Le forum politique de haut niveau adopte une déclaration ministérielle pour une mise en œuvre accélérée du Programme 2030, « voie à suivre » en ces temps de pandémie
Le forum politique de haut niveau pour le développement durable a adopté, cet après-midi, une déclaration ministérielle*, point d’orgue du débat ministériel qu’il tient avec le Conseil économique et social (ECOSOC) sur le thème de la reprise durable et de la résilience après la pandémie de COVID-19, pour ouvrir une voie inclusive et efficace vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Cette déclaration, qui marque la fin des travaux du forum de haut niveau pour 2021, devrait être adoptée demain par l’ECOSOC.
Réunis en cette période « difficile de crise, de résilience, de reprise et d’espoir », les ministres et hauts représentants s’engagent, par cette déclaration, en faveur d’une action accélérée visant à mettre en œuvre le Programme 2030, qui est « la voie que nous devons suivre pour lutter contre les effets négatifs de la pandémie de COVID-19, prévenir de futures pandémies et bâtir un avenir meilleur ». La pandémie est venue s’ajouter aux obstacles préexistants qui entravent la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) et accentuent les inégalités structurelles, ainsi que les risques systémiques, reconnaît la déclaration.
En même temps, comme il ressort des huit jours de débat du forum que la Vice-Secrétaire générale de l’ONU a résumés, les changements mis en place pour répondre à la pandémie peuvent fournir une base pour progresser vers les ODD. Mme Amina J. Mohammed a notamment plaidé en faveur de l’universalité d’accès aux vaccins contre la COVID-19, appuyée par le Président de l’ECOSOC, M. Munir Akram, qui a salué ce forum politique « intense, inspiré et orienté vers l’action ».
Comme l’exprime aussi la déclaration ministérielle, la reprise mondiale passe par un accès « équitable et abordable » pour tous aux vaccins et traitements contre la COVID-19. « Nous sommes conscients que l’immunisation à grande échelle contre la COVID-19 jouera le rôle d’un bien public mondial », poursuivent-ils, en appuyant sans réserve le Mécanisme COVAX. Les pays en capacité de le faire sont ainsi invités à mettre leurs doses excédentaires à la disposition dudit mécanisme afin de favoriser une distribution équitable des vaccins aux pays en développement.
Alors que la crise liée à la COVID-19 a montré l’importance des systèmes de protection sociale, les ministres appellent à en faire bénéficier les quatre milliards de personnes dans le monde qui en sont dénuées. Ils demandent aussi de prendre des « mesures concrètes » pour remédier à la faim chronique dans laquelle ont basculé en 2020, en raison de la pandémie, entre 83 et 132 millions de personnes, qui sont venues s’ajouter aux 690 millions de 2019.
Face aux changements climatiques –« l’un des plus grands défis du monde contemporain »- la déclaration plaide pour une « riposte mondiale renforcée » et souligne l’importance de l’Accord de Paris. Elle appelle « instamment » les pays à mettre en place, après la pandémie de COVID-19, des politiques de relance économique durables, inclusives et adaptées aux réalités climatiques. « Il importe au plus haut point de renforcer la capacité d’adaptation et la résilience et de réduire la vulnérabilité face aux changements climatiques », précise le texte.
S’agissant du financement des mesures d’atténuation face à ces changements, la déclaration rappelle l’engagement pris de mobiliser 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 et jusqu’en 2025 pour répondre aux besoins des pays en développement. Un appui supplémentaire de la part des pays développés est aussi jugé nécessaire, « notamment pour ce qui est du transfert de technologie, du renforcement des capacités et du financement en faveur des pays en développement. » L’urgence d’honorer les engagements au titre de l’aide publique au développement est ainsi rappelée.
Toujours sur le plan financier, la communauté internationale est priée d’apporter un appui aux pays les moins avancés, aux pays en développement sans littoral et aux petits États insulaires en développement, pour le financement de mesures de relance tenant compte de leurs vulnérabilités particulières. Les États Membres saluent par ailleurs l’Initiative de suspension du service de la dette proposée par le G20 et encouragent « fortement » la participation accrue des créanciers privés à celle-ci. Le traitement de la dette pourrait permettre aux pays de se recentrer sur la réalisation des ODD et des objectifs de l’Accord de Paris, reconnaissent-ils en conclusion.
Trois amendements présentés par la Fédération de Russie relatifs aux paragraphes 20, 25 et 36 sur, respectivement, l’action climatique, l’égalité entre les genres et la biodiversité, ont été rejetés. Le premier amendement a recueilli 130 voix contre, 7 pour (Arabie saoudite, Arménie, Bélarus, Côte d’Ivoire, Fédération de Russie, Kazakhstan et Kirghizistan) et 3 abstentions (Angola, Cambodge et Madagascar). Le second sur le paragraphe 25 a récolté 4 voix pour, (Arabie saoudite, Bélarus, Fédération de Russie et Kazakhstan), 130 contre, pour 3 abstentions (Angola, Cambodge et Madagascar). Le dernier amendement a reçu les voix de 3 pays (Arabie saoudite, Bélarus, Fédération de Russie) mais a été rejeté par 131 autres, pour 4 abstentions (Angola, Cambodge, Kazakhstan et Madagascar).
Israël a également demandé un vote sur le paragraphe 29 sur la paix et la sécurité et le développement durable, en lui reprochant son libellé trop « politisé ». Il a été maintenu par 98 votes pour, 4 contre (Australie, Canada, États-Unis et Israël) et 40 abstentions.
Enfin, 14 derniers pays ont présenté, aujourd’hui, leurs examens nationaux: Japon, Allemagne, Malaisie, Chypre, Indonésie, Iraq, Madagascar, Bhoutan, Namibie, République démocratique populaire lao, Espagne, Zimbabwe, Paraguay et Suède. Le forum aura entendu 42 pays au cours de sa session 2021.
Nous quittons ce forum pleinement conscients de l’ampleur du défi mais aussi avec espoir et détermination, a conclu la Vice-Secrétaire générale en rappelant les prochains rendez-vous importants: le Sommet sur les systèmes alimentaires, le Dialogue de haut niveau sur l’énergie, la COP15 sur la biodiversité et la COP26 sur le climat. « Les décisions qui seront prises peuvent nous remettre sur la voie pour tenir la promesse du Programme 2030 et de l’Accord de Paris. »
*E/2021/L.26 E/HLPF/2021/L.2
SUITE DU DÉBAT DE HAUT NIVEAU
Adoption de la déclaration ministérielle
Le représentant de la Fédération de Russie a présenté des amendements à trois paragraphes du projet de déclaration ministérielle. D’abord, le paragraphe 20, qui semble à ses yeux donner la prépondérance à une question par rapport à l’autre. Pour la Russie, les changements climatiques et la pandémie de COVID-19 doivent avoir la même importance pour la communauté internationale, en droite ligne du Programme 2030 qui prescrit un équilibre entre les trois dimensions du développement durable. Le représentant a dénoncé le fait que les États semblent privilégier l’action climatique, au détriment de la relance économique qui serait louable pour leur propre population. À propos du paragraphe 25, le représentant a dit s’opposer au fait que l’approche genre ait été insérée dans le libellé sans accord des États. De plus, la délégation a estimé qu’il n’est pas correct d’utiliser le mot « genre » séparément de la combinaison « égalité des sexes ». Enfin, au sujet du paragraphe 36, la délégation a dénoncé une tentative d’ingérence dans la politique économique des pays, notamment leur approche de préservation de la biodiversité.
Au nom de l’Union européenne, la représentante de la Slovénie a estimé que l’amendement proposé vise à réduire l’importance d’une reprise sensible au climat. Veiller à ce que notre redressement postpandémie soit sensible au climat doit être une priorité afin de faire face à la menace existentielle des changements climatiques et de nous rendre plus résilients face à leurs impacts, a-t-elle fait valoir. Selon elle, ce n’est que si les stratégies de relance et les décisions politiques et d’investissement adoptées maintenant favorisent les acquis de l’Accord de Paris et des objectifs mondiaux pour la biodiversité que nous pourrons vraiment reconstruire en mieux et soutenir des activités socioéconomiques à long terme, a-t-elle ajouté, avant de demander à toutes les délégations de voter contre l’amendement proposé au paragraphe 20 et en faveur du maintien du libellé tel qu’il est reflété dans la version finale de la déclaration.
Parlant au nom d’un groupe de pays, la représentante de la Norvège a déploré le fait que la mention des femmes dans la déclaration ministérielle soit remise en question. Nous sommes déçus de la proposition de retirer ces références, car cela porte atteinte à nos engagements en faveur de la mise en œuvre de la déclaration de Beijing et du Programme 2030, notamment dans l’optique de mettre fin à la violence sexiste et d’assurer l’égalité entre les sexes, a-t-elle justifié. « Nous ne pouvons laisser la moitié de la population mondiale en arrière, c’est pourquoi nous demandons aux délégations de voter contre l’amendement du paragraphe 25. »
S’exprimant au nom d’un groupe de pays, le représentant du Royaume-Uni a rappelé que les crises liées aux changements climatiques et à la perte de biodiversité sont interconnectées. Il a souligné que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris sur le climat constituent la meilleure feuille de route pour parvenir aux objectifs de développement durable. À cette aune, il a demandé aux délégations de voter contre l’amendement déposé et de maintenir le texte original de la déclaration.
Après le vote sur les amendements
La représentante d’Israël aurait souhaité une non-politisation de certaines questions et un libellé équilibré. Ce n’est pas le cas en ce qui concerne le paragraphe 29, a-t-elle dit, en appelant à une distinction claire entre la politique et le développement durable. « C’est pourquoi nous avons demandé un vote sur ce paragraphe. »
Explications après l’adoption de la déclaration ministérielle
Le représentant de la Guinée, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a jugé important que le forum envoie des signaux clairs sur l’engagement en faveur des ODD et aurait souhaité une déclaration plus équilibrée et plus consensuelle. Nous sommes déçus par le fait que certaines délégations aient rompu la procédure d’approbation tacite, a-t-il dit, en soulignant la nécessité d’une déclaration robuste. Il a souligné la nécessité de mobiliser les ressources pour son application, avant de rejeter toute mesure coercitive prise contre un pays. « Ces sanctions doivent être éliminées. » Le Groupe a veillé à préserver le consensus en se ralliant à cette déclaration, a conclu la Guinée.
Par la voix de la Slovénie, la représentante de l’Union européenne (UE) a regretté qu’en dépit des efforts visant à parvenir à un consensus, un vote ait été demandé sur le paragraphe 29 de la déclaration et sur les amendements aux paragraphes 20, 25 et 36. De plus, concernant le paragraphe 8, elle a déploré que le dernier changement, effectué à la demande d’une délégation, ait modifié le libellé de telle sorte qu’il s’écarte de celui utilisé dans la cible 6.5 du Programme de développement durable à l’horizon 2030. « Nous réitérons que le libellé du Programme 2030 reste pour nous la source principale », a dit la représentante, avant de réaffirmer l’attachement de l’UE à la mise en œuvre pleine et effective du Programme d’action de Beijing et du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) ainsi qu’à la santé sexuelle et aux droits reproductifs.
Pour l’UE, la pandémie de COVID-19 et les défis mondiaux interconnectés que sont les changements climatiques, la dégradation de l’environnement, la perte de biodiversité et les inégalités croissantes viennent rappeler que la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) est cruciale pour reconstruire en mieux et en plus vert. Dans ce contexte, elle aurait souhaité un texte plus ambitieux, mettant clairement l’accent sur la mise en œuvre du Programme 2030 dans son ensemble. De plus, a relevé la représentante, certains problèmes soulevés par l’UE au cours des négociations n’ont pas été intégrés au texte final ou ont disparu à un stade intermédiaire.
S’agissant de la section de la déclaration qui traite des objectifs spécifiques examinés cette année, l’UE a constaté que, dans de nombreux cas, le libellé utilisé dans le texte ne reflète pas l’équilibre et l’ambition des objectifs et cibles convenus en 2015. D’autre part, tout en se félicitant qu’en cette année de pandémie zoonotique mondiale la déclaration souligne la nature interconnectée de la santé humaine, animale, végétale et environnementale et la nécessité de coopération étroite des parties concernées du système des Nations Unies, elle a regretté que le texte ne mentionne pas explicitement l’importance de l’approche « Une seule santé » de l’ONU, bien qu’il s’agisse d’un concept reconnu au niveau intergouvernemental.
L’UE a ensuite déploré le manque d’ambition de la déclaration, à la veille des COP, pour ce qui est des efforts à mener face aux changements climatiques et à la perte de biodiversité. Aucun des deux paragraphes qui s’y rapportent n’est pleinement à la hauteur des attentes, a-t-elle jugé, relevant en outre l’absence de points importants comme, par exemples, la nécessité d’une élimination progressive à l’échelle mondiale des subventions aux combustibles fossiles, de la neutralité climatique d’ici au milieu du siècle et d’un engagement audacieux pour un Cadre mondial de la biodiversité post-2020 ambitieux, en vertu de la Convention sur la diversité biologique.
À propos du climat, l’UE a regretté que le libellé ajouté concernant « l’atténuation et le financement de l’adaptation » ne reflète pas correctement celui de l’article 9.4 de l’Accord de Paris. Joindre le consensus d’aujourd’hui n’implique pas que nous souscrivions à la notion de sous-catégories de financement climatique qui méconnaissent la « nature holistique et transversale » d’une grande partie du soutien climatique fourni, a-t-elle fait valoir. Quant à la biodiversité, la représentante a observé que le libellé de la déclaration s’écarte de celui de la Deuxième Commission dans sa résolution sur la biodiversité et semble impliquer, « à tort », que les solutions basées sur la nature et les approches basées sur les écosystèmes sont deux catégories distinctes.
De même, l’UE s’est étonnée que plusieurs délégations aient demandé la réouverture de paragraphes sur le financement du développement et réclamé que cette question soit intégrée tout au long du texte. Bien qu’elle accepte la formulation finale, elle a dit redouter que le forum politique de haut niveau « devienne un lieu de renégociation d’accords antérieurs et assez récents conclus par les mêmes délégations ». Malgré ces réserves, la représentante a réaffirmé l’importance que l’UE accorde au forum politique de haut niveau pour faire le point sur l’état d’avancement du Programme 2030 et à la déclaration en tant que « moyen de montrer notre élan et notre volonté collective de soutenir les progrès vers la réalisation des ODD ».
Le représentant du Canada, au nom du groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a jugé essentiel de montrer au monde que « nous pouvons surmonter ensemble » les défis liés à la pandémie. Il nous revient de mettre en œuvre les ODD, sans les revoir à la baisse, a-t-il dit. Il a appelé à une action plus résolue s’agissant de l’égalité entre les genres, en se disant déçu que le texte ne reconnaisse pas les conséquences négatives bien établies de la pandémie pour les femmes et les filles. Le Canada a aussi déploré que la déclaration ne reconnaisse pas l’initiative intégrée « Une santé ». Nous avons besoin d’engagements constants en faveur de l’Accord de Paris, a déclaré le Canada, en soulignant l’urgence absolue du défi climatique.
Le Saint-Siège s’est félicité de ce que la déclaration ministérielle ait souligné le fait que l’élimination de la pauvreté est le plus grand défi mondial, ainsi que la reconnaissance du rôle et de la contribution des migrants à une croissance inclusive. Au sujet de la mention des droits de l’enfant, le Saint-Siège a précisé que ces droits sont exprimés au sein de la famille qui est l’unité sociale de base reconnue. Il a également appelé au respect du rôle des parents, avant de souligner que l’avortement ne saurait en aucun cas faire partie de la santé sexuelle et reproductive. De même, le terme genre et ses dérivés est compris comme faisant référence aux deux sexes que sont les hommes et femmes, a encore souligné le Saint-Siège.
Le représentant de la Hongrie a indiqué soutenir l’adoption de la déclaration ministérielle parce que celle-ci met en avant des priorités importantes. Il a toutefois affirmé ne pas être en mesure d’appuyer les paragraphes du texte relatifs à la migration, arguant que la migration n’est pas la meilleure solution pour le marché du travail et les problèmes démographiques des pays de destination. De même, la migration ne peut être considérée comme une solution appropriée pour relever les défis auxquels les pays d’origine sont confrontés. D’autre part, a encore fait valoir le délégué, la crise liée à la pandémie de COVID-19 oblige les gouvernements à répondre aux besoins de leur propres citoyens. Au lieu de favoriser les départs des pays d’origine et de faciliter une migration ordonnée, sûre et régulière qui génère d’autres facteurs d’attraction, nous devrions nous concentrer sur la fourniture d’une assistance aux pays tiers localement en créant des conditions qui permettent aux gens de rester dans leur patrie dans la paix et la prospérité, a ajouté le représentant. De plus, il a estimé que le fait de distinguer arbitrairement différents groupes marginalisés, tels que les migrants au paragraphe 24, pourrait avoir pour effet d’en exclure d’autres qui sont tout aussi vulnérables. Il s’est par conséquent dissocié du paragraphe 31 de la déclaration et des libellés des paragraphes 17, 18 et 24 relatifs aux migrants.
Les États-Unis se sont déclarés heureux de se joindre au consensus sur l’adoption de cette déclaration. Soulignant leur attachement à la mise en œuvre du Programme 2030, ils ont rappelé qu’ils sont le plus grand fournisseur de développement international et d’aide humanitaire pour la sécurité alimentaire et la nutrition. Ils ont également souligné leur engagement en matière de coopération internationale afin de relever les défis mondiaux urgents, telle la lutte contre la pandémie de COVID-19 et ses effets. Nous nous sommes engagés à faire don d’un demi-milliard de vaccins Pfizer à 92 pays à revenu faible et intermédiaire et à l’Union africaine, a relevé la délégation, faisant observer que ces vaccins s’ajoutent aux 80 millions de doses que les États-Unis se sont engagés à fournir d’ici à la fin du mois, en plus des 2 milliards de dollars déjà versés au Mécanisme COVAX.
Le représentant des États-Unis a cependant exprimé des préoccupations concernant la déclaration telle qu’adoptée. Il a ainsi regretté que de nombreuses questions cruciales aient été omises, telles que l’approche « Une seule santé » pour la préparation aux pandémies et l’élimination des pires formes de travail des enfants. D’autres questions ont été présentées de façon déséquilibrée ou inexacte, selon les États-Unis, notamment les libellés sur les infrastructures durables, l’approvisionnement mondial et la gestion durable de l’eau, a déploré le délégué, notant par ailleurs que la déclaration ne reconnaît pas la « source » des droits de l’homme dans le développement, y compris en ce qui concerne le droit à l’alimentation et au le droit à l’eau potable et à l’assainissement.
Les États-Unis ont également exprimé leur préoccupation quant au fait que de nombreux paragraphes tentent de caractériser ou d’influencer les processus menés dans des forums indépendants, en particulier sur les questions commerciales et financières. Pour la délégation, l’ONU doit respecter les mandats indépendants des autres processus et institutions, y compris les négociations commerciales, et ne doit pas tenter d’interférer avec les décisions de ces forums. De fait, les États-Unis ont indiqué qu’ils ne considéreront pas ces libellés comme convenus dans les négociations futures. Parmi ces derniers, le représentant a cité les libellés sur les flexibilités de l’ADPIC dans le cadre de l’OMC, sur les mesures commerciales d’urgence, sur la propriété intellectuelle et les transferts de technologie, et sur le traitement de la dette dans le cadre de l’Initiative de suspension du service de la dette.
Le représentant a d’autre part estimé que l’inclusion du paragraphe 35 représente une tentative de politiser le travail important que les États Membres entreprennent dans le cadre du forum politique de haut niveau. C’est pourquoi sa délégation a voté contre. Enfin, rappelant qu’ils ont expliqué leur position sur le Programme 2030 le 1er septembre 2015, les États-Unis ont dit apprécier les efforts déployés par les délégations pour négocier une « déclaration percutante » qui reflète notre engagement commun en faveur du développement durable.
Le Mexique a dit que le principe de « ne laisser personne sur le côté » guide son action en matière de développement durable, avec un accent sur les communautés oubliées comme les peuples autochtones. Il a insisté sur l’accès équitable aux vaccins, qui doivent être traités comme un bien public mondial. Les dispositions de la déclaration sur le sujet auraient dû être plus claires et plus ambitieuses, a-t-il estimé, avant d’insister aussi sur une application systématique de la perspective de genre dans tous les domaines du développement durable. Il a salué l’inclusion de l’Initiative du G20 sur la réduction du service de la dette mais a rejeté les tentatives visant à amoindrir les engagements en faveur des groupes les plus vulnérables, tels que les migrants et les réfugiés.
Après l’adoption de la déclaration ministérielle, la Fédération de Russie a félicité les facilitateurs pour leurs efforts durant le processus de négociation qui a duré plusieurs mois. Bien qu’elle ait soutenu l’adoption de la déclaration ministérielle, elle a exprimé ses regrets devant le rejet de ses propositions d’amendements. La Fédération de Russie s’est donc distanciée des paragraphes 20, 25 et 36. Concernant le libellé du paragraphe 34 concernant la participation des enfants à la mise en œuvre et l’examen du programme de développement durable à l’horizon 2030, elle a indiqué que la participation des enfants effectuant de tels travaux, jusqu’à ce qu’ils atteignent l’âge de la majorité, devrait se limiter à la famille et à l’école.
Le Royaume-Uni s’est réjoui que le consensus ait prévalu sur cette déclaration ministérielle. Il a rappelé son soutien aux droits humains, aux solutions basées sur la nature, à l’égalité des sexes et au concept « Une seule santé » de l’ONU. Soulignant que le Programme 2030 a pour objectif premier de ne laisser personne de côté, il a plaidé pour plus d’ambition afin de soutenir et d’autonomiser les populations des pays en situation particulière, notamment les pays les moins avancés (PMA) et les petits États insulaires en développement (PEID). Par ailleurs, en écho aux préoccupations exprimées par le Groupe des 77 et la Chine sur la procédure d’approbation tacite, le Royaume-Uni a regretté l’absence de transparence sur les changements opérés au paragraphe 8. Il serait préférable, a-t-il dit, qu’en cette Décennie d’action et face au défi que continue de poser la COVID-19, la communauté internationale se concentre sur la mise en œuvre du Programme 2030 plutôt que sur sa réécriture.
La Turquie a salué à son tour l’adoption par consensus de la déclaration ministérielle. Elle a salué la référence à un accès équitable aux vaccins pour les pays en situation particulière, à l’égalité des sexes, à l’autonomisation des femmes et des filles, et au nécessaire renforcement des systèmes de protection sociale. Notant que les défis actuels sont trop complexes pour être abordés individuellement par les États Membres, elle a plaidé pour plus de coopération et de solidarité, notamment en faveur des groupes les plus vulnérables. Selon elle, un soutien accru est également nécessaire pour les pays les moins avancés (PAM) et les petits États insulaires en développement (PEID) confrontés à plusieurs crises, dont celle liée aux changements climatiques. Enfin, la Turquie a une nouvelle fois appelé de ses vœux un objectif séparé sur l’eau, regrettant à cet égard que la déclaration ne contienne pas de libellé sur l’ODD 6.
L’Iraq a indiqué que les négociations ont duré quatre mois pour parvenir à cette déclaration « d’espoir » face aux graves conséquences de la pandémie.
Le représentant du Guatemala a dit se joindre au consensus compte tenu de la grande importance qu’il accorde au mandat qu’exerce le forum politique de haut niveau pour examiner et suivre la mise en œuvre du Programme 2030. Il a cependant décidé de se dissocier du paragraphe 8 de la déclaration car il n’admet pas le terme de « coopération transfrontalière » s’agissant des cours d’eau. La Constitution du pays reconnaît en effet l’eau comme un « bien de l’État » qui doit être administré et utilisé par les organes nationaux compétents au profit de leur population. De fait, a indiqué la délégation, le Guatemala considère que l’utilisation des cours d’eau internationaux doit faire l’objet de traités internationaux bilatéraux, dont la négociation et la conclusion revient exclusivement aux États concernés.
La Suisse a loué le caractère « équilibré » de la déclaration, notamment en ce qui concerne le rôle des organisations de la société civile. Elle a plaidé pour un accès équitable aux vaccins et souhaité une solution consensuelle et applicable sur la taxation de l’économie numérique. Elle a regretté le changement « à la dernière minute » du libellé du paragraphe 8 et la faiblesse du libellé sur les droits reproductifs.
Les représentants de la République de Corée, d’Israël, de la République islamique d’Iran, de l’Éthiopie et de l’Ukraine ont également pris la parole, mais après le départ des interprètes.
Déclarations de clôture
La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme AMINA J. MOHAMMED, a salué huit jours solides de délibérations et de réflexion qui ont vu neuf objectifs de développement durable examinés en profondeur, et les résultats de 42 examens nationaux volontaires présentés et discutés. Elle a noté que les délibérations ont souligné l’innovation des décideurs politiques ainsi que le courage et la résilience des communautés pendant la pandémie. Une observation récurrente des travaux aura été que les changements mis en place pour répondre à la pandémie peuvent fournir une base pour progresser sur les ODD. L’apprentissage numérique, par exemple, était une bouée de sauvetage pour de nombreux gens pendant la pandémie, et l’expansion équitable du numérique à l’éducation pourrait contribuer à réduire la fracture numérique, améliorer l’accès à l’apprentissage et transformer plus largement l’éducation. De même, de nombreux pays ont répondu à la crise en mettant en œuvre un soutien essentiel à l’économie, à l’emploi et en faveur des citoyens. Les gouvernements devraient maintenant examiner si certaines de ces mesures peuvent être intégrées dans un système global de protection sociale, a-t-elle encore relevé.
Au cours de nos délibérations, a poursuivi Mme Mohammed, nous avons également entendu comment les efforts de relance peuvent être conçus à la fois pour relancer les économies et accélérer la mise en œuvre des ODD. Par exemple, les plans de relance et les droits de tirage spéciaux (DTS) peuvent être mis à profit pour faire progresser l’égalité des sexes; booster les investissements dans l’éducation, la santé et la protection sociale; et accélérer les transitions majeures nécessaires pour vaincre les changements climatiques et générer des emplois décents. Enfin, a dit la Vice-Secrétaire générale, nous avons entendu haut et fort qu’il ne peut y avoir de sortie de la pandémie sans solidarité internationale et coopération, notamment par le biais du financement climatique et du financement du développement. Cela s’étend, a-t-elle précisé, à la fourniture d’une bouée de sauvetage financière pour les pays en développement confrontés à d’importantes pressions d’endettement. Le système des Nations Unies pour le développement s’est engagé à soutenir ces efforts, a-t-elle relevé, soulignant que sous la direction d’une équipe capable et indépendante de coordonnateurs résidents, les équipes de pays ont répondu aux besoins et priorités des gouvernements au cours de la pandémie. Nous ne devons pas laisser tomber notre ambition collective alors que les besoins n’ont jamais été aussi importants, a déclaré Mme Mohammed.
En outre, elle a dit que « nous quittons ce forum pleinement conscients de l’ampleur du défi qui nous attend pour le reste de la Décennie d’action ». Mais nous partons aussi avec espoir et détermination. Et les décisions qui seront prises au cours des six prochains mois, au Sommet sur les systèmes alimentaires, au Dialogue de haut niveau sur l’énergie, à la COP15 sur la biodiversité et la COP26 sur le climat, peuvent nous remettre sur la voie pour tenir la promesse du Programme 2030 et de l’Accord de Paris sur les changements climatiques. N’oublions pas, a plaidé la Vice-Secrétaire générale, que pour de nombreux pays en développement, la pandémie fait toujours rage, des gens meurent encore à des niveaux inacceptables, et les économies sont dans une situation désespérée. Elle a appelé à soutenir ces pays dans leur réponse à la pandémie de COVID-19 et à reconstruire en mieux afin d’accélérer la mise en œuvre des ODD. Selon elle, il s’agit avant tout de garantir l’universalité d’accès aux vaccins contre la COVID-19. Avec un leadership politique, la solidarité et l’unité d’objectif, nous pouvons mettre fin à la pandémie, obtenir des améliorations majeures dans la vie des gens d’ici à 2030, et tenir la promesse du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a-t-elle espéré.
M. MUNIR AKRAM, Président de l’ECOSOC, a salué la tenue de ce forum politique « intense, inspiré et orienté vers l'action » qui, a-t-il ajouté, montre un engagement fort et continu envers le Programme 2030 et l’Accord de Paris. Il a relevé que les débats ont été marqués par de grandes inquiétudes face à la crise actuelle ainsi que par un appel fort et manifeste à la solidarité mondiale.
Un large accord s’est dégagé sur le fait qu’assurer un accès équitable, universel et abordable au vaccin est un impératif moral, le seul moyen de surmonter la pandémie et une condition sine qua non pour une reprise mondiale résiliente et durable, a-t-il notamment relevé. Mais de nombreux pays en développement ont appelé à des réponses plus ambitieuses, y compris la création éventuelle d’une nouvelle architecture de la dette. M. Akram a appelé à établir des plans de relance capables de soutenir, entre autres, l’investissement dans des infrastructures durables, le renforcement des systèmes de protection sociale et la garantie d’une couverture sanitaire universelle. Nous devons mettre notre réponse à l’épreuve du climat et veiller à ce qu’elle renforce la protection de l’environnement, a ajouté M. Akram pour qui construire des sociétés pacifiques, égalitaires et inclusives nécessite une approche centrée sur les personnes et protectrice des plus vulnérables.
Poursuivant, le Président de l’ECOSOC a constaté que l’année écoulée a souligné à quel point la science, la technologie et l’innovation peuvent garantir des progrès face à des problèmes massifs et apparemment insolubles.
Mais nous devons élargir la coopération internationale, en facilitant l’accès ouvert aux technologies, notamment pour le vaccin, les connaissances et les solutions, a-t-il tempéré. Il a également espéré que les appels à la suspension des accords sur les droits de propriété intellectuelle seront entendus. Nous devons, a-t-il insisté, augmenter l’échelle de nos actions, les rendre plus efficaces et ciblées, inclure le climat, les dimensions environnementales et, encore une fois, travailler ensemble pour ne laisser personne de côté.
Le Président de l’ECOSOC a vu dans la déclaration ministérielle adoptée aujourd’hui l’expression de l’engagement des États Membres à réaliser la vision du Programme 2030 et à surmonter la pandémie grâce à la coopération internationale, au multilatéralisme, et à des politiques guidées par des preuves et un souci d’équité - et soutenues par un financement et une technologie adéquats. Nous avons maintenant besoin d’une volonté politique pour que nos pays, nos citoyens, nos secteurs d’activité et nos sociétés adoptent et soutiennent ces mesures essentielles pour une reprise durable grâce à des actions accélérées, a affirmé M. Akram.