En cours au Siège de l'ONU

Session de 2017, Débat consacré aux questions d’intégration,
25e & 26e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6830

Le Conseil économique et social examine les mesures favorables à une approche intégrée d’élimination de la pauvreté

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a poursuivi, aujourd’hui, son débat consacré aux questions d’intégration, l’occasion pour les États Membres de présenter leurs expériences nationales, les leçons à partager et les défis rencontrés dans la lutte contre la pauvreté.

Les travaux de cette deuxième journée du segment d’intégration dont le thème est « Faire de l’éradication de la pauvreté un objectif faisant partie intégrante de toutes les politiques: quelles mesures prendre? », étaient articulés autour de deux tables rondes consacrées, respectivement à « L’expérience de pays », et aux « instruments de politiques en faveur d’une approche intégrée de l’élimination de la pauvreté ».

Au cours de la première table ronde, le représentant des Maldives, au nom de l’Alliance des petits États insulaires, a notamment fait part des obstacles rencontrés par ces pays en raison, notamment, du manque de financement pour les nouvelles initiatives, des taux d’intérêt prohibitifs des prêts qui leur sont accordés, sans oublier les risques de catastrophe naturelle et l’éloignement géographique.  M. Ahmed Sareer a également insisté sur l’importance que revêt la gestion durable des océans pour l’économie de son pays dont les principaux moteurs sont la pêche et le tourisme.

Les délégations ont également entendu des exposés sur les succès rencontrés au Pérou qui a enregistré une baisse de 35% de la pauvreté ces 10 dernières années, nonobstant la persistance de certains problèmes sanitaires, 40% de la population souffrant d’anémie.

Ancien Vice-Gouverneur de la Banque centrale du Kenya, M. Edward Sambili, a de son côté cité les initiatives lancées pour combattre les dimensions sociales de la pauvreté, moyennant, notamment, la création de systèmes de protection sociale destinés aux personnes les plus marginalisées.

Au cours de la table ronde de l’après-midi, la Directrice générale de Amwal Financial Investments d’Égypte, Mme Hanaa Elhelaly, a indiqué que l’Égypte s’était inspirée du modèle brésilien pour lancer un programme de transfert de fonds en faveur des plus démunis et espérer ainsi éliminer la pauvreté qui touche un tiers de la population du pays.

Le Président de Rural Support Programmes Network, du Pakistan, M. Shoaib Sultan-Khan, a toutefois souligné que la meilleure stratégie de réduction de la pauvreté exige d’impliquer les populations bénéficiaires elles-mêmes, invitant l’ECOSOC à suggérer une telle approche participative et d’appropriation aux États, au lieu d’essayer « en vain » d’inventer de nouveau la roue.

Ce dernier a notamment prôné la création d’un mécanisme hybride doté à la fois des ressources financières du gouvernement et de la flexibilité de terrain d’une ONG.

Le Directeur de l’initiative Global Pulse, M. Robert Kirkpatrick, a par ailleurs plaidé pour une meilleure utilisation des mégadonnées dans le cadre des initiatives d’appui au développement durable.

Au cours du débat général qui a suivi, le représentant du Zimbabwe a en outre appelé à accorder une plus-value aux ressources naturelles et aux produits agricoles dont regorgent les pays en développement, faisant notamment observer que « tant que ceux-ci resteront des plantations et des carrières de mine », leurs économies seront toujours tributaires de la fluctuation des prix des matières premières. 

Le thème principal de la session 2017 du Conseil est « Éradiquer la pauvreté sous toutes ses formes et dimensions en favorisant le développement durable, en élargissant les opportunités et en abordant les défis connexes ». 

L’ECOSOC poursuivra son segment d’intégration, demain, mercredi 10 mai, à partir de 10 heures.

FAIRE DE L’ÉRADICATION DE LA PAUVRETÉ UN OBJECTIF FAISANT PARTIE INTÉGRANTE DE TOUTES LES POLITIQUES: QUELLES MESURES PRENDRE?

Mme ELIZABETH THOMPSON, modératrice, ancienne Ministre et Sénatrice de la Barbade, et ancienne Sous-Secrétaire générale et Coordonnatrice exécutive de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio +20), a précisé que cette table ronde était une occasion pour les participants de mettre l’accent sur les expériences menées dans chaque pays pour éradiquer la pauvreté. 

Table ronde interactive: L’expérience de pays

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires, M. AHMED SAREER (Maldives), a indiqué que son groupe s’est consacré à assurer la cohérence entre le Programme 2030 et les Orientations de Samoa, non seulement dans les moyens de mise en œuvre mais aussi le suivi et l’examen dans le but d’alléger le fardeau y afférent.  Il a ensuite fait observer qu’il existe de nombreux moyens capables d’aider à réaliser l’intégration des trois piliers du développement durable dans l’élaboration des politiques.  La première étape est l’amélioration de la coordination et de la cohérence à différents niveaux de la gouvernance, et la nécessité d’aller au-delà des cloisonnements pour parvenir à un alignement politique.  Les défis économiques, sociaux et environnementaux ne devraient pas être examinés indépendamment mais comme des questions transversales, a-t-il notamment indiqué.  Il a également jugé nécessaire de collecter et d’appliquer des données de référence pertinentes afin d’intégrer la durabilité dans les politiques et programmes. 

Le représentant a toutefois constaté que le manque de financement, pour de nouvelles initiatives, reste un obstacle.  Attirer l’investissement privé fait poser des questions aux PEID parce que notre petite taille et l’éloignement sont des défis lorsqu’il s’agit de créer une économie d’échelle, a-t-il indiqué.  Les catastrophes naturelles multiplient également les coûts, mais en dépit de ces problèmes, les PEID sont en train d’élaborer des encouragements à l’investissement.  Le financement public international reste un élément nécessaire pour toute conversation autour de l’élaboration et la mise en œuvre des politiques pour les objectifs de développement durable, a-t-il indiqué.

Poursuivant, M. Sareer a souligné que pour les PEID et les Maldives, l’océan demeure la principale source disponible pour éradiquer la pauvreté, et assurer les moyens de subsistance et le développement économique.  Il a indiqué que l’économie des Maldives dépend du tourisme et de la pêche, ce qui requiert un océan sain.  Afin de réaliser le développement économique et social dans le cadre de cette ressource limitée, a-t-il enchainé, l’éradication de la pauvreté va de pair avec l’utilisation et la conservation durables de l’océan et de la mer, ainsi que la mise en œuvre de programmes d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques pour prévenir les dégâts provoqués par les tempêtes, la montée des eaux et le réchauffement des océans.  Le représentant a insisté sur l’importance de la pêche durable appelant également à accorder une attention particulière à la protection des écosystèmes fragiles et à la promotion de l’écotourisme et de politiques environnementales.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déclaré que son pays est un exemple de réussite dans la lutte contre la pauvreté.  Si en 2004, 60% de la population était pauvre, en 2014, le taux a baissé à 24%, avec moins de 5% de population vivant dans l’extrême pauvreté, et en 2017, le pays compte moins de 20% de pauvres et moins de 3% de la population vit dans l’extrême pauvreté.  En 10 ans, le pays a enregistré 35% de baisse de la pauvreté, s’est-il félicité, soulignant toutefois que la situation est contrastée car la pauvreté est restée prégnante en milieu rural. 

Le représentant a expliqué que ces résultats sont les conséquences de la politique macroéconomique menée par le Gouvernement qui vise la stabilité et la croissance économique.  Un accord national a été conclu avec la société civile pour fixer des objectifs très précis pour réduire la pauvreté, et l’administration a déployé de nombreux efforts pour atteindre les zones rurales les plus reculées.  Beaucoup d’investissement dans l’infrastructure et l’assainissement ont été réalisés et la population rurale a été encouragée à accéder au commerce et aux échanges économiques pour l’aider à augmenter ses revenus.  En outre, des politiques spécifiques visant différents groupes d’âges, notamment les enfants et les personnes âgées, ont été menées, permettant notamment de créer des places dans les garderies et de fournir des retraites aux personnes de plus de 65 ans.  La « pauvreté monétaire » s’est améliorée.  Cependant, des problèmes persistent sur le plan sanitaire, 40% de la population souffrant d’anémie.

M. Meza-Cuadra a estimé que la solution à ces problèmes est de mener une politique d’intégration des populations touchées, notamment dans la région andine.  Des politiques d’intégration financière ont d’ores et déjà été lancées, notamment un système de paiement en ligne qui permet aux gens de recevoir et d’envoyer de l’argent par téléphone, même dans les régions les plus reculées.  La croissance et la stabilité macroéconomiques assorties de programmes très spécifiques visant des groupes très précis de la population sont la clef, a-t-il fait observer, mais on craint néanmoins le fait que 45% de la population risque de retomber dans la pauvreté.  

M. MISKA SIMANAINEN, Chercheur à l’Institut de la sécurité sociale (Kela), de la Finlande, a parlé d’un programme pilote lancé par son pays pour permettre aux chômeurs de toucher un revenu de base mensuel pendant deux ans, quel que soit le succès rencontré dans leur recherche de travail.  Il a expliqué que l’objectif principal était de connaître l’effet des incitations monétaires au travail sur le taux d’emploi, et que cette initiative ne devait pas être considérée comme une politique d’élimination de la pauvreté.  Il a précisé que l’introduction d’un revenu de base de 560 euros ne modifierait pas la distribution de revenus, le groupe cible étant limité. 

M. Simanainen a indiqué que cette expérience a permis de mieux connaître les limites constitutionnelles sur ce qui peut être expérimenté, notant par ailleurs que la conception d’un traitement est aussi difficile que la création d’une véritable politique, les essais nécessitant du temps et des ressources.  Il a aussi estimé que les réformes de systèmes à grande échelle peuvent être trop difficiles à expérimenter.

M. PAULO LUIZ MOREAUX LAVIGNE ESTEVES, Superviseur général du Centre politique de « BRICS », a indiqué qu’en 2012, le Brésil avait inscrit près de 14 millions de familles dans un programme de transferts conditionnels de fonds qui a eu un impact positif sur leur santé, leur éducation et l’égalité entre les sexes.  Il a imputé ce succès à des conditions sociopolitiques favorables sur le terrain, ainsi qu’à l’existence de capacités institutionnelles et d’une base de données fiables sur les familles vivant dans la pauvreté.  Dans le même ordre d’idées, des goulets d’étranglement ont pu être surmontés avec l’aide des Nations Unies.  En outre, le Gouvernement brésilien a uni ses forces avec les Nations Unies pour créer des centres de promotion de cette politique à savoir le Centre international de lutte contre la pauvreté et le Centre d’excellence contre la faim.  L’objectif était de surveiller et d’évaluer l’impact de la politique.

Quelle est l’importance du financement du développement et du financement innovant pour les petits États insulaires en développement (PEID)? a demandé Mme THOMSON, modératrice, au représentant de l’Alliance des petits États insulaires.  Ce dernier a répondu que le principal obstacle pour les PEID est d’être classifié dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire.  En effet, même si le produit national brut est plus élevé, la structure de l’économie reste la même, le niveau d’exportation et les autres sources financières demeurent limités, et les pays peinent à sortir de cette catégorie.  Il y a aussi le problème posé par le système financier international qui fait que nos pays n’ont plus accès à des prêts à des taux favorables, auquel s’ajoute la baisse constante de l’aide publique au développement pour les PEID.  En outre, la mobilisation des ressources au niveau national est difficile, tandis que l’élargissement de l’assiette fiscale est presque impossible du fait de la taille modeste de ces pays.  Il a toutefois estimé que le financement vert issu des Orientations de Samoa représente une approche idéale pour les PEID.

Interrogé sur l’importance de l’inclusion pour éliminer la pauvreté, en particulier chez les femmes, les populations autochtones et les jeunes, le représentant du Pérou a indiqué que l’inclusion est la grande différence entre les objectifs du Millénaire pour le développement et les objectifs de développement durable.  L’idée de ne laisser personne de côté est présente dans toutes les cibles, et cela nous aide à concentrer sur les groupes vulnérables, a-t-il indiqué.  Au Pérou, on veille à ce que les objectifs de développement durable soient appliqués depuis le programme de développement de l’État jusqu’au niveau local ou de district pour réduire, notamment, la malnutrition.  Il a aussi parlé du lancement d’un programme d’inclusion financière qui utilise les téléphones portables, et qui vise à toucher cinq millions de personnes d’ici à cinq ans.  Le Pérou tient aussi à ce que les populations locales bénéficient de la présence d’industrie extractive sur leurs territoires.

À son tour, le Vice-Gouverneur de la Banque centrale du Kenya a été prié de dire quels sont les mécanismes à utiliser pour amener les experts financiers et économiques à tenir compte des facteurs sociaux et environnementaux pour améliorer les résultats obtenus en matière d’éradication de la pauvreté.  Il a expliqué que c’est toujours le Gouvernement qui trace la voie et que pour ce qui est des objectifs de développement durable, le Kenya dispose d’une plateforme qui réunit les Nations Unies, le Gouvernement et la société civile et qui privilégie une vision à long terme.  Il a souligné que la question environnementale implique aussi la question énergétique et que son pays dispose d’un programme de promotion de l’énergie solaire.  Le Gouvernement prévoit aussi le lancement d’un plan énergétique quinquennal à moyen terme.  Il a jugé nécessaire d’assurer la cohérence macroéconomique en alignant les dépenses aux recettes.  Il a également évoqué la mise en place d’un « contrat de cohérence » qui engage les ministères à expliquer et montrer leurs initiatives. 

La représentante de la Norvège a ensuite demandé au Chercheur à l’Institut de la sécurité sociale (Kela) des précisions sur la pertinence et l’impact du revenu de base.  Ce dernier a expliqué que l’objectif de l’expérience est de mieux connaître l’impact des mesures d’incitations monétaires sur le taux d’emploi, évoquant de « bons résultats » pour les groupes ciblés.  Il a indiqué qu’il n’y a pas de conditions pour en bénéficier, et qu’il est de ce fait difficile de faire la différence entre les différents mécanismes d’incitation.  Le représentant du Pakistan et Président de la table ronde en a profité pour souligner l’importance du financement innovant, citant comme les transferts de fonds et l’inclusion financière au Brésil.  Il a indiqué qu’au Pakistan, les transferts d’argent sont destinés aux femmes et a appelé les autres pays à s’inspirer de ce modèle.  Le représentant du Brésil a précisé que les transferts en espèces par téléphone n’étaient pas des microcrédits.  Des conditions doivent être remplies pour en bénéficier, comme l’obligation, pour les familles bénéficiaires, de  scolariser leurs enfants ou de se rendre dans les dispensaires pour se soigner ou se faire vacciner.  Les bénéficiaires s’engagent aussi à se former et à renforcer leurs capacités afin de ne plus dépendre, à l’avenir, de ces programmes de transferts de fonds. 

Quelles sont les concessions à faire dans la réalisation des objectifs de développement durable?  Dans quelle mesure peut-on combler les failles de la mise en œuvre au niveau national?  Que peut faire l’ECOSOC pour aider les pays à réaliser les objectifs de développement durable? a lancé à son tour la modératrice.  À cela, l’ancien Vice-Gouverneur de la Banque centrale du Kenya s’est inquiété du manque de ressources pour réaliser les objectifs de développement durable.  Donc il faut établir des priorités en commençant par les mesures les plus efficaces, à savoir les politiques sociales, suivies de l’emploi et de l’environnement. 

Le Superviseur général du Centre politique de groupe « BRICS » s’est étonné de l’absence d’études sur les conséquences, pour le développement, de l’investissement privé.  Il a estimé que les Nations Unies doivent faire office de pont et aider au partage des expériences entre les pays.  La coopération fiscale internationale est également très importante, a-t-il indiqué, appuyé par le représentant de l’Équateur.  Le Chercheur à l’Institut de la sécurité sociale (Kela), a de son côté souligné qu’il faut avoir une idée bien précise avant d’élaborer et concevoir des politiques.  L’expérience du revenu de base en Finlande devrait pouvoir aider à répondre à d’autres questions dont on ne connaît pas encore l’envergure, mais dans l’immédiat, l’important est de bien mener l’expérience actuelle.  Il a ensuite précisé que les données recueillies ont été partagées avec des experts.

« Si la croissance économique s’accompagne de politique de distribution, alors toute la population peut s’en sortir et les plus vulnérables pourront bénéficier de la croissance », a interjeté le représentant du Pérou.  Il a annoncé que les pays d’Amérique latine se réuniront en juillet prochain au Mexique pour débattre de la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Le représentant des Maldives a appelé, de son côté, à éviter les cloisonnements dans les approches et de mettre l’accent sur les points de convergence entre les programmes et les politiques.  Le système de développement des Nations Unies doit travailler de manière unie, a conclu le représentant.

Table ronde interactive: Instruments de politiques en faveur d’une approche intégrée de l’élimination de la pauvreté

Mme BENTE ANGELL-HANSEN, Représentante permanente de la Norvège auprès des Nations Unies à Vienne et Présidente de la soixantième session de la Commission des stupéfiants, a souligné qu’il existe un lien étroit entre la pauvreté et la consommation des stupéfiants.  Elle a indiqué que les fonds issus du crime et du commerce des stupéfiants constituent des obstacles au développement, et que les questions d’insécurité sapent les efforts de développement, y compris les efforts en vue d’éradiquer la pauvreté.

Elle a déploré la stigmatisation dont sont victimes les femmes toxicomanes qui sont souvent laissées à elles-mêmes, et qui, parfois, refusent de demander de l’aide de peur de perdre leurs enfants.  Elle a regretté que la Commission des stupéfiants ne dispose pas de suffisamment de fonds pour mener à bien ses activités à travers le monde.

M. ROBERT KIRKPATRICK, Directeur de l’initiative Global Pulse, a indiqué que  Global Pulse est une initiative de l’ONU qui vise à favoriser l’utilisation des mégadonnées, afin qu’elles soient exploitées de manière sûre et responsable.  Sa mission est d’accélérer le développement et l’adoption, à grande échelle, d’une innovation notable en matière de données afin d’appuyer le développement durable et l’action humanitaire.

Il a présenté, en guise d’exemple, une étude menée à Jakarta, en Indonésie, sur les déplacements de la population urbaine, précisant qu’une telle collecte de données permet d’établir des schémas sur les déplacements des populations.  Il a expliqué que la coopération avec l’industrie du secteur de la téléphonie mobile est utile dans ce cadre et que Global Pulse travaille avec des données anonymes. Il a toutefois signalé que ces mégadonnées se retrouvent parfois dans les mains d’acteurs mal intentionnés.  Le représentant a ensuite proposé que les gouvernements puissent utiliser ces données de manière efficiente pour la cause du développement. 

M. Kirkpatrick a cité d’autres études de Global Pulse, admettant que le problème réside parfois dans la manipulation dont les données peuvent être l’objet.  Il a aussi souligné que la non utilisation de ces données est également préjudiciable aux efforts de développement.  Dans ce contexte, il a plaidé pour plus d’investissements nationaux en faveur du renforcement des capacités institutionnelles en matière de collecte et d’exploitation des données, et cela sans préjudice pour la vie privée.

Mme HANAA ELHELALY, ancienne Directrice générale du Fonds social de développement et Directrice générale de Amwal Financial Investments d’Égypte, a relevé qu’un tiers de la population égyptienne est considérée comme pauvre.  Après le Printemps arabe que le pays a connu en 2011, beaucoup de gens ont perdu leur emploi et les besoins élémentaires de vie ne pouvaient plus être comblés.  Pourtant, cette révolution sociale appelait à la justice pour tous, car l’essor de l’économie ne profitait pas aux plus démunis, a-t-elle indiqué.

Mme Elhelaly a dit que le Gouvernement égyptien procède aujourd’hui à des transferts de fonds en faveur des plus démunis, selon un modèle semblable à celui qui a connu du succès au Brésil.  Un autre programme vise à prendre en charge les personnes âgées et les handicapés en leur offrant des conditions de vie plus décentes.  Les filets de sécurité sociale sont importants pour aider les pauvres, a-t-elle relevé, tout en appelant le secteur privé à s’investir davantage dans la responsabilité sociale des entreprises afin d’appuyer les initiatives sociales à l’intention des plus démunis. 

M. SHOAIB SULTAN-KHAN, Président de Rural Support Programmes Network, une organisation non gouvernementale œuvrant au développement rural au Pakistan, a rappelé que 20% de la population mondiale consomme 80% des ressources, alors que les 20% plus pauvres de la planète ne représentent que 1,3% de la consommation mondiale.

De par son expérience dans le domaine du développement, notamment dans le monde rural en Asie, il a expliqué que la meilleure stratégie de réduction de la pauvreté exige d’impliquer les populations bénéficiaires elles-mêmes.  Pour cela, il a argué qu’il faille mettre sur pied un mécanisme hybride entre l’administration classique et le mode de fonctionnement des organisations non gouvernementales (ONG).  Ainsi, une telle structure, dotée à la fois des ressources financières du gouvernement et de la flexibilité de terrain d’une ONG pourrait appuyer des programmes sociaux en zone rurale notamment.

Il a évoqué un certain nombre de projets ayant respecté ce principe en Inde, au Bangladesh et au Pakistan, invitant le Conseil économique et social (ECOSOC) à suggérer une telle approche participative et d’appropriation aux États, au lieu d’essayer « en vain » d’inventer de nouveau la roue.

Après ces exposés, l’animateur, M. SANJAY REDDY, Professeur d’économie à la New School for Social Research de New York, a rappelé que de nombreuses approches ont déjà été mises à contribution afin d’éliminer la pauvreté dans le monde. 

Justement, parmi ces approches, a rappelé le Président de séance, M. NABEEL MUNIR (Pakistan), les transferts de fonds aux pauvres et les microfinancements sont souvent opposés.

Mme Elhelaly de Amwal Financial Investments d’Égypte a expliqué que les transferts de fonds ciblent le plus souvent les femmes des milieux ruraux afin de leur permettre de subvenir à des besoins élémentaires tels que les soins de santé, de nutrition et d’éducation.  À contrario, les microfinancements ciblent pour leur part les femmes, les petites et moyennes entreprises (PME), les jeunes diplômés, entre autres.  Ces microfinancements viennent ainsi dynamiser des activités génératrices de revenus en apportant aux pauvres des prêts qui leur sont inaccessibles dans des banques classiques.

En fin de la table ronde, une courte vidéo des activités de Amwal Financial Investments d’Égypte a été projetée.

Débat général

M. JIEYI LIU (Chine) a appelé à réduire la pauvreté en améliorant notamment la coopération Nord-Sud et la coopération Sud-Sud.  Il a invité les pays développés à respecter leurs engagements en matière d’aide publique au développement (APD).  Il faut que chaque pays puisse choisir son mode de développement en fonction de ses besoins spécifiques, a—t-il plaidé tout en appelant à un système financier international plus transparent. 

Le représentant a aussi parlé des politiques misent en œuvre par son gouvernement pour réduire la pauvreté.  Il s’est félicité de leurs résultats qui ont notamment permis de réduire de 166 millions à 43 millions le nombre de pauvres vivant en zones rurales.  Le Gouvernement aide également à la création d’emplois, à la réinstallation des travailleurs migrants et offre des prêts à taux zéro à certaines entreprises.  La Chine apporte aussi son soutien aux pays les moins avancés (PMA) dans le cadre de la coopération Sud-Sud, a-t-il indiqué. 

M. NONTAWAT CHANDRTRI (Thaïlande) a déclaré que son gouvernement avait intégré l'élimination de la pauvreté dans sa stratégie nationale de 20 ans et ses plans nationaux de développement social et économique.  Les stratégies et les plans sont traduits dans les politiques et programmes intégrés de chaque ministère afin d’appuyer le développement dans ses trois dimensions.  Ces politiques et programmes vont de l’octroi d’aide financière à des subventions aux pauvres et de la création d’emplois, à l’appui des services sociaux comme le logement, l’éducation, et la couverture sanitaire universelle, en accordant une attention particulière aux plus vulnérables, notamment les personnes âgées et les personnes handicapées.  En conséquence, le taux de personnes vivant sous le seuil national de pauvreté est passé de 57% en 1990 à 10,5% en 2014.

La Thaïlande est également convaincue que l’élimination de la pauvreté nécessite aussi un changement de mentalité.  Pendant plus de 40 ans, le Gouvernement a mis en œuvre une approche axée sur l’être humain dans le cadre de la « philosophie de la suffisance économique ».  Elle enseigne comment transformer son mode de pensée et sortir du cercle vicieux de la pauvreté en utilisant les principes de la modération, de la résilience et de la raison, guidés par la connaissance et les considérations morales.  Le représentant a ensuite annoncé que son gouvernement présentera son examen national volontaire en juillet.

M. VUSUMUZI NTONGA (Zimbabwe) a indiqué que son pays a mis sur pied un programme national pour la transformation socioéconomique.  Il a relevé que le premier objectif de développement durable, qui est d’éliminer la pauvreté, ne peut être réalisé sans que les autres ne le soient également.  Il a estimé que tant que les pays en développement resteront des plantations et des carrières de mine, alors leurs économies seront toujours tributaires de la fluctuation des prix des matières premières.  Il a donc appelé à transformer ces économies en accordant une plus-value aux riches ressources naturelles et aux produits agricoles dont ils regorgent.

M. HABIB MIKAYILLI (Azerbaïdjan) a indiqué que son pays s’était récemment engagé à aider financièrement quatre pays à sortir de la pauvreté.  Après l’Examen quadriennal complet des politiques adopté, l’an dernier, à l’Assemblée générale, pour aider le système de développement des Nations Unies à s’aligner sur les efforts menés au plan national, il a dit attendre avec intérêt le travail d’alignement de l’Assemblée générale sur le Programme 2030.

En Azerbaïdjan, la politique économique est destinée à améliorer les conditions socioéconomiques dans lesquelles vivent les citoyens, a poursuivi le représentant.  Il a expliqué que son pays a intégré les objectifs de développement durable dans ses plans et stratégies, garantissant ainsi l’appropriation nationale de la mise en œuvre du Programme 2030.  En outre, un Conseil national de coordination sur le développement durable a été créé.

Le représentant a ensuite mentionné les efforts entrepris pour diversifier l’économie, créer des parcs industriels dans les régions, augmenter les dépenses publiques pour l’agriculture et les activités économiques rurales.  Il s’attache également à créer des emplois durables et décents, encourage l’entreprenariat, alloue des prêts préférentiels aux entrepreneures, fournit une protection sociale aux familles à bas revenu et investit dans l’éducation et la santé.

Ainsi, au cours des 10 dernières années, les taux de pauvreté et de chômage ont été réduits de 5%, tandis que 3 000 écoles, 600 hôpitaux et centres de soin ont été construits ou rénovés.  Le pays accorde aussi une attention particulière aux personnes déplacées, dont 250 000 qui ont déjà reçu un logement.  L’Azerbaïdjan sera l’un des pays à présenter un rapport national volontaire au Forum politique de haut niveau sur le développement durable, en juillet 2017.

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