Première Commission: des propos sévères et quelques pistes pour sortir les mécanismes du désarmement de l’impasse
Intenable, injustifiable, inexcusable. Après un mois de travaux en Première Commission (Désarmement et sécurité internationale), les délégations ont eu des mots sévères pour qualifier l’impasse dans laquelle se trouve l’architecture du désarmement de l’ONU, en particulier la Conférence du désarmement, et suggéré quelques aménagements pour la sortir de l’ornière, tout en reconnaissant qu’il en dépend de la « volonté politique » des États Membres.
La bonne volonté dans un monde de plus en plus polarisé, c’est bien ce qui manque le plus, ont souligné l’Iran, le Royaume-Uni, la République de Corée ou encore l’Algérie, cette dernière faisant valoir que ce sont les États non dotés de l’arme nucléaire qui souffrent le plus de cette paralysie puisqu’entretemps les arsenaux continuent de se moderniser et de se développer.
Cela fait 20 ans que l’Irlande siège à la Conférence et celle-ci n’a pas avancé, a dénoncé sa représentante, pour qui « l’absence de progrès voire le retour en arrière observé » rend l’environnement mondial plus difficile. Avec elle, l’Union européenne, le Portugal, la République tchèque ou encore le Myanmar, au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), ont estimé que la Conférence gagnerait à élargir sa composition pour restaurer sa crédibilité.
Plusieurs délégations ont cependant nuancé ce tableau en soulignant, comme la Pologne ou la République de Corée, que l’an dernier, « pour la première fois en 22 ans », la Conférence était parvenue à se mettre d’accord sur la création de cinq organes subsidiaires et à adopter quatre rapports. La France s’est félicitée de ces discussions techniques qui tranchent avec « les débats généraux et politisés » et permettront, a-t-elle espéré, d’engager le débat sur un traité interdisant la production de matières fissiles.
« C’est un pas significatif sur lequel la Conférence doit bâtir ses futures sessions », a renchéri la délégation des Pays-Bas, pour qui les discussions interactives menées au sein des organes subsidiaires ont démontré que le progrès était à portée lorsque les efforts sont concentrés sur des sujets clefs.
Avec elle, le Royaume-Uni a espéré que ces rapports serviront de base de travail en 2019. Mais ceci est encore loin de la revitalisation souhaitée, a tempéré la Suisse pour qui une approche pragmatique, basée sur des avancées graduelles et autres que contraignantes, pourrait aider à sortir de l’impasse.
Si pour le Myanmar, au nom de l’ASEAN, ou l’Égypte, au nom de la Ligue des États arabes, les mécanismes actuels sont encore bien loin des attentes, le Pakistan a défendu les instances de l’ONU comme les seules valables pour avancer: « négocier en dehors de la Conférence du désarmement ne servira à rien », a-t-il estimé, car ce n’est qu’en son sein que peuvent négocier sur un pied d’égalité toutes les puissances militaires. Aussi, a-t-il recommandé de composer « avec les dynamiques politiques ». Et celles-ci sont puissantes.
La Russie a ainsi déploré la « surpolitisation sans précédent » des débats ainsi que les prises de position qui vont à l’encontre des règles de fonctionnement des organes, pointant notamment la tentative d’empêcher un État de présider la Conférence, en dépit du respect du principe de rotation géographique.
Convaincu qu’il n’y a pas d’alternative au multilatéralisme en matière de désarmement, l’Iran a affirmé pour sa part que ce sont les États nucléarisés qui s’opposent à tout progrès et qui font valoir des arguments techniques pour masquer leur manque de volonté.
« Le cœur du problème est la résistance d’un petit groupe d’États à se soumettre aux règles du droit international », a regretté, à son tour, l’Afrique du Sud.
Un grand nombre de délégations se sont en outre inquiétées du manque de financement approprié des mécanismes de désarmement qui ont conduit parfois à écourter ou annuler des réunions. La France a dénoncé une situation inacceptable, tandis que le Mexique a même estimé que les ressources allouées à la Conférence du désarmement seraient mieux employées à financer les objectifs de développement durable.
L’Afrique du Sud a de plus fait observer que ce sont à la fois les membres et les non-membres de cet organe qui couvrent les frais de ce qui est devenu une conférence inactive.
« Tous les États Membres de l’ONU sont donc en droit de demander des comptes et de la rendre redevable de ces ressources engagées pour ne pas fonctionner », a-t-il asséné.
À noter également que plusieurs délégations, dont celle du Bangladesh et de l’Indonésie, au nom du Mouvement des pays non alignés, ont réclamé la tenue d’une quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement.
La Première Commission a ainsi achevé ses débats sur les points à son ordre du jour et s’apprête désormais à examiner les projets de résolution. Elle reprendra ses travaux demain, jeudi 1er novembre, à partir de 15 heures.
DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR
Désarmement et sécurité sur le plan régional (suite)
M. BASSEM YEHIA HASSAN KASSEM HASSAN (Égypte), s’exprimant au nom de la Ligue des États arabes, a réitéré l’importance que revêt pour la région l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. Il a appelé les États à appliquer les résolutions pertinentes et le Secrétaire général à jouer un rôle actif sur cette question. La Ligue veut aller de l’avant et espère arriver à un Moyen-Orient sans armes de destruction massive dans une des régions les plus enclines à l’instabilité, a-t-il souligné. Il a expliqué que, compte tenu de l’absence de mise en œuvre de la résolution de consensus adoptée lors de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) de 2010, la Ligue a essayé de sortir de l’impasse avec un nouveau projet de résolution. Mais « deux ou trois pays » ont rejeté cet effort et produit un autre document qui a sapé la solidité du TNP, a-t-il déploré. Il a averti du danger sur le plan humanitaire et de l’environnement que représente, selon lui, le refus d’Israël de rejoindre le TNP, le seul pays de la région à ne pas y avoir adhéré, dénonçant en outre que cet État refuse de soumettre ses installations à l’AIEA et de préciser ce qu’il fait de ses déchets nucléaires.
M. ENRI PRIETO (Pérou) a rappelé que les pays de sa région sont toujours confrontés à des défis liés au problème des inégalités. Grâce au soutien du Centre régional des Nations Unies pour la paix, le désarmement et le développement en Amérique latine et dans les Caraïbes, il a expliqué que les pays de la région ont pu réaliser des progrès de développement, notamment dans la mise en œuvre de normes de désarmement et de sécurité. Il a dénombré jusqu’à 115 activités d’aides techniques mises sur pied pour assister les États de la région, entre autres dans le cadre du Programme d’action relatif aux armes légères et de l’Instrument international de traçage. Le Centre, a-t-il ajouté, est aussi venu en aide au Pérou pour rédiger une nouvelle législation. Au mois d’août 2017, il a encore apporté une assistance technique à l’armée péruvienne pour détruire 18 000 armes obsolètes, conformément aux normes internationales. « L’identification des domaines dans lesquels le Centre doit travailler est primordiale », a-t-il toutefois souligné.
M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni) a regretté que certains pays et groupes s’emploient à saper les normes acceptées en matière de stabilité régionale. L’utilisation d’armes chimiques, par exemple, menace les efforts internationaux visant à éradiquer ces armes de haine, avec de claires implications pour la sécurité régionale, a-t-il souligné. Dans ce contexte, le Royaume-Uni reste fermement engagé en faveur d’une zone exempte d’armes de destruction massive et de systèmes de livraison au Moyen-Orient. Il a toutefois estimé que les propositions actuelles ne respectent pas les conditions nécessaires à un processus inclusif et efficace.
S’agissant de l’utilisation d’armes chimiques par le régime d’Assad en Syrie, le représentant a estimé que pour progresser sur cette question, les pays de la région doivent avoir la certitude que les autres se conformeront à la Convention sur les armes chimiques, exhortant le régime syrien à déclarer et détruire l’ensemble de son programme d’armes chimiques. Il a aussi salué la décision prise d’élargir le mandat de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour lui permettre d’identifier les utilisateurs d’armes chimiques en Syrie. Il convient à présent de soutenir les efforts du Secrétaire général en vue d’une mise en œuvre pleine et entière de cette décision.
Il a ajouté que la prévention de la prolifération nucléaire est un autre impératif pour la stabilité régionale. À cet égard, le Plan d’action global commun reste un accord précieux, a-t-il dit, saluant la confirmation par l’AIEA que l’Iran se conforme à ses engagements sur le plan nucléaire. Dans le même temps, le Royaume-Uni est préoccupé par certaines activités régionales de l’Iran, notamment son soutien à des acteurs non étatiques militants et la poursuite de son programme de missiles balistiques.
M. Liddle s’est également alarmé de la poursuite du programme nucléaire de la République populaire démocratique de Corée (RPDC). Tout en se félicitant des discussions en cours entre ce pays et les États-Unis, il a jugé vital que la RPDC prenne des mesures concrètes en vue d’une dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible. Avant cela, la communauté internationale doit veiller à l’application stricte des sanctions, a-t-il plaidé. Il a par ailleurs appelé la Fédération de Russie à se conformer intégralement au Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (Traité FNI).
M. SHIVANAND SIVAMOHAN (Malaisie) a dit l’importance de veiller au respect continu des instruments historiques comme la Charte de l’ASEAN, et le Traité d’amitié et de coopération. À cet égard, la Malaisie apporte son soutien aux efforts pour renforcer les mécanismes de l’ASEAN, y compris l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est plus la Chine, le Japon et la République de Corée (ASEAN+3), le sommet de l’Asie de l’Est, le Forum régional de l’ASEAN et la Réunion des ministres de la défense de l’ASEAN. Nous sommes confiants que ces plateformes continueront d’offrir des liens entre les États membres de l’ASEAN, et la communauté internationale leur permettant de partager les visions et les expériences dans de nombreux domaines.
Le représentant a souligné l’importance de réaliser les objectifs du Traité sur la zone exempte d’armes nucléaires en Asie du Sud-Est et a estimé que l’accession des États dotés d’armes nucléaires au protocole au Traité demeure impérative. La Malaisie appuie également la création d’une zone exempte d’armes nucléaires dans le Moyen-Orient.
Mme MICHAL SEHAYEK-SOROKA (Israël) a affirmé que, depuis la fin des années 70, le régime radical en Iran vise à exporter sa révolution vers d’autres pays du Moyen-Orient et ailleurs, que ce soit dans le golfe Arabique, en Afrique et au Maghreb, en Asie, en Amérique du Nord et du Sud et en Europe. Personne n’est à l’abri, a-t-elle averti. Le régime iranien, les gardiens de la Révolution et ses alliés tentent de créer des forteresses dans ces territoires et violent la souveraineté partout dans le monde. Fermer les yeux est une erreur grave car cela favorise le régime iranien. Et tendre la main ne marchera pas non plus car ce geste sera perçu comme une faiblesse et le régime iranien en tirera des avantages.
La représentante a indiqué que le terrorisme au Moyen-Orient a évolué et revêt de nombreuses formes mais que son unique objectif est de changer le mode de vie des modérés. Les terroristes veulent renverser les gouvernements dans le Moyen-Orient parce qu’ils ne sont assez radicaux, a-t-elle mis en garde. Ces acteurs non étatiques ont certes leurs propres desseins, mais certains d’entre eux sont aussi des instruments dans la « boîte à outils du terrorisme » du régime iranien.
La communauté internationale et les modérés doivent travailler ensemble sans hésitation, sans politique de deux poids, deux mesures, et sans se faire d’illusions face aux forces radicales, a-t-elle insisté. Nous devons tous adopter une approche proactive pour bloquer la prolifération, « à l’intérieur, à partir et vers le Moyen-Orient », des armes conventionnelles, des missiles, des technologies des fusées et des connaissances et des technologies sur les armes de destruction massive. Le danger croissant que représente un seul État Membre, dans ses activités nucléaires, de prolifération, de missiles et financières, est une grande préoccupation pour Israël. Les modérés, a-t-elle souligné, doivent adopter une approche constructive au lieu d’épuiser leur énergie et ressources dans des « programmes destructifs » qui ne nous mèneront nulle part et serviront uniquement à conforter les radicaux.
Poursuivant en arabe, Mme Sehayek-Soroka a affirmé que tout comme les autres pays modérés de la région, Israël est menacé par des puissances destructrices et participe au combat contre ces forces malveillantes. L’approche d’Israël a toujours été constructive: nous sommes prêts à travailler ensemble car les défis sécuritaires ne connaissent pas de frontières et les menaces posées par les extrémistes ne font que croître. Des interactions directes sur des plateformes bilatérales et régionales sont essentielles, a-t-elle ajouté.
M. MESHARI ALMUZAINI (Koweït) a réitéré l’importance de la création de zones exemptes d’armes nucléaires, tout particulièrement au Moyen-Orient. Pour y arriver, il a notamment jugé important qu’Israël signe le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et soumette ses installations au régime de vérification de l’AIEA. Le Koweït s’est dit prêt à accueillir les pourparlers entre les différentes parties pour promouvoir le désarmement. Il a également salué les discussions entre les États-Unis et la République populaire démocratique de Corée (RPDC), d’autant plus, a-t-il noté, que la tension entre les deux États avait atteint son paroxysme l’an dernier. Il a enfin appelé à l’universalisation des conventions propres au désarmement et à la non-prolifération.
M. ALI ROBATJAZI (République islamique d’Iran) a affirmé que la principale menace à la paix est due aux stratégies brutales et offensives du régime israélien qui, a-t-il dénoncé, a envahi tous ses voisins, mené plus de 15 guerres et commis tous les crimes internationaux imaginables. Et cela ne représente qu’une part de son « vandalisme régional », s’est-il insurgé.
Selon le représentant, « pendant trop longtemps » les alliés d’Israël ont ignoré les stratégies favorables à la paix et ont fait de mauvais choix. Et maintenant, ils s’en prennent à l’Iran et l’accusent des conséquences de leurs choix désastreux, s’est-il indigné. Le délégué a notamment cité invasion de l’Iran par l’Iraq, le soutien apporté à Al-Qaida et aux Taliban, l’appui à l’invasion israélienne au Liban, ainsi que les incursions régulières dans l’espace aérien de la Syrie et les bombardements commis au Yémen avec des avions occidentaux.
Les États-Unis et leurs « clients locaux » dans la région souffrent des conséquences de ces mauvais choix, mais on essaie ici de cacher la réalité. Est-ce l’Iran qui a obligé les États-Unis à faire ces mauvais choix? Est-ce notre faute si nous étions du bon côté de l’histoire en combattant Saddam Hussein, Daech et Al-Qaida? a-t-il lancé.
Le représentant iranien a ensuite affirmé que les États-Unis fournissent l’essentiel des armes utilisées au Yémen. Tout ce qui les intéresse c’est l’argent et de vendre encore plus d’armes sans aucune autre perspective, a-t-il accusé.
Enchaînant, il a souligné que par son adhésion en 2015 au Plan d’action global commun, l’Iran avait démontré que ses activités nucléaires étaient essentiellement pacifiques. De plus, après la conclusion de l’accord et conscient du déficit de dialogue et de confiance dont souffre, selon lui, la région du golfe Persique, l’Iran avait suggéré la tenue d’un forum régional pour combattre le terrorisme.
M. ANDREY BELOUSOV (Fédération de Russie) s’est dit préoccupé par les activités des « partenaires occidentaux » qui visent, selon lui, à saper la sécurité en Europe. Sous le prétexte propagandiste de contrer les menaces venues de l’Est, a-t-il poursuivi, il y a une augmentation sans précédent du personnel militaire de l’OTAN et des États-Unis dans les pays baltes. Il a affirmé que des bases sont créées dans ces pays afin d’accroître les contingents militaires le long des frontières russes. D’après ses chiffres, les effectifs déployés sont passés de 2 000 à 11 000 hommes entre 2015 et 2018. Au cours de la même période, il a aussi noté une augmentation du nombre de sorties de navires de l’Alliance, un accroissement de l’intensité de leurs vols de surveillance, mais aussi une multiplication par 12 des vols de bombardiers B52 et B1B. Il a ainsi dénombré 40 sorties de ces avions seulement depuis le début de l’année.
La différence entre les manœuvres militaires russes et celles de l’OTAN, a-t-il pointé, « c’est que les nôtres se déroulent sur notre territoire alors que celles des États-Unis se font chez leurs alliés ». Il a aussi précisé que les manœuvres russes sont à caractère défensif et anti terroristes, « alors qu’on ne peut pas en dire autant de celles de l’OTAN ». À ses yeux, ce surcroit d’activités vise uniquement la Russie. À cela s’ajoute l’augmentation des dépenses militaires. En 2019, a-t-il indiqué, le budget militaire des États-Unis va encore augmenter pour atteindre un montant historique alors que les dépenses russes baissent. « Cela démontre bien les intentions des Américains et de leurs alliés », a-t-il avancé. Se disant favorable pour tout effort visant à diminuer la tension dans le cadre d’un dialogue respectueux, il a souligné que l’activité militaire russe est sous contrôle international et qu’elle agit de manière transparente.
En ce qui concerne la présence russe en Moldova et en Ossétie du Sud, la Russie a insisté sur le fait que ses forces y sont déployées en vertu d’accords internationaux ou bilatéraux. Pour elle, cette présence est la garantie d’une stabilité et de la coexistence des peuples. Pour ce qui est de la soi-disant militarisation de la Crimée, il ne s’agit, selon lui, que d’une propagande organisée par l’OTAN pour dissimuler ses propres plans de visant à renforcer sa mainmise sur la région.
Mme MAJID ABDELQADIR ABDALLAH (Émirats arabes unis) a souhaité que l’on puisse parvenir à un environnement exempt d’armes nucléaires et autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. Elle n’en a pas moins réaffirmé le droit des États à utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques et a appelé à renforcer la confiance entre les États. Elle a invité la communauté internationale à déployer davantage d’efforts pour parvenir au consensus et à améliorer le travail de la Première Commission.
M. FRANCISCO VITAL ORNAI (Timor-Leste) a indiqué que son pays s’est associé, en 2007, au Traité d’amitié et de coopération en Asie du Sud-Est, et qu’il était par ailleurs devenu partie du Forum régional de l’ASEAN, convaincu de l’importance de la coopération internationale. Il a appelé tous les États à continuer de promouvoir ces instruments de paix et de dialogue pour renforcer la confiance et à appuyer la diplomatie préventive dans la région Asie-Pacifique, en respectant le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États.
Il a par ailleurs fait savoir qu’en 2014, le Timor-Leste a mis en place des instruments pour empêcher le blanchiment d’argent bénéficiant au financement du terrorisme. D’autres mesures ont également été adoptées en 2017 pour lutter contre la criminalité transnationale organisée et le trafic de drogue. Il a souligné que seule la coopération garantira la paix et la stabilité dans la région, qui est par ailleurs également confrontée au problème de la piraterie. Il a en outre affirmé que le Timor-Leste n’appuie aucune entité souhaitant mettre au point, acquérir ou transporter des armes de destruction massive ou leurs vecteurs.
M. BAKHTIYOR IBRAGIMOV (Ouzbékistan) a rappelé que l’entrée en vigueur du Traité portant création d’une zone exempte d’armes nucléaires en Asie centrale date de 2006 et a contribué à apaiser la région. Les États parties à ce Traité se sont engagés sans équivoque à interdire la possession et la production d’armes nucléaires, s’est-il félicité. Cet objectif est, selon lui, pleinement conforme avec le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) et le désarmement nucléaire. Il a noté en outre que cette zone est la première entièrement située dans l’hémisphère Nord et sans accès à la mer. La délégation ouzbèque a ensuite indiqué qu’elle va présenter un projet de résolution sur le Traité susmentionné.
M. PYE SOE AUNG (Myanmar) a estimé que la création de zones exemptes d’armes nucléaires dans les différentes régions du monde est une mesure efficace pour limiter la propagation géographique des armes nucléaires et contribue à la cause du désarmement nucléaire. Le représentant a réitéré l’engagement de sa délégation à préserver la région de l’ASEAN comme une zone exempte d’armes nucléaires et de toutes les armes de destruction massive. Il a reconnu l’importance de la mise en œuvre totale et effective du Traité sur la zone exempte d’armes nucléaires en Asie du Sud-Est et de son Plan d’action pour la période 2018-2022.
Le Myanmar appuie le Centre régional des Nations Unies pour la paix et le désarmement en Asie et dans le Pacifique pour son aide concrète et ses activités de renforcement de capacités afin de contribuer aux efforts nationaux et régionaux de contrôle des armes, du désarmement et de non-prolifération ainsi qu’à la promotion du dialogue, des mesures de renforcement de la confiance et de l’éducation en matière de paix et de désarmement.
Le représentant a par ailleurs jugé impératifs de reprendre les négociations au sein de la Conférence du désarmement et de rétablir la confiance entre les États Membres pour surmonter l’impasse actuelle.
Déclarations sur le mécanisme pour le désarmement
M. ANDREANO ERWIN (Indonésie) au nom du Mouvement des pays non alignés, a réaffirmé l’importance de la Conférence du désarmement. Il a appelé à travailler par consensus et à tenir compte des intérêts des États de façon équitable et équilibrée pour qu’aucun État n’ait un avantage sur les autres. Il a salué les efforts déployés au cours de la session 2018, mais a encouragé l’ensemble des États Membres à apporter le soutien politique nécessaire à la Conférence du désarmement pour qu’elle puisse s’acquitter de son mandat. Il s’est par ailleurs inquiété de la politisation de ses travaux.
Le représentant a ensuite appelé les États Membres à dégager un consensus au sein du Groupe de travail de la Commission du désarmement qui se penche sur les moyens à déployer pour parvenir au désarmement et à la non-prolifération nucléaires. Mais selon lui la principale difficulté est le manque de volonté politique des États pour progresser sur la voie du désarmement nucléaire. Il a réclamé la tenue de la quatrième session spéciale de l’Assemblée générale consacrée au désarmement. En outre l’absence de représentation de pays du Mouvement au sein du Bureau des affaires de désarmement est préoccupante, a-t-il ajouté, insistant sur l’importance, pour le Secrétaire général, de garantir une représentation équilibrée au sein de ce Bureau. Le représentant a également demandé que l’UNIDIR soit consolidé et ses fonctions de recherche étendues, comme prévu lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale.
M. BASSEM YEHIA HASSAN KASSEM HASSAN (Égypte) au nom de la Ligue des États arabes, a rappelé que le mécanisme du désarmement est un pilier essentiel des Nations Unies. Selon lui, l’impasse que rencontre la question du désarmement n’est pas forcément un problème de mécanisme, mais davantage un manque de volonté de la part de certains États qui, a-t-il affirmé, souhaitent conserver leur domination absolue. Il a appelé à relancer les efforts au sein de la Commission du désarmement sur la question du désarmement nucléaire. De même, il a jugé nécessaire de renforcer l’indépendance de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR) pour l’améliorer encore. Le délégué a souhaité également une meilleure synergie entre tous les organes de désarmement des Nations Unies. À ce titre, il a salué le Programme du désarmement du Secrétaire Général qui témoigne, selon lui, de la volonté de l’ONU de remettre le désarmement au centre de ses objectifs.
M. KYAW MOE TUN (Myanmar) au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a appelé à renforcer les normes universelles et élargir la portée des institutions du désarmement qui, a-t-il estimé, doivent être revigorées en intégrant notamment davantage les travaux des organismes de recherches. Les mécanismes de désarmement des Nations Unies ont permis de conclure des accords et traités mais il est inquiétant de voir le désarmement progresser si lentement en raison de l’érosion du multilatéralisme, s’est-il inquiété, fustigeant le manque de volonté des États. L’ASEAN souhaite voir renforcées les principales instances de désarmement de l’ONU comme la Première Commission, la Commission du désarmement et la Conférence du désarmement, ainsi que l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR). L’ASEAN est particulièrement préoccupée par l’impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement et appelle ses membres à s’accorder par consensus sur un programme de travail équilibré.
Le représentant a toutefois salué la création de cinq organes subsidiaires en son sein. Il a par ailleurs reconnu le rôle important et précieux de l’UNIDIR, jugeant toutefois nécessaire de consolider ses fonctions de recherches et d’information, comme prévu par le Document final de la première session extraordinaire de l’Assemblée générale. Pour l’ASEAN, les mécanismes actuels sont encore bien loin des attentes et il est temps d’identifier les moyens de se montrer plus efficace.
Mme SHEILA CAREY (Bahamas), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), s’est félicitée des avancées réalisées dans le cadre de la Conférence du désarmement. Elle a particulièrement salué la création de cinq sous-organes de discussion et a espéré que les délégations travailleront de concert pour sortir du statu quo et faire avancer les aspects essentiels du désarmement. La CARICOM s’est dite impatiente de poursuivre un nouveau cycle triennal pour aboutir à des consensus, notamment sur le désarmement nucléaire et la non-prolifération.
La CARICOM a souligné que le désarmement est un lien fondamental entre la paix et le développement durables. Elle a, à ce titre, salué les contributions importantes des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement, citant notamment les travaux du Centre en Amérique latine et dans les Caraïbes, qui a mené 115 activités dans le cadre du désarmement, de son mécanisme et de ses différents traités. Selon la déléguée, beaucoup de pays de la zone en ont profité.
La délégation a, enfin, salué le rôle de l’AIEA pour ses contributions à la sécurité, ainsi que celui joué par l’UNIDIR. Se disant fier de son appartenance au Traité de Tlatelolco, la CARICOM a dit espérer que le récent Traité d’interdiction des armes nucléaires fera progresser le désarmement. Elle a, en conclusion, reconnu l’importance des ONG et souligné la participation nécessaire des industriels de l’armement.
M. LINDA ANNE SCOTT (Namibie), qui a parlé au nom d’un groupe de 43 États Membres, a indiqué qu’il était clair lors de l’examen des défis de sécurité et des questions liées aux armes que les impacts liés au genre doivent être évalués. Les femmes, les hommes, les filles et les garçons subissent des menaces différentes durant et après les conflits. Ils sont affectés de manière différenciée par les armes et leurs flux dans des environnements sans conflits.
Analyser les perspectives de genre permet aussi un examen approfondi des hypothèses sous-jacentes sur la manière dont le genre façonne notre travail et la dynamique des efforts de désarmement. Le représentant a estimé qu’il reste encore beaucoup à faire pour intégrer la problématique hommes-femmes à l’ensemble des débats sur le désarmement et la sécurité internationale, tout en saluant le grand nombre d’initiatives déjà prises à ce jour, citant notamment l’augmentation du nombre de résolutions qui abordent la question du genre ou encore la création du Groupe international de l’impact des champions du genre pour le désarmement.
Pour Mme MARKETA HOMOLKOVA, déléguée de l’Union européenne, les trois instances de désarmement au sein de l’ONU sont irremplaçables, mais il faut veiller à les rendre plus efficaces pour qu’elles puissent remplir leur rôle et déboucher sur des résultats. Elle a estimé que cette Commission est la bonne enceinte pour concentrer les débats sur les défis majeurs qui se posent.
Elle a rappelé que la Conférence du désarmement est chargée de négocier les traités et autres instruments et normes et a regretté qu’elle ne parvienne pas dégager un consensus depuis plus de 20 ans. Davantage de volonté politique et de créativité sont nécessaires pour sortir de l’impasse, a estimé la déléguée.
L’Union européenne réitère sa volonté de voir s’élargir le nombre de ses membres et soutient la nomination d’un coordonnateur à cette fin. Elle s’est dite encouragée par la création de cinq organes subsidiaires pour approfondir les discussions techniques, élargir les domaines d’accord et envisager des mesures pour appuyer les négociations. Pour la première fois, il y a eu des progrès et cela pourrait constituer une bonne base de travail en 2019, s’est-elle félicitée.
La représentante a toutefois regretté que la Syrie ait assuré la présidence de la Conférence du désarmement, en mai et juin, pointant le manque de légitimité de cet État en raison de ses violations graves et répétées en matière de désarmement et de non-prolifération, à commencer par le recours à l’arme chimique et ses violations du droit international humanitaire.
Poursuivant, elle a indiqué que l’Union européenne fournit un appui financier important pour faciliter la participation des pays en développement de tous les continents à l’élaboration d’un traité sur les matières fissiles et a demandé le lancement des négociations en ce sens. La déléguée a aussi souligné le rôle fondamental et l’importance des recherches menées par l’UNIDIR sur le désarmement.
M. ENRIQUE J.M. CARILLO GOMEZ (Paraguay) a estimé que davantage de transparence dans les débats permettrait d’améliorer les travaux à la Conférence du désarmement et s’est dit favorable à une augmentation du nombre de ses membres. Il a reconnu la valeur de la Commission du désarmement et a considéré que ses recommandations devraient comprendre l’élargissement des zones exemptes d’armes nucléaires et l’octroi de garanties de sécurité négatives aux États non dotés.
Il a par ailleurs reconnu que les débats structurés au sein de la Première Commission permettent d’en savoir plus sur les positions nationales de chaque État.
Le délégué a ensuite insisté sur l’importance de faire avancer le désarmement dans un cadre multilatéral. Il a également estimé que la réforme du mécanisme de désarmement doit aborder la nécessité d’éliminer la pauvreté et d’avancer vers le développement durable. Pour ce faire, il a appelé à basculer les ressources consacrées au militaire vers le développement durable.
Mme SABRINA DALLAFIOR (Suisse) a relevé que la Conférence du désarmement a été en mesure, pour la première fois en 22 ans, de se mettre d’accord sur la création des cinq organes subsidiaires, tout en signalant qu’elle est encore loin de sa revitalisation souhaitée. 0 Elle s’est dite convaincue qu’une approche pragmatique, basée sur des avancées graduelles et une approche nouvelle, autre que contraignante, pourrait aider à sortir de l’impasse.
La représentante s’est dite gravement préoccupée par la situation financière de nombreux traités et conventions qui s’est encore aggravée en raison du non-versement de certaines contributions obligatoires des États Membres. Elle a espéré que des mesures seront prises pour décourager les non-paiements, insistant sur le fait que les conventions ont besoin de prévisibilité.
S’agissant de l’UNIDIR, dont elle a salué l’importance, elle a évoqué le rapport qui recommande que cet Institut articule ses travaux autour d’un plan stratégique pluriannuel pour améliorer son fonctionnement. Elle s’est également préoccupée du fait que la contribution de l’ONU a décru et ne représente plus que 9% du budget de l’Institut. La contribution venant du budget ordinaire de l’ONU devrait couvrir, au minium, le salaire de la directrice et de son adjoint, a estimé la représentante.
Intervenant une nouvelle fois en sa capacité nationale, M. BASSEM YEHIA HASSAN KASSEM HASSAN (Égypte) a rappelé que le mécanisme du désarmement est un pilier essentiel des Nations Unies. Selon lui, l’impasse que rencontre la question du désarmement n’est pas forcément un problème de mécanisme, mais davantage un manque de volonté de la part de certains États qui, a-t-il affirmé, souhaitent conserver leur domination absolue. Il a appelé à relancer les efforts au sein la Commission du désarmement sur la question du désarmement nucléaire. De même, il a jugé nécessaire de renforcer l’indépendance de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR) pour l’améliorer encore. Le délégué a souhaité également une meilleure synergie entre tous les organes de désarmement des Nations Unies. À ce titre, il a salué le Programme du désarmement du Secrétaire général qui témoigne, selon lui, de la volonté de l’ONU de remettre le désarmement au centre de ses objectifs.
Le représentant du Portugal a regretté que depuis plus de 20 ans, la composition de la Conférence du désarmement n’ait pas bougé et demeure fermée à de nouveaux pays comme le Portugal. Il a regretté l’absence de consensus et a jugé que la question du nombre de ses membres est décisive pour sa revitalisation. De plus, tous les États doivent contribuer au coût de la Conférence du désarmement, qu’ils en soient membres ou pas. Pour le représentant, les possibilités d’élargissement doivent être rapidement étudiées et il a appuyé la nomination d’un coordonnateur en la matière.
Le délégué s’est par ailleurs dit encouragé par les mesures pratiques adoptées dans le domaine des armes classique et a demandé la reprise immédiate des négociations en vue d’un traité sur la production des matières fissiles.
M. MAYANK JOSHI (Inde) a souligné le rôle fondamental de l’ONU pour promouvoir le désarmement. Selon lui, le mécanisme ne souffre pas de déficience, c’est surtout l’attitude de certains États Membres qui entrave son bon fonctionnement. À ses yeux, la Première Commission représente la foi de la communauté internationale dans le mécanisme du désarmement dans un cadre multilatéral. C’est aussi une plateforme pour exprimer son point de vue sur cette question, a-t-il ajouté.
Il a assuré que l’engagement de l’Inde en faveur de la Conférence du désarmement n’a pas changé. Le délégué a d’ailleurs trouvé encourageantes les discussions de fond qui se sont tenues au sein des organes subsidiaires.
Accordant aussi beaucoup d’importance à la Commission du désarmement, il a salué l’adoption par consensus de mesures sur les questions de l’espace extra-atmosphérique et des armes classiques. Le Bureau des affaires de désarmement des Nations Unies est un partenaire indispensable, a ajouté le délégué qui a par ailleurs souhaité une plus grande cohérence entre New-York et Genève. Enfin, pour profiter encore davantage de l’expertise de l’UNIDIR, il a jugé qu’il faudrait convoquer un atelier à Genève en 2019 sur les sujets qu’il couvre.
M. SHUAIB MAHOMED (Afrique du Sud) s’est préoccupé de la paralysie des mécanismes de désarmement au sein de l’ONU, qui sape leur crédibilité et mine leur pertinence. L’impasse de la Conférence du désarmement n’est pas tenable, a-t-il averti. Celle-ci a été créée pour mener à bien des négociations multilatérales sur le désarmement et force est de constater qu’elle n’exécute donc pas son mandat. Le cœur du problème est la résistance d’un petit groupe d’États à se soumettre aux règles du droit international, a-t-il regretté. De plus, ce n’est pas un nombre limité de membres qui assume les coûts de fonctionnement de cette impasse prolongée, a-t-il noté, rappelant que ce sont à la fois les membres et les non-membres de cet organe qui couvrent les coûts de ce qui est devenu une Conférence inactive. Tous les États Membres de l’ONU ont donc le droit de demander des comptes et de la rendre redevable de ces ressources engagées pour ne pas fonctionner, a-t-il asséné.
L’Afrique du Sud, a—t-il poursuivi, estime que ces ressources seraient mieux utilisées pour combattre la pauvreté et pour répondre aux besoins fondamentaux des populations. Elle est prête à étudier toute proposition qui permettrait de sortir de l’impasse.
Mme ANAR FAZYLOVA (Kazakhstan) a relevé les multiples entraves qui ont marqué le mécanisme de désarmement constitué de la Conférence du désarmement, de la Commission du désarmement et de la Première Commission, et complété par l’UNIDIR et le Bureau des affaires de désarmement. Elle a constaté que l’équilibre entre ces trois organes qui a été perdu. « Les perspectives nationales l’emportent sur le bien commun », a-t-elle déploré.
Pour elle, la Première Commission doit être un exemple d’unité. Mais, malgré les déclarations de bonnes intentions de beaucoup d’États, elle a constaté que peu de résolutions ont été adoptées par consensus. Rappelant que la Conférence du désarmement est la seule enceinte multilatérale à même d’avancer sur ces questions, elle a regretté qu’elle n’ait pas pu s’acquitter de son mandat. Tous les traités existants ont été négociés au sein de cette Conférence, a-t-elle souligné.
Regrettant l’impasse dans laquelle elle se trouve, elle a salué toutefois les cinq nouveaux organes subsidiaires au sein desquels beaucoup de travaux sont effectués. Considérant comme essentiel le travail de recherche et d’information de l’UNIDIR, la déléguée a encouragé les États Membres à apporter leur soutien financier et politique à ce complément au mécanisme de désarmement.
Elle a enfin généreusement remercié les organisations de la société civile qui ont été championnes pour plaider la cause du désarmement. Le prix Nobel 2017 remis à la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires est pour elle la démonstration de ce pouvoir d’influence.
Pour Mme DAIRE COURTNEY (Irlande), la Première Commission est une enceinte importante pour définir le programme de désarmement, et elle a jugé nécessaire d’associer la société civile à ses travaux. L’absence de progrès en matière de désarmement, voire le retour en arrière observé, conduit à un environnement mondial plus difficile, s’est-elle inquiétée. Sortir de l’impasse la Conférence du désarmement est devenu une priorité, a-t-elle souligné. L’Irlande qui en est membre depuis vingt ans, n’a vu aucun progrès pendant cette période et elle soutient l’élargissement du nombre de ses membres afin d’accroître la crédibilité de cet organe en tant qu’enceinte sans exclusive.
Elle a par ailleurs constaté que la Conférence du désarmement est bien financée alors que les ressources se font rares. Il faut dépasser les intérêts nationaux pour avancer et le désarmement doit redevenir une priorité, a-t-elle insisté, déplorant que plusieurs réunions de désarmement aient été annulées ou écourtées faute de financement adéquat. Elle a appelé les États à assumer leurs responsabilités, notant qu’un bon financement est indispensable à l’avancée des travaux.
Elle a aussi insisté sur l’importance d’assurer le financement à long terme de l’UNIDIR, en raison de l’apport substantiel de l’Institut aux travaux de la Conférence.
M. Yann HWANG (France) a rappelé que, plus que jamais, les régimes de non-prolifération subissent de fortes contraintes, voire de sérieuses violations. La communauté internationale doit en prendre toute la mesure et répondre avec la plus grande fermeté, a-t-il estimé. Il s’est dit vivement préoccupé par la violence croissante et la polarisation des débats sur la non-prolifération nucléaire et a estimé que les progrès ne peuvent être réalisés qu’en rapprochant les points de vue non en les divisant, par une approche inclusive.
Il a rappelé l’attachement de sa délégation à la Conférence du désarmement, « qui a permis de négocier de grands traités de désarmement », et regretté son blocage malgré des progrès encourageants réalisés en 2018 avec la mise en place d’organes subsidiaires. Il n’y avait eu auparavant que des débats généraux et politisés: ces discussions techniques, notamment sur le traité interdisant la production de matières fissiles, ont permis de dépasser certains clivages, s’est-il félicité. Il a également salué l’adoption de quatre rapports qui donneront une base solide aux prochaines sessions et souhaité que ces organes subsidiaires soient reconduits d’année en année.
Le représentant s’est par ailleurs félicité de l’ouverture d’un nouveau cycle triennal de la Commission du désarmement et de l’ajout inédit d’un segment spatial à l’ordre du jour. La France est toutefois vivement préoccupée par les graves problèmes de financement que connaissent les conventions sur le désarmement. Il est inacceptable de voir certaines réunions annulées faute de financement a-t-il insisté en appelant à un « sursaut collectif ».
Enfin, il a insisté sur l’importance de l’UNIDIR.
M. NAZIM KHALDI (Algérie) a souligné la nécessité de préserver et de renforcer la nature, le rôle et les objectifs de la triade chargée du désarmement au sein de l’ONU. À cet égard il s’est profondément inquiété, comme beaucoup, de voir la Conférence du désarmement incapable de parvenir à un consensus et a jugé « intolérable » cette paralysie en cours depuis 20 ans, d’autant plus qu’elle nuit aux États non nucléaires.
Selon lui, cette impasse n’est pas due aux ratées de la Conférence du désarmement, ni à son mode opératoire ou à ses règles de fonctionnement. Si la Conférence ne peut pas remplir son mandat, a-t-il affirmé, c’est parce que les États Membres ne font pas preuve de la volonté politique nécessaire pour avancer vers le désarmement nucléaire et parvenir à un programme de travail global et équilibré.
Droits de réponse
L’Iran est le principal sponsor du terrorisme, a commencé le représentant des États-Unis, citant notamment pour preuve l’annonce, hier, que le Gouvernement du Danemark a réussi à déjouer un complot ourdi par trois ressortissants iraniens. L’objectif de l’Iran c’est aussi de rayer Israël de la carte, a-t-il poursuivi. Jugeant que ce régime n’a aucune crédibilité, il a estimé que même si l’Iran se décrit comme un État épris de paix et de multilatéralisme, « il ne trompe personne ». Il a ensuite annoncé que le 4 novembre, son gouvernement adoptera des mesures pour « rendre très compliqué » le financement du terrorisme par cet État.
À la Russie, il a demandé qu’elle cesse de violer le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (Traité FNI), et de tenter de redessiner les frontières en Europe par la force.
Le représentant de l’Iran a catégoriquement rejeté les accusations portées contre lui par le régime Israélien. Israël essaie selon lui de se présenter comme modéré, mais il ne peut pas masquer ses actions déstabilisantes. « Son histoire est peuplée d’agressions contre ses voisins, a-t-il jugé. Et c’est un régime raciste digne de l’Apartheid. » Rappelant que le pays refuse d’adhérer au TNP et aux Conventions sur les armes chimiques et biologiques, il l’a désigné comme le seul obstacle à la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. Pour lui, le fait que ce régime détienne des armes nucléaires constitue la pire menace dans la région.
À la délégation des États-Unis, il a affirmé que le recrutement des extrémistes au Moyen-Orient est dû à l’invasion étrangère qui a commencé en Palestine, puis à leurs interventions militaires qui ont refaçonné l’architecture régionale. Demandant aux États-Unis de se débarrasser de leur « dépendance à la violence », il les a appelés à constater l’inefficacité des sanctions pour construire la paix. Il a rappelé que le retrait américain du Plan d’action global commun avait été critiqué par leurs propres alliés. Les accusant d’être le principal parrain du terrorisme dans le monde arabe, il a jugé que l’apparition de groupes terroristes et le cycle de violence barbare dans la région remontent au début des années 2000, à la suite des actions américaines.
Le représentant de la Fédération de Russie a dénoncé le fait que les États-Unis ne s’acquittent pas de leurs obligations au titre du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (Traité FNI) depuis l’an 2000 et refusent tout dialogue. Les États Unis ont saboté le travail de la Commission consultative spéciale et de ses organes créés dans le cadre de l’accord, en particulier pour le règlement de questions complexes apparues à propos des obligations des États parties à ce Traité. À partir de 2013, a-t-il poursuivi, les États-Unis ont commencé une campagne agressive pour discréditer la Russie en tant que Partie à cet accord en rejetant toute possibilité de discuter des problèmes apparus. En 2016, les États-Unis ont convenu de parler de préoccupations mutuelles dans le cadre de cette Commission: la Russie a fourni des informations détaillées et complètes jusqu’aux caractéristiques techniques des fusées et les résultats des essais de ces missiles. Mais, a-t-il déploré, les États-Unis continuent de spéculer sur les violations commises par la Russie, tout en refusant de fournir la moindre information pour répondre aux préoccupations soulevées par les Russes depuis l’an 2000.
Pourquoi les États-Unis ont décidé de « la diplomatie du mégaphone » plutôt que de parler de façon constructive des problèmes de cet accord avec nous? La réponse, a dit le représentant, est venue le 20 octobre dernier quand le Président Trump a déclaré que son pays sortait du Traité et annonçait le déploiement de nouveaux missiles.
Les accusations contre la Russie sont sans fondement: les seuls à avoir violé le Traité FNI, ce sont les États-Unis et c’est la raison pour laquelle ils ont décidé de se retirer, a martelé le délégué, qui a par ailleurs dénoncé le fait que les États-Unis ont plus de 700 bases dans le monde dont 170 autour de la Russie.
Le représentant de la Syrie a dénoncé le rôle « démoniaque » joué par l’Union européenne en accordant tout son soutien à Israël. Selon lui, l’Union européenne a créé les réacteurs nucléaires et la technologie par lesquels ce pays lance ses missiles sur son pays, affirmant dans la foulée que les États-Unis cherchent à démolir la Syrie. Ni l’Union européenne, ni les États-Unis ne sont habilités à lancer des accusations alors qu’ils sapent les efforts de conciliation en se retirant de traités internationaux et violent les traités de non-prolifération, a-t-il accusé.
Le représentant de l’Ukraine a fustigé les propos de la délégation russe selon laquelle l’OTAN ferait tout pour attaquer une Russie pacifique et innocente, y voyant une nouvelle tentative de détourner l’attention de la communauté internationale de sa politique hostile à l’égard de ses voisins. Dénonçant ses activités déstabilisantes en Géorgie, Moldova et en Ukraine, le délégué a prévenu que la Russie considère ces territoires comme faisant partie de la Russie.
La déléguée du Moldova a dénoncé la présence des forces militaires russes dans la région de Transnistrie, sans l’assentiment du pays hôte, ni mandat international, ainsi que l’appui militaire russe aux structures du pouvoir illégal en Transnistrie. « Nous rejetons toutes tentatives de légitimer cette présence », a-t-elle affirmé.
Exerçant son deuxième droit de réponse, le délégué des États-Unis a affirmé que le régime d’Assad détruit la Syrie depuis sept ans et l’a accusé d’avoir attaqué son propre peuple avec du gaz.
« C’est très difficile de répondre à la Russie », a-t-il poursuivi. « Face aux preuves de violation d’un traité, ils se contentent de dire ‘Non, c’est vous qui l’avez violé’ ». Assurant avoir fourni à la Russie beaucoup de preuves sur ses activités illégales, il a souligné qu’aucun traité ne peut fonctionner quand l’un des membres ne le respecte pas.
« Nous avons entendu une déclaration des États-Unis riche en affirmations erronées et en hypocrisie », a affirmé à son tour le délégué de la Syrie. Accusant les Administrations américaines d’avoir utilisé des armes interdites en Syrie, notamment l’uranium appauvri et le phosphore blanc, il leur a reproché également de développer leur arsenal nucléaire en violation du TNP et d’autres conventions, mais aussi de disposer de programmes d’armes biologiques militaires. « L’un des éléments les plus importants de la politique étrangère américaine, c’est le mensonge, ils l’ont montré avec l’invasion de l’Iraq », a-t-il poursuivi. À ses yeux, les États-Unis cherchent à créer des prétextes afin de permettre une mobilisation des médias et de la diplomatie contre un pays qui refuse de courber l’échine devant eux.
Reprise des déclarations sur le mécanisme pour le désarmement
Mme ELISABETH TICHY-FISSLBERGER (Autriche) a regretté que la Conférence du désarmement n’ait pas pu s’acquitter de son mandat en tant que forum de négociation du désarmement depuis 22 ans. Alors que nous apprécions les efforts qui ont été déployés lors des délibérations de fond dans le cadre des organes subsidiaires de la Conférence sur le désarmement cette année, nous pensons que cela ne peut pas remplacer le respect du mandat de négociation, a tempéré la représentante. Briser cette impasse devrait rester la plus haute priorité des membres de la Conférence, en particulier dans le contexte actuel marqué par un environnement instable de sécurité, a-t-elle ajouté, les exhortant à faire preuve de la volonté politique nécessaire pour permettre à la Conférence d’honorer son mandat.
La représentante a appuyé l’appel pour l’élargissement des membres de la Conférence. Elle a également rappelé que l’un des facteur clefs pour le fonctionnement du mécanisme de désarmement des Nations Unies et des instruments connexes est leur financement. Toutes les parties doivent honorer leurs obligations financières et verser leurs contributions intégralement et à temps. À l’instar des travaux de l’UNIDIR, elle a aussi jugé nécessaire d’élaborer des stratégies concrètes pour assurer la pleine représentation des femmes dans les foras de désarmement et intégrer une perspective sexospécifique aux travaux liés au désarmement.
M. USMAN JADOON (Pakistan) a estimé que toute mesure de désarmement juridiquement contraignante doit être considérée et prise sur la seule base du consensus, et avec la participation de tous les acteurs, afin que les États puissent sauvegarder leurs intérêts particuliers. Depuis 1996, les mécanismes du désarmement des Nations Unies n’ont produit aucun résultat contraignant, a-t-il déploré. Certains États s’opposent même à l’ouverture de négociations qui contreviennent à leurs avantages militaires et leurs positions, d’autres rejettent certains instruments qu’ils jugent discriminatoires ou qui affecteraient leur sécurité; tandis que d’autres, enfin, veulent réaliser des progrès à tout prix au mépris de l’impact régional ou international sur la paix. À l’arrivée, ces facteurs poussent le désarmement dans l’impasse et le Pakistan partage la frustration et la déception qui résultent de ces stratégies.
Il a également pointé le fait que certains pays veulent que démarrent immédiatement les négociations sur un traité sur les matières fissiles, mais sans tenir compte des stocks existants. Une telle position ne contribuera pas au désarmement nucléaire, a-t-il souligné.
La Première Commission et la Commission du désarmement connaissent également de nombreux défis, a-t-il poursuivi. Le représentant a estimé que la solution au désarmement ne peut être trouvée en dehors de ces enceintes spécialisées. Or, il n’y a qu’au sein de la Conférence du désarmement que sont représentés tous les États militarisés importants qui peuvent négocier à pied d’égalité et selon la défense de leurs intérêts vitaux sur la base d’un consensus.
Pour le Pakistan, le véritable défi est de savoir composer avec les dynamiques politiques et les développements qui apparaissent hors des salles de conférence. Tant que les tentatives de parvenir à une sécurité égale pour tous seront entravées par des desseins hégémoniques au niveau mondial ou régional, la voie du succès continuera de nous échapper, a-t-il averti.
M. HAYRO BUDI NUGROHO (Indonésie) a estimé que la revitalisation des mécanismes de désarmement des Nations Unies ne seront pas réellement possibles sans la participation des États dotés d’armes nucléaires. Tous les autres États doivent aussi agir de manière responsable et s’acquitter de leurs engagements. Le représentant a appelé tous les pays à travailler ensemble et à montrer la volonté politique nécessaire pour assurer une avancée concrète sur toutes les questions au sein des mécanismes de désarmement.
Il a regretté que la Conférence du désarmement ait échoué à trouver un consensus sur le rapport de l’organe subsidiaire 4 sur les garanties de sécurité négatives. Il a espéré qu’en 2019, la Conférence du désarmement parviendra à s’accorder sur un programme de travail équilibré et complet. Le représentant a, en outre, exhorté les États membres de la Commission du désarmement à trouver un consensus concernant les recommandations du Groupe de travail pour parvenir à l’objectif du désarmement nucléaire et de non-prolifération.
M. MARCIN CZEPELAK (Pologne) a fait valoir que depuis l’an dernier des progrès importants avaient été enregistrés: ainsi la Conférence du désarmement a créé cinq organes subsidiaires et adopté quatre rapports, ce qui représente le premier accomplissement en 22 ans, s’est-il félicité. Il a espéré que ces contributions permettront de poursuivre les travaux l’an prochain au sein de la Conférence du désarmement et d’ouvrir la voie à l’élaboration de nouveaux instruments internationaux. Il a salué le Programme du désarmement du Secrétaire général, « car il est important que ce type d’initiatives provienne du pinacle des Nations Unies ».
Le représentant a ensuite suggéré d’intégrer davantage les idées des États Membres, des ONG, de la société civile, des militants et des chercheurs. Le désarmement n’est pas une abstraction, c’est un processus complexe, fragile et lourd qui doit être conduit dans un environnement propice pour lancer de nouvelles opérations, a-t-il souligné.
Tout en appuyant pleinement l’approche multilatérale, il a estimé que les pistes bilatérales de la diplomatie traditionnelle devaient être aussi exploitées. Enfin, il a plaidé pour une meilleure coordination entre les grands centres de désarmement et non-prolifération des Nations Unies à Genève, New York et Vienne, avec un échange d’informations en temps réel.
M. REINT VOGELAAR (Pays-Bas) a rappelé que son pays a lancé cette année sa stratégie étrangère et de sécurité intégrée. Citant au rang de ses priorités clefs le désarmement, le contrôle des armes, la non-prolifération et la cybersécurité, il a ajouté que le multilatéralisme était d’une importance fondamentale pour mener à bien ces missions puisque l’environnement sécuritaire international rejaillit directement sur la sécurité intérieure.
Il s’est dit encouragé par des développements positifs dans la machinerie du désarmement. Pour la première fois depuis 22 ans, le travail substantiel réalisé cette année à la Conférence du désarmement a conduit à l’adoption par consensus de quatre rapports. « C’est un pas significatif sur lequel la Conférence doit bâtir ses futures sessions », a ajouté le délégué. Il a notamment salué les discussions interactives dans les organes subsidiaires qui ont démontré que le progrès était à portée lorsque les efforts sont concentrés sur des sujets clefs.
Dans une veine similaire, il s’est félicité de l’attention grandissante consacrée à la question du genre dans la machinerie du désarmement. Il a jugé que la diversité accroissait la capacité des délégations à trouver des solutions innovantes et créatives. Rappelant que le Secrétaire général a souligné que le développement de la science faisait peser des risques sur la paix et la sécurité, il a considéré que la Conférence du désarmement devrait adopter une approche plus flexible de ces questions. Il a notamment cité la possibilité d’adopter des mesures non juridiquement contraignantes, comme des codes de conduite, des principes et des feuilles de route. Il a aussi constaté que la participation du monde académique et des groupes de réflexion (think-tanks) dans les organes subsidiaires de la Conférence du désarmement apportait une réelle plus-value.
Hélas, a-t-il conclu, il y a aussi des raisons de s’inquiéter. Pointant les difficultés financières des différents organes des traités, il a rappelé que ne pas s’acquitter de ses obligations en la matière mettait ces entités à risque et minait les progrès de la machinerie du désarmement dans son entier.
Mme VANESSA WOOD (Australie) s’est dit « encouragée » par certains développements, cette année, dans la « machinerie du désarmement » et a appelé à saisir cette dynamique pour aller de l’avant en 2019. Les avancées significatives réalisées dans le cadre de la Conférence du désarmement dépassent de loin ce qui a été accompli depuis des années, s’est-elle félicitée. Cela reflète, selon elle, la volonté des États Membres d’approfondir la compréhension des positions respectives. De même, elle a salué l’adoption du programme de la Commission du désarmement, présidée cette année par son pays, précisant qu’il s’agissait de l’adoption la plus rapide depuis 2006.
En revanche, elle a fait part de sa préoccupation s’agissant de la « crise de financement » pour la mise en œuvre des conventions sur le contrôle des armes. Certains États tardent à honorer leurs contributions et parfois même ne s’en acquittent pas du tout, a-t-elle déploré.
M. DILIP KUMAR PAUDEL (Népal) a estimé que les mécanismes et les organes de désarmement existants sont capables de faire progresser le régime de désarmement s’ils sont utilisés de manière plus régulière et plus efficace. L’engagement politique de tous les États Membres, en particulier de ceux dotés d’armes nucléaires, est particulièrement important à cet égard, a-t-il ajouté. Il a recommandé que l’ensemble des États, qu’ils soient nucléaires ou autres, puissent participer aux délibérations et aux négociations sur le désarmement. En outre, les pays les moins avancés ne sont pas de simples observateurs, a-t-il souligné. Ils font face aux conséquences disproportionnées et indiscriminées de l’emploi des armes et de la prolifération des armements. Il faut donc leur accorder la même opportunité au sein des mécanismes internationaux de désarmement, a plaidé le délégué.
M. JULIO HERRAIZ ESPAŇA (Espagne) a estimé que les mécanismes de désarmement des Nations Unies demeurent nécessaires et utiles, tout en insistant sur l’importance de maintenir le consensus pour qu’ils puissent fonctionner. Les mécanismes de désarmement, a poursuivi le délégué, ont besoin de retrouver leur besoin de crédibilité et doivent favoriser le désarmement nucléaire. Il faut aussi se concentrer sur les questions actuelles de sécurité.
Le représentant a ensuite dénoncé les tentatives de nuire au caractère multilatéral de La Conférence du désarmement. Il a jugé que le moment est opportun pour entamer les négociations sur un traité sur l’interdiction des matières fissiles. D’ailleurs, les succès qu’a connus la Conférence du désarmement l’an dernier démontrent qu’avec de la patience et de la volonté politique, il est possible d’aboutir à des résultats concrets.
Le délégué a par ailleurs espéré que de plus en plus de femmes contribueront aux travaux des mécanismes de désarmement qui, a-t-il ajouté, doivent être financés adéquatement pour qu’ils puissent s’acquitter de leurs mandats.
Pour M. ANDREY BELOUSOV (Fédération de Russie), on ne peut élaborer de nouveaux régimes de désarmement que dans le cadre des mécanismes existants, y voyant un gage du respect des principes qui régissent le désarmement. Chaque élément de la triade des Nations Unies du désarmement doit s’acquitter efficacement des fonctions qui lui ont été confiées et respecter à la lettre son mandat en évitant la politisation aux dépens du consensus, a-t-il souligné. Hélas, a-t-il déploré, en plus des problèmes existants, on a observé récemment dans les instances une surpolitisation des débats qui y sont menés. Ceci distrait les États Membres de l’ordre du jour, comme ce fut le cas au sein de la Conférence du désarmement.
Le représentant a notamment dénoncé les positions qui vont à l’encontre des règles de fonctionnement des organes, pointant notamment la tentative d’empêcher un État de présider un organe conformément à la rotation géographique. Il a aussi décrié la tendance à examiner des questions importantes pour sécurité mais situées au-delà du mandat de l’instance concernée, comme, par exemple, en faisant adopter un rapport « très technique et procédurier ». Cette tendance existe aussi en Première Commission: la politisation de ses travaux entraîne une polarisation et donc des difficultés à parvenir au consensus, comme cela a déjà été observé. Mais cette année, a-t-il déploré, ce phénomène a atteint un niveau sans précédent, citant « pour preuve » le vote, la semaine dernière, pour savoir si oui ou non la Première Commission devait être saisie du projet de résolution russe.
Cette année, un nouveau point consacré à l’élaboration des mesures de confiance dans l’espace extra-atmosphérique a été ajouté et des débats de fond ont été menés. Cependant, la position de la Russie n’est pas reflétée dans le rapport du Secrétaire général, a-t-il regretté.
M. ABDULLAH HALLAK (République arabe syrienne) a dit que la présidence syrienne de la Conférence avait pour objectif de parvenir à un consensus sur son programme de travail de la Conférence, et de la sortir de l’immobilisme. Mais les États-Unis ont sapé les travaux en posant des questions qui n’ont rien à voir avec les travaux. Les États-Unis, la France et la Grande Bretagne violent le Règlement intérieur de la Conférence. Ils ne veulent pas accepter une règlementation des activités dans l’espace espace extra-atmosphérique-atmosphérique. Le représentant a également dénoncé un mémorandum français sur l’informatique qui doit être retiré de l’annexe des résumés des réunions de la Commission. Les États-Unis ont aussi entravé l’adoption du rapport annuel de la Commission pour des raisons politiques, a indiqué le délégué. Ce pays ne pourra pas ainsi assumer des responsabilités au sein de la Commission l’année prochaine, a averti le représentant syrien.
M. FAIYAZ MURSHID KAZI (Bangladesh) a partagé la frustration ressentie face à l’impasse dans laquelle se trouve la Conférence du désarmement. Ceci ne peut durer: les tensions actuelles devraient nous inciter à un nouvel élan, a-t-il estimé. À cet égard, il a salué les « modestes progrès » réalisés par la Conférence du désarmement. Il a appuyé l’idée de convoquer une quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement, afin de réviser les mandats des organes pertinents des Nations Unies au vu des défis actuels et à venir. Il a aussi souhaité que les délibérations de la Première Commission soient mieux adaptées aux défis du désarmement et jugé nécessaire d’évaluer le nombre et le thème des résolutions existantes pour éviter les doublons. Il a ensuite salué la décision de l’Allemagne de retirer sa résolution sur les mesures pratiques de désarmement.
Il est essentiel, a-t-il souligné, de dépasser le mode opératoire du siècle précédent pour faire des organes existants des instances efficaces. Il a par ailleurs jugé important d’examiner la question de l’espace extra-atmosphérique en tenant compte des aspirations des pays en développement.
Mme HU HUIFANG (Chine) a estimé que devant la situation sécuritaire actuelle, il faut renforcer les mécanismes de désarmement des Nations Unies et non pas les affaiblir. Leur rôle est irremplaçable comme celui de la Première Commission, a-t-elle insisté. Elle a également appelé les États Membres à faire preuve de volonté politique et à fournir des efforts diplomatiques, pour privilégier l’intérêt collectif et abandonner l’idée de sécurité absolue. Il faut mettre en place un nouvel ordre du jour compte tenu de la situation sécuritaire qui prévaut, a suggéré la représentante, qui a souligné que pour être efficaces, les mécanismes de désarmement doivent tenir compte de l’apparition de nouveaux problèmes.
Pour M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni), l’atout de la Conférence du désarmement est que tous les États dotés de l’arme nucléaire et les autres grandes puissances militaires peuvent y mener des débats de fond en tenant compte de leurs intérêts sécuritaires, sur la base du consensus. C’est la seule instance dans laquelle peut être négocié un accord, et la pierre angulaire des efforts de désarmement, a-t-il souligné. Il a imputé la lenteur des progrès au manque de volonté politique de certains États. Les cinq organes subsidiaires et les quatre rapports adoptés doivent constituer la base des travaux de l’an prochain, a-t-il souligné.
Le représentant a également appelé à renforcer et à bien financer les mécanismes existants pour leur permettre de jouer leur rôle. Il a dit l’importance de trouver des solutions aux problèmes structurels de certaines conventions, tout en reconnaissant qu’ils ne pourront être surmontés que si tous les États parties versent leur contribution et payent leurs arriérés. Enfin, il a salué les travaux de l’UNIDIR et a souhaité une meilleure structure de financement pour cet Institut.
M. MARTIN KLUCAR (République tchèque) a déploré que la Conférence du désarmement n’ait pas été à la hauteur des attentes de la communauté internationale, depuis plus de deux décennies, dénonçant notamment son impasse persistante et son incapacité à entamer des négociations de fond. Il a également regretté le manque de progrès en ce qui concerne l’élaboration d’un traité interdisant la production de matières fissiles.
Il a appuyé la nomination d’un coordonnateur spécial pour lancer le débat sur l’élargissement de la Conférence. L’augmentation de la composition de la Conférence favoriserait la transparence et la nature inclusive de ses travaux et permettrait aussi à la Conférence de rétablir sa crédibilité.
Le représentant a par ailleurs salué le fait que la Commission du désarmement ait réussi, l’an dernier, après 18 ans d’impasse, à adopter des recommandations sur les mesures de renforcement de la confiance dans le domaine de armes classiques.
Mme MYUNG EUNJI (République de Corée) a salué la conclusion réussie de la session de fond de la Commission du désarmement, déplorant toutefois qu’elle ait échoué à adopter les recommandations de son Groupe de travail II sur la transparence et les mesures de renforcement de la confiance dans l’espace extra-atmosphérique, lesquelles visent, a-t-elle rappelé, à prévenir une course à l’armement dans l’espace.
S’agissant des délibérations sur le désarmement nucléaire et la non-prolifération, elle a estimé que le calendrier des États Membres doit viser la Conférence des Parties chargée d’examiner le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2020.
La représentante a ensuite fait part de son désaccord avec ceux qui estiment que la Conférence du désarmement a perdu sa pertinence en raison de l’impasse prolongée dans laquelle elle est plongée. Des signes de progrès ont pu être constatés l’an dernier, suite aux travaux du Groupe de travail « Way Ahead », en dépit de l’échec à parvenir à un consensus lors de l’adoption de ses recommandations, a-t-elle estimé. Elle a aussi cité la création des cinq organes subsidiaires avant d’espérer que d’autres progrès concrets pourront être réalisés à l’an prochain.
M. PICHAMONCH PINTOLA (Thaïlande) a estimé que le mécanisme multilatéral pour le désarmement doit être capable de s’adapter aux changements internationaux concernant la sécurité. Il a estimé que les débats sur le désarmement et la non-prolifération ne peuvent plus être limités aux États: le mécanisme multilatéral pour le désarmement doit inclure les voix qui représentent le peuple. Ainsi, le rôle de la société civile, des universités et des jeunes, de même que celui des femmes, doit être reconnu, a-t-il souligné.
Le délégué a par ailleurs salué le Programme de désarmement du Secrétaire général et a estimé que le mécanisme multilatéral pour le désarmement doit en tenir compte afin de concrétiser la vision du Secrétaire général. Il a insisté sur le rôle du multilatéralisme dans le cadre des travaux sur le désarmement. Il a aussi parlé de l’importance des centres régionaux des Nations Unies pour la paix et le désarmement.
Mme ARIEL RODELAS PENERANDA (Philippines) a appelé à assurer un meilleur équilibre entre les sexes dans le processus de désarmement. Dans cette veine, les Philippines ont créé le plan national d’action pour les femmes, la paix et la sécurité pour la période 2017-2022, qui fournit des mesures pour soutenir l’inclusion par genre.
Elle a notamment expliqué que le point d’action 10 de ce plan, qui porte sur les mécanismes de prévention et les systèmes d’alertes pour les femmes et les jeunes filles pour prévenir les violences liées aux conflits, est renforcé par la mise en œuvre d’un programme conçu pour répondre à la prolifération des armes légères et de petit calibre.
Les Philippines encouragent les États Membres à développer des programmes appropriés et effectifs qui protègent les femmes qui ont participé à l’application des sujets liés au désarmement aux niveaux local, national, sous-régional et régional. La contribution des femmes est vitale dans le processus de paix, y compris le désarmement et le contrôle des armes, a-t-elle souligné.
Pour M. MOHAMMAD HOSSEIN GHANIEI (République islamique d’Iran), il n’y a pas d’alternative au multilatéralisme en matière de désarmement. C’est pourquoi en dépit du manque de volonté politique de certains États nucléaires, les mécanismes des Nations Unies restent pertinents et valides, a-t-il estimé. Il a constaté que les États nucléarisés qui s’opposent à tout progrès ont souvent fait valoir des arguments techniques pour masquer leur manque de volonté. Mais la Conférence du désarmement et la Commission du désarmement ont marqué des points importants dans le passé en concluant des instruments essentiels et prouvé la pertinence de leur mandat et leur efficacité. Telle quelle, la machinerie de l’ONU sur le désarmement n’est pas responsable de la paralysie actuelle, mais c’est l’absence de réelle volonté politique qui les a rendues inefficaces, a-t-il affirmé.
Le représentant a ensuite estimé que l’adoption des « Recommandations pratiques sur les mesure de confiance » par la Commission du désarmement démontre la flexibilité du Mouvement des pays non alignés et il a espéré que d’autres États fassent preuve de la même flexibilité. Il a souhaité la négociation rapide, sous l’égide de la Conférence du désarmement, d’une convention complète interdisant les armes nucléaires, « comme le demande l’Assemblée générale depuis des années ». C’est la seule option pour faire avancer le désarmement nucléaire qui, a-t-il souligné, reste la priorité absolue pour l’écrasante majorité de États.
Ces dernières années, a-t-il poursuivi, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) se sont vu dotées d’un mandat statutaire de vérification du désarmement. À ses yeux, le fait que les États-Unis aient décidé de publier un rapport annuel sur le respect du contrôle de armes et de la non-prolifération sape gravement l’autorité et le rôle de ces deux organisations. En outre, les États-Unis, en se retirant des instruments internationaux, affaiblissent les institutions multilatérales. Ces rapports politisés n’ont aucune valeur, a-t-il affirmé, avant de dénoncer une tentative politiquement motivée concernant la présidence de la Conférence du désarmement dans le but d’entraver ses travaux. Il est important de respecter à la lettre la rotation géographique équitable, a-t-il souligné.
M. NOBUSHIGE TAKAMIZAWA (Japon) a constaté qu’il y a plusieurs raisons de se réjouir au titre de la machinerie du désarmement. Il s’est ainsi félicité du rapport final sur le traité d’interdiction de la production de matières fissiles que le Groupe d’Experts Gouvernementaux a finalisé cette année. Il a également salué les discussions intenses et substantielles qui se sont tenues au sein des cinq organes subsidiaires de la Conférence du désarmement. Même s’il reconnait que des lacunes évidentes demeurent, notamment sur le plan de la compréhension du problème et des moyens de faire avancer la discussion, le délégué a considéré qu’il fallait poursuivre les efforts et faire preuve de créativité et de flexibilité pour trouver des accords communs.
« Il est toujours important de garder à l’esprit que nous ne pouvons partir que de là où nous sommes », a poursuivi le délégué. Compte tenu de la situation internationale qui a exacerbé les tensions et entravé le dialogue entre des États aux vues divergentes, il a plaidé pour un dialogue constructif et respectueux entre toutes les parties. C’est aussi parce que des défis émergents vont affecter différents domaines transversaux qu’il faut absolument en passer par des enceintes multilatérales, a-t-il insisté.
Mme ELIF ÇALIŞKAN (Turquie) a estimé que les problèmes qui font obstacles au progrès au sein de la Conférence du désarmement n’ont pas été créés par ses procédures ou sa dynamique interne. Elle ne fonctionne pas dans le vide et nous devons nous abstenir d’évaluer le travail de la Conférence dans l’abstraction du reste des efforts de désarmement, a-t-elle estimé. La Turquie, a indiqué la représentante, est convaincue que la Conférence possède le mandat, les règles de procédures et les membres nécessaires pour lui permettre d’accomplir ses devoirs. Elle a appelé les États Membres à préserver la pertinence de cet organe.
Mme Çalişkan a par ailleurs indiqué que pendant sa présidence de la Conférence du désarmement en 2018, la Turquie a mené les négociations de manière responsable et transparente dans le but de dégager un consensus sur le rapport de la Conférence. Le projet de résolution annuel de la Conférence a été soumis à la Commission et nous attendons l’appui des États Membres lorsqu’ils l’examineront dans les prochains jours.
M. ALCIBIADES SANCHEZ (Mexique) a dénoncé le fait que depuis 22 ans, la Conférence du désarmement n’exerce plus son mandat, n’ayant même pas réussi à se mettre d’accord sur un programme de travail. Ses méthodes de travail contribuent à la paralysie et, de plus, sa charge de travail augmente en raison de la création d’organes subsidiaires, s’est-il inquiété. Pour le Mexique, l’utilisation des ressources pour financer ces organes au travail limité oblige à réfléchir car celles-ci pourraient autrement servir à appuyer la réalisation des objectifs de développement durable. S’agissant de la Commission du désarmement, à part l’adoption de mesures de confiance sur les armes classiques, elle se trouve dans une situation similaire à celle de la Conférence.
Il a déploré le nombre de résolutions répétitives adoptées par la Commission et il a regretté qu’on accorde la priorité au consensus au détriment de débats de fond.
Il a espéré qu’une quatrième session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le désarmement permettra de surmonter l’impasse actuelle. Une revitalisation ou une réforme réelle du mécanisme de désarmement ne sera possible que s’il existe une entente généralisée. Or la paralysie actuelle est inacceptable et le mécanisme de désarmement doit s’adapter aux nouvelles réalités.