En cours au Siège de l'ONU

L’ECOSOC réfléchit aux moyens d’édifier des sociétés durables, résilientes et inclusives grâce à la participation de tous

Session de 2018,
32e et 33e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6919

L’ECOSOC réfléchit aux moyens d’édifier des sociétés durables, résilientes et inclusives grâce à la participation de tous

La budgétisation participative, le cybergouvernement, des sociétés civiles dynamiques ou bien encore la collecte de données statistiques fiables ont été quelques-unes des pistes évoquées aujourd’hui lors d’une Réunion spéciale du Conseil économique et social (ECOSOC) afin d’édifier des sociétés durables, résilientes et inclusives, grâce à la participation de tous, objectif majeur du Programme de développement à l’horizon 2030. 

« Les sociétés au sein desquelles des groupes sont systématiquement exclus de la vie politique et économique courent le risque de voir leurs gains de développement compromis », a déclaré Mme Maria Chatardova, Présidente du Conseil, à l’ouverture de cette Réunion spéciale, composée de trois sessions qui se sont voulues le plus concrètes possibles. 

« L’inclusion est en effet au cœur du Programme 2030 », a affirmé la Présidente, en appelant à la participation constructive et approfondie de tous les secteurs de la société.  Même son de cloche du côté de Mme Amina J. Mohammed, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, qui a insisté sur la participation des femmes, « agents de changement », à l’instar de la déléguée de l’Union africaine. 

Lors de la session intitulée « Tendances globales et nouveaux problèmes: construire des sociétés durables, résilientes et inclusives dans un monde changeant », M. Mahmoud Mohieldin, Vice-Président du Groupe de la Banque mondiale, a noté les contributions positives énormes de la technologie, comme au Kenya, où ont été introduits des modes de paiement numérique, qui ont réduit de 80% le coût de transaction des envois d’argent des zones urbaines vers les zones rurales. 

« Des sommes colossales vont être dépensées dans les technologies pour appuyer la résilience », a-t-il prédit, tandis que la Présidente du Conseil a souligné le consensus qui existe autour du potentiel des nouvelles technologies pour favoriser la participation de tous.

Une position partagée par M. Aroon P. Manoharan, professeur à l’Université du Massachussetts, qui a, lui, loué les mérites du cybergouvernement lors de la session « Approches et technologies innovantes pour favoriser la participation de tous ». 

 « Ce système permet d’améliorer les relations entre citoyens et gouvernants ainsi que la qualité des services publics », a-t-il dit, en prenant l’exemple de l’Estonie, dont les citoyens peuvent transmettre par Internet des commentaires aux responsables politiques. 

Autre piste évoquée, la budgétisation participative qui consiste à garantir la participation de différents publics aux décisions budgétaires qui les concernent, a expliqué M. Francesco Tena, de Participatory Budgeting Projet.

« À Boston, un million de dollars a ainsi été bloqué par la municipalité et ce sont les jeunes qui ont décidé de son affectation », a-t-il dit.  La délégation de l’Andorre a donné l’exemple d’une initiative de budget participatif dans son pays où les citoyens peuvent avancer des idées avant la prise de décisions.

La collecte de statistiques de qualité a été longuement évoquée, notamment par Mme Janet Gornick, professeur de sciences politiques et de sociologie à City University of New York, déclarant qu’un suivi efficace des objectifs de développement durable exige beaucoup de travail sur les données, qui doivent être comparables, désagrégées par sexe et par âge. 

« Les investissements dans des microdonnées de haute qualité sont cruciaux », a-t-elle dit, tandis que le délégué du Canada a, lui, noté que le problème n’était pas le manque de données, mais leur consolidation. 

Sur un plan plus politique, Mme Hedia Belhadj, du Groupe Tawhida Ben Cheick, a recommandé aux organisations de la société civile de travailler de manière intégrée afin de faire pression sur les gouvernements, selon un « effet boule de neige », en prenant l’exemple de son pays, la Tunisie, où des droits nouveaux ont été récemment accordés aux femmes.

La participation de la société civile a été au cœur de la dernière session « Renforcer la coopération pour des sociétés durables, résilientes et inclusives », marquée par l’intervention de M. Andrew Gilmour, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, qui a rappelé que « les gouvernements n’ont pas le monopole de la sagesse ».

Il a noté la tendance regrettable consistant à étrangler la société civile avec l’adoption de lois qui rendent plus difficiles le travail des ONG.  Il a regretté la participation limitée de la société civile lors des sessions de 2016 et 2017 du Forum politique de haut niveau pour le développement durable, pointant l’obstacle de l’obtention du statut consultatif auprès de l’ECOSOC pour des ONG dont les auditions sont parfois reportées durant des années.  La société civile doit faire entendre sa voix au sein de l’ONU, a-t-il conclu.

RÉUNION SPÉCIALE SUR LE THÈME « VERS DES SOCIÉTÉS DURABLES, RÉSILIENTES ET INCLUSIVES GRÂCE À LA PARTICIPATION DE TOUS »

Déclarations

« Les sociétés au sein desquelles des groupes sont systématiquement exclus de la vie politique et économique courent le risque de voir leurs gains de développement compromis », a déclaré Mme MARIA CHATARDOVA, Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC).  Elle a aussi remarqué que les changements climatiques, l’urbanisation, les catastrophes naturelles, les migrations forcées et les inégalités au sein et entre les pays affectent tout le monde.  Pour elle, il faut différencier ces défis pour mieux identifier les liens entre eux et définir les politiques les plus adéquates pour y remédier.  Elle a évoqué les différentes réunions organisées avant cette réunion spéciale, au cours desquelles la recommandation suivante a été avancée: au-delà de favoriser le développement durable, une participation égale aux affaires publiques et politiques est un droit qui doit être respecté. 

Dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, les États Membres ont reconnu que des sociétés inclusives reposant sur des institutions solides et transparentes sont un préalable à tout développement durable.  Si elle a salué les progrès enregistrés, Mme Chatardova a indiqué qu’ils ne sont pas encore suffisants.  Plus de 190 millions de personnes sont sans emploi au niveau mondial, les conflits déchirent le tissu social alors que la croissance urbaine épuise les ressources naturelles, a-t-elle dit.  Elle a plaidé pour un changement de paradigme et une approche intégrée pour bâtir des sociétés résilientes et inclusives.  Le but de cette réunion est d’explorer les pistes d’une action collective pour répondre aux défis de la participation et de l’inclusion, dans le contexte du Programme 2030, a-t-elle expliqué. 

« L’inclusion est en effet au cœur du Programme 2030 », a affirmé la Présidente en soulignant que le développement durable requiert d’encourager la participation constructive et approfondie de tous les secteurs de la société.  « Nous devons aussi soigneusement choisir nos approches et institutions et déployer des technologies émergentes afin de favoriser l’avènement de sociétés durables, résilientes et inclusives et accroître la participation à la mise en œuvre des objectifs de développement durable. » 

Le Programme 2030 se fait pour les gens, par les gens et doit être réalisé par eux, a rappelé Mme AMINA J.  MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU.  « Son succès dépendra de tous les acteurs de la société, c’est une responsabilité collective. » Revenant sur les leçons de la réunion préparatoire à cette journée, qui a eu lieu à Prague, elle s’est dite convaincue de l’importance de la participation pour réaliser les objectifs collectifs, parvenir à de meilleures lois et promouvoir la responsabilisation.  Elle a aussi souligné que le monde des affaires peut apporter des solutions.  À son avis, « nous créons des obstacles à la participation réelle ».  Elle a fait valoir que le développement durable inclusif est la base d’une prospérité universelle, et ainsi « notre meilleure défense contre les conflits violents qui peuvent détruire les gains du progrès ». 

Mme Mohammed a conseillé de promouvoir un environnement favorable à la participation, avec une tolérance pour des points de vue différents.  Elle a insisté sur la participation des femmes, « agents de changement », et des jeunes « qui sont impatients face à ceux qui ralentissent le progrès ».  « Nous ne pouvons y arriver sans leur leadership, leurs idées.  Après tout, il s’agit de leur avenir », a-t-elle souligné au sujet de ces derniers.  La Vice-Secrétaire a aussi mis en évidence l’action sur le climat, qui peut permettre de créer une croissance économique pour tous et a rappelé la nécessité de faire comprendre les objectifs de développement durable et leur mise en œuvre, et d’entendre les positions des plus vulnérables.  « Nous devons mobiliser les acteurs à tous les niveaux pour le financement des objectifs de développement durable.  L’ECOSOC a un rôle crucial pour créer du consensus à ce sujet », a-t-elle conclu. 

M. VLADISLAV SMRZ, Vice-Ministre de l’environnement de la République tchèque, a dit que la réalisation du Programme 2030 requiert la participation de tous.  Il a indiqué que l’année 2018 est cruciale pour son pays qui fêtera en octobre le centenaire de la création de l’État tchèque.  « L’esprit démocratique qui anime mon pays est au cœur du Programme 2030, qui vise à accroître la participation de tous », a-t-il dit, avant de présenter le cadre stratégique pour le développement durable adopté en avril 2017 par son gouvernement, un document qui s’articule autour dudit Programme. »  Il a précisé que son pays s’était inspiré de la Finlande dans la création d’une base de données pour favoriser des projets de développement durable.  Enfin, le Vice-Ministre a mentionné les divers mécanismes participatifs mis en place afin que les Tchèques soient étroitement associés à la protection de l’environnement.

M. SERGIO LONDONO ZUREK, Directeur général de l’Agence présidentielle pour la coopération internationale colombienne, a lié les efforts pour parvenir à une paix durable avec la réalisation des objectifs de développement durable, citant l’exemple de son pays.  « Il est essentiel de créer les possibilités d’une vie productive pour tous, de régler les conflits armés et de réduire les écarts économiques », a estimé le représentant.  « Les efforts de paix entre Colombiens vont de pair avec les efforts pour mettre en œuvre les objectifs de développement durable », a affirmé M. Zurek.  Il a cité plusieurs initiatives prises par son gouvernement pour la réalisation du Programme 2030, notamment la création en 2015 par le Président du Mexique d’une commission chargée de promouvoir le dialogue entre le Gouvernement et les différents acteurs de la société à ce sujet ainsi que l’adoption, en mars dernier, d’un document de politique public, qui constitue une feuille de route pour la réalisation des objectifs de développement durable et constitue ainsi un guide pour les pouvoirs locaux.  Il a souligné le grand défi de la mise en œuvre au plan local et le potentiel énorme des partenariats multipartites.  « Avec le secteur privé, nous travaillons à la mise en œuvre d’un système de collecte de données pour évaluer les efforts de réalisation des objectifs de développement durable », a-t-il également donné comme exemple. 

Session 2: Tendances globales et nouveaux problèmes.  Construire des sociétés durables, résilientes et inclusives dans un monde changeant.

Cette table ronde a abordé la question de la participation de tous les groupes sociaux aux efforts tournés vers le développement durable, en examinant entre autres les atouts qu’offrent les données collectées au niveau local pour accroître cette participation.

Pour Mme MAMI MIZUTORI, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la réduction des risques de catastrophe, la réduction de ces risques est essentielle pour l’élimination de la pauvreté.  « Les catastrophes déplacent plus de 20 millions de personnes par an.  Elles ne connaissent pas de frontières et détruisent des années d’acquis dans le développement », a-t-elle rappelé.  Soulignant la corrélation entre la réduction du risque, le développement durable et les changements climatiques, elle a souligné la nécessité d’« affronter le tout ensemble ».  « Nous devons adopter une approche inclusive face à la gestion des risques, comme le prévoit le Cadre de Sendai -grâce notamment à la participation des femmes, des jeunes, des handicapés, des peuples autochtones- car ils peuvent contribuer avec leur expérience et enrichir les stratégies politiques. »  Le principe de participation de Sendai doit, cependant, être concrétisé en actions, a-t-elle recommandé.

Mme Mizutori a rapporté ses impressions après une visite à Sendai en mars, où elle a rencontré un groupe de personnes handicapées touchées par le tsunami de 2011.  Ce groupe avait à l’époque construit un réseau pour s’entraider en cas de catastrophes mais ils se sont malgré tout trouvés isolés sans comprendre ce qui se passait.  Ils ont réalisé que leur réseau devait être inscrit dans le reste de la société, a compris Mme Mizutori ».  Elle a conclu en imaginant que les situations peuvent être encore pires dans les pays en développement où il n’existe pas encore de politiques de réduction des risques.  « Nous devons travailler pour eux », a-t-elle proposé.

M. MAHMOUD MOHIELDIN, Vice-Président du groupe de la Banque mondiale, a souhaité revenir sur la question des changements rapides dans le monde, qui sont si rapides qu’ils dépassent les capacités des décideurs et des institutions.  Il a pointé plusieurs grandes tendances.  D’abord, les transitions démographiques et la tendance à l’urbanisation: « 4 milliards de personnes vivent en ville et d’ici à 2050, la population urbaine de la planète aura doublé, ce qui fera que 70% de la population sera urbaine ».  Si rien ne se passe, 1 milliard de personnes vivront dans des bidonvilles, avec des poches d’extrême pauvreté en zone rurale, a-t-il prévenu.

Autres tendances pointées par le représentant: 1 milliard de personnes vivent dans des zones touchées par des cycles de violence, tandis que le nombre de personnes touchées par des catastrophes naturelles a triplé; 2 milliards sont victimes de catastrophes liées au climat.  Les pays à faible revenus représentent 48% de toutes les victimes, même si leur exposition aux événements climatiques extrêmes est faible.  M. Mohieldin a aussi relevé que la technologie peut avoir un effet positif mais si elle est mal gérée, les incidences peuvent être sérieuses.  Le budget de la Banque mondiale consacré à la gestion des catastrophes s’élève à 4 milliards et demi pour l’exercice 2017, a-t-il indiqué, précisant qu’il représente 10% du portefeuille de la Banque, mais une part encore insuffisante selon lui.

M. Mohieldin a ensuite suggéré plusieurs pistes d’action.  D’abord, il a recommandé que les villes et les communautés locales élaborent des stratégies de levée de fonds.  « Il ne suffit pas que le gouvernement central ait suffisamment de ressources.  Les niveaux locaux doivent appuyer les efforts d’ensemble pour mobiliser ces ressources. »  Il a aussi appelé à utiliser le levier de la technologie, notant les contributions positives énormes, comme au Kenya, où ont été introduits des modes de paiement numérique, ce qui limite les envois d’argent des zones urbaines vers les zones rurales, avec un coût de transaction ainsi diminué de 80%.  « Des sommes colossales vont être dépensées dans les technologie pour appuyer la résilience », a-t-il prédit. 

Les communautés de recherche peuvent appuyer les objectifs de développement durable, a poursuivi Mme JANET GORNICK, Professeur de sciences politiques et de sociologie à CUNY (City University of New York), qui développe depuis 25 ans une banque de données basée au Luxembourg avec un satellite à New York.  « LIS » est un centre d’archives de données transnationales qui dessert une communauté internationale de chercheurs, d’éducateurs et de décideurs.  Il recense des micro-données sur les revenus dans 50 pays à revenus élevés ou moyens, en travaillant sur l’harmonisation des données, lesquelles sont codées sur un modèle commun.  Couvrant une période de 1980 à 2016, ce centre permet de mettre en évidence et d’examiner les grandes tendances.  Soulignant des partenariats déjà existants avec l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l’Organisation internationale du Travail (OIT), Mme Gornick a dit son espoir d’une collaboration accrue avec les Nations Unies dans le cadre de la réalisation des objectifs de développement durable, et dans le sens des efforts menés pour les rendre plus accessibles.  « Un suivi efficace de ces objectifs exige beaucoup de travail sur les données, qui doivent être comparables, désagrégées par sexe, âge, etc. »  Mme Gornick a expliqué combien étaient importants les investissements dans des micro-données de haute qualité.  Ces données, a-t-elle précisé, viendront s’ajouter aux macrosdonnées pour une analyse efficace des politiques.

Lors du dialogue interactif, cette importance des données a, à nouveau, été réaffirmée, l’expert de la Banque mondiale les décrivant comme « le nouveau pétrole ».  « Les exemples du Bangladesh et du Burkina Faso, montrent que les pouvoirs publics peuvent faire mieux avec des données sophistiquées mais cela dépend de la qualité des données », a-t-il expliqué en avertissant que le type d’investissement nécessaire pour y parvenir au niveau infranational est colossal.  « Mais sans données idoines au niveau local, nous ne pouvons atteindre les objectifs de développement durable. » Réagissant à une remarque du Canada, qui a noté que le problème n’était pas le manque de données, mais leur consolidation, la professeur de CUNY a dit la volonté de la communauté universitaire de participer à ces efforts.  « Ce qui nous manque, c’est un espace de dialogue organisé, systématisé, pour qu’une organisation comme la mienne puisse être utile. »

La Thaïlande a appelé le monde entier à s’inspirer de la philosophie de l’économie suffisante pratiquée par son pays, soulignant qu’elle l’a aidé à surmonter la crise financière et le tsunami.  Elle a mis en évidence l’importance de s’appuyer sur le niveau local et communautaire pour parvenir à plus de résilience.  « Nous devons faire plus pour les motiver à appliquer les objectifs de développement durable » a-t-il déclaré en se félicitant du prix Équateur du PNUD reçu par une communauté locale thaï pour son travail sur la gestion durable des forêts.  Opinion partagée par l’expert de la Banque mondiale qui a insisté sur la nécessaire mobilisation des ressources locales pour atteindre les objectifs de développement durable.  Il a pointé l’obstacle de l’inefficacité des systèmes fiscaux.  La Banque mondiale a identifié 19 sources de financement possibles pour les pouvoirs locaux, mais dans la pratique, seules deux sont utilisés, a-t-il noté.  « Les initiatives locales sont essentielles mais les gouvernements nationaux doivent donner un espace pour coordonner ces efforts », a tempéré la Représentante spéciale.

L’Andorre est revenue sur l’importance de la participation, donnant l’exemple d’une initiative de budget participatif dans son pays où les citoyens peuvent avancer des idées avant la prise de décisions.  En écho à une intervention d’une représentante des dames de la charité, qui a noté l’écart entre cette enceinte et les personnes vulnérables dont son organisation s’occupe dans 70 pays, le représentant de l’OCDE a mis en garde contre les effets négatifs du manque d’inclusion.  « Même si la création du Programme 2030 a été une des initiatives les plus inclusives, beaucoup de gens se sentent exclus des progrès de la mondialisation », a-t-il analysé en faisant allusion au taux élevé de chômage des jeunes, et aux communautés touchées par la destruction environnementale.  « Ils font de moins en moins de confiance aux gouvernements.  Dans les pays de l’OCDE, seuls 43% des citoyens font confiance à leur Gouvernement, a-t-il indiqué en jugeant ce chiffre frappant.  Cette diminution de la confiance va de pair avec une remise en cause du multilatéralisme, selon lui.  « Et ça, c’est vraiment dangereux, car on remet en cause l’architecture dans laquelle tout le monde joue avec les mêmes règles. »

La Représentante spéciale a souligné la responsabilité des gouvernements dans la création d’espaces permettant la collaboration de toutes les parties prenantes: « c’est à cette condition seule qu’on peut y parvenir ».

Session 3: Approches et technologies innovantes pour favoriser la participation de tous

Cette discussion a permis d’explorer les mérites de la participation des femmes, des techniques budgétaires participatives, du cybergouvernement et de l’économie circulaire.  Le tout dans l’objectif de la réalisation du développement durable et en lien avec le Programme 2030.

Mme HEDIA BELHADJ, Groupe Tawhida Ben Cheick (Tunisie), a parlé des droits de reproduction sexuels pour les femmes, lesquels sont au cœur de son organisation non gouvernementale (ONG).  « La révolution en 2011 dans mon pays a vu la montée de mentalités conservatrices mais aussi l’adoption de politiques ayant accordé des droits nouveaux aux femmes », a-t-elle dit en précisant que la résilience des femmes tunisiennes s’en est trouvée accrue.  Elle a mentionné l’apport de la société civile tunisienne à la rédaction du rapport national soumis dans le cadre de l’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme.  « Mais nous avons encore beaucoup de travail devant nous. »

En 2017, des mesures importantes ont été adoptées pour lutter contre les violences faites aux femmes, a poursuivi Mme Belhadj: l’interdiction de mariage avec des non-musulmans a notamment été abrogée.  Mme Belhadj a dit que ces avancées sont le fruit de l’alliance de la société civile et des forces politiques ayant conduit à l’adoption de la Constitution de 2014.  Une mobilisation de la société civile, en partenariat avec les instances gouvernementales, engendre « un effet boule de neige » et permet d’aboutir à de réelles avancées sociales, a-t-elle constaté.  « Je n’ai pas d’assurance que l’inclusivité sociale sera toujours de mise dans mon pays », a nuancé Mme Belhadj.  Elle a plaidé pour la mise en place d’indicateurs permettant de mesurer cette inclusivité dans les rapports rédigés par les États dans le cadre du Programme 2030.  Enfin, elle a recommandé aux différentes ONG de travailler de manière intégrée afin de mieux faire pression sur les gouvernements. 

La budgétisation participative consiste à garantir la participation de différents publics aux décisions budgétaires qui les concernent, a remarqué M. FRANCESCO TENA, Participatory Budgeting Projet (États-Unis).  À Boston, un million de dollars a ainsi été bloqué par la municipalité et ce sont les jeunes qui ont décidé de son affectation, a-t-il expliqué.  Ces jeunes ont notamment décidé de financer un plan ambitieux sur la santé mentale.  « Comment pourrait-on appliquer cette technique budgétaire participative aux objectifs de développement durable? », a-t-il lancé aux représentants.  M. Tena a dit que cette budgétisation participative était née au Brésil avant de gagner d’autres pays, comme les États-Unis.  Elle devrait être bientôt appliquée dans les écoles de New York.  L’élément clef est que les groupes visés comme les jeunes s’approprient cette technique, a-t-il souligné. 

C’est le cybergouvernement qui a intéressé de son côté M. AROON P.  MANOHARAN, professeur à l’Université du Massachussetts, parce que ce système permet d’améliorer les relations entre citoyens et gouvernants ainsi que la qualité des services publics.  L’importance du cybergouvernement numérique a été consacrée par l’ONU, a-t-il rappelé, ajoutant que son but est d’arriver à un « gouvernement intelligent ».  Des entraves demeurent, comme l’existence d’une véritable fracture numérique, qui est à la fois sociale, culturelle, économique, a-t-il dit.  De plus en plus de gouvernements utilisent l’administration en ligne, mais la participation des citoyens est souvent négligée.  Une autre tendance préoccupante est le fait que les villes n’arrivent pas à maintenir sur la durée le volume de services accessibles en ligne.  Les plateformes numériques doivent inclure les publics les plus vulnérables, mais ceux-ci doivent avoir suffisamment d’informations sur ces plateformes pour que cette participation soit effective, a-t-il remarqué.  Il a loué l’initiative numérique citoyenne mise en place en Estonie, qui permet aux citoyens de ce pays d’envoyer des commentaires aux responsables politiques.  Enfin, il a rappelé que les zones les moins connectées sont aussi les moins dynamiques économiquement. 

M. PETR MAREK, ERCTech de la République tchèque, est intervenu sur un autre terrain: « l’économie circulaire ».  IL a détaillé le cœur de métier de son entreprise qui est le recyclage intégral des déchets du secteur du bâtiment, en vantant les bienfaits écologiques de cette économie circulaire.  Ainsi, le béton proposé par son entreprise est moins cher de 15%, tandis que les émissions de gaz à effet de serre sont diminuées.  Cette méthode pourrait être appliquée aux objectifs de développement durable, notamment l’objectif 1, en fournissant des habitations moins chères et propres d’un point de vue écologique, a-t-il expliqué.  Il a encore précisé qu’une telle technique permet l’avènement de villes propres, prévu par l’objectif 15, ou encore de diminuer les déchets rejetés dans les océans, satisfaisant à l’objectif 14. 

Lors de la discussion qui a suivi, la déléguée de l’Union africaine a demandé que la réduction de la pauvreté soit bel et bien au cœur du Programme 2030.  Elle a recommandé une meilleure évaluation de la coopération pour le développement et souhaité que le rôle crucial des femmes dans le développement, notamment en Afrique, soit davantage débattu à l’ECOSOC.  « Investir dans les femmes est une condition de la réussite du Programme 2030 », a réagi la panéliste du Groupe Tawhida Ben Cheick

De son côté, le délégué de l’Union parlementaire a dit son intérêt pour la budgétisation participative, tout en se demandant dans quelle mesure elle peut contribuer à réduire la défiance qui existe entre gouvernants et citoyens.  L’expert de Participatory Budgeting Projet a répondu par la positive, tout en recommandant que les détails dans l’application des plans budgétaires soient définis au niveau le plus proche des citoyens. 

Session 4: Renforcer la coopération pour des sociétés durables, résilientes et inclusives

Des partenariats multipartites forts et une coopération entre tous les acteurs: tels sont les fondements du succès de la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Mais comment y parvenir?  Cette quatrième session de la réunion spéciale de l’ECOSOC a réuni des représentants des Nations Unies, d’institutions gouvernementales, de la société civile et du monde des affaires pour formuler des recommandations.

« Les gouvernements n’ont pas le monopole de la sagesse et il est important d’entendre d’autres voix » a entamé M. ANDREW GILMOUR, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, en donnant l’exemple du Costa Rica, où les Nations Unies ont soutenu le Gouvernement dans la création d’un pacte national pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable, incluant notamment les médias, les migrants et les peuples autochtones.  Poursuivant, il a mis en lumière le rôle des droits de l’homme dans la réalisation du Programme 2030.  « Il y a des idées novatrices à tirer comme dans l’exercice périodique universel, qui implique des consultations importantes avec la société civile.  C’est un modèle utile pour vérifier les progrès des objectifs de développement durable », a-t-il indiqué.

Tout ceci intervient cependant dans le contexte regrettable d’une tendance à étrangler la société civile avec l’adoption de lois qui rendent plus difficiles le travail des ONG, a remarqué le Sous-Secrétaire.  Il a noté la participation limitée de la société civile lors des sessions de 2016 et 2017 du Forum politique de haut niveau pour le développement durable, pointant l’obstacle de l’obtention du statut consultatif auprès de l’ECOSOC pour des ONG dont les auditions sont parfois reportées durant des années.  Il a mis cela en parallèle avec ce que subissent parfois les défenseurs des causes de l’ONU: « Des gens ont été réprimés pour avoir participé à des activités avec l’ONU.  Cela va parfois jusqu’à la mort, ou le refus de soins médicaux.  J’ai rencontré des personnes accusées d’être antipatriotique. »  Il a appelé à empêcher cela, en essayant de façon systématique de renverser cette tendance qui empêche l’ONU d’entendre la voix de la société civile.

 « Dans un monde devenu hypercompétitif, avec un faible niveau de confiance envers les gouvernements, et une des pires situations d’inégalités de l’histoire moderne, la coopération et le partenariat sont plus nécessaires que jamais », a enchaîné M. MARTIN CHUNGONG, Secrétaire général de l’Union interparlementaire.  Il a tenu à mettre en lumière le rôle essentiel que peuvent jouer des parlements forts capables de dialoguer avec tous les secteurs de la société pour aider à concevoir et mettre en œuvre des politiques nationales de développement durable.  « Chacun a un rôle spécifique à jouer, avec des responsabilités différentes.  Mais ce sont les gouvernements qui doivent prendre l’initiative dans le cadre du Programme 2030 et les parlements, de leur côté, doivent vérifier si ces derniers respectent leurs engagements », a-t-il précisé.  Il a insisté sur le fait que malgré la tendance des gouvernements, ces dernières années, à abandonner certaines de leurs prérogatives en privatisant par exemple divers domaines, ils restent les seuls garants du bien-être des citoyens, comme cela se constate au niveau du respect des droits de l’homme. 

Mettant en évidence le rôle essentiel de la société civile, il s’est inquiété que la participation de cette dernière soit limitée dans de nombreux pays.  Il a aussi souligné le rôle du secteur privé, qui « doit créer de bons emplois, dans le respect des règles environnementales, ainsi que des services et des biens utiles aux peuples et à la planète ».  Regrettant l’influence de grandes entreprises dans la formulation de politiques qui vont plus souvent dans le sens de leur propre intérêt que celui de la société dans son ensemble et constatant leur surreprésentation dans les instances gouvernementales, il a appelé à créer une nouvelle relation avec le secteur privé, dans lequel tous les segments de ce dernier auront leur mot à dire, surtout les petites et moyennes entreprises, tandis que les gouvernements, avec l’aide des parlements, encadreraient cette participation avec des régulations à caractère obligatoire.  Même si le parlement est l’institution qui devrait, plus qu’une autre, rassembler toutes les composantes de la société, ils ont encore un long chemin pour être vraiment représentatifs de la population, a-t-il aussi constaté.  Certains groupes sont sous représentés, comme les femmes, les jeunes, les peuples autochtones et les personnes pauvres, qui sont les moins susceptibles de participer à la vie politique « Ce n’est pas étonnant que de nombreux pays continuent à avoir des politiques limitées en termes d’égalité des genres et des politiques qui ne sont pas en faveur des pauvres.  Il faut des mesures proactives pour renverser cette tendance. »

Mme NATHALIE MOLINA NIÑO, Présidente-directrice générale de BRAVA Investments, a fait part de son expérience pour augmenter la participation des femmes dans le monde de l’investissement.  Son entreprise investit dans des entreprises bénéfiques aux femmes.  « Nous ne mettons pas l’accent sur les fondatrices, mais aussi sur les femmes consommatrices, ou qui font partie de la main d’œuvre, pour ne perdre aucune occasion à saisir ».  Son entreprise ne vise pas non plus les profits à court terme, ce qui lui permet d’être flexible, un aspect essentiel, par exemple pour les partenariats avec le secteur public.  « Les femmes ne bénéficient pas suffisamment d’investissements.  Elles ont peu accès au capital risque », a-t-elle constaté.  « Elles n’ont pas le réseau d’appui, l’avocat, les amis riches, pas d’accès personnel à des réseaux de financement, ni d’économies leur permettant d’investir dans leur propre entreprise. »

Pour mettre en œuvre une véritable participation, il faut savoir ce qu’on fait, a développé M. TOMÁŠ RÁKOS, Directeur des projets spéciaux et du développement des affaires de D21 (République tchèque).  « La participation du public au niveau des autorités locales et des régions, c’est là que les personnes peuvent véritablement s’exprimer », a-t-il jugé.  Pour lui, il est très facile de concevoir des processus justes et équitables pour toutes les parties prenantes.  « J’ai appris que les personnes veulent participer.  Si elles ne le font pas, c’est la faute du processus, pas la leur. »  Il a donné l’exemple de la dimension d’éducation citoyenne, civique: si elle manque, cela peut créer un obstacle.  De plus, il a remarqué que les citoyens ne sont pas toujours prêts à participer, à contribuer, car ils n’ont pas la confiance requise pour être un acteur clef.  Les processus de participation ne sont pas des campagnes politiques ou de relations publiques, a-t-il également souligné.  « Si vous perdez la confiance du public, il faudra des années pour la reconquérir. »  Insistant sur le fait que l’argent n’est pas un problème, il a estimé qu’il n’y a pas de recette miracle, de technologie incroyable pour permettre la participation.  Pour faire de la participation citoyenne, il faut être sociologue, expert en communication, connaître les pratiques optimales de consultation sans quoi on ne peut pas créer un processus sérieux, a-t-il aussi remarqué. 

Pour que les partenariats soient véritablement inclusifs, les gouvernements doivent identifier les facteurs qui entravent l’inclusivité, a estimé de son côté M. VITALICE MEJA, de Reality of Aid Africa Network.  Autre ingrédient essentiel selon lui: la société civile doit être reconnue en tant qu’actrice du développement.  « Il faut lever les entraves juridiques, politiques et bureaucratiques qui freinent sa participation.  Sans l’appropriation par la population, il n’y a pas de mécanismes de mobilisation sur le terrain. »  La transparence et la recherche des responsabilités sont aussi importants de la part du gouvernement, a-t-il poursuivi.  « Le gouvernement peut reconnaître qu’il commet des erreurs, ce n’est pas grave. »  Au contraire, s’il ne le fait pas, cela empêche les citoyens de participer et on ne peut pas avancer, a-t-il ajouté.  « Quand le gouvernement est hostile à certains groupes, il faut voir comment les réunir autour de la table », a-t-il aussi recommandé. 

Une plus grande participation des ONG, c’est aussi ce qu’a souhaité une représentante de l’ONG Saint Vincent de Paul, qui a regretté que certaines d’entre elles n’aient pas accès à l’Assemblée générale.  Elle a rapporté que son organisation avait enquêté sur la manière dont les personnes sur le terrain étaient informées des examens nationaux à titre volontaire et que ce niveau d’information était faible.  Elle a appelé à chercher des moyens pour entendre la voix des sans abris, et s’est demandé s’il était possible de créer une instance au niveau de l’ONU pour entendre la voix de ce qui vivent avec moins de 1,25 euros par jour.  Un avantage de la société civile, a également fait observer le Brésil, c’est qu’elle est interconnectée au niveau mondial. 

La délégation de la République de Corée a jugé important pour le citoyen de comprendre ce que le gouvernement fait pour participer.  « Il faut une administration transparente et des données accessibles au public », a-t-elle recommandé.  Le représentant de l’Union Interparlementaire a insisté sur l’importance de la confiance entre le gouvernement et la société civile mais aussi avec le parlement, que le gouvernement doit considérer comme un partenaire et non un adversaire politique.  « La confiance est essentielle », a appuyé le représentant d’une ONG qui s’est demandé si celle-ci se nouait aussi dans des circonstances officieuses.  « Elle repose sur la capacité à se réunir régulièrement, à se faire des amis », a-t-il estimé. 

Déclarations de clôture

Mme MARIA CHATARDOVA, Présidente de l’ECOSOC, a indiqué que les conclusions de cette Réunion spéciale alimenteront les travaux du prochain Forum politique de haut niveau pour le développement durable.  Résumant les discussions de la journée, elle a souligné le consensus qui existe autour du potentiel des nouvelles technologies pour favoriser la participation de tous.  Des ressources conséquentes devraient être allouées pour garantir l’accès à Internet des plus vulnérables, a-t-elle dit, tout en encourageant les gouvernements à promouvoir les plateformes en ligne.  « Nous devons encore en faire plus pour améliorer la collecte de données et rendre celles-ci accessibles. »  La Présidente a ensuite insisté sur l’importance d’une société civile dynamique pour mesurer les progrès accomplis dans la mise en œuvre du Programme 2030.  « Nous sommes sur la bonne voie pour identifier les solutions concrètes en vue de remédier à la limitation de la participation aux processus de prise de décisions », a-t-elle conclu. 

« Nous devons œuvrer de concert à la mise en œuvre des objectifs de développement durable en tissant des partenariats à tous les niveaux », a résumé M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, dans ses remarques de clôture.  Parmi ses recommandations, la création de mécanismes de surveillance et de suivi pour assurer la réussite des partenariats.  Les gouvernements doivent s’informer, dialoguer les uns avec les autres, réfléchir à des pratiques telles que la budgétisation participative, a-t-il aussi proposé.  Rappelant que la pierre angulaire du Programme 2030 est de « ne laisser personne de côté », il a estimé qu’il fallait être prudent à ce sujet et faire en sorte que la participation de chacun soit ancrée dans des structures et cadres institutionnels solides.  « La participation de tous est un avantage, elle enrichit nos discussions, permet d’obtenir des nouvelles connaissances et de catalyser les solutions novatrices », a déclaré M. Zhenmin, qui a aussi souligné l’importance de la communication et de la sensibilisation.  « La participation de tous est également synonyme de responsabilité de tous », a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le Coordonnateur spécial pour le Moyen-Orient appelle à appuyer les infrastructures de Gaza pour éviter une nouvelle guerre

8265e séance – matin
CS/13350

Conseil de sécurité: le Coordonnateur spécial pour le Moyen-Orient appelle à appuyer les infrastructures de Gaza pour éviter une nouvelle guerre

Huit jours après avoir fait le point sur les affrontements mortels à Gaza, le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. Nickolay Mladenov, a appelé, ce matin, devant le Conseil de sécurité, à mettre en œuvre d’urgence des projets clefs pour appuyer les infrastructures de Gaza, atténuer les souffrances de la population et éviter ainsi une nouvelle guerre.

Intervenant par visioconférence depuis Jérusalem, M. Mladenov a averti que les infrastructures à Gaza sont sur le point de s’effondrer, notamment en ce qui concerne l’électricité, l’approvisionnement en eau et les soins de santé.  Si l’on ne met pas immédiatement en œuvre, dans les 6 à 12 mois, un ensemble de projets modestes, réalisables, et qui plus est, déjà approuvés par les parties prenantes, et parfois même déjà financés, l’on s’expose au risque d’une crise humanitaire amplifiée, avec de moins en moins de moyens pour y faire face.

Le Coordonnateur spécial s’est engagé à agir sur quatre fronts: accorder la priorité aux projets identifiés par le Comité spécial de liaison pour la coordination de l’assistance internationale aux Palestiniens; adopter une procédure rapide de mise en œuvre; renforcer la coordination avec l’Autorité palestinienne, Israël et l’Égypte pour surmonter tout obstacle politique, administratif et logistique; exiger le respect du cessez-le-feu conclu en 2014 et que toutes les factions de Gaza s’abstiennent d’accumuler des armes illégales et de toute activité militante. 

« Si nous agissons présentement, les possibilités d’une confrontation armée et d’un autre conflit dévastateur seront amoindries », a souligné M. Mladenov. 

« Nous créerons par là même les conditions pour assouplir les restrictions de mouvements et d’accès, préserverons les liens qui s’effilochent entre Gaza et la Cisjordanie et appuierons les efforts de réconciliation de l’Égypte.  Qui plus est, nous donnerons aux Gazaouis la bouffée d’air dont ils ont tant besoin. »

Le Coordonnateur spécial a précisé être en pourparlers avec les principales parties prenantes pour faire avancer cette stratégie.  À cet égard, il a salué la décision du Président égyptien, M. Abdel Fattah Al Sisi, de maintenir le point de passage de Rafah ouvert pendant le mois du Ramadan.  Il a aussi reconnu les efforts déployés par Israël pour assurer la livraison d’articles vers Gaza, et ce, en dépit des dommages causés au point de passage de Kerem Shalom, pour ensuite saluer la décision du Gouvernement palestinien de fournir des articles médicaux et des médecins à Gaza après les événements tragiques du 14 mai. 

Soulignant que ces derniers évènements viennent rappeler la rapidité avec laquelle la violence peut se propager à Gaza, M. Mladenov a appelé une nouvelle fois à condamner dans les termes les plus forts les actions qui ont provoqué tant de pertes en vies humaines à Gaza. 

Israël, a-t-il souligné, ne doit utiliser la force létale qu’en dernier recours.  Et Hamas ne doit pas se servir des manifestations pour dissimuler des tentatives de provocation et placer des bombes le long du barbelé, ni cacher ses militants parmi la foule.  Conscient du fait que les manifestations risquent de se poursuivre pendant le mois de juin, il a appelé toutes les parties à faire preuve de retenue. 

« Les membres du Conseil de sécurité parlent souvent de la nécessité de prévenir la guerre et le Secrétaire général a placé la diplomatie préventive au cœur de son agenda.  Le moment est à présent venu de transformer nos paroles en actes à Gaza », a-t-il affirmé.

Au cours de son intervention, M. Mladenov a par ailleurs réitéré la position de l’ONU concernant Jérusalem, à savoir que le statut final de la Ville sainte devra être examiné par les parties à travers des négociations. 

Le Coordonnateur spécial a préconisé d’adopter une approche unifiée pour modifier la situation actuelle sur le terrain à Gaza, tout en soulignant qu’il revient en premier lieu aux dirigeants de toutes les parties impliquées dans le conflit de faire preuve de la volonté politique et de la détermination nécessaires pour réaliser de véritables progrès. 

« Gaza fait partie intégrante d’un plus grand puzzle et le succès de toute initiative à Gaza est lié à un horizon politique crédible qui unisse tous les Palestiniens », a-t-il conclu. 

En même temps, a souligné M. Mladenov, « nous ne pouvons pas ignorer la Cisjordanie, où les activités de peuplement se poursuivent et où la situation reste précaire ».  À cet égard, a-t-il estimé, le Quatuor pour le Moyen-Orient demeure essentiel pour débattre des perspectives de résolution du conflit.

Seul membre du Conseil de sécurité à prendre la parole, le Kazakhstan, par la voix de son Ministre délégué des affaires étrangères, a déclaré que la reprise immédiate des négociations et la mise en œuvre des accords permettront de résoudre le problème du manque de confiance, tout en facilitant l’ouverture d’un dialogue plus ouvert entre les deux parties.  Il faut donc identifier des principes mutuellement acceptables pour faire avancer le processus de paix israélo-palestinien, a souligné M. Galymzhan Koishybayev, qui a par ailleurs estimé que les discours antisémites sont inacceptables et ne servent en rien les intérêts du peuple palestinien.

Le Ministre a également insisté sur l’importance de l’unité interpalestinienne, plaidant pour l’édification d’institutions palestiniennes fortes, la promotion des réformes des secteurs de sécurité et judiciaire et la promulgation de nouvelles lois afin de renforcer l’état de droit et la bonne gouvernance.  Il a aussi souligné l’importance de soutenir l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), et a promis de verser une contribution supplémentaire de 50 000 dollars à l’Office. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: face à une situation sécuritaire qui reste précaire, l’ONU appelle à un soutien accru en faveur de la Force conjointe du G5 Sahel

8266e séance – après-midi 
CS/13351

Conseil de sécurité: face à une situation sécuritaire qui reste précaire, l’ONU appelle à un soutien accru en faveur de la Force conjointe du G5 Sahel

Au cours d’une réunion du Conseil de sécurité consacrée à la paix et à la sécurité en Afrique, cet après-midi, la Sous-Secrétaire générale aux opérations de maintien de la paix, Mme Bintou Keita, a invité la communauté internationale à renforcer son soutien à la Force conjointe du G5 Sahel, notamment en équipements, et à concrétiser les promesses faites à Bruxelles, le 23 février dernier, au cours de la conférence des donateurs.

Conformément à la résolution 2391 (2017), les États membres du G5 Sahel, l’ONU et l’Union européenne ont signé un accord technique définissant la portée et l’ampleur de l’appui de l’ONU à la Force conjointe par l’entremise de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).  Mme Keita a indiqué que le mécanisme de soutien prévu par cette résolution va demander des ressources récurrentes pour appuyer la Force conjointe, y compris le réapprovisionnement des caisses de la Facilité de soutien à la paix pour l’Afrique.

Depuis son autorisation par le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine en avril 2017, la Force conjointe formée par le Groupe de cinq pays du Sahel (G5 Sahel), à savoir le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad, a connu des progrès notables, a expliqué Mme Keita.  Le déploiement des troupes a débuté et les postes de commandement et le quartier général de trois secteurs ont commencé à recevoir du matériel.  La Force conjointe a mené ses deux premières missions dans le secteur central et elle a franchi les premières étapes pour établir son cadre réglementaire de contrôle du respect des droits de l’homme.

« Néanmoins, il nous reste beaucoup de travail à accomplir », a prévenu la Sous-Secrétaire générale.  Le déploiement de la Force a pris du retard et elle n’a pas encore atteint sa pleine capacité.  Elle a invité le G5 à redoubler d’efforts pour déployer le restant des troupes au plus vite.  Elle les a aussi invités à arrêter le concept stratégique d’opérations et à préciser sa finalité et ses objectifs. 

Même si plus de 80% des effectifs sont déjà déployés au quartier général de Sevaré et au niveau des trois zones opérationnelles, il n’en demeure pas moins que les troupes sont encore généralement mal équipées, les bases militaires et plus globalement la logistique nécessaire à une intervention efficace font défaut, surtout dans un environnement souvent hostile, a renchéri le Secrétaire permanent du G5 Sahel, M. Maman Sidikou. 

Comme la majorité des orateurs après elle, Mme Keita a rappelé que la situation sécuritaire reste précaire au Sahel.  Le terrorisme et le crime organisé continuent d’être le défi sécuritaire le plus pressant dans la région, et elle a dit craindre que cela ne soit ainsi « pour de nombreuses années encore ». 

En fin de compte, a-t-elle affirmé, « toutes les tentatives pour surmonter l’instabilité et l’insécurité au Sahel ne réussiront que si elles se concentrent sur le lien entre le développement, la paix et la sécurité ». 

Le représentant de la France a pour sa part appelé à « faire preuve de réalisme dans nos attentes sur le court terme », car l’opérationnalisation de la Force « ne peut pas se faire du jour au lendemain. »  De plus, a-t-il jugé « on ne peut nourrir à l’égard de la Force conjointe des attentes qui soient déconnectées du rythme de mise en œuvre de notre propre soutien ».  Sur le long terme, Mme Keita a fait écho aux recommandations du Secrétaire général dans ses derniers rapports, et en particulier son rapport du 8 mai dont était saisi le Conseil, en ce sens qu’il faut réfléchir ensemble à des mécanismes permettant un financement plus pérenne, y compris en envisageant des contributions obligatoires. 

Dans cette optique, M. Sidikou a invité le Conseil de sécurité à situer l’apport de l’ONU à un niveau plus approprié, qui passera entre autres par des contributions obligatoires afin d’être en mesure d’apporter un appui de long terme.  Il a aussi demandé au Conseil de doter la Force conjointe du mandat renforcé qu’elle mérite et des ressources nécessaires pour achever son opérationnalisation et assurer sa pleine capacité d’intervention. 

« Il s’agit de réussir, avec la Force conjointe du G5 Sahel, à mettre en place une force opérationnelle performante, d’ossature africaine, mais soutenue fortement par l’ensemble de la communauté internationale, ONU en tête », a expliqué le Secrétaire permanent.  Pour sa part, la déléguée des États-Unis a estimé que « la MINUSMA ne peut efficacement soutenir la Force conjointe alors qu’elle ne peut même pas assurer sa propre protection ».  C’est pourquoi elle a plaidé davantage pour une combinaison de soutiens bilatéraux et multilatéraux pour appuyer la Force conjointe. 

Mme Fatima Kyari Mohammed, l’Observatrice permanente de l’Union africaine, a de son côté estimé que « seul un mandat robuste en vertu du Chapitre VII de la Charte, ainsi que des moyens importants à la disposition de la Force du G5 Sahel, pourraient aider à éradiquer les menaces identifiées ».  Elle a relevé que le Conseil pour la paix et la sécurité de l’Union africaine avait décidé, le 23 mars, de proroger de 12 mois le déploiement de la Force conjointe. 

Plusieurs intervenants ont aussi souligné l’importance de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali qui se présente comme « la pierre angulaire de tout effort de stabilisation dans la région », selon les termes de Mme Keita.  Dans son dernier rapport, le Secrétaire général note que l’élection présidentielle qui doit se tenir en juillet 2018 au Mali sera un moment décisif, qui non seulement façonnera l’avenir du pays, mais pourrait aussi avoir une incidence sensible sur la région.

Des voix ont également insisté sur l’importance pour le G5 Sahel et sa Force de respecter les droits de l’homme et le droit international humanitaire.  Le délégué de l’Union européenne, M. João Vale de Almeida, a promis une contribution de 10 millions d’euros en faveur de la mise en œuvre de son cadre de conformité aux droits de l’homme.  L’Union européenne, qui apporte déjà un soutien de 70 millions d’euros pour la fourniture d’équipements, d’infrastructures et de services à la Force conjointe, est « convaincue que la Force conjointe doit être fermement ancrée dans un cadre politique et institutionnel plus vaste, pour guider ses opérations et faire en sorte qu’elles ne constituent qu’un élément d’une stratégie régionale large ». 

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE

Rapport du Secrétaire général sur la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel (S/2018/432)

Déclarations

La Sous-Secrétaire générale aux opérations de maintien de la paix, Mme BINTOU KEITA, a rappelé que la situation sécuritaire reste précaire au Sahel, soulignant par exemple des échanges de tirs à Ouagadougou, au Burkina Faso, hier.  Au cours des dernières semaines, les forces de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) ont aussi été la cible d’attaques terroristes, dont celle du 18 avril à Tombouctou.

Mme Keita a précisé que les plus affectées sont les populations locales qui sont victimes d’intimidation et de harcèlement et « vivent dans la peur au quotidien ».  Le terrorisme et la criminalité organisée continuent d’être le défi sécuritaire le plus pressant du Sahel et elle a dit craindre que cela ne soit ainsi pour de nombreuses années encore. 

Depuis son autorisation par le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine en avril 2017, la Force conjointe du G5 Sahel a connu des progrès notables.  Le déploiement des troupes a débuté et les postes de commandement et le quartier général de trois secteurs ont commencé à recevoir du matériel.  La Force conjointe a mené ces deux premières missions dans le secteur central et elle a franchi les premières étapes pour établir son cadre réglementaire de contrôle du respect des droits de l’homme, en établissant notamment des mécanismes de tri et de suivi des violations des droits de l’homme. 

« Néanmoins, il nous reste beaucoup de travail à accomplir », a prévenu Mme Keita.  Le déploiement de la Force a pris du retard et elle n’a pas encore atteint sa pleine capacité.  La Sous-Secrétaire générale a invité les cinq pays du Sahel à redoubler d’efforts pour déployer le restant des troupes au plus vite.  Elle les a aussi invités à arrêter le concept stratégique d’opérations et préciser sa finalité et ses objectifs.  Le soutien de la communauté internationale est également souhaité pour soutenir la Force conjointe en équipement et en matière de formation. 

La Sous-Secrétaire générale a indiqué qu’il faudrait apporter des réponses aux récents rapports sur des violations des droits de l’homme par les forces de sécurité de la région, étant donné que ces actes pourraient constituer un obstacle à l’aide de l’ONU à la Force.  Elle a invité le G5 Sahel à coopérer pour mettre rapidement en œuvre le cadre du respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire, notamment en soutenant les mécanismes de redevabilité, en assurant le déploiement d’officiers de police à tous les niveaux et en appuyant le déploiement d’équipes des Nations Unies dans les cinq pays.

Mme Keita a rappelé qu’à la conférence des donateurs du 23 février à Bruxelles, 80 millions d’euros avaient été collectés, portant les promesses de contribution en faveur de la Force à 400 millions d’euros, presque le montant total du budget annuel de la Force.  Conformément à la résolution 2391 (2017), les États membres du G5 Sahel, l’ONU et l’Union européenne ont signé un accord technique définissant la portée et l’ampleur de l’appui de l’Organisation à la Force conjointe par l’entremise de la MINUSMA.  Elle a néanmoins indiqué que le mécanisme de soutien prévu par la résolution 2391 (2017) va demander des ressources récurrentes pour appuyer la Force conjointe, y compris le réapprovisionnement des caisses de la Facilité de soutien à la paix pour l’Afrique.  De plus, l’ONU va dépendre de partenaires externes pour être en mesure d’apporter le soutien nécessaire au G5 Sahel. 

En outre, malgré le nombre important d’annonces de contributions, les fonds nécessaires pour mettre en œuvre l’intégralité du soutien de la MINUSMA à la Force conjointe restent en suspens, a poursuivi la responsable.  Avec les fonds reçus à ce jour, la Mission ne peut fournir que des biens de consommation essentiels et des services d’évacuation sanitaire de base.  La MINUSMA a encore besoin de fonds en urgence pour le soutien en ingénierie afin de fournir une assistance pour la fortification des camps du G5 sur le territoire malien.  Pour l’instant, les troupes déjà déployées par la Force conjointe doivent vivre et opérer dans des conditions les plus difficiles.

Mme Keita a donc invité les donateurs à contribuer ou affecter des fonds supplémentaires au soutien de la MINUSMA à la Force conjointe, et à renforcer leur soutien aux secteurs Est et Ouest qui ne bénéficieront pas pour l’instant du soutien de l’ONU, étant situés hors du Mali. 

Sur le long terme, Mme Keita a fait écho aux recommandations du Secrétaire général dans ses derniers rapports en ce sens qu’il faut réfléchir ensemble à des mécanismes permettant un financement plus pérenne, y compris en envisageant des contributions obligatoires.

En fin de compte, a affirmé la Sous-Secrétaire générale, « toutes les tentatives pour surmonter l’instabilité et l’insécurité au Sahel ne réussiront que si elles se concentrent sur le lien entre le développement, la paix et la sécurité ». 

Les interventions de la Force conjointe resteront toujours une initiative axée sur la sécurité, qui, a-t-elle précisé, doit s’inscrire dans un cadre plus large et holistique, en l’associant à des initiatives visant à améliorer la gouvernance, l’accès à la nutrition et aux services sociaux de base, et à créer des opportunités pour les jeunes. 

L’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali se présente aussi comme « la pierre angulaire de tout effort de stabilisation dans la région ».  Face aux informations faisant état de violations des droits de l’homme par les forces de l’ordre locales, Mme Keita a rappelé que « la Force conjointe ne peut réussir que si elle jouit de la confiance et du soutien de la population locale ».  En outre, la mise en place du groupe de soutien permettrait une coopération plus concertée et systématique avec la région, l’Union africaine et d’autres partenaires internationaux.

Le Secrétaire permanent du G5 Sahel, M. MAMAN SIDIKOU, a noté que la région du Sahel, confrontée à des enjeux multiples qui ont été longtemps minimisés ou ignorés, est devenue progressivement « une zone d’instabilité majeure en Afrique » et représente aujourd’hui un danger croissant pour la sécurité internationale.   

Au premier rang de ces défis, la crise sécuritaire, depuis plusieurs années déjà, mais qui a pris une acuité extrême récemment, du fait de la prolifération des conflits armés à l’intérieur de nos pays, la propagation du terrorisme d’obédience religieuse extrémiste, le narcotrafic et d’autres formes de criminalité transfrontalière avec des ramifications internationales, ainsi que « la crise migratoire et sa plus hideuse manifestation que constitue la traite abjecte des êtres humains », organisée par les filières d’immigration clandestine vers l’Europe.

M. Sidikou a salué le fait que les cinq pays sont en train de réussir à constituer en quelques mois la Force conjointe du G5 Sahel, composée de 5 000 soldats, dont l’opérationnalisation est en cours et qui bénéficie de l’appui de la communauté internationale à travers notamment la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali (MINUSMA) et l’opération Barkhane menée par la France. 

Un accord dit « Arrangement technique » a été conclu dans ce sens entre l’ONU, l’Union européenne et le G5 Sahel en février dernier et signé par le Président du Niger et Président en exercice du G5 Sahel, M. Issoufou Mahamadou.  En vue de se conformer aux normes de l’ONU en la matière, la Force conjointe a intégré dans son Concept général des opérations (CONOPS) le cadre de conformité des droits de l’homme.  Le G5 Sahel et la MINUSMA ont déjà entamé leur collaboration lors de la mise en place du quartier général de la Force conjointe à Sevaré, au Mali, ainsi que durant le déroulement des deux premières opérations de la Force (opérations « Hawbi et Pagnali ») dans la délicate zone des trois frontières entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger.

M. Sidikou a reconnu toutefois que « la Force est encore loin d’avoir atteint une bonne vitesse de croisière dans la mise en œuvre concrète de sa réponse sécuritaire à la crise qui menace de totalement déstabiliser le Sahel et ses environs ». 

Même si plus de 80% des effectifs sont déjà déployés au quartier général de Sevaré et au niveau des trois zones opérationnelles, il n’en demeure pas moins que les troupes sont encore généralement mal équipées, les bases militaires et plus globalement la logistique nécessaire à une intervention efficace font défaut, surtout dans un environnement souvent hostile à plusieurs égards. 

Le Secrétaire permanent a également déploré le fait que la configuration du soutien de la MINUSMA à la Force conjointe, autorisée par la résolution 2391 (2017), limite grandement une efficiente couverture de la région et une bonne emprise opérationnelle sur tous les fronts identifiés comme urgents pour des prochaines interventions de la Force.  Il a ainsi regretté « l’inadaptation du dispositif mis en place pour appuyer la Force conjointe », qui n’est « pas à la hauteur des enjeux ni viable dans la durée ». 

Dans cette optique, M. Sidikou a invité le Conseil de sécurité à situer l’apport de l’ONU à un niveau plus approprié, qui passera entre autres par des contributions obligatoires afin d’être en mesure d’apporter un appui de long terme.  Il a aussi demandé au Conseil de doter la Force conjointe du mandat renforcé qu’elle mérite et des ressources nécessaires pour achever son opérationnalisation et assurer sa pleine capacité d’intervention.

« Il s’agit de réussir, avec la Force conjointe du G5 Sahel, à mettre en place une force opérationnelle performante, d’ossature africaine, mais soutenue fortement par l’ensemble de la communauté internationale, ONU en tête », a expliqué le Secrétaire permanent. 

Selon lui, une telle option enverrait un message fort à toutes les forces négatives et permettrait de mener à bien une mission des plus périlleuses dont l’échec signerait la déstabilisation totale d’une bonne partie du continent africain, d’une région voisine de la Méditerranée et donc du continent européen, et qui se présente comme un carrefour important de circulation vers le reste du monde: l’Amérique, l’Asie et le Moyen-Orient en particulier. 

M. Sidikou a argué que pour la nébuleuse « Internationale terroriste » et tous les groupuscules apparentés, l’échec de du G5 Sahel signifierait leur offrir sur un plateau d’argent la meilleure base opérationnelle possible pour organiser la propagation quasi illimitée, partout dans le monde, d’un terrorisme de masse encore plus terrifiant que ce que nous vivons déjà aujourd’hui.

Conscients d’être les premiers concernés, les cinq États, malgré des ressources financières très limitées, ont récemment consenti des efforts importants pour accroître les moyens de leurs forces de défense et de sécurité, qui en moyenne bénéficient dorénavant de plus de 20% du budget des cinq pays, au détriment souvent des secteurs sociaux pourtant critiques.  Ainsi, la quote-part attendue des cinq pays pour financer la Force conjointe est versée par tous, malgré parfois quelques retards.  Il a souligné que les premières contributions financières, essentiellement africaines, sont déjà arrivées ou en voie de l’être, notamment celles du Rwanda et des pays membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).

Le Secrétaire permanent a aussi parlé d’un travail mené notamment avec l’appui du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en vue de veiller au respect strict des droits de l’homme dans cette lutte contre la terreur.  Il a averti qu’il est crucial, pour un succès de long terme, de ne pas isoler la réponse sécuritaire du reste de la problématique complexe du Sahel.  En effet, sans la paix et la sécurité, point de développement ni de prospérité possibles.  Mais, l’absence de développement et de progrès socioéconomiques notables favorise aussi la recrudescence de l’insécurité et de l’instabilité.  D’où l’importance d’une approche plus holistique dans la réponse à la situation sahélienne.  Par conséquent, le « nexus sécurité-développement » doit être au cœur de cette action, bien tangible sur le terrain pour les populations du Sahel.  « Il est plus que temps d’agir pour le Sahel au-delà des discours et des demi-mesures », a conclu le Secrétaire permanent du G5 Sahel. 

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, déléguée de l’Union africaine, a dit être profondément préoccupée par la détérioration de la situation au Mali et dans la région du Sahel.  Ce qui s’y déroule rappelle que les groupes terroristes ne connaissent pas de frontières, d’où l’urgence d’un engagement international robuste en appui aux efforts déployés par les pays de la région, à commencer par le G5 Sahel et le processus de Nouakchott.

L’intervenante a salué des progrès réalisés jusqu’à présent à travers la Force conjointe du G5 Sahel qui a mené avec succès ses deux premières opérations après l’établissement de son quartier général à Sévaré, au Mali.  Elle a aussi exprimé sa gratitude aux partenaires bilatéraux et multilatéraux, y compris ceux ayant pris des engagements lors de la Conférence de haut niveau qui s’est tenue à Bruxelles le 23 février dernier.

L’Union africaine se félicite ainsi des premières contributions financières africaines, notamment celles du Rwanda et des pays membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).  Mme Mohammed a souligné le besoin urgent d’assurer le financement prévisible et durable de la Force conjointe qui, en raison des difficultés financières et en l’absence d’équipements majeurs, tarde à atteindre sa pleine capacité opérationnelle.  À cela s’ajoute le fait que la Force ne peut pas mener des opérations de grande envergure, « laissant finalement l’initiative aux groupes terroristes et au crime organisé ».

Les besoins en soutien logistique et en capacités d’acquisition du renseignement sont également immenses, a-t-elle poursuivi, avant de solliciter le soutien du Conseil de sécurité au G5 Sahel et d’attirer l’attention sur la volatilité de la situation sécuritaire dans la région de Liptako-Gourma.  « Seul un mandat robuste en vertu du Chapitre VII de la Charte, ainsi que des moyens importants à la disposition de la Force conjointe du G5 Sahel, pourraient aider à éradiquer les menaces identifiées », a-t-elle fait valoir.

La représentante a par ailleurs relevé que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine avait décidé, le 23 mars, de proroger de 12 mois le déploiement de la Force conjointe du G5 Sahel.  L’Union africaine poursuivra également ses efforts pour renforcer la cohérence au sein de l’architecture africaine pour la paix et la sécurité dans la région du Sahel, l’objectif étant notamment de renforcer la coopération entre les pays, d’améliorer la sécurité des frontières et le partage de renseignements.  Une étape importante a d’ailleurs été franchie avec la signature, le 24 mars, d’un mémorandum d’accord pour l’opérationnalisation de la Force conjointe.  Elle a ensuite exhorté les parties maliennes à redoubler d’efforts pour assurer la bonne mise en œuvre des dispositions principales de l’Accord de paix d’Alger.

Enfin, Mme Mohammed a souligné que la complexité et la nature multidimensionnelle des défis qu’affronte la région du Sahel appellent à tenir compte des liens étroits entre la sécurité et le développement.  Elle a jugé nécessaire de « recalibrer » les interventions afin d’être mieux à même de pouvoir répondre aux causes sous-jacentes de l’instabilité et de mettre un terme à la violence.  L’Union africaine prend des mesures pour dresser la liste des différents projets lancés par ses institutions dans la région afin de renforcer la synergie de ses interventions et de les aligner avec les priorités régionales.

M. JOÃO VALE DE ALMEIDA, Chef de la délégation de l’Union européenne, a souhaité que le décaissement par l’Union européenne de 10 millions d’euros au profit de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) permette de lancer rapidement un soutien efficace à la Force conjointe du G5 Sahel.

Depuis la conférence organisée à Bruxelles le 23 février dernier, où la communauté internationale a promis plus de 400 millions d’euros, et avec l’arrangement technique G5-ONU-UE désormais en place, le G5 Sahel dispose du soutien international nécessaire pour progresser dans le déploiement et l’opérationnalisation de sa Force conjointe, a-t-il dit.  M. de Almeida a invité d’autres partenaires à utiliser ce mécanisme pleinement opérationnel pour acheminer leur financement à la MINUSMA.  C’est là un élément essentiel, car le type de soutien que la MINUSMA peut apporter sur le terrain à la Force conjointe ne peut être fourni directement par aucun autre canal, y compris bilatéral, a-t-il insisté.

Le délégué a saisi cette occasion pour annoncer que l’Union européenne prépare une contribution de 10 millions d’euros en faveur de l’établissement et de la mise en œuvre d’un cadre de conformité aux droits de l’homme et au droit international humanitaire.  Elle apporte déjà un soutien de 70 millions d’euros pour la fourniture d’équipements, d’infrastructures et de services à la Force conjointe.

« L’Union européenne est convaincue que la Force conjointe doit être fermement ancrée dans un cadre politique et institutionnel plus vaste, pour guider ses opérations et faire en sorte qu’elles ne constituent qu’un élément d’une stratégie régionale large », a dit M. de Almeida.

L’Union européenne s’est également engagée à hauteur de 5 millions d’euros à soutenir le G5 Sahel dans l’opérationnalisation de son fonds fiduciaire, la mise en place du comité de soutien et du comité de contrôle, ainsi que du bureau de défense et de sécurité du Secrétariat permanent.

M. de Almeida a salué cette nouvelle dynamique, « favorable à la poursuite du leadership et de l’intégration du G5 Sahel, aux niveaux national et régional », ainsi que les efforts déployés à cet égard par le Secrétariat permanent du G5 Sahel.

À ce titre, il a estimé essentiel de prendre en compte le protocole d’accord récemment conclu entre l’Union africaine et le G5 Sahel, qui confère un rôle de coordination à l’Union africaine et considère la Force conjointe comme faisant partie de l’architecture africaine de paix.

Parallèlement, le délégué a assuré que l’Union européenne continuera de gérer le centre de coordination, le « coordination hub », aussi longtemps qu’il sera jugé nécessaire pour aider la Force conjointe et le Secrétariat permanent du G5 à organiser et apporter de la cohérence aux contributions volontaires internationales à la Force.

Mais au-delà du soutien financier et institutionnel, les efforts européens de renforcement des capacités de défense et de sécurité dans la région, notamment au Mali et au Niger, sont actuellement réévalués afin d’étendre leurs activités à la formation et à la fourniture de conseils à la Force conjointe, dans le plein respect des prérogatives et de l’autorité du G5 Sahel, a-t-il expliqué.

L’Union européenne soutient également le développement et l’opérationnalisation de la composante police de la Force conjointe du G5.  « C’est là la clef pour assurer une judiciarisation adéquate de toute action contre la criminalité organisée et le terrorisme, ainsi que pour s’assurer de l’aval et garantir une protection appropriée de la population civile. »  Enfin, il est important de ne pas perdre de vue la dimension sécuritaire de la contribution européenne au développement économique, social et politique de la région.  À cet égard, l’Union européenne a apporté une aide de 8 milliards d’euros au Sahel au cours des sept dernières années.  Il n’y a pas besoin de rappeler aussi qu’aucun progrès durable ne sera réalisé sans des avancées concomitantes sur le plan politique, a insisté M. de Almeida.  « Nous devons plus que jamais mettre à profit l’ensemble des leviers dont nous disposons pour encourager les parties maliennes à mettre en œuvre leurs engagements. »

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a appelé à « faire preuve de réalisme dans nos attentes sur le court terme », car la Force conjointe du G5 Sahel fait encore face à de nombreux défis.  Parmi ces défis, il a cité la disponibilité d’équipements critiques, comme les moyens de communication destinés à faire le lien entre les structures de commandement de la Force et ses contingents sur le terrain.  « Son opérationnalisation ne peut pas se faire du jour au lendemain. » 

Il importe, a expliqué M. Delattre, que les États du G5 Sahel continuent dans les mois à venir de faire le meilleur usage du soutien apporté afin de finaliser l’opérationnalisation de la Force.  Pour lui, la matérialisation des contributions annoncées constitue une condition importante pour leur permettre d’avancer.  « On ne peut nourrir à l’égard de la Force conjointe des attentes qui soient déconnectées du rythme de mise en œuvre de notre propre soutien », a-t-il insisté.

Un autre point important, à son avis, est l’activation du soutien prévu dans le cadre de l’arrangement technique, grâce à une contribution de l’Union européenne.  Le représentant a tenu à rappeler que la réponse militaire ne constitue qu’une partie de la solution et qu’il ne saurait y avoir de stabilisation durable du Sahel sans les avancées concomitantes sur les plans politique et du développement.  Pour sa part, la France entend continuer à porter la question de la lutte contre le terrorisme au Sahel au Conseil de sécurité, a-t-il assuré, car « la situation sur le terrain le justifie plus que jamais ».  En conclusion, il faut appeler la communauté internationale à mettre en œuvre dans les meilleurs délais l’ensemble du soutien annoncé, et encourager les États du G5 Sahel à poursuivre leur mobilisation en faveur du déploiement effectif de la Force conjointe.

Si le rapport du Secrétaire général permet de noter les progrès accomplis dans l’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel, a relevé M. ILAHIRI ALCIDE DJÉDJÉ (Côte d’Ivoire), il nous offre également l’occasion de faire l’état des multiples défis qui persistent.  Parmi ces défis, il a cité la mobilisation de l’assistance internationale, et la mise en œuvre de l’Accord technique et du Cadre de conformité sur le respect des droits de l’homme, adoptés par les pays du G5 Sahel.  La Côte d’Ivoire encourage tous les acteurs concernés, en particulier les États du G5 Sahel, à poursuivre leurs efforts en vue de la maturation de la Force conjointe, qui illustrent, a-t-il insisté, « la volonté des pays africains de s’approprier leur sécurité collective ».

Évoquant la détérioration de la situation sécuritaire dans la région du Sahel, M. Djédjé a souscrit à l’appel lancé par le Secrétaire général pour intensifier le dialogue avec les partenaires internationaux afin de renforcer et de mieux coordonner les soutiens multiformes à l’opérationnalisation de la Force conjointe.  Les capacités de déploiement rapide et la bonne connaissance de l’environnement socioculturel constituent des avantages comparatifs dans la lutte contre l’expansion du terrorisme et de la criminalité transfrontalière dans le Sahel.  L’appui logistique et opérationnel de la MINUSMA à la Force constitue, selon lui, « un bon exemple de coopération entre une opération des Nations Unies et une opération africaine de paix ».  Cependant, a-t-il averti, quand bien même elle atteindrait sa pleine capacité opérationnelle, l’efficacité de la Force restera tributaire des efforts actuels visant à stabiliser l’environnement politique régional.  C’est pourquoi, a conclu le représentant, « la Force conjointe doit être une composante d’un projet politique qui va au-delà de l’approche sécuritaire pour une résolution durable des crises actuelles dans la région ». 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a rappelé que la déstabilisation du Sahel trouve son origine dans la guerre en Libye en 2011.  Il a insisté sur le besoin d’assistance humanitaire au Sahel, notant qu’aux effets des conflits, il faudrait aussi ajouter les conséquences négatives des changements climatiques.  Il a salué la volonté politique des cinq pays pour opérationnaliser la Force conjointe, et il a jugé indispensable que la Force crée les conditions pour le déploiement total des forces militaires et de police.  Il a invité la communauté internationale à apporter son soutien technique et financier au G5 Sahel.  Il a aussi souhaité que les programmes prévus dans la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel soient mis en œuvre.

Durant la visite du Conseil de sécurité au Sahel, en octobre dernier, « nous avons été témoins de la ferme volonté des États de la région de relever le défi sécuritaire, a rappelé Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) qui a tenu à les féliciter pour leur détermination en dépit de circonstances difficiles.  Elle a encouragé les États du G5 Sahel à mettre en œuvre les éléments contenus dans la résolution 2391 (2017) pour assurer la crédibilité et la pleine opérationnalisation de la Force conjointe.

La représentante a jugé importante la mise en œuvre du cadre de conformité relatif aux droits de l’homme qui est, selon elle, essentielle pour le plein succès sur le long terme de la Force.  En outre, elle a salué le soutien fourni par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) dans la région.  Pour la déléguée, la Force conjointe G5 Sahel fait partie des nombreux instruments qui contribuent à une approche régionale intégrée et durable de la situation au Sahel.  Dès lors, a-t-elle conclu, nous partageons l’avis du Secrétaire général de l’inscrire dans un cadre institutionnel et politique plus large, « en tant qu’élément d’une stratégie globale pour la région ».

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) s’est inquiété de la détérioration de la situation au Sahel et a condamné les attaques terroristes qui y sont perpétrées. Il a loué les efforts déployés par la Force conjointe du G5 Sahel, s’inquiétant toutefois des défis rencontrés pour assurer sa pleine opérationnalisation et son financement.  Il a salué les annonces de contribution faites à la Conférence de Bruxelles au mois de février dernier.

Le représentant a également jugé fondamental que les Africains mènent eux-mêmes les efforts de lutte contre le terrorisme, se félicitant de la contribution financière du Rwanda.  Il a ensuite appelé à examiner les facteurs de la propagation de l’extrémisme violent dans la région.  « Une approche globale est nécessaire afin de construire des sociétés qui privilégient la sécurité humaine et ne se limitent pas à la défense des frontières. »  Il a aussi appelé au plein respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire.

M. KAREL J. G. VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a salué les efforts déployés jusqu’à présent par les pays du G5 Sahel pour établir une force régionale dans un environnement sécuritaire et politique complexe.  Il a constaté que le succès de la Force conjointe dépend des progrès réalisés dans le cadre du processus de paix malien et a exhorté les parties concernées à prendre les mesures qui s’imposent pour établir une paix durable au Mali.  Il convient également de répondre aux causes sous-jacentes du conflit et les Pays-Bas se félicitent du programme de développement du G5 et de l’Alliance Sahel lancée par la France et l’Allemagne.

Le représentant a aussi souligné que pour être efficace, la Force doit bénéficier de la confiance de la population.  Il a également dit l’importance des mécanismes de responsabilisation au vu des violations des droits de l’homme commises au Mali.  Il a ensuite encouragé le G5 Sahel à accélérer l’établissement de la composante de police qui, a-t-il ajouté, est essentielle pour combattre le terrorisme, la criminalité transnationale et le trafic de migrants.  Ces menaces sapent non seulement la stabilité du Sahel, mais représentent également « une importante préoccupation sécuritaire pour l’Europe », a-t-il indiqué.

M. van Oosterom a par ailleurs souligné qu’un financement prévisible et à long terme permettrait de renforcer la légitimité et l’efficacité de la Force.  Enfin, l’appui accordé par la MINUSMA à l’opérationnalisation de la Force ne doit pas se faire au détriment de ses principales responsabilités.

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a estimé que la Force conjointe du G5 Sahel a le potentiel d’être « un bon exemple de solution africaine apportée à un problème africain », tout en reconnaissant que son succès dépend de l’appui politique unanime du Conseil de sécurité et de la capacité des États du G5 à la rendre entièrement opérationnelle.  Il a appelé à renforcer la coordination entre la Force conjointe et les autres forces de sécurité qui se trouvent dans la région, notamment la MINUSMA, l’opération française Barkhane et le Processus de Nouakchott.

D’après le représentant, l’action antiterroriste de la Force conjointe doit aller de pair avec les efforts entrepris pour répondre aux causes sous-jacentes du conflit, à commencer par le renforcement de la gouvernance, la réduction de la pauvreté et des rivalités tribales, ainsi que l’octroi de services de base et la création d’emplois.  L’atténuation des changements climatiques doit aussi être érigée en priorité.

Pour résoudre les conflits régionaux, M. Tumysh a également proposé une stratégie en trois étapes reposant sur le renforcement des liens entre la sécurité et le développement, une approche régionale renforcée et la rationalisation du système des Nations Unies qui, a-t-il ajouté, doivent par ailleurs finaliser leur Stratégie intégrée pour le Sahel.

Mme AMY NOEL TACHCO (États-Unis) a indiqué que les solutions sécuritaires ne suffiront pas à régler les questions de gouvernance ou les défis économiques dans le Sahel.  Elle a recommandé de ne pas perdre de vue le processus de paix au Mali, rappelant que l’Accord de paix d’Alger reste de la plus grande importance pour la stabilité de ce pays.  Le Conseil de sécurité devrait également, a-t-elle suggéré, user de sanctions ciblées afin de parvenir à des résultats probants au Mali. 

La déléguée a prévenu que « la route sera encore longue pour la pleine opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel », et que le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire sera essentiel pour son succès.  Les États-Unis, a-t-elle informé, attendent les résultats de l’enquête gouvernementale après la mort d’une douzaine de civils maliens dans la localité de Boulikessy, à la frontière avec le Burkina Faso, le 19 mai dernier, à la suite d’une opération du G5 Sahel. 

Mme Tachco a estimé que « la MINUSMA ne peut efficacement soutenir la Force conjointe alors qu’elle ne peut même pas assurer sa propre protection ».  C’est pourquoi les États-Unis plaident davantage pour une combinaison de soutiens bilatéraux et multilatéraux pour appuyer la Force conjointe.  Les États-Unis ont fait des efforts en ce sens envers les pays de la région, a-t-elle rappelé.  Elle a ajouté que la stabilité dans le Sahel est aussi liée aux questions de développement et à la prise en charge des besoins humanitaires.

M. ABDULAZIZ ALJARALLAH (Koweït) a salué l’accord technique signé en février dernier, ainsi que les démarches lancées pour opérationnaliser la Force conjointe du G5 Sahel.  La communauté internationale et l’ONU doivent continuer de renforcer les capacités de la Force, et les pays du G5 redoubler d’efforts pour permettre à celle-ci de faire face à la menace terroriste.

Préoccupé par l’ampleur de la criminalité transnationale organisée, caractérisée par des trafics en tous genres, le représentant a appelé à renforcer la coopération entre la Force et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).  Il a déploré la lenteur des avancées du processus de paix malien, pour ensuite insister sur l’importance de tenir compte du développement de la région.  Dans cet esprit, il a mentionné l’appui de Banque islamique de développement qui apporte un soutien économique à des projets d’autonomisation des jeunes et des femmes.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a constaté que le manque de progrès dans le processus de paix malien vient exacerber la situation dans la région du Sahel, s’inquiétant notamment de l’ampleur et de « la sophistication sans précédent » des attaques perpétrées par les terroristes.  Il s’est inquiété des défis énormes qui doivent encore être surmontés pour accélérer la pleine opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel, notamment en termes de renseignements, de transport et de communication.  Faute de moyens de transport, la communication entre le siège de la Force, les postes de commandement et les bataillons présente un défi sérieux, a-t-il insisté, d’où la nécessité de faire de la construction des infrastructures du camp et de l’amélioration du siège de la Force une priorité.

Le représentant a ensuite salué « la démonstration de solidarité africaine » du Rwanda qui a contribué un million de dollars pour appuyer l’opérationnalisation de la Force.  Il s’est aussi félicité de la signature des arrangements techniques entre les pays du G5 Sahel, l’ONU et l’Union européenne, dans le respect de la résolution 2391 (2017).  Il a également appelé le Conseil de sécurité à examiner les deux options proposées par le Secrétaire général dans son rapport pour renforcer l’appui de l’ONU à la Force conjointe.

Soulignant l’importance de répondre aux causes sous-jacentes du conflit, M. Alemu a appelé à mettre en œuvre une stratégie « holistique » sur la base de l’appropriation nationale et du partenariat avec les pays de la région du Sahel. Il a aussi réclamé une plus grande synergie entre l’Union africaine, l’ONU et les partenaires internationaux.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a indiqué que malgré la générosité des bailleurs de fonds, les déboursements restent attendus en faveur du G5 Sahel.  Son pays entend offrir un financement le mois prochain au Niger et fournir un hélicoptère d’évacuation sanitaire, a-t-il annoncé.  En plus de leurs activités régionales, les pays du Sahel doivent continuer d’agir pour la paix sur le plan national.  Il a ainsi appelé à la mise en œuvre de l’Accord d’Alger pour la paix au Mali, estimant que le Conseil de sécurité devrait pouvoir user de tous les outils à sa disposition pour sanctionner ceux qui en entravent l’application.

Selon le Royaume-Uni, l’aide au développement doit aussi tenir compte des causes réelles d’insécurité dans le Sahel.  Le représentant a donc dit attendre avec impatience la Stratégie révisée des Nations Unies pour le Sahel qui devrait être plus « holistique ».  Il s’est aussi félicité que le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire ait été pris en compte dans la signature de l’accord tripartite entre le G5 Sahel, l’Union européenne et l’ONU. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est inquiété de la grave situation humanitaire et sécuritaire dans la région du Sahel.  Il a insisté sur l’importance d’y apporter une réponse coordonnée et de préserver la cohérence politique tout en tenant compte des priorités du G5 Sahel et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Il a salué la création du fonds d’affectation spéciale géré par l’Union européenne et la décision de l’Union africaine de proroger d’un an le mandat de la Force conjointe.  Il a insisté sur la nécessité d’un financement prévisible et pérenne.

Le représentant a aussi appelé à privilégier une approche globale face au conflit en tenant notamment compte des impératifs de développement, des changements climatiques et du rôle des femmes.  Il s’est inquiété de l’absence de progrès du processus de paix au Mali et a espéré que les prochaines élections soient l’occasion de renouveler le dialogue politique.  Il convient également de tenir compte des liens entre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée et de renforcer les efforts pour combattre ces deux fléaux, a-t-il ajouté.

Le Pérou estime que le G5 Sahel illustre bien comment les pays africains qui en ont la capacité peuvent assumer des responsabilités importantes pour promouvoir la paix et la sécurité, mais encore faut-il qu’ils puissent bénéficier de l’appui de la communauté internationale, dont celui du Conseil de sécurité.

Selon M. ALEXANDER A. POLYANSKIY (Fédération de Russie), « les causes profondes de l’insécurité au Sahel sont liées à l’effondrement de l’État libyen à la suite des interventions militaires étrangères ».  Pour lui, sans une stabilité en Libye, il ne sera pas possible de parvenir à la paix au Sahel.  Il a souhaité que les donateurs ayant annoncé des contributions s’activent pour que la Force conjointe du G5 Sahel puisse prendre son envol.  Il est évident que l’on ne pourra pas éradiquer les conflits uniquement par les moyens militaires, a-t-il noté, tout en plaidant pour des solutions globales aux défis de développement.  La Fédération de Russie étudie les moyens de renforcer sa coopération avec les pays de la région, notamment dans le cadre du renforcement des capacités militaires des pays.

M. WU HAITAO (Chine) s’est félicité des progrès réalisés depuis l’adoption de la résolution 2391 (2017), s’inquiétant toutefois des nombreux défis que continue d’affronter la région du Sahel.  Il a appelé à renforcer l’appui de la communauté internationale à la Force conjointe du G5 Sahel, se félicitant de la signature de l’accord technique et des récentes promesses de contributions.  Le représentant a aussi appelé à identifier les priorités de la région en respectant la souveraineté des pays concernés, de manière à promouvoir une paix et stabilité durables au Sahel.  Il faut aussi tenir compte des effets « boule de neige » de certaines situations, notamment la crise libyenne, a-t-il ajouté.

Le représentant a ensuite appelé à combattre le terrorisme de manière active.  Il a aussi insisté sur l’importance de promouvoir la pleine implication des organisations régionales et de renforcer la coordination avec les pays de la région.  La Chine appuie « la recherche de solutions africaines pour des problèmes africains », a-t-il par ailleurs assuré.

Liant les causes profondes des conflits aux défis en matière de gouvernance ou de développement, Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a encouragé une coopération accrue entre les pays du G5, les pays voisins et les organisations régionales.  Cela est essentiel pour la réalisation d’un progrès à la fois tangible et durable.  Ensemble, Le G5 Sahel et la Force conjointe illustrent, selon elle, cet exemple de collaboration globale.  Elle a donc exprimé son plein soutien au mandat de la Force conjointe et formé le vœu qu’avec l’appui de la communauté internationale, ce mécanisme sera bientôt pleinement opérationnel, en conformité avec le droit international, y compris le droit international humanitaire, les droits de l’homme et le droit international des réfugiés.

Après avoir évoqué l’assistance fournie par la Pologne aux troupes tchadiennes opérant au sein de la Force, la représentante a fait part de la décision de son pays de contribuer davantage à ce mécanisme, notamment à travers un programme de renforcement des capacités dans le domaine de la lutte contre les engins explosifs improvisés.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité des ONG recommande le statut consultatif spécial à 57 ONG et reporte sa décision sur 26 autres

Reprise de la session 2018,
19e & 20e séeances - matin & après-midi
ECOSOC/6916-ONG/871

Le Comité des ONG recommande le statut consultatif spécial à 57 ONG et reporte sa décision sur 26 autres

Le Comité des ONG a, aujourd’hui, recommandé le statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social (ECOSOC) à 57 ONG et reporté sa décision sur 26 autres en attente des réponses aux questions portant en majorité sur le financement.

Cuba a voulu comprendre comment l’ONG britannique « Broad National Movement- BNM Limited Ltd », finance des projets d’aide aux réfugiés soudanais au Caire, dans le Darfour et dans l’État soudanais du Nil-Bleu, avec un budget de 10 dollars.  Cuba a aussi demandé à l’ONG nigériane « South Saharan Social Development Organisation » comment elle préserve son indépendance alors que 85% de son budget vient de l’étranger?  L’ONG équipe les jeunes femmes et hommes avec les compétences sociales, sanitaires, économiques, éducatives et politiques nécessaires pour survivre dans une région en pleine mutation et en pleine urbanisation. 

Cuba a également exigé de l’ONG française « Association Duval » pourquoi 80% de son financement vient du secteur privé.  L’Association mène des actions pour la protection et l’aide à l’enfance, aux personnes âgées, aux malades et aux familles.  Elle s’attache tout particulièrement à l’égalité des chances entre hommes et femmes, notamment en soutenant des projets ou initiatives permettant aux enfants d’avoir un réel accès à l’éducation.

La Fédération de Russie s’est interrogée sur les activités de l’ONG russe « The Andrey Rylkov Foundation for Health and Social Justice » l’année dernière.  L’ONG a expliqué qu’elle ne reçoit plus de fonds de la Fondation Open Society depuis que les activités de M. George Soros ont été interdites en Russie.  Nous n’avons pas non plus la chance d’être boursier de la Présidence russe, a ajouté l’ONG qui lutte contre l’épidémie du sida et la consommation de drogue à Moscou. 

Le Comité des ONG peut recommander trois types de statut consultatif auprès de l’ECOSOC.  Le statut consultatif général est réservé aux grandes ONG internationales, dont les domaines d’action et de travail couvrent la majorité des points contenus dans l’ordre du jour de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires.  Ces ONG sont autorisées à soumettre au Conseil des communications écrites et des pétitions, et à proposer l’inscription de points à l’ordre du jour.

Les ONG qui travaillent dans un domaine spécifique peuvent, elles, recevoir le statut consultatif spécial et soumettre des communications écrites et des pétitions.  La Liste est réservée aux ONG qui ne rentrent dans aucune de ces deux catégories et qui ont plutôt tendance à travailler d’une manière plus technique et/ou restreinte.  Elles ne peuvent soumettre au Conseil économique et social que des communications écrites.

Le Comité des ONG poursuivra ses travaux demain, mercredi 23 mai, à partir de 10 heures.

Nouvelles demandes d’admission au statut consultatif ou de reclassement

Octroi du statut consultatif spécial

  1. ANADEC- Acção Nacional para o Desenvolvimento Comunitária (Guinée-Bissau)
  2. Agir Pour l'Epanouissement de l’Enfant et de la Femme en Afrique-A.P.E.E.F.A. (Togo)
  3. Ligue pour la solidarité congolaise (République démocratique du Congo)
  4. Maharat Foundation (Liban)
  5. Mothers Pride and Development Initiative (Nigeria)
  6. Mouvement panafricain Jeunes pour la reconstruction, la réforme et la révolution culturelle au Tchad et en Afrique- JRRRC (Tchad)
  7. Nigerian Association of Commercial Commuters (Nigéria)
  8. Observatoire National pour les Droits de l'Électeur (Maroc)
  9. Organization For Community Development Project (Nigéria)
  10. Pars Non Trading Development Activists Co. (Iran)
  11. Partners For Transparency (Égypte)
  12. Paryavaran Mitra, Thaltej Ahmedabad (Inde)
  13. Projonma Academy (Bangladesh)
  14. Proslavi Oporavak (Bosnie-Herzégovie)
  15. RENCTAS- Rede Nacional De Combate Ao Trafico De Animais Silvestres (Brésil)
  16. Red Dot Foundation (Inde)
  17. Rivers Of Hope and Humanitarian Initiative (Nigéria)
  18. Self-Help Association for Rural people through Education and Entrepreneurship (Bangladesh)
  19. Sheba Shangstha (Bangladesh)
  20. Singapore Children's Society (Singapour)
  21. Sociedade Maranhense de Direitos Humanos (Brésil)
  22. Society For Public Education Cultural Training & Rural Action– SPECTRA (Inde)
  23. Soroor Mehr Andishan Rastin Institute (Iran)
  24. Students' Care Service (Singapour)
  25. Sunny Trust (Pakistan)
  26. Sustainability for Seychelles (Seychelles)
  27. Synergy Care Development Initiative (Nigéria)
  28. Terra de Direitos (Brésil)
  29. The Association of People with Disability (Inde)
  30. Trung tâm Phát triển Nông thôn Bền vững (Viet Nam)
  31. Trust for Youth Child Leadership- TYCL (Inde)
  32. Trybe Limited (Singapour)
  33. VIKALP (Inde)
  34. Vie et Santé du Centre (Cameroun)
  35. Welfare and Nature Club of Naikhyongchari (Bangladesh)
  36. Women in Law and Development in Africa- Femmes,Droit et Developpement en Afrique- Section Togo- Wi.L.D.AF./Fe.D.D.AF- Togo (Togo)
  37. Yayasan Wafaa Indonesia Gemilang (Indonésie)
  38. Yellowjerrycan Save a Child Foundation (Nigéria)
  39. Academy of Dentistry International (États-Unis)
  40. African Cultural Promotions Inc (États-Unis)
  41. Aziz Mahmûd Hüdâyi Vakfı (Turquie)
  42. Barbra Schlifer Commemorative Clinic (Canada)
  43. Biofutura, Asociación Civil (Mexique)
  44. Bufete de Estudios Interdisciplinarios AC (Mexique)
  45. Conoscenza e Innovazione –Scuola di sociologia e di ricerca interdisciplinare (Italie)
  46. Coral Guardian (France)
  47. Danske Handicaporganisationer (Danemark)
  48. Dementia Action Alliance (États-Unis)
  49. Dialogue Afrique-Europe (Belgique)
  50. EcoHealth Alliance (États-Unis)
  51. Eşit Haklar İçin İzleme Derneği (Turquie)
  52. Family Development and Samaritan Foundation, Inc. (États-Unis)
  53. Femmes Informations Juridiques Internationales Rhône-Alpes (France)
  54. Fundación ONCE para la Cooperación e Inclusión de Personas con Discapacidad (Espagne)
  55. DOMUNI (France)
  56. GAHT-US Corporation (États-Unis)
  57. Hardwired, Incorporated (États-Unis)

Report de la décision dans l’attente de réponse aux questions posées par le Comité

Peut-on avoir plus d’informations sur l’organisation turque avec laquelle La Vie Pour Tous (République démocratique du Congo) réalise un projet sur les énergies renouvelables? a demandé la TurquieNational Human Rights Civic Association « Belarusian Helsinki Committee » (Bélarus) a été priée par la Chine de donner davantage d’informations sur sa participation à l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme.  Cuba a voulu que l’Organisation Tamaynut (Maroc) présente un état financier cohérent.

Safe Care Trust International (Pakistan) devra donner au Pakistan des détails sur ses états financiers.  Pourquoi ses dépenses représentent 75% du budget?  Comment fait l’ONG pour équilibrer son budget?  Quels sont les projets de Sensitization Centre (Ghana)?  A-t-elle un calendrier d’exécution? a questionné le Venezuela.  Quels sont les projets en cours de Shrushti Seva Samiti (Inde)? a voulu savoir le Pakistan.

Le Pakistan a exigé que la Society for Participatory Research in Asia (Inde) donne des précisions sur ses partenaires en Asie.  Cuba a demandé à South Saharan Social Development Organisation (Nigéria) comment elle choisit ses projets?  Est-elle indépendante alors que 85% de son budget vient de l’étranger?  L’Uruguay a prié Southern African AIDS Trust- Association incorporated under Section 21 (Afrique du Sud) de produire des certificats d’enregistrement dans les pays où elle est présente.  L’Afrique du Sud a sommé l’ONG de donner la liste des 21 pays où elle est active.  Qui sont les donateurs?  Pourquoi l’ONG n’a aucun projet en Afrique du Sud?

Quelles sont les organisations internationales qui contribuent au budget de The Family Planning Association of Sri Lanka (Sri Lanka)? a interrogé le Nicaragua.  Quelles sont les sources de financement de The Public Association « Kazakhstan International Bureau for Human Rights and Rule of Law » (the Republican Status) (Kazakhstan)? a demandé la Chine.  Les États-Unis ont demandé à World Historic and Cultural Canal Cities Cooperation Organization (Chine) de fournir les résultats de sa collaboration avec l’UNESCO en 2017.  Quels sont les projets de YOUTHLEAD- Jeunes Leaders (Togo)? a voulu savoir le Nicaragua.

L’Iran a voulu savoir plus des activités régionales d’Alternative Perspectives and Global Concerns (Canada).  Dans quelles régions l’ONG opère-t-elle?  Cuba a voulu en savoir plus sur les projets de l’Asia Initiatives Inc (États-Unis) au Costa Rica.  Il a aussi exigé de l’Association Duval (France) qu’elle explique pourquoi 80% de son financement vient du secteur privé.

      La Belgische associatie voor mensenrechten en ontwikkeling (Belgique) devra expliquer au Comité ses activités dans les pays voisins de l’Iraq, a demandé l’Iran.  Cuba a voulu comprendre comment le Broad National Movement- BNM Limited Ltd (Royaume-Uni) finance ses projets avec un budget de 10 dollars.  La Chine a demandé à Canadian Canola Growers Association (Canada) d’utiliser le nom officiel de Taïwan.  La demande de l’Éducation Globale et Développement (Belgique) sera examinée lorsque son dossier sera traduit dans les six langues officielles des Nations Unies, a indiqué la Chine

Dans quels autres pays de la Corne de l’Afrique Eri-Platform (Belgique) travaille-t-elle? a demandé l’Afrique du Sud.  A-t-elle des relations avec le Gouvernement de l’Érythrée?  Ses activités dans les domaines législatif et migratoire se traduisent-elles par des changements concrets en Érythrée?  Vingt pour cent du budget de l’ONG sont consacrés aux projets.  Comment est-ce possible? s’est interrogé le Venezuela.  La Turquie a demandé des informations supplémentaires sur le projet d’université en ligne d’Ethiopian Genocide Committee 1935-1941, Inc. (États-Unis).

      European coalition for just and effective drug policies- ENCOD(États-Unis) a-t-elle des activités en dehors de l’Union européenne? a voulu savoir la Fédération de Russie.  Qui sont les partenaires internationaux qui aident Fondazione del Monte di Bologna e Ravenna (Italie) à mener à bien ses nombreux projets? a questionné la Turquie.

Dialogue avec les ONG

La Fédération de Russie a demandé à World Association for Sexual Health (Royaume-Uni) la nature de son travail avec l’UNESCO.  Ce travail consiste à élaborer un guide mondial de l’éducation sexuelle notamment en Amérique latine, a répondu l’ONG.  Avez-vous l’intention de mener des projets en Russie? a poursuivi le délégué russe.  Malgré la présence de l’ONG dans la salle, comme l’a fait remarquer la Grèce, l’Inde a voulu une réponse écrite à sa question sur la coopération avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP).  Le Nicaragua a voulu en savoir plus sur les futurs projets de l’ONG en Amérique latine.

La Chine a  demandé à Women’s Refugee Commission, Inc. (États-Unis) ce qu’elle fait pour les jeunes filles réfugiées.  Pourquoi vous prétendez-vous indépendante alors que 30% de votre budget vient du Gouvernement?  Cuba a voulu savoir comment l’ONG a pu mener à bien des manifestations avec des organismes des Nations Unies comme l’UNICEF, le FNUAP, ONU-Femmes et l’OMS, sans avoir de statut consultatif.  Quelles sont vos sources de revenu?

La Fédération de Russie s’est interrogée sur les dernières activités de The Andrey Rylkov Foundation for Health and Social Justice (Fédération du Russie) contre le VIH/sida et la drogue.  Nous continuons cette année de ce que nous faisons depuis 2010, a répondu l’ONG qui a dit toucher plus de 3 000 personnes par an.  Vous recevez des fonds d’Open Society.  En recevez-vous aussi du Gouvernement russe?  Nous ne recevons plus de financement de la part de M. George Soros depuis que ses activités ont été interdites en Russie, a indiqué l’ONG.  Nous n’avons pas non plus eu la chance de recevoir une bourse présidentielle en Russie, a ajouté l’ONG.  Quelle est la nature de vos activités à l’étranger? a poursuivi le délégué russe.  Nous participons à des conférences internationales sur le VIH/sida et nous avons contribué à la préparation de rapports de la Fédération de Russie pour le Comité sur les droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU et l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme.  Peut-on avoir par écrit votre nouvel état financier? a conclu la Fédération de Russie.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale proclame le 30 juin « Journée internationale du parlementarisme »

89e séance plénière - matin
AG/12016

L’Assemblée générale proclame le 30 juin « Journée internationale du parlementarisme »

L’Assemblée générale a adopté par consensus, ce matin, une résolution sur l’interaction entre l’ONU, les parlements nationaux et l’Union interparlementaire (UIP), dans laquelle elle décide de célébrer, chaque année, le 30 juin, la Journée internationale du parlementarisme.  La Présidente de l’UIP a appelé les parlementaires à continuer de faire le lien entre l’ONU et les électeurs, pour que les engagements internationaux « se traduisent en actes ».

Créée en 1889 et basée à Genève, en Suisse, l’UIP est l'organisation internationale des parlements.  Financée en premier lieu par ses membres avec des fonds publics, l’UIP a pour principal objectif d’œuvrer pour la paix, la coopération entre les peuples et l’affermissement de la démocratie représentative.

En tant que coauteur du texte, le Mexique, dont est ressortissante la Présidente de l’Union, Mme Gabriela Cuevas Barron, s’est félicité du climat constructif qui a prévalu lors des négociations.  Adoptée deux fois par an par l’Assemblée générale depuis 2004, la résolution appelle chaque fois au renforcement des relations entre l’ONU, l’UIP et les parlements nationaux, dans les domaines du développement durable, de l’égalité entre hommes et femmes, de la lutte contre les changements climatiques, de l’intégration de la jeunesse et de la prévention de l’extrémisme violent.  Fait innovant, le texte adopté aujourd’hui décide de faire du 30 juin, la Journée internationale du parlementarisme.  Il engage également l’UIP à associer l’ONU aux préparatifs de sa future conférence mondiale sur le dialogue interconfessionnel et interethnique, en présence de chefs d’État, de parlementaires et de représentants religieux.

Cette résolution est l’occasion de relancer les efforts pour améliorer la collaboration entre l’ONU et les parlements, s’est félicitée la Présidente de l’UIP.  Mme Cuevas Barron a appelé les parlements du monde entier à continuer de faire le lien entre l’Organisation et leurs concitoyens, pour que les engagements internationaux se traduisent en actes.  « En bref, nous sommes le lien naturel entre les citoyens que nous représentons et l’agenda mondial », a-t-elle déclaré.   

En tant qu’élue mexicaine, Mme Cuevas Barron s’est dite consciente du rôle fondamental des parlementaires, en particulier dans l’élaboration des budgets nationaux, « l’outil politique le plus important dont dispose chaque pays ».  Pour la Présidente, le Secrétaire général de l’ONU, lui-même ancien parlementaire, est bien conscient de ce rôle, comme en témoigne son dernier rapport sur l’« Interaction entre l’Organisation des Nations Unies, les parlements nationaux et l’Union interparlementaire », qui met l’accent sur les domaines clefs de la collaboration entre l’ONU et l’UIP.

Outre le développement durable, la Présidente a souhaité faire ressortir deux éléments clefs de cette coopération.  En premier lieu, les efforts de l’UIP pour concourir à ce que les migrations et la mobilité se fassent de façon ordonnée, sûre, régulière et responsable, notamment en mettant en place des politiques migratoires planifiées et en sensibilisant les parlementaires au sort des réfugiés.  « Les accords en la matière doivent se fonder sur les droits de l’hommes et non sur des discours xénophobes. »

En second lieu, Mme Cuevas Barron a insisté sur la représentation politique des femmes dans les parlements.  L’année dernière, a-t-elle dit, cette représentation n’a augmenté que de 0,1%.  Jugeant cette évolution trop lente, elle a appelé les parlements du monde entier à s’ouvrir davantage, non seulement aux femmes, mais également aux jeunes.  « Nous les parlementaires, ne devons jamais cesser de représenter les personnes qui nous ont élus », a-t-elle appelé.

La Namibie, dont le Parlement compte 47% d’élues, a félicité l’UIP pour son action en faveur de la représentation des femmes.  Certes, la route est encore longue avant de parvenir à une parité parfaite dans le monde, mais il y a 30 ans, lors de l’indépendance de la Namibie, le taux de représentation parlementaire des femmes n’était que de 10%.  Il est désormais de 24%.

« Au cœur même de toute démocratie se trouvent les parlements », a souligné Trinité-et-Tobago, ajoutant que ces derniers avaient la responsabilité de veiller à la bonne gouvernance « par les peuples, pour les peuples ».  La bonne gouvernance n’est pas un luxe mais une condition fondamentale pour atteindre les objectifs de développement durable, a dit le pays, appelant les parlementaires à traduire ces objectifs en stratégies nationales tenant compte des priorités de chaque pays en matière de développement. 

Nous poursuivons tous le même but, à savoir que nos pays concrétisent les objectifs de développement durable, a renchéri l’Argentine.  À travers la résolution d’aujourd’hui, a affirmé le pays, nous disposons d’une feuille de route claire pour éliminer la pauvreté.  Or, malgré les succès rencontrés par certains pays comme la Chine et l’Inde, l’Argentine a déploré la lenteur de la lutte contre la pauvreté dans le reste du monde, notamment en Amérique latine, où le taux de pauvreté moyen est d’environ 29%.  En tant que législateurs, nous pouvons travailler, avec nos gouvernements, à des lois contre la pauvreté et pour le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

La Fédération de Russie a salué « l’échange d’opinions non politisées et respectueuses des parlementaires » au sein de l’UIP.  Dans ce cadre, il est « intolérable » d’adopter des sanctions à l’encontre des parlementaires, a déclaré le pays, qui a accueilli en octobre 2017 la cent-trente-septième Assemblée des parlements nationaux à Saint-Pétersbourg.  Il est essentiel que tous les parlementaires invités à de telles manifestations internationales puissent s’y rendre sans entrave, a insisté la Fédération de Russie.

L’Ukraine a justement déploré la décision de l’UIP d’organiser sa cent-trente-septième Assemblée en Fédération de Russie, malgré « l’acte d’agression » perpétré dans le Donbass ukrainien.  Cette décision sape la crédibilité de l’UIP, a estimé l’Ukraine, qui a pour cette raison, choisi de se dissocier du consensus.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Forum sur la coopération met en évidence le rôle de la coopération Sud-Sud, mais appelle à ne pas la substituer à l’APD

Session de 2018,
30e et 31e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6917

Le Forum sur la coopération met en évidence le rôle de la coopération Sud-Sud, mais appelle à ne pas la substituer à l’APD

Près de 40 ans après l’adoption du Plan d’action de Buenos Aires, qui promeut la coopération technique entre pays en développement, le rôle de la coopération Sud-Sud s’est retrouvé au centre de plusieurs débats lors de la deuxième journée du Forum sur la coopération au développement du Conseil économique et social (ECOSOC).

Une coopération qui prend de l’ampleur, comme en a témoigné Mme Ana Ciuti, la Directrice du Conseil intergouvernemental ibéro-américain, une institution qui réunit tous les pays d’Amérique latine, ainsi que le Portugal et l’Espagne, et qui a recensé 7 000 initiatives de coopération Sud-Sud dans son dernier rapport, contre 7 il y a 11 ans.

Plus tôt dans la matinée, M. Daniel Raimondi, Vice-Ministre des affaires étrangères et du culte de l’Argentine, avait appelé à se saisir de l’« occasion historique » de la deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud (BAPA 40+) qui aura lieu dans son pays du 20 au 22 mars 2019, pour parvenir à des accords de coopération dans des domaines clefs tels que la migration, la parité hommes-femmes, les changements climatiques.

« La conférence sera l’enceinte idéale pour faire progresser le renforcement institutionnel », a déclaré le Vice-Ministre qui a dévoilé quelques points prévus à l’agenda: l’intégration de la coopération Sud-Sud aux programmes nationaux, la reconnaissance du rôle des plateformes régionales ainsi que l’évaluation de la manière dont le système de développement des Nations Unies peut contribuer à ces efforts. 

Si la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire ont un rôle à jouer dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, elles ne peuvent se substituer à l’aide publique au développement (APD), ont cependant estimé plusieurs participants, à l’instar de M. Li Chenggang, Ministre adjoint au Ministère du commerce de la Chine, qui a regretté que seuls six pays développés se soient acquittés de leur engagement de consacrer 0,7% du PIB à l’APD.

« La contribution de la coopération Sud-Sud est modeste en termes de flux financiers, et les pays du Nord ont des responsabilités vis à vis du Sud, car il y a encore des effets de la colonisation et des politiques néolibérales sur le Sud », a renchéri Mme Amy Padilla, Directrice exécutive de l’ONG IBON international. 

Autre mise en garde, en écho aux propos tenus par M. Jonathan Glennie, chercheur indépendant, Cuba et l’Inde ont toutes deux dénoncé des tentatives de faire disparaître « la division entre pays en développement et pays développés ». 

Les contours de la coopération Sud-Sud ont aussi été largement discutés.  L’Ouganda, par exemple, a insisté sur la nécessité de respecter les critères précis du Plan d’action de Buenos Aires: « Ce n’est pas parce qu’une action a lieu au Sud ou qu’existe une coopération bilatérale, qu’on peut parler de coopération Sud-Sud .»  M. João Almino, Directeur de l’Agence brésilienne de la coopération, a quant à lui estimé que cette coopération avait besoin de souplesse: chacun doit pouvoir participer avec ses propres atouts, même si les contributions sont modestes et pas forcément de nature financière. 

Les mécanismes d’évaluation des programmes de coopération ont également fait l’objet de débats, l’Inde insistant sur le fait qu’il appartient aux pays du Sud d’élaborer leur propre système et rejetant celui mis en place par la CNUCED. 

Un mécanisme d’évaluation qui a fait ses preuves a été donné en exemple, dans le cadre de la stratégie de synchronisation entre les objectifs du Programme 2030 et ceux de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.  M. David Medhi Hamam, Directeur du Bureau du Conseiller spécial du Secrétaire général de l’ONU, a ainsi parlé du cadre unique de suivi et d’évaluation ainsi que du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs pour suivre la mise en œuvre des deux programmes.

Mais le Ministre adjoint de l’économie de l’Afghanistan a fait une mise en garde: s’il est important d’obtenir des résultats et de les présenter aux partenaires de développement, il faut que les pays soient les chefs de file de toutes les décisions prises. 

Parmi les outils qui permettent une bonne mise en œuvre du Programme 2030, M. Zachary Chege, Président de la Commission de statistique de l’ONU, a insisté sur l’importance de statistiques fiables.  Dans la foulée, la « révolution des données » a été abordée par Mme Michelle Demers, de Boundless Impact Investing, qui a mis en évidence le rôle des données dans la création de nouvelles normes de comportement pour les entreprises qui cherchent à contribuer au développement durable. 

Mme Erin Palomares, de Reality of Aid Global, a insisté de son côté sur le rôle essentiel des organisations de la société civile pour mesurer les impacts.  « Elles possèdent des données fiables sur le terrain pour compléter les capacités officielles. »

L’émergence de nouveaux acteurs, la mobilisation des ressources propres à chaque pays à travers des leviers fiscaux et le renforcement de l’APD ont également fait partie des discussions de la journée. 

Au terme de la journée, la Présidente de l’ECOSOC, Mme Marie Chatardova, s’est réjouie d’un large consensus sur la contribution de la coopération internationale au Programme 2030.  Elle a cependant averti qu’un programme public de cette ampleur ne pouvait être considéré comme acquis « dans un monde où l’extrémisme violent est en augmentation, où l’espace civique se réduit et où le multilatéralisme est battu en brèche ».

L’ECOSOC se réunira demain, mercredi 23 mai à 10 heures, pour une réunion spéciale intitulée « Vers des sociétés durables, résilientes et inclusives grâce à la participation de tous ».

FORUM POUR LA COOPÉRATION EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT

Déclarations

M. JONATHAN GLENNIE, chercheur indépendant, a rappelé la « bataille » conceptuelle qui a conduit il y a trois ans à la définition des objectifs de développement durable.  La voix des partenaires du Sud est davantage entendue que par le passé, a—t-il constaté.  « Nous assistons à de vrais changements. »  Il a déclaré que le principe d’appropriation nationale des projets de développement est crucial pour que ces projets soient fructueux.  Il s’est dit préoccupé par le fait que les donateurs donnent souvent l’impression qu’ils savent ce qu’ils font et n’ont pas à coopérer avec les bénéficiaires.  M. Glennie a mentionné le risque, avec le rôle accru dévolu au secteur privé, que les gouvernements soient ceux qui sont laissés pour compte s’agissant des stratégies de développement.  Il a en outre qualifié d’anachronique la terminologie « pays développés, pays en développement ».  Le Nord doit écouter davantage encore les voix du Sud, a-t-il conclu en émettant l’espoir de pouvoir, ensemble, faire évoluer le système auquel nous appartenons. 

Pour que la coopération puisse servir le Programme de développement durable à l’horizon 2030, M. JOSE ANTONIO ALONSO, professeur d’économie appliquée à l’Université Complutense (Madrid), a appelé à refaçonner un système fragmenté, pour qu’il appartienne à tous les pays, et pas seulement aux pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui se trouvent au centre du jeu.  « Il faut consacrer davantage de temps à l’examen de la création d’un cadre de coordination qui inciterait à la collaboration entre tous les acteurs, avec le système de l’aide publique au développement (APD) et les fournisseurs du Sud, qui ont d’autres modèles de coopération, ainsi que les organisations de la société civile et les entreprises.  Cette coordination ne peut pas être l’application de décisions centralisées mais le résultat d’une action hyper collective », a suggéré le professeur.

Le professeur a aussi rappelé que la coopération au développement n’est pas seulement une question d’argent, mais concerne aussi la volonté politique, ou l’amélioration de la coordination fiscale internationale, avec la mise en place de mécanismes de résolution des dettes souveraines.  « Pour que les objectifs de développement durable soient concrétisés, la communauté internationale doit mettre en place une politique de développement fondée sur l’alignement entre les piliers nationaux et l’échelle internationale.  C’est l’essence du Programme 2030. » M. Alonso a à nouveau souligné le rôle essentiel de l’APD dans la réalisation du Programme 2030.  Tout en notant son potentiel pour lever des fonds privés, il a cependant décrit des limites à cette participation du privé.  « Si on concentre les APD sur les populations en marge, il n’y aura pas de retour à court terme donc c’est difficile de s’aligner avec les intérêts du privé », a-t-il relevé. 

Session 4: Les leviers de la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire pour le développement durable: sur la route du BAPA 40+

La deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud (BAPA 40+), prévue du 20 au 22 mars 2019 à Buenos Aires, marquera le quarantième anniversaire de l’adoption du Plan d’action de Buenos Aires pour la promotion et la mise en œuvre de la coopération technique entre pays en développement.  Elle aura pour but d’examiner l’évolution de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire, notamment les progrès accomplis par la communauté internationale, dont le système onusien.

Pour M. DANIEL RAIMONDI, Vice-Ministre des affaires étrangères et du culte de l’Argentine, le BAPA 40+, que son pays accueillera l’année prochaine, est une occasion historique de parvenir à des consensus larges sur la coopération Sud-Sud dans l’enceinte des Nations Unies.  « La conférence sera l’enceinte idéale pour faire progresser le renforcement institutionnel de la coopération Sud-Sud. »  M. Raimondi a énoncé les différents domaines sur lesquels la conférence va se concentrer: l’intégration de la coopération Sud-Sud aux programmes nationaux, la reconnaissance du rôle des plateformes régionales comme le programme ibéro-américain, ainsi que l’évaluation de la manière dont le système de développement des Nations Unies peut contribuer à ces efforts.  Il a également pointé la nécessité de parvenir à des accords de coopération dans des domaines clefs, comme la réduction des risques de catastrophe, les changements climatiques, l’égalité hommes-femmes. 

M. Raimondi a particulièrement insisté sur le potentiel d’une meilleure synergie entre régions, pour parvenir à s’accorder sur des positions au sein des enceintes mondiales.  Insistant sur l’intégration de nouveaux acteurs tels que la société civile, le monde universitaire, les banques d’investissement, il a appelé à une approche intégrée du développement en matière de coopération Sud-Sud, avec un équilibre entre les aspects sociaux, économiques et environnementaux.  « Il faut aussi passer d’une approche sectorielle à une logique interinstitutionnelle tout au long du cycle du projet » a-t-il également suggéré.  En prévision du BAPA 40+, il a invité l’audience à parvenir à des accords politiques robustes au cours des prochains mois, en identifiant les domaines dans lesquels on peut trouver un large consensus.

« Depuis que la premier BAPA a établi le premier cadre de la coopération Sud-Sud, nous sommes parvenus à des résultats remarquables », a estimé M. LI CHENGGANG, Ministre adjoint au Ministère du commerce de la Chine.  Son pays a-t-il indiqué, va poursuivre son ouverture au monde et instaurer un environnement attractif pour l’investissement national, afin de « permettre un débordement », pour que les autres pays puissent profiter de ce développement.  M. Chenggang s’est félicité des succès obtenus grâce à la coopération triangulaire pratiquée par la Chine avec les Nations Unies.  Constatant que 10 ans après la crise financière de 2008, le déséquilibre entre riches et pauvres n’a pas été résolu, y compris au sein de son propre pays, il a appelé à continuer à respecter les principes de la coopération et du multilatéralisme pour éliminer la pauvreté.  « La coopération Sud-Sud vient s’ajouter plus que remplacer la coopération Nord-Sud » a-t-il également déclaré, regrettant que seuls six pays développés se soient acquittés de leur engagement de consacrer 0,7% du PIB à l’APD.  « Les mêmes conditions ne doivent pas être imposées à la coopération Sud-Sud » a-t-il précisé, clôturant son exposé par un inventaire des efforts de la Chine en la matière: la Chine, qui est « le plus grand pays en développement du monde avec 30 millions de chinois souffrant de pauvreté », a aidé 166 pays.

« Se saisir de l’opportunité du BAPA 40+ », c’est ce qu’a proposé M. AGUSTIN GARCIA-LOPEZ, Directeur exécutif de l’Agence mexicaine de la coopération au développement international du Ministre des affaires étrangères du Mexique.  Il a pointé l’existence de défis de développement, qui dépassent les politiques nationales: la migration, la parité homme-femme, les changements climatiques.  « Cela va influencer nos politiques, nos décisions: la seule façon de s’attaquer à ces questions est de le faire ensemble. »  Il a conseillé de partager les expériences entre pays ayant des niveaux de développement semblables.  Il a aussi souligné l’importance de relations horizontales dans la coopération triangulaire, comme celle que son pays expérimente avec l’Allemagne.

« La coopération Sud-Sud n’a pas besoin d’un cadre rigide, mais d’un cadre complet qui prenne en compte différents types de réalités dans les pays de développement », a poursuivi M. JOÃO ALMINO, Directeur de l’Agence brésilienne de la coopération.  « Chacun doit pouvoir participer avec ses propres atouts », a-t-il souhaité en soulignant que la contribution est parfois modeste et pas forcément de nature financière.  Il a appelé à préserver cette souplesse, car elle permet à n’importe quel pays qui veut contribuer de participer et élargit ainsi les possibilités de coopération.  Le représentant a donné l’exemple d’un programme mené avec plus de 40 pays pour renforcer les institutions dans la coopération Sud-Sud.  « Nous avons examiné des instruments spécifiques: le manuel brésilien sur les directives en matière de coopération Sud-Sud et la législation mexicaine sur la coopération internationale. »  Tirant les leçons d’un symposium organisé sur le sujet au mois de mars dernier, il a estimé que les principes de la coopération Sud-Sud discutés à Buenos Aires étaient encore valables.  Il a également mis en évidence l’importance de procéder à un exercice d’évaluation.  « Le Mexique et le Brésil ont mis en place des systèmes de quantification et d’évaluation, et nous allons partager nos expériences pour améliorer nos activités. »  Mais il a aussi invité à tenir compte aussi des aspects qualificatifs.  « Parfois ce n’est pas l’argent qui compte.  Une politique transférée à un autre pays peut avoir des résultats importants. »

La question du développement n’est pas seulement liée à la question des ressources, a enchaîné M. UWE GELHEN, chef de la division de l’efficacité et la transparence au Ministère fédéral de la coopération économique et du développement de l’Allemagne, mettant l’accent sur les transferts de connaissances.  Il s’est longuement attardé sur la manière dont l’Allemagne avait dû revoir son approche en matière de développement.  « Avant, nous utilisions nos experts, maintenant ce n’est plus nécessaire.  Les idées viennent du monde entier en matière de développement durable. » Au lieu de donner des leçons à tout le monde, il a dit que l’Allemagne essaye plutôt d’être comme un animateur, de mettre à disposition certaines ressources et d’utiliser les liens entre les économies émergentes et les pays à faible revenus.  « Il faut parfois trouver le bon rôle à jouer. »

Il s’agit, grâce à la coopération Sud-Sud, de rééquilibrer les pouvoirs en matière de coopération au développement, a estimé Mme AMY PADILLA, Directrice exécutive de IBON international.  « La solidarité entre pays du Sud est importante et les pays du Nord ont un rôle à jouer pour la renforcer.  Mais la coopération Sud-Sud ne remplace pas l’APD, elle doit la compléter.  Elle est modeste en termes de flux financiers, et les pays du Nord ont des responsabilités vis à vis du Sud, car ceux-ci subissent encore certains effets de la colonisation et des politiques néolibérales. »  Si des mécanismes institutionnels au niveau local et national sont importants, il ne faut pas qu’ils se mettent en place sans une participation réelle de la société civile et des populations, « qui sont les premières concernées ». 

Rebondissant sur ses propos, le représentant de l’Inde a aussi insisté sur une responsabilité différenciée.  « Il y a une tentative de faire disparaître la différence entre pays développés et en développement.  La coopération Sud-Sud n’est pas obligatoire pour réaliser les objectifs de développement durable.  Cela se fait sur une base volontaire. »  Il a aussi fortement critiqué le système de quantification mis en place à la CNUCED en 2016, qui selon lui, n’est pas acceptable pour les pays en développement.  « Tout effort de quantifier ces efforts mutuels depuis l’extérieur n’a rien à voir avec le projet et doit être rejeté », selon lui.  Il a en effet relevé que cela s’était fait sans consultation avec les pays en développement.  Il a également demandé le respect de l’engagement de 0,7% en matière d’APD.

Le représentant de Cuba a abondé dans son sens, ajoutant que la coopération Sud-Sud ne peut se substituer à l’APD, suivie en cela par son homologue de l’Union européenne.  Cuba a aussi rejeté « toute tentative de revenir sur la division entre pays en développement et pays développés ».  L’Union européenne, elle, a réaffirmé son engagement à atteindre les 0,7% fixés, en faisant valoir qu’elle avait déjà progressé jusqu’à 0,5% ces dernières années. 

Répondant à la question de l’Iran, qui s’est interrogé sur le rôle des Nations Unies dans la coopération Sud-Sud, l’Organisation internationale du Travail (OIT) et l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ont réagi en déroulant leurs priorités sur la question.  La coopération Sud-Sud sera au programme de la prochaine conférence internationale du travail qui se déroulera la semaine prochaine.  Emploi décent, renforcement des capacités des travailleurs et employeurs, et pas seulement des institutions, sont au menu de ces efforts de coopération Sud-Sud, ainsi que les échanges de connaissance au niveau régional.  Pour la FAO, qui dit travailler depuis 20 ans pour faciliter la coopération Sud-Sud, l’expérience montre que chaque pays a quelque chose à offrir.  « Nous avons créé un portail de coopération Sud-Sud, où les institutions actives dans le domaine d’agriculture et de la sécurité alimentaire peuvent échanger des expériences », a expliqué sa représentante. 

Le représentant du Soudan est intervenu en fin de séance pour regretter que le Ministre de la coopération du Soudan n’ait pas pu participer au débat, parce qu’il n’a pu obtenir son visa d’entrée aux États-Unis.  Il a aussi souligné l’importance de la coopération du Gouvernement du Soudan avec le Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud dans le cadre des objectifs de développement durable.  Il a donné comme exemple les bourses offertes aux étudiants de pays d’Asie ou d’Afrique pour faire des études scientifiques. 

Session 5: combler les lacunes capacitaires et faciliter le développement et le transfert des technologies dans des domaines stratégiques

Les experts ont énuméré divers moyens qui permettent d’améliorer les capacités des pays en développement.  Dans l’aide apportée par les donateurs d’APD, une approche individualisée par pays est nécessaire, a d’abord plaidé Mme SHAMSHAD AKHTAR, Directrice exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP): « Comment, sinon, choisir entre les pays? », a-t-elle demandé.  Mme Akhtar a en même temps relevé les limitations de l’APD, notamment dans le montant dispensé, ce qui lui a fait dire qu’il faut une bonne hiérarchisation des priorités de développement afin de mieux cibler l’APD.  Autre terrain d’action pour renforcer les capacités de développement: il faut élargir le secteur de l’économie formelle. 

Mme Akhtar a également plaidé pour la libération du potentiel du secteur privé.  Elle a insisté sur l’importance de mobiliser les ressources locales pour le financement de projets de développement.  En outre, renforcer les capacités passe aussi par une réforme des systèmes fiscaux, car cela permet une meilleure mobilisation des ressources domestiques et d’attirer les investissements directs étrangers.  À cet égard, Mme Akhtar a salué le projet du FMI visant à une réforme des systèmes fiscaux des pays en développement en vue notamment de lutter contre l’évasion fiscale et de minimiser les coûts de levée de l’impôt. 

La mise en œuvre des réformes fiscales se heurte toutefois à de nombreuses difficultés politiques, a relevé M. RICHARD WATTS, Secrétaire exécutif de Development Initiatives, en expliquant qu’il fallait augmenter le ratio recettes locales/PIB souvent trop bas dans les pays en développement.  De manière générale, il a prôné une approche intégrée, conduite par les gouvernements, pour arriver à une meilleure mobilisation des ressources domestiques. 

Autre moyen de renforcer les capacités, M. ZACHARY CHEGE, Président de la Commission des statistiques de l’ONU, a insisté sur l’importance de statistiques fiables pour la mise en œuvre du Programme 2030.  Les systèmes nationaux de collecte des statistiques doivent être modernisés à cette fin, a-t-il dit misant sur un apport supplémentaire de ressources et sur un appui international.  En ce qui concerne les instances de collecte des données, il a souhaité une meilleure synergie de leurs efforts pour arriver à une véritable « révolution des données ».  « Nous devons également davantage sensibiliser le grand public sur l’importance des données statistiques », a-t-il conclu. 

Sur le plan des outils technologiques, M. STEVE HOLLINGWORTH, Président de la Grameen Foundation, a dit que le monde avait été témoin d’un extraordinaire « saut technologique » touchant les populations du monde entier, en particulier celles des pays en développement.  Cependant, des efforts doivent être faits pour s’assurer que ces progrès technologiques profitent aux pauvres tout en protégeant leurs intérêts, a-t-il dit.  Grâce aux nouvelles technologies, il est désormais possible de fournir aux pauvres eux-mêmes des informations pertinentes sur leur vie quotidienne, ce qui influence leur prise de décisions.  Enfin, il a dit que les progrès avaient permis de mieux comprendre les besoins et les aspirations des pauvres, même si ces nouvelles technologies présentent également des risques.

En Uruguay, « nous aurions pu donner la priorité à l’innovation mais nous avons dû faire un choix », a expliqué la délégation en soulignant que les efforts de réduction des inégalités dans son pays se font avec « des ressources limitées ».  Pour une meilleure mobilisation des ressources nationales, l’Éthiopie a adopté des réformes, notamment l’initiative « Transformation des impôts pour le développement durable ».  Au sujet de la fiscalité, l’Inde a proposé que le Comité sur la coopération en matière fiscale devienne une véritable entité gouvernementale.

La déléguée de l’Union interparlementaire a mentionné l’élaboration en cours d’une loi dans son pays, la Jordanie, pour une meilleure collecte des impôts.  Ce projet n’est pas sans susciter des craintes dans la population, a-t-elle dit, en invitant le Forum à ne perdre de vue les aspects sociaux.  À ce propos, la Directrice exécutive du CESAP a indiqué que la résistance aux réformes trouve souvent sa source dans la protection d’intérêts particuliers. 

De son côté, le Brésil a mentionné l’initiative de son pays pour renforcer les capacités de collecte statistique du Sénégal et de Cabo Verde, initiative saluée par le Président de la Commission des statistiques de l’ONU.

La déléguée du Ghana a, elle, invité à ne pas perdre de vue l’importance de l’affectation des dépenses, trop souvent occultée par la question de la mobilisation des ressources.  Une position partagée par la Directrice exécutive du CESAP qui a plaidé pour un programme rigoureux de gestion des dépenses publiques et insisté sur l’importance de lutter contre la corruption. 

Session 6: Renforcer l’examen multifacette et l’évaluation de la coopération au développement, qu’est-ce qui marche?

Il faut des bons paramètres pour mesurer les résultats sur le terrain.  Les objectifs de développement durable, qui couvrent tout, exigent également des institutions publiques qu’elles s’adaptent aux priorités.  Ce sont là les éléments de la problématique discutée au cours de cette session qui visait aussi à examiner comment traduire le Programme 2030 de manière compréhensible pour le public. 

« En Afrique, il y a un alignement très fort entre les objectifs de développement durable et l’Agenda 2063 de l’Union africaine », a expliqué M. DAVID MEDHI HAMAM, Directeur du Bureau du Conseiller spécial du Secrétaire général de l’ONU.  « Il se fait au niveau de l’objectif et des cibles, et prévoit un examen intégré des deux programmes. »  Il a indiqué que les pays africains avaient pris trois mesures importantes à ce niveau.  D’abord, un cadre unique de suivi et d’évaluation et une architecture commune pour présenter les rapports.  Ensuite, un appui à l’intégration des deux programmes dans les plans de développement national.  Enfin, une extension du mandat du mécanisme africain d’évaluation par les pairs pour suivre la mise en œuvre des deux programmes.  Ce mécanisme a été mis en œuvre pour compléter le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).  De son côté, le système des Nations Unies appuie ces efforts, notamment à travers l’organisation du Forum annuel de développement africain régional où l’on suit également les progrès et la mise en œuvre des objectifs de développement durable et de l’Agenda 2063.  Un examen annuel volontaire national dans le cadre du Forum politique de haut niveau pour le développement durable permet aussi de partager les expériences, les réussites et les leçons apprises. 

L’expérience ibéro-américaine dans le suivi des résultats a été présentée par Mme ANA CIUTI, Directrice générale de la coopération internationale de l’Argentine et Présidente du Conseil intergouvernemental ibéro-américain pour le renforcement de la coopération Sud-Sud.  Ce programme a comme particularité première de rassembler tous les pays d’Amérique latine ainsi que le Portugal et l’Espagne.  « Nous avons des dialogues stratégiques avec d’autres régions, et nous poursuivons des objectifs techniques et méthodologiques pour réaliser des progrès sur des sujets concrets. »  Mme Ciuti a indiqué que ce programme produit le seul rapport au monde sur la coopération Sud-Sud, et que le dernier en date, rassemblait plus de 7 000 initiatives.  « Il y a 11 ans, nous en avions 7.  Cela vous donne une idée de l’ampleur prise par la coopération Sud-Sud. »  Elle a aussi précisé que c’était un instrument complexe, une plateforme où chaque pays doit rendre compte de ses activités. 

Réagissant à une question de la représentante du Canada, qui s’est demandé comment coordonner toutes ces initiatives, et à un commentaire du représentant de l’Inde, qui a insisté sur le fait qu’il appartient aux pays du Sud d’élaborer leur propre évaluation, Mme Ciuti a donné l’exemple du Brésil, qui dispose d’une méthodologie pour mesurer les effets de ses projets de coopération Sud-Sud et dont les autres pays d’Amérique latine s’inspirent.  « Nous reconnaissons la souveraineté, l’horizontalité », a-t-elle dit.  « Comme la coopération Sud-Sud a connu une progression importante, cela crée un espace pour des systèmes qui dialoguent les uns avec les autres.  Il est possible de trouver un dénominateur commun. »  Le représentant du Brésil est lui-même intervenu pour insister sur l’importance de l’évaluation et de la quantification, aspect clef de la coopération Sud-Sud et une nécessité pour améliorer la qualité des programmes et des activités. 

Le représentant de l’Ouganda a pris la parole pour mettre en garde contre le risque de tout mélanger.  « Il existe des critères précis dans le Plan d’action sur la coopération Sud-Sud qui permettent de qualifier ce qu’est cette coopération.  Ce n’est pas parce qu’une action a lieu au Sud, qu’il y a une coopération bilatérale, qu’on peut parler de la coopération Sud-Sud. »

« Ces 10 dernières années, une nouvelle stratégie d’investissement a émergé pour traiter les problèmes de la planète » a déclaré Mme MICHELE DEMERS, de Boundless Impact Investing, dont l’entreprise s’occupe d’injecter des capitaux privés pour trouver des solutions novatrices.  « L’objectif est de réaliser des progrès sociaux plus rapidement. »  Elle a indiqué que ce mouvement avait commencé il y a 30 ans avec des investissements socialement responsables afin d’aboutir à des avancées socioéconomiques et environnementales.  Elle a mis en évidence l’importance des données dans ce mouvement.  « Il y a une explosion dans la production, l’analyse et la diffusion des données, ce qui accroît la possibilité d’évaluer l’efficacité d’un investissement », a-t-elle expliqué en prédisant que ce serait de plus en plus utilisé à l’avenir.  Pour elle, cette « révolution des données » crée des nouvelles normes de comportement pour les entreprises.  « La croissance responsable, l’inclusivité sociale et le comportement responsable envers l’environnement sont liés à la volatilité des risques.  Cela apparaît de plus en plus.  Le représentant de l’Éthiopie lui a demandé comment avoir accès à ces milliards de dollars qui sont aux mains du secteur privé.  Pour Michelle Demers, cela passe par les partenariats public-privé, mais aussi par les partenariats philanthropiques ou encore le financement mixte.

Pour M. RAHUL MALHOTRA, Chef de la division Reviews, Results, Evaluation and development innovation à l’OCDE, les objectifs de développement durable sont reflétés dans des cadres de développement nationaux.  Ils deviennent un cadre de développement commun, et c’est ce qui va pousser les choix dans le domaine de la coopération.  À l’OCDE, on utilise les objectifs de développement durable pour voir les convergences et divergences au niveau national, a-t-elle indiqué.  Il a aussi appelé, concernant les partenariats multipartites, à identifier le meilleur partenaire possible pour parvenir aux résultats.  « Si on veut parvenir à des résultats plus rapides, atteindre les plus éloignés, il faut les prendre en compte quand on choisit un partenaire ou on décide d’une nouvelle loi. »  Il a également suggéré de créer une plateforme d’échange sur les différents mécanismes d’évaluation du Programme 2030, arguant qu’il faut mettre en commun les efforts en matière d’évaluation. 

Mme ERIN PALOMARES, de Reality of Aid Global, a regretté qu’il y ait beaucoup de lacunes au niveau des informations échangées.  « On tient compte des apports plus que des résultats pour suivre l’évaluation du programme 2030. »  Elle a aussi insisté sur le rôle essentiel des organisations de la société civile pour mesurer les impacts.  « Elles possèdent des données fiables sur le terrain pour compléter les capacités officielles. » 

Session 7: Le rôle stratégique de la coopération pour le développement dans l’édification de sociétés durables et résilientes

Les panélistes ont été invités à présenter leurs recommandations en vue de l’édification de sociétés durables et résilientes, alors qu’une réunion spéciale sur ce sujet doit être convoquée demain par la Présidente de l’ECOSOC. 

M. MOHAMMAD ISMAIL RAHIMI, Ministre adjoint de l’économie de l’Afghanistan, a d’abord fait un bref état des lieux de son pays qui est l’un des quatre pays les plus jeunes au monde.  Le taux de pauvreté y a augmenté en 2017 pour atteindre 55% de la population en raison de l’insécurité, a-t-il ajouté, avant de se féliciter des progrès remarquables engrangés dans le domaine de l’égalité entre les sexes.  Sur le plan de la coopération internationale, il a déploré une diminution en 2017 de l’APD pour son pays, alors que cette aide finance les deux tiers du budget afghan.  Il a en même temps indiqué que les entités gouvernementales de son pays n’ont pas la capacité de gérer les projets les plus importants financés par l’APD.  En conséquence, il a recommandé un dialogue robuste entre les partenaires pour régler les difficultés inhérentes au financement de projets par l’APD. 

Il faudrait envoyer un signal « très ferme » sur le rôle absolument nécessaire de l’APD, a souhaité Mme GLADYS GHARTEY, du Ministère des finances et de l’économie du Ghana qui a aussi appelé les pays développés à honorer leurs engagements, « car le niveau actuel est trop bas ».  « Nous avons besoin d’une coopération pour le développement très étroite », a-t-elle martelé.  Elle a relevé que les principes de la coopération Sud-Sud avaient changé ces 40 dernières années.  « Comment les pays du Sud qui se sont enrichis peuvent-ils désormais contribuer au développement des pays les plus pauvres? », a-t-elle lancé.  « N’hésitons pas à changer les principes de la coopération Sud-Sud », a-t-elle recommandé, alors qu’une conférence de haut niveau sur la coopération Sud-Sud doit bientôt se tenir à Buenos Aires. 

Ce qu’il faut, ce sont des politiques bénéfiques pour tous les pans de la société, a avancé Mme MARGARETA CEDERFELT, Membre du Parlement de Suède, tout en reconnaissant les difficultés à y parvenir.  Elle a jugé crucial de faire valoir les responsabilités s’agissant des politiques menées.  Les parlementaires, élus du peuple, ont à cet égard un rôle important à jouer, puisque le gouvernement est redevable de ses actions devant eux.  Les donateurs veulent voir les résultats acquis grâce à leurs contributions, a-t-elle dit, ajoutant que la corruption est un véritable « poison » qui érode la confiance publique. 

Mme PRIMA TUKAMUSHABA, Représentante des jeunes de l’Ouganda, a demandé d’inclure les habitants au niveau local dans la mise en œuvre du Programme 2030.  « Les jeunes doivent être écoutés parce qu’ils savent ce qu’ils veulent. »  Elle a exhorté l’ONU à davantage aider les jeunes par la création, a-t-elle proposé, d’un fonds pour les jeunes.  Elle a indiqué que la coopération pour le développement n’a pas grand sens au niveau local, avant de souligner l’importance du problème du chômage pour les jeunes, lesquels sont les plus touchés par ce fléau.  « Les jeunes ont besoin de mesures concrètes. »

La représentante de l’Union interparlementaire a, comme Mme Tukamushaba, recommandé une meilleure inclusion des jeunes et des femmes, au cours de la brève discussion qui a suivi les exposés.  La déléguée de l’Équateur a, comme le Ministre afghan, demandé le respect par les pays développés de leurs engagements en matière d’APD.  Les pays à revenu intermédiaire ne doivent pas être oubliés, a-t-elle ajouté. 

« La façon dont on traite les pays à revenu intermédiaire revient à punir les bons élèves », a réagi le panéliste du Ghana.  Elle a en effet déploré l’arrêt de l’aide dès qu’un pays sort de la catégorie des pays les moins avancés.  La cessation de l’aide doit être graduelle, a-t-elle recommandé, en demandant également l’opérationnalisation de la Banque de technologies. 

Enfin, le Ministre adjoint de l’économie de l’Afghanistan a reconnu l’importance d’acquérir des résultats et de les présenter aux partenaires de développement.  Mais les pays doivent être les chefs de file de toutes les décisions prises, a-t-il insisté. 

Déclarations de clôture

« Nous sommes sur la bonne voie mais nous devons travailler plus rapidement », a déclaré M. LIU ZHENMIN, Sous-Secrétaire général chargé des affaires économiques et sociales.  Il a ensuite mentionné les idées les plus saillantes avancées lors de ces deux jours de discussion.

Ce Forum a rappelé l’importance de l’APD pour les pays les plus pauvres, a-t-il indiqué, en appelant au respect des engagements pris au titre de cette aide.  La coopération en matière de développement doit être adaptée aux situations spécifiques des pays et être axée sur le Programme 2030, lequel, a-t-il admis, fait face à un certain « scepticisme ».  L’inclusion doit être renforcée, a-t-il poursuivi, en soulignant le rôle des jeunes et des femmes. 

M. Liu a souligné la nécessité d’une réflexion accrue sur le financement mixte et mis en garde contre le gaspillage des ressources publiques.  Il a pointé l’évolution de la coopération Sud-Sud et appelé à un échange des bonnes pratiques entre ces pays.  Enfin, le Sous-Secrétaire général a rappelé les contraintes qui pèsent sur les pays les plus pauvres s’agissant de la collecte de statistiques. 

Mme MARIE CHATARDOVA, Présidente du Conseil économique et social, s’est réjouie, dans ses remarques de clôture, de constater le consensus sur le rôle de la coopération internationale au développement dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Mais elle a toutefois souligné, qu’un programme public de cette ampleur ne peut être pris pour acquis « dans un monde où l’extrémisme violent est en augmentation, où l’espace civique se réduit et où le multilatéralisme est battu en brèche ».

« Des actions sont prises dans les communautés à travers le monde pour réaliser les objectifs de développement durable, mais nous devons aussi mieux défendre l’idée que la coopération au développement est nécessaire pour amplifier les résultats au bénéfice des laissés-pour-compte », a-t-elle suggéré.  Répercutant une mise en garde contre la recherche de perfection structurelle et politique, y compris dans les examens menés par l’ECOSOC et dans le cadre de la réforme du système des Nations Unies, elle a remarqué que les participants avaient mis l’accent sur la participation, l’inclusivité, ainsi que le renforcement des capacités et des institutions.  Elle a promis de porter ce message lors de la réunion spéciale de l’ECOSOC, qui se tiendra demain sur le thème « Vers des sociétés durables, résilientes et inclusives ».  Les contributions de ce forum seront également utilisées lors du Forum du haut niveau pour le développement durable qui se tiendra en juin, a-t-elle fait savoir. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: il faut prendre des mesures d’urgence pour remédier à la situation en matière de protection des civils, dit le Secrétaire Général

8264e séance – matin
CS/13348

Conseil de sécurité: il faut prendre des mesures d’urgence pour remédier à la situation en matière de protection des civils, dit le Secrétaire Général

Près de 90 intervenants, dont 5 ministres, ont pris part aujourd’hui au débat annuel du Conseil de sécurité sur la protection des civils en période de conflit armé, présidé par le Ministre des affaires étrangères de la Pologne, M. Jacek Czaputowicz.  Après avoir brossé un tableau très sombre de la situation, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a engagé les États Membres à prendre des mesures concrètes pour asseoir le respect du droit international et inciter les parties à tout conflit à adopter de bonnes pratiques. 

Les délégations, relevant que l’année 2019 va marquer le vingtième anniversaire de l’inclusion du thème de la protection des civils dans le programme de travail du Conseil, ont unanimement rappelé que toutes les parties étatiques et non étatiques à un conflit doivent respecter le droit international humanitaire et « offrir un filet de sécurité aux civils », comme l’a rappelé le représentant de la Suède.  C’est en effet en 1999, après les atrocités en Sierra Leone, le nettoyage ethnique dans les Balkans et le génocide et les mouvements de personnes déplacées dans la région des Grands Lacs que le Conseil avait entamé l’examen de cette question.

Aujourd’hui, on note « une situation d’horreur et de souffrances incessantes qui touche des millions de femmes, d’enfants et d’hommes dans tous les conflits », souligne le rapport annuel du Secrétaire général sur la protection des civils en période de conflit armé.  « On ne peut pas tolérer que des civils soient pris pour cible.  On ne peut pas ne pas protéger les civils », écrit M. Guterres.

Le Secrétaire général rappelle ainsi que 128 millions de personnes à travers le monde ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence, et que « ce chiffre stupéfiant résulte en grande partie des conflits ».  En 2017, l’ONU a recensé plus de 26 000 civils tués ou blessés lors d’attaques dans des conflits dans six pays, alors que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) parle de 322 attaques contre des installations sanitaires dans des pays en conflit, faisant 242 morts et 229 blessés parmi le personnel médical et les patients. 

Le Secrétaire général a fait trois recommandations devant le Conseil: établir des cadres directifs nationaux pour la protection des civils; améliorer le respect du droit par les groupes armés non étatiques; promouvoir le respect du droit par la communication et l’application du principe de responsabilité. 

M. Guterres a aussi noté « des lueurs d’espoir », puisque l’on reconnaît de plus en plus que le droit international humanitaire et les droits de l’homme contribuent à atténuer les conflits et à lutter contre le terrorisme.  Des gouvernements, la société civile et d’autres acteurs se lèvent pour appeler à des changements.  Dix-neuf pays africains ont, par exemple, adopté un communiqué à Maputo en novembre dernier sur la protection des civils contre les explosifs dans des zones peuplées.  Et plus d’une trentaine ont adhéré aux Principes de Kigali qui plaident pour une meilleure protection des civils lors des opérations de maintien de la paix.  À ce sujet, le Rwanda a rappelé que les Principes de Kigali reflètent les enseignements tirés des tragiques évènements de 1994.

Pour le Directeur général du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), M. Yves Daccord, « l’outil le plus important pour atteindre cet objectif est d’ores et déjà entre nos mains: le droit international humanitaire, qui est conçu pour respecter et préserver la vie et la dignité même dans les pires circonstances ».  Les États qui fournissent des armes ont une responsabilité quand des violations sont commises, a-t-il dit.  Il a également évoqué les personnes disparues dans les conflits armés, pour lesquelles on ne peut avancer de chiffre exact. 

Témoignant sur les ravages de la guerre à Mossoul, en Iraq, Mme Hanaa Edwar de l’association Iraqi Al-Amal a dénombré 3 000 civils portés disparus dans la vieille ville.  Elle a invité l’ONU à financer l’identification des corps, la recherche des survivants, et leur retour au sein de leur famille, notamment les yézidis, non sans attirer l’attention sur le sort des familles de combattants de Daech, « maltraitées et isolées dans des camps ». 

Le Ministre polonais des affaires étrangères a mis l’accent sur les 2 830 civils tués, 24 234 blessés et 1 492 851 déplacés en Ukraine.  Il faut noter que 4,4 millions de personnes vivent dans les zones affectées du Donbass, dont 3,4 millions ont besoin d’aide humanitaire, a renchéri son homologue d’Ukraine, tandis que le délégué de la Fédération de Russie dénonçait « l’intensité des pilonnages de Kiev sur des zones habitées » et le silence des Occidentaux face aux violations des Accords de Minsk.

Récemment, a ironisé le délégué russe, « une délégation du Conseil de sécurité a sorti de son chapeau un concept nouveau d’intervention humanitaire ».  On nous a expliqué, a-t-il dit, que le tir de missiles sur un État avait pour but de protéger la population locale.  Or, pour les États-Unis, la communauté internationale ne doit pas se faire d’illusions et « agir quand des États échouent à protéger les civils ».  Plusieurs États ont par ailleurs fait valoir que la Cour pénale internationale (CPI) doit prendre le relai dans ce cas.

De nombreuses délégations ont également souligné le rôle des opérations de maintien de la paix dans la protection des civils.  La Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) reste l’une des meilleures illustrations de l’engagement croissant de l’Union africaine à protéger les civils dans les conflits armés, a noté la déléguée de l’Union africaine.  « Pour bien protéger les civils, il faut savoir se protéger soi-même en étant bien formé, préparé et doté d’équipements adaptés », a résumé la France. 

À l’instar de la Suède, plusieurs intervenants ont appelé au respect des engagements décrits dans la résolution 2286 (2016) sur la protection du personnel, du matériel et des locaux médicaux en période de conflit armé, notamment en Syrie. 

PROTECTION DES CIVILS EN PÉRIODE DE CONFLIT ARMÉ

Lettre datée du 9 mai 2018, adressée au Secrétaire général par la Représentante permanente de la Pologne auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2018/444)

Rapport du Secrétaire général sur la protection des civils en période de conflit armé (S/2018/462)

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a noté que la meilleure manière de protéger les civils est de prévenir et de mettre fin aux conflits.  C’est pourquoi la prévention des conflits, leur résolution et la consolidation de la paix demeurent les plus grandes priorités du système des Nations Unies. 

Le Secrétaire général a rappelé que 128 millions de personnes à travers le monde ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence, et que « ce chiffre stupéfiant résulte en grande partie des conflits ».  En 2017, l’ONU a recensé plus de 26 000 civils tués ou blessés lors d’attaques dans des conflits dans six pays: Afghanistan, Iraq, République centrafricaine (RCA), République démocratique du Congo (RDC), Somalie et Yémen.  Dix mille de ces victimes ont été recensées en Afghanistan. 

Les civils sont également victimes de graves violations des droits de l’homme, y compris de viols et d’autres violences sexuelles au cours des conflits. En RDC par exemple, l’ONU a dénombré plus de 800 cas de violence sexuelle en 2017, soit une augmentation de 56% par rapport à 2016.  Les conséquences de telles attaques perdurent pour le reste de la vie des survivants, a souligné M. Guterres. 

Il a également indiqué que les conflits forcent des millions de gens à fuir leur domicile pour un avenir incertain, et avec un accès limité à l’aide et la protection les plus élémentaires.  Fin 2016, on dénombrait 65,6 millions de déplacés du fait de la guerre, de la violence et de la persécution, tandis que de nombreuses personnes sont portées disparues. 

En outre, les bombardements des villes causent la mort et les blessures de milliers de civils chaque année, et ces bombardements laissent en plus des débris dans des habitations et des infrastructures vitales telles que les systèmes d’adduction d’eau et de distribution d’énergie.  En Syrie, par exemple, de telles attaques ont causé la mort et blessé de nombreux civils à Alep, Dayr al-Zawr, Homs, Edleb, Raqqah et Rif Dimashq.  De même, des installations médicales sont constamment attaquées, des personnels médicaux et humanitaires sont ciblés et empêchés de faire leur travail.  En 2017, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a enregistré 322 attaques de ce type perpétrées dans des pays en proie à un conflit.  Ces attaques se sont soldées par 242 morts et 229 blessés parmi le personnel médical et les patients.  « Cela n’est pas raisonnable », a réagi le Secrétaire général en parlant aussi de matériels médicaux vandalisés et retirés de convois humanitaires.

Selon M. Guterres, les conflits sont également une cause majeure d’insécurité alimentaire.  Dix des 13 crises alimentaires majeures de 2017 étaient causées par les conflits.  Au Yémen, par exemple, 3 millions de femmes et d’enfants sont sévèrement malnutris et plus de 8 millions de personnes ne savent pas quand elles auront leur prochain repas.

Le Secrétaire général a néanmoins noté des lueurs d’espoir, puisque l’on reconnait de plus en plus que le droit international humanitaire et le droit des droits de l’homme contribuent à atténuer les conflits et à lutter contre le terrorisme.  Dans une résolution de l’Assemblée générale l’an dernier, les États Membres ont reconnu que la lutte contre le terrorisme violait le droit international humanitaire et les droits de l’homme, trahissant ainsi les valeurs qu’elle essaye pourtant de défendre, et conduisant à davantage d’extrémisme violent.  Certaines parties aux conflits ont également pris des mesures pour protéger les civils.  Des gouvernements, la société civile et d’autres acteurs se lèvent pour appeler à des changements.  Dix-neuf pays africains ont, par exemple, adopté un communiqué à Maputo en novembre dernier sur la protection des civils contre les explosifs dans des zones peuplées. 

Le Secrétaire général a rappelé que, dans son dernier rapport sur la protection des civils, il fait trois recommandations.  Tout d’abord, il invite tous les gouvernements à établir des cadres directifs nationaux pour la protection des civils en temps de conflit.  Cette mesure devrait, par exemple, conditionner les exportations d’armes au respect du droit international humanitaire, dans la droite ligne du Traité sur le commerce des armes.  La seconde recommandation du Secrétaire général est que les États Membres doivent soutenir l’ONU et d’autres acteurs engagés afin que les groupes armés non étatiques adoptent des codes de conduite et des plans d’action de protection des civils.  Ensuite, il appelle les États à appuyer la sensibilisation sur la question de la protection des civils, et à garantir l’obligation de rendre des comptes en cas de violations graves des droits de l’homme, pour mettre fin au climat d’impunité.  Cela implique, a-t-il expliqué, des enquêtes nationales crédibles et un soutien au travail de la Cour pénale internationale (CPI).

Enfin, M. Guterres a prié les membres du Conseil de sécurité de ne pas laisser leurs différences politiques saper les actions en faveur des civils, car la protection des civils en temps de conflit s’avère être la seule manière de poser les fondations d’une paix durable.  De même, « éviter les victimes civiles et permettre un accès humanitaire traduit ce que nous sommes en tant que membres de la famille humaine », a-t-il conclu.  Cela est crucial pour éviter un cycle d’instabilité et de rancœur, tout en rendant la paix pérenne et la réconciliation possibles.

« Notre message fondamental est simple et clair: la voie la plus effective de réduire les souffrances dans les conflits est de respecter le principe fondamental d’humanité », a déclaré le Directeur général du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), M. YVES DACCORD.  « L’outil le plus important pour atteindre cet objectif est d’ores et déjà entre nos mains: le droit international humanitaire, qui est conçu pour respecter et préserver la vie et la dignité même dans les pires circonstances », a-t-il insisté. 

De même, a-t-il poursuivi, les États sont les premiers responsables en la matière.  « Il n’y a aucune excuse ni exception dans l’application de la loi », a martelé le Directeur général du CICR, et ce, quelle que soit la complexité ou la durée des conflits armés, peu importe la désignation ou l’étiquette données aux parties.  Des États et leurs partenaires invoquent la lutte contre des individus désignés comme terroristes ou combattants terroristes étrangers, parfois des enfants et non pas des ennemis conventionnels pour lesquels le droit international humanitaire est inapplicable ou s’applique parfois différemment. 

Il existe également cette tendance du déni des violations du droit international humanitaire, or, a-t-il dit, cela contribue à accroître le climat d’impunité et provoque davantage de souffrances.  Soyons clairs, a-t-il dit: le droit international humanitaire protège quiconque n’est pas ou n’est plus partie dans les hostilités.  Dans de nombreux conflits armés au Moyen-Orient, en Afrique et ailleurs, les belligérants reçoivent un soutien important de la part des États, sous forme logistique, financière, ou dans le cadre d’opérations en partenariat. 

Les États qui fournissent des armes ont une responsabilité particulière et sont particulièrement influents, en tant que fournisseurs de moyens par lesquels les violations sont commises.  Là encore, a insisté le Directeur général du CICR, le message est clair: « Pas de soutien sans respect de la loi! » 

Il a cité à cet égard, quatre questions qui sont particulièrement préoccupantes tout en préconisant des recommandations pour améliorer la situation sur le terrain.  La première, qui fait écho aux préoccupations du Secrétaire général, est, selon lui, l’impact de l’emploi d’armes explosives lourdes dans les zones densément peuplées et les dégâts infligés aux populations civiles, comme a pu le constater de visu le CICR en Syrie, en Iraq, au Yémen, en Ukraine, en Afghanistan et en Libye. 

Avec l’urbanisation des conflits, leurs conséquences sont plus répandues et durent plus longtemps, parfois sur des générations, a déploré le CICR, appelant les parties aux conflits à changer les comportements et adapter le type d’armes utilisées dans les guerres urbaines.  La deuxième question abordée par M. Daccord est la protection de la santé, rappelant à cet égard la résolution 2286 (2016), qui est une première étape vers une meilleure mise en œuvre du droit international humanitaire en matière de soins médicaux dans les conflits armés. 

Deux ans après son adoption, le CICR a déploré plus de 1 200 cas de violence contre les personnels et locaux médicaux dans 16 États: personnels de santé tués, menacés, enlevés, ambulances bloquées, fournitures médicales détruites ou empêchées de franchir les lignes de front, hôpitaux bombardés ou pillés. 

L’écart entre les mots et l’action est déplorable, a regretté M. Daccord, appelant les États et non pas seulement les parties aux conflits à se conformer à leurs engagements en matière de droit international humanitaire et faire de la protection de la mission médicale une priorité nationale.  La meilleure façon d’y parvenir est selon lui d’axer l’action sur les initiatives nationales et régionales, y compris à travers l’échange des bonnes pratiques. 

Il a, à cet égard, invité les États à adopter cinq mesures prioritaires, notamment revoir leurs doctrine militaire et procédures, s’assurer que leurs législations nationales permettent aux professionnels de la santé de s’acquitter de leur mission de manière impartiale et en toute sécurité conformément au droit international humanitaire, et de leur assurer une formation spécifique en la matière. 

Le Directeur général a également évoqué la privation de la liberté, une question d’une importance cruciale, rappelant l’obligation faite aux États de respecter la dignité humaine y compris dans les lieux de détention temporaires, les infrastructures pénitentiaires doivent être planifiées conformément aux Règles Nelson Mandela, a-t-il dit. 

Il a poursuivi son exposé en faisant état des personnes disparues dans les conflits armés et dont personne ne peut avancer un chiffre exact.  En Iraq, par exemple, ce chiffre varie de 250 000 à un million et le sort de ces personnes et de leurs familles peut durer des années, voir des décennies.  Cette année, a-t-il indiqué, le CICR a lancé un projet sur quatre ans visant à élaborer des normes et des pratiques professionnelles pour améliorer la réponse aux personnes portées disparues. 

Malgré ce tableau sombre, il serait faux, voir même dangereux de croire que le droit international humanitaire est constamment non respecté et par conséquent inutile, c’est pourquoi, a-t-il conclu, le CICR entreprend un plan d’action pour collecter et promouvoir les exemples de stratégies fondées sur le respect du droit international humanitaire par les parties aux conflits à travers le monde qui a-t-il espéré, renforcera l’impact positif du droit international humanitaire dans les conflits armées. 

Mme HANAA EDWAR, de l’organisation non gouvernementale Iraqi Al-Amal Association, a raconté avec force détails les conditions épouvantables dans lesquelles survivent les civils en Iraq, particulièrement dans la région de Mossoul, devenue « un cimetière à ciel ouvert », et rapporté l’existence de nombreux charniers.

« À ce jour, on dénombre 3 000 civils portés disparus dans la vieille ville », a indiqué Mme Edwar, qui a appelé l’Organisation à financer l’identification des corps, la recherche des vivants, et leur retour au sein de leur famille, notamment les yézidis.

Relevant, notamment, le caractère essentiel de la résolution de 2379 (2017) sur les actes susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des crimes de génocide perpétrés par Daech, elle a appelé les Nations Unies à soutenir leur mise en œuvre.

Dans le même temps, elle a rappelé le sort des familles de combattants de Daech, « maltraitées et isolées dans des camps ».  Des femmes, « parfois mariées de force », sont aujourd’hui veuves, et leurs enfants sans document officiel d’aucune sorte.

Mme Edwar a terminé sur une note optimiste, en se félicitant de la bonne tenue des récentes élections dans le pays, et de la libération des zones auparavant contrôlées par Daech.

M. JACEK CZAPUTOWICZ, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a appelé à n’épargner aucun effort pour faire de la prévention des conflits la principale priorité des Nations Unies.  Il a estimé qu’en cas de conflit, l’attention doit être portée aux normes les plus élevées de protection des civils, soulignant que cette responsabilité incombe en premier lieu aux parties au conflit, mais aussi à la communauté internationale.  Il a appelé à porter une attention particulière aux défis humanitaires, notamment l’impact inhumain des engins explosifs improvisés et les flux illicites d’armes de petit calibre.  Il a réclamé la pleine mise en œuvre de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel et de la Convention sur les armes chimiques, entre autres.

Le Ministre a ensuite évoqué la situation en Ukraine, « en proie à une agression militaire continue » et où le nombre de victimes est particulièrement alarmant, avec 2 830 civils tués, 24 234 blessés et 1 492 851 déplacés.  De plus, chaque mois plus d’un million de personnes sont contraintes de traverser les lignes de front pour obtenir de l’aide.  Il a appelé à mettre en œuvre les bonnes pratiques en matière de respect du droit international humanitaire, citant notamment la commission intergouvernementale sur le droit international humanitaire créée par la Pologne.

M. Czaputowicz a poursuivi en appelant à mettre un terme à l’impunité pour les violations du droit international humanitaire.  La Cour pénale internationale (CPI) doit jouer un rôle de chef de file en la matière et le Conseil de sécurité doit lui déferrer plus fréquemment les cas de violations flagrantes des normes juridiques internationales, a-t-il estimé.  Il a appuyé le Code de conduite relatif à l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, pour ensuite condamner « l’utilisation de l’insécurité alimentaire et de la faim comme arme de guerre ».  Des mesures s’imposent également pour protéger les établissements médicaux, à l’instar de l’initiative « la santé en danger » du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).  La Pologne appelle également à la stricte mise en œuvre de la politique de tolérance zéro concernant l’exploitation et les atteintes sexuelles.

M. GALYMZHAN KOISHYBAYEV, Ministre délégué des affaires étrangères du Kazakhstan, a déploré le fait que 75% de l’ensemble des victimes des guerres soient des civils; un constat d’autant plus grave que les hostilités se produisent désormais dans les zones urbaines, avec l’emploi excessif d’armes notamment par les groupes armés non étatiques. 

Tout en soutenant les recommandations du Secrétaire général contenues dans son dernier rapport, il a souhaité faire quelques observations à l’adresse du Conseil. 

Tout d’abord, il a jugé essentiel de se conformer au droit international humanitaire et de renforcer les responsabilités, appelant également à promouvoir la collecte de données à cet égard.  La survie des blessés dépend de l’établissement d’unités médicales opérationnelles et de professionnels de la santé, a-t-il dit, rappelant que son pays avait coparrainé la résolution 2286 (2016) dont l’adoption à l’unanimité reflète, à son avis, l’unité du Conseil quant à l’engagement humanitaire en temps de guerre. 

Il a, en outre, rappelé que la protection des civils incombait en premier lieu aux États d’accueil.  Il a, enfin, appelé la communauté internationale à concentrer ses actions sur les mesures préventives, y compris s’attaquer aux causes profondes des conflits ainsi qu’à la consolidation de la paix et au développement économique.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a rappelé que le Conseil de sécurité doit assurer la protection des civils car cela fait partie de son mandat.  Il a évoqué les images de civils tués par les attaques du régime syrien, notamment dans la Ghouta orientale.  Il a également déploré les attaques contre des sites civils en Ukraine, notamment des sites de traitement d’eau et des écoles.  Il a aussi regretté le fait que des installations médicales et des travailleurs humanitaires et de la santé soient ciblés au cours de conflits.  Au Soudan du Sud, a-t-il noté, plus de 5 000 travailleurs humanitaires ont été tués.  

Le représentant a ensuite identifié trois domaines pour améliorer la protection des civils.  Premièrement, il faut prendre des mesures pour que la protection des civils soit intégrée dans les politiques nationales.  À ce sujet, le Royaume-Uni a récemment signé la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, et demande que d’autres États fassent de même.  Deuxièmement, il faut établir des mécanismes de suivi des violations des droits de l’homme en cas de conflit.  Le Royaume-Uni appuie du reste de telles initiatives, tout en apportant son soutien aux systèmes nationaux de justice pénale, et en plaidant pour que la Cour pénale internationale (CPI) prenne le relai quand les États ne peuvent ou ne veulent prendre leurs responsabilités en matière de protection des civils.  Enfin, le représentant a indiqué que les opérations de maintien de la paix de l’ONU ont un rôle important à jouer, notamment à travers leur équipe des droits de l’homme.  Il a néanmoins déploré leurs faibles rendements à cet égard, car elles sont affaiblies par la diminution de leur budget par la Cinquième Commission.    

Mme MAHLET H. GUADEY (Éthiopie) a appelé à débattre davantage des trois actions supplémentaires recommandées par le Secrétaire général et des cadres directifs nationaux pour la protection des civils qui figurent en annexe de son rapport.  Elle a souligné l’importance de renforcer le respect du droit international humanitaire, à la fois par les États, mais aussi les groupes armés non étatiques.

Elle a fait observer que les opérations de maintien de la paix continuent d’être un outil important pour la protection des civils et a insisté sur l’importance de consulter les pays contributeurs de contingents lors de la définition des mandats des missions afin de renforcer leur efficacité en matière de protection des civils.

Il convient également de veiller à ce que les opérations disposent de ressources et d’équipements suffisants afin de leur permettre de s’acquitter de leur mandat et les Casques bleus doivent quant à eux être guidés par les principes du droit international humanitaire et obtenir une formation adéquate en la matière.

Mme Guadey a ensuite fait observer que l’Éthiopie était l’un des plus importants pays d’accueil pour les réfugiés et a appelé à renforcer les valeurs de solidarité et de partage des responsabilités afin de pouvoir faire face à ces défis de manière plus prévisible et efficace.

Mme KELLEY ANNE ECKELS-CURRIE (États-Unis) a dit qu’entendre les personnalités comme Mme Hanaa Edwar, d’une organisation non gouvernementale de l’Iraq, permettait au Conseil de sécurité de se faire une idée réelle de la situation sur le terrain en matière de protection des civils.  Elle a appelé la communauté internationale à empêcher les exactions contre les civils, par exemple en veillant à ce que les armes chimiques ne soient plus utilisées.  Pour les États-Unis, la communauté internationale ne doit pas se faire d’illusion et agir quand des États échouent à protéger les civils.   

Dans le cadre des opérations de maintien de la paix, elle s’est félicitée des mesures prises par le Secrétaire général de l’ONU pour améliorer le principe de responsabilité.  Elle a plaidé pour l’établissement de normes de performances et de résultats au sein des missions en ce qui concerne notamment la protection des civils. 

Son pays se tient d’ailleurs prêt à faire davantage dans ce domaine en s’appuyant notamment sur les Principes de Kigali.  Elle a aussi souhaité que les commandants des opérations de maintien de la paix aient toute latitude d’autoriser les soldats de la paix à user de la force pour protéger les civils, au lieu d’attendre l’autorisation du Siège.

La représentante a invité le Conseil de sécurité à faire preuve de solidarité dans des situations de génocide, de crime de guerre ou d’autres similaires.  Le Conseil peut également utiliser des outils à sa disposition tels que les sanctions ciblées, l’embargo sur les armes, les missions d’établissement des faits, afin de veiller à ce que les auteurs de violations soient traduits en justice. 

Les États Membres sont aussi invités à établir des outils appropriés pour éviter les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Pour les États-Unis, « il ne suffit pas de se dire outré par les histoires que nous avons entendues ce matin ».  De même, « cela ne suffit pas de rédiger de beaux discours, mais il faut que le Conseil de sécurité utilise les outils à sa disposition pour remplir ses obligations en matière de protection des civils ».

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a, outre le rappel du grand nombre de victimes civiles dans les conflits armés, déploré que l’année 2016 à elle seule ait vu 65 millions de personnes déplacées.  Il a aussi attiré l’attention sur les personnes les plus vulnérables, à savoir les enfants, qui sont souvent soumis à des violences sexuelles, à la séquestration et au déplacement forcé.  Après avoir condamné tous ces actes de violence contre les civils, le représentant a donné des chiffres concernant le Yémen (plus de 22 millions de personnes en attente d’aide en 2018, sur une population de 27 millions); la Palestine (73 morts et 8 154 blessés en 2017) et la Libye (2 824 citoyens ayant perdu la vie ou disparu en mer en 2017).

Face à ce constat, la Bolivie salue les initiatives concrètes comme la résolution 2286 (2016), le « Programme d’action pour l’humanité » ou encore « Les soins de santé en danger ».  Mais le représentant a dénoncé le fait que l’impact disproportionné des conflits armés soit imputable au manque d’application du droit international, et notamment du droit international humanitaire, et des principes de la Charte des Nations Unies.  Il a prévenu que certains de ces actes peuvent être considérés comme des crimes de guerre ou contre l’humanité, avant d’appeler tous les États à ratifier le Statut de Rome. Il a salué à ce propos la décision de l’Autorité palestinienne de saisir la Cour pénale internationale CPI) pour demander une enquête sur les éventuels crimes de guerre commis par Israël dans les territoires palestiniens occupés.

M. MA ZHAOXU (Chine) a appelé à adopter des mesures pragmatiques et efficaces pour garantir la protection des civils en période de conflit.  Il a notamment jugé nécessaire de s’attaquer aux causes fondamentales des conflits, y voyant le moyen le plus efficace de protéger les civils.  Le Conseil de sécurité doit faciliter la diplomatie préventive et favoriser la résolution politique des conflits, a-t-il ajouté.

Il a également souligné que les gouvernements des pays concernés et les parties au conflit doivent assumer la responsabilité de protéger les civils, la communauté internationale ne pouvant se substituer aux parties concernées.

Le représentant a ensuite insisté sur l’importance pour les opérations de maintien de la paix, de respecter strictement les paramètres de leur mandat, soulignant par ailleurs que leur action en matière de protection de civils ne peut pas se substituer aux responsabilités des États.

Le délégué a aussi appelé à utiliser pleinement les organisations régionales, comme l’Union africaine, pour aider les pays hôtes à mieux protéger les civils.  Il a également engagé l’ONU à renforcer les directives pour le personnel humanitaire et à garantir la mise en œuvre effective des opérations humanitaires.

M. ILAHIRI ALCIDE DJEDJE (Côte d’Ivoire) a souscrit aux recommandations du Secrétaire général pour l’adoption et la mise en œuvre de stratégies nationales visant à renforcer la protection des civils en situation de conflit armé.  Pour avoir connu les affres d’un conflit armé postélectoral et ses effets néfastes sur les populations civiles, les autorités ivoiriennes sont conscientes que la protection des civils doit commencer par la formation et la sensibilisation de tous les acteurs concernés.  Il a expliqué qu’au lendemain de cette crise, son pays s’était inscrit dans une approche préventive dont l’une des priorités est le renforcement des capacités et la sensibilisation des institutions sécuritaires nationales au respect des normes internationales en matière de protection des civils et d’assistance aux personnes déplacées internes.  Il a également procédé à la destruction et à la sécurisation physique des stocks d’armes, avec l’appui des Nations Unies et d’autres partenaires.

Pour le Gouvernement ivoirien, les opérations de maintien de la paix des Nations Unies constituent le meilleur instrument pour assurer efficacement la protection des civils et des personnels humanitaires dans les pays en conflit.  Il soutient d’ailleurs sans réserve le projet « Action pour le maintien de la paix » par lequel le Secrétaire général entend mener les réformes indispensables à l’amélioration de ces missions qui peuvent, à son sens, contribuer efficacement à prévenir les atrocités contre les civils, notamment à travers leurs rôles d’observateur des cessez-le-feu, de facilitateurs du dialogue politique et de la réconciliation nationale, ainsi que d’appui à la justice transitionnelle.

M. KAREL J. G. VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a exhorté le Conseil à relever d’urgence trois défis: mettre fin au cercle vicieux des conflits et de la faim; protéger le personnel médical et leurs installations; améliorer les résultats des opérations de maintien de la paix.  Prenant pour exemple le Soudan du Sud, où 5,4 millions de personnes souffrent d’insécurité alimentaire à cause du conflit armé, le représentant a rappelé qu’un accès humanitaire rapide était essentiel dans un tel contexte, tout comme l’obligation de rendre des comptes pour les responsables de crimes.

M. van Oosterom a annoncé que les Pays-Bas étaient sur le point d’amender leur loi relative aux crimes internationaux pour qualifier de « crime de guerre » l’acte d’affamer intentionnellement des civils.  Les Néerlandais seraient heureux de partager leur nouvelle expertise juridique avec les États Membres, a indiqué le représentant.  Enfin, concernant les attaques contre le personnel médical en zone de conflit, il a appelé le Conseil à référer tout problème à la Cour pénale internationale.  Il a aussi exhorté l’ONU à mettre en place des mécanismes pour préparer des enquêtes en vue d’éventuelles poursuites pénales, sur le modèle du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie depuis mars 2011.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a condamné fermement les attaques violentes et les menaces contre les civils dans les conflits armés, en rappelant le bilan de milliers de civils décédés dans ces conditions en 2017, sans compter les dégâts aux infrastructures essentielles.  D’autres ont été victimes de violence sexuelle et de la faim, utilisées comme armes de guerre, de terrorisme, de torture et de répression.  Il a appelé à renforcer les efforts de prévention des conflits et ceux qui permettent d’éviter l’escalade ou leur résurgence, par le biais d’initiatives de développement durable et de consolidation de la paix.

La protection des civils, a affirmé le représentant, relève de la responsabilité première des États Membres, qui doivent être appuyés en ce sens par les opérations de maintien de la paix de l’ONU.  Il a appelé les parties aux conflits armés en présence à se conformer à leurs obligations découlant du droit international et du droit international humanitaire.  Aux organisations humanitaires, il a demandé de respecter également ce droit ainsi que les lois des États dans lesquels ils opèrent, conformément aux principes d’humanité, de neutralité et d’impartialité.  Il a enfin appuyé les recommandations du Secrétaire général quant à la promotion du respect du droit international et des bonnes pratiques entre les parties.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït), a invité les pays soutenant les parties en conflits à prendre des mesures de protection des civils, par exemple en rendant public les contrats de vente d’armes.  Le représentant a salué le fait que le Conseil ait pu adopter une résolution pour permettre l’accès humanitaire pendant 30 jours en Syrie, même s’il a déploré que cela n’ait pu se faire.  Il a aussi salué les efforts de la coalition internationale qui soutient le Gouvernement du Yémen. 

Le représentant a rappelé que sera commémoré, l’an prochain, le vingtième anniversaire de l’inclusion du thème de la protection des civils dans le programme de travail du Conseil de sécurité.  Malheureusement, ce débat ne semble pas avoir eu un impact positif sur le sort des populations palestiniennes, a-t-il regretté, dénonçant les violations et exactions israéliennes et appelant à la fin de l’occupation qui est la cause de ce conflit vieux de plus de 50 ans.  Il a souhaité que le Conseil adopte le texte présenté par le Koweït sur la protection des Palestiniens.  Il a aussi rappelé que le Koweït souffre toujours de la disparition de ses citoyens, plus de 20 ans après un conflit avec l’Iraq.  Le Koweït souhaite aussi que les opérations de maintien de la paix accordent la priorité à la protection des civils, et que les cas les plus graves soient renvoyés devant la CPI.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a fait remarquer que le Conseil a renforcé la protection des civils, notamment des femmes et des enfants, dans les mandats des opérations de maintien de la paix, comme c’est le cas en République démocratique du Congo (RDC).  À ce sujet, la performance opérationnelle des opérations de maintien de la paix est indispensable, a-t-il rappelé.  « Pour bien protéger les civils, il faut savoir se protéger soi-même en étant bien formé, préparé et doté d’équipements adaptés. » 

Le Conseil a également innové avec le cadre de conformité aux droits de l’homme de la Force conjointe G5 Sahel.  De tels dispositifs qui visent à prévenir les victimes civiles et à identifier les dommages qui leur sont causés pourraient être étendus à d’autres situations, a fait valoir le représentant.

Passant aux progrès à accomplir pour une meilleure protection des civils, M. Delattre a considéré que le Conseil doit rester mobilisé pour que l’ensemble des parties, dans toutes les zones de conflit armé, respectent leurs obligations au titre du droit international humanitaire.  Le Conseil pourrait ainsi renforcer son action dans trois domaines. 

Tout d’abord, face à la persistance des attaques contre les personnels médicaux, la France a proposé une déclaration politique, le 31 octobre 2017, qui engage les signataires sur des mesures concrètes.  Ensuite, la protection des journalistes étant « une priorité » pour la France, M. Delattre s’est félicité de la désignation d’un réseau de points focaux dans les agences des Nations Unies qui doit permettre de rendre effective leur protection dans les situations de conflit armé.  Enfin, le Conseil doit prendre en compte la situation des détenus et des disparus, et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) doit pouvoir exercer sa mission de protection à leur égard. 

« L’efficacité de la protection des civils repose sur l’exemplarité des acteurs de la protection » et sur la lutte contre l’impunité, a ajouté le représentant.  Ainsi les violences sexuelles ne peuvent-elles être tolérées.  En outre, le Conseil doit veiller à ce que les attaques commises contre le personnel de l’ONU fassent l’objet d’enquêtes et de poursuites.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a regretté que, bien souvent, le Conseil de sécurité ne soit pas à la hauteur de ses responsabilités pour protéger le droit international humanitaire.  Il a pourtant invoqué une « obligation morale et juridique » d’agir de façon unifiée pour mettre fin aux souffrances de millions de personnes dans des pays comme le Yémen, la Syrie, le Soudan du Sud, la République démocratique du Congo (RDC), le Myanmar, la Somalie, la République centrafricaine, la Libye ou la Palestine.  À cet égard, a-t-il rappelé, 116 États, dont le Pérou et huit membres du Conseil, ont signé le code de conduite promu par le Groupe ACT pour prévenir et mettre fin à des crimes atroces.

De la même façon, a poursuivi M. Meza-Cuadra, le Pérou a adhéré à la responsabilité de protéger (R2P) et forme à ce concept les troupes qu’il déploie dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU.  Il a par ailleurs jugé indispensable que le Conseil examine les causes profondes des conflits et le respect des droits de l’homme.  Favorable à l’adhésion universelle au Statut de Rome, il a souhaité que le Conseil défère à la Cour pénale internationale (CPI) les situations atroces où il faut garantir l’accès à la justice et la mise en œuvre de la responsabilité.

M. IGOR V. KUZMIN (Fédération de Russie) a dit constater aujourd’hui une « tendance nocive à la politisation des activités humanitaires ».  Il s’est dit préoccupé par les morts de civils à cause de cette politisation qui se fait au détriment de leur sort.  Il a aussi dénoncé la tendance aux « accusations non vérifiées », accusant certains acteurs de « pousser le bouchon jusqu’à l’utilisation de sources douteuses comme les Casques blancs ».  Il a aussi dénoncé des institutions « qui enquêtent à distance » et des médias « sélectionnés à dessein » et « dont les informations diffusées s’appuient sur des sources ultra-secrètes qui doivent être protégées ».  Il a déploré que de telles pratiques aient de plus en plus cours au sein même de l’ONU, sapant de ce fait les efforts en faveur de la protection des civils.

Le représentant a ensuite évoqué le conflit en Ukraine, « né du fait que les autorités se soient retournées contre leur propre population », et qui a fait de nombreux morts, dont 138 enfants, et plus de 9 000 blessés.  Actuellement, l’intensité des pilonnages de Kiev sur des zones habitées ne cesse de prendre de l’ampleur, a noté M. Kuzmin, dénonçant le silence des Occidentaux devant ces violations des Accords de Minsk.  Il a aussi insisté sur le respect des principes de souveraineté nationale et de non-ingérence dans les affaires intérieures. 

Récemment, a ironisé M. Kuzmin, « une délégation du Conseil de sécurité a sorti de son chapeau un concept nouveau d’intervention humanitaire ».  On nous a donc expliqué, a-t-il dit, que le tir de missiles sur un État avait pour but de protéger la population locale.  La Fédération de Russie souligne que toute mesure de protection des civils, notamment par la force, est conditionnée à l’aval de l’ONU et devrait s’inscrire dans le respect de la Charte des Nations Unies.  Réagissant aux propos du Ministre polonais au sujet du droit de veto, le délégué de la Fédération de Russie a souligné que le système de veto est « un outil de poids et contre poids » qui sert à pousser les membres permanents à rechercher le consensus.  Plus d’une fois, a-t-il fait observer, « l’utilisation du veto a évité à l’ONU d’être associée à des aventures douteuses ».

Pour M. OLOF SKOOG (Suède), le respect du droit international et du droit international humanitaire est un préalable essentiel à tout progrès en termes de protection des civils.  Reconnaissant que la prévention des conflits reste la « première ligne de défense », il a expliqué que, lorsqu’elle échoue toutefois, le droit international humanitaire devrait offrir un « filet de sécurité » aux civils pris dans les conflits armés.  Notant que les besoins en termes de protection varient souvent entre femmes/filles et hommes/garçons, le représentant a insisté sur le bien-fondé d’une perspective de genre dans ce domaine.  Fort de l’expérience de récentes visites de sa délégation au Mali, en Iraq, en Afghanistan et au Soudan du Sud, il a demandé qu’une telle perspective soit systématiquement intégrée dans toutes les opérations de missions de maintien de la paix ainsi que dans les résolutions du Conseil de sécurité, et que dorénavant toute collecte de données soit ventilée par âge et par sexe.

Le représentant a souligné trois domaines qui « sont au cœur de la protection des civils », à commencer par le respect des engagements décrits dans la résolution 2286 (2016) sur la protection des établissements de santé en situation de conflit armé, rappelant, qu’en Syrie, 112 de ces établissements et leurs employés avaient été attaqués.  « La communauté internationale et le Conseil de sécurité doivent agir pour protéger les soins médicaux en situation de conflit », a martelé M. Skoog avant de mentionner une nouvelle initiative du Gouvernement suédois, développée en collaboration avec le CICR et la Croix-Rouge suédoise, et qui va dans ce sens.  Ensuite, il a mis l’accent sur le recours aux meilleures pratiques par le personnel des missions onusiennes dotées d’un mandat de protection des civils, puis salué la nouvelle politique de reddition de comptes dans ce domaine qui s’adresse aux hauts cadres des missions et qui a récemment fait l’objet d’un accord.  Enfin, s’agissant de l’application des pactes mondiaux sur les réfugiés et les migrants, la Suède insiste sur l’importance du respect du droit international, du droit international humanitaire et du droit des réfugiés.

M. SERGIY KYSLYTSYA, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a regretté que près de deux décennies après l’adoption de la résolution 1265 (1999), de nouveaux conflits dévastateurs continuent de voir le jour.  Il a relevé que l’absence de mesures capables d’être mises en œuvre entrave les progrès de la communauté internationale en matière de protection des civils.  Il a notamment jugé urgent d’améliorer la collecte de preuves et les enquêtes sur les violations, ainsi que de combattre l’impunité.  Tant que certains États Membres, « y compris un membre permanent bien connu », n’auront que faire de la mise en œuvre des décisions de la CIJ, le Conseil de sécurité se verra condamné à tourner en rond en ce qui concerne la protection des civils, a-t-il argué.  Il a souligné qu’en l’absence d’un organe juridique supranational, il incombe à chacun de ne tolérer aucun crime d’agression, ni aucune violation du système juridique international.

Le Vice-Ministre a ensuite affirmé que l’Ukraine compte fournir la meilleure protection possible aux civils, alors que « l’agression de la Russie » entre dans sa cinquième année.  Il a indiqué que 4,4 millions de personnes vivent dans les zones affectées du Donbass, dont 3,4 millions ont besoin d’aide humanitaire. L’Ukraine a multiplié par six les allocations budgétaires destinées aux 1,5 million de déplacés, tandis que les fardeaux bureaucratiques ont été allégés et que des services d’appui psychologiques ont été mise en place.  Les autorités ukrainiennes se mobilisent également pour assurer le fonctionnement continu des infrastructures essentielles dans la région du Donbass.  Le Vice-Ministre a toutefois dénoncé que le 17 avril, cinq membres du personnel de la station de filtration d’eau de Donetsk, située dans la « zone grise », aient été blessés après que leur véhicule a essuyé des tirs provenant de forces appuyées par la Russie.  La station n’a pu fonctionner pendant cinq jours, ajoutant ainsi aux souffrances de la population locale, a-t-il déploré.

Le Vice-Ministre a aussi parlé de la création, par l’Ukraine, de la Commission interagences pour l’application et la mise en œuvre du droit international humanitaire et de la constitution, par les forces armées ukrainiennes, d’une équipe chargée de réduire le nombre de victimes civiles.  Le Cabinet des Ministres travaille actuellement à la rédaction d’une politique pour la protection des civils.  De leur côté, les démineurs ukrainiens ont retiré plus de 150 000 restes d’engins explosifs, dont plus de 1 000 engins explosifs improvisés « délibérément posés par les forces appuyées par la Russie ».

M. GUILLERMO RAIMONOI (Argentine) a rappelé les obligations qui découlent des quatre Conventions de Genève de 1949 et de ses protocoles additionnels de 1977, des Conventions de La Haye de 1899 et 1907, des droits de l’homme et des réfugiés, ainsi que du droit international coutumier.  Il a jugé nécessaire de renforcer les activités de protection des civils dans les mandats des missions des Nations Unies, en dotant celles-ci des moyens nécessaires pour une mise en œuvre efficace. 

Les opérations de maintien de la paix elles-mêmes doivent respecter le droit international humanitaire, a-t-il ajouté.  En ce qui concerne l’aide humanitaire, le représentant a appelé les parties à un conflit à faire tout leur possible pour garantir l’accès des personnels comme des matériels et fournitures.

Le représentant s’est inquiété que, comme le mentionne le rapport du Secrétaire général, certaines mesures de lutte contre le terrorisme affectent les activités humanitaires.  Il a aussi déploré que, deux ans après l’adoption de la résolution 2286 (2016), il faille redire que le personnel médical et les hôpitaux ne peuvent être l’objet d’attaques et qu’il faille condamner les nombreux cas survenus. 

L’Argentine, a-t-il dit, réaffirme le rôle préventif des mécanismes de responsabilité, avec des mécanismes d’enquêtes impartiaux sur les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Elle juge prioritaire de continuer à discuter de la création de nouveaux mécanismes pour renforcer l’application du droit international humanitaire.

M. MIKHEIL JANELIDZE, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de la Géorgie, a déclaré que la violation, par la Russie, du droit international représente un obstacle important au règlement du conflit entre ce pays et la Géorgie.  Il a notamment pointé le non-respect de l’Accord de cessez-le-feu de 2008, et le fait que la Mission de surveillance de l’Union européenne (MSUE) se voit nié l’accès aux territoires « sous occupation militaire illégale » de la Russie.  Il a averti que des meurtres de civils continuent de se produire, une femme ayant notamment été tuée l’an dernier par un « soi-disant » garde-frontière dans la région abkhaze, tandis qu’un homme a trouvé la mort alors qu’il était en détention dans la région de Tskhinvali.  Il a regretté que malgré les réunions régulières du Mécanisme conjoint de prévention des incidents et d’intervention, la réponse aux principaux incidents n’ait pas toujours été adéquate.

Le Ministre a ensuite insisté sur l’urgence d’assurer l’accès humanitaire, signalant que les autorités géorgiennes se voient empêchées de fournir une protection aux populations qui se trouvent dans les régions occupées de la Géorgie, lesquelles voient leurs droits fondamentaux violés, à commencer par leur liberté de mouvement.  Les observateurs internationaux ne peuvent pas non plus pénétrer dans les régions occupées pour rendre compte de la situation humanitaire sur le terrain, s’est-il inquiété.  Il a aussi appelé à trouver une solution durable à la situation des personnes déplacées.  Alors que 10% de la population de la Géorgie a été « exilée », le pays fait de son mieux pour améliorer le sort des déplacés, mais il importe de respecter leur droit au retour et de régler les questions liées à la propriété, a-t-il indiqué.  Il a aussi dit la nécessité d’établir un dispositif international de sécurité sur le terrain.

M. SYED AKBARUDDIN (Inde) a constaté que ce n’est pas l’absence de normes, mais l’incapacité à les respecter qui est la cause de la situation « lamentable » que connaît la protection des civils.  Il a relevé que la question de la protection des civils s’est intensifiée depuis les années 90 lorsque les conflits armés ont commencé à devenir des situations non plus interétatiques, mais intraétatiques avec de surcroît l’implication d’acteurs non étatiques et de réseaux terroristes.

La question de la protection des civils est donc particulièrement complexe en raison de la nature différente des conflits, des possibles contradictions dans les principes agréés du maintien de la paix, et de la limite des mandats et des ressources très insuffisantes dont disposent les missions.

M. Akbaruddin a souligné que la responsabilité de protéger les civils incombe en premier lieu aux gouvernements nationaux, et a déploré le peu d’efforts déployés pour renforcer les capacités sociétales de protection.  La protection des civils se fait en déterminant la façon dont les civils peuvent être protégés par d’autres parties, que ce soit les parties au conflit, les Casques bleus ou les organisations humanitaires, a-t-il constaté.  Pour l’Inde, le renforcement des mécanismes nationaux et sociétaux est donc essentiel et les acteurs externes ne peuvent que les compléter et non pas s’y substituer.

Le représentant a ensuite appelé à clairement définir les mandats des missions de maintien de la paix eu égard à la protection des civils.  La complexité des théâtres dans lesquels opèrent les missions ne doit pas servir d’excuse pour accepter l’impact dévastateur des conflits sur les civils, a-t-il estimé.

M. ELBIO OSCAR ROSSELLI FRIERI (Uruguay) a déploré que les attaques et bombardements contre les hôpitaux ont augmenté malgré l’adoption de la résolution 2286 (2016).  Pour la mettre en œuvre, le représentant croit en la mise en place d’enquêtes indépendantes, impartiales et exhaustives.  Il a qualifié les mécanismes pour identifier les responsables de violations d’importants pour progresser, citant en exemple le mécanisme d’enquête conjoint créé par le Conseil pour identifier l’emploi d’armes chimiques en Syrie.

Appelant le Conseil à enquêter en employant les synergies existantes, l’Uruguay a appelé à mettre fin à la culture d’impunité des auteurs de crimes de guerre.  L’Uruguay s’est aussi félicité à être le premier pays à transposer le Statut de Rome dans sa propre loi nationale.  Il a enfin appelé le Conseil à renvoyer certains cas devant la Cour pénale internationale (CPI) si la situation l’exigeait.

M. ALEX GIACOMELLI DA SILVA (Brésil) a estimé que la responsabilité collective ne doit pas uniquement se traduire en action sécuritaire collective.  Les civils doivent être davantage protégés, car des innocents souffrent de plus en plus.  Pour ce faire, il faut que la protection des civils puisse faire partie d’un grand nombre des mandats des opérations de maintien de la paix, notamment à travers les questions liées à la problématique de genre, la démobilisation et la réintégration.

Pour une paix pérenne, il faut intégrer les objectifs de consolidation d’une paix durable.  Il est, par ailleurs, crucial que toutes les parties facilitent un accès sans entrave au personnel humanitaire.  Il a réitéré en conclusion le rôle central qui incombe à la Cour pénale internationale (CPI).

« Loin sont les jours où l’impact des conflits armés étaient limités à des dommages collatéraux », a déploré Mme MALEEHA LODHI (Pakistan).  Aujourd’hui, les attaques ciblées, la violence sexuelle, l’enrôlement forcé, les tueries sans discriminations sont devenus le lot quotidien des conflits armés des temps modernes, a-t-elle poursuivi.  Bien plus, les civils qui sont censés être les premiers protégés sont devenus la principale cible!  Face à ce tableau sombre, elle a appelé à faire de la protection des civils la responsabilité de tous et de l’État hôte en premier lieu et ce, sans discrimination.

Pour le Pakistan, la violation des droits des civils n’est « ni inévitable ni insurmontable ».  Cela peut être atténué par l’emploi d’un éventail de mesures juridiques et autres, sur les plans national et international, pour promouvoir la conformité avec le droit international humanitaire et déterminer les responsabilités.  Mme Lodhi a dénoncé l’absence de volonté politique du respect du droit humanitaire qui est, à son avis, le premier obstacle devant la protection des civils dans les conflits armés.  Elle a, en conclusion, suggéré que les efforts collectifs soient orientés sur la recherche des causes des conflits, car dans le cas contraire « nous serions concentrés uniquement sur le traitement des symptômes et non sur leurs origines ».

M. OSCAR OCTAVIO GONZÁLEZ PARRA (Colombie) a rappelé aux États Membres que « nous devions assumer nos responsabilités » et s’engager davantage à faire respecter la résolution 2286 (2016).  Il a insisté sur le fait que « le respect et la protection » des missions médicales était nécessaire.  Dans le cas du règlement du long conflit avec les Forces Armées révolutionnaires colombiennes (FARC), « nous continuons à avancer », s’est-il réjoui.

Il a fait part de résultats très positifs en matière de protection des civils, avec un taux d’enlèvement et d’homicide le plus bas depuis 40 ans.  Il a enfin rappelé que la consolidation de l’état de droit était absolument nécessaire pour avancer dans ce domaine, et a rappelé que le meilleur des socles pour progresser était un pays en paix.

M. TORE HATTREM (Norvège) a salué l’initiative « les soins de santé en danger » du CICR, y voyant un excellent exemple de l’action communautaire sur le terrain couplée à la coopération avec les États et les organisations internationales.  Il a appelé les États non seulement à mettre en œuvre les recommandations issues de cette initiative, mais aussi à appuyer les efforts déployés par l’OMS pour établir un système de surveillance unifié pour disséminer des données de qualité sur les attaques perpétrées contre les centres de santé.  Il a aussi exhorté les États à mettre en œuvre la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.

Le représentant a ensuite souligné que le dialogue avec les parties à un conflit est essentiel pour améliorer la protection des civils.  Il a appelé les États en mesure d’avoir une influence sur le terrain à prêcher par l’exemple en la matière.  Il a aussi vu dans l’acte d’engagement auprès de l’Appel de Genève pour la protection des enfants contre les effets des conflits armés, un bon exemple d’une mesure pratique élaborée sur la base de l’expérience du terrain.  Il a, par ailleurs, dit l’importance de mettre en œuvre la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel et de la Convention sur les armes à sous-munitions.  Les actions de déminage et de destruction des stocks d’armes sont une contribution « très concrète et efficace » à la protection des civils après un conflit, a–t-il expliqué.  Il a par ailleurs appuyé l’appel du Secrétaire général à éviter d’utiliser des engins explosifs dans les zones peuplées et à élaborer des directives pour leur usage de manière à épargner les civils.

Reprenant à son compte les propos du responsable du CICR, M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a reconnu qu’il existe un fossé profond entre les paroles et les actes que nous devons combler.  Nul besoin de rappeler les situations effroyables des populations civiles et leurs souffrances, relayées par les photos prises en Syrie, en Afghanistan, au Myanmar et ailleurs.  C’est pourquoi il a appelé à joindre le geste à la parole et à agir dans les trois domaines: prévention, protection et responsabilité.  On ne peut tolérer l’impunité, a-t-il martelé, soulignant que si son pays est élu au Conseil de sécurité, « nous donnerons davantage de poids à la protection des conflits ».

Le sort des Rohingya est riche d’enseignement à cet égard, a estimé le représentant, car c’est un drame qui aurait pu être évité « si nous avions attiré l’attention de la Communauté internationale plus tôt ».  Leur sort n’aurait pas été aussi catastrophique.  Tout en soulignant le rôle essentiel des opérations de maintien de la paix dans la protection des civils, comme c’est le cas en République centrafricaine (RCA) ou République démocratique du Congo (RDC), il a regretté la réduction de leur budget.  Il a, en conclusion, appelé à une plus étroite collaboration entre Genève et New York qui parfois donnent « l’air d’appartenir à des planètes différentes ».  Quand il s’agit de protection de civils, il faut laisser de côté les divergences politiques! a-t-il lancé.

Pour M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie), la meilleure façon de protéger les civils est d’empêcher la flambée de violences, l’escalade et la récurrence des conflits armés. Il faut aussi s’attaquer en priorité aux causes profondes des conflits. « Nous disposons des outils adéquats pour relever ces défis posés à la paix et à la sécurité internationales », a-t-il assuré, c’est pourquoi il faut agir en conséquence et traduire sur le terrain nos engagements. Soulignant que les organisations terroristes ne se sentent liées par aucun cadre juridique international, il a appelé à identifier les voies pour améliorer et coordonner notre lutte commune contre ce phénomène, sous toutes ses formes et manifestations.  Il faudrait, par exemple, éviter de signer des documents avec des groupes armés non étatiques qui pourraient être tentés de les utiliser pour légitimer leurs actes.

La première responsabilité de protéger incombe aux États, a rappelé le représentant.  Cependant, a-t-il ajouté, il appartient également à la communauté internationale de protéger les civils dans le cas où les États ont failli.  « Nous devons intensifier notre assistance humanitaire pour répondre aux besoins des populations dans les situations d’urgence. »  En Syrie, a-t-il souligné, l’on a été témoin de l’une des crises diplomatiques les plus dramatiques.  La Turquie, a-t-il indiqué, continuera d’apporter son assistance, en coopération avec les Nations Unies, pour l’aide humanitaire transfrontalière qui est indispensable à la survie de centaines de milliers de personnes affectées.  Il a regretté que les réponses du Conseil de sécurité à des crises comme celles de la Syrie et de la Palestine soient loin des attentes; bien plus, a-t-il conclu, cela reflète une totale ignorance des valeurs du système des Nations Unies.

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a estimé qu’il est de la responsabilité collective d’inverser l’érosion « progressive et dramatique » du respect des règles les plus élémentaires de la guerre.  L’absence de mise en œuvre de la résolution 2286 (2016) devrait d’ailleurs servir d’appel à l’action du Conseil de sécurité, « car l’érosion de l’état de droit international nous concerne tous », a-t-il ajouté.  Il a vu dans la prévention des atrocités de masse le meilleur moyen de protéger les civils et s’est dit encouragé du fait que 116 États aient adhéré au code de conduite du Groupe ACT.

Le représentant a ensuite salué la récente visite du Conseil de sécurité au Myanmar et au Bangladesh, mais a toutefois déploré que celle-ci n’ait pas insufflé un sentiment d’urgence à l’action du Conseil.

Il a appelé le Conseil à user de sa compétence pour référer la situation des Rohingya à la Cour pénale internationale (CPI).  Le Conseil de sécurité a jusqu’à présent démontré un penchant malheureux à chercher à distinguer la dimension judiciaire de la crise humanitaire, alors qu’elles sont indissociables, a-t-il déploré.  Cette situation, a-t-il souligné, illustre à quel point le Conseil doit répondre aux atrocités de masse afin de faire son travail efficacement.

Pour Mme KATALIN BOGYAY (Hongrie), le meilleur moyen de protéger les civils est de prévenir les conflits armés.  Pour cela, les Nations Unies doivent utiliser tous les moyens en leur possession pour promouvoir le principe de l’alerte précoce et une médiation politique afin d’inverser l’escalade des hostilités.  La Hongrie, a-t-elle poursuivi, accorde une attention particulière au principe de la responsabilité de protéger (R2P) qui est un élément essentiel de la prévention. « Nous devons accorder une attention particulière aux alertes précoces sur d’éventuelles atrocités, notamment celles liées aux violations graves des droits de l’homme dans certaines zones. »

C’est pourquoi la Hongrie soutient fermement le mécanisme de prévention du Conseil des droits de l’homme.  En tant que membre de cet organe (2017-2019), une de ses priorités est d’agir pour prévenir les atrocités.  De même, la représentante a jugé essentiel le principe de responsabilité.   La Hongrie soutient également la Cour pénale internationale (CPI), ainsi que le Mécanisme international impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves commises en Syrie et d’aider à juger les responsables.

M. JORGE MORAGAS SANCHEZ (Espagne) a noté le bien-fondé de la résolution 2286 de mai 2016, « son rôle, sa profondeur », sans pour autant être satisfait de sa mise en œuvre.  Si « de plus en plus d’États Membres haussent la voix quand survient une attaque et exigent une enquête prompte, impartiale et exhaustive », le représentant s’est demandé « comment nous pourrions créer la volonté politique nécessaire pour que les deux parties d’un conflit puissent changer de comportement », et « comment augmenter le coût politique pour les auteurs d’attaques ».  En ce sens, l’Espagne s’est dite prête à explorer, avec les quatre cosignataires de la résolution 2286, les options pour augmenter son pouvoir effectif: « nous croyons que l’Assemblée générale pourrait jouer un rôle à ce sujet », a-t-il indiqué.

M. GHOLAMALI KHOSHROO (République islamique d’Iran) est revenu sur la répression et « le massacre » des civils palestiniens non armés à Gaza, pour dénoncer l’impunité d’Israël, une impunité, a-t-il insisté, offerte au Conseil du sécurité, par les États-Unis, les même États-Unis qui ont par la suite essayé de bloquer la création d’une commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme. 

Le représentant a aussi dénoncé l’agression saoudienne qui dure depuis plus de trois ans dans un Yémen déjà appauvri.  Cette agression et cette « guerre humaine », a-t-il dit, se poursuivent sous les yeux du Conseil de sécurité, avec le plein appui militaire et logistique des États-Unis qui assurent aussi la formation des troupes saoudiennes. 

Les régimes israélien et saoudien, a poursuivi le représentant, continuent à attaquer les civils alors que le rôle des États-Unis, en tant que membre du Conseil de sécurité, est « d’attaquer la vérité », en leur garantissant appui et impunité.  « Nous vivons dans un monde de frustrations croissantes où personne ne gagne les guerres.  La communauté internationale doit de toute urgence mettre fin aux conflits au nom des millions de civils qui souffrent dans le monde », a conclu le représentant.

M. JORGE SKINNER KLEÉ-ARENALES (Guatemala) a déploré qu’en dépit de toutes les initiatives de la communauté internationale, l’on dénombrait beaucoup de victimes innocentes et des violations des Conventions de Genève.  Il a noté que les résolutions 1265 (1999) et 2286 (2016) étaient encore difficiles à mettre en œuvre, et que combattre l’impunité des auteurs était un exercice compliqué.

Concernant les opérations de maintien de la paix, M. Skinner Klee-Arenales a observé que le Conseil de sécurité devait confier des mandats réalistes et les doter de ressources suffisantes.  Il a également déploré qu’un consensus sur la définition de l’expression « protection des civils » n’ait pas été trouvé au sein des Nations Unies.

Le Guatemala a mis l’accent sur la prévention dans le rapport du Secrétaire général, mais a néanmoins noté que le Conseil continuerait d’être critiqué s’il ne gagnait pas en efficacité.

M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) a appelé tous les États Membres à renouveler leur engagement en faveur du droit international humanitaire et à tout faire pour traduire en justice les auteurs de violations.  De ce point de vue, universaliser la juridiction de la Cour pénale internationale (CPI) reviendrait à franchir une première étape importante, a-t-il estimé. 

La réforme du secteur sécuritaire est également un facteur clef de la protection des civils, a ajouté le représentant, soulignant que les lacunes dans ce secteur engendraient bien souvent des abus et violations des droits de l’homme à l’encontre des populations civiles. 

Enfin, M. Mlynár a insisté sur le besoin de protéger l’aide humanitaire.  Il a mentionné notamment les derniers chiffres publiés par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), selon lesquels 322 attaques ont été perpétrées contre le secteur de la santé en période de conflit armé l’an dernier, la majorité d’entre elles de manière intentionnelle.  Pour se prémunir contre ces agissements, le représentant a appelé à mettre en œuvre pleinement la résolution 2286 (2016) du Conseil.

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a d’abord souligné que la responsabilité première en matière de droit international humanitaire incombait aux États, mais a aussi rappelé que les groupes armés non étatiques devaient, eux aussi, être sensibilisés à cette notion de droit. À cet égard, elle a mis en avant les résultats de l’association « Geneva Call ». Déplorant que la protection des civils ne soit pas assurée dans toutes les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, la représentante a souligné l’importance cruciale de la formation des contingents pour prévenir de futures atrocités, et s’est félicitée que la Belgique investisse dans la première formation en protection des civils dispensée en français, qui aura lieu dans quelques semaines à Entebbe, en Ouganda.

Concernant les efforts de médiation, la représentante a déploré que les acteurs de médiation politique et les négociateurs humanitaires fonctionnent parfois « en vase clos », et a appelé à « une réflexion stratégique » pour fluidifier ce processus. Enfin, en matière de lutte contre l’impunité, la Belgique a invité le Conseil à renforcer « son soutien aux procédures judiciaires nationales et aux mécanismes hybrides », et invité tous les États Membres à ratifier la version la plus récente du Statut de Rome, pour augmenter la pression sur les auteurs de crimes de guerre.

« Pas besoin de lire les rapports officiels pour constater que le monde fait face à une crise en termes de protection des civils en situation de conflit et d’instabilité », a regretté Mme JOANNA ADAMSON, de l’Union européenne.  Quatre domaines inquiètent plus spécifiquement l’Union européenne: le respect du droit international; la prévention de la violence à caractère sexiste; la lutte contre les restrictions à l’accès humanitaire; la protection du personnel de santé et humanitaire.  « C’est notre responsabilité collective de veiller au respect du droit international, y compris du droit international humanitaire et des droits de l’homme, et de tenir pour responsables ceux qui y contreviennent », a souligné la représentante en ajoutant que les victimes civiles d’atrocités « ont besoin de pouvoir satisfaire leur sens de justice ».   

Traduire les responsables de ces crimes en justice est une « obligation morale », a –t-elle poursuivi, rappelant qu’au sein de l’Union européenne, il y avait eu un nombre croissant de poursuites judiciaires, dans le cadre de législations nationales, contre ceux qui avaient enfreint le droit international humanitaire.  Parallèlement, l’Union européenne soutient sans réserve la justice internationale, y compris le travail de la Cour pénale internationale (CPI).  Elle encourage d’ailleurs tous les États Membres à en faire de même et les appelle à « réduire les clivages entre ce qui se dit au Conseil de sécurité et la pratique quotidienne ».

Mme Adamson a ensuite abordé la question des violences à caractère sexiste qui sont toujours utilisées comme tactique de guerre, de terrorisme, de torture et de répression.  Face à cette tendance alarmante, l’Union européenne souhaite voir une perspective de genre incorporée systématiquement dans les efforts de protection, y compris dans les actions humanitaires.  Après avoir mis l’accent sur le lien crucial qui existe entre protection des civils et accès humanitaire, un lien qui a été tristement absent au cours de l’année 2017, la représentante a condamné dans les termes les plus fermes le recours aux tactiques qui visent à assiéger et affamer des populations civiles.  « La politique n’a pas de rôle à jouer dans la fourniture de l’assistance vitale », s’est-elle indignée.    Persuadée que les opérations de maintien de la paix peuvent jouer un rôle primordial, la représentante a proposé de trouver une « meilleure définition de stratégies politiques possibles pour assurer la protection des civils » sur le terrain.

M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a souhaité que la protection des civils, notamment les femmes, les enfants et les personnes handicapées, soit au cœur des activités du système des Nations Unies.  « Il faut que le lien entre le principe de responsabilité et la prévention des conflits soit établi. »  Il a ainsi proposé que les cas les plus graves de violations du droit international humanitaire et des résolutions du Conseil de sécurité fassent l’objet d’enquêtes et que les auteurs soient traduits en justice, y compris, en cas de besoin, à la Cour pénale internationale (CPI).  De même, des mécanismes d’alerte et d’action précoces sont cruciaux pour éviter des atrocités et des conflits.  Le délégué a plaidé pour la mise en œuvre complète de la résolution 2286 (2016) du Conseil de sécurité.  Enfin, il a invité les opérations de maintien de la paix à pleinement assumer leur mandat de protection des civils, conformément aux Principes de Kigali.

M. SVEN JURGENSON (Estonie) a souligné que son pays soutient pleinement le programme de réformes mené par le Secrétaire général ainsi que le concept de paix durable qui place la prévention et la paix durable au cœur de l’action des Nations Unies.  Il a jugé essentielle la formation des Casques bleus ainsi que d’autres personnels des Nations Unies en prévision de leur déploiement.  Pour sa part, a-t-il dit, l’Estonie a ratifié les principaux instruments du droit international humanitaire relatif à la protection des civils et introduit les ajustements nécessaires pour leur mise en œuvre.  Toutes les mesures ont été prises pour que le personnel militaire ne contrevienne pas au droit international humanitaire lorsqu’il accomplit sa mission.  Il a, en conclusion, insisté sur le principe de responsabilité, soulignant le rôle clef de la Cour pénale internationale (CPI) à cet égard, dans les cas où les enquêtes ou poursuites au niveau national n’ont pas été rendues possibles.  

M. MILENKO SKOKNIC (Chili) a mis l’accent sur le lien qui existe entre les questions liées aux femmes, à la paix et à la sécurité, et à la protection des enfants dans les conflits armés, qui font partie des priorités du Chili en termes de politique étrangère.  Se faisant l’écho du Secrétaire général, il a affirmé que la meilleure façon d’éviter les guerres, les déplacements de personnes et les abus contre des groupes vulnérables reste de s’attaquer aux causes profondes des conflits, de promouvoir les droits de l’homme et l’état de droit, de renforcer la bonne gouvernance et les institutions publiques et d’investir dans le développement durable inclusif.   Il faut aujourd’hui passer de la « réaction à la prévention », a poursuivi le représentant avant d’annoncer que le Chili avait déposé, il y a deux jours, ses instruments de ratification du Traité sur le commerce des armes. 

M. Skoknic s’est également aligné sur les priorités avancées par le Secrétaire général dans son dernier rapport sur la nécessité de renforcer le respect du droit international humanitaire, de promouvoir les meilleures pratiques entre parties aux conflits et de protéger le personnel médical et humanitaire.  Le Chili est d’avis qu’il faut privilégier la protection des civils dans les missions onusiennes et éviter les déplacements forcés de personnes, tout en recherchant des solutions durables à la situation des réfugiés et des personnes déplacées.

Au nom du Groupe des Amis pour la protection des civils en période de conflit armé, M. JURG LAUBER (Suisse) a estimé que le respect du droit international humanitaire, tel que défini dans les Conventions de Genève, était la pierre angulaire de la protection des civils.  Face aux violations généralisées de ces Conventions, le représentant a appelé le Conseil de sécurité et les États Membres à prendre leurs responsabilités, y compris en appuyant le processus intergouvernemental lancé à Genève dans le but de renforcer le respect du droit international humanitaire.  L’une des clefs pour y parvenir, a estimé M. Lauber, sera de garantir l’application du principe de responsabilité pour toute violation du droit international humanitaire.  Selon lui, lorsque les systèmes juridiques nationaux « n’ont pas la capacité ou la volonté d’agir », les mécanismes d’enquête internationaux, telle la Cour pénale internationale (CPI), doivent prendre le relai. 

En outre, le représentant a souligné que la mise en œuvre de la résolution 2286 (2016) du Conseil sur la protection du secteur de la santé en période de conflit armé devait être une priorité.  Il s’est ainsi félicité de la formation récente, à Genève, d’un groupe informel d’États pour promouvoir la mise en œuvre de cette résolution.  M. Lauber a enfin appelé à accorder davantage d’attention à la protection des civils dans le cadre des activités de lutte contre le terrorisme.

M. ABDALLAH Y. AL-MOUALLIMI (Arabie saoudite) a regretté que les principes et règles qui devraient sous-tendre le droit international soient régulièrement foulés au pied.  « C’est malheureusement la sombre réalité. »  La protection et l’intégrité des civils garanties par le droit international sont violées sans que leurs auteurs ne craignent des poursuites.  Récemment, le monde a assisté à un nouveau carnage où des dizaines de martyrs palestiniens ont été tués et des milliers d’autres blessés.  Le monde assiste à un carnage en Syrie.  Tous les moyens sont utilisés pour commettre un génocide au Myanmar.  Au Yémen, a accusé le représentant, le « gang des Houthistes appuyé par l’Iran se livre à des actes de torture et d’humiliation.  Des enfants sont utilisés comme boucliers humains, a-t-il ajouté.

Le moment est venu pour que les auteurs de ces actes hostiles rendent compte, a lancé M. Al-Mouallimi.  C’est pourquoi l’Arabie saoudite approuve la mise en place d’une commission d’enquête en Palestine et un mécanisme en Syrie et appuie les efforts entrepris pour que les Rohingya rentrent chez eux.  Il a saisi cette occasion pour rappeler qu’au Yémen, la coalition a lancé une grande opération pour sauver les populations de certaines forces obscurantistes qui ont pour visée de les asservir.  « Dans nos opérations, nous faisons preuve de retenue », a-t-il assuré, et ce, malgré certains incidents occasionnels non intentionnels.  Il a tenu à souligner que ceux-ci ont d’ailleurs fait l’objet d’enquêtes et que, dans bien des cas, leurs auteurs ont répondu de leurs actes et les victimes et leurs familles ont été indemnisées.

Au nom du Réseau de la Sécurité humaine, M. MELITÓN ALEJANDRO ARROCHA RUÍZ (Panama) a estimé que l’approche traditionnelle de la sécurité doit être complétée par « une approche holistique centrée sur la personne ».  Cela veut dire, s’est-il expliqué, travailler à la protection civile pendant un conflit mais aussi à la prévention.  Après avoir salué le dernier rapport du Secrétaire général, il a encouragé le Conseil de sécurité à exploiter toutes les informations collectées par les différents organes des Nations Unies pour assurer une meilleure mise en œuvre des normes et obligations liées à la protection des civils.  Le principe de responsabilité face aux violations du droit international humanitaire est un élément clef de la protection des civils, a-t-il insisté.  À cet égard, la communauté internationale doit faire davantage pour renforcer les capacités nationales.  Face aux violations du droit international dans les situations de conflit, le silence, la tolérance ou l’impunité ne sauraient être une option.  C’est le message qui doit sortir de ce Conseil et qui doit résonner partout dans le monde, a conclu le représentant. 

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a remarqué qu’il n’a jamais été aussi périlleux d’être un civil au milieu d’un conflit armé qu’aujourd’hui et jugé horrifiant le niveau actuel des souffrances qui sont pourtant évitables.  Comme l’a répété le pape François, il est tout à fait « inacceptable que tant de personnes non armées, y compris de nombreux enfants, paient le prix du conflit ».  Le nonce a mis l’accent sur le sort des personnes vulnérables, y compris les femmes et les enfants, avant d’appeler à condamner et à ne pas laisser impunie la vague d’attaques récentes contre des installations médicales dans des situations de conflit par des acteurs étatiques et non étatiques, y voyant non seulement une violation flagrante du droit international, mais aussi « une trahison de l’humanité elle-même ». 

Mgr Auza a invité à traduire en action tangible la résolution historique et politique 2286 (2016).  Les parties à un conflit armé doivent affirmer sans équivoque la nécessité de protéger les soins de santé, a-t-il dit, en demandant aussi des poursuites pénales pour les auteurs de telles attaques.  Il s’est alarmé de l’augmentation des attaques contre les travailleurs humanitaires et a dénoncé la politisation et la militarisation de l’aide humanitaire. 

M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a condamné « l’inaction » des membres du Conseil de sécurité, qu’il a qualifié d’« arène de confrontation géopolitique », où les États servent leurs intérêts, selon lui, au lieu de tenter de régler les conflits dans le monde. Il a pris pour exemple la situation à Gaza, à Douma en Syrie, et dans le sud-est de l’Ukraine « où l’impunité règne depuis quatre ans », a-t-il regretté.  Préoccupé par la vulnérabilité de la situation des traducteurs et interprètes dans les zones à risques, le représentant a estimé nécessaire d’élaborer un nouvel instrument international qui confirmerait le statut particulier de ces personnes et assurerait leur protection.  Enfin, il a appuyé les efforts pour trouver une solution pacifique au conflit en Ukraine, et s’est dit favorable à la mise en place éventuelle d’une force de maintien de la paix de l’ONU dans la région.

La protection des civils peut être garantie grâce à la prévention des conflits et de leur escalade et en exigeant que les responsables soient poursuivis, a souligné Mme VALENTINE RUGWABIZA (Rwanda). Le débat d’aujourd’hui montre l’importance cruciale de protéger les civils qui représentent une proportion importante des victimes: « ce ne sont pas des dégâts collatéraux mais bien des victimes de guerre! », s’est-elle exclamée. Le Rwanda insiste sur le fait que toutes les opérations de maintien de la paix des Nations Unies donnent la priorité à la protection des civils. La représentante a souligné à cet égard que les Principes de Kigali sont un ensemble de pratiques exemplaires pour la protection des civils dans le cadre des mandats des opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Elle a rappelé en conclusion que ces principes reflètent les enseignements tirés des tragiques évènements survenus au Rwanda.

Pour protéger les civils, nous devons nous concentrer sur la prévention, a estimé M. HAM SANGWOOK (République de Corée).  Il a donc appelé le Secrétaire général à user des pouvoirs que lui confère l’article 99 de la Charte des Nations Unies pour saisir le Conseil de sécurité des menaces ou des attaques contre les civils.  Il reviendra alors au Conseil d’y répondre « dans l’unité », a souligné le représentant.  Il a aussi insisté sur l’établissement des responsabilités pour chaque crime contre les civils.  L’impunité doit être « inacceptable » dans tous les recoins de la planète, a-t-il dit, en voyant un excellent exemple dans le Mécanisme international, impartial et indépendant chargé d’enquêter sur les violations commises en Syrie. Enfin, le représentant a voulu que l’on exploite au mieux les missions de maintien de la paix pour parvenir à une protection efficace des civils sur le terrain. Pour améliorer leur efficacité, les missions doivent être équipées des technologies modernes comme les drones ou les systèmes de géolocalisation, a-t-il estimé.

M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) s’est réjoui que Forces armées iraquiennes aient enregistré de grands succès dans la libération de territoires contrôlées par Daech « en se conformant au droit humanitaire ».  Il a aussi loué l’appui de la communauté internationale dans la création de couloirs humanitaires pour les civils dans des régions contrôlées par Daech, ainsi que la création de camps de déplacés dans lesquels des services de base et une aide alimentaire ont été fournis.  Le Gouvernement iraquien a mobilisé tous les ministères pour acheminer l’aide humanitaire et médicale ainsi que de l’eau potable dans les régions.  Des projets de « réhabilitation psychologique » sont aussi menés pour réinsérer les habitants, y compris les enfants mobilisés par Daech, et réconcilier la nation.

L’Iraq s’est engagé à coopérer avec les Nations Unies pour mettre en œuvre la résolution 2379 (2017) afin d’apporter l’aide nécessaire aux victimes et punir les responsables de Daech, a poursuivi M. Bahr Aluloom.  « Meurtres, enlèvements, traite d’êtres humains ne doivent pas rester impunis », a-t-il insisté, avant d’annoncer la création d’un comité central de compensation des victimes touchées par certaines opérations militaires et par des attentats terroristes, ainsi qu’un centre de coordination.   Enfin, les forces de sécurité iraquiennes travaillent à remettre sur pied des sites civils confisqués par Daech.  « La victoire militaire s’est doublée d’une victoire civile » avec les élections du 12 mai, a-t-il conclu.

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela), a rappelé que lors de la dernière Conférence de son Mouvement au mois d’avril dernier, les ministres ont souligné que la protection des civils relève de la responsabilité première du pays hôte, tout en reconnaissant que c’est une tâche qui est prévue dans de nombreux mandats des opérations de maintien de la paix.  Le Mouvement des pays non alignés appelle toutes les parties au conflit à honorer leurs obligations en vertu du droit international humanitaire.  Il appelle aussi les agences humanitaires à respecter ce droit et les lois des pays dans lesquels ils opèrent, sans oublier les principes consacrés par l’Assemblée générale pour l’aide humanitaire, à savoir l’humanité, la neutralité et l’impartialité.

Le représentant a aussi rappelé les principes de non-ingérence dans les affaires intérieures des États, de souveraineté, d’intégrité territoriale, d’unité nationale et d’indépendance des États.  Il a tenu à souligner que 88% des Casques bleus viennent des États membres de son Mouvement.  La bonne exécution des mandats, y compris celui de protéger les civils, dépend d’une coordination efficace entre les pays contributeurs de troupes, le Conseil de sécurité et le Secrétariat de l’ONU, a-t-il soulignant, en ajoutant qu’en l’occurrence, la sûreté et la sécurité des soldats de la paix ne sauraient être surestimées.  Le représentant a conclu en insistant sur la lutte contre l’impunité et la tolérance zéro pour tout acte de violence, toute attaque ou toute menace contre les civils.

M. ION JINGA (Roumanie) a mis en avant trois points: garder la prévention des conflits au cœur de la coopération internationale, assurer le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme et développer des cadres législatifs nationaux pour protéger les civils.  Remarquant l’urbanisation grandissante des conflits et leur caractère de plus en plus asymétrique, il a appelé l’Organisation à adapter sa réponse.

Rappelant la contribution des Roumains dans les opérations de maintien de la paix depuis 1991, M. Jinga a mis l’accent sur les progrès en matière de diversité dans les rangs des soldats de la paix, en remarquant l’impact positif des femmes soldats dans leurs interactions avec les femmes en situation de vulnérabilité sur le terrain.

M. JAN KICKERT (Autriche) a affirmé que partout où éclatent des conflits, le respect total du droit international humanitaire est primordial, a indiqué M. Kickert.  Le représentant a aussi appelé tous les États Membres à participer à l’élaboration d’une déclaration politique pour faire face aux effets humanitaires de l’utilisation des armes explosives dans les zones densément peuplées. 

Ainsi que le Secrétaire général le souligne dans son rapport, utilisés dans des zones habitées, les engins explosifs ont fait 92% de victimes civiles.  L’Autriche, a dit son représentant, partage l’appel du Secrétaire général à améliorer et étendre les suivis, les signalements et les réparations des dommages causés aux civils.  L’Autriche organisera demain deux événements sur ces deux sujets, a annoncé le représentant. 

M. Kickert a souligné que le vingtième anniversaire des Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays, cette année, donne l’occasion de renforcer notre travail vers des solutions durables conformément à ces Principes.  L’élaboration d’un plan d’action pour faire avancer la prévention, la protection et les solutions pour les personnes déplacées pour la période 2018-2019 est une excellente étape à cet égard.

Mme ALYA AHMED S. AL-THANI (Qatar) s’est exprimée au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, qui représente 50 États et l’Union européenne.  Coprésidé par l’Italie et le Qatar, le Groupe appelle au plein respect du droit international dans le cadre de la protection des civils.  Il souligne l’importance pour les États de mettre en place des législations pour faire face aux violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme, et pour veiller à l’application du principe de responsabilité aux auteurs de telles violations.  La communauté internationale devrait également enquêter en cas de graves violations et déférer leurs auteurs devant les juridictions nationales ou les tribunaux internationaux quand le besoin s’en fait sentir, y compris devant la Cour pénale internationale (CPI).

Mme Al-Thani a déploré la généralisation d’attaques contre les infrastructures civiles, notamment médicales et scolaires.  Elle a également indiqué que la protection des civils doit tenir compte du genre, tout en plaidant pour la protection des journalistes qui jouent un important rôle de sensibilisation sur la réalité des conflits.  Elle a enfin estimé que la meilleure manière de protéger les civils est d’investir dans la prévention des conflits et la résolution pacifique des différends.

Mme MARTHA A. A. POBEE (Ghana) a condamné les privations alimentaires infligées aux civils comme arme de guerre, ainsi que l’usage de populations comme boucliers humains, avant de rappeler la responsabilité première des États dans les enquêtes et la poursuite de criminels de guerre à l’intérieur de leurs frontières. Elle a appelé les États Membres à intégrer le droit international dans leurs lois nationales pour combattre les violations et placer les auteurs de crimes de guerre devant leurs responsabilités.  Mme Pobee a aussi exhorté les États Membres à développer la capacité d’action de leurs systèmes judiciaires, afin qu’ils poursuivent les auteurs présumés de crimes de guerre dans des tribunaux nationaux, dans le but d’alléger la charge de la Cour pénale internationale (CPI).

« L’an dernier, les Nations Unies ont enregistré 26 000 morts civils suite à des attaques délibérées ou autres dans seulement six pays », a déploré M. MICHEAL TIERNEY (Irlande), précisant dans la foulée qu’aujourd’hui plus de 50 millions de personnes sont touchées par des conflits urbains.  Suite à ce constat, il a exigé que « tous les États engagés dans des conflits se conforment au droit international humanitaire et plus précisément aux principes de distinction, de discrimination et de proportionnalité ».  Particulièrement inquiet par le recours aux armes explosives dans des zones urbaines, il a expliqué que ces armes touchent à la fois et indistinctement des cibles militaires et civiles et ont un impact humanitaire lourd à long terme puisque, au-delà des victimes immédiates, ces armes détruisent les infrastructures, les écoles, les hôpitaux, les centrales d’épurations et les logements.

Le délégué a appelé à un engagement politique renouvelé pour la protection des civils, ce qui passe par un respect plus strict du droit international humanitaire et une meilleure opérationnalisation de ses dispositions dans la doctrine et les pratiques militaires.  La protection et l’accès à l’aide humanitaire doivent être garantis à ceux frappés par une crise, y compris aux femmes, enfants, personnes handicapées et aux plus vulnérables, a-t-il poursuivi, avant de saluer les appels renouvelés à exiger que les responsables des violations graves du droit international soient poursuivis en justice.  Reconnaissant que le maintien de la paix reste un outil essentiel dans la protection des civils, l’Irlande a réitéré son soutien aux Principes de Kigali.  En tant que contributeur de troupes important, l’Irlande souhaite ardemment que l’on fournisse aux opérations de paix les moyens nécessaires pour accomplir leurs mandats, notamment en termes de protection des civils.  Dans cette optique, l’Irlande a mis à disposition de ses partenaires onusiens une série de formations qui s’adressent au leadership de ces opérations.

M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE (Nigéria) a fait observer que les femmes et les filles sont les plus durement touchées par les situations de conflit, en particulier quand elles font face à la violence et à l’esclavage sexuel.  Selon lui, les réseaux d’alerte communautaires jouent un rôle essentiel dans la protection des civils, et les opérations de maintien de la paix doivent pouvoir répondre aux menaces qu’ils perçoivent.  

Environ 14,8 millions de personnes sont affectées par l’insurrection de Boko Haram au Nigéria, a souligné M. Muhammad-Bande.  Le Gouvernement a pris des mesures décisives pour améliorer le sort des civils, à commencer par les femmes et les filles vivant en zone rurale, en adoptant un plan de protection sociale et en lançant le deuxième plan de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000). Le Nigéria a adhéré à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, qui vient d’ailleurs renforcer une initiative nationale établie sur ce même thème en 2014.  Le Gouvernement met également en œuvre le « Plan de Buhari » qui concerne l’octroi de l’aide humanitaire et la stabilisation socio-économique du nord-est du pays.  Le Nigéria, a poursuivi le représentant, collabore par ailleurs avec ses voisins dans le cadre de la Force multinationale mixte pour vaincre Boko Haram. Il s’est félicité de la libération de plus de 1 000 femmes et enfants qui avaient été kidnappés. Le délégué a ensuite parlé de l’initiative « Opération corridor sûr » qui vise à combattre la radicalisation et à assurer la réintégration des anciens membres de Boko Haram.  Nombre d’entre eux se sont rendus et 700 autres sont prêts à en faire de même.

Cela fait des décennies, a rappelé M. RIYAD H. MANSOUR, État de Palestine, que le peuple palestinien demande à la communauté internationale une protection conformément au droit international, en particulier l’application du droit humanitaire international.  Cela fait des décennies que ce peuple souffre d’une « crise de protection », causée par l’occupation et l’impunité dont jouit Israël.  Une puissance occupante, a plaidé l’observateur, ne peut invoquer son droit à la sécurité au détriment du droit à la sécurité, à la protection et au bien-être du peuple occupé, et à son droit à l’autodétermination.  Aucun droit à la sécurité ne saurait justifier l’occupation permanente, l’acquisition illégale de territoires, la colonisation, le blocus imposé depuis 11 ans à deux millions de personnes et le recours illégal à la force contre des manifestants pacifiques, a-t-il plaidé. 

Le droit international trace une ligne claire entre l’action légale et les crimes de guerre et contre l’humanité.  Il ne saurait y avoir une norme pour le monde entier et une autre pour Israël.  L’impunité, a insisté l’Observateur, est la plus grande menace pour les civils et le principe de responsabilité, leur meilleur bouclier.  L’observateur a conclu en annonçant que le Koweït, membre du Conseil de sécurité, a entamé des consultations sur un projet de résolution relatif à la protection des civils palestiniens.  Il a appelé le Conseil à saisir cette occasion pour prouver que les principes consacrés dans ses propres résolutions sur la protection des civils, y compris la protection des enfants, ne souffrent d’aucune exception.  Il a insisté pour que le Conseil prouve sa détermination à agir avec constance pour défendre ces principes face à de graves violations. 

La responsabilité première de la protection des civils revient à l’État, a rappelé M. VITAVAS SRIVIHOK (Thaïlande).  Il a toutefois ajouté que toutes les parties au conflit avaient pour obligation de respecter le droit international, le droit international humanitaire et les droits de l’homme.  Il a également insisté sur le fait que le personnel de maintien de la paix devait bien comprendre son mandat de protection, ses priorités et ses responsabilités.  En tant que pays contributeur de troupes, la Thaïlande dispense une formation continue à son personnel de maintien de la paix, a assuré son représentant.  Il a également plaidé en faveur de plus de partenariats et d’une approche intégrée entre composantes militaires, civiles et de police pour la protection des civils, ces trois composantes devant également coordonner leurs actions avec les autorités nationales et les organismes humanitaires pertinents sur le terrain.

Selon M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh), la crise récente des Rohingya a démontré combien les autorités du Myanmar avaient abdiqué leur responsabilité de protéger les civils du pays.  Face à cette situation, le représentant a appelé à créer des « zones sécuritaires » de protection des civils dans l’État Rakhine, sous l’égide des Nations Unies et de partenaires régionaux.  En l’absence de telles zones, le retour des Rohingya réfugiés au Bangladesh dans leur pays d’origine demeure fortement incertain, a-t-il affirmé, à plus forte raison que les autorités du Myanmar n’ont à ce jour pris aucune mesure concrète pour enquêter sur les crimes commis à l’encontre de la minorité rohingya.

Pour améliorer la protection des civils dans les situations de conflit en général, M. Momen a appelé l’ONU à mettre davantage l’accent sur l’analyse stratégique et l’évaluation des menaces contre les civils, notamment via des mécanismes d’alerte précoce.  Les parties à des conflits ne doivent pas entraver l’acheminement de l’aide humanitaire, a-t-il ajouté, appelant également les États à ne pas vendre des armes à d’autres entités nationales si ces dernières les utilisent pour commettre des crimes contre des civils.  

Étant donné que la protection des civils relève de la responsabilité première de chaque État Membre, a dit M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie), le renforcement des capacités institutionnelles et l’appui des Nations Unies et des autres partenaires est crucial.  Il a aussi estimé que le Conseil de sécurité devrait trouver des moyens novateurs pour obtenir des acteurs étatiques qu’ils respectent les normes internationales en matière de protection des civils.  Il faut aussi, a-t-il poursuivi, améliorer le système d’évaluation médicale des soldats de la paix et du personnel humanitaire.  Par ailleurs, a reconnu le représentant, les femmes savent mieux que d’autres ce dont les communautés ont besoin pour réaliser et consolider la paix.  Il a réclamé une action à l’échelle du système des Nations Unies pour promouvoir les femmes comme force indispensable de la consolidation de la paix, de la protection des civils et d’une paix durable.

Mme MILICA PEJANOVIĆ-DJURIŠIĆ (Monténégro) a affirmé que pour protéger les civils, l’ONU doit faire mieux en matière de prévention et de résolution des conflits.  Pour elle, aucun pays n’a le droit de s’opposer à la résolution 2286 (2016) qui promeut l’accès des civils aux soins médicaux.  Le Conseil de sécurité doit veiller à lutter contre l’impunité en cas de grave violation du droit international humanitaire, y compris par des renvois devant la Cour pénale internationale (CPI).  Estimant en outre que le droit de veto ne devrait pas être utilisé quand la protection des civils est en cause, le Monténégro soutient l’initiative de la France et du Mexique sur les restrictions de l’usage de ce droit en cas d’atrocités de masse, et il adhère au code de conduite du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence.  Par ailleurs les soldats de la paix originaires du Monténégro sont formés à la protection des civils et adhèrent aux Principes de Kigali, a expliqué la représentante.  

M. JĀNIS MAŽEIKS (Lettonie) a noté l’incidence des guerres urbaines, qui sont de plus en plus fréquentes, sur les populations et infrastructures civiles.  Le recours aux armes explosives, ou, pire encore, aux armes chimiques dans des zones fortement peuplées, les déplacements forcés de personnes, les violences sexuelles, le fait d’affamer des populations civiles et d’assiéger des villes, ou encore de refuser l’accès à l’aide humanitaire, sont devenus des tactiques de guerre qui font la une des journaux au point « de ne plus sembler scandaleuses », a-t-il déploré.

La Lettonie est aussi préoccupée par les attaques récurrentes de convois humanitaires et du personnel et des installations médicales dans les zones de conflit armé, mais au-delà par le sentiment croissant de « fatigue » face au mépris des principes humanitaires de nos jours. Pour son représentant, on ne doit plus tolérer l’impunité face à ces crimes.  Il a d’ailleurs rappelé que toutes les parties aux conflits, étatiques ou non, ont pour obligation de respecter le droit international, le droit humanitaire et les droits de l’homme.  S’agissant du rôle du Conseil de sécurité, M. Mažeiks a regretté qu’il ne soit pas possible de lever les obstacles à la protection des civils dans différentes zones de conflit, y compris en Syrie, en République démocratique du Congo (RDC) et en Ukraine, et demandé aux membres permanents de renoncer à exercer leur droit de veto face aux atrocités de masse.  Lorsqu’il n’y a pas d’action nationale, les mécanismes du droit international doivent prendre le relai pour rendre justice aux victimes, a-t-il exigé.

Face à l’inaction du Conseil de sécurité dans certaines zones de conflit, qui a eu « un coût humain important », Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a appelé ses membres à faire preuve d’unité.  Abordant la situation dans sa propre région, où la Syrie entre dans sa huitième année de conflit, elle a regretté que pendant trop longtemps le peuple syrien n’ait pu avoir accès à l’aide humanitaire.  Outre un accès sans entrave à l’assistance humanitaire, les Émirats arabes unis demandent que les responsables des attaques à l’arme chimique contre des civils soient poursuivis en justice.  S’agissant de Gaza, la représentante a estimé que les actions d’Israël ne pouvaient être tolérées par la communauté internationale et ne devaient pas devenir la nouvelle norme.  En demandant le respect du principe de responsabilité dans ces deux cas, les Émirats arabes unis ne le font pas uniquement dans un souci de justice mais aussi pour éviter que telles situations ne se répètent à l’avenir, a expliqué leur représentant.  Elle a préconisé la mise en place de mécanismes de collectes de données indisputables, de sorte que la communauté internationale puisse réagir de manière informée et responsable aux développements sur le terrain.

En tant que membre de la coalition soutenant la légitimité au Yémen, son pays prend à cœur ses responsabilités en termes de droit international humanitaire et de protection des civils, a assuré la représentante.  Il veut poursuivre sa coopération avec les Nations Unies dans ce conflit dont « les Houthistes sont responsables avec leurs soutiens iraniens ».  « La décision de l’Iran d’armer des acteurs non étatiques avec des armes, y compris des missiles balistiques, a poussé toute la région vers un précipice », a-t-elle averti. 

Ceux qui commettent des exactions à l’encontre des populations qu’ils sont censés protéger doivent être condamnés, a déclaré Mme KOKI MULI GRIGNON (Kenya).  En tant que représentant d’un pays fournisseur de contingents, la représentante a renouvelé l’engagement du Kenya à mettre pleinement en œuvre la résolution 2272 (2016) du Conseil de sécurité, qui vise à contraindre les pays à sanctionner ceux qui, au sein de leurs propres troupes, commettent des crimes d’exploitation et d’atteintes sexuelles contre des civils dans le cadre de missions onusiennes. 

S’agissant, plus généralement, des opérations de maintien de la paix, la représentante a appelé à harmoniser davantage les mandats de protection des civils et à mieux coordonner les efforts des composantes militaires, civiles et de police en la matière.  Il faut également s’assurer, a-t-elle dit, que les opérations disposent des ressources nécessaires pour mettre en œuvre ces mandats.  La représentante a ainsi jugé nécessaire de définir une « doctrine commune » sur la protection des civils, afin notamment de garantir la qualité des formations du personnel déployé et des équipements dont ils disposent sur le terrain.  Une telle doctrine passerait également par l’établissement d’objectifs « crédibles et réalistes » de protection des civils et la mise en place de dispositifs d’alerte précoce. 

M. MOUNZER (République arabe syrienne) a indiqué que sa délégation va transmettre des observations écrites au Secrétariat en réaction au rapport du Secrétaire général.  Selon lui, la protection des civils doit tenir compte des principes de la Charte des Nations Unies, dont le respect de la souveraineté des pays.  La Syrie va continuer de coopérer avec ses alliés en vue de protéger ses citoyens face aux terroristes en provenance de plus de 100 pays qui ont envahi son territoire.  Il a déploré le fait que des groupes armés agissent « sous le couvert d’organisations humanitaires », notamment les Casques blancs.  Il a aussi dénoncé la politisation du concept de protection des civils dans son pays, tout en ironisant sur les rapports transmis par sa délégation au Secrétariat sur la question et qui « se perdent en chemin ». 

Selon le représentant, les victimes civiles palestiniennes témoignent aussi de l’échec du Conseil de sécurité de les protéger des exactions israéliennes.  Il a rappelé l’objectif des pères fondateurs des Nations Unies résolus à préserver le monde du fléau de la guerre.  Il a, par ailleurs, accusé l’Arabie saoudite d’avoir été le siège de levées de fonds destinés à déstabiliser la Syrie.

M. KHALED HUSSEIN MOHAMED ALYEMANY (Yémen) a indiqué que son pays avait connu l’un des transferts de pouvoir les plus pacifiques depuis le Printemps arabe, le mouvement de changement yéménite ayant servi de modèle pour bâtir un Yémen nouveau, uni et démocratique et en finir avec le régime centralisé, la dictature et l’exclusion.  Cependant, les milices houthistes appuyées par l’Iran ont mis fin au processus de transition politique pacifique et détruit le Yémen pour mettre en place l’agenda expansionniste de l’Iran, a-t-il dénoncé.  Il a indiqué que le Gouvernement yéménite n’avait ménagé aucun effort pour accepter les initiatives paix proposées par l’ONU et pour appuyer la mise en œuvre de la résolution 2216 (2015).  Il a aussi indiqué que la capitale du pays est actuellement « prise en otage », et que pour sauvegarder la vie de ses habitants, les autorités n’avaient pas lancé d’attaques contre elle.  Les combats dans la ville de Taëz ont en revanche fait des milliers de victimes, tombées aux mains des milices qui ont endoctriné les enfants et délibérément ciblé les femmes.  Il a appelé la communauté internationale à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les civiles yéménites, notamment les enfants endoctrinés et les personnes disparues.

Le délégué s’est ensuite étonné que l’Iran ait osé parler de la situation humanitaire déplorable au Yémen, « alors qu’il en est la cause ».  Il a appelé le Conseil à exercer une influence sur les « putschistes houthistes armés par l’Iran », notamment en les empêchant d’utiliser les civils comme boucliers humains et les écoles et hôpitaux comme bases militaires.

M. WOUTER HOFMEYR ZAAYMAN (Afrique du Sud) s’est dit particulièrement préoccupé par l’échec du Conseil à prendre une décision sur Gaza où une population civile a été aveuglément visée par une force militaire.  C’est le Conseil des droits de l’homme qui a dû prendre le relais et lancer une enquête, a rappelé le représentant, en appuyant pleinement cette enquête indépendante.  Depuis 1999, a-t-il poursuivi, la protection des civils est devenue un élément central des opérations de maintien de la paix sans pour autant que les politiques et les pratiques n’évoluent au rythme souhaité.  L’Afrique du Sud n’a cessé le dire: pour exécuter leur mandat de protection des civils, les opérations de l’ONU doivent être dotées des ressources et des capacités nécessaires.  Le représentant s’est aussi dit alarmé par les attaques contre le personnel médical et les hôpitaux.  Ces « actes d’agression », a-t-il martelé, sont un acte de guerre dont les responsables doivent rendre compte.

M. TOSHIYA HOSHINO (Japon), dont le pays avait rédigé la résolution 2286 (2016), s’est réjoui du progrès qu’elle a apporté en matière de droit international, tout en déplorant les limites de sa mise en œuvre.  Il a notamment déploré l’évolution de la nature des conflits vers des zones plus densément peuplées, affaiblissant la protection des civils.

Évoquant le cas syrien, le représentant a regretté le blocage de convois et les attaques fréquentes contre les médecins.  « Si nous reconnaissons les possibles différences de points de vue entre les membres du Conseil du sécurité et les États Membres dans leur ensemble, il demeure que c’est au Conseil qu’incombe la responsabilité de protéger les civils, et donc de délivrer un message clair aux acteurs des conflits pour qu’ils respectent le droit international humanitaire, même en cas de guerre contre le terrorisme », a-t-il insisté.

Le représentant a enfin salué le dernier rapport du Secrétaire général et ses idées pour mieux mettre en œuvre la résolution 2286 (2016).  Dans ce cadre, il a confirmé la nécessité urgente que la résolution soit aussi respectée par des groupes armés non étatiques.

Mme SIMA SAMI I. BAHOUS (Jordanie) a dénoncé les « violences inhumaines » d’Israël envers les civils palestiniens, envers les infrastructures civiles de Palestine et ses écoles.  Elle a aussi contesté un usage excessif de la force par Israël contre les civils non armés qui manifestaient pacifiquement, et qui ont entraîné la mort de 61 Palestiniens dont 8 enfants.  « La paix ne saurait être édifiée dans un bain de sang, elle n’est possible que si l’on reconnait le droit des peuples à vivre dans la dignité », a-t-elle plaidé, avant de souhaiter qu’un État indépendant de Palestine voie le jour avec Jérusalem-Est comme capitale.  La représentante a appelé la communauté internationale à protéger le peuple palestinien et plaidé pour l’ouverture d’une enquête indépendante des violences commises à Gaza.  « Celles-ci doivent cesser », a-t-elle insisté.  Enfin, elle a évoqué l’accueil des réfugiés syriens, qui sont actuellement 1,3 million en Jordanie, comme une preuve tangible de l’engagement de son pays en faveur de la protection des populations civiles en période de conflit armé.

M. ANDREJ DOGAN (Croatie) a fait observer que, si pendant la Première Guerre mondiale le nombre de décès parmi les contingents militaires était 10 fois plus élevé que parmi les civils, cette tendance est désormais inversée depuis la Seconde Guerre mondiale.  Dans certains cas, s’est-il alarmé, les civils peuvent même représenter 90% des victimes.  Il a appelé les parties aux conflits, y compris les groupes non étatiques, à respecter pleinement les normes juridiques internationales en matière de protection des civils.  Les auteurs d’atrocités ne doivent bénéficier d’aucune impunité et aucun État ne saurait être « amnistié » de la responsabilité qui lui revient d’enquêter et de traduire les auteurs de tels actes en justice.

Le représentant s’est aussi inquiété des entraves portées à la livraison de l’aide humanitaire et a appelé les États à veiller à ce que les organisations humanitaires impartiales ne rencontrent aucun obstacle pendant leurs missions.  Il a également appelé à veiller à la situation des réfugiés et des personnes déplacés, que ce soit en Syrie, en Iraq, ou qu’il s’agisse des Rohingya du Myanmar.  De son côté, la Croatie est en train de déterminer le sort des 1 945 citoyens croates et 150 ressortissants des pays voisins qui demeurent portés disparus depuis la « guerre de la patrie » des années 90.  M. Dogan a par ailleurs indiqué que la Croatie est prête à organiser des formations prédéploiement à l’intention du personnel des missions de maintien de la paix.

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, déléguée de l’Union africaine, a rappelé que la création de l’Union africaine, en 2002, a été marquée par l’abandon de la doctrine de « non-ingérence » au profit de celle de « non-indifférence » à la souffrance humaine.  En conséquence, ses opérations d’appui à la paix se sont de plus en plus attachées à la protection des civils.  Depuis 2003, presque toutes les opérations autorisées par le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine ont complètement ou partiellement dû relever les défis de la protection des civils. 

La représentante a mis en exergue l’expérience de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) qui reste l’une des meilleures illustrations de l’engagement croissant de l’Union à protéger les civils dans les conflits armés.  En un peu plus d’une décennie, l’AMISOM a engrangé des victoires sécuritaires et politiques « indéniables » tout en protégeant les Somaliens contre la menace terroriste.  La protection des civils est d’ailleurs devenue la « préoccupation centrale » du Conseil de paix et de sécurité et de la Commission de l’Union africaine.  L’Union a collaboré étroitement avec le Département des opérations de maintien de la paix et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires pour veiller à la conformité de sa politique avec l’approche de l’ONU, comme en atteste le Cadre UA-ONU du 19 avril 2017 sur le partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité. 

M. SABRI BOUKADOUM (Algérie) s’est dit sidéré par la situation à Gaza, et par le sort de la population palestinienne en général.  « Les civils dans le monde sont devenus la principale cible des conflits, réfugiés, déplacés ou même esclaves ou victimes de pénuries alimentaires », a-t-il ensuite élargi.  Il a salué le renforcement de certains mandats, tout en jugeant les efforts de la communauté internationale insuffisants.  « La protection des civils est une obligation, pas une option », a-t-il insisté, en rappelant les principes universels sur lesquelles l’ONU s’est construite.  Les entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire et les attaques contre le personnel humanitaire doivent elles aussi cesser, selon lui.  Le représentant a enfin regretté « l’absence d’une stratégie cohérente » pour protéger les civils en période de conflit armé, et dénoncé l’impunité dont profitent des criminels de guerre potentiels.

Au moment où la violence et les conflits pèsent sur la sécurité internationale, Mme LOUISE BLAIS (Canada) a présenté les efforts de son pays pour construire un monde plus sûr et plus pacifique.  Indigné par les attaques menées contre le personnel et les installations médicales ainsi que le personnel humanitaire, elle a exhorté le Conseil de sécurité à condamner clairement toute attaque directe et indiscriminée contre des civils et a exigé que les différentes parties aux conflits armés se soumettent à leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et des résolutions du Conseil.  L’obligation de rendre des comptes est une autre priorité pour le Canada, qui est activement engagé, aux côtés d’autres partenaires internationaux, pour faire la lumière sur ce qui s’est passé au Myanmar, où il soutient également la mission d’établissement des faits de l’ONU.  Il finance par ailleurs des efforts de collecte, d’analyse et de documentation de données qui viendraient appuyer de futures poursuites judiciaires contre Daech et d’autres parties ayant commis des crimes de guerre et des violations du droit international, a encore précisé son représentant.

Renforcer la protection des civils à travers le maintien de la paix est une autre approche soutenue par le Canada qui souhaite toutefois une modernisation des opérations de l’ONU pour pouvoir mieux répondre à la nature changeante des conflits.  Parmi les approches innovantes proposées par le Canada dans ce domaine, Mme Blais a cité les Principes de Vancouver, auxquels ont souscrit 62 États Membres en novembre dernier et qui vise à lutter contre le recrutement d’enfants, ainsi que « l’Initiative d’Elsie » pour les femmes dans les opérations de maintien de la paix.  Enfin, et pour tenir compte des besoins spécifiques des femmes et des fillettes dans les conflits, la représentante a plaidé pour des réponses qui tiennent compte du genre, une approche reflétée dans le deuxième plan national du Canada sur les femmes, la paix et la sécurité.

L’adoption à l’unanimité de la résolution 2286 (2016) en réponse à l’escalade dramatique des attaques contre les locaux de santé et le personnel médical en Syrie, au Yémen et ailleurs, a illustré notre engagement collectif du respect du droit international humanitaire, a souligné M. FINIAN CHESCHIRE (Nouvelle-Zélande).  Il y a vu la démonstration que les États Membres pouvaient alors travailler ensemble pour traiter des questions importantes.  Malheureusement, a-t-il déploré, les infrastructures de santé ainsi que le personnel continuent d’être une cible dans les zones de conflit à travers le monde.  Malgré les efforts d’organisations comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et Médecins sans frontières, un grand nombre de civils ne peut avoir accès aux soins de santé.  Il a jugé « totalement inacceptable » un tel irrespect du droit international humanitaire.  Il a, à cet égard, identifié trois axes où la détermination du Conseil est requise pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Le Conseil de sécurité doit faire usage de tous les outils à sa disposition pour prévenir les conflits et défendre les normes internationales et lutter contre l’impunité.  Il a invité le Conseil à explorer d’autres voies pour asseoir son autorité afin de mettre un terme aux attaques contre les personnels de santé et leurs locaux.  Il a appelé, en conclusion, à une approche intégrée en matière de maintien et de consolidation de la paix dans le cadre de l’architecture onusienne, afin de permettre à l’ONU de mieux protéger les intérêts des civils.

Si l’on est incapable de garantir le respect du droit international, a déclaré M. GEORGI VELIKOV PANAYOTOV (Bulgarie), les auteurs de crimes doivent au moins être traduits en justice.  Et si les États impliqués refusent ou ne sont pas en mesure de juger les coupables, a-t-il ajouté, nous devons faire appel à la Cour pénale internationale (CPI).  Outre le principe de responsabilité, le représentant a insisté sur l’importance de la prévention et de la médiation en matière de protection des civils.  En tant que représentant d’un pays fournisseur de personnel de police, M. Panayotov s’est dit en faveur de l’élargissement des mandats de protection des civils dans le cadre des opérations de maintien de la paix et a appuyé, en ce sens, la réforme du pilier paix et sécurité de l’Organisation lancée par le Secrétaire général.

Mme FARZANA ZAHIR (Maldives) a attiré l’attention sur la faculté de la société civile à sensibiliser les belligérants à la protection des civils, en particulier, le personnel humanitaire.  Les débats que nous tenons, a poursuivi la représentante, sont importants pour mettre en lumière la gravité de la situation mais c’est toute une autre affaire d’obtenir du Conseil de sécurité une action immédiate, comme l’exige pourtant la Charte.  La représentante a en effet jugé « inacceptable » que le Conseil n’ait rien fait quand des civils pacifiques ont été « attaqués et tués » la semaine dernière en Palestine.  « Si les Membres des Nations Unies commencent à ignorer les résolutions du Conseil et de l’Assemblée générale, c’est la légitimité et la crédibilité mêmes de l’ONU qu’ils mettent en jeu. » 

Les Maldives, qui ont présenté leur candidature à un siège non permanent du Conseil pour la période 2019-2020, s’engagent à travailler avec tous les membres du Conseil, les pays contributeurs de troupes et les organisations de la société civile à une meilleure sensibilisation au respect du droit international humanitaire, a assuré M. Mohamed.  La primauté de ce droit doit être un élément central de la formation des Casques bleus et même du format d’une opération de maintien de la paix.  Les Maldives plaident depuis longtemps pour un cadre analytique qui permettrait au Conseil d’envisager les changements nécessaires aux mandats des missions de maintien de la paix.  Un tel cadre commencerait, dès les premières étapes, par une plus grande coordination et une meilleure cohérence opérationnelle entre les opérations de maintien de la paix et les équipes de pays des Nations Unies.

M. OMAR KADIRI (Maroc) a réitéré que la protection des civils incombait aux États, tout en remarquant que, dans certains cas, des États étaient trop affaiblis pour faire face à cette responsabilité, ce qui nécessite alors l’intervention de la communauté internationale.  Il a noté qu’un financement adéquat des opérations de maintien de la paix était nécessaire à leur réussite, et qu’il fallait éviter toute instrumentalisation de l’aide humanitaire à des fins politiques.  Soulignant l’importance cruciale de la protection du personnel médical, des blessés et des malades en période de conflit, il a plébiscité une approche préventive pour les prévenir, conformément aux recommandations du Secrétaire général.

Près de 90% des victimes des conflits en cours sont des civils, a déploré M. NGUYEN PHUONG NGA (Viet Nam).  Partant de ce « triste » constat, le représentant a rappelé qu’il incombait en priorité à chaque État de protéger sa population.  Il a également rappelé aux parties à des conflits leur obligation de protéger les civils en vertu des principes du droit international humanitaire.  Les Nations Unies, en coordination avec les organisations régionales, doivent selon lui jouer un rôle plus moteur dans l’instauration d’une culture de respect du droit international humanitaire.  Dans ce cadre, le Conseil de sécurité, a-t-il estimé, devrait prendre des mesures concrètes pour protéger les infrastructures civiles indispensables à la santé et à la survie des populations victimes de conflits.

M. HAU DO SUAN (Myanmar) a reconnu qu’il revient aux États d’assurer la protection de leurs citoyens, tout en faisant observer que les États en situation de conflit armé manquent souvent des capacités et des institutions nécessaires pour honorer leurs obligations.  Il a appelé les États à renforcer leurs institutions juridiques et à créer un environnement sûr pour leurs citoyens.  Le représentant a ensuite insisté sur l’importance du règlement pacifique des différends, des négociations et de la médiation, faisant observer que le meilleur moyen de protéger les civils est de répondre aux causes sous-jacentes des conflits.  Il faut aussi garder à l’esprit les liens entre la paix, le développement durable et l’élimination de la pauvreté, a-t-il ajouté.

Il a ensuite indiqué que le Myanmar s’efforce de mettre un terme à sept décennies de conflit armé.  L’Accord national de cessez-le-feu a été mis sur pied à cette fin et a été signé par 10 des 20 groupes armés.  Le Gouvernement a aussi mis en place un processus politique pour répondre aux causes sous-jacentes du conflit, à l’instar de la Conférence de Panglong pour la paix dont les travaux ont permis, en 2017, de déboucher sur un accord qui servira de base à la rédaction d’une constitution fédérale démocratique.

Mme CRISTINA MARIA CERQUEIRA PUCARINHO (Portugal) a regretté que, près de 20 ans après l’inscription de cette problématique à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, les civils continuent de faire les frais des conflits armés, tandis que les droits de l’homme et le droit international humanitaire ne sont pas respectés.  Bien que le droit international exige la protection des écoles et des hôpitaux, ces établissements restent la cible d’attaques délibérées, exposant à la violence les civils, notamment les enfants, les jeunes et les personnes âgées. La représentante a souligné le rôle essentiel des organisations de la société civile qui sont présentes sur le terrain pour apporter soins et réconfort aux victimes des violences.  Dès lors, il lui paraît indispensable de travailler en étroite collaboration avec ces organisations.  Pour elle, le fait que l’on ait échoué à mettre un terme aux violations du droit international humanitaire et aux abus des droits de l’homme souligne l’importance de hiérarchiser en priorité la prévention ainsi que la lutte contre l’impunité. 

Mme VERÓNICA GARCÍA GUTIÉRREZ (Costa Rica) a constaté qu’en dépit de l’adoption de la résolution 2286 (2016), le Conseil de sécurité est à nouveau amené à débattre du thème de la protection des civils, dans un contexte encore plus sombre qu’en 2016, comme en témoigne, selon elle, le rapport du Secrétaire général sur la question.  En particulier, elle a déploré les dommages causés aux civils par le transfert d’armes non régulées à des parties à un conflit.  Elle a donc appelé les États ne l’ayant pas encore fait à signer et ratifier le Traité sur le commerce des armes.  S’agissant de la lutte contre l’impunité en cas de crimes commis contre des civils, le représentant s’est prononcé en faveur du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables.  De façon à renforcer ce Mécanisme, le représentant a appelé à rattacher son financement au budget ordinaire de l’Organisation.  Elle a également appelé le Conseil à transférer les crimes de masse à la Cour pénale internationale (CPI).  Selon elle, les membres permanents du Conseil doivent également se conformer au code de conduite promu par le Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (ACT) s’agissant de l’usage du droit de veto.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a insisté pour que les principes d’humanité, d’impartialité, de neutralité et d’indépendance de l’action humanitaire soient respectés en tout temps et que l’accès humanitaire soit toujours assuré.  Le représentant a mis en avant l’attachement de son pays à la sécurité des enfants et des étudiants dans les conflits armés ainsi qu’au droit international humanitaire.  Il a rappelé que les populations civiles du Nagorno-Karabakh et des régions voisines de l’Arménie sont constamment exposées à des menaces humanitaires graves.  L’agression militaire de l’Azerbaïdjan en avril 2016 a non seulement violé l’Accord de cessez-le-feu de 1994 et l’Accord trilatéral de 1995 mais a aussi donné lieu à des violations graves du droit international humanitaire et des droits de l’homme, avec les pertes en vies humaines parmi la population civile que cela implique. 

En violation flagrante du droit humanitaire, les autorités azéries ont placé des installations militaires dans des quartiers civiles et les utilisent comme rampe de lancement des bombardements le long de la ligne de contact.  En poursuivant sa politique de criminalisation de quiconque tente de se rendre au Nagorno-Karabakh, le Gouvernement de l’Azerbaïdjan montre qu’il est prêt à se livrer à des atrocités de masse sans précédent dans la région.  Tout aussi alarmant est le fait que le leadership azéri continue d’inciter à la haine contre les Arméniens.  La protection des civils, a conclu le représentant exige un accès sans entrave du CICR, du HCR et des organes de traités des Nations Unies dans le zones de conflit.  Toute tentative de politiser une question purement humanitaire et tout refus de coopérer sur la question des personnes disparues montrent une intention claire de faire obstacle aux progrès.  L’Arménie appuie la création d’un mécanisme d’enquête sur les violations du cessez-le-feu et l’expansion du mandat du Représentant personnel du Président de l’OSCE au Nagorno-Karabakh.

M. NAZIFULLAH SALARZAI (Afghanistan) a indiqué que l’année dernière, 2 903 civils ont trouvé la mort et plus de 6 000 autres ont été blessés dans des attaques « ennemies » menées dans tout le pays et principalement contre des cibles civiles.  L’édition 2017 du rapport de la Mission des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) sur la protection des civils dans les conflits armés décrit clairement comment les Taliban et les autres groupes terroristes opèrent.  Au moment où nous parlons, a annoncé le représentant, une autre attaque terroriste vient de faire 16 morts et plus de 30 blessés à Kandahar.  Le représentant a passé en revue les mesures stratégiques, opérationnelles et tactiques que son pays a prises pour protéger les civils.  Il a tout de même souligné que la terreur, la violence et l’insécurité qui caractérisent aujourd’hui son pays trouvent leurs sources en dehors du territoire national.  Le but doit donc être de traiter de cette question et le Conseil a un rôle « fondamental » à jouer en la matière.  Le représentant a en effet dit attendre du Conseil qu’il réagisse comme il se doit contre les responsables, les argentiers et les planificateurs des attaques pour assurer la protection et le bien-être des civils afghans.

Pour M. MAGDI AHMED MOFADAL ELNOUR (Soudan), la responsabilité de protéger des civils incombe en premier lieu aux pays touchés par un conflit avant d’être un mandat confié aux opérations de maintien de la paix.  C’est pourquoi il a appelé ces opérations, les organisations non gouvernementales actives en matière d’assistance humanitaire et les autres acteurs à s’acquitter de leurs tâches « dans le strict respect de la souveraineté et des lois et traditions du pays hôte ».  Il a également appelé ces entités à respecter le principe de neutralité, la transparence et le droit international afin d’asseoir une confiance mutuelle durable. 

Le Soudan a tiré un certain nombre d’enseignements du fait de son engagement avec la communauté internationale dans la résolution du conflit à l’ouest du pays, a poursuivi son représentant.  « Un conflit dont les premières victimes ont été les civiles mais qui connaît aujourd’hui un dénouement positif à travers l’instauration de la paix. »  De plus, dans le cadre des efforts à l’échelle régionale de protection des civils et de la promotion de la paix au Soudan du Sud, le Soudan a renouvelé la convention d’assistance humanitaire aux victimes de la guerre au Soudan du Sud pour alléger leurs souffrances.  La protection des populations civiles et la promotion de l’action humanitaire, la consolidation et la pérennisation de la paix, ainsi que le développement durable viennent en tête des priorités du Soudan, a assuré le représentant 

M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan) a encouragé l’attention portée au problème des déplacements de population en période de conflit armé, avant de focaliser son discours sur le cas du conflit qui se déroule en Azerbaïdjan et « l’occupation militaire » d’une partie de son territoire, ainsi que les meurtres de civils, les prises d’otages et l’exécution de prisonniers de guerre, parmi d’autres exactions.  Il a dénoncé « une politique de nettoyage ethnique » de la part de ses agresseurs.  « Mon pays a l’une des plus larges populations déplacées au monde », a-t-il plaidé, avant de rapporter le chiffre de 3 875 citoyens portés disparus au 1er avril 2018.  M. Musayev a dénoncé l’impunité des auteurs de crimes dans cette guerre comme un obstacle à la paix future.

Quand nous ne pouvons lever les yeux assez haut pour reconnaître l’affaiblissement des normes de notre humanité.  Quand nous ne pouvons dépasser nos intérêts étroits pour aider ceux qui en ont le plus besoin, alors, a dit M. LEWIS GARSEEDAH BROWN II (Libéria), nous trahissons non seulement les femmes, les enfants, les médecins, les infirmières et le personnel humanitaire mais aussi les Nations Unies et tout ce qu’elles doivent représenter.  Nous trahissons nos valeurs communes et oui, nous nous trahissons nous-mêmes.  Nos résolutions sont-elles inefficaces ou serait-ce que nous ne sommes pas vraiment déterminés à les mettre en œuvre?  Est-ce raisonnable de confier la protection des civils à des institutions détruites par la guerre?  Devons-nous assigner cette tâche aux régions en conflit ou aux acteurs externes qui ont tout intérêt à voir les conflits se poursuivre?  Est-ce si difficile de nous engager dans un code de conduite pour veiller à ce que le Conseil de sécurité mette toujours ses énormes pouvoirs au service de la protection des civils?  Le Libéria, a répondu le représentant, ne saurait trop applaudir la position du Secrétaire général: le meilleur moyen de protéger les civils, c’est de prévenir les conflits.  Mais il faut pour cela que les États s’engagent à travailler avec créativité et sans égoïsme ni agressivité.  Nous pouvons le faire, a estimé le représentant. 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial appelle à la tenue des élections et à combattre une économie « prédatrice » pour sortir de l’impasse politique

8263e séance – matin
CS/13347

Libye: devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial appelle à la tenue des élections et à combattre une économie « prédatrice » pour sortir de l’impasse politique

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye, M. Ghassan Salamé, a insisté, ce matin, devant le Conseil de sécurité, sur l’importance de tenir des élections le plus rapidement possible afin de mettre un terme à la transition, tout en veillant à l’existence de conditions propices à leur bon déroulement, à commencer par une législation électorale qui satisfasse la majorité des habitants.  Selon lui, « le moment est venu de tourner la page sur l’Accord politique libyen de Skhirat » compte tenu des demandes répétées d’amendements et du refus des parties de faire les concessions nécessaires.

Intervenant par visioconférence depuis Paris, M. Ghassan Salamé a par ailleurs souligné que, pour faire progresser le processus politique en Libye, il importe avant tout de « torpiller le modèle économique pervers du pays qui fournit aux rares personnes qui sont au cœur de l’impasse politique de la Libye toutes les occasions pour piller les coffres de l’État et pour s’opposer à toute action susceptible de porter atteinte à leur économie prédatrice ».

Face aux divers trafics qui pullulent en Libye, la France a d’ailleurs appelé à réfléchir collectivement aux actions qui permettraient d’enrayer ce cercle vicieux de façon durable.  À ses yeux, il est primordial que les institutions économiques et financières libyennes, en particulier la Banque centrale et la « National Oil Corporation », soient préservées, et que la gouvernance de la Banque centrale soit clarifiée. 

Le Représentant spécial s’est en revanche félicité du processus de consultation lancé en avril par la conférence nationale pour permettre aux citoyens de faire part, d’ici à la fin juin, de leur vision pour le pays et des principes à adopter pour sortir de la crise actuelle.  Des Libyens de tous bords ont participé à cette conversation politique, « avec un enthousiasme qui n’aurait pu être prédit », s’est-il réjouit.

Parmi les points de consensus qui se sont dégagés de ce processus consultatif à large échelle, il a notamment cité la nécessité de décentraliser l’État afin de bâtir une nation unie et souveraine, l’urgence de veiller à une distribution plus équitable des ressources publiques, la création d’institutions de l’État unifiées et transparentes, ainsi que le besoin de disposer d’une armée professionnelle.

L’année 2018 est celle de la croisée des chemins pour la Libye, a noté de son côté le Royaume-Uni, qui a insisté sur le fait que la prospérité du pays passe par des élections crédibles que la communauté internationale doit soutenir, car « si nous échouons en Libye, les conséquences sur notre sécurité seront plus grandes ».

Le Représentant spécial a toutefois averti que l’influence « périlleuse » des groupes armés sur la politique et l’économie risque de s’étendre, comme l’illustre la décision contestée du Gouvernement d’entente nationale d’octroyer à un groupe armé des pouvoirs qui relèvent de l’autorité d’un État souverain.

Il a également appelé à la tenue rapide de négociations entre la Libye et ses voisins du sud, mettant en garde contre le risque que l’escalade « alarmante » des combats dans la ville de Sabha ne se transforme en conflit ethnique et se propage dans la région, de nombreux groupes armés venant de pays voisins ayant fait de cette partie de la Libye « leur champ de bataille ».

La précarité de la situation sécuritaire de la Libye a dominé une large part des interventions des membres du Conseil qui ont été unanimes à condamner l’attentat du 2 mai contre le siège de la Haute Commission nationale électorale.

À l’instar de la Suède, de nombreux membres du Conseil se sont également préoccupés du sort des 700 000 migrants qui se trouvent actuellement en Libye, dont la vulnérabilité augmente le risque d’être exploités et victimes de détention arbitraire.  L’émoi suscité par l’existence de marchés d’esclaves était également marqué, et les appels se sont multipliés pour combattre la traite des personnes.

La délégation des États-Unis a toutefois déploré l’absence de consensus au sein du Conseil pour imposer des sanctions contre six individus impliqués dans le trafic d’êtres humains.  Pour sa part, la Fédération de Russie a appelé à combattre les causes profondes de la migration au lieu de privilégier les « demi-mesures ».

La Libye a, quant à elle, déploré « le double jeu de certaines organisations non gouvernementales qui, sous prétexte d’aider les migrants, les revendent aux trafiquants ».  Pour la Libye, « il ne faut surtout pas perdre de vue que le trafic des migrants prospère grâce au soutien des bandes criminelles sur les deux rives de la Méditerranée », a en outre souligné la délégation qui a appelé la communauté internationale à aider les pays d’origine à endiguer les départs des migrants. 

Pendant cette réunion, les Quinze ont également entendu un exposé du Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1970 (2011), le représentant de la Suède, qui a notamment fait le point sur la demande de levée de l’interdiction de voyager concernant Mme Aisha Muammar Qadhafi.

LA SITUATION EN LIBYE

Rapport du Secrétaire général sur la mission d’appui des Nations Unies en Libye (S/2018/429)

Déclarations

Intervenant par visioconférence depuis Paris, M. GHASSAN SALAMÉ, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye, a indiqué que la situation actuelle dans le pays est source de préoccupations, mais aussi d’espoir.  Il a notamment parlé de l’attentat perpétré le 2 mai contre le siège de la Haute Commission nationale électorale.  Revendiqué par l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL), il cherchait à faire dérailler le processus électoral, a-t-il indiqué.  En revanche, l’élection de la Présidence du Haut Conseil d’État a pu se dérouler en temps voulu.  De plus, le Gouvernement d’entente nationale s’est accordé sur son budget 2018.

Le Représentant spécial s’est ensuite inquiété de la recrudescence de la violence dans la ville de Derna, et a appelé les parties et le Conseil de sécurité à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les civils.  La ville de Sabha, dans le sud du pays, connaît également une escalade alarmante des combats, le principal hôpital de la ville ayant été ciblé par des attaques directes.  Il a expliqué que la situation dans cette ville, qui est la plus importante du sud du pays, est particulièrement préoccupante en raison de la violation répétée des nombreux accords de cessez-le-feu, et du risque que les accrochages ne se transforment en conflit ethnique et se propagent dans la région, de nombreux groupes armés venant de pays voisins ayant fait de cette partie de la Libye « leur champ de bataille ».  Il a appelé à la tenue rapide de négociations entre la Libye et ses voisins du sud, notamment pour sécuriser les frontières et combattre la traite des personnes, les flux de combattants et les trafics de tout genre.

Après s’être félicité du bon déroulement des élections municipales à Zawiya, le Représentant spécial s’est attardé sur la situation à Tawergha, qui avait été dépeuplée suite à un conflit sérieux avec la ville de Misrata.  Les habitants, qui auraient dû regagner la ville le 1er février selon le plan du Gouvernement d’entente nationale en ont été empêchés, et nombre d’entre eux vivent depuis dans des camps de fortune.  Il a indiqué avoir présenté une stratégie pour mettre entre œuvre l’accord de 2016 entre Tawergha et Misrata, rappelant ensuite que la Libye compte plus de 300 000 personnes déplacées.

M. Salamé a ensuite parlé de la tenue, à Ghadamès, de la conférence nationale, expliquant qu’elle avait été l’occasion, pour les citoyens de faire part de leurs visions pour le pays et des principes à adopter pour sortir de la crise actuelle.  Il a précisé que 42 évènements similaires s’étaient déroulés dans 27 localités du pays depuis le lancement du processus au mois d’avril, rapportant que les Libyens de tous bords avaient participé à cette conversation politique, « avec un enthousiasme qui n’aurait pu être prédit ».  Lorsque ces réunions se seront achevées à la fin du mois de juin, les conclusions seront partagées lors d’un évènement spécial en Libye, ainsi que devant le Conseil de sécurité, a-t-il annoncé.

Parmi les points de consensus qui se sont dégagés de ce processus consultatif à large échelle, il a cité la nécessité de décentraliser l’État afin de bâtir une nation unie et souveraine, l’urgence de veiller à une distribution plus équitable, transparente et effective des ressources publiques, la création d’institutions de l’État unifiées et transparentes, dirigées par des personnes choisies « sur la base de leurs compétences, et non pas de leur identité ».  Il a aussi parlé du besoin de disposer d’une armée unifiée et professionnelle, ainsi que d’un système sécuritaire cohérent et libre de toute interférence politique, de tenir des élections capables d’unifier le pays et, enfin, de sortir de la transition.  C’est pour cela, a-t-il souligné, que la poursuite du processus politique est si essentielle.

M. Salamé a indiqué que des élections doivent se tenir le plus rapidement possible, mais que les conditions pour se faire doivent toutefois être mises en place.  Il a notamment dit la nécessité de procéder à un nouveau cycle d’inscription d’électeurs et d’assurer l’engagement des parties à accepter le résultat du scrutin, sans oublier les besoins en matière de financement et de sécurité.  De plus, la Chambre des représentants doit adopter une législation électorale jugée acceptable par la majorité des habitants, les Nations Unies étant prêtes à fournir des conseils en la matière.

Le Représentant spécial a fait savoir que les opinions divergent de manière notable en ce qui concerne l’actuel projet de constitution, certains souhaitant procéder directement au référendum, tandis que d’autres réclament des amendements, le retour à une constitution préalable, ou des garanties.  Soulignant que l’adoption d’une constitution est un moment capital dans la vie d’une nation, il a indiqué que la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) compte élaborer, en consultation avec les parties libyennes, un calendrier pour la tenue d’un référendum ou d’élections nationales, précisant qu’il en présenterait les contours lors de sa prochaine intervention devant le Conseil de sécurité.

M. Salamé a ensuite parlé des amendements réclamés pour l’Accord politique libyen, déplorant qu’en dépit de tous les efforts déployés par l’ONU, les parties refusent de faire les concessions nécessaires.  Estimant que ces amendements sont à présent devenus une « distraction », il a affirmé que le moment est venu de tourner la page.  Toutefois, a-t-il ajouté, il conviendrait d’exiger davantage du Conseil présidentiel pendant ses derniers mois, en ce qui concerne la préparation des élections et l’octroi de services.

S’agissant de la situation des droits de l’homme, il a averti que l’influence continue des groupes armés sur la politique et l’économie est « périlleuse » et risque de s’étendre, comme l’illustre la décision contestée du Gouvernement d’entente nationale d’octroyer à un groupe armé des pouvoirs qui relèvent de l’autorité d’un état souverain.  Il a expliqué que la Mission est en train de finaliser, en consultation avec les autorités, une nouvelle stratégie pour faire face aux groupes armés, tout en insistant sur la nécessité de créer une armée et une police professionnelles.

Poursuivant, le Représentant spécial a indiqué que l’adoption du budget doit déboucher sur le partage des ressources libyennes avec le peuple, le processus devant être libre de corruption.  Cependant, la question des allocations demeure irrésolue, de même que le profond écart entre les taux de change officiels et sur le marché noir, pendant que des articles de contrebande et des personnes soumises à la traite continuent de traverser les frontières.  Il a averti que cette situation fournit aux rares personnes qui sont au cœur de l’impasse politique de la Libye « toutes les occasions pour piller les coffres de l’État et s’opposer à toute action susceptible de porter atteinte à leur économie prédatrice ».  C’est ce modèle économique pervers qui doit être torpillé pour permettre au processus politique de progresser, a–t-il souligné.

C’est dans cette optique qu’un évènement spécial s’est tenu en avril en marge des réunions de printemps des institutions de Bretton Woods afin d’appuyer les autorités libyennes dans la gestion de leur politique fiscale et monétaire, ainsi que pour combattre la criminalité financière.  Mais, a averti M. Salamé, à moins de disposer d’institutions unifiées et suffisamment puissantes pour défier ces intérêts personnels et crédibles pour lancer des réformes approfondies, la marge de manœuvre sera limitée.

M. OLOF SKOOG (Suède), Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1970 (2011), concernant la Libye, a présenté le rapport de son comité pour la période allant du 22 mars au 21 mai 2018.  Sur la question de l’embargo sur les armes, le Comité a envoyé une lettre à la Libye en lui demandant des informations nouvelles après les comptes rendus présentés par le pays en mai 2017, en particulier concernant les garde-côtes, les unités de neutralisation des explosifs et des munitions et la Garde présidentielle. 

Au 1er mai, le Comité a examiné la possibilité d’inclure six noms dans la liste des personnes visées par le gel des avoirs et l’interdiction de voyager dans le contexte de l’exploitation et des abus à l’encontre des migrants. 

En ce qui concerne la demande de levée de l’interdiction de voyager concernant Aisha Muammar Qadhafi, le Président a estimé qu’étant donné que son nom avait été inscrit dans la liste du gel des avoirs et de l’interdiction de voyager par une résolution du Conseil de sécurité, le Comité attend que les États de résidence et de citoyenneté de cette personne fassent des commentaires sur cette demande, avant que le Comité ne réponde à cette demande de retrait. 

Enfin, le Comité des sanctions a reçu de nouvelles informations de son Comité d’experts au sujet des bateaux Nadine et Lynn S qui avaient été recensés comme procédant au trafic de pétrole libyen, et dont la période de sanction est arrivée à expiration les 18 et 29 avril 2018.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a estimé que le statu quo n’est plus vivable en Libye, et que c’est pour cette raison qu’il faut renforcer les efforts pour aller vers des élections.  Pour lui, les plus de 2,5 millions de personnes inscrites sur les listes électorales font croire que « la population veut le changement ».  Il importe de bien gérer l’enchaînement des élections, a-t-il prôné, tout en appelant les autorités du pays à arrêter certaines mesures politiques et sécuritaires afin que ces élections soient pacifiques et crédibles, et que les résultats soient acceptés par tous.  

Avec l’approbation du budget national pour 2018, le représentant a plaidé pour des changements sur le plan économique.  Tout en notant la baisse du nombre des morts dans le pays du fait de la violence, M. Allen a néanmoins déploré la poursuite des attentats, dont celui, revendiqué par Daech, qui a récemment frappé la Commission électorale libyenne.  De plus, les combats à Sabha, notamment, montrent que les divisions sont encore profondes dans le pays.  Il a aussi souligné que les marchés d’esclaves doivent être combattus.  L’année 2018 est celle de la croisée des chemins pour la Libye, a-t-il noté, en insistant sur le fait que la prospérité du pays passe par des élections crédibles que la communauté internationale doit soutenir, car « si nous échouons en Libye, les conséquences sur notre sécurité seront plus grandes ».

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a constaté que la promesse de la révolution libyenne demeurait inassouvie, citant notamment les activités de Daech, le trafic d’armes « qui sont utilisées du Sahel au Sinaï », la traite des êtres humains et les marchés d’esclaves.  On ne peut tolérer les conditions qui ont permis l’émergence de pratiques aussi barbares, a-t-elle dénoncé.  

La représentante s’est aussi inquiétée du sort des milliers de migrants qui se trouvent dans les centres de détention et a vivement dénoncé ceux qui torturent les migrants et les réfugiés et qui profitent de la traite.  Ces trafiquants, a-t-elle averti, menacent la sécurité et la stabilité de la Libye.

Mme Haley a ensuite fait savoir que le Conseil envisageait d’imposer des sanctions contre six individus qui trafiquent des êtres humains et a déploré qu’un consensus n’ait pas encore prévalu en ce qui concerne ces inscriptions.  

En outre, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) ont déjà effectué un bon travail en matière de rapatriement, et ces agences doivent pouvoir continuer ces efforts essentiels.

La représentante a fait part de l’appui des États-Unis au dialogue national, avertissant que toute discussion parallèle risque de saper le processus, et a appelé toutes les parties à nouer un contact de bonne foi avec les Nations Unies.

Elle s’est ensuite félicitée des préparatifs en cours pour la tenue des élections, insistant sur l’importance de disposer d’une base constitutionnelle, mais aussi pour que le Représentant spécial puisse disposer de l’espace nécessaire afin de pouvoir négocier avec les parties.  

Elle a fait savoir que les États-Unis ont consacré, depuis 2012, plus de 32 millions de dollars à l’appui aux élections et à la rédaction d’une nouvelle constitution et a appelé les bailleurs de fonds à augmenter leur contribution.

Après avoir condamné l’attaque du 2 mai contre la Haute Commission électorale nationale, la déléguée a appelé les dirigeants libyens à défendre la cause d’un gouvernement uni et démocratique.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a salué les consultations populaires dans plus d’une vingtaine de villes libyennes et les différents canaux de dialogue politiques et militaires initiés par le Représentant spécial du Secrétaire général.  Pour la France, c’est un travail essentiel pour atténuer les tensions et parvenir à une solution politique inclusive, sur la base de l’Accord politique libyen de Skhirat. 

La conduite d’élections générales, libres, crédibles, transparentes et démocratiques en 2018 exige la mise en place d’un environnement politique et de sécurité adéquat et l’engagement des composantes de la société à respecter les résultats.  De ce fait, la tenue sans encombre des premières élections municipales à Zawiya, le 12 mai, avec un taux de participation de 62%, est encourageante. 

Pour la France, le statu quo n’est pas acceptable et il appartient désormais aux acteurs politiques libyens de respecter la volonté populaire qui est favorable aux élections.

M. Delattre a noté que les obstacles sécuritaires demeurent nombreux, et la situation sur le terrain reste très volatile, comme l’a démontré l’attaque du 2 mai dernier contre la Haute commission électorale libyenne, à Tripoli.  La France condamne l’ensemble des actes terroristes en Libye qui visent à déstabiliser le pays et invite les Libyens à s’unir contre ce fléau.  Il est donc important de favoriser le dialogue entre les forces armées afin de les unifier sous l’autorité civile.  

Seule une solution politique inclusive, c’est-à-dire la réconciliation nationale, l’unification des institutions et le renforcement de l’État, permettra de vaincre le terrorisme et d’assurer une sécurité durable.

Pour le représentant, face aux divers trafics qui pullulent en Libye et alimentent l’économie de prédation, « il nous faut collectivement réfléchir aux actions qui permettent d’enrayer ce cercle vicieux de façon durable ».  Il est aussi primordial que les institutions économiques et financières libyennes, en particulier la Banque centrale et la « National Oil Corporation », soient préservées et la gouvernance de la Banque centrale clarifiée.

Enfin, la France estime que les individus responsables de la traite d’êtres humains et de trafics de migrants doivent faire l’objet de sanctions dans le cadre du régime onusien existant.

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a salué le rôle de l’Union africaine et de l’opération militaire de l’Union européenne dans la partie sud de la Méditerranée centrale (EUNAVFOR MED opération SOPHIA).  Il a appuyé toutes les mesures visant à prévenir les exportations illicites de pétrole et à lutter contre le trafic de migrants et la traite des personnes.  Il a en outre invité le Conseil de sécurité et la communauté internationale à se concentrer d’urgence sur l’impact négatif du conflit politique et militaire sur la situation économique et sociale de la Libye, rappelant que les affrontements et la présence de groupes terroristes affectent plus d’un million et demi de personnes.

La situation en Libye risque d’affecter progressivement les pays voisins, a averti M. Esono Mbengono.  L’instabilité se diffuse rapidement, a-t-il témoigné, en citant à titre d’exemple les évènements récents en Guinée équatoriale.  L’attentat perpétré à Tripoli, le 2 mai dernier, contre la Commission électorale nationale, ne doit pas saper les efforts entrepris pour préparer le pays à la réconciliation nationale et à l’organisation d’élections nationales.  Le représentant a réitéré que la solution pacifique du conflit dépend des Libyens eux-mêmes, qui doivent se fonder sur leur indépendance et leur souveraineté.  Dans cet esprit, il s’est félicité de l’accord de paix signé, le 11 mai dernier à Dakar, entre plus de 20 dirigeants politiques libyens.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a espéré que la nouvelle Constitution de la Libye, qui reflète un consensus national, sera utile pour établir les cadres institutionnels et de gouvernance nécessaires à une paix durable.  Il a estimé nécessaire également d’adopter une loi électorale, en complément du nouveau registre d’inscription des électeurs. 

Il a appelé la communauté internationale et le Conseil de sécurité à rester unis dans l’appui qu’ils fournissent aux bons offices déployés par la Mission pour que le Haut Conseil d’État se mette d’accord avec l’autorité exécutive afin de mener à bien les processus électoraux et affronter les menaces importantes.  Le représentant a salué les progrès accomplis dans la mise en œuvre du plan d’action des Nations Unies, avant d’appeler à en faire aussi du côté de la réintégration dans la vie civile des intervenants armés.

Après avoir exprimé ses préoccupations à propos des violations des droits de l’homme dans le pays, le délégué a plaidé pour le renforcement des capacités fiscales et de la lutte contre la corruption.

M. OLOF SKOOG (Suède) a noté l’amélioration de la situation sécuritaire à Tripoli et a appelé à déployer tous les efforts pour la renforcer.  Il s’est préoccupé de la monté des violences à Derna, s’inquiétant à la perspective d’un nombre croissant de victimes civiles.  Il a aussi engagé à poursuivre la coopération régionale pour désamorcer la situation à Sabha.

Il a salué les visites effectuées dans les prisons et les centres de détention libyens, déplorant que des milliers de personnes y languissent sans savoir ce que l’avenir leur réserve.  Il a appelé toutes les parties à en garantir l’accès aux Nations Unies et aux organisations humanitaires, notamment dans le centre de détention de Mitiga.

S’agissant du processus politique, le représentant a appelé les dirigeants libyens à créer les conditions juridiques, politiques et sécuritaire nécessaires à la tenue d’élections libres et justes afin de mettre un terme à la transition.  Il a dit être impressionné par l’approche ambitieuse adoptée par la conférence nationale pour mener son processus de consultation et impliquer le plus grand nombre possible de Libyens.

Le délégué a aussi appelé à déployer tous les efforts possibles pour promouvoir la participation des femmes aux processus politique et électoral, appelant notamment à déployer des efforts concrets pour faire face aux menaces sécuritaires qu’affrontent les femmes candidates.

Il s’est également gravement préoccupé du sort des 5 000 réfugiés et des 700 000 migrants qui se trouvent actuellement en Libye, avertissant que leur vulnérabilité augmente leur risque d’être exploités et victimes de détention arbitraire.  

Il a salué le travail de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et a réclamé des efforts sérieux pour combattre la violation des droits, assurer la responsabilité et promouvoir des changements de comportement afin de mettre un terme à l’impunité.

Il a appelé le Conseil à s’accorder et à envoyer un fort signal à cette fin, notamment en imposant des sanctions aux responsables de la traite et des passages clandestins de personnes.

M. ILAHIRI ALCIDE DJEDJE (Côte d’Ivoire) a condamné l’attentat du 2 mai dernier contre la Haute Commission électorale nationale, revendiqué par Daech, qui rappelle la fragilité de la situation sécuritaire et « nous interpelle sur la nécessité de conjuguer nos efforts pour trouver des réponses idoines au terrorisme et à la question des groupes armés qui constituent une véritable menace au processus de paix libyen ».  Il a néanmoins salué les progrès enregistrés dans le cadre du processus de paix libyen, notamment le fait que la Cour suprême libyenne ait pu lever des obstacles judiciaires en vue de permettre la tenue prochaine du référendum sur la nouvelle constitution qui sera la pierre angulaire de l’état de droit auquel aspirent tous les Libyens.  M. Djédjé a affirmé que les avancées significatives que nous constatons sur le terrain augurent d’un dénouement heureux des efforts du Représentant spécial du Secrétaire général en vue d’un retour à la paix et la stabilité en Libye.

Pour la Côte d’Ivoire, la résolution de la crise en Libye est d’une importance majeure pour toute l’Afrique, notamment en raison de ses effets sur la région sahélo-saharienne.  C’est dans cette optique que s’est tenue, le 17 avril dernier à Addis-Abeba, la réunion du Haut Comité de l’Union africaine sur la Libye.  La Côte d’Ivoire salue également les efforts déployés par le Gouvernement libyen en vue de mettre fin à la traite des migrants, tout en se réjouissant que la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI) ait envisagé la possibilité d’élargir le champ de compétence de la Cour aux crimes commis contre les migrants.  Il a enfin lancé un appel en faveur de la mise en œuvre effective du plan humanitaire libyen 2018 destiné à répondre aux besoins urgents de 940 000 Libyens.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a constaté que malgré certaines mesures positives, la montée de la violence entre groupes armés rivaux se poursuit, sapant les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’Accord politique libyen.  Insistant sur l’importance de la stabilité, il a appelé l’ensemble des parties à maintenir leur engagement envers un règlement politique de la crise et la pleine mise en œuvre de l’Accord politique libyen.

Il est essentiel que les autorités de Tripoli et de Tobrouk résolvent leurs différends sur la base du dialogue, a-t-il souligné.  Pour faire avancer le dialogue politique, la primauté des Nations Unies en tant que principal médiateur doit être maintenue, et l’engagement aux niveaux international et régional demeure essentiel.  Il a aussi appelé au plein respect de l’embargo sur les armes.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a salué le développement normatif en Libye, qui est essentiel pour l’établissement d’institutions fiables.  Il s’est également félicité des progrès accomplis par la Haute Commission électorale nationale avec l’inscription de 2,5 millions d’électeurs, dont près de la moitié sont des femmes.  Les efforts de réconciliation tribale et communautaire ont été salués par le représentant, qui a aussi apprécié les efforts des organisations et acteurs régionaux, comme l’Union africaine et la Ligue des États arabes, pour soutenir le processus politique libyen et le plan d’action.

Le délégué a appelé les acteurs locaux à déposer les armes et à éviter toute rhétorique de violence.  Il s’est aussi préoccupé de la présence de combattants et de groupes armés étrangers sur le terrain, des allégations de violations généralisées de droits de l’homme dans les centres de détention tenus par le Gouvernement, ainsi que des violations des droits des migrants détenus dans des conditions inadéquates et soumis à des traitements dégradants.  Il a lancé un appel aux parties pour qu’elles préviennent de tels abus.  Aux autorités libyennes, il a demandé de mener des enquêtes pour identifier les responsables et éviter qu’ils restent impunis.  Enfin, il a réitéré qu’il n’existe pas de sortie militaire à ce conflit, en appelant les parties à un dialogue et à une transition politique pacifique, qui réponde aux intérêts de tous les Libyens.  Il a aussi tenu à souligner que la situation de sécurité dans la région est « la conséquence directe des pratiques interventionnistes et des politiques de changement de régime ».

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a dit son soutien au Plan d’action des Nations Unies qui devrait permettre de clore la transition prolongée en Libye.  Selon lui, l’un des aspects les plus importants de ce Plan est le soutien au pays alors qu’il prépare des élections générales.  Il a du reste espéré que l’engouement des 2,4 millions d’inscrits sur les listes électorales va contribuer à une large participation populaire des Libyens au vote.  Il a salué la bonne tenue des élections municipales d’Alzawia dont le taux de participation a dépassé les 60%.  Le Koweït insiste sur le vœu de la Ligue des États arabes qui avait appelé à une solution politique globale à la crise libyenne et le respect des accords politiques.

M. Alotaibi a en outre déploré le récent attentat contre le siège de la Haute Commission électorale nationale à Tripoli, ainsi que l’escalade de la violence à Sabha et dans d’autres villes à travers le pays.  Alors que la Libye produit désormais plus d’un million de barils de pétrole par jour, le Koweït a déploré les dépenses publiques considérables qui ont conduit à un déficit de 7,5 milliards de dollars.  Il a terminé son propos en demandant au Représentant spécial pourquoi la Chambre des représentants n’a pu finaliser le texte de loi sur les élections malgré le fort taux d’enregistrement des électeurs.

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a constaté que, malgré les efforts déployés pour lancer le dialogue, un règlement rapide de la crise n’est encore à l’ordre du jour en raison notamment de la méfiance persistante entre les principaux acteurs libyens.  

En outre, de nombreux problèmes subsistent avant la tenue des prochaines élections, à commencer par les ententes sur la loi électorale.  Il a appelé à la vigilance et souligné que toute mesure doit viser en premier lieu l’unité du pays.  L’élaboration d’un cadre juridique pour la création d’organes institutionnels unis en cas de désaccord à l’issue des élections sera particulièrement ardue, a –t-il ajouté.

Après avoir dénoncé l’attentat du 2 mai, le représentant a indiqué que nombre de décisions dépendent de l’engagement des dirigeants tribaux et a appelé à se reposer sur l’Accord politique libyen de Skhirat.  Il a aussi souligné que la remise en ordre du secteur de la sécurité est essentielle afin, notamment, de combattre les groupes terroristes qui profitent actuellement du vide institutionnel pour poursuivre leurs activités.

Le représentant s’est également inquiété de la situation des migrants qui se trouvent en détention et a appelé à combattre les causes profondes de la migration au lieu de privilégier les « demi-mesures ».  Il a aussi appelé à redoubler d’efforts pour convenir des modalités nécessaires pour favoriser la réconciliation nationale.  De son côté, l’ONU doit continuer de jouer un rôle primordial dans le processus de pourparlers.

Le représentant a ensuite fait observer que les difficultés que connaît actuellement la Libye sont la conséquence des actions de « certaines capitales occidentales » qui, a-t-il dénoncé, n’ont pas pris en compte la position de l’Union africaine.

Il a ensuite affirmé qu’à la demande de la Fédération de Russie, une réunion du Comité des sanctions s’était tenue le 3 avril afin, notamment, de se pencher sur la fuite dans la presse du rapport d’étape du groupe d’experts.  Selon lui, cette fuite ne peut s’expliquer que par une défaillance du système informatique.  Il a regretté que le Comité n’ait pu convenir d’un compromis pour expliquer cet incident.

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a estimé que le défi majeur en Libye est le manque de volonté politique entre les parties pour faire des compromis.  Elle a indiqué que des élections ne doivent se tenir que dans le cadre d’un environnement sécuritaire stable.  Condamnant l’attentat du 2 mai dernier, elle a affirmé que l’amélioration de la situation sécuritaire, à travers le dialogue entre et au sein des groupes armés, va requérir l’attention de la communauté internationale au cours des prochains mois.

Sur la question des migrants, Mme Van Haaren a déploré les violations et abus dont ils ont victimes à travers la Libye, rappelant que les réseaux de trafic et d’exploitation des migrants sont étroitement liés aux milices et groupes terroristes qui déstabilisent la Libye.  Elle a dit soutenir les sanctions ciblées pour démanteler ces réseaux, améliorer la situation des droits de l’homme des migrants et aider à stabiliser la Libye.  Le trafic des migrants n’est pas la seule activité criminelle qui pénalise l’économie libyenne, a rappelé la représentante.  Elle a déploré le trafic du pétrole qui fait perdre des millions de dollars au peuple libyen.  Les parties libyennes doivent comprendre qu’elles sont à la croisée des chemins, a-t-elle déclaré, précisant que ces parties ont le choix entre renforcer les efforts pour enfin parvenir à la paix en Libye ou être responsables de la poursuite de l’instabilité et du désordre.  

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) s’est félicité de l’achèvement du processus d’inscription des électeurs.  Il a aussi salué les consultations en cours pour former une nouvelle autorité exécutive et apporter des amendements limités à l’Accord politique libyen, de même que la poursuite du processus de réconciliation locale.  Il a appelé les acteurs libyens à continuer de s’impliquer dans le processus de paix facilité par les Nations Unies en faisant preuve d’un esprit constructif, pour mettre un terme aux institutions étatiques parallèles et créer les conditions propices à la tenue d’élections crédibles, notamment en adoptant un cadre constitutionnel.

Il s’est inquiété de la fragilité du la situation sécuritaire dans le pays, dénonçant la poursuite des déplacements et des attaques terroristes, notamment celle qui a ciblé, le 2 mai, le siège de la Haute Commission électorale.  Il a indiqué que l’insécurité affecte également les migrants et les réfugiés et a appelé le Conseil de sécurité à faire preuve d’unité pour adopter des mesures appropriées contre les trafiquants d’êtres humains.  Le représentant a par ailleurs appelé les organisations régionales et les pays voisins à continuer de travailler ensemble pour trouver une solution politique qui réponde aux aspirations légitimes de l’ensemble des Libyens.  De son côté, le Conseil doit continuer d’appeler les acteurs libyens à rester impliqués dans le processus politique défini par le plan d’action des Nations Unies.

M. SHEN BO (Chine) a salué les progrès « indubitables » en Libye, grâce à l’aide des pays voisins notamment, ainsi que les efforts entrepris pour faire avancer les parties libyennes.  Il a invité ces dernières à favoriser le dialogue qui ne doit pas souffrir de l’ingérence étrangère.  Il a plaidé pour de meilleures conditions de sécurité dans le pays, notamment par la mise en place d’institutions de sécurité unifiées. 

Il est du reste important que l’ONU mette en branle ses bons offices afin de soutenir les autorités libyennes dans la préparation des futures élections, a ajouté le représentant.  Il a aussi invité l’ONU, l’Union africaine et la Ligue des États arabes à soutenir le plan d’action des Nations Unies pour la paix en Libye.  Pour la Chine, des sanctions en Libye doivent viser les responsables d’abus et d’exactions et « ne pas aller contre les intérêts nationaux ou empêcher le déploiement de l’aide humanitaire ».   

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a salué la conclusion du processus d’inscription sur les listes électorales.  Elle s’est toutefois inquiétée de la prévalence de l’insécurité dans le pays, des violations des droits de l’homme et des abus commis en détention, ainsi que des détentions arbitraires prolongées.  Elle a appuyé les mesures prises par le Conseil de sécurité contre les responsables du trafic d’êtres humains, en accord avec la résolution 1970 (2011).  Enfin, elle a appelé les autorités libyennes à pleinement coopérer avec la Cour pénale internationale (CPI).

M. ELMAHDI S. ELMAJERBI (Libye) a dit que les acteurs politiques libyens entendent œuvrer à la stabilité du pays, « sans l’ingérence étrangère qui a fait tant de mal au pays ».  Le Gouvernement d’entente nationale souscrit au plan d’action des Nations Unies, lequel prévoit notamment l’organisation des élections.  Le représentant a noté parmi les problèmes majeurs de son pays la prolifération de la criminalité organisée qui trouve, dans les divisions internes, un terreau fertile pour des actes répréhensibles.  Le Gouvernement d’entente nationale fait des efforts pour unir les Libyens et, malgré la difficulté de cette tâche, des patriotes apportent leur soutien au Gouvernement notamment pour parvenir au succès de la réconciliation entre les différentes tribus du pays.  Il a ainsi salué le fait que de nombreuses villes jouissent désormais de la paix. 

Selon M. Elmajerbi, l’émergence du phénomène du terrorisme et des groupes armés en Libye résulte de la propagation d’idéologies contraires aux valeurs du peuple libyen connu pour sa tolérance.  « Ce sont ces idées importées qui visent à semer l’anarchie et la terreur dans le pays. »  Il a salué l’aide apportée par certains acteurs externes contre ce fléau.  Il a aussi rappelé le récent attentat du 2 mai dernier contre le siège de la Haute Commission électorale nationale.    

Accord politique libyen de SkhiratLa question des migrations illégales a connu récemment une légère détente grâce aux efforts des dispositifs de sécurité du Gouvernement d’entente nationale, s’est félicité le délégué.  Il a dénoncé les bandes de trafiquants qui pratiquent ce commerce sur le sol libyen, alors même que les autorités locales ont établi des camps d’accueil des migrants avec la collaboration de la MANUL et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).  Il a déploré « le double jeu de certaines organisations non gouvernementales qui, sous prétexte d’aider les migrants, les revendent aux trafiquants ».  Il a salué deux interpellations récentes de travailleurs d’ONG par des autorités européennes.  Pour la Libye, « il ne faut surtout pas perdre de vue que le trafic des migrants prospère grâce au soutien des bandes criminelles sur les deux rives de la Méditerranée ».  Il est tout aussi important que la communauté internationale apporte son appui aux pays d’origine afin d’endiguer les départs des migrants. 

M. Elmajerbi a conclu en soulignant que le peuple libyen est éreinté par la détérioration de ses conditions de vie.  Il a souhaité que la communauté internationale soutienne la mise en œuvre du plan d’action des Nations Unies, adopté le 20 septembre dernier, et qu’elle mette fin à l’ingérence étrangère dans les affaires internes libyennes.  Il a aussi insisté sur le fait que la communauté internationale doit accorder une attention similaire aux questions de sécurité et aux questions politiques, arguant que le processus politique ne peut être couronné de succès si les conditions sécuritaires ne s’améliorent pas.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Comité des ONG entame une « session chargée » et recommande le statut consultatif spécial pour 53 ONG

Reprise de la session 2018,
17e & 18e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6914-ONG/870

Le Comité des ONG entame une « session chargée » et recommande le statut consultatif spécial pour 53 ONG

Le Comité des ONG a entamé, aujourd’hui, la deuxième partie de sa session 2018 en recommandant le statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social (ECOSOC) pour 53 ONG.  Le Comité a reporté sa décision sur 16 autres ONG, après avoir tenu une longue discussion sur la demande de la Chine visant à retirer à l’ONG suisse « Société pour les peuples menacés » son statut consultatif spécial.

C’est une session chargée qui attend le Comité, comme l’a expliqué la Directrice du Service des ONG du Département des affaires économiques et sociales, Mme Marion Barthélemy.  À cette reprise de session, a confirmé le Président du Comité des ONG, M. Jorge Dotta, de l’Uruguay, le Comité va se pencher sur 228 nouvelles demandes de statut, 244 demandes reportées des sessions précédentes, 204 nouveaux rapports quadriennaux et 84 rapports reportés des précédentes sessions.

En général, le nombre de demandes de statut auprès de l’ECOSOC est passé de 440 en 2014 à 774 en 2018, a précisé la Directrice du Service des ONG.  Le taux d’augmentation est de 36% pour les ONG du Sud et de 25% pour celles du Nord.  Il faut, a-t-elle reconnu, des efforts supplémentaires pour parvenir à un nombre global qui reflète mieux la structure démographique de la population mondiale.

Avant d’octroyer le statut consultatif spécial à 53 ONG, le Comité a d’abord eu une longue discussion sur le retrait, exigé par la Chine, du statut consultatif spécial de l’ONG suisse « Société pour les peuples menacés (STP) » au motif qu’un de ses représentants, M. Dolkun Isa, activiste ouïgour et Vice-Président de la « East Turkestan Liberation Organization », de nationalité allemande, a participé, incité et financé le séparatisme et le terrorisme pendant des années.  La Chine a donné quatre jours à M. Isa pour répondre par écrit.  Accusations sans fondement, a rétorqué l’Allemagne.  Aucun fait ne corrobore les accusations de la Chine qui a d’ailleurs remis « ses preuves » un peu tard, a commenté l’Union européenne. 

Nous sommes préoccupés par une démarche qui en réalité bloque le travail des ONG, ont dit, à leur tour, les États-Unis, arguant que le Service des visas américain n’aurait jamais accordé de droit d’entrée à cette personne si elle était vraiment prête à commettre des attentats terroristes sur le sol américain.  La Chine a en effet affirmé que M. Dolkun Isa avait participé à la dernière session à New York de l’Instance permanente pour les peuples autochtones.  Il serait très regrettable d’agir avec « la vitesse de l’éclair » pour retirer le statut de la « Société pour les peuples menacés » alors que le Comité avance « à pas de tortue » quand il s’agit d’examiner les demandes de statut, a ironisé le Royaume-Uni.

      La Chine a aussi, par une motion d’ordre, interrompu la déclaration d’une ONG, au nom du respect de l’ordre du jour.  Parmi d’autres, l’Autriche s’est étonnée que le Comité perde des heures à discuter du droit de parole d’une ONG dont la déclaration n’aurait duré que trois minutes.     

En début de matinée, le Comité a adopté son ordre du jour provisoire annoté* ainsi que le programme de travail de 44 pages qui comprend aussi la liste des ONG dont les demandes doivent être examinées**.

La Directrice du Service des ONG a rappelé que, le 22 juin 2018, auront lieu les premières consultations avec les ONG dotées d’un statut.  L’Iran a voulu savoir si le recours à Internet a été envisagé pour promouvoir la participation des ONG du Sud.  La Chine a demandé un compte rendu dans les six langues officielles des Nations Unies.

Le Comité chargé des ONG poursuivra ses travaux demain, mardi 22 mai, à partir de 10 heures.

*E/C.2/2018/1/REV.1

**csonet.org

Renforcement du Service des organisations non gouvernementales du Département des affaires économiques et sociales du Secrétariat

La Directrice du Service des ONG du Département des affaires économiques et sociales du Secrétariat, Mme MARION BARTHÉLEMY, a déclaré que depuis l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030, le nombre des ONG qui demandent un statut consultatif auprès du Conseil économique et social (ECOSOC) a augmenté: de 440 en 2014 à 774 en 2018.  Le taux d’augmentation est plus élevé pour les organisations des pays en développement -36%- que des pays développés -25%-.  Le nombre total des dossiers est désormais partagé de manière égale entre les ONG du Nord et du Sud.  Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour atteindre les organisations du Sud et parvenir à un nombre global qui reflète mieux la structure démographique de la population mondiale.

La forte augmentation du nombre de demandes a entraîné une augmentation aussi forte de la charge de travail du Service des ONG mais aussi du Comité des ONG.  Le nombre des rapports quadriennaux atteindra le record de 1105 en 2019, soit 300 de plus que cette année.

Le Comité des ONG est de plus en plus sollicité.  Les consultations qu’il tiendra avec les ONG dotées de statut, pour la première fois, le 22 juin 2018, illustrent la nécessité d'une plus grande interaction entre les processus intergouvernementaux et la société civile pour que les deux mondes se comprennent et profitent mutuellement de leurs contributions dans un esprit de partenariat.

Mme Barthélemy a ajouté que le Département des affaires économiques et sociales (DAES) est en train d’élaborer une nouvelle plateforme intégrée qui devrait éventuellement remplacer les systèmes actuels à savoir la base de données intégrée sur les organisations de la société civile, le réseau de la société civile (CSO Net) et les réunions sans support papier (Paperless).  Investir dans ces outils d'information est indispensable pour la continuité du travail du Comité et du Service des ONG.  Les méthodes de travail du Comité devront également être ajustées afin de se conformer à la charge de travail accrue.  Rappelant la résolution 68/1 de l'Assemblée générale sur l’amélioration de l’efficacité de l’ECOSOC, Mme Barthelemy a estimé que ce processus renforcera également la participation de la société civile au travail de l’ECOSOC. 

Cuba a estimé que l’ONU doit en effet faire des efforts pour améliorer la participation des ONG du Sud à son travail.  Le volume de travail du Comité des ONG ne doit pas nous faire dévier de notre mission qui est d’examiner les dossiers des organisations, a-t-il ajouté.  Les États-Unis ont appuyé l’idée d’organiser, avant chaque session, des échanges entre le Comité et les ONG.  Ils ont d’ailleurs reproché au Comité de faire barrage à trop d’ONG, en particulier les ONG humanitaires.  Les États-Unis demandent aux membres du Comité de réaffirmer leur engagement et ont dénoncé les exigences d’« un seul et unique État et de sa question répétitive sur les sources financières ».  « Déçu de la déclaration des États-Unis », l’Iran a vu là une tentative de politiser les travaux du Comité.  L’Autriche, observateur, a salué la création d’une nouvelle plateforme modernisée permettant aux non-membres du Comité de participer à ses travaux.

Examen des rapports spéciaux

La Chine a demandé le retrait du statut consultatif de la Société des peuples menacés (STP) au motif qu’un de ses représentants, Dolkun Isa, accrédité auprès de l’Instance permanente sur les peuples autochtones, a participé, incité et financé le séparatisme et le terrorisme pendant des années.  Dolkun Isa se dit Président du Congrès mondial Ouigour (WUP), principale organisation politique du Mouvement islamique du Turkestan oriental (ETIM), qui figure sur la liste du Comité des sanctions créé en vertu de la résolution 1267 du Conseil de sécurité.  Le WUC, a accusé la Chine, a incité des éléments du « Turkestan oriental » à comploter et à mener des activités terroristes dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang et d'autres régions de la Chine.  Le WUC organise également le trafic illégal de ressortissants chinois en Syrie pour le « Jihad », menaçant non seulement la sécurité nationale de la Chine mais stimulant aussi la propagation du terrorisme international.  M. Isa a été classé par le Gouvernement chinois comme un terroriste en décembre 2003.  Lui et le WUC se sont engagés dans la soi-disant « Indépendance du Xinjiang » qui enfreint de manière flagrante la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale de la Chine et viole gravement les buts et principes de la Charte des Nations Unies.  La Chine a donné à M. Isa jusqu’à vendredi pour répondre par écrit à ses accusations. 

Les États-Unis ont, se fondant sur un rapport du Secrétaire général en date du 26 avril, affirmé que M. Dolkun Isa n’a pas participé aux travaux de l’Instance permanente, après les plaintes de la Chine.  Nous sommes préoccupés par cette démarche qui revient à bloquer le travail des ONG, se sont inquiétés les États-Unis, demandant au Département de la sécurité de venir dire au Comité si oui ou non M. Isa représente un danger pour l’Organisation, comme l’affirme la Chine.  Le Service des visas des États-Unis n’aurait jamais accordé de visa à cette personne si elle était vraiment prête à commettre des attentats terroristes sur le sol américain.

L’Allemagne s’est dite surprise de la demande de la Chine, s’agissant d’une ONG dont le siège est sur le territoire allemand.  Les allégations de terrorisme contre M. Isa sont « sans fondement » et n’ont jusqu’ici jamais été prouvées.  Dolkun Isa est un ressortissant allemand sur lequel les autorités allemandes n’ont aucune information le liant à une organisation terroriste.  Aucun fait ne corrobore les accusations de la Chine qui a d’ailleurs remis « ses preuves » un peu tard, a commenté l’Union européenne.  Les accusations de la Chine sont très sérieuses, a rétorqué la Fédération de Russie.  « On ne peut pas faire entrer aux Nations Unies des personnes accusées de terrorisme. »  Et si les accusations sont confirmées, nous devons retirer le statut de cette ONG.  Le Pakistan, Cuba, Israël et l’Iran ont pris note de la suggestion de la Chine d’examiner le statut de l’ONG vendredi prochain. 

Cette ONG mène des actions contre l’intégrité territoriale d’un État Membre de l’ONU, a répété la Chine, qui a aussi réitéré que la participation de l’ONG au travail de l’Organisation présente des « risques sécuritaires ».  Notre intention n’est pas de bloquer le travail des ONG et encore moins de prendre des mesures de représailles.  Mais l’obtention d’un visa américain ne veut pas dire que le détenteur ne présente aucun risque car, avant de quitter la Chine, M. Isa a commis de nombreux attentats terroristes et son passeport allemand ne change rien à la situation.  Dolkun Isa a appelé à « une guerre sainte » contre la Chine sur les médias sociaux et il serait inopportun que les États-Unis et l’Allemagne pratiquent aujourd’hui la politique des deux poids, deux mesures. 

L’ONG représente des minorités persécutées et les preuves présentées contre elle ne sont pas convaincantes, ont tranché les États-Unis.  Le Royaume-Uni a estimé que ce serait très regrettable d’agir avec la vitesse de l’éclair pour retirer le statut de cette ONG alors que le Comité avance à pas de tortue dans l’examen des dossiers

Mon Gouvernement, a rétorqué la Chine, défend et respecte les droits des minorités ethniques, y compris les Ouïgours.  Nous avons beaucoup d’éléments à charge contre Dolkun Isa et, à cause de la politique des deux poids, deux mesures, ces éléments sont examinés à la légère.  Cette personne mène des activités criminelles en Chine et c’est une preuve suffisante.  « Attendons vendredi pour continuer la discussion. »

Plusieurs observateurs ont pris la parole comme l’Union européenne qui a dit que la participation de la société civile devait être le reflet de notre aspiration à la paix, à la sécurité et au développement.  Le Danemark a ajouté que la participation des ONG contribue au fonctionnement normal et sain des Nations Unies.  Le Canada et l’Australie ont prié le Comité de respecter la contribution importante de la société civile aux travaux des Nations Unies.  Le Comité doit d’ailleurs rendre son processus plus accessible aux ONG, a commenté, à son tour, l’Estonie, avant que le Royaume-Uni ne demande un examen plus profond de la question de la charge de travail du Comité. 

Un représentant d’ONG a été interrompu par une « motion d’ordre » de la Chine qui réclamait le respect de l’ordre du jour, appuyée par la Fédération de Russie.  L’Uruguay a regretté que l’on refuse aux ONG de prendre la parole en particulier « International Service for human rights » qui représente plus d’une centaine d’autres organisations.  Soutenus par le Canada, les États-Unis ont insisté sur le droit à la parole des ONG.  L’Autriche s’est étonnée que le Comité perde des heures à discuter du droit à la parole d’une ONG dont la déclaration n’aurait pas duré trois minutes.  Le Royaume-Uni, la Grèce, l’Australie et Israël ont dit ne pas comprendre pourquoi on interdirait à une ONG, dotée du statut consultatif spécial, de s’exprimer.  En l’absence de consensus, le Président du Comité a décidé que l’ONG prendra la parole pendant les heures consacrées au dialogue. 

Examen des méthodes de travail du Comité

Cuba a demandé si le Comité est prêt à examiner la liste des ONG à l’aune des Listes établies par les Comités des sanctions du Conseil de sécurité.  L’Inde a soutenu cette demande.  À propos des consultations du 22 juin dernier, l’Iran a voulu savoir si le recours à Internet a été envisagé pour promouvoir la participation des ONG du Sud.  La Chine a demandé le compte rendu dans les six langues officielles des Nations Unies de ces consultations. 

Nouvelles demandes d’admission au statut consultatif ou de reclassement

Octroi du statut consultatif spécial

  1. AWWA LTD. (Singapour)
  2. Action pour l’Éducation et la Promotion de la Femme (Tchad)
  3. Aie Serve (Liban)
  4. Akshar Foundation(Inde)
  5. Alianza ONG (République dominicaine)
  6. Aman against Discrimination (Libye)
  7. Apex Voluntary Agency for Rural Development (Inde)
  8. Arab Society for Academic Freedoms (Jordanie)
  9. Aravind Foundation (Inde)
  10. Asmau Foundation for Orphans and Less Priviledge (Nigéria)
  11. Asociacion La Familia Importa (Guatemala)
  12. Association Humanity First Cameroon (Cameroun)
  13. Association Nationale pour Promouvoir la Société Civile et la Citoyenneté (Algérie)
  14. Association des Citoyens pour le Progrès du Centre- ASCIPROC (Haïti)
  15. Association des femmes pour le développement à la base (République démocratique du Congo)
  16. Association des jeunes volontaires au service du monde environnemental (Togo)
  17. Association pour la promotion du développement local (Cameroun)
  18. Beyond Beijing Committee (Népal)
  19. Caucus of Development NGO Networks (Philippines)
  20. Center for China & Globalization Limited (Chine)
  21. Center for Human Rights Studies of Mofid University (Iran)
  22. Centre For Social Justice Limited by Guarantee (Nigéria)
  23. Centre d’analyse et de recherche en droits de l'homme- CARDH-H (Haïti)
  24. Centre for Communication and Sustainable Development for All- CECOSDA (Cameroun)
  25. Centre for Legal Rights Advancement (Nigéria)
  26. Centre for Promoting Alternatives to Violence- PAVe (Singapour)
  27. Collectif des Associations Contre l'Impunité au Togo- C.A.C.I.T. (Togo)
  28. Community Development and Welfare of the Less Privilege Initiative (Nigeria)
  29. Daughters of Virtue and Empowerment Initiative (Nigéria)
  30. EL Hikma Organization for health and Social Welfare (Soudan)
  31. Echange pour l'organisation et la promotion des petits entrepreneurs au Togo- ECHOPPE-TOGO (Togo)
  32. Educate a Child in Africa (Cameroun)
  33. Election Network Society in the Arab Region (Jordanie)
  34. Farasooye Taaly Institute (Iran)
  35. Friends Group (Népal)
  36. Fundación Multitudes (Chili)
  37. Havtzelet Cultural and Educational Institutions of HaShomer HaTzair- PPC (Israël)
  38. Operation Underground Railroad Inc (États-Unis)
  39. WomenNC-NC Committee for CSW/CEDAW (États-Unis)
  40. Fundación para la Protección de los Arboles La Iguana (Équateur)
  41. Fundação de Apoio a Pesquisa Científica, Educacional e Tecnológica de Rondônia (Brésil)
  42. Fédération de la Ligue Démocratique des Droits des Femmes (Maroc)
  43. Gana Unnayan Kendra- GUK (Bangladesh)
  44. Global Peace and Development Organization- GPDO (Libéria)
  45. Groots Kenya Association (Kenya)
  46. HaritaDhara Research Development and Education Foundation (Inde)
  47. Health Development Project- Sierra Leone (Sierra Leone)
  48. Hiranmoy Das Gupta Foundation (Inde)
  49. Independent Institute for Monitoring the Formation of Civil Society (Ouzbékistan)
  50. Instituto Etnia Planetária (Brésil)
  51. Instituto Sou da Paz (Brésil)
  52. Khubaib Foundation (Pakistan)
  53. Kosar Mashiz (Hazrat Zahra) Charity (Iran)

Report de la décision dans l’attente de réponse aux questions posées par le Comité

En attendant la traduction dans les six langues officielles de l’ONU de leurs demandes, le Comité a reporté sa décision sur les dossiers d’ANADEC -Acção Nacional para o Desenvolvimento Comunitária (Guinée-Bissau) et d’Agir Pour l'Épanouissement de l’Enfant et de la Femme en Afrique (A.P.E.E.F.A.) (Togo).  Al-Mehran Rural Development Organization (AMRDO) (Pakistan) est-elle enregistrée auprès des autorités locales de Qasimabad? a demandé le Pakistan.

Le Venezuela a demandé à l’Arab Program for Human Rights Activists (Égypte) une liste de ses activités et de ses partenaires régionaux.  Quelles sont les conférences des Nations Unies auxquelles a participé Cairo Foundation for Development and Law (Égypte)?  Quels en sont enseignements tirés?  Pourquoi le site Internet de l’ONG ne fonctionne pas?  Le Burundi a voulu que l’Association for Reconciliation and Development through English (Burundi) lui explique « la nature de ses activités génératrices de revenus ».  Quels sont les projets de China Biodiversity Conservation and Green Development Foundation (Chine) pour parvenir à ses objectifs? ont demandé les États-UnisChina Charity Alliance (Chine) peut-elle en dire plus sur les résultats du Forum d’échanges Chine-Afrique en 2016?  La Fédération de Russie a demandé à East Human Rights Group (Ukraine) des détails supplémentaires sur ses partenaires.

Peut-on avoir les noms des membres de votre Conseil d’administration? a voulu la Mauritanie d’Éducation des filles (Mauritanie).  Où est la liste des sources de financement d’Etrat Fatemi Charity Institute (Iran)? ont voulu savoir les États-Unis.  Green Lane Agricultural Assistance Non-Governmental Organization (Arménie) a-t-elle des activités dans les territoires occupés de l’Azerbaïdjan? a demandé l’Azerbaïdjan.  Combien de membres compte le Conseil d’administration de Habilian Association (République islamique d’Iran)? ont voulu savoir les États-Unis.  Human Rights & Democratic Participation Center- SHAMS (État de Palestine) devra donner une liste ventilée de ses sources de financement aux États-Unis.

Qui sont les partenaires régionaux et internationaux de l’International Association of Justice Watch (Iran)? a interrogé la TurquieCuba a demandé à l’International Association of World Peace Advocate (Nigéria) la nature de ses derniers projets.  Pourquoi avoir dépensé seulement 1 dollar pour ces projets?  Pourquoi le site Internet ne fonctionne pas?

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Forum pour la coopération en matière de développement s’ouvre sur des appels au respect des engagements pris au titre de l’APD

Session de 2018,
28e et 29e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6915

Le Forum pour la coopération en matière de développement s’ouvre sur des appels au respect des engagements pris au titre de l’APD

Le Forum pour la coopération en matière de développement s’est ouvert aujourd’hui sur des appels lancés aux pays développés pour qu’ils atteignent l’objectif fixé par l’ONU de consacrer 0,7% de leur revenu national brut à l’aide publique au développement (APD).  Cette aide continue en effet de jouer un rôle vital pour les pays les plus vulnérables, ont souligné la plupart des orateurs, pour cette première journée de travail, qui s’est articulée autour de trois sessions. 

À l’entame de ce Forum, dont les recommandations seront présentées au Forum politique de haut niveau pour le développement durable en juillet prochain, Mme Amina J. Mohammed, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a insisté sur « le long chemin » qui reste à parcourir pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, en dépit « des avancées remarquables accomplies ».

« Près de 767 millions de personnes vivent encore avec moins de 1,90 dollars par jour et, globalement, 793 millions de personne étaient malnutries en 2014-2016 », a-t-elle dit.  Le délégué du Bangladesh, qui s’exprimait au nom des pays les moins avancés (PMA), a indiqué que ces pays ne peuvent pas espérer atteindre l’objectif d’une croissance économique d’au moins 7%, leur taux de croissance économique étant de 4,8% en moyenne.

L’APD, qui est la principale source de financement extérieur de nos pays, demeure loin de l’objectif du Programme d’action d’Addis-Abeba*, qui a retenu la cible précitée de 0,7%, a-t-il regretté.  Le Sous-Secrétaire général aux affaires économiques et sociales, M. Lui Zhenmin, a rappelé, dans le droit fil du dernier rapport** du Secrétaire général sur la question, que cette aide demeure une source « vitale » de financement.

Selon ce rapport, cette aide a représenté en 2016 un montant de 145,7 milliards de dollars.  Si les pays ont, en moyenne, rempli en 2016 leurs engagements au titre du Programme d’action d’Addis-Abeba visant à inverser le déclin de cette aide aux PMA, à moyen terme, la « tendance » en la matière est à la stagnation, s’inquiète le Secrétaire général.

Si tous les pays développés consacraient un tel montant, cela représenterait 184 milliards de dollars d’aide supplémentaire, a noté le délégué de l’Inde.  Son homologue d’El Salvador a estimé qu’il ne fallait pas abandonner cet objectif de 0,7%, surtout à un moment où le multilatéralisme est menacé.

« Les accords fixés au sein de l’ONU doivent être honorés, faute de quoi ce sont les objectifs de développement durable eux-mêmes qui pourraient être remis en cause », a averti le délégué.  Même son de cloche du côté de la délégation de l’Union européenne qui a indiqué que celle-ci contribue à hauteur de 90 milliards de dollars annuels à l’APD.

« L’Union européenne a une cible en tête et il ne faut pas changer d’objectif à mi-chemin, même si on peut améliorer ce qui se fait », a-t-elle dit.  Le représentant de Cuba s’est insurgé quant à la possibilité de diminuer les engagements en matière d’APD.  « Comment pouvons-nous faire pour que les pays qui se sont engagés pour les 0,7% d’APD honorent leur promesse? »

Inquiet, lui aussi, de cette tendance, le délégué de l’Égypte a aussi rappelé que la coopération Sud-Sud ne peut pas remplacer la coopération Nord-Sud mais seulement la compléter.  Mme Mohammed a, elle, regretté que les PMA et ceux avec des situations spéciales soient trop souvent contournés, notamment en matière de financement mixte.  « Il faut que cela change », a-t-elle dit.

Une note quelque peu dissonante est venue de la représentante des États-Unis qui a indiqué que les défis du développement vont bien au-delà de la question des ressources financières.  Une position partagée par un entrepreneur, M. Jeff Hoffman, qui a déclaré que « la devise la plus importante c’est le capital humain » et mis en garde contre le gaspillage des ressources financières.

Pointant la lenteur dans l’élaboration des politiques publiques d’appui au développement, il a exhorté les délégués à « enlever leurs beaux habits et à mettre les mains dans le cambouis ».  Si une politique ne règle pas un problème, elle n’est pas utile, a-t-il tranché, ajoutant que « 2030 c’est demain ».

Les avis sur l’aide au développement ont aussi quelque peu divergé entre d’un côté l’Union européenne, qui se demandait s’il ne fallait pas aider les autorités nationales à diriger leur budget vers certains secteurs, et, de l’autre, le panéliste d’EURODAD (réseau européen sur la dette et le développement), qui conseillait plutôt de « délier l’aide ».  Défenseur de l’appropriation de l’aide par les pays récipiendaires, ce dernier a plaidé pour que les ressources ne soient pas préaffectées à un secteur plutôt qu’un autre.

La question de l’APD a été le fil rouge de la première et de la deuxième sessions intitulées, respectivement, « Renforcer la durabilité et la résilience grâce à la coopération au développement » et « Généraliser des partenariats multipartites et approches inclusifs pour la coopération en matière de développement: politiques et cadres juridiques ».

La troisième session, composée de trois dialogues parallèles, était intitulée « Améliorer la performance pour le développement durable: le rôle des politiques nationales de coopération en matière de développement ».

Le Forum poursuivra ses travaux, demain, mardi 22 mai à 10 heures.

*Programme d’action d’Addis-Abeba issu de la troisième Conférence internationale sur le financement du développement

**E/2018/55

FORUM POUR LA COOPÉRATION EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT

Déclarations

Mme MARIE CHATARDOVA, Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC) a indiqué que ce Forum pour la coopération en matière de développement est l’occasion de réfléchir aux moyens de bâtir des sociétés durables et résilientes.  Les gains de développement si âprement gagnés sont menacés par les inégalités, les changements climatiques, la montée de l’extrémisme violent et du populisme et le rétrécissement de l’espace civique, a-t-elle dit, avant de miser sur la coopération pour le développement qui permet de contrecarrer ces tendances. 

La Présidente a dit que le succès de ce Forum repose sur des discussions franches.  Elle a exhorté les participants à faire montre d’ouverture et d’un esprit constructif lors des deux prochains jours.  « N’hésitons pas à remettre en question nos idées », a-t-elle dit.  Mme Chatardova s’est dite convaincue que des discussions ouvertes permettront d’enrichir les recommandations qu’elle présentera lors du Forum politique de haut niveau pour le développement durable en juillet prochain. 

« Quelles mesures pouvons-nous prendre pour faire en sorte que nos stratégies nationales et le soutien que nous apportons aux pays en développement répondent aux nouvelles exigences du Programme de développement durable à l’horizon 2030 », a-t-elle demandé, résumant ainsi l’enjeu des discussions de ce Forum. 

Pour Mme AMINA J.  MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, il est temps d’atteindre les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  « Nous sommes ici pour passer des paroles aux actes.  Il s’agit de créer des partenariats plus forts afin que la coopération au développement joue un rôle plus stratégique et effectif dans sa mise en œuvre ».  « Nous avons fait des avancées remarquables » s’est-elle réjouie, « mais nous avons encore un long chemin à parcourir pour construire des sociétés résilientes et durables, qui ne laissent personne de côté ».  Elle a cité plusieurs chiffres à l’appui: 767 millions de personnes vivent encore avec moins de 1,90 dollars par jour et globalement, 793 millions de personne étaient malnutries en 2014-2016.  En 2015, plus de 303 000 femmes sont mortes durant la grossesse et l’accouchement, et 5,9 millions d’enfants de moins de 5 ans sont décédés, autant de morts, qui pour Mme Mohammed, sont évitables. 

La Vice-Secrétaire générale a aussi pointé les inégalités entre les sexes, « toujours fortes », les jeunes confrontés à « des taux dramatiques de chômage et dont les voix ne se font pas entendre », ainsi que les 9% d’enfants qui ne sont pas scolarisés.  Elle a ensuite mis en évidence les conséquences des problèmes environnementaux: le stress hydrique, qui nécessite de construire davantage d’infrastructures durables, la pollution de l’air qui affecte 9 habitants sur 10 dans les villes, et les changements climatiques qui « provoquent des pertes économiques de 250 milliards à 300 milliards de dollars par an ».

Poursuivant sur la question de l’aide au développement, elle a regretté que les pays les moins avancés et ceux avec des situations spéciales soient trop souvent contournés, notamment en matière de financement mixte.  « Il faut que cela change » a-t-elle dit.  Tout en notant que les gouvernements ne peuvent agir seuls et qu’il est indispensable de dialoguer avec le secteur privé, elle a toutefois mis en garde: malgré son potentiel énorme, le financement mixte « sans cadre juridique fiable et une comptabilité publique transparente représente un risque pour les populations ».  Mme Mohammed a ensuite mis en évidence l’importance de la coopération Sud-Sud, citant le Plan d’action de Buenos Aires comme « modèle » et rappelant qu’une conférence de haut niveau se déroulera l’année prochaine en Argentine sur ce thème.  Elle a conclu son exposé en expliquant que la réforme du système de développement des Nations Unies permettra de prendre des mesures plus ciblées et stratégiques, notamment en se repositionnant pour renforcer l’appui au niveau local, indispensable pour la mise en œuvre. 

M. LUI ZHENMIN, Sous-Secrétaire général aux affaires économiques et sociales, a présenté les principales conclusions du rapport du Secrétaire général sur les tendances et progrès en matière de coopération internationale pour le développement (E/2018/55) en soulignant que « premièrement, la coopération en matière de développement doit demeurer axée sur le Programme 2030 ».  Il a en outre demandé un renforcement des liens entre la coopération en matière de développement et les actions pour remédier aux conséquences du changement climatique. 

Deuxièmement, l’aide publique au développement (APD) demeure une source vitale de financement, a-t-il dit.  Il a appelé le Forum à réfléchir aux moyens de renforcer une allocation efficace de cette aide et de faire en sorte que les engagements pris en la matière soient respectés.  Troisièmement, le renforcement des capacités des pays en développement est crucial, a-t-il dit.  En quatrième lieu, il a noté la diversification et l’expansion de la coopération Sud-Sud et triangulaire.

Enfin, il a insisté sur le potentiel du financement mixte, ajoutant que l’utilisation de l’APD pour des projets financés par le financement mixte doit être guidée par les principes qui garantissent une coopération efficace.  En conclusion, M. Liu a plaidé pour un rôle accru du secteur privé afin de promouvoir le développement durable et pour une coopération Sud-Sud et triangulaire mieux structurée. 

M. JEREMY HEIMANS, cofondateur et Directeur exécutif de Purpose -une organisation qui apporte un soutien aux mouvements dédiés à la lutte pour un monde ouvert, juste et habitable- a déploré que la coopération en matière de développement soit encore gouvernée par des règles désuètes, avec notamment une relation inégale entre donateurs et récipiendaires de l’aide, ceux-ci étant « passifs ».  « Nous avons besoin d’un nouveau pouvoir, plus participatif », a-t-il dit en précisant qu’il fallait bâtir des institutions qui permettent d’assouvir la soif participative de nombreux acteurs. 

M. Heimans a déploré la montée du populisme, prenant l’exemple du Brexit, ajoutant que la coopération en matière de développement permet d’y remédier.  Les partisans du Brexit ont développé des arguments plus « émotionnels » que les opposants qui se sont, eux, reposés sur des « faits bruts », a-t-il remarqué en appelant à suivre le procédé qui consiste à faire appel à l’émotion.  « Nous ne devons pas hésiter à créer la polémique. »  Enfin, il a insisté sur l’ampleur du mouvement #Metoo et sur celui qui lutte contre la violence sexuelle en Inde, des mouvements très puissants animés par des femmes. 

Lors de la discussion avec les délégations, celles-ci ont insisté sur l’importance de l’APD et exhorté les pays en développement à honorer leurs engagements en la matière.  Le délégué de l’Égypte a ainsi indiqué que six pays seulement consacrent 0,7% de leur revenu à l’APD, déplorant les « tendances alarmantes » dans la coopération Nord-Sud.  La coopération Sud-Sud ne peut pas remplacer la coopération Nord-Sud mais seulement la compléter, a-t-il affirmé, en réclamant plus de transferts de technologie vers les pays en développement. 

Une inquiétude partagée par le délégué du Bangladesh, qui, au nom des pays les moins avancés (PMA), a indiqué que la plupart de ces pays ne parviendront pas à l’objectif d’une croissance économique d’au moins 7%, leur taux de croissance économique étant de 4,8% par an en moyenne.  L’APD, qui est leur principale source de financement extérieur, demeure loin de l’objectif du Programme d’action d’Addis-Abeba, a-t-il regretté. 

Il a salué l’opérationnalisation de la Banque de technologies pour les PMA en Turquie, tandis que son homologue du Brésil a insisté sur le rôle du secteur privé pour réaliser le Programme 2030. 

L’Inde est revenue sur le cœur du débat, l’APD, pour pointer l’ambiguïté des relations entre cette source d’aide et le financement international pour faire face aux changements climatiques.  Si tous les pays respectaient les cibles en matière d’APD, cela représenterait 184 milliards d’aide supplémentaire, a-t-il dit. 

Le représentant d’ActionAid a insisté sur le caractère unique de l’APD, qui est souvent « incomprise ».  Le financement mixte n’est pas la solution pour les PMA, a-t-il dit, tandis que la déléguée de Reality of Aid a jugé le montant actuel de l’APD « insuffisant ».  La modératrice de ce débat, Mme JUDITH RANDEL, de Development Intiatives, a en effet rappelé que l’APD ne représente que 8% des flux à destination des pays en développement, même si c’est la ressource la plus importance de financement pour ces pays.

M. Heimans a noté que la cible précitée d’APD est « importante et problématique ».  « Si nous en parlons depuis des décennies, nous devons mieux communiquer sur ce sujet, en définissant davantage le message à transmettre », a-t-il recommandé. 

Session 1.  Renforcer la durabilité et la résilience grâce à la coopération au développement

Réagissant aux propos tenus plus tôt ce matin par Jeremy Heimans, M. JAIME MIRANDA, Vice-Ministre de la coopération au développement d’El Salvador, a estimé qu’il ne fallait pas abandonner l’objectif de 0,7% du PIB à consacrer à l’aide publique au développement, surtout à un moment où le multilatéralisme est menacé.  « Les accords fixés au sein de l’ONU doivent être honorés, faute de quoi ce sont les objectifs de développement durable eux-mêmes qui pourraient être remis en cause », a averti le délégué.  Mme JOANNE ADAMSON, chef adjointe de la Délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies, a abondé dans son sens: « l’Union européenne a une cible en tête et il ne faut pas changer d’objectif à mi-chemin, même si on peut améliorer ce qui se fait.  Nous encourageons les 0,7% ».  Le représentant de Cuba s’est lui aussi insurgé quant à la possibilité de diminuer les engagements en matière d’APD.  « Plutôt que de consacrer des ressources à la course aux armements, il vaut mieux orienter les ressources.  Comment pouvons-nous faire pour que les pays qui se sont engagés pour les 0,7% d’APD honorent leur promesse? » a-t-il demandé. 

M. JESSE GRIFFITHS, directeur à EURODAD, réseau européen sur la dette et le développement, a insisté sur le fait que l’APD est une ressource publique indispensable, rappelant que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 nécessite des fonds conséquents dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’infrastructure, qui ne peuvent être mobilisés que par l’action publique.  « Pour moi, l’APD est un appel à augmenter davantage les dépenses publiques pour qu’il n’y ait aucun laissés-pour-compte », a-t-il lancé.  Il a appelé à augmenter l’APD pour les pays les moins avancés (PMA). 

En écho à ses propos, le représentant de la Turquie a déclaré que son pays avait débloqué une APD de 8,1 milliards en 2017, ce qui représente 0,85% du budget public, soit plus que la cible.  Il a aussi annoncé qu’il avait augmenté la part consacrée à l’éducation, notamment en Afghanistan, et a rappelé son initiative de création d’une banque de technologies pour les PMA.  Elle sera inaugurée le 4 juin et se concentrera, la première année, sur une évaluation des besoins technologiques dans les PMA. 

Plusieurs intervenants se sont demandés si les critères d’attribution de l’APD devaient être revus.  La chef adjointe de la Délégation de l’Union européenne, qui a rappelé que celle-ci contribuait à hauteur de 90 milliards de dollars annuels à l’aide au développement, a questionné la manière dont les pays s’appropriaient cette aide.  « Nos attentes sont-elles trop importantes?  Ne faut-il pas aider les autorités nationales à diriger leur budget vers certains secteurs comme la santé et l’éducation? » D’un autre avis, le panéliste d’EURODAD a plutôt appelé à « délier l’aide », notant que plus de 32 milliards d’APD sont officiellement liés, c’est-à-dire préaffectés à une action ou un secteur.  « Et je ne parle pas de ces autres pratiques où l’APD est liée informellement à des contrats qui bénéficient à des sociétés issues des pays bailleurs de fonds. »  Le panéliste a recommandé, au contraire, de favoriser l’appropriation de l’aide par les pays récipiendaires.  C’est aux pays en développement qu’il revient d’expliquer comment dépenser l’APD, a-t-il insisté.

De son côté, le Vice-Ministre de la coopération au développement d’El Salvador a remis en cause le critère de classement des pays qui leur permet ou non de bénéficier de l’APD, soit le revenu par habitant.  À son avis, ce critère ne reflète pas les réelles inégalités et le grand nombre de pauvres caractéristiques de la situation en Amérique latine. 

Enchaînant, la représentante du Ghana a regretté que son pays, classé à revenus moyens, ne doive compter que sur ses propres ressources pour faire de la prévention face aux chocs, notamment environnementaux, qui le menacent.  Elle a insisté sur le fait que la résilience et la durabilité devaient avant tout se réaliser au niveau national, par le biais d’institutions fortes.  À ce sujet, le représentant de l’Union interparlementaire a regretté que le rapport du Secrétaire général ne mette pas suffisamment en évidence l’objectif 16, qui prévoit la mise en place, à tous les niveaux, d’institutions responsables, efficaces et ouvertes à tous.  « Il faut des élections libres, transparentes, démocratiques » a appuyé sa collègue qui a pris la parole un peu plus tard.  « Et la démocratie, ce ne sont pas seulement les élections, mais tout un système.  Notamment, avoir un parlement qui contrôle l’exécutif.  C’est essentiel pour le développement. »

Plusieurs intervenants, à l’instar du Ministre salvadorien et du représentant de la République dominicaine, ont également rappelé les risques liés aux changements climatiques, à la surpopulation mondiale, et à l’épuisement des ressources naturelles, insistant sur la nécessité dans ce domaine, de parler de justice climatique plutôt que de coopération.  La représentante de l’Union européenne a invité à faire preuve d’innovation à ce niveau, donnant l’exemple des assurances sécheresses tandis que le représentant d’EURORAD a estimé que le financement de l’action climatique doit se faire en sus de l’APD.

Apportant une autre perspective au débat, M. SERGIY KYSLYTSYA, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a appelé de son côté à ne pas attendre le retour de la paix pour coopérer avec des pays en conflit.  Il a donné l’exemple du niveau de violence domestique qui s’élève quand les soldats démobilisés rentrent dans leur famille, et lorsqu’ils ont accès à la drogue, l’alcool.  « Plus les femmes sont protégées, plus il est possible qu’elles trouvent un emploi, et moins le fardeau sera élevé pour le gouvernement en termes de soins médicaux et de d’éventuels frais de justice. »  Il a également regretté, en matière de coopération, le décalage entre ce qui est dit « dans les capitales, et dans l’enceinte de l’ONU », ainsi que « celui qui sépare cette assemblée du Conseil de sécurité ».  Ce dernier devrait, a-t-il estimé, « parler de ce dont nous discutons ici ».

Session 2: Généraliser des partenariats multipartites et approches inclusifs pour la coopération en matière de développement: politiques et cadres juridiques

Mme SUSAN FINE, USAID, a reconnu que l’APD a un rôle à jouer au sein des partenariats multipartites au service du développement durable.  Mais les défis du développement sont très complexes et vont bien au-delà de la question des ressources financières, a-t-elle dit.  Elle a indiqué que ces partenariats multipartites permettent précisément de prendre en compte toutes les dimensions du développement.  Elle a souligné les objectifs divergents que les différentes parties de ces partenariats peuvent poursuivre.  Le secteur privé veut signer des contrats alors que les institutions publiques doivent rendre des comptes de leur action devant les instances parlementaires, a-t-elle expliqué.  C’est pourquoi il est crucial que les objectifs soient arrêtés en amont, a-t-elle déclaré. 

Les partenariats multipartites sont créés avant tout pour répondre à des besoins nationaux et ils doivent être planifiés sur le long terme, a précisé Mme NONHLANLA MKHIZE, Département des sciences et de la technologie de l’Afrique du Sud.  En outre, a-t-elle ajouté, les responsabilités doivent être clairement ventilées entre les membres des partenariats.  Elle a souligné l’importance du transfert de technologies innovantes dans les pays en développement, ainsi que la bonne appropriation nationale de ces transferts.  Nous avons pour cela besoin de ressources, de capacités renforcées et d’un environnement favorable, a-t-elle dit, ajoutant que ce sont là des objectifs poursuivis par le Programme d’action d’Addis-Abeba.  « Nous avons besoin de ressources mais aussi de volonté politique. »

En même temps, les entrepreneurs n’ont pas le temps d’attendre que les responsables politiques finissent d’élaborer leurs politiques de promotion du développement durable, a fait remarquer M. JEFF HOFFMAN, Directeur exécutif de Color Jar: « 2030 c’est demain », a-t-il dit, en se disant préoccupé par la lenteur des changements.  « Vous devez garder à l’esprit qu’une coopération ne peut pas être parfaite du premier coup et que vous ne pourrez pas régler tous les problèmes », a-t-il lancé aux États Membres.  Il a souligné leur responsabilité de régler les défis et de lever les entraves au développement.  « Enlevez vos beaux habits, mettez les mains dans le cambouis, allez dans les villages; si une politique ne règle pas un problème, elle n’est pas utile », a-t-il tranché.  Il a reconnu que des ressources financières sont certes importantes, mais qu’elles ne sont pas toute la solution.  « La devise la plus importante c’est le capital humain », a-t-il conclu, en mettant en garde contre le gaspillage des ressources financières. 

En parlant du capital humain, la déléguée du Canada a prôné la tolérance et l’égalité entre les sexes.  « Si nous voulons agir différemment, nous devons mettre les femmes aux commandes du développement durable », a-t-elle dit. 

Son homologue de la République de Corée a dit que le succès des partenariats multipartites passe par un échange des bonnes pratiques et un renforcement des capacités dans des domaines prioritaires.  L’approche traditionnelle s’agissant de la coopération pour le développement, celle qui privilégie les gouvernements, ne marche tout simplement plus, a-t-il conclu.  « Nous devons établir un cadre juridique garantissant la participation du secteur privé à de tels partenariats. » 

De son côté, le représentant du Brésil a indiqué que toute coopération en matière de développement doit s’évaluer à l’aune des résultats obtenus. 

En Italie, ce sont trois entités juridiques multipartites qui œuvrent en faveur de la coopération au développement.  M. LUCA MAESTRIPIERI, Directeur général adjoint de la coopération internationale de l’Italie, a mentionné, d’abord, un comité intergouvernemental de la coopération qui englobe tous les échelons du gouvernement, avec un ministère qui assure la responsabilité principale et donne une direction stratégique pour tous les départements.  Ensuite, un conseil national pour la coopération, que M. Maestripieri décrit comme une « sorte de parlement pour la coopération, avec des représentants du gouvernement central, des régions, des autorités locales, de la société civile et des institutions financières ».  Il a un rôle consultatif par rapport aux documents stratégiques du gouvernement, mais peut aussi faire des propositions portées à l’attention des parties prenantes.  Enfin, une conférence de la coopération au développement, convoquée tous les trois ans, et qui s’est réunie à Rome en janvier dernier pour débattre publiquement de la sensibilisation aux sujets de la coopération au développement.  « Un thème qui n’est pas toujours populaire dans mon pays », a souligné le directeur.  Il a également donné l’exemple d’un groupe de travail migration et développement, qui a rassemblé des représentants des diasporas qui vivent en Italie avec la société civile, les autorités locales italiennes et des pays d’origine. 

En Suisse, il existe un mouvement pour la paix bleue qui s’occupe de créer des partenariats pour la gestion des bassins transfrontaliers, a déclaré M. JOHAN GELY, Chef de division et chef du programme mondial de l’eau, Agence suisse pour le développement et la coopération.  Au niveau mondial, seuls 40% de ces bassins font l’objet d’un accord entre États riverains, a-t-il observé, rappelant qu’entre 3 et 5 millions de personnes meurent de maladies véhiculées par l’eau chaque année.  « Ce n’est pas simple du tout de mettre en place des partenariats.  Il faut repenser les délimitations politiques et sectorielles », a-t-il expliqué.  Une coopération durable transfrontière autour de ces bassins n’est pas seulement importante pour l’eau, mais aussi pour l’énergie, les secteurs agricole, commercial et sécuritaire.

« Notre expérience montre que les partenariats ne sont pas toujours une réussite mais parfois nous avons du succès », a poursuivi M. Gely.  Pour lui, il n’est pas possible de travailler avec tout le monde, il faut choisir les bons interlocuteurs.  Avec le secteur privé notamment, il a recommandé de sélectionner « des représentants qui ne sont pas là uniquement pour faire du profit mais aussi pour obtenir des changements sociaux positifs ».  « Même chose avec les représentants politiques, il faut dialoguer avec le Ministre en charge de l’eau, mais aussi celui en charge des questions de sécurité, des affaires étrangères.  Dans chaque administration, il faut trouver des intermédiaires.  C’est un art ».  Concernant le rôle joué par le secteur privé, il a donné l’exemple de multinationales disposant de données utiles au gouvernement.  « On peut les impliquer dans le mécanisme de gestion des données transfrontières ». 

« Un partenariat multipartite, mais pour faire quoi? », s’est demandé M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives).  « Aider à la croissance économique? Au développement? Il faut se poser la question ».  Le délégué a rappelé la situation particulière des Maldives, état archipélagique qui compte plus de 200 îles, dont 188 sont habitées.  Le reste des îles sont consacrées au tourisme ou sont des réserves.  « Chaque île a besoin de services, d’un port, d’un hôpital, d’installations sanitaires et bancaires.  Le concept de bien commun doit donc être envisagé de manière très large. »  Pour lui, les partenariats public-privé, initiés depuis 2009, ont donné des résultats mitigés.  Il a donné l’exemple d’une expérience où le secteur privé a pu louer des îles entières pour le tourisme à condition qu’il fasse des routes.  « Il faut des mécanismes de contrôle », a-t-il prôné en demandant de s’interroger avant tout sur l’existence des institutions nécessaires pour encadrer et suivre les partenariats et, le cas échéant, sur leur capacité à surveiller ces développements.  Rebondissant sur ses propos, un représentant de l’ONG Reality for Africa a lui aussi souligné l’importance d’institutions efficaces et fonctionnelles pour mettre ces partenariats en œuvre. 

De son côté, la représentante d’une autre ONG a regretté que les réseaux de coopération reposent sur une gamme étroite de partenaires, se désolant aussi du manque d’implication des ONG et de la société civile.  « Les gouvernements doivent leur laisser une place », a-t-elle estimé.  La représentante d’USAID a également plaidé pour la création d’un environnement favorable à la société civile, « qui donne sa place au capital humain ».  « Pour nous, l’APD doit aider les pays à gérer leur propre développement. »  Elle a aussi indiqué que l’USAID essaie de changer sa culture de fonctionnement en collaborant avec le secteur privé et en essayant d’intégrer d’autres points de vue.  Le panéliste de la Suisse s’est quant à lui enthousiasmé pour le principe de destruction créative.  « C’est ce qui s’est passé pour le concept d’empreinte de l’eau.  C’est nous qui l’avons développé avant qu’il soit adopté par le parlement. »

Lors du dialogue avec la salle, Mme ALEXANDRA BOETHIUS, cofondatrice d’Impact Hub Genève et Accelerate 2030, a parlé du programme Accelerate 2030, cofinancé par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui réunit des partenaires au sein des organes des Nations Unies, mais aussi des investisseurs et des réseaux d’entrepreneurs pour mettre en œuvre les objectifs de développement durable.  Son organisation travaille avec des marchés émergents, et collabore avec des acteurs sur le terrain, ce qui « est la clef du succès ».  Pour elle, les entrepreneurs avancent vite, et ont besoin non seulement d’un environnement réglementaire adéquat mais aussi d’un écosystème, avec un accès à des financements.  Mme Boethius estime que c’est là qu’il faut faire preuve d’innovation.  Elle a appelé l’ONU à se saisir de ces solutions pour les mettre au service des objectifs de développement durable. 

Le représentant du Maroc s’est quant à lui demandé, de manière plus générale, si le niveau de coopération était en progression ou en recul.  « Pendant la première décennie pour le développement, les Nations Unies avaient demandé qu’1% du PIB des pays riches soit consacré à l’aide au développement. »  Au fil du temps, les institutions de prêts sont venues remplacer les pays.  Les seuils d’endettement des pays sont extrêmes du fait de cette absence de soutien des pays riches, a-t-il analysé en imaginant que « la Suède pourrait certainement allouer 1% à l’APD ».  Il a également appelé à réduire les écarts entre pays développés et en développement par le biais de la coopération technique.

Introduction à la session 3: « Améliorer la performance pour le développement durable: le rôle des politiques nationales de coopération en matière de développement. »

Pour introduire le sujet de cette troisième session, le Ministre délégué aux affaires générales du Maroc, M. LAHCEN DAOUDI, a mentionné la loi en cours d’élaboration dans son pays pour renforcer la coopération entre le secteur privé et le secteur public aux fins du développement durable.  Les objectifs de développement durable transcendent les générations, a-t-il dit pour souligner l’importance de cette coopération.  Il a détaillé la stratégie de son pays en la matière qui s’appuie sur un cadre juridique idoine.  « Nous voulons faire advenir un Maroc vert », a-t-il déclaré, ajoutant que la croissance annuelle du secteur agricole y est de 7%.  Le Ministre a également mentionné la construction d’une usine de dessalement à Agadir, avant de souligner l’acuité de la question de la gestion des déchets.  Les phosphates marocains seront une contribution importante au développement durable, a conclu M. Daoudi. 

À son tour, M. CHIENG YANARA, Secrétaire général du Conseil de la réhabilitation et du développement du Cambodge, a souligné la contribution positive de la coopération pour le développement pour son pays.  Le Cambodge, pays à revenu moyen, est très attaché au Programme 2030, a-t-il dit.  Il a souligné le rôle crucial de l’APD en appui des efforts nationaux en particulier dans le domaine des infrastructures.  M. Yanara a souligné la mise en place d’indicateurs et d’un cadre de suivi pour évaluer les résultats de la stratégie de développement de son pays.  Il a mentionné les défis qui subsistent au Cambodge tels que la pauvreté et les inégalités, avant de souligner la nécessité de disposer de statistiques plus détaillées sur la pauvreté.  « Nous devons mieux comprendre la dynamique de l’exclusion », a-t-il conclu. 

Cette session s’est poursuivie en trois dialogues parallèles pour favoriser un échange entre panélistes et délégations d’États Membres.

 

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