Session de 2017, Débat consacré aux questions d’intégration,
27e & 28e séances – matin & après-midi        
ECOSOC/6831

ECOSOC: Fin du débat sur l’intégration et rappel de « la position unique de l’ONU pour apporter une réponse intégrée au défi de l’éradication de la pauvreté »

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a achevé, aujourd’hui, son débat annuel consacré aux « questions d’intégration », qui avait pour mission de réfléchir aux mesures à prendre pour « faire de l’éradication de la pauvreté un objectif faisant partie intégrante de toutes les politiques ».

Pendant trois jours, les 54 membres de l’ECOSOC et divers experts se sont retrouvés pour discuter de ces mesures, sous le format de débat général ou de tables rondes interactives.  Après les trois sessions de la dernière journée, le Vice-Président de l’ECOSOC, M. Nabeel Munir, du Pakistan, a résumé les débats en affirmant que les défis de l’éradication de la pauvreté placent « l’ONU dans une position unique » lui imposant de continuer de renforcer tous les mécanismes pour une collaboration interagences. 

Cette collaboration, a-t-il expliqué, devrait apporter une véritable réponse, de manière intégrée et durable, au défi de l’éradication de la pauvreté.  Pour ce faire, il faudrait améliorer la gouvernance et la coordination des structures impliquées, en alignant les pratiques de financement à cet objectif.  Il faudrait également renforcer les partenariats et susciter l’innovation, tout en améliorant les processus de coopération entre les agences et entre les gouvernements et ce, afin d’aider l’ONU à agir d’une seule voix.

M. Munir a prévenu les États Membres: toutes ces étapes requièrent un leadership solide de la part des gouvernements et de toutes les parties prenantes. 

« Le travail commun de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ne fait que commencer », a aussi souligné le Sous-Secrétaire général à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations du Département des affaires économiques et sociales (DAES), M. Thomas Gass.

Dans la matinée, lors de la table ronde sur « l’élimination de la pauvreté en Afrique », on a constaté que les progrès socioéconomiques réalisés jusqu’à ce jour sur le continent permettent d’espérer atteindre le premier objectif du Programme de développement durable à l’horizon 2030 -l’élimination de la pauvreté- d’autant que ce sont les économies de pays africains qui enregistrent les plus forts taux de croissance dans le monde. 

Néanmoins, Mme Irène Ovonji-Odida, Présidente de l’« International Board of ActionAid International » et ancienne membre du Cabinet du Président de l’Ouganda, a attiré l’attention sur le « paradoxe africain »: si le continent a beaucoup de ressources, il a aussi beaucoup de pauvres.  Elle a invité les participants à s’interroger sur les raisons de cette pauvreté quand on sait que le continent dispose de 50% des réserves de diamant et 25% des réserves d’or.

La mobilisation des ressources nationales et la mise en place de politiques pour lutter contre les flux financiers illicites ont été présentées comme des solutions au problème par Mme Zeinab Bashir El Bakri, membre du groupe d’inspection de la Banque mondiale.  Elle a aussi suggéré que l’Afrique accorde une attention particulière aux situations de fragilité de conflit, et de violence en mettant l’accent sur la prévention. 

L’ESOCOC a aussi abordé, dans l’après-midi, la question de la « cohésion du système du Conseil économique et social ».  M. Elliot Harris, Directeur du Bureau du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) à New York, a fait observer que même si le cadre de coopération entre les organes subsidiaires de l’ECOSOC existe, l’action et les mesures prises restent sectaires, d’où le besoin de les intégrer entre elles.

La dernière table ronde a permis aux participants de débattre des rôles d’exécution, des attributions et des résultats de ce qu’on appelle l’« approche multipartite ».  Les panélistes ont constaté que cette approche était essentielle si l’on voulait arriver à éradiquer la pauvreté.  Elle doit se traduire par la coopération, la transparence et la reddition de comptes.

M. Thomas Gass a promis que le compte rendu succinct de ce segment sur l’intégration de l’ECOSOC serait publié ultérieurement.

DÉBAT SUR L’INTÉGRATION

Faire de l’éradication de la pauvreté un objectif faisant partie intégrante de toutes les politiques: quelles mesures prendre?

Table ronde sur le thème «Éliminer la pauvreté en Afrique »

Pour atteindre l’objectif de « ne laisser personne sur le côté », il faut réussir en Afrique où se concentre la plus importante population pauvre du monde, a prévenu d’emblée le modérateur de la table ronde, M. DAVID MEHDI HAMAM, Directeur du bureau du Conseiller spécial pour l’Afrique.  Les progrès socioéconomiques réalisés jusqu’à ce jour permettent d’espérer atteindre le premier objectif du Programme de développement durable à l’horizon 2030 -l’élimination de la pauvreté- d’autant que ce sont les économies de pays africains qui enregistrent les plus forts taux de croissance dans le monde.  Le continent regorge aussi d’une importante population de jeunes, a-t-il souligné en y voyant la possibilité d’exploiter le dividende démographique.

Un statisticien de l’Afrique du Sud, M. PALI LEHOHLA, a relevé les problèmes rencontrés en Afrique qui empêchent de jouir du dividende démographique, principalement le chômage et l’accès à l’eau, à l’électricité, aux soins et à l’éducation.  Il a également parlé de l’incapacité à élaborer et à exécuter des politiques intégrées au niveau des municipalités.  Pour remédier à ces problèmes, M. Lehohla a recommandé d’encourager le commerce en Afrique, notamment en harmonisant les tarifs douaniers et fiscaux.  C’est là que les données de la Banque africaine de développement sont utiles, a-t-il observé en soulignant que l’Afrique a besoin de planification et de statistiques, ainsi que de données très fiables.  Si l’Afrique veut mettre en œuvre l’Agenda 2063 « L’Afrique que nous voulons », elle doit intégrer les données statistiques dans ses plans de développement.  L’Afrique doit aussi devenir consommatrice de technologies, a-t-il recommandé.

Mme IRENE OVONJI-ODIDA, Présidente de l’« International Board of ActionAid International » et ancienne membre du Cabinet du Président de l’Ouganda, a rappelé que « les problèmes de l’Afrique exigent des solutions africaines ».  Elle a estimé en même temps qu’il fallait avoir « un point de vue exogène » car le système actuel ne fait que reproduire la situation dans laquelle se trouve l’Afrique.  En effet, a-t-elle noté, les paramètres montrent qu’il n’y a pas eu beaucoup de progrès en Afrique.  Le « paradoxe africain », c’est que l’Afrique a beaucoup de ressources, mais aussi beaucoup de pauvres.  « Pourquoi? » a demandé Mme Ovonji-Odida, alors que 50% de réserves de diamant et 25% des réserves d’or, pour ne parler que de cela, se trouvent en Afrique. 

Pour l’experte, il est important de changer la façon d’analyser la situation.  Elle a préféré réfléchir en termes d’« appauvrissement », plutôt que de « pauvreté », en s’interrogeant sur les pratiques qui conduisent à la situation actuelle.  De même, au lieu de parler de « richesses », elle a conseillé d’examiner le problème de l’« exploitation », ainsi que la « relation exploitants-exploités ».  Elle a remarqué que les déplacements de populations de certaines régions en conflit en Afrique sont voulus, pour permettre l’exploitation des richesses du sous-sol par les industries extractives, car celles-ci fournissent en armes les groupes armés.

Mme Ovonji-Odida a insisté pour qu’on parle d’appauvrissement et non de pauvreté, afin d’examiner au plus profond les causes de la situation actuelle.  « C’est une question d’idéologie », a-t-elle souligné en espérant que cela obligerait à revoir les approches actuelles et le rôle des gouvernements dans la situation.  Les mécanismes qui le permettent sont notamment le système des Nations Unies, les mécanismes de la CNUCED ou ceux de l’Union européenne, a-t-elle indiqué.  « Nous avons l’expertise juridique pour gérer les relations avec les industries extractives. »  Pour  changer de système, elle a souligné le rôle important de l’ONU en ce qu’elle peut faire en sorte que la fiscalité mondiale soit plus juste et ne génère plus de pauvreté.  En ce qui concerne la lutte contre les flux financiers illicites, les gouvernements africains doivent adopter et mettre en œuvre le rapport Mbeki, a-t-elle souhaité.  « Le problème africain n’est pas une question de ressources mais d’engagement », a conclu Mme Odida. 

La question des ressources est toutefois importante puisque Mme ZEINAB BASHIR EL BAKRI, Membre du groupe d’inspection de la Banque mondiale, a constaté « c’est le manque de ressources qui empêche de s’attaquer aux problèmes en Afrique ».  À son avis, il faut changer de paradigme en matière de ressources pour le développement et adopter de nouveaux modèles de développement plus durables.  Si les signes actuels sont encourageants, comme la croissance économique de 2,6% en 2017 en Afrique, les progrès sont inégalement répartis, a noté l’experte en signalant par exemple que les prix des produits de base sont restés faibles.  « Heureusement que certains pays tirent la situation vers le haut comme le Nigéria, l’Afrique du Sud et l’Angola. »

Parmi ses recommandations, Mme El Bakri a suggéré de renforcer la croissance actuelle en Afrique, d’investir dans les pauvres, de créer un environnement favorable au secteur privé et de réduire les risques.  Il faut également mettre en place des politiques favorables à une croissance durable, c’est-à-dire donner la priorité au secteur agricole.  Elle a aussi recommandé de renforcer la mobilisation des ressources nationales, de mettre en place des politiques pour lutter contre les flux financiers illicites, et d’accorder une attention particulière aux situations de fragilité, de conflit, et de violence en mettant l’accent sur la prévention.  

« Si l’Afrique n’est pas homogène, ses pays partagent toutefois quelques traits fondamentaux », a remarqué M. DONALD MMARI, Directeur exécutif de « Policy Research for Development (REPOA) ».  Pour arriver à éliminer la pauvreté en Afrique, il a plaidé principalement en faveur de la transformation rurale et agricole.  Il a conseillé d’améliorer la productivité des exploitations agricoles, de renforcer les marchés agricoles, de diversifier les économies rurales et d’encourager les petits exploitants ruraux à se lancer dans d’autres secteurs.  En ce qui concerne l’industrialisation, il faut donner la priorité à l’agro-industrie et à la création de valeur ajoutée, mettre en place des industries d’extractions et de minerais et réduire les écarts en matière d’infrastructures.

M. Mmari a également jugé important de transformer l’économie informelle en mettant en place des politiques et des mesures incitatives pour améliorer la productivité de ce secteur, en prenant des mesures pour réduire les risques, les coûts et éliminer les préjugés institutionnels contre le secteur informel.  Pour cela, il faut investir dans le développement des connaissances, simplifier les procédures administratives, donner de la voix aux entreprises informelles et mettre en place une gouvernance politique à l’écoute de ce secteur.

La discussion avec les délégations a tourné autour des manques à combler pour équiper l’Afrique sur son chemin vers le développement durable: il faut davantage de leadership, de transparence, de données, de planification nationale et d’intégration régionale.  Des systèmes fiscaux efficaces sont en outre importants, ainsi qu’un meilleur système financier, économique et commercial mondial.  La lutte contre les flux illicites a également été vue comme fondamentale pour faire avancer l’Afrique.

À ce propos, le représentant du Libéria a insisté sur l’importance du rapport Mbeki, en faisant valoir que les pays africains ont besoin de financer leur développement.  Mais même si ce rapport a fait l’objet d’une résolution à l’Assemblée générale, il ne pourra pas résoudre tous les problèmes à lui seul, a-t-il prévenu. 

Son homologue de la Norvège a indiqué que son pays et le Nigéria organisaient, demain, un événement au Siège de l’ONU sur la lutte contre les flux financiers illicites.  La lutte contre ce problème passe par un système fiscal performant, a-t-il observé, en souhaitant que les institutions financières internationales jouent un rôle dans le renforcement des capacités fiscales des pays.

Réagissant à ces remarques, l’ancienne Vice-Présidente de la Banque africaine de développement a expliqué que si les dirigeants africains ne tiennent pas compte du rapport Mbeki, c’est sans doute parce qu’ils n’y voient pas leur intérêt et qu’il y a des questions de corruption derrière cette attitude.

La Présidente de l’« International Board of ActionAid International a, elle aussi, regretté le manque de suivi dans la mise en œuvre de ce rapport après son adoption par les chefs d’État africains.  Elle a remarqué que les sociétés multinationales sont impliquées dans 60% des cas de flux financiers illicites.  C’est donc un problème international.  Elle a recommandé de veiller à l’instauration de règles de transparence, notamment dans les relations entre les pays.  Le représentant du Libéria a rappelé à cet égard la nécessité d’une bonne gouvernance et du respect de l’état de droit.

La délégation du Libéria a aussi diagnostiqué un manque de recours aux données produites par les chercheurs africains et par d’autres sources, lorsque les dirigeants africains élaborent leurs politiques.  Réduire la pauvreté prendra du temps, a averti le représentant pour qui la croissance actuelle est trop faible pour amorcer un véritable changement.  Il faut, a-t-il souhaité, trouver de nouveaux moyens pour le développement de l’Afrique pendant cette transition. 

Pour lui répondre sur la question des données, le statisticien de l’Afrique du Sud a déploré le fait que les Africains ne les utilisent pas pour chercher des solutions à leurs problèmes, alors qu’elles sont disponibles.  Pour inverser cette situation, nous avons besoin de leadership, a-t-il tranché.  « Il faut planifier le développement à partir des données. »  Il a rappelé que tous les pays développés avaient utilisé les données en les transformant en actions concrètes.  « Savoir des choses mais ne pas agir n’est pas savoir », a philosophé le statisticien en paraphrasant Bouddha.

Pour le représentant du Nigéria, toutefois, cette affirmation est « difficile à accepter dans le contexte africain ».  Ce délégué a souligné que chaque pays suit un rythme différent de développement.  Il a ajouté que le système financier, économique et commercial mondial ne favorise pas l’Afrique, souhaitant que l’ONU contribue à rectifier les déséquilibres entre les pays.  « C’est pour rétablir cette situation que l’ONU a été créée », a-t-il rappelé.    

L’Afrique doit passer par la planification du développement, tirer les leçons de ce qui a été fait dans d’autres pays, et utiliser les données existantes, a confirmé la Présidente de l’« International Board of ActionAid International, voulant au préalable que les Africains comprennent bien le contenu des programmes de développement.  Il faut être capable de voir ce qui a permis de faire évoluer un pays pour qu’il devienne une grande puissance économique, a-t-elle explicité. 

« Comment faire pour opérer un changement de mentalité en Afrique?» Répondant à cette question du Libéria, le Directeur exécutif de Policy Research for Development (REPOA) s’est tourné vers les dirigeants africains en souhaitant qu’ils s’approprient cette question.  En attendant, il faut lever certaines barrières comme les restrictions à la liberté de mouvement qui, contrairement aux mouvements des capitaux, est très limitée sur le continent.  Il est plus facile de se rendre en Europe que d’aller d’une capitale africaine à une autre, a-t-il constaté.

L’expert a aussi jugé important d’améliorer la compétitivité des entreprises africaines.  À cet égard, le statisticien sud-africain a suggéré de renforcer les blocs régionaux sur le plan économique, car les régions ont actuellement des vocations plutôt politiques.

En matière de leadership, le représentant de l’Irlande a demandé pourquoi un « dirigeant africain est resté au pouvoir depuis 1979 », exprimant la nécessité de mettre en place un système qui permette un renouvellement des dirigeants.  Il faut pour cela impliquer la jeunesse, a conseillé la Présidente de l’« International Board of ActionAid International » en appuyant ce qu’a dit le représentant de l’Algérie.

« Une main d’œuvre bon marché fait-elle partie des solutions pour éliminer la pauvreté? » a poursuivi le représentant de l’Irlande.  L’ancienne Vice-Présidente de la Banque africaine de développement a répondu que le recours à la main d’œuvre bon marché ne suffisait pas pour développer un pays. 

Le même représentant a voulu savoir pourquoi les pays africains n’étaient pas capables de créer des compagnies aériennes à bas coût pour résoudre les restrictions à la liberté de mouvement.  Le Directeur exécutif de REPOA a constaté une volonté de le faire, comme ce fut le cas en Tanzanie et au Rwanda.  Mais la masse critique de consommateurs de ce type de produit n’est pas encore là.  Il faudra attendre un peu de temps pour y parvenir, a-t-il prédit.  

Table ronde sur le thème « Assurer la cohésion du système du Conseil économique et social »

Au cours de cette discussion, les dirigeants de divers organes subsidiaires du Conseil économique et social (ECOSOC) ont présenté les résultats des travaux de leurs sessions annuelles qui étaient toutes orientées vers l’éradication de la pauvreté.

M. DAVID DONOGHUE, Représentant permanent de l’Irlande auprès des Nations Unies et Président de la soixante deuxième session de la Commission de la condition de la femme, a expliqué que la dernière session de la Commission, tenue en mars, avait permis d’examiner les questions liées à l’autonomisation économique des femmes.  Il a souligné que les participants avaient longuement évoqué la question de la « féminisation de la pauvreté ».  Ils sont convenus, au terme des débats, que l’éradication de la pauvreté passe par l’adoption de politiques visant à éliminer les inégalités entre les sexes afin de permettre la pleine implication des femmes dans le monde de l’emploi.  La Commission a également appelé au renforcement de la présence des femmes à tous les niveaux de prise de décision.  

M. PHILIPP CHARWATH, Représentant permanent adjoint de l’Autriche auprès des Nations Unies et Président de la cinquante-cinquième session de la Commission du développement social, a indiqué que la Commission avait misé, notamment, sur une bonne éducation pour tous et sur le plein emploi pour les jeunes.  De même, les travaux de cette année ont permis aux délégations de souligner la nécessité d’éviter le transfert intergénérationnel de la pauvreté.  La Commission, a-t-il ajouté, a aussi appelé à veiller à intégrer toutes les couches sociales dans les activités de développement, notamment les personnes handicapées.  La Commission avait amplement donné la parole à la société civile, souhaitant que cette tendance soit désormais de mise au niveau des pays.  

Mme CRISTINA POPESCU, Conseillère à la mission permanente de la Roumanie auprès des Nations Unies et Vice-Présidente de la cinquantième session de la Commission de la population et du développement, a expliqué que cette dernière session avait permis de constater une augmentation de la population en âge de travailler, ce qui pourrait permettre aux États d’en tirer profit grâce au dividende démographique.  Elle a expliqué que cet état de fait devrait conduire à une augmentation de la croissance, et partant la réduction de la pauvreté.  Différents pays dont la population est vieillissante ont de leur côté appelé au renforcement du système de retraite et de la sécurité sociale, afin de réduire la pauvreté des seniors.  Les participants ont également convenu de la nécessité de promouvoir l’emploi des jeunes.

Le dernier intervenant parmi les experts fut M. JOSÉ ANTONIO OCAMPO, Professeur de pratiques professionnelles dans les affaires internationales et publiques, enseignant à l’université Columbia de New York et Président du Comité des politiques de développement de l’ONU, un organe subsidiaire consultatif de l’ECOSOC.  Il a déclaré que les pays les moins avancés (PMA) ont besoin de faire certaines mutations afin de sortir de ladite catégorie.  D’abord, ils se doivent d’améliorer la gouvernance.  Ensuite, les dirigeants doivent y adopter des politiques qui favorisent des synergies entre les capacités de production et les bénéfices sociaux.  Ils doivent également instaurer des politiques financières et macroéconomiques qui permettent au pays de résister aux chocs externes.  Enfin, ils doivent tirer parti de facteurs extérieurs tels que le commerce international et la coopération fiscale internationale.

M. Ocampo a expliqué que parmi les PMA qui réussissent à sortir de la catégorie, restent vulnérables du fait de certaines lacunes structurelles qui risquent de leur faire perdre rapidement leurs gains économiques.  Il en a conclu que l’assistance internationale reste essentielle dans toutes ces économies, notamment à travers l’APD, du moins pendant un certain temps, afin que le pays sorti de la catégorie puisse aller au bout des mutations.

Au cours des échanges avec le public, la représentante de la Suisse a rappelé que toutes les commissions techniques de l’ECOSOC auront un rôle à jouer dans le cadre de la session du Forum politique de haut niveau sur le développement durable.  Elle a cependant voulu savoir comment le savoir-faire de chacune de ces commissions allait être pris en compte au cours des travaux du Forum politique.

Le Président de la cinquante-cinquième session de la Commission du développement social a rappelé que si de nombreux documents adoptés par les Nations Unies sont le résultat des délibérations de ces instances, il arrive souvent qu’on ne sache pas quoi en faire.  Un avis partagé par l’animateur de la table ronde, M. ELLIOT HARRIS, Directeur du Bureau du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) à New York, qui a fait observer que même si le cadre de coopération entre les organes subsidiaires de l’ECOSOC existe, l’action et les mesures prises restent sectaires, d’où le besoin de les intégrer.

Table ronde sur le thème « Approche multipartite: rôles d’exécution, attributions et résultats »

Mme ANDREA ORDÓÑEZ, Coordonnatrice de la recherche et des partenariats à Southern Voice, qui jouait le rôle de modératrice de la discussion, a jugé primordial de suivre une « approche multipartite » pour éliminer la pauvreté.  Dans ce cadre, « quel type de partenariat avons-nous besoin? » a-t-elle demandé pour lancer la discussion. 

Mme HUGUETTE LABELLE, Présidente du Conseil consultatif indépendant du Sénat du Canada, et membre du Conseil d’administration du Pacte mondial des Nations Unies, a expliqué que si l’aide publique au développement reste essentielle, elle suppose une confiance des partenaires dans le gouvernement aidé.  Elle a donc prôné une approche multipartite car elle permet la coopération, la transparence et la reddition de comptes.  Elle a pris l’exemple de la lutte contre les flux financiers illicites au Guatemala où, grâce au travail des partenaires nationaux et internationaux, des entités gouvernementales et des acteurs du secteur privé, des recommandations ont été élaborées pour peaufiner la lutte contre l’évasion fiscale, des taxes douanières notamment.  Si cette coopération a pu se faire, c’est parce que le pays était déterminé à agir, a-t-elle souligné.

Prenant ensuite le cas de l’Afrique, elle a parlé de la « Gates Foundation » qui fait la promotion d’une politique de lutte contre le tabac.  L’objectif est d’assurer un échange d’informations et une coopération avec l’Organisation mondiale de la Santé et des organisations de la société civile dans plusieurs pays d’Afrique, en vue de renforcer les capacités de ceux qui élaborent les politiques.  Un certain nombre de pays ont ainsi saisi les tribunaux pour défendre leurs citoyens contre l’industrie du tabac. 

Mme SHIRA KILCOYNE, Directrice des affaires gouvernementales et internationales chez GlaxoSmithKline (GSK), a souligné pour sa part le rôle essentiel que joue le secteur privé et appelé à lui faire davantage confiance.  Elle a indiqué que GSK, entreprise qui fournit des médicaments innovants, des vaccins et des services de santé à des millions de personnes, avait développé plusieurs dizaines de partenariats afin d’atteindre des populations qui n’ont pas accès à ces produits et services.  Elle a mentionné, par exemple, le partenariat avec l’ONG « Save the Children » qui permet de sauver un million d’enfants sur deux pays, la République démocratique du Congo et le Kenya.  Elle a encore cité le partenariat avec « Gates Foundation » sur un vaccin contre le paludisme.

Son entreprise, qui travaille sur l’éducation du personnel de santé, la vaccination et la santé néonatale, compte d’ailleurs associer d’autres parties prenantes.  La clef de la réussite, a-t-elle expliqué, c’est l’engagement de chaque partenaire.  Elle a également souligné l’importance de la « pérennisation », ce qui a conduit GSK à réinvestir 30% de ses bénéfices dans les pays aidés.  Cela constitue un engagement durable pour former notamment le personnel de santé.

En ce qui concerne les critères à vérifier pour tisser de bons partenariats, elle a cité « la volonté politique, le financement, le programme commun avec les partenaires, l’évaluation des activités qui se renforcent mutuellement et l’appropriation du projet par la hiérarchie ».   « On examine en ce moment ce que l’on va pouvoir faire collectivement pour promouvoir les objectifs de développement durable au sein du secteur privé et ainsi les rendre plus visibles. »

M. MANUEL F. MONTES, Conseiller principal au « South Center », a apporté le témoignage de son organisation qui apporte une aide technique à ses partenaires.  Si le secteur privé a la responsabilité d’assurer une libre concurrence, de respecter les règles du jeu et de faire des profits, il peut également entreprendre des actions sociales grâce à ses profits, a-t-il expliqué en parlant de « la responsabilité sociale du secteur privé ».  Celui-ci doit assumer son rôle économique et social, par exemple en payant ses impôts ou en achetant des produits locaux.  Dans les pays en développement, ce sont les petits agriculteurs qui constituent le secteur privé, un secteur qui doit être aidé si l’on veut que les investissements combattent la pauvreté. 

Après ces interventions, la modératrice a posé la question suivante: « Que doivent faire l’ECOSOC et le système de développement des Nations Unies afin d’encourager les partenariats et les multiplier? »

La première chose à faire, a répondu la Présidente du Conseil consultatif indépendant du Sénat canadien, c’est de réunir toutes les parties prenantes autour d’une table pour discuter des actions à mener en se basant sur les questions d’actualités.  Elle a aussi suggéré de diffuser les bons exemples de partenariat de l’ECOSOC pour que d’autres s’en inspirent. 

Le système des Nations Unies est bien placé pour promouvoir les objectifs de développement durable, a fait remarquer la Directrice des affaires gouvernementales et internationales de GlaxoSmithKline.  « C’est un rôle que l’ONU peut jouer et doit jouer davantage. »  Mais le Conseiller principal au « South Center » a fait remarquer le budget de l’ONU n’avait pas beaucoup augmenté depuis 20 ans, ce qui fait que la marge de manœuvre est très faible.  « Si l’on n’a pas de ressources, on ne peut pas faire des projections à long terme et il faut toujours se poser la question de ressources », a-t-il constaté.

 

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