Malvinas ainsi que la volonté du Royaume-Uni de faire référence à ces territoires argentins comme s’ils étaient des territoires britanniques d’outremer.  Le représentant a jugé que le principe de l’autodétermination des peuples n’est pas applicable à ce territoire, qualifiant dans la foulée le référendum invoqué par le représentant britannique d’illégitime.  Il s’agissait, a-t-il affirmé, d’un référendum où des sujets britanniques ont décidé de rester britanniques.  Il s’agit d’une distorsion du droit international, à ses yeux, dans la mesure où il n’existe pas un peuple des Malvinas. 

Lui répondant, le représentant du Royaume-Uni, a fait observer qu’il ne saurait y avoir un dialogue sur la souveraineté tant que les habitants des îles Falkland ne le souhaitent pas.  Le Royaume-Uni respecte cette volonté, a-t-il expliqué, reprochant dans la foulée à l’Argentine de continuer à nier les droits fondamentaux de ces habitants.

Répondant aussi à l’intervention de Maurice, il a expliqué n’avoir aucun doute sur la souveraineté du Royaume-Uni sur les îles Chagos, rappelant qu’aucun tribunal international ne l’a remise en question.  Ce territoire est important en matière de défense, notamment pour la lutte contre le terrorisme, a-t-il expliqué avant de se dire déçu que Maurice ait déposé une demande pour avis consultatif devant la CIJ sans consentement du Royaume-Uni.

Reprenant la parole, le représentant de l’Argentine a fait observer qu’à la différence d’autres dossiers coloniaux, aucune résolution sur les îles Malvinas ne mentionne le principe de l’autodétermination.  Il a invité à nouveau le Royaume-Uni à reprendre le plus rapidement possible les négociations avec l’Argentine pour trouver une solution juste et durable à ce litige.

Reprenant la parole, la représentante de l’Espagne a rappelé les termes du Traité d’Utrecht et a souligné que son gouvernement ne reconnaît pas au Royaume-Uni de droits maritimes autres que ceux souscrits en 1713 entre le Royaume-Uni et l’Espagne.  Les eaux environnant Gibraltar sont des eaux espagnoles, et les bateaux espagnols peuvent y naviguer comme depuis toujours, a-t-elle souligné.  Par ailleurs, le référendum d’autodétermination auquel fait référence le Royaume-Uni n’a pas été reconnu par les Nations Unies et on ne peut donc pas l’utiliser pour donner un statut au territoire.

La représentante de Maurice a rappelé que l’affaire des îles Chagos a été portée devant la Cour de justice européenne. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Sixième Commission examine les demandes d’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale de dix organisations

Soixante-treizième session,
14e séance – matin
AG/J/3574

La Sixième Commission examine les demandes d’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale de dix organisations

La Sixième Commission (questions juridiques) a été saisie aujourd’hui des demandes d’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale formulées par dix organisations intergouvernementales et de huit projets de résolution* y afférant.  Elle avait auparavant clos son débat sur le Rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation.

La Commission a décidé de reporter, à sa soixante-quatorzième session, l’examen de l’octroi du statut d’observateur à quatre organisations: Conseil de coopération des États de langue turcique; Union économique eurasienne; Convention de Ramsar sur les zones humides; Fonds pour l’environnement mondial.

Devant l’absence de consensus, elle a également décidé de reprendre à une date ultérieure ses discussions sur l’octroi du statut d’observateur à la Communauté des démocraties.

En revanche, les membres de la Commission se prononceront au cours des prochaines semaines sur les projets de résolution relatifs aux demandes des cinq organisations suivantes: Nouvelle Banque de développement; Conseil international pour l’exploration de la mer; Organisation européenne de droit public; Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures; Groupe de réflexion international sur les pays en développement sans littoral.

En début de séance, les deniers orateurs à se prononcer sur le rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation ont insisté, comme l’Algérie et Maurice, sur le fait les que sanctions ne doivent être appliquées qu’en dernier recours, dans le strict respect des dispositions de la Charte et du droit international.

Si la déléguée des États-Unis a vu dans les sanctions ciblées un instrument important à la disposition du Conseil de sécurité, son homologue de l’Iran a accusé son pays d’être « accro » aux sanctions et de les brandir comme « un instrument au service de ses intérêts nationaux ».  À cet égard, le Conseil de sécurité se doit d’être plus représentatif, ont fait valoir les Maldives, notamment afin de permettre une plus grande participation des petits États en développement au maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Répondant aux délégations qui ont remis en cause l’existence même du Comité spécial de la Charte, l’Uruguay a prévenu que cesser d’appuyer ses travaux reviendrait à remettre ses prérogatives à d’autres organes, alors que l’Assemblée générale demeure le seul organe vraiment représentatif de l’ONU.  Toutefois, pour la Malaisie comme pour les États-Unis, les délibérations du Comité spécial continuent de faire doublon avec les discussions qui ont cours au sein d’autres instances.

La Sixième Commission se penchera sur le rapport annuel de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) demain, mardi 16 octobre, à partir de 10 heures.   

*A/C.6/73/L.2
 A/C.6/73/L.3
 A/C.6/73/L.4
 A/C.6/73/L.5
 A/C.6/73/L.6
 A/C.6/73/L.7
 A/C.6/73/L.8
 A/C.6/73/L.9

RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIAL DE LA CHARTE DES NATIONS UNIES ET DU RAFFERMISSEMENT DU RÔLE DE L’ORGANISATION

Suite des déclarations

D’après Mme LAILA SHAREEF (Maldives), toutes les décisions sur les méthodes de travail adoptées en 2006 devraient être mises en œuvre.  Elle a réaffirmé son soutien au règlement pacifique des différends selon des principes compatibles avec les principes et objectifs énoncés dans la Charte des Nations Unies, soulignant l’importance de respecter le rôle de l’Assemblée générale. 

Le Conseil de sécurité doit être davantage représentatif, a fait valoir la représentante, notamment pour permettre une plus grande participation des petits États en développement à la défense de la paix et de la sécurité internationales.  Par ailleurs, elle a considéré que les sanctions imposées par l’ONU devraient être conformes aux dispositions de la Charte. 

Mme EMILY PIERCE (États-Unis) a noté « la dynamique positive » observée dans les activités du Comité spécial de la Charte, ainsi que la rationalisation de son ordre du jour.  Elle a encouragé les membres du Comité à améliorer encore son fonctionnement afin de faire un meilleur usage de ses ressources et améliorer sa productivité, par le biais notamment de l’organisation de sessions plus courtes.  Le Comité doit s’abstenir de toute discussion qui viendrait dupliquer des discussions menées en d’autres enceintes. 

Évoquant la proposition du Ghana sur le renforcement des relations entre l’ONU et les accords ou organismes régionaux dans le règlement pacifique des différends, la déléguée a espéré que ce pays accueillera favorablement les observations des autres délégations.  Elle a ensuite estimé que les sanctions ciblées demeurent un instrument important à la disposition du Conseil de sécurité, avant de se dire défavorable à l’inscription de nouveaux points à l’ordre du jour du Comité, notamment lorsque ces points peuvent être étudiés en d’autres enceintes.  À ce titre, la déléguée a émis des doutes sur l’utilité pour le Comité spécial de discuter des questions relatives à l’Article 51 de la Charte relatif au droit de légitime défense. 

M. JORGE DOTTA (Uruguay) s’est dit préoccupé par les délégations qui estiment que la Sixième Commission n’avance pas suffisamment pour s’acquitter de ses fonctions de renforcer la capacité d’action du système des Nations Unies sans modification de la Charte.  Il a estimé que le mandat de la Sixième Commission est bénéfique à l’équilibre des différents organes de l’ONU. 

Ne pas appuyer les travaux du Comité spécial de la Charte reviendrait à remettre ses prérogatives à d’autres organes, alors que l’Assemblée générale est le seul organe vraiment représentatif de l’ONU, a argué le représentant.  Le contenu des rapports du Comité suffisant, selon lui, à en démontrer l’utilité, il a souhaité la poursuite de ses travaux, conformément au mandat que lui ont confié les États Membres. 

M. TAREQ MD ARIFUL ISLAM (Bangladesh) a salué l’élan positif observé au sein du Comité spécial s’agissant des moyens pour un règlement pacifique des différends, dans le respect du Chapitre VII de la Charte.  Il a ensuite regretté que plusieurs points soient inscrits depuis de longues années à l’ordre du jour du Comité spécial, l’un l’étant depuis 1999.  Il a appelé les délégations à faire preuve de volonté politique pour y remédier.  Enfin, le délégué a souhaité la poursuite des discussions sur les sanctions, ainsi que la soumission d’une proposition écrite sur les questions relatives à l’Article 51 de la Charte. 

Selon Mme AFZAN ABD KAHAR (Malaisie), les propositions de discussions ou de documents de travail contenues dans le Chapitre II du rapport du Comité spécial de la Charte, intitulé « Maintien de la paix et de la sécurité internationales », feraient doublon avec les discussions déjà tenues dans d’autres cadres des Nations Unies.  Afin de ne pas alourdir sa charge de travail, la déléguée a invité le Comité à se concentrer sur des nouveaux sujets plus pertinents. 

Mme ZAKIA IGHIL (Algérie) a renouvelé son appui au Comité spécial de la Charte en tant que seul organe permanent dédié au renforcement des principes de la Charte.  Elle a salué les efforts déployés par les États Membres afin de renforcer les capacités du Comité spécial.  La volonté politique est fondamentale pour réaliser des progrès sur les questions de longue date, a-t-elle relevé. 

S’inquiétant ensuite des effets des sanctions sur les États tiers touchés par leur application, la représentante a rappelé que les sanctions doivent être mises en œuvre en dernier recours, dans le respect des dispositions de la Charte et du droit international, notamment celles relatives aux pouvoirs et fonctions des différents organes.  Elle a réitéré, en terminant, son attachement aux principes de la Charte sur le règlement pacifique des différends et sur le rôle de la Cour internationale de Justice (CIJ) à cet égard. 

M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) a fustigé les pratiques d’un petit nombre d’États Membres qui recourent illicitement à la force, et estimé que la clarification des dispositions de la Charte sur un tel recours permettrait de renforcer l’Organisation.  Il a rappelé que les sanctions du Conseil constituent un dernier recours et rejeté toute sanction politiquement motivée.  Le délégué a constaté une nouvelle tendance à l’œuvre consistant à menacer ouvertement des pays, comme l’ont fait les États-Unis à l’encontre des pays ayant voté en faveur d’une résolution onusienne, promettant de « prendre leurs noms ».  Cette tendance affaiblit l’ONU, a-t-il dit. 

M. Khoshroo a accusé un membre permanent du Conseil de sanctionner les pays qui ne font que respecter la résolution 2231 (2015).  Plus que jamais, ce pays est « accro » aux sanctions et les voit comme un instrument au service de ses intérêts nationaux, a-t-il déploré.  Enfin, il a indiqué que le Plan d’action global commun, sur le programme nucléaire iranien, malgré le retrait d’un acteur majeur, est toujours « en vie », grâce « au pouvoir de la diplomatie et de la négociation ».  Enfin, le délégué a fustigé les efforts inlassables des États-Unis visant à faire avorter cet accord, avant de rappeler les conséquences négatives des mesures unilatérales prises contre son pays. 

M. PATRICK LUNA (Brésil) a déclaré que les pratiques actuelles mettent en lumière le fait que l’on peut encore améliorer le contenu, les délais et la circulation des communications au titre de l’Article 51 de la Charte, relatif au droit de légitime défense.  Un suivi approprié de ces communications est également nécessaire, afin de s’assurer que les obligations découlant de la Charte sont respectées.  À titre d’exemple, a-t-il dit, il est critique que les États fournissent des informations suffisantes concernant les attaques pour lesquelles ils invoquent le principe de légitime défense.  Alors que la Charte exige que ces informations soient le plus rapidement communiquées, dans la réalité, elles arrivent souvent avec un retard considérable, a regretté le représentant.

Selon M. Luna, le flux d’informations destinées aux États non membres du Conseil de sécurité devrait être amélioré.  Le Brésil a suggéré à cet égard la création, sur le site Internet du Conseil, d’une liste des lettres reçues au titre de l’Article 51.  Il serait également bien que le Conseil tienne un débat ouvert à chaque fois qu’il reçoit une communication à ce sujet, car de telles communications, bien qu’adressées au Conseil de sécurité, intéressent la communauté internationale dans son ensemble.  À ce titre, le Brésil se félicite du débat qui aura lieu au Comité spécial sur les aspects procéduraux de la mise en œuvre de l’Article 51.  Sa délégation estime toutefois que la Sixième Commission devrait, elle aussi, tenir un tel débat, a-t-il conclu.  

M. RISHY BUKOREE (Maurice) a rappelé que le Comité spécial de la Charte a négocié plusieurs textes importants tels que la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends, de même qu’un guide sur cette question.  La réforme entreprise par le Secrétaire général met l’accent sur le règlement pacifique des différends plutôt que sur le recours aux sanctions, a-t-il souligné. 

Selon lui, les sanctions ne doivent être imposées que dans le respect de la Charte et du droit international.  Il a estimé que l’Assemblée générale devrait être consultée sur l’imposition de sanctions, conformément aux dispositions de la Charte, véritable « constitution » de l’ONU, tout en respectant la souveraineté des États. 

Droits de réponse

Le délégué des Émirats arabes unis a exercé son droit de réponse pour rejeter les accusations du Qatar.  Les étudiants qataris peuvent poursuivre leurs activités dans notre pays, a-t-il assuré.  Ils sont 694, même s’ils ont besoin d’une autorisation.  Les mesures prises par mon pays visent le Gouvernement du Qatar, pas sa population, a-t-il conclu. 

Répondant à l’intervention de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), YOUNG-HYO PARK (République de Corée) a indiqué que la Sixième Commission ne constitue pas une instance pertinente pour discuter des questions soulevées.

OCTROI DU STATUT D’OBSERVATEUR AUPRÈS DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE À DIVERSES ORGANISATIONS INTERGOUVERNEMENTALES

Appuyant l’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale à la Communauté des démocraties, le Royaume Uni a fait valoir que cette organisation avait pour objectif de renforcer la coopération des États dans le développement de la démocratie et la promotion des droits de l’homme, une position appuyée par la Pologne.

S’opposant à cette candidature, Cuba a rappelé la nature intergouvernementale de cette organisation et l’a accusée de s’ingérer dans les affaires intérieures des États, considérant qu’elle ne respecte pas les exigences de la Sixième Commission.  À son tour, la Syrie a reproché à la Communauté des démocraties d’établir des liens entre le droit au développement et la conformité aux critères de la démocratie.  En l’absence d’un consensus à la Sixième Commission, le Venezuela, le Nicaragua et la Bolivie ont recommandé le rejet de cette candidature.

Pour sa part, Singapour a souligné l’importance pour la Sixième Commission d’obtenir toutes les informations pertinentes sur cette organisation.

S’agissant de la demande de statut d’observateur pour la Nouvelle Banque de développement, le délégué de la Chine a informé que la Banque possède la personnalité juridique, ses membres fondateurs étant le Brésil, la Fédération de Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud.  Cette Banque, dont toutes les délégations peuvent devenir membres, vise à mobiliser des ressources pour des projets de développement et d’infrastructure dans ces pays précités -les BRICS-, et dans d’autres pays en développement ou émergents.  Son capital de départ est de 100 milliards de dollars.  Le délégué chinois a appuyé cette demande, estimant que la Banque contribue à la réalisation des objectifs de développement durable.

Même son de cloche du côté des délégations du Brésil, de l’Inde, de la Fédération de Russie et de l’Afrique du Sud qui ont pris la parole pour appuyer cette demande.  Les domaines d’intervention essentiels de la Banque seront notamment l’énergie propre, les infrastructures et l’intégration économique, a déclaré le délégué sud-africain.  C’est le premier outil de développement à rayonnement mondial forgé par des économies émergentes, a renchéri le délégué brésilien. 

Présentant ensuite la demande d’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale au Conseil international pour l’exploration de la mer, la Norvège a déclaré que le Conseil serait prêt à contribuer aux travaux pertinents de l’ONU sur l’exploration marine et considéré qu’il répond pleinement aux critères de l’Assemblée générale.  Réitérant l’importance de la conservation de l’environnement, l’Afrique du Sud a soutenu la candidature de cette organisation. 

Le délégué du Portugal s’est dit en faveur du statut d’observateur pour l’Organisation européenne de droit public et a présenté le projet de résolution afférent.  Cette Organisation a été créée en 2007 pour diffuser des connaissances en droit public.  Elle siège en tant qu’observateur au sein de l’Organisation internationale du Travail (OIT) notamment.  Le délégué a déclaré que cette Organisation, comme l’ONU, promeut le dialogue entre les cultures et la bonne gouvernance.

Par ailleurs, présentant le projet de résolution sur l’octroi du statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale à la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures, la Chine a défendu l’éligibilité de cette organisation, tout en soulignant son caractère international.  La Banque assure la promotion du développement économique durable en Asie ainsi que le développement de partenariats régionaux, en collaboration avec des institutions bilatérales et multilatérales, a précisé le représentant.

La Russie, Singapour, l’Afrique du Sud, le Brésil, l’Inde et le Viet Nam ont appuyé la candidature de la Banque, estimant que ses priorités sur l’énergie, les infrastructures et les transports sont pertinentes pour les travaux de l’Assemblée générale et le développement économique de l’Asie.  L’octroi du statut d’observateur à la Banque permettrait également de renforcer ses capacités à l’échelle internationale, ont fait valoir les délégations.

Enfin, abordant la demande d’octroi du statut d’observateur au Groupe de réflexion international sur les pays en développement sans littoral, le délégué de la Mongolie a expliqué que cette organisation s’attache à fournir des solutions viables pour des pays sans littoral, lesquels sont confrontés à des obstacles particuliers.  Le Groupe de réflexion international sur les pays en développement sans littoral sert, ce faisant, les objectifs de développement durable défendus par l’ONU.  À cette aune, il s’est dit en faveur de l’octroi de ce statut, au même titre que ses homologues du Népal et du Paraguay, pour lesquels le Groupe vise à renforcer les capacités des pays en développement sans littoral et à favoriser « des perspectives communes » entre ces pays.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Quatrième Commission: une lueur d’espoir se profile avec l’initiative des pourparlers de décembre de l’Envoyé personnel pour le Sahara occidental

Soixante-treizième session,
6e séance – après midi
CPSD/666

Quatrième Commission: une lueur d’espoir se profile avec l’initiative des pourparlers de décembre de l’Envoyé personnel pour le Sahara occidental

La Quatrième Commission (questions politiques spéciales et décolonisation) a achevé, aujourd’hui, les auditions de pétitionnaires et a repris son débat général sur les questions de décolonisation.  À cette occasion, le nouveau représentant du Front Polisario a annoncé son intention de participer à la table ronde entre parties concernées que l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour la question du Sahara occidental souhaite organiser à Genève les 5 et 6 décembre prochains. 

La reprise du débat général a également été l’occasion pour plusieurs puissances administrantes de faire le point sur leurs actions dans certains des territoires qui demeurent sous leur tutelle.

La France est notamment revenue sur la situation de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française.  À trois semaines du référendum du 4 novembre au cours duquel les Calédoniens devront répondre à la question « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante? » la délégation a assuré que les recommandations du Comité spécial sur la décolonisation, qui avait effectué une mission de visite dans le territoire au mois de mars, avaient été suivies avec une communication de grande ampleur sur la consultation à venir et une sécurisation des meetings électoraux et les lieux de vote.

La Puissance administrante a également assuré que toutes les mesures nécessaires avaient été prises pour garantir à tous les potentiels électeurs une inscription sur la liste électorale spéciale, y compris via le recours aux procédures d’inscription d’office.  Un dispositif exceptionnel sera également déployé le jour du scrutin sous la direction d’une commission de contrôle des opérations de vote qui pourra procéder à une rectification immédiate de la liste électorale si cela s’avère nécessaire.  De réels efforts ont été observés cette année pour parvenir à l’exhaustivité de la liste électorale spéciale, a également assuré la délégation française.

Celle-ci a par ailleurs demandé que la décision d’inscription de la Polynésie française sur la liste des territoires non autonomes soit revue « pour tenir compte de la volonté de sa population ».

La Nouvelle-Zélande est également intervenue pour mettre en avant les relations privilégiées qu’elle entretient avec les Tokélaou.  Son représentant a notamment annoncé 86 millions de dollars d’investissements néo-zélandais dans l’atoll sur les quatre prochaines années pour y améliorer notamment les services publics.  La Puissance administrante a également financé un service de navettes interatoll qui réduira considérablement le temps de transport.

Au préalable, les membres de la Quatrième Commission ont entendu le nouveau représentant du Front Polisario, M. Sidi Omar, insister sur la revendication centrale du peuple sahraoui de pouvoir enfin exercer son droit à l’autodétermination par un référendum. 

Ce dernier a également estimé que les efforts déployés par l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, M. Horst Köhler, avaient insufflé un « nouveau souffle » au processus en cours et a indiqué que le Front Polisario avait accepté l’invitation de ce dernier de participer à des pourparlers, à Genève.

Cette initiative a largement été soutenue par les délégations qui espèrent qu’elle permettra de faire avancer les perspectives d’une solution politique mutuellement acceptable et négociée pour ce différend de longue date.

Comme par le passé, plusieurs pétitionnaires ont toutefois estimé que, contrairement à ses revendications, le Front Polisario n’est pas le représentant légitime du peuple sahraoui.  Ces derniers ont notamment accusé les responsables du Front Polisario de gonfler artificiellement le nombre d’habitants des camps de Tindouf pour, d’une part, justifier leur légitimité d’interlocuteur unique des Sahraouis et, d’autre part, détourner une partie de l’aide humanitaire qui est destinée à ces réfugiés. 

Un autre pétitionnaire a remis en cause la reconnaissance de la « fantomatique république sahraouie » qui ne serait, selon lui, reconnue que par 32 des 193 États Membres de l’ONU.  Cinquante États, « dupés » dans un premier temps par la propagande séparatiste ont retiré leur reconnaissance, et à l’exception de l’Union africaine, aucune organisation régionale ne la reconnaît, ni aucun membre du Conseil de sécurité, a-t-il souligné.

D’autres ont, en revanche, enjoint le Gouvernement espagnol à attribuer un statut diplomatique au Front Polisario en Espagne et à reconnaître la République arabe sahraouie démocratique.  « L’Espagne doit abandonner sa fausse neutralité et appuyer le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination, ainsi que ses droits sur les ressources naturelles du territoire », a notamment affirmé une pétitionnaire.

Le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui a d’ailleurs été fermement défendu à de nombreuses reprises et l’ONU s’est également vu plusieurs fois reprocher de « n’avoir pas tenu sa promesse » s’agissant du référendum que la Mission des Nations Unies pour l’organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) est chargée d’organiser.

S’agissant du statut juridique du Sahara occidental, une mise au point sévère a été faite par un pétitionnaire qui a axé son intervention sur la position de la Cour de justice de l’Union européenne (UE) qui, à quatre reprises, a réaffirmé que le Sahara occidental est bien un territoire distinct de celui du Maroc.  Selon lui, la Cour aurait ainsi clairement rejeté l’interprétation de l’UE visant à conférer au Maroc un statut de « puissance de fait », d’autant plus qu’elle a explicitement fait du consentement du peuple du Sahara occidental un élément fondamental pour la validité des accords commerciaux passés avec le Maroc.

La Quatrième Commission reprendra son débat général lundi 15 octobre, à partir de 10 heures.

DÉBAT GÉNÉRAL PORTANT SUR LES POINTS RELATIFS À LA DÉCOLONISATION (SUITE)

Pétitionnaires sur le Sahara occidental

M. SIDI OMAR, représentant du Front Polisario, a souligné d’emblée que le Polisario est le « représentant légitime du peuple du Sahara occidental ».  Il a expliqué que le processus d’indépendance de ce territoire a été interrompu en 1975 du fait de l’invasion marocaine, un fait, a-t-il affirmé, reconnu par le Conseil de sécurité.  En effet, en octobre 1975, l’une des résolutions du Conseil avait demandé au Maroc de se retirer immédiatement de ce territoire et de veiller au retour des personnes ayant participé à la marche verte, a-t-il expliqué.  Toujours en 1975, l’Assemblée générale avait déploré l’aggravation de la situation dans ce territoire et avait demandé au Maroc de participer à un processus de paix en vue de mettre fin à cette occupation.  Ainsi, pour M. Omar, il s’agit bien d’un fait: « le Maroc occupe le Sahara occidental ».  Réfutant les déclarations cherchant à faire croire le contraire, il a souligné que le fait que la Commission soit toujours saisie de la question du Sahara occidental est bien la preuve que ce processus de décolonisation n’est pas achevé.  De plus, a-t-il noté, elle n’a pas à accepter un état de fait sur le terrain. 

M. Omar a ensuite estimé que les efforts déployés par l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental avaient insufflé un nouveau souffle au processus en cours et a indiqué que le Front Polisario avait accepté l’invitation de ce dernier de se rendre à Genève, en décembre 2018, pour participer à des pourparlers.

À la lumière de certains rapports, le représentant du Zimbabwe a demandé des éclaircissements sur la situation des droits de l’homme au Sahara occidental, « un aspect que le mandat de la MINURSO ne couvre pas ».

Lui répondant, M. Omar a affirmé que ces violations avaient bien été documentées par la communauté internationale et a regretté que la Commission ne les ait toujours pas condamnées. 

Mme KAREN BAEZ, pétitionnaire, a constaté que le Sahara occidental continue à devoir lutter après sa colonisation par l’Espagne et son invasion par le Maroc.  Si le Maroc voulait aider les Sahraouis, ils n’auraient pas besoin de créer un mur de séparation, a-t-elle commenté.  Nous demandons simplement l’indépendance.  Les Sahraouis devraient simplement gouverner leur territoire, a-t-elle déclaré.

M. MOHAMED ALI ARKOUKOU, Free Western Sahara,  a estimé que l’article 49/6 de la Convention de Genève dispose que la puissance occupante ne peut pas déplacer sa population dans un territoire.  Le pétitionnaire s’est demandé pourquoi les Nations Unies se concentrent autant sur Israël et oublient de regarder les activités du Maroc?  Les Marocains ne se cachent même pas de la colonisation du Sahara occidental.  Ils appellent ça la « marocanisation » du Sahara occidental, a-t-il dénoncé.  IL a affirmé qu’au début des années 90, le Gouvernement marocain avait fait venir des familles marocaines et que cette politique se poursuit encore.  De plus, à partir de 18 ans, toute personne a la possibilité d’obtenir un passeport marocain.  À ses yeux, les derniers recensements démontrent la magnitude des activités du Maroc.  Ainsi, la population de Laâyoune est passée de 74 000 au premier recensement, à une population près d’un demi-million de personnes en 2017.  Je ne suis pas un expert en biologie, mais je ne crois pas qu’une population humaine puisse croitre en si peu de temps, a-t-il commenté.

M. SIDI AHMED HORMAT ALLAH, militant de la société civile, a souhaité exposer la vérité sur les conditions économiques et sociales du Sahara Occidental, bien loin, selon lui, de celles exposées devant la Commission.  Ainsi, a-t-il expliqué, la région de Laayoune/Sakia Lhamra se situe au premier rang des régions marocaines avec un revenu annuel par tête de 36 000 dirhams soit 80% au–dessus de la moyenne nationale.  Elle devance donc la région de Casablanca qui totalise à elle seule 70% des activités économiques du Maroc.  Celle de Dakhla/Oued Eddahab arrive en troisième position avec 25 000 dirhams par tête.  N’en déplaise aux opposants du Maroc, ces chiffres ne sortent pas de nulle part mais reflètent les efforts déployés par le Maroc dans cette région, a-t-il affirmé.

M. CHRIS SASSI, de SKC. Inc, a répondu aux déclarations faites hier par certains juristes « au parti pris déclaré ».  Il a dit défendre ceux auxquels on a volé la liberté: le peuple sahraoui qui est victime de l’occupation militaire marocaine.  Il a rappelé que la Cour de justice européenne avait statué, à quatre reprises, sur les accords commerciaux qui lient l’UE et le Maroc et, concernant le statut du Sahara occidental, elle a à chaque fois réaffirmé qu’il s’agit d’un territoire distinct de celui du Maroc, ainsi que d’un territoire non autonome depuis son inscription, en 1963, sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU. 

Plus précisément, a-t-il poursuivi, l’arrêt du 27 février 2018 de la Cour réaffirme que l’inclusion du territoire du Sahara occidental dans le champ d’application de l’accord de pêche entre le Maroc et l’UE enfreindrait plusieurs règles du droit international général applicables aux relations entre l’UE et le Maroc, notamment le principe d’autodétermination.  Aux yeux de la Cour, a-t-il affirmé, compte tenu du fait que ce territoire ne fait pas partie du Maroc, les eaux adjacentes au Sahara occidental ne relèvent pas de la zone de pêche marocaine visée par cet accord.  La Cour, a-t-il encore dit, exclut tout lien de souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental et souligne que le Royaume ne dispose d’aucun mandat au Sahara occidental et rejette clairement l’interprétation de l’UE visant à conférer au Maroc un statut de « puissance de fait ».  La Cour fait également du consentement du peuple du Sahara occidental un élément fondamental pour la validité de ces accords, a conclu le pétitionnaire. 

Pour le pétitionnaire, la démarche de la Commission européenne constitue une dérive et un précédent « très grave » dans la procédure suivie pour la préparation des termes du mandat de négociations, « demeurés curieusement confidentiels ».  Dans ses tentatives d’interprétation de la représentativité du peuple sahraoui, la Commission européenne a dilué l’exigence de la Cour par le recours à une pseudoconsultation de la population locale constituée majoritairement de colons marocains, a-t-il indiqué.

M. AHMED BAQAI, un étudiant pakistanais du Westminster College, a demandé aux Nations Unies de respecter leur promesse s’agissant du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.  Il a estimé que les liens juridiques entre le Maroc et certaines tribus ne permettent pas d’en déduire l’appartenance de ce territoire au Maroc et a reproché au Royaume de ne pas avoir accepté le premier plan Baker, à la suite de quoi, a-t-il rappelé, le peuple sahraoui a accepté le deuxième.  Il s’agit bien à ses yeux d’une question de décolonisation, et les Nations Unies doivent s’acquitter de leur mandat pour sortir de l’impasse actuelle à travers un référendum juste et impartial.

Mme PALOMA LOPEZ BERMEJO, Députée au Parlement européen, a regretté la décision européenne qui octroie au Maroc des droits de pêche dans les eaux du Sahara occidental dans ses accords avec l’Union européenne.  En agissant ainsi, a-t-elle dénoncé, l’Union européenne (UE) interfère dans le travail de l’ONU et appuie de fait l’occupation illégale, par le Maroc, d’un territoire qui doit décider de son avenir.  Elle entérine la non-résolution du conflit et ignore les droits du peuple sahraoui, a-t-elle déploré.  Il est temps de réagir, a-t-elle estimé, avant d’exhorter les États Membres à appuyer l’initiative proposée par l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour relancer les négociations de paix.

Mme MARIA ANTÒNIA SUREDA MARTÍ, Intergroupe parlementaire « Paix et liberté pour le peuple sahraoui », a dénoncé le manque d’espoir et de perspectives dans les camps de réfugiés en raison d’une gestion malheureuse des différentes institutions nationales et internationales responsables de la situation du Sahara occidental depuis plus de 40 ans.  La seule et unique solution pour sortir de cette situation, a-t-elle estimé, est l’organisation d’un référendum.  Plus de déclarations d’intention, plus de documents de travail qui restent dans les cartons, mais un véritable référendum, a-t-elle martelé.

Mme FATMA SEIDA, Région de Laayoune-Sakia El Hamra, a estimé que les élections organisées par le Polisario s’éloignent bien des pratiques démocratiques et des normes internationales.  Lorsque les séparatistes du Polisario ont eu une discussion avec un représentant de l’Union européenne, ils ont été très surpris lorsqu’on leur a dit la vérité, qu’ils refusent d’ailleurs d’entendre, a-t-elle indiqué.  Selon la pétitionnaire, l’Union européenne a indiqué que la Cour de justice européenne ne donnait pas le droit au Polisario d’être une entité ayant un statut juridique, donc, a-t-elle argué, le Polisario ne dispose pas du statut juridique nécessaire pour déposer une plainte.  De plus, le Polisario n’est pas le seul représentant du Sahara occidental, a-t-elle affirmé.

M. MOHAMED AYACH, Commune de Foum El Oued, a mis en exergue les nombreux paradoxes de la situation du Sahara occidental.  Par exemple, l’Union africaine a reconnu le Sahara occidental comme pays membre.  Mais aujourd’hui, seuls 17 pays parmi les 54 États membres de l’Union africaine reconnaissent l’existence du Sahara occidental.  En tant que ressortissant du Sahara occidental, je vous implore de comprendre ce dilemme: soit le Sahara occidental doit soit rejoindre le Maroc, soit accéder à l’indépendance.  Mais comment certains pays peuvent-ils reconnaître une identité qui n’est pas reconnue?  La vérité est que les pays qui reconnaissent cette république qui n’existe pas et qui demandent l’organisation d’un référendum pour assurer l’autodétermination, refusent aussi l’autodétermination des peuples de certains pays en Europe, a-t-il accusé.

M. HAMMADA EL BAIHI, Observatoire du Sahara pour la paix, la démocratie et les droits de l’homme, a demandé un recensement de la population de Tindouf, « une demande qui mettrait le Front Polisario à mal » parce qu’il sait que ce nombre est bien plus bas que les chiffres qu’il avance.  Actuellement, le Polisario affirme que cette population s’élève à 160 000 personnes rien qu’à Tindouf alors même que la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) avait identifié 107 000 électeurs, dont un tiers qui vit au Maroc.  De son avis, tous ces chiffres portent à confusion et ne cherchent qu’à gonfler le nombre d’habitants dans les camps pour justifier la légitimité du Front Polisario comme seul représentant du peuple sahraoui.  Pour le pétitionnaire, il n’y aurait en fait que 45 000 personnes dans les camps.  Il a de plus décrié que les deux tiers de l’aide humanitaire qui leur est destinée sont détournées et revendues sur des marchés parallèles en Afrique, ce qui « remplit les comptes de certains ».

M. SIDI LAAROUSSI DAHI, de Laâyoune, est intervenu en tant que citoyen sahraoui responsable des affaires sociales à Laayoune, une province où, a-t-il affirmé, l’État marocain joue un rôle majeur dans la création d’emplois pour les jeunes et la promotion du développement.  Il a également témoigné du rôle central que joue la société civile dans le domaine social, considérée comme un partenaire majeur par l’État pour le développement dans ces régions. 

M. ZINEDINE EL AABIDINE EL OUALI, ONG 9 MARS, a démenti les assertions du Front Polisario selon lesquelles 80 pays auraient reconnu la « fantomatique république sahraouie ».  En réalité, selon lui, elle n’est reconnue que par 32 pays sur les 193 États Membres de l’ONU.  Selon lui, 50 États « dupés » dans un premier temps par la propagande séparatiste, ont retiré leur reconnaissance: 18 de ces pays sont africains, 18 d’Amérique latine et 14 d’Asie et d’Océanie, a-t-il précisé.  Aujourd’hui seul le tiers des pays africains, soit 19 pays, continue de la reconnaître, plus 11 latino-américains et 2 en Asie.  À l’exception de l’Union africaine, aucune organisation régionale ne la reconnaît, ni aucun membre du Conseil de sécurité, a-t-il souligné.

Mme AGUSTINA VILARET GONZALEZ, Députée du Parlement des Îles Baléares, a condamné la violation des droits humains du peuple sahraoui par le Maroc et dénoncé la paralysie du plan de paix.  Elle a réclamé la mise en œuvre des jugements prononcés dans le domaine économique et a exigé du Gouvernement espagnol qu’il attribue le statut diplomatique au Front Polisario en Espagne et reconnaisse la République arabe sahraouie démocratique.  L’Espagne doit abandonner sa fausse neutralité et appuyer le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination, ainsi que ses droits sur les ressources naturelles du territoire

M. MAALAININE YARA, Laayoune Online, a dénoncé les fausses allégations qu’il a entendues et qui le « rendent malade ».  Concernant, par exemple, les accusations de trafic de stupéfiants, il a fait observer que les plantes nécessaires à la création de la drogue ne peuvent pousser dans le désert et doivent venir des sommets de l’Atlas, « donc du Maroc ».  Ensuite, les activités terroristes dont certains ont parlé sont peut-être le fait de citoyens américains ou européens, mais pas de Sahraouis, a-t-il affirmé.  Enfin, en ce qui concerne les élections, il a estimé que les personnes ne peuvent pas choisir leurs élus.  Dire le contraire est un mensonge, et, de toute façon, les gens sont payés pour aller voter aux élections, a-t-il conclu. 

Débat général

M. MAX H RAI (Papouasie-Nouvelle-Guinée), s’exprimant au nom de Melanesian Spearhead Group(MSG), a relevé, pour s’en féliciter, que dans 21 jours, 174 000 électeurs allaient décider de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, pour la première fois en près de deux siècles.  Il a souligné les progrès enregistrés dans un esprit de conciliation entre les parties prenantes, avec l’appui de l’ONU.  Les défis restent élevés et rien n’est gagné, a-t-il toutefois reconnu, appelant à rester vigilant pendant cette période et en particulier le jour de la consultation.  Il a également appelé à maintenir un dialogue pacifique entre les parties et à encourager un esprit de coopération.

M. Rai s’est toutefois dit préoccupé du fait que certains électeurs kanaks ne soient pas enregistrés, « car les autorités ont du mal à vérifier leur adresse locale ».  Il a demandé au Secrétariat de l’ONU d’expliquer en quoi consisterait le rôle d’observateur du Département des affaires politiques de l’ONU, qui a reçu une invitation de la part de la Puissance administrante.  Il a jugé préférable de déployer des membres de la Quatrième Commission sur la décolonisation et a appelé à maintenir la Nouvelle-Calédonie sur la liste des territoires non autonomes.

M. JEAN-HUGUES SIMON-MICHEL (France) est revenu sur la situation de deux territoires français: la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française.  À trois semaines du référendum qui portera sur la question « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante? » il a trouvé utile de préciser que, pour la deuxième fois en quatre ans, le Comité spécial sur la décolonisation s’est rendu dans l’île.  Il a pu constater, d’après le délégué, l’ensemble des mesures prises dans les domaines politique, socioéconomique, culturel et éducatif pour assurer la mise en œuvre des Accords de Nouméa.  Par ailleurs, il a assuré que les recommandations du rapport du C24 avaient été suivies avec une communication de grande ampleur sur la consultation à venir, une sécurisation des meetings électoraux et des lieux de vote, un financement d’un centre d’accueil pour victimes d’agression, en particulier sexuelle, et un accompagnement des politiques éducatives et de gestion des ressources naturelles.  Il a également noté que, à la demande de la France, des experts de l’ONU avaient été conviés sur l’île avant et pendant le scrutin afin d’observer le bon déroulement de ses préparatifs et du vote en lui-même.  Il a enfin assuré que toutes les dispositions avaient été prises pour garantir à chaque électeur potentiel une inscription sur la liste électorale spéciale.

La Puissance administrante a également assuré que toutes les mesures nécessaires avaient été prises pour garantir à tous les potentiels électeurs une inscription sur la liste électorale spéciale, y compris via le recours aux procédures d’inscription d’office.  Un dispositif exceptionnel sera également déployé le jour du scrutin sous la direction d’une commission de contrôle des opérations de vote qui pourra procéder à une rectification immédiate de la liste électorale si cela s’avère nécessaire.  De réels efforts ont été observés cette année pour parvenir à l’exhaustivité de la liste électorale spéciale, a également assuré la délégation française.

Sur le second sujet, le délégué a remémoré à l’assistance que la Polynésie française, en tant que territoire autonome au sein de la République française, avait expressément demandé, en 2013, son retrait de la liste des territoires non autonomes.  Il a donc souhaité que la décision d’inscription soit revue pour tenir compte de la volonté de sa population.  Menées en présence d’observateurs internationaux, les récentes élections territoriales ont, selon lui, démontré que l’immense majorité des Polynésiens était en faveur de l’autonomie dans le cadre de la République française.

Mme ANAYANSI RODRÍGUEZ CAMEJO (Cuba) a constaté que la situation économique, sociale et humanitaire de Porto Rico demeure préoccupante, un an après le passage des ouragans Irma et Maria en septembre 2017.  L’île ne s’est pas relevée des graves dégâts occasionnés à cette occasion et, à ce stade, seuls 4 milliards de dollars ont été dépensés sur les 62 milliards débloqués par le Congrès.  Et cette somme ne couvrait même pas l’ensemble des dégâts estimés à près de 90 milliards, a-t-elle dénoncé.

Par ailleurs Cuba souhaite défendre le droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination sur la base des principes de la Charte des Nations Unies.  La représentante a également appuyé le droit légitime de l’Argentine sur les îles Malvinas, les Îles de Géorgie du Sud et Sandwich du Sud et les espaces maritimes afférents.

Elle a également dénoncé l’occupation persistante par Israël du territoire palestinien et réaffirmé la solidarité de Cuba avec le peuple palestinien.

M. RODRIGO ALBERTO CARAZO ZELEDÓN (Costa Rica) a réaffirmé le droit légitime de l’Argentine sur les îles Malvinas, les Îles de Géorgie du Sud et Sandwich du Sud et les espaces maritimes afférents et a souligné la justesse de sa revendication.  Il a salué l’amélioration des relations entre l’Argentine et le Royaume-Uni dans différents domaines, notamment leurs efforts, avec l’aide de la Croix-Rouge, qui ont permis d’identifier les restes de soldats argentins non identifiés qui reposaient dans le cimetière de Darwin. 

Au terme de cette enquête, 90 familles ont pu retrouver la dépouille de leurs proches et organiser une cérémonie, s’est-il félicité, insistant sur le caractère important de cette évolution.

Par ailleurs, il a salué les efforts déployés par l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, soulignant que le droit à l’autodétermination est une aspiration suprême des peuples qui implique un lien direct entre souveraineté et démocratie.

M. CRAIG J. HAWKE (Nouvelle-Zélande) a estimé que c’était un moment excitant de l’histoire des relations entre la Nouvelle-Zélande et les Tokélaou.  Au cours de 2018, nous avons mis en place la position d’administrateur, augmenté notre coopération dans le développement des Tokélaou et renforcé notre engagement politique.  Ces développements reflètent l’importance que place la Nouvelle-Zélande dans sa relation avec les Tokélaou et sont un nouveau départ dans son approche, s’est-il félicité.  Ce nouveau départ de la connexion de la Nouvelle-Zélande avec la région du Pacifique, a pour objectif de construire des partenariats plus forts avec nos voisins.

Nous investirons 86 millions de dollars néo-zélandais aux Tokélaou dans les quatre prochaines années, a-t-il déclaré.  D’abord, nous améliorerons les services publics, notamment dans l’éducation et la santé.  Nous avons financé un service de navettes interatoll qui réduira considérablement le temps de transport. Par ailleurs, un câble sous-marin permettra de développer Internet.  Puis, nous allons renforcer la gouvernance et les pratiques administratives, notamment avec plus de transparence et en promouvant la démocratie.  Troisièmement, nous renforçons la résilience face aux impacts des changements climatiques, qui, avec l’augmentation du niveau de la mer, menacent la vie même de nos peuples.  La Nouvelle-Zélande travaille d’ailleurs actuellement sur un projet de réduction des risques d’inondation des côtes lors des tempêtes.

Le représentant a également expliqué que le statut des Tokélaou fait qu’elles n’ont pas accès à des financements qui lui permettraient de lutter contre les changements climatiques, ce qui rend le rôle de la Nouvelle-Zélande d’autant plus important.  La Nouvelle-Zélande est aussi impliquée pour faire entendre la voie des Tokélaou sur le plan niveau international.  Dans sa déclaration au Comité spécial des 24 en juin, le « Ulu » des Tokélaou a noté que si les Tokélaou sont très engagées dans le processus d’autodétermination, il faudra encore de nombreuses années avant que la question d’un autre référendum sur l’autodétermination soit de nouveau considérée par le General Foro – l’Assemblée des Tokélaou.  « Nous continuerons à nous engager à aider les Tokélaou à mettre en place son propre gouvernement », a-t-il assuré.

M. RUDOLPH MICHAEL TEN-POW (Guyana) a tout d’abord salué le rôle des Nations Unies dans le processus de décolonisation.  Cependant, a-t-il ajouté, tant que les 17 territoires non autonomes ne pourront pas exercer leur droit à l’autodétermination, ce processus ne sera pas achevé.  Il a rappelé que la sujétion des peuples à la domination et à l’exploitation étrangères est contraire aux droits de l’homme, notamment parce qu’elle entrave le développement socioéconomique et culturel des populations concernées.  En réitérant le soutien de son pays aux mesures approuvées par l’Assemblée générale vis-à-vis des Deuxième et Troisième Décennies internationales de l’élimination du colonialisme, il a exhorté toutes les puissances administrantes à collaborer pleinement avec les Nations Unies afin de compléter la mise en œuvre des résolutions concernant la décolonisation.  S’il espère voir des progrès mesurables, il a souligné l’importance d’un dialogue continu avec les puissances administrantes, qui ont l’obligation de promouvoir le bien-être des habitants de ces territoires, mais aussi avec le Comité spécial, qui est le vecteur principal du processus de décolonisation.

À propos du Sahara occidental, le délégué a considéré que le bien-être du peuple sahraoui devait être la motivation première pour parvenir à une solution mutuellement acceptable dans le cadre de l’autodétermination.  Après s’être félicité de la rencontre entre les parties qui se tiendra à Genève en décembre, le délégué de Guyana a appelé chaque camp à aborder ces discussions dans un esprit constructif et respectant les résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale sur la question du Sahara occidental.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a enjoint la Commission à redoubler d’efforts dans le traitement des situations de décolonisation, qui nécessitent avant tout, a-t-il souligné, une réelle volonté politique et une approche au cas par cas prenant en considération chaque situation particulière.  Il faut aussi procéder à une évaluation méticuleuse et permanente.

Le représentant a réaffirmé l’appui de son pays à l’Argentine dans ses revendications sur les « îles Malvinas » que des circonstances historiques ont privées du droit à l’autodétermination.  Pour le Pérou, la solution passe inévitablement par la négociation entre les parties impliquées.  Aussi a-t-il appelé les Gouvernements de l’Argentine et du Royaume Uni à reprendre les négociations en vue de parvenir à une solution pacifique, sur la base des résolutions pertinentes de l’ONU.

M. GILBERT TOUANGAÏ (République centrafricaine) a jugé inconcevable, au début du XXIsiècle, que la communauté internationale n’ait pas été en mesure d’appliquer les principes cardinaux de l’autodétermination des peuples et du droit des pays et des territoires coloniaux à l’indépendance.

S’agissant du différend régional maghrébin sur le Sahara, dont le règlement est dans l’impasse depuis 42 ans, il a soutenu le processus politique mené sous les auspices du Secrétaire général et la facilitation de son Envoyé personnel, M. Horst Köhler, en vue de parvenir à un solution politique mutuellement acceptable et négociée.  À ses yeux, il est crucial de souligner l’appel du Conseil de sécurité aux États voisins, en particulier l’Algérie, à « apporter des contributions importantes au processus politique et renforcer leur participation au processus de négociation ». 

La République centrafricaine se félicite de la pleine coopération du Maroc qui a permis, en juin 2018, la visite de M. Köhler au Sahara, en particulier à Laayoune, Dakhla et Smara où il a pu rencontrer des représentants démocratiquement élus des populations du Sahara marocain.

Il a soutenu l’invitation de M. Köhler, notamment à l’Algérie, au Maroc et à la Mauritanie, à une table ronde à Genève les 5 et 6 décembre, et à laquelle le Maroc a accepté de participer.

Mme MARIA DE JESUS FERREIRA (Angola) a rappelé que l’existence du colonialisme, même lorsqu’il prend la forme d’une exploitation économique, est en contradiction avec la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux et la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Notant que le Sahara occidental demeure le dernier territoire non autonome d’Afrique inscrit à l’ordre du jour de la Commission, elle a considéré qu’il était temps d’appliquer toutes les résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité.  À ce titre, l’Angola soutient la décision de la trente et unième session de l’Assemblée de l’Union africaine et les décisions d’Addis-Abeba sur la question du Sahara occidental.  La déléguée a aussi appelé à soutenir l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, M. Horst Kohler, dans ses efforts de médiation pour la tenue de pourparlers entre le Maroc et le Font Polisario au mois de décembre.  Elle a insisté sur le fait que ces négociations visaient à permettre au peuple saharaoui d’exercer son droit à l’autodétermination dans le cadre d’un référendum.  Enfin, elle a souhaité que la Commission spéciale organise une visite au Sahara occidental, à la fois dans les territoires occupés et libérés, mais aussi dans les camps de réfugiés, afin de promouvoir le respect des droits de l’homme.

M. JASSIM AL MAAMDA (Qatar) a estimé que la décolonisation a toujours été une des grandes priorités des Nations Unies et l’un de ses plus grands accomplissements.  Les pays qui ont été décolonisés sont des pays qui ont pu faire valoir leurs droits à l’autodétermination, a-t-il déclaré.  Il a rappelé l’importance de toutes les résolutions relatives à la décolonisation, dont la résolution 1514 de l’Assemblée générale.  « Au vu de l’importance que nous attachons à un règlement pacifique des différends », a-t-il estimé, « il est important d’établir un dialogue avec les parties concernées ».  Il a ensuite rappelé la position du Qatar s’agissant du droit à l’autodétermination du peuple palestinien et a exigé par ailleurs le retrait d’Israël des territoires arabes occupés.

S’agissant du Sahara occidental, le représentant a estimé que le meilleur moyen d’obtenir un règlement durable est de passer par le dialogue et la négociation.  Il faut que la résolution 2414 du Conseil de sécurité soit mise en œuvre pour préserver l’intégrité de la souveraineté de l’État marocain.  L’Assemblée générale devrait veiller à faire aboutir ce règlement, a-t-il conclu. 

Mme ZAKIA RIYAD HASHIM (Iraq) a regretté que certaines puissances administrantes ne mènent pas toutes les consultations comme elles devraient le faire, ni ne fournissent toutes les informations requises au sujet de leurs territoires non autonomes.  Chaque affaire doit être étudiée au cas par cas et chaque résolution mise en œuvre, a-t-elle souligné.  Les puissances administrantes sont responsables des territoires non autonomes et de leur population et chargées de protéger les ressources naturelles de ces territoires, a-t-elle aussi insisté, rappelant également leur devoir de soulager les souffrances humanitaires de ces populations.

La représentante a souhaité l’envoi de missions régulières dans ces territoires afin d’obtenir des informations utiles.  Elle a expliqué que l’Iraq s’était rendu en Nouvelle-Calédonie en mars dernier dans le cadre de la mission de visite du Comité spécial sur la décolonisation.  Elle a félicité le Gouvernement de la France pour sa coopération avec les Nations Unies et pour avoir participé à l’accueil de cette mission.  La France a également facilité les rencontres avec les autorités locales, ce qui a facilité le travail de la mission et lui a permis de préparer son rapport. 

Droits de réponse

Faisant usage de son droit de réponse, le représentant du Royaume-Uni a réagi aux déclarations du Costa Rica et du Pérou.  Nous ne doutons pas de notre souveraineté sur les îles Falkland, a-t-il déclaré, soulignant par ailleurs qu’aucun dialogue ne peut être établi sur la question de la souveraineté à moins que cela vienne des populations elles-mêmes.  Or, le dernier référendum a été clair: la population des Falkland ne veut pas de dialogue sur la souveraineté.

Le représentant de l’Argentine a affirmé que « les îles Malvinas » font partie intégrante de l’Argentine et ont été occupées illégalement par le Royaume-Uni.  Cette occupation illégale a fait l’objet de plusieurs résolutions de l’Assemblée générale, dont la 2656, qui reconnaissent toutes l’existence de ce différend.  Il a estimé que le principe de l’autodétermination des peuples n’est pas applicable à ce différend, qualifiant le « référendum illégitime » organisé par le Royaume-Uni d’« acte unilatéral sans importance ».  La résolution de la question de la souveraineté ne dépend pas d’un soi-disant référendum demandant à des Britanniques s’ils veulent rester Britanniques, a-t-il affirmé.

Réagissant aux propos du Qatar, le représentant de l’Iran a indiqué que l’appellation Golfe persique était légitime et reconnue par les Nations Unies: elle désigne l’étendue d’eau qui sépare la péninsule arabique de l’Iran, a-t-il remarqué.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Troisième Commission débat des moyens de dialoguer avec les peuples autochtones et de promouvoir leur autogouvernance

Soixante-treizième session,
16e séance – matin
AG/SHC/4234

La Troisième Commission débat des moyens de dialoguer avec les peuples autochtones et de promouvoir leur autogouvernance

Renforcer l’autonomie des peuples autochtones par le biais de la gouvernance, tel a été le plaidoyer adressé aujourd’hui devant la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, par la Rapporteuse spéciale sur cette question, Mme Victoria Tauli-Corpuz.

Mme Tauli-Corpuz, qui en avait fait une composante importante de son rapport, a insisté sur la nécessité d’un dialogue entre peuples autochtones, États et tous les autres acteurs concernés, afin de trouver les moyens de renforcer l’autogouvernance des autochtones.  Consciente des difficultés liées à la définition d’un « système d’autogouvernance des autochtones », eu égard à la diversité des nombreuses institutions autochtones, leur histoire respective, le contexte et les luttes menées qui ont permis de les façonner, la Rapporteuse spéciale a toutefois noté de nombreux exemples concluants de systèmes d’autogouvernance établis dans le cadre d’accords formels avec les États.

Ainsi, de nombreux systèmes de gouvernance traditionnelle ont prouvé qu’ils étaient bien plus efficaces pour le bien-être, la paix, la sécurité et le droit des peuples autochtones que l’action d’acteurs externes, a reconnu Mme Tauli-Corpuz.  De tels systèmes de gouvernance sont d’autant plus nécessaires que, comme l’a rappelé la Communauté des Caraïbes, partout dans le monde les personnes issues des peuples autochtones sont souvent plus pauvres que leurs concitoyens non autochtones.  « La réalité est même pire pour les femmes, enfants, jeunes, personnes âgées et personnes handicapées autochtones, plus « privés » que d’autres » a déploré l’organisation régionale.  Au nom des pays nordiques et baltiques, le représentant de la Finlande a fait le même constat et rappelé la nécessité de prendre en compte le besoin de participation des femmes autochtones, des jeunes et des personnes en situation de handicap dans toutes les institutions autochtones.

La Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes promeut la participation des peuples autochtones à la prise de décisions dans les affaires qui affectent leurs droits et insiste sur le devoir qu’ont les États de consulter les peuples concernés par le biais de procédures appropriées.  En son nom, le représentant d’El Salvador a également insisté sur le droit des peuples autochtones à préserver leur propre histoire, leurs idiomes, traditions orales, écritures et littératures.  Un besoin reconnu par l’Assemblée générale qui a fait de 2019 l’Année des langues autochtones, ce dont nombre de pays d’Amérique latine se sont félicités.  La disparition des peuples autochtones, de leurs langues et cultures pourrait représenter une perte encore plus grande que celle de la diversité ou les dommages à l’environnement, a fait observer le délégué du Saint-Siège, alors que le représentant de la Bolivie rappelait que 97% de la population mondiale ne parle que 7% des quelque 7 000 langues répertoriées dans le monde.

Mme Victoria Tauli-Corpuz a d’ailleurs précisé que l’usage de leur langue faisait partie intégrante de la gouvernance des peuples autochtones et a déploré que, lorsque des membres de ces peuples sont confrontés à la justice, ils n’aient pas accès à des services de traduction et ne puissent donc pas se défendre dignement.  Elle a d’ailleurs ajouté que, dans les pays où des systèmes multilingues sont en place, les résultats en matière de justice étaient bien meilleurs.  Plusieurs délégations d’Amérique latine ont mis en avant la pluralité de leurs langues officielles.

Un autre aspect essentiel des droits des peuples autochtones concerne l’accès à la terre et le rapport qu’ils entretiennent avec celle-ci.  « Tous les jours, quelque part dans le monde, les peuples autochtones sont dépossédés de leurs terres ancestrales, territoire et ressources », a déploré la représentante de l’Union européenne. 

Là aussi, les situations sont multiples à travers le monde.  La représentante des Fidji a rappelé que 87% des terres de l’archipel sont des terres autochtones inaliénables alors qu’au Brésil, 12% du territoire national est constitué de terres autochtones.  À cet égard, Cuba s’est inquiétée de voir que l’on continue d’incriminer ces peuples quand ils défendent leur droit à la terre.  Pire, l’Union européenne a rappelé que les personnes autochtones et ceux qui défendent leurs droits sont victimes d’intimidation et d’attaques, et parfois d’assassinats: en 2017, année à ce jour la plus meurtrière pour les défenseurs des droits de l’homme avec 197 assassinats répertoriés, les personnes issues des peuples autochtones étaient très largement surreprésentées.

Pour plusieurs délégations, la solution consiste à associer les peuples autochtones à la gestion des ressources naturelles de leur territoire, pour qu’ils puissent pour le moins, comme l’a dit le Canada, apporter leur consentement en toute connaissance de cause.

Des expériences diverses ont été présentées.  Ainsi, État insulaire confronté aux conséquences des changements climatiques, les Fidji ont dû commencer à évacuer et réinstaller certaines communautés côtières.  Leur représentante a expliqué que la première opération du genre s’est effectuée dans le cadre d’une approche holistique en vue de préserver et maintenir l’identité culturelle de la localité.

Il reste aussi que la définition même de peuple autochtone n’est pas toujours claire.  La représentante du Cameroun a estimé que chacune des 250 ethnies du pays pouvait se considérer comme autochtone dans sa région d’origine, tout en ajoutant que seul le groupe des Pygmées était officiellement considéré comme un peuple autochtone.

Lundi 15 octobre, à 10 heures, la Troisième Commission commencera l’examen de l’ensemble des questions touchant à la protection et la promotion des droits de l’homme et entendra dans ce cadre la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

Déclaration liminaire

Mme VICTORIA TAULI-CORPUZ, Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, a présenté ce qu’elle considère comme l’une des solutions possibles et importantes pour relever les défis auxquels sont confrontés les peuples autochtones à travers le monde: la protection et la promotion du rôle des institutions des peuples autochtones et des moyens de s’autogouverner.  C’est une composante importante de son rapport, qui en traite principalement sous l’angle du développement durable.

Mme Tauli-Corpuz a dit vouloir se concentrer, l’année prochaine, sur la thématique liée aux peuples autochtones et la gouvernance autonome, en « engageant un dialogue avec les peuples autochtones, les États, ainsi que d’autres acteurs pour aboutir à des recommandations sur les moyens de renforcer l’autogouvernance des autochtones ».  Un sujet que d’aucuns jugeront « très compliqué ou même polémique », a-t-elle reconnu.

La Rapporteuse spéciale s’est dite consciente de cette difficulté, ajoutant qu’elle l’avait constatée lors de ses diverses visites de pays, des communications avec les gouvernements ainsi que des études thématiques menées ces cinq dernières années.  Elle a toutefois aussi noté de nombreux exemples concluants de systèmes d’autogouvernance établis dans le cadre d’accords formels avec l’État et reconnus, soit dans la Constitution, la législation et les politiques, soit moins formellement au niveau des hautes sphères de l’État.

Mme Tauli-Corpuz a dit vouloir apprendre davantage de ces exemples car chaque jour apporte un exemple de cette pratique et son impact sur la réalisation d’un développement durable adapté.  Bien plus, ce développement durable est profitable aussi bien aux peuples autochtones qu’à la société au sens large, a plaidé la Rapporteuse spéciale.   

Mme Tauli-Corpuz a également jugé important de comprendre le rôle que les autochtones peuvent jouer dans le développement durable, notamment s’agissant de la bonne gouvernance, la participation et de la nécessité de ne laisser personne de côté, dans le cadre de ce système d’autogouvernance.

La Rapporteuse spéciale a néanmoins reconnu qu’il n’était pas aisé de décrire ou définir un « système d’autogouvernance des autochtones », eu égard à la diversité des nombreuses institutions autochtones, leurs histoires respectives, le contexte et les luttes menées, et qui ont permis de les façonner.  Selon elle, de nombreux systèmes de gouvernance traditionnelle ont prouvé qu’ils étaient bien plus concluants pour le bien-être, la paix, la sécurité et le droit des peuples autochtones que l’action d’acteurs externes.

Enfin, Mme Tauli-Corpuz a fait état des activités qu’elle a menées depuis l’année dernière, notamment ses visites au Guatemala et au Mexique.  Elle a aussi fait part de son inquiétude quant à l’accroissement de la violence et de la criminalisation à l’encontre des peuples autochtones.

Dialogue interactif

Lors du dialogue interactif avec la Rapporteuse spéciale, les Philippines se sont dites d’accord avec ses conclusions sur la résilience des systèmes de gouvernance autochtones et leur cohérence avec leurs cultures, valeurs et traditions.  Un mécanisme d’autogouvernance est d’ailleurs mis en œuvre dans l’archipel par le biais de la Représentation obligatoire des peuples autochtones, au sein de laquelle des communautés autochtones désignent leurs représentants par la sélection et non l’élection.

La Nouvelle-Zélande a rappelé que son Parlement garantissait la représentation des Maoris, tout en reconnaissant que beaucoup restait à faire pour améliorer l’autogestion autochtone.  C’est pourquoi un projet de loi va réintroduire le bien-être au niveau local pour améliorer les conditions de vie des communautés autochtones.  La délégation a demandé à la Rapporteuse spéciale des exemples de bonnes pratiques sur la façon dont les droits des autochtones sont appliqués dans le cadre du Programme 2030.  L’Afrique du Sud a déclaré avoir fait des efforts en matière de reconnaissance des structures traditionnelles des peuples autochtones mais s’est dite confrontée à des défis liées au dialogue avec ces institutions.  Pour y remédier, le Gouvernement a choisi de développer les capacités de ces institutions mais cela ne bénéficie pas nécessairement aux communautés.   En conséquence, elle a souhaité savoir quelles seraient les recommandations de Mme Tauli-Corpuz à cet égard.

Le Canada a mis l’accent sur la nécessité d’associer les peuples autochtones à des processus de prises de décision qui reconnaissent et respectent leurs droits.   Il a par ailleurs demandé à la Rapporteuse spéciale si des obstacles communs au développement de l’autogouvernance autochtone s’étaient fait jour lors de ses échanges avec les États Membres.  Les États-Unis ont affirmé avoir des rapports avec 573 tribus reconnues par le Gouvernement fédéral et tenir compte de leurs spécificités dans l’élaboration de leurs politiques et programmes.  Ils ont en outre organisé des consultations avec les tribus reconnues au niveau fédéral sur le rapatriement d’objets culturels, les violences contre les femmes et les filles, la frontière entre le Canada et les États-Unis et les critères en matière de consultation utiles.   

La Norvège a souhaité en savoir davantage sur le rapport remis au Conseil des droits de l’homme et notamment sur l’approche de tolérance zéro qu’il défend contre les violences visant des défenseurs des droits des peuples autochtones.  Ces derniers, a ajouté la délégation, ont un rôle essentiel à jouer dans la réalisation des objectifs de développement durable, notamment l’objectif 15.  L’Union européenne a dit partager les préoccupations de la Rapporteuse spéciale concernant les violences et la criminalisation dans le domaine des terres, assurant soutenir le travail des défenseurs des droits de l’homme, financer des programmes de renforcement des capacités et promouvoir des mécanismes de dialogue entre les institutions et les peuples autochtones.  À ce sujet, elle a demandé quel devrait être le rôle du secteur privé dans la protection des peuples autochtones et de leurs défenseurs.  

Le Mexique s’est félicité de la visite de la Rapporteuse spéciale et a réaffirmé l’engagement du pays en faveur des droits des peuples autochtones.  Il est disposé à tenir un dialogue constructif dans le domaine des droits de la personne pour les peuples autochtones et entend poursuivre sa collaboration avec le système onusien de protection des droits de l’homme.  Le Mexique souhaiterait en outre connaître les recommandations de Mme Tauli-Corpuz en vue de la célébration des langues autochtones en 2019.

 L’Équateur, qui prépare la visite de la Rapporteuse spéciale en novembre prochain, s’est dit disposé à dialoguer pour mettre en place des mécanismes bénéfiques pour les peuples autochtones.  Il a demandé à la Rapporteuse spéciale comment, dans le cadre de son mandat, elle comptait contribuer à la réussite de l’Année internationale des langues autochtones en 2019.

Le Brésil a jugé l’autogouvernance essentielle à la réalisation des objectifs de développement durable.  C’est un élément fondamental de la politique menée au Brésil, dont 12% du territoire national sont constitués de terres autochtones.  À cet égard, la délégation a souhaité connaître les recommandations de la Rapporteuse spéciale pour adapter au mieux l’autogouvernance aux politiques de santé et d’éducation.   

La Fédération de Russie a déclaré ne pas comprendre les « informations fausses » contenues dans le rapport de Mme Tauli-Corpuz à propos des peuples autochtones sur son territoire.  La Russie est un État fédéral où de nombreux peuples autochtones sont autogérés, a-t-elle fait valoir, ajoutant que la législation russe réglementait l’ensemble des aspects de la vie autochtone et prévoyait des assemblées de représentants des peuples autochtones.  Nous prévoyons aussi la participation de ces groupes dans l’adoption de questions touchant à leurs intérêts, a ajouté la délégation, qui a souhaité qu’à l’occasion de la poursuite de ses travaux, la Rapporteuse spéciale tienne compte de la spécificité des États multinationaux.       

Dans ses réponses, Mme Tauli-Corpuz a expliqué que l’une des principales recommandations de son rapport était d’inviter les gouvernements à travailler de bonne foi dans le cadre d’un dialogue approfondi avec les autochtones pour réaliser les objectifs de développement durable et garantir la mise en œuvre de la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Elle a ajouté que les États qui avaient entrepris ce genre de dialogue avaient rencontré des difficultés, mais qu’en fin de compte l’objectif d’un meilleur partenariat entre l’État et les populations autochtones avait été atteint.

Concernant le secteur privé, Mme Tauli-Corpuz a spécifié que ce dernier devait adhérer à des principes directeurs et mener à bien des processus respectueux dans le cadre des projets et investissements, surtout lorsque ces derniers ont des incidences sur les droits de l’homme ou l’environnement.  Si le respect des droits de l’homme relève en premier lieu de la responsabilité des États, le secteur privé a aussi une responsabilité concernant les droits de l’homme et les droits des peuples autochtones, a-t-elle rappelé.   

La Rapporteuse spéciale a noté qu’en matière de coopération entre États et peuples autochtones, de nombreux exemples existent, notamment dans le cadre de l’éducation, de la santé, des services sociaux fondamentaux et de l’atténuation des risques de catastrophes ou encore de la justice.  Elle a annoncé qu’elle reviendrait sur ces questions dans son prochain rapport car elles ont besoin d’être approfondies et développées.  Mme Tauli-Corpuz a en outre salué les efforts des peuples autochtones auprès des gouvernements pour qu’il y ait des services de santé et culturels et a constaté que les incidences étaient réelles sur les performances des peuples autochtones quand ces derniers étaient pris en compte dans l’élaboration des politiques.   

La Rapporteuse spéciale a remercié l’Assemblée générale d’avoir fait, de 2019, l’Année internationale des langues autochtones.  Elle a mentionné un atelier, tenu en Chine, sur la question et annoncé la publication prochaine d’une déclaration à sa suite.  Elle a également insisté sur le fait que les langues autochtones faisaient partie intégrante de la gouvernance des peuples autochtones et a déploré que, lorsque des membres de ces peuples doivent faire face à la justice, ils n’aient pas accès à des services de traduction et ne puissent donc pas se défendre dignement.  Elle a d’ailleurs ajouté que, dans les pays où des systèmes multilingues sont en place, les résultats en matière de justice étaient bien meilleurs.

Enfin, revenant sur ses recommandations visant à dépasser les obstacles actuels, Mme Tauli-Corpuz a mentionné en priorité le dialogue et l’engagement constructif avec les peuples autochtones.  « C’est la meilleure des approches.  S’il n’y a pas de véritable dialogue établi, les recherches montrent que le coût des projets augmente de 25% parce qu’il faut résoudre une série de conflits. »  La seule solution est que les États mettent en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, a-t-elle conclu.

Discussion générale

M. GLENTIS THOMAS (Antigua-et-Barbuda), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a déclaré que, partout dans le monde, les personnes issues des peuples autochtones étaient souvent plus pauvres que leurs concitoyens non autochtones.  La réalité est même pire pour les femmes, enfants, jeunes, personnes âgées et personnes handicapées autochtones, plus « privés » que d’autres.  C’est pourquoi les États membres de la CARICOM continuent de travailler avec les communautés autochtones, afin de s’assurer que les droits de l’homme et le développement positif leur profitent également.  À cette fin, des interventions stratégiques sont réalisées sur les plans régional et national, à travers divers plans visant à mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

La CARICOM attache une importance « vitale » au travail du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones, dont les financements permettent aux organisations représentatives des peuples autochtones, notamment le Groupe de travail sur les populations autochtones et le Forum permanent de fonctionner, de délibérer et de participer aux travaux des instances des Nations Unies, y compris au Conseil des droits de l’homme.  La CARICOM appelle les donateurs traditionnels et les nouveaux donateurs à continuer de contribuer au Fonds, dont le rôle a été reconnu, notamment dans le renforcement des capacités et de l’expertise de ceux qui en bénéficient, et dans la promotion de la coopération sur le plan international.

La CARICOM salue en outre les efforts du système des Nations Unies pour mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et les conclusions du document final de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones.  L’organisation régionale appelle tout le système des Nations Unies, les organisations non gouvernementales, les gouvernements et toute autre partie intéressée à tout mettre en œuvre pour parvenir aux objectifs de ces deux documents.  Elle attend enfin avec intérêt la célébration de l’Année internationale des langues autochtones en 2019. 

M. RUBÉN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Salvador), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a souligné que celle-ci appuyait la participation des représentants et institutions des peuples autochtones dans les réunions et les organes pertinents des Nations Unies, notamment lorsqu’il s’agit de questions qui les concernent.

Tout en rappelant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le représentant s’est félicité de la décision de l’Assemblée générale de déclarer 2019 Année internationale des langues autochtones et a souligné l’engagement de la CELAC de mettre en œuvre des programmes pour la promotion de ces langues, qui « font partie de nos cultures ». 

La CELAC réaffirme le droit des peuples autochtones à préserver leur propre histoire, leurs idiomes, traditions orales, écritures et littératures.  Elle réaffirme de même le droit des peuples autochtones à participer à la prise de décisions dans les affaires qui affectent leurs droits, ainsi que le devoir des États de consulter les peuples concernés par le biais de procédures appropriées et notamment à travers leurs institutions représentatives. 

Enfin, la CELAC estime que l’autonomisation économique, l’inclusion et le développement des peuples autochtones sont de nature à leur permettre une meilleure intégration sociale, culturelle et politique, et de faciliter ainsi l’édification de communautés durables et résilientes.

M. KAI SAUER (Finlande), au nom des pays nordiques et baltiques, a déclaré, que, pour ces pays, parvenir aux objectifs de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones reste une priorité.  Pour ce faire, ils ont pris une série de mesures visant notamment à accroître la représentativité des peuples autochtones dans divers forums et institutions des Nations Unies.  Parmi ces mesures figurent des contributions au travail du conseiller du Président de l’Assemblée générale sur les questions autochtones.  Les pays nordiques et baltiques ont également participé au processus de consultations sur la participation des peuples autochtones aux travaux des Nations Unies.  Depuis l’adoption de la résolution sur ce sujet en septembre 2017, ils n’ont cessé leurs efforts continus en ce sens, a assuré le représentant.

Le représentant a ensuite jugé important de souligner le droit des peuples autochtones à l’autogouvernement, un des thèmes du rapport de la Rapporteuse spéciale.  Mais les États du groupe insistent en outre sur le besoin de participation des femmes autochtones, des jeunes et des personnes en situation de handicap dans toutes les institutions autochtones.  Il faut également se pencher sur la question des défis qui se posent à ces institutions, notamment le manque de ressources.  Car promouvoir les droits des peuples autochtones et reconnaître les défis auxquels ils sont confrontés est essentiel à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a conclu le représentant.

Mme DÖRTHE WACKER, Union européenne, a estimé que le rapport de la Rapporteuse spéciale confirmait les dires de nombre d’organisations non gouvernementales et d’autres titulaires de mandats de procédure spéciale, y compris sur les défenseurs des droits de l’homme, à savoir que les peuples autochtones et les personnes qui défendent leurs droits sont victimes d’attaques.  Rien qu’en 2017, année la plus meurtrière pour les défenseurs des droits de l’homme, pas moins de 197 meurtres ont été documentés, a rappelé la représentante.  Dans ce total, les personnes issues des peuples autochtones sont représentées de manière disproportionnée, a-t-elle dénoncé.

La Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones (EMRIP) et l’Instance permanente sur les questions autochtones n’ont cessé d’alerter sur le phénomène de l’accaparement des terres, a en outre rappelé Mme Wacker.  « Tous les jours, quelque part dans le monde, les peuples autochtones sont dépossédés de leurs terres ancestrales, territoire et ressources », a déclaré la représentante, déplorant que, très souvent aussi, ces phénomènes aient lieu dans les pays où les droits de ces populations sont censés être protégés, y compris dans la Constitution.

Face à ce phénomène, l’Union européenne estime que l’accaparement des terres résulte de l’absence de responsabilisation et de bonne gouvernance.  Là où ces dernières manquent, « il ne peut y avoir de gestion durable des terres, des ressources et de l’environnement », a déclaré Mme Wacker, assurant de la détermination de l’Union européenne à promouvoir le respect de l’état de droit, la bonne gouvernance et le développement.

À cette fin, les États membres de l’Union européenne ont adopté le nouveau Consensus européen sur le développement, qui réaffirme leur engagement en faveur d’une approche basée sur les droits de l’homme en matière de développement.  L’Union européenne soutient également les Directives volontaires pour une gouvernance responsable du foncier, des pêcheries et forêts.  Elle finance, dans ce cadre, différents programmes dans plus de 40 pays, et à hauteur de 240 millions d’euros, a aussi rappelé la représentante, entre autres initiatives de l’Union européenne.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique), qui s’exprimait au nom du Groupe des Amis des peuples autochtones, a constaté que ces peuples continuent de faire face à d’importantes vulnérabilités partout dans le monde.  Il a souligné à cet égard la nécessité d’accorder une attention particulière aux éléments les plus vulnérables de ces peuples, à savoir les femmes, les filles, les handicapés et les personnes âgées.  Le représentant a par ailleurs jugé fondamentale la participation des peuples autochtones dans la mise en œuvre du Programme 2030.  Tous les États Membres devraient en tenir compte dans leur approche des objectifs de développement durable, a-t-il dit.

M. Sandoval Mendiolea a également encouragé les États, les institutions pertinentes et l’UNESCO à prendre une part active aux célébrations et actions prévues, en 2019, à l’occasion de l’Année internationale des langues autochtones, rappelant que, chaque semaine, une de ces langues disparaît dans le monde.  Le représentant s’est d’autre part félicité de l’engagement des États Membres à réfléchir aux moyens d’améliorer la participation des peuples autochtones aux décisions les concernant.  Il a enfin salué la décision d’étendre le mandat du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones et a appelé les États Membres à l’abonder.

M. AZIZ MOHAMED (Iraq) a affirmé que son pays se réjouissait de la Déclaration finale issue de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones, en ce qu’elle réaffirme le respect et le renforcement de leurs droits.  Il a également salué le rôle important des Nations Unies à cet égard.  L’Iraq se félicite en outre du contenu de la Déclaration et renouvèle son engagement à veiller aux droits de ces peuples et à les promouvoir, afin de leur assurer une vie digne en conformité avec le développement durable, lequel forme le cadre idoine pour la consolidation des droits de l’homme.

M. ROMAN G. KASHAEV (Fédération de Russie) a déclaré que son pays avait toujours appuyé et continuerait d’appuyer les peuples autochtones dans la pleine réalisation de leurs droits.  C’est une priorité de la Fédération de Russie au niveau de la coopération internationale comme en politique intérieure, a affirmé le représentant, qui a ajouté que de nombreuses lois existaient dans son pays pour protéger et promouvoir les droits de peuples autochtones.

M. Kashaev a insisté sur l’importance de la relation entre le secteur privé et les peuples autochtones, expliquant qu’il existe dans son pays de nombreux accords triangulaires entre les organes de pouvoir locaux, les entreprises et les gouvernements.  Il a fait état de l’existence de mécanismes chargés de régler les situations conflictuelles, y compris le calcul des pertes causées par ces entreprises aux biens des peuples autochtones.

Le représentant a par ailleurs déploré des tentatives de politisation des discussions concernant les peuples autochtones et la volonté d’en faire une plateforme politique.  « Toute initiative entraînant les peuples autochtones dans des affrontements artificiels pour en faire des monnaies d’échange est inadmissible » a-t-il conclu. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a présenté quelques bonnes pratiques mises en œuvre dans son pays en faveur des peuples autochtones.  Rappelant son engagement en faveur de la mise en œuvre du Programme 2030, le représentant a souligné les mesures de son gouvernement pour intensifier les processus de dialogue et de concertation avec les peuples les plus vulnérables, dont les peuples autochtones.  Le Pérou a ainsi adopté une loi prévoyant la participation de ces peuples aux principales consultations.  Un groupe de travail associant les sept groupes autochtones les plus importants a par ailleurs été créé pour adapter les services publics aux traditions de ces peuples, a précisé le représentant, qui a expliqué que cette approche interculturelle était une obligation au Pérou.  De même, le pays a récemment adopté une législation établissant un régime de contrôle et de sanctions en cas de contact initial avec des peuples autochtones.  Enfin, une politique nationale visant à garantir les droits linguistiques des locuteurs autochtones a été adoptée en 2017.

Mme NICHOLAS-MACKENZIE (Canada) a jugé nécessaire de renouveler les relations entre les gouvernements et les peuples autochtones, notamment en reconnaissant leurs droits et en les réalisant.  Au Canada, cela signifie les droits naturels ou issus de traités, et le Gouvernement doit s’assurer activement qu’ils sont respectés et réalisés.  Cette reconnaissance, a poursuivi la représentante, est essentielle pour reconstruire des nations autochtones fortes, qui se gouvernent par elles-mêmes pour le bénéfice de toutes les communautés.  Elle passe par un dialogue inclusif et une participation significative.

L’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones a été un premier pas, a poursuivi la représentante, qui a rappelé que ce texte reconnaît qu’il appartient aux États de décider de mesures à prendre pour en achever les objectifs, « en consultation et en coopération avec les peuples autochtones ».  Conformément à ce texte, le Gouvernement du Canada reconnaît aux peuples autochtones le droit de participer aux processus de prise de décisions qui affectent leurs droits, via des institutions représentatives, et dans le cadre de consultations et d’une coopération de bonne foi, afin d’obtenir leur consentement éclairé.  Le Canada est fier de faire partie des nombreux États Membres qui ont commencé de prendre des mesures difficiles pour mettre en œuvre la Déclaration, a poursuivi la représentante, qui a estimé qu’il fallait trouver avec les peuples autochtones les moyens d’explorer de nouvelles idées et de nouvelles voies pour parvenir à des accords qui reconnaissent leurs droits et promeuvent leur vision d’autodétermination, nécessaire pour parvenir à un monde durable pour tous.

Mme ADALI FRIAS (Mexique) a souligné que la question des peuples autochtones était profondément enracinée dans l’identité du Mexique, État multiculturel du fait des circonstances historiques, sociales et politiques.  Le Mexique s’attache à faire en sorte que les peuples autochtones bénéficient le plus possible du développement durable sur le sol mexicain.  Au niveau international, il défend les peuples autochtones au sein de diverses enceintes régionales et multilatérales.  La représentante a ainsi souligné que son pays avait été l’un des acteurs centraux des négociations qui ont abouti à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de 2007.  Il promeut aussi les travaux de la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, de l’Instance permanente de l’ONU sur les questions autochtones et du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones.  Enfin, le Mexique a présenté une initiative, lors de la trente-troisième session du Conseil des droits de l’homme, visant à proroger pour une période, de trois ans, le mandat de la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones.

M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a dit avoir l’honneur de représenter l’un des 23 pays qui ont ratifié la Convention (no 169) relative aux peuples indigènes et tribaux de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Mettant en avant ses bonnes pratiques en matière d’association des peuples autochtones aux décisions les concernant, le représentant a souligné que ces peuples avaient vu leur participation politique augmenter ces dernières années.  À cet égard, il a dressé le portrait de deux femmes autochtones devenues les symboles de cette tendance.  Mme Sônia Guajajara a ainsi été la première candidate autochtone au poste de Vice-Président du pays, tandis que Mme Joênia Wapichana est devenue la première autochtone élue à la députation nationale.  Le représentant a assuré en conclusion que le Brésil travaillait activement à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et était conscient de la nécessité d’associer les peuples autochtones pour y parvenir.

M. FRANCISCO ALBERTO GONZALEZ (Colombie), qui a souligné l’importance du respect des législations internes et des institutions nationales qui garantissent les droits des peoples autochtones, a déclaré que la Constitution colombienne avait joué un rôle important dans la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Ces derniers ont bénéficié en Colombie de décrets qui leur permettent de bénéficier de leurs ressources.  La Colombie a également créé des mécanismes pour protéger les territoires possédés depuis longtemps par les peuples autochtones.  L’État colombien veut assurer la bonne gestion politique et administrative de ces terres et, à cette fin, a mis en place des transferts monétaires vers ces territoires, a ajouté le représentant. 

Le concept de bien vivre prévoit le droit des peuples autochtones de choisir leur modèle de développement, a poursuivi M. Gonzalez.  Le Gouvernement colombien veut garantir la diversité des perspectives, a-t-il ajouté.  La Colombie reconnaît la situation vulnérable dans laquelle se trouvent les peuples autochtones et fait des efforts pour garantir leurs droits, notamment en ce qui concerne le trafic de drogue, ou encore les activités minières et les déboisements illégaux, ainsi que la présence de groupes armés dans le territoire.

M. SILVERMAN (États-Unis) a fait part de la préoccupation de son pays face aux violences que subissent les femmes et les filles autochtones en territoire américain.  Il a fait état à ce sujet d’efforts critiques des autorités fédérales, expliquant que les femmes originaires d’Alaska et de tribus amérindiennes étaient plus sujettes que les autres à ce phénomène.  Selon le représentant, des programmes communautaires offrent aux survivantes des services et des appuis, l’aide fédérale visant, quant à elle, à améliorer la capacité des tribus à assurer la sécurité de leurs communautés. 

En outre, a ajouté le représentant, des enquêtes et poursuites sont engagées dans les cas de femmes autochtones ayant fait l’objet de traite des êtres humains et de disparition.  À cette fin, des procureurs spéciaux sont formés à ce type de procédure et les tribus bénéficient d’un accès croissant aux bases de données fédérales, a-t-il souligné, évoquant également la création d’un groupe de travail associant les États-Unis, le Canada et le Mexique sur ces problématiques.  Il a encore précisé que le Département de l’intérieur travaillait avec des groupes autochtones pour protéger leurs droits, notamment à la restitution de leurs biens.

Mme MERYL MICHELLE DIEDRICKS (Afrique du Sud) a expliqué que le pays continuait à prendre des mesures pour remédier aux défis socioéconomiques entre les communautés liés aux pratiques discriminatoires du passé dont la confiscation des terres, surtout sous l’angle du titre à la propriété.  Elle a ajouté que le Gouvernement d’Afrique du Sud se rendait compte qu’il ne pouvait y avoir de développement économique sans que soit réglée la question de la propriété de la terre.

M. JUAN MANUEL MONGELOS GALEANO (Paraguay) a souligné l’importance des peuples autochtones dans la promotion de son pays, à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières.  Il existe 19 groupes autochtones répartis sur notre territoire et tous font partie du patrimoine du pays, a-t-il insisté, notant que la Constitution nationale établit que le Paraguay est un État multiculturel, avec deux langues officielles, l’espagnol et le guarani.  C’est pourquoi le Paraguay se félicite que 2019 ait été proclamée Année internationale des langues autochtones.  Le pays a prouvé qu’il voulait mettre en œuvre les engagements pris dans le document final de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones, a poursuivi M. Mongelos Galeano, ajoutant que cette mise en œuvre se faisait en étroite collaboration entre les peuples autochtones et les institutions gouvernementales compétentes.  Il a cependant reconnu que beaucoup restait à faire en matière de promotion et protection des droits des peuples autochtones et a réaffirmé l’engagement de son pays dans ce sens.

M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a expliqué que les droits des autochtones étaient protégés par la Constitution de son pays.  Il a rappelé qu’entre 2016 et 2018 le Gouvernement avait consacré un montant de 481 132 dollars au renforcement de la gouvernance territoriale des territoires autochtones.  Concernant la sécurité humaine et sociale, le représentant a expliqué que 31,4% du territoire national et 100% des titres fonciers demandés avaient été attribués à des personnes autochtones ou d’ascendance africaine, ce qui démontre « la volonté de l’État de garantir le bien-être » de ces derniers. 

Mme SUDMALIS (Australie) a souligné le rôle pivot de la femme autochtone dans l’autonomisation des communautés pour la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Souvent, la femme et la fille autochtones ont un parcours différent de celui des femmes non autochtones, notamment au vu des responsabilités qui leur incombent, et ce, depuis le plus jeune âge, a fait valoir la représentante.  Cette situation affecte négativement leur niveau d’éducation et leur accès à l’emploi.  C’est pourquoi le Gouvernement australien a lancé, en collaboration avec le Commissaire à la justice sociale pour les autochtones et insulaires du détroit de Torrès, un dialogue national dans le cadre duquel les femmes et les filles autochtones décrivent leurs forces, défis et aspirations au changement.  L’Australie encourage les idées faisant le parallèle entre l’autonomisation des peuples autochtones et le Programme 2030, a encore déclaré la représentante.

M. DIEGO ALONSO TITUAÑA MATANGO (Équateur) a déclaré que son pays s’était engagé depuis de nombreuses décennies à œuvrer en faveur de la préservation des langues autochtones et de la mise en place de systèmes éducatifs interculturels.  À l’heure actuelle, l’Équateur dispose d’un système d’enseignement interculturel bilingue et d’un cursus national d’éducation bilingue dans toutes les langues autochtones parlées au sein du pays, s’est enorgueilli le représentant, ajoutant qu’en juillet 2018, le pays avait créé un secrétariat du système d’enseignement interculturel bilingue, pour coordonner, gérer et évaluer les politiques publiques dans ce domaine.  De plus, a-t-il dit, l’Équateur a été l’un des pays à soutenir la proclamation de l’an 2019 en tant qu’Année internationale des langues autochtones.

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a rappelé que la Constitution de son pays fournissait le cadre de base pour la protection et la promotion des droits des communautés marginalisées.  Bien plus, la Namibie, est partie à de nombreux traités et conventions qui sauvegardent le droit de tous les peuples.  La législation nationale a été promulguée conformément aux obligations stipulées dans les instruments internationaux.

En Namibie, les défis des communautés marginalisées comprennent, entre autres, l’absence d’accès à la terre de manière sécurisée, en plus d’un bas niveau d’éducation et d’un accès limité aux services de santé.  Le pays a lancé une série d’initiatives relatives notamment à la promotion de l’alphabétisation et de l’emploi à destination des peuples marginalisés.  Il s’agit également de programmes de « réinstallation » à travers le rachat par le Gouvernement d’exploitations agricoles de grande taille, à des fins de réinstallation.  Enfin, le représentant a indiqué qu’en application de la Loi sur les autorités traditionnelles, une communauté traditionnelle pouvait demander à l’État la reconnaissance de ses chefs traditionnels, un élément figurant d’ailleurs dans le rapport de la Représentante spéciale sur les droits des peuples autochtones.

Mme DESIRÉE DEL CARMEN CEDEÑO RENGIFO (Panama) a déploré les progrès limités en matière de protection des droits des peuples autochtones dans le monde et a insisté sur l’importance des efforts à fournir afin d’apporter une vie plus digne aux peuples autochtones.  En juin, le pays a signé un contrat de 80 millions de dollars avec la Banque mondiale pour soutenir la mise en œuvre du plan de développement intégral des peuples autochtones.  Elle a également spécifié que cette initiative, qui contribue à un modèle de développement global défini par le Gouvernement, est une première dans l’histoire du pays en ce qu’elle est le résultat d’un consensus national entre les 12 structures autochtones de gouvernance.

Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a regretté que plus de 10 ans après l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, il existe toujours un fossé inquiétant entre autochtones et non-autochtones aux plans économique et social.  À ses yeux, il est essentiel que les États concernés intensifient leurs efforts pour protéger les droits des peuples autochtones dans la mise en œuvre de leurs priorités de développement.  De plus, a-t-elle ajouté, certains groupes autochtones continuent de subir des traitements injustes, notamment toutes formes de discrimination.  C’est pourquoi la représentante a appelé à multiplier les efforts pour la promotion et la protection de l’identité, la culture et les traditions des peuples autochtones, y compris le droit à une patrie et à la jouissance des ressources naturelles sur leur territoire, dans le cadre de la mise en œuvre de « nos objectifs communs en matière de développement ».  Enfin, Mme Ershadi a pris note avec satisfaction des recommandations faites par la Représentante spéciale sur l’importance de la reconnaissance du système de gouvernance des peuples autochtones et le rôle de ces systèmes pour que ces peuples ne soient pas les laissés-pour-compte.

Mgr TOMASZ GRYSA, Saint-Siège, a déclaré que, malgré les progrès réalisés, l’environnement ainsi que le patrimoine culturel et spirituel des peuples autochtones restaient menacés.  Aux niveaux local et national, les idéologies économiques et coloniales, sous la bannière d’un « soi-disant progrès » continuent de prospérer, sans aucune considération pour les droits des peuples autochtones.  Nulle part ailleurs dans le monde cela n’est plus vrai que dans le bassin de l’Amazonie, où des industries extractives et leurs intérêts ont conduit à dévaster et à dégrader l’environnement par la déforestation et le déplacement des personnes.  Il faut rompre avec le paradigme qui voit dans l’Amazonie et autres régions des sources inépuisables de richesses destinées à être exploitées, a déclaré le délégué, ajoutant que la disparition des peuples autochtones, de leurs langues et cultures pourrait représenter une perte encore plus grande que celle de la diversité ou les dommages à l’environnement. 

Mme MARÍA MAGDALENA CRUZ YÁBAR (Espagne) s’est enorgueillie du fait que l’Espagne soit l’un des seuls pays au monde à avoir élaboré une stratégie de coopération internationale dédiée aux peuples autochtones.  Le pays s’est de plus doté d’un cadre stratégique spécial en la matière, le Programme autochtone, qui dispose d’un budget propre et appuie des actions visant à promouvoir la participation politique des peuples autochtones dans le monde.  La représentante a ensuite expliqué les actions menées par l’Espagne, dans le cadre du Programme autochtone, en faveur de l’application de la Convention (n° 169) de l’Organisation internationale du Travail (OIT), via la promotion d’espaces de dialogue et la prise de mesures multisectorielles de confiance aux niveaux régional et national.

Par ailleurs, Mme Cruz Yábar a souligné que l’Espagne soutenait activement la cause des peuples autochtones dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, comme en attestent la participation et le rôle actif de l’Espagne à la première réunion des Hautes autorités ibéro-américaines sur les peuples autochtones, qui a eu lieu cette année.

M. RODRIGO ALBERTO CARAZO (Costa Rica) a renvoyé à l’article 1er de la Constitution de son pays, qui consacre le caractère pluriethnique et pluriculturel du pays.  À l’issue de deux années d’un processus participatif intense, le Costa Rica s’est, a affirmé le représentant, « acquitté d’une dette historique envers les peuples autochtones », en créant, en mars dernier, un instrument garantissant le consentement libre, préalable et éclairé avec des règles claires quant à leur participation pleine et effective à la prise de décisions à travers le Mécanisme général de consultations des peuples autochtones.

Ce mécanisme de dialogue et de participation avec les 24 territoires autochtones présents sur tout le territoire national est le premier en Amérique latine à avoir été mis au point sur la base du principe du « consentement libre, préalable et éclairé », à la suite de recommandations de la Rapporteuse spéciale et conformément aux normes énoncées dans la Convention (no 169) de l’Organisation internationale du Travail et dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Le représentant a précisé ensuite que la politique publique pour les peuples autochtones (2019-2024) du Costa Rica cherchait à promouvoir les conditions nécessaires à la garantie des droits individuels et collectifs de ces peuples, avec un accent interculturel, intergénérationnel et d’égalité des sexes.  Pour M. Carazo, il est fondamental d’inclure les peuples autochtones, par le truchement de leurs institutions et représentants, dans les activités de mise en œuvre des objectifs de développement durable, pour n’abandonner aucun autochtone sur le bord du chemin.  Le représentant a enfin expliqué qu’il restait encore à parachever un processus de réconciliation. 

Mme LILIANA STEPHANIE OROPEZA ACOSTA (Bolivie) a noté que, depuis l’adoption de la nouvelle Constitution en 2009, son pays était un État social unitaire de droit plurinational, indépendant, décentralisé et interculturel.  En outre, a-t-elle relevé, nous avons adopté une démocratie participative et communautaire et nous reconnaissons les différentes cultures caractérisées par leurs coutumes.

Onze ans après l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, des progrès importants ont été réalisés dans son application en Bolivie, bien que le chemin soit encore long pour sa mise en œuvre effective, a précisé la représentante, qui a jugé particulièrement important de promouvoir et revitaliser les traditions et les langues des peuples autochtones.  À cet égard, elle s’est félicitée que 2019 ait été déclarée Année internationale des langues autochtones, avant de rappeler que 97% de la population mondiale ne parlait que 7% des quelque 7 000 langues répertoriées dans le monde.  Sans mesures adéquates pour sauver les langues autochtones, nous perdrons la mémoire des peuples qui les parlent et contribuerons à la réduction de la pluralité linguistique, a-t-elle averti.

En Bolivie, a précisé Mme Oropeza Acosta, l’État reconnaît 26 nationalités et permet de suivre les programmes éducatifs dans quatre langues en plus de l’espagnol.  « Toutes les sociétés doivent écouter la sagesse ancestrale des peuples autochtones, qui montre comment respecter les formes de vie offertes par la terre nourricière », a encore déclaré la représentante.

Mme ROSA DALITUICAMA (Fidji) a souligné le lien sacré des peuples autochtones avec leur terre et leur environnement.  C’est pourquoi son gouvernement veille à leur fournir toutes les protections qui sauvegardent leur doit à l’autodétermination.  Aux Fidji, 87% des terres sont des terres autochtones inaliénables et la majorité des populations des Fidji sont des autochtones.  Tout comme les autres États insulaires, les Fidji font face aux menaces des changements climatiques et ont identifié près de 63 communautés côtières qui nécessitent une réinstallation en raison de la montée du niveau de la mer.  La représentante s’est félicitée que la première réinstallation de telles communautés, qui a concerné le village de Vunidogoloa en 2014, ait été menée dans le cadre d’une approche holistique en vue de préserver et maintenir l’identité culturelle de la localité.  Même le cimetière a été déplacé, a-t-elle fait observer.

M. AMIR HAMZAH BIN MOHD NASIR (Malaisie) a expliqué que le pays était riche de multiples ethnies et que les peuples autochtones du pays représentaient presque 13% de la population nationale, ajoutant qu’ils étaient les plus vieux habitants du territoire et contribuaient à la richesse du pays.  Reconnaissant les progrès de la Malaisie sur la voie du développement, le représentant a estimé que les populations autochtones s’adaptaient bien au processus de développement et a insisté sur l’importance de préserver leurs coutumes et croyances. 

En tant que Gouvernement responsable des droits de nos concitoyens, nous continuerons d’aider les peuples autochtones à relever les défis difficiles de la modernisation et de la vie complexe au XXIe siècle, a affirmé le représentant.  Ces droits, a-t-il précisé, sont protégés par la législation de 1954 sur les peuples autochtones.

Mme DARYNA HORBACHOVA (Ukraine) a déclaré que son pays garantissait aux Tatars de Crimée la jouissance de leurs droits dans l’État souverain et indépendant de l’Ukraine.  Leurs organes délibératif et exécutif -le Mejlis et le Kurultai- sont reconnus.  Mais, a fait observer la représentante, depuis le début de l’occupation temporaire de la Crimée en février 2014, les Tatars criméens et autres ethnies ukrainiennes font face à des exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées, persécutions à motivation politique, discriminations, harcèlements, tortures, violences, y compris sexuelle, détentions arbitraires et internements psychiatriques.  Le dernier rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme fait même état de problèmes systématiques exigeant des mesures urgentes, a-t-il rappelé.  L’identité tatare semble être un crime dans cette région occupée, a poursuivi Mme Horbachova qui a appelé la Fédération de Russie à respecter la décision de la Cour internationale de Justice et à remplir ses obligations internationales en tant que Puissance occupante. 

Mme BANAKEN (Cameroun) a reconnu que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de 2007 représentait une avancée significative.  Rappelant qu’elle était le résultat de « nombreuses années de négociation », elle y a vu le signe de la difficulté à atteindre un consensus autour du concept d’autochtones.  Pour sa part, le Cameroun compte 250 ethnies et chacune d’elles peut se considérer comme autochtones dans sa région d’origine, a ajouté la représentante, avant de préciser que seul le groupe des Pygmées était considéré comme un peuple autochtone.

M. CASTILLO SANTANO (Cuba) s’est félicité du fait que l’on assiste, depuis le précédent rapport de la Rapporteuse spéciale, à une augmentation des mesures positives prises par les États pour renforcer dans leur législation nationale la protection des peuples autochtones.  Le représentant a toutefois jugé préoccupant que l’on continue d’incriminer ces peuples quand ils défendent leur droit à la terre.  Afin d’harmoniser la législation foncière avec les droits collectifs de ces peuples, il est nécessaire qu’ils participent à la gestion des ressources naturelles sur le territoire où ils vivent, a plaidé le représentant, estimant que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 offrait une opportunité exceptionnelle pour mettre fin à la discrimination de ces peuples et leur permettre de devenir des acteurs du développement. 

Pour Cuba, la Déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones est un message clair en faveur de la survie de ces peuples.  Elle reconnaît également les relations spéciales de ces peuples avec leur terre, un lien qui est l’essence même de leur existence.  C’est pourquoi, a conclu le représentant, Cuba réitère son soutien aux demandes justes des peuples autochtones et appelle la communauté internationale à prendre des mesures concrètes afin de garantir la pleine jouissance de leurs droits civiques, politiques et socioéconomiques.

M. CERTA, du Fonds de développement pour les peuples autochtones d’Amérique latine et des Caraïbes (FILAC), a rappelé que cet organisme intergouvernemental, créé en 1992, avait pour but de contribuer aux processus d’auto-développement et de promotion des droits individuels et collectifs des peuples autochtones de la région.  Le FILAC compte aujourd’hui 22 États membres, 19 régions et compte aussi des représentants autochtones venus de chaque État membre.

Malgré les avancées engrangées, beaucoup reste à faire pour les droits de ces peuples, a souligné le représentant.  C’est pourquoi, le FILAC a facilité l’élaboration d’un plan d’action ibéro-américain pour la mise en œuvre effective de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Ce plan, a-t-il ajouté, s’appuie sur les objectifs de développement durable de l’ONU et incorpore la perspective autochtone dans le Programme 2030.  Il établit aussi des mécanismes de participation systématique et de dialogue avec les peuples autochtones et les États, tout en renforçant la participation des femmes autochtones aux politiques publiques destinées à combattre les violences auxquelles elles sont confrontées.  Au niveau international, le FILAC, en tant que coprésident du Groupe interagences pour les droits des peuples autochtones, continue d’appuyer la mise en œuvre du plan d’action des Nations Unies sur ces droits et à travailler à une meilleure coordination.  Le représentant a par ailleurs remercié les États ayant appuyé, en novembre 2017, l’adoption de la résolution 72/128 de l’Assemblée générale qui a accordé à l’organisation le statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale. 

M. EDGAR ANDRÉS MOLINA LINARES (Guatemala) a indiqué que son pays avait toujours été un promoteur de la lutte pour les intérêts des peuples autochtones.  Il a notamment été le premier pays, en 2012, à mettre en œuvre une évaluation de la Déclaration des Nations Unies sur les peuples autochtones et célèbre, cette année, les 400 ans du calendrier maya.  Soulignant qu’il est de la responsabilité du Gouvernement de consulter les peuples autochtones avant de mettre en place des politiques ou programmes les concernant, le représentant a précisé qu’un guide opérationnel avait été créé en 2017 à cette fin, cet instrument permettant d’orienter les autorités publiques dans leurs échanges avec les peuples autochtones.

M. Molina Linares s’est d’autre part félicité que 2019 ait été proclamée Année internationale des langues autochtones.  Il a rappelé à cet égard que le Guatemala comptait plusieurs langues et que le pays mettait la dernière main à une politique publique pour l’interculturalité.  Il s’agit, a-t-il dit, de garantir la participation de ces peuples aux institutions, au travers de leurs conseils traditionnels et ancestraux.  En conclusion, il a appelé les États Membres qui n’auraient pas encore reconnu leurs peuples autochtones à engager un dialogue avec ces derniers afin que l’on puisse appliquer la Déclaration onusienne de manière universelle.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Deuxième Commission: l’agriculture durable et la nutrition sont plus que jamais nécessaires face à l’augmentation de la faim et de l’obésité

Soixante-treizième session,
10e et 11e séances – matin & après-midi
AG/EF/3499

Deuxième Commission: l’agriculture durable et la nutrition sont plus que jamais nécessaires face à l’augmentation de la faim et de l’obésité

La faim dans le monde est de nouveau à la hausse après avoir reculé pendant plusieurs années: tel est le constat alarmant du rapport du Secrétaire général sur le développement agricole, la sécurité alimentaire et la nutrition, présenté aujourd’hui à la Deuxième Commission (économique et financière).  Les conflits, les chocs climatiques et la pauvreté sont parmi les facteurs expliquant cette évolution, ont constaté les délégations qui ont en même temps déploré l’augmentation du surpoids et de l’obésité en raison d’une alimentation déséquilibrée.

Éliminer la faim et la pauvreté sont les premiers objectifs de développement durable, ont rappelé le Groupe des 77 et la Chine, et, au vu de la tendance actuelle, la réalisation de l’objectif 2 -Faim « zéro »- est très compromise.  Parmi les 51 pays confrontés à l’insécurité alimentaire, 33 sont dans la catégorie des pays les moins avancés (PMA), a relevé le porte-parole de ce Groupe.  L’Inde a tenu à souligner « l’ironie de la situation actuelle », puisqu’on produit suffisamment de nourriture pour satisfaire les besoins de toute la population mondiale, alors que des millions de personnes souffrent toujours de la faim au quotidien.  De plus, la faim et l’extrême pauvreté prédominent dans les régions rurales, où les aliments sont pourtant produits, ce qui constitue un symptôme de rupture des systèmes agricoles, comme l’a noté l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

Les effets négatifs des changements climatiques sur la sécurité alimentaire en termes d’accès à la nourriture et de qualité des aliments ont été soulignés à maintes reprises par les intervenants comme l’un des facteurs aggravants pour le développement agricole.  Les catastrophes climatiques auront un impact non seulement sur les personnes vulnérables mais aussi sur l’accès à des ressources comme l’eau qui sera de plus en plus difficile, ce qui va freiner voire empêcher la production agricole et limiter le développement économique et social, a fait observer Mme Madhushree Chatterjee, du Département des affaires économiques et sociales, en présentant les rapports du Secrétaire général.

L’un des facteurs clefs pour rompre le cycle vicieux de la pauvreté, de la faim et de la malnutrition est l’agriculture, a assuré Sri Lanka.  Les pratiques agroécologiques, que plusieurs pays ont adoptées, sont une façon de transformer les systèmes agricoles tout en protégeant l’environnement, la santé et la nutrition, a fait observer Mme Chatterjee.  Malheureusement, le secteur agricole subit toujours une pression excessive par manque d’investissements.  Comme l’a résumé le Mali, le secteur agricole reste confronté à d’immenses défis: maintenir la sécurité alimentaire d’une population croissante, gérer de façon durable les ressources naturelles dans la perspective des changements climatiques, améliorer la productivité, sécuriser et accroître les revenus des exploitants, assurer la maîtrise de l’eau. 

Nombre de délégations ont insisté sur la nécessité d’aider l’agriculture à se moderniser, à adopter de nouvelles technologies et à augmenter sa productivité, sans oublier les petits exploitants, en particulier les femmes, qui assurent les moyens de subsistance d’une large partie de la population dans nombre de pays en développement, comme l’a rappelé le groupe des PMA.  Tous les pays devraient investir davantage et promouvoir les nouvelles technologies pour assurer la sécurité alimentaire des PMA, a renchéri la Chine.  Il s’agit par exemple, a expliqué la Communauté des Caraïbes (CARICOM), de développer des semences résistantes aux sécheresses et aux inondations et une gestion durable du bétail.

L’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) a plaidé pour une démarche globale, puisque les problèmes d’agriculture sont également liés aux systèmes de santé, à la sécurité de l’eau, aux changements climatiques, à la santé des océans ainsi qu’à la volatilité des prix des produits de base et à l’accès aux marchés.  Le Groupe des États d’Afrique a remarqué que les distorsions et les déséquilibres sur les marchés agricoles mondiaux empêchent les pays d’Afrique d’y accéder, alors que le continent a un énorme potentiel en matière agricole, puisqu’il possède la plus grande surface de terres fertiles non cultivées.  Les subventions massives de l’agriculture dans les pays développés, qui ont conduit à des distorsions sur les marchés des produits agricoles, doivent prendre fin, a abondé le Brésil.

Le Costa Rica a rappelé que l’Assemblée générale avait adopté une résolution proclamant la Décennie de l’agriculture familiale 2019-2028.  Cette délégation présentera au cours de cette session, avec d’autres pays, un projet de résolution pour faire du 7 juin la « Journée mondiale sur l’innocuité alimentaire », afin de concentrer les efforts sur la qualité des aliments.  De son côté, la Finlande a lancé une initiative pour proclamer 2020 « année internationale de la santé des plantes » afin d’attirer l’attention sur la progression des organismes nuisibles qui causent de graves problèmes aux cultures, et ainsi promouvoir des pratiques responsables.  Quant au Burkina Faso, il est porteur d’un projet de résolution sur une Journée mondiale des légumineuses le 10 février.

Lundi 15 octobre à 10 heures, la Deuxième Commission entendra la Présidente de l’Assemblée générale, avant d’entamer l’examen du point sur le développement durable.

DÉVELOPPEMENT AGRICOLE, SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET NUTRITION

Présentations des rapports

Mme MADHUSHREE CHATTERJEE, Chef de la Subdivision des politiques et analyses de la Division du développement durable du Département des affaires économiques et sociales, a présenté le Rapport du Secrétaire général (A/73/293) intitulé Développement agricole, sécurité alimentaire et nutrition.  Elle a souligné une grande tendance: la faim est de nouveau à la hausse après avoir reculé pendant plusieurs années.  En 2017, 821 millions de personnes étaient sous-alimentées, contre 777 millions en 2015 et 815 millions en 2016.  Malgré l’assistance humanitaire, les populations vulnérables sont confrontées à des risques de famine, a dit Mme Chatterjee, citant le Nord-Est du Nigéria, la Somalie, le Soudan du Sud et le Yémen.  Quant à la malnutrition chronique, elle se manifeste sous diverses formes et touche 1 enfant de moins de 5 ans sur 5 dans le monde.  Dans le même temps, le surpoids et l’obésité sont en augmentation en raison d’une alimentation déséquilibrée: on compte 1,3 milliard de personnes en surpoids et 600 millions d’obèses.

Le rapport du Secrétaire général souligne aussi l’importance du lien intrinsèque entre l’objectif 2 de développement durable (Faim « zéro ») et les autres objectifs.  Les pratiques agroécologiques, que plusieurs pays ont adoptées, sont ainsi une façon de transformer les systèmes alimentaires tout en protégeant l’environnement, la santé et la nutrition.  Quant aux catastrophes, elles ont des répercussions sur toutes les dimensions de la sécurité alimentaire, et Mme Chatterjee a souligné que les changements climatiques auront un impact non seulement sur les personnes vulnérables mais aussi sur l’accès à des ressources comme l’eau qui sera de plus en plus difficile.  La rareté de l’eau est un facteur exacerbant car elle freine voire empêche la production agricole et limite le développement économique et social.

S’agissant du Rapport du Secrétaire général (A/73/287) sur les Activités organisées pendant l’Année internationale des légumineuses (2016), il montre que cette année internationale a permis de sensibiliser le public partout dans le monde aux avantages de ces plantes et de mettre en évidence le rôle qu’elles peuvent jouer dans la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Malheureusement, a indiqué Mme Chatterjee, le secteur agricole subit toujours une pression excessive par manque d’investissements.  Elle a souligné, à cet égard, l’importance de la coopération Sud-Sud, de la coopération triangulaire et des partenariats pour promouvoir les initiatives.  Le transfert de technologies est essentiel pour améliorer les pratiques agricoles et réaliser l’objectif 2 de développement durable, a-t-elle encore ajouté.

Dialogue interactif

À la question du Nigéria se demandant ce qui a accéléré la malnutrition dans le Nord-Est du pays et ce qu’il pourrait faire avec la communauté internationale pour améliorer la situation, Mme Chatterjee a conseillé de s’adresser à l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) pour mieux répondre à cette question.

Pour répondre au Paraguay qui s’est interrogé sur les liens entre l’objectif 2 de développement durable et les autres objectifs, Mme Chatterjee a donné l’eau comme exemple, ainsi que la santé et l’assainissement.  Elle a renvoyé au rapport du Secrétaire général et à la plateforme des connaissances sur les objectifs de développement durable pour davantage d’informations.

Déclarations

M. ELASHMAWY (Égypte), au nom du Groupe des 77 et la Chine, a rappelé que le nombre de personnes souffrant de la faim avait augmenté depuis trois ans, à des niveaux pas vus depuis plus de 10 ans.  Le nombre absolu de personnes dans le monde souffrant de malnutrition ou de sous-alimentation chronique est passé de 804 millions en 2016 à 821 millions en 2017, et le G77 et la Chine ont noté avec inquiétude que le nombre de personnes risquant de subir l’insécurité alimentaire a lui aussi grossi, passant de 108 millions en 2016 à 124 millions en 2017.  Le G77 et la Chine craignent que le rythme de la réalisation des objectifs de développement durable ne puisse pas promouvoir le changement nécessaire pour atteindre l’objectif numéro 2, et que les cibles relatives à la faim ne soient pas atteintes dans beaucoup d’endroits du monde. 

Éliminer la faim et la pauvreté sont les premières priorités des objectifs de développement durable, a poursuivi le représentant.  Dans ce contexte, le G77 approuve l’application de la résolution A/72/238 du Secrétaire général sur le développement agricole, la sécurité alimentaire et la nutrition, qui dit que mettre fin à la pauvreté nécessite le rehaussement des salaires en zone rurale et l’accroissement de la productivité soutenable, pour transformer les modes de vies des foyers ruraux, et que le développement inclusif et durable de l’agriculture et des système alimentaires joue un rôle clef. 

Le G77 a aussi plaidé en faveur de la hausse des investissements et du renforcement des capacités pour augmenter la productivité agricole.  Le Programme 2030 et le Programme d’action d’Addis-Abeba soulignent tous deux que les investissements dans l’agriculture sont cruciaux pour améliorer la productivité du secteur, a argué la délégation.  Le G77 souligne la difficulté pour les États Membres, et en particulier les pays en développement, de rattacher les liens complexes entre sécurité alimentaire, nutrition, transformations rurales et agriculture durable avec les autres objectifs de développement durable.  Pour être mieux à même de réaliser l’objectif 2, le représentant a prôné la promotion de politiques et de programmes nationaux intégrés ainsi que du partage de connaissances et des partenariats productifs.

L’agriculture demeure le secteur dominant dans le produit intérieur brut (PIB), les exportations et l’emploi dans de nombreux pays en développement, a enfin remarqué le représentant qui, dans ce contexte, a souhaité un système commercial bien régulé.  Cela est nécessaire pour faciliter un environnement global plus favorable à l’instauration de la sécurité alimentaire et à l’agriculture durable, en rendant les denrées alimentaires plus abondantes et bon marché.  Par conséquent, le Groupe a souligné que le commerce agricole pouvait contribuer à réaliser les objectifs de développement durable de nombreuses manières. 

Mme HMWAY HMWAY KHYNE (Myanmar), qui s’exprimait au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a souligné la recrudescence de la malnutrition dans le monde et souligné que, selon les estimations de la FAO, il faudra une augmentation de la production alimentaire de 70% d’ici à 2050 pour pouvoir satisfaire les besoins de la population mondiale qui devrait atteindre alors les 9,1 milliards.  C’est pourquoi l’ASEAN plaide pour des investissements dans l’agriculture, reconnaissant toutefois que ce n’est pas la panacée pour résoudre le problème de l’insécurité alimentaire.  Il faut aussi une approche holistique plus large allant de la lutte contre les changements climatiques, à celle contre la pauvreté et les pertes en biodiversité ainsi que des systèmes agricoles et alimentaires durables.  Il s’agit là d’une des grandes priorités des pays de l’ASEAN qui, comme l’a rappelé la représentante, sont les premiers producteurs de riz au monde et représentent un « panier alimentaire fertile ».  Cela ne signifie pas pour autant que ces pays ne font pas face aux aléas des changements climatiques, au déclin de leurs ressources naturelles et à une urbanisation rapide.

De plus, la population des États de l’ASEAN devrait passer de 650 millions d’habitants à 800 millions en 2035, et c’est sur cette base que la feuille de route à l’horizon 2025 de la Communauté économique de l’ASEAN a été établie.  Son objectif est notamment d’ajuster la production alimentaire à cette demande croissante et de garantir des prix abordables et une bonne qualité des aliments, a expliqué la représentante.  Il a présenté certains éléments de cette feuille de route comme le Plan stratégique pour la coopération en matière d’alimentation, d’agriculture et de sylviculture, y compris la gestion durable des forêts tropicales.  Les dirigeants des pays de l’ASEAN ont également adopté une Déclaration en 2017 par laquelle ils s’engagent à mettre fin à toute forme de malnutrition à travers une approche collaborative et multisectorielle de la sécurité alimentaire et de la nutrition.  Compte tenu de la vulnérabilité de ces pays face aux changements climatiques, le dernier sommet ministériel de l’ASEAN sur l’action climatique a galvanisé la mobilisation de la région autour de cet enjeu, a indiqué la représentante avant d’indiquer que le Plan stratégique pour l’environnement (2016-2025) est sur le point d’être finalisé.

M. PERKS LIGOYA (Malawi), s’exprimant au nom des pays les moins avancés (PMA), a déploré que parmi les 51 pays confrontés à insécurité alimentaire, 33 sont des PMA, avec une population combinée de 81,8 millions de personnes.  Un quart des PMA connaissent une grave insécurité alimentaire, et plus encore au Nigéria, au Soudan du Sud et au Yémen, trois pays exposés au risque de famine.  « C'est un défi immense qui nécessite des partenariats solides si nous voulons le vaincre », en a conclu M. Ligoya.

Entre 2015 et 2017, le nombre de personnes mal nourries dans les PMA est passé de 216 millions à 237 millions, problème auquel il faut ajouter les incidences des changements climatiques: les effets combinés des phénomènes climatiques extrêmes, de la concentration de gaz à effet de serre, du changement de température, et des précipitations.  Ces phénomènes ont des conséquences négatives sur la sécurité alimentaire en termes d’accès à la nourriture et de qualité des aliments, a dit le représentant, reprenant des données du Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC).

M. Ligoya a donc réclamé des investissements appropriés.  De son avis, il est également nécessaire de mieux informer les agriculteurs et de développer de nouvelles technologies.  Dans les PMA, les exploitations sont souvent de petite taille, et gérées par des femmes, une population très exposée et vulnérable aux fluctuations des prix et aux chocs environnementaux.  Mettre fin à la pauvreté et à la faim, tout en atteignant la sécurité alimentaire dans les PMA, va nécessiter des efforts concertés à tous les niveaux, national et international, a conclu M. Ligoya.

M. RUDOLPH MICHAEL TEN-POW (Guyana), qui s’exprimait au nom des États de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a mis l’accent sur la vulnérabilité extrême de ces pays aux impacts destructeurs des changements climatiques.  Il a souligné la menace que cela représente pour la production et les infrastructures agricoles et, par conséquent, pour leur sécurité alimentaire.  Augmenter la résilience de ces pays face aux aléas climatiques à travers des pratiques agricoles sensibles au climat, des systèmes de gestion des eaux, des semences résistantes aux sécheresses et aux inondations et une gestion durable du bétail sont autant d’objectifs à atteindre dans le cadre de l’objectif 2 de développement durable.  Il s’agit de passer d’une agriculture de plantation qui remonte à l’époque coloniale à une agriculture moderne sur le plan technique et en termes d’infrastructures.  Il faut aussi encourager l’investissement pour parvenir à une meilleure productivité, a expliqué le représentant.  La politique agricole commune adoptée par la CARICOM jette les bases de cette transformation du secteur agricole et cherche à augmenter la part des exportations agricoles tout en veillant à la satisfaction de la demande locale, a expliqué le représentant.  « Notre objectif est de faire des Caraïbes la première région résiliente aux changements climatiques avec les soutiens de nos partenaires internationaux, y compris le l’Institut interaméricain pour la coopération dans le domaine de l’agriculture. »

Le représentant a ensuite soulevé le problème que représentent les importations alimentaires dans la CARICOM: elles représentent 60% des aliments et près de 4 milliards de dollars par an soit une augmentation de 50% par rapport à 2 000.  Les efforts pour lutter contre cette réalité nouvelle n’ont pas été concluants à ce jour, a-t-il expliqué, tout en restant optimiste par rapport au potentiel de l’augmentation de la production locale de manioc pour se substituer au blé et au maïs importés.  Cela pourrait représenter 5% de la facture des importations alimentaires, a souligné M. Ten-Pow.  Élargissant le débat, il a affirmé que les défis du secteur agricole ne peuvent toutefois être relevés sans qu’il y ait un système commercial multilatéral ouvert, non-discriminatoire et réglementé pour promouvoir l’agriculture et le développement rural dans les pays en développement.  Cela contribuerait grandement, à ses yeux, à la sécurité alimentaire et l’alimentation dans le monde.

M. FARZANA ZAHIR (Maldives), s’exprimant au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), s’est alarmé du fait que la sécurité alimentaire dans les petits États insulaires en développement (PEID) soit mise à mal à cause des changements climatiques, de la dégradation de l’environnement, y compris celle des océans, et des crises économiques mondiales.  Pour ces pays, le lien entre sécurité alimentaire, changements climatiques et océans durables est d’autant plus fort qu’ils sont vulnérables aux chocs externes et ont des ressources limitées.  C’est ainsi que le représentant a expliqué que les zones agricoles côtières des certains PEID sont détruites par les catastrophes naturelles, et les productions sont perdues, tandis que les infrastructures de transport sont endommagées.  De même, la dégradation des écosystèmes marins affecte les moyens de subsistance, sans oublier la pêche illégale qui détruit les ressources marines. 

De nombreux PEID sont des importateurs de nourriture, ce qui les expose à l’extrême volatilité des prix des marchandises et des transports, a poursuivi le représentant.  Pour couronner le tout, ces aliments importés sont de faible valeur nutritive et contribuent même à l’épidémie de maladies non transmissibles tels que le diabète, les problèmes cardiaques, l’obésité et bien d’autres affections.  La FAO apporte son soutien aux PEID pour améliorer la nutrition des populations, mais le manque de fonds est un obstacle qui entrave la mise en œuvre du Programme d’action mondial pour relever les défis pressants liés à la sécurité alimentaire, à la nutrition et aux impacts des changements climatiques auxquels sont confrontés les PEID.  Le représentant des Maldives a prévenu qu’il fallait adopter une démarche globale, puisque les problèmes d’agriculture sont également liés aux systèmes de santé, à la sécurité de l’eau, aux changements climatiques, à la santé des océans ainsi qu’à la volatilité des prix des produits de base et l’accès aux marchés.

M. OMAR HILALE (Maroc), s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a remarqué que seulement 13 ans séparaient la communauté internationale de la date limite de 2030 pour réaliser les objectifs de développement durable, et que des étapes concertées étaient toujours nécessaires pour y arriver.  Au rythme actuel, l’objectif 2 sera difficile à atteindre, a-t-il prévenu, particulièrement inquiet de la malnutrition en Afrique subsaharienne et en Asie.

Pour sa part, l’Union africaine a pris des initiatives ciblées pour parachever sa vision du secteur de l’agriculture pour le continent, notamment via le Plan exhaustif de développement agricole de l’Afrique (PDDAA), ainsi que via la Déclaration de Malabo sur l’Agriculture africaine, la stratégie et la feuille de route de mise en œuvre du PDDAA.  Le but est d’éliminer la faim d’ici à 2025. L’Afrique a un énorme potentiel en matière agricole, a-t-il affirmé; le continent possède en effet la plus grande surface de terres fertiles non cultivées, des ressources en eau abondantes, et une proximité des plateformes de transport et des marchés régionaux.  La jeunesse du continent est aussi un atout, a-t-il noté.

Déplorant le manque d’investissements dans le domaine de l’agriculture et celui de la protection sociale, le représentant a remarqué que les distorsions et les déséquilibres sur les marchés agricoles mondiaux empêchaient les pays d’Afrique d’accéder à ce marché.  La communauté internationale, a-t-il lancé, a une opportunité à saisir en y remédiant.  Rappelant que le développement agricole jouait un rôle clef dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine, il a souligné que le secteur offrait un énorme potentiel en matière de réduction de la pauvreté et de création d’emplois, particulièrement parmi les populations les plus vulnérables.

M. RUBÉN ARMANDO ESCALANTE HASBÚN (El Salvador), qui s’exprimait au nom des États de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a réaffirmé l’engagement de ces pays à réaliser leur Plan pour la sécurité alimentaire, l’alimentation et l’élimination de la faim (2025 CELAC FSN PLAN), qui est en ligne avec le Programme 2030 et est transposé dans leurs stratégies nationales.  La CELAC mise notamment sur des mesures pour faciliter et renforcer les programmes de nutrition dans les écoles de la région.  Elle prend note des directives de la FAO sur les politiques agroenvironnementales en Amérique latine et dans les Caraïbes, « qui pourraient se révéler très utiles pour la protection des ressources et l’intégration, la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité dans les domaines de l’agriculture, des cheptels, de la sylviculture, des pêcheries et du tourisme », a estimé le représentant.  Il a également mis l’accent sur l’importance des investissements dans l’agriculture et notamment dans les structures familiales, comme moyen pour augmenter la sécurité alimentaire, remédier aux problèmes de chômage et renforcer les économies nationales tout en augmentant le bien-être des fermiers. 

La CELAC poursuivra son action contre la malnutrition sous toutes ses formes, en particulier chez les enfants en bas âge, a poursuivi M. Escalante Hasbún en expliquant que cela se faisait notamment par des actions de formation au niveau local pour que les organisations communautaires puissent devenir un relai des services alimentaires.  La Communauté cherche également à promouvoir des systèmes de production inclusifs et efficaces qui facilitent la participation des petits agriculteurs et permettent de réduire les gaspillages.  À cet égard, le représentant a rappelé l’impact des phénomènes météorologiques extrêmes sur l’agriculture, la sécurité alimentaire et la nutrition, soulignant l’importance du soutien de la communauté internationale dans ce domaine.  En effet, la CELAC compte sur le rôle de la coopération Sud-Sud, la coopération triangulaire et la coopération Nord-Sud, ainsi que sur l’aide publique au développement (APD), pour augmenter les capacités nationales des pays de la Communauté, afin qu’ils résistent mieux aux impacts des changements climatiques.  Ainsi, elle renouvelle son appel pour un soutien technique et financier de la part de la FAO, de l’OMS, du PAM, de la CEPALC, de l’ALADI et de l’IFAD dans la mise en œuvre du Plan FSN 2025 de la CELAC et pour la réalisation des objectifs de développement durable.

Pour M. VIDHU P. NAIR (Inde) la croissance accélérée des économies rurales et de l’agriculture est un impératif si l’on veut briser le « cercle vicieux » de la pauvreté extrême, de la sous-nutrition et de la malnutrition.  Même s’il place certains espoirs dans les avancées technologiques pour répondre à ce défi, il a tenu à souligner « l’ironie de la situation actuelle » puisqu’on produit suffisamment de nourriture pour satisfaire les besoins de toute la population mondiale, alors que des millions de personnes souffrent toujours de la faim tous les jours.  Pour sa part, l’Inde a plus que quintuplé sa production alimentaire depuis son accession à l’indépendance il y a 70 ans, étant devenue en quelques décennies une nation autosuffisante sur le plan alimentaire grâce à une révolution verte, et, aujourd’hui, elle est même un exportateur net de produits alimentaires.

Pour y arriver, l’Inde a misé sur les technologies agricoles et la recherche, ainsi que sur des investissements dans les infrastructures rurales et les capacités humaines, a expliqué le représentant, en citant aussi les facilités de crédit et d’approvisionnement à des coûts minima et le renforcement des institutions de soutien.  « Beaucoup des succès agricoles de l’Inde s’expliquent par sa capacité d’apporter des solutions innovantes et rentables aux défis rencontrés par les agriculteurs, comme des tracteurs à bas prix, des circuits de semences et des nouvelles technologies de gestion de l’eau », s’est enorgueilli l’intervenant.  Il a toutefois reconnu, que face à la demande croissante, il restait de nombreux défis à relever notamment pour augmenter la productivité agricole et pour généraliser des pratiques agricoles durables tout en connectant les fermes aux marchés et en améliorant les systèmes de distribution alimentaire. 

Il y a deux ans, « nous avons rêvé de doubler le revenu des fermiers indiens d’ici à 2022 », a poursuivi le représentant, expliquant que, pour y arriver, le Gouvernement avait mis en place des mécanismes pour soutenir les droits de l’agriculteur allant de l’achat des semences à l’accès de leurs produits aux marchés, et faisant appel à un système d’identification biométrique pour être sûr que ces mécanismes profitent bien aux destinataires voulus.  Le Gouvernement a également reconnu l’importance des marchés locaux pour l’écoulement des produits des petits producteurs et a créé le Marché agricole national (NAM) et e-NAM qui est une plateforme digitale unifiée pour les biens agricoles.  Un régime d’assurance récoltes a également été mis en place pour les fermiers.

M. IAN S. NAUMKIN (Fédération de Russie) s’est dit préoccupé par le nombre de personnes souffrant de la faim et de la malnutrition dans le monde, estimant que des mesures globales et coordonnées, sous l’égide des organisations internationales, sont nécessaires pour remédier à cette situation.  Si la lutte contre la faim est un objectif prioritaire, le représentant a noté qu’il fallait aussi garantir la qualité de l’alimentation, ce qui aura notamment pour effet de réduire l’incidence des maladies non transmissibles.  Un même pays peut être touché par la faim et l’obésité, a-t-il souligné.  Il s’est félicité des initiatives de l’ONU comme la Décennie pour la nutrition (2016-2025) ou la Journée mondiale de l’alimentation, le 16 octobre.  La Russie est aussi un bailleur de fonds et a, par exemple, mis en place des projets de sécurité alimentaire dans plusieurs pays d’Asie centrale en partenariat avec le Programme alimentaire mondial (PAM), et ce, depuis 2010.

M. RODRIGO ALBERTO CARAZO ZELEDÓN (Costa Rica) a remercié les pays qui soutiennent l’approbation de la Décennie de l’agriculture familiale 2019-2028.  Il a ensuite fait valoir l’importance de l’innocuité alimentaire pour la réalisation des objectifs de développement durable liés à l’élimination de la faim, à la santé, au commerce international et pour la promotion de modèles de production et de consommation durables.  On estime en effet qu’environ 600 millions de personnes tombent malades chaque année après avoir ingéré des aliments impropres à la consommation, et que 420 000 en meurent.  Les aliments contenant des bactéries, des virus, des parasites ou des substances chimiques nocives sont la cause de quelque 200 maladies, dont le cancer, a expliqué M. Carazo.  Il a jugé nécessaire de prendre des initiatives globales pour mettre en place des systèmes efficaces et effectifs de contrôle de l’innocuité dans toute la chaîne alimentaire, de la production au consommateur.  En ce sens, le Costa Rica présentera à la Deuxième Commission un projet de résolution pour faire du 7 juin la « Journée mondiale sur l’innocuité alimentaire ».

M. MURTADA HASSAN ABUOBEIDA SHARIF (Soudan) a déploré que la faim augmente au Soudan après des années de déclin, pour différentes raisons: conflits armés, ralentissement de l’économie, changements climatiques.  Tous ces éléments constituent un défi majeur pour la communauté internationale, a-t-il constaté en appelant celle-ci à redoubler d’efforts pour éliminer la faim et la malnutrition.  Éliminer la faim est une priorité des objectifs de développement durable, a-t-il rappelé.  Dans le cas des zones rurales, où 80% des Soudanais vivent et se nourrissent principalement de culture et de pêche, une agriculture durable pourrait grandement améliorer leur vie.  Le représentant a indiqué que le Soudan possède des millions d’hectares de terres arables et qu’il peut produire une agriculture diversifiée.  Le Soudan, a-t-il poursuivi, a élaboré des plans stratégiques pour augmenter sa productivité agricole, et a lancé une initiative au niveau régional pour renforcer la sécurité alimentaire et développer des réserves.  Le représentant a demandé à l’ONU d’appuyer ces efforts en contribuant au renforcement de ses capacités et au transfert de technologies.

M. MOHAMMED BESSEDIK (Algérie) a remarqué que de nombreux pays avaient redoublé d’efforts pour accroître la productivité agricole.  Mais ces efforts sont confrontés à un défi d’envergure: développer l’agriculture durable contre des phénomènes qui ne sont pas de leurs responsabilités.  En Algérie, la sécurité alimentaire est un objectif prioritaire depuis la crise alimentaire mondiale de 2007, qui a mis au jour la vulnérabilité du pays aux chocs extérieurs.  Pour y remédier, les autorités algériennes ont octroyé un « cachet de souveraineté alimentaire », avec une politique agricole nationale, et une approche multisectorielle, où plus de 13 milliards de dollars ont été investis pour améliorer l’existence des population rurales, avec l’aide du secteur privé.  La sécurité énergétique et hydraulique vers laquelle se dirige l’Algérie permettra de réduire les déséquilibres commerciaux, de favoriser un développement durable, et d’assurer la sécurité alimentaire du pays.  M. Bessedik a enfin appelé la communauté internationale à nourrir la population pauvre à des prix adéquats et abordables, face aux situations d’urgence provoquées par les changements climatiques.

M. GHULAM SEDDIQ RASULI (Afghanistan) a plaidé pour des actions urgentes pour améliorer les systèmes de production agricole, revitaliser le secteur agricole, promouvoir le développement rural et autonomiser les groupes traditionnellement exclus, comme les petits exploitants.  Environ 45% des Afghans connaissent l’insécurité alimentaire: si le conflit a joué un rôle dans cette situation, les changements climatiques ont aussi des effets profonds sur la sécurité alimentaire, notamment en raison de l’augmentation de la sécheresse, a fait remarquer le représentant.  Il a aussi relevé qu’environ 85% des Afghans sont impliqués dans l’agriculture, raison pour laquelle tout changement climatique touche les moyens de subsistance de millions de personnes.  Pour tenter d’y remédier, le Gouvernement a lancé un programme national de sécurité alimentaire et de nutrition en octobre 2017.

M JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a estimé que la mise en œuvre des objectifs de développement agricole, de sécurité alimentaire et de nutrition dans les pays en développement est l’une des questions les plus importantes sur lesquelles la communauté internationale doit concentrer ses efforts.  La délégation a pris note dans le rapport du Secrétaire général que l’insécurité alimentaire grave touche de façon disproportionnée les régions rurales, et en particulier les femmes.  Elle a jugé important de tenir compte du fait que la sécurité alimentaire exige une croissance économique équitable, la création d’emploi, la génération de revenus et d’avancées technologiques, surtout dans le secteur agricole.  La première priorité de la stratégie nationale de souveraineté et de sécurité alimentaire du Nicaragua, mise en œuvre avec l’accompagnement de la FAO, est de garantir aux familles l’accès à une alimentation suffisante, nutritive et saine.  Cela passe par des mesures de soutien aux petits producteurs et par une aide alimentaire aux victimes des changements climatiques.  Au Nicaragua, la lutte contre la faim est étroitement liée à la lutte contre la pauvreté.

Mme NICOLA ROSEMARIE GABY BARKER-MURPHY (Jamaïque) a déclaré que son pays avait augmenté la part des investissements privés pour améliorer son rendement agricole, mais qu’il restait beaucoup d’efforts à faire dans ce domaine.  En tant que PEID et pays importateur, la Jamaïque n’est pas autosuffisante, a-t-elle indiqué avant d’expliquer que la fréquence accrue des phénomènes climatiques extrêmes dus aux changements climatiques sont un énorme obstacle.  L’importation alimentaire est couteuse et rend la Jamaïque vulnérable aux chocs économiques externes et aux changements climatiques, a-t-elle insisté.  La représentante a déploré que les impacts économiques à long terme entravent la réalisation des objectifs de développement durable.  Elle s’est par ailleurs alarmée que des changements profonds de régimes alimentaires entraînent un problème de santé publique mondial, avec une augmentation de l’obésité et des maladies non transmissibles comme le diabète.

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a craint que l’objectif numéro 2 ne soit pas atteint d’ici à 2030, déplorant que dans un monde aussi connecté, la faim dans le monde reste prévalente.  L’augmentation de la population et les changements climatiques ont privé le Bangladesh de terres arables, a-t-elle indiqué tout en se félicitant que le pays ait quand même réussi à tripler sa production agricole depuis 1971.  Celle-ci représente désormais 14,75% du PIB et concentre la plupart des emplois.  Le Bangladesh a mis en place des programmes pour mécaniser l’agriculture, développer le numérique et les nanotechnologies dans le cadre agricole.  Il investit pour que le pays s’adapte aux changements climatiques, en inventant de nouvelles semences, plus adaptées.  Longtemps sur la corde raide, le pays fait tout pour nourrir correctement ses citoyens, a assuré le représentant en signalant aussi que des dispositions juridiques ont été mises en place pour améliorer le secteur de la pêche ainsi que la traçabilité des produits. 

M. ALADE AKINREMI BOLAJI (Nigéria) a noté les statistiques préoccupantes montrant que le monde, et les pays en développement en particulier, n’est pas sur la bonne voie pour réaliser l’objectif 2 de développement durable. Il a reconnu le lien entre l’éradication de la faim et de la malnutrition et l’autonomisation des habitants des zones rurales par la transformation des systèmes agricoles et alimentaires.  Il a souligné l’importance des marchés locaux et nationaux pour les petits exploitants, vu que l’agriculture fournit les moyens de subsistance de la majorité des Nigérians.  Pour sa part, le Nigéria se concentre sur la modernisation de l’agriculture et a mis en place des programmes pour en finir avec la faim et la malnutrition, qui donnent déjà des résultats.  Il a investi dans les pratiques agricoles, et aussi dans la sensibilisation aux changements de comportement alimentaire.  Le développement de l’élevage est essentiel pour améliorer l’accès à l’alimentation et le Nigéria a également distribué des semences très résistantes pour faire face aux effets négatifs des changements climatiques sur l’agriculture.

M. VITALII BILAN (Ukraine) a dit que son pays se sent très concerné par le problème de la faim, rappelant la tragédie d’Holodomor, une famine de masse organisée par le régime soviétique en Ukraine: en novembre, cela fera 85 ans. Aujourd’hui, l’Ukraine traverse une des périodes les plus difficiles de son histoire moderne, a-t-il poursuivi en se félicitant des travaux de la FAO et du PAM en Ukraine, qui aident le Gouvernement à faire face aux problèmes humanitaires.  Il a dit que malgré ces difficultés, l’Ukraine reste un gros producteur de céréales.  Pour finir, M. Bilan a plaidé pour que les causes multidimensionnelles et complexes de la faim soient traitées par des mesures globales et une coordination renforcée entre les institutions spécialisées des Nations Unies et les institutions financières internationales.  Il faut aussi un système plus formel de gouvernance mondiale, a-t-il ajouté.

Mme SOBOTH SOK (Cambodge) a souligné que les questions d’agriculture, de sécurité alimentaire et de nutrition ont été intégrées dans la stratégie rectangulaire du pays et dans le Plan stratégique national de développement.  Une stratégie nationale sur la sécurité alimentaire et la nutrition avait même été adoptée pour la période 2014-2018.  La croissance économique de 7,7% que le Cambodge a connue au cours des dernières décennies est due en majorité au rôle du secteur agricole qui a généré, a affirmé la représentante, des emplois décents et des revenus supplémentaires pour des millions de Cambodgiens des zones rurales notamment.  Afin d’améliorer son agriculture, le Gouvernement a investi dans les infrastructures d’irrigation rurale et dans la production de semences améliorées, tout en offrant des crédits à des conditions favorables aux agriculteurs.  Ces efforts ont été couronnés de succès, puisque le Cambodge a reçu un prix des Nations Unies pour avoir diminué la faim de moitié avant la date butoir de 2025. 

M. TANG TIANXI (Chine) a regretté que malgré les progrès de la productivité agricole, des millions de personnes souffrent encore de la faim dans le monde.  Tous les pays devraient investir davantage et promouvoir les nouvelles technologies pour assurer la sécurité alimentaire des PMA, a remarqué le représentant.  Il a indiqué que la Chine avait créé des « zones agricoles somptueuses » et adopté des politiques qui bénéficient à tous les agriculteurs, tout en modernisant son agriculture.  La Chine accorde une importance particulière à la nutrition, avec un programme national d’amélioration des normes de nutrition qui vise les nouveau-nés, les étudiants, et les personnes âgées en milieu hospitalier. 

M. ADEL AL AMIRI (Émirats arabes unis) a relevé qu’en dépit des conditions climatiques difficiles, le pays a engagé des mesures pour promouvoir une agriculture durable.  Il a ainsi évoqué l’intégration des technologies modernes, une gestion efficiente des ressources naturelles, et des mesures pour tirer parti du statut du pays qui est l’un des marchés les plus prestigieux de la région.  Les Émirats arabes unis ont aussi mis en place une banque alimentaire afin de distribuer des vivres aux plus démunis, tandis que le programme « Zerai » permet aux agriculteurs de bénéficier de formations et de services marketing offerts par le Gouvernement.  Sur le plan multilatéral, les Émirats arabes unis ont également investi dans la sécurité alimentaire dans de nombreux pays à travers le monde, s’est félicité M. Al Amiri.

M. VILIAMI VA’INGA TŌNĒ (Tonga) a fait valoir que, pour répondre aux défis de l’agriculture, son Gouvernement promouvait une utilisation durable des ressources locales et une approche intégrée.  Les répercussions négatives des changements climatiques pèsent sur la sécurité alimentaire des Tonga de manière directe et indirecte, a-t-il déploré, en expliquant que son pays travaille pour trouver des semences adaptées aux changements climatiques et tente de s’adapter.  Le pays est également très touché par les maladies liées à la nutrition, ainsi que par des maladies non transmissibles qui pèsent beaucoup sur la société tongane.  La production d’alimentation locale permettrait aux habitants des Tonga d’être en meilleure santé, a-t-il souligné en exprimant l’attachement de son pays à l’agriculture durable.

M. ANTONIO GUMENDE (Mozambique) a noté que plus de 70% de la population active du Mozambique travaille dans le secteur de l’agriculture.  Fort de ce constat, le Gouvernement a fait de ce secteur l’une de ses quatre priorités avec les infrastructures, l’énergie et le tourisme.  La population du pays est passée de 13 millions en 1990 à 28 millions en 2017, mais les techniques agraires sont restées les mêmes.  La conséquence est visible, puisque 43% d’enfants âgés de 0 à 5 ans souffrent de retard de croissance sévère, avec des graves implications sur leur santé et leur éducation.  Le représentant a aussi relevé les difficultés du domaine agricole liées aux catastrophes naturelles fréquentes et expliqué que, de ce fait, le pays dépend des importations pour se nourrir.  Le Gouvernement entend désormais agir pour que l’agriculture de subsistance soit plus productive et orientée vers les marchés, notamment grâce à sa mécanisation et à l’utilisation de nouvelles technologies.  Cela devrait permettre, a expliqué M. Gumende, aux petits producteurs de pouvoir se nourrir tout en augmentant leurs revenus pour s’offrir d’autres services comme l’éducation, la santé et les biens divers.

M. ALAMI (Maroc) a qualifié la faim de « défi majeur du monde contemporain », se basant sur le constat qu’il faudra augmenter la production agricole de près de 70% d’ici à 2050 pour parvenir à nourrir la population mondiale.  Le représentant a également constaté que, dans la crise alimentaire menaçant des millions d’Africains, les conflits et les crises climatiques jouent un rôle déterminant.  En Afrique, l’agriculture produite ne nourrit pas la population, et le budget agricole a beaucoup baissé, a-t-il souligné.  Il a assuré que le Maroc partage son expérience et son savoir-faire: il met à la disposition d’autres pays africains une centaine d’experts pour les aider à développer leur propre irrigation et une agriculture durable.  Dans le cadre de la FAO, des fonds de plus d’1 million de dollars ont été alloués par le Maroc pour que les pays demandeurs améliorent l’exploitation de leurs ressources naturelles.  Pour le Maroc, la coopération Sud-Sud basée sur le partage du savoir-faire est de nature à jouer un rôle fondamental pour réaliser les objectifs de développement durable et réduire la vulnérabilité des pays africains.

Mme BARBARA BOECHAT DE ALMEIDA (Brésil) a rappelé que le Forum politique de haut niveau sur le développement durable, au cours de sa réunion de juillet 2017, placée sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC), avait fait le constat que le rythme des avancées actuelles laisse présager que les cibles de l’objectif 2 de développement durable ne seront pas atteintes dans les temps.  Le Brésil, a-t-il poursuivi, se félicite que l’Assemblée générale ait proclamé la Décennie des Nations Unies pour l’agriculture familiale (2019-2028) l’an dernier.

Pour le Brésil, il faut davantage d’investissements dans l’agriculture et les zones rurales, y compris grâce à la coopération internationale, pour la promotion d’une agriculture véritablement productive dans les pays en développement, notamment en ce qui concerne l’agriculture familiale.  De même, les subventions massives de l’agriculture dans les pays développés, qui ont conduit à des distorsions sur les marchés des produits agricoles, doit prendre fin.  La représentante a expliqué que ces subventions détruisent les efforts menés pour développer un secteur agricole solide dans les pays en développement.  Enfin, le Brésil soutient l’idée de faire du 7 juin la journée mondiale de la sécurité alimentaire, notamment du fait qu’il s’agit d’une question sérieuse affectant la vie des enfants et des populations vivant dans l’extrême pauvreté et la faim.

M. GEBEYEHU GANGA GAYITO (Éthiopie) s’est dit préoccupé que la faim dans le monde augmente après des décennies de recul, en attribuant la cause aux effets des changements climatiques et aux conflits.  Il a jugé qu’une action coordonnée et urgente est nécessaire pour reprendre de l’élan et accélérer les mesures contre la faim, pour une bonne nutrition et pour une agriculture durable.  De plus grands investissements dans le secteur agricole seraient nécessaires, de même que des transferts de technologie et un renforcement des capacités.  L’Éthiopie a placé la productivité et la production agricole au cœur de sa stratégie de mise en œuvre de l’objectif 2 de développement durable, a indiqué le représentant, et elle a vu le nombre d’enfants enregistrant un retard de croissance baisser.  Le représentant a également fait part de son soutien à une agriculture verte résiliente au climat, qui passe par exemple par le développement de la sylviculture et la préservation des sols et de l’eau.

M. MUSONDA (Zambie) a noté que le monde est loin d’être en passe d’éliminer la faim et de réaliser l’objectif 2 de développement durable Les changements climatiques et les facteurs politiques entravent les efforts, a dit le représentant, soulignant que la communauté internationale doit s’attaquer aux causes profondes de la faim et de la malnutrition.  Pour sa part, le Gouvernement de la Zambie a lancé un programme d’aide à la modernisation du matériel agricole, qui a permis d’améliorer la production et les revenus des femmes.  Celles-ci représentent environ 70% des petits exploitants, a-t-il précisé.

Mme LEILA CASTILLON LORA-SANTOS (Philippines) a relevé que la faim regagnait du terrain en raison des changements climatiques et des conflits.  L’agriculture joue un rôle essentiel aux Philippines, a-t-elle dit, en signalant que le pays a lancé un plan national entre 2018 et 2022 pour développer la pêche et l’agriculture, un secteur qui emploie un tiers des Philippins.  La représentante a estimé qu’il fallait mettre en avant l’agriculture familiale, en particulier les petites exploitations familiales agricoles et de pêcheries, pour faire régresser la pauvreté.  Pour conclure, elle a appelé la communauté internationale à une assistance accrue à destination des pays en développement, pour les aider à lutter contre la malnutrition et l’insécurité alimentaire.

M. TONY OUTHAITHIP (République démocratique populaire lao) a fait valoir les progrès du pays dans le secteur agricole, pierre angulaire du développement économique national, avec 70% des emplois laotiens liés à l’agriculture.  Pour la mise en œuvre de l’objectif 2, La République démocratique populaire lao a mis en place un comité national pour la nutrition qui contribue à la lutte contre la pauvreté et la faim.  En outre, plusieurs plans d’action ont été mis en œuvre, notamment pour le renforcement des capacités des agriculteurs et la modernisation agricole.  Le pays est actif dans ce domaine au sein de l’ASEAN, a précisé le délégué.  Il a aussi mentionné les faiblesses de La République démocratique populaire lao où les zones irriguées sont peu nombreuses: l’essentiel du pays dépend donc grandement des précipitations.  La République démocratique populaire lao est à la merci des changements climatiques, a poursuivi M. Outhaithip, en rappelant les graves inondations qui ont touché 115 des 148 districts du pays et y ont détruit beaucoup d’infrastructures. L’assistance internationale a cependant permis au pays d’améliorer la nutrition et la sécurité alimentaire dans le pays.

M. SAVITRI INDRACHAPA PANABOKKE (Sri Lanka) a jugé alarmant que plus de 800 millions de personnes souffrent de malnutrition chronique dans le monde.  L’agriculture est l’un des facteurs clefs pour rompre le cycle vicieux de la pauvreté, de la faim et de la malnutrition, a assuré le représentant, jugeant essentiel d’investir dans l’agriculture durable.  Les changements climatiques sont néanmoins devenus une menace, avec des inondations qui ont eu de lourdes répercussions sur la production à Sri Lanka.  Aussi, le pays a-t-il adopté de nouvelles techniques et des semences résistantes, et s’est-il engagé dans la diversification des cultures et l’utilisation de la technologie.

M. ARTHUR AMAYA ANDAMBI (Kenya) a dit que le secteur agricole représente 24% du PIB au Kenya et plus de 60% des opportunités d’emploi.  Pour le Gouvernement, la contribution de l’agriculture à la sécurité alimentaire reste une priorité de développement national, de même que l’industrie, la couverture de santé universelle et le logement abordable.  Le Kenya a mis en place une politique agricole reposant sur une triple approche l’approvisionnement, les prix et les revenus.  Il accorde ainsi des subventions pour les intrants agricoles ainsi que des prêts, tout en veillant à améliorer les infrastructures agricoles et à développer les marchés agricoles.  Il est aussi impliqué dans l’achat de maïs à des prix supérieurs à ceux du marché pour stimuler les producteurs.  Et, pour ce qui est des revenus, il a augmenté sa contribution aux programmes d’éducation gratuite et a réduit les coûts de la santé dans les structures publiques de soins.  Cela permet aux pauvres de disposer de meilleurs revenus pour se nourrir.  Le représentant, qui a également noté les effets négatifs des changements climatiques, a indiqué que son pays cherche à améliorer la qualité des semences pour qu’elles soient plus résistantes à la sécheresse.

M. KANISSON COULIBALY (Mali) a rappelé que le secteur agricole était « l’épine dorsale de l’économie » du Mali et représentait 80% de la population active du pays et plus de 30% du PIB.  Il s’est par ailleurs félicité que son pays se soit classé parmi les 29 qui ont pu atteindre l’objectif de sécurité alimentaire.  Ceci étant dit, il a estimé que le secteur agricole reste confronté à d’immenses défis: maintenir la sécurité alimentaire d’une population croissante, gérer de façon durable les ressources naturelles dans la perspective des changements climatiques, améliorer la productivité, sécuriser et accroître les revenus des exploitants, assurer la maîtrise de l’eau.  Des défis auxquels le Mali a commencé à répondre.  Il a notamment travaillé à développer les progrès techniques des systèmes de production, s’est doté d’une loi d’orientation agricole et alloué 15% de son budget à l’agriculture.  En parallèle, il a également initié une politique nationale de sécurité alimentaire à travers la mise en place d’un stock national et de programmes d’assistance nutritionnelle.  Résultat, entre 2016 et 2017, la production céréalière s’est accrue de 8%.

Mme EMILIA VAN VEEN (Finlande) a voulu attirer l’attention sur une question centrale dans le combat pour l’éradication de la faim: la santé des plantes.  La protection de la santé des plantes constitue un accès clef à la réalisation des objectifs de développement durable, notamment dans les PMA et autres pays en développement, où la progression des organismes nuisibles peut causer de graves problèmes.  La FAO estime que les parasites envahissants peuvent causer des dégâts dans 40% des cultures dans le monde chaque année, avec des pertes de produits totalisant 220 milliards de dollars par an.  N’ayant pas d’ennemis naturels, ils constituent un des plus grands facteurs de perte de biodiversité dans le monde.  « En Afrique, une mouche de fruits, et la maladie de l’olivier en Europe, pour ne citer qu’eux, sont des menaces concrètes », propagées par le commerce international, le commerce en ligne et l’augmentation du transport aérien.  Pour y remédier, la Finlande souhaite sensibiliser la communauté internationale.  C’est pourquoi elle a lancé une initiative pour proclamer 2020 « année internationale de la santé des plantes » pour sensibiliser le grand public et le secteur industriel, promouvoir des pratiques responsables, et accroître le soutien des gouvernements et du secteur privé pour remédier au problème.

M. RIO BUDI RAHMANTO (Indonésie) a invité la communauté internationale à se focaliser sur le développement rural et les systèmes de production alimentaire durables afin de renforcer la sécurité alimentaire et réduire la pauvreté.  L’Indonésie a investi énormément pour renforcer la connectivité des zones rurales et permettre ainsi aux agriculteurs de s’insérer dans les systèmes locaux de production.  Le secteur culinaire en Indonésie fait partie des domaines les plus dynamiques de l’économie nationale, a relevé le délégué, qui a précisé que ce secteur offre des emplois aussi bien dans les villes que dans les zones rurales.  Des activités d’autosuffisance alimentaire sont en outre promues par le Gouvernement dans 17 provinces et 20 districts du pays.  Des sites spéciaux ont été mis en place afin de connecter les agriculteurs aux marchés par le numérique, améliorant ainsi leurs connaissances, et de facto, augmentant leurs revenus.  Enfin, le représentant a plaidé pour des transferts de technologies et pour l’innovation dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire, dans le but d’améliorer la qualité et la quantité d’aliments produits.

M. SUVANGA PARAJULI (Népal) s’est montré pessimiste quant à l’insécurité alimentaire, qui est un « défi humanitaire » actuel, et a qualifié les perspectives de « moroses ».  Les habitants des zones rurales sont les plus touchés, a-t-il noté.  M. Parajuli a fait le rapport entre la pauvreté et la faim, la première entraînant la seconde, surtout dans les zones rurales, où résident 80% des personnes très pauvres.  Il a appelé à investir de façon plus qualitative, surtout dans les pays qui accusent un retard conséquent, et à renforcer les interventions en zone rurale.  Dans les PMA et les pays en développement sans littoral, les difficultés s’accumulent, a-t-il relevé, en parlant notamment de son pays qui entre dans les deux catégories et se trouve donc particulièrement vulnérable aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles.  La majorité de la population népalaise étant dépendante de l’agriculture pour sa subsistance, les défis sont donc multiples.  Le Népal, où la Constitution garantit la souveraineté alimentaire, œuvre pour le développement de technologies agricoles durables et résistantes au climat, la modernisation des technologies agricoles, afin d’aider les PMA à trouver le chemin de la prospérité.

M. YEMDAOGO ERIC TIARE (Burkina Faso) a expliqué que l’économie de son pays reposait principalement sur l’agriculture, l’élevage et le secteur minier.  Mais à lui seul, le secteur agricole (sorgho, mil, maïs, riz, arachide et coton) représente 84% de la population active et environ 40% du PIB.  Selon lui, ce secteur est malheureusement menacé par la désertification, les changements climatiques, le faible développement des infrastructures de stockage, la dégradation du couvert végétal et les différents « ravageurs » de cultures.  Pour prendre la mesure de ces défis, le Burkina Faso a élaboré en 2013 un document de politique nationale visant à atteindre la sécurité alimentaire à l’horizon 2025.  Pour ce faire, il a déployé des programmes et des stratégies sur la sécurité foncière en milieu rural, la nutrition, la protection sociale et la résilience des communautés vulnérables.  Hélas, a expliqué le délégué, les ressources budgétaires sont un goulot d’étranglement.  Le pays compte de ce fait sur l’accompagnement habituel de la communauté internationale.  Le délégué en a profité pour rappeler que le Burkina Faso est porteur d’un projet de résolution sur une Journée mondiale des légumineuses le 10 février.

M. MOHAMMAD ABDURRAHMAN S. ALKADI (Arabie saoudite) a relevé trois piliers de la lutte contre la faim et la malnutrition: fournir des denrées alimentaires, garantir qu’elles sont sûres pour la consommation et les rendre abordables pour tous.  Le représentant a exhorté la communauté internationale à trouver des solutions durables pour garantir un approvisionnement en aliments et en eau suffisant pour tous.  Pour sa part, l’Arabie saoudite a soutenu des projets liés à la sécurité alimentaire, à l’eau et à l’environnement dans plusieurs pays en investissant plus de 700 millions de dollars.  Elle fournit aussi des aides financières aux Saoudiens dans le besoin.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a noté que si les interventions humanitaires sont cruciales pour freiner la famine, cela ne suffit pas pour faire face aux causes profondes de la faim.  Il a donc prôné d’investir dans l’agriculture et améliorer les opportunités commerciales.  Cela permettrait ainsi de réduire la vulnérabilité des PMA face à l’insécurité alimentaire.  Le Saint-Siège note que la production alimentaire mondiale est plus que suffisante pour nourrir l’humanité, mais le problème tient du fait que la nourriture ne se retrouve pas là où elle est le plus demandée.  L’Observateur a évoqué des problèmes de transport, de vente et de conservation des aliments.  En plus, un système commercial injuste et des marchés peu fiables sont autant de conditions qui découragent les agriculteurs de produire davantage ou de transporter leurs produits jusqu’aux marchés.  Le prélat a également cité le pape François qui a parlé de « culture du gaspillage », expliquant que « le consumérisme nous pousse au gaspillage de la nourriture ».  Pour le Saint-Siège, la solution consistant à réduire le nombre de bouches à nourrir ne tient pas la route.  « C’est une fausse solution si l’on considère les quantités de nourritures gaspillées », s’est indigné l’Observateur.

S’exprimant également au nom du Fonds international de développement agricole (FIDA) et du Programme alimentaire mondial (PAM), Mme CARLA MUCAVI (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, FAO) a confirmé que le nombre absolu de personnes sous-alimentées a augmenté, étant passé à 821 millions en 2017, soit un niveau équivalent à celui d’il y a une décennie, selon le rapport de ces organisations, de l’UNICEF et de l’OMS, intitulé L’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde.  Les conflits, les chocs climatiques et la pauvreté sont parmi les facteurs expliquant cette évolution.  Dans le même temps, d’autres formes de malnutrition émergent en tant que menaces mondiales: si 1 personne sur 9 dans le monde a faim, 1 adulte sur 8 est obèse.  L’obésité est une maladie galopante dans les pays en développement, qui cohabite avec la sous-nutrition dans les mêmes foyers, a fait observer Mme Mucavi.

Cette situation reflète les systèmes agricoles déficients et non durables qui prévalent aujourd’hui dans le monde.  Comme le relève également le rapport du Secrétaire général, l’agriculture durable et des systèmes agricoles durables sont essentiels pour inverser ces tendances et bien gérer les ressources naturelles dans la durée.  Mme Mucavi a également noté la prédominance de la faim et de l’extrême pauvreté dans les régions rurales, là où les aliments sont pourtant produits, ce qui démontre encore la rupture des systèmes agricoles.  Les exploitants familiaux, responsables d’environ 80% de la production agricole mondiale, sont souvent ceux qui souffrent le plus de la faim et de la pauvreté, a-t-elle constaté.  Si les acteurs ruraux sont des agents essentiels de changement, ils n’ont pourtant malheureusement souvent qu’un accès limité aux terres, à l’eau, au crédit et aux marchés.  Mme Mucavi a plaidé pour l’autonomisation de ces acteurs, pour des programmes de protection sociale en faveur des pauvres, pour une nouvelle alliance rurale-urbaine, pour des investissements nationaux et internationaux, et pour un changement de modèle.  Elle a invité à célébrer la Journée internationale de la femme rurale le 15 octobre et la Journée mondiale de l’alimentation le 16.

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