En cours au Siège de l'ONU

L’Assemblée générale prévoit une réunion de haut niveau sur la sécurité routière en 2022 et proclame le 18 juin Journée internationale de la lutte contre les discours de haine

Soixante-quinzième session ,
92e séance plénière – matin
AG/12348

L’Assemblée générale prévoit une réunion de haut niveau sur la sécurité routière en 2022 et proclame le 18 juin Journée internationale de la lutte contre les discours de haine

L’Assemblée générale a adopté aujourd’hui deux résolutions par lesquelles elle décide de tenir en 2022 une réunion de haut niveau sur l’amélioration de la sécurité routière dans le monde et de proclamer le 18 juin Journée internationale de la lutte contre les discours de haine. 

L’Assemblée a adopté sans vote un texte* aux termes duquel la réunion de haut niveau se tiendra immédiatement après le forum politique de haut niveau sur le développement durable organisé sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC). 

Le texte, qui a été adopté sans vote, tel que modifié par un amendement entériné par 81 voix pour, 36 voix contre et 30 abstentions, prévoit que la réunion de haut niveau aura pour thème « La sécurité routière à l’horizon 2030: garantir une décennie d’action et de réalisations ».  L’objectif est de combler les lacunes et de relever les défis, de mobiliser les dirigeants politiques, de promouvoir la collaboration multisectorielle et multipartite et d’évaluer les progrès accomplis dans la réalisation des cibles du Programme de développement durable à l’horizon 2030 relatives à la sécurité routière.  La réunion sera couronnée d’une déclaration « politique concise et pragmatique », qui aura obtenu un consensus préalable au terme de négociations intergouvernementales. 

L’Inde et Brunéi Darussalam, au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), ont salué cette réunion, rappelant que 1,3 million de personnes perdent la vie tous les ans dans des accidents de la route, dont beaucoup de cyclistes et de piétons.  « La sécurité routière est une question de santé publique », a ajouté Brunéi Darussalam.  

Auteur de l’amendement consistant à remplacer le paragraphe 11 de la résolution sur la participation des organisations de la société civile, le Royaume-Uni a expliqué qu’il s’agissait de faire revenir l’Assemblée générale à « l’approche consensuelle » des textes sur les modalités des réunions de haut niveau sur le VIH/sida, la cybercriminalité et la traite des êtres humains, sans oublier les textes similaires remontant à 2001. 

Il s’agissait aussi, a-t-il poursuivi, de corriger un libellé qui aurait privé de leur voix des partenaires « légitimes », ceux qui ont une vraie expérience de la sécurité routière, ceux qu’il faut écouter et ceux qui peuvent enrichir les débats avec leurs connaissances.  Nous n’avons enlevé en rien, a ajouté le Royaume-Uni, la faculté de vérifier la pertinence des organisations de la société civile.  Bien au contraire nous avons redonné le pouvoir de décision à l’Assemblée plutôt qu’à tel ou tel État Membre.  L’amendement offre la chance de prendre une décision collégiale sur qui on doit ou ne doit pas entendre et retire à un État ou un autre le pouvoir de censure.  

Cet amendement fonctionne parce que nous l’avons vu fonctionner, a martelé le Royaume-Uni, en citant l’exemple de « l’État » qui avait voulu bloquer pour « des raisons politiques » la participation d’une ONG à la réunion de haut niveau sur le VIH/sida.  L’Assemblée, a-t-il rappelé, a pu passer au vote et approuvé à une majorité écrasante l’idée d’entendre l’ONG en question. 

Le Royaume-Uni a été soutenu par la Slovénie qui, au nom de l’Union européenne, a également insisté sur la participation « importante » de la société civile, « priorité de premier rang pour l’UE ».  Le groupe CANZ -Australie, Canada, Nouvelle-Zélande- a lui aussi critiqué le libellé original, aux côtés des États-Unis.  En revanche pour la Chine, la première version représentait le consensus auquel étaient parvenus les États Membres.  La procédure d’approbation tacite qui permet aux ONG sans statut consultatif auprès de l’ECOSOC de prendre part aux travaux de l’Assemblée générale préserve, dans le même temps, la nature intergouvernementale des réunions, a-t-elle argué. 

« C’est un processus conforme à la pratique de l’Assemblée générale », a affirmé la Chine qui a cité plusieurs résolutions adoptées par consensus par le passé lesquelles ont, à ses yeux, réglé la question de la participation des ONG aux travaux de l’Assemblée générale.  Elle a donc voté contre un amendement « qui affaiblit le rôle des États Membres et sape un équilibre de plusieurs années », aux côtés de l’Iran, du Bélarus et de la Syrie. 

L’Assemblée a ensuite adopté sa résolution*** sur la « Lutte contre les discours de haine: promotion du dialogue interreligieux et interculturel et de la tolérance ».  Outre la proclamation du 18 juin comme Journée internationale de la lutte contre les discours de haine, le texte demande à son Président de convoquer une réunion informelle de haut niveau, le 18 juin 2022, à l’occasion de la commémoration de la première Journée. 

Cette réunion aura pour objectif « de contribuer à susciter un soutien politique en vue d’élaborer des stratégies permettant d’identifier, de traiter et de contrer le discours de haine aux niveaux national et mondial, en tenant compte, le cas échéant, de la Stratégie et du Plan d’action des Nations Unies pour la lutte contre les discours de haine ». 

L’Assemblée demande aussi aux États Membres d’engager des échanges afin de promouvoir les vertus du dialogue interreligieux et interculturel, du respect et de l’acceptation des différences, de la tolérance, du respect de la diversité, de la coexistence et de la cohabitation pacifiques et du respect des droits de l’homme, et de contrer la propagation de tout discours de haine qui constitue une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence.  Les États Membres, « auxquels il incombe au premier chef de lutter contre la discrimination et le discours de haine », sont également priés de promouvoir l’inclusion et l’unité dans les mesures prises pour lutter contre la pandémie de COVID-19. 

Au nom de l’Union européenne, la Slovénie a regretté l’accent mis exclusivement sur l’aspect religieux, en estimant qu’une approche globale comprenant tous les aspects de la discrimination contre des individus ou des groupes, aurait eu une plus grande portée.  Elle s’est dite déçue que toutes les propositions de l’UE n’aient pas été prises en compte notamment l’accent mis sur l’universalité des droits et des libertés fondamentales.  Une approche plus globale face à toutes les formes de discriminations aurait aussi permis d’éviter de nourrir « cette tendance à multiplier les journées internationales ». 

Le Royaume-Uni a critiqué un texte qui semble vouloir amoindrir le droit des peuples à contester l’action de leur gouvernement, alors que le groupe CANZ regrettait l’absence d’une mention des liens potentiels entre discours de haine et risques d’atrocités de masse.  La Fédération de Russie a accusé certaines délégations d’avoir insisté sur l’élimination de plusieurs parties de la version originale de la sécurité.  Enfin, le Saint-Siège a souligné le « distinguo crucial » entre le dialogue interculturel et le dialogue interreligieux, ce dernier, a-t-il souligné, étant essentiel à la promotion d’une paix durable et à la cohésion sociale.  

L’ONU n’a aucun mandat pour définir les cadres ou les objectifs du dialogue interreligieux, a-t-il dit, préoccupé par une mauvaise compréhension de la nature même d’un tel dialogue.  Le Saint-Siège a donc jugé primordial de promouvoir ce concept ainsi que le rôle des dirigeants religieux au sein de l’Organisation. « Évitons les divisions et privilégions les ponts », a-t-il conseillé. 

L’Assemblée générale a prévu une autre séance publique le vendredi 23 juillet à partir de 10 heures pour examiner les progrès dans la lutte contre le paludisme et se prononcer sur plusieurs résolutions. 

*A/75/L.109 

**A/75/L.114 

***A/75/L.115 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Réunion de gestion: l’ECOSOC accorde le statut consultatif à 431 ONG, mais demande le réexamen du dossier de Abaza-Abkhaz Ethnos « Alashara »

Session de 2021,
12e séance – matin
ECOSOC/7062

Réunion de gestion: l’ECOSOC accorde le statut consultatif à 431 ONG, mais demande le réexamen du dossier de Abaza-Abkhaz Ethnos « Alashara »

Au premier des deux jours de son « débat consacré à la gestion », le Conseil économique et social (ECOSOC) a adopté ce matin trois résolutions et six décisions, en accordant notamment le statut consultatif à 431 ONG.  Il a ainsi suivi les recommandations de son Comité des organisations non gouvernementales, sauf pour un dossier, celui de l’ONG russe Abaza-Abkhaz Ethnos « Alashara » qu’il a demandé au Comité de réexaminer alors que le statut consultatif spécial avait été recommandé.  Le Conseil est passé par un vote pour adopter cette décision présentée par la Géorgie et qui a reçu 21 avis favorables, 7 contre (Botswana, Chine, Éthiopie, Fédération de Russie, Nicaragua, République islamique d’Iran et Zimbabwe) et 17 abstentions.  

La Géorgie a expliqué ce qui l’avait poussée à faire cette demande: elle n’avait pas eu la latitude d’interroger l’organisation lors de l’examen de son dossier devant le Comité.  Elle a aussi mis en avant la « confusion » entourant le travail de l’organisation, « comme le démontre la terminologie qu’elle utilise au sujet de la Géorgie et de ses régions ».  Cette ONG considère que les régions géorgiennes d’Abkhazie et d’Ossétie ne font pas partie du territoire de la Géorgie, a aussi remarqué l’Ukraine qui a appuyé cette demande.  La Lettonie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont dit partager cet avis.  

La Fédération de Russie a quant à elle marqué sa surprise face aux actions de la délégation géorgienne, avant de donner des informations sur l’ONG concernée et d’exprimer son embarras par rapport au Comité des ONG.  Renvoyer ce dossier devant le Comité reviendrait à dénigrer le travail de cet organe subsidiaire de l’ECOSOC, a-t-elle fait remarquer.

Le Comité des ONG est composé de 19 membres qui examinent les demandes de statut consultatif auprès de l’ECOSOC et les demandes de reclassement présentées par des organisations.  Trois statuts sont possibles: le statut consultatif général, le statut consultatif spécial et l’inscription sur la Liste.  

Ce matin, l’ECOSOC a aussi examiné le rapport du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti, dont le mandat a été prolongé.  Pays où 4,4 millions de personnes -environ 40% de la population- ont besoin d’assistance humanitaire, Haïti a, dans ces moments difficiles, une opportunité de renverser l’orthodoxie et rechercher des solutions durables, a dit le Représentant spécial adjoint du Secrétaire général.

À la suite de l’assassinat du Président Jovenel Moïse le 7 juillet dernier, Haïti a « évité le pire », a assuré la délégation haïtienne.  Le Gouvernement haïtien, a-t-il dit, souscrit à l’appel au dialogue constructif lancé par le Groupe consultatif aux acteurs politiques en vue des élections présidentielle, législatives et locales.  Il soutient aussi son appel concernant l’amélioration de la cohérence et de la coordination de l’appui international afin que l’aide au développement soit plus efficace.  

Le représentant haïtien a toutefois constaté qu’en dépit des 16 missions effectuées depuis 20 ans par le Groupe consultatif sur le terrain et des nombreux rapports soumis à l’ECOSOC, les attentes en matière de résultats, tant de la communauté internationale que de la population haïtienne, « n’ont pas été comblées ».

Parmi les autres questions à l’ordre du jour de ce mercredi, les membres de l’ECOSOC ont examiné les « répercussions économiques et sociales de l’occupation israélienne sur les conditions de vie du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe dans le Golan syrien occupé ».  Cette question a suscité des commentaires des États-Unis, d’Israël, de la République arabe syrienne et de l’observateur de l’État de Palestine.

Le débat consacré à la gestion du Conseil économique et social, présidé par M. Collen Vixen Kelapile (Botswana), se poursuit demain, 22 juillet, dès 10 heures.

DÉBAT CONSACRÉ À LA GESTION

Questions de coordination, questions relatives au programme et autres questions  

Pays africains qui sortent d’un conflit 

Le Président de la Commission de consolidation de la paix (CCP), M. MOHAMED FATHI AHMED EDREES (Égypte), a noté qu’en 2020, sur les 15 contextes nationaux et régionaux couverts par la Commission, 12 étaient en Afrique.  Le renforcement des partenariats de la CCP avec les organisations régionales et sous-régionales en Afrique s’est illustré par une participation accrue de l’Union africaine (UA) et d’autres représentants aux discussions de la Commission.  Au cours de la réunion consultative informelle qui s’est tenue entre le Conseil de paix et de sécurité de l’UA et la CCP en octobre 2020, les deux organismes ont reconnu les défis sans précédent posés par la pandémie de COVID-19 dans les pays et régions examinés par la Commission.  Ils ont appelé à un soutien plus fort pour les efforts de reconstruction et de développement postconflit, sous la direction de l’UA.

De même, la CCP a également renforcé les synergies avec le Fonds pour la consolidation de la paix dans le cadre du soutien aux efforts de consolidation de la paix dans les pays touchés par des conflits.  En conclusion, M. Edrees a réitéré l’engagement de la Commission à intensifier ses efforts pour continuer de rapprocher les États Membres et les partenaires pour des réponses appropriées aux défis urgents et multidimensionnels, en particulier dans les contextes de conflit.

Le Coordonnateur résident et Coordonnateur humanitaire des Nations Unies au Soudan du Sud, M. ARAFAT JAMAL, a ensuite présenté le chapitre 2 du rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre d’un appui intégré, cohérent et coordonné au Soudan du Sud par les organismes des Nations Unies (E/2021/63).  

L’ECOSOC a ensuite décidé (E/2021/L.32) que le Secrétaire général devra lui présenter pour examen, à sa session de 2022, un rapport sur la mise en œuvre d’un appui intégré, cohérent et coordonné au Soudan du Sud par les organismes des Nations Unies.

Développement durable au Sahel 

Le Coordonnateur spécial pour le développement du Sahel, M. MAR ABDOULAYE DIENG, a présenté le chapitre 3 du rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre d’un appui intégré, cohérent et coordonné au Soudan du Sud par les organismes des Nations Unies (E/2021/63).   

Programme à long terme d’aide à Haïti 

M. ROBERT KEITH RAE (Canada), Président du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti, a présenté son rapport (E/2021/65).  Il a affirmé que les récents événements en Haïti nous ont tous profondément touchés et nous rappellent l’importance de continuer à travailler main dans la main avec le pays et le peuple haïtien pour un avenir plus pacifique, plus prospère et plus démocratique.  Il a relevé que les travaux du Groupe, cette année, ont continué à être impactés par la pandémie de COVID-19.  Ainsi, le Groupe n’a pu entreprendre ses visites annuelles à Washington D.C. et en Haïti.  Malgré ces défis, le Groupe est resté actif tout au long de l’année et a mené ses travaux en organisant une série de réunions thématiques virtuelles.  Il a aussi accueilli la République dominicaine comme membre.  

Préoccupé par la situation en Haïti, M. Rae a estimé que c’est maintenant qu’il faut agir.  Il est donc urgent que les décideurs haïtiens, avec le soutien constant de l’ONU et de ses partenaires internationaux, agissent rapidement et efficacement pour faire face aux difficultés du pays, surtout que la pandémie de COVID-19 a aggravé une situation déjà difficile et menace même d’effacer les gains de développement et de sécurité des 15 dernières années.  Enfin, le Groupe a encouragé le système des Nations Unies à soutenir les efforts de riposte à la COVID-19, en coordination avec le Gouvernement. 

Il est vrai que sur le plan humanitaire, quelque 4,4 millions de personnes -environ 40% de la population du pays- ont besoin d’assistance humanitaire.  Cette situation désastreuse est aggravée par la situation économique difficile et l’insécurité croissante.  Au vu de l’impasse politique actuelle, a suggéré le Président du Groupe de contact, il est urgent d’initier un dialogue entre les Haïtiens de tous les secteurs et points de vue pour tracer la voie à suivre pour leur pays.

M. BRUNO GEORGES LEMARQUIS, Représentant spécial adjoint du Secrétaire général en Haïti, s’exprimant par visioconférence, a déclaré que l’assassinat du Président s’est produit dans un contexte entaché de défis insurmontables.  En effet, plusieurs milliards de dollars ont été investis en Haïti au cours des dernières décennies, mais les principaux indicateurs de développement ont continué de régresser.  Il a souhaité que la communauté internationale s’éloigne de l’aide d’urgence, des approches à court terme et des approches de projet pour adopter des solutions à long terme pouvant avoir un impact plus important.  Il a plaidé pour que ce moment difficile pour les Haïtiens soit une opportunité de renverser l’orthodoxie et rechercher des solutions durables. 

M. ANTONIO RODRIGUE (Haïti) a tout d’abord assuré que son pays a « évité le pire », à la suite de l’assassinat du Président Jovenel Moïse, le 7 juillet dernier.  Un gouvernement a été installé hier pour garantir la continuité de l’État et préparer les prochaines élections, a-t-il indiqué, ajoutant que la désignation d’un nouveau Président est fixée au 7 février 2022.  Dans ce contexte, il a noté que le Groupe consultatif ad hoc de l’ECOSOC sur Haïti dresse un tableau « particulièrement sombre » de la situation du pays, confronté à des tensions politiques et sociales exacerbées par la pandémie de COVID-19.  Le Gouvernement haïtien, a-t-il dit, souscrit à l’appel au dialogue constructif lancé par le Groupe consultatif aux acteurs politiques en vue des élections présidentielle, législatives et locales.  Il a également soutenu son appel concernant l’amélioration de la cohérence et de la coordination de l’appui international afin que l’aide au développement soit plus efficace.  

Le représentant a toutefois constaté qu’en dépit des 16 missions effectuées depuis 20 ans par le Groupe consultatif sur le terrain et des nombreux rapports soumis à l’ECOSOC, les attentes en matière de résultats, tant de la communauté internationale que de la population haïtienne, « n’ont pas été comblées ».  En effet, a-t-il relevé, les indicateurs socioéconomiques du pays sont toujours en deçà des niveaux acceptables et la population reste en proie à des difficultés énormes, 40% de celle-ci, soit plus de 4 millions de personnes, étant en situation d’insécurité alimentaire.  Or l’aide publique au développement s’est contractée, en raison principalement de la « fatigue » des donateurs, ce qui a entraîné une réduction des dépenses liées au développement.  

Pour le délégué, le Groupe doit repenser sa stratégie ou développer des mécanismes de persuasion afin que l’aide au développement soit en réelle adéquation avec les besoins.  Il convient ainsi de renoncer au principe de la « taille unique » parce que chaque pays a ses spécificités en termes de besoins en développement, a-t-il plaidé, souhaitant que le Groupe facilite un « nouveau partenariat » avec Haïti afin que les ODD ne soient pas un simple « vœu pieux » exprimé par la communauté internationale.   

Le Mexique a souhaité que le Conseil s’attaque aux défis de développement d’Haïti, lesquels ont été rendus plus complexes par la pandémie.  Il s’est félicité du plan stratégique des Nations Unies pour aider Haïti à réaliser le Programme 2030, saluant les efforts de l’équipe de pays pour créer des emplois pour les femmes, les jeunes et d’autres groupes vulnérables.  

L’ECOSOC a par la suite adopté une résolution (E/2021/L.29) en vertu de laquelle il a décidé de proroger le mandat du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti jusqu’à la conclusion de sa session de 2022, afin de pouvoir suivre la situation de près et de formuler des conseils concernant la stratégie de développement à long terme d’Haïti en vue de favoriser le relèvement, la reconstruction et la stabilité du pays sur les plans économique et social.  Une attention particulière est demandée, dans ce texte, à la nécessité d’assurer un appui international cohérent et durable à Haïti, dans le respect de ses priorités nationales de développement à long terme.

Après cette adoption, les États-Unis ont demandé que les dirigeants haïtiens mettent de côté leurs divergences et relèvent les défis de longue date du pays. 

Rapports des organes de coordination 

L’ECOSOC a pris note du rapport du Comité du programme et de la coordination sur sa soixante et unième session (1er–25 juin 2021) (A/76/16).

Projet de budget-programme pour 2022 A/76/6 (Introduction) 

Le Conseil a également pris note du projet de budget-programme pour 2022.

Organisations non gouvernementales 

L’ECOSOC a tout d’abord adopté une décision (E/2021/L.25) proposée par la Géorgie, par 21 voix pour, 7 contre (Botswana, Chine, Éthiopie, Fédération de Russie, Nicaragua, République islamique d’Iran et Zimbabwe) et 17 abstentions, par laquelle il décide de retourner la demande de l’ONG International Association for the Development of the Abaza-Abkhaz Ethnos « Alashara » au Comité chargé des ONG.  Cette organisation verra son dossier à nouveau examiné pour un complément d’informations.

En présentant le projet de décision, la Géorgie a argué qu’elle n’avait pas eu la latitude d’interroger l’organisation lors de l’examen de son dossier devant le Comité des ONG.  Pour la délégation, il y a confusion sur le travail de cette organisation, comme le démontre la terminologie qu’elle utilise au sujet de la Géorgie et de ses régions.  « La question ainsi soulevée ne modifie en rien notre attachement à la participation des ONG aux travaux des Nations Unies », a souligné la délégation.  L’Ukraine a, elle aussi, dit soutenir la participation des ONG au travail des Nations Unies, mais elle a appuyé la demande de la Géorgie, puisqu’il apparaît que cette ONG considère que les régions géorgiennes d’Abkhazie et d’Ossétie ne font pas partie du territoire de la Géorgie.  Pour ces mêmes raisons, la Lettonie a appuyé cet avis.  Les États-Unis, qui prennent part aux travaux du Comité des ONG, ont dit soutenir ce projet de décision à la lumière de nouvelles informations reçues, un avis renforcé par le Royaume-Uni.  

La Fédération de Russie s’est dite surprise par les actions de la délégation géorgienne.  Elle a affirmé que l’ONG œuvrant pour le développement de l’ethnie Abaza-Abkhaze « Alashara » est enregistrée en Fédération de Russie et travaille principalement dans ce pays.  Son siège est à Saint-Pétersbourg et elle n’a aucun bureau dans les régions mentionnées comme le laisserait croire la Géorgie, a assuré la délégation russe.  Renvoyer ce dossier devant le Comité des ONG reviendrait aussi à dénigrer le travail du Comité, a argumenté la Fédération de Russie qui avait demandé que le projet de décision soit rejeté. 

Ensuite, l’ECOSOC a adopté, tel qu’amendée par la décision présentée par la Géorgie, la décision I proposée par le Comité des ONG.  Le Conseil a ainsi décidé: d’accorder le statut consultatif à 431 organisations non gouvernementales; d’en reclasser trois, qui passent du statut consultatif spécial au statut consultatif général; d’en reclasser une autre, qui passe du statut d’organisation inscrite sur la Liste au statut consultatif général.  En vertu de la même décision, l’ECOSOC a décidé de prendre acte du changement de nom de sept ONG; de prendre acte des rapports quadriennaux de 604 ONG; de clore, sans préjudice de nouvelles demandes, l’examen des demandes d’admission au statut consultatif présentées par 34 ONG qui n’ont pas répondu aux questions qui leur ont été posées à deux sessions consécutives; et enfin, de prendre acte de la demande de trois ONG de retirer leur demande d’admission au statut consultatif.

Aux termes du projet de décision II, le Conseil prend note du rapport du Comité chargé des ONG sur les travaux de sa session ordinaire de 2021 (New York, 17-27 mai et 7 juin 2021) (E/2021/32 (Part I)).

Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies

Mme KEISHA ANIYA MCGUIRE (Grenade) a présenté le rapport du Secrétaire général sur l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’ONU (A/76/68).   

L’ECOSOC a ensuite adopté par 19 voix pour, zéro contre et 29 abstentions, la résolution intitulée « Appui aux territoires non autonomes par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies » (E/2021/L.31).  Par ce texte, le Conseil économique et social prend note du rapport de son Président, prend acte du rapport du Secrétaire général et recommande que tous les États redoublent d’efforts au sein des institutions spécialisées et des autres organismes des Nations Unies dont ils sont membres afin d’assurer l’application intégrale et effective de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, qui figure dans la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale.  

Les États-Unis n’ont pas soutenu ce texte, estimant en ce qui les concerne que c’est la Constitution d’un pays qui détermine la manière avec laquelle sont gérés les territoires sous son contrôle.  La Fédération de Russie a expliqué s’être abstenue « par tradition », étant donné qu’elle considère cette question « superflue » dans le travail de l’ECOSOC.  Pour l’Argentine, ce texte ainsi adopté doit s’appliquer aux territoires visés. 

Répercussions économiques et sociales de l’occupation israélienne sur les conditions de vie du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe dans le Golan syrien occupé 

M. TARIK ALAMI, Directeur des questions émergentes et des conflits à la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a présenté le rapport du Secrétaire général relatif aux répercussions économiques et sociales de l’occupation israélienne sur les conditions de vie du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe du Golan syrien occupé (E/2021/73).  Le rapport fournit des informations sur les faits nouveaux pertinents qui sont survenus au cours de la période à l’examen (1er avril 2020-31 mars 2021).  Il rend compte des pratiques et mesures auxquelles Israël continue de recourir, en particulier celles qui constituent des violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme et qui ont des répercussions sur la situation économique et sociale des populations vivant sous l’occupation militaire israélienne.

Les États-Unis ont dénoncé un rapport déséquilibré qui détourne l’ECOSOC de son travail et n’améliore en rien la situation sur le terrain pour les Israéliens et les Palestiniens.  Pour Israël, ce rapport n’apporte rien de nouveau et réduit même les perspectives de coopération entre les parties.  Selon la délégation, l’accent est mis sur Israël pour expliquer les problèmes palestiniens, alors que la plupart de ces problèmes sont dus au système de patriarcat en vigueur chez les Palestiniens. 

La République arabe syrienne a dénoncé les pratiques de la Puissance occupante qui a récemment confisqué des terres d’agriculteurs syriens dans le Golan afin d’y installer des éoliennes qui produiront de l’électricité pour les populations israéliennes.  La délégation a demandé aux Nations Unies de faire pression sur Israël afin qu’il mette fin aux pratiques racistes et discriminatoires contre les populations syriennes dans le Golan occupé. 

L’observateur de l’État de Palestine a rappelé que, comme tous les autres peuples du monde, les Palestiniens sont confrontés à la pandémie de COVID-19.   Mais compte tenu de l’occupation israélienne, cette crise vient aggraver les difficultés économiques et sociales auxquelles font face les populations des territoires palestiniens, a-t-il souligné, jugeant que cette situation n’est « pas tenable ».  Il a appelé à des mesures internationales pour tenir Israël comptable de ses actes.  C’est une condition sine qua non pour la réalisation des droits inaliénables du peuple palestinien, notamment son droit au développement, a-t-il insisté.  Selon lui, la communauté internationale doit aussi interdire les exportations de produits issus des territoires palestiniens occupés afin d’aider la Palestine à se développer dans le droit fil des ODD.  Ces objectifs ne pourront être atteints sous l’occupation, a-t-il averti, exprimant sa reconnaissance aux pays qui viennent en aide au peuple palestinien et le conforte dans sa conviction d’une paix juste, dans le cadre d’un État indépendant vivant côte à côte avec Israël sur les frontières de 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale.    

Coopération régionale 

Mme ROSA MALANGO, Directrice du Bureau des Commissions régionales à New York, a présenté le rapport du Secrétaire général sur la coopération régionale dans les domaines économique et social et les domaines connexes (E/2021/15 et E/2021/15/Add.1).  Le rapport s’attache à démontrer toute l’importance d’une action au niveau régional pour un soutien efficace à la riposte à la COVID-19 et au relèvement postpandémie et pour la relance de la réalisation du Programme 2030.  On y fait le point sur les progrès accomplis dans la réalisation du Programme 2030 dans les régions et l’on y présente des leviers de transformation (tels que le financement du développement, la numérisation inclusive ou la coopération régionale et transfrontalière) et des initiatives régionales en cours qui paraissent propres à favoriser des trajectoires de relèvement inclusives, résilientes et durables qui contribuent à la promotion du Programme 2030.   

L’ECOSOC a ensuite adopté la décision I contenue dans le rapport, notant ainsi le fait qu’à sa soixante-neuvième session, tenue les 20 et 21 avril 2021, la Commission économique pour l’Europe a approuvé le Guide des pratiques optimales de récupération et d’exploitation du méthane provenant des mines de charbon désaffectées.  L’ECOSOC a recommandé une large diffusion de ce guide, invitant les États Membres de l’ONU, les organisations internationales et les commissions régionales à envisager la possibilité de prendre des mesures propres à en assurer l’application à l’échelle mondiale.  Il a aussi proposé de recommander son application à l’échelle mondiale.

Par la décision II, l’ECOSOC a noté qu’à cette même session, la Commission économique pour l’Europe a approuvé la version actualisée de la Classification-cadre des Nations Unies pour les ressources de 2019 et recommandé une large diffusion de cette version actualisée.  Le Conseil économique et social a de ce fait invité les États Membres de l’ONU, les organisations internationales et les commissions régionales à envisager la possibilité de prendre des mesures propres à en assurer l’application à l’échelle mondiale.

Questions sociales et questions relatives aux droits de l’homme

Droits de l’homme   

Le Chef du Bureau des droits de l’homme du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, M. CRAIG MOKHIBER, a présenté les points saillants du rapport du Comité des droits des personnes handicapées pour ses vingt et unième session (11 mars-5 avril 2019), vingt-deuxième session (26 août-20 septembre 2019) et vingt-troisième session (17 août-4 septembre 2020).

Application et suivi des textes issus des grandes conférences et réunions au sommet organisées par les Nations Unies 

Examen et coordination de l’application du Programme d’action en faveur des pays les moins avancés pour la décennie 2011-2020  

Le Conseil économique et social a enfin adopté une résolution intitulée « Programme d’action en faveur des pays les moins avancés pour la décennie 2011-2020 » (E/2021/L.28).  En vertu de ce texte, présenté par la Guinée, au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), l’ECOSOC prend acte du rapport du Secrétaire général sur l’application du Programme d’action en faveur des pays les moins avancés pour la décennie 2011-2020 et invite les partenaires de développement, les organisations internationales et les autres parties prenantes à aider les pays les moins avancés à se relever et continuer de mettre en œuvre le Programme d’action d’Istanbul en faveur des pays les moins avancés pour la décennie 2011-202011; le Programme de développement durable à l’horizon 2030, et le Programme d’action d’Addis-Abeba issu de la troisième Conférence internationale sur le financement du développement.  

En outre, l’ECOSOC demande que la coopération internationale soit renforcée, notamment grâce à l’application dans son intégralité du Règlement sanitaire international (2005), en vue de contenir, d’atténuer et de vaincre la pandémie de COVID-19. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: clôturant le débat de haut niveau, M. Liu Zhenmin note que le succès du Programme 2030 est lié aux engagements à « ne laisser personne de côté »

Session de 2021,
11e séance, matin & après-midi
ECOSOC/7061

ECOSOC: clôturant le débat de haut niveau, M. Liu Zhenmin note que le succès du Programme 2030 est lié aux engagements à « ne laisser personne de côté »

Au dernier jour du débat de haut niveau 2021 du Conseil économique et social (ECOSOC), M. Liu Zhenmin, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a estimé que le succès du Programme de développement durable à l’horizon 2030 se mesurera à la façon dont nous respectons les engagements à « ne laisser personne de côté ».  Ces engagements sont réaffirmés dans la Déclaration ministérielle adoptée hier par le forum politique de haut niveau pour le développement durable, que l’ECOSOC a entérinée cet après-midi.

L’un des messages forts de la journée et de la session du forum politique aura été de considérer le Programme 2030 comme La feuille de route pour se remettre de la pandémie de COVID-19.  C’est ce qu’a relevé M. Liu en soulignant le besoin d’avoir un « plan mondial » pour que tous les pays se remettent ensemble de la pandémie.  Il a recommandé pour ce faire de mobiliser des ressources financières et de partager les connaissances et technologiques. 

Dans sa déclaration de clôture, le Président de l’ECOSOC, M. Munir Akram, a salué l’adoption par consensus de la Déclaration ministérielle.  Il a souhaité que l’ECOSOC s’appuie sur cette convergence et ce consensus, au cours de l’année prochaine et de la Décennie d’action, pour mettre en œuvre le Programme 2030.  

Même si le consensus a prévalu, trois amendements proposés par la Fédération de Russie ont été rejetés, comme la veille lors de l’adoption de la Déclaration par le forum politique de haut niveau.  L’amendement au paragraphe 20 n’a été soutenu que par 3 États (Arabie saoudite, Arménie et Fédération de Russie), alors que 38 s’y sont opposés et 3 se sont abstenus (Angola, Îles Salomon et Madagascar).  L’amendement du paragraphe 25 a été rejeté par 39 membres de l’ECOSOC, soutenu par 2 États (Arabie saoudite et Fédération de Russie) alors que 2 autres se sont abstenus (Angola et Madagascar).  Enfin, l’amendement au paragraphe 36 voté par deux États (Arabie saoudite et Fédération de Russie) a été rejeté par 39 États et 2 abstentions (Angola et Madagascar).  En présentant ces amendements, le représentant russe a déclaré s’en tenir aux mêmes explications fournies la veille à la clôture du forum politique de haut niveau pour le développement durable.  La délégation avait par exemple déploré le fait que le paragraphe 20 accorde une importance à certaines questions au détriment d’autres, sapant ainsi le principe d’équilibre entre les trois dimensions du développement durable, tel que prescrit par le Programme 2030.  

De son côté, la délégation des États-Unis s’est inquiétée des insuffisances du libellé de la Déclaration.  Elle a aussi souhaité le retrait du paragraphe 29 mais sa proposition a été rejetée par 27 pays, alors que seuls 3 États y ont souscrit (Australie, Canada et États-Unis) et 17 se sont abstenus.  L’Ukraine s’est pour sa part dissociée du paragraphe 11 de la Déclaration, estimant que l’examen volontaire national de la Fédération de Russie de l’an dernier s’était fait en violation de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, car l’exposé avait présenté la Crimée comme un territoire russe.  Parmi les autres délégations qui avaient des réserves, la République islamique d’Iran s’est dissociée des « parties de la Déclaration qui contreviennent aux valeurs de la société iranienne ».   

En matinée, l’ECOSOC a tenu une table ronde sur le thème « renforcer l’ECOSOC à son soixante-quinzième anniversaire pour une reprise durable et résiliente après la pandémie de COVID-19 », l’occasion d’entendre des suggestions pour renforcer l’efficacité du Conseil.  C’est ainsi que l’ancienne Ministre des affaires étrangères de l’Équateur, Mme Maria Fernanda Espinosa, a plaidé pour un ECOSOC fort, ayant une interaction plus étroite avec la Deuxième Commission -la commission économique et financière de l’Assemblée générale- et un mécanisme de coordination plus robuste avec cette dernière.  En plus d’une meilleure répartition des compétences avec l’Assemblée, le Vice-Premier Ministre d’Espagne a souhaité une coopération accrue entre l’ECOSOC et la société civile.  

Cette table ronde a été l’occasion pour l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse d’alerter sur le fossé qui se creuse entre les jeunes et les gouvernements.  Mme Jayathma Wickramanayake a loué le forum des jeunes de l’ECOSOC, mais a avoué que « la soif de participation et de réussite des jeunes est inextinguible ».  Elle a donc demandé que les jeunes ne soient pas cantonnés aux sujets qui les concernent.  Autre proposition avancée par le Président de l’ECOSOC pour la réalisation des ODD, le Conseil devrait créer un mécanisme capable de suivre de manière plus scientifique la mise en œuvre des 17 objectifs et de leurs 169 cibles.  Il a ainsi suggéré de convoquer une autre conférence au sommet pour convenir de la structure et du contenu d’une nouvelle entité « plus dynamique et équitable » de coopération économique internationale.

Le débat de l’après-midi a offert l’occasion à la société civile notamment d’envisager les scénarios possibles concernant le redressement après la pandémie.  La Directrice générale de Lands for Life n’a pas vu d’autre solution pour « reconstruire en mieux » que de « reconstruire différemment », en alignant « durabilité et équité ».  Il faut se relever « intelligemment », a ajouté la Secrétaire d’État allemande Rita Schwarzeluehr-Sutter, qui a appelé à rendre nos sociétés plus résilientes, nos économies plus vertes et nos politiques climatiques plus efficaces.  Le problème, selon Bertrand Piccard, fondateur et Président de Solar Impulse Foundation, c’est l’écart énorme entre ceux qui dirigent et ceux qui sont aux prises avec la réalité de l’élément naturel.  Il a assuré que sa fondation reste « plus terre à terre », tandis que l’Alliance mondiale des groupes volontaires a attiré l’attention sur la force que représente 1 milliard de bénévoles dans le monde.

Le principal défi des 10 prochaines années sera l’impact de la quatrième révolution industrielle, a quant à lui estimé M. Felix Dodds de l’Université de Caroline du Nord aux États-Unis.  Il a certes reconnu les chances que présentent l’intelligence artificielle, l’automatisation, l’analyse des données, la réalité virtuelle et augmentée, les « blockchains » et la biotechnologie, tout en prévenant de leurs risques pour l’humanité en cas de mauvais usage.

L’ECOSOC se réunira à nouveau la semaine prochaine, les 21 et 22 juillet, pour tenir la dernière réunion de gestion de la session 2021.  L’organisation de la session de 2022 du Conseil se tiendra quant à lui le matin du 23 juillet.

DÉBAT DE HAUT NIVEAU - E/2021/33, E/2021/60, E/2021/61, E/2021/62

Présentation des rapports

Le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. LIU ZHENMIN, a présenté, dans un premier temps, le rapport du Secrétaire général sur le thème de l’ECOSOC de cette année (E/2021/62) « Une reprise durable et résiliente après la pandémie de maladie à coronavirus 2019 (COVID-19), qui favorise les dimensions économique, sociale et environnementale du développement durable: ouvrir une voie inclusive et efficace vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 dans le contexte de la décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable ».  Le rapport explore les principaux enseignements de la pandémie de COVID-19 et propose des idées pour une reprise durable et résiliente qui nous emmène dans le monde envisagé par le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Le rapport souligne que la pandémie de COVID-19 a mis en évidence des problèmes systémiques et interdépendants.  Pour récupérer durablement, le rapport définit des étapes spécifiques.  Il est tout d’abord question de solidarité internationale avec l’urgence que tous les pays aient accès aux vaccines contre la COVID-19.  Pour les pays en développement, un financement d’urgence devrait être mis à disposition.  Le Secrétaire général mise également, dans le rapport, sur un système de soins de santé primaires solide dans chaque pays et pour tout le monde.  L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a estimé que la réalisation de la couverture sanitaire universelle pourrait sauver 100 millions de vies d’ici à 2030.  Il est aussi question de protection sociale.  Quelque 190 pays et territoires ont dû introduire ou adapter des mesures de protection sociale pour répondre à la pandémie.  Il est question de capitaliser sur cette dynamique et de construire des systèmes de protection sociale qui soient inclusifs.

En outre, le rapport indique que des mesures pourraient apporter des gains économiques cumulés de 26 000 milliards de dollars d’ici à 2030 telles que l’accélération de la transformation structurelle des systèmes énergétiques, un développement urbain plus intelligent, une plus grande importance accordée à l’utilisation durable des terres et à la gestion de l’eau, ou encore la transition vers une économie industrielle circulaire.  Ces stratégies pourraient également générer plus de 65 millions d’emplois supplémentaires sobres en carbone d’ici à 2030.  Le rapport suggère enfin d’exploiter le potentiel des technologies numériques, notamment dans les pays en développement.

Le second rapport du Secrétaire général présenté par M. Liu porte sur les « effets à long terme des tendances économiques, sociales et environnementales actuelles sur la réalisation des objectifs de développement durable » (E/2021/61).  Le rapport décrit comment des actions mondiales coordonnées pourraient atteindre les objectifs de développement durable.

Ce rapport présente un scénario basé sur des actions intégrées pour réaliser le Programme 2030, accompagner la numérisation, lutter contre les changements climatiques et faire avancer la reprise post-COVID-19.

Si elles sont bien faites, les actions dans un domaine entraîneront des progrès dans les autres domaines, puisque le rapport décrit un monde de plus en plus high-tech, interconnecté et axé sur l’éducation, la science et la technologie.  Le Secrétaire général montre également que nous pourrions parvenir à une baisse de l’utilisation mondiale de l’énergie et des ressources, malgré la rapidité de l’augmentation du niveau de vie.  Cependant, cela nécessitera une coopération mondiale renforcée, et dans l’immédiat, sur la réponse à la COVID-19.  Les actions proposées par le rapport peuvent être prises par les gouvernements, les entreprises, la société civile, et nous tous, a conclu M. Liu.

Le Président du Comité des politiques de développement, M. JOSÉ ANTONIO OCAMPO, a ensuite présenté le rapport (E/2021/33) de la vingt-troisième session du Comité qui s’est tenue du 22 au 26 février 2021.  Le Comité a recommandé des domaines d’action prioritaires, pour le relèvement post-COVID-19.  Il y a d’abord le besoin de garantir des vaccinations universelles rapides, non seulement grâce à un soutien financier, mais aussi grâce à des dispositions pour mobiliser la production mondiale de vaccins en supprimant les obstacles créés par les droits de propriété intellectuelle.  À cet égard, le Comité a approuvé la proposition soumise au Conseil de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) par l’Inde et l’Afrique du Sud pour une renonciation à certaines dispositions de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce dans le cadre de la prévention et du traitement de la COVID-19.  Le Comité a aussi plaidé pour un soutien financier accru aux pays en développement pour faire face aux conséquences économiques de la COVID-19 et assurer un développement durable et résilient face aux changements climatiques.  Il est également question d’un allégement efficace de la dette des pays en développement, en particulier des pays les moins avancés (PMA) et de ceux qui sont en situation critique d’endettement.

Par ailleurs, le Comité a souligné l’importance de la transformation structurelle des économies pour le développement durable, appelant à avoir des gouvernements qui promeuvent activement le développement des capacités productives.  Dans ce contexte, le système multilatéral doit soutenir les efforts des pays pour assurer la transformation structurelle, y compris en garantissant une marge de manœuvre politique.  Le Comité a également fait des recommandations sur l’assistance financière pour l’adaptation aux changements climatiques et le renforcement de la résilience, pour le renforcement de la protection sociale et pour remédier aux échecs de l’éducation et des inégalités numériques, entre autres.

En outre, la complexité du défi auquel sont confrontés les PMA a été mise en évidence par l’étude approfondie sur l’impact de la COVID-19 sur la catégorie des PMA, entreprise par le Comité dans le cadre du mandat reçu de l’ECOSOC.  L’étude a laissé voir que les retombées socioéconomiques de la pandémie ont été dévastatrices pour ces pays dans les domaines tels que le commerce mondial, les investissements étrangers, le tourisme, les envois de fonds et d’autres.  Près de la moitié des PMA courent un risque élevé de surendettement ou sont déjà en situation de surendettement.  L’Initiative de suspension du service de la dette du G20 et le « Cadre commun pour le traitement de la dette au-delà de l’Initiative de suspension du service de la dette » ont allégé les pressions dans certains PMA, mais elles sont insuffisantes.  Pour soutenir ces pays, quatre domaines prioritaires nécessitent une attention particulière au niveau international: l’accès aux vaccins, des mesures pour soulager effectivement la pression de la dette, la transformation durable et inclusive des économies des PMA, notamment en développant leurs capacités productives, et un soutien accru pour une transition en douceur des pays sortant de la catégorie des PMA.

Justement, le Comité a procédé à son examen triennal de la liste des PMA, a indiqué M. Ocampo.  Il a ainsi recommandé le reclassement du Bangladesh, de la République démocratique populaire lao et du Népal, et a appelé les partenaires en développement et commerciaux à soutenir ces pays dans une transition en douceur.  En raison de la pandémie de COVID-19, le Comité a également recommandé une prolongation de la période préparatoire de cinq ans.  Il examinera à nouveau les impacts de la pandémie lors d’un suivi annuel et lors de l’examen triennal de 2024, lorsqu’il évaluera également si une nouvelle extension de la période préparatoire serait nécessaire.  Le Président du Comité s’est félicité du fait que l’ECOSOC ait déjà approuvé ces recommandations.  Aucun des pays déjà reclassés ne semblait risquer de retomber dans la catégorie des PMA, a souligné le Président du Comité.

Renforcer l’ECOSOC à son soixante-quinzième anniversaire pour une reprise durable et résiliente après la pandémie de COVID-19

L’ensemble des intervenants de cette table ronde ont souligné que, 75 ans après sa création, le mandat et le rôle de l’ECOSOC sont plus pertinents que jamais pour promouvoir la solidarité mondiale et la coopération internationale, en particulier en ces temps où le monde est aux prises avec une pandémie dévastatrice.  Des pistes pour son renforcement ont été proposées, telles qu’une interaction accrue avec les autres organes de l’ONU ou bien encore un meilleur suivi dans la mise en œuvre de ses décisions.

Premier intervenant, M. MAKHDOOM SHAH MAHMOOD QUREISHI, Ministre des affaires étrangères du Pakistan, a indiqué que son pays a fait face à la pandémie en donnant la priorité à des confinements limités et intelligents et à des programmes de protection sociale destinés à soutenir les plus vulnérables.  Le pays est désormais revenu à une trajectoire économique saine, a-t-il dit, en soulignant l’importance des systèmes de protection sociale pour faire face à la crise.  Le Ministre a demandé un accès équitable aux vaccins, une augmentation des investissements pour réaliser les ODD et une action robuste pour remédier aux inégalités du système financier international.  Avec l’aide de la Chine, le Pakistan avance dans la création d’un corridor économique entre les deux pays, a-t-il signalé.  Le Ministre a ensuite insisté sur l’intérêt qu’a son pays de voir un Afghanistan stable, prospère et uni, avant de réclamer une solution juste au contentieux sur le Jammu-et-Cachemire sur la base de la Charte des Nations Unies et dans l’intérêt de sa population.  Le Ministre a enfin estimé que l’ECOSOC est un instrument essentiel pour la promotion d’une coopération qu’il a jugée plus cruciale que jamais.

Mme MARIA FERNANDA ESPINOSA, Ancienne Ministre des affaires étrangères de l’Équateur et ancienne Présidente de la soixante-treizième session de l’Assemblée générale, a plaidé pour un ECOSOC fort, avec une interaction plus étroite avec la Deuxième Commission.  Elle a souligné que les inégalités se sont creusées et appelé à une coopération renforcée pour y remédier.  L’innovation est le maître-mot pour ce faire, a-t-elle dit, en demandant d’avoir de l’audace.  Elle a demandé un mécanisme de coordination plus robuste entre l’ECOSOC et l’Assemblée générale.  Elle a évoqué aussi la création d’un comité de la résilience mondiale.  L’ONU ne peut être le messie venant sauver le monde, cette responsabilité incombant à tous, a-t-elle conclu.  « À époque exceptionnelle, moyens exceptionnels. »

Même son de cloche du côté de M. JEFFREY SCHLAGENHAUF, Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui a confirmé l’importance de la coopération internationale, en soulignant l’insuffisance de cette coopération pour une reprise pérenne pour tous les pays face à la pandémie.  Il a réclamé un accès équitable aux vaccins et une action robuste en matière climatique.  Il a été d’avis que l’ONU doit jouer un rôle de chef de file dans la réalisation des ODD, l’OCDE venant l’épauler.  Nous devons donner la priorité à l’accélération de la numérisation de l’économie mondiale, sans quoi nous ne parviendrons pas à atteindre nos objectifs, a-t-il dit.  « Travaillons ensemble. »  Enfin, il a insisté sur la nécessité de combler le déficit de confiance entre les populations et les gouvernements.

De son côté, M. IBRAHIM ASSANE MAYAKI, Agence de développement de l’Union africaine, a appelé à la cessation des flux financiers illicites qui privent les pays en développement de centaines de milliards de dollars.  « C’est un problème chronique, en particulier pour les pays africains. »  Il a appelé à une transparence plus grande en ce qui concerne les dépenses publiques et défendu l’imposition mondiale minimale récemment entérinée par le G20.  Ces flux financiers sont une véritable menace, a-t-il averti, avant de pointer les « immenses lacunes » dans le financement du développement.  Enfin, alors que l’âge moyen de la population africaine est de 19 ans, il a demandé des politiques arrimant fermement le continent africain à l’économie mondiale, en soulignent le dynamisme des jeunes entrepreneurs africains.

M. JOHN FRANK, Vice-Président pour les affaires onusiennes de Microsoft, a souligné l’importance de la connectivité, qui est indispensable pour réaliser le développement durable.  La moitié du monde n’est pas encore connectée, alors que la connectivité est au fondement de la croissance économique.  Il a souhaité que les efforts de renforcement de la connectivité soient axés sur les êtres humains, en veillant à assurer un accès au numérique abordable.  M. Frank a indiqué que le secteur privé a un rôle crucial à jouer pour parvenir aux ODD, en soulignant la nécessité d’assurer la pérennité financière des partenariats publics-privés.

Enfin, Mme JAYATHMA WICKRAMANAYAKE, Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, a remarqué que le fossé entre les jeunes et les gouvernements s’est creusé.  Les jeunes croient pourtant dans le multilatéralisme et réclament une ONU plus inclusive, notamment pour les jeunes les plus vulnérables.  « Il faut désormais passer de la parole aux actes. »  Elle a réclamé une action déterminée contre le racisme et les inégalités, estimant que la pandémie est une chance pour reconstruire en mieux.  Elle a loué le forum des jeunes de l’ECOSOC, qui est un mécanisme unique.  « La soif de participation et de réussite des jeunes est inextinguible. »  Elle a enfin demandé que les jeunes ne soient pas cantonnés aux sujets qui les concernent uniquement.

Les délégations, nombreuses, ont ensuite pris la parole pour proposer des pistes pour un renforcement du rôle de l’ECOSOC.  La Ministre des affaires étrangères du Liban a ainsi souhaité que l’ECOSOC aide davantage encore les pays en développement à identifier et réaliser des projets viables, en particulier s’agissant de la mobilisation des ressources financières.  « Un ECOSOC revitalisé est au cœur d’un multilatéralisme efficace. »  Son homologue d’Andorre a dit que l’ECOSOC est « l’acteur incontournable » du développement, avant de plaider pour des « alliances innovantes » au service du développement durable, associant en particulier les jeunes.  Pour sa part, le Vice-Premier Ministre de l’Espagne a souhaité une coopération accrue du Conseil avec la société civile et souhaité une réorganisation basée sur une meilleure répartition des compétences avec l’Assemblée générale.  Celle-ci doit élargir ses compétences pour travailler de manière complémentaire et prendre des décisions qui renforcent la crédibilité et l’impact de l’ECOSOC, a-t-il recommandé.

« Il faut préserver le mandat principal de l’ECOSOC, dont la mise en œuvre n’a jamais été aussi impérieuse qu’aujourd’hui », a renchéri le Ministre des affaires étrangères de l’Algérie.  L’ECOSOC doit pouvoir assurer un suivi renforcé de la mise en œuvre de ses résolutions, a-t-il dit, appuyé par son homologue du Kenya.  Le Ministre algérien a aussi souhaité une coopération plus étroite avec les autres organes de l’ONU pour éviter les doublons et exhorté l’ECOSOC à se concentrer davantage sur les difficultés de financement des pays en développement.  « Le Conseil doit veiller à une vision collective cohérente dans l’application du Programme 2030 pour ne laisser personne de côté. »  Une position partagée par son homologue de la Croatie qui a souligné l’importance de l’ECOSOC dans la riposte mondiale à la pandémie.  Il a aussi demandé un renforcement de ses liens avec la société civile, affaiblis par la pandémie.  « L’efficacité de l’ECOSOC ne doit pas s’évaluer à l’aune du nombre de résolutions qu’il adopte mais aux résultats obtenus sur le terrain », a-t-il ajouté.

Une position pleinement partagée par le Secrétaire aux affaires étrangères de la Thaïlande pour qui l’ECOSOC est bien placé pour appuyer les États Membres dans leur réponse aux défis considérables de la pandémie.  À l’instar du Belize, il a aussi exhorté le Conseil à jouer un rôle de chef de file dans la conciliation harmonieuse de la croissance économique et du développement durable, tandis que le Nigéria a salué le fait que l’ECOSOC maintienne au premier plan la question fondamentale du financement du développement.  La Ministre des droits de l’homme du Mexique a indiqué que son pays, qui a un poste de vice-président à l’ECOSOC, veille à sa consolidation fonctionnelle.  Estimant que l’heure est à renforcer le Conseil plutôt que l’affaiblir, elle a vivement regretté à ce titre la récente adoption d’une résolution sur les modalités du forum de haut-niveau de l’ECOSOC qui l’a, selon elle, affaibli.  Le Conseil doit continuer de respecter les priorités nationales de développement des pays, a enfin nuancé la Fédération de Russie.

« Scénarios et tendances possibles à moyen et long terme concernant le redressement après la pandémie de COVID-19 et la réalisation des ODD »

Animée par Mme DANIELLA TILBURY, Commissaire de Gibraltar pour le développement durable et les générations futures, la dernière table ronde de ce segment de haut niveau s’est concentrée sur les scénarios et tendances possibles à moyen et long terme, notamment la contribution des nouvelles technologies, en vue d’assurer une reprise durable et résiliente après la pandémie de COVID-19 et de réaliser les objectifs de développement durable.  Elle a été l’occasion pour les participants de décrire des voies d’avenir plausibles sur la base des meilleures preuves scientifiques disponibles et avec un calendrier d’actions cohérent.   

Premier orateur de cette discussion, M. BERTRAND PICCARD, fondateur et Président de Solar Impulse Foundation, a observé que les décideurs du monde parlent en termes de création d’emplois et de profits industriels.  Il existe donc un écart énorme entre ceux qui dirigent et ceux qui sont aux prises avec la réalité de l’élément naturel, a-t-il noté, assurant que sa fondation reste « plus terre à terre ».  Elle a ainsi recensé 1 200 solutions susceptibles de protéger l’environnement tout en créant des emplois.  Ces solutions, a-t-il noté, s’appliquent aux secteurs de l’énergie, de la gestion de l’eau, de la mobilité et de l’industrie, et toutes sont sources de profit.  Autrement dit, il n’est pas juste d’affirmer que la protection de l’environnement est incompatible avec l’économie, a fait valoir l’explorateur, selon lequel nous pouvons habiter le monde d’une manière plus durable et plus efficace grâce aux nouvelles technologies.  Si nous polluons, c’est parce que nous utilisons encore des technologies surannées et des systèmes dispendieux qui gaspillent les ressources naturelles, a-t-il expliqué, estimant que l’on peut dissocier le PIB de la quantité de produits et le réassocier à la qualité et à l’efficacité.  À son avis, toutes les négociations sur ces questions doivent prendre en compte le fait qu’il existe des solutions pour réaliser les ODD et qu’elles peuvent être mises en œuvre par des entreprises, petites et grandes, partout dans le monde.  « Ce n’est pas rêver les yeux ouverts », a-t-il insisté. 

Dans le même ordre d’idées, M. KEYWAN RIAHI, Directeur du programme énergétique de l’Institut international d’analyse des systèmes appliqués, en Autriche, et membre du Groupe des Représentants de haut niveau des Nations Unies pour soutenir le mécanisme de facilitation de la technologie, a constaté que les pays qui se redressent aujourd’hui ne font que « revenir à l’ancienne normalité ».  En conséquence, les émissions de gaz à effet de serre ont recommencé à augmenter et nous nous écartons des objectifs à atteindre pour stopper les changements climatiques.  Pour remédier à cette situation, il a proposé de privilégier une transition axée sur « la demande » en limitant cette dernière par le déploiement de technologies granulaires à petite échelle qui se diffusent plus rapidement sur les marchés.  De plus, un accent plus marqué sur les technologies granulaires contribuerait à accélérer les cycles d’innovation.  Enfin, les technologies à petite échelle sont aussi moins capitalistiques et nécessitent donc moins d’investissements, a-t-il fait valoir, estimant que ces innovations changeraient fondamentalement notre façon d’utiliser l’énergie et impliquerait de passer « de l’ancien modèle de propriété à une économie du partage ». 

« Au cœur de la reprise verte et inclusive se trouvent les questions de hiérarchisation et d’optimisation des synergies », a pour sa part analysé Mme PAULA CABALLERO, Directrice générale du programme Lands for Life, pour qui « reconstruire en mieux » doit d’abord signifier « reconstruire différemment ».  Pour cela, le concept de « comptabilité du patrimoine » est utile car il fait appel au capital humain et naturel au-delà de la simple performance économique, en alignant durabilité et équité, a-t-elle relevé, jugeant que le défi est maintenant de protéger et de développer ce capital, ce qui signifie aussi lutter contre les changements climatiques.  Mais, alors que les plans de relance des principales économies s’élèvent à 4 600 milliards de dollars américains, moins de 1 800 milliards de dollars ont été consacrés à des projets verts.  Elle a donc souhaité une transformation profonde, en s’appuyant sur la rupture actuelle.  « Comme on dit, il ne faut jamais laisser passer une bonne crise », a-t-elle commenté, souhaitant toutefois qu’elle ne devienne pas une crise générationnelle. 

M. DEBAPRIYA BHATTACHARYA, membre émérite du Center for Policy Dialogue, au Bangladesh, et membre du Comité des Nations Unies pour les politiques de développement, a recommandé de mesurer les objectifs de développement sur la base de leur portée, en s’appuyant sur des données ventilées.  C’est le seul moyen de mesurer les impacts de la crise actuelle sur les communautés les plus défavorisées, a-t-il souligné, non sans rappeler que ces dernières, déjà victimes de disparités préexistantes, ont développé pendant la pandémie des stratégies de survie, perdu leur emploi et fait face au surendettement et à la déscolarisation de leurs enfants.  Selon le chercheur, les conséquences économiques de la COVID-19 vont durer plus longtemps que l’urgence sanitaire.  Si la consommation et la reprise sont les maîtres-mots, il convient de ne pas oublier l’éducation, l’accès au numérique, mais aussi la nutrition, l’alimentation et les maladies non liées à la COVID-19 qui ont été négligées, autant de questions qui nécessitent des données. 

Outre la pandémie et les changements climatiques, le principal défi des 10 prochaines années sera l’impact de la quatrième révolution industrielle, a quant à lui estimé M. FELIX DODDS, professeur adjoint au Département des sciences et de l’ingénierie de l’environnement de l’Université de Caroline du Nord.  Ces transformations concernent l’intelligence artificielle, mais aussi l’automatisation, l’analyse des données, la réalité augmentée et virtuelle, les « blockchains » et la biotechnologie, a-t-il observé, y voyant de grandes chances mais aussi de grands risques.  Parmi ces derniers, il a distingué les « deepfakes », les failles de la cybersécurité et de la protection de la vie privée, les robots policiers, les drones militaires, l’impression d’armes en 3D, l’utilisation des données personnelles à des fins répressives et la diffusion de messages de haine sur les réseaux sociaux.  De plus, on estime que 70% des personnes seront employées en tant que pigistes d’ici à 2030, sans savoir encore ce que cela signifiera en termes de soins de santé, de sécurité sociale et de retraite.  Face à cette révolution en marche, a-t-il dit, nous avons besoin de toute urgence d’un dialogue international sur la manière de gérer la transition « avant qu’il ne soit trop tard ».

De l’avis de Mme RITA SCHWARZELUEHR-SUTTER, Secrétaire d’État parlementaire au Ministère de l’environnement, de la conservation de la nature et de la sûreté nucléaire de l’Allemagne, la pandémie a clairement démontré que nous n’étions pas sur la bonne voie pour réaliser les ODD.  Si nous voulons nous rétablir intelligemment, nous devons rendre nos sociétés plus résilientes, nos économies plus respectueuses de l’environnement et nos politiques climatiques plus efficaces, a-t-elle plaidé, avant de se prononcer pour un alignement des plans à long terme sur les accords mondiaux.  Jugeant positif l’objectif de zéro émission nette annoncé par de nombreux pays, elle a souhaité que davantage soit fait sur le plan numérique.  Elle a précisé à ce sujet que le Ministère allemand de l’environnement a lancé un programme de politique numérique pour l’environnement, qui prévoit une écoconception des technologies de l’information et des communications, la création de centres de données vertes et l’intégration de critères de durabilité dans les algorithmes de recherche. 

Plus centré sur le Programme 2030, M. OMAR RAZZAZ, ancien Premier Ministre de la Jordanie, a noté que les ODD ont constitué des outils cruciaux pour éveiller les consciences, appliquer des conclusions scientifiques et pointer du doigt certains pays en retard sur leur réalisation.  Il s’est toutefois interrogé sur la pertinence de l’ODD 17, qui porte sur la coopération entre les pays et les différents secteurs.  Cet objectif présuppose que l’intérêt des uns serait le mode opératoire des autres, a-t-il déploré, souhaitant plutôt que soit promue la notion de « biens publics mondiaux », qui peuvent profiter à tous.  Il a d’autre part constaté que les problèmes rencontrés à l’échelle locale l’ont aussi été au niveau international, ce qui explique que les ODD ne soient pas sur la bonne voie à l’heure actuelle.  Même avant la COVID-19, on estimait que les ODD ne seraient pas atteints avant 2082, a rappelé M. Razzaz, imputant ce dysfonctionnement à des structures de gouvernance trop morcelées qui ne prennent pas en compte les externalités.  Selon lui, l’ODD 17 devrait être révisé en vue de créer une structure mondiale de coopération à même de mesurer les progrès réalisés et de récompenser les pays qui avancent sur la voie des ODD. 

« La seule façon de réussir est d’agir ensemble », a renchéri M. DAG-INGE ULSTEIN, Ministre du développement international de la Norvège, en appelant à construire des infrastructures plus robustes et à mettre en œuvre des solutions fondées sur la nature qui préviennent les catastrophes liées au climat et favorisent des systèmes alimentaires plus résilients.  À cette aune, il a souligné l’importance de la transformation numérique.  Grâce à la Digital Public Goods Alliance, nous soutenons l’utilisation gratuite de systèmes publics, comme l’information numérique du système de santé norvégien, a-t-il noté, y voyant le fondement d’une numérisation de l’administration publique.  Il s’est d’autre part prononcé pour la construction d’une fiscalité saine et progressive afin de combattre la corruption, la fraude et les flux financiers illicites.  Nous devons aussi remplir nos obligations au regard du Plan d’action d’Addis-Abeba, a-t-il souligné, avant de préciser que l’institut norvégien de financement du développement, Norfund, a augmenté ses investissements de 20% l’an dernier, prouvant ainsi qu’il est possible d’investir même en période de crise.

Revenant à la dimension régionale du débat, Mme ARLETTE SOUDAN-NONAULT, Ministre de l’environnement, du développement durable et du bassin du Congo de la République du Congo et Présidente de la septième session du Forum régional africain sur le développement durable, a assuré que l’Afrique est prête à promouvoir des solutions aux changements climatiques et à générer une croissance verte inclusive en tirant parti de ses avantages comparatifs en matière de ressources naturelles.  L’un d’eux réside dans l’écosystème du bassin du Congo, qui est le « second plus grand poumon écologique du monde », a-t-elle indiqué, ajoutant que, selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), les tourbières de ce bassin représentent un puits de carbone d’environ 30 milliards de tonnes, soit l’équivalent de trois années d’émissions des gaz à effet de serre à l’échelle mondiale.  Consciente de cet atout, la République du Congo a créé le Fonds bleu pour le bassin du Congo, auquel 16 pays du continent ont souscrit.  Ce mécanisme, a expliqué la Ministre, vise à financer des investissements verts et stimuler la croissance dans des secteurs tels que l’énergie, l’eau, l’assainissement, la gestion des déchets et le transport.   

M. DINESH GUNAWARDENA, Ministre des affaires étrangères de Sri Lanka, a lui aussi mis en avant l’action de son gouvernement, qui a donné la priorité à la lutte contre la pandémie tout en soignant la résilience de l’économie nationale face aux impacts des confinements.  Grâce à un plan de secours d’urgence, les employés du secteur informel et les micro, petites et moyennes entreprises ont reçu une aide financière et matérielle.  Les licenciements dans le secteur privé ont ainsi été maintenus au minimum et un salaire minimum a été garanti.  Le pays opère parallèlement une transition vers une agriculture centrée sur la sécurité alimentaire.  Il a ainsi décidé d’arrêter les importations d’engrais chimiques afin de garantir une alimentation non toxique.  Mettant l’accent sur les efforts en matière de circularité, le Ministre a aussi indiqué que la part des énergies renouvelables sera portée à 70% du mix énergétique de Sri Lanka d’ici à 2030.  

Au cours du débat interactif qui a suivi, M. Felix Dodds s’est félicité que la question de l’impact de la numérisation ait été abordée par plusieurs délégations, notamment la Norvège et l’Allemagne.  Les changements font peur, or ils vont être rapides et profonds, a-t-il prévenu, citant l’inventeur Ray Kurzweil, selon lequel « nous ne connaîtrons pas 100 ans de progrès au XXIe siècle, mais plutôt 20 000 ans de progrès au rythme actuel ».  Le changement doit donc être géré, a-t-il professé, saluant au passage les « New Deals » verts mis en place par différents pays dans le monde. 

La République de Corée s’est justement enorgueillie d’avoir procédé à un « New Deal coréen » pour ouvrir la voie à une meilleure économie postpandémie.  Dans ce cadre, elle a lancé la stratégie « Digital New Deal », qui vise à augmenter la productivité de toutes les industries en investissant dans l’intégration des données, l’intelligence artificielle et la transformation numérique de l’éducation.  Elle a également opéré un « Green New Deal », qui encourage la neutralité carbone en favorisant les énergies renouvelables et la mobilité verte via les véhicules électriques et à hydrogène.  Le troisième volet de ce plan national basé sur la transparence et la participation prend la forme d’une stratégie de renforcement de la protection sociale, agrémentée de formations et de mesures destinées à combler la fracture numérique.   

Le Royaume-Uni est, lui, revenu sur la question des données.  « Les débats de ce forum politique de haut niveau ont confirmé qu’une relance inclusive et durable ne pourra avoir lieu que si les plus vulnérables y sont associés. »  Or, a-t-il remarqué, on manque de données sur ces populations disproportionnellement frappées par la pandémie.  Il a donc souhaité savoir ce que peuvent faire les États Membres pour assurer la production de ces données et faire en sorte que nul ne soit laissé pour compte.  La réponse est venue de M. Felix Dodds, selon lequel les gouvernements, en particulier ceux des pays développés, doivent aider leurs bureaux de la statistique et ceux des pays en développement.  Selon lui, le soutien apporté à ces institutions ainsi qu’au Bureau de la statistique de l’ONU contribue au renforcement des capacités. 

De son côté, le Danemark a souhaité que les plans de relance ne soient pas utilisés au profit du statu quo mais servent à remettre le monde sur la voie des ODD.  Pour cela, a-t-il dit, l’un des principaux domaines d’investissement est la jeunesse, faute de quoi une génération entière pourrait être laissée pour compte.  La délégation a ainsi proposé l’établissement de groupes de jeunes pour conseiller les gouvernements sur des questions qui les concernent, notamment les effets des changements climatiques.  Il faut entrer en dialogue avec la jeunesse pour préparer un monde plus durable, a-t-elle affirmé.  Son appel a été repris par la Fédération internationale des étudiants en médecine, selon laquelle les jeunes sont engagés pour un avenir durable et doivent donc pouvoir participer aux stratégies de redressement et de réalisation des ODD. 

L’Alliance mondiale des groupes volontaires a, elle aussi, fait valoir que le milliard de bénévoles que compte le monde représente une ressource puissante pour aider à mieux reconstruire.  Elle a par conséquent invité les États à soutenir et à reconnaître le volontariat dans leurs examens nationaux volontaires et leurs plans nationaux pour atteindre les ODD, préconisant à cette fin des approches intégrées plutôt que cloisonnées, une collaboration intersectorielle et une implication efficace des secteurs public et privé.

En conclusion, M. Keywan Riahi a souligné l’importance de ne pas faire de laissés pour compte dans le cadre des 17 ODD.  Il importe selon lui de privilégier une perspective structurelle et donc de maximiser les synergies.  Ces dernières peuvent être favorisées par l’ONU et les banques multilatérales de développement, a enchaîné Mme Paula Caballero, selon laquelle le potentiel des ODD n’a pas encore été pleinement exploité.  Pour bien mesurer l’exacerbation des inégalités pendant la pandémie, il faut sérier les problèmes, ce qui nécessite de s’appuyer sur des données ventilées, a enfin estimé M. Debapriya Bhattacharya, appelant à une meilleure compréhension des réalités locales avant de passer à des analyses nationales et mondiales. 

Adoption de la Déclaration ministérielle

En présentant trois amendements au projet de déclaration ministérielle, le représentant de la Fédération de Russie a déclaré s’en tenir aux mêmes explications fournies la veille à la clôture du forum politique de haut niveau pour le développement durable.

Explications après le vote final

Le représentant des États-Unis a appuyé l’adoption de la Déclaration ministérielle en soulignant notamment la nécessité de la coopération internationale pour parvenir à des systèmes d’alimentation durable.  Il s’est néanmoins inquiété de certaines insuffisances de ce texte s’agissant de l’affirmation de la nécessité d’infrastructures et chaines d’approvisionnement durables.  Il a aussi regretté que la Déclaration ne reconnaisse pas le droit à l’alimentation ni le droit à l’accès à l’eau et à l’assainissement.

Le représentant du Panama a appelé à des efforts post-COVID-19 pour la reconstruction d’un monde plus résilient avec un nouvel accent sur le développement social.  « Nous devons redoubler d’efforts pour combler l’inégalité entre hommes et femmes, que la pandémie de COVID-19 a aggravée », a notamment plaidé le représentant en soulignant le terrible impact de cette pandémie sur la réalisation des ODD. 

Le représentant d’Israël a réitéré son appui à la réalisation des ODD.  Il a estimé que l’adoption de cette Déclaration est le meilleur moyen de réagir face à l’impact de la pandémie de COVID-19. 

Le représentant du Guatemala a renvoyé à sa déclaration du 15 juillet.

Le représentant de la République islamique d’Iran s’est dissocié des parties de la Déclaration qui contreviennent aux valeurs de la société iranienne.  Il a constaté que l’imposition de sanctions unilatérales illégitimes et injustifiées augmente de manière alarmante et estimé qu’une stratégie à ce sujet doit avoir sa place dans tout document sur le développement durable.  Le délégué a regretté que la proposition du G77 pour l’inclusion d’un paragraphe sur les mesures coercitives n’ait pas été retenue.

À son tour, la représentante de l’Ukraine s’est dissociée du paragraphe 11 de la Déclaration ministérielle estimant que la présentation, l’an dernier, de l’examen national volontaire de la Fédération de Russie s’était faite en violation de l’intégrité de l’Ukraine car celle-ci indiquait que la Crimée relevait de la Fédération de Russie.

Déclarations de clôture

Le Président du Conseil économique et social, M. MUNIR AKRAM (Pakistan), dont le mandat tire à sa fin, a relevé que malgré les nombreux défis auxquels la communauté internationale est confrontée, l’expérience de l’année écoulée a cristallisé la prise de conscience de l’unité essentielle de l’humanité et de l’impératif de la coopération économique internationale, une tâche que l’ECOSOC a pour mandat de poursuivre en vertu de la Charte des Nations Unies.  Il a expliqué comment le Conseil, à travers ses différents segments et délibérations tout au long de l’année, a permis de répondre aux multiples crises avec « une unité et une solidarité uniques ».  Il a salué le fait que la Déclaration ministérielle du forum politique de haut niveau ait été adoptée par consensus.  L’ECOSOC et ses États membres doivent s’appuyer sur cette convergence et ce consensus, au cours de l’année prochaine et au cours de la Décennie d’action, pour mettre en œuvre le Programme 2030, a—t-il souhaité.  

Il a ensuite évoqué les principales tâches à venir.  Premièrement, un accès universel et abordable au vaccin contre la COVID-19, afin de vaincre le virus et relancer le commerce, l’investissement et la croissance dans le monde.  Il a rappelé que nous devons mobiliser les 4 300 milliards de dollars dont les pays en développement ont besoin pour se remettre des crises et réaliser les ODD.  Il a également insisté sur le respect de l’engagement pris par les pays développés de fournir 100 milliards de dollars par an en financement climatique.  M. Akram a en outre rappelé les 1 000 milliards de dollars nécessaires pour l’investissement annuel dans les infrastructures durables, afin de faciliter la transition vers une économie mondiale « verte et dynamique ».  Un dialogue multipartite de haut niveau organisé par l’ONU peut faire avancer cet objectif, a-t-il espéré.  

M. Akram a indiqué que les stratégies d’investissement en faveur des ODD doivent se concentrer sur la création d’emplois, notamment dans des secteurs comme le logement, la construction, les énergies renouvelables, les transports, l’agriculture durable et la manufacture.  Dans le même temps, la pauvreté et la faim ont augmenté et doivent être attaquées de front, notamment par le biais de programmes de protection sociale et d’aide, ainsi que par une production et une distribution alimentaires durables, a-t-il plaidé.  L’accès aux technologies de pointe et aux innovations, en particulier les technologies numériques, doit être libéralisé de manière drastique, a-t-il encore réclamé, arguant qu’ils sont essentiels pour atteindre les ODD et les objectifs climatiques. 

Le Président de l’ECOSOC a plaidé pour la mobilisation de la volonté politique pour s’attaquer aux problèmes structurels et systémiques qui entravent une croissance et un développement équitables et dynamiques.  Selon lui, l’ECOSOC devrait créer un mécanisme capable de suivre, de manière plus scientifique, la mise en œuvre des 17 ODD et de leurs 169 cibles.  Il est temps de convoquer une autre conférence au sommet pour convenir de la structure et du contenu d’une nouvelle structure plus dynamique et équitable de coopération économique internationale, a-t-il conclu.

Dans son discours de clôture, le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. LIU ZHENMIN, a souligné que l’un des messages forts de la journée et de cette session du forum politique de haut niveau pour le développement durable aura été que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est notre feuille de route pour se remettre de la pandémie de COVID-19.  Les efforts de mise en œuvre des ODD doivent englober la solidarité internationale, l’égalité et l’inclusion.  Nous avons besoin d’un plan mondial pour que tous les pays se remettent ensemble de la pandémie, ce qui passe par l’accès de tous aux vaccins, et la mise des pays les plus pauvres sur la voie de la réalisation des ODD, a-t-il recommandé.  Il a plaidé pour la mobilisation des ressources financières et le partage des connaissances et technologies.  « Le succès se mesurera à la façon dont nous respectons les engagements à ne laisser personne de côté. »

Le Secrétaire général adjoint a indiqué que l’ECOSOC a envoyé un message fort selon lequel les défis interconnectés auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui exigent une solidarité internationale revigorée.  L’ECOSOC engage toutes les parties de la société, y compris les jeunes, à œuvrer pour le succès du Programme 2030, a souligné M. Liu.  Travaillons ensemble pour garantir le meilleur scénario pour le monde et pour tout le monde, ne laissant personne de côté, a-t-il lancé.  « Alors que nous avançons, continuons à trouver des solutions créatives et efficaces. »  De même, tirons parti de nos engagements et de nos nouvelles idées, a-t-il demandé en appelant à collaborer à travers les frontières, à travers les institutions, à travers les secteurs et à travers les communautés en soutien au Programme 2030.  Malgré les incertitudes, en travaillant ensemble, nous pouvons réaliser les ODD, a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité appelé à atténuer l’impact des régimes de sanctions et des mesures antiterroristes sur l’espace humanitaire

8822e séance – matin
CS/14582

Le Conseil de sécurité appelé à atténuer l’impact des régimes de sanctions et des mesures antiterroristes sur l’espace humanitaire

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et l’ONG Action contre la faim ont appelé, ce matin, le Conseil de sécurité à veiller à ce que les régimes de sanctions et les mesures antiterroristes ne portent pas atteinte à l’espace et à l’action humanitaires, dans un contexte marqué par une forte augmentation du nombre de personnes dans le besoin du fait de l’impact des changements climatiques, de la pandémie de COVID-19 ou encore du creusement des inégalités. Cette année, a indiqué la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, nous avons pour ambition de fournir une aide à 160 millions de personnes, « un chiffre record ».  

La réunion était consacrée à la préservation de l’espace humanitaire dans le contexte des conflits armés, un concept que le Directeur général du CICR a voulu expliquer très simplement: Ce n’est pas un concept abstrait mais quelque chose de tangible -une prison, un hôpital, un réseau hydrique ou un camp- ancré dans le droit international humanitaire.  On peut diverger sur le sens du concept, mais quand il n’y a pas d’espace humanitaire, « ce n’est pas beau ».  C’est un manque criant de protection et d’assistance pour ceux qui en ont le plus besoin.  Ce sont des travailleurs humanitaires en danger de mort. 

Les tactiques employées pour entraver l’action humanitaire, ont été dûment dénoncées par la Vice-Secrétaire générale de l’ONU.  Elle a décrié les restrictions aux mouvements, les longues procédures douanières, ou encore les retards aux points de contrôle.  À ces maux, le Directeur général du CICR en a ajouté l’impact des régimes de sanctions et des mesures antiterroristes qui peuvent par exemple amoindrir la faculté de son Comité à visiter des personnes détenues par des groupes frappés par les sanctions, à récupérer les dépouilles, à former les groupes armés au droit international humanitaire ou encore à faciliter les échanges mutuels de prisonniers. 

Pour en atténuer l’impact, il a milité pour l’inclusion dans les régimes de sanctions de mesures « concrètes et pratiques » pour faciliter le travail humanitaire impartial, comme cela a été le cas pour la Somalie.  Les efforts antiterroristes, a ajouté la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, doivent inclure des dispositions claires pour veiller à ce que les humanitaires ne soient pas punis pour avoir fait leur travail.  Pour les sanctions comme les mesures de lutte contre le terrorisme, il faut des « dérogations humanitaires », a renchéri la Directrice déléguée au plaidoyer d’Action contre la faim, prévenant que l’exigence de certains donateurs de voir les bénéficiaires de l’aide humanitaire se soumettre à un contrôle est « une ligne rouge » à ne pas dépasser, au risque de compromettre la capacité des humanitaires de travailler de manière impartiale. 

Il semble, a contré la Fédération de Russie, que le « beau slogan » d’espace humanitaire ait pour objectif de conférer une sorte d’« immunité » aux acteurs humanitaires.  Elle a jugé tout simplement inacceptable que des organisations médicales et humanitaires aident directement ou indirectement les terroristes.  Il est tout aussi inacceptable, a estimé le Ministre français des affaires étrangères, d’envoyer en prison des acteurs humanitaires pour avoir soigné des individus au motif que, par ces soins, ils aideraient des combattants. 

Le Ministre français, dont le pays préside le Conseil de sécurité ce mois-ci a aussi appelé à sanctionner plus fréquemment les auteurs et les commanditaires d’attaques contre les personnels humanitaire et médical lesquels doivent pouvoir être visés par les régimes de sanctions, comme le Conseil l’a fait pour celui imposé en République démocratique du Congo (RDC).  Un autre problème a été soulevé, celui de la politisation de l’aide humanitaire.  Le Ministre indien des affaires étrangères a estimé que cette aide ne saurait être utilisée comme un moyen de rogner sur l’intégrité territoriale des États.  Nous avons vu trop souvent, a-t-il affirmé, l’aide humanitaire liée aux mesures coercitives imposées par des acteurs extérieurs pour parvenir aux résultats qu'ils souhaitent. 

Pour être efficace, a professé le Niger, l’action humanitaire doit être frappée du sceau d’impartialité, d’indépendance et de neutralité, sans lequel il perd la confiance des parties au conflit.   Il a également conseillé de promouvoir la complémentarité entre les acteurs de la protection et les travailleurs humanitaires, surtout au Sahel, où la présence de multiples acteurs militaires, avec des mandats pas forcément harmonisés, peut parfois entraver la réponse humanitaire.  Le Kenya a, pour sa part, attiré l’attention sur le fardeau des pays d’accueil des réfugiés et appelé à une nouvelle « infrastructure mondiale de partage des responsabilités » qui aille au-delà des ressources financières. 

PROTECTION DES CIVILS EN PÉRIODE DE CONFLIT ARMÉ.  PRÉSERVER L’ESPACE HUMANITAIRE S/2021/618

Déclarations

Intervenant au nom du Secrétaire général, Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a passé en revue plusieurs situations humanitaires dans le monde, s’alarmant notamment de l’impact des attaques brutales en Afghanistan, où le nombre de victimes civils du conflit a augmenté de 29% cette année.  Elle s’est aussi inquiétée de la situation au Yémen où cinq civils sont tués ou blessés chaque jour et 20 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire.  Les écoles et les hôpitaux, qui devraient être des havres de paix ne sont pas épargnés, a-t-elle dénoncé évoquant l’attaque contre l’hôpital Chifa en Syrie, qui a fait 19 morts parmi les civils le mois dernier.  Face à l’étendue des besoins, l’ONU veut fournir une aide à 160 millions de personne, « un chiffre record ». 

Mme Mohammed a exhorté le Conseil de sécurité à prendre des actions fortes pour appuyer les acteurs humanitaires, s’alarmant du meurtre de 12 travailleurs humanitaires au Tigré depuis le début du conflit.  L’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a-t-elle par ailleurs fait savoir, a recensé 568 cas affectant la fourniture d’aide médicale dans 14 zones de conflit en 2021, provoquant de nombreuses victimes.  Un seul convoi a pu pénétrer dans le Tigré depuis le mois dernier; en Afghanistan les acteurs humanitaires sont harcelés, et 350 épisodes des restrictions imposées aux humanitaires ont été recensés au Yémen.  

La Vice-Secrétaire générale a dénoncé les tactiques employées pour entraver l’action humanitaire, citant notamment les restrictions imposées aux déplacements des humanitaires, les longues procédures douanières, ou encore les retards aux points de contrôle.  Les États doivent aussi veiller à ce que leurs mesures de lutte contre le terrorisme ne sapent pas les efforts humanitaires.  Mme  Mohammed s’est également inquiétée des pressions croissantes que subissent les organisations qui négocient avec les groupes armés non étatiques, notant qu’il s’agit là d’un élément essentiel d’une action humanitaire impartiale. 

La meilleure façon de protéger l’espace humanitaire est de mettre un terme à la violence et aux conflits, a-t-elle souligné, et l’ONU intervient dans le monde entier pour participer à des négociations difficiles à cette fin.  Elle a également signalé que l’assistance humanitaire n’a jamais atteint autant de personnes dans le monde, mais que les besoins dépassent « notre capacité ».  Le Conseil de sécurité, a-t-elle souligné, a la responsabilité de tout mettre en œuvre pour garantir le respect du droit international humanitaire et assurer la sécurité du personnel humanitaire. 

La Vice-Secrétaire générale a ensuite cité plusieurs domaines d’action pour préserver l’espace humanitaire, à commencer par la formation des forces militaires nationales, l’exercice de pressions diplomatiques et l’imposition de sanctions.  Elle a également appelé à établir des lignes claires entre les opérations humanitaires et les objectifs politiques.  Le respect des principes humanitaires de neutralité et d’indépendance est essentiel pour assurer la confiance des groupes armés non étatiques. 

Tous les gouvernements, a-t-elle insisté, doivent protéger la capacité des humanitaires à dialoguer avec toutes les parties au conflit, y compris les groupes armés non étatiques, ce qui les rend les plus à même de pouvoir négocier des trêves.  En outre, les mesures antiterroristes doivent inclure des dispositions claires pour préserver l’espace humanitaire et veiller à ce que les humanitaires ne soient pas punis pour avoir fait leur travail. 

La Vice-Secrétaire générale a aussi exhorté le Conseil de sécurité à veiller à la fin immédiate des attaques contre les écoles et les hôpitaux et à condamner leur utilisation à des fins militaires.  Elle a appelé à soutenir l’initiative « Les soins de santé en danger » du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge visant à mettre un terme aux attaques contre le personnel et les installations médicales, et les patients.  Enfin, Mme  Mohammed a fait part de l’intention du Secrétaire général de charger le prochain Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires de désigner un conseiller spécial sur la préservation de l’espace et de l’accès humanitaire.  La communauté internationale, a-t-elle insisté, doit accorder un soutien sans faille aux acteurs humanitaires. 

M. ROBERT MARDINI, Directeur général du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a déclaré que l’espace humanitaire n’est pas un concept abstrait mais quelque chose de tangible -une prison, un hôpital, un réseau hydrique ou un camp- ancré dans le droit international humanitaire.  S’il existe des perspectives différentes sur ce que constitue un espace humanitaire, il ne fait guère de doute sur ce qui se passe lorsqu’il n’y en a pas et « ce n’est pas beau ».  C’est un manque criant de protection et d’assistance pour ceux qui en ont le plus besoin.  Ce sont des travailleurs humanitaires en danger de mort.  Beaucoup d’entre eux sont traumatisés, portés disparus, mutilés ou tués.  Les espaces humanitaires doivent être protégés, sans exception, a souligné le Directeur général. 

M. Mardini s’est inquiété de la politisation et de la manipulation de l’aide humanitaire ce qui a pour effet, a-t-il dit, de mettre les organisations humanitaires sous pression et de tenir les populations civiles en otage.  Il s’est également dit préoccupé par le recours aux escortes armées, notant que lorsque des États insistent sur ces escortes pour assurer la sûreté et la sécurité des acteurs humanitaires, « le résultat est souvent exactement le contraire ». 

Le Directeur général a jugé essentiel que les organisations humanitaires neutres et impartiales soient autorisées à procéder à des évaluations indépendantes des besoins et à l’acheminement de l'aide.  L'accès ne doit pas être illégalement refusé ou retiré, notamment lorsque les besoins fondamentaux des personnes ne sont pas satisfaits, a-t-il insisté avant de signaler que les divisions au sein de ce Conseil, notamment au sujet de l’accès humanitaires, ne font qu’aggraver les souffrances de ceux qui sont en première ligne. 

L’impact délétère des sanctions et des mesures antiterroristes sur l’aide humanitaire est une autre source de préoccupation, a-t-il poursuivi.  De telles mesures entravent la faculté du CICR à visiter des personnes détenues par des groupes désignés, récupérer les dépouilles, former les groupes armés au droit international humanitaire ou encore faciliter les échanges mutuels de prisonniers.  Bien qu’il soit difficile de mesurer l’impact précis de ces mesures, il ne fait aucun doute que des personnes souffrent alors que le droit international humanitaire devrait les protéger.  Il a en outre constaté une nette tendance des États et des donateurs à transférer les risques associés aux opérations menées dans des environnements fragiles ou des théâtres de conflit aux acteurs humanitaires et locaux.  « Cela est tout simplement insoutenable et inadmissible », a-t-il dénoncé. 

Face à ces préoccupations, M. Mardini a appelé les États à veiller à ce que les organisations humanitaires soient en mesure de maintenir une proximité physique avec les populations touchées et un engagement soutenu avec les parties au conflit.  Il les aussi exhortés à renouveler le consensus autour des principes clefs du droit international humanitaire et à assurer leur respect et leur mise en œuvre.  Cela signifie que tous les mots prononcés ici à New York doivent être traduits dans la réalité là où ils comptent vraiment: aux points de contrôle et sur les lignes de front dans le monde entier. 

À cette fin, le Directeur général du CICR a engagé les membres du Conseil à trouver des moyens innovants d’inciter à un meilleur comportement de leurs propres forces armées mais aussi de leurs alliés, partenaires et mandataires.  Il faut aussi, a-t-il enchaîné, examiner et atténuer l'impact humanitaire des mesures de lutte contre le terrorisme, en mettant en place des dérogations bien conçues et permanentes.  Les futures résolutions doivent exiger explicitement des États qu’ils adoptent des mesures concrètes et pratiques pour faciliter le travail des organisations humanitaires impartiales.  Des protections similaires doivent aussi être prévues dans les régimes de sanctions, comme cela a été le cas pour la Somalie. 

Mme LUCILE GROSJEAN, Directrice déléguée au plaidoyer, d’Action contre la Faim, s’est inquiétée de l’impact sans précédent des changements climatiques, des inégalités et de la pandémie de COVID-19, sur les besoins humanitaires, en situation de conflit.  Pendant ce temps, l'espace humanitaire se rétrécit en raison d’un mépris croissant pour le droit international humanitaire, a-t-elle estimé, en regrettant que le Conseil n'ait jusqu'à présent pas été en mesure de stopper cette tendance.  Elle a prévenu que les divergences entre les membres du Conseil de sécurité menacent des vies et empêchent l’aide humanitaire.  Elle a attiré l’attention sur des situations qui ont vu peu de progrès alors qu’elles sont inscrites depuis des années à l'ordre du jour du Conseil. 

Nous avons besoin d’une condamnation rapide suivie d’une action ambitieuse lorsque l’espace humanitaire est ignoré, a-t-elle insisté.  Sur le terrain, les victimes des conflits sont souvent convaincues que l'ONU ignore ses propres résolutions.  La Directrice a également souligné l’impact négatif des mesures antiterroristes et des régimes de sanctions sur la liberté de mouvement du personnel humanitaire.  L’exigence de certains donateurs de voir les bénéficiaires de l’aide humanitaire se soumettre à un contrôle est « une ligne rouge » à ne pas dépasser, au risque de compromettre la capacité des humanitaires de travailler de manière impartiale. 

Mettant l’accent sur l’interminable et tragique liste des attaques contre les travailleurs humanitaires, elle a cité le chiffre de 191 acteurs humanitaires tués, blessés ou kidnappés depuis début 2021.  Face à ce constat, elle a exhorté le Conseil à agir et mettre un terme à cette spirale meurtrière et veiller à ce que ses décisions ne réduisent plus l'espace humanitaire.  Elle a aussi demandé que les sanctions et les mesures antiterroristes puissent inclure des « dérogations humanitaires », et que les crimes contre les travailleurs humanitaires soient dénoncés collectivement.  Soulignant que les violations du droit international humanitaire ne peuvent être ignorées et que la lutte contre l’impunité doit être une priorité du Conseil, elle s’est félicitée de l’intention du Secrétaire général de nommer un conseiller spécial pour la protection et le renforcement de l’espace humanitaire.  Elle a promis que les organisations humanitaires travailleront avec ce conseiller spécial pour inverser les « tendances sinistres ». 

M. JEAN-YVES LE DRIAN, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a insisté sur la responsabilité d’agir et d’abord pour faire connaître et faire respecter le droit international humanitaire.  Il a insisté sur le « rôle majeur » que doit jouer le Conseil de sécurité et appelé les États à prolonger le travail de formation de leurs forces armées et de leurs partenaires.  À cet égard, le Ministre a attiré l’attention sur le Plan de formation au droit international humanitaire dont vient de se doter la France. 

Il a aussi appelé à se mobiliser pour que les acteurs humanitaires impartiaux ne soient pas traduits en justice ou sanctionnés, du seul fait d’avoir conduit des actions humanitaires, conformes au droit international humanitaire et aux principes humanitaires.  Il n’est pas acceptable qu’ils soient envoyés en prison pour avoir soigné des individus au motif que, par ces soins, ils aideraient des combattants. 

De même, a poursuivi M. Le Drian, le financement des opérations humanitaires conformes au droit international ne doit pas être mis en péril par des pratiques de « surconformité » des banques, qui peuvent aboutir dans les faits à priver les acteurs humanitaires de la possibilité même d’agir.  En France, a-t-il fait savoir, un canal de communication direct a été mis en place entre les banques et les ONG, afin de construire un dialogue de confiance.  Un circulaire, qui encourage les Parquets à prendre en compte la spécificité des missions des acteurs humanitaires dans l’application des législations pénales antiterroristes, a également été préparée. 

Le Ministre a aussi appelé à protéger les travailleurs humanitaires et à lutter de façon déterminée contre l’impunité des crimes et attaques perpétrés à leur encontre.  Nous devons donc impérativement sanctionner plus fréquemment les auteurs et les commanditaires d’attaques contre les personnels humanitaire et médical.  Cela suppose que les régimes de sanctions permettent de les viser.  Le Conseil vient d’introduire ce critère dans le régime lié à la RDC; il doit en faire autant pour d’autres régimes, a estimé le Ministre.  M. Le Drian a voulu que l’on garde à l’esprit la voie de la justice pénale internationale, dès lors que des crimes commis contre des travailleurs humanitaires relèvent de la compétence matérielle de la Cour pénale internationale.  « Il s’agirait d’un signal fort. » 

M. MARCELO EBRARD CASAUBON, Ministre des affaires étrangères du Mexique, a rappelé que la protection de ceux qui ne participent pas aux hostilités est l’objectif principal du droit international humanitaire (DIH).  Face à la multiplication des attaques contre le personnel humanitaire et les infrastructures civiles, tels que les écoles, les hôpitaux ou les stations d’eau, le Ministre a souligné qu’il incombe principalement aux juridictions nationales de traiter de ces situations.  Néanmoins, il a invité le Conseil à examiner celles situations qui doivent être renvoyées à la Cour pénale internationale (CPI), comme le prévoit le Statut de Rome. 

Le Ministre a souligné la nécessité de mesurer l’impact négatif sur l’action humanitaire des sanctions et des mesures antiterroristes.  Il est clair, a-t-il dit, les sanctions affectent directement les opérations humanitaires, comme l’interdiction d’importer tel ou tel bien.  Le Ministre a néanmoins reconnu que des sanctions approuvées par le Conseil de sécurité contre les individus qui attaquent le personnel médical ou humanitaire peuvent être dissuasives.  Il a particulièrement salué la résolution 2582 sur la République démocratique du Congo (RDC). 

En outre, le Ministre a mis l’accent sur le concept « d’espace humanitaire », en soulignant la pertinence de l’Appel à l’action lancé par la France et l’Allemagne en 2019, après l’initiative de la Suisse, de l’Allemagne et de son pays.  Le Mexique, a dit le Ministre, invite ceux qui ne l’ont pas encore fait à se joindre à cette initiative.  Il a d’ailleurs précisé qu’au Mexique une Commission interministérielle, créée en 2009, étudie et révise en permanence la législation nationale pour la mettre en conformité avec les développements du droit international humanitaire.  Le Ministre a souligné l’engagement de son pays à continuer de promouvoir la protection de l’espace humanitaire en tant qu’élément central pour garantir la sécurité internationale, la réalisation d’une paix durable et la promotion d’une aide humanitaire qui ne soit pas l’otage de considérations politiques. 

Nous sommes, a prévenu Mme RAYCHELLE OMAMO (Kenya), à un point critique que nous avons déjà peut-être dépassé.  Les crises humanitaires s’aggravent et durent beaucoup plus longtemps.  Les pays d’accueil des réfugiés risquent des problèmes sécuritaires et des coûts environnementaux intenables et dangereux pour leur stabilité et les donateurs sont bien loin des ressources nécessaires.  La représentante a d’abord appelé toutes les parties aux conflits à respecter leurs obligations humanitaires.  Elle a ensuite souligné le caractère « temporaire » des interventions humanitaires, contrairement à leur « quasi-permanence » que l’on observe aujourd’hui.  Le Conseil, a-t-elle estimé, doit travailler beaucoup plus sérieusement à sa collaboration avec les organisations régionales, comme l’Union africaine, pour mettre fin plus rapidement aux conflits.  Cette collaboration doit s’élargir aux mandats des opérations de paix et aux sanctions pour leur imprimer un caractère réaliste, réalisable et réactif aux contextes politiques spécifiques. 

Après avoir une nouvelle fois attiré l’attention sur le fardeau des pays d’accueil des réfugiés, la représentante a appelé à une nouvelle « infrastructure mondiale de partage des responsabilités ».  Parlant au nom d’un pays qui abrite des réfugiés depuis plusieurs décennies, elle a insisté sur le fait que ce partage doit aller au-delà des ressources financières.  Elle a aussi jugé essentiel que les acteurs humanitaires trouvent les moyens de travailler plus efficacement avec les agences chargées de la sécurité, et en particulier de la lutte contre le terrorisme.  Ces acteurs, a-t-elle insisté, pourraient être plus novateurs et plus ambitieux pour renforcer leur chaîne d’approvisionnement et éviter que leurs processus soient exploités par les terroristes.  Face aux crises humanitaires et autres, la représentante a prôné la bonne gouvernance.  Elle a dit attendre avec intérêt de voir l’ONU lancer une conversation sur un nouveau paradigme pour des États résilients.  

M. OTHMAN JERANDI, Ministre des affaires étrangères, de la migration et des Tunisiens de l’extérieur de la Tunisie, a relevé que 235 millions de personnes dans 56 pays ont besoin d’une aide d’urgence en 2021, comparé à 168 millions en 2020.  Cette augmentation est en partie due à la COVID-19 et aux changements climatiques, mais aussi aux tensions entre les pays.  Il s’est inquiété de la prise pour cible et des contraintes imposées aux humanitaires, insistant sur l’importance de l’établissement des responsabilités.  Il a exhorté à veiller à la protection du personnel humanitaire et médical conformément aux résolutions du Conseil de sécurité, mais aussi à promouvoir la réconciliation.  Il faut, a-t-il insisté, soutenir l’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu mondial et intensifier les efforts pour mettre un terme aux conflits en Afrique notamment, ainsi qu’au conflit israélo-palestinien. 

Le Ministre a également appelé au respect des principes de neutralité et d’indépendance humanitaire pour permettre notamment aux organisations humanitaires de négocier avec les acteurs non étatiques.  Il a aussi engagé les organisations humanitaires à veiller à une meilleure complémentarité et coordination entre elles.  Dans le cadre de la migration irrégulière, a-t-il indiqué, des interférences entravent l’action humanitaire et provoquent différents défis pour les États de transit.  Il a appelé à plus de solidarité et de coordination pour aider les humanitaires à remplir pleinement leur rôle. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que les travailleurs humanitaires sont les « super-héros » du monde, risquant leur vie pour sauver celle des autres et soulager les souffrances.  « Le monde leur doit de la gratitude mais au lieu de cela, ils sont attaqués, kidnappés voire tués.  La représentante a attiré l’attention sur les récents incidents en Afghanistan et dans la région du Tigré en Éthiopie, et a appelé les États Membres et toutes les parties au conflit à se conformer au droit international humanitaire et à protéger l’indépendance et la neutralité des organisations humanitaires. 

S’appuyant sur des cas particuliers, elle a déclaré que le « régime » du Président syrien a multiplié les conditions à l’acheminement de l’aide humanitaire.  Au Venezuela, où une personne sur trois vit dans l’insécurité alimentaire, et le « régime Maduro » n’a autorisé que récemment les livraisons du Programme alimentaire mondial (PAM).  Dans la région du Tigré en Éthiopie, la réponse aux besoins essentiels est tout simplement refusée, a-t-elle encore dit, avant de se faire l’écho de l’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu humanitaire mondial.  Un tel cessez-le-feu, a-t-elle conclu, n’entamerait en rien la faculté des États de poursuivre leurs opérations légitimes de lutte contre le terrorisme. 

M. HARSH VARDHAN SHRINGLA, Ministre des affaires étrangères de l’Inde, a affirmé que les principes du droit humanitaire se sont ancrés dans son pays avant même l’évolution de la jurisprudence moderne.  L’Inde a suivi la voie du « Dharma » ou de la « juste conduite » et offert un refuge aux peuples persécutés pendant des siècles.  Le « Dharma », a expliqué le Ministre, est fondé sur les normes du conflit armé de l’Inde ancienne et une importance capitale est accordée à la distinction entre combattants et non-combattants.  Dans un « Dharma-yuddha » ou « une juste guerre », les civils ne sont pas attaqués.  Ils sont protégés.  Le Ministre a donc condamné le meurtre du journaliste indien, Danish Sidiqui, à Kandahar en Afghanistan.  L’aide humanitaire, a-t-il poursuivi, doit être distribuée de manière impartiale, conformément à la résolution 46/182 de l’Assemblée générale et aux autres résolutions pertinentes.  L’Inde, a souligné le Ministre, est attachée aux principes d’humanité, de neutralité et d’indépendance dans toutes les situations humanitaires. 

Nous sommes aussi attachés, a dit le Ministre, aux principes de la Charte dont la souveraineté, l’indépendance politique et l’intégrité territoriale des États, lesquels doivent demeurer la base de toutes les actions humanitaires.  En l’occurrence, le Conseil doit éviter la politisation du travail et des acteurs humanitaires.  L’aide ne saurait être utilisée comme un moyen de rogner sur l’intégrité territoriale des États.  Nous avons vu trop souvent, a affirmé le Ministre, l’aide humanitaire liée aux mesures coercitives imposées par des acteurs extérieurs pour imposer leurs résultats.  Non seulement cela est contre-productif mais cela risque aussi de rétrécir l’espace nécessaire à l’action humanitaire. 

Établir les responsabilités pour des violations graves du droit international humanitaire demeure l’un des défis les plus graves, a encore dit le Ministre.  Nous devrions, a-t-il estimé, aider les autorités nationales à renforcer leurs cadres juridiques pour qu’ils puissent enquêter et poursuivre les responsables.  Les sanctions contre les auteurs de violations sont un outil dont dispose le Conseil mais elles doivent jouir de l’appui international et régional pour ne pas détériorer encore davantage les crises humanitaires.  Le représentant a pris l’exemple de la Syrie à propos de laquelle le Secrétaire général et le Bureau de la coordination des affaires humanitaires ont alerté sur l’impact dévastateur des sanctions sur la situation humanitaire. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a dénoncé les attaques contre les travailleurs et les installations humanitaires, évoquant notamment la situation au Tigré où les parties au conflit entravent l’acheminement de l’aide.  Elle a appelé l’ensemble des parties à lever les obstacles et dénoncé des situations similaires au Yémen, en Afghanistan et au Soudan du Sud.  La représentante s’est félicitée de l’adoption de la résolution 2585 (2021) facilitant la poursuite de l’acheminement d’une aide vitale en Syrie.  Les membres du Conseil de sécurité doivent à présent travailler ensemble pour mettre en œuvre les résolutions qui visent à établir les responsabilités pour les violations du droit international.  La représentante a appelé à un recours plus systématique aux sanctions, tout en veillant à ce qu’elles n’entravent pas l’acheminement de l’aide humanitaire. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a insisté sur la dangerosité des environnements dans lesquels évoluent les acteurs humanitaires, comme en témoigne la Syrie.  Outre les restrictions bureaucratiques et administratives aux mouvements de ces acteurs, certains États utilisent désormais la COVID-19 comme prétexte.  Le représentant a déploré cette impunité pour les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Nous avons l’obligation, a-t-il dit, d’établir les responsabilités et d’enquêter sur tous les crimes de guerre, y compris ceux commis contre les travailleurs humanitaires et la fourniture de l’aide.  Il est « inacceptable » que dans certains cas, certains violateurs soient « récompensés » par des postes au gouvernement ou plus généralement dans le secteur public.  Nous devons faire attention aux signaux que ce type de « promotions » envoie, a prévenu le représentant. 

Quand un État refuse d’enquêter, on doit, a-t-il martelé, faire appel à la Cour pénale internationale devant laquelle le Conseil de sécurité a un droit de saisine.  Pour assurer l’établissement des responsabilités, nous devons, a poursuivi le représentant, nous montrer proactifs dans la formation de nos forces armées au droit international humanitaire.  Le représentant a conclu en appelant à la pleine mise en œuvre des résolutions 2286 et 2417, arguant que les acteurs humanitaires doivent avoir du pouvoir et qu’il faut les soutenir.  La résolution 2417, a-t-il rappelé, nous donne la possibilité d’envisager des sanctions ciblées qui sont « nécessaires » pour tenir les individus et les entités responsables de leurs obstructions à la fourniture de l’aide humanitaire. 

M. DINH QUY DANG (Viet Nam) a dénoncé l’augmentation des menaces à l’encontre des acteurs humanitaires et a fermement condamné les actes de violence qu’ils subissent.  Pour assurer leur sûreté et sécurité, il a appelé au plein respect du droit international humanitaire par toutes les parties à un conflit, y compris les groupes armés étatiques et non étatiques.  Il faut également protéger les infrastructures essentielles à la livraison de l’aide ainsi que les systèmes de production alimentaire.  Les auteurs d’attaques contre le personnel humanitaire doivent être traduits en justice.  Le représentant a aussi appelé au respect du principe de souveraineté et de non-ingérence, notant qu’un dialogue entre les organisations humanitaires et l’État hôte aiderait à mieux comprendre le contexte social et culturel et à gérer les risques.  Il a par ailleurs appelé à redoubler d’efforts pour renforcer les capacités locales, réduire les besoins humanitaires et répondre aux causes sous-jacentes des conflits armés.  La prévention des conflits et la consolidation de la paix sont d’une importance primordiale, a-t-il ajouté. 

En tant que membre du Conseil de sécurité, a souligné, M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) nous avons la responsabilité « unique » de maintenir la paix et la sécurité internationales et dans ce contexte, de promouvoir et d’assurer le respect du droit international humanitaire qui sert à protéger l’espace humanitaire.  Trop souvent, a dit à son tour le représentant, ce droit est violé, comme on le voit en Syrie, en Afghanistan et ailleurs.  L’Irlande, a-t-il dit, ne cesse d’appeler à l’établissement des responsabilités pour ces violations ainsi que celles des droits de l’homme.  Le représentant a appelé à une enquête indépendante sur le meurtre des trois membres du personnel de Médecins sans frontières (MSF) au Tigré.  L’histoire nous apprend, a-t-il dit, que lorsque l’on n’établit pas les responsabilités, la culture de l’impunité se propage, affectant en particulier les femmes et les filles.  Quand ce Conseil est informé de violations graves, il doit chercher à en identifier les coupables, a martelé le représentant qui a fermement appuyé l’Appel à l’action. 

Il s’est aussi attardé sur les acteurs humanitaires qui travaillent dans leur propre pays.  Bien plus que leurs collègues internationaux, ils sont aux fortes pressions de leurs autorités, de leurs communautés et de leurs forces de sécurité.  Ces problèmes doivent être pris en compte lorsque l’on planifie la sécurité de tout le personnel, a estimé le représentant.  Il a conclu sur l’impact des mesures antiterroristes qui peuvent limiter, criminaliser et empêcher les acteurs humanitaires de fournir de l’aide dans les zones contrôlées par des individus ou des entités frappés de sanctions, y compris des organisations terroristes.  Le représentant a estimé aussi que les organismes de l’ONU chargés de la lutte contre le terrorisme devraient travailler plus systématiquement avec les acteurs humanitaires.  Il a appelé le Conseil à prévoir des dérogations dans ses régimes de sanctions pour ne pas entraver le travail humanitaire. 

M. ABDOU ABARRY (Niger) a estimé qu’à tout juste un mois de la célébration de la journée mondiale de l’aide humanitaire le 19 aout prochain, il est grand temps que tous les États renouvellent leur engagement en faveur de la protection de ces héros que sont les acteurs humanitaires et qui se sont encore distingués dans la terrible combat contre la pandémie de COVID-19.  Dans la région du Sahel, a-t-il fait observer, les groupes terroristes et autres criminels s’attaquent aussi hélas, aux acteurs humanitaires.  Ces dernières années ont vu malheureusement, une augmentation dans le nombre d’attaques majeures contre les travailleurs humanitaires, a constaté le représentant.  Ces attaques, conjuguées avec la nature changeante et les conflits de types nouveaux, doivent obliger les États à réévaluer leur rôle et à réfléchir à de nouvelles façons d’assurer la protection, la sûreté et la sécurité des travailleurs humanitaires, et celles du personnel médical. 

En l’occurrence, le représentant a jugé « crucial » de dépolitiser le débat autour de l’espace humanitaire, même si comme l’a dit un auteur célèbre « l’humanitaire c’est la continuation de la politique par d’autres moyens ».  L’aide humanitaire ne doit pas servir d’instrument pour atteindre des objectifs de politiques étrangères, tout comme elle ne peut être délibérément politisée par certains acteurs humanitaires, en réponse aux difficultés auxquelles ils sont confrontés sur le terrain.  Pour être efficace l’action humanitaire doit être frappée du sceau d’impartialité, d’indépendance et de neutralité, sans lequel il perd la confiance des parties au conflit. 

Si les États doivent respecter le droit humanitaire international, ils doivent aussi élever la question de la protection du personnel humanitaire au niveau de politique nationale.  Il a encouragé les acteurs humanitaires à collaborer avec les différents acteurs sécuritaires.  Il faut en effet, a estimé le représentant, promouvoir la complémentarité entre les acteurs de la protection et les travailleurs humanitaires, surtout au Sahel, où la présence de multiples acteurs militaires, avec des mandats pas forcément harmonisés, peut parfois entraver la réponse humanitaire.  Concluant sur  la question « très controversée » de l’impact des sanctions unilatérales, sur l’aide humanitaire, il a plaidé pour que les activités exclusivement humanitaires, menées par des organisations impartiales, et conformément au droit international humanitaire soient exclues du champ d’application de ces sanctions. 

M. BING DAI (Chine) a appelé la communauté internationale à pratiquer un véritable multilatéralisme et à assurer la sécurité des travailleurs humanitaires, alors que la COVID-19, l’insécurité alimentaire, les défis économiques et la politisation croissante des opérations humanitaires ont compromis l’efficacité des actions.  Le représentant a exhorté toutes les parties à adhérer au droit international humanitaire.  Après avoir rappelé qu’il incombe aux gouvernements d’assumer la responsabilité principale de protéger l’espace humanitaire, il a souligné le rôle de l’ONU et des partenaires internationaux dans le renforcement des capacités. 

L’aide humanitaire doit s’appliquer conformément aux principes de neutralité et d’objectivité, et « ne doit pas devenir un » outil de rivalité ou de « manipulation politique », a insisté le représentant, avant de se faire l’avocat des opérations humanitaires « respectueuses » des lois, des coutumes et des normes sociales locales.  Il a en outre appelé à la levée immédiate de toutes les sanctions unilatérales parce qu’elles empêchent l’accès aux fournitures nécessaires et déstabilisent l’ordre économique des États ciblés.  Soulignant que les attaques contre les travailleurs humanitaires et les infrastructures essentielles sont une conséquence regrettable des conflits armés, le représentant a dit la nécessité de s’attaquer aux causes profondes des conflits et a exhorté les pays à se doter d’une vision à long terme qui mette l’accent sur la réduction de la pauvreté et le développement durable. 

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) s’est inquiétée de l’augmentation du nombre d’attaques contre les travailleurs et les installations humanitaires depuis le début de la pandémie de COVID-19.  L’augmentation du nombre de personnes dans le besoin est également préoccupante, de même que la détérioration de l’environnement humanitaire.  Elle a appelé à améliorer la sûreté des travailleurs humanitaires et à préserver l’accès humanitaire.  Invoquer l’obligation morale et juridique ne suffit pas pour garantir le respect du droit international humanitaire.  Il n’y a pas d’approche à taille unique et il faut mettre en place des dispositifs pragmatiques et adaptés au contexte, a-t-elle insisté.  Les principes, les protocoles et les règles de base doivent être établis dans un processus collectif de prise de décision. 

La représentante a également estimé que la législation antiterroriste doit éviter d’ériger en infraction les mesures prises par les humanitaires, et que les régimes de sanction établis par le Conseil de sécurité doivent se garder de restreindre la faculté à secourir les populations.  Une évaluation plus systématique de l’impact des mesures antiterroristes sur l’action humanitaire s’impose et il convient d’en tenir compte pendant la création ou le renouvèlement des régimes de sanction.  Mme King a aussi réclamé des ressources suffisantes pour protéger l’espace humanitaire.  Les organisations doivent avoir un accès aux financements pour l’analyse des contextes, les négociations ou encore les équipements de communication.  Les donateurs doivent pour leur part veiller à ce que les accords de financement comprennent des dispositifs pour assurer une évaluation continue et adéquate des risques. 

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a souligné la situation de plusieurs pays, victimes de conflit, accusés « à tort » de vouloir délibérément bloquer l’accès humanitaire.  Le représentant a tenu à rappeler que les activités humanitaires doivent être menées en conformité avec les principes directeurs consacrés dans la résolution 46/182 de l’Assemblée générale.  Il a insisté sur le fait que le consentement de l’État hôte constitue la base de la sécurité, de la neutralité et de l’impartialité de l’action humanitaire.  Dans ce contexte, il s’est interrogé sur la pertinence du concept d’« espace humanitaire », en estimant que ce « beau slogan » a pour objectif de conférer une sorte d’« immunité » aux acteurs humanitaires qui empiètent sur la souveraineté des États, en contradiction avec la résolution 46/182. 

Le représentant russe a aussi souligné la nécessité de faire en sorte que les opérations humanitaires ne soient pas utilisées pour empêcher les États d’honorer leurs obligations liées à la lutte contre le terrorisme.  Il est « inacceptable » que des organisations médicales et humanitaires aident directement ou indirectement les terroristes, en compromettant les efforts antiterroristes internationaux, a martelé le représentant, en rappelant que la résolution 2462 du Conseil de sécurité souligne que les activités humanitaires doivent être menées de manière impartiale et dans le respect du droit international humanitaire. 

Le représentant a également fustigé la tendance du Conseil de sécurité à renvoyer des situations à la Cour pénale internationale (CPI) ou à créer des tribunaux spéciaux.  Cette pratique, a-t-il estimé, ouvre la voie aux abus, surtout lorsque l’on voit des États poursuivre des suspects dans des États tiers, sur la base d’une prétendue « compétence universelle ».  Nous pensons que le premier rôle dans la lutte contre l’impunité doit être laissé aux systèmes judiciaires des États dans lesquels les violations présumées ont été commises, a insisté le représentant.  Un des meilleurs moyens d’éviter les crises humanitaires, a-t-il conclu, est de renoncer à la pratique « vicieuse » des sanctions et des blocus.  Il a dénoncé le recours accru aux sanctions unilatérales à motivation politique, « une nouvelle réalité et une nouvelle forme d’atteinte à la souveraineté des États et d’ingérence dans leurs affaires intérieures ». 

Mme MONA JUUL (Norvège) a fait observer que si le Conseil de sécurité a maintenu en vie le mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontalière en Syrie, les acteurs humanitaires doivent tout de même négocier tous les jours leur accès avec les communautés locales et les autorités.  L’accord des communautés est certes crucial mais il ne suffit pas à garantir la sécurité des acteurs humanitaires.  Ces acteurs, a martelé la représentante, doivent pouvoir parler directement avec les parties aux conflits, y compris les groupes armés non étatiques.  Il faut donc que les donateurs et les directeurs de l’action humanitaire aient un niveau élevé d’accès diplomatique et coordonnent leur actions avec les organisations sur le terrain. 

Quant aux attaques contre ces organisations et leurs personnels, la représentante a appuyé le système de surveillance de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le projet sur les Centres de données relatives au conflit et à l’humanitaire.  De telles données, a-t-elle souligné, permettront d’élaborer de meilleures réponses, de mieux coopérer et de partager les pratiques exemplaires. Donnant l’exemple de son pays, elle a prié tous les États d’explorer les mesures nationales et internationales propres à renforcer le respect du droit international humanitaire et la protection des civils, y compris les travailleurs humanitaires.  Elle a insisté à son tour sur l’établissement des responsabilités, appelant à des enquêtes approfondies, impartiales et efficaces, sans oublier les mécanismes de justice pénale « crédibles » aux niveaux national et international. Elle a conclu, en notant les observations de la communauté humanitaire sur l’impact des mesures antiterroristes et des sanctions sur l’aide.  Les cadres juridiques, a-t-elle dit, doivent comprendre les garanties et les dérogations nécessaires. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le forum politique de haut niveau adopte une déclaration ministérielle pour une mise en œuvre accélérée du Programme 2030, « voie à suivre » en ces temps de pandémie 

Forum politique de haut niveau,
matin & après-midi
ECOSOC/7060

Le forum politique de haut niveau adopte une déclaration ministérielle pour une mise en œuvre accélérée du Programme 2030, « voie à suivre » en ces temps de pandémie 

Le forum politique de haut niveau pour le développement durable a adopté, cet après-midi, une déclaration ministérielle*, point d’orgue du débat ministériel qu’il tient avec le Conseil économique et social (ECOSOC) sur le thème de la reprise durable et de la résilience après la pandémie de COVID-19, pour ouvrir une voie inclusive et efficace vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Cette déclaration, qui marque la fin des travaux du forum de haut niveau pour 2021, devrait être adoptée demain par l’ECOSOC.

Réunis en cette période « difficile de crise, de résilience, de reprise et d’espoir », les ministres et hauts représentants s’engagent, par cette déclaration, en faveur d’une action accélérée visant à mettre en œuvre le Programme 2030, qui est « la voie que nous devons suivre pour lutter contre les effets négatifs de la pandémie de COVID-19, prévenir de futures pandémies et bâtir un avenir meilleur ».  La pandémie est venue s’ajouter aux obstacles préexistants qui entravent la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) et accentuent les inégalités structurelles, ainsi que les risques systémiques, reconnaît la déclaration.

En même temps, comme il ressort des huit jours de débat du forum que la Vice-Secrétaire générale de l’ONU a résumés, les changements mis en place pour répondre à la pandémie peuvent fournir une base pour progresser vers les ODD.  Mme Amina J. Mohammed a notamment plaidé en faveur de l’universalité d’accès aux vaccins contre la COVID-19, appuyée par le Président de l’ECOSOC, M. Munir Akram, qui a salué ce forum politique « intense, inspiré et orienté vers l’action ».

Comme l’exprime aussi la déclaration ministérielle, la reprise mondiale passe par un accès « équitable et abordable » pour tous aux vaccins et traitements contre la COVID-19.  « Nous sommes conscients que l’immunisation à grande échelle contre la COVID-19 jouera le rôle d’un bien public mondial », poursuivent-ils, en appuyant sans réserve le Mécanisme COVAX.  Les pays en capacité de le faire sont ainsi invités à mettre leurs doses excédentaires à la disposition dudit mécanisme afin de favoriser une distribution équitable des vaccins aux pays en développement.

Alors que la crise liée à la COVID-19 a montré l’importance des systèmes de protection sociale, les ministres appellent à en faire bénéficier les quatre milliards de personnes dans le monde qui en sont dénuées.  Ils demandent aussi de prendre des « mesures concrètes » pour remédier à la faim chronique dans laquelle ont basculé en 2020, en raison de la pandémie, entre 83 et 132 millions de personnes, qui sont venues s’ajouter aux 690 millions de 2019. 

Face aux changements climatiques –« l’un des plus grands défis du monde contemporain »- la déclaration plaide pour une « riposte mondiale renforcée » et souligne l’importance de l’Accord de Paris.  Elle appelle « instamment » les pays à mettre en place, après la pandémie de COVID-19, des politiques de relance économique durables, inclusives et adaptées aux réalités climatiques.  « Il importe au plus haut point de renforcer la capacité d’adaptation et la résilience et de réduire la vulnérabilité face aux changements climatiques », précise le texte.

S’agissant du financement des mesures d’atténuation face à ces changements, la déclaration rappelle l’engagement pris de mobiliser 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 et jusqu’en 2025 pour répondre aux besoins des pays en développement.  Un appui supplémentaire de la part des pays développés est aussi jugé nécessaire, « notamment pour ce qui est du transfert de technologie, du renforcement des capacités et du financement en faveur des pays en développement. »  L’urgence d’honorer les engagements au titre de l’aide publique au développement est ainsi rappelée.

Toujours sur le plan financier, la communauté internationale est priée d’apporter un appui aux pays les moins avancés, aux pays en développement sans littoral et aux petits États insulaires en développement, pour le financement de mesures de relance tenant compte de leurs vulnérabilités particulières.  Les États Membres saluent par ailleurs l’Initiative de suspension du service de la dette proposée par le G20 et encouragent « fortement » la participation accrue des créanciers privés à celle-ci.  Le traitement de la dette pourrait permettre aux pays de se recentrer sur la réalisation des ODD et des objectifs de l’Accord de Paris, reconnaissent-ils en conclusion.

Trois amendements présentés par la Fédération de Russie relatifs aux paragraphes 20, 25 et 36 sur, respectivement, l’action climatique, l’égalité entre les genres et la biodiversité, ont été rejetés.  Le premier amendement a recueilli 130 voix contre, 7 pour (Arabie saoudite, Arménie, Bélarus, Côte d’Ivoire, Fédération de Russie, Kazakhstan et Kirghizistan) et 3 abstentions (Angola, Cambodge et Madagascar).  Le second sur le paragraphe 25 a récolté 4 voix pour, (Arabie saoudite, Bélarus, Fédération de Russie et Kazakhstan), 130 contre, pour 3 abstentions (Angola, Cambodge et Madagascar).  Le dernier amendement a reçu les voix de 3 pays (Arabie saoudite, Bélarus, Fédération de Russie) mais a été rejeté par 131 autres, pour 4 abstentions (Angola, Cambodge, Kazakhstan et Madagascar).

Israël a également demandé un vote sur le paragraphe 29 sur la paix et la sécurité et le développement durable, en lui reprochant son libellé trop « politisé ».  Il a été maintenu par 98 votes pour, 4 contre (Australie, Canada, États-Unis et Israël) et 40 abstentions.

Enfin, 14 derniers pays ont présenté, aujourd’hui, leurs examens nationaux: Japon, Allemagne, Malaisie, Chypre, Indonésie, Iraq, Madagascar, Bhoutan, Namibie, République démocratique populaire lao, Espagne, Zimbabwe, Paraguay et Suède.  Le forum aura entendu 42 pays au cours de sa session 2021.

Nous quittons ce forum pleinement conscients de l’ampleur du défi mais aussi avec espoir et détermination, a conclu la Vice-Secrétaire générale en rappelant les prochains rendez-vous importants: le Sommet sur les systèmes alimentaires, le Dialogue de haut niveau sur l’énergie, la COP15 sur la biodiversité et la COP26 sur le climat.  « Les décisions qui seront prises peuvent nous remettre sur la voie pour tenir la promesse du Programme 2030 et de l’Accord de Paris. »

*E/2021/L.26 E/HLPF/2021/L.2

SUITE DU DÉBAT DE HAUT NIVEAU

Adoption de la déclaration ministérielle

Le représentant de la Fédération de Russie a présenté des amendements à trois paragraphes du projet de déclaration ministérielle.  D’abord, le paragraphe 20, qui semble à ses yeux donner la prépondérance à une question par rapport à l’autre.  Pour la Russie, les changements climatiques et la pandémie de COVID-19 doivent avoir la même importance pour la communauté internationale, en droite ligne du Programme 2030 qui prescrit un équilibre entre les trois dimensions du développement durable.  Le représentant a dénoncé le fait que les États semblent privilégier l’action climatique, au détriment de la relance économique qui serait louable pour leur propre population.  À propos du paragraphe 25, le représentant a dit s’opposer au fait que l’approche genre ait été insérée dans le libellé sans accord des États.  De plus, la délégation a estimé qu’il n’est pas correct d’utiliser le mot « genre » séparément de la combinaison « égalité des sexes ».  Enfin, au sujet du paragraphe 36, la délégation a dénoncé une tentative d’ingérence dans la politique économique des pays, notamment leur approche de préservation de la biodiversité.

Au nom de l’Union européenne, la représentante de la Slovénie a estimé que l’amendement proposé vise à réduire l’importance d’une reprise sensible au climat.  Veiller à ce que notre redressement postpandémie soit sensible au climat doit être une priorité afin de faire face à la menace existentielle des changements climatiques et de nous rendre plus résilients face à leurs impacts, a-t-elle fait valoir.  Selon elle, ce n’est que si les stratégies de relance et les décisions politiques et d’investissement adoptées maintenant favorisent les acquis de l’Accord de Paris et des objectifs mondiaux pour la biodiversité que nous pourrons vraiment reconstruire en mieux et soutenir des activités socioéconomiques à long terme, a-t-elle ajouté, avant de demander à toutes les délégations de voter contre l’amendement proposé au paragraphe 20 et en faveur du maintien du libellé tel qu’il est reflété dans la version finale de la déclaration.

Parlant au nom d’un groupe de pays, la représentante de la Norvège a déploré le fait que la mention des femmes dans la déclaration ministérielle soit remise en question.  Nous sommes déçus de la proposition de retirer ces références, car cela porte atteinte à nos engagements en faveur de la mise en œuvre de la déclaration de Beijing et du Programme 2030, notamment dans l’optique de mettre fin à la violence sexiste et d’assurer l’égalité entre les sexes, a-t-elle justifié.  « Nous ne pouvons laisser la moitié de la population mondiale en arrière, c’est pourquoi nous demandons aux délégations de voter contre l’amendement du paragraphe 25. »

S’exprimant au nom d’un groupe de pays, le représentant du Royaume-Uni a rappelé que les crises liées aux changements climatiques et à la perte de biodiversité sont interconnectées.  Il a souligné que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur le climat constituent la meilleure feuille de route pour parvenir aux objectifs de développement durable.  À cette aune, il a demandé aux délégations de voter contre l’amendement déposé et de maintenir le texte original de la déclaration.  

Après le vote sur les amendements

La représentante d’Israël aurait souhaité une non-politisation de certaines questions et un libellé équilibré.  Ce n’est pas le cas en ce qui concerne le paragraphe 29, a-t-elle dit, en appelant à une distinction claire entre la politique et le développement durable.  « C’est pourquoi nous avons demandé un vote sur ce paragraphe. »

Explications après l’adoption de la déclaration ministérielle

Le représentant de la Guinée, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a jugé important que le forum envoie des signaux clairs sur l’engagement en faveur des ODD et aurait souhaité une déclaration plus équilibrée et plus consensuelle.  Nous sommes déçus par le fait que certaines délégations aient rompu la procédure d’approbation tacite, a-t-il dit, en soulignant la nécessité d’une déclaration robuste.  Il a souligné la nécessité de mobiliser les ressources pour son application, avant de rejeter toute mesure coercitive prise contre un pays.  « Ces sanctions doivent être éliminées. »  Le Groupe a veillé à préserver le consensus en se ralliant à cette déclaration, a conclu la Guinée.

Par la voix de la Slovénie, la représentante de l’Union européenne (UE) a regretté qu’en dépit des efforts visant à parvenir à un consensus, un vote ait été demandé sur le paragraphe 29 de la déclaration et sur les amendements aux paragraphes 20, 25 et 36.  De plus, concernant le paragraphe 8, elle a déploré que le dernier changement, effectué à la demande d’une délégation, ait modifié le libellé de telle sorte qu’il s’écarte de celui utilisé dans la cible 6.5 du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  « Nous réitérons que le libellé du Programme 2030 reste pour nous la source principale », a dit la représentante, avant de réaffirmer l’attachement de l’UE à la mise en œuvre pleine et effective du Programme d’action de Beijing et du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) ainsi qu’à la santé sexuelle et aux droits reproductifs. 

Pour l’UE, la pandémie de COVID-19 et les défis mondiaux interconnectés que sont les changements climatiques, la dégradation de l’environnement, la perte de biodiversité et les inégalités croissantes viennent rappeler que la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) est cruciale pour reconstruire en mieux et en plus vert.  Dans ce contexte, elle aurait souhaité un texte plus ambitieux, mettant clairement l’accent sur la mise en œuvre du Programme 2030 dans son ensemble.  De plus, a relevé la représentante, certains problèmes soulevés par l’UE au cours des négociations n’ont pas été intégrés au texte final ou ont disparu à un stade intermédiaire. 

S’agissant de la section de la déclaration qui traite des objectifs spécifiques examinés cette année, l’UE a constaté que, dans de nombreux cas, le libellé utilisé dans le texte ne reflète pas l’équilibre et l’ambition des objectifs et cibles convenus en 2015.  D’autre part, tout en se félicitant qu’en cette année de pandémie zoonotique mondiale la déclaration souligne la nature interconnectée de la santé humaine, animale, végétale et environnementale et la nécessité de coopération étroite des parties concernées du système des Nations Unies, elle a regretté que le texte ne mentionne pas explicitement l’importance de l’approche « Une seule santé » de l’ONU, bien qu’il s’agisse d’un concept reconnu au niveau intergouvernemental. 

L’UE a ensuite déploré le manque d’ambition de la déclaration, à la veille des COP, pour ce qui est des efforts à mener face aux changements climatiques et à la perte de biodiversité.  Aucun des deux paragraphes qui s’y rapportent n’est pleinement à la hauteur des attentes, a-t-elle jugé, relevant en outre l’absence de points importants comme, par exemples, la nécessité d’une élimination progressive à l’échelle mondiale des subventions aux combustibles fossiles, de la neutralité climatique d’ici au milieu du siècle et d’un engagement audacieux pour un Cadre mondial de la biodiversité post-2020 ambitieux, en vertu de la Convention sur la diversité biologique. 

À propos du climat, l’UE a regretté que le libellé ajouté concernant « l’atténuation et le financement de l’adaptation » ne reflète pas correctement celui de l’article 9.4 de l’Accord de Paris.  Joindre le consensus d’aujourd’hui n’implique pas que nous souscrivions à la notion de sous-catégories de financement climatique qui méconnaissent la « nature holistique et transversale » d’une grande partie du soutien climatique fourni, a-t-elle fait valoir.  Quant à la biodiversité, la représentante a observé que le libellé de la déclaration s’écarte de celui de la Deuxième Commission dans sa résolution sur la biodiversité et semble impliquer, « à tort », que les solutions basées sur la nature et les approches basées sur les écosystèmes sont deux catégories distinctes. 

De même, l’UE s’est étonnée que plusieurs délégations aient demandé la réouverture de paragraphes sur le financement du développement et réclamé que cette question soit intégrée tout au long du texte.  Bien qu’elle accepte la formulation finale, elle a dit redouter que le forum politique de haut niveau « devienne un lieu de renégociation d’accords antérieurs et assez récents conclus par les mêmes délégations ».  Malgré ces réserves, la représentante a réaffirmé l’importance que l’UE accorde au forum politique de haut niveau pour faire le point sur l’état d’avancement du Programme 2030 et à la déclaration en tant que « moyen de montrer notre élan et notre volonté collective de soutenir les progrès vers la réalisation des ODD ». 

Le représentant du Canada, au nom du groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a jugé essentiel de montrer au monde que « nous pouvons surmonter ensemble » les défis liés à la pandémie.  Il nous revient de mettre en œuvre les ODD, sans les revoir à la baisse, a-t-il dit.  Il a appelé à une action plus résolue s’agissant de l’égalité entre les genres, en se disant déçu que le texte ne reconnaisse pas les conséquences négatives bien établies de la pandémie pour les femmes et les filles.  Le Canada a aussi déploré que la déclaration ne reconnaisse pas l’initiative intégrée « Une santé ».  Nous avons besoin d’engagements constants en faveur de l’Accord de Paris, a déclaré le Canada, en soulignant l’urgence absolue du défi climatique.

Le Saint-Siège s’est félicité de ce que la déclaration ministérielle ait souligné le fait que l’élimination de la pauvreté est le plus grand défi mondial, ainsi que la reconnaissance du rôle et de la contribution des migrants à une croissance inclusive.  Au sujet de la mention des droits de l’enfant, le Saint-Siège a précisé que ces droits sont exprimés au sein de la famille qui est l’unité sociale de base reconnue.  Il a également appelé au respect du rôle des parents, avant de souligner que l’avortement ne saurait en aucun cas faire partie de la santé sexuelle et reproductive.  De même, le terme genre et ses dérivés est compris comme faisant référence aux deux sexes que sont les hommes et femmes, a encore souligné le Saint-Siège. 

Le représentant de la Hongrie a indiqué soutenir l’adoption de la déclaration ministérielle parce que celle-ci met en avant des priorités importantes.  Il a toutefois affirmé ne pas être en mesure d’appuyer les paragraphes du texte relatifs à la migration, arguant que la migration n’est pas la meilleure solution pour le marché du travail et les problèmes démographiques des pays de destination.  De même, la migration ne peut être considérée comme une solution appropriée pour relever les défis auxquels les pays d’origine sont confrontés.  D’autre part, a encore fait valoir le délégué, la crise liée à la pandémie de COVID-19 oblige les gouvernements à répondre aux besoins de leur propres citoyens.  Au lieu de favoriser les départs des pays d’origine et de faciliter une migration ordonnée, sûre et régulière qui génère d’autres facteurs d’attraction, nous devrions nous concentrer sur la fourniture d’une assistance aux pays tiers localement en créant des conditions qui permettent aux gens de rester dans leur patrie dans la paix et la prospérité, a ajouté le représentant.  De plus, il a estimé que le fait de distinguer arbitrairement différents groupes marginalisés, tels que les migrants au paragraphe 24, pourrait avoir pour effet d’en exclure d’autres qui sont tout aussi vulnérables.  Il s’est par conséquent dissocié du paragraphe 31 de la déclaration et des libellés des paragraphes 17, 18 et 24 relatifs aux migrants.

Les États-Unis se sont déclarés heureux de se joindre au consensus sur l’adoption de cette déclaration.  Soulignant leur attachement à la mise en œuvre du Programme 2030, ils ont rappelé qu’ils sont le plus grand fournisseur de développement international et d’aide humanitaire pour la sécurité alimentaire et la nutrition.  Ils ont également souligné leur engagement en matière de coopération internationale afin de relever les défis mondiaux urgents, telle la lutte contre la pandémie de COVID-19 et ses effets.  Nous nous sommes engagés à faire don d’un demi-milliard de vaccins Pfizer à 92 pays à revenu faible et intermédiaire et à l’Union africaine, a relevé la délégation, faisant observer que ces vaccins s’ajoutent aux 80 millions de doses que les États-Unis se sont engagés à fournir d’ici à la fin du mois, en plus des 2 milliards de dollars déjà versés au Mécanisme COVAX. 

Le représentant des États-Unis a cependant exprimé des préoccupations concernant la déclaration telle qu’adoptée.  Il a ainsi regretté que de nombreuses questions cruciales aient été omises, telles que l’approche « Une seule santé » pour la préparation aux pandémies et l’élimination des pires formes de travail des enfants.  D’autres questions ont été présentées de façon déséquilibrée ou inexacte, selon les États-Unis, notamment les libellés sur les infrastructures durables, l’approvisionnement mondial et la gestion durable de l’eau, a déploré le délégué, notant par ailleurs que la déclaration ne reconnaît pas la « source » des droits de l’homme dans le développement, y compris en ce qui concerne le droit à l’alimentation et au le droit à l’eau potable et à l’assainissement.

Les États-Unis ont également exprimé leur préoccupation quant au fait que de nombreux paragraphes tentent de caractériser ou d’influencer les processus menés dans des forums indépendants, en particulier sur les questions commerciales et financières.  Pour la délégation, l’ONU doit respecter les mandats indépendants des autres processus et institutions, y compris les négociations commerciales, et ne doit pas tenter d’interférer avec les décisions de ces forums.  De fait, les États-Unis ont indiqué qu’ils ne considéreront pas ces libellés comme convenus dans les négociations futures.  Parmi ces derniers, le représentant a cité les libellés sur les flexibilités de l’ADPIC dans le cadre de l’OMC, sur les mesures commerciales d’urgence, sur la propriété intellectuelle et les transferts de technologie, et sur le traitement de la dette dans le cadre de l’Initiative de suspension du service de la dette.

Le représentant a d’autre part estimé que l’inclusion du paragraphe 35 représente une tentative de politiser le travail important que les États Membres entreprennent dans le cadre du forum politique de haut niveau.  C’est pourquoi sa délégation a voté contre.  Enfin, rappelant qu’ils ont expliqué leur position sur le Programme 2030 le 1er septembre 2015, les États-Unis ont dit apprécier les efforts déployés par les délégations pour négocier une « déclaration percutante » qui reflète notre engagement commun en faveur du développement durable.

Le Mexique a dit que le principe de « ne laisser personne sur le côté » guide son action en matière de développement durable, avec un accent sur les communautés oubliées comme les peuples autochtones.  Il a insisté sur l’accès équitable aux vaccins, qui doivent être traités comme un bien public mondial.  Les dispositions de la déclaration sur le sujet auraient dû être plus claires et plus ambitieuses, a-t-il estimé, avant d’insister aussi sur une application systématique de la perspective de genre dans tous les domaines du développement durable.  Il a salué l’inclusion de l’Initiative du G20 sur la réduction du service de la dette mais a rejeté les tentatives visant à amoindrir les engagements en faveur des groupes les plus vulnérables, tels que les migrants et les réfugiés.

Après l’adoption de la déclaration ministérielle, la Fédération de Russie a félicité les facilitateurs pour leurs efforts durant le processus de négociation qui a duré plusieurs mois.  Bien qu’elle ait soutenu l’adoption de la déclaration ministérielle, elle a exprimé ses regrets devant le rejet de ses propositions d’amendements.  La Fédération de Russie s’est donc distanciée des paragraphes 20, 25 et 36.  Concernant le libellé du paragraphe 34 concernant la participation des enfants à la mise en œuvre et l’examen du programme de développement durable à l’horizon 2030, elle a indiqué que la participation des enfants effectuant de tels travaux, jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge de la majorité, devrait se limiter à la famille et à l’école.   

Le Royaume-Uni s’est réjoui que le consensus ait prévalu sur cette déclaration ministérielle.  Il a rappelé son soutien aux droits humains, aux solutions basées sur la nature, à l’égalité des sexes et au concept « Une seule santé » de l’ONU.  Soulignant que le Programme 2030 a pour objectif premier de ne laisser personne de côté, il a plaidé pour plus d’ambition afin de soutenir et d’autonomiser les populations des pays en situation particulière, notamment les pays les moins avancés (PMA) et les petits États insulaires en développement (PEID).  Par ailleurs, en écho aux préoccupations exprimées par le Groupe des 77 et la Chine sur la procédure d’approbation tacite, le Royaume-Uni a regretté l’absence de transparence sur les changements opérés au paragraphe 8.  Il serait préférable, a-t-il dit, qu’en cette Décennie d’action et face au défi que continue de poser la COVID-19, la communauté internationale se concentre sur la mise en œuvre du Programme 2030 plutôt que sur sa réécriture.  

La Turquie a salué à son tour l’adoption par consensus de la déclaration ministérielle.  Elle a salué la référence à un accès équitable aux vaccins pour les pays en situation particulière, à l’égalité des sexes, à l’autonomisation des femmes et des filles, et au nécessaire renforcement des systèmes de protection sociale.  Notant que les défis actuels sont trop complexes pour être abordés individuellement par les États Membres, elle a plaidé pour plus de coopération et de solidarité, notamment en faveur des groupes les plus vulnérables.  Selon elle, un soutien accru est également nécessaire pour les pays les moins avancés (PAM) et les petits États insulaires en développement (PEID) confrontés à plusieurs crises, dont celle liée aux changements climatiques.  Enfin, la Turquie a une nouvelle fois appelé de ses vœux un objectif séparé sur l’eau, regrettant à cet égard que la déclaration ne contienne pas de libellé sur l’ODD 6.  

L’Iraq a indiqué que les négociations ont duré quatre mois pour parvenir à cette déclaration « d’espoir » face aux graves conséquences de la pandémie.

Le représentant du Guatemala a dit se joindre au consensus compte tenu de la grande importance qu’il accorde au mandat qu’exerce le forum politique de haut niveau pour examiner et suivre la mise en œuvre du Programme 2030.  Il a cependant décidé de se dissocier du paragraphe 8 de la déclaration car il n’admet pas le terme de « coopération transfrontalière » s’agissant des cours d’eau.  La Constitution du pays reconnaît en effet l’eau comme un « bien de l’État » qui doit être administré et utilisé par les organes nationaux compétents au profit de leur population.  De fait, a indiqué la délégation, le Guatemala considère que l’utilisation des cours d’eau internationaux doit faire l’objet de traités internationaux bilatéraux, dont la négociation et la conclusion revient exclusivement aux États concernés. 

La Suisse a loué le caractère « équilibré » de la déclaration, notamment en ce qui concerne le rôle des organisations de la société civile.  Elle a plaidé pour un accès équitable aux vaccins et souhaité une solution consensuelle et applicable sur la taxation de l’économie numérique.  Elle a regretté le changement « à la dernière minute » du libellé du paragraphe 8 et la faiblesse du libellé sur les droits reproductifs.

Les représentants de la République de Corée, d’Israël, de la République islamique d’Iran, de l’Éthiopie et de l’Ukraine ont également pris la parole, mais après le départ des interprètes.

Déclarations de clôture

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme AMINA J. MOHAMMED, a salué huit jours solides de délibérations et de réflexion qui ont vu neuf objectifs de développement durable examinés en profondeur, et les résultats de 42 examens nationaux volontaires présentés et discutés.  Elle a noté que les délibérations ont souligné l’innovation des décideurs politiques ainsi que le courage et la résilience des communautés pendant la pandémie.  Une observation récurrente des travaux aura été que les changements mis en place pour répondre à la pandémie peuvent fournir une base pour progresser sur les ODD.  L’apprentissage numérique, par exemple, était une bouée de sauvetage pour de nombreux gens pendant la pandémie, et l’expansion équitable du numérique à l’éducation pourrait contribuer à réduire la fracture numérique, améliorer l’accès à l’apprentissage et transformer plus largement l’éducation.  De même, de nombreux pays ont répondu à la crise en mettant en œuvre un soutien essentiel à l’économie, à l’emploi et en faveur des citoyens.  Les gouvernements devraient maintenant examiner si certaines de ces mesures peuvent être intégrées dans un système global de protection sociale, a-t-elle encore relevé.

Au cours de nos délibérations, a poursuivi Mme Mohammed, nous avons également entendu comment les efforts de relance peuvent être conçus à la fois pour relancer les économies et accélérer la mise en œuvre des ODD.  Par exemple, les plans de relance et les droits de tirage spéciaux (DTS) peuvent être mis à profit pour faire progresser l’égalité des sexes; booster les investissements dans l’éducation, la santé et la protection sociale; et accélérer les transitions majeures nécessaires pour vaincre les changements climatiques et générer des emplois décents.  Enfin, a dit la Vice-Secrétaire générale, nous avons entendu haut et fort qu’il ne peut y avoir de sortie de la pandémie sans solidarité internationale et coopération, notamment par le biais du financement climatique et du financement du développement.  Cela s’étend, a-t-elle précisé, à la fourniture d’une bouée de sauvetage financière pour les pays en développement confrontés à d’importantes pressions d’endettement.  Le système des Nations Unies pour le développement s’est engagé à soutenir ces efforts, a-t-elle relevé, soulignant que sous la direction d’une équipe capable et indépendante de coordonnateurs résidents, les équipes de pays ont répondu aux besoins et priorités des gouvernements au cours de la pandémie.  Nous ne devons pas laisser tomber notre ambition collective alors que les besoins n’ont jamais été aussi importants, a déclaré Mme Mohammed.

En outre, elle a dit que « nous quittons ce forum pleinement conscients de l’ampleur du défi qui nous attend pour le reste de la Décennie d’action ».  Mais nous partons aussi avec espoir et détermination.  Et les décisions qui seront prises au cours des six prochains mois, au Sommet sur les systèmes alimentaires, au Dialogue de haut niveau sur l’énergie, à la COP15 sur la biodiversité et la COP26 sur le climat, peuvent nous remettre sur la voie pour tenir la promesse du Programme 2030 et de l’Accord de Paris sur les changements climatiques.  N’oublions pas, a plaidé la Vice-Secrétaire générale, que pour de nombreux pays en développement, la pandémie fait toujours rage, des gens meurent encore à des niveaux inacceptables, et les économies sont dans une situation désespérée.  Elle a appelé à soutenir ces pays dans leur réponse à la pandémie de COVID-19 et à reconstruire en mieux afin d’accélérer la mise en œuvre des ODD.  Selon elle, il s’agit avant tout de garantir l’universalité d’accès aux vaccins contre la COVID-19.  Avec un leadership politique, la solidarité et l’unité d’objectif, nous pouvons mettre fin à la pandémie, obtenir des améliorations majeures dans la vie des gens d’ici à 2030, et tenir la promesse du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a-t-elle espéré.

M. MUNIR AKRAM, Président de l’ECOSOC, a salué la tenue de ce forum politique « intense, inspiré et orienté vers l'action » qui, a-t-il ajouté, montre un engagement fort et continu envers le Programme 2030 et l’Accord de Paris.  Il a relevé que les débats ont été marqués par de grandes inquiétudes face à la crise actuelle ainsi que par un appel fort et manifeste à la solidarité mondiale.

Un large accord s’est dégagé sur le fait qu’assurer un accès équitable, universel et abordable au vaccin est un impératif moral, le seul moyen de surmonter la pandémie et une condition sine qua non pour une reprise mondiale résiliente et durable, a-t-il notamment relevé.  Mais de nombreux pays en développement ont appelé à des réponses plus ambitieuses, y compris la création éventuelle d’une nouvelle architecture de la dette.  M. Akram a appelé à établir des plans de relance capables de soutenir, entre autres, l’investissement dans des infrastructures durables, le renforcement des systèmes de protection sociale et la garantie d’une couverture sanitaire universelle.  Nous devons mettre notre réponse à l’épreuve du climat et veiller à ce qu’elle renforce la protection de l’environnement, a ajouté M. Akram pour qui construire des sociétés pacifiques, égalitaires et inclusives nécessite une approche centrée sur les personnes et protectrice des plus vulnérables.

Poursuivant, le Président de l’ECOSOC a constaté que l’année écoulée a souligné à quel point la science, la technologie et l’innovation peuvent garantir des progrès face à des problèmes massifs et apparemment insolubles.

Mais nous devons élargir la coopération internationale, en facilitant l’accès ouvert aux technologies, notamment pour le vaccin, les connaissances et les solutions, a-t-il tempéré.  Il a également espéré que les appels à la suspension des accords sur les droits de propriété intellectuelle seront entendus.  Nous devons, a-t-il insisté, augmenter l’échelle de nos actions, les rendre plus efficaces et ciblées, inclure le climat, les dimensions environnementales et, encore une fois, travailler ensemble pour ne laisser personne de côté.

Le Président de l’ECOSOC a vu dans la déclaration ministérielle adoptée aujourd’hui l’expression de l’engagement des États Membres à réaliser la vision du Programme 2030 et à surmonter la pandémie grâce à la coopération internationale, au multilatéralisme, et à des politiques guidées par des preuves et un souci d’équité - et soutenues par un financement et une technologie adéquats.  Nous avons maintenant besoin d’une volonté politique pour que nos pays, nos citoyens, nos secteurs d’activité et nos sociétés adoptent et soutiennent ces mesures essentielles pour une reprise durable grâce à des actions accélérées, a affirmé M. Akram.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Libye: les membres du Conseil insistent sur la tenue des élections présidentielle et législatives à la date prévue du 24 décembre 2021, « clef de voûte » de la transition

8820e séance – matin
CS/14581

Libye: les membres du Conseil insistent sur la tenue des élections présidentielle et législatives à la date prévue du 24 décembre 2021, « clef de voûte » de la transition

Munis d’une Déclaration présidentielle, les membres du Conseil de sécurité ont entendu aujourd’hui l’Envoyé spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) faire le point sur les problèmes liés au processus électoral libyen.  Il est « impératif » que le calendrier soit respecté, à savoir la tenue des élections présidentielle et législatives, le 24  décembre prochain, « clef de voûte » du processus de transition, a martelé le Ministre français des affaires étrangères qui s’est exprimé aux côtés de ses homologues de la Tunisie et de l’Allemagne, sans oublier le Premier Ministre libyen et le Secrétaire général de la Ligue des États arabes. 

Nous ne pouvons, en aucun cas, transiger sur la date du 24 décembre, pour quelque motif que ce soit, a insisté M. Jean-Yves Le Drian, dont le pays préside le Conseil de sécurité ce mois-ci.  Ce Conseil, a-t-il rappelé, a été clair, avec la résolution 2571 (2021: « tous ceux qui essaieront de mettre en échec le processus politique pourront être sanctionnés. ».  Dans sa Déclaration présidentielle, le Conseil exhorte vivement les autorités compétentes de la Libye, dont la Chambre des députés, à prendre des mesures immédiates pour préciser la base constitutionnelle des élections et promulguer, le cas échéant, les lois nécessaires pour permettre à la Haute Commission électorale nationale de bénéficier d’un temps et de ressources suffisantes afin de préparer le scrutin.  Le Conseil rappelle que les sanctions énoncées dans la résolution 1970 (2011), telles que modifiées par des résolutions ultérieures, peuvent s’appliquer également aux personnes qui entravent ou compromettent la tenue des élections. 

Ces personnes ont été dûment dénoncées par le Chef de la MANUL, M. Jan Kubiš, qui a parlé d’une situation « plus difficile, plus conflictuelle et plus tendue » où les forces anciennes et nouvelles du statu quo utilisent différentes tactiques pour empêcher la tenue des élections.  Dans sa Déclaration présidentielle, le Conseil de sécurité engage tout aussi vivement tous les États Membres, toutes les parties libyennes et tous les acteurs concernés à respecter et à appuyer l’application intégrale de l’accord de cessez-le-feu du 23 octobre 2020, notamment au moyen du retrait intégral et immédiat de l’ensemble des forces étrangères et des mercenaires du territoire libyen, sans délai. 

Or, a fait observer le Chef de la MANUL, le Gouvernement d’unité nationale et le Conseil de la Présidence ne sont toujours pas accordés sur la nomination du Ministre de la défense, un poste crucial pour la mise en œuvre de l’Accord de cessez-le-feu alors que la Commission militaire mixte 5+5 a reporté la réouverture de la route côtière reliant les parties est et ouest, compte tenu de l’impasse sur le retrait des mercenaires et des forces étrangères.  La Fédération de Russie a plaidé pour un retrait « progressif et synchronisé », pour veiller à ce que le rapport de force actuel « sur le terrain » ne soit pas bouleversé, au risque d’ouvrir la voie à une nouvelle escalade armée.  À ce propos, le Chef de la MANUL a indiqué que le Gouvernement et la Commission militaire mixte 5+5 souhaitent que la tâche principale de la composante onusienne du Mécanisme libyen de surveillance du cessez-le-feu soit la surveillance dudit retrait. 

Le Conseil rappelle d’ailleurs, dans sa Déclaration présidentielle, l’obligation de tous les États Membres de respecter l’embargo sur les armes et l’engagement des participants à la Conférence de Berlin II, du 23 juin dernier, à s’abstenir de toute ingérence dans les affaires intérieures de la Libye.  Le Ministre allemand des affaires étrangères, qui a présenté les conclusions de la Conférence, a appelé le Conseil à « la fermeté » pour maintenir le cap.  Par ailleurs, dans sa Déclaration présidentielle, le Conseil constate avec une vive préoccupation les répercussions du conflit sur les pays voisins, en particulier sur le Sahel. 

Il est  « primordial » que des mesures soient prises, a pressé le Niger, pour éviter que le Sahel ne subisse une deuxième vague de conséquences directes du conflit.  Les évènements dramatiques que le Tchad a connus nous rappellent combien il est urgent de prendre en considération les impératifs de paix, de stabilité et de sécurité des voisins de la Libye, a-t-il souligné.  Le Conseil rappelle enfin, dans sa Déclaration présidentielle, qu’il est nécessaire de planifier le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR) des groupes armés et de tous les acteurs non étatiques armés concernés et d’édifier un dispositif de sécurité unifié, inclusif, comptable de son action et placé sous le contrôle des autorités civiles. 

En la matière, le Premier Ministre libyen, M. Abdul Hamid Dbeibeh a demandé l’aide de la communauté internationale, sans oublier d’accuser certains États « d’exploiter » la résolution 1970 (2011).  Il a réclamé la modification du régime des sanctions pour permette aux institutions compétentes de gérer les avoirs malgré le gel.  Dans sa Déclaration présidentielle, le Conseil réaffirme son intention de veiller à ce que les avoirs gelés soient, « à une étape ultérieure », mis à la disposition du peuple libyen et utilisés à son profit.  Le Premier Ministre a tout de même estimé qu’« une lueur d’espoir brille désormais au bout d’un tunnel qui n’est que trop long ». 

Après une décennie d’instabilité, la signature de l’accord de cessez-le-feu du 23 octobre 2020, puis l’investiture du Gouvernement d’union nationale, « pour la première fois depuis longtemps, la paix est à portée de main en Libye, a confirmé le Ministre français des affaires étrangères.  Nous sommes prêts à partager avec « nos frères libyens » notre expérience, a déclaré le Ministre tunisien des affaires étrangères, M. Othman Jerandi, au nom d’un pays qui a lui-même vécu « les subtilités et les complexités » de la transition démocratique.  Les Libyens doivent passer de la « logique de la concurrence » à celle du consensus, a préconisé le Secrétaire général de la Ligue des États arabes, M. Ahmed Gheit.  

Déclaration du Président du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité se félicite de la tenue, le 23 juin 2021, de la deuxième Conférence de Berlin, de ses conclusions (S/2021/595) et de l’attachement des participants au processus politique dirigé et contrôlé par la Libye et facilité par l’Organisation des Nations Unies ainsi qu’à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Libye. Le Conseil se félicite de l’inclusion de la Libye comme membre du Comité international de suivi de la situation en Libye.

Le Conseil exprime son soutien au Conseil de la présidence et au Gouvernement d’unité nationale de transition, chargés de gouverner la Libye jusqu’à la période des élections nationales présidentielle et législatives du 24 décembre 2021, comme énoncé dans la feuille de route du Forum de dialogue politique interlibyen, tenu à Tunis en novembre 2020, et dans sa résolution 2570 (2021).

Le Conseil insiste sur l’importance d’élections présidentielle et législatives libres, équitables, régulières et crédibles et souligne qu’il importe de mettre en place des dispositions visant à assurer la participation pleine, égale et effective des femmes et l’inclusion des jeunes. Il considère qu’il est nécessaire de protéger les femmes contre les menaces et les représailles qu’elles sont amenées à subir, notamment dans les rôles qu’elles peuvent assumer dans l’espace public.

Le Conseil rappelle l’importance que revêtent l’unification des institutions libyennes, une bonne gouvernance et l’amélioration des résultats économiques, notamment au moyen d’un accord rapide sur un budget unifié ainsi que sur la question des postes souverains, telle qu’énoncée dans la feuille de route. Il constate avec satisfaction que l’audit indépendant de la Banque centrale a été mené à bien. 

Le Conseil réaffirme son intention de veiller à ce que les avoirs gelés en application des dispositions du paragraphe 17 de la résolution 1970 (2011) soient, à une étape ultérieure, mis à la disposition du peuple libyen et utilisés à son profit.

Le Conseil rappelle que les participants à la deuxième Conférence de Berlin s’étaient engagés à accepter et à appuyer les résultats du processus politique intralibyen et adressé un appel à tous les Libyens et aux acteurs internationaux pour qu’ils en fassent autant.

Le Conseil souligne l’importance d’un processus de réconciliation nationale global et inclusif. Il se félicite du concours qu’apporte l’Union africaine à cet égard et salue le rôle important des organisations régionales telles que la Ligue des États arabes et l’Union européenne.

Le Conseil exhorte vivement les autorités et institutions compétentes, dont la Chambre des députés, à prendre des mesures immédiates pour préciser la base constitutionnelle des élections et promulguer, le cas échéant, les lois nécessaires pour permettre à la Haute commission électorale nationale de bénéficier d’un temps et de ressources suffisantes afin de préparer des élections présidentielle et législatives, selon le calendrier prescrit dans la feuille de route du Forum de dialogue politique interlibyen. Il demande une fois de plus au Forum de prendre des mesures visant à faciliter les élections, si besoin est, et se félicite des efforts faits par la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) pour encourager le Forum à élaborer des propositions en vue d’un processus électoral libre, équitable et inclusif.

Le Conseil rappelle que les mesures énoncées dans la résolution 1970 (2011), telles que modifiées par des résolutions ultérieures, s’appliqueraient également aux personnes et entités dont le Comité avait déterminé qu’elles se livraient ou qu’elles apportaient un appui à d’autres actes qui mettaient en danger la paix, la stabilité ou la sécurité en Libye ou qui entravaient ou compromettaient la réussite de sa transition politique, et souligne que ces actes peuvent comprendre le fait d’entraver ou de compromettre la tenue des élections prévues dans la feuille de route établie dans le cadre du Forum de dialogue politique interlibyen.

Le Conseil engage vivement tous les États Membres, toutes les parties libyennes et tous les acteurs concernés à respecter et à appuyer l’application intégrale de l’accord de cessez-le-feu du 23 octobre 2020, notamment au moyen du retrait intégral et immédiat de l’ensemble des forces étrangères et des mercenaires du territoire libyen, sans délai.

Le Conseil rappelle que la Mission d’appui des Nations Unies en Libye joue un rôle pour ce qui est de l’application du cessez-le-feu et qu’elle est tenue d’appuyer le Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu dirigé et contrôlé par la Libye, notamment au moyen du déploiement rapide, évolutif et progressif de ses observateurs du cessez-le-feu lorsque les conditions le permettront.

Le Conseil rappelle qu’il a décidé que tous les États Membres devaient respecter l’embargo sur les armes imposé à la Libye par la résolution 1970 (2011), telle que modifiée par les résolutions ultérieures.

Le Conseil rappelle l’engagement pris par les participants à la Conférence de Berlin de s’abstenir de toute ingérence dans le conflit armé ou dans les affaires intérieures de la Libye et l’appel adressé à tous les acteurs internationaux pour qu’ils en fassent autant.

Le Conseil constate avec une vive préoccupation les répercussions du conflit sur les pays voisins, en particulier sur le Sahel, et notamment les menaces que font peser le transfert illicite, l’accumulation déstabilisante et le détournement d’armes, ainsi que l’afflux de groupes armés et de mercenaires. Il encourage un resserrement de l’appui international et de la coopération régionale entre la Libye et le Sahel.

Le Conseil se déclare à nouveau gravement préoccupé par le trafic de migrants et de réfugiés et par la traite d’êtres humains, ainsi que par la situation tragique à laquelle se heurtent les migrants, les réfugiés ou les personnes déplacées, notamment les enfants, en Libye, et il rappelle la nécessité d’accompagner les nouvelles mesures prises pour renforcer la gestion des frontières libyennes.

Le Conseil souligne que les responsables des violations du droit international humanitaire et des violations du droit international des droits de l’homme et des atteintes à ces droits doivent répondre de leurs actes.

Le Conseil rappelle qu’il est nécessaire de planifier le désarmement, la démobilisation et la réintégration des groupes armés et de tous les acteurs non étatiques armés concernés ainsi que la réforme du secteur de la sécurité et d’édifier, pour l’ensemble de la Libye, un dispositif de sécurité unifié, inclusif, comptable de son action et placé sous le contrôle des autorités civiles, et il demande aux autorités libyennes de se mobiliser et de progresser sur cette question.

LA SITUATION EN LIBYE

Déclarations

Alors que tous mes interlocuteurs ont réitéré leur engagement à organiser des élections le 24 décembre, je crains que beaucoup d’entre eux ne soient pas prêts à traduire leur parole en acte, a prévenu M. JÁN KUBIŠ, Envoyé spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission dappui desNations Unies en Libye (MANUL), qui vient de tenir des consultations avec les parties en Libye.  La tenue des élections à la date prévue est nécessaire, a-t-il souligné, pour parachever la transition démocratique et éviter une reprise du conflit, de la violence et du chaos.  L’Envoyé spécial a regretté que la Chambre des représentants, l’organe mandaté pour définir la base constitutionnelle des élections en consultation avec le Haut Conseil d’État, ne se soit pas encore prononcée.  La semaine dernière, a-t-il indiqué, le nouveau Comité de la Chambre des représentants, créé pour préparer les lois électorales, a demandé le soutien de l’ONU.  J’ai conseillé au Président de la Chambre, a dit l’Envoyé spécial, de consulter le Haut Conseil d’État, conformément à l’Accord politique libyen, et de veiller à ce que la base juridique et constitutionnelle des élections soit en place, conformément à la résolution 2570 du Conseil de sécurité et des conclusions de la Conférence de Berlin II et de la feuille de route du Forum de dialogue politique libyen. 

Parmi les questions en suspens, a précisé M. Kubiš, figurent la tenue ou non d’un référendum sur le projet de constitution, les critères d’éligibilité des candidats, en particulier du président, et la représentation des composantes culturelles.  Malgré l’incapacité du Forum de dialogue politique libyen de résoudre ces questions à l’issue de sa session de mai, M. Kubiš s’est réjoui qu’une rencontre tenue à Genève, du 28 juin au 2 juillet, après la réunion de préparation à Tunis du 24 au 26 juin, ait abouti à un large consensus sur une proposition de compromis.  Cependant, a-t-il avoué, il est devenu clair à Genève que les membres du Forum sont fragmentés en divers blocs et groupes d’intérêts. Nous n’avons donc toujours pas une proposition finale de base constitutionnelle. En raison de cet échec, la situation en Libye devient plus difficile, plus conflictuelle et plus tendue, a prévenu l’Envoyé spécial.  Les intérêts institutionnels, politiques et individuels font obstacle à un accord sur le cadre juridique nécessaire à la tenue des élections le 24 décembre 2021. 

L’Envoyé spécial a accusé les forces anciennes et nouvelles du statu quo d’utiliser différentes tactiques pour empêcher la tenue des élections.  Certains groupes insistent sur la mise en place des conditions préalables aux élections, ce qui mettrait en péril le respect du calendrier.  Ils exigent en effet l’organisation du référendum constitutionnel, le retrait de tous les mercenaires, combattants étrangers et forces étrangères ou encore la réunification de l’armée et la réconciliation nationale.  D’autres groupes s’opposent à l’idée de barrer l’accès à l’éligibilité à ceux qui ont la double nationalité, ceux qui sont inculpés sans être reconnus coupables et ceux qui occupent des postes militaires.  D’autres encore craignent que la Libye ne retourne à la dictature si les élections se tenaient sans une constitution permanente ou sur une base constitutionnelle qui ne restreigne pas les critères d’éligibilité ou ne limite pas les prérogatives du nouveau président. 

Malgré l’absence d’un cadre électoral législatif, M. Kubiš a indiqué que la Haute Commission électorale nationale (HNEC) a lancé le 4 juillet la mise à jour de la liste des électeurs, avec une disposition spéciale pour l’inclusion des déplacés.  Si l’impasse sur la base constitutionnelle et entre les institutions de l’État persiste, la dynamique positive observée depuis quelques mois seulement pourrait s’inverser, a prévenu l’Envoyé spécial.  Il s’est inquiété des conséquences de cette impasse sur d’autres priorités nationales clefs, notamment les volets sécuritaire et économique.  Il a par exemple expliqué que la Chambre des représentants n’a pas adopté le budget présenté par le Gouvernement d’unité nationale et qu’elle et le Haut Conseil d’État ne se sont toujours pas d’accord sur la marche à suivre pour les nominations aux postes régaliens, malgré plusieurs réunions facilitées par le Maroc. 

L’armée nationale libyenne n’a toujours pas autorisé le Gouvernement d’unité nationale à étendre son autorité aux zones qu’elle contrôle et ce dernier et le Conseil de la Présidence n’ont pas pu se mettre d’accord sur la nomination du Ministre de la défense, un poste crucial pour la mise en œuvre de l’Accord de cessez-le-feu, pour les progrès en matière de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR) des groupes armés, pour la réforme du secteur de la sécurité et la réunification de l’armée.  La Commission militaire mixte 5+5 a reporté la réouverture de la route côtière reliant les parties est et ouest du pays pour protester contre l’incapacité de prendre des décisions qui faciliteraient la tenue des élections à la date convenu et de surmonter l’impasse sur le retrait des mercenaires, des combattants étrangers et des forces étrangères.  Bien que l’accord de cessez-le-feu continue de tenir malgré des affrontements mineurs entre des groupes armés et des gangs criminels, M. Kubiš a dit craindre que l’unité du Comité mixte de suivi ne s’effondre si le processus politique reste au point mort. 

L’Envoyé spécial a assuré que les Nations Unies continueront de soutenir la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu et a fait le point sur les préparatifs en cours pour le déploiement d’une composante de surveillance du cessez-le-feu de la MANUL en appui au Mécanisme de surveillance dirigé par la Libye.  Le Gouvernement et la Commission militaire mixte 5+5 souhaitent d’ailleurs que la tâche principale de la composante onusienne soit la surveillance du retrait des mercenaires et des combattants étrangers, plutôt que les patrouilles pour vérifier le respect de l’accord de cessez-le-feu.  Rappelant, dans ce contexte, l’importance de la réouverture de la route côtière, l’Envoyé spécial a indiqué que le Conseil de la Présidence a instruit, le 8 juin, le commandant des opérations de Syrte-Jufra de relocaliser ses groupes armés, étape nécessaire avant la réouverture de la route.  M. Kubiš a néanmoins regretté que cet élan positif ne se soit pas traduit par des dispositions définitives sur cette réouverture de la route côtière, compte tenu du blocage du calendrier électoral. 

La présence des forces étrangères et des mercenaires menaçant le cessez-le-feu, l’Envoyé spécial a jugé impératif que les acteurs libyens et internationaux se mettent d’accord sur un plan de retrait.  Alors que la situation sécuritaire est encore compliquée par les récents attentats et la menace terroriste renouvelée d’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) et de Daech, en particulier dans le Sud, il s’est inquiété des retards dans la réunification de l’appareil sécuritaire et militaire de la Libye, et de l’absence d’une approche centralisée et coordonnée, facilitant les recrutements, les opérations et les activités asymétriques des organisations extrémistes violentes.  M. Kubiš a exhorté les acteurs libyens de la sécurité à lutter conjointement contre cette menace, en consultation et en coopération avec la Commission militaire mixte 5+5 et les acteurs locaux dont les chefs de tribu. 

Après avoir mis l’accent sur les efforts de la MANUL, en partenariat avec l’Union africaine, en matière de réconciliation, M Kubiš s’est inquiété de la situation des migrants.  Au 26 juin 2021 les garde-côtes libyens avaient intercepté et renvoyé sur les côtes du pays 14 751 migrants et refugiés, soit un chiffre supérieur au total enregistré en 2020.  Au 21 juin, environ 6 377 migrants et réfugiés étaient détenus arbitrairement, soit une augmentation de 550% depuis janvier 2021.  L’Envoyé spécial a appelé les États Membres à prendre conscience que compte tenu de sa situation humanitaire et des droits de l’homme ou encore de sa faible capacité de protection, la Libye n’est pas un territoire de choix pour le retour des migrants interceptés en mer. 

M. JEAN-YVES LE DRIAN, Ministre de lEurope et des affaires étrangères de la France, a dit:« nous avons la responsabilité de soutenir l’aspiration légitime des Libyens à vivre dans un pays sûr, uni et souverain, en nous mobilisant pour que la fenêtre d’opportunité qui s’est ouverte à la fin de l’année dernière ne se referme pas.  La signature de l’accord de cessez-le-feu du 23 octobre 2020 entre les parties libyennes, la réunion du Forum de dialogue politique libyen, puis l’investiture du Gouvernement d’union nationale par le Parlement sont autant de signes que des progrès sont possibles, a estimé le Ministre.  Il a toutefois attiré l’attention sur « les réelles menaces qui pèsent sur cette dynamique ». 

Le Ministre a jugé « impératif » que le calendrier électoral soit respecté, à savoir la tenue des  élections législatives et présidentielle, le 24 décembre prochain.  Il a souligné que cette date a été contestée par certains des participants à la dernière réunion du Forum, à Genève, alors qu’elle est « la clef de voûte » du processus de transition.  Nous ne pouvons donc, en aucun cas, transiger sur la date du 24 décembre, pour quelque motif que ce soit, a martelé le Ministre.  Le Conseil de sécurité, a-t-il rappelé, a été clair, avec la résolution 2571: « tous ceux qui essaieront de mettre en échec le processus politique pourront être sanctionnés. »  Comme autre « impératif », le Ministre a cité le retrait des forces et des mercenaires étrangers, dont la présence constitue une violation des résolutions de ce Conseil et une atteinte grave à la souveraineté de la Libye. 

Le Ministre a réclamé un calendrier de départ « progressif, symétrique et séquencé » des éléments étrangers des deux camps.  Ce retrait, s’est-il expliqué, pourrait concerner, dans un premier temps, les mercenaires syriens des deux camps, dès les prochaines semaines pour engager une dynamique visant, à terme, le départ de toutes les forces et mercenaires étrangers du territoire libyen.  Dans cette perspective, la situation des pays voisins de la Libye doit évidemment être prise en compte, dont les pays du Sahel.  Les événements survenus récemment au Tchad, a souligné le Ministre, nous rappellent que nous devons veiller à ce que les mercenaires issus des voisins de la Libye soient renvoyés vers leur pays d’origine dans le cadre d’un processus de démobilisation crédible. 

En matière de sécurité, a-t-il poursuivi, la plus grande vigilance doit rester de mise.  Le Ministre a plaidé pour la réunification de l’armée et le démantèlement des milices, pour permettre aux autorités civiles d’assurer leurs responsabilités en matière de sécurité; le déploiement d’un mécanisme de surveillance, sous l’égide de la MANUL et en soutien aux décisions des Libyens; la poursuite de la lutte contre le terrorisme; la réouverture effective de la route côtière et le renforcement du contrôle que les autorités libyennes exercent sur leurs frontières terrestres et maritimes.  Le Ministre a aussi souligné que son pays, l’Union européenne et l’Italie sont disposés à faire davantage pour soutenir la formation et l’équipement des garde-côtes libyens.  L’opération IRINI pourrait y apporter une contribution essentielle, au-delà de sa fonction première, qui est la mise en œuvre de l’embargo sur les armes décidé par ce Conseil, a-t-il estimé. Pour la première fois depuis longtemps, « la paix est à portée de main en Libye », a affirmé le Ministre. 

Le Ministre des affaires étrangères, de limmigration et des Tunisiens de létranger, M. OTHMAN JERANDI, a rappelé que pour son pays, la solution à la crise en Libye passe par un dialogue entre Libyens.  Dans ce contexte, le Président tunisien, M. Kais Saied, a appelé les Libyens à s’unir autour d’un projet national pour restaurer la sécurité et la stabilité.  Le Forum de dialogue libyen que la Tunisie a accueilli en novembre 2020, sa feuille de route et ses objectifs clairs, a été le début d’une véritable percée dans la voie politique, a noté le Ministre.  Les prochaines élections présidentielle et législatives qui se tiendront à la fin de cette année, a-t-il estimé, constituent sans aucun doute un tournant dans le processus politique libyen, car elles marquent le début d’une voie démocratique permanente et la mise en place des fondements de l’état de droit et des institutions en Libye. 

Dans ce contexte, la Tunisie exprime sa satisfaction pour la confirmation par les « frères libyens » de leur engagement à tenir ces élections selon le calendrier établi, et pour les avancées notées lors de la récente Conférence de Berlin 2.  Il a renouvelé la disponibilité de la Tunisie à mettre son expérience au service de ses « frères » et à partager son expérience dans les domaines constitutionnel, législatif et électoral.  Nous exhortons également tous les partis politiques à poursuivre un dialogue constructif et responsable, dans le but de parvenir à une formule consensuelle de la base constitutionnelle des élections et de laisser le peuple exercer son droit de vote, a indiqué M. Jerandi. 

Le Ministre a jugé nécessaire d’accélérer la mise en place du mécanisme de surveillance du cessez-le-feu libyen avec l’appui des Nations Unies.  Selon lui, le retrait des combattants et mercenaires étrangers est une condition préalable à la stabilité, étant donné que ces derniers sont une menace grave pour la Libye et pour toute la région, en particulier les pays voisins.  Le Ministre a réitéré la nécessité de redoubler d’efforts au sein des différents mécanismes internationaux et régionaux de coopération sécuritaire et de lutte contre le terrorisme, de la Communauté des États sahélo-sahariens et du Partenariat transsaharien de lutte contre le terrorisme, pour renforcer les capacités de coopération entre les pays du Sahel et d’Afrique du Nord. 

M. Jerandi a également insisté sur la nécessité de renforcer les mécanismes de coordination et de contrôle pour prévenir l’aggravation de la migration illégale par la mer, d’autant plus que la période récente a été témoin par une augmentation des flux de migrants illégaux de diverses nationalités vers Les eaux territoriales tunisiennes, ce qui pose des défis sécuritaires, économiques, sociaux et humanitaires pour le pays.  S’adressant aux Libyens, il a dit que la Tunisie a elle-même vécu « les subtilités et les complexités » de la transition démocratique.  Ainsi, nous sommes conscients que la voie de la transition démocratique en Libye et de la construction institutionnelle pourra être suivie par « les frères libyens », avec le soutien de la communauté internationale, et avec le soutien « permanent » de la Tunisie, a conclu le Ministre. 

Mme RAYCHELLE OMAMO (Kenya) a salué le peuple libyen pour avoir, au cours de cette dernière année, avancé avec constance dans le processus de paix et continué à travailler à un pays pacifique, sûr et stable.  Chaque gain, si petit soit-il, doit être protégé, étant entendu que les processus de paix ne devraient jamais être imposés.  Il faut toujours, a-t-elle souligné, laisser une marge de manoeuvre pour que les peuples concernés puissent se réunir autour de la table, au nom de l’accpetation et de l’appropriation.  La représentante a donc encouragé le dialogue sur les élections du 24 décembre.  Elle a salué les mesures prises par le Gouvernement d’unité nationale pour galvaniser précisément l’unité, comme la création de l’Initiative de stabilistion.  La représenante a aussi salué celle de la Haute Commission nationale pour la réconciliation et le travail efectué par la Commission militaire conjointe 5+5 sur le déploiement d’une composante « surveillance du cessez-le-feu » de l’ONU au sein du Mécanisme libyen. 

À son tour, elle a appelé au départ de touts les combattants et mercenaires étrangers qui alimentent le terrorisme et l’extrémisme violent.  Elle a aussi appelé à un programme de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR), aux côtés d’une réforme du secteur de la sécurité qui tienne compte de la surveillance de la frontière Sud.  Elle a d’ailleurs estimé que le mandat de la MANUL doit être ajusté en conséquence pour inclure une dimension régionale dans le DDR. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré qu’une solution politique à la situation en Libye est possible mais que celle-ci repose sur la tenue des élections.  Des cadres juridiques et institutionnels doivent donc être mis en place pour permettre aux Libyens de prendre en main l’avenir de leur pays.  Il ne faut en aucun cas reporter ces élections, a-t-elle insisté, mettant en garde contre toute tentative d’ingérence.  Elle a jugé essentiel que les membres du forum de dialogue politique interlibyen se consacrent à nouveaux aux débats sur la voie à suivre pour les élections, notant que pour passer de la feuille de route à la réalité, des dispositions constitutionnelles et législatives doivent être adoptées. 

La représentante a par ailleurs appelé le Conseil de sécurité à exiger le départ immédiat des combattants étrangers et des mercenaires, insistant en outre sur l’importance de la pleine mise en œuvre du cessez-le-feu.  L’établissement d’un mécanisme de contrôle du cessez-le-feu jouerait un rôle essentiel en la matière, a-t-elle estimé.  Elle a appelé à tout faire pour éviter que les troubles-faite ne fassent dérailler les progrès durement acquis. 

M. HARSH VARDHAN SHRINGLA (Inde) a avoué un sentiment « d’optimisme prudent » face à la situation en Libye, en particulier depuis l’accord de cessez-le-feu du 23 octobre 2020.  Toutefois, a-t-il dit, la situation en matière de sécurité reste fragile, l’impact économique du conflit est aggravé par la pandémie de COVID-19 et la désintégration des institutions financières, et l’implication des forces extérieures dans les affaires internes de la Libye affectent les progrès politiques.  Les six prochains mois seront « cruciaux », a prévenu le représentant.  Il a relevé que le consensus autour de la base constitutionnelle des élections n’est toujours pas acquis.  Ces élections doivent se tenir le 24 décembre, comme prévu, a martelé le représentant.  

Il a aussi plaidé pour le respect de la souveraineté, de l’indépendance, de l’unité et de l’intégrité territoriale de la Libye, se félicitant de l’audit indépendant de la Banque centrale.  Il s’est en revanche inquiété de ce que les dispositions de l’accord de cessez-le-feu relatives au retrait des forces et mercenaires étrangers ne se soient toujours pas matérialisées.  Il est tout aussi alarmant, a-t-il ajouté, que l’embargo sur les armes continue d’être violé « de manière flagrante ».  Il a appelé le Conseil de sécurité à se pencher « avec sérieux » sur ces questions, avant d’insister à son tour, sur le renforcement de la lutte contre le terrorisme, l’élaboration d’un plan pour le DDR et le lancement d’un processus de réconciliation inclusif et global. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a appelé à honorer l’engagement de tenir des élections libres, justes et inclusives avec une participation « équitable et totale » des femmes.  Les parties doivent donc s’accorder sur les bases juridiques des élections pour que celles-ci se tiennent comme prévu le 24 décembre.  Elle a également engagé au respect complet du cessez-le-feu et a appelé à officialiser immédiatement le retrait des combattants étrangers et des mercenaires de Libye.  L’ouverture de la route côtière permettrait par ailleurs de renforcer la confiance entre les parties, a estimé la représentante qui a ensuite insisté sur l’importance que revêt la fourniture de services.  Il faut, a-t-elle souligné, faire perdurer l’élan qui a permis à la Libye des faire des progrès notables au cours de la dernière année. 

Avouant à son tour « un optimisme prudent », M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) s’est félicité de l’accord de cessez-le-feu qui a permis aux parties de commencer à surmonter progressivement leur méfiance mutuelle, fruit des 10 années d’un conflit provoqué par une intervention extérieure en 2011.  Tout en saluant la mise en place des nouvelles autorités, dont un gouvernement d’union nationale, le représentant a estimé que le principal défi auquel sont confrontées les autorités de la transition est la tenue d’élections générales dans le délai imparti, à savoir le 24 décembre 2021.  En la matière, le représentant a souligné la nécessité d’une base constitutionnelle appropriée, laquelle serait le fruit d’un compromis entre le Forum de dialogue politique et la Chambre des représentants.  Il s’est dit convaincu que le succès dépendra directement du degré d’inclusivité et de transparence du processus politique dans son ensemble.  Cela implique, s’est-il expliqué, l’implication de toutes les forces politiques du pays, des représentants de toutes les régions et de ceux de « l’ancien régime ». 

Le représentant a appuyé les activités du Comité militaire mixte qui joue un rôle important dans l’unification des forces armées et dont le travail fructueux a contribué à l’ouverture partielle de l’artère de transport stratégique entre l’Est et l’Ouest.  Il a aussi appuyé le retrait « progressif et synchronisé » de toutes les forces et unités étrangères de la Libye.  Ce faisant, a-t-il prévenu, il faut veiller à ce que le rapport de force actuel sur le terrain ne soit pas bouleversé, au risque d’ouvrir la voie à une nouvelle escalade armée.  Le représentant a insisté sur l’importance de maintenir des contacts étroits avec les principales forces politiques des différentes régions de la Libye pour encourager le compromis sur les questions clefs du processus politique. 

M. ABDOU ABARRY (Niger) s’est félicité de constater que le cessez-le-feu du 23 octobre tient toujours.  « Nous appelons le nouveau Gouvernement d’union nationale de transition à veiller à la mise en œuvre scrupuleuse de la feuille de route politique convenue par le Forum de dialogue politique libyen, à Tunis en novembre 2020.  « Il a aussi salué la création par le Conseil de la Présidence, de la Haute Commission de Réconciliation Nationale, un « acte éminemment positif » selon lui. 

Notant que les Libyens se sont engagés à organiser des élections nationales d’ici le 24 décembre 2021, il a plaidé pour un accompagnement technique, logistique et financier, en demandant aussi que le Conseil garde une voix unie « pour lancer le message approprié » en vue de dissuader les éventuels fauteurs de troubles.  Ces élections, a-t-il insisté, doivent répondre à l’immense aspiration du peuple libyen en vue de renforcer et de consolider l’indépendance, la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’identité nationale du pays. 

Sur le plan sécuritaire, le représentant a jugé primordial que des mesures soient prises pour éviter que le Sahel voisin ne subisse une deuxième vague de conséquences directes du conflit.  Les dramatiques évènements que le Tchad a connus nous rappellent combien il est urgent de prendre en considération les impératifs de paix, de stabilité et de sécurité des pays voisins de la Libye.  À cet égard, il a estimé que le retrait des combattants étrangers devra se faire de façon structurée et ordonnée, en collaboration avec les pays d’origine et sous la supervision des Nations Unies. 

M. Abarry a aussi évoqué la dramatique situation dans laquelle se trouvent les migrants et les réfugiés africains en Libye et a appelé à revoir la politique de débarquement en terre libyenne, des migrants interceptés en haute mer, de façon à éviter les souffrances indicibles que subissent nombre de femmes et d’enfants dans des centres de détention assez souvent hors du contrôle des autorités libyennes. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a souligné les développements encourageants en Libye depuis la signature de l’accord de cessez-le-feu, tout en notant l’importance de mesures « concrètes » pour parvenir à la paix.  Il est crucial de procéder aux préparatifs nécessaires pour la tenue d’élections libres, transparentes, inclusives et crédibles le 24 décembre.  Les femmes et les jeunes doivent être inclus dans toutes les étapes du processus politique, a souligné le représentant qui a estimé que le soutien international demeure vital en Libye.  Il a donc salué la tenue de la deuxième Conférence de Berlin le 23 juin et appelé toutes les parties à honorer leurs engagements, y compris l’arrêt de toute ingérence étrangère en Libye.  Toutes les actions qui violent l’embargo sur les armes doivent cesser, a-t-il poursuivi, en appuyant les efforts de l’opération IRINI.  Il a aussi souhaité des mesures concrètes pour la mise en œuvre du mécanisme de surveillance du cessez-le-feu dirigé et contrôlé par les Libyens, y compris le déploiement rapide de sa composante d’appui international.  Enfin, il a souligné l’importance de la lutte contre l’impunité et de la réconciliation pour guérir les plaies de la société libyenne. 

M. INGA RHONDA KING, Saint-Vincent-et-les Grenadines, a souligné l’importance de préserver la dynamique existante en vue de la « renaissance de la Libye ».  Elle a souhaité que, lors du renouvellement de son mandat en septembre prochain, la MANUL soit renforcée afin de conduire le processus de désarmement, démobilisation et réintégration et contribuer au retour des combattants étrangers et des mercenaires dans leur pays d’origine.  Elle a salué la tenue de la deuxième Conférence de Berlin, avant d’appeler à des élections libres, transparentes, inclusives et crédibles le 24 décembre.  Mme King a plaidé pour la pleine application de l’accord de cessez-le-feu du 23 octobre, y compris le retrait en bon ordre des combattants étrangers et des mercenaires.  Elle a appelé au plein respect de l’embargo sur les armes, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil.  Soulignant la nécessité de protéger les migrants et réfugiés vulnérables, la déléguée a estimé que la Libye ne peut être considérée comme un pays de débarquement sûr.  Elle a enfin appelé les parties libyennes à trouver un compromis sur le cadre nécessaire à la tenue des élections.  « Après 10 années d’incertitudes et d’extrêmes difficultés, les Libyens sont sur le point de réparer un pays fracturé. »

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a jugé que malgré des avancées en Libye, il reste encore beaucoup à faire.  Cela inclut la tenue d’élections en décembre comme prévu, le retrait immédiat de tous les combattants et mercenaires étrangers de Libye et l’unification des institutions politiques, sécuritaires et économiques du pays.  Dans cet esprit, l’Irlande a salué et approuvé les conclusions de la deuxième conférence de Berlin du 23 juin.  M. Flynn a regretté que le Forum de dialogue politique libyen n’ait pas été en mesure de se mettre d’accord sur la base constitutionnelle des élections de décembre avant la date limite du 1er juillet.  Le représentant a réitéré le ferme soutien de l’Irlande à la tenue d’élections présidentielle et parlementaires nationales le 24 décembre, comme indiqué dans la feuille de route politique convenue, et conformément à la résolution 2570 (2021).  Tout retard par rapport au calendrier de décembre risque de compromettre à la fois la transition politique de la Libye et les perspectives de sécurité et de réforme économique, a-t-il averti. 

M. Flynn a ensuite souligné la nécessité -et le droit- des femmes de participer et de s’engager pleinement dans tous les domaines liés à la transition démocratique, au règlement des conflits et à la consolidation de la paix.  Les jeunes doivent également être soutenus et impliqués dans de tels processus, a-t-il ajouté.  Il a aussi encouragé la poursuite du soutien international et de la coopération régionale entre la Libye et ses voisins pour permettre le désarmement, la démobilisation et la réintégration des groupes armés et un retour coordonné dans leurs pays d’origine. 

Souhaitant une lutte contre l’impunité, qui permet de prévenir de futures violations, le délégué a dit soutenir pleinement le travail de la Mission indépendante d’établissement des faits à cet égard.  Il a aussi encouragé les autorités libyennes à renforcer les institutions de justice transitionnelle, précisant que le travail de la Cour pénale internationale (CPI) doit être considéré comme complémentaire à ces importantes initiatives nationales.  Il a exhorté tous les États à coopérer avec la Cour alors qu’elle enquête sur les allégations de crimes internationaux graves en Libye.  Enfin, M. Flynn a appelé à mettre fin à la pratique de la détention arbitraire et indéfinie des migrants, en particulier la détention des enfants. 

M. DINH QUY DANG (Viet Nam) a appelé les parties en Libye à résoudre les questions qui demeurent en suspens et à faire progresser tous les dispositifs juridiques et logistiques pour veiller à ce que les élections nationales se déroulent selon la feuille de route établie.  Il a insisté sur l’importance de veiller à la pleine participation des femmes à ce processus et appelé la communauté internationale à appuyer le dialogue, le renforcement de la confiance et la réconciliation entre les parties.  Il est impératif que les parties concernées assurent la pleine mise en œuvre du cessez-le-feu d’octobre 2020 et veillent au respect de l’embargo sur les armes.  Le retrait des combattants étrangers et des mercenaires doit se faire de manière ordonnée, complète et en temps opportun et ne pas provoquer d’instabilité dans les États voisins, a-t-il notamment souligné, avant d’appeler à plus de collaboration entre l’ONU et les organisations régionales au sujet du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration des combattants armés en Libye. 

M. Dang a par ailleurs salué les efforts déployés pour appuyer l’unification des institutions financières et économiques de la Libye ainsi que le processus de vaccination contre la COVID-19.  Des efforts supplémentaires s’imposent cependant en matière d’atténuation des risques pour protéger les civils des restes explosifs de guerre. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a tout d’abord souligné l’importance d’organiser les élections présidentielle et législatives, le 24 décembre prochain, comme prévu.  À cet égard, elle s’est déclarée préoccupée par l’impasse sur la base constitutionnelle de ces élections, exprimant la crainte que cela mette en péril les progrès réalisés au cours de l’année écoulée.  Elle a donc engagé le Conseil supérieur d’État et la Chambre des représentants à clarifier cette base constitutionnelle et à promulguer la législation nécessaire d’ici au 1er août afin que ces scrutins aient lieu comme prévu.  La représentante a également appelé à la participation pleine, égale et significative des femmes, à la fois en tant qu’électrices et candidates.  S’agissant par ailleurs de l’accord de cessez-le-feu d’octobre 2020, elle a souhaité que toutes les forces étrangères et tous les mercenaires quittent le pays.  Quant aux effets potentiellement déstabilisateurs pour la région du retour de combattants étrangers ou de mercenaires étrangers, elle a jugé nécessaire d’assurer un processus global de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR), avec le soutien de la MANUL et des organisations régionales. 

Évoquant ensuite l’embargo sur les armes, Mme Juul a constaté qu’il reste inefficace, avant d’exhorter à nouveau tous les acteurs à respecter cette décision du Conseil de sécurité et à éviter d’alimenter davantage le conflit.  La déléguée s’est d’autre part alarmée du sort tragique des migrants et des réfugiés qui tentent de traverser la Méditerranée.  Elle a appelé les autorités libyennes à respecter le droit international relatif aux opérations de recherche et de sauvetage, et à cesser de placer arbitrairement en détention ces personnes parmi lesquelles figurent des enfants.  Enfin, elle leur a demandé instamment de faciliter l’accès sûr et sans entrave des travailleurs humanitaires en Libye pour protéger et aider les personnes dans le besoin. 

M. BING DAI (Chine) a appelé l’ensemble des parties à renforcer la coopération et la consultation sur les questions les plus importantes.  S’agissant de la transition politique, il a espéré que l’ensemble des parties accueillera favorablement les consultations qui visent à établir une base constitutionnelle pour la tenue du scrutin.  L’établissement d’un cadre juridique s’impose également. 

Il a appelé à consolider le cessez-le-feu et à rouvrir l’axe routier entre l’est et l’ouest du pays.  Le déploiement du mécanisme de contrôle du cessez-le-feu est également une priorité.  Le représentant a ensuite appelé au retrait des combattants étrangers et mercenaires tout en soulignant que ce processus doit tenir compte des préoccupations des pays voisins et éviter les risques de déstabilisation de la région.  Le délégué a par ailleurs appelé le Parlement à accélérer l’approbation d’un budget unifié pour pouvoir assurer la fourniture des services essentiels.  La communauté internationale doit en outre continuer d’appuyer le Gouvernement dans sa lutte contre la pandémie de COVID-19, y compris par l’octroi de vaccins.  Il a par ailleurs plaidé pour un réexamen du dossier des actifs gelés. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a pris note du progrès que signifie la formation du Gouvernement d’unité nationale pour le processus politique libyen.  Grâce à la responsabilité dont a fait preuve le Forum de dialogue politique libyen, il a été possible de surmonter les divisions, d’avancer vers l’unification des institutions et de maintenir l’accord de cessez-le-feu, a-t-il salué, avant de se réjouir que, lors de la deuxième conférence de Berlin, les autorités libyennes aient rejoint le comité international de suivi sur la Libye.  Le représentant a toutefois jugé essentiel que les acteurs politiques libyens parviennent à un accord sur le cadre juridique entourant la tenue des élections présidentielle et législatives le 24 décembre prochain.  Voyant dans ces scrutins une « occasion unique de réconciliation », il a appelé le Conseil de sécurité à soutenir, à travers la MANUL, les autorités libyennes dans tout ce qui est nécessaire pour éviter que le processus électoral n’aggrave les divisions internes. 

Pour le délégué, l’urgence des tâches en suspens ne doivent pas faire oublier les victimes du conflit libyen.  Alors que plus d’un million de civils ont besoin d’une aide humanitaire, il a appelé les autorités libyennes à respecter les droits humains de tous les migrants et à faciliter le travail du personnel humanitaire opérant dans le pays, avec le soutien de la MANUL.  Il a d’autre part réitéré son appel au respect de l’embargo sur les armes et à une coordination avec les autorités libyennes et les pays de la région pour le retrait des mercenaires et des combattants étrangers.  Enfin, il a salué la plus grande implication des organisations régionales, telles que l’Union africaine et la Ligue des États arabes, dans la mise en œuvre d’un programme de rapatriement et de réinsertion des combattants présents en Libye. 

Aujourd’hui une lueur d’espoir brille au bout d’un tunnel qui n’est que trop long, a déclaré M. ABDUL HAMID DBEIBEH, Premier Ministre du Gouvernement d’unité nationale de la Libye.  Il a décrit une situation nationale « plus stable et plus positive », sous l’égide d’un gouvernement « qui représente tous les Libyens ».  Il a reconnu la nécessité d’accélérer l’unification des institutions politiques du pays, dont la Banque centrale, pour permettre à son gouvernement de travailler avec efficacité.  Le choix de tenir les élections présidentielle et législatives, le 24 décembre, appartient exclusivement aux Libyens, a-t-il martelé, jugeant impératif de trouver une base constitutionnelle et d’élaborer la réglementation dès que possible.  L’exécutif, a-t-il affirmé, fait ce qu’il faut pour appuyer ce « droit historique ». 

En l’occurrence, le Premier Ministre a déploré que la Chambres des représentants ne se soit pas encore prononcée sur le budget national, ce qui retarde les efforts visant à répondre aux besoins de la population, notamment sur le plan humanitaire.  Revenant au processus électoral, il indiqué que le Ministère de l’intérieur a été chargé de former 30 000 personnes à la sécurisation des bulletins de vote et a appelé la Chambre des représentants, le Haut Conseil d’État et le Forum de dialogue politique interlibyen à dégager un consensus pour que les élections se tiennent en temps voulu. 

La présence de mercenaires et de combattants étrangers représente un des principaux obstacles à la stabilité de la Libye, a poursuivi le Premier Ministre. Il a réclamé une aide pour traiter de cette question et honorer les conclusions des deux Conférences de Berlin.  Il a ajouté que la réouverture de la route côtière et la libération des détenus des deux côtés permettrait de renforcer la confiance.  M. Dbeibeh a appelé la communauté internationale à aider les Libyens à unifier leurs forces de sécurité, en appuyant le processus de DDR, la réforme du secteur de la sécurité et la sécurisation des frontières, afin de prévenir toute menace pour les pays voisin et la région du Sahel.  Cela nous permettrait d’affronter « l’ennemi véritable » qui est le terrorisme sous toutes ses formes, a-t-il dit. 

Le Premier Ministre libyen a ensuite accusé certains États « d’exploiter » la résolution 1970 (2011).  Il a plaidé pour la modification du régime des sanctions pour permette aux institutions compétentes de gérer les avoirs malgré le gel et de travailler librement.  N’oublions pas, a souligné le Premier Ministre, que la valeur de ces actifs en souffre.  Il a aussi voulu que l’on modifie le système des dérogations pour permettre l’affectation rapide des avoirs à la réponse aux besoins humanitaires.  M. Dbeibeh a dénoncé les tentatives d’affaiblir le Gouvernement, insistant au contraire sur l’importance de la réconciliation nationale, en coordination avec les Nations Unies.  Le Conseil de sécurité doit régler le cas des « fauteurs de trouble », a martelé le Premier Ministre, avant d’affirmer que « le choix de la guerre est désormais derrière nous et nous coopérerons avec tous les Libyens pour créer une Libye moderne, unifiée et stable ». 

Présentant les conclusions de la deuxième Conférence de Berlin, qui s’est tenue le 23 juin, M. HEIKO MAAS, Ministre fédéral des affaires étrangères de l’Allemagne, a salué le rôle joué par les représentants de la Libye et de M. Abdul Hamid Dbeibeh, Premier Ministre du Gouvernement d’unité nationale.  Il s’est félicité de ce que tous les participants aient réaffirmé leur engagement envers la souveraineté, l’indépendance, l’intégrité territoriale et l’unité nationale de la Libye.  Il a tout particulièrement mis l’accent sur le large accord selon lequel, conformément à l’accord de cessez-le-feu et aux résolutions du Conseil de sécurité, tous les combattants, forces et mercenaires étrangers doivent quitter le pays.  Nous devons maintenant trouver un moyen d’y parvenir, sans délai, a insisté le Ministre.  Il a ajouté que tous les participants à la Conférence ont réaffirmé la nécessité d’organiser des élections libres, équitables et inclusives, le 24 décembre, comme prévu, afin que les Libyens puissent enfin faire entendre leur voix. 

Le Ministre a demandé aux membres du Conseil de sécurité de soutenir la mise en œuvre des conclusions de la Conférence de Berlin.  Il a évidemment regretté que le Forum de dialogue politique n’ait pas encore réussi à se mettre d’accord sur la base constitutionnelle des élections.  Le Ministre a prôné « la fermeté » face à ceux qui défendent le report des élections pour « des motifs politiques égoïstes ».  Il a demandé au Conseil de sécurité de réaffirmer qu’il ne tolérera aucune obstruction pour maintenir le cap et rendre les progrès irréversibles. 

M. AHMED ABOUL GHEIT, Secrétaire général de la Ligue des États arabes, a estimé que de nombreux participants au processus de Berlin sont démoralisés par la perspective de voir mises à mal les grandes avancées réalisées jusqu’à présent en Libye.  Il s’est notamment inquiété de l’incapacité des parties de s’accorder sur la base constitutionnelle des élections du 24 décembre, imputant cette incapacité aux intérêts « étroits » et aux divergences que l’on croyait dépassés.  Il faut, a-t-il préconisé, passer de la « logique de la concurrence » à celle du consensus pour ne pas manquer la chance que représentent les élections et travaille d’arrache-pied pour lever tous les obstacles au processus électoral.  Ces élections, a insisté le Secrétaire général, sont un moment charnière pour la préservation de l’unité de la Libye.  Reporter leur date ouvrira la voie à un conflit qui ne servira pas les intérêts de la Libye et des Libyens, a-t-il prévenu. 

M. Gheit a ensuite souligné que le retrait sans délai des combattants étrangers et des mercenaires est « impératif et fondamental » pour le processus de paix.  Leur départ demeure cependant encore lointain, et les retards enregistrés auront de graves répercussions sur l’ensemble du processus politique, a-t-il averti.  Le Secrétaire général a également insisté sur l’importance que revêt l’unification des institutions de l’État, y compris militaires et sécuritaires. Les avancés réalisées jusqu’à présent sont bien en deçà des espérances, a-t-il déploré, se préoccupant en outre qu’aucun dirigeant n’ait été nommé à la tête de la Banque centrale et de la Cour suprême.  L’unification des instituions est un aspect important de la transition et il faut y accorder l’attention requise, a-t-il martelé. 

Le Secrétaire général s’est par ailleurs dit préoccupé par la tendance de certaines parties à transformer en terre d’accueil permanente les territoires libyens désignées comme zones de transit des migrants clandestins.  Il a dit craindre de « graves retombées », compte tenu de la situation démographique « délicate » de la Libye.  Installer des centaines de milliers d’étrangers aggravera en outre la complexité de la crise.  En conclusion, le Secrétaire général a avoué sa peur de voir la Libye replonger « dans un tunnel obscur » du fait des désaccords politiques.  Il faut tout mettre en œuvre pour aider ce pays à franchir ce cap délicat. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: « Choquées », les délégations rendent hommage à la mémoire du Président d’Haïti, Jovenel Moïse, assassiné le 7 juillet dernier

Soixante-quinzième session,
91e séance plénière – matin
AG/12347

Assemblée générale: « Choquées », les délégations rendent hommage à la mémoire du Président d’Haïti, Jovenel Moïse, assassiné le 7 juillet dernier

L’Assemblée générale a tenu aujourd’hui une séance publique pour rendre hommage à la mémoire du Président d’Haïti, Jovenel Moïse, assassiné le 7 juillet dernier dans sa résidence de Port-au-Prince.  Les orateurs, dont la Vice-Présidente de l’Assemblée générale et la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, ont condamné cet assassinat « odieux », « tragique », « lâche » et « barbare », tandis que le représentant de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a demandé que ses auteurs soient traduits en justice pour éviter un « effondrement de la civilisation en Haïti ».  L’Assemblée a également adopté une décision relative au débat général de sa prochaine session.

« Au nom des 193 membres des Nations Unies, je condamne dans les termes les plus forts l’assassinat du feu Président Jovenel Moïse », a déclaré la Vice-Présidente de l’Assemblée générale, Mme Keisha Aniya McGuire.  C’est une tragédie qu’aucun pays ne devrait avoir à subir, a-t-elle dit, en demandant une enquête approfondie sur cette attaque « odieuse ».  Estimant que la peur ne doit pas l’emporter, la Vice-Présidente a appelé les Haïtiens à faire preuve de calme et à préserver les principes de liberté et de coopération que Jovenel Moïse chérissait tant. 

L’assassinat du Président haïtien est une attaque contre la démocratie, a enchaîné la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina Mohammed, qui a regretté « l’ami, l’époux, le père » disparu.  Elle a rappelé les grandes réalisations du Président, dont le renforcement des infrastructures du pays ou l’éradication du choléra.  La Vice-Secrétaire générale a souligné la « fierté » du peuple d’Haïti, premier pays des Caraïbes à s’être affranchi du joug colonial et à avoir proclamé son indépendance.

Les cinq groupes régionaux des Nations Unies se sont dits unanimement « choqués ».  Le représentant du Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes a exhorté la communauté internationale à continuer de soutenir Haïti, alors que les États-Unis, pays hôte des Nations Unies, ont promis que leur partenariat avec Haïti sera préservé, tout en appelant à la poursuite d’un processus conduisant à des élections libres et transparentes.

Le délégué d’Haïti a rendu un vibrant hommage au cinquante-huitième Président haïtien, dont l’assassinat « lâche et barbare » a révolté la conscience de tous ceux qui l’ont connu.  Son ambition, a-t-il affirmé, était de faire d’Haïti un pays émergent à l’horizon de 2030.  Avec la fougue qu’il avait, il s’est attaqué aux grands dossiers: construction en régie, réforme énergétique, lutte contre la corruption, réforme constitutionnelle, réalignement diplomatique et gestion de l’aide publique au développement (APD).

Aujourd’hui, a indiqué le délégué, le calme règne dans le pays.  La majorité des membres du commando qui a attaqué la résidence du Président ont été retrouvés.  Deux ont péri dans les échanges de tirs avec la Police et 15 autres sont entre les mains de la justice qui poursuit les enquêtes pour identifier les coupables et auteurs « intellectuels » de ce crime « odieux ».  L’état de l’épouse de Jovenel Moïse, grièvement blessée lors de l’attaque, ne suscite plus d’inquiétude.

L’Assemblée générale a enfin adopté une décision* relative au débat général de sa soixante-seizième session.  Préoccupée par la situation actuelle concernant la pandémie de COVID-19, elle décide, « sans que cela ne crée de précédent », que chaque État Membre, chaque État observateur et l’Union européenne pourront présenter une déclaration préenregistrée de leur chef d’État, vice-président(e), princesse ou prince héritier(ière), chef de gouvernement, ministre ou vice-ministre.  La Fédération de Russie a néanmoins souhaité que la priorité dans l’ordre de passage soit accordée aux dignitaires qui s’exprimeront à la tribune de l’Assemblée. 

*A/75/L.110

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Yémen: le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Mission en appui à l’Accord sur Hodeïda

8819e séance – matin
CS/14580

Yémen: le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de la Mission en appui à l’Accord sur Hodeïda

Le Conseil de sécurité a décidé aujourd’hui de proroger jusqu’au 15 juillet 2022, le mandat de la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), chargée de faciliter l’application de l’Accord sur la ville de Hodeïda et les ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa comme le prévoit l’Accord de Stockholm*. 

En adoptant à l’unanimité la résolution 2586 (2021), le Conseil préserve le mandat de la MINUAAH qui continuera de diriger le Comité de coordination du redéploiement en vue de superviser le cessez-le-feu, le redéploiement des forces et les opérations de déminage dans l’ensemble de la province de Hodeïda.  Elle sera également chargée de surveiller le respect du cessez-le-feu dans la province de Hodeïda et le redéploiement mutuel des forces à l’extérieur de la ville de Hodeïda et des ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa. 

Comme dans le passé, la MINUAAH continuera aussi de collaborer avec les parties pour que la sécurité de la ville de Hodeïda et des ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa soit assurée par les forces de sécurité locales, dans le respect de la législation yéménite.  Elle coordonnera en outre l’appui qu’apporte l’ONU en vue d’aider les parties à appliquer intégralement l’Accord sur Hodeïda. 

Par ce texte, le Conseil prie en outre le Secrétaire général de déployer rapidement l’ensemble de la Mission, compte tenu de l’impact de la pandémie de COVID-19, et demande aux parties à l’Accord sur Hodeïda de fournir un appui à l’ONU notamment en assurant la sûreté, la sécurité et la santé du personnel de la Mission.  Il demande aussi que soient levés les obstacles au mouvement du personnel de la Mission dans la province de Hodeïda, en particulier dans les districts touchés par le conflit. 

*S/2018/1134 

Texte du projet de résolution (S/2021/640)

Le Conseil de sécurité, Rappelant ses résolutions 2014 (2011), 2051 (2012), 2140 (2014), 2175 (2014), 2201 (2015), 2204 (2015), 2216 (2015), 2266 (2016), 2342 (2017), 2402 (2018), 2451 (2018), 2452 (2019), 2481 (2019), 2505 (2020), 2511 (2020), 2534 (2020) et 2564 (2021) ainsi que les déclarations de sa présidence relatives au Yémen, en date du 15 février 2013, du 29 août 2014, du 22 mars 2015, du 25 avril 2016, du 15 juin 2017 et du 15 mars 2018,

Sachant que le conflit armé exacerbe la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19) et exhortant les parties à répondre à l’appel au cessez-le-feu énoncé dans les résolutions 2532 (2020) et 2565 (2021),

Ayant examiné les lettres que le Secrétaire général a adressées le 31 décembre 2018, le 12 juin 2019, le 14 octobre 2019, le 15 juin 2020 et le 3 juin 2021 à son président, en application de ses résolutions antérieures,

Réaffirmant son ferme attachement à l’unité, à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale du Yémen, et son engagement à soutenir le peuple yéménite,

Rappelant qu’il a approuvé l’accord conclu en Suède par le Gouvernement yéménite et les houthistes concernant la ville de Hodeïda et les ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa (« l’Accord sur Hodeïda ») et demandant de nouveau aux parties de coopérer en vue d’en appliquer toutes les dispositions,

Demandant de nouveau à toutes les parties de contribuer à la stabilité de Hodeïda, notamment en coopérant avec le Comité de coordination du redéploiement et avec la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), et insistant sur l’importance du fonctionnement du Comité et de ses mécanismes conjoints, en vue de l’application de l’Accord sur Hodeïda,

1. Décide de proroger jusqu’au 15 juillet 2022 le mandat de la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), chargée de faciliter l’application de l’Accord sur la ville de Hodeïda et les ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa comme le prévoit l’Accord de Stockholm, dont le texte a été distribué sous la cote S/2018/1134;

2. Décide que, pour aider les parties à s’acquitter des engagements qu’elles ont pris dans l’Accord sur Hodeïda, la Mission sera chargée du mandat suivant:

a) diriger le Comité de coordination du redéploiement et assurer son fonctionnement, avec l’assistance d’un secrétariat composé de membres du personnel des Nations Unies, en vue de superviser le cessez-le-feu, le redéploiement des forces et les opérations de déminage dans l’ensemble de la province de Hodeïda,

b) surveiller le respect, par les parties, du cessez-le-feu dans la province de Hodeïda et le redéploiement mutuel des forces à l’extérieur de la ville de Hodeïda et des ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa,

c) collaborer avec les parties pour que la sécurité de la ville de Hodeïda et des ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa soit assurée par les forces de sécurité locales, dans le respect de la législation yéménite,

d) faciliter et coordonner l’appui qu’apporte l’Organisation des Nations Unies en vue d’aider les parties à appliquer intégralement l’Accord sur Hodeïda;

3. Approuve de nouveau les propositions du Secrétaire général relatives à la composition et aux aspects opérationnels de la Mission qui figurent dans l’annexe à la lettre qu’il a adressée, le 31 décembre 2018, à son président, et note que la Mission sera dirigée par le Président du Comité de coordination du redéploiement, qui aura rang de Sous-Secrétaire général et fera rapport au Secrétaire général par l’intermédiaire de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen et de la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix;

4. Souligne qu’il importe d’établir une collaboration et une coordination étroites entre toutes les entités des Nations Unies présentes au Yémen, notamment le Bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, la Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de l’action humanitaire et l’équipe de pays des Nations Unies au Yémen, la Mission et le Mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies, afin d’éviter le chevauchement des tâches et de tirer le meilleur parti des ressources existantes;

5. Prie le Secrétaire général de déployer rapidement l’ensemble de la Mission, compte tenu de l’impact de la pandémie de COVID-19, et demande aux parties à l’Accord sur Hodeïda de fournir un appui à l’Organisation des Nations Unies comme le prévoit le document S/2019/28, notamment en assurant la sûreté, la sécurité et la santé du personnel de la Mission et l’entrée et la circulation dans le pays, sans entrave ni retard, du personnel et du matériel de la Mission, des vivres et des articles de première nécessité, et demande que soient levés les obstacles au mouvement du personnel de la Mission dans la province de Hodeïda, en particulier dans les districts touchés par le conflit, et exprime son appui aux efforts faits par la Mission pour réactiver le Comité et les mécanismes conjoints mis en place en vue d’appliquer l’Accord sur Hodeïda, satisfaire les besoins d’accès de toutes les parties et donner également suite à toutes leurs requêtes;

6. Prie les États Membres, en particulier les États voisins, d’apporter leur appui à l’Organisation des Nations Unies, selon qu’il convient, de sorte que la Mission s’acquitte de son mandat;

7. Prie le Secrétaire général de lui rendre compte, chaque mois, des progrès accomplis dans l’application de la présente résolution et de tout acte de quelque partie que ce soit qui ferait obstacle au bon fonctionnement de la Mission, et de l’application de la résolution 2451 (2018), y compris d’éventuels manquements de toute partie;

8. Prie également le Secrétaire général de lui faire un point complémentaire sur la Mission dans un délai d’au moins un mois avant la date à laquelle le mandat de la Mission doit venir à expiration;

9. Décide de rester activement saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: à l’ouverture du débat ministériel du forum politique, le Secrétaire général, inquiet, note que nous nous éloignons davantage de nos objectifs   

Forum politique de haut niveau,
matin & après-midi
ECOSOC/7058

ECOSOC: à l’ouverture du débat ministériel du forum politique, le Secrétaire général, inquiet, note que nous nous éloignons davantage de nos objectifs   

Selon le Secrétaire général de l’ONU, plutôt que de progresser dans la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, nous nous éloignons davantage de nos objectifs.   M. António Guterres a fait ce constat ce matin en ouvrant, en personne, le débat ministériel du forum politique de haut niveau pour le développement durable, lequel se tiendra durant trois jours, de concert avec le débat de haut niveau du Conseil économique et social (ECOSOC).   

Le Secrétaire général a noté l’impact dramatique de la COVID-19 sur les efforts déployés pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD).  Et alors que le forum politique de haut niveau est destiné à évaluer les progrès accomplis dans le cadre du Programme 2030, il s’est inquiété de voir que la pauvreté mondiale pourrait atteindre un taux de 7% d’ici à 2030 et qu’avec l’augmentation de la température mondiale déjà à 1,2 degré Celsius « nous sommes au bord du gouffre ».  Il a tout de même dit continuer de croire que nous pouvons et devons renverser la vapeur, arguant que « nous avons les connaissances, la science, la technologie et les ressources pour le faire ».  Il a également prôné une unité d’objectif, un leadership efficace de tous les secteurs et une action urgente et ambitieuse. 

« Une action décisive. »  C’est ce que le Secrétaire général a demandé pour mettre fin à la pandémie partout et en même temps remettre les ODD sur la bonne voie.  Sachant qu’il faut vacciner au moins 70% du monde pour venir à bout de la pandémie, il a recommandé « un plan mondial de vaccination ».   M. Guterres a ensuite demandé de tirer les leçons de cette crise et d’investir dans des sociétés plus égalitaires et inclusives: chaque pays doit élargir l’accès à la couverture sanitaire universelle, à la protection sociale, à une éducation de qualité et à la connectivité numérique.  Il a aussi plaidé pour l’inclusion économique des femmes et pour un financement renforcé en soutien des efforts de développement.  Ainsi, les économies avancées devraient prolonger la bouée de sauvetage lancée aux pays en développement, a-t-il proposé.  Les droits de tirage spéciaux (DTS) et l’Initiative de suspension du service de la dette, par exemple, devraient être étendus à tous les pays vulnérables à revenu intermédiaire et aux petits États insulaires en développement (PEID) qui en ont besoin.  

Pour le Président de l’ECOSOC, M. Munir Akram, cette solidarité internationale existe déjà, et la crise actuelle l’a démontré.  Il a espéré une stratégie mondiale de relèvement qui mise sur une protection sociale universelle pour les personnes les plus vulnérables.  Poussant plus loin cet esprit de solidarité, le Premier Ministre du Pakistan, M. Imran Khan, a estimé que l’allocation de 650 milliards de dollars de nouveaux DTS pour les pays les plus pauvres, certes louable, reste néanmoins un effort insuffisant.  Pour lui, les pays à revenu élevé devraient réaffecter volontairement une partie de leurs quotes-parts du FMI inutilisées, afin qu’au moins 150 milliards de dollars soient réorientés vers le financement des projets et programmes de développement dans les pays en développement.  M. Khan a aussi souhaité que les engagements en faveur de financements concessionnels et de subventions aux pays en développement, y compris la promesse de 0,7% du PIB consacré à l’APD, soient honorés. 

C’est encore cette idée de « solidarité » que l’Indonésie entend promouvoir à la présidence du G20 l’année prochaine, avec le thème « Se relever ensemble, se relever plus solidement », a expliqué son Président, M. Joko Widodo.  Il n’a pas manqué de demander un appui renforcé des pays développés à la transition économique verte des pays en développement, expliquant que le principe de « ne laisser personne de côté » doit être réalisé de manière concrète.  Pour cela, il faut éviter la « politique du moi d’abord » et faire en sorte que la formule « les vaccins, un bien public mondial » ne reste pas un simple slogan.  Il est vrai que la pandémie a mis en lumière l’importance de la coopération internationale, a renchéri le Chancelier de l’Autriche, M. Sebastian Kurz.  Selon lui, la pandémie a aussi révélé « ce qu’il y a de meilleur en l’homme », avec une entraide internationale étroite et un développement rapide de vaccins.  La Vice-Présidente Marta Lucía Ramírez Blanco de la Colombie, Ministre des affaires étrangères du pays, a témoigné de l’engagement de son gouvernement envers les plus vulnérables pendant la pandémie: des solutions innovantes, vertes et durables ont été déployées à grande échelle.

Pour sa part, le Président de l’Assemblée générale a appelé à investir massivement dans l’accès au numérique et à l’énergie, qui sont des « accélérateurs d’ODD ».  M. Volkan Bozkir a aussi insisté sur la nécessité urgente de combler les inégalités de genre, en rappelant les conséquences disproportionnées de la pandémie sur les femmes.  Selon lui, le seul obstacle à la réalisation de ces recommandations aussi réalistes que pragmatiques est notre hésitation.  C’est pour pousser à agir que le Secrétaire général et le Président de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement (UNEA) ont plaidé pour une action climatique urgente et ambitieuse, y compris en matière de financement, suivis en cela par d’autres intervenants.  M. Guterres a appelé à un plan clair pour tenir les engagements climatiques et établir un niveau de confiance essentiel dans l’action climatique multilatérale. 

La confiance, il en été question dans les discours des deux jeunes ayant pris la parole pendant la séance d’ouverture.  Mme Melati Wijsen, cofondatrice de Bye Bye Plastic Bags et de YouthTopia, a fait remarquer que sa génération assistera soit à la poursuite de la destruction de la planète, soit à sa sauvegarde.  Elle a demandé aux dirigeants de prendre les jeunes au sérieux, puisqu’ils sont aussi des pourvoyeurs de solutions.  Dans cette optique, le pouvoir de décision doit désormais être partagé avec les jeunes, a plaidé M. Steve Seungjoon Lee, du grand groupe des enfants et des jeunes, en demandant qu’ils fassent également partie des délégations gouvernementales et des processus d’examens nationaux volontaires.

Ces examens nationaux commencés hier se sont d’ailleurs poursuivis aujourd’hui, en mode virtuel, avec huit pays qui les présentaient pour la première fois: Angola, Antigua-et-Barbuda, Cuba, Bolivie, Saint-Marin, Nicaragua, Îles Marshall et République populaire démocratique de Corée.  Le débat ministériel continuera demain, 14 juillet, dès 9 heures.

DÉBAT DE HAUT NIVEAU

Déclarations liminaires

M. MUNIR AKRAM, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a ouvert le segment ministériel du forum de haut niveau pour le développement durable en se félicitant de la large participation des nations, qui vient confirmer l’engagement de tous vis-à-vis du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de ses objectifs.  Comme cela a été souligné lors des cinq premiers jours du forum, a-t-il relevé, le monde continue de souffrir de la pandémie de COVID-19 et de ses impacts de grande portée.  Face à ce bouleversement mondial, la coopération internationale est essentielle pour nous permettre de nous rassembler pour construire une reprise durable et résiliente, tout en revenant à la réalisation des objectifs de développement durables (ODD) et aux objectifs climatiques, a plaidé M. Akram.  À ses yeux, cette solidarité existe, la crise actuelle l’a démontré, et elle doit permettre de bâtir les fondations d’une stratégie mondiale de relèvement.  Celle-ci doit, selon lui, comprendre la lutte contre le virus, notamment par le biais de la vaccination pour tous, mais aussi les investissements nécessaires à la reprise.  Ces efforts doivent également tendre vers une protection sociale universelle pour les personnes les plus vulnérables, a-t-il ajouté, répétant qu’il est crucial que l’humanité se montre « solidaire et unie ».  Personne ne sera à l’abri tant que tous ne le seront pas, a martelé le Président de l’ECOSOC, avant de juger que cela vaut pour la COVID-19 comme pour les changements climatiques et la perte de biodiversité, lesquelles remettent en question la survie même de la planète et de toutes les nations.  « Nous n’avons d’autre choix que de coopérer et d’être solidaires, poursuivons le travail », a-t-il conclu.    

Le Secrétaire général de l’ONU, M. ANTÓNIO GUTERRES, a noté que la COVID-19 a eu un impact dramatique sur les progrès vers les objectifs de développement durable (ODD).  Ainsi, le produit intérieur brut (PIB) mondial a diminué d’environ 4,6% en 2020, et en février dernier, 36 pays à faible revenu étaient soit en situation de surendettement, soit à risque élevé d’y sombrer.  L’équivalent de 255 millions d’emplois à temps plein ont été perdus et la pandémie a plongé 124 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté.  Alors qu’on estime que près d’une personne sur trois dans le monde n’avait pas accès à une alimentation adéquate en 2020, deux élèves sur trois sont encore affectés par les fermetures d’écoles, en particulier les filles qui risquent de ne jamais y retourner.  Le Secrétaire général a aussi alerté d’une recrudescence des mariages et du travail des enfants, alors que la violence à l’égard des femmes est à des niveaux choquants, et qu’une charge supplémentaire de travail domestique et de soins non rémunérés exclut les femmes de la population active.  De même, les défis structurels sous-jacents aux ODD, notamment la crise climatique et les inégalités croissantes, se sont aggravés.  Il s’est alarmé du fait que les concentrations de dioxyde de carbone sont maintenant à leur plus haut niveau en 3 millions d’années, soit 148% au-dessus des niveaux préindustriels.  La biodiversité décline à un rythme alarmant et sans précédent, avec un million d’espèces menacées d’extinction.  Le Secrétaire général a noté que chaque année, nous perdons 10 millions d’hectares de forêts.  Les inégalités restent à des niveaux insoutenables, à preuve, la valeur nette de quelque 2 500 milliardaires a augmenté de plus de 5,2 milliards de dollars par jour pendant la pandémie, tandis que 4 milliards de personnes vivent toujours sans aucune forme de protection sociale de base.  Et pendant tout ce temps, les conflits et les crises ont forcé 1% de la population mondiale à se déplacer. 

Selon M. Guterres, alors que le forum politique de haut niveau est destiné à évaluer les progrès accomplis dans le cadre du Programme 2030, nous devons faire face aux faits: « plutôt que de progresser, nous nous éloignons davantage de nos objectifs ».  On s’attend maintenant à ce que la pauvreté mondiale atteigne 7% d’ici à 2030 et qu’elle soit à peine en-dessous du niveau de 2015.  Et avec l’augmentation de la température mondiale déjà à 1,2 degré Celsius, nous sommes au bord du gouffre, s’est-il lamenté.  « Je continue de croire que nous pouvons et devons renverser la vapeur », a espéré le Secrétaire général, arguant que « nous avons les connaissances, la science, la technologie et les ressources pour le faire ».  Il a prôné « une unité d’objectif, un leadership efficace de tous les secteurs et une action urgente et ambitieuse ».

Déjà, pour mettre fin à la pandémie partout et remettre les ODD sur la bonne voie, il a appelé à une action décisive dans quatre domaines clefs.  Premièrement, tout le monde, partout, doit avoir accès aux vaccins, aux tests, aux traitements et au soutien en rapport à la COVID-19.  Les promesses de doses et de fonds sont les bienvenues, mais elles ne suffisent pas, a-t-il averti, notant que nous avons besoin d’au moins 11 milliards de doses pour vacciner 70% du monde et mettre fin à cette pandémie.  Le monde a donc besoin d’un plan mondial de vaccination pour au moins doubler la production de vaccins, assurer une distribution équitable par le biais du Mécanisme COVAX, coordonner la mise en œuvre et le financement, et soutenir les programmes nationaux de vaccination.  

Pour réaliser ce plan, le Secrétaire général a dit avoir mis sur pied un groupe de travail d’urgence qui rassemble les pays produisant et pouvant produire des vaccins, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les partenaires de l’Accélérateur ACT et les institutions financières internationales capables de traiter avec les sociétés pharmaceutiques et les fabricants concernés, ainsi que d’autres intervenants clefs.  À l’heure actuelle, il est essentiel de financer intégralement l’Accélérateur ACT et de soutenir la feuille de route d’investissement de 50 milliards de dollars pour mettre fin à la pandémie et assurer une reprise mondiale, a prévenu M. Guterres.  

Deuxièmement, nous avons besoin d’une action climatique urgente et ambitieuse, y compris en matière de financement, a plaidé M. Guterres.  Il a salué le fait que d’ici au mois prochain, les pays représentant plus de 65% des émissions de gaz à effet de serre et plus de 70% de l’économie mondiale se seront engagés à atteindre zéro émission nette.  Mais nous luttons toujours pour maintenir l’augmentation de la température mondiale à l’objectif de 1,5 degré Celcius, comme fixé dans l’Accord de Paris, a-t-il rappelé.  Si la Conférence des parties (COP26) à Glasgow doit être un tournant, nous avons besoin que tous les pays s’engagent à atteindre le zéro net d’émissions d’ici au milieu du siècle, a-t-il souhaité.  De même, les pays en développement ont besoin d’assurances que leur ambition climatique sera satisfaite avec un soutien financier et technique.  Cela signifie tenir la promesse des pays développés de fournir 100 milliards de dollars par an pour l’atténuation et l’adaptation d’ici à 2020.  Nous avons besoin d’un plan clair pour tenir cet engagement et établir un niveau de confiance essentiel dans l’action climatique multilatérale, a-t-il relevé.

Le Secrétaire général a aussi demandé d’accélérer la transition du charbon, du pétrole et du gaz vers les énergies renouvelables en créant des emplois verts et en réduisant les inégalités.  Si les fonds publics sont essentiels, le financement privé à grande échelle l’est également, a-t-il expliqué, notant aussi que tous les financiers doivent s’engager à ne plus financer le charbon d’ici à la fin de 2021.  

Troisièmement, M. Guterres a demandé de tirer les leçons de cette crise et d’investir dans des sociétés plus égalitaires et inclusives.  Cela demande à chaque pays de fournir une base d’opportunités pour tous, en élargissant l’accès à la couverture sanitaire universelle, à la protection sociale, à une éducation de qualité et à la connectivité numérique.  Il a aussi plaidé pour l’inclusion économique des femmes.  De son avis, chaque plan de relance national devrait inclure des investissements importants dans l’économie et l’infrastructure des soins.  Cela allégera le fardeau du travail de soins non rémunéré, permettant ainsi aux femmes de rejoindre la population active, tout en créant des emplois durables et verts.  Nous devons nous concentrer sur l’emploi et le travail décent et stimuler la disponibilité d’emplois et de formations pour les jeunes, a-t-il encore suggéré.

Quatrièmement, au sujet du financement du développement, le Secrétaire général a estimé qu’au nom de la solidarité et de l’intérêt personnel, les économies avancées devraient prolonger la bouée de sauvetage économique lancée aux pays en développement.  Au sujet des mesures telles que les droits de tirage spéciaux (DTS) et l’Initiative de suspension du service de la dette, il a dit que l’aide doit être étendue à tous les pays vulnérables à revenu intermédiaire et aux petits États insulaires en développement (PEID) qui en ont besoin.  

À long terme, nous devons également envisager une architecture de la dette internationale réformée et plus équitable, a-t-il souhaité, saluant pour l’occasion l’accord historique du G20 sur une nouvelle architecture fiscale internationale.  Mais les gouvernements devraient également envisager une forme de taxe de solidarité liée à la COVID-19, a-t-il proposé en disant que cela servirait à réduire les inégalités extrêmes.  Il a enfin invité les États Membres à financer de manière prévisible et adéquate le système des coordonnateurs résidents qui a montré son efficacité pendant la crise de la COVID-19.

M. VOLKAN BOZKIR, Président de l’Assemblée générale, a indiqué que, rarement dans son histoire, la communauté internationale a eu une telle occasion d’œuvrer à un changement radical.  « Si la pandémie est d’abord et avant tout une tragédie, nous ne pouvons ignorer le fait qu’elle constitue aussi une opportunité. »  Il a noté l’existence, pour la première fois depuis des générations, d’un appui public et politique large pour un changement véritablement transformateur.  Cette fois-ci, nous pouvons placer nos sociétés sur une voie plus durable, plus résiliente et plus juste, a dit le Président.

M. Bozkir a fait quatre propositions.  Premièrement, il a appelé à une révision de l’architecture financière internationale.  Le système actuel, qui repose sur des éléments aussi volatiles que l’aide publique au développement (APD), les investissements étrangers et un service élevé de la dette, ne permet pas d’aboutir à des progrès dans le domaine du développement durable.  Nous avons besoin de systèmes de financement inclusifs et innovants, qui élargissent l’accès aux prêts concessionnels, à l’allègement de la dette et aux mécanismes d’échange de dette climatique afin que tous les pays puissent en bénéficier, a-t-il dit.  Cela est particulièrement important pour les pays les moins avancés (PMA), les pays à revenu intermédiaire et les petits États insulaires en développement (PEID).  Afin de réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, le Président a appelé à un changement des logiques d’investissement dans ces pays.  « Je veux être clair: les lacunes structurelles ne sont pas une raison pour ne pas fournir un soutien adéquat aux pays les plus vulnérables. »

Deuxièmement, le Président a appelé à combler le fossé numérique qui ne cesse de se creuser.  « Nous ne pouvons progresser sur la voie des ODD, lorsqu’une moitié de l’humanité prend des appels Zoom et gère ses comptes en banque en ligne tandis que l’autre n’a pas accès à Internet. »  Il a donc appelé à investir massivement dans les « accélérateurs d’ODD » qu’est l’accès au numérique et à l’énergie.

Troisièmement, M. Bozkir a insisté sur l’urgence de combler les inégalités de genre, en rappelant les conséquences disproportionnées de la pandémie pour les femmes.  Il a donc demandé l’adoption et l’application de dispositions législatives dédiées à l’élimination de la violence contre ces dernières et l’augmentation de leur représentation et participation à tous les aspects de la vie publique.

Quatrièmement, M. Bozkir a appelé de ses vœux un relèvement vert, qui permette une réconciliation avec la nature.  La protection et la restauration des écosystèmes, ainsi que la sauvegarde de la biodiversité, permettront de renforcer la résilience et de faire face à de futures pandémies, a-t-il dit, avant de plaider pour une diminution des émissions de carbone.

En conclusion, le Président a rappelé que le seul obstacle à la réalisation de ces recommandations aussi réalistes que pragmatiques est « notre hésitation ».  Ce n’est pas le moment de se montrer timide et tiède, soyons audacieux, transformateur et délibératif parce que l’avenir du développement durable est inclusif, résilient et vert, a conclu M. Bozkir.

M. IMRAN KHAN, Premier Ministre du Pakistan, a constaté que ce forum politique de haut niveau se tient à un « moment critique », alors que le monde fait face à un triple défi: la pandémie de COVID-19, le relèvement économique et la menace existentielle des changements climatiques.  Pour y répondre efficacement, tant au plan national qu’international, il a tout d’abord jugé essentiel de prévoir un accès universel et abordable aux vaccins contre la COVID-19.  Le monde doit en augmenter la production et assurer leur diffusion rapide, a-t-il plaidé, appelant en outre à la renonciation aux droits de propriété intellectuelle sur les vaccins, à leur production sous licence, au financement intégral du Mécanisme COVAX et à l’octroi de subventions et de prêts concessionnels pour permettre aux pays en développement d’acheter des vaccins à des prix équitables. 

En deuxième lieu, a poursuivi M. Khan, des financements adéquats doivent être mobilisés pour permettre aux pays en développement de relever le triple défi de la reprise.  Si les pays à revenu élevé ont pu injecter 17 000 milliards de dollars pour stimuler leurs économies, les pays en développement n’ont pu accéder à qu’à 5% des quelque 4 300 milliards de dollars dont ils ont besoin pour se relever et mettre en œuvre les ODD, a-t-il noté, avant de rappeler qu’il avait proposé en septembre dernier l’émission de nouveaux droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI pour générer des financements pour le développement.  Saluant l’allocation de 650 milliards de dollars de nouveaux DTS pour les pays les plus pauvres, il a toutefois estimé que cet effort reste insuffisant.  Il est urgent, selon lui, que les pays à revenu élevé réaffectent volontairement une partie de leurs quotes-parts du FMI inutilisées.  Le Premier Ministre a ainsi espéré qu’au moins 150 milliards de dollars seront réaffectés pour financer des projets et programmes de développement dans les pays en développement, via le FMI, la Banque mondiale et d’autres banques et institutions de développement. 

Pour M. Khan, la restructuration de la dette est un autre instrument essentiel pour fournir aux pays en développement l’espace budgétaire nécessaire au financement du développement.  Dénonçant les négociations du « cadre commun » qui iraient à l’encontre de cet objectif d’allègement de la dette, il a souhaité que les engagements en faveur de financements concessionnels et de subventions aux pays en développement, y compris la promesse de 0,7% du PIB consacré à l’APD, soient honorés.  De même, a-t-il souligné, le respect de l’engagement pris par les pays développés de fournir 100 milliards de dollars par an en financement climatique est vital, notamment pour le succès de la COP26 à Glasgow.  Relevant à cet égard que le financement climatique cumulé s’élève désormais à plus de 1 000 milliards de dollars, il a prévenu que les montants offerts pour la coopération au développement, y compris l’APD, ne peuvent pas être comptés deux fois au titre de l’action climatique.  De plus, au moins 50% du financement climatique devrait être alloué à l’adaptation, a insisté le Premier Ministre pakistanais.

M. Khan a d’autre part jugé que les stratégies de développement nationales et internationales devraient cibler les secteurs susceptibles de permettre aux pays en développement de se relever, en particulier la reprise post-COVID, le développement humain, la protection sociale, les énergies renouvelables, l’agriculture durable, la lutte contre les changements climatiques et la numérisation.  Selon lui, les investissements dans les infrastructures durables –qui concernent 92% des ODD– doivent être au cœur des stratégies de développement et c’est à l’ONU d’initier la mobilisation des 1 000 milliards de dollars requis chaque année à cette fin.  Enfin, a-t-il poursuivi, les déficiences structurelles et systémiques du système financier international doivent être abordées de manière globale.  Le régime commercial international doit fournir à tous les pays en développement des accès équitables et préférentiels aux marchés mondiaux, a-t-il demandé en exigeant aussi l’annulation des mesures protectionnistes érigées par certaines grandes économies, en violation des accords de l’OMC.  Il s’est par ailleurs félicité de la proposition américaine de taxation des grandes entreprises mondiales afin d’empêcher les transferts de bénéfices et l’évasion fiscale.  En conclusion, il a invité les États à se concentrer sur un règlement pacifique et juste des différends et à promouvoir la coopération internationale pour la construction d’un monde stable et prospère.

M. JOKO WIDODO, Président de l’Indonésie, a jugé que dans une situation aussi difficile, le statu quo ne peut pas continuer.  La coopération et la solidarité doivent être intensifiées et l’innovation renforcée, puisqu’aucun pays ne peut progresser tant que tous les pays n’ont pas progressé.  Il faut permettre au monde de se remettre rapidement de la pandémie, a-t-il dit en notant que les vaccins sont notre espoir pour accélérer la sortie du monde de cette crise sanitaire.  Un accès juste et équitable aux vaccins doit donc être garanti, a-t-il plaidé, souhaitant que la formule « les vaccins en tant que bien public mondial » ne reste pas un simple slogan.  Il a donc suggéré d’augmenter la production mondiale de vaccins, notamment grâce à la dérogation portant sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC).  Il faut également renforcer la chaîne d’approvisionnement mondiale en vaccins, notamment en supprimant les barrières aux exportations des matières premières des vaccins.  Il a aussi proposé d’accroître la diversification et le volume de la production de vaccins, y compris dans les pays en développement.

Ensuite, le Chef de l’État indonésien a demandé de mieux cibler et aider les groupes vulnérables.  Selon lui, la sécurité et la protection sociales sont importantes dans les efforts de relèvement de la pandémie.  En Indonésie, 28,5 milliards de dollars ont été consacrés à l’aide sociale, et pas moins de 9,8 millions de microentreprises ont reçu une aide pour soutenir leurs activités, a-t-il signalé.  En outre, l’économie mondiale doit se redresser de concert, a recommandé le Président, précisant que toutes les économies doivent se développer ensemble sans compromettre les aspects sanitaires.  Il a aussi demandé le renforcement de l’appui des pays développés à la transition économique verte dans les pays en développement, ajoutant que le principe de « ne laisser personne de côté » doit être réalisé de manière concrète.  Pour cela, il faut éviter la « politique du moi d’abord ».  C’est cette idée de solidarité que l’Indonésie entend valoriser à la présidence du G20 l’année prochaine, avec le thème « Se relever ensemble, se relever plus solidement », a conclu le Président indonésien.

La Vice-Présidente de la Colombie et Ministre des affaires étrangères, Mme MARTA LUCÍA RAMÍREZ BLANCO, a relevé qu’à moins d’une décennie de la date butoir fixée pour la réalisation des ODD, de grands défis persistent, ainsi que des disparités.  « Face à la pandémie, la réponse du Gouvernement colombien s’est concentrée sur la promotion de solutions innovantes, vertes et durables, déployées à grande échelle, afin de répondre aux besoins des populations les plus vulnérables. »  Parmi les mesures gouvernementales, elle a fait part de l’octroi d’une aide financière à plus de 10 millions de familles, correspondant à 11% de son PIB.  D’autres programmes ont été mis sur pied pour préserver les emplois des femmes et leur fournir des incitations à concilier travail et responsabilités familiales.  Dans la même veine, une allocation budgétaire historique a été faite au secteur de l’éducation.

En outre, dans l’optique de reconstruire en mieux en tenant compte de la durabilité environnementale, la Colombie travaille avec le secteur privé pour concevoir des stratégies permettant de créer les conditions nécessaires pour éliminer la pauvreté, réduire les inégalités, promouvoir le bien-être et la prospérité et lutter contre la crise environnementale, a indiqué Mme Ramírez Blanco.  De même, le pays a renforcé son leadership dans l’agenda environnemental mondial, avec des initiatives telles que le Pacte de Leticia; l’approbation de la Charte de l’environnement dans la communauté andine; l’annonce, dans le cadre de l’Accord de Paris, de l’objectif national de réduire de 51%, d’ici à 2030, les émissions de gaz carbonique.  La Vice-Présidente a rappelé que la Colombie a présenté, hier, son troisième examen national devant le forum politique de haut niveau, lequel a souligné les solutions colombiennes basées sur la nature, l’économie circulaire, le tourisme durable, la transition énergétique et l’ambition de combler les lacunes numériques du pays.

M. SEBASTIAN KURZ, Chancelier de l’Autriche, a salué la tenue en présentiel de cette réunion.  Il a souligné les conséquences de la pandémie, 120 millions de personnes ayant sombré dans la pauvreté.  « Nous devons travailler ensemble, nous soutenir et apprendre des uns des autres », en a-t-il conclu au niveau mondial.  M. Kurz a détaillé la réponse de son pays à la pandémie, en soulignant l’importance des tests pour la juguler.  Lors de la réouverture des universités, nous avons introduit des tests très faciles pour les étudiants à faire eux-mêmes.  L’Autriche compte la proportion la plus élevée au monde de tests COVID-19 par habitant.  Les entreprises sont passées à temps partiel, tandis que le Gouvernement leur a apporté un soutien permettant de sauver un million d’emplois.  Nous avons aussi renforcé l’accès au numérique, en investissant dans le haut débit, a-t-il dit. 

Le Chancelier a estimé que la pandémie a mis en lumière l’importance de la coopération internationale.  L’Autriche est l’un des plus grands contributeurs au Mécanisme COVAX et a fourni, par le biais de l’Union européenne (UE), 600 000 doses de vaccins aux pays voisins des Balkans.  Le Chancelier a tenu à rendre hommage au personnel onusien qui a fait face à la pandémie et à ses conséquences.  « Pour mieux nous relever, nous devons adapter nos politiques pour bâtir un monde plus juste, plus durable et plus résilient. »  Il a précisé que l’UE essaye de parvenir à la neutralité carbone en 2050, avant d’assurer que l’Autriche restera aux côtés des pays les plus vulnérables.  Le Programme 2030 restera notre boussole pour nous relever en mieux, a déclaré le Chancelier, en mentionnant le récent examen volontaire national soumis par son pays.  M. Kurtz a estimé que la pandémie a aussi révélé « ce qu’il y a de meilleur en l’homme » avec une entraide internationale étroite et un développement rapide de vaccins.  Profitons de cette décennie capitale d’action pour réaliser le Programme 2030, a conclu le Chancelier.

M. STEVE SEUNGJOON LEE, partenaire organisateur du grand groupe des enfants et des jeunes, a rappelé que les 7 et 8 avril derniers, près de 20 000 jeunes de 193 pays se sont réunis pour le dixième anniversaire du Forum des jeunes de l’ECOSOC, ce qui a représenté le plus grand événement axé sur les jeunes en 75 ans d’histoire des Nations Unies.  À cette occasion, a-t-il dit, des appels à l’action ont été lancés dans six domaines prioritaires, à commencer par un accès aux services de santé mentale afin d’aider les jeunes à faire face à l’impact psychologique de la COVID-19.  Une autre urgence consiste selon lui à offrir un accès universel et abordable à Internet.  Cela aurait dû être fait l’an dernier dans le cadre de la cible 9.c, or seulement 41% de la population des pays les moins avancés est aujourd’hui couverte par le signal 4G et à des conditions tarifaires loin d’être abordables. 

Pour M. Lee, il est également prioritaire d’arrêter tous les investissements dans le charbon, le pétrole et le gaz, et de les réorienter vers des énergies propres, tout en atteignant l’objectif de 100 milliards de dollars de financement climatique.  De même, il importe que les contributions déterminées au niveau national qui seront soumises lors de la COP26 à Glasgow permettent de limiter la hausse des températures à 1,5 degré Celsius, comme prévu par l’Accord de Paris.  Il faut en outre garantir l’inclusion des jeunes handicapés dans tous les espaces d’élaboration des politiques et passer à une approche intersectionnelle pour collecter des données ventilées sur les expériences des jeunes dans la réalisation du Programme 2030.  « Quand serons-nous assez importants pour être vus et comptés? » a-t-il demandé. 

Pour sa part, a encore indiqué M. Lee, le grand groupe des enfants et des jeunes souhaite que le pouvoir de décision soit désormais partagé avec les jeunes, que ce soit au niveau national ou local.  Les consultations resteront symboliques si ce que nous disons continue d’être ignoré, a-t-il relevé, ajoutant que « le contrat social ne peut pas profiter à la communauté s’il ne vient pas de la communauté ».  Enfin, le grand groupe réclame l’inclusion d’enfants dans les délégations gouvernementales et dans les processus d’examens nationaux volontaires pour qu’ils partagent leurs expériences.  C’est d’autant plus nécessaire que, partout dans le monde, « les enfants et les jeunes sont à l’avant-garde de la mise en œuvre du développement durable ». 

Mme MELATI WIJSEN, cofondatrice de Bye Bye Plastic Bags et de YouthTopia, a demandé que le groupe des jeunes soit un partenaire à part entière dans la mise en œuvre des ODD, en notant le travail qu’il reste à abattre pour les réaliser.  Les jeunes prennent de plus en plus leurs responsabilités dans le monde, ils doivent pouvoir s’exprimer et faire valoir leurs droits, a-t-elle dit.  Elle a rappelé que c’est sa génération qui assistera, soit à la poursuite de la destruction de la planète, soit à sa sauvegarde.  « Le temps et le pouvoir sont contre nous », a-t-elle lancé aux décideurs, en les exhortant à leur donner du pouvoir et du temps.  « Prenez-nous au sérieux! »  Elle a indiqué qu’elle n’avait que 12 ans lorsqu’elle a commencé à débarrasser sa ville de sacs plastiques, une initiative qui a, depuis, essaimé dans le monde grâce aux jeunes.  Elle a insisté sur l’importance de donner aux jeunes les compétences requises pour jouer un rôle, telle l’organisation d’une campagne ou bien encore la prise de parole en public.  « Les jeunes doivent être avec vous à la table de négociation, dès le début », a-t-elle lancé, en concluant que les jeunes sont « sérieux » en ce qui concerne le changement.

Intervenant principal

Le Ministre de l’environnement du climat de la Norvège, M. SVEINUNG ROTEVATN, est intervenu comme orateur principal en sa qualité de Président de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement (UNEA) et s’est dit heureux de pouvoir transmettre des messages clefs et des recommandations au forum politique de haut niveau afin que la dimension environnementale continue d’être pleinement intégrée aux efforts de relèvement et à la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD).  Selon lui, le monde n’est pas sur la bonne voie pour réaliser le Programme 2030 et c’est particulièrement vrai pour les objectifs environnementaux.  L’impact de la pandémie de COVID-19 a mis à rude épreuve notre capacité à atteindre les ODD, a-t-il souligné, constatant que les pauvres et les marginalisés continuent d’être les plus vulnérables aux risques environnementaux.  Une action transformatrice accélérée est donc nécessaire pour stabiliser le climat, vivre en harmonie avec la nature et parvenir à une planète sans pollution. 

Parmi les mesures à prendre à cette fin, M. Rotevatn a tout d’abord cité l’intensification de l’action climatique mondiale afin de parvenir aux objectifs d’adaptation et d’atténuation fixés par la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et l’Accord de Paris.  Il convient également d’établir des voies économiquement et socialement durables pour inverser la perte de biodiversité et améliorer l’intégrité de l’écosystème, tout en renforçant la capacité de gestion des produits chimiques et des déchets, notamment grâce à l’économie circulaire.  Nous devons par ailleurs promouvoir un système de gouvernance mondiale efficace fondé sur un multilatéralisme environnemental inclusif, y compris par le biais de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement, a-t-il plaidé, avant d’en appeler à une mobilisation adéquate, prévisible et durable des ressources et à des financements durables.  De même, a-t-il ajouté, les transferts de technologie selon des modalités convenues et le renforcement des capacités sont essentiels pour générer des solutions environnementales innovantes.

De l’avis de M. Rotevatn, la biodiversité a besoin d’un cadre mondial ambitieux et réaliste pour l’après-2020.  Mais il faut aussi appuyer les mesures qui favorisent l’intégration de la durabilité environnementale dans tous les secteurs économiques et garantissent l’utilisation durable des ressources naturelles dans le développement économique et social.  Il importe en outre de tirer parti des opportunités de coopération renforcée, a-t-il affirmé, évoquant à cet égard la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes (2021-2030), les propositions du groupe de travail « Mieux récupérer pour la durabilité », dans le cadre de l’Initiative de financement du développement à l’ère de la COVID-19 et au-delà, le Programme de soutien à la relance verte et le Cadre décennal des programmes sur la production et la consommation durables.  Il s’est dit convaincu que l’ensemble de ces mesures contribueront à renforcer la dimension environnementale du développement durable dans le monde postpandémique et à assurer le succès de la Décennie d’action.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Colombie: les membres du Conseil de sécurité saluent les progrès « réels » de la paix malgré de multiples problèmes interconnectés

8818e séance – matin
CS/14579

Colombie: les membres du Conseil de sécurité saluent les progrès « réels » de la paix malgré de multiples problèmes interconnectés

Nous devons reconnaître,  voire célébrer  « les réels » progrès enregistrés par la Colombie, a estimé aujourd’hui l’Irlande alors que le Conseil de sécurité entendait le Chef de la Mission de vérification des Nations Unies dans le pays et la Vice-Présidente et Ministre colombienne des affaires étrangères.  Malgré les « multiples problèmes interconnectés », a ajouté l’Irlande, la mise en œuvre de l’Accord final pour la fin du conflit et la construction d’une paix stable et durable avance. 

Le processus de paix en Colombie entre dans une phase cruciale, près de cinq ans après la signature de l’Accord final de paix, a confirmé le Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie.  M. Carlos Ruiz Massieu, dont le rapport* parle de la forte agitation sociale et de la polarisation des manifestations marquées par des violences, ces derniers mois, a reconnu que ce sont des événements qui ont éveillé de vives inquiétudes. 

La Fédération de Russie a d’ailleurs souligné que l’appui de la communauté internationale à l’Accord de paix « est une sorte de bénéfice du doute accordé aux Colombiens ».  Elle a appuyé, pour aller de l’avant, les cinq priorités recommandées par le Secrétaire général de l’ONU pour 2021, à savoir: assurer la protection et la sécurité des ex-combattants, des populations touchées par le conflit, des figures de la société civile et des défenseurs des droits humains ; assurer la viabilité du processus de réintégration; mieux intégrer la présence de l’État dans les zones touchées par le conflit; rendre le dialogue plus constructif entre les parties ; promouvoir la réconciliation. 

En la matière, le Chef de la Mission de l’ONU a confirmé l’engagement de tous les acteurs dans la tâche « noble et complexe » de la paix.  Cet engagement a porté ses fruits, a-t-il dit, en citant par exemple les avancées simultanées des entités de la justice transitionnelle créées par l’Accord.  Il s’est attardé sur la décision intervenue en avril dernier, en vertu de laquelle sept anciens commandants, au plus haut niveau des ex-FARC-EP ont officiellement accepté leurs responsabilités pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre concernant le cas 01 de la Juridiction spéciale pour la paix (JEP) sur les prises d’otages et autres privations graves de liberté. 

Il s’agit là d’une « étape vitale » pour la vérité, la justice et la réconciliation ainsi que pour les droits des victimes, se sont réjouis les États-Unis, devant ce que le Royaume-Uni a qualifié d’« avancées significatives » et l’Irlande, de « réels progrès ».  Cette dernière s’est tout de même alarmée d’un nombre toujours trop élevé de morts parmi les anciens combattants, les défenseurs des droits de l’homme, les leaders sociaux, les enfants, les autochtones et les Afro-Colombiens.  

La réconciliation étant impossible sans la sécurité, comme l’a souligné le Royaume-Uni, les États-Unis se sont félicités du dialogue national promu par le Président Ivan Duque et ont dit apprécier l’adoption d’un plan stratégique pour la sécurité et la protection des anciens combattants.  Malgré tous les problèmes, ont-ils souligné, la Colombie s’achemine vers le succès et vers un statut de modèle pour les sorties de crise.  Pour autant, a argué la France, que l’Accord de paix soit compris comme un ensemble à mettre en œuvre dans son intégralité.  Elle a dit attendre des progrès en matière de réforme rurale, d’accès à la terre, de substitution des cultures illicites ou encore de participation politique. 

Les avancées ont été mises en avant par Mme Martha Lucia Ramirez, Vice-Présidente et Ministre des affaires étrangères de la Colombie, qui n’a pas oublié de rappeler que le coût de l’application de l’Accord de paix représente deux années entières du PIB colombien et que le délai fixé est de 15 ans.  Elle a noté que peu de délégations ont soulevé le problème du trafic de drogue alors qu’il demeure un défi majeur et « la cause première » des morts parmi les défenseurs des droits humains.  Elle a aussi argué que ce sont les groupes armés et pas une prétendue non-application de l’Accord qui menacent la stabilité du pays.  Le Chef de la Mission de vérification des Nations Unies a semblé le confirmer et a réclamé des mesures fermes pour mettre en œuvre une politique publique en faveur du démantèlement des groupes armés illégaux, des organisations criminelles et de leurs réseaux de soutien. 

La Vice-Présidente a par ailleurs jugé « acceptables », les revendications de la « jeune artisane de la paix », présente aujourd’hui au Conseil de sécurité. Melissa Herrerra a demandé à son pays de s’engager à mettre en œuvre la résolution du Conseil sur les jeunes, la paix et la sécurité, à améliorer l’inclusion des jeunes aux processus décisionnels à tous les niveaux, à protéger les jeunes de la violence sexuelle et sexiste dans le contexte postconflit et à mettre en œuvre des garanties de sécurité pour leur permettre de participer à la vie politique. 

Elle a aussi appelé son pays à faire progresser les enquêtes sur les actes de violence contre les femmes et les jeunes et à élaborer des stratégies de réintégration des jeunes impliqués dans le conflit armé.  La jeunesse est indispensable à l’édification de la paix, a-t-elle martelée, soutenue par plusieurs délégations. 

*S/2021/603 

LETTRES IDENTIQUES DATÉES DU 19 JANVIER 2016, ADRESSÉES AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ET AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LA REPRÉSENTANTE PERMANENTE DE LA COLOMBIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2016/53) - S/2021/603

Déclarations

M. CARLOS RUIZ MASSIEU, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie, a estimé que le processus de paix en Colombie entre dans une phase cruciale, près de cinq ans après la signature de l’Accord de paix.  L'engagement et le travail de tous les acteurs impliqués dans cette tâche « noble et complexe » ont porté leurs fruits, malgré les défis multiples et persistants, a-t-il affirmé.  Il en a voulu pour preuve les avancées simultanées des entités de la justice transitionnelle créées par l’Accord, pour lesquelles la participation de tous, y compris des victimes du conflit, a été fondamentale.  Il s’est attardé sur la décision intervenue en avril dernier, en vertu de laquelle sept anciens commandants, au plus haut niveau des ex-FARC-EP ont officiellement accepté leurs responsabilités pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre concernant le cas 01 de la Juridiction spéciale pour la paix (JEP) sur les prises d'otages et autres privations graves de liberté. 

De même, la semaine dernière, la JEP a inculpé 11 personnes, dont des officiers de l’armée, ainsi qu’un troisième civil, dans le cadre de l’affaire 03, sur des meurtres extrajudiciaires et disparitions forcées.  Parallèlement, le travail de l’Unité de recherche a permis de retrouver des centaines de corps de personnes disparues, notamment grâce aux informations fournies par les ex-guérilleros, les anciens paramilitaires et les agents de l’État.  Ce travail contribue à rassurer les familles des victimes après des années d’incertitude douloureuse, a dit le Représentant spécial, avant de noter que la Commission vérité continue de promouvoir des espaces de reconnaissance dans lesquels les victimes des différents acteurs du conflit ont pu se retrouver face à face et dialoguer avec ceux qui, il y a des années, leur ont causé des dommages irréparables.  

Tous ces événements que l’on pensait encore irréalisables, il y a quelques années, sont nés de l’Accord de paix, s’est félicité M. Massieu.  Il a appelé les institutions créées pour garantir la justice, la vérité, la réparation et la non-répétition à se hisser à la hauteur de la ténacité et de la générosité des victimes du conflit.  C’est une condition nécessaire, a-t-il prévenu, au succès de l’Accord de paix et une tâche qui demande un effort constant, de l’humilité et de l’empathie.  Il faudra du temps, a-t-il encore prévenu, pour faire disparaître les discours hérités du conflit et clore définitivement ce chapitre pour avancer vers la réconciliation.  En ce sens, le travail confié par le Conseil de sécurité à la Mission pour vérifier le respect et la mise en œuvre des sanctions émises par la JEP, contribuera à ces efforts de réconciliation. 

Le Représentant spécial a jugé que ces avancées soulignent l’importance des initiatives conjointes entre la société civile et les entités étatiques pour protéger les leaders sociaux et les défenseurs des droits humains, comme le projet pilote du Programme global de garanties pour les femmes leaders et les défenseurs des droits humains, actuellement en cours à Montes de María.  Il s’est en effet inquiété du niveau de violence et de stigmatisation persistant à l’encontre des anciens combattants et des membres du Parti des communs à l’approche des élections de 2022.  Face à la persistance de la violence, M. Massieu a réclamé des mesures fermes pour mettre en œuvre une politique publique en faveur du démantèlement des groupes armés illégaux, des organisations criminelles et de leurs réseaux de soutien.  Il faut en l’occurrence une présence intégrée de l’État, laquelle se matérialise notamment par le déploiement de forces de sécurité et une plus forte présence des institutions civiles.  Il a noté que la mise en œuvre intégrale du Système général de sécurité pour l’exercice de la liberté politique contribue à renforcer les garanties de sécurité des participants à la vie politique, notamment les futurs candidats aux élections de 2022, ainsi que les fonctionnaires. 

Mettant l’accent sur l’importance des liens entre les processus de réintégration des anciens combattants et les autres réformes, M. Massieu a jugé primordial que ces anciens combattants puissent avoir accès à la terre et au logement pour ne plus vivre dans l’incertitude et pouvoir éprouver un sentiment d’appartenance.  Il a donc encouragé le Gouvernement à faire davantage, notamment en ce qui concerne les logements et les terrains situés en dehors des anciens secteurs territoriaux de formation et de réintégration. 

M. Massieu s’est particulièrement inquiété de l’impact de la troisième vague de la pandémie de COVID-19 qui vient exacerber les difficultés de nombreux Colombiens défavorisés à travers le pays.  La société et les institutions doivent envisager la mise en œuvre de l’Accord pour régler des questions qui sont problématiques depuis longtemps.  Alors que les prochaines élections générales approchent à grand pas, M. Massieu a appelé les parties à saisir l’occasion du processus politique pour parvenir à une démocratie plus solide, protéger les acquis et triompher de la non-stigmatisation.  Il a particulièrement salué la création récente de 16 sièges supplémentaires à la Chambre des représentants pour promouvoir la participation des populations historiquement exclues, dans les régions touchées par le conflit, y compris des membres des organisations de victimes et de femmes. 

MELISSA HERRERA, Présidente et Fondatrice de « Viva la Vida », s’est présentée comme « jeune artisane de la paix » de la région de Nariño, a raconté l’histoire d’une adolescente de 14 ans qui, vivant dans la pauvreté, avait échangé, en 1966, son bébé contre quelques pièces d’argent.  Cette enfant, Lucía, maltraitée et privée d’éducation, est ensuite devenue mère à son tour à 15 ans.  Mais sa fille, Lucy, est parvenue à aller à l’université et est devenue ensuite une dirigeante de la communauté culturelle de Nariño.  Un jour, pendant les fêtes de Noël, Lucy a été tuée par un groupe armé dans une zone territoriale pour la paix où elle travaillait sur une exposition consacrée au travail des femmes artisanes de la paix.  Cet acte illustre la situation des femmes qui subissent les conséquences du conflit armé, a affirmé l’intervenante qui a ensuite révélé que « cette adolescente de 14 ans était ma grand-mère, Lucía est ma mère et Lucy était ma sœur ». 

La « jeune artisane de la paix » a indiqué que des difficultés persistent dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2002) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, notamment en ce qui concerne les adolescents, comme en témoigne l’exemple de Lucía.  Elle a évoqué l’espoir que suscite l’Accord de paix, avant de se réjouir que la voix des jeunes ait été entendue durant les récentes manifestations.  Les jeunes se sont exprimés, tout en faisant preuve de leur ouverture au dialogue, a-t-elle affirmé. 

L’intervenante a appelé le Conseil de sécurité à établir des indicateurs sur la mise en œuvre des résolutions 2250, 2419 et 2535 et à faire le lien avec les questions de genre et de la jeunesse.  Elle a également invité le Conseil à se rendre sur place pour rencontrer des représentants de la jeunesse « dans toute sa diversité ».  Elle a exhorté la Colombie à s’engager à mettre en œuvre la résolution sur les jeunes, la paix et la sécurité, notamment en améliorant l’inclusion des jeunes aux processus décisionnels à tous les niveaux, en protégeant les jeunes de la violence sexuelle et sexiste dans le contexte postconflit et en mettant en œuvre des garanties de sécurité pour leur permettre de participer à la vie politique. 

Elle a également appelé son pays à faire progresser les enquêtes sur les actes de violence contre les femmes et les jeunes, dans le contexte de la mise en œuvre de l’Accord de paix.  Il convient aussi d’élaborer des stratégies de réintégration des jeunes impliqués dans le conflit armé, de renforcer les collectifs des jeunes et de prendre en charge la santé mentale des personnes touchées par le conflit et les manifestations actuelles.  La jeunesse, a-t-elle souligné, est indispensable à l’édification de la paix. 

M. JAMES PAUL ROSCOE (Royaume-Uni) s’est inquiété des violations des droits humains signalés en Colombie et a salué les enquêtes initiées par le Gouvernement pour faire la lumière sur le recours excessif à la violence durant les récentes manifestations.  Il a estimé que ces évènements ne doivent pas pour autant occulter les progrès réalisés pendant la période à l’examen, saluant notamment les avancées « significatives » sur le plan de la justice transitionnelle.  Des vérités douloureuses ont vu le jour mais elles ont justifié l’importance de la vérité et de la réconciliation, a-t-il estimé, tout en prévenant que la réconciliation sera impossible si l’insécurité persiste.  Il a exhorté le Gouvernement à redoubler d’efforts, notamment en mettant en œuvre sa politique de démantèlement des groupes armés illégaux et en renforçant la présence de l’État dans les anciennes zones de conflit.  Il l’a également encouragé à accélérer l’achat de terrains pour appuyer la réintégration des anciens combattants. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a salué les progrès importants observés dans le processus de paix, en citant particulièrement la reconnaissance par les anciens commandants des FARC d’une politique d’enlèvements et de leur responsabilité pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.  Il a pris acte des demandes de pardon et de l’engagement à retrouver les dépouilles des personnes assassinées ou décédées, en détention.  La réponse à l’ordonnance de la Juridiction spéciale pour la paix est une étape importante pour la vérité, la justice et la réconciliation, dans le respect des droits des victimes, s’est réjoui le représentant.  Ce processus, a-t-il affirmé, peut servir d’exemple à d’autres processus de paix et de justice.  Après s’être inquiété du nombre élevé de personnes déplacées en raison de l’action des groupes armés illégaux, le représentant a souligné la nécessité de mettre en œuvre les politiques publiques pertinentes pour protéger la population, y compris les ex-combattants, les défenseurs des droits humains, les peuples autochtones et les Afro-Colombiens.  Il a salué la proposition du Gouvernement colombien de procéder à une évaluation de la mise en œuvre de l’Accord de paix, à la veille de son cinquième anniversaire cet automne. 

Au fur et à mesure que le travail de la Juridiction spéciale pour la paix progressera, le représentant, dont le pays copréside le Groupe informel sur les femmes, la paix et la sécurité, a voulu que l’on réfléchisse de manière plus approfondie à l’impact des violences sexuelles liées au conflit.  Il a salué la décision de créer 16 sièges supplémentaires au Congrès pour assurer la représentation de territoires défavorisés et sous-représentés des anciennes zones de conflit.  Malgré les défis qui subsistent, il s’est félicité de ce que près de 100 000 familles participent au Programme national complet de substitution des cultures.  À la lumière des troubles sociaux, de la polarisation, des violences regrettables et des pertes en vies humaines, le représentant a appelé au dialogue et au plein respect des droits de l’homme.  Il a dûment salué les bons offices de la Mission de vérification et du Bureau du Haut-Représentant pour les droits de l’homme. 

Au nom du Kenya, du Niger, de la Tunisie et de Saint-Vincent-et-les Grenadines (A+3), Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a estimé que les troubles sociaux « sans précédent » que vient de connaître la Colombie et la violence qui les a accompagnés sont « extrêmement préoccupants » et montrent l’importance de s’attaquer « frontalement » aux causes sous-jacentes du conflit, dont les inégalités.  Notant les succès et les échecs de la mise en œuvre de l’Accord de paix, la représentante a voulu que l’on insuffle un élan plus fort au renforcement de l’appareil sécuritaire de l’État pour mettre fin à la violence. Elle s’est félicitée des directives pour le démantèlement des groupes armés illégaux, tout en notant des divergences de vues sur le plan stratégique de protection.  Encourageant les parties au dialogue, elle a appelé les autorités colombiennes à accorder plus de ressources à la mise en œuvre du Programme complet de sécurité et de protection et à veiller à ce que la Commission nationale des garanties de sécurité tienne des réunions plus régulières. 

Elle n’a pas manqué de prier les autorités de faire progresser les enquêtes sur les violations des droits de l’homme, avant de souligner que la justice transitionnelle demeure un pilier des processus de paix.  Se félicitant des progrès en la matière, elle a ensuite appelé à des mesures renforcées pour faciliter une bonne réintégration des anciens combattants et résoudre la controverse qui entoure la pleine mise en œuvre de la réforme rurale générale.  La représentante s’est aussi dite impatiente de voir des progrès dans la mise en œuvre des dispositions de l’Accord relatives aux minorités ethniques et aux Afro-Colombiens. 

M. HAI ANH PHAM (Viet Nam) s’est dit encouragé par les progrès « remarquables » enregistrés depuis la conclusion de l’Accord de paix en 2016.  Il a salué les efforts « considérables » dans la promotion du développement socioéconomique, y compris une réforme agraire globale et l’expansion du processus de réintégration à tous les niveaux.  Le représentant s’est tout de même dit préoccupé par la mise en œuvre incomplète de l’Accord; la réintégration tout comme d’autres processus étant toujours confrontés à de nombreux problèmes.  Il a donc souligné l’importance de la volonté politique et de la détermination de toutes les parties pour aller de l’avant.  Il a d’ailleurs salué l’idée d’élaborer une feuille de route pour appuyer la participation des anciens combattants au processus de réintégration.  Il a aussi appelé à un dialogue constructif, aux niveaux politique et technique, pour ancrer la réconciliation, la solidarité et les progrès. 

Le représentant a dit attendre du Gouvernement, des partis politiques et d’autres parties prenantes l’adoption de mesures pour traiter des causes sous-jacentes de l’instabilité.  Après avoir condamné toutes les formes de violence, il a prié les parties d’exploiter tout le potentiel des mécanismes de garanties de sécurité prévus par l’Accord de paix; jugeant important de redoubler d’efforts pour assurer la sécurité et le développement des communautés affectées par le conflit, par des « mesures pratiques ». 

Mme MONA JUUL (Norvège) a salué l’engagement « fort » des parties en faveur de la mise en œuvre de l’Accord de paix, même dans les circonstances difficiles des troubles sociaux.  Compte tenu des informations « profondément troublantes », elle a insisté sur le respect des droits de l’homme et des manifestations pacifiques, condamné le recours à une force disproportionnée et appelé tous les acteurs à régler leurs différends par le dialogue.  Les derniers évènements, a estimé la représentante, doivent encourager les parties à mettre en œuvre toutes les dispositions de l’Accord de paix et en particulier, celles liées aux garanties de sécurité, à la participation politique et aux questions liées au genre.  Assurer la participation pleine, égale et substantielle des femmes au processus de paix ainsi que celle des minorités ethniques et des jeunes est essentiel, a martelé la représentante qui a aussi plaidé pour une meilleure protection des défenseurs des droits de l’homme.  Le but ultime de l’Accord de paix, a-t-elle dit, est de remplacer la violence par la participation politique et le chapitre 2 offre tout un éventail d’instruments pour renforcer la démocratie et assurer la participation à l’exercice politique. 

Sur une note plus positive, la représentante a salué les progrès du système intégré de justice transitionnelle et appelé tous les acteurs à exploiter tout le potentiel de la Commission Vérité.  Elle a particulièrement souligné le fait que des anciens leaders des FARC aient assumé leurs responsabilités devant la Juridiction spéciale pour la paix.  C’est un acte historique car il est rare que les leaders d’une ancienne guérilla reconnaissent les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre qu’ils ont commis.  Mais, a prévenu la représentante, il faut garder à l’esprit le sentiment des victimes et des auteurs présumés de violations, dont les anciens membres des FARC et les forces de sécurité selon lequel est impossible de contribuer au système de justice transitionnelle sans risquer sa vie.  Il est donc impératif que les autorités fassent tout pour les protéger. 

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a qualifié de « positifs » les progrès enregistrés, ces trois derniers mois, dans la mise en œuvre de l’Accord de paix, malgré des problèmes complexes, dont la pandémie de COVID-19.  Les dernières manifestations ont souligné, si besoin en était, la nécessité d’un engagement plus large de toutes les parties prenantes à résoudre les problèmes liés aux inégalités, à la sécurité et aux cultures de substitution.  À la veille du cycle électoral, l’accent mis sur les cinq priorités fixées par le Secrétaire général pour avancer dans la mise en œuvre de l’Accord sera important, a pronostiqué le représentant.  Les autorités, a-t-il dit, doivent prendre des mesures pour garantir un climat politique inclusif. 

Il a espéré que la feuille de route pour mettre en œuvre la politique nationale sur le démantèlement des groupes armés illégaux sera finalisée bientôt. La présence intégrée et renforcée de l’État dans tout le pays est un élément « fondamental » pour une paix durable.  Il est tout aussi important, a poursuivi le représentant, que la grande majorité des anciens combattants soient impliqués dans des activités génératrices de revenus.  La dernière distribution de terre et la destruction des cultures illicites sont une évolution à saluer, a estimé le représentant.  Plaidant pour la protection de ces anciens combattants, il a encouragé un dialogue régulier entre eux et les forces de sécurité.  Il a aussi insisté sur la sécurité des leaders sociaux, des défenseurs des droits de l’homme, des femmes leaders, des autochtones et des leaders afro-colombiens.  Le représentant a conclu en appelant au renforcement des capacités judiciaires de la Colombie et en s’enorgueillissant des relations diplomatiques que son pays entretient avec cette dernière depuis 60 ans.  

Malheureusement, a regretté M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie), le rapport du Secrétaire général montre une détérioration de la situation due à l’insuffisance des progrès dans la mise en œuvre de l’Accord final de paix, comme en ont attesté les dernières manifestations partout dans le pays.  La cause de ces manifestations, a souligné le représentant, est directement liée à des domaines couverts par l’Accord de paix.  Après avoir appelé les forces de l’ordre à agir de manière plus professionnelle, il a appuyé les cinq priorités fixées dans le dernier rapport du Secrétaire général.  Mais, a-t-il dit, on ne voit aucun progrès sur aucune de ces priorités, alors que la campagne électorale va bientôt commencer, en prévision des élections prévues en 2022.  Nous doutons, a avoué le représentant, que la situation s’améliorera dans un avenir prévisible. 

La lutte entre groupes armés pour des zones d’influence a provoqué un déplacement massif et le meurtre des participants au processus de paix, sans compter les tensions à la frontière avec le Venezuela qui ne font qu’aggraver les problèmes sécuritaires.  Le représentant a aussi noté l’impasse dans la réforme agraire, le droit d’accès à la terre et les programmes pour les cultures de substitution.  La distribution des terres tarde tout comme le versement des dédommagements à ceux qui ont détruit leurs champs de coca.  Bien au contraire, la production de coca ne fait qu’augmenter d’année en année, avec l’aggravation de la violence et de la corruption que cela implique.  Quant à la justice transitionnelle, on peut se féliciter que des anciens leaders des FARC aient reconnu leurs responsabilités mais qu’en est-il des représentants de l’État?  Une véritable paix, a prévenu le représentant, est impossible sans la prise en compte de l’ensemble des points de vue.  Il a espéré que les parties colombiennes reviendront à de véritables négociations sur la réconciliation.  À la veille du cinquième anniversaire de l’accord historique de paix, le représentant a souligné que l’appui de la communauté internationale à ce document « est une sorte de bénéfice du doute accordé aux Colombiens ».  La paix n’est pas une déclaration volontaire de l’une ou l’autre partie.  La paix, a martelé le représentant, est un long travail et un long processus de dialogue constant tenant compte de toutes les opinions.

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a jugé important de reconnaître « voire de célébrer » les réels progrès enregistrés par la Colombie.  Toutefois, a tempéré le représentant, il est clair que le pays fait face à de multiples problèmes interconnectés.  Il a noté avec « une profonde préoccupation » les menaces contre les participants au système de justice transitionnelle ainsi que la violence contre les membres des partis politiques, à la veille de la période électorale.  Le représentant a condamné « dans les termes les plus forts », l’attentat à la voiture piégée à Cúcuta, l’attaque « lâche » contre l’hélicoptère du Président Ivan Duque et le meurtre « insensé » de la Procureure municipale, Esperanza Navas, et de la dirigeante sociale, Derly Pastrana Yara lequel témoigne du nombre trop élevé des morts parmi les défenseurs des droits de l’homme, les leaders sociaux, les anciens combattants, les enfants, les autochtones et les Afro-Colombiens.  Les auteurs de ces violences doivent être traduits en justice, a martelé le représentant, à l’intention du Gouvernement colombien.  

Les derniers troubles sociaux et les manifestations généralisées, a-t-il poursuivi, montrent les problèmes structurels qui caractérisent encore la Colombie et le caractère « vital » d’un dialogue véritable et inclusif.  Le représentant n’a pas manqué de saluer le leadership et l’engagement de la jeunesse colombienne qui doit, a-t-il dit, pouvoir participer à la prise de décisions.  Il a salué l’engagement que vient de prendre le Président Duque à faciliter les premières élections aux conseils municipaux des jeunes, cet automne.  La pleine mise en œuvre de l’Accord de paix dépend de la qualité du dialogue, a souligné le représentant.  Il a dit parler d’un dialogue qui ouvre la voie à des solutions mutuellement agrées aux problèmes communs.  La consolidation de la paix requiert un engagement actif de tous les membres de la société, un engagement bâti sur la confiance et une confiance qui ne peut venir que d’un dialogue mené de bonne foi, a professé le représentant. 

M. SHUANG GENG (Chine) a constaté que des progrès ont été réalisés dans la mise en œuvre de l’Accord final, notant qu’il s’agit d’un processus de longue haleine et que l’accord se heurte à des « incertitudes », comme en témoigne les récentes manifestations.  Il a appelé à des conditions propices à la tenue des élections l’an prochain.  Le représentant a ensuite pris note des programmes de substitution des cultures illicites et de réintégration des anciens combattants.  Il a appuyé les programmes de lutte contre la criminalité organisée et les groupes armés, ainsi que les discussions en cours entre le Gouvernement colombien et le Parti des communs sur le renouvèlement de l’Accord.  Le représentant a en outre salué l’action de la Mission de vérification et espéré qu’elle parviendra, en coordination avec l’équipe de pays de l’ONU, à appuyer les efforts déployés par le Gouvernement colombien pour faire face à la pandémie, mettre en œuvre l’Accord final et assurer la stabilité sociale. 

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) s’est dit alarmé par l’attaque du 25 juin contre l’hélicoptère du Président Ivan Duque mais « soulagé » que personne n’ait été blessée.  Il a ensuite salué le travail « acharné » du Gouvernement colombien contre la pandémie de COVID-19 et rappelé que son pays vient d’offrir à la Colombie 2,5 millions de doses de vaccin.  Le représentant s’est félicité du dialogue national promu par le Président Duque sur les causes des dernières manifestations.  Ces derniers mois, a-t-il poursuivi, le système de justice transitionnelle a fait des progrès importants, comme en attestent les aveux des anciens commandants des FARC et l’acceptation de leurs responsabilités pour des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. 

Il s’agit là, s’est réjoui le représentant, d’une « étape vitale » pour la vérité, la justice et la réconciliation ainsi que pour les droits des victimes.  Il s’agit aussi d’une démonstration importante de l’engagement des anciens membres des FARC en faveur de l’Accord final de paix.  Le représentant a aussi salué les progrès de la justice transitionnelle dans l’identification et l’établissement des responsabilités des anciens membres des forces de sécurité qui ont ordonné ou participé aux abus des droits de l’homme, y compris aux exécutions extrajudiciaires. 

Malgré ces progrès, a prévenu le représentant, nous suivons étroitement l’aggravation de la violence dans les anciennes zones contrôlées par les FARC, en particulier contre les anciens combattants et les leaders sociaux.  Il a dit apprécier l’adoption d’un plan stratégique pour la sécurité et la protection de ces anciens combattants mais s’est dit « profondément préoccupé » par la mort de 71 défenseurs des droits de l’homme et leaders sociaux depuis le début de l’année. 

La protection de ces catégories de personnes est un élément crucial de l’Accord final de paix, a martelé le représentant qui s’est dit tout aussi préoccupé par l’intensification de la culture et de la production de coca.  La meilleure manière de régler ce problème une fois pour toutes est de combiner les efforts de maintien de l’ordre avec un programme solide de développement rural. Malgré tous ces problèmes, a conclu le représentant, la Colombie s’achemine vers le succès et vers un statut de modèle pour les sorties de crise.  Le travail du Gouvernement et de la Mission de vérification est « tout simplement admirable », a-t-il estimé. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a constaté que la situation en Colombie est préoccupante. Les troubles sociaux et la polarisation de la société doivent être gérés, a-t-il insisté, avant d’insister aussi sur l’importance de renforcer les garanties de sécurité et les réformes structurelles.  Il a salué les développements concernant la décision de créer 16 circonscriptions électorales provisoires spéciales pour la paix, ainsi que le travail des mécanismes de justice transitionnelle, notamment la Juridiction spéciale pour la paix.  La situation sécuritaire, a poursuivi le représentant, demeure le principal défi.  La lutte contre l’impunité est essentielle pour mettre un terme à la violence, et en la matière, a-t-il dit, la présence limitée de l’état, la pauvreté et les groupes armés illégaux sont les principales causes de la violence auxquelles il faut répondre.  Notant que la Commission nationale des garanties de sécurité doit se réunir pour établir une feuille de route sur la mise en œuvre des directives en matière de politique publique, le représentant a formulé l’espoir que des progrès significatifs pourront être réalisés malgré les « défis spectaculaires » actuels. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a salué les efforts entrepris par le Gouvernement et le peuple colombiens depuis 2016 pour mettre en œuvre « l’accord historique » dont nous marquerons le cinquième anniversaire à l’automne.  Le représentant a noté que la Colombie est durement frappée par une nouvelle vague de COVID-19 qui accroit les inégalités et que, dans plusieurs parties du territoire, la situation sécuritaire est en détérioration, avec de nombreux crimes commis contre les défenseurs des droits de l’homme, les leaders sociaux et les anciens combattants.  Face à ce constat, il a appelé au renforcement de la présence de l’État dans ces zones reculées où ont lieu la majorité de ces crimes, avant de préciser que la Commission des garanties de sécurité doit pouvoir se réunir pour proposer des mesures concrètes en faveur de ces territoires fragiles. 

Par ailleurs, le représentant a particulièrement salué les étapes décisives franchies, ces derniers mois, en matière de justice transitionnelle.  Nous nous félicitons de l’acceptation par les responsables des FARC de leurs responsabilités dans le macro-cas numéro un, a-t-il dit, avant d’estimer que leur collaboration démontre que le système fonctionne.  L’acte d’accusation publié par la Juridiction spéciale pour la paix dans l’affaire dite des « faux positifs » est un nouveau pas en avant, a-t-il encore estimé, avant d’espérer que les individus inculpés reconnaîtront également leurs responsabilités. 

Enfin, le représentant a jugé important que toutes les parties au conflit s’engagent dans le cadre de la Commission Vérité, comme l’ont fait récemment Ingrid Betancourt et ses ravisseurs.  Il a salué le travail accompli par cette Commission qui publiera son rapport en novembre, marquant ainsi une nouvelle étape historique dans le processus d’établissement de la vérité.  Enfin, le représentant a estimé que l’accord de paix doit être compris comme un ensemble, qui ne pourra porter ses fruits durablement que s’il est mis en œuvre dans son intégralité.  C’est pourquoi il a appelé à des progrès en matière de réforme rurale, d’accès à la terre, de substitution des cultures illicites ou encore de participation politique.  Pour gagner la paix, il faut réduire la fracture entre les territoires et fournir des opportunités socioéconomiques viables et justes à tous, a-t-il conclu, en souhaitant que l’on arrive à un niveau de mise en œuvre concrète rendant l’accord irréversible. 

Mme MARTHA LUCÍA RAMIREZ, Vice-Présidente et Ministre des affaires étrangères de la Colombie, a assuré que son gouvernement cherche une paix réelle et durable, notamment en appuyant le développement du pays afin de combler la fracture sociale et de créer un climat de paix réel.  Elle a noté que peu de délégations ont soulevé le problème du trafic de drogue alors que celui-ci demeure un défi majeur pour son gouvernement.  C’est « la cause première » des morts parmi les défenseurs des droits humains, a-t-elle affirmé, avant de souligner la responsabilité partagée face à ce fléau et aux problèmes de déboisement et de trafic de personnes qui y sont liés.  La Ministre a indiqué que le coût de l’application de l’Accord de paix représente deux années entières du PIB colombien et rappelé que 15 ans sont prévus pour assurer son application.  Malgré les défis, nous ne baisserons pas les bras et veillerons à aller de l’avant, a-t-elle assuré. 

Mme Ramirez a récusé les affirmations selon lesquelles la violence dans le pays découlerait de la non-application de l’Accord, soulignant que ce sont les groupes criminels qui menacent la stabilité du pays.  Assurer le contrôle de l’État sur l’ensemble du territoire est primordial, a-t-elle convenu, en attirant l’attention sur la construction de 13 000 km de routes pour donner aux paysans des chances de développement et les éloigner de la filière de la coca.  En outre, les progrès en termes de réintégration politique et sociale sont indéniables: 13 898 personnes ont été dissociées des FARC; plus de 87% des personnes réintégrées bénéficient d’un soutien et un programme de formation et de nombreux autres programmes sont en voie d’être créés.  Plus de 1 370 hectares ont été réhabilités, des terrains ont été remis aux anciens combattants parmi lesquels 95% ont accès aux services bancaires et une autre très grande majorité à la santé.  

S’agissant de la question des garanties de sécurité pour les anciens combattants, Mme Ramirez a fait savoir qu’un mécanisme surveille l’étendue des progrès réalisés à ce sujet et que des mesures ont permis d’éviter l’assassinat des candidats des FARC aux élections en 2019.  Un système analogue est prévu pour les élections de 2022, a-t-elle ajouté.  En outre, des ressources importantes ont été allouées à l’Unité nationale de protection, l’objectif étant d’éviter les attaques contre les anciens combattants.  À ce sujet, la Ministre a fait état d’une baisse de 20% des homicides à leur encontre et des progrès notables dans les enquêtes sur ces assassinats.  Les auteurs de ces crimes sont souvent liés au trafic de drogue et font partie des groupes dissidents des FARC, a-t-elle indiqué, précisant par ailleurs que plus de 40 condamnations ont été prononcées. 

Après avoir reconnu l’importance des mécanismes de justice transitionnelle, la Ministre a parlé des progrès réalisés pour faire face aux enlèvements et répondre aux exigences de la population à ce sujet.  Des efforts budgétaires ont également été déployés pour renforcer les mécanismes de justice transitionnelle dont il importe de respecter l’indépendance.  Il est également crucial que les enquêtes menées par la Juridiction spéciale pour la paix produisent leurs effets. Les questions de genre sont une autre priorité du Gouvernement, a poursuivi Mme Ramirez, qui s’est félicitée du fait que 57% des indicateurs du Plan cadre en la matière ont été respectés.  Des terres et un soutien économique ont par ailleurs été alloués aux femmes, tandis qu’un document politique sur les réparations à accorder aux victimes tient compte de la dimension genre. 

Poursuivant, la Ministre a insisté sur le fait que les troubles actuels en Colombie ne sont pas liés à l’Accord de paix, mais aux inégalités.  D’autres pays ont été le théâtre de manifestations similaires, notamment dans le contexte de la COVID-19, a-t-elle fait observer.  Elle a précisé que 15 000 manifestations ont été enregistrées depuis avril mais que les forces publiques n’ont eu à intervenir que dans 11% des cas.  Elle n’en a pas moins dénoncé un processus de destruction « planifié et financé » contre le tissu social de la Colombie, y voyant un lien avec l’approche des élections. 

Souhaitant réagir à certaines interventions, Mme Ramirez a assuré que la Colombie dispose d’institutions et d’un bureau du procureur qui travaille en toute indépendance, notamment sur les questions de violations des droits humains.  Elle a jugé « acceptables » les demandes de la « jeune artisane de la paix » à son gouvernement, évoquant notamment l’élaboration d’un pacte pour la jeunesse et l’élection prochaine aux conseils municipaux des jeunes.  Elle a indiqué que les efforts se poursuivent pour identifier les auteurs de l’attentat contre l’hélicoptère du Président colombien, s’engageant ensuite à répondre par écrit aux questions soulevées au sujet des anciens combattants.  Peut-être n’avons-nous pas transmis suffisamment d’informations, s’est-elle demandé? 

Évoquant la célébration, en novembre prochain, du cinquième anniversaire de l’Accord de paix, elle a invité le Conseil de sécurité à se rendre en Colombie pour pouvoir constater par lui-même l’engagement du Gouvernement.  La paix doit profiter à tous, notamment aux « groupes ethniques ».  À cet effet, un système de consultation des communautés autochtones a été mis sur pied, a encore indiqué la Ministre, sans oublier de rappeler que son pays accueille deux millions de Vénézuéliens pour lesquels le Gouvernement a mis en place un programme temporaire de protection de 10 ans.  

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