En cours au Siège de l'ONU

ECOSOC: ouverture du Forum de collaboration sur la science, la technologie et l’innovation

Forum de collaboration multipartite,
1re & 2e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6832

ECOSOC: ouverture du Forum de collaboration sur la science, la technologie et l’innovation

Comment mettre la science, la technologie et l’innovation au service de la réalisation des 17 objectifs de développement durable?  C’est la question à laquelle se sont efforcés de répondre les participants au deuxième Forum de collaboration multipartite du Conseil économique et social (ECOSOC) qui s’est ouvert, aujourd’hui, au Siège de l’ONU.

À l’instar de nombreux intervenants, le Président de l’ECOSOC, M. Frederick Musiiwa Makmure Shava, a souligné que la science, la technologie et l’innovation sont essentielles à la réalisation des objectifs de développement durable et du développement durable en général et a appelé à les mettre au service de la création d’actions concrètes sur le terrain. 

« Au cours de nos vies, nous avons tous vu comment les avancées rapides de la science, la technologie et l’innovation ont changé nos modes de vie, notre travail et notre manière de communiquer », a renchérit le Président de l’Assemblée générale, M. Peter Thomson, qui a cité l’exemple des téléphones intelligents qui permettent aux personnes sans compte bancaire d’accéder aux services bancaires, ou d’assurer le suivi de certaines maladies chroniques. 

Il a lui aussi appelé la communauté internationale à prendre les mesures nécessaires pour débloquer le potentiel inhérent aux innovations technologiques et élaborer ainsi les solutions nécessaires à la réalisation de l’ensemble des 17 objectifs de développement durable à l’horizon 2030.

Intervenant au nom du Groupe des pays d’Afrique, le Représentant du Cameroun, M. Michel Tommo Monthe, a toutefois indiqué que si ces États dépendent largement de la technologie pour appuyer leur développement durable, les pays du continent doivent toutefois relever de nombreux défis liés à la fracture numérique, aux disparités dans les capacités à innover ou encore au manque de moyens financiers pour gérer l’ensemble du cycle de vie des technologies et leur diffusion sur le marché. 

Si ces défis ne sont pas pris en considération, a-t-il averti, de nombreux pays en développement, notamment en Afrique, ainsi que les pays les moins avancés, seront toujours à la traine. 

Se faisant l’écho de ces préoccupations, plusieurs intervenants, dont le représentant du Bangladesh, M. Masud Bin Momen, s’exprimant au nom des pays les moins avancés (PMA), ont appelé à la pleine mise en œuvre de la Banque de technologies pour les pays les moins avancés, créée en décembre dernier par l’Assemblée générale, afin de renforcer le transfert de technologies appropriées et du savoir-faire en faveur des PMA. 

Cette première journée de travaux du Forum, qui est prévu sur deux jours, a également été ponctuée par la tenue d’une série* de tables rondes consacrées à l’examen des principales priorités de l’implication de la science, de la technologie et de l’innovation afin d’éliminer la pauvreté, de permettre à tous de vivre en bonne santé ou encore de parvenir à l’égalité des sexes.

Les délégations ont notamment débattu des moyens de permettre aux femmes de briser le plafond de verre qui les empêche bien souvent de s’impliquer dans des domaines scientifiques, d’autant plus que les technologies et les innovations sont souvent orientées vers les besoins des hommes.

De nombreux appels ont aussi été lancés pour combler le fossé numérique, vulgariser le savoir technologique, ou encore adapter les nouvelles technologies aux besoins des utilisateurs.

La table ronde sur la santé a notamment été l’occasion d’envisager l’impact que la technologie et l’innovation pourraient avoir si on réussit à éliminer la chaîne de froid nécessaire à la conservation des vaccins.

Le rôle de la téléphonie mobile pour renforcer les systèmes de santé, en Afrique notamment, a aussi été discuté.

La Directrice exécutive de International Women’s Rights Action Watch pour la région d’Asie et du Pacifique, Mme Priyanthi Fernando, a toutefois averti que le téléphone portable peut parfois élargir le fossé numérique entre hommes et femmes, notamment en Inde où moins de 46% des habitants ont un téléphone portable, et où les femmes sont les moins connectées car elles ne contrôlent pas le budget familial.  « Le téléphone portable apparaît donc comme un outil de pouvoir aux mains des hommes », a-t-elle dénoncé.

Le Forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable poursuivra ses travaux demain, mardi 16 mai, à partir de 10 heures.

* À noter que les sessions 2(b), 2(e) et 2(f) n’ont pas pu être couvertes, faute d’interprétation dans les langues officielles des Nation Unies.

FORUM DE COLLABORATION MULTIPARTITE SUR LA SCIENCE, LA TECHNOLOGIE ET L’INNOVATION POUR LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Déclarations liminaires

M. FREDERICK MUSIIWA MAKAMURE SHAVA (Zimbabwe), Président du Conseil économique et social (ECOSOC) a souligné que la science, la technologie et l’innovation sont essentielles à la réalisation des objectifs de développement durable et du développement durable en général.  Les technologies de la communication ont, par exemple, transformé la vie économique et sociale, les innovations  de pointe aident à combattre les maladies, tandis que les technologies développées pour le secteur de l’énergie ont le potentiel d’atténuer les défis rencontrés dans ce domaine.

M. Shava a toutefois souligné qu’aucune solution ne pourra être élaborée pour faire face aux défis qu’affronte l’humanité à moins d’agir sur le terrain. Il a donc appelé à intensifier les efforts pour mettre la science et la technologie au service de la création d’actions concrètes favorables au développement durable.  Selon lui, une action orientée sur la science, la technologie et l’innovation permettrait de combler les écarts entre les nations et différentes communautés, mais aussi de renforcer la communication et la collaboration.

Poursuivant, le Président de l’ECOSOC a souhaité que le Forum permette d’identifier les besoins, ainsi que les lacunes, en matière de coopération scientifique, d’innovation et de renforcement des capacités, et aide à faciliter le développement, le transfert et la dissémination des technologies pertinentes à la réalisation des objectifs de développement durable.

M. Shava a notamment appelé à identifier des solutions pratiques pour favoriser la science, la technologie et l’innovation dans tous les pays, notamment en tenant compte des connaissances des communautés autochtones.  Il a également voulu que ce Forum permette de suggérer de nouvelles initiatives et partenariats. 

Le Président de l’ECOSOC a par ailleurs salué la participation de nombreux jeunes au Forum, soulignant que ces derniers ont un rôle important à jouer dans la promotion d’innovations à la fois favorables au développement et respectueuses de la planète.

M. PETER THOMSON, Président de l’Assemblée générale, a dit avoir pu constater le pouvoir et l’impact de l’innovation et de la technologie alors de son récent voyage en Afrique d’où il est revenu la nuit dernière.  Il a indiqué qu’à l’échelle du continent, des dirigeants politiques visionnaires, des jeunes entrepreneurs et de larges pans de la population embrassent les nouvelles opportunités qu’offrent les nouvelles technologies afin de faire de grandes avancées. 

Au cours de nos vies, a-t-il souligné, nous avons tous vu comment les avancées rapides de la science, la technologie et l’innovation ont changé nos modes de vie, notre travail et notre manière de communiquer.  Le Président de l’Assemblée générale a notamment cité l’exemple des téléphones intelligents qui permettent aux personnes sans compte bancaire d’accéder aux services bancaires, et qui sont également utilisés pour des diagnostics médicaux, ainsi que pour assurer le suivi de maladies chroniques. 

M. Thomson a appelé la communauté internationale à prendre les mesures nécessaires pour débloquer le potentiel inhérent aux innovations technologiques et élaborer ainsi les solutions nécessaires à la réalisation de l’ensemble des 17 objectifs de développement durable à l’horizon 2030.  Il a notamment prescrit de trouver des solutions au problème de l’accès inégal à l’innovation et à la technologie et d’améliorer la connectivité, notamment en Afrique.  Il a aussi appelé la communauté internationale à faire davantage pour établir les partenariats stratégiques nécessaires au renforcement de l’action inclusive.  Il faut en outre renforcer la participation des femmes dans la science, la technologie et l’innovation, a-t-il dit. 

Le Président de l’Assemblée générale a aussi jugé nécessaire de mieux comprendre et gérer les risques associés au déploiement de l’innovation et la technologie, que ce soit en termes politiques, économiques, éthiques, sécuritaires, ou en matière de respect des droits de l’homme.  Il a notamment appelé à protéger les systèmes informatiques contre les cyberattaques de masse comme celle que le monde a connue la semaine dernière, mais aussi à s’intéresser aux questions relatives à la vie privée, notamment la collecte, la rétention et la distribution de données personnelles.  Il s’est aussi préoccupé de l’impact, dans le monde du travail, de la « machinalisation des tâches ». 

Le Président de l’Assemblée générale a estimé que le Forum a le potentiel de devenir une plate-forme mondiale majeure pour faciliter le dialogue, mettre en commun les positions, renforcer la coopération et galvaniser une action concertée et coordonnée pour appuyer la mise en œuvre des objectifs de développement durable par le biais du pouvoir de l’innovation et de la technologie. 

M. Thomson a par ailleurs annoncé l’organisation, ce mercredi, d’un évènement de l’Assemblée générale sur l’action en faveur des objectifs de développement durable, qui sera l’occasion pour les États Membres, les responsables de l’ONU, et la société civile de discuter directement avec des innovateurs et des chefs d’entreprises pour explorer les voies et moyens d’exploiter le pouvoir de la technologie pour renforcer la mise en œuvre des objectifs de développement durable. 

M. THOMAS GASS, Sous-Secrétaire général à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations du Département des affaires économiques et sociales (DAES), a affirmé que la réalisation des objectifs de développement durable nécessite des changements qui ne peuvent arriver que par le biais de la science, de la technologie et de l’innovation.  « La science nous montre ce qui marche, comment cela marche et pourquoi ça marche », a expliqué M. Gass.  Dans le contexte du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a-t-il poursuivi, la science nous offre la possibilité de mieux établir les liens entre les cibles et les objectifs de développement durable et de renforcer leurs synergies. 

M. Gass a invité la communauté internationale à mettre les technologies transformatives au service de l’être humain, notamment des personnes qui courent le risque d’être laissé de côté.  En plus de scientifiques, d’acteurs du domaine technologique et d’innovateurs, nous avons aussi besoin du secteur privé qui produit les biens et offre des services, de décideurs qui élaborent des règles qui favorisent l’innovation, et de la société civile qui promeut la production et la consommation durables. 

Il a ensuite indiqué que l’ONU est prête à soutenir ce processus à travers plusieurs mécanismes et initiatives, notamment la mise en place d’un groupe de travail interinstitutions des Nations Unies sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable.  En outre, une plateforme virtuelle va être établie dans le cadre du Mécanisme de facilitation des technologies pour servir de passerelle entre les financements et les initiatives favorables aux objectifs de développement durable.

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, Mme HELENA YÀNEZ LOZA (Équateur) a souligné qu’à moins de renforcer la coopération internationale dans le domaine de la technologie, passer à un chemin plus durable sera très difficile et onéreux pour les pays en développement.  Elle a jugé urgent de canaliser une assistance technique, durable et efficace, et de renforcer les capacités afin de répondre aux besoins et contraintes spécifiques des pays en développement et de combler le fossé en matière d’infrastructure technologique.  Elle a notamment appelé à tenir compte des contraintes de capacité des pays africains, des pays les moins avancés, des pays en développement sans littoral, des petits États insulaires en développement, et des pays en conflit ou sortant de conflit, tout en reconnaissant les défis graves auxquels font face les pays à revenu intermédiaire.  La représentante a également appelé à opérationnaliser la Banque de technologies pour les pays les moins avancés, reconnaissant son potentiel à favoriser la capacité productive, la transformation structurelle, l’élimination de la pauvreté et le développement durable. 

Le Groupe réaffirme que la coopération internationale pour le développement reste un catalyseur fondamental pour la croissance économique, a poursuivi Mme Loza.  Les pays développés doivent respecter leurs engagements dans le cadre de l’aide publique au développement, et il est également essentiel de mobiliser les ressources nationales pour appuyer la science, la technologie et l’innovation.  La représentante a notamment estimé que le transfert de technologie, sur la base de termes concessionnels et préférentiels, est nécessaire pour réduire la vulnérabilité aux impacts des changements climatiques des pays en développement. Elle a aussi appelé à renforcer les systèmes éducatifs et de recherche ainsi que les organismes de développement des pays en développement. 

Notant par ailleurs que la population urbaine est passée, dans le monde, de 2,6 milliards en 1995 à 3,9 milliards en 2014, pour majorité des pays en développement, la représentante a souligné que l’accès à la science, la technologie et l’innovation et le partage des connaissances seront essentiels à la réalisation du Nouveau Programme pour les villes.  La connaissance traditionnelle doit en outre être pleinement considérée, respectée et promue lors de l’élaboration des politiques de développement et des stratégies et programmes destinés à renforcer la science, la technologie et l’innovation. 

M. MICHEL TOMMO MONTHE (Cameroun), s’exprimant au nom du Groupe des pays d’Afrique, a déclaré que la science, la technologie et l’innovation peuvent être l’élément crucial pour changer la situation socioéconomique des pays africains.  Il a notamment souligné que les pays africains dépendent largement de la technologie pour appuyer leur développement durable, mais se voient confrontés à la fracture numérique, aux disparités dans les capacités à innover, à l’absence de connectivité ainsi qu’à un manque d’accès aux technologies.  Si ces défis ne sont pas pris en considération, a-t-il averti, de nombreux pays en développement, notamment en Afrique, ainsi que les pays les moins avancés, seront toujours à la traine. 

Le représentant a expliqué que de nombreux pays africains ne disposent pas des moyens financiers et des capacités nécessaires pour bien gérer tout le cycle de vie des technologies et leur diffusion sur le marché.  De ce fait, un véritable système technologique innovant permettrait de combler ces lacunes, a-t-il estimé.  Il a aussi salué la mise en place de la Banque de technologies pour les pays les moins avancés, appelant à sa pleine mise en œuvre.

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh), s’exprimant au nom des pays les moins avancés (PMA), a souligné que l’examen à mi-parcours, l’an dernier, du Programme d’action en faveur des pays les moins avancés pour la décennie 2011-2020, encore dénommé Programme d’action d’Istanbul, a permis de relever que les pays les moins avancés ne bénéficient pas encore des atouts qu’offrent la science, la technologie et l’innovation.  Il a indiqué que la réalisation de nombreux objectifs de développement durable dépend des technologies modernes et propres.  Ces technologies peuvent notamment aider ces pays à lutter contre les changements climatiques, les catastrophes naturelles et les épidémies.  Elles pourraient également contribuer à l’éradication de la pauvreté, à la bonne gouvernance, à l’inclusion financière et à la construction d’infrastructures.  Le représentant a plaidé pour un engagement plus fort et une plus grande volonté politique de la communauté internationale pour soutenir les PMA dans leur quête de la science, la technologie et l’innovation, en vue de réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et le Programme d’action d’Istanbul.

Le délégué a salué la création de la Banque de technologies en décembre dernier, appelant à la pleine mise en service de cette institution.  M. Momen a en outre souhaité le renforcement de la coordination verticale entre les politiques et les stratégies adoptées par les États afin d’assurer plus d’investissements publics dans la recherche ainsi que les politiques et programmes multilatéraux.  Il a affirmé que la mise en route de la Banque de technologies permettra de renforcer le transfert de technologies appropriées et du savoir-faire en faveur des PMA.  Ces derniers ont du reste besoin de financements adéquats pour exploiter la science, la technologie et l’innovation.  Cela peut également passer par un accent mis sur la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire.  Il a enfin invité les partenaires de développement à réaliser les promesses faites dans le cadre du Programme d’action d’Istanbul, notamment en ce qui concerne l’octroi de bourses aux étudiants et enseignants originaires des PMA, surtout dans les domaines de la science, de la technologie, de la gestion et de l’économie.

Au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), M. HECTOR JAIME CALDERON (El Salvador) a souligné, dans un premier temps, que l’utilisation de la technologie de l’information et des communications ne devrait pas porter atteinte aux droits individuels à la vie privée.  Il a ensuite indiqué qu’étant le pivot de la réalisation du Programme 2030, la science, la technologie et l’innovation doivent répondre aux besoins des objectifs de développement durable et appuyer leur réalisation.  Il a fait observer qu’une solution de haute technologie ne peut pas être apportée à tous les problèmes et que les changements technologiques ne sont pas non plus favorables au développement durable. 

Pour aller de l’avant, il est important d’évaluer comment la technologie peut être mobilisée pour offrir des solutions aux défis les plus pressants, a-t-il estimé.  À cet effet, diverses sources de connaissances, y compris la connaissance autochtone, devraient être examinées, ainsi que le savoir susceptible de modifier la manière d’aborder l’interface science politique.  La représentante a appelé à la promotion du développement d’infrastructures de technologies d’information et des communications ainsi qu’au renforcement des capacités dans tous les pays en développement, en particulier les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral, les petits États insulaires en développement et les pays à revenu intermédiaire.  Il a notamment insisté sur l’accès universel à Internet, ainsi que sur l’accès des femmes, des filles et des personnes handicapées aux sciences et à la technologie.

Dans un message vidéo, M. BILL GATES de la Fondation Bill et Melinda Gates, a déclaré que depuis 1968, les améliorations apportées à la santé maternelle ont permis de sauver plus de 120 millions vies.  « La science peut ouvrir la voie aux miracles, a-t-il lancé.  Ces miracles dont nous avons besoin pour aider les plus pauvres et les plus démunies ».  M. Gates a notamment appelé à créer de nouveaux vaccins pour prévenir les maladies, à innover dans le domaine de l’agriculture, et à développer des sources d’énergie propre. 

SESSION 1: MOBILISER LA SCIENCE, LA TECHNOLOGIE ET L’INNOVATION AU PROFIT DES OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE: UNE PRATIQUE ESSENTIELLE À LA STIMULATION DE LA SCIENCE, DE LA TECHNOLOGIE ET DE L’INNOVATION

Cette table ronde a notamment été l’occasion d’attirer l’attention sur l’impact de la santé humaine sur la réalisation du développement durable, dans un monde où les maladies infectieuses se propagent en raison de la destruction des habitats d’animaux, de l’urbanisation et des changements climatiques.  Des appels ont également été lancés pour renforcer la coopération internationale en matière de transfert de technologies, ainsi que pour promouvoir la participation des femmes et des filles dans les filières scientifiques.

Mme INDIRA NATH, professeure à « All India Institute of Medical Sciences, National Academy of Sciences », de l’Inde, a attiré l’attention sur l’impact de la santé humaine sur la réalisation du développement durable, s’inquiétant notamment de l’augmentation de maladies infectieuses dans le monde provoquée, entre autres, par les destructions des habitats d’animaux.  Alors que 6 des 10 maladies les plus courantes sont provoquées par les oiseaux et les animaux, Mme Nath a insisté sur la nécessité de protéger l’environnement, d’élaborer, à l’échelle mondiale, des programmes de formation pour les médecins et les vétérinaires, et de surveiller en temps réel les animaux et les oiseaux.  À l’heure actuelle, certaines épidémies ne sont pas détectées faute d’efficacité, a-t-elle averti, avant d’appeler à une meilleure coopération, collaboration et communication entre médecins, scientifiques et vétérinaires.   Mme Nath a aussi suggéré de suivre de près les flux de migrations internes et les taux d’urbanisation qui peuvent contribuer à la propagation des maladies, notamment dans les pays les moins avancés.  Elle a aussi averti que les changements climatiques aggraveront nombre des problèmes sanitaires que connaît la planète. 

La science, la technologie et l’innovation pourraient devenir une forme d’aide publique au développement, a suggéré M. TAIKAN OKI, vice-recteur de l’Université des Nations Unies.  Selon lui, en termes de développement, la science, la technologie et l’innovation peuvent améliorer la productivité, réduire les coûts, et favoriser un accès équitable aux ressources.  Plus encore, elles sont un outil essentiel pour évaluer les progrès dans la réalisation des objectifs de développement durable, a-t-il souligné.

Pour y parvenir, le panéliste a appelé les États Membres à créer un groupe d’experts sur la science, la technologie et l’innovation au profit des objectifs de développement durable afin de définir les priorités pour chaque nation.  Il a aussi jugé nécessaire d’améliorer la collaboration entre les différentes parties prenantes avant de suggérer la tenue d’une conférence publique sur la contribution de la science, la technologie et l’innovation à la réalisation des objectifs de développement durable et les appuyer.  Il est aussi important de former les jeunes talents qui deviendront les acteurs clefs pour résoudre les problèmes des prochaines générations, a-t-il ajouté. 

Discussion interactive

La promotion de la science, de la technologie et de l’innovation au service du développement durable est une priorité pour le Gouvernement chinois, a assuré, suite à cette intervention, le représentant de la Chine, qui a notamment parlé de la création, en 2016 par le Conseil d’État, d’un plan d’innovation scientifique, et de la mise au point, par le Ministère de la science et de la technologie, d’une banque de développement technologique qui vise à fournir un appui aux pays en développement.  Lui emboitant le pas, le représentant de l’Éthiopie a toutefois jugé nécessaire de renforcer la coopération internationale en matière de transfert de technologies vers les pays les moins avancés, afin d’appuyer leurs efforts de développement.  Le représentant du Canada a appelé, de son côté, à ne pas perdre de vue le rôle des femmes et des filles dans la science, dont la participation a « explosé » ces dernières années.  Il a estimé nécessaire de trouver le moyen d’encourager et d’aider les filles à devenir des ingénieures, indiquant que dans son pays, le 13 mai a été consacré « journée des filles qui codent ». 

Cette table ronde était modérée par Mme ELENITA DANO, Directrice pour l’Asie de « Action Group on Erosion, Technology and Concentration », qui a souligné l’importance d’avancer des solutions et des recommandations pour mettre la science, la technologie et l’innovation au service du développement. 

Les deux coprésidents du Forum sont également brièvement intervenus. M. MACHARIA KAMAU, Représentant permanent du Kenya, s’est inquiété de l’étendue du fossé en termes de savoir scientifique et a réclamé une plus grande cohérence entre les différentes communautés scientifiques et techniques.  M. VAUGHAN TUEKIAN, Conseiller pour la science et la technologie du Secrétaire d’État des États-Unis, a de son côté évoqué l’optimisme et la créativité qui seront, selon lui, nécessaires à la réalisation des objectifs de développement durable.

SESSION 2: LES DÉFIS DE LA SCIENCE, DE LA TECHNOLOGIE ET DE L’INNOVATION, ET LES SOLUTIONS DES SIX OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE RETENUS

Session 2 a): Les principales priorités de l’implication de la science, de la technologie et de l’innovation afin d’éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde (Objectif 1)

Au cours de cette table ronde, les appels se sont multipliés pour mettre l’innovation technologique au service de la lutte contre la pauvreté, à condition, toutefois de combler aussi le fossé numérique, de partager et vulgariser le savoir technologique.  La question de l’accessibilité des femmes et des personnes handicapées a également été soulevée, une panéliste faisant notamment observer qu’en Inde le téléphone portable apparait souvent comme un outil de pouvoir aux mains des hommes.

La session a débuté avec la présentation par M. JOHN GIBBONS, de « Babajob in India » du site Internet « babajob.com », le plus grand marché d’emplois en Inde avec plus de 7 millions d’offres.  Cette plateforme innovante est gratuite et met en relation employeurs et chercheurs d’emplois, ces derniers pouvant notamment s’y connecter grâce à un ordinateur ou téléphone portable et afficher leur profil professionnel.  Le promoteur de ce site a dit vouloir étendre cette expérience au reste du monde.

M. DIRK FRANSAER, Directeur de l’Institut flamand de recherche technologique en Belgique, a expliqué qu’il faut trouver des solutions intégrées et innovantes aux problèmes socioéconomiques, cette approche permettant de trouver des solutions capables de régler plusieurs problèmes de société en concomitance.  Par exemple, pour trouver l’énergie nécessaire à la purification de l’eau domestique, on peut utiliser l’énergie tirée de la transformation des déchets domestiques.  Ce genre de solution n’est pas souvent mis en œuvre parce que les multinationales ne veulent pas intégrer une telle approche, a-t-il déploré.

Mme PRIYANTHI FERNANDO, Directrice exécutive de International Women's Rights Action watch pour la région d’Asie et du Pacifique (Malaisie), a souhaité que dans toute recherche de solution intégrant le domaine technologique, qu’on tienne compte de la place et du rôle des femmes.  En Inde par exemple, moins de 46% des habitants ont un téléphone portable, et les femmes sont les moins connectées car elles ne contrôlent pas le budget familial.  Le téléphone portable apparait donc comme un outil de pouvoir aux mains des hommes, a-t-elle dénoncé. C’est également un outil de discrimination qui élargit le fossé numérique entre hommes et femmes.  Elle a également déploré le fossé qui existe au sein et entre les États en matière d’accès à l’eau et à l’énergie électrique.  Elle a prescrit de ne pas stéréotyper les femmes et de reconnaître leur statut d’innovatrices.

Revenant sur la question de l’innovation, Mme ANNE KINGIRI, Chercheure principale au Centre africain de recherche technologiques au Kenya, a expliqué que celle-ci peut déboucher sur plusieurs changements structurels, notamment dans le cadre de la lutte contre la pauvreté.  Elle a cité des travaux du Fonds international de développement agricole (FIDA) et du Comité d’Oxford de secours contre la famine (OXFAM) qui tendent à démontrer que les innovations peuvent être porteuses de changement à condition que les populations soient disposées à s’y adapter.  Mme Kingiri a notamment parlé du concept d’« innovation sociale » pour souligner l’importance de mettre sur pied des processus d’apprentissage en faveur des populations.  Cela permettrait, a-t-elle assuré, que la société s’approprie l’innovation et en tire parti.  Dans cette même veine, elle a argué que l’éducation est porteuse d’innovations car elle peut préparer les jeunes à créer et inventer.

Après ces exposés, la déléguée de la Chine a indiqué que son pays compte continuer de mettre l’innovation au service la réduction de la pauvreté afin d’éradiquer complétement la pauvreté d’ici à 2030.  La représentante de la Zambie a toutefois souligné, on ne peut espérer éradiquer la pauvreté sans vulgariser la technologie et l’innovation.  « Malheureusement, la réalité fait voir que les savoirs technologies ne sont pas souvent partagés », a-t-elle regretté. 

Le représentant de l’Agence technologique du Japon s’est pour sa part inquiété du fait que la science, l’innovation et la technologie pourraient contribuer à creuser le fossé entre les plus riches et les plus pauvres.  Justement, une jeune déléguée de l’Union mondiale des aveugles a attiré l’attention sur le fait que le plus d’un milliard de personnes handicapées que compte le monde souffrent toujours de nombreux problèmes liés notamment à l’accessibilité et à l’inadéquation des programmes scolaires.

En concluant le débat, l’animatrice de la table ronde, Mme GILLIAN TETT, Responsable du magazine britannique Financial Times aux États-Unis, a insisté sur la nécessité de briser les silos afin de trouver des solutions technologiques innovantes pour mettre fin à la pauvreté.

Session 2 c): Les principales priorités de l’implication de la science, de la technologie et de l’innovation pour permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge (Objectif 3)

Cette table ronde a été l’occasion d’envisager l’impact que la technologie et l’innovation pourraient avoir sur la santé, en permettant, par exemple, d’éliminer la chaîne de froid nécessaire à la conservation des vaccins.  L’impact de la téléphonie mobile sur le renforcement des systèmes de santé, en Afrique notamment, a aussi été discuté, de même que l’importance d’adapter les technologies aux besoins des utilisateurs.  Des préoccupations ont toutefois été soulevées au sujet du fait que les progrès réalisés dans certains domaines du développement se font parfois au détriment des progrès réalisés dans le domaine de la santé,

Avant d’entamer cette table ronde, les intervenants ont entendu M. Asher Hasan présenter le travail de « doctHERs », du Pakistan, qui permet de connecter de jeunes médecins femmes à des patients.  M. Adama Kane a ensuite parlé de « JokkoSante » au Sénégal qui aide les familles à conserver des médicaments essentiels dans leur domicile.

Déclarations liminaires

En guise d’introduction, Mme RACHEL KYTE, Directrice générale et Représentante spéciale du Secrétaire général pour l’initiative « Énergie durable pour tous » a déclaré qu’en mettant l’accent sur l’énergie et la santé, il sera possible d’accélérer la réalisation des objectifs de développement.  Elle a constaté que la pléthore de données disponibles à la fois sur l’énergie et la santé démontre l’intérêt du secteur public et du secteur privé à trouver des solutions aux défis rencontrés dans ces domaines.  Elle a toutefois averti qu’à moins de déployer des efforts concertés, l’objectif de réduire le fossé en matière d’accès à l’énergie ne serait atteint qu’en 2040, au plus tôt.

Mme Kyte s’est inquiétée de la persistance de nombreux défis lorsqu’il s’agit de mettre la science, la technologie et l'innovation sur le marché de la manière la plus efficace, pointant notamment du doigt l'insuffisance des ressources humaines et des capacités de gestion au sein d’institutions « qui ne sont pas toujours tournées vers l'avenir ».  Cet environnement peu propice a ralenti les progrès, a–t-elle déploré. 

Pour obtenir des résultats rapides et positifs, dans l’immédiat, elle a appelé à promouvoir la cuisson propre, ce qui permettrait de réduire la pollution intérieure, et les maladies qui y sont associées.

M. LIVIO VALENTI, Co-Fondateur et Vice-Président pour la politique et la stratégie de « Vaxess Technologies » et Chercheur à la  « Harvard Kennedy School of Government » (États-Unis), a expliqué que son groupe travaille notamment à la création de vaccins pouvant être administrés sans aiguille ou qui ne nécessitent pas une conservation par le froid.  Il a indiqué que grâce aux nouvelles technologies, il est possible d’envisager, dans un avenir proche, une baisse notable du coût des campagnes de vaccination.  Vaxess Technologies a élaboré un processus permettant à une personne de recevoir deux doses de vaccin en une fois, améliorant ainsi l’efficience du processus.  Le groupe a mobilisé 50 millions de dollars pour ses recherches, mais la levée de fonds supplémentaires est d’une importance critique pour son travail dont l’objectif est de mettre les vaccins à la disposition des personnes vivant dans des régions isolées du monde. 

Mme SARAH MARNIESSE Directrice de la mobilisation de la recherche et de l’innovation de l’Institut national de recherche pour le développement durable (France), s’est inquiétée de l’augmentation du nombre de décès provoqués par la pollution, la pauvreté et la malnutrition, entre autres.  Elle a aussi constaté que les progrès réalisés dans certains domaines du développement se font parfois  au détriment des progrès réalisés dans le domaine de la santé, avertissant notamment que si la croissance de la productivité agricole n’est pas gérée de manière durable, elle risque d’endommager les écosystèmes et de nuire à la santé.  

Dans les pays en développement, a-t-elle enchainé, le plus grand défi est probablement la faiblesse des systèmes de santé, d’où l’importance de renforcer les capacités d’innovation et de recherches au niveau local.  Elle a également indiqué que la téléphonie mobile a un potentiel énorme de renforcer les systèmes de santé en favorisant un meilleur accès à la connaissance et de l’information, en améliorant les offres de service et réduisant le temps de réponse. 

Suite à ces interventions, le représentant de l’Éthiopie a indiqué que les maladies contagieuses et les maladies non transmissibles continuent de faire des millions de victimes en Afrique, mais que le continent dépend toujours de la chaîne de froid pour assurer la conservation des vaccins.  Un défi qu’a déploré le co-fondateur de Vaxess Technologies qui a appelé à recourir aux technologies disponibles pour pallier à cette situation d’ici à 2030.  Ce dernier a également souligné qu’il était important pour les chercheurs de se rendre sur le terrain, notamment en Afrique, afin d’adapter les technologies aux besoins des utilisateurs, un commentaire qui a fait suite à l’intervention de la représentante de la Zambie qui a vu dans la téléphonie mobile un atout pour améliorer l’accès aux systèmes de santé en Afrique.  La représentante de l’Institut national de recherche pour le développement durable a ensuite insisté sur l’importance du travail des « campus pour l’innovation ».

À l’instar du représentant d’une association de malvoyants, le représentant de la Fédération internationale des malentendants a par ailleurs appelé les  États à fournir l’appui nécessaire pour que les technologies soient abordables pour les personnes handicapées.

Cette table ronde était modérée par M. PAULO GADELHA, Conseiller principal à FIOCRUZ et membre du Groupe TFM 10 (Brésil), qui a constaté un énorme écart entre les besoins en santé et les efforts déployés pour y répondre, et qui a estimé que la technologie peut avoir un impact positif sur la santé. 

Session 2 d): Les principales priorités de l’implication de la science, de la technologie et de l’innovation pour parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles (Objectif 5)

Cette table ronde a débouché sur une discussion animée sur les moyens de permettre aux femmes de briser le plafond de verre qui les empêche bien souvent de s’impliquer dans des domaines scientifiques.  Il a aussi été constaté que les technologies et les innovations sont souvent orientées vers les besoins des hommes.  Le rôle des pères et des mères dans l’éducation de leurs fils et filles a aussi été soulevé.

Au début de cette session, M. EMMANUEL OWOBU, promoteur de « OMOMI in Nigeria », a présenté son application, disponible sur des téléphones mobiles, qui permet aux parents de suivre le statut vaccinal de leur enfant.

Mme MYRNA CUNNINGHAM, médecin et Présidente du Centre d’autonomie et de développement des peuples autochtones du Nicaragua, animatrice de la table ronde, a déploré la double discrimination dont souffrent les femmes autochtones, qui sont discriminées en tant que femme et en tant que membre de la communauté autochtone.  Elle a fait observer que la participation des filles et femmes apparaît comme un facteur accélérateur de la réalisation des objectifs de développement durable.  Elle a déploré le fait que les chiffres de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) font voir qu’il n’y a que 28% de femmes dans la recherche dans le monde.

M. SUSIL PREMAJAYANTHA, Ministre de la science, de la technologie et de la recherche du Sri Lanka, a vu dans les technologies de l’information et des communications (TIC) un des moyens les plus puissants pour autonomiser les femmes.  Il a indiqué que chacun des 40 000 villages de Sri Lanka compte une sage-femme, et que chacune d’elles est munie d’une tablette qui lui permet de noter les indicateurs de santé des femmes et des enfants et de les partager avec une plateforme disponible dans tout le pays.

Il a par ailleurs indiqué que dans le pays, le pourcentage des étudiants de sexe féminin est de 55%.  Le gouvernement entend désormais assurer la parité sur les listes électorales afin d’avoir des décideurs femmes.  Il a par ailleurs dénoncé la discrimination dont souffrent les femmes dans le domaine du travail, précisant que les autorités du pays entendent résorber ce problème en instituant des quotas.   

Mme LANA NUSSEIBEH, Représentante permanente des Émirats arabes unis, a indiqué que dans son pays, ce sont les hommes qui sont à la tête des programmes d’autonomisation de femmes, ce qui laisse voir l’étendue du travail à mener.  Elle a dit qu’au vu de sa petite taille, son pays n’aurait jamais pu atteindre son niveau actuel de développement sans l’implication des femmes qui représentent la moitié de la population. 

La représentante a indiqué que des programmes de mentorat aident les femmes à s’impliquer dans des domaines qui sont a priori traditionnellement réservés aux hommes, tandis que les jeunes femmes sont incitées à choisir des carrières scientifiques. 

Elle a cité une étude selon laquelle le produit intérieur brut du pays pourrait considérablement augmenter si les femmes étaient davantage intégrées dans le monde du travail.  Pour y arriver, Mme Nusseibeh a estimé que l’autonomisation doit commencer dans les écoles, en investissant dans la participation des femmes à la science et la technologie.  Il faut aussi des données ventilées par sexe pour toucher du doigt les réalités du processus d’autonomisation, a-t-elle souligné.

Suite à cela, Mme DALIA FRANCHESKA MARQUEZ, du « Women’s Leaders Committee of OAS Youth United “In Action” », du Venezuela, a déclaré que les femmes représentent 28% des chercheurs en Amérique latine, et qu’il existe toujours un « plafond de verre »  dans la région qui tend à les empêcher de s’impliquer dans des domaines scientifiques.  Cela est dû d’abord à une éducation et une socialisation sexiste qui cantonne les jeunes filles aux tâches ménagères, a expliqué la déléguée.  Elle a indiqué que son organisation offre des cours en ligne et dans des sites physiques pour autonomiser les femmes dans les filières scientifiques.  Elle a plaidé pour un accès à une éducation égalitaire entre garçons et filles.  Elle a aussi demandé que la dépendance économique des femmes soit réduite afin qu’elles puissent prendre des initiatives et décider de leur avenir.   

À la suite de ces exposés, une responsable d’un groupe d’innovation en Arabie saoudite a estimée qu’en plus de l’implication des femmes dans la science, il faudrait aussi que les femmes aient la possibilité de diriger les recherches, car les technologies et les innovations sont souvent orientées vers les besoins des hommes.

Face à ce constat, la représentante du grand groupe des enfants a proposé le renforcement de la place des femmes dans les sciences, notamment dans les pays en développement, ainsi que leur implication, à l’échelle planétaire, dans l’élaboration des politiques en matière de recherche.  Ella a aussi invité les États à s’engager à adopter des budgets intégrant l’aspect genre.  

Justement, en Chine, a expliqué une déléguée du pays, les autorités ont créé des récompenses pour susciter l’émulation entre les jeunes femmes évoluant dans la science.  Les brevets pour les innovations de chercheuses dans le monde placent les femmes chinoises au deuxième rang selon les données de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), s’est-elle enorgueillie.

La représentante de la Zambie s’est offusquée de constater que malgré tous ces retards, les femmes préfèrent défiler et festoyer le 8 mars.  Il ne faut pas seulement tirer sur les femmes, a tempéré le président de séance, M. VAUGHAN TUREKIAN, des États-Unis.  Pourquoi les pères ne peuvent-ils pas servir de mentors en science pour leur fille? a-t-il lancé à l’endroit de l’assistance.  Dans ce cas, les mères pourraient tout aussi bien servir de mentors pour leur fils à qui elles expliqueraient que les femmes sont autant capables que les hommes, a renchéri la représentante des Émirats arabes unis

En effet, a souligné Mme Cunningham, l’animatrice, l’implication des filles et femmes dans la science, la technologie et l’innovation pourraient davantage faciliter la réalisation des objectifs de développement durable.  Mais pour cela, il faudrait une forte volonté politique, et l’implication des femmes bien entendu, a-t-elle conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Abyei: le Conseil de sécurité proroge le mandat de la FISNUA jusqu’au 15 novembre 2017, pour la dernière fois si les parties ne respectent pas leurs engagements

7939e séance – soir
CS/12822

Abyei: le Conseil de sécurité proroge le mandat de la FISNUA jusqu’au 15 novembre 2017, pour la dernière fois si les parties ne respectent pas leurs engagements

Constatant que la situation qui règne à Abyei et le long de la frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud continue de menacer gravement la paix et la sécurité internationales, le Conseil de sécurité a, ce soir, prorogé de six mois, jusqu’au 15 novembre 2017, le mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA).

En adoptant, à l’unanimité de ses 15 membres, la résolution 2352 (2017), présentée par les États-Unis, le Conseil décide que la présente prorogation de la modification du mandat établie dans la résolution 2024 (2011) sera la dernière à moins que les deux parties ne montrent, par leurs actions, qu’elles sont clairement résolues et s’engagent fermement à mettre en œuvre le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière.

Par cette résolution, le Conseil exige à nouveau du Soudan et du Soudan du Sud qu’ils mettent en place « sans délai » l’administration et le Conseil de la zone d’Abyei, en sortant de l’impasse au sujet de la composition dudit Conseil, et créent le Service de police d’Abyei, notamment pour protéger les infrastructures pétrolières, conformément aux engagements qu’ils ont pris dans l’Accord du 20 juin 2011.

Dans le préambule du texte, le Conseil de sécurité se déclare en effet « profondément préoccupé » par l’absence d’administration publique et d’état de droit dans la zone d’Abyei.

Le Conseil décide également de réduire l’effectif maximum autorisé à 4 791 militaires.

Le Conseil condamne la présence intermittente de personnel des services de sécurité sud-soudanais et le déploiement des unités de la police du pétrole de Diffra dans la zone d’Abyei, et toute entrée de milices armées sur le territoire.  Il exige à nouveau que le Gouvernement sud-soudanais retire ses forces de sécurité de la zone d’Abyei et que le Gouvernement soudanais en retire la police du pétrole de Diffra.

La FISNUA doit, en vertu de ce texte, poursuivre le dialogue avec le Comité mixte de contrôle d’Abyei et les populations misseriya et ngok dinka en vue de garantir pleinement le respect du statut d’Abyei comme zone exempte d’armes.

En outre, le Conseil demande instamment aux deux gouvernements de prendre des mesures de renforcement de la confiance entre les différentes communautés, lesquelles sont exhortées à s’abstenir de tout acte ou discours provocateur pouvant susciter des affrontements violents.

Après des négociations difficiles, les délégations se sont félicitées du consensus obtenu et du message fort envoyé par le Conseil de sécurité aux deux parties.  « Cinq ans d’obstacles au déploiement de la mission, cela suffit », a martelé la représentante des États-Unis.  Ce Conseil ne devrait pas appuyer indéfiniment des mandats qui ne font pas l’objet de l’assentiment stratégique des parties, a-t-elle dit.  Il doit exiger des États qu’ils respectent leurs engagements. 

« L’impasse à Abyei n’a que trop duré », a renchéri le représentant de l’Italie, s’exprimant également au nom de la Suède.  Aujourd’hui, le Conseil dit aux parties qu’elles doivent faire preuve d’un engagement fort au cours des prochains six mois, sinon la mission de la FISNUA se terminera. 

« En l’absence de progrès, la poursuite de la présence de la mission sera gravement remise en question », a assuré à son tour le représentant de l’Éthiopie, seul pays fournisseur de contingents à la FISNUA.

Les délégués de l’Égypte, de la Fédération de Russie et de la Chine ont constaté avec satisfaction que les préoccupations des pays de la région avaient été prises en compte.

En se réjouissant que la résolution en appelle aux responsabilités des deux parties, leurs homologues de la France et du Royaume-Uni ont également souhaité que l’on continue à œuvrer pour la stabilité dans la région et que l’on suive de près les travaux de la FISNUA.

« L’avenir de cette mission est exclusivement entre les mains du Soudan et du Soudan du Sud », a résumé le représentant de l’Uruguay.

Le Soudan n’a jamais rien fait pour nuire au travail du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, a assuré le représentant du Soudan, en se demandant pourquoi la FISNUA cesserait son soutien au Mécanisme.  Il a indiqué que son gouvernement était attaché à la mise en œuvre des réunions du Comité conjoint politique qui s’est réuni hier à Addis-Abeba, espérant que ces décisions constitueraient un nouveau début. 

Tout en saluant les progrès réalisés par la FISNUA et un certain degré de coopération entre les Gouvernements soudanais et sud-soudanais, le représentant du Soudan du Sud a considéré que le retrait de l’appui au Mécanisme aurait un impact négatif sur la mise en œuvre l’Accord de coopération entre les deux pays, car cela encouragerait les parties à adopter une position plus belliqueuse le long de la frontière.  Il a appuyé le renouvellement de la FISNUA, « la meilleure chose qui se soit produite à Abyei dans sa longue histoire tourmentée ».

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD

Rapport spécial du Secrétaire général sur l’examen du mandat de la Force intérimaire des Nations Unies pour l’Abyei (S/2017/293)

Rapport du Secrétaire général sur la situation à Abyei (S/2017/312)

Texte du projet de résolution (S/2017/412)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses précédentes résolutions et déclarations du Président concernant la situation au Soudan et au Soudan du Sud, notamment ses résolutions 1990 (2011), 2024 (2011), 2032 (2011), 2046 (2012), 2047 (2012), 2075 (2012), 2104 (2013), 2126 (2013), 2156 (2014), 2179 (2014), 2205 (2015), 2230 (2015), 2251 (2015), 2287 (2016) et 2318 (2016) et les déclarations du Président S/PRST/2012/19 et S/PRST/2013/14, ainsi que les déclarations du Président à la presse des 18 juin 2012, 21 septembre 2012, 28 septembre 2012, 6 mai 2013, 14 juin 2013, 14 février 2014, 17 mars 2014, 11 décembre 2014 et 27 novembre 2015,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale du Soudan et du Soudan du Sud, ainsi qu’aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et rappelant l’importance des principes de bon voisinage, de non-ingérence et de coopération régionale,

Déclarant à nouveau que les frontières territoriales des États ne sauraient être modifiées par la force et que les différends territoriaux doivent être réglés exclusivement par des moyens pacifiques, affirmant qu’il donne la priorité à la mise en œuvre intégrale et immédiate de tous les éléments de l’Accord de paix global encore en suspens et insistant sur le fait que le statut futur d’Abyei doit être déterminé par voie de négociations entre les parties dans le respect de l’Accord de paix global et non par des actions unilatérales de l’une ou l’autre des parties,

Rappelant les engagements pris par les Gouvernements soudanais et sud-soudanais dans l’Accord entre le Gouvernement de la République du Soudan et le Mouvement populaire de libération du Soudan concernant les arrangements provisoires pour l’administration et la sécurité de la zone d’Abyei conclu le 20 juin 2011, l’Accord conclu entre le Gouvernement soudanais et le Gouvernement du Sud-Soudan sur la sécurité des frontières et le Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité le 29 juin 2011 et l’Accord entre le Gouvernement du Soudan et le Gouvernement du Soudan du Sud concernant la Mission d’appui à la surveillance de la frontière conclu le 30 juillet 2011, ainsi que dans l’Accord de coopération entre la République du Soudan et la République du Soudan du Sud et l’Accord sur les dispositions de sécurité conclus le 27 septembre 2012, la décision du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité en date du 8 mars 2013 et le tableau récapitulatif établi aux fins de l’application des accords signés entre la République du Soudan et la République du Soudan du Sud, sur lequel les Gouvernements soudanais et sud-soudanais se sont entendus le 12 mars 2013 sous les auspices du Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine et lors de la réunion extraordinaire, tenue les 13 et 14 octobre 2015, et de la réunion ordinaire, tenue le 5 juin 2016, du Mécanisme,

Encourageant les progrès dans l’amélioration des relations bilatérales entre le Soudan et le Soudan du Sud et soulignant que le Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité et les autres mécanismes conjoints, notamment la Commission frontalière mixte et le Comité mixte de démarcation, doivent se réunir régulièrement afin de favoriser le dialogue et la coordination sur les questions de sécurité des frontières,

Priant instamment les Gouvernements soudanais et sud-soudanais de s’efforcer de progresser davantage dans la mise en œuvre des arrangements provisoires pour l’administration et la sécurité de la zone d’Abyei tels que prévus dans l’Accord du 20 juin 2011,

Exprimant son appui résolu aux efforts que déploie l’Union africaine pour apaiser les tensions actuelles entre la République du Soudan et la République du Soudan du Sud et favoriser la reprise des négociations sur les relations postsécession et la normalisation des relations, et soulignant l’importance de l’engagement continu de l’Union africaine,

Réaffirmant ses précédentes résolutions sur la protection des civils en période de conflit armé, notamment les résolutions 1265 (1999), 1296 (2000), 1674 (2006), 1738 (2006), 1894 (2009), 2175 (2014) et 2222 (2015); sur le sort des enfants en temps de conflit armé, notamment les résolutions 1612 (2005), 1882 (2009), 1998 (2011), 2068 (2012), 2143 (2014) et 2223 (2015); sur la protection du personnel humanitaire et du personnel des Nations Unies, notamment la résolution 1502 (2003); et sur les femmes et la paix et la sécurité, notamment les résolutions 1325 (2000), 1820 (2008), 1888 (2009), 1889 (2009), 1960 (2010), 2106 (2013), 2122 (2013) et 2242 (2015),

Soulignant qu’il est nécessaire de s’assurer du respect des droits de l’homme et de communiquer des informations sur la question, et notamment de constater toute forme de violence sexuelle et sexiste et toute violation ou atteinte commise sur la personne de femmes ou d’enfants, notant l’absence d’avancées concernant la surveillance effective du respect des droits de l’homme dans la zone d’Abyei, et se disant à nouveau préoccupé par le fait que les parties ne coopèrent pas avec le Secrétaire général dans ce domaine,

Rappelant que, dans sa résolution 2086 (2013), il a réaffirmé qu’il importait, lors de l’établissement et du renouvellement des mandats des missions des Nations Unies, d’y inclure des dispositions relatives à la promotion de l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes au lendemain des conflits, ainsi que sur le sort des enfants en temps de conflit armé, et soulignant que les obstacles persistants à l’application complète de sa résolution 1325 (2000) et de ses résolutions ultérieures sur les femmes et la paix et la sécurité, notamment sa résolution 2242 (2015), ne pourront être éliminés qu’au prix d’un engagement résolu en faveur de l’autonomisation des femmes, de leur participation et de leur capacité à exercer leurs droits fondamentaux, et moyennant la mise en place d’initiatives concertées et d’un dispositif d’information et d’action cohérent et la fourniture d’un appui, tout cela dans le but d’accroître la participation des femmes à la prise de décisions à tous les niveaux,

Notant que les Gouvernements soudanais et sud-soudanais ont accepté, à la réunion du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité tenue les 13 et 14 octobre 2015, la carte soumise en novembre 2011 par le Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine concernant la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, qu’ils sont convenus que la ligne médiane avait exclusivement pour fonction de servir de ligne de séparation entre les forces armées et que les parties sont convenues d’activer tous les dispositifs liés au Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité, comme prévu dans les accords pertinents, et encourageant les parties à définir le tracé de la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, notamment de la « zone des 14 miles », ou à en arrêter les coordonnées, et à la démilitariser, et à mettre pleinement en œuvre le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, conformément à sa résolution 2046 (2012) et à la Feuille de route du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine en date du 24 avril 2012, soulignant qu’il importe que le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière établisse et maintienne un contrôle effectif et complet de la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, et notamment de la « zone des 14 miles », et exhortant en outre les parties à coopérer pour permettre à la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA) de s’acquitter de la responsabilité qui lui incombe de garantir la sécurité afin que le personnel du Mécanisme conjoint puisse remplir sa mission de surveillance de la zone frontalière démilitarisée et sécurisée,

Regrettant que des progrès substantiels n’aient pas été réalisés par les deux parties en ce qui concerne les objectifs du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière et que des freins inutiles soient imposés au Mécanisme, réduisant sa capacité à contrôler efficacement la zone frontalière démilitarisée et sécurisée,

Notant avec préoccupation l’absence d’institutions locales qui pourraient administrer la zone d’Abyei ainsi que le manque de progrès constaté depuis mars 2015 s’agissant de convoquer une réunion du Comité mixte de contrôle d’Abyei,

Conscient qu’il importe que les Gouvernements soudanais et sud-soudanais continuent de dialoguer, rappelant sa résolution 2046 (2012), dans laquelle il a décidé que les parties devaient reprendre immédiatement les négociations, sous les auspices du Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine, en vue de parvenir à un accord sur le statut définitif d’Abyei, engageant toutes les parties à participer de façon constructive au processus, facilité par le Groupe de mise en œuvre et devant aboutir à un accord final sur le statut définitif de la zone d’Abyei, et soulignant que les parties doivent régler immédiatement les questions en suspens de l’Accord du 20 juin 2011, en particulier pour régler les différends concernant l’accord sur la zone d’Abyei et le Conseil de la zone, et créer immédiatement l’administration de la zone et le Service de police d’Abyei,

Soulignant que les deux pays et communautés auront beaucoup à gagner s’ils font preuve de retenue et empruntent la voie du dialogue au lieu de recourir à la violence et à la provocation,

Saluant le concours que continuent de prêter aux parties le Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement, la République fédérale démocratique d’Éthiopie, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Soudan et le Soudan du Sud et la FISNUA,

Saluant également les efforts que déploie la FISNUA pour s’acquitter de son mandat, en veillant notamment à faciliter les migrations pacifiques dans toute la zone d’Abyei, à prévenir les conflits et à mener des activités de médiation et de dissuasion, exprimant aux pays qui fournissent des contingents sa profonde gratitude pour le travail accompli, soulignant fermement que toute attaque perpétrée contre le personnel des Nations Unies, notamment les tirs effectués contre des patrouilles de la FISNUA au début de 2017 par des assaillants inconnus, est inacceptable et réaffirmant que des enquêtes approfondies sur ces attaques doivent rapidement être menées et que les responsables doivent être amenés à en répondre,

Prenant acte des conditions de sécurité dans la zone d’Abyei, décrites par le Secrétaire général dans son rapport du 11 avril 2017 (S/2017/312), constatant que, depuis son déploiement, la FISNUA a contribué à renforcer la paix et la stabilité et se disant résolu à empêcher que de nouveaux actes de violence contre des civils ou des déplacements de civils ne se produisent et à éviter les conflits intercommunautaires,

Se déclarant à nouveau profondément préoccupé par l’absence d’administration publique et d’état de droit dans la zone d’Abyei, due aux retards répétés dans la mise en place de l’administration, du Conseil et de la police de la zone d’Abyei, notamment d’une unité spéciale chargée de traiter les questions relatives à la migration des populations nomades, lesquels sont essentiels pour le maintien de l’ordre et la prévention des conflits intercommunautaires dans cette zone, et se félicitant à cet égard de l’action que mène la FISNUA pour appuyer et renforcer les comités de protection communautaire et pour continuer d’œuvrer aux côtés des deux gouvernements sur cette question,

Notant avec préoccupation que la mise en place des institutions temporaires et la détermination du statut définitif d’Abyei sont systématiquement reportées et que la persistance du risque de violences intercommunautaires contribue à la montée des tensions dans la zone d’Abyei, notamment celles qui empêchent le personnel soudanais de la FISNUA et d’autres organismes de retourner à Abyei,

Exhortant toutes les parties à s’abstenir de toute action unilatérale qui pourrait envenimer les relations intercommunautaires dans la zone d’Abyei, se déclarant préoccupé par les répercussions durables de ce que le Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine a qualifié dans sa déclaration à la presse du 6 novembre 2013 de « décision des Ngok Dinka d’organiser un référendum unilatéral » et, dans ce contexte, notant également que le Gouvernement soudanais a procédé à ses élections nationales d’avril 2015 à Abyei,

Conscient de la situation humanitaire actuelle, dans laquelle les organisations humanitaires continuent de fournir une assistance à 160 000 personnes dans la zone d’Abyei, et de l’importance de la cohérence de l’assistance fournie par les organismes des Nations Unies dans la région, et soulignant qu’il faut faciliter d’urgence l’acheminement de l’aide humanitaire à toutes les populations touchées,

Affirmant qu’il importe que les déplacés rentrent chez eux de leur plein gré, en toute sécurité et dans la dignité et s’y réintègrent durablement, et que la paix et l’ordre règnent pendant la saison des migrations, dans le respect des parcours migratoires traditionnels qui mènent du Soudan au Soudan du Sud à travers Abyei, et exhortant la FISNUA à continuer de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité dans la zone d’Abyei, conformément à son mandat,

Rappelant sa résolution 2117 (2013), vivement préoccupé par le fait que le transfert illicite, l’accumulation déstabilisante et le détournement d’armes légères et de petit calibre menacent la paix et la sécurité à Abyei, se félicitant de la mise en place des infrastructures, systèmes et politiques de confiscation, de stockage et de destruction des armes, et engageant la FISNUA à assurer la protection adéquate de ces infrastructures,

Préoccupé par la présence résiduelle de mines et de restes explosifs de guerre dans la zone d’Abyei, qui compromet la sécurité du retour des déplacés, celle des migrations et les activités de subsistance,

Prenant acte des rapports du Secrétaire général en date des 5 et 11 avril 2017 (S/2017/293 et S/2017/312), notamment de l’appel qu’il a lancé aux parties afin qu’elles redoublent d’efforts pour résoudre les questions en suspens, qu’elles appliquent l’Accord d’Abyei du 20 juin 2011 et qu’elles lèvent tous les obstacles opérationnels auxquels la FISNUA est confrontée,

Rappelant qu’il s’est félicité, dans sa résolution 2205 (2015), de la décision du Secrétaire général de nommer un chef civil de mission,

Constatant que la situation qui règne à Abyei et le long de la frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud continue de menacer gravement la paix et la sécurité internationales,

1.     Décide de proroger jusqu’au 15 novembre 2017 le mandat de la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei établi au paragraphe 2 de la résolution 1990 (2011) et modifié par la résolution 2024 (2011) et le paragraphe 1 de la résolution 2075 (2012) et, agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, décide également de proroger jusqu’au 15 novembre 2017 le mandat de la Force établi au paragraphe 3 de la résolution 1990 (2011), et précise qu’aux fins du paragraphe 1 de la résolution 2024 (2011), l’appui opérationnel fourni au Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière doit être étendu aux comités spéciaux, selon qu’il convient si ces mécanismes en font la demande par consensus, dans la limite de la zone d’opérations et des moyens disponibles de la FISNUA;

2.     Souligne que la coopération constante entre les Gouvernements soudanais et sud-soudanais est essentielle pour la paix, la sécurité et la stabilité, ainsi que pour l’avenir des relations entre les deux États;

3.     Exige à nouveau du Soudan et du Soudan du Sud qu’ils entreprennent sans délai de mettre en place l’administration et le Conseil de la zone d’Abyei, notamment en sortant de l’impasse au sujet de la composition du Conseil, et créent le Service de police d’Abyei, appelé à assumer les fonctions de police dans toute la zone d’Abyei, notamment à protéger les infrastructures pétrolières, conformément aux engagements qu’ils ont pris dans l’Accord du 20 juin 2011;

4.     Demande instamment aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais de reprendre des négociations directes afin de conclure sans délai un accord définitif sur la question d’Abyei, engage les parties à prendre des mesures concrètes pour renforcer la confiance et contribuer à la réalisation de cet objectif avec le concours renouvelé du Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine, encourage le Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine et l’Envoyé spécial du Secrétaire général à poursuivre les efforts de coordination visant à demander la pleine application des accords de 2011, et prie le Secrétaire général de faire un compte rendu sur les progrès enregistrés à cet égard d’ici au 15 août 2017;

5.     Regrette que la réunion du Comité mixte de contrôle d’Abyei n’ait pas encore été tenue, demande instamment l’application des décisions antérieures du Comité mixte de contrôle d’Abyei et de l’Accord du 20 juin 2011, rappelle qu’il est nécessaire que l’Union africaine prenne des initiatives à l’appui de cet objectif et encourage celle-ci à poursuivre son action, et prie le Secrétaire général de faire le point des progrès accomplis sur ces questions dans ses rapports périodiques;

6.     Se dit à nouveau préoccupé que les efforts visant à rendre le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière pleinement opérationnel soient enlisés et que des retards aient été pris à cet égard, prend acte des critères et recommandations formulés par le Secrétaire général concernant le fonctionnement du Mécanisme, note que l’aide apportée au Mécanisme pour qu’il atteigne sa pleine capacité opérationnelle devrait être subordonnée à plusieurs conditions, notamment le règlement du différend concernant la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, et invite les Gouvernements soudanais et sud-soudanais à recourir efficacement et en temps utile au Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, au Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité et aux autres mécanismes conjoints convenus, pour garantir la sécurité et la transparence de la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, notamment de la « zone des 14 miles »;

7.     Demande aux deux parties de respecter les engagements qu’elles ont pris dans l’Accord du 30 juillet 2011 concernant la Mission d’appui à la surveillance de la frontière, notamment la reprise des discussions sur la démarcation de la frontière, la tenue de réunions régulières du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et l’assurance d’une complète liberté de circulation, et engage les deux parties à se montrer pleinement déterminées à mettre en œuvre les arrangements qu’elles ont arrêtés concernant leur frontière commune et à prendre les mesures voulues à cette fin, notamment en donnant suite à la réunion du 5 juin 2016 et en organisant rapidement une nouvelle réunion du Mécanisme conjoint pour les questions politiques et la sécurité afin de prendre les décisions opérationnelles concernant leur accord sur la zone frontalière démilitarisée sécurisée;

8.     Décide que la présente prorogation de la modification du mandat établie dans la résolution 2024 (2011) sera la dernière à moins que les deux parties ne montrent, par leurs actions, qu’elles sont clairement résolues et s’engagent fermement à mettre en œuvre le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière, conformément aux mesures énoncées au paragraphe 7, et prie le Secrétaire général de lui faire rapport quant à savoir si le mécanisme aura atteint sa pleine capacité opérationnelle d’ici au 15 octobre 2017;

9.     Décide de réduire l’effectif maximum autorisé à 4 791 militaires et prie le Secrétaire général de le tenir pleinement informé de l’état d’avancement du déploiement dans ses rapports périodiques;

10.    Engage vivement les parties à redoubler d’efforts pour déterminer définitivement sur le terrain le tracé de la ligne médiane de la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, et rappelle que la ligne médiane ne préjuge en rien du statut juridique actuel et futur de la frontière, des négociations en cours sur les zones contestées et revendiquées ni de la démarcation de la frontière;

11.    Souligne que, pour s’acquitter de son mandat de protection des civils établi au paragraphe 3 de la résolution 1990 (2011), la FISNUA prendra les mesures nécessaires pour protéger les civils sous la menace imminente d’actes de violence physique, quelle qu’en soit la source, et salue les efforts déployés par la FISNUA à cet égard;

12.    Condamne la présence intermittente de personnel des services de sécurité sud-soudanais et le déploiement des unités de la police du pétrole de Diffra dans la zone d’Abyei, en violation de l’Accord du 20 juin 2011, et toute entrée de milices armées sur le territoire, exige à nouveau que le Gouvernement sud-soudanais retire ses forces de sécurité de la zone d’Abyei et que le Gouvernement soudanais en retire la police du pétrole de Diffra, immédiatement et sans condition préalable, et rappelle à nouveau que, conformément à ses résolutions pertinentes, en particulier les résolutions 1990 (2011) et 2046 (2012), la zone d’Abyei doit être démilitarisée, toutes les forces autres que celles de la FISNUA et du Service de police d’Abyei devant s’en retirer, ainsi que les éléments armés des populations locales;

13.    Appuie les décisions du 3 mai 2013 et du 30 mars 2015 par lesquelles le Comité mixte de contrôle d’Abyei a donné à Abyei le statut de zone exempte d’armes, souligne que, dans son communiqué du 7 mai 2013, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine s’est dit préoccupé par les informations selon lesquelles plusieurs groupes de population vivant à Abyei seraient lourdement armés, rappelle qu’aux termes de l’Accord du 20 juin 2011 concernant les arrangements provisoires pour l’administration et la sécurité de la zone d’Abyei, celle-ci devrait être une zone exempte d’armes, la FISNUA étant seule autorisée à y faire entrer des armes et, à cet égard, demande instamment aux deux gouvernements de prendre toutes les mesures nécessaires pour procéder à la démilitarisation effective d’Abyei, notamment en mettant en place des programmes de désarmement, selon que de besoin;

14.    Réaffirme que, selon l’autorisation accordée dans la résolution 1990 (2011), la FISNUA, agissant dans les limites de son mandat et de ses capacités, peut procéder à la confiscation et à la destruction d’armes dans la zone d’Abyei, en coordination avec les signataires de l’Accord de juin 2011 concernant les arrangements provisoires pour l’administration et la sécurité de la zone d’Abyei, le Comité mixte de contrôle et les populations misseriya et ngok dinka et conformément à la décision du Comité mixte de contrôle de faire d’Abyei « une zone exempte d’armes », et demande à nouveau à la FISNUA de constater les mouvements d’armes à destination d’Abyei et la présence, la destruction et la confiscation d’armes à Abyei, de rassembler des informations à ce sujet et de lui en rendre compte dans le cadre des rapports périodiques du Secrétaire général;

15.    Demande à la FISNUA de poursuivre le dialogue avec le Comité mixte de contrôle d’Abyei et les populations misseriya et ngok dinka en vue de mettre en place des stratégies et mécanismes de contrôle permettant de garantir pleinement le respect du statut d’Abyei comme zone exempte d’armes par l’ensemble des parties concernées, la priorité étant accordée à l’élimination sans délai des armes lourdes ou collectives et des lance-roquettes, et demande aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais, au Comité mixte de contrôle d’Abyei et aux populations misseriya et ngok dinka de collaborer pleinement avec la FISNUA à cet égard;

16.    Demande instamment aux deux gouvernements de prendre immédiatement des mesures pour renforcer la confiance entre les différentes communautés de la zone d’Abyei, en s’assurant que les femmes participent à tous les stades, notamment à la faveur de processus de réconciliation à l’échelon local, en appuyant les efforts déployés par les organisations non gouvernementales pour consolider la paix, et en aidant pleinement la FISNUA à promouvoir le dialogue, se félicite de la poursuite du dialogue entre les Ngok Dinka et les Misseriya et exhorte toutes les communautés d’Abyei à faire preuve de la plus grande retenue dans tous leurs échanges et à s’abstenir de tout acte ou discours provocateur pouvant susciter des affrontements violents;

17.    Souligne que la participation des femmes à tous les niveaux du dialogue intercommunautaire est essentielle pour garantir un processus crédible et légitime et demande à toutes les parties de promouvoir une participation des femmes qui soit sans restriction et sur un pied d’égalité;

18.    Se félicite des progrès réalisés au niveau local entre les populations misseriya et ngok dinka, en particulier de leur engagement apprécié en faveur de la réconciliation et de la coopération, comme le montrent la reprise des activités commerciales et la surveillance des biens et du bétail volés, notamment leur restitution ou l’indemnisation rapide des victimes;

19.    Se félicite également des initiatives prises par la FISNUA pour soutenir le dialogue des communautés et les efforts fournis par les populations misseriya et ngok dinka pour renforcer les relations intercommunautaires et promouvoir la stabilité et la réconciliation dans la région d’Abyei, notamment de la facilitation des réunions du Comité mixte pour la paix entre les deux communautés et de la réouverture d’un marché commun;

20.    Salue les efforts que la FISNUA continue de faire pour renforcer, dans la limite de ses capacités et ressources et en coordination étroite avec les populations misseriya et ngok dinka, les capacités des comités de protection communautaire, afin de contribuer à la gestion des processus de maintien de l’ordre dans la zone d’Abyei et de poursuivre sa collaboration avec les deux gouvernements sur cette question;

21.    Engage toutes les parties à donner pleinement suite aux conclusions et recommandations issues de l’enquête de la Commission d’enquête conjointe de la zone d’Abyei sur le meurtre d’un soldat de la paix de la FISNUA et du Chef suprême des Ngok Dinka, accueille avec satisfaction la déclaration à la presse du 24 mars 2015 par laquelle le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a demandé à la Commission de l’Union africaine d’avoir des échanges avec les parties au sujet de ces constatations et recommandations, et réaffirme la nécessité de permettre aux deux communautés de clore l’enquête sur l’assassinat du Chef suprême des Ngok Dinka, compte tenu de la nécessité de promouvoir la stabilité et la réconciliation dans la zone d’Abyei;

22.    Entend réexaminer, selon que de besoin, le mandat de la FISNUA en vue de restructurer éventuellement la Force en fonction de la suite que le Soudan et le Soudan du Sud donneront aux décisions prises dans la résolution 2046 (2012) et aux engagements auxquels ils ont souscrit dans les accords des 20 et 29 juin et 30 juillet 2011 et 27 septembre 2012, portant notamment sur le retrait de toutes les forces de la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, la pleine mise en œuvre opérationnelle du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière et des comités spéciaux ainsi que l’achèvement de la démilitarisation de la zone d’Abyei;

23.    Demande à tous les États Membres, en particulier au Soudan et au Soudan du Sud, de garantir la libre circulation, sans entrave ni retard, à destination et en provenance d’Abyei et dans toute la zone frontalière démilitarisée et sécurisée, de tout le personnel de la FISNUA ainsi que de l’ensemble du matériel, des vivres, des fournitures et des autres biens, notamment des véhicules, aéronefs et pièces de rechange, destinés à l’usage officiel et exclusif de la FISNUA;

24.    Demande à nouveau aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais d’apporter tout leur soutien aux organismes des Nations Unies, et notamment de délivrer rapidement des visas au personnel militaire, au personnel de police et au personnel civil des Nations Unies, y compris au personnel humanitaire, sans considération de nationalité, afin qu’ils puissent entrer au Soudan et au Soudan du Sud, de faciliter l’installation de bases, la construction d’infrastructures dans la zone de la mission et l’octroi d’autorisations de vol et de fournir un soutien logistique, demande aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais de faciliter les déplacements au Soudan et au Soudan du Sud en provenance ou à destination d’Abyei, et demande également à toutes les parties de respecter pleinement leurs obligations au titre de l’Accord sur le statut des forces;

25.    Reconnaît que l’absence de projets de développement ainsi que l’incapacité de fournir des services publics de base ont eu des conséquences défavorables pour les populations d’Abyei et demande aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais ainsi qu’aux donateurs d’appuyer les activités de reconstruction et de renforcement des capacités;

26.    Exige des Gouvernements soudanais et sud-soudanais qu’ils continuent de faciliter le déploiement du personnel du Service de la lutte antimines de l’ONU afin que le personnel du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière puisse se déplacer librement et que les mines qui se trouvent dans la zone d’Abyei et la zone frontalière démilitarisée et sécurisée puissent être détectées et neutralisées;

27.    Exige également de toutes les parties concernées qu’elles permettent à tous les agents humanitaires d’accéder en toute sécurité et en toute liberté aux populations civiles qui ont besoin d’aide et qu’elles leur accordent toutes les facilités nécessaires à leurs activités, conformément au droit international, y compris le droit international humanitaire applicable, et aux principes directeurs des Nations Unies concernant l’assistance humanitaire;

28.    Demande instamment que toutes les parties cessent toutes formes de violence, de violations des droits de l’homme, de violations du droit international humanitaire et de violations et atteintes commises sur la personne d’enfants contrevenant au droit international applicable;

29.    Engage la FISNUA à avancer rapidement dans le déploiement d’un conseiller pour la protection des femmes et des enfants;

30.    Prie le Secrétaire général de pourvoir à la surveillance effective du respect des droits de l’homme et d’en rendre compte dans les rapports qu’il lui présente, et demande à nouveau aux Gouvernements soudanais et sud-soudanais d’apporter au Secrétaire général leur plein concours à cette fin, notamment en délivrant des visas au personnel des Nations Unies concerné;

31.    Rappelle la résolution 2272 (2016) et prie également le Secrétaire général de prendre les dispositions nécessaires pour que la FISNUA applique pleinement la politique de tolérance zéro de l’Organisation à l’égard de l’exploitation et des agressions sexuelles et de le tenir pleinement informé des progrès faits par la FISNUA à cet égard, notamment en ce qui concerne l’application de la résolution 2272 (2016), dans ses rapports périodiques sur des pays donnés;

32.    Prie le Secrétaire général de continuer de l’informer des progrès accomplis dans l’exécution du mandat de la FISNUA dans deux rapports écrits, qu’il lui remettra au plus tard les 31 juillet et 15 octobre 2017, et de porter immédiatement à son attention toute violation grave des accords susmentionnés;

33.    Prend note de l’action que mène le Secrétaire général pour assurer une coopération étroite entre les missions des Nations Unies présentes dans la région, notamment la FISNUA, la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) et l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD), ainsi qu’avec son Envoyé spécial pour le Soudan et le Soudan du Sud, et lui demande de maintenir cette pratique;

34.    Décide de rester activement saisi de la question.

Déclarations

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a considéré que la FISNUA fournit une sécurité essentielle à la zone et aux communautés qui la traversent.  Elle s’est dite entièrement d’accord avec l’évaluation du Secrétaire général, à savoir que le problème d’Abyei est un problème politique.  Or, depuis 2011, les deux gouvernements n’ont jamais eu la volonté nécessaire afin de régler la question et de mettre en œuvre les mesures convenues pour administrer conjointement la zone et opérationnaliser le Mécanisme conjoint de vérification.  Ils ont constamment imposé des restrictions au mandat de la FISNUA.

« Cinq ans d’obstacles au déploiement de la mission, cela suffit », a-t-elle martelé.  Ce Conseil ne devrait pas appuyer indéfiniment des mandats qui ne font pas l’objet de l’assentiment stratégique des parties.  Il doit exiger des États qu’ils respectent leurs engagements.  Elle s’est félicitée de la décision d’accorder la dernière et ultime prorogation.  « Il importe à chaque membre de remettre en cause le statu quo lorsque celui-ci ne fonctionne pas. »

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie), seul pays fournisseur de contingents à la FISNUA, s’est félicité de l’adoption de cette résolution.  Les deux parties doivent démontrer leur plein engagement vis-à-vis des accords concernant la frontière et prendre des mesures en ce sens.  Il est essentiel que les parties commencent à établir l’administration de la zone d’Abyei et à mettre en place les forces de police.  « En l’absence de progrès, la poursuite de la présence de la mission sera gravement remise en question », a-t-il assuré. 

M. SEBASTIANO CARDI (Italie), s’exprimant également au nom de la Suède, a partagé l’avis des États-Unis selon lequel on a besoin d’une plus grande efficacité dans les missions de maintien de la paix de l’ONU.  Le renouvellement de leur mandat ne doit jamais être considéré comme faisant partie d’une routine.  Il s’agit également de prendre en compte l’opinion des organisations régionales et des pays fournisseurs de contingents.

« L’impasse à Abyei n’a que trop duré », a-t-il insisté.  Aujourd’hui, le Conseil dit aux parties qu’elles doivent faire preuve d’un engagement fort au cours des prochains six mois, sinon la mission de la FISNUA se terminera.  

M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie) a appuyé l’adoption de cette résolution de compromis, car la cessation complète de soutien pour le Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière de la part de la FISNUA aurait été très mauvaise. 

Il a espéré que les deux parties entendront l’appel du Conseil de sécurité.  Celui-ci vient d’adopter une décision qui reflète les positions des pays concernés de la région, mais, a-t-il relevé, des questions se posent sur les méthodes de travail des porte-plume principaux.

M. KORO BESSHO (Japon) a remercié les États-Unis pour les négociations sur ce texte, ainsi que l’Éthiopie pour sa souplesse qui a permis de l’adopter.  Il a dit avoir soutenu ce texte pour améliorer le fonctionnement du Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière. 

Il a déclaré être encouragé par le dialogue mené au niveau local, mais déçu par le manque de progrès politique dans cette résolution.  Il a appuyé la simplification et la rationalisation des opérations de maintien de la paix.  Il a souhaité des discussions approfondies sur les mandats et les plafonds autorisés sur chaque opération.

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a salué l’adoption de la résolution qui reflète l’unité du Conseil de sécurité et envoie un message fort aux parties quant à sa vision claire.  Il a demandé de suivre la même approche lorsqu’on examine toute opération de maintien de la paix, plutôt que de rechercher une réduction graduelle des effectifs qui aurait une incidence sur la capacité de s’acquitter du mandat. 

Il a aussi déclaré vouloir tenir compte des préoccupations des pays fournisseurs de contingents lorsque le Conseil de sécurité décide de proroger un mandat.

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a tenu compte des préoccupations des pays concernés.  Grâce aux efforts des pays et de la communauté internationale, la situation à Abyei reste calme, a-t-il noté tout en constatant qu’il reste des défis à relever.

À son avis, la mise en œuvre du mandat de la FISNUA sera essentielle pour le maintien de la paix et de la sécurité.  Il a appelé à regarder le tableau général des intérêts dans la région. 

M. CLAY (Royaume-Uni) a rendu hommage à la mission et à l’Éthiopie pour tout ce qu’elles ont fait en faveur de la paix.  Il a souhaité que l’on continue à œuvrer pour la stabilité dans la région et que l’on suive de près les travaux de la FISNUA.  Quand il y a des preuves qu’un mandat n’est pas exécuté, il ne faut pas continuer à lui consacrer des ressources, a-t-il cependant argué.  

Il a estimé que le Mécanisme cesserait dans six mois, à moins que les gouvernements concernés ne s’engagent à le faire fonctionner à sa pleine capacité.

M. ABDOULAYE BARRO (Sénégal) a salué la souplesse qui a permis de déboucher sur un compromis dynamique.  Il s’est dit convaincu de la nécessité d’une approche unitaire des résolutions du Conseil de sécurité sur la question d’Abyei.  

En application des accords pertinents entre les deux pays, il a lancé un appel aux deux pays pour qu’ils mettent en œuvre des arrangements provisoires et la surveillance de la frontière, afin de prévenir les tensions de nature à compromettre la stabilité déjà acquise.  Il les a engagés à maintenir un dialogue constructif avec les pays contributeurs de troupes.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a jugé essentiel de continuer à suivre avec attention la situation entre les deux pays et l’adéquation de la mission au mandat qui lui est confié, déterminant pour la paix en Afrique de l’Est.

« La stabilité des relations entre les deux pays est avant tout entre les mains des deux parties », a dit la représentante.  L’Accord de 2011 constitue la feuille de route à suivre, a-t-elle ajouté, en se réjouissant que la résolution en appelle aux responsabilités des deux parties.

Saluant cette résolution « conditionnelle », M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a déclaré que « l’avenir de cette mission est exclusivement entre les mains du Soudan et du Soudan du Sud ».

M. MAGDI AHMED MOFADAL ELNOUR (Soudan) a remercié le Conseil de sécurité de son esprit de coopération et de consensus qui lui a permis d’adopter la résolution prorogeant de six mois le mandat de la FISNUA.  Il a espéré que cet esprit prévaudrait pour les discussions du Conseil pour faire face à tous les défis qui pèsent sur la paix internationale.  Il a réitéré l’engagement de son pays à coopérer avec la FISNUA.  Il a souligné le rôle positif de la FISNUA depuis sa création.

Le Soudan n’a jamais rien fait pour nuire au travail du Mécanisme, a-t-il assuré.  Le rapport indique que le Mécanisme avait dû annuler 18 de ses patrouilles aériennes en raison de retard d’approbation par le Soudan du Sud, a-t-il par ailleurs remarqué.  Il s’est demandé pourquoi la FISNUA cesserait son soutien au Mécanisme.

Le représentant a indiqué que le Gouvernement soudanais était attaché à la mise en œuvre des réunions du Comité conjoint politique qui s’est réuni hier à Addis-Abeba, espérant que ces décisions constitueraient un nouveau début.  Il a affirmé son attachement aux accords signés avec le Gouvernement du Soudan du Sud, y compris le protocole d’Abyei de 2004, l’Accord temporaire pour l’administration d’Abyei du 20 juin 2007 et l’Accord de coopération de septembre 2012. 

Il a prôné le dialogue pour créer des institutions d’Abyei et pour déterminer le statut final de la zone.  Jusque-là, la zone est un territoire soudanais, a-t-il rappelé en soulignant la souveraineté pleine et entière de son pays.

Rappelant que l’Accord de juin 2011 prévoit la création d’administration conjointe d’Abyei et de police conjointe, il a prédit que cela créerait un environnement propice pour répondre aux aspirations de toutes les parties. 

L’Accord prévoit également des modalités de sécurité exigeant de cesser le soutien à tout rebelle.  Il a dès lors regretté que le Soudan du Sud continue de soutenir les mouvements rebelles soudanais, l’appelant à respecter ses engagements.  S’agissant du déploiement d’une unité de police, il a estimé que cette décision était le résultat d’un échec dans la création d’une police conjointe à Abyei. 

M. JOSEPH MOUM MAJAK NGOR MALOK (Soudan du Sud) a appuyé le renouvellement de la FISNUA, « la meilleure chose qui se soit produite à Abyei dans sa longue histoire tourmentée ».

Tout en saluant les progrès réalisés par la FISNUA et un certain degré de coopération entre les Gouvernements soudanais et sud-soudanais, il a considéré que le retrait de l’appui au Mécanisme conjoint de vérification et de surveillance de la frontière aurait un impact négatif sur la mise en œuvre de l’Accord de coopération entre les deux pays, car cela encouragerait les parties à adopter une position plus belliqueuse le long de la frontière.  D’après lui, le Conseil de sécurité devrait être encouragé à appuyer le Mécanisme, pour éviter des conflits par procuration le long de la frontière.

Il est évident que la recherche d’une solution définitive au problème d’Abyei a calé, a-t-il regretté, malgré les efforts inlassables du Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine.  La population d’Abyei et des communautés voisines du nord et du sud, qui migrent saisonnièrement dans la région à la recherche d’eau et de pâturages, ne peuvent pas être abandonnées à leur sort, a-t-il plaidé.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Violences sexuelles en période de conflit: comment passer de l’impunité à la dissuasion?

7938e séance – matin
CS/12819

Violences sexuelles en période de conflit: comment passer de l’impunité à la dissuasion?

Les violences sexuelles en période de conflit étant considérées comme une menace légitime pour la sécurité et la paix durables, le Conseil de sécurité a tenu un long débat, aujourd’hui, sous la présidence du Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Uruguay, M. José Luis Cancela, pour réfléchir aux moyens de prévenir ce fléau et d’y remédier, face à une aggravation récente du problème.

Tout en soulignant le rôle essentiel qu’a joué jusqu’à présent le Conseil de sécurité en encourageant la reddition de la justice et la prévention dans ce domaine, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohammed, lui a néanmoins demandé d’en faire plus pour éliminer ces crimes une fois pour toutes.

De son côté, le Ministre de la défense de la Suède, M. Peter Hultqvist, a souhaité que le Conseil suive cette question en priorité, notamment en améliorant la collecte de données statistiques et de témoignages.  Le Vice-Ministre uruguayen des affaires étrangères a été d’avis que la communauté internationale devait miser sur l’alerte rapide.

La délégation russe a fait entendre un avis différent sur le rôle que doit jouer le Conseil de sécurité sur ce sujet, craignant une tentative d’élargir son champ de compétence.  Il a demandé d’établir une distinction claire entre les violences sexuelles constituant des crimes de guerre, et les crimes semblables qui ne sont pas liés à un conflit.

Pour Mme Mina Jaf, invitée à participer au débat en sa qualité de Directrice de l’organisation non gouvernementale « Route des réfugiées », le plus important est de faire de l’autonomisation des femmes et des filles le pilier de tous les efforts visant à prévenir la violence sexuelle dans les conflits armés.  Car, selon elle, cette violence est le résultat des échecs systématiques de la communauté internationale à traiter des causes sous-jacentes des conflits et des inégalités entre les sexes.

Le débat abordait la question des violences sexuelles sous l’angle d’une nouvelle tendance à les utiliser comme « tactique de guerre et de terrorisme », comme « outils de déshumanisation et de honte », ainsi que comme « armes pour punir et persécuter », comme l’a décrit le Conseiller spécial pour la prévention du génocide, M. Adama Dieng, qui est actuellement chargé du Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.

En citant le rapport du Secrétaire général sur les violences sexuelles liées aux conflits*, datant du 15 avril 2017, M. Dieng a attiré l’attention sur les nouvelles dimensions de ce fléau telles que l’utilisation de femmes esclaves sexuelles comme kamikazes ou boucliers humains, ou encore comme monnaie servant à dédommager les combattants, ce qui en fait des ressources « jetables » pour alimenter le terrorisme. 

Le Secrétaire général relève que cette violence est de plus en plus utilisée comme tactique de terrorisme par des groupes extrémistes en Iraq, en Syrie, au Yémen, en Somalie, au Nigéria ou au Mali.  Parmi les autres situations où ces crimes sont commis, les cas du Soudan du Sud et de la République démocratique du Congo (RDC) ont été souvent mentionnés.

Le débat a permis d’aborder les différents aspects d’une réponse efficace, qui s’articule autour de trois domaines: la sécurité, la justice, et les services multidimensionnels pour les victimes.

Tout le monde a été d’accord pour dire qu’il revient aux gouvernements nationaux de protéger les citoyens.  Mais vu les difficultés de certains pays à assumer cette responsabilité, de nombreux appels ont été lancés pour que la communauté internationale contribue à renforcer les capacités des pays concernés.

Il existe d’ailleurs aux Nations Unies une « Équipe d’experts de l’état de droit et des questions touchant les violences sexuelles commises en période de conflit », qui offre un appui technique aux États Membres, dont la RDC, la Guinée et la Côte d’Ivoire.

Tout au long du débat, les délégations ont tenu à faire valoir le point de vue des victimes en appelant à leur fournir toute l’assistance nécessaire, notamment des conseils psychosociaux et des soins de santé génésique d’urgence, tout en s’assurant que la justice soit rendue au plan pénal comme au niveau du dédommagement des victimes.  Beaucoup ont aussi insisté sur la réinsertion sociale et économique de ces dernières.

Le débat a aussi soulevé le problème de la stigmatisation des victimes de ces violences.  « L’opprobre tue », n’a pas hésité à dire M. Dieng en citant les crimes d’honneur, les suicides ou encore les avortements qui ne sont pas pratiqués en toute sécurité.

C’est pourquoi le Secrétaire général adjoint, comme de nombreux intervenants aujourd’hui, a insisté sur les changements de mentalité à opérer au niveau des chefs traditionnels et religieux, préalable aux changements législatifs nécessaires.  Il a signalé à cet égard que 62 pays n’offraient toujours pas de protection aux hommes victimes de viol.

Enfin, les intervenants n’ont pas manqué d’aborder les cas d’atteintes et d’exploitation sexuelles commises par des membres du personnel civil et militaire des opérations de maintien de la paix, en appuyant fermement la politique de tolérance zéro adoptée par le Secrétaire général et les mesures spéciales prises pour y arriver. 

* S/2017/249

LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ

La violence sexuelle en période de conflit

Lettre datée du 5 mai 2017, adressée au Secrétaire général par le Chargé d’affaires par intérim de la Mission permanente de l’Uruguay auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2017/402)

Déclarations

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a salué le Conseil de sécurité pour son travail de lutte contre les violences sexuelles en période de conflit, notamment par l’adoption récente de la résolution 2331 (2016), laquelle souligne les liens entre les violences sexuelles liées aux conflits, la traite dans les conflits armés et l’extrémisme violent.

Le débat d’aujourd’hui a lieu à un moment critique, a-t-elle dit.  D’une part, le silence profond qui a traditionnellement voilé les crimes des violences sexuelles est finalement rompu.  Il y a plus de visibilité, plus de volonté politique et plus d’élan, a-t-elle estimé.

La compréhension globale de ce fléau change, a observé Mme Mohammed.  Les violences sexuelles en période de conflit ne sont plus considérées comme « simplement une question concernant les femmes » ou comme un « moindre mal » dans une fausse hiérarchie des violations des droits de l’homme.

Au lieu de cela, on les considère à juste titre comme une menace légitime pour la sécurité et la paix durables qui exige une sécurité opérationnelle et une réponse juridique, et nécessite d’assurer des services multidimensionnels pour les survivants de ces crimes.

Le Secrétaire général, M. António Guterres, a accordé la priorité à la prévention, a poursuivi la Vice-Secrétaire générale.  Le mandat concernant les violences sexuelles en période de conflit, grâce au leadership stratégique des représentants spéciaux successifs, à l’engagement des États Membres et aux partenariats avec la famille et la société civile des Nations Unies, montre comment une information et une analyse opportunes et fiables peuvent être utilisées pour la prévention.

Un cadre législatif solide existe désormais, a-t-elle expliqué, faisant état notamment d’une série de résolutions précises du Conseil de sécurité qui apportent de nouveaux outils pour stimuler les changements et les progrès.

L’on observe, a-t-elle dit, une plus grande appropriation nationale, un plus grand leadership et une plus grande responsabilité.  Plus de gouvernements s’engagent formellement à agir.  Les organisations régionales travaillent de conserve avec les Nations Unies pour compléter cet effort.

Cependant, selon elle, la réalité pour les populations vulnérables dans de nombreuses situations demeure une préoccupation, notamment au Soudan du Sud, où les violences sexuelles constituent une arme choisie et une tactique de guerre utilisées pour terroriser et persécuter les populations.

Comme le Secrétaire général le souligne dans son rapport, « nous sommes confrontés à de nouveaux défis ».  La violence sexuelle est de plus en plus utilisée comme tactique de terrorisme, employée par des groupes extrémistes en Iraq, en Syrie, au Yémen, en Somalie, au Nigéria ou au Mali pour faire progresser leurs objectifs militaires, économiques et idéologiques.

Une même litanie d’horreurs est décrite à travers les récits des captives yézidies de Daech, des filles nigérianes qui ont fui Boko Haram, des femmes somaliennes libérées des Chabab, des femmes dans le nord du Mali vivant sous la coupe du groupe extrémiste Ansar Eddine.

Il est donc essentiel que des considérations de protection et d’autonomisation des femmes et des filles fassent partie de l’architecture de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.

Le Secrétaire général a accordé une attention particulière à l’amélioration du processus visant à obtenir des engagements concrets en matière de protection de la part des parties énumérées chaque année dans ses rapports sur les violences sexuelles et les enfants dans les conflits armés.

La communauté internationale fait face à des défis opérationnels et politiques sans précédent qui exigent un appui concerté des États Membres et de l’ensemble du système des Nations Unies.  Selon la Vice-Secrétaire générale, la crise de la migration de masse et les déplacements massifs de populations en raison de conflits prolongés dans le monde ont augmenté le risque de violences sexuelles.

La réponse des Nations Unies est, par ailleurs, compromise par des allégations inacceptables et des cas d’abus et d’exploitation sexuels par les Casques bleus, a affirmé Mme Mohammed.  « Le Secrétaire général et nous tous sommes déterminés à faire face à ce défi, comme en témoigne le rapport récent sur les mesures spéciales pour la protection contre l’exploitation et les abus sexuels, qui décrit une stratégie visant à faire de la tolérance zéro une réalité. »

La Vice-Secrétaire générale s’est dite réjouie de la nouvelle de la libération, la semaine dernière, de 82 filles détenues en captivité depuis trois ans par Boko Haram.  Les filles faisaient partie d’un groupe de 270 écolières kidnappées à Chibok, en avril 2014.  Mais, a-t-elle souligné, « des milliers d’autres sont encore portées disparues dans le monde et nous devons continuer à exiger sans relâche leur retour ».

Il ne suffit pas de « ramener nos filles », nous devons les ramener dans la dignité et le respect, dans un environnement de soutien, d’égalité et d’opportunités, et veiller à ce qu’elles reçoivent des conseils psychosociaux, des soins de santé génésique d’urgence et autre assistance.   Les victimes des violences sexuelles liées aux conflits ont également droit à des réparations complètes.

Pour Mme Mohammed, la réinsertion sociale et économique est impérative et doit faire partie intégrante des efforts de reconstruction, de justice transitionnelle et des cadres de développement postconflit.  C’est également l’un des principaux engagements énoncés dans les objectifs de développement durable en vue d’autonomiser les femmes et les filles et d’éliminer toutes les formes de violence à leur égard.

Si le Conseil de sécurité a joué un rôle essentiel en favorisant la reddition des comptes et la prévention des violences sexuelles, il doit néanmoins, selon la Vice-Secrétaire générale, faire plus pour éliminer ces crimes une fois pour toutes.

Le Secrétaire général énonce des recommandations complètes dans son rapport, y compris l’engagement du Conseil à obtenir des parties en conflit des mesures concrètes en matière de protection et à procéder à un déploiement accéléré sur le terrain d’effectifs spécialisés, comme des conseillers en matière de protection des femmes.

« Nous avons la responsabilité solennelle, a-t-elle conclu, de transformer une culture d’impunité de plusieurs siècles en une culture de responsabilité et de dissuasion. »

M. ADAMA DIENG, Secrétaire général adjoint et Conseiller spécial pour la prévention du génocide, qui est actuellement chargé du Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, a souligné que, ainsi que le décrit le Secrétaire général dans son rapport sur les violences sexuelles liées aux conflits datant du 15 avril 2017, les violences sexuelles sont utilisées comme tactique de guerre et de terrorisme, comme outils de déshumanisation et de honte, ainsi que comme armes pour punir et persécuter.

Le Secrétaire général, dans son rapport, met en lumière de nouvelles dimensions de ce fléau telles que l’utilisation de filles et de femmes esclaves sexuelles comme kamikazes ou boucliers humains, ou encore comme monnaie servant à dédommager les combattants et à soutenir les opérations militaires, ce qui atteste leur statut de ressources « jetables » servant à alimenter la machine du terrorisme. 

« Derrière chaque chiffre présenté dans le rapport il y a une histoire, un visage et un nom », a-t-il fait remarquer, avant de citer les cas de Nasima, une jeune Iraquienne kidnappée par Daech qui a tenté de se suicider après sa libération, et de Sadiya, qui a eu un bébé issu d’un viol par un membre de Boko Haram. 

Il a aussi parlé de Jean, violé par des membres d’un gang dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), qui a été ridiculisé par sa communauté et accusé d’homosexualité.  M. Dieng a signalé au passage que 62 pays n’offraient toujours pas de protection aux hommes victimes de viol.

La violence sexuelle est un crime qui transforme les victimes en parias, casse les familles et détruit la structure des communautés, a souligné M. Dieng.  « L’opprobre tue », a-t-il martelé en citant les crimes d’honneur, les suicides ou encore les avortements qui ne sont pas pratiquées en toute sécurité. 

La honte fait partie intégrante de la logique du viol, car cette pratique attaque l’individu mais aussi les relations collectives.  Il a donc jugé nécessaire de réorienter la honte des violences sexuelles: celle-ci ne doit pas peser sur les victimes mais sur les auteurs de ces crimes. 

Le Secrétaire général adjoint a rappelé que le Conseil de sécurité avait rejeté l’idée que le viol était la conséquence inévitable de la guerre.  Il a appelé à remédier à ce problème de toute urgence ainsi que sur le long terme, car c’est non seulement une question des droits de l’homme mais aussi un problème de sécurité.

Il en a appelé à l’autorité morale des dirigeants religieux et traditionnels pour changer les normes sociales et redéfinir les concepts d’honneur et de honte.  La justice, en outre, peut avoir un effet en cascade, car chaque victime qui la saisit peut en convaincre une autre de le faire.  Il a donc souhaité que l’on passe de la culture de l’impunité à celle de la dissuasion.

La justice de réparation est ce que veulent le plus les survivants, a-t-il remarqué, tout en notant qu’ils ne la reçoivent pas souvent.  Il a invité à envoyer un signal fort pour dire qu’aucun dirigeant civil ou militaire ne sera au-dessus de la loi.  Malgré les condamnations historiques prononcées l’an dernier par la Cour internationale de Justice, comme dans l’affaire Bemba, le viol reste un des crimes les moins punis à l’échelle mondiale.  En outre, bien souvent les victimes vivent toujours aux côtés des criminels.  Une justice lente n’est pas une justice digne de ce nom, a-t-il ajouté.

Selon M. Dieng, les récits de crimes de violences sexuelles contre les communautés yézidies montrent que nous sommes peut-être en présence de génocide.  Il a en même temps observé qu’aucun militant de Daech n’avait fait face à un procès pour violences sexuelles. 

Au Soudan du Sud, l’impunité a conduit à la normalisation de comportements extrêmes de violence, dont les violences sexuelles liées au conflit, a-t-il ajouté.  Il a aussi rappelé que certains responsables de viols en réunion commis en RDC continuent à commettre des viols et autres atrocités.  Ainsi, après le viol de 387 civils à Walikale en 2016, aucun auteur n’a été poursuivi en justice et aucun survivant n’a obtenu réparation. 

Il revient aux gouvernements nationaux de protéger les citoyens, a rappelé M. Dieng, avant de recommander une réaction multidimensionnelle et transversale face à la violence sexuelle.  Il a regretté que le manque d’infrastructures et d’expérience des pays affaiblisse cette réaction. 

Il a cependant rappelé que l’Équipe d’experts de l’état de droit et des questions touchant les violences sexuelles commises en période de conflit apporte un appui technique, notamment en RDC, en Guinée et en Côte d’Ivoire.  Il a donné des exemples de ce qui est ainsi réalisé dans ces pays, notamment en Guinée, où 17 militaires de haut rang ont été mis en examen, en septembre 2009, pour des crimes de violences sexuelles utilisées comme outil de répression politique.  Leurs procès vont bientôt commencer.

Enfin, il a invité à repérer de manière plus efficace la traite des personnes, soulignant que la violence sexuelle fait désormais partie de l’économie de l’ombre.  Il faut examiner les causes premières de ces crimes et notamment les liens entre insécurité physique et insécurité économique.  

C’est pourquoi il a plaidé pour que l’appui à la réinsertion économique imprègne tous les efforts de consolidation de la paix et de reconstruction.  Les personnes libérées de l’esclavage sexuel ne devraient jamais subir la stigmatisation mais être reconnues comme des victimes, a-t-il insisté, avant de conclure en appelant à faire preuve de détermination politique et à mobiliser les ressources nécessaires.

Au nom du Groupe de travail des organisations non gouvernementales sur les femmes, la paix, la sécurité, Mme MINA JAF, Fondatrice et Directrice de la « Route des réfugiées », s’est présentée comme féministe née dans un camp de réfugiés après les attaques à l’arme chimique dans le Kurdistan iraquien. 

« Je vous parle, a-t-elle dit, en toute sécurité, alors qu’une femme réfugiée sur cinq a été violée ou victime d’une autre forme de violence sexuelle. »  Mme Jaf s’est attardée sur la nécessité d’un appui sexospécifique aux réfugiés et sur l’importance « capitale » d’autonomiser les femmes et les filles réfugiées.    

L’oratrice a dit avoir fondé son organisation lorsqu’elle a réalisé que les réponses humanitaires étaient largement indifférentes aux questions du genre.  Elle a donné l’exemple d’une femme qui, dans un centre d’enregistrement des réfugiés, voulait porter plainte contre son mari et devant l’insistance du personnel pour qu’elle s’adresse à un homme interprète, elle a préféré tout annuler. 

Mme Jaf a rappelé la peur de la stigmatisation chez ces femmes due à l’absence de confidentialité comme en témoigne le cas d’une fille violée par des combattants de Daech qui avait choisi de se taire et donc de renoncer à toute assistance médicale, avant d’accoucher en Europe où elle avait finalement trouvé refuge. 

Mme Jaf a aussi cité le cas d’une jeune Afghane de 16 ans, victime d’un viol en groupe et qui a toujours refusé de porter plainte par peur de ne pas être protégée.  « Je n’ai que trop vu, a-t-elle déploré, des agences humanitaires mettre en place des programmes standardisés au lieu de les adapter aux préoccupations et aux besoins spécifiques des survivantes. » 

La violence sexuelle est le résultat des échecs systématiques de la communauté internationale à traiter des causes sous-jacentes des conflits, des inégalités entre les sexes et de l’impunité, a estimé Mme Jaf.  Elle a voulu que l’on fasse de l’autonomisation des femmes et des filles le pilier de tous les efforts visant à prévenir la violence sexuelle dans les conflits armés. 

Elle a aussi appelé à appuyer l’« Appel à l’action pour la protection contre la violence sexiste dans les situations d’urgence »; à faire en sorte que le pacte mondial pour les réfugiés qui doit être adopté en 2018, soit suffisamment progressiste pour les femmes et les filles; à veiller à ce que l’aide ne soit pas soumise aux desiderata des donateurs, s’agissant en particulier de l’accès à la santé sexuelle et reproductive dont l’avortement; à privilégier les programmes sexospécifiques, y compris une bonne formation du personnel concerné; et à lutter contre les flux d’armes légères par l’universalisation du Traité sur le commerce des armes. 

M. JOSÉ LUIS CANCELA, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Uruguay, a déclaré que les violences sexuelles en période de conflit faisaient partie intégrante du programme femmes, paix et sécurité.  L’Uruguay, a-t-il précisé, a organisé ce débat, « convaincu que la violence sexuelle représente une des pires agressions à l’encontre de la dignité des êtres humains ». 

Perpétrée par l’État, la violence sexuelle peut même être considérée comme un acte de torture.  Il a constaté avec préoccupation que la violence continuait d’être utilisée de façon systématique comme arme de guerre par des groupes non étatiques.

Dans une situation de conflit, a poursuivi le Vice-Ministre, le recours systématique, organisé et planifié à la violence sexuelle à l’encontre des groupes les plus vulnérables de la société civile est un instrument barbare mis au point par des groupes terroristes comme Daech ou Boko Haram.  Il détruit et déshumanise ses victimes, et ses coûts à long terme sont beaucoup plus importants et complexes que l’on imagine. 

D’après lui, la communauté internationale doit miser sur la prévention et l’alerte rapide.  L’Uruguay appuie les propositions reprises dans le rapport du Secrétaire général pour combattre tout type de violence sexuelle.  Il est nécessaire d’autonomiser les femmes, a-t-il insisté.  Elles doivent avoir accès à l’éducation, au travail et au processus de prise de décisions.  Il faut œuvrer pour une plus grande participation des femmes dans la médiation et la résolution des conflits.

M. Cancela a proposé d’accorder toute l’attention nécessaire à la réinsertion des victimes qui ont besoin d’une aide médicale, notamment génésique, et psychosociale.  Il a évoqué le viol, la transmission du sida, la castration.  Les enfants nés du viol sont des victimes invisibles qui se voient privées du droit à un nom; bien souvent considérés comme des « enfants de l’ennemi », ils font face à une vie de rejet et d’exclusion, a-t-il déploré.

Il faut dénoncer ces crimes car la reddition des comptes est essentielle pour que l’impunité ne prévale pas et pour rétablir la dignité des victimes, a ajouté le Vice-Ministre.  Les États doivent redoubler d’efforts pour traduire les coupables en justice. 

À cet égard, a-t-il estimé, la Cour pénale internationale (CPI) joue un rôle crucial.  Il revient au Conseil de sécurité de faire en sorte que ces crimes soient renvoyés à la CPI et de faire inscrire sur les listes des comités des sanctions les noms des coupables. 

Enfin, a-t-il conclu, les opérations de maintien de la paix doivent disposer de tous les moyens nécessaires pour remplir leur mandat en ce qui concerne la protection des civils.

« De tous les maux qui surviennent dans le cadre d’un conflit, la violence sexuelle est sans doute celui qui laisse le plus de traces », a affirmé M. PETER HULTQVIST, Ministre de la défense de la Suède, ajoutant que, outre les blessures physiques qu’endurent les victimes, ces dernières doivent vivre avec un traumatisme moral pour le restant de leurs jours. 

Constatant que l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre n’avait fait qu’augmenter au cours des derniers mois, au même titre que la traite des êtres humains et l’exploitation des personnes vulnérables, le Ministre suédois a appelé le Conseil de sécurité à prendre des mesures concrètes pour mettre fin à ce phénomène, à commencer par l’adoption d’une approche basée sur les droits de l’homme et sur les besoins des victimes, y compris dans le domaine sanitaire.

En second lieu, le ministre a invité le Conseil à faire de la violence sexuelle en situation de conflit une priorité dans le cadre du suivi de la mise en œuvre des mandats du Conseil, notamment en améliorant la collecte de données statistiques et des témoignages. 

M. Hultqvist a, de plus, appelé le Conseil à employer tous les moyens à sa disposition, y compris la formulation de sanctions, pour lutter contre les violences sexuelles. 

S’agissant du personnel déployé au sein des opérations de maintien de la paix, le Ministre a estimé que davantage de femmes devaient être déployées sur le terrain, y compris à des postes de direction.  Il a aussi appelé à intégrer une perspective de genre aux efforts de lutte contre le terrorisme, comme le préconise la résolution 2242 (2015) du Conseil. 

« Il est essentiel de briser la loi du silence concernant la violence sexuelle en situation de conflit: la rendre visible, et non plus honteuse [pour les victimes] », a enfin déclaré le Ministre.

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a rappelé que la résolution du Conseil de sécurité sur les crimes sexuels commis dans les conflits armés reflète une réalité.  Il faut que cela incite le Conseil de sécurité à agir, a-t-elle dit en lui demandant de se concentrer sur trois aspects du problème.  Tout d’abord, elle a demandé au Conseil de sécurité de souligner et de condamner l’impact qu’ont les violences sexuelles sur la paix et la sécurité. 

Elle a pris l’exemple du Soudan où le viol est utilisé comme outil de nettoyage ethnique ou comme taxe imposée sur les femmes fuyant le pays.  C’est une tactique de guerre qui est pratiquée aux yeux de tous, a-t-elle remarqué en citant des cas où des enfants sont les témoins du viol de leur mère. 

Au Soudan du Sud, a-t-elle ajouté, « l’épidémie du viol et des violences sexuelles exacerbe la menace à la paix et la sécurité internationales ».

En deuxième lieu, elle a souhaité que le Conseil de sécurité, pour faire face aux violences sexuelles, tienne pour responsables les auteurs de ces crimes.  L’absence de justice peut aboutir à détruire les institutions, a-t-elle observé, en dénonçant les cas où les agents de police eux-mêmes sont les auteurs de tels crimes.  Quant aux victimes, elles n’ont pas facilement accès aux services médicaux et sociaux pour reconstruire leurs vies, a-t-elle aussi regretté.

Enfin, la représentante a lancé un appel au Conseil de sécurité pour qu’il encourage les responsables des communautés et les dirigeants des pays à œuvrer en faveur de l’autonomisation des femmes.  Celles-ci doivent être des chefs de file et contribuer à la paix, a-t-elle exigé avant d’assurer que les États-Unis continueront à lutter contre ces crimes.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a rappelé que, de « l’adoption fondatrice » de la résolution 1325 (2000), il y a 17 ans, à celle de « textes essentiels » comme les résolutions 1820 (2008) et 1960 (2010), le Conseil avait placé au centre de ses préoccupations le rôle des femmes dans les processus de gestion et de sortie de crise. 

Au-delà du programme femmes, paix et sécurité, a-t-il poursuivi, la question des violences sexuelles dans les conflits occupe une place croissante dans les travaux du Conseil.  Malgré les efforts de ce dernier, le représentant a constaté que les femmes demeuraient les principales victimes de violences sexuelles à grande échelle, « qui revêtent souvent un caractère systématique », notamment celles perpétrées par des groupes terroristes tels que Daech, en Syrie et en Iraq, ou Boko Haram, en Afrique de l’Ouest.

Au-delà même des groupes terroristes, a déploré le délégué français, les violences sexuelles sont utilisées à grande échelle comme une arme de guerre par des forces ou des groupes armés au Soudan du Sud et dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).  « Face à ces actes odieux, l’indignation ne suffit pas: il faut réagir », a-t-il déclaré, appelant à lutter contre l’impunité en traduisant en justice les auteurs et responsables de ces violences. 

M. Delattre a également estimé que les régimes de sanctions du Conseil devraient mieux cibler les individus et groupes responsables des violences sexuelles, notamment lorsqu’elles sont utilisées par des groupes terroristes à des fin de financement ou comme moyen de recrutement.

Outre la lutte contre l’impunité, le délégué a appelé à intégrer pleinement les risques de violences sexuelles dans les mécanismes de prévention des crises, dans la mesure où ces violences sont souvent un signe de détérioration de la situation politique et sécuritaire dans une zone ou un pays.  Il a aussi appelé à mieux soutenir les autorités nationales en leur fournissant la capacité de poursuivre les auteurs et de réaliser un suivi médical et social des victimes.

L’exemplarité des opérations de maintien de la paix, a-t-il ajouté, doit être de rigueur.  Aussi, M. Delattre a réaffirmé son soutien envers la politique de tolérance zéro du Secrétaire général en matière d’exploitation et d’abus sexuels par le personnel onusien déployé sur le terrain. 

Le représentant a enfin invité les États Membres à inscrire la lutte contre les violences sexuelles dans une approche plus globale des questions d’égalité entre les femmes et les hommes lors des conflits.

M. YURIY VITRENKO (Ukraine) a jugé impératif que la communauté internationale redouble d’efforts pour combattre les violences sexuelles en période de conflit.  Rappelant que son pays avait toujours défendu la question de la prévention au Conseil des droits de l’homme, il a appuyé l’approche du Secrétaire général sur la prévention de toutes les formes de violence sexuelle et sexiste dans le cadre général de la prévention des conflits.

Il a également souligné l’importance de traduire en justice les coupables.  Dans des situations où la justice fonctionne mal, les victimes de traumatismes sexuels risquent en plus d’être rejetées par leurs familles et leurs communautés, et d’avoir un accès limité aux services de santé.

Le représentant a noté que ces crimes qui stigmatisent les victimes sont souvent passés sous silence.  D’après l’ONU, un viol sur deux n’est pas déclaré. Il est donc impératif d’appuyer la réintégration des victimes et d’accorder une attention particulière aux enfants nés de viols.  Il faut aussi assister les hommes et les garçons victimes de violences sexuelles.

Malheureusement, a-t-il poursuivi, l’Ukraine a connu une augmentation des cas de violence sexuelle du fait de l’agression russe.  D’après le rapport thématique du Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’homme sur les violences sexuelles liées au conflit dans son pays, elles sont utilisées pour forcer des personnes en détention dans les territoires contrôlés par des groupes armés appuyés par la Russie à abandonner leurs biens.

À ce sujet, a-t-il assuré, l’Ukraine est prête à renforcer sa coopération avec les organisations internationales et l’ONU, et elle a invité une délégation d’ONU-Femmes le mois prochain. 

En particulier, le représentant a condamné un cas de harcèlement sexuel vis-à-vis d’une femme membre d’une patrouille de la Mission spéciale de surveillance de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) dans la région de Donetsk et demandé une réaction sans équivoque et rapide.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a souhaité que le Conseil de sécurité mette en œuvre les recommandations contenues dans le rapport du Secrétaire général, notamment en ce qui concerne le déploiement de conseillers pour la protection des femmes.  Il s’est aussi adressé aux États Membres en leur demandant de respecter le droit humanitaire pour ce qui est notamment de la protection des civils.

Il a souligné la nécessité de renforcer les capacités des missions de maintien de la paix en augmentant par exemple le nombre de femmes dans leurs effectifs.  Il faut également faire participer les femmes aux efforts de prévention et de consolidation de la paix.  

Le représentant a ensuite demandé de faire appliquer les lois en rendant la justice, ce qui implique un renforcement des capacités en matière de sécurité et de poursuites judiciaires.  Il ne faut pas oublier de se pencher sur ce qui se passe dans les familles, car certaines situations sont reproduites dans les conflits, a-t-il dit.

Par ailleurs, le représentant a salué l’engagement de l’Union européenne (UE) dans la lutte contre l’impunité, par la poursuite en justice des auteurs de tels crimes.  Il a aussi souligné l’utilité de se coordonner avec l’UE et l’Union africaine (UA) dans ce domaine. 

Enfin il a réitéré sa condamnation des violences sexuelles commises par des membres des opérations de maintien de la paix, en appuyant la politique de tolérance zéro et la création d’une équipe spéciale de haut niveau.

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a commencé par rappeler l’importance de la résolution sur la traite des personnes dans les zones de conflit armé adoptée l’année dernière.  « Il est crucial que les rapports du Secrétaire général sur les violences sexuelles en période de conflit respectent les limites et la nature du mandat qui leur a été confié », a-t-il toutefois souligné.

Depuis 2009, l’Égypte a inclus des femmes dans les missions de paix internationales au Soudan ou au Sahara occidental, a-t-il expliqué.  Le centre de formation du Caire a préparé 3 620 personnes, tous grades militaires et civils confondus, à aborder la question à l’ordre du jour. 

L’Égypte est engagée vis-à-vis de la politique de tolérance zéro du Secrétaire général pour mettre un terme à toutes les formes de violence contre les femmes dans les opérations de maintien de la paix.  Il a également salué les efforts déployés par l’Équipe d’experts de l’état de droit et des questions touchant les violences sexuelles commises en période de conflit.   

En outre, il a proposé de renforcer les capacités des responsables religieux et des autorités pour combattre la stigmatisation des victimes, et refuser de légitimer le viol d’un point de vue religieux comme le font les groupes terroristes.  

M. WU HAITAO (Chine) a noté les menaces croissantes que subissent les femmes et les enfants en période de conflit.  Comme remède à ce problème, il a recommandé tout d’abord de faire davantage pour prévenir les conflits et, lorsqu’ils surviennent, de les régler de manière pacifique en incluant les femmes dans le processus de paix.  Il a aussi plaidé en faveur du renforcement de capacités des pays concernés par les conflits et les violences sexuelles, en demandant à la communauté internationale d’apporter l’aide nécessaire.

Les efforts doivent aussi porter sur la lutte antiterroriste, a-t-il ajouté, suggérant de s’attaquer en particulier à ceux qui financent l’idéologie terroriste et à ceux qui la propagent en utilisant l’Internet.  Il faut renforcer le contrôle aux frontières, a-t-il également proposé.  Le représentant a ensuite demandé de renforcer les synergies entre les institutions de l’ONU. 

La Chine, a-t-il assuré, continuera à œuvrer en faveur de l’instauration d’un environnement pacifique mondial, pour contribuer à l’élimination de la violence sexuelle.

Fort de l’impact psychologique que les violences sexuelles font peser sur les victimes, mais aussi des conséquences néfastes qu’elles induisent sur la sécurité, M. ABDOULAYE BARRO (Sénégal) a affirmé que la lutte contre les violences sexuelles devait impérativement passer par la prévention des conflits, la protection des victimes, l’aide aux survivantes et la reddition des comptes pour les auteurs.

Saluant les efforts du Conseil sur cette question, le représentant a insisté pour que la prévention de la violence sexuelle devienne l’un des éléments prioritaires de la prévention des conflits, en commençant par l’application des dispositions juridiques et autres textes internationaux existants, ainsi que par l’inclusion de mécanismes de prévention de ce crime dans les accords de paix et de cessez-le-feu. 

Par ailleurs, le représentant a insisté sur la nécessité de renforcer la protection des civils et le soutien à apporter aux victimes de violences sexuelles.  Il s’est ainsi félicité de l’octroi de plus en plus fréquent de mandats de protection des civils aux missions de maintien de la paix de l’ONU. 

Afin d’apporter un soutien psychologique aux victimes, ainsi qu’un accès rapide et sans entrave à des soins de santé de qualité, le délégué sénégalais a appelé à mettre en place un cadre stratégique visant à donner la priorité aux droits et à la dignité des victimes, à mettre fin à l’impunité et à prendre des mesures de détection, de contrôle et de prévention des actes d’exploitation et d’atteintes sexuelles.

Le délégué a enfin appelé à tenir systématiquement les auteurs de violences sexuelles pour responsables et à garantir aux victimes l’accès à la justice, notamment en luttant contre les stigmatisations et la marginalisation des survivantes.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a vu dans les exemples de violences sexuelles cités aujourd’hui « les illustrations tragiques d’un système patriarcal de contrôle sur le corps des femmes qui persiste ».  Il a recommandé de se concentrer sur cinq piliers pour lutter contre ce fléau: la prévention, et le droit à la vérité, à la justice, à la réparation et au fait que cela ne se répète pas.

Le représentant a jugé indispensable de renforcer les mécanismes existants qui protègent les femmes et les jeunes filles dans toutes les circonstances.  Selon lui, il ne faut pas ignorer le lien entre les violences sexuelles en période de conflit et le terrorisme, la traite et le crime organisé.  Il faut prévoir des instruments qui permettent la facilitation du dialogue entre les parties belligérantes.  « Si l’on veut arriver à une paix pérenne, les responsables ne doivent pas jouir de l’impunité, à aucun moment, ni à aucun niveau », a-t-il ajouté. 

En conclusion, il a préconisé le respect du droit international et condamné les actes unilatéraux qui sont des facteurs susceptibles de générer des conflits.

M. EVGENY T. ZAGAYNOV (Fédération de Russie) s’est élevé contre les tentatives d’établir une corrélation artificielle entre les violences sexuelles et le maintien de la paix et de la sécurité internationales et la prévention des conflits.  Il n’y a pas de preuve que les violences sexuelles constituent la cause de conflits armés, a-t-il affirmé, estimant que ces violences sont plutôt une conséquence des conflits. 

Il a appelé à renforcer les capacités nationales des pays pour que ceux-ci soient mieux à même de lutter contre les violences sexuelles et de juger les auteurs.  Il a aussi prôné un dialogue avec les chefs traditionnels et religieux pour lutter contre la stigmatisation et pour favoriser la réintégration des victimes dans la société.  Il faut, a-t-il ajouté, détruire l’économie de l’ombre de Daech qui tire profit de l’esclavage sexuel.

Le représentant russe a ensuite soulevé des questions de terminologie par rapport au thème du débat.  Pour lui, il ne s’agit pas d’une discussion académique mais d’un changement de concept qui peut avoir des conséquences importantes.  Il y a vu, en effet, une tentative d’élargir le champ de compétence du Conseil de sécurité pour y inclure les violences sexuelles, en particulier lorsqu’elles sont liées aux conflits. 

Il a demandé de distinguer clairement les violences sexuelles qui constituent des crimes de guerre, d’une part, et les activités semblables qui ne sont pas liées à un conflit, d’autre part.

De plus, il a relevé que la note de cadrage de la séance d’aujourd’hui et le rapport du Secrétaire général présentent des cas de violences sexuelles du fait de Boko Haram et autres, en parlant de « groupes extrémistes violents ».  Il a rappelé qu’il fallait appeler les « terroristes » par leur nom, à défaut de quoi on pourrait minimiser l’ampleur du problème.  Il ne faut pas créer d’ambiguïtés, a-t-il insisté.

Notant aussi que les violences sexuelles sont déjà examinées dans le cadre des droits de l’homme, il a craint qu’il y ait des doublons dans le travail des Nations Unies.  Il a cité l’exemple récent des travaux du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur les violences sexuelles commises dans le conflit en Ukraine en critiquant une certaine « conceptualisation » des problèmes. 

Il existe de nombreuses données sur des cas de passage à tabac avec utilisation d’électricité, notamment contre des femmes que l’on prive de la liberté, a-t-il dit à cet égard. 

Le Conseil de sécurité travaille mieux quand il est bien informé par la société civile, a fait valoir M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni), en remerciant Mme Mina Jaf pour son témoignage ce matin.  « Nous devons faire en sorte que mettre un terme aux violences sexuelles en période de conflit fasse partie de nos politiques », a-t-il insisté.

« Il faut moins de femmes dans les cuisines, et plus de femmes aux tables de négociations », a-t-il plaidé.  Il est indispensable de parler de ces crimes afin que les survivantes reçoivent les soins nécessaires.  Pour sa part, le Royaume-Uni mène une campagne pour lutter contre les préjugés et la stigmatisation qui entourent les victimes, et en coopération avec la société civile et l’ONU, il a élaboré des principes pour une action globale qui seront lancés à l’Assemblée générale en septembre prochain.

« Il faut avoir une vision plus large », a poursuivi le représentant.  Il faut reconnaître que les terroristes sont capables de mener ces actes terribles quand la paix s’écroule et le Conseil de sécurité ne parvient à honorer le mandat qui est le sien d’après la Charte des Nations Unies. 

Il ne suffit pas d’aborder une fois par an la question des violences sexuelles en période de conflit armé.  La question doit être soulevée au Conseil à chaque fois que cela est pertinent.  « Tant que les femmes ne seront pas traitées de la même façon que les hommes, nous aurons échoué », a-t-il conclu.

M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a estimé que la violence sexuelle et fondée sur le sexe n’est pas inévitable.  La prévention commence en temps de paix avec un cadre juridique fort et des institutions solides.  Mais, la prévention ne peut qu’échouer quand les crimes sont commis sans conséquence.  Dans ce contexte, le représentant a insisté sur l’importance de la Cour pénale internationale (CPI) et a demandé au Conseil, face aux exactions de Daech, d’élargir les critères de ses comités des sanctions comme cela a été fait avec succès avec la résolution 2339 (2017) sur la République centrafricaine. 

Aucune amnistie ne saurait être appliquée aux crimes liés à la violence sexuelle, a prévenu le représentant.  Il a jugé essentiel d’apporter une aide au renforcement des capacités nationales et donné l’exemple du « Centre d’excellence pour la stabilité des unités de police » qui, à Vicence, dispense une formation et des cours spécialisés aux soldats de la paix sur la prévention et les enquêtes liées à la violence sexuelle et fondée sur le sexe.

Le représentant a ensuite insisté sur l’assistance aux victimes car si la violence sexuelle ne tue pas, la stigmatisation, elle, tue.  C’est la raison pour laquelle, a-t-il souligné, la violence sexuelle contre les hommes et les garçons tue.  Il a attiré l’attention sur la loi relative à la protection des mineurs étrangers non accompagnés que son pays a adoptée en avril dernier.

M. BARLYBAY SADYKOV (Kazakhstan) s’est inquiété de l’augmentation des cas de violences sexuelles et du fait qu’elles sont devenues une tactique de guerre.  Il a appelé tous les réseaux de lutte contre la violence sexuelle à se coordonner avec les structures régionales et les organisations internationales, comme INTERPOL et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), ainsi qu’avec les parlementaires, les dirigeants religieux et les organisations non gouvernementales.

Le représentant a rappelé que les États ont la responsabilité première de répondre à la violence sexuelle.  Il a félicité l’équipe d’experts des Nations Unies pour l’aide technique qu’elle apporte aux États Membres à cet égard.  Il a plaidé pour que l’on parvienne à une reddition des comptes pour tous les cas de violences sexuelles et pour que celles-ci soient un critère pour la liste des sanctions du Conseil de sécurité. 

Il a, en outre, appuyé une politique de tolérance zéro en soulignant le caractère prioritaire du mandat de protection des missions de maintien de la paix.  Le Kazakhstan envoie des observateurs militaires compétents dans ce domaine, a-t-il indiqué.

M. HIROSHI MINAMI (Japon) a estimé que les violences sexuelles perpétrées en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme pouvaient représenter des crimes contre l’humanité et qu’il fallait donc les combattre « systématiquement et stratégiquement ».  

Le Conseil de sécurité étant l’organe approprié pour débattre et agir sur cette question liée au maintien de la paix et de la sécurité, il faut le tenir régulièrement informé des violences sexuelles dans le contexte de situations spécifiques de pays et de domaines de travail thématiques.

Le Japon, a rappelé le représentant, a toujours appuyé la politique de tolérance zéro du Secrétaire général pour éliminer l’exploitation sexuelle au sein du système des Nations Unies et sur le terrain.  Il a encouragé la formation et la présence accrue de conseillères au sein des missions de maintien de la paix de l’ONU.  Le représentant a souligné l’importance de la coopération judiciaire internationale pour la mise en œuvre de la résolution 2331 (2016) du Conseil sur la traite des êtres humains. 

Ensuite, M. Minami a considéré que les victimes de violences sexuelles devaient être traitées comme des victimes de terrorisme et recevoir une assistance officielle.  Cette année, le Japon a appuyé un projet pour des réfugiés syriens en Jordanie, dans le cadre de l’action de l’ONU contre les violences sexuelles en période de conflit. 

En outre, il a été un partenaire actif de la Cour pénale internationale (CPI) en contribuant aux Fonds d’affectation spéciale pour les victimes de violences sexuelles et sexiste en République démocratique du Congo (RDC) et en Ouganda.  Le Japon soutient également le travail des experts attachés à la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question.

M. SANABRIA (Espagne) a appelé la communauté internationale et le Conseil de sécurité à agir de concert pour lutter contre les violences sexuelles en situation de conflit, notamment en déployant des spécialistes de la question dans le cadre des opérations de maintien de la paix. 

Le délégué a également jugé urgent d’améliorer l’application des résolutions du Conseil sur la violence sexuelle lors des conflits, ainsi que la mise en œuvre des mécanismes d’alerte précoce.  Il s’agit là, a-t-il dit, d’un « investissement capital » pour lutter contre les violences sexuelles.

Le délégué a en outre exhorté les États Membres à lutter plus efficacement contre l’impunité, tout en tenant compte du sort des victimes.  Il convient également, a-t-il poursuivi, de parvenir à une participation équitable des femmes au sein des opérations de maintien de la paix, et ce, à tous les niveaux de personnel déployé. 

Il a ainsi appelé à lutter contre les obstacles structurels à une plus grande implication des femmes dans l’architecture de la paix, et ce, étant donné le rôle que les femmes sont amenées à jouer pour lutter contre l’exploitation et les abus sexuels perpétrés par le personnel déployé dans le cadre des opérations de maintien de la paix.

M. SOLA ENIKAOLAIYE, Secrétaire permanent au Ministère des affaires étrangères du Nigéria, a salué les efforts des Nations Unies visant à améliorer la coordination interinstitutions, le partage des connaissances et le plaidoyer pour combattre les violences sexuelles commises en période de conflit.  Pour arriver à des résultats durables, a-t-il toutefois insisté, il faut donner la priorité à la création d’un environnement propice et à la lutte contre les causes profondes des conflits, comme la pauvreté, la faim, les violations des droits de l’homme, la corruption, le manque d’inclusion et l’impunité.   

Si les coupables doivent être traduits en justice, les capacités institutionnelles des États doivent être renforcées, a fait valoir M. Enikaolaiye.  Des solutions politiques et économiques aux conflits sont également essentielles.  Au Nigéria, les activités terroristes de Boko Haram ont conduit au déplacement d’environ deux millions de personnes.

Son pays, a-t-il assuré, a toujours agi de manière concertée afin que les auteurs de violences sexuelles répondent de leurs crimes, et ses efforts s’inscrivent dans le contexte d’avancées très importantes de la part de l’armée pour faire reculer Boko Haram.

En outre, a continué le représentant, le Nigéria a toujours été à l’avant-garde de l’application de la résolution sur les femmes, la paix et la sécurité.  Son gouvernement a pris des mesures pour renforcer leur participation directe et active dans la consolidation de la paix.  Il a également pris des mesures pour accroître la sécurité des femmes et des filles dans les camps de personnes déplacées et pour « dé-radicaliser » des terroristes, à travers des conseils psychologiques, et en enrôlant des leaders religieux pour aller à l’encontre des discours extrémistes.

Le Gouvernement nigérian travaille avec les communautés affectées, a précisé M. Enikaolaiye.  Après la libération récente de 82 des écolières enlevées à Chibok, il a redoublé d’efforts pour assurer la libération de celles qui sont encore aux mains de Boko Haram.  

Ces jeunes filles doivent pouvoir retrouver leur estime de soi, rentrer dans leur famille et retourner à l’école, a reconnu le représentant.  Des professionnels de santé ont été déployés dans le nord-est du Nigéria pour offrir une thérapie aux victimes.  

En outre, le Nigéria s’est engagé à signer les Engagements de Paris en vue de protéger les enfants contre une utilisation ou un recrutement illégaux par des groupes ou des forces armés, a-t-il annoncé.  D’autres réponses de nature sociale et juridique sont prévues par le Gouvernement fédéral, y compris le procès de 203 terroristes de Boko Haram actuellement en détention.  

Mme NATHALIE VÉRONIQUE CHUARD (Suisse) a souligné l’importance de la résolution 2331 du Conseil de sécurité sur la traite des êtres humains, un thème selon elle étroitement lié à celui des violences sexuelles dans les conflits armés.  La déléguée suisse a en effet affirmé que les conditions d’émergence de la traite favorisaient également les crimes de violence sexuelle. 

Il a notamment été démontré, a-t-elle poursuivi, que les déplacements forcés et la migration aggravaient les risques d’exploitation sexuelle.  La violence sexuelle est également un facteur d’insécurité sur les routes migratoires, a-t-elle ajouté, tout en espérant que le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières offrirait l’opportunité de trouver des solutions à ces problèmes.

Par ailleurs, la déléguée a salué la recommandation du Secrétaire général d’inclure la violence sexuelle parmi les critères utilisés par le Conseil dans le cadre des régimes de sanctions.  « C’est logique dans la mesure où la violence sexuelle fait partie de l’économie de guerre », a-t-elle déclaré.

La représentante a enfin estimé que les femmes et les filles devaient avoir accès à des soins de santé sexuelle et reproductive de qualité en situation de conflit.  Ces soins, a-t-elle dit, sont d’autant plus importants qu’ils contribuent à la réintégration des victimes dans leur communauté.

La violence sexuelle et sexiste n’est pas inévitable, a estimé Mme VALENTINE RUGWABIZA (Rwanda).  Il appartient aux États de mettre en place un cadre normatif et juridique et des mesures propres à garantir la tolérance zéro en temps de guerre et de paix. 

Alors que les situations de conflit empirent dans beaucoup d’endroits et que les femmes et les enfants restent la cible de violences sexuelles, il faut que toutes les opérations de maintien de la paix de l’ONU disposent d’un mandat robuste pour protéger les citoyens, conformément aux Principes de Kigali, a-t-elle ajouté.  

Pour sa part, a expliqué la représentante, le Rwanda a mis au point un programme de formation pour ses troupes militaires et de police qui inclut des leçons sur l’exploitation et les abus sexuels.  Elle a appelé tous les États à accroître le nombre de conseillères au sein des opérations de maintien de la paix en général.  

M. FRANCISCO TENYA HASEGAWA (Pérou) a estimé que l’utilisation de la violence sexuelle comme une arme de guerre contre les populations civiles était de nature à « exacerber » et « prolonger de manière significative » les situations de conflit. 

Étant donné que ces violences sexuelles sont perpétrées par des groupes terroristes, le représentant a estimé que les stratégies de résolution des conflits et la lutte contre le terrorisme devaient nécessairement s’accompagner d’efforts pour protéger et autonomiser les femmes et les filles, ainsi que pour lutter contre les violences sexuelles.

La stigmatisation des victimes ne doit pas non plus être ignorée, a-t-il poursuivi, tout en appelant également à lutter contre les intimidations à l’encontre de leurs familles et des témoins.  Le délégué a également appelé à améliorer la crédibilité des institutions nationales chargées d’administrer la justice, une question d’autant plus cruciale que les forces à l’origine des violences sexuelles sont parfois les mêmes qui sont censées protéger les victimes et rendre la justice en leur nom.

Le représentant a par ailleurs salué la tendance actuelle à incorporer de manière systématique une perspective de genre dans les mandats des opérations de maintien de la paix, ainsi qu’à inclure davantage les femmes dans la prévention et la résolution des conflits. 

À cette fin, le délégué a indiqué que le Pérou avait augmenté le nombre de femmes péruviennes déployées dans les six opérations de maintien de la paix auxquelles son pays participe, au point qu’elles représentent désormais 15% du personnel du pays sur le terrain.

Mme KATHRIN NESCHER-STÜETZEL (Liechtenstein) a insisté sur la « responsabilité », clef des efforts conjoints pour éradiquer la violence sexuelle dans les conflits.  Là où la Cour pénale internationale (CPI) ne peut, a-t-elle dit, « nous devons envisager d’autres options ».  Dans le cas de la Syrie, elle a estimé que le nouveau mécanisme international pour appuyer la poursuite des crimes les plus graves offre la seule voie prometteuse vers l’établissement des responsabilités pour les crimes commis, la justice et une paix durable. 

Elle a appelé tous les États à continuer de soutenir ce mécanisme.  La représentante s’est, une nouvelle fois, félicitée de la résolution 2331 (2016) du Conseil de sécurité sur la traite des êtres humains dans les conflits.  Cette résolution est particulièrement importante pour le Liechtenstein en ce qu’elle identifie le lien entre traite, violence sexuelle, conflit armé, terrorisme et criminalité transnationale organisée. 

La résolution montre que l’éradication de la traite et de l’esclavage moderne exige une approche véritablement globale et interdisciplinaire et l’implication d’une diversité de parties prenantes.  Le Liechtenstein, l’Université des Nations Unies et le Royaume-Uni, avaient d’ailleurs publié une série de « 10 idées » dont certaines ont été reprises dans la résolution 2331. 

En mars dernier, le Liechtenstein a organisé, toujours avec l’Université des Nations Unies, un atelier qui a réuni les acteurs du secteur des finances, des États Membres et des représentants de la société civile dont le résultat devrait être présenté au Forum politique de haut niveau en juillet et à la Semaine de haut niveau en septembre. 

La représentante n’a pas manqué de rappeler qu’à ce jour plus de la moitié des États Membres de l’ONU ont signé le Code de conduite du Groupe « Accountability, Coherence and Transparency (ACT) » sur l’exercice du droit de veto au Conseil de sécurité, promettant ainsi d’appuyer toute action visant à prévenir et à mettre fin aux trois crimes les plus graves qui incluent la violence sexuelle. 

M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) a affirmé que les femmes étaient une ressource clef pour promouvoir la paix et la stabilité.  La résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité met l’accent sur l’impact spécifique des conflits armés sur les femmes, le rôle positif qu’elles peuvent jouer dans la prévention des conflits et le renforcement de la paix et de la sécurité aux niveaux local, régional et international.

Malheureusement, la crise actuelle, en particulier au Moyen-Orient, a pris des formes odieuses et constitue des défis sans précédent pour la stabilité dans la région, a-t-il dit, constatant que les femmes sont parmi les principales victimes du fléau de l’extrémisme violent et du terrorisme.

L’Iran, a dit son représentant, condamne fermement les actes barbares des groupes extrémistes terroristes et violents tels que Daech et ses ramifications, comme Boko Haram, ainsi que les attaques aveugles contre des civils, y compris des femmes et des enfants.

Par ailleurs, pour le délégué iranien, les sanctions comme forme de punition collective violent de manière flagrante et aveugle les droits de l’homme fondamentaux de tous les citoyens en particulier les femmes et les autres personnes dans des situations vulnérables.  Les violations systématiques des droits de l’homme légitimes du peuple palestinien, y compris les femmes palestiniennes, sous l’occupation brutale du régime israélien et le blocus illégal de la bande de Gaza constituent aussi, selon lui, une privation massive de civils palestiniens et de femmes de leurs droits.

Mme MARA MARINAKI, de l’Union européenne, a exprimé la détermination de l’Union européenne (UE) à rester « le chef de file mondial » de la lutte contre la violence sexuelle et fondée sur le sexe.  « Nous sommes déterminés à faire de la mise en œuvre le centre de gravité de tous nos efforts », a assuré la représentante. 

« La redevabilité commençant à la maison », l’UE a lancé cette année une série de mesures dont les discussions sur son accession à la Convention d’Istanbul du Conseil de l’Europe.  Après être revenue sur les mesures européennes contre la traite des êtres humains dans les conflits et pour la politique de tolérance zéro face aux cas d’exploitation et d’abus sexuels commis par le personnel de maintien de la paix de l’ONU, la représentation des femmes à la prévention, la gestion et le règlement des crises, et la justice transitionnelle, la représentante s’est attardée sur les cadres européens de lutte contre la violence sexuelle.

Outre la mise en œuvre de la politique sur les femmes, la paix et la sécurité, l’UE poursuit la mise en œuvre du Guide des actions pratiques contre la violence sexuelle dans les conflits armés.  Elle veille ainsi à ce que toute son assistance humanitaire s’adapte systématiquement aux besoins des femmes et des hommes de tout âge. 

L’année dernière, l’UE a fermement appuyé la « Campagne orange » des Nations Unies et les 16 jours d’activisme contre la violence fondée sur le sexe.  La représentante a aussi parlé du « Madad », le plus grand fonds d’affectation spéciale européen pour les réfugiés syriens, assurant l’accès de quelque 700 000 réfugiés à la protection contre la violence sexuelle fondée sur le sexe. 

En Somalie, l’UE finance le Comité de secours international qui fournit des services de santé dans huit cliniques et un hôpital.  En République démocratique du Congo, l’UE finance depuis une décennie l’hôpital Panzi, spécialisé en gynécologie réparatrice. 

En Côte d’Ivoire, l’Union européenne finance un projet sur la prévention et les soins pour 300 victimes et sur la protection de 6 000 filles.  L’UE a débloqué une somme de 3,5 millions d’euros pour des projets de justice transitionnelle au Kosovo, en Colombie et aux Philippines. 

En 2016, plus de 18 millions d’euros de son enveloppe humanitaire sont allées à 84 différents projets pour près de 3,4 millions de bénéficiaires.  En 2017, l’UE entend fournir une aide aux victimes qui se trouvent dans les régions les plus reculées et les plus fragiles, tout en continuant d’assurer le bien-être des réfugiés sur son territoire. 

De manière générale, a conclu la représentante, l’UE estime qu’il faut veiller à ce que les nouvelles initiatives apportent véritablement de la valeur ajoutée pour éviter toute fragmentation dans l’agenda « femmes, paix et sécurité ». 

Malgré l’adoption d’une série de résolutions importantes depuis 2008, a fait remarquer Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) les progrès ont été inégaux et variés, comme le montre le dernier rapport du Secrétaire général sur la question qui dit que « les femmes et les filles continuent de servir de monnaie d’échange dans l’économie politique de la guerre ». 

Dans le voisinage du Pakistan également, le viol et l’abus sexuel sont utilisés comme tactique pour soumettre ou supprimer des populations entières, a-t-elle constaté.

D’après la représentante, combattre l’impunité est prioritaire. Il faut rediriger le stigmatisme associé à ces crimes vers leurs auteurs et renforcer les systèmes nationaux de justice pénale.  Ensuite, a-t-elle dit, il faut appuyer les victimes de violence sexuelle.  Les survivantes ont besoin d’accéder à des soins de santé, à des services sociaux et juridiques.  Elles doivent pouvoir réintégrer la société.  

Évoquant le sort des femmes et des filles migrantes, elle a appuyé la recommandation du Secrétaire général de considérer la violence sexuelle liée aux conflits comme fondement d’une procédure d’asile.

Mme Lodhi a noté que les missions multidimensionnelles de maintien de la paix jouent un rôle clef pour combattre la violence contre les femmes dans les situations de conflit et d’après conflit.  Pour le Pakistan, grand pays contributeur de troupes, la sensibilisation à la problématique hommes-femmes a toujours fait partie de la formation des soldats de la paix.

M. CARLOS SERGIO SOBRAL DUARTE (Brésil) a affirmé que l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre et de terrorisme est odieuse et totalement inacceptable.  Ces crimes détruisent le tissu social des communautés et infligent des traumatismes psychologiques durables.  Le Brésil a condamné à plusieurs reprises toutes les formes de violence contre toutes les femmes et les filles, y compris la violence sexuelle en conflit.

C’est au cours de la présidence brésilienne du Comité des sanctions de la République démocratique du Congo (RDC), en 2011, que la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles en période de conflit, Mme Margot Wallström, a été invitée à informer le Comité sur les violences sexuelles dans ce pays.

Cela a finalement conduit le Conseil de sécurité à imposer pour la première fois des sanctions pour les actes de violence sexuelle en période de conflit, en collaboration avec le Gouvernement de la RDC, en plaçant définitivement cette question à l’ordre du jour.

Pour le représentant brésilien, la responsabilisation est un élément de dissuasion puissant, ainsi qu’un devoir moral envers ceux qui souffrent.  Le manque de capacités et d’expertise nationales adéquates pour enquêter et poursuivre les actes de violence sexuelle demeure l’un des principaux obstacles à la responsabilisation non seulement concernant la violence sexuelle, mais aussi les crimes connexes.  Cette situation entraîne souvent une impunité généralisée et a eu un impact sur l’accès à la justice et sur la sécurité des survivants.

La communauté internationale devrait encourager et aider les États à exercer pleinement leurs responsabilités.  La promotion de l’universalité du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) est également essentielle pour que ces crimes ne soient pas impunis.

Au nom du Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité, M. MICHAEL DOUGLAS GRANT (Canada) s’est dit scandalisé par la propagation généralisée de la violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme.  Il a dit que cette violence sexuelle en période de conflit constituait une violation flagrante du droit international humanitaire et des droits de l’homme. 

« De plus, la violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme est devenue une cause et une conséquence de déplacements forcés », a-t-il noté.  Il a souhaité que ces actes odieux cessent, que leurs auteurs soient traduits en justice et que leurs victimes reçoivent une aide pour panser les plaies tant physiques que psychologiques. 

Il a estimé que la lutte contre la violence sexuelle en période de conflit devait être considérée comme un moyen de prévenir les conflits.  Il a jugé que des enquêtes efficaces sont fondamentales pour faire justice.  Il a salué plusieurs mécanismes en place dont le protocole international sur la communication, la recherche et les enquêtes sur la violence sexuelle en période de conflit, ainsi que le rôle du groupe d’experts de l’ONU sur l’état de droit et la violence sexuelle en période de conflit.

« Nous recommandons des mécanismes de responsabilité », a insisté le représentant avant de suggérer que les responsables de contingents de Casques bleus et la société civile se réunissent plus souvent sur le terrain des opérations de maintien de la paix pour s’attaquer à cette question.  Il a aussi appelé à faire face à la stigmatisation des victimes des violences sexuelles en souhaitant que les responsables des communautés, dont les chefs religieux, unissent leurs efforts pour lutter contre cette stigmatisation.

Au nom de son pays, le représentant du Canada a dit que les pays ne pouvaient se contenter de dénoncer les violences sexuelles en période de conflit sans prendre des actions contre leurs auteurs.  Il a précisé que le Canada s’est engagé à accueillir 1 200 survivants de Daech, notamment des femmes et des enfants, sur son sol en 2017.  

Mme KATALIN ANNAMÁRIA BOGYAY (Hongrie) s’est inquiétée de l’utilisation croissante de la violence sexuelle comme arme de guerre et comme tactique terroriste.  Les conséquences de tels crimes sont dramatiques pour les survivants et fragilisent les communautés touchées, a-t-elle regretté, soulignant que les victimes souffrent régulièrement de stigmatisation et d’exclusion sociale.  À ses yeux, les violences sexuelles contribuent ainsi à la « destruction du lien social » dans les communautés.

Pour juger les coupables, la représentante a appelé les États concernés à lutter contre l’impunité et à mener systématiquement des enquêtes.  Elle a également appelé à fournir « une assistance ciblée » aux victimes, notamment afin de contribuer à leur réinsertion dans leur communauté.  Il faut aussi lutter contre la stigmatisation, a ajouté la déléguée, notamment en travaillant avec les leaders politiques et religieux locaux. 

La représentante a enfin appelé à renforcer la formation du personnel de l’ONU, notamment celui déployé dans le cadre d’opérations de maintien de la paix, aux problématiques de genre et de violence sexuelle, ainsi qu’à améliorer la représentation des femmes déployées sur le terrain à tous les niveaux de responsabilité.

M. SVEN JÜRGENSON  (Estonie) a souligné que chaque pays peut faire la différence dans la lutte contre la violence sexuelle et fondée sur le sexe.  L’Estonie appuie la Représentante spéciale du Secrétaire général et fait des contributions régulières au Fonds d’affectation spéciale de la Cour pénale internationale (CPI) pour les victimes. 

Elle appuie aussi l’Équipe d’experts de l’état de droit et des questions touchant les violences sexuelles commises en période de conflit.  Au niveau national, le pays a fait des progrès importants: les victimes de la traite et les mineurs étrangers non accompagnés et victimes d’abus sexuels ont désormais le droit de recevoir une aide psychologique. 

Pour l’Estonie, la lutte contre la violence sexuelle dans les conflits armés fait partie intégrante du programme plus large femmes, paix et sécurité.  Elle a donc intégré la question de la traite et de la violence sexuelle dans les formations dispensées aux soldats de la paix. 

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a dénoncé toute forme de violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme en notant que ces souffrances sans précédents subies par les femmes doivent inciter à l’action.

« Nous n’avons pas besoin de preuve pour savoir que les femmes et les filles sont ciblées dans le cadre de conflit », a-t-il insisté.  Il a estimé que ces crimes sont de la responsabilité des États parce que ceux-ci ont la première responsabilité de protéger les victimes de ces violences sexuelles en période de conflit.

L’observateur du Saint-Siège a jugé nécessaires des efforts de réconciliation et de reconstruction.  Il a mis en garde contre la culture de destruction qui se propage dans le monde avant d’exhorter le Conseil de sécurité à adopter les mesures nécessaires pour y mettre fin.  

Préoccupé par l’augmentation des violences sexuelles dans les conflits, notamment sous la forme d’esclavage sexuel, de prostitution forcée et de grossesse forcée, M. CRISTIÁN BARROS MELET (Chili) a dénoncé l’utilisation de ces crimes comme une arme de guerre par des groupes terroristes, notamment dans le but de « soumettre et démoraliser les populations », mais aussi comme source de financement. 

Le représentant a par conséquent appelé à appuyer et protéger les journalistes qui tentent de sensibiliser l’opinion publique à ces crimes en les dénonçant, souvent au péril de leur vie.  Le délégué a également salué le déploiement de conseillers spécialisés dans la protection des femmes au sein des opérations de maintien de la paix.

De manière générale, le délégué chilien a appelé la communauté internationale à tout faire pour lutter contre l’impunité pour ces crimes, afin que la justice puisse apporter une forme de réparation morale et matérielle aux victimes.  Il a également estimé nécessaire d’investir dans des programmes de prévention, notamment en éduquant aussi bien les forces armées que les Casques bleus sur ces questions. 

À cette fin, le délégué a déclaré que son pays incluait désormais une perspective de genre et de lutte contre les violences sexuelles à la formation de son personnel déployé dans le cadre de missions de maintien de la paix de l’ONU.

M. MICHAEL O’TOOLE (Irlande) a souligné le lien entre la violence sexuelle et la traite des êtres humains.  En temps de conflit, a dit la délégation, les mécanismes de prévention et de protection pertinents sont presque complètement érodés, permettant ainsi aux activités des groupes terroristes et des réseaux criminels de prospérer.  

La résolution 2331 (2016) du Conseil de sécurité de l’ONU est l’instrument juridique le plus solide pour souligner la relation entre la violence sexuelle et le trafic en situation de conflit, a—t-elle ajouté, se disant impatiente de la voir, grâce aux efforts déployés par l’ONU et ses États Membres, mise en œuvre, en complémentarité avec le programme femmes, paix et sécurité.

De même, la délégation a insisté sur la nécessité de placer les besoins et les perspectives des victimes au cœur des efforts à réaliser, l’accent devant également être placé sur la prévention.

M. JORGE SKINNER-KLÉE (Guatemala) a condamné les actes de barbarie que constituent les violences sexuelles, en particulier lorsqu’elles sont utilisées comme arme de guerre dans les conflits.  Pour lutter contre ce phénomène, il a estimé qu’une importance particulière devait être accordée aux dispositifs d’alerte précoce.  Il a également approuvé la recommandation du Secrétaire général d’inclure ces crimes dans les critères donnant lieu à l’imposition de sanctions par le Conseil de sécurité.

Le représentant a par ailleurs appelé à inclure davantage les femmes dans les activités de prévention des conflits, ainsi que de consolidation et de promotion de la paix.  Les femmes, a-t-il poursuivi, doivent aussi être mieux représentées au sein des opérations de maintien de la paix des Nations Unies.

Tout en approuvant la politique de tolérance zéro du Secrétaire général dans les cas d’exploitation et d’abus sexuels commis par le personnel de l’ONU déployé sur le terrain, le représentant a appelé les États concernés par des conflits à transposer les dispositions du Statut de Rome liées à la violence sexuelle dans leur législation nationale, et ce, afin de disposer d’un cadre exhaustif de lutte contre l’impunité en matière de crimes sexuels.

M. BOGUSLAW WINID (Pologne) a salué l’inclusion de la question des violences sexuelles dans les mandats des opérations de maintien de la paix, ainsi que le déploiement de conseillers pour la problématique hommes-femmes dans le cadre de ces opérations.  Il s’est également félicité de l’amélioration de la qualité des données disponibles concernant les crimes sexuels, une évolution qui a selon lui permis de traduire en justice de nombreux auteurs de ces crimes, y compris en Colombie, en République démocratique du Congo (RDC), en Iraq et en Ouganda.  

Ces efforts ont aussi contribué à sensibiliser davantage l’opinion publique internationale vis-à-vis de ces crimes, a-t-il dit, ainsi qu’à faire reconnaître le viol comme un crime dans des pays où ce n’était toujours pas le cas.

Cependant, a regretté le délégué, la violence sexuelle est toujours utilisée comme une arme de guerre et comme une « technique systématique de terrorisme et de torture ».  Dans certains pays, il existe un « consentement silencieux à la violence sexuelle », a de plus affirmé le représentant, notamment en raison de la stigmatisation des victimes, de la peur des représailles ou de la faiblesse des institutions juridiques.  Le représentant a par conséquent estimé qu’il fallait venir en aide aux victimes de toute urgence, notamment en leur donnant accès à des soins médicaux et psychologiques adaptés.

Par ailleurs, le représentant s’est inquiété face à la montée de l’extrémisme violent et des migrations de masse, susceptibles selon lui d’engendrer une hausse du trafic des personnes à des fins d’exploitation et de violence sexuelles.  Ce danger, a-t-il ajouté, touche de manière disproportionnée les femmes et enfants migrants, les déplacés et les minorités ethniques et religieuses.

Pour lutter contre ces tendances, le délégué a appelé à sensibiliser encore davantage l’opinion publique sur la question et à investir davantage dans la formation des médecins, des forces armées, de la police et des juges pour traiter de ces problématiques, aussi bien au niveau national que des missions de l’ONU.

M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a rappelé que la guerre de libération de son pays en 1971 avait fait 200 000 victimes de violences sexuelles.  Il a expliqué qu’il avait fallu quatre décennies pour rendre justice à ces victimes qui avaient dû faire preuve de beaucoup de courage pour se faire connaître. 

Au niveau international il a salué l’importance de la résolution 2331 (2016) du Conseil de sécurité qui a mis en exergue les liens entre la traite des êtres humains et le terrorisme.  Il s’est inquiété d’une nouvelle tendance qui consiste au recrutement forcé des femmes par les groupes terroristes, notamment pour s’en servir comme boucliers humains.  

Le représentant du Bangladesh a jugé déterminant de promouvoir l’autonomisation des femmes comme moyen de mettre le terrorisme en échec.  Il a dit qu’il était essentiel de mettre fin à l’impunité par le biais d’enquêtes impartiales.  « Il ne faut plus que les victimes souffrent de stigmatisation, mais bien les coupables », a insisté le représentant avant d’appeler aussi à mieux protéger les migrantes contre la violence sexuelle dans les pays d’accueil.  

Mme MARÍA EMMA MEJÍA VÉLEZ (Colombie) a souligné les progrès accomplis dans son pays, mentionnés par le rapport du Secrétaire général, pour fournir un soutien aux survivants de violences sexuelles.  Elle a rappelé que le processus de négociations de paix en Colombie avait inclus un grand nombre de femmes, que son pays avait créé une sous-commission du genre et que la Mission politique spéciale chargée de la mise en œuvre comptait 20% de femmes dans les effectifs d’observateurs militaires et civils.

La représentante a aussi assuré que les mécanismes de l’Accord de paix accordent une attention particulière aux droits des victimes, notamment dans les cas de violences sexuelles.  La Commission vérité et juridiction spéciale pour la paix, par exemple, a décidé que les crimes de violences sexuelles commis dans le cadre d’un conflit ne seraient pas amnistiables.

En outre, la juridiction spéciale pour la paix créée le mois dernier comprend une unité chargée des enquêtes, avec une équipe spéciale pour les cas de violences sexuelles.

Mme Mejía Vélez a assuré que le processus de réconciliation en Colombie prévoyait le rétablissement des droits des victimes et la création de conditions de vie dignes dans les campagnes. 

Enfin, elle a rendu hommage aux organisations de la société civile, en particulier celles de femmes, qui contribuent à la mise en œuvre des mécanismes d’alerte précoce et de prévention de la violence sexuelle.

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a appelé à prévenir et à punir fermement, dans le respect de l’état de droit, les crimes liés à l’utilisation de la violence sexuelle par des groupes armés non étatiques, des groupes terroristes, des extrémistes violents, mais aussi par certains acteurs étatiques, à des fins de recrutement, de financement et d’intimidation de groupes spécifiques. 

Diverses juridictions internationales ont qualifié ces crimes d’actes de torture, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de crimes de génocide, a poursuivi le représentant, appelant le Conseil à utiliser les outils à sa disposition pour y mettre fin, en particulier les régimes de sanctions et le déferrement des cas à la Cour pénale internationale (CPI).

Le représentant a estimé que l’un des éléments clefs pour prévenir les violences sexuelles dans les conflits consistait à s’attaquer aux facteurs de risque et aux conditions susceptibles de favoriser la vulnérabilité de certains groupes face à la violence sexuelle. 

Pour ces raisons, le délégué a insisté sur l’importance des politiques de prévention de la violence de genre et de lutte contre les discriminations à l’encontre des femmes.  Il a également appelé à renforcer la capacité des États à traduire les coupables en justice, notamment en améliorant les enquêtes, l’échange d’informations, la collecte des données, l’extradition des coupables et l’assistance aux victimes. 

Ces différents éléments, a estimé le représentant argentin, doivent être pris en compte dans la définition des mandats des opérations de maintien de la paix, notamment via le déploiement de conseillers pour la problématique hommes-femmes sur le terrain.

M. GEIR O. PEDERSEN (Norvège) a jugé « intolérable » l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre.  Il a appelé à inclure systématiquement cette problématique dans la négociation des accords de paix et des mandats des opérations de maintien de la paix. 

Soulignant en outre les conséquences dévastatrices de la violence sexuelle sur les victimes et les communautés affectées, le représentant a appelé à faire de la prévention de ces crimes une priorité absolue, notamment dans le cadre des opérations de maintien de la paix.

« La riposte de la communauté internationale doit être ferme et globale », a-t-il par ailleurs déclaré, appelant à traduire systématiquement les coupables en justice.  Tout en soulignant le rôle de la Cour pénale internationale (CPI) pour y parvenir, le représentant a estimé que cet organe ne pouvait cependant se substituer aux États concernés, qui ont la responsabilité de juger les auteurs et de protéger les victimes.    

Les Casques bleus femmes jouent également un rôle essentiel, a-t-il estimé, appelant à augmenter encore davantage leur nombre au sein des opérations de maintien de la paix.  « Une équipe diverse est une équipe plus efficace », a-t-il insisté, ajoutant que la Norvège développait actuellement un manuel destiné à sensibiliser le personnel déployé dans des missions de l’ONU aux questions de genre. 

Sur ce plan, le représentant a réaffirmé le soutien de son pays à la politique de tolérance zéro du Secrétaire général envers l’exploitation et les abus sexuels commis par le personnel de l’ONU.

Mme LAURA ELENA FLORES HERRERA (Panama) a dit que la violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme était plus présente que jamais, notamment en raison du développement de l’extrémisme violent.  Elle a rappelé l’importance de la résolution 2242 (2015) du Conseil de sécurité qui souligne le rôle des femmes dans la prévention des conflits. 

Elle a dit la nécessité de stratégies efficaces et de l’intégration de la parité entre les sexes à tous les objectifs.  « Nous devons améliorer les actions de prévention, réduire la durée des enquêtes et éliminer tous les comportements inacceptables ».  Elle a salué l’importance des activités du Bureau de la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.

Elle a dit la nécessité de combattre ce nouveau fléau que constitue le recrutement forcé des femmes par les groupes terroristes.  

M. GÜVEN BEGEÇ (Turquie) a salué l’accent mis par le Secrétaire général sur la prévention de la violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme.  « L’utilisation de la violence sexuelle en période de conflit, dont la vente et l’échange de filles comme tactique terroriste par Daech en Iraq et en Syrie exige une action inclusive, globale, urgente et appropriée de la part de la communauté internationale », a estimé le représentant. 

Le représentant turc a dit que le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) commettait aussi des crimes de violence sexuelle même à l’encontre de ses propres recrues.  Avec trois millions de réfugiés syriens en Turquie, le représentant turc a jugé que l’autonomisation de ces réfugiés, particulièrement des femmes et des filles, était essentielle pour préserver leur sécurité.

Mme NIDA JAKUBONĖ (Lituanie) a condamné les tactiques de terrorisme des acteurs non étatiques qui utilisent la violence sexuelle à des fins stratégiques.  Pour lutter contre ce phénomène, elle a salué la mise en place de mécanismes d’alerte précoce, tout en soulignant l’importance de l’autonomisation des femmes en général et leur participation aux processus politiques.

Constatant que les pays touchés par les conflits n’avaient souvent pas les capacités nécessaires pour réaliser les enquêtes, protéger les victimes et traduire les coupables en justice, la représentante a estimé que la coopération internationale avec ces États pouvait être un outil efficace de lutte contre l’impunité. 

Elle a également estimé que la violence sexuelle devait être un des critères donnant lieu à la prise de sanctions par le Conseil de sécurité, organe qu’elle a en outre appelé à condamner « de manière plus ferme et plus systématique » les cas de violence sexuelle dans le monde.

S’agissant de la prévention, la déléguée a estimé que le déploiement de conseillers pour la problématique hommes-femmes dans le cadre des opérations de maintien de la paix était une mesure importante, au même titre que la prise en charge des survivants. 

La représentante a enfin estimé que l’accès à la justice était le premier critère permettant de lutter contre la stigmatisation et la marginalisation des victimes.

M. MIGUEL RUIZ-CABAÑAS, Vice-Ministre des affaires multilatérales et des droits de l’homme du Mexique, a affirmé que les enlèvements et échanges de filles et les avortements forcés étaient des formes de violence sexuelle en période de conflit.  Il a jugé fondamentale la résolution 1820 (2008) du Conseil de sécurité dans le sens où elle a permis de passer du silence à la reconnaissance de ce grave phénomène de la violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme, en soulignant la nécessité d’une sensibilisation de la communauté internationale et l’urgence d’une action au niveau mondial.

Il a salué l’importance des résolutions 2242 (2015) et 2331 (2016) qui ont reconnu l’existence de groupes terroristes qui recourent à la violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme.  Le Ministre mexicain a appelé à promouvoir le rôle des femmes dans l’élaboration de stratégies de lutte contre la violence sexuelle en période de conflit et de processus de paix. 

Il a aussi appelé les États Membres à refonder les cadres normatifs nationaux pour faire en sorte que les victimes de violence sexuelle soient reconnues comme victimes de guerre et puissent obtenir des réparations. 

M. MAGDI AHMED MOFADAL ELNOUR (Soudan) a condamné l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre et a appelé la communauté internationale à lutter contre ce phénomène, notamment en s’attaquant à la traite des femmes et des filles, un crime qui touche notamment le Soudan, en tant que pays de transit.  Le représentant a par ailleurs indiqué que son pays avait signé des accords avec plusieurs pays voisins pour lutter contre les groupes qui violent les droits de l’homme en se livrant au trafic d’êtres humains.

Le délégué a en outre indiqué que le Soudan avait amendé l’an dernier son Code pénal pour condamner « fermement et ouvertement » le crime de viol.  Ce code, a-t-il poursuivi, contient également le crime de harcèlement sexuel.

S’agissant de la situation au Darfour, le délégué a souhaité apporter des précisions concernant les informations présentées dans le paragraphe 64 du rapport d’aujourd’hui, qui ne reflète pas, selon lui, la réalité actuelle dans la zone et contredit la résolution 2340 (2017) adoptée en février dernier. 

Le Darfour a récemment connu une amélioration de ses conditions politiques et sécuritaires, a estimé le délégué, ajoutant que les précédents rapports du Secrétaire général avaient fait mention de cette amélioration.

S’agissant des chiffres contenus dans le rapport sur la violence sexuelle et sexiste au Soudan (112 cas enregistrés, 13 sentences rendues par des tribunaux, dont 2 peines de mort), le délégué a estimé que la grande majorité de ces affaires concernait des problèmes sociaux sans liens avec des violences sexuelles liées au conflit. 

Le délégué a de plus précisé que les forces armées soudanaises respectaient « à la lettre » les droits de l’homme et agissaient de façon « extrêmement professionnelle » pour arrêter les auteurs de crimes de violence sexuelle. 

Le délégué a enfin réaffirmé l’engagement du Soudan à lutter pour préserver le droit des femmes et les protéger des violences sexuelles.  Il a appelé à ce que les informations concernant son pays soient utilisées de façon plus précise dans les futurs rapports de l’ONU sur la question. 

M. JUAN CARLOS MENDOZA-GARCÍA (Costa Rica) s’est inquiété de l’augmentation de la violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme, pour intimider et contrôler des communautés entières.  Il a estimé que les Nations Unies ont échoué à s’attaquer aux causes de ces violences et à éliminer l’impunité.  Face à ce constat, il a exhorté les États Membres à instaurer au niveau national les bases solides de protection des femmes et des filles, mais aussi des populations vulnérables dans leur ensemble, dont les minorités et les populations rurales. 

« Nous devons nous assurer que tous les pays sanctionnent tous les actes de violence sexuelle en période de conflit et reconnaissent qu’il s’agit là de crimes contre l’humanité », a insisté le représentant du Costa Rica.  Il a dit l’utilité de programmes disposant de financements appropriés pour prévenir cette violence mais aussi aider les victimes.  Il faut des programmes d’assistance pour faciliter la réinsertion des victimes.  

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a appelé à adopter une « démarche globale » dans le soutien apporté aux victimes des violences sexuelles, notamment en leur donnant accès à des soins médicaux et psychologiques, ainsi qu’en leur fournissant une protection légale et des opportunités de travail pour participer à la vie économique.

Le représentant a en outre appelé à modifier la façon dont les femmes étaient perçues dans la société pour prévenir la violence sexuelle, y compris en faisant la promotion de la non-discrimination envers les femmes. 

Pour redoubler d’efforts dans la lutte contre l’impunité, le délégué allemand a appelé à inscrire les auteurs dans les listes de sanctions du Conseil de sécurité, mais aussi à favoriser le transfert des enquêtes sur ces crimes aux tribunaux internationaux. 

Dans le cas particulier de la Syrie, il s’est prononcé en faveur de la création d’un mécanisme international, impartial et indépendant pour aider à enquêter et à poursuivre les responsables des crimes les plus graves en droit international, y compris les crimes de violence sexuelle.

Enfin, le représentant a appelé à accélérer la mise en œuvre du programme de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité, notamment via des initiatives régionales.

M. TANMAYA LAL (Inde) a jugé déterminant de mieux associer les femmes à la prévention et à la résolution des conflits.  Il a salué le rôle de la Commission de la condition de la femme pour encourager l’autonomisation des femmes comme moyen de garantir des sociétés plus prospères et plus stables. 

Il a rappelé la responsabilité particulière de son pays, en notant que l’Inde avait fourni des Casques bleus à 50 des 71 opérations de maintien de la paix de l’ONU et à 13 des 16 missions existant actuellement.  Il a dit que l’Inde avait apporté une contribution historique en matière de promotion des femmes dans les opérations de maintien de la paix en déployant, en 2007 au Libéria, la première unité de police constituée uniquement de femmes. 

« Nous avons aussi pris des initiatives novatrices en étant parmi les premiers à dispenser des cours de sensibilisation aux violences sexuelles aux Casques bleus », a-t-il ajouté.  Il a aussi précisé que l’Inde avait été un des premiers pays à contribuer au Fonds d’affection du Secrétaire général pour les victimes d’exploitation sexuelle.

Il n’y a pas d’autres solutions, a prévenu M. TÉTE ANTÓNIO, Observateur permanent de l’Union africaine, que de traiter rapidement de la nature changeante des conflits maintenant que des acteurs transnationaux modifient constamment leur modus operandi.  L’Union africaine (UA) développe un modèle résilient de prévention, continue de prouver son attachement aux résolutions 1325 (2000) et 1612 (2005) du Conseil de sécurité et campe sur sa position de « tolérance zéro » face à la violence sexuelle dans les conflits armés, a affirmé le représentant. 

L’UA, a-t-il insisté, a fait de la protection de la femme et de l’enfant une priorité continentale comme en témoigne la nomination en 2014 d’une envoyée spéciale, Mme Bineta Diop, et l’intégration des programmes « femmes, paix et sécurité » et « enfants dans les conflits armés » dans la Feuille de route 2016-2020 de l’Architecture africaine de paix et de sécurité.  Cette feuille de route doit être vue comme une contribution importante à l’intégration des questions du genre dans le programme de la paix et de la sécurité de l’Union africaine. 

En partenariat avec ONU-Femmes et l’Allemagne, l’Union africaine organise du 31 mai au 2 juin 2017 à New York, un Forum de haut niveau des femmes leaders pour la transformation de l’Afrique.  À cette occasion, sera lancé le Réseau des femmes leaders africaines, une nouvelle initiative visant à consolider le leadership des femmes dans la gouvernance, la paix et la sécurité pour la transformation de l’Afrique. 

Selon M. JIŘÍ ELLINGER (République tchèque), toutes les parties prenantes doivent adopter une position d’autant plus ferme sur la question que nous vivons à une époque où les groupes extrémistes armés font de la subordination des femmes une priorité.  L’autonomisation des femmes et des filles et le maintien d’une politique de tolérance zéro contre toutes les formes de violence sexuelle sont la seule façon de répondre aux inégalités et aux violations des droits des femmes.

Le droit tchèque pénalise la violence contre les femmes, a expliqué le représentant.  Le Gouvernement a déboursé 130 millions de couronnes tchèques dans des projets de coopération internationale qui mettent l’accent sur l’égalité entre les hommes et les femmes, la prévention de la violence contre les femmes et l’assistance aux victimes, en Géorgie, en Serbie, au Kosovo, en Syrie, en République centrafricaine et en Afghanistan.  Le plan d’action du Ministère de la défense sur les femmes, la paix et la sécurité prévoit également des formations pour le personnel civil et militaire.   

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a indiqué que son pays est sur le point d’adopter son troisième plan d’action national sur la résolution 1325 (2000), dans lequel la question de la violence sexuelle tient une place importante.  Pour la Belgique, la « redevabilité » et la lutte contre l’impunité sont « cruciales », a dit le représentant qui a souligné l’importance de la recommandation du Secrétaire général appelant le Conseil de sécurité à inclure la question des violences sexuelles liées aux conflits dans les travaux des comités des sanctions. 

La légitimité « incontestable » des sanctions adoptées dans ce contexte permettra de renforcer considérablement les efforts collectifs dans la lutte contre ce fléau, a estimé le représentant.  Il a aussi estimé, s’agissant de la Syrie, que le mécanisme international, impartial et indépendant a un rôle important à jouer.  Il a également salué le travail des experts de l’initiative d’intervention rapide au service de la justice et l’impact de leur déploiement en Syrie, en République démocratique du Congo (RDC) et au Burundi. 

Il n’a pas oublié de rendre hommage au travail « remarquable » du docteur Denis Mukwege et de son équipe à l’hôpital Panzi que son pays soutient.  Il a réitéré son appel aux autorités congolaises et à la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) pour qu’elles prennent toutes les mesures nécessaires pour protéger le docteur Mukwege, son équipe et ses patients.

M. CHO TAE-YUL (République de Corée) a souligné les fruits qu’a portés le déploiement de conseillers sur la protection des femmes dans les missions de maintien de la paix et les missions politiques.  Il a dénoncé les violences sexuelles commises par les groupes extrémistes et appelé à éliminer ces groupes en priorité, souhaitant n’épargner aucun effort pour éliminer le terrorisme. 

En ce qui concerne la prévention, il a attiré l’attention sur l’importance de l’Initiative mondiale pour l’éducation avant tout.  En tant que Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP), il a assuré que la question de la prévention des violences sexuelles dans les conflits serait traitée dans le cadre des travaux de la Commission sur les femmes et les jeunes.

Le représentant a aussi invité à mettre fin à la culture d’impunité et félicité à cet égard l’Équipe d’experts de l’état de droit et des questions touchant les violences sexuelles commises en période de conflit.  Lorsqu’un pays ne traduit pas en justice les auteurs de crimes de violences sexuelles, la communauté internationale devrait renvoyer les auteurs devant les juridictions internationales, a-t-il aussi recommandé. 

Enfin, il a plaidé pour qu’une aide soit apportée aux victimes dans tous les secteurs, en œuvrant aussi pour éviter la stigmatisation.  Il a recommandé d’aider les pays qui n’ont pas les capacités à avancer dans des domaines comme l’autonomisation des femmes, comme le fait son pays.

M. MOHAMED KHALED KHIARI (Tunisie) a évoqué la stratégie nationale de lutte contre l’extrémisme et le terrorisme adoptée en novembre 2016 par son pays et qui repose sur quatre axes: prévention, protection, suivi et riposte.  Un atelier de réflexion a été organisé le 3 mai à l’initiative du Ministère des affaires religieuses afin de discuter des différentes formes de polarisation de la femme par les groupes terroristes, de l’impératif de sa protection de tout endoctrinement et harcèlement, et de son rôle central dans la prévention et la lutte contre le terrorisme.  

En outre, dans l’esprit des résolutions adoptées par le Conseil de sécurité, la Tunisie a mis en place un plan d’action national pour encourager la formation des femmes au maintien de la paix. 

Enfin, la loi de décembre 2013 sur l’instauration de la justice transitionnelle a créé l’Instance vérité et dignité qui a organisé en mars dernier une audience publique consacrée exclusivement aux femmes, « une première, brisant les tabous ». 

Même si 144 pays ont cosigné en septembre 2013 la Déclaration d’engagement concernant l’élimination de la violence sexuelle en temps de conflit, les crimes restent largement impunis, a regretté Mme BESIANA KADARE (Albanie). 

Le manque de capacités nationales adéquates et d’expertise pour prévenir, enquêter et poursuivre les responsables rend difficile la lutte contre la violence sexuelle.  Il est donc important que l’ONU redouble d’efforts pour renforcer les capacités nationales, a-t-elle fait valoir.

À cet égard, la représentante a salué l’excellent travail accompli par l’Équipe d’experts de l’état de droit et des questions touchant les violences sexuelles commises en période de conflit, et le partenariat réussi entre l’Initiative d’intervention rapide au service de la justice et ONU-Femmes pour mettre fin à l’impunité. 

Lorsque les États échouent à mettre en place des politiques pour protéger leur peuple des violences sexuelles, c’est à la Cour pénale internationale (CPI), dont la compétence est universelle, qu’il revient de garantir la reddition des comptes.  

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a salué le fait que, dans son rapport, le Secrétaire général mette l’accent sur la violence sexuelle comme tactique de guerre et de terrorisme, « une des plus horribles violations des droits de l’homme au monde ».  Face au silence des victimes, les Nations Unies doivent agir, a encouragé le représentant. 

Il a soutenu l’inscription sur des listes des auteurs de ces actes mais aussi l’approche de la tolérance zéro du Secrétaire général et en dernier recours, la Cour pénale internationale (CPI) qui jusqu’ici, a–t-il regretté, n’a poursuivi qu’un seul cas de violence sexuelle depuis sa création. 

Pour leur part, les Pays-Bas veillent à ce que tous leurs policiers et militaires reçoivent, avant leur déploiement, une bonne formation sur les questions de genre, les droits de l’homme et le droit international humanitaire.  Avec l’Espagne, ils dispensent une formation aux personnels des autres États. 

Les Pays-Bas financent aussi une formation spécialisée aux femmes soldats, coorganisée avec ONU-Femmes.  Ils appuient toute initiative visant à augmenter le nombre des femmes soldats de la paix ainsi que le lancement d’une étude mondiale sur la mise en œuvre de la résolution 1235 (2000) du Conseil de sécurité. 

« Ne pensons pas aux femmes et aux filles seulement comme des victimes, car émancipées et participant à la prise de décisions avec un rôle de leadership, elles peuvent vraiment faire la différence.  Faisons preuve de sérieux quand nous parlons des objectifs de développement durable et mettons fin à la violence sexuelle partout et pour toujours », a martelé le représentant.

M. MOUNZER MOUNZER (République arabe syrienne) a appelé à faire preuve d’extrême prudence et d’objectivité dans l’examen de ce phénomène de violence sexuelle en période de conflit comme tactique de guerre et de terrorisme.  Il a estimé que la Commission d’enquête internationale avait fait des conclusions qu’il a qualifiées de politisées au sujet de la situation en Syrie. 

Le représentant syrien s’est dit préoccupé que la Représentante du Secrétaire général se fonde sur ses enquêtes qui manquent, selon lui, de crédibilité et d’humanité.  Il a souhaité que les rapports de l’ONU mettent en exergue les violences subies par les femmes syriennes dans les camps de réfugiés en Jordanie et en Turquie.  Il a fustigé la présentation de rapports dit secrets au Comité 1267 du Conseil de sécurité sur les violences commises par les groupes terroristes contre les femmes syriennes.

Il s’est dit choqué d’entendre des pays qui financent les groupes terroristes actifs en Syrie prétendre vouloir protéger les femmes syriennes.  

Mme CRISTINA MARIA CERQUEIRA PUCARINHO (Portugal) a considéré qu’il restait encore beaucoup à faire depuis l’adoption de la résolution 1325 (2000) sur les femmes, la paix et la sécurité.  Elle a jugé « intolérable » l’utilisation de la violence sexuelle, y compris les viols à grande échelle, comme tactique de guerre.  Elle a reconnu avec le Secrétaire général qu’il fallait faire davantage pour prévenir une telle violence en période de conflit.  En particulier, il faut garantir le droit des victimes à la protection et à la réparation et faire en sorte que les coupables soient punis.

Le Portugal a adopté en 2014 son deuxième plan d’action sur la résolution 1325 (2000).  Celui-ci inclut des programmes de formation sur la parité des sexes, la violence contre les femmes et les filles, et la traite des personnes pour le personnel des forces armées et de sécurité et des institutions judiciaires, au niveau national et dans le cadre de missions internationales. 

Enfin, la représentante a recommandé de travailler en étroite collaboration avec les organisations de la société civile.   

M. FEH MOUSSA GONE (Côte d’Ivoire) s’est félicité, qu’au regard des progrès « formidables » réalisés, le Secrétaire général ait retiré la Côte d’Ivoire de la liste des pays dont les forces de l’ordre et les groupes armés se sont systématiquement livrés à des viols et autres formes de violence sexuelle dans des situations de conflit armé. 

Le représentant a appelé au retrait des acteurs non étatiques qui figurent encore dans le rapport, étant donné que ces groupes n’existent plus depuis six ans.  Il a cité les différentes mesures qui ont contribué aux progrès et indiqué qu’en tant que contributeur de troupes, la Côte d’Ivoire entend poursuivre dans le même élan et continuer de renforcer les capacités de ses forces de défenses et de sécurité en matière de lutte contre la violence sexuelle. 

Le pays est également déterminé à faire aboutir les poursuites judiciaires concernant les cas déjà répertoriés et à soutenir les victimes, notamment à travers les actes menées par le Ministère de la femme, de la protection de l’enfant et de la solidarité. 

Le représentant a conclu en mettant l’accent sur certaines recommandations du Secrétaire général: la nécessité pour les États d’aligner leur législation nationale sur les normes internationales en matière de qualification, de prévention et de répression de la violence sexuelle; l’importance d’intégrer dans les opérations de maintien de la paix la dimension « violence sexuelle »; le renforcement des capacités de contingents dans les domaines liés à cette violence avant tout déploiement; l’enseignement des droits de l’homme, du droit pénal international et du droit international humanitaire dans la formation des forces de sécurité et de défense nationales; et la vulgarisation des notions des droits humains dans l’enseignement général et les cursus professionnels.

M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO (Venezuela) a dénoncé ceux qui financent et promeuvent les groupes non étatiques qui ont pour objectif de déstabiliser des États pour des raisons politiques et économiques.  Cela entraîne l’effondrement des institutions étatiques et instaure un terrain propice à l’impunité et aux violences sexuelles, a-t-il prévenu. 

Il a demandé de mieux respecter le droit international et notamment l’interdiction de fournir des armes et un appui financier aux groupes extrémistes et terroristes.  Plaidant en faveur de la prévention, il a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle adopte des mesures qui permettent de poursuivre en justice ceux qui fournissent une aide financière et militaire à ces groupes.

Le Venezuela réitère son appui à la politique de tolérance zéro pour de tels crimes commis par le personnel militaire, politique ou civil des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales.  Il a recommandé de développer la résilience des pays en situation de conflit en augmentant leurs capacités institutionnelles en matière de justice, de santé et de bien-être social. 

Il a salué le travail accompli par l’Équipe d’experts de l’état de droit et des questions touchant les violences sexuelles commises en période de conflit.  Enfin, il a souhaité une meilleure préparation des personnels déployés sur le terrain et l’envoi d’experts sur les questions de genre.

Mme INA HAGNININGTYAS KRISNAMURTHI (Indonésie) a cité quatre éléments qui, selon elle, devraient être inclus dans la lutte contre la culture de l’impunité: la prévention, la détection rapide, la poursuite et la condamnation des auteurs de violences sexuelles et la justice pour les victimes.  L’Indonésie, a-t-elle annoncé, prend l’engagement d’augmenter le nombre de ses Casques bleus, y compris celui des femmes soldats et des femmes observateurs militaires.  Le Centre indonésien du maintien de la paix dispense désormais une formation sur la question de la violence sexuelle. 

Mais pour l’Indonésie, il est important de ne pas se priver de l’expertise civile.  Il faut élargir les réserves de capacités civiles, s’agissant en particulier de la consolidation de la paix, en cherchant à y impliquer les survivantes.  Ces dernières doivent en effet être encouragées à participer à la formation des soldats de la paix pour mieux les sensibiliser. 

À cette expertise, il faut ajouter celle des pays qui ont une expérience avérée dans la consolidation de la paix ou la transition démocratique.  Ceci dit, a conclu la représentante, notre objectif ultime doit être la prévention des conflits et en coopération avec les organisations régionales, le Conseil de sécurité doit y jouer son rôle. 

Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE (Ghana) a apprécié que l’attention, qui était plutôt focalisée jusqu’à présent sur les normes à adopter, se déplace vers la mise en œuvre des instruments juridiques existants en matière de lutte contre la violence sexuelle dans les conflits.  Si l’on reconnaît que les États Membres ont la responsabilité première de protéger leurs peuples des atrocités de masse, il faut renforcer leurs capacités pour qu’ils puissent poursuivre les auteurs en justice et dédommager les victimes, tout en adoptant les lois nécessaires pour éviter de futurs crimes. 

Notant cependant qu’il faut plus que des lois pour venir à bout de ce problème, la représentante a appelé à changer la culture de discrimination et de violence contre les femmes qui existe dans toute société.

Elle a conseillé notamment de former les agents chargés du maintien de la paix pour les sensibiliser aux violences sexuelles.  Une telle formation devrait être obligatoire pour les membres des contingents militaires et de police, ainsi que du personnel civil, des missions de maintien de la paix.  Dans les cas où ces personnels sont eux-mêmes coupables de tels crimes, elle a demandé qu’ils soient jugés avec sévérité. 

Enfin, Mme Pobee a demandé d’adopter des approches centrées sur les victimes et d’allouer suffisamment de fonds pour financer les programmes médicaux et psychosociaux, ainsi que pour l’éducation sur les droits et la réintégration économique des victimes. 

M. WOUTER HOFMEYR ZAAYMAN (Afrique du Sud) a estimé qu’il fallait utiliser pleinement les outils créés par le Conseil de sécurité pour combattre la violence sexuelle en période de conflit.  Avant tout, a-t-il estimé en appuyant les diverses recommandations du Secrétaire général, il faut augmenter le nombre de Casques bleus féminins dans les opérations de maintien de la paix et y déployer des conseillères en matière de protection.  Il faut également sensibiliser les soldats, lors de leur formation, aux questions relatives à la violence sexuelle et sexiste.  Il faut, a-t-il poursuivi, mieux identifier les indicateurs en matière de traite des personnes dans les zones affectées par un conflit.

Le représentant a encouragé le Conseil de sécurité à travailler avec le Secrétaire général pour mettre au point un protocole visant à inclure la prévention des abus sexuels dans les mandats de maintien de la paix et l’Assemblée générale à prévoir ceci dans le budget des opérations à haut risque.  Il a ensuite repris les idées du Secrétaire général de créer des fonctions d’appui aux victimes au Siège de l’ONU ainsi qu’un recueil consolidé de tous les renseignements fournis.     

M. DAVID YITSHAK ROET (Israël) a trouvé inimaginable qu’en 2017 il soit encore nécessaire de discuter des violences sexuelles en période de conflit.  C’est un fléau qu’il faut éliminer, a-t-il lancé en dénonçant une épidémie de violence sexuelle.  Il a même constaté une tendance à la hausse de cette tactique de guerre qui consiste à créer la peur parmi la population. 

Le représentant a donc demandé de mettre en œuvre les recommandations pratiques figurant dans le rapport du Secrétaire général, adressées au Conseil de sécurité, aux États Membres et aux organisations régionales.

M. Roet a jugé trop faible l’expression « violences sexuelles en période de conflit » par rapport à ce que subissent les victimes.  Dans les territoires contrôlés par Daech, les femmes sont enfermées dans des enclos, puis vendues sur les marchés ou offertes comme trophées aux combattants qui reviennent du front.  Il a affirmé que le régime syrien participe aussi directement à ces atrocités. 

De plus, il a affirmé que la République islamique d’Iran, « un pays qui viole de façon flagrante les droits de l’homme », appuie le Gouvernement syrien, ce qui lui a fait dire que l’Iran devait être considéré comme complice.  Il s’est inquiété également de la peur des représailles et de la stigmatisation des victimes, avant de demander de mettre à la disposition de celles-ci des voies de recours.

M. SHAHARUDDIN ONN (Malaisie) s’est félicité de l’engagement de la communauté internationale en faveur de l’autonomisation des femmes.  La question des violences sexuelles en période de conflit ne peut être examinée de façon isolée, a-t-il dit.  Il a prôné la mise en place de mécanismes pour la réhabilitation des jeunes filles enlevées. 

Il faut profiter de la nouvelle dynamique internationale pour renforcer la participation des femmes à tous les niveaux.  La participation des femmes est également importante dans les processus de paix, comme l’a montré celui qui a été mené en Colombie.

Le représentant a en outre préconisé d’augmenter le nombre de femmes dans les contingents de Casques bleus, arguant que cela peut renforcer la confiance de la population locale.  La Malaisie a d’ailleurs augmenté le nombre de femmes déployées dans les opérations de maintien de la paix auxquelles elle participe, notamment à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL). 

Le représentant a appuyé la politique de tolérance zéro dans ce domaine pour le personnel des Nations Unies sur le terrain.  La résolution 1325 (2000) demandait déjà l’augmentation du nombre de femmes, a-t-il rappelé en soulignant le besoin de parité à tous les niveaux du personnel de l’ONU.

Depuis 2013, la page de l’histoire du féminicide des citoyennes congolaises se referme peu à peu, a affirmé Mme JEANINE MABUNDA LIOKO, Représentante personnelle du Président de la République démocratique du Congo (RDC) en charge de la lutte contre les violences sexuelles et le recrutement d’enfants.  Comment passe-t-on de l’horreur à un début de normalité? 

Le 30 mars 2013, a répondu la Représentante personnelle, le Gouvernement a conçu et déployé un plan d’action de lutte contre les violences sexuelles, mobilisant toutes les énergies, en particulier les Ministères de la justice et de la défense, les organisations de la société civile, et les chefs religieux et coutumiers. 

La majeure partie de ce programme de normalisation a reposé sur la prévention, la lutte contre l’impunité et la réponse socioéconomique.  Les forces armées de la RDC ont elles-mêmes adopté un plan de lutte piloté par la « Commission spécialisée pour la lutte contre les violences sexuelles » qui depuis trois ans déroule des activités de sensibilisation dans les camps militaires, avec l’appui des Nations Unies. 

La Police nationale suit désormais le mouvement de l’armée laquelle a d’ailleurs promu une femme générale pour diriger l’unité d’éducation civique.  « Mon bureau, a ajouté la Représentante personnelle, a lancé en 2014 “Brisez le silence”, une campagne qui a mis en place un numéro vert, très utilisé d’ailleurs par les hommes. » 

Après avoir expliqué les progrès de la justice militaire qui ont donné à la publication du « Bulletin des arrêts de la Haute Cour militaire » et au déploiement d’un haut magistrat de l’auditorat militaire congolais auprès de la Cour spéciale de la République centrafricaine, la Représentante personnelle s’est attardée sur l’aide socioéconomique aux victimes de la violence sexuelle. 

« Avec l’aide du Japon et de plusieurs fondations, mon Bureau, a-t-elle indiqué, a offert une formation à 1 5000 survivantes de la violence sexuelle et enfants sortis des groupes armés. »  Mais, a-t-elle reconnu, la réparation et l’indemnisation des victimes demeurent un défi.  Le Sénat doit encore examiner la loi pertinente et en attendant le Gouvernement et ses partenaires s’efforcent de soutenir les hôpitaux, dont les hôpitaux Panzi, à Bukavu, et Heal Afrique, à Goma.

M. ABDERRAZZAK LAASSEL (Maroc) a constaté que Daech, Boko Haram ou encore les Chabab, et bien d’autres groupes terroristes cités dans le rapport du Secrétaire général, se servent des violences sexuelles comme tactique de guerre, arme de terreur et l’un des pivots des flux financiers servant à alimenter leurs ressources et conforter leur pouvoir.  Il a observé, en outre, que ces violences n’affectaient pas uniquement les victimes, puisqu’elles rongent et gangrènent les communautés et les sociétés dans leur intégralité.

Le Maroc, qui est membre du Groupe des Amis des femmes et de la paix et de la sécurité, présidé par le Canada, et du Groupe d’amis pour la parité des sexes, conduit par la Colombie, souscrit à ses engagements internationaux en matière de lutte contre toutes les formes de violence sexuelle.

Le représentant a appelé à trouver rapidement une réponse innovante face à ce fléau, en suivant une approche inclusive.  Il faut en effet prendre en compte toutes les causes de ce fléau dans toute leur complexité, ainsi que les intérêts et les besoins des personnes concernées. 

L’approche doit prescrire des mesures fermes en matière de reddition des comptes, a-t-il ajouté.  Il a aussi appelé à corriger la stigmatisation qui entoure les victimes et les enfants nés de la violence sexuelle.

M. SOPHEA YAUNG CHAN (Cambodge) a déploré l’augmentation des viols dans les conflits, ainsi que le fait que ces crimes constituent une économie de l’ombre.  Il a demandé à la communauté internationale de porter toute l’attention nécessaire à cette tactique de terrorisme.  Il a aussi recommandé d’utiliser pleinement les instruments juridiques permettant de protéger les victimes potentielles, plaidant pour le renforcement de l’état de droit aux niveaux national et international.

La prévention des conflits est une façon de prévenir ces actes, a-t-il poursuivi en souhaitant que la communauté internationale s’attaque aux causes profondes des conflits.  Le Cambodge est par ailleurs attaché à la lutte contre le terrorisme, notamment en coopérant avec l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et l’ONU.  Le représentant a ensuite rappelé l’attaque contre un convoi de l’ONU en République centrafricaine la semaine dernière, qui a conduit à la mort de quatre Casques bleus cambodgiens. 

Mme ZAHIR (Maldives) a appelé l’Organisation des Nations Unies, en particulier le Conseil de sécurité, à adapter ses efforts de prévention, de protection et de réhabilitation aux menaces de plus en plus asymétriques posées par les groupes non étatiques, extrémistes et terroristes, s’agissant de la violence sexuelle. 

La représentante s’est, une nouvelle fois, félicitée des résolutions 2242 (2015) et 2331 (2016) du Conseil de sécurité et a appuyé la recommandation du Secrétaire général visant à ce que le Conseil utilise tous les moyens nécessaires pour faire en sorte que les parties au conflit respectent le droit international applicable à la violence sexuelle. 

Qualifiant de « pilier » la résolution 1325 (2000), la représentante a aussi fermement appuyé la politique de tolérance zéro du Secrétaire général que son pays a pleinement adoptée, comme en témoignent la loi sur la prévention de la violence domestique et la protection sociale et celle de 2016 sur l’égalité entre les sexes.

M. AMADU KOROMA (Sierra Leone) a rappelé que son pays avait été le théâtre, durant 11 années de guerre civile, de nombreuses atrocités contre les femmes.  Néanmoins, il s’est félicité que depuis la paix intervenue en janvier 2002, la Sierra Leone était sur la voie du progrès économique et social, de la consolidation de la paix et de la bonne gouvernance. 

Il a expliqué que son pays accordait aujourd’hui une priorité à l’état de droit et plus particulièrement au droit des femmes.  Il a salué l’importance de la Cour spéciale de la Sierra Leone pour traduire en justice les auteurs de violences sexuelles.  Au-delà de la justice, le représentant de la Sierra Leone a dit la nécessité d’investir dans le développement des femmes et leur autonomisation. 

Il s’est particulièrement félicité des initiatives de son pays pour développer un cadre juridique visant à mettre fin aux inégalités entre les sexes, promouvoir les droits des femmes et s’attaquer à l’impact négatif des traditions sur la condition de la femme.

Illustrant son propos, il a cité l’adoption des lois « Gender Justice Laws » et « Three gender acts ».  Il a mentionné des lois de 2007 qui découragent les mariages précoces, pénalisent la violence domestique ou interdisent l’expulsion des femmes et des enfants du domicile conjugal après le décès du père de famille.

M. YOUSSOUF ADEN MOUSSA (Djibouti) a salué les efforts entrepris par le Gouvernement nigérian pour la libération de 82 lycéennes de Chibok, après trois années de captivité aux mains de Boko Haram.  Il a espéré que toutes les dispositions seront mises en place pour assurer leur prise en charge aussi longtemps qu’elle s’avèrera nécessaire et pour retrouver les autres lycéennes qui manquent à l’appel. 

Le représentant a mis l’accent sur le sort des enfants exposés à de tels traitements cruels.  « Enfants en danger, enfants dangereux », que de vies brisées à jamais, s’est-il lamenté.  Au vu de leur caractère destructeur, ces violations en temps de guerre méritent des réponses fermes de la part de la communauté internationale.

La priorité doit être donnée aux actions sur le terrain concrètes et axées sur la prévention, la détection et l’alerte précoce.  De plus en plus de conseillers doivent être déployés sur le terrain, en accord avec les pays hôtes.  Il a jugé utile que l’évaluation qualitative et quantitative du nombre de victimes continue, car les chiffres présentés sont toujours « loin de la réalité ». 

Enfin, il a salué les initiatives du Secrétaire général visant à obtenir des améliorations visibles et quantifiables du dispositif pour la prévention et la répression de l’exploitation et des atteintes sexuelles commises par les Casques bleus et personnels des Nations Unies.     

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: le Groupe des 77 s’interroge sur la répartition des tâches entre les deux sites chargés d’appuyer les opérations de maintien de la paix

Soixante et onzième session, Deuxième partie de la reprise de session,
35e séance – matin
AG/AB/4236

Cinquième Commission: le Groupe des 77 s’interroge sur la répartition des tâches entre les deux sites chargés d’appuyer les opérations de maintien de la paix

La Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, a examiné, ce matin, le projet de budget annuel de la Base de soutien logistique des Nations Unies à Brindisi (BSLB).  La Base ayant été fusionnée avec le Centre informatique de Valence, le Groupe des 77 s’est interrogé sur la véritable répartition des tâches.  La Commission s’est aussi penchée sur l’évaluation des « stocks pour déploiement stratégique » menée par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI). 

Pour la Base de soutien logistique de Brindisi, le Secrétaire général propose une enveloppe de 88,3 millions de dollars pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018, soit une hausse de 6,6% par rapport à l’exercice précédent.  Mais le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) recommande à la Cinquième Commission de réduire cette enveloppe de 2,3 millions de dollars et de la ramener à 86 millions.

Créé en 1994 par l’Assemblée générale dans le but de répondre aux besoins logistiques d’un nombre croissant de missions de maintien de la paix, la Base de Brindisi forme désormais avec le Centre informatique et communications des Nations Unies à Valence, le « Centre de services mondial » chargé de fournir aux missions des services dans les domaines de l’information géospatiale, de l’informatique et des télécommunications, de la planification, de l’approvisionnement, du déploiement et de la reconstitution des stocks. 

Prenant acte de cette restructuration, signe des efforts du Secrétariat pour améliorer l’efficacité du soutien logistique aux opérations de maintien de la paix, la représentante du Groupe des 77 et de la Chine a toutefois appelé le Secrétaire général à réaliser une étude complète et détaillée sur les implications de cette double implantation à Brindisi et à Valence. 

Cette étude, a-t-elle ajouté, devra également comporter une ventilation précise de la répartition du personnel entre les deux sites, comme l’a également demandé le CCQAB.  La représentante du Groupe des 77 et de la Chine a par ailleurs exprimé sa préoccupation face aux « inexactitudes et incohérences » relevées par le CCQAB dans la comptabilisation de certaines dépenses de la Base de soutien logistique, une tendance qui entrave, selon elle, la capacité des délégations à évaluer correctement l’exécution du budget et à faire des comparaisons dans le temps.

S’agissant en particulier du Service des technologies géospatiales, de l’informatique et des télécommunications de la Base ainsi que de ses missions clientes, la déléguée du Groupe des 77 et de la Chine a également souhaité obtenir davantage d’informations sur les ressources nécessaires pour ces missions clientes, sur l’état d’avancement des produits et sur la réalisation des mandats par le Service.

Enfin, la représentante du Groupe des 77 et de la Chine a appelé à mieux préciser la répartition des rôles et responsabilités des entités impliquées dans les opérations aériennes, ainsi qu’à utiliser en priorité les ressources internes à l’ONU dans le cadre des travaux de la Base, plutôt qu’à faire appel à des consultants externes en situation de vacance.

La Cinquième Commission s’est également penchée sur l’évaluation des stocks pour déploiement stratégique menée par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI).  Ces stocks ont été créés par l’Assemblée générale en 2002 en tant qu’élément d’une réserve stratégique censée permettre aux opérations de maintien de la paix de se déployer intégralement dans les 30 à 90 jours après l’approbation du mandat par le Conseil de sécurité.  Ils concernent les articles à long délai de production, d’achat et de livraison.

Depuis lors, des stocks ont été constitués à hauteur de 526 millions de dollars et élargi aux missions politiques spéciales et aux opérations de maintien de la paix existantes afin de faire tourner les biens menacés d’obsolescence.  En 2003, 57 855 membres du personnel de l’ONU étaient déployés dans 13 missions de maintien de la paix contre 118 792 dans 16 missions en 2016.  Si l’on tient compte des besoins logistiques à couvrir en appui à des effectifs si importants, on peut dire que le principe des stocks pour déploiement stratégique reste toujours valable.

Mais, prévient le BSCI, sans la mise en œuvre intégrale et effective des autres composantes de la réserve stratégique, les stocks ne sauraient contribuer à atteindre l’objectif primordial de déploiement rapide dans les 90 jours.  Il recommande au Département de l’appui aux missions d’actualiser et de réviser le principe des stocks pour déploiement stratégique, les hypothèses qui ont présidé à son adoption et les politiques connexes, dans le cadre de la gestion de la chaîne d’approvisionnement et des initiatives en cours concernant le démarrage d’une mission, afin de contribuer à assurer un déploiement rapide.  Le concept révisé devrait être soumis sous forme de proposition aux États Membres.

Le Département devrait aussi revoir la composition actuelle afin de veiller à ce que leur niveau et leur volume des stocks soient déterminés en fonction des besoins en phase de démarrage; que leur composition reflète le concept d’organisation en modules; et que les articles ayant des délais d’approvisionnement inférieurs à 90 jours qui ne sont pas des éléments de modules soient exclus et achetés par d’autres arrangements contractuels.

Le Département et celui de la gestion devraient également prendre des mesures pour s’assurer que les contrats-cadres relatifs aux stocks restent valides.  Le Département de l’appui aux missions devrait par ailleurs mettre en œuvre des mesures pour rapprocher, examiner et signaler chaque année la comptabilisation en pertes et la reconstitution des stocks.  Il devrait communiquer aux organes délibérants tous les détails concernant le transfert de stocks d’un montant net de 16,7 millions de dollars aux stocks de réserve de l’ONU et aux stocks de la Base de soutien logistique des Nations Unies.

La Cinquième Commission tiendra sa prochaine réunion vendredi 26 mai, à 15 heures, pour clôturer cette deuxième reprise de la soixante et onzième session.

* A/71/836/Add.10
** A/71/798

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale pourvoit trois postes vacants dans des organes subsidiaires

Soixante et onzième session,
81e séance plénière - matin
AG/11913

L’Assemblée générale pourvoit trois postes vacants dans des organes subsidiaires

L’Assemblée générale a pourvu, ce matin, sur recommandation de sa Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires, trois postes vacants dans certains de ses organes subsidiaires.

Elle a ainsi décidé* de nommer M. Olivier Myard, de la France, membre du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) pour un mandat qui commence le 11 mai 2017 et se terminera le 31 décembre 2019.

L’Assemblée générale a aussi nommé** Mme Zhang Wei, de la République populaire de Chine, membre du Comité des contributions.  Son mandat commencera également aujourd’hui et s’achèvera le 31 décembre 2017. 

Enfin, l’Assemblée générale a décidé*** de nommer M. Vladimir A. Storozhev, de la Fédération de Russie, membre de la Commission de la fonction publique internationale pour un mandat qui commence aussi le 11 mai 2017 et qui expirera le 31 décembre 2020.

La prochaine réunion de l’Assemblée générale sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

* A/71/589/Add.2  

** A/71/590/Add.2

*** A/71/592/Add.1 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: face une pression financière accrue, le nouveau Chef des opérations de maintien de la paix défend une approche « pragmatique » et une vision « progressiste »

Soixante et onzième session, Deuxième partie de la reprise de session,
34e séance – matin
AG/AB/4235

Cinquième Commission: face une pression financière accrue, le nouveau Chef des opérations de maintien de la paix défend une approche « pragmatique » et une vision « progressiste »

La Cinquième Commission,chargée des questions administratives et budgétaires, a pris note, ce matin, de la proposition du Secrétaire général d’augmenter le budget du compte d’appui des opérations de maintien de la paix pour l’exercice 2017-2018, alors que les contributions non acquittées sont à la hausse.  Face à cette pression financière croissante, le nouveau Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean-Pierre Lacroix, a appelé à une approche « pragmatique » et à un consensus autour d’une « vision progressiste ».

Le projet de budget pour le compte d’appui proposé par le Secrétaire général pour 2017/18 s’élève à 339,4 millions de dollars, soit une augmentation de 12 millions par rapport à l’exercice précédent.  Parallèlement, au 30 avril 2017, le montant des contributions non acquittées au budget des opérations de maintien de la paix était d’environ 1,7 milliard de dollars, sur des paiements attendus de 1,2 milliard.

Conscient de « la pression que représentent le climat financier et le paysage de la sécurité internationale actuels », le nouveau Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, qui s’exprimait pour la première fois devant la Cinquième Commission, a appelé à adopter une approche « pragmatique, ciblée et axée sur les résultats » pour la gestion et la réforme de ces opérations et à un consensus entre États Membres autour d’une « vision progressiste » du maintien de la paix.

Nous devons, a-t-il plaidé, « repenser notre approche » et « trouver de nouveaux moyens » de planifier, financer et mener les opérations de maintien de la paix pour les rendre « plus souples », « plus efficaces », « plus réactives » et « plus responsables ».  C’est la raison pour laquelle, a-t-il expliqué, le Département des opérations de maintien de la paix a intensifié ses efforts pour améliorer les processus de planification stratégique et opérationnelle, renforcer les partenariats politiques et opérationnels avec les organisations régionales et sous-régionales et améliorer la performance et l’efficacité. 

Ces efforts seront toutefois vains, a prévenu M. Jean-Pierre Lacroix, si la réputation des Nations Unies continue d’être entachée par les actes « honteux » de quelques-uns.  Il a estimé que la nouvelle stratégie du Secrétaire général pour combattre l’exploitation et les abus sexuels dans l’ensemble du système de l’ONU est l’occasion pour le Secrétariat et les États Membres de travailler en partenariat et de passer le cap une fois pour toutes.

Le Secrétaire général adjoint a enfin espéré que l’Organisation continuera ses efforts pour améliorer l’outil du maintien de la paix, un outil qui a transformé, selon lui, la vie d’un nombre incalculable d’hommes, de femmes et d’enfants, ces 60 dernières années.  Le maintien de la paix étant un partenariat unique entre les États Membres, le Secrétariat de l’ONU, les pays hôtes et les organisations régionales, tous doivent faire leur part pour rendre les opérations plus efficaces et mieux à même d’appuyer la paix. 

La représentante du Groupe des 77 et de la Chine s’est tout de même étonnée d’une proposition de 312,7 millions de dollars pour le compte d’appui aux opérations de maintien de la paix (hors progiciel de gestion intégré, sécurité des systèmes et des données informatiques et dispositif de prestation de services centralisée inclus), soit une augmentation de 3 millions de dollars par rapport à l’an passé. 

C’est d’autant plus surprenant, s’est-t-elle expliquée, que l’Organisation a lancé des initiatives de réforme censées générer des gains d’efficacité et réaliser des économies d’échelle, comme les centres de services partagés, les améliorations apportées à la gestion de la chaîne d’approvisionnement et la mise en service du progiciel de gestion intégré Umoja, à propos duquel elle s’est aussi étonnée d’une demande de 25 millions de dollars supplémentaires, soit une augmentation de 48,8% par rapport à l’exercice précédent. 

Sans nier l’importance de la discipline budgétaire sur laquelle a particulièrement insisté le représentant du Japon, son homologue de l’Inde a souhaité que les décisions ne soient pas uniquement guidées par « le besoin de faire des économies », mais qu’elles tiennent également compte de « l’impérieuse nécessité » d’exécuter les mandats et d’assurer la protection des troupes sur le terrain. 

Justement, la Cinquième Commission a été saisie des projets de budget annuel des Missions en République centrafricaine (MINUSCA), au Mali (MINUSMA) et au Soudan du Sud (MINUSS).  Le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) a fait des recommandations qui aboutiraient à réduire de 18,8 millions de dollars l’enveloppe proposée de 921,5 millions pour la MINUSCA.  Une recommandation similaire aboutirait à réduire de 16,6 millions l’enveloppe de 1 milliard pour la (MINUSMA) et de 19 millions de dollars celle de 1,2 milliard pour la (MINUSS).

Les délégations n’ont pas manqué de se féliciter, une nouvelle fois, de la situation financière « globalement saine » de l’ONU.  Les représentants de la Chine et de l’Union européenne ont appelé les États Membres à s’acquitter « pleinement et en temps voulu » de leur contribution.  « Les discours de soutien aux Nations Unies ne sauraient suffire », a renchéri la représentante du Groupe des 77 et de la Chine, rejetant les « justifications artificielles » avancées par certains États pour expliquer leur retard.

La déléguée cubaine a souligné que les dettes vis-à-vis de l’Organisation sont le fait d’un seul État Membre, qui, « comme par hasard », bénéficie, selon elle, de « la plus grande distorsion » dans le calcul des contributions, alors qu’il profite de la présence sur son territoire du Siège de l’ONU.  C’est cette situation, a-t-elle poursuivi, qui crée l’instabilité financière. 

La Cinquième Commission tiendra sa prochaine séance publique vendredi matin, 12 mai, à 10 heures, pour poursuivre l’examen des aspects administratifs et budgétaires du financement des opérations de maintien de la paix.

 

AMÉLIORATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES

Rapport du Secrétaire général sur la situation financière de l’Organisation des Nations Unies (A/71/440/Add.1)

Le Secrétaire général annonce une situation financière globalement saine. S’agissant du budget ordinaire, il indique qu’en 2017, le budget est d’environ 2,6 milliards de dollars, soit 29 millions de dollars de plus qu’en 2016.  Au 30 avril 2017, le montant des contributions non acquittées s’élevait à 1,4 milliard de dollars, soit 8 millions de moins qu’il y a un an.  Les moyens de trésorerie pour la couverture des dépenses inscrites au budget ordinaire au titre du Fonds général comprennent le Fonds de roulement, dont le montant autorisé par l’Assemblée générale est de 150 millions de dollars, et le Compte spécial dont le solde actuel est de 200 millions de dollars.

Durant 2017, le budget ordinaire continuera de connaître des difficultés de trésorerie, compte tenu du niveau actuellement réduit des réserves qui résulte de décisions prises par l’Assemblée générale ces dernières années au sujet des prélèvements sur le Compte spécial, et du fait que l’Assemblée a également décidé de financer un grand nombre d’activités par la voie d’autorisations d’engagement de dépenses (sans mise en recouvrement de quotes-parts) durant l’exercice biennal 2016-2017.  La situation de trésorerie à la fin de 2017 dépendra largement des contributions qui seront versées par les États Membres dans les mois à venir.

Pour ce qui est des opérations de maintien de la paix, au 30 avril 2017, alors que de nouveaux avis de mise en recouvrement avaient été émis pour un montant de 1,2 milliard de dollars, le montant des contributions non acquittées avait été ramené à moins de 1,7 milliard de dollars.  Au 31 mars 2017, les sommes à rembourser aux États Membres s’élevaient au total à 777 millions de dollars, dont 225 millions au titre des contingents et des unités de police constituées, 466 millions au titre du matériel appartenant aux contingents pour les missions en cours et 86 millions au titre du matériel appartenant aux contingents pour les missions terminées.  Le montant total dû devrait s’élever à 804 millions de dollars à la fin de l’année 2017.

Pour ce qui est des tribunaux internationaux, au 30 avril 2017, l’arriéré des contributions au financement des tribunaux s’élevait à 91 millions de dollars, soit un montant légèrement inférieur à celui enregistré l’année précédente.  Les résultats définitifs de l’année 2017 dépendront de la capacité des États Membres à continuer de s’acquitter de leurs obligations financières à l’égard des tribunaux.

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, Mme AMÉRICA LOURDES PEREIRA SOTOMAYOR (Équateur) s’est déclarée rassurée par le fait que la situation financière de l’Organisation soit globalement saine.  Elle a toutefois noté que certains aspects doivent être « suivis de près » d’ici à la fin de l’année 2017.

La représentante a salué la réduction des contributions non acquittées au budget ordinaire et aux tribunaux internationaux, à la fin de l’année 2016.  Le Groupe demeure cependant inquiet, a-t-elle nuancé, de l’augmentation des contributions non acquittées aux opérations de maintien de la paix.  Elle a appelé les États Membres à poursuivre leurs efforts pour inverser la tendance. 

Elle a par ailleurs noté que le niveau des versements dus aux pays fournisseurs de contingents, d’unités de police constituées et de matériel s’est réduit par rapport à l’exercice précédent.  Elle a appelé l’ONU à tout faire pour raccourcir encore le délai des versements, une question « capitale » pour son Groupe, a-t-elle insisté, dans la mesure où de nombreux États contributeurs sont des pays en développement.

La représentante a appelé les États Membres à s’acquitter « pleinement et en temps voulu » de leur contribution à l’Organisation.  « Les discours de soutien aux Nations Unies ne sauraient suffire », a-t-elle averti, rejetant les « justifications artificielles » avancées par certains États pour expliquer leur retard.

Mme FIONA GRANT, de l’Union européenne, a salué le fait qu’à la fin du mois d’avril dernier, les estimations des contributions non payées, dans toutes les catégories, étaient inférieures à celles de l’année précédente.  Elle a invité tous les États Membres à payer leur contribution dans leur totalité, à temps et sans condition.  Ces paiements sont autant plus attendus que d’ici à la fin de l’année, les liquidités disponibles au titre du budget ordinaire de l’ONU seront très réduites.  La représentante a souligné que la bonne santé financière de l’ONU dépend, certes, de la fiabilité des contributions versées, mais aussi de leur bonne gestion.  Elle a, dans ce contexte, invité l’ONU à s’efforcer de dépenser de manière judicieuse, avec plus de responsabilité et dans les limites des budgets agréés.

Au nom du groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), M. KENT VACHON (Canada) a déploré le fait que l’Organisation dépende de plus en plus du Fonds de réserve pour ses activités et s’est dit inquiet que les liquidités disponibles ne feront que s’amenuiser si les États ne versent pas leur quote-part.  Il a aussi déploré les retards pris par l’Organisation dans le remboursement des pays engagés dans les opérations de maintien de la paix.  Dans ce contexte, il a félicité le Secrétariat pour avoir mis en place des mesures de paiement rapides malgré des versements tardifs.  M. Vachon a aussi dit être inquiet de voir que l’ONU dépend de plus en plus chaque année du Fonds de roulement et du Compte spécial d’appui.  Les montants de ces deux mécanismes doivent être revus en fonction de cette nouvelle réalité, a-t-il estimé.

Le groupe CANZ, a-t-il indiqué, s’engage à continuer de s’acquitter de ses quotes-parts, entièrement, à temps, et sans condition et il invite les autres États à faire de même.  Le représentant a par ailleurs prié les États qui connaissent des tensions de trésorerie à tirer parti des mécanismes de flexibilité de l’ONU, par exemple l’étalement des versements sur plusieurs années.  Il a enfin plaidé pour une amélioration de la gestion des ressources de l’Organisation, notamment en renforçant la transparence, en adoptant la gestion axée sur les résultats et en assurant une meilleure manière de rendre compte des dépenses.

Tout en saluant la bonne situation financière de l’ONU, M. FU LIHENG (Chine) a toutefois exprimé son inquiétude face aux arriérés de paiements de certains États Membres qui s’élevaient au 30 avril 2017 à plus de 3 milliards de dollars.  Il s’est aussi inquiété du montant des sommes dues aux pays contributeurs de contingents, d’unités de police constituées et de matériel qui s’élèvent à environ 480 millions de dollars.  Le représentant a appelé les États Membres à s’acquitter « pleinement et en temps voulu » de leur contribution auprès de l’Organisation. Ceux qui ont pris du retard doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour régler leur ardoise.  Le représentant a tout de même appelé le Secrétariat de l’ONU à améliorer encore la gestion des budgets.

Mme ANA SILVIA RODRIGUEZ ABASCAL (Cuba) a estimé que la volonté politique des États Membres qui sous-tend l’adoption de l’ambitieux Programme de développement durable à l’horizon 2030 doit également se traduire par une volonté de doter l’Organisation des ressources à la hauteur des ambitions.  Elle a donc regretté que les dettes vis-à-vis de l’Organisation soient le fait d’un seul État Membre en particulier, qui, « comme par hasard », bénéficie, selon elle, de « la plus grande distorsion » dans le calcul des contributions, alors qu’il profite de la présence sur son territoire du Siège de l’ONU.  C’est cette situation, a-t-elle poursuivi, qui crée l’instabilité financière.  La représentante a donc appelé  le Secrétariat à « réduire les conséquences de ces pressions financières ».

Elle a estimé que la priorité de l’ONU dans l’allocation des « maigres ressources » dont elle dispose doit être l’avancement de ses mandats et pas seulement le financement de l’administration.  Pour Cuba, a-t-elle souligné, le versement des sommes dues à l’ONU demeure « un défi », en raison du « blocus unilatéral imposé depuis plus de 50 ans par les États-Unis ».  Ces sanctions unilatérales entravent non seulement la capacité de Cuba de s’acquitter de ses obligations financières vis-à-vis de l’ONU mais également vis-à-vis des organisations internationales.  La représentante a appelé la nouvelle Administration américaine à revoir sa politique cubaine.

M. KATSUHIKO IMADA (Japon) s’est félicité de ce que son pays ait versé toutes ses contributions à tous les budgets de l’ONU.  Ces budgets doivent être arrêtés en tenant compte de la capacité de payer des États, a-t-il insisté.  Ils doivent être gérés efficacement et avec transparence, en gardant à l’esprit que c’est l’argent du contribuable.  Le représentant a insisté sur « une stricte discipline budgétaire ».

ASPECTS ADMINISTRATIFS ET BUDGÉTAIRES DU FINANCEMENT DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur l’exécution du budget du compte d’appui des opérations de maintien de la paix pour l’exercice allant du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 et le projet de budget pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 (A/71/883)

Les recommandations du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) aboutiraient à réduire de 11 722 400 dollars l’enveloppe proposée de 339 468 400 dollars pour le compte d’appui aux opérations de maintien de la paix pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 (A/71/806).

Le CCQAB rejette plusieurs postes aux Départements des opérations de maintien de la paix, de la gestion et de l’appui aux missions, ainsi qu’au Bureau des services de contrôle interne.  Il fait de même pour les emplois de temporaire, dont un au Bureau du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.  Le CCQAB recommande aussi des réductions budgétaires au titre des consultants; des voyages; des installations et infrastructures; des transports terrestres; des communications; de l’informatique; et des fournitures, services et matériel divers.

Le projet de budget du compte d’appui est donc ramené à 327 746 000 dollars, déduction faite d’un montant de 611 300 dollars correspondant au solde inutilisé de l’exercice allant du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016; d’un autre montant de 2 238 200 dollars correspondant aux ressources diverses portant sur l’exercice précédent et d’un dernier montant de 1 161 100 dollars correspondant au reliquat du montant autorisé pour le Fonds de réserve pour le maintien de la paix pour l’exercice clos le 30 juin 2016.

Déclarations

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, Mme AMÉRICA LOURDES PEREIRA SOTOMAYOR (Équateur) a noté la nature changeante des opérations de maintien de la paix au cours des dernières années, ainsi que les nouveaux défis auxquels elles doivent faire face sur le terrain.  Elle a toutefois estimé que la dotation du compte d’appui des opérations de maintien de la paix doit « refléter la taille et  la complexité » desdites opérations.

Elle a ainsi noté que les dépenses proposées par le Secrétaire général pour l’exercice 2017-18 s’élèvent à 312,7 millions de dollars, soit une augmentation de 3 millions de dollars par rapport à l’exercice précédent.  La représentante a prévenu que son Groupe analysera « minutieusement » les propositions du Secrétaire général concernant les postes, pour s’assurer qu’elles reflètent bien la nécessité d’appuyer les troupes sur le terrain. Nous étudierons avec attention, a-t-elle insisté, les propositions sur la création, la suppression, la reclassification et le redéploiement des postes, compte tenu du réalignement du compte d’appui dans les domaines de la constitution des forces, de la responsabilité environnementale, de l’appui médical, du soutien sanitaire des forces, de la sûreté et de la sécurité du personnel, des droits de l’homme, de la gouvernance, de la démocratie et de la prévention de l’exploitation et des atteintes sexuelles.

La représentante a par ailleurs regretté le manque d’impact des différentes initiatives de réformes, comme les centres de services partagés, les améliorations apportées à la gestion de la chaîne d’approvisionnement et la mise en service du progiciel de gestion intégré Umoja, sur les demandes de ressources.  La représentante a insisté sur le fait que ces initiatives ont précisément pour objectif de générer des gains d’efficacité et de réaliser des économies d’échelle.

Concernant spécifiquement Umoja, elle a noté la demande d’y affecter 25 millions de dollars, soit une augmentation de 48,8% par rapport à l’exercice précédent.  Mon Groupe analysera avec soin cette proposition, a prévenu la représentante qui s’est aussi inquiétée de la faible représentation des personnels issus des pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police dans la structure d’appui aux opérations de maintien de la paix, aussi bien sur le terrain qu’au Siège de l’Organisation, en particulier, dans les postes de direction.  Nous demanderons au Secrétariat la nature des mesures qu’il a prises pour améliorer la situation.

En tant que premier contributeur de troupes aux opérations de maintien de la paix.  L’Inde, a déclaré M. KUMAR, souhaite que les décisions budgétaires ne soient pas uniquement guidées par le besoin de faire des économies mais qu’elles tiennent également compte de l’impérieuse nécessité d’exécuter les mandats et d’assurer la protection des troupes sur le terrain.  Le représentant a insisté pour que les pays contributeurs de troupes soient dûment consultés à toutes les étapes du processus de prise de décisions.  Il n’a pas manqué de dénoncer les retards pris dans le remboursement des sommes dues, en craignant des « raisons politiques ».  L’engagement de l’ONU vis-à-vis de ces pays n’est pas à la hauteur des sacrifices auxquels ils consentent, a estimé le représentant.

FINANCEMENT DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur l’exécution du budget de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine pour l’exercice allant du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 et le projet de budget pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 /A/71/836/Add.8)

Le CCQAB fait des recommandations qui aboutiraient à réduire de 18 873 200 dollars l’enveloppe proposée de 921 580 500 pour la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 (A/71/819).

Le Comité consultatif rejette en effet la création et la réaffectation de plusieurs postes et en supprime d’autres.  Il estime en outre que le programme de travaux de construction pour l’exercice 2017/18 n’est pas basé sur des hypothèses réalistes et recommande donc que les dépenses prévues soient réduites de 10%.   Il recommande aussi que le montant demandé au titre des consultants soit réduit de 50% et de 30% s’agissant des voyages.  Tenant compte de la sous-utilisation des crédits ouverts pour les drones et la sous-utilisation de ces derniers dans d’autres missions de maintien de la paix, il recommande que le montant demandé soit réduit de 10%.  Enfin, le Comité consultatif demande que les dépenses de carburant soient ramenées au niveau de l’exercice en cours.

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur l’exécution du budget de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali pour l’exercice allant du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 et le projet de budget pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 (A/71/836/Add.14)

Le CCQAB fait des recommandations qui aboutiraient à réduire de 16 684 100 dollars l’enveloppe demandée de 1 077 552 000 pour la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018.

Le Comité estime que dans la mesure où, au 28 février 2017, les coefficients délais de déploiement des contingents et des unités de police constituées se situaient respectivement à 18,5% et à 36,9%, les ressources nécessaires au remboursement mensuel au taux standard du coût des contingents doivent être corrigées.  Il rejette ensuite la création de plusieurs postes et différentes réaffectations.  Il recommande aussi de réduire de 20% le montant des crédits demandés pour les voyages et de 10% les crédits pour les systèmes de drones. Il recommande en outre de réduire de 1 000 000 dollars le montant des crédits demandés au titre des services d’information, d’impression et de reproduction.

En conclusion, le Comité consultatif recommande que l’Assemblée générale ouvre un crédit d’un montant de 1 060 867 900 dollars, si le Conseil de sécurité décide de proroger le mandat de la Mission au-delà du 30 juin 2017.

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires sur l’exécution du budget de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud pour l’exercice allant du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016 et le projet de budget de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 (A/71/836/Add.15)

Le CCQAB fait des recommandations qui aboutiraient à réduire de 19 258 600 dollars l’enveloppe proposée de 1 178 338 600 dollars pour la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) pour l’exercice allant du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 (A/71/841).

Ici aussi, le Comité recommande de supprimer plusieurs postes et emplois temporaires.  Il recommande également que les crédits demandés pour le personnel recruté sur le plan national soient ramenés à un montant global de 8 millions de dollars.  S’agissant des consultants, le montant devrait être réduit de 124 100 dollars et de 5 000 000 dollars pour les dépenses prévues au titre des installations et infrastructures.  Ce sera -20% pour le montant total des ressources demandées au titre des voyages et– 1 000 000 dollars pour celui concernant les drones.  Enfin, le CCQAB propose une réduction de 5% du montant des ressources demandées au titre des communications.

En conclusion, le Comité consultatif recommande que le budget de la Mission soit ramené à 1 159 080 000 dollars.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité entend continuer à jouer un rôle actif dans le processus de paix en Colombie

7937e séance – matin
CS/12817

Le Conseil de sécurité entend continuer à jouer un rôle actif dans le processus de paix en Colombie

Le Conseil de sécurité a, ce matin, dans une déclaration présidentielle, réaffirmé sa détermination à faciliter l’application de l’Accord de paix final conclu le 24 août 2016 entre le Gouvernement colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (FARC-EP), et à continuer de jouer un rôle actif et constructif dans les mois à venir.

Le Conseil de sécurité a effectué une visite en Colombie, du 3 au 5 mai 2017, lors de laquelle il a rencontré toutes les parties prenantes.

Conscient des difficultés considérables que présente l’application de l’Accord de paix, le Conseil se félicite des progrès considérables accomplis à cet égard par le Gouvernement colombien et les FARC-EP et de leur détermination à mener à bien la transition vers la paix dans l’intérêt de tous les Colombiens.

Par cette déclaration, le Conseil salue l’arrivée pacifique de près de 7 000 membres des FARC-EP dans les secteurs et points de normalisation convenus et le lancement du processus de dépôt des armes.

Le Conseil note qu’outre le dépôt des armes, la pleine application de l’Accord de paix, et notamment l’adoption rapide de toutes les mesures convenues pour assurer une réintégration et une réconciliation réelles, avec l’entière participation des femmes, sera d’une importance cruciale.  Il note qu’il sera essentiel dans le cadre de cette action de répondre aux besoins particuliers des groupes touchés. 

En particulier, il exprime sa préoccupation face aux meurtres récents de certains représentants des communautés les plus touchées, salue les efforts déployés par le Gouvernement et la volonté de remédier au problème et appelle à une action encore plus décisive pour assurer leur sécurité.  

Le Conseil de sécurité était saisi d’une lettre* en date du 22 janvier 2016, par laquelle le Président de la Colombie, M. Juan Manuel Santos Calderón, sollicite, au nom du Gouvernement colombien et des FARC-EP, la participation de l’ONU à la composante internationale du mécanisme tripartite de surveillance et vérification de l’accord portant cessez-le-feu et cessation des hostilités bilatéraux et définitifs et dépôt des armes.

* S/2016/53

LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53)

Texte de la déclaration du Président du Conseil de sécurité

Lors de la visite qu’il a effectuée en Colombie du 3 au 5 mai 2017, le Conseil de sécurité s’est félicité d’avoir pu s’entretenir avec le Président Santos et de hauts responsables du Gouvernement colombien, les dirigeants des FARC-EP, des membres du Congrès représentant tous les partis présents sur l’échiquier politique, l’équipe du Mécanisme tripartite de surveillance et vérification, des membres de la société civile et de la population locale, la Mission des Nations Unies et l’Équipe de pays des Nations Unies à Bogota et Vista Hermosa, et il tient à exprimer ses remerciements au Gouvernement colombien, à la Mission des Nations Unies en Colombie et à tous ses interlocuteurs pour ces échanges fructueux.

Le Conseil rend hommage aux Colombiens qui ont eu le courage de s’engager sur la voie de la paix, souligne qu’il s’agit d’une formidable occasion après plus de 50 ans de conflit, en faisant observer que la violence est au niveau le plus bas qui ait jamais été atteint en plus de 40 ans, et insiste sur les avantages considérables qu’une paix durable présenterait pour le pays dans sa totalité et sur le fait que le processus de paix en Colombie pourrait être un exemple pour le reste du monde.

Le Conseil est conscient des difficultés considérables que présente l’application de l’Accord de paix final et se félicite des progrès considérables accomplis à cet égard par le Gouvernement colombien et les FARC-EP et de leur détermination à mener à bien la transition vers la paix dans l’intérêt de tous les Colombiens.

À cet égard, le Conseil salue l’arrivée pacifique de près de 7 000 membres des FARC-EP dans les secteurs et points de normalisation convenus et le lancement du processus de dépôt des armes.  Il salue la détermination dont continuent de faire preuve les parties en collaborant pour permettre aux éléments des FARC de déposer leurs armes dans le délai de 180 jours qui a été fixé.

Le Conseil note qu’outre le dépôt des armes, la pleine application de l’Accord de paix, et notamment l’adoption rapide de toutes les mesures convenues pour assurer une réintégration et une réconciliation réelles, avec l’entière participation des femmes, sera d’une importance cruciale pour permettre l’instauration d’une paix stable et durable pour tous les Colombiens.  Le Conseil note qu’il sera essentiel dans le cadre de cette action de répondre aux besoins particuliers des groupes touchés.

Le Conseil est conscient des répercussions du conflit, en particulier sur les communautés les plus touchées, exprime sa préoccupation face aux meurtres récents de certains de leurs membres, notamment de personnalités locales, salue les efforts déployés par le Gouvernement et la volonté de remédier au problème qui est manifestée au plus haut niveau et appelle à une action encore plus décisive pour assurer la sécurité de ces communautés et la protection de leurs représentants.

Le Conseil remercie le Représentant spécial du Secrétaire général et son équipe des efforts qu’ils ont déjà faits et il est confiant en l’aptitude de la Mission de s’acquitter de ses responsabilités telles qu’il les a définies dans ses résolutions 2261 et 2307 (2016).  Le Conseil remercie les pays, notamment ceux de la CELAC, qui ont fourni des observateurs à la Mission.

Le Conseil salue la contribution au processus de paix en Colombie de toutes les parties concernées, en particulier les pays garants, à savoir la République de Cuba et le Royaume de Norvège, et les pays accompagnateurs, c’est-à-dire la République du Chili et la République bolivarienne du Venezuela.

Le Conseil rappelle son attachement sans réserve au processus de paix et réaffirme sa détermination à faciliter l’application de l’Accord de paix final en Colombie en application de la résolution 2261 (2016) et à continuer de jouer un rôle actif et constructif dans les mois à venir.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Les comités chargés de la lutte contre le terrorisme exposent au Conseil de sécurité les fruits de leurs efforts et de leur collaboration

7936e séance – matin
CS/12816

Les comités chargés de la lutte contre le terrorisme exposent au Conseil de sécurité les fruits de leurs efforts et de leur collaboration

Le Conseil de sécurité a, comme il le fait chaque semestre, entendu ce matin les exposés des présidents de ses trois organes subsidiaires formant le dispositif de lutte contre le terrorisme, des comités chargés de surveiller la mise en œuvre des régimes de sanctions pertinentes.  Les intervenants ont souligné les nouvelles tendances et menaces qu’ils ont constatées dans le phénomène du terrorisme, ainsi que les progrès accomplis dans le combat mené en appliquant les résolutions du Conseil de sécurité.

Les membres du Conseil ont apprécié les efforts de collaboration entre ces organes mais ont appelé à rester vigilant face à la menace terroriste.  Des appels ont aussi été lancés pour renforcer l’assistance technique aux pays qui ont besoin d’améliorer leurs capacités de lutte antiterroriste.

Le délégué du Kazakhstan, qui assure la présidence du Comité créé par les résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015), chargé de la mise en œuvre des sanctions contre Al-Qaida et les Taliban, a signalé une évolution de la menace posée par Daech, Al-Qaida et ses affiliés.  Il a remarqué, par exemple, que l’émergence de Daech n’avait pas affaibli stratégiquement Al-Qaida.

En outre, l’Asie du Sud-Est et l’Afrique de l’Ouest et de l’Est connaissent un niveau croissant de risques émanant de Daech ou des affiliés d’Al-Qaida.  C’est pourquoi l’Équipe de surveillance a mis l’accent sur la nécessité d’améliorer le partage d’informations entre les États Membres. 

Des progrès ont été soulignés en termes de réduction des mouvements de terroristes étrangers.  De plus, les mesures de sanctions imposées aux flux d’actifs de Daech ont commencé à prendre effet, notamment avec des saisies d’antiquités extraites illégalement d’Iraq et de Syrie.

Le représentant de la Bolivie, en sa qualité de Président du Comité créé par la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité concernant la prévention de la prolifération des armes nucléaires, chimiques et biologiques, a souligné l’importance de la collaboration entre les trois comités.  Il s’est félicité notamment des visites conjointes organisées dans les États par la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme.

Les visites de terrain ont été très appréciées par les membres du Conseil de sécurité, notamment celles du Comité contre le terrorisme (CCT) et de sa Direction exécutive (DECT) créés par la résolution 1373 (2001).  Le représentant de l’Égypte, qui préside ce comité, a en effet recensé 17 visites de la DECT, en précisant que celle-ci veillait également au suivi avec les États Membres. 

Par ailleurs, suite à l’appel du Conseil de sécurité l’an dernier de préparer un projet de « cadre international complet » pour lutter contre la rhétorique et les idéologies des groupes terroristes, le CCT, en consultation avec la DECT et l’Équipe spéciale de lutte contre le terrorisme, a présenté le mois dernier un tel projet. 

Le représentant de la Fédération de Russie, comme celui de l’Italie, ont espéré que ce cadre serait bientôt adopté, comme le propose un projet de résolution préparé par l’Égypte.  Leur homologue de l’Éthiopie a été d’avis que ce cadre tienne compte des contextes nationaux pour garantir son efficacité.

Pour sa part, le délégué de l’Égypte, au nom des présidents des Comités créés par les résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015); 1373 (2001); et 1540 (2004), lesquels sont chargés, respectivement, de la mise en œuvre des sanctions contre Al-Qaida et les Taliban, de la lutte antiterroriste et de la prévention de la prolifération des armes nucléaires, chimiques et biologiques, a fait un compte rendu au Conseil de sécurité sur la coopération entre ces trois organes.   

Il a mentionné en particulier la collaboration des trois groupes d’experts attachés respectivement aux trois comités, dans le cadre de visites de pays et de diverses réunions, dont une en mai 2016 au Kazakhstan et une autre en février 2017 au Tadjikistan.  Les trois comités ont aussi partagé des renseignements sur le financement du terrorisme.

La représentante des États-Unis a rappelé que les comités devraient coopérer étroitement avec le nouveau bureau de lutte contre le terrorisme qui va être créé à l’ONU pour coordonner les efforts de 38 bureaux au sein du système.  Elle a espéré que le nouveau bureau profiterait en particulier des évaluations de pays menées par la DECT en vue de renforcer les capacités des États.

À cet égard, le représentant du Japon a appelé tous les États Membres à contribuer au financement du plan de mise en œuvre du renforcement des capacités en vue d’endiguer le flux de combattants terroristes étrangers, qui n’est pour l’instant financé qu’à hauteur de 23%.

La délégation du Sénégal a illustré l’importance de ce soutien aux pays les plus touchés par le terrorisme en observant que Daech cherche à se déployer notamment dans la bande sahélo-saharienne.  Il a donc jugé important que les trois comités œuvrent à l’établissement et au renforcement des partenariats aux niveaux national, régional et international avec toutes les parties, aussi bien publiques que privées.

EXPOSÉS DES PRÉSIDENTS DES ORGANES SUBSIDIAIRES DU CONSEIL DE SÉCURITÉ

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte), au nom des présidents des Comités créés par les résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015); 1373 (2001); et 1540 (2004), lesquels sont chargés, respectivement, de la mise en œuvre des sanctions contre Al-Qaida et les Taliban, de la lutte antiterroriste et de la prévention de la prolifération des armes nucléaires, chimiques et biologiques, a fait un compte rendu au Conseil de sécurité sur la coopération entre ces trois organes. 

Ces trois organes subsidiaires, qui forment le dispositif de lutte contre le terrorisme, ont reconnu la grave menace que pose le terrorisme, ainsi que les défis que représentent les terroristes et leurs organisations lorsqu’ils recourent à de nouveaux moyens de financement et planifient de nouveaux actes terroristes. 

Ces comités, a-t-il indiqué, ont insisté sur la nécessité de demander aux États Membres de respecter leurs obligations de mettre pleinement en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité, soulignant la nécessité pour les pays de renforcer leurs capacités à cet effet.

Le terrorisme et le risque de prolifération d’armes de destruction massive entre les mains d’acteurs non étatiques continuent de représenter une grave menace à la paix et à la sécurité internationales, a-t-il poursuivi, en soulignant le travail important qu’accomplissent ces comités pour y faire face. 

Les trois comités ont ainsi continué à collaborer avec leurs trois groupes d’experts, notamment dans le cadre de visites de pays.  Ils ont participé à des réunions en mai 2016 au Kazakhstan et en février 2017 au Tadjikistan.  Les groupes d’experts échangent des informations, notamment par le biais des visites et de l’assistance technique, en travaillant aussi avec des organisations internationales d’intérêt commun.

Les trois comités sont également demeurés en étroite coopération dans le cadre de leur soutien à l’Équipe spéciale de lutte contre le terrorisme et à ses groupes de travail chargés notamment des questions relatives aux combattants terroristes étrangers, à la protection des infrastructures de nature critique, au financement du terrorisme et à l’application de la loi.

Venant au Groupe d’experts du Comité 1540, M. Aboulatta a indiqué que ce groupe avait encouragé le groupe de travail de l’Équipe spéciale contre le terrorisme qui travaille sur les armes de destruction massive à se concentrer sur la prévention de la non-prolifération auprès des acteurs non étatiques. 

De plus, la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT) et l’Équipe de surveillance du Comité 1267 ont présenté quatre rapports sur la menace que pose Daech et sont en train d’en rédiger un cinquième.  Ces deux entités ont également collaboré sur l’utilisation d’Internet et ont pris part aux consultations de la DECT avec le secteur privé à Zurich, dans la Silicon Valley et à Kuala Lumpur.

Les trois comités ont aussi partagé des renseignements sur le financement du terrorisme.  Ils ont débattu des plateformes de commerce illicite comme eBay et Ali Baba.  Ils ont aussi rencontré le Groupe d’action financière (GAFI). 

En avril 2016, le Comité 1267, le Comité contre le terrorisme, des États Membres et d’autres organisations ont aussi tenu une séance ouverte sur la façon de priver les groupes terroristes de financement. 

Les trois comités ont reconnu la nécessité d’améliorer encore la coordination lorsque cela est possible, en cherchant les synergies possibles.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan), Président du Comité créé par les résolutions 1267 (1999), 1989 (2011) et 2253 (2015), chargé de la mise en œuvre des sanctions contre Al-Qaida et les Taliban, a affirmé que depuis la dernière séance conjointe du Conseil en mai 2016, la menace posée par Daech, Al-Qaida et ses affiliés avait évolué.  Dans son dernier rapport, l’Équipe de surveillance a constaté que les filiales de Daech et d’Al-Qaida continuaient de présenter un défi complexe et diversifié à la sécurité internationale.

Daech demeure sous une pression militaire soutenue et, en réponse, a mené une série d’attaques en dehors des zones de conflit.  Beaucoup d’attaques inspirées par Daech ont d’abord été signalées comme des attaques d’acteurs isolés, mais des enquêtes ultérieures ont révélé que, dans la plupart des cas, leurs auteurs avaient reçu un soutien d’autres groupes extrémistes et criminels.

Les affiliés d’Al-Qaida maintiennent également un niveau important d’opérations terroristes dans leurs régions respectives.  Dans certaines régions, les affiliés d’Al-Qaida restent plus forts que les cellules et groupes de Daech.  Par conséquent, l’émergence de Daech n’a pas affaibli stratégiquement Al-Qaida.

L’Équipe de surveillance a ajouté que le flux global de combattants terroristes étrangers en Iraq et en République arabe syrienne semblait avoir ralenti en raison des mesures de contrôle accrues mises en place par les États Membres et de la pression militaire.

Un défi croissant est celui posé par les rapatriés et la relocalisation des combattants.  Le déplacement de ces personnes amplifie le risque de concentration d’individus qui représentent potentiellement une menace considérable dans des régions particulières.  L’Asie du Sud-Est et l’Afrique de l’Ouest et de l’Est connaissent un niveau croissant de risques émanant de Daech ou des affiliés d’Al-Qaida.

L’Équipe de surveillance a mis l’accent sur la nécessité d’améliorer le partage d’informations entre les États Membres à cet égard.  En plus de la réduction des mouvements de terroristes étrangers, les mesures de sanctions imposées aux flux d’actifs de Daech ont commencé à prendre effet, notamment concernant le trafic d’antiquités extraites illégalement d’Iraq et de Syrie.  Les États Membres ont commencé à signaler les saisies de ces articles sur leurs territoires.

En ce qui concerne l’Afghanistan, l’Équipe de surveillance note que Daech a perdu de l’importance.  En outre, un nombre important de combattants liés à d’autres groupes affiliés d’Al-Qaida, qui avaient déjà opéré dans la région frontalière entre l’Afghanistan et le Pakistan, ont rejoint les Taliban et ont nécessité une augmentation des capacités de lutte contre les Taliban.

La menace évolutive se reflète également dans l’adoption d’un certain nombre de nouvelles résolutions par le Conseil de sécurité, qui a élargi le travail du Comité et de l’Équipe de surveillance.  En décembre 2016, le Conseil a adopté la résolution 2331 (2016) pour entraver le financement des terroristes contre les actes de violence sexuelle et sexiste et la traite des personnes.

Le Conseil a noté, dans sa résolution, que ces actes font partie des objectifs stratégiques et de l’idéologie de certains groupes terroristes tels que Daech et Al-Qaida et sont utilisés comme tactique du terrorisme et comme instrument pour accroître leurs finances et leur pouvoir par le recrutement et la destruction des communautés.

S’agissant de la résolution 2347 (2017) relative à la protection du patrimoine culturel dans les conflits armés, les mesures décidées sont fondées sur les recommandations que l’Équipe de surveillance a faites dans divers rapports au cours de l’année 2016 et que le Comité a entérinées.  

Pour les deux résolutions, a dit le Président, il est essentiel que les États Membres s’engagent à fournir des informations actualisées au Comité et à l’Équipe de surveillance sur la nature évolutive de la menace, les individus et les entités énumérés et le statut de la mise en œuvre des sanctions.

Pour renforcer la mise en œuvre complète et efficace des sanctions, le Comité entreprend également des visites dans des pays sélectionnés.  Dans ce contexte, le Président du Comité 1267 s’est rendu en Afghanistan du 1er au 13 novembre 2016.  

Dans le cadre de l’engagement du Comité sur les derniers développements en Afghanistan, le Comité a, le 3 février, décidé de supprimer Gulbuddin Hekmatyar de sa liste de sanctions afin de faciliter les efforts en cours à Kaboul en faveur de la réconciliation nationale.  Le Conseil, dans sa résolution 2344 (2017), a exprimé sa vive inquiétude quant à la présence et à la croissance potentielle des filiales de Daech en Afghanistan, lesquelles posent de sérieuses menaces à la sécurité de l’Afghanistan et des pays de la région, y compris en Asie centrale.

M. ABOULATTA (Égypte), en sa qualité de Président du Comité contre le terrorisme (CCT), a présenté les travaux de ce comité et de sa Direction exécutive (DECT) créés par la résolution 1373 (2001). 

La DECT a été mandatée jusqu’au 31 décembre 2017 pour aider les États Membres à mettre pleinement en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité sur le terrorisme, a-t-il d’abord rappelé.  Il a indiqué que les activités de ces deux organes ont continué à se concentrer sur l’augmentation du nombre et du rythme des évaluations et du suivi sur la disponibilité de l’assistance technique, ainsi que sur l’identification de tendances importantes, les travaux avec les partenaires et les réponses innovantes.

Depuis mars 2016, le Comité a effectué 17 visites dans divers États Membres, a-t-il dit.  Après ces visites, la DECT a effectué un suivi avec les États Membres en vue d’une assistance technique.  Cela a permis à l’Argentine et à Sri Lanka de recevoir une aide technique de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).

Le CCT et la DECT ont continué à identifier les menaces terroristes et les nouvelles tendances dans ce domaine, ainsi que les réponses possibles.  Le financement de la lutte antiterroriste était une priorité du Comité l’an dernier, a-t-il ajouté en précisant que les terroristes recherchent toujours de nouveaux moyens de lever des fonds, notamment par le biais de la criminalité transnationale organisée.

L’utilisation d’Internet et d’autres technologies de communication par les terroristes est un autre domaine sur lequel ces organes ont travaillé.  Une réunion spéciale a eu lieu en décembre 2016, puis une autre en février dernier avec des dirigeants de sociétés de technologie de l’information et des communications (TIC), portant sur l’initiative « Tech Against Terrorism ».

Suite à l’appel du Conseil de sécurité de préparer un projet de « cadre international complet » de lutte contre la menace de terrorisme, le CCT, en consultation avec la DECT, l’Équipe spéciale de lutte contre le terrorisme, a présenté le mois dernier un tel projet au Conseil de sécurité.

M. Aboulatta a aussi indiqué que la DECT continue à prendre conseil auprès de spécialistes qui ont une expérience de terrain au sujet des défis du terrorisme, comme des magistrats et des policiers d’Asie du Sud-Est qui se réunissent régulièrement avec elle. 

En outre, la Direction exécutive organise pour les États Membres des présentations informelles sur les nouvelles menaces, ainsi que des exposés en collaboration avec INTERPOL et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

Enfin, le CCT et la DECT continuent à accorder une attention particulière aux questions relatives aux droits de l’homme et à l’état de droit, notamment dans le cadre de réunions avec les États Membres et dans le cadre des visites de pays.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie), Président du Comité créé par la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité concernant la prévention de la prolifération des armes nucléaires, chimiques et biologiques, a rappelé que le Comité veille en particulier à ce que des acteurs non étatiques, y compris des terroristes, ne se procurent pas d’armes de destruction massive.  

Il a souligné l’importance de la collaboration entre les trois comités, reconnue dans la résolution 2335 (2016) du 15 décembre dernier sur la non-prolifération des armes de destruction massive, qui engage tous les États à redoubler d’efforts pour parvenir à la pleine mise en œuvre de la résolution 1540 (2004), en mettant l’accent, selon qu’il conviendra, sur les domaines dans lesquels des mesures devraient être prises ou renforcées. 

Se félicitant des visites conjointes organisées dans les États par la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, il a espéré qu’elles pourront se poursuivre dans la mesure des ressources disponibles.  Dans beaucoup d’États en effet, la plupart des parties responsables de la mise en œuvre des résolutions du Conseil sont les mêmes personnes.

Le Conseil a demandé au Comité 1540 d’accorder une plus grande attention aux éléments suivants: mesures d’exécution; mesures relatives aux armes biologiques, chimiques et nucléaires; mesures concernant le financement de la prolifération; localisation et sécurisation des éléments connexes; contrôles nationaux à l’exportation et au transbordement, a relevé M. Llorentty Solíz. 

Il a salué le type de coopération entre les experts à laquelle se réfère la déclaration conjointe sur les risques de trafic illicite et de terrorisme à travers l’utilisation de plateformes commerciales publiques en ligne.  Cela aide le Comité à suivre l’évolution constante de la nature des risques de prolifération, notamment le fait que les acteurs non étatiques peuvent tirer parti des avancées rapides de la science, de la technologie et du commerce international à des fins de prolifération.

Le Président du Comité 1540 a ensuite remercié les États qui ont contribué au Fonds d’affectation spéciale pour les activités de désarmement à l’échelle mondiale et régionale. 

Déclarations

Les trois comités formant le dispositif de lutte contre le terrorisme doivent rester vigilants pour contrer la menace dynamique que présentent l’État islamique et les autres groupes terroristes, a averti Mme MICHELE J. SISON (États-Unis).  Des milliers de combattants reviennent des zones de conflit et ces groupes continuent de recruter.  Malgré les pertes récentes qu’ils ont subies, ils sont encore capables d’étendre leurs zones d’attaques.

Les Nations Unies ont un rôle accru à jouer pour lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes, a-t-elle affirmé.  À cet égard, les comités doivent adopter une approche intégrée et il leur faudra coopérer étroitement avec le nouveau bureau de lutte contre le terrorisme de l’ONU qui va être créé et qui coordonnera les efforts de 38 bureaux au sein du système.   

La Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT) doit lutter contre les discours terroristes et promouvoir le respect des droits de l’homme et de l’état de droit, a poursuivi la représentante.  Elle a encouragé la Direction exécutive à œuvrer avec d’autres entités de l’ONU, tels l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) ou INTERPOL, pour encourager les États à mieux coopérer.

Elle a espéré que le nouveau bureau de l’ONU profitera des évaluations de pays menées par la Direction exécutive pour renforcer les capacités des États.  

« Il nous faut renforcer nos alliances pour lutter contre le terrorisme », a martelé la représentante.  « Gardons à l’esprit, a-t-elle dit, que, pour de nombreux États, la liste 1267 des sanctions reste une directive très importante qui doit être mise à jour pour appliquer les sanctions. »

Selon elle, le Comité 1540, pierre angulaire des efforts internationaux pour lutter contre la prolifération des armes de destruction massive, est d’autant plus pertinent que la République populaire démocratique de Corée (RPDC) continue de mettre au point des armes nucléaires et des missiles balistiques, et que des armes chimiques sont utilisées en Syrie.

Elle a toutefois reconnu qu’il y avait de grandes lacunes en matière de mise en œuvre, notamment pour lutter contre le financement et les vecteurs.

M. EVGENY T. ZAGAYNOV (Fédération de Russie) a souligné l’importance des travaux de ces comités pour garantir l’efficacité des mesures prises par le Conseil de sécurité.  Il a noté que ce sont les jeunes et les plus pauvres qui sont menacés par le terrorisme.  Le représentant a rappelé que, le 11 mai 2016, lors d’un débat sur la lutte contre la propagande terroriste présidé par la Russie, le Conseil de sécurité avait souhaité adopter un « cadre international complet » pour contrer plus efficacement la propagande d’organisations terroristes comme Daech, Al-Qaida ou des groupes associés. 

Il a espéré que ce cadre serait adopté par une résolution du Conseil de sécurité, en suivant le projet présenté à cet égard par l’Égypte.

Le représentant a demandé de suivre une approche similaire pour le financement du terrorisme, notant que les résolutions ciblées ne sont pas mises en œuvre par tous les États.  Il a donc aussi souhaité voir renforcer le régime du Conseil sur le financement du terrorisme.

Passant au Comité contre le terrorisme, il a partagé l’idée du Président du Comité contre le terrorisme, M. Amr Abdellatif Aboulatta, qu’il faut renforcer le Comité et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT).  Il faut établir des priorités pour les pays les plus à risque de terrorisme, conformément au classement du Conseil de sécurité.  Il a mentionné à cet égard l’utilité des visites en Afghanistan.

En ce qui concerne le Comité 1267, il a appuyé l’idée que le Conseil de sécurité inclue de nouveaux individus sur la liste, sans politisation.  Il faut aussi améliorer l’efficacité des mécanismes de sanctions.  Mais il y a encore de grands problèmes pour leur mise en œuvre, a-t-il noté en soulignant l’approche très étroite sur le court terme.  Il a appuyé les travaux sur le suivi et a appelé les États Membres à coopérer avec les membres du Groupe, appelant à davantage d’objectivité dans les rapports.

Sur les travaux du Comité 1540, il s’est dit satisfait et a noté qu’il ne reste que peu d’États n’ayant pas présenté des rapports nationaux.  Il a toutefois souhaité la tenue de réunions plus fréquente de ce comité.  Étant donné la situation en Syrie et en Iraq, la résolution 1540 (2004) est toujours aussi importante, a-t-il affirmé, jugeant inacceptables les violations de ce texte.  Il s’est dit prêt à renforcer le régime de non-prolifération des armes de destruction massive.

M. YASUHISA KAWAMURA (Japon) a dit que de nombreux combattants terroristes étrangers en Iraq et en Syrie revenaient dans leur pays d’origine, y compris le sud-est de l’Asie.  Leurs tactiques évoluent, y compris l’utilisation de passeports falsifiés.  La résolution 2178 (2014) encourage les États Membres à utiliser le système de « renseignements préalables concernant les voyageurs » et le système de « dossier passager ». 

Cependant, a regretté le représentant, seuls 56 des 193 États Membres ont introduit le premier système, et seulement 15 utilisent le deuxième.  « Je demande instamment à tous les États Membres d’utiliser ces systèmes dès que possible », a exhorté M. Kawamura.

Concernant toujours la résolution 2178 (2014), le Japon a donné 1,1 million de dollars en mars dernier pour le plan de mise en œuvre du renforcement des capacités en vue d’endiguer le flux de combattants terroristes étrangers.  Toutefois, ce plan n’a reçu que 23% du financement nécessaire jusqu’à présent. 

Le représentant a encouragé tous les États Membres à contribuer au plan qui se concentrerait non seulement sur la lutte contre le flux de combattants terroristes étrangers et leur retour, mais aussi sur la prévention de l’extrémisme violent. 

Sur le travail du Comité 1540, le représentant a d’abord souligné la poursuite des essais nucléaires de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et l’utilisation d’armes chimiques en Syrie pour indiquer qu’il était de la responsabilité de chaque État de se protéger et de protéger son peuple en renforçant les mesures de non-prolifération internationales et nationales. 

Les activités de prolifération doivent être évitées chaque fois qu’elles sont entreprises ou tentées.  Les mesures d’application liées au paragraphe 3 de la résolution 1540 (2004), y compris l’élaboration de listes nationales de contrôle, sont de plus en plus importantes, a estimé le représentant japonais.  

Il y a moins de deux mois, le Royaume-Uni a été le théâtre d’une terrible attaque à Westminster, à Londres, a rappelé M. PETER WILSON (Royaume-Uni).  Ce n’est malheureusement qu’un exemple parmi d’autres.  « Nous sommes confrontés à une menace commune qui ne cesse d’évoluer et qui exige une riposte commune », a-t-il estimé.  

Il a rappelé le rôle essentiel des trois comités pour lutter contre le terrorisme.  En particulier, grâce au Comité 1540, des mesures tangibles sont prises pour que des armes de destruction massive ne tombent pas entre les mains de terroristes ou d’autres acteurs non étatiques.  « Cette menace n’est plus hypothétique », a-t-il mis en garde.  Selon lui, il faut tout faire pour encourager les États Membres à présenter leurs rapports sur la mise en œuvre de la résolution 1540 (2004).

Par ailleurs, a rappelé le représentant, le Royaume-Uni s’est fait, au sein du Conseil de sécurité, « le chantre de la sécurité aérienne » dans le cadre des menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de terrorisme, avec l’adoption de la résolution 2309 (2016).  Une réunion de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) est prévue à ce sujet en juillet prochain pour partager les pratiques optimales.  « Il faut placer la prévention de l’extrémisme violent au cœur de nos efforts collectif », a-t-il conclu.

M. INIGO LAMBERTINI (Italie) a salué le travail remarquable du Comité 1540 et de ses groupes d’experts.  Notant que les entités terroristes profitent des avancées sur le plan de l’innovation, il a souligné que les abus en matière de transfert de technologies sensibles et de fonds permettent à ces entités d’accéder à des armes de destruction massive.  Il a donc jugé impératif que les États Membres prennent les mesures nécessaires pour contrer ce phénomène, en respectant les droits de l’homme.

Le représentant a apprécié les efforts menés par le Comité contre le terrorisme (CCT) et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT).  Rappelant que les terroristes s’adaptent rapidement pour diffuser leur propagande et transférer des fonds, il a apprécié l’initiative visant à s’y opposer.  Il a aussi encouragé à s’allier pour cela avec le secteur privé.  Il s’est en outre prononcé en faveur de l’adoption d’un cadre international complet.

Concernant les Comités 1267 et 2253, il a appuyé le travail notamment de l’Équipe de surveillance du Comité des sanctions.  Il s’est félicité de la visite de l’Équipe de surveillance en Italie prévue au cours du deuxième semestre.

Pour mettre pleinement en œuvre la résolution 1540 (2004), il faut encore déployer des efforts importants, a-t-il ajouté en saluant les travaux du Comité du même nom.  Il a appelé à utiliser les outils disponibles pour lutter contre la prolifération, en particulier pour éviter l’usage d’armes biologiques et pour protéger les infrastructures essentielles.

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a souligné que les résolutions récemment adoptées, notamment les résolutions 2309 (2016) sur la sécurité aérienne, 2322 (2016) sur la coopération judiciaire internationale, 2341 (2017) sur la protection des infrastructures essentielles contre les attaques terroristes et 2347 (2017) sur la protection des biens culturels, ont considérablement élargi le mandat de la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme.

Le représentant a ajouté que l’année 2016 avait été marquée par une étape importante dans la promotion du régime de non-prolifération des armes de destruction massive.  Cependant, en dépit de toutes les mesures prises par les États Membres pour réduire les risques de prolifération, le monde entier est témoin des menaces croissantes et toujours plus sophistiquées dans ce domaine.  

Ces risques résultent non seulement des lacunes de la législation nationale, mais aussi du développement rapide de la science et de la technologie, ainsi que du commerce électronique, et le manque de sensibilisation aux menaces dans les milieux universitaire, l’industrie et les sociétés civiles. 

Au cours de la dernière décennie, des matériaux chimiques et biologiques ont été souvent mentionnés comme les armes potentielles des terroristes, des acteurs non étatiques et des États voyous.  Apparemment, cette hypothèse semble se vérifier comme le confirment les événements récents. 

Toute utilisation d’armes de destruction massive en toutes circonstances doit avoir une réponse forte de la communauté internationale.  Les auteurs de tels actes odieux doivent être tenus responsables et le Conseil de sécurité ne peut pas se permettre de rester silencieux ou indifférent sur ce sujet, a déclaré le représentant.   

Mme MARIE AUDOUARD (France) a rappelé que Daech constituait une menace toujours aussi complexe et diversifiée, en dépit de la pression militaire que le groupe subit sur le terrain.  Dans ce contexte, a-t-elle ajouté, « notre réponse collective doit être ferme et organisée ».  Mme Audouard a souligné que le Comité 1267 remplissait deux missions: l’analyse de la menace terroriste par le biais des rapports de l’Équipe d’appui analytique et de surveillance, très détaillés et précieux pour les États Membres, et la mise en œuvre et le suivi rigoureux de la liste de sanctions.

À cet égard, elle a encouragé les États Membres à continuer à soumettre des demandes d’inscription sur la liste.  Pour que ce régime reste crédible, il est essentiel que les procédures respectent les libertés fondamentales des personnes inscrites sur la liste, a indiqué la déléguée. 

S’agissant du Comité contre le terrorisme, ou le Comité 1373, il remplit aussi deux fonctions dont la première est de sensibiliser au mieux les États aux nouvelles tendances qui caractérisent une menace terroriste sans cesse changeante.  Les réunions spéciales du Comité comme celle prévue le 21 juin prochain sur la coopération judiciaire et policière internationale, sont un excellent moyen d’informer les États et de réfléchir ensemble à certaines problématiques précises.

La deuxième fonction du Comité contre le terrorisme est, selon Mme Audouard, d’examiner la mise en œuvre par les États des principales résolutions du Conseil de sécurité, notamment la résolution 1373 (2001) sur la lutte contre le terrorisme en général et son financement, et la résolution 1624 (2005) sur la lutte contre l’incitation à commettre des actes terroristes. 

La représentante a ensuite souligné l’importance du travail que mène le Comité 1540.  Elle a ajouté que le risque que des matières biologiques, chimiques et nucléaires tombent entre les mains de terroristes était un danger réel.  S’il est avéré que Daech dispose de capacités chimiques en Syrie et en Iraq, à cela s’ajoutent les incertitudes qui demeurent sur la déclaration syrienne sur son programme chimique à l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et l’existence potentielle de capacités résiduelles sur le territoire syrien ne fait qu’augmenter ce risque que la France prend très au sérieux.

« Il importe donc, plus que jamais, d’adapter notre action à l’évolution de la menace », a dit la représentante.  Aujourd’hui, la grande majorité des États Membres ont adopté des mesures transposant en droit national les dispositions de la résolution.  Qu’il s’agisse de sécurisation de matières et biens sensibles, d’un renforcement des contrôles aux frontières ou même, lorsque cela s’impose, de l’établissement de mécanismes de contrôle aux exportations, la communauté internationale veille à éviter que de tels matières et biens sensibles ne puissent éventuellement tomber entre les mains de terroristes.

L’adoption de la résolution 2325 (2016) a permis d’adapter et renforcer nos outils pour lutter contre cette menace.  « En renforçant la logique de coopération, d’assistance et d’interaction, nous parviendrons à mieux prévenir le risque d’acquisition d’armes de destruction massive par des acteurs non étatiques », a estimé Mme Audouard.

« Le terrorisme est l’ennemi commun de l’humanité », a déploré M. WU HAITAO (Chine).  Il a mis l’accent sur le renforcement des capacités, la coopération et la prévention de l’utilisation d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs.  D’après lui, la communauté internationale doit adopter des mesures globales pour faire face concrètement à ces menaces.

Le représentant a notamment salué les résultats positifs enregistrés dans les travaux du Comité 1267 sur les sanctions et il a appuyé la poursuite des efforts entrepris par le Comité 1989 pour lutter contre l’utilisation d’Internet par des terroristes.  Quant au Comité 1540, qui a mené un examen complet de la mise en œuvre des résolutions par les États Membres, il va devoir à présent insister sur le rôle de chef de file que doivent jouer les États pour empêcher la prolifération et accorder la priorité aux besoins d’assistance des pays en développement.   

M. OLOF SKOOG (Suède) a dit qu’il était important que le Comité 1267, avec l’aide de l’Équipe de surveillance, continue de surveiller et d’adapter ses mesures en conséquence.  Les défis croissants en matière de sécurité liés au retour et à la relocalisation des combattants terroristes étrangers nécessitent un meilleur partage de l’information. 

Chaque cas doit être évalué sur ses propres mérites, et ceux qui ont commis des crimes doivent être traités par le système judiciaire.  La Suède a introduit de nouvelles dispositions relatives au Code pénal liées aux voyages et au financement afin de satisfaire pleinement aux exigences énoncées dans la résolution 2178 (2014).

Pour ce qui est du Comité contre le terrorisme (CCT), l’objectif de toutes les activités de lutte contre le terrorisme doit consister à empêcher les attaques terroristes.  En même temps, des principes fondamentaux tels que la liberté d’information et d’expression, en ligne et hors ligne, et la liberté d’association et d’assemblage doivent être respectés.  Ces libertés représentent la base d’une société ouverte, incitant à la pensée critique et à la résilience contre la propagande terroriste.

Enfin, s’agissant des armes de destruction massive, l’objectif de la résolution 1540 (2004) est étroitement lié aux efforts antiterroristes mondiaux.  La menace des acteurs non étatiques est réelle.  L’urgence est devenue encore plus évidente à cause de l’utilisation confirmée des armes chimiques, a indiqué le représentant.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a salué le travail du Comité contre le terrorisme (CCT) et de la Direction exécutive contre le terrorisme (DECT) dans la mise en œuvre des mesures prises pour lutter contre le terrorisme.  Il a apprécié les travaux de suivi notamment.  La coopération régionale devrait être renforcée à son avis, en visant les pays les plus touchés par le terrorisme. 

Il a aussi appelé à renforcer l’aide technique en faveur de ces pays.  Il s’est félicité de la collaboration de l’Équipe spéciale de lutte contre le terrorisme avec le CCT et la DECT.  La coopération de toutes les parties prenantes, publiques et privées, reste essentielle, a-t-il insisté.

M. Alemu s’est ensuite félicité du projet de cadre global complet pour lutter contre le discours du terrorisme, souhaitant que ce cadre tienne compte des contextes nationaux pour garantir son efficacité.

Pour ce qui est des travaux du Comité 1267, il a reconnu le travail important mené par l’Équipe d’appui analytique et de surveillance pour aider le Comité.  Si le fait que le nombre de combattants terroristes étrangers diminue est une bonne nouvelle, il a dit attendre d’en savoir plus sur certaines régions comme l’Afrique de l’Ouest qui encourent actuellement des risques accrus.

Le représentant s’est ensuite dit très préoccupé par les menaces que représente la prolifération d’armes de destruction massive.  Cette question devrait être examinée dans le contexte plus large d’une interdiction totale d’armes de destruction massive biologiques et nucléaires, a-t-il estimé.  Il s’est donc dit favorable à l’adoption d’un cadre juridiquement contraignant et complet sur l’interdiction des armes de destruction massive. 

Il a par ailleurs préconisé la tenue de réunions de groupes d’experts pour favoriser l’assistance technique.

M. FODÉ SECK (Sénégal) a rappelé que l’Afrique est confrontée, aujourd’hui plus que jamais, à la menace terroriste.  Les résultats de la mission onusienne d’évaluation de l’impact de la crise libyenne sur la région du Sahel, conduite en décembre 2011, faisait déjà état de la circulation d’une grande quantité d’armes et de munitions.  Passées en contrebande, a-t-il expliqué, ces armes représentent une réelle menace pour la sécurité et la stabilité dans cette région.  à cette situation s’ajoutent la criminalité transnationale organisée et les trafics en tout genre.

Daech cherche à se déployer dans d’autres régions du monde, notamment dans la bande sahélo-saharienne, a averti le représentant.  Il a jugé important que les trois comités œuvrent à l’établissement et au renforcement des partenariats aux niveaux national, régional et international avec toutes les parties, aussi bien publiques que privées.

Outre le partage d’informations, il a souhaité la sécurisation des chaînes d’approvisionnement possibles des terroristes et de contrôle des frontières.

M. Seck a encouragé la collaboration des comités dans les domaines complémentaires, comme les visites conjointes de pays et les groupes de travail de l’Équipe spéciale de lutte contre le terrorisme.  Il a souligné l’engagement politique de l’Union africaine en faveur de la résolution 2235 (2015) contre la menace que représente l’État islamique, qui s’est traduit par l’organisation, en partenariat avec le Comité 1540, d’une conférence d’assistance aux pays demandeurs.  

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a estimé que les rapports de ces comités donnent des informations importantes pour comprendre l’ampleur du phénomène du terrorisme et de son évolution.  Abordant les travaux du Comité 1373, il s’est félicité des visites effectuées dans plusieurs pays, soulignant qu’elles permettent de renforcer les points forts et de traiter les problèmes. 

Il s’est félicité de la visite de la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme (DECT) en Uruguay, assurant vouloir continuer à travailler ensemble dans un esprit de franche coopération.  Les rapports thématiques sont très utiles ainsi que les réunions organisées par le Comité, a-t-il ajouté.

En ce qui concerne le Comité 1267, il a jugé important d’assurer le suivi des activités des groupes terroristes pour neutraliser leur capacité d’action.  Mais l’efficacité du régime des sanctions repose en grande partie sur la coopération et sur la mise à jour de la liste des entités par les États.

Pour ce qui est du Comité 1540, il s’est dit préoccupé de la prolifération des armes de destruction massive.  Il a souligné l’importance du rôle préventif de la résolution 1540 et des travaux du Comité dans ses quatre domaines de travail, à savoir la mise en œuvre, l’assistance, la coopération, et la transparence et la divulgation.  

En conclusion, il a estimé essentiel de mener à bien toutes ces activités de lutte contre le terrorisme dans le cadre de l’état de droit, en respectant les libertés fondamentale.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: Fin du débat sur l’intégration et rappel de « la position unique de l’ONU pour apporter une réponse intégrée au défi de l’éradication de la pauvreté »

Session de 2017, Débat consacré aux questions d’intégration,
27e & 28e séances – matin & après-midi        
ECOSOC/6831

ECOSOC: Fin du débat sur l’intégration et rappel de « la position unique de l’ONU pour apporter une réponse intégrée au défi de l’éradication de la pauvreté »

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a achevé, aujourd’hui, son débat annuel consacré aux « questions d’intégration », qui avait pour mission de réfléchir aux mesures à prendre pour « faire de l’éradication de la pauvreté un objectif faisant partie intégrante de toutes les politiques ».

Pendant trois jours, les 54 membres de l’ECOSOC et divers experts se sont retrouvés pour discuter de ces mesures, sous le format de débat général ou de tables rondes interactives.  Après les trois sessions de la dernière journée, le Vice-Président de l’ECOSOC, M. Nabeel Munir, du Pakistan, a résumé les débats en affirmant que les défis de l’éradication de la pauvreté placent « l’ONU dans une position unique » lui imposant de continuer de renforcer tous les mécanismes pour une collaboration interagences. 

Cette collaboration, a-t-il expliqué, devrait apporter une véritable réponse, de manière intégrée et durable, au défi de l’éradication de la pauvreté.  Pour ce faire, il faudrait améliorer la gouvernance et la coordination des structures impliquées, en alignant les pratiques de financement à cet objectif.  Il faudrait également renforcer les partenariats et susciter l’innovation, tout en améliorant les processus de coopération entre les agences et entre les gouvernements et ce, afin d’aider l’ONU à agir d’une seule voix.

M. Munir a prévenu les États Membres: toutes ces étapes requièrent un leadership solide de la part des gouvernements et de toutes les parties prenantes. 

« Le travail commun de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ne fait que commencer », a aussi souligné le Sous-Secrétaire général à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations du Département des affaires économiques et sociales (DAES), M. Thomas Gass.

Dans la matinée, lors de la table ronde sur « l’élimination de la pauvreté en Afrique », on a constaté que les progrès socioéconomiques réalisés jusqu’à ce jour sur le continent permettent d’espérer atteindre le premier objectif du Programme de développement durable à l’horizon 2030 -l’élimination de la pauvreté- d’autant que ce sont les économies de pays africains qui enregistrent les plus forts taux de croissance dans le monde. 

Néanmoins, Mme Irène Ovonji-Odida, Présidente de l’« International Board of ActionAid International » et ancienne membre du Cabinet du Président de l’Ouganda, a attiré l’attention sur le « paradoxe africain »: si le continent a beaucoup de ressources, il a aussi beaucoup de pauvres.  Elle a invité les participants à s’interroger sur les raisons de cette pauvreté quand on sait que le continent dispose de 50% des réserves de diamant et 25% des réserves d’or.

La mobilisation des ressources nationales et la mise en place de politiques pour lutter contre les flux financiers illicites ont été présentées comme des solutions au problème par Mme Zeinab Bashir El Bakri, membre du groupe d’inspection de la Banque mondiale.  Elle a aussi suggéré que l’Afrique accorde une attention particulière aux situations de fragilité de conflit, et de violence en mettant l’accent sur la prévention. 

L’ESOCOC a aussi abordé, dans l’après-midi, la question de la « cohésion du système du Conseil économique et social ».  M. Elliot Harris, Directeur du Bureau du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) à New York, a fait observer que même si le cadre de coopération entre les organes subsidiaires de l’ECOSOC existe, l’action et les mesures prises restent sectaires, d’où le besoin de les intégrer entre elles.

La dernière table ronde a permis aux participants de débattre des rôles d’exécution, des attributions et des résultats de ce qu’on appelle l’« approche multipartite ».  Les panélistes ont constaté que cette approche était essentielle si l’on voulait arriver à éradiquer la pauvreté.  Elle doit se traduire par la coopération, la transparence et la reddition de comptes.

M. Thomas Gass a promis que le compte rendu succinct de ce segment sur l’intégration de l’ECOSOC serait publié ultérieurement.

DÉBAT SUR L’INTÉGRATION

Faire de l’éradication de la pauvreté un objectif faisant partie intégrante de toutes les politiques: quelles mesures prendre?

Table ronde sur le thème «Éliminer la pauvreté en Afrique »

Pour atteindre l’objectif de « ne laisser personne sur le côté », il faut réussir en Afrique où se concentre la plus importante population pauvre du monde, a prévenu d’emblée le modérateur de la table ronde, M. DAVID MEHDI HAMAM, Directeur du bureau du Conseiller spécial pour l’Afrique.  Les progrès socioéconomiques réalisés jusqu’à ce jour permettent d’espérer atteindre le premier objectif du Programme de développement durable à l’horizon 2030 -l’élimination de la pauvreté- d’autant que ce sont les économies de pays africains qui enregistrent les plus forts taux de croissance dans le monde.  Le continent regorge aussi d’une importante population de jeunes, a-t-il souligné en y voyant la possibilité d’exploiter le dividende démographique.

Un statisticien de l’Afrique du Sud, M. PALI LEHOHLA, a relevé les problèmes rencontrés en Afrique qui empêchent de jouir du dividende démographique, principalement le chômage et l’accès à l’eau, à l’électricité, aux soins et à l’éducation.  Il a également parlé de l’incapacité à élaborer et à exécuter des politiques intégrées au niveau des municipalités.  Pour remédier à ces problèmes, M. Lehohla a recommandé d’encourager le commerce en Afrique, notamment en harmonisant les tarifs douaniers et fiscaux.  C’est là que les données de la Banque africaine de développement sont utiles, a-t-il observé en soulignant que l’Afrique a besoin de planification et de statistiques, ainsi que de données très fiables.  Si l’Afrique veut mettre en œuvre l’Agenda 2063 « L’Afrique que nous voulons », elle doit intégrer les données statistiques dans ses plans de développement.  L’Afrique doit aussi devenir consommatrice de technologies, a-t-il recommandé.

Mme IRENE OVONJI-ODIDA, Présidente de l’« International Board of ActionAid International » et ancienne membre du Cabinet du Président de l’Ouganda, a rappelé que « les problèmes de l’Afrique exigent des solutions africaines ».  Elle a estimé en même temps qu’il fallait avoir « un point de vue exogène » car le système actuel ne fait que reproduire la situation dans laquelle se trouve l’Afrique.  En effet, a-t-elle noté, les paramètres montrent qu’il n’y a pas eu beaucoup de progrès en Afrique.  Le « paradoxe africain », c’est que l’Afrique a beaucoup de ressources, mais aussi beaucoup de pauvres.  « Pourquoi? » a demandé Mme Ovonji-Odida, alors que 50% de réserves de diamant et 25% des réserves d’or, pour ne parler que de cela, se trouvent en Afrique. 

Pour l’experte, il est important de changer la façon d’analyser la situation.  Elle a préféré réfléchir en termes d’« appauvrissement », plutôt que de « pauvreté », en s’interrogeant sur les pratiques qui conduisent à la situation actuelle.  De même, au lieu de parler de « richesses », elle a conseillé d’examiner le problème de l’« exploitation », ainsi que la « relation exploitants-exploités ».  Elle a remarqué que les déplacements de populations de certaines régions en conflit en Afrique sont voulus, pour permettre l’exploitation des richesses du sous-sol par les industries extractives, car celles-ci fournissent en armes les groupes armés.

Mme Ovonji-Odida a insisté pour qu’on parle d’appauvrissement et non de pauvreté, afin d’examiner au plus profond les causes de la situation actuelle.  « C’est une question d’idéologie », a-t-elle souligné en espérant que cela obligerait à revoir les approches actuelles et le rôle des gouvernements dans la situation.  Les mécanismes qui le permettent sont notamment le système des Nations Unies, les mécanismes de la CNUCED ou ceux de l’Union européenne, a-t-elle indiqué.  « Nous avons l’expertise juridique pour gérer les relations avec les industries extractives. »  Pour  changer de système, elle a souligné le rôle important de l’ONU en ce qu’elle peut faire en sorte que la fiscalité mondiale soit plus juste et ne génère plus de pauvreté.  En ce qui concerne la lutte contre les flux financiers illicites, les gouvernements africains doivent adopter et mettre en œuvre le rapport Mbeki, a-t-elle souhaité.  « Le problème africain n’est pas une question de ressources mais d’engagement », a conclu Mme Odida. 

La question des ressources est toutefois importante puisque Mme ZEINAB BASHIR EL BAKRI, Membre du groupe d’inspection de la Banque mondiale, a constaté « c’est le manque de ressources qui empêche de s’attaquer aux problèmes en Afrique ».  À son avis, il faut changer de paradigme en matière de ressources pour le développement et adopter de nouveaux modèles de développement plus durables.  Si les signes actuels sont encourageants, comme la croissance économique de 2,6% en 2017 en Afrique, les progrès sont inégalement répartis, a noté l’experte en signalant par exemple que les prix des produits de base sont restés faibles.  « Heureusement que certains pays tirent la situation vers le haut comme le Nigéria, l’Afrique du Sud et l’Angola. »

Parmi ses recommandations, Mme El Bakri a suggéré de renforcer la croissance actuelle en Afrique, d’investir dans les pauvres, de créer un environnement favorable au secteur privé et de réduire les risques.  Il faut également mettre en place des politiques favorables à une croissance durable, c’est-à-dire donner la priorité au secteur agricole.  Elle a aussi recommandé de renforcer la mobilisation des ressources nationales, de mettre en place des politiques pour lutter contre les flux financiers illicites, et d’accorder une attention particulière aux situations de fragilité, de conflit, et de violence en mettant l’accent sur la prévention.  

« Si l’Afrique n’est pas homogène, ses pays partagent toutefois quelques traits fondamentaux », a remarqué M. DONALD MMARI, Directeur exécutif de « Policy Research for Development (REPOA) ».  Pour arriver à éliminer la pauvreté en Afrique, il a plaidé principalement en faveur de la transformation rurale et agricole.  Il a conseillé d’améliorer la productivité des exploitations agricoles, de renforcer les marchés agricoles, de diversifier les économies rurales et d’encourager les petits exploitants ruraux à se lancer dans d’autres secteurs.  En ce qui concerne l’industrialisation, il faut donner la priorité à l’agro-industrie et à la création de valeur ajoutée, mettre en place des industries d’extractions et de minerais et réduire les écarts en matière d’infrastructures.

M. Mmari a également jugé important de transformer l’économie informelle en mettant en place des politiques et des mesures incitatives pour améliorer la productivité de ce secteur, en prenant des mesures pour réduire les risques, les coûts et éliminer les préjugés institutionnels contre le secteur informel.  Pour cela, il faut investir dans le développement des connaissances, simplifier les procédures administratives, donner de la voix aux entreprises informelles et mettre en place une gouvernance politique à l’écoute de ce secteur.

La discussion avec les délégations a tourné autour des manques à combler pour équiper l’Afrique sur son chemin vers le développement durable: il faut davantage de leadership, de transparence, de données, de planification nationale et d’intégration régionale.  Des systèmes fiscaux efficaces sont en outre importants, ainsi qu’un meilleur système financier, économique et commercial mondial.  La lutte contre les flux illicites a également été vue comme fondamentale pour faire avancer l’Afrique.

À ce propos, le représentant du Libéria a insisté sur l’importance du rapport Mbeki, en faisant valoir que les pays africains ont besoin de financer leur développement.  Mais même si ce rapport a fait l’objet d’une résolution à l’Assemblée générale, il ne pourra pas résoudre tous les problèmes à lui seul, a-t-il prévenu. 

Son homologue de la Norvège a indiqué que son pays et le Nigéria organisaient, demain, un événement au Siège de l’ONU sur la lutte contre les flux financiers illicites.  La lutte contre ce problème passe par un système fiscal performant, a-t-il observé, en souhaitant que les institutions financières internationales jouent un rôle dans le renforcement des capacités fiscales des pays.

Réagissant à ces remarques, l’ancienne Vice-Présidente de la Banque africaine de développement a expliqué que si les dirigeants africains ne tiennent pas compte du rapport Mbeki, c’est sans doute parce qu’ils n’y voient pas leur intérêt et qu’il y a des questions de corruption derrière cette attitude.

La Présidente de l’« International Board of ActionAid International a, elle aussi, regretté le manque de suivi dans la mise en œuvre de ce rapport après son adoption par les chefs d’État africains.  Elle a remarqué que les sociétés multinationales sont impliquées dans 60% des cas de flux financiers illicites.  C’est donc un problème international.  Elle a recommandé de veiller à l’instauration de règles de transparence, notamment dans les relations entre les pays.  Le représentant du Libéria a rappelé à cet égard la nécessité d’une bonne gouvernance et du respect de l’état de droit.

La délégation du Libéria a aussi diagnostiqué un manque de recours aux données produites par les chercheurs africains et par d’autres sources, lorsque les dirigeants africains élaborent leurs politiques.  Réduire la pauvreté prendra du temps, a averti le représentant pour qui la croissance actuelle est trop faible pour amorcer un véritable changement.  Il faut, a-t-il souhaité, trouver de nouveaux moyens pour le développement de l’Afrique pendant cette transition. 

Pour lui répondre sur la question des données, le statisticien de l’Afrique du Sud a déploré le fait que les Africains ne les utilisent pas pour chercher des solutions à leurs problèmes, alors qu’elles sont disponibles.  Pour inverser cette situation, nous avons besoin de leadership, a-t-il tranché.  « Il faut planifier le développement à partir des données. »  Il a rappelé que tous les pays développés avaient utilisé les données en les transformant en actions concrètes.  « Savoir des choses mais ne pas agir n’est pas savoir », a philosophé le statisticien en paraphrasant Bouddha.

Pour le représentant du Nigéria, toutefois, cette affirmation est « difficile à accepter dans le contexte africain ».  Ce délégué a souligné que chaque pays suit un rythme différent de développement.  Il a ajouté que le système financier, économique et commercial mondial ne favorise pas l’Afrique, souhaitant que l’ONU contribue à rectifier les déséquilibres entre les pays.  « C’est pour rétablir cette situation que l’ONU a été créée », a-t-il rappelé.    

L’Afrique doit passer par la planification du développement, tirer les leçons de ce qui a été fait dans d’autres pays, et utiliser les données existantes, a confirmé la Présidente de l’« International Board of ActionAid International, voulant au préalable que les Africains comprennent bien le contenu des programmes de développement.  Il faut être capable de voir ce qui a permis de faire évoluer un pays pour qu’il devienne une grande puissance économique, a-t-elle explicité. 

« Comment faire pour opérer un changement de mentalité en Afrique?» Répondant à cette question du Libéria, le Directeur exécutif de Policy Research for Development (REPOA) s’est tourné vers les dirigeants africains en souhaitant qu’ils s’approprient cette question.  En attendant, il faut lever certaines barrières comme les restrictions à la liberté de mouvement qui, contrairement aux mouvements des capitaux, est très limitée sur le continent.  Il est plus facile de se rendre en Europe que d’aller d’une capitale africaine à une autre, a-t-il constaté.

L’expert a aussi jugé important d’améliorer la compétitivité des entreprises africaines.  À cet égard, le statisticien sud-africain a suggéré de renforcer les blocs régionaux sur le plan économique, car les régions ont actuellement des vocations plutôt politiques.

En matière de leadership, le représentant de l’Irlande a demandé pourquoi un « dirigeant africain est resté au pouvoir depuis 1979 », exprimant la nécessité de mettre en place un système qui permette un renouvellement des dirigeants.  Il faut pour cela impliquer la jeunesse, a conseillé la Présidente de l’« International Board of ActionAid International » en appuyant ce qu’a dit le représentant de l’Algérie.

« Une main d’œuvre bon marché fait-elle partie des solutions pour éliminer la pauvreté? » a poursuivi le représentant de l’Irlande.  L’ancienne Vice-Présidente de la Banque africaine de développement a répondu que le recours à la main d’œuvre bon marché ne suffisait pas pour développer un pays. 

Le même représentant a voulu savoir pourquoi les pays africains n’étaient pas capables de créer des compagnies aériennes à bas coût pour résoudre les restrictions à la liberté de mouvement.  Le Directeur exécutif de REPOA a constaté une volonté de le faire, comme ce fut le cas en Tanzanie et au Rwanda.  Mais la masse critique de consommateurs de ce type de produit n’est pas encore là.  Il faudra attendre un peu de temps pour y parvenir, a-t-il prédit.  

Table ronde sur le thème « Assurer la cohésion du système du Conseil économique et social »

Au cours de cette discussion, les dirigeants de divers organes subsidiaires du Conseil économique et social (ECOSOC) ont présenté les résultats des travaux de leurs sessions annuelles qui étaient toutes orientées vers l’éradication de la pauvreté.

M. DAVID DONOGHUE, Représentant permanent de l’Irlande auprès des Nations Unies et Président de la soixante deuxième session de la Commission de la condition de la femme, a expliqué que la dernière session de la Commission, tenue en mars, avait permis d’examiner les questions liées à l’autonomisation économique des femmes.  Il a souligné que les participants avaient longuement évoqué la question de la « féminisation de la pauvreté ».  Ils sont convenus, au terme des débats, que l’éradication de la pauvreté passe par l’adoption de politiques visant à éliminer les inégalités entre les sexes afin de permettre la pleine implication des femmes dans le monde de l’emploi.  La Commission a également appelé au renforcement de la présence des femmes à tous les niveaux de prise de décision.  

M. PHILIPP CHARWATH, Représentant permanent adjoint de l’Autriche auprès des Nations Unies et Président de la cinquante-cinquième session de la Commission du développement social, a indiqué que la Commission avait misé, notamment, sur une bonne éducation pour tous et sur le plein emploi pour les jeunes.  De même, les travaux de cette année ont permis aux délégations de souligner la nécessité d’éviter le transfert intergénérationnel de la pauvreté.  La Commission, a-t-il ajouté, a aussi appelé à veiller à intégrer toutes les couches sociales dans les activités de développement, notamment les personnes handicapées.  La Commission avait amplement donné la parole à la société civile, souhaitant que cette tendance soit désormais de mise au niveau des pays.  

Mme CRISTINA POPESCU, Conseillère à la mission permanente de la Roumanie auprès des Nations Unies et Vice-Présidente de la cinquantième session de la Commission de la population et du développement, a expliqué que cette dernière session avait permis de constater une augmentation de la population en âge de travailler, ce qui pourrait permettre aux États d’en tirer profit grâce au dividende démographique.  Elle a expliqué que cet état de fait devrait conduire à une augmentation de la croissance, et partant la réduction de la pauvreté.  Différents pays dont la population est vieillissante ont de leur côté appelé au renforcement du système de retraite et de la sécurité sociale, afin de réduire la pauvreté des seniors.  Les participants ont également convenu de la nécessité de promouvoir l’emploi des jeunes.

Le dernier intervenant parmi les experts fut M. JOSÉ ANTONIO OCAMPO, Professeur de pratiques professionnelles dans les affaires internationales et publiques, enseignant à l’université Columbia de New York et Président du Comité des politiques de développement de l’ONU, un organe subsidiaire consultatif de l’ECOSOC.  Il a déclaré que les pays les moins avancés (PMA) ont besoin de faire certaines mutations afin de sortir de ladite catégorie.  D’abord, ils se doivent d’améliorer la gouvernance.  Ensuite, les dirigeants doivent y adopter des politiques qui favorisent des synergies entre les capacités de production et les bénéfices sociaux.  Ils doivent également instaurer des politiques financières et macroéconomiques qui permettent au pays de résister aux chocs externes.  Enfin, ils doivent tirer parti de facteurs extérieurs tels que le commerce international et la coopération fiscale internationale.

M. Ocampo a expliqué que parmi les PMA qui réussissent à sortir de la catégorie, restent vulnérables du fait de certaines lacunes structurelles qui risquent de leur faire perdre rapidement leurs gains économiques.  Il en a conclu que l’assistance internationale reste essentielle dans toutes ces économies, notamment à travers l’APD, du moins pendant un certain temps, afin que le pays sorti de la catégorie puisse aller au bout des mutations.

Au cours des échanges avec le public, la représentante de la Suisse a rappelé que toutes les commissions techniques de l’ECOSOC auront un rôle à jouer dans le cadre de la session du Forum politique de haut niveau sur le développement durable.  Elle a cependant voulu savoir comment le savoir-faire de chacune de ces commissions allait être pris en compte au cours des travaux du Forum politique.

Le Président de la cinquante-cinquième session de la Commission du développement social a rappelé que si de nombreux documents adoptés par les Nations Unies sont le résultat des délibérations de ces instances, il arrive souvent qu’on ne sache pas quoi en faire.  Un avis partagé par l’animateur de la table ronde, M. ELLIOT HARRIS, Directeur du Bureau du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) à New York, qui a fait observer que même si le cadre de coopération entre les organes subsidiaires de l’ECOSOC existe, l’action et les mesures prises restent sectaires, d’où le besoin de les intégrer.

Table ronde sur le thème « Approche multipartite: rôles d’exécution, attributions et résultats »

Mme ANDREA ORDÓÑEZ, Coordonnatrice de la recherche et des partenariats à Southern Voice, qui jouait le rôle de modératrice de la discussion, a jugé primordial de suivre une « approche multipartite » pour éliminer la pauvreté.  Dans ce cadre, « quel type de partenariat avons-nous besoin? » a-t-elle demandé pour lancer la discussion. 

Mme HUGUETTE LABELLE, Présidente du Conseil consultatif indépendant du Sénat du Canada, et membre du Conseil d’administration du Pacte mondial des Nations Unies, a expliqué que si l’aide publique au développement reste essentielle, elle suppose une confiance des partenaires dans le gouvernement aidé.  Elle a donc prôné une approche multipartite car elle permet la coopération, la transparence et la reddition de comptes.  Elle a pris l’exemple de la lutte contre les flux financiers illicites au Guatemala où, grâce au travail des partenaires nationaux et internationaux, des entités gouvernementales et des acteurs du secteur privé, des recommandations ont été élaborées pour peaufiner la lutte contre l’évasion fiscale, des taxes douanières notamment.  Si cette coopération a pu se faire, c’est parce que le pays était déterminé à agir, a-t-elle souligné.

Prenant ensuite le cas de l’Afrique, elle a parlé de la « Gates Foundation » qui fait la promotion d’une politique de lutte contre le tabac.  L’objectif est d’assurer un échange d’informations et une coopération avec l’Organisation mondiale de la Santé et des organisations de la société civile dans plusieurs pays d’Afrique, en vue de renforcer les capacités de ceux qui élaborent les politiques.  Un certain nombre de pays ont ainsi saisi les tribunaux pour défendre leurs citoyens contre l’industrie du tabac. 

Mme SHIRA KILCOYNE, Directrice des affaires gouvernementales et internationales chez GlaxoSmithKline (GSK), a souligné pour sa part le rôle essentiel que joue le secteur privé et appelé à lui faire davantage confiance.  Elle a indiqué que GSK, entreprise qui fournit des médicaments innovants, des vaccins et des services de santé à des millions de personnes, avait développé plusieurs dizaines de partenariats afin d’atteindre des populations qui n’ont pas accès à ces produits et services.  Elle a mentionné, par exemple, le partenariat avec l’ONG « Save the Children » qui permet de sauver un million d’enfants sur deux pays, la République démocratique du Congo et le Kenya.  Elle a encore cité le partenariat avec « Gates Foundation » sur un vaccin contre le paludisme.

Son entreprise, qui travaille sur l’éducation du personnel de santé, la vaccination et la santé néonatale, compte d’ailleurs associer d’autres parties prenantes.  La clef de la réussite, a-t-elle expliqué, c’est l’engagement de chaque partenaire.  Elle a également souligné l’importance de la « pérennisation », ce qui a conduit GSK à réinvestir 30% de ses bénéfices dans les pays aidés.  Cela constitue un engagement durable pour former notamment le personnel de santé.

En ce qui concerne les critères à vérifier pour tisser de bons partenariats, elle a cité « la volonté politique, le financement, le programme commun avec les partenaires, l’évaluation des activités qui se renforcent mutuellement et l’appropriation du projet par la hiérarchie ».   « On examine en ce moment ce que l’on va pouvoir faire collectivement pour promouvoir les objectifs de développement durable au sein du secteur privé et ainsi les rendre plus visibles. »

M. MANUEL F. MONTES, Conseiller principal au « South Center », a apporté le témoignage de son organisation qui apporte une aide technique à ses partenaires.  Si le secteur privé a la responsabilité d’assurer une libre concurrence, de respecter les règles du jeu et de faire des profits, il peut également entreprendre des actions sociales grâce à ses profits, a-t-il expliqué en parlant de « la responsabilité sociale du secteur privé ».  Celui-ci doit assumer son rôle économique et social, par exemple en payant ses impôts ou en achetant des produits locaux.  Dans les pays en développement, ce sont les petits agriculteurs qui constituent le secteur privé, un secteur qui doit être aidé si l’on veut que les investissements combattent la pauvreté. 

Après ces interventions, la modératrice a posé la question suivante: « Que doivent faire l’ECOSOC et le système de développement des Nations Unies afin d’encourager les partenariats et les multiplier? »

La première chose à faire, a répondu la Présidente du Conseil consultatif indépendant du Sénat canadien, c’est de réunir toutes les parties prenantes autour d’une table pour discuter des actions à mener en se basant sur les questions d’actualités.  Elle a aussi suggéré de diffuser les bons exemples de partenariat de l’ECOSOC pour que d’autres s’en inspirent. 

Le système des Nations Unies est bien placé pour promouvoir les objectifs de développement durable, a fait remarquer la Directrice des affaires gouvernementales et internationales de GlaxoSmithKline.  « C’est un rôle que l’ONU peut jouer et doit jouer davantage. »  Mais le Conseiller principal au « South Center » a fait remarquer le budget de l’ONU n’avait pas beaucoup augmenté depuis 20 ans, ce qui fait que la marge de manœuvre est très faible.  « Si l’on n’a pas de ressources, on ne peut pas faire des projections à long terme et il faut toujours se poser la question de ressources », a-t-il constaté.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil économique et social examine les mesures favorables à une approche intégrée d’élimination de la pauvreté

Session de 2017, Débat consacré aux questions d’intégration,
25e & 26e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6830

Le Conseil économique et social examine les mesures favorables à une approche intégrée d’élimination de la pauvreté

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a poursuivi, aujourd’hui, son débat consacré aux questions d’intégration, l’occasion pour les États Membres de présenter leurs expériences nationales, les leçons à partager et les défis rencontrés dans la lutte contre la pauvreté.

Les travaux de cette deuxième journée du segment d’intégration dont le thème est « Faire de l’éradication de la pauvreté un objectif faisant partie intégrante de toutes les politiques: quelles mesures prendre? », étaient articulés autour de deux tables rondes consacrées, respectivement à « L’expérience de pays », et aux « instruments de politiques en faveur d’une approche intégrée de l’élimination de la pauvreté ».

Au cours de la première table ronde, le représentant des Maldives, au nom de l’Alliance des petits États insulaires, a notamment fait part des obstacles rencontrés par ces pays en raison, notamment, du manque de financement pour les nouvelles initiatives, des taux d’intérêt prohibitifs des prêts qui leur sont accordés, sans oublier les risques de catastrophe naturelle et l’éloignement géographique.  M. Ahmed Sareer a également insisté sur l’importance que revêt la gestion durable des océans pour l’économie de son pays dont les principaux moteurs sont la pêche et le tourisme.

Les délégations ont également entendu des exposés sur les succès rencontrés au Pérou qui a enregistré une baisse de 35% de la pauvreté ces 10 dernières années, nonobstant la persistance de certains problèmes sanitaires, 40% de la population souffrant d’anémie.

Ancien Vice-Gouverneur de la Banque centrale du Kenya, M. Edward Sambili, a de son côté cité les initiatives lancées pour combattre les dimensions sociales de la pauvreté, moyennant, notamment, la création de systèmes de protection sociale destinés aux personnes les plus marginalisées.

Au cours de la table ronde de l’après-midi, la Directrice générale de Amwal Financial Investments d’Égypte, Mme Hanaa Elhelaly, a indiqué que l’Égypte s’était inspirée du modèle brésilien pour lancer un programme de transfert de fonds en faveur des plus démunis et espérer ainsi éliminer la pauvreté qui touche un tiers de la population du pays.

Le Président de Rural Support Programmes Network, du Pakistan, M. Shoaib Sultan-Khan, a toutefois souligné que la meilleure stratégie de réduction de la pauvreté exige d’impliquer les populations bénéficiaires elles-mêmes, invitant l’ECOSOC à suggérer une telle approche participative et d’appropriation aux États, au lieu d’essayer « en vain » d’inventer de nouveau la roue.

Ce dernier a notamment prôné la création d’un mécanisme hybride doté à la fois des ressources financières du gouvernement et de la flexibilité de terrain d’une ONG.

Le Directeur de l’initiative Global Pulse, M. Robert Kirkpatrick, a par ailleurs plaidé pour une meilleure utilisation des mégadonnées dans le cadre des initiatives d’appui au développement durable.

Au cours du débat général qui a suivi, le représentant du Zimbabwe a en outre appelé à accorder une plus-value aux ressources naturelles et aux produits agricoles dont regorgent les pays en développement, faisant notamment observer que « tant que ceux-ci resteront des plantations et des carrières de mine », leurs économies seront toujours tributaires de la fluctuation des prix des matières premières. 

Le thème principal de la session 2017 du Conseil est « Éradiquer la pauvreté sous toutes ses formes et dimensions en favorisant le développement durable, en élargissant les opportunités et en abordant les défis connexes ». 

L’ECOSOC poursuivra son segment d’intégration, demain, mercredi 10 mai, à partir de 10 heures.

FAIRE DE L’ÉRADICATION DE LA PAUVRETÉ UN OBJECTIF FAISANT PARTIE INTÉGRANTE DE TOUTES LES POLITIQUES: QUELLES MESURES PRENDRE?

Mme ELIZABETH THOMPSON, modératrice, ancienne Ministre et Sénatrice de la Barbade, et ancienne Sous-Secrétaire générale et Coordonnatrice exécutive de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio +20), a précisé que cette table ronde était une occasion pour les participants de mettre l’accent sur les expériences menées dans chaque pays pour éradiquer la pauvreté. 

Table ronde interactive: L’expérience de pays

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires, M. AHMED SAREER (Maldives), a indiqué que son groupe s’est consacré à assurer la cohérence entre le Programme 2030 et les Orientations de Samoa, non seulement dans les moyens de mise en œuvre mais aussi le suivi et l’examen dans le but d’alléger le fardeau y afférent.  Il a ensuite fait observer qu’il existe de nombreux moyens capables d’aider à réaliser l’intégration des trois piliers du développement durable dans l’élaboration des politiques.  La première étape est l’amélioration de la coordination et de la cohérence à différents niveaux de la gouvernance, et la nécessité d’aller au-delà des cloisonnements pour parvenir à un alignement politique.  Les défis économiques, sociaux et environnementaux ne devraient pas être examinés indépendamment mais comme des questions transversales, a-t-il notamment indiqué.  Il a également jugé nécessaire de collecter et d’appliquer des données de référence pertinentes afin d’intégrer la durabilité dans les politiques et programmes. 

Le représentant a toutefois constaté que le manque de financement, pour de nouvelles initiatives, reste un obstacle.  Attirer l’investissement privé fait poser des questions aux PEID parce que notre petite taille et l’éloignement sont des défis lorsqu’il s’agit de créer une économie d’échelle, a-t-il indiqué.  Les catastrophes naturelles multiplient également les coûts, mais en dépit de ces problèmes, les PEID sont en train d’élaborer des encouragements à l’investissement.  Le financement public international reste un élément nécessaire pour toute conversation autour de l’élaboration et la mise en œuvre des politiques pour les objectifs de développement durable, a-t-il indiqué.

Poursuivant, M. Sareer a souligné que pour les PEID et les Maldives, l’océan demeure la principale source disponible pour éradiquer la pauvreté, et assurer les moyens de subsistance et le développement économique.  Il a indiqué que l’économie des Maldives dépend du tourisme et de la pêche, ce qui requiert un océan sain.  Afin de réaliser le développement économique et social dans le cadre de cette ressource limitée, a-t-il enchainé, l’éradication de la pauvreté va de pair avec l’utilisation et la conservation durables de l’océan et de la mer, ainsi que la mise en œuvre de programmes d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques pour prévenir les dégâts provoqués par les tempêtes, la montée des eaux et le réchauffement des océans.  Le représentant a insisté sur l’importance de la pêche durable appelant également à accorder une attention particulière à la protection des écosystèmes fragiles et à la promotion de l’écotourisme et de politiques environnementales.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déclaré que son pays est un exemple de réussite dans la lutte contre la pauvreté.  Si en 2004, 60% de la population était pauvre, en 2014, le taux a baissé à 24%, avec moins de 5% de population vivant dans l’extrême pauvreté, et en 2017, le pays compte moins de 20% de pauvres et moins de 3% de la population vit dans l’extrême pauvreté.  En 10 ans, le pays a enregistré 35% de baisse de la pauvreté, s’est-il félicité, soulignant toutefois que la situation est contrastée car la pauvreté est restée prégnante en milieu rural. 

Le représentant a expliqué que ces résultats sont les conséquences de la politique macroéconomique menée par le Gouvernement qui vise la stabilité et la croissance économique.  Un accord national a été conclu avec la société civile pour fixer des objectifs très précis pour réduire la pauvreté, et l’administration a déployé de nombreux efforts pour atteindre les zones rurales les plus reculées.  Beaucoup d’investissement dans l’infrastructure et l’assainissement ont été réalisés et la population rurale a été encouragée à accéder au commerce et aux échanges économiques pour l’aider à augmenter ses revenus.  En outre, des politiques spécifiques visant différents groupes d’âges, notamment les enfants et les personnes âgées, ont été menées, permettant notamment de créer des places dans les garderies et de fournir des retraites aux personnes de plus de 65 ans.  La « pauvreté monétaire » s’est améliorée.  Cependant, des problèmes persistent sur le plan sanitaire, 40% de la population souffrant d’anémie.

M. Meza-Cuadra a estimé que la solution à ces problèmes est de mener une politique d’intégration des populations touchées, notamment dans la région andine.  Des politiques d’intégration financière ont d’ores et déjà été lancées, notamment un système de paiement en ligne qui permet aux gens de recevoir et d’envoyer de l’argent par téléphone, même dans les régions les plus reculées.  La croissance et la stabilité macroéconomiques assorties de programmes très spécifiques visant des groupes très précis de la population sont la clef, a-t-il fait observer, mais on craint néanmoins le fait que 45% de la population risque de retomber dans la pauvreté.  

M. MISKA SIMANAINEN, Chercheur à l’Institut de la sécurité sociale (Kela), de la Finlande, a parlé d’un programme pilote lancé par son pays pour permettre aux chômeurs de toucher un revenu de base mensuel pendant deux ans, quel que soit le succès rencontré dans leur recherche de travail.  Il a expliqué que l’objectif principal était de connaître l’effet des incitations monétaires au travail sur le taux d’emploi, et que cette initiative ne devait pas être considérée comme une politique d’élimination de la pauvreté.  Il a précisé que l’introduction d’un revenu de base de 560 euros ne modifierait pas la distribution de revenus, le groupe cible étant limité. 

M. Simanainen a indiqué que cette expérience a permis de mieux connaître les limites constitutionnelles sur ce qui peut être expérimenté, notant par ailleurs que la conception d’un traitement est aussi difficile que la création d’une véritable politique, les essais nécessitant du temps et des ressources.  Il a aussi estimé que les réformes de systèmes à grande échelle peuvent être trop difficiles à expérimenter.

M. PAULO LUIZ MOREAUX LAVIGNE ESTEVES, Superviseur général du Centre politique de « BRICS », a indiqué qu’en 2012, le Brésil avait inscrit près de 14 millions de familles dans un programme de transferts conditionnels de fonds qui a eu un impact positif sur leur santé, leur éducation et l’égalité entre les sexes.  Il a imputé ce succès à des conditions sociopolitiques favorables sur le terrain, ainsi qu’à l’existence de capacités institutionnelles et d’une base de données fiables sur les familles vivant dans la pauvreté.  Dans le même ordre d’idées, des goulets d’étranglement ont pu être surmontés avec l’aide des Nations Unies.  En outre, le Gouvernement brésilien a uni ses forces avec les Nations Unies pour créer des centres de promotion de cette politique à savoir le Centre international de lutte contre la pauvreté et le Centre d’excellence contre la faim.  L’objectif était de surveiller et d’évaluer l’impact de la politique.

Quelle est l’importance du financement du développement et du financement innovant pour les petits États insulaires en développement (PEID)? a demandé Mme THOMSON, modératrice, au représentant de l’Alliance des petits États insulaires.  Ce dernier a répondu que le principal obstacle pour les PEID est d’être classifié dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire.  En effet, même si le produit national brut est plus élevé, la structure de l’économie reste la même, le niveau d’exportation et les autres sources financières demeurent limités, et les pays peinent à sortir de cette catégorie.  Il y a aussi le problème posé par le système financier international qui fait que nos pays n’ont plus accès à des prêts à des taux favorables, auquel s’ajoute la baisse constante de l’aide publique au développement pour les PEID.  En outre, la mobilisation des ressources au niveau national est difficile, tandis que l’élargissement de l’assiette fiscale est presque impossible du fait de la taille modeste de ces pays.  Il a toutefois estimé que le financement vert issu des Orientations de Samoa représente une approche idéale pour les PEID.

Interrogé sur l’importance de l’inclusion pour éliminer la pauvreté, en particulier chez les femmes, les populations autochtones et les jeunes, le représentant du Pérou a indiqué que l’inclusion est la grande différence entre les objectifs du Millénaire pour le développement et les objectifs de développement durable.  L’idée de ne laisser personne de côté est présente dans toutes les cibles, et cela nous aide à concentrer sur les groupes vulnérables, a-t-il indiqué.  Au Pérou, on veille à ce que les objectifs de développement durable soient appliqués depuis le programme de développement de l’État jusqu’au niveau local ou de district pour réduire, notamment, la malnutrition.  Il a aussi parlé du lancement d’un programme d’inclusion financière qui utilise les téléphones portables, et qui vise à toucher cinq millions de personnes d’ici à cinq ans.  Le Pérou tient aussi à ce que les populations locales bénéficient de la présence d’industrie extractive sur leurs territoires.

À son tour, le Vice-Gouverneur de la Banque centrale du Kenya a été prié de dire quels sont les mécanismes à utiliser pour amener les experts financiers et économiques à tenir compte des facteurs sociaux et environnementaux pour améliorer les résultats obtenus en matière d’éradication de la pauvreté.  Il a expliqué que c’est toujours le Gouvernement qui trace la voie et que pour ce qui est des objectifs de développement durable, le Kenya dispose d’une plateforme qui réunit les Nations Unies, le Gouvernement et la société civile et qui privilégie une vision à long terme.  Il a souligné que la question environnementale implique aussi la question énergétique et que son pays dispose d’un programme de promotion de l’énergie solaire.  Le Gouvernement prévoit aussi le lancement d’un plan énergétique quinquennal à moyen terme.  Il a jugé nécessaire d’assurer la cohérence macroéconomique en alignant les dépenses aux recettes.  Il a également évoqué la mise en place d’un « contrat de cohérence » qui engage les ministères à expliquer et montrer leurs initiatives. 

La représentante de la Norvège a ensuite demandé au Chercheur à l’Institut de la sécurité sociale (Kela) des précisions sur la pertinence et l’impact du revenu de base.  Ce dernier a expliqué que l’objectif de l’expérience est de mieux connaître l’impact des mesures d’incitations monétaires sur le taux d’emploi, évoquant de « bons résultats » pour les groupes ciblés.  Il a indiqué qu’il n’y a pas de conditions pour en bénéficier, et qu’il est de ce fait difficile de faire la différence entre les différents mécanismes d’incitation.  Le représentant du Pakistan et Président de la table ronde en a profité pour souligner l’importance du financement innovant, citant comme les transferts de fonds et l’inclusion financière au Brésil.  Il a indiqué qu’au Pakistan, les transferts d’argent sont destinés aux femmes et a appelé les autres pays à s’inspirer de ce modèle.  Le représentant du Brésil a précisé que les transferts en espèces par téléphone n’étaient pas des microcrédits.  Des conditions doivent être remplies pour en bénéficier, comme l’obligation, pour les familles bénéficiaires, de  scolariser leurs enfants ou de se rendre dans les dispensaires pour se soigner ou se faire vacciner.  Les bénéficiaires s’engagent aussi à se former et à renforcer leurs capacités afin de ne plus dépendre, à l’avenir, de ces programmes de transferts de fonds. 

Quelles sont les concessions à faire dans la réalisation des objectifs de développement durable?  Dans quelle mesure peut-on combler les failles de la mise en œuvre au niveau national?  Que peut faire l’ECOSOC pour aider les pays à réaliser les objectifs de développement durable? a lancé à son tour la modératrice.  À cela, l’ancien Vice-Gouverneur de la Banque centrale du Kenya s’est inquiété du manque de ressources pour réaliser les objectifs de développement durable.  Donc il faut établir des priorités en commençant par les mesures les plus efficaces, à savoir les politiques sociales, suivies de l’emploi et de l’environnement. 

Le Superviseur général du Centre politique de groupe « BRICS » s’est étonné de l’absence d’études sur les conséquences, pour le développement, de l’investissement privé.  Il a estimé que les Nations Unies doivent faire office de pont et aider au partage des expériences entre les pays.  La coopération fiscale internationale est également très importante, a-t-il indiqué, appuyé par le représentant de l’Équateur.  Le Chercheur à l’Institut de la sécurité sociale (Kela), a de son côté souligné qu’il faut avoir une idée bien précise avant d’élaborer et concevoir des politiques.  L’expérience du revenu de base en Finlande devrait pouvoir aider à répondre à d’autres questions dont on ne connaît pas encore l’envergure, mais dans l’immédiat, l’important est de bien mener l’expérience actuelle.  Il a ensuite précisé que les données recueillies ont été partagées avec des experts.

« Si la croissance économique s’accompagne de politique de distribution, alors toute la population peut s’en sortir et les plus vulnérables pourront bénéficier de la croissance », a interjeté le représentant du Pérou.  Il a annoncé que les pays d’Amérique latine se réuniront en juillet prochain au Mexique pour débattre de la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Le représentant des Maldives a appelé, de son côté, à éviter les cloisonnements dans les approches et de mettre l’accent sur les points de convergence entre les programmes et les politiques.  Le système de développement des Nations Unies doit travailler de manière unie, a conclu le représentant.

Table ronde interactive: Instruments de politiques en faveur d’une approche intégrée de l’élimination de la pauvreté

Mme BENTE ANGELL-HANSEN, Représentante permanente de la Norvège auprès des Nations Unies à Vienne et Présidente de la soixantième session de la Commission des stupéfiants, a souligné qu’il existe un lien étroit entre la pauvreté et la consommation des stupéfiants.  Elle a indiqué que les fonds issus du crime et du commerce des stupéfiants constituent des obstacles au développement, et que les questions d’insécurité sapent les efforts de développement, y compris les efforts en vue d’éradiquer la pauvreté.

Elle a déploré la stigmatisation dont sont victimes les femmes toxicomanes qui sont souvent laissées à elles-mêmes, et qui, parfois, refusent de demander de l’aide de peur de perdre leurs enfants.  Elle a regretté que la Commission des stupéfiants ne dispose pas de suffisamment de fonds pour mener à bien ses activités à travers le monde.

M. ROBERT KIRKPATRICK, Directeur de l’initiative Global Pulse, a indiqué que  Global Pulse est une initiative de l’ONU qui vise à favoriser l’utilisation des mégadonnées, afin qu’elles soient exploitées de manière sûre et responsable.  Sa mission est d’accélérer le développement et l’adoption, à grande échelle, d’une innovation notable en matière de données afin d’appuyer le développement durable et l’action humanitaire.

Il a présenté, en guise d’exemple, une étude menée à Jakarta, en Indonésie, sur les déplacements de la population urbaine, précisant qu’une telle collecte de données permet d’établir des schémas sur les déplacements des populations.  Il a expliqué que la coopération avec l’industrie du secteur de la téléphonie mobile est utile dans ce cadre et que Global Pulse travaille avec des données anonymes. Il a toutefois signalé que ces mégadonnées se retrouvent parfois dans les mains d’acteurs mal intentionnés.  Le représentant a ensuite proposé que les gouvernements puissent utiliser ces données de manière efficiente pour la cause du développement. 

M. Kirkpatrick a cité d’autres études de Global Pulse, admettant que le problème réside parfois dans la manipulation dont les données peuvent être l’objet.  Il a aussi souligné que la non utilisation de ces données est également préjudiciable aux efforts de développement.  Dans ce contexte, il a plaidé pour plus d’investissements nationaux en faveur du renforcement des capacités institutionnelles en matière de collecte et d’exploitation des données, et cela sans préjudice pour la vie privée.

Mme HANAA ELHELALY, ancienne Directrice générale du Fonds social de développement et Directrice générale de Amwal Financial Investments d’Égypte, a relevé qu’un tiers de la population égyptienne est considérée comme pauvre.  Après le Printemps arabe que le pays a connu en 2011, beaucoup de gens ont perdu leur emploi et les besoins élémentaires de vie ne pouvaient plus être comblés.  Pourtant, cette révolution sociale appelait à la justice pour tous, car l’essor de l’économie ne profitait pas aux plus démunis, a-t-elle indiqué.

Mme Elhelaly a dit que le Gouvernement égyptien procède aujourd’hui à des transferts de fonds en faveur des plus démunis, selon un modèle semblable à celui qui a connu du succès au Brésil.  Un autre programme vise à prendre en charge les personnes âgées et les handicapés en leur offrant des conditions de vie plus décentes.  Les filets de sécurité sociale sont importants pour aider les pauvres, a-t-elle relevé, tout en appelant le secteur privé à s’investir davantage dans la responsabilité sociale des entreprises afin d’appuyer les initiatives sociales à l’intention des plus démunis. 

M. SHOAIB SULTAN-KHAN, Président de Rural Support Programmes Network, une organisation non gouvernementale œuvrant au développement rural au Pakistan, a rappelé que 20% de la population mondiale consomme 80% des ressources, alors que les 20% plus pauvres de la planète ne représentent que 1,3% de la consommation mondiale.

De par son expérience dans le domaine du développement, notamment dans le monde rural en Asie, il a expliqué que la meilleure stratégie de réduction de la pauvreté exige d’impliquer les populations bénéficiaires elles-mêmes.  Pour cela, il a argué qu’il faille mettre sur pied un mécanisme hybride entre l’administration classique et le mode de fonctionnement des organisations non gouvernementales (ONG).  Ainsi, une telle structure, dotée à la fois des ressources financières du gouvernement et de la flexibilité de terrain d’une ONG pourrait appuyer des programmes sociaux en zone rurale notamment.

Il a évoqué un certain nombre de projets ayant respecté ce principe en Inde, au Bangladesh et au Pakistan, invitant le Conseil économique et social (ECOSOC) à suggérer une telle approche participative et d’appropriation aux États, au lieu d’essayer « en vain » d’inventer de nouveau la roue.

Après ces exposés, l’animateur, M. SANJAY REDDY, Professeur d’économie à la New School for Social Research de New York, a rappelé que de nombreuses approches ont déjà été mises à contribution afin d’éliminer la pauvreté dans le monde. 

Justement, parmi ces approches, a rappelé le Président de séance, M. NABEEL MUNIR (Pakistan), les transferts de fonds aux pauvres et les microfinancements sont souvent opposés.

Mme Elhelaly de Amwal Financial Investments d’Égypte a expliqué que les transferts de fonds ciblent le plus souvent les femmes des milieux ruraux afin de leur permettre de subvenir à des besoins élémentaires tels que les soins de santé, de nutrition et d’éducation.  À contrario, les microfinancements ciblent pour leur part les femmes, les petites et moyennes entreprises (PME), les jeunes diplômés, entre autres.  Ces microfinancements viennent ainsi dynamiser des activités génératrices de revenus en apportant aux pauvres des prêts qui leur sont inaccessibles dans des banques classiques.

En fin de la table ronde, une courte vidéo des activités de Amwal Financial Investments d’Égypte a été projetée.

Débat général

M. JIEYI LIU (Chine) a appelé à réduire la pauvreté en améliorant notamment la coopération Nord-Sud et la coopération Sud-Sud.  Il a invité les pays développés à respecter leurs engagements en matière d’aide publique au développement (APD).  Il faut que chaque pays puisse choisir son mode de développement en fonction de ses besoins spécifiques, a—t-il plaidé tout en appelant à un système financier international plus transparent. 

Le représentant a aussi parlé des politiques misent en œuvre par son gouvernement pour réduire la pauvreté.  Il s’est félicité de leurs résultats qui ont notamment permis de réduire de 166 millions à 43 millions le nombre de pauvres vivant en zones rurales.  Le Gouvernement aide également à la création d’emplois, à la réinstallation des travailleurs migrants et offre des prêts à taux zéro à certaines entreprises.  La Chine apporte aussi son soutien aux pays les moins avancés (PMA) dans le cadre de la coopération Sud-Sud, a-t-il indiqué. 

M. NONTAWAT CHANDRTRI (Thaïlande) a déclaré que son gouvernement avait intégré l'élimination de la pauvreté dans sa stratégie nationale de 20 ans et ses plans nationaux de développement social et économique.  Les stratégies et les plans sont traduits dans les politiques et programmes intégrés de chaque ministère afin d’appuyer le développement dans ses trois dimensions.  Ces politiques et programmes vont de l’octroi d’aide financière à des subventions aux pauvres et de la création d’emplois, à l’appui des services sociaux comme le logement, l’éducation, et la couverture sanitaire universelle, en accordant une attention particulière aux plus vulnérables, notamment les personnes âgées et les personnes handicapées.  En conséquence, le taux de personnes vivant sous le seuil national de pauvreté est passé de 57% en 1990 à 10,5% en 2014.

La Thaïlande est également convaincue que l’élimination de la pauvreté nécessite aussi un changement de mentalité.  Pendant plus de 40 ans, le Gouvernement a mis en œuvre une approche axée sur l’être humain dans le cadre de la « philosophie de la suffisance économique ».  Elle enseigne comment transformer son mode de pensée et sortir du cercle vicieux de la pauvreté en utilisant les principes de la modération, de la résilience et de la raison, guidés par la connaissance et les considérations morales.  Le représentant a ensuite annoncé que son gouvernement présentera son examen national volontaire en juillet.

M. VUSUMUZI NTONGA (Zimbabwe) a indiqué que son pays a mis sur pied un programme national pour la transformation socioéconomique.  Il a relevé que le premier objectif de développement durable, qui est d’éliminer la pauvreté, ne peut être réalisé sans que les autres ne le soient également.  Il a estimé que tant que les pays en développement resteront des plantations et des carrières de mine, alors leurs économies seront toujours tributaires de la fluctuation des prix des matières premières.  Il a donc appelé à transformer ces économies en accordant une plus-value aux riches ressources naturelles et aux produits agricoles dont ils regorgent.

M. HABIB MIKAYILLI (Azerbaïdjan) a indiqué que son pays s’était récemment engagé à aider financièrement quatre pays à sortir de la pauvreté.  Après l’Examen quadriennal complet des politiques adopté, l’an dernier, à l’Assemblée générale, pour aider le système de développement des Nations Unies à s’aligner sur les efforts menés au plan national, il a dit attendre avec intérêt le travail d’alignement de l’Assemblée générale sur le Programme 2030.

En Azerbaïdjan, la politique économique est destinée à améliorer les conditions socioéconomiques dans lesquelles vivent les citoyens, a poursuivi le représentant.  Il a expliqué que son pays a intégré les objectifs de développement durable dans ses plans et stratégies, garantissant ainsi l’appropriation nationale de la mise en œuvre du Programme 2030.  En outre, un Conseil national de coordination sur le développement durable a été créé.

Le représentant a ensuite mentionné les efforts entrepris pour diversifier l’économie, créer des parcs industriels dans les régions, augmenter les dépenses publiques pour l’agriculture et les activités économiques rurales.  Il s’attache également à créer des emplois durables et décents, encourage l’entreprenariat, alloue des prêts préférentiels aux entrepreneures, fournit une protection sociale aux familles à bas revenu et investit dans l’éducation et la santé.

Ainsi, au cours des 10 dernières années, les taux de pauvreté et de chômage ont été réduits de 5%, tandis que 3 000 écoles, 600 hôpitaux et centres de soin ont été construits ou rénovés.  Le pays accorde aussi une attention particulière aux personnes déplacées, dont 250 000 qui ont déjà reçu un logement.  L’Azerbaïdjan sera l’un des pays à présenter un rapport national volontaire au Forum politique de haut niveau sur le développement durable, en juillet 2017.

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