Le Mécanisme pour les Tribunaux pénaux internationaux et le Tribunal pour l’ex-yougoslavie comptent sur l’appui du Conseil de sécurité et des États

7707e séance – matin 
CS/12391

Le Mécanisme pour les Tribunaux pénaux internationaux et le Tribunal pour l’ex-yougoslavie comptent sur l’appui du Conseil de sécurité et des États

Le Conseil de sécurité a organisé ce matin un débat consacré au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), qui doit achever ses travaux à la fin de l’année 2017, et au Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles du TPIY et du Tribunal pénal pour le Rwanda (TPIR), qui a fermé ses portes en décembre 2015. 

Les Présidents du TPIY et du Mécanisme, ainsi que le Procureur du TPIY et du Mécanisme, ont fait le point sur l’avancement de leurs travaux au cours des six derniers mois.  Pour mener à bien leur mission, ils ont compté sur l’appui de la communauté internationale, en particulier du Conseil de sécurité, et sur la coopération des États de la région, dont la Serbie, en ce qui concerne les affaires d’outrage à la Cour.

Le Président du TPIY, M. Carmel Agius, a informé les membres du Conseil que toutes les affaires qui devaient se terminer s’étaient achevées dans les délais.  Le Tribunal a notamment rendu son jugement dans les affaires concernant Radovan Karadžić et Vojislav Šešelj.  

Le Président du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux, M. Theodor Meron, a indiqué que la mise en état en appel dans ces deux affaires avait déjà commencé au Mécanisme.

Depuis l’arrestation de Ratko Mladić et de Goran Hadzić en 2011, il ne reste plus aucun fugitif recherché par le TPIY pour violations graves du droit international humanitaire, a rappelé le juge Agius.  Cependant, dans le cadre d’une procédure d’outrage pendante, les mandats d’arrêt délivrés en janvier 2015 par le TPIY contre trois personnes n’ont pas encore été exécutés.  Or, a insisté le juge, « la Serbie a l’obligation de coopérer pleinement avec le Tribunal », conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et au Statut du Tribunal, qui donne à ce dernier la primauté sur les juridictions serbes.

Contrairement aux décisions qu’elle a rendues précédemment, la Haute Cour de Belgrade affirme désormais, à la « grande surprise » de M. Agius, que la Serbie n’est pas tenue de coopérer avec le Tribunal en matière d’outrage.  Il a vu là « un recul par rapport à la situation existante en matière de coopération avec le Tribunal ».

La Serbie manque depuis un an et demi à son obligation d’exécuter les mandats d’arrêt délivrés par le TPIY à l’encontre de trois accusés et de remettre à ses derniers à la garde du Tribunal, a renchéri le Procureur du TPIY et Procureur du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux, M. Serge Brammertz.  Il a ainsi regretté que la Serbie se soit « écartée de la voie de la pleine coopération avec le Tribunal ».

Alors que le TPIY se trouve dans la phase finale de ses activités en première instance et en appel, une difficulté importante demeure, à savoir « la question de la fidélisation du personnel ».  Selon le juge Agius, il importe au plus haut point que le Tribunal puisse, en cette avant-dernière année d’activité, conserver ses fonctionnaires expérimentés et spécialisés pour achever ses travaux.    

S’agissant du fonctionnement du Mécanisme, M. Brammertz a indiqué que, conformément aux instructions du Conseil de sécurité, le Bureau du Procureur avait recouru à des mesures de cumul des fonctions et à des listes de réserve afin que le transfert des responsabilités du TPIY vers le Mécanisme se fasse en souplesse et sans coûts excessifs.     

Le Mécanisme a pris en charge les dernières fonctions résiduelles du TPIR, a précisé à son tour le juge Meron.  Le transfert de ces fonctions s’est déroulé sans heurt et les préparatifs sont en cours pour que la division du Mécanisme à Arusha s’installe dans ses nouveaux locaux à la fin de cette année.  M. Meron a rappelé que les huit derniers accusés du TPIR étaient toujours en fuite, dont trois doivent être jugés par le Mécanisme.  « À nous seuls, nous ne parviendrons pas à les arrêter », a-t-il affirmé.  Il est nécessaire, a-t-il estimé, d’assister les États Membres dans ces activités de recherche afin d’appréhender les fugitifs.

« Le Rwanda ne baissera pas les bras jusqu’à ce que chacun soit jugé; nous le devons au million de victimes et aux survivants » du génocide, a martelé le représentant de ce pays.  Le Rwanda souhaite également le transfert des archives du TPIR.  À ce sujet, son homologue de la France a indiqué que les deux affaires renvoyées par le TPIR devant les juridictions françaises étaient traitées avec toute la rigueur et la diligence nécessaires en contact avec le Tribunal, puis avec le Mécanisme résiduel. 

Par ailleurs, les membres du Conseil de sécurité étaient saisis d’un rapport du Bureau des services de contrôle interne sur l’évaluation des méthodes de travail du TPIY* dont le représentant de la Fédération de Russie a jugé les conclusions alarmantes.  Il a rappelé que le Conseil, dans sa résolution 2256 (2015), avait demandé au TPIY, non seulement de respecter le calendrier fixé pour l’achèvement de ses travaux, mais aussi de réduire les délais de jugement.

De plus, le représentant russe a estimé que les affaires d’outrage à la Cour dans le cadre de l’affaire Šešelj, aujourd’hui terminée, ne relevaient pas du mandat du Tribunal. 

Revenant sur les allégations d’une inexécution par son pays de mandats d’arrêt délivrés contre trois individus pour outrage à la Cour, le représentant de la Serbie a indiqué que son gouvernement n’avait pas pu les exécuter en raison de risques à la sécurité nationale de son pays.  Il a ensuite combattu « l’impression qui prévaut dans la région que la Serbie serait quelque part responsable de l’acquittement de Vojislav Šešelj ».

La condamnation de Radovan Karadžić est la preuve que la justice finit par vaincre, a affirmé le représentant des États-Unis. S’agissant de l’affaire Ratko Mladić, son homologue du Royaume-Uni a espéré que le jugement pourra être rendu en novembre 2017 comme prévu.

 

*S/2016/441

 

Tribunal international chargé de juger les personnes accusées de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991

Tribunal international chargé de juger les personnes accusées d’actes de génocide ou d’autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais accusés de tels actes ou violations commis sur le territoire d’États voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994

Rapport du Bureau des services de contrôle interne sur l’évaluation des méthodes de travail du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (S/2016/441)

Lettre datée du 17 mai 2016, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Président du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux (S/2016/453)

Lettre datée du 17 mai 2016, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Président du Tribunal international chargé de juger les personnes accusées de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (S/2016/454)

Déclarations

Le juge CARMEL AGIUS, Président du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), a présenté son rapport sur la stratégie d’achèvement des travaux du Tribunal daté du 17 mai 2016 (S/2016/454). 

Le juge Agius a informé le Conseil de sécurité du fait que, depuis son dernier exposé, toutes les affaires qui devaient se terminer au cours des six derniers mois s’étaient achevées dans les délais.  Le Tribunal a rendu son arrêt dans l’affaire Stanišić et Simatović et son jugement dans l’affaire concernant Radovan Karadžić et celle concernant Vojislav Šešelj.

S’agissant du procès de Goran Hadžić, que le juge a suivi de près en raison du stade avancé de la maladie de l’accusé, le Procureur a demandé, le 19 mai dernier, qu’il soit officiellement mis fin à la procédure engagée et, dans sa réponse, la défense s’est également dite en faveur de l’extinction des poursuites.  La Chambre de première instance devrait rendre sa décision sous peu, avant la fin du mois, a-t-il espéré.

À l’issue du prononcé dans l’arrêt de l’affaire Stanišić et Zupljanin, le mandat de quatre juges prendra fin et le Tribunal ne comptera plus que sept juges, a expliqué M. Agius.

Très satisfait de son avancement dans l’affaire Mladić, il a confirmé que le jugement sera rendu en novembre 2017.  S’agissant de la procédure d’appel dans l’affaire Prlic et consorts, il a attiré l’attention du Conseil sur le fait qu’elle compte parmi les plus volumineuses que le Tribunal ait eu à traiter et nécessitera « non seulement du temps, mais aussi des ressources suffisantes de manière continue ».

M. Agius a abordé ensuite des questions liées à l’outrage.  Depuis l’arrestation de Ratko Mladić et de Goran Hadžić en 2011, il ne reste plus aucun fugitif recherché par le TPIY pour violations graves du droit international humanitaire, a-t-il rappelé.  Cependant, dans le cadre d’une procédure d’outrage pendante, les mandats d’arrêt délivrés en janvier 2015 par le TPIY contre trois personnes n’ont pas encore été exécutés.  Or, le 20 mai dernier, la République de Serbie a communiqué au Tribunal deux décisions selon lesquelles les conditions requises pour arrêter et livrer les accusés n’étaient pas réunies.

« Toute entrave au cours de la justice porte atteinte au fondement même de ce que nous nous sommes efforcés de bâtir ensemble et menace la capacité du Tribunal de mener ses travaux à bien efficacement et équitablement », a averti le juge.  Contrairement aux décisions qu’elle a rendues précédemment, la Haute Cour de Belgrade affirme désormais, à sa « grande surprise », que la Serbie n’est pas tenue de coopérer avec le Tribunal en matière d’outrage.  Très préoccupé par cette situation, il a estimé qu’il s’agissait là « d’un recul par rapport à la situation existante en matière de coopération avec le Tribunal ».

La République de Serbie a l’obligation de coopérer pleinement avec le Tribunal, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et au Statut du Tribunal, qui donne à ce dernier la primauté sur les juridictions serbes, a insisté M. Agius.

Par ailleurs, alors que le TPIY se trouve dans la phase finale de ses activités en première instance et en appel, une difficulté importante demeure, à savoir « la question de la fidélisation du personnel ».  D’après le juge, il importe au plus haut point que le Tribunal puisse, en cette avant-dernière année d’activité, conserver ses fonctionnaires expérimentés et spécialisés pour achever ses travaux.  « Je vous demande une fois de plus de nous aider, avant que nous n’atteignons un point de non-retour », a-t-il plaidé.  Il faut ainsi donner au Tribunal la prévisibilité appropriée, en mettant en place des mesures qui inciteraient les fonctionnaires à rester telles qu’une prime de contrat.

« Le Tribunal est engagé dans une entreprise historique et doit être soutenu jusqu’au bout », a conclu M. Agius.  En dépit des difficultés, il s’est dit résolu, aux côtés du Conseil de sécurité, à veiller à ce que la fermeture de l’institution se déroule avec efficacité et sans heurt d’ici à la fin de l’année 2017.

« Au cours des six derniers mois, le Mécanisme a connu un certain nombre d’évènements importants », a affirmé le juge THEODOR MERON, Président du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux.  Il a indiqué que, le 15 décembre 2015, la Chambre d’appel du TPIY avait rendu son arrêt dans l’affaire mettant en cause Jovica Stanišić et Franko Simatović, et ordonné la tenue d’un nouveau procès.  Le Mécanisme est désormais chargé de ce nouveau procès, a-t-il dit.  En mars, deux jugements importants ont été rendus par le TPIY dans les affaires concernant Radovan Karadžić et Vojislav Šešelj, a-t-il poursuivi, en précisant que la mise en état en appel dans ces affaires avait déjà commencé au Mécanisme.

Après avoir rappelé que le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) avait fermé ses portes en décembre 2015 et que le Mécanisme avait pris en charge ses dernières fonctions résiduelles, M. Meron a assuré qu’une fois de plus, le transfert de ces fonctions s’était déroulé sans heurt.  Les préparatifs sont en cours pour que la division du Mécanisme à Arusha s’installe dans ses nouveaux locaux à la fin de cette année.  Le Mécanisme continue de réaliser des progrès importants dans plusieurs autres domaines, que ce soit le transfert des dossiers des Tribunaux au Mécanisme et des efforts continus pour en faciliter l’accès, ou l’amélioration des processus liés à l’assistance aux juridictions nationales.  Le Président s’est dit, en outre, convaincu que le Mécanisme tirera profit des audits menés régulièrement par le Bureau des services de contrôle interne pour améliorer encore davantage son fonctionnement.  En attendant, nous continuons à chercher à accroître au maximum notre efficacité et d’adopter des approches innovantes, telles que le travail à distance, a indiqué M. Meron.

Revenant sur l’arrestation en décembre de l’un des derniers fugitifs mis en accusation par le TPIR, Ladislas Ntaganzwa, M. Meron a tenu à préciser que ce dernier avait été transféré au Rwanda.  Le Mécanisme assure le suivi de la procédure engagée à l’encontre de Ladislas Ntaganzwa au Rwanda, a-t-il indiqué, avant d’ajouter que le suivi des autres affaires renvoyées devant les juridictions du Rwanda et de la France était en cours.  Il a rappelé que huit accusés étaient toujours en fuite, dont trois doivent être jugés par le Mécanisme.  « À nous seuls, nous ne parviendrons pas à les arrêter », a-t-il affirmé.  Il est nécessaire, a-t-il estimé, d’assister les États Membres dans ces activités de recherche afin d’appréhender les fugitifs.  Le Mécanisme compte également sur les États qui ont accepté de se charger de l’exécution des peines prononcées par le TPIR, le TPIY et le Mécanisme.  M. Meron s’est félicité à ce titre de la conclusion d’un nouvel accord relatif à l’exécution des peines avec le Mali.  Cet accord tient compte des meilleures pratiques en matière de détention, notamment les règles Nelson Mandela adoptées par l’Assemblée générale en décembre dernier, a-t-il dit.  M. Meron a ensuite encouragé les États qui ne l’ont pas fait à signer des accords similaires afin d’œuvrer au renforcement des capacités du Mécanisme en matière d’exécution des peines qui sont d’une importance cruciale.

Concernant la situation de plus en plus urgente, à Arusha, du petit nombre de personnes acquittées par le TPIR ou qui ont purgé la peine prononcée par celui-ci à leur encontre, M. Meron a rappelé que le Mécanisme dépendait de la communauté internationale pour régler cette question humanitaire.  En attendant, le Mécanisme a soigneusement revu le large éventail des services de soutien fournis par le TPIR aux personnes concernées à Arusha et adopte une approche limitée et moins onéreuse, a assuré son Président.  En conclusion, M. Meron s’est engagé à continuer d’identifier les meilleures pratiques et de les ériger en règles, d’innover chaque fois que possible et de chercher à gagner plus encore en efficacité.

M. SERGE BRAMMERTZ, Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et Procureur du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, a indiqué que le Tribunal avait rendu des jugements ou arrêts dans trois affaires et ainsi franchi un pas supplémentaire vers l’achèvement de son mandat prévu fin 2017.  Notant l’importance de la coopération des États, le Procureur a regretté que la Serbie se soit écartée de la voie de la pleine coopération avec le Tribunal.  Il a rappelé que la Serbie manquait depuis un an et demi à son obligation d’exécuter les mandats d’arrêt délivrés par le Tribunal à l’encontre de trois accusés et de remettre ces derniers à la garde du Tribunal.

Il a relevé néanmoins que par le passé, la Serbie avait exécuté sans problème ni délai important des mandats d’arrêt dans des affaires similaires d’outrage au Tribunal.  Tout en saluant l’adoption par la Serbie d’une stratégie nationale de poursuite en matière de crimes de guerre, le Procureur Brammertz a appelé la Serbie à prouver maintenant qu’elle honore son engagement de coopérer avec le TPIY. 

Par ailleurs, il a indiqué que pour plusieurs affaires de catégorie 2, les Procureurs de Bosnie-Herzégovine avaient sollicité la coopération de la Croatie.  Notant des retards liés à des problèmes de communication, il a exhorté le Gouvernement de la Croatie à revoir sa politique de coopération régionale et faciliter le traitement des affaires de crimes de guerre dans la région.  Au niveau régional, il a regretté que trop de responsables politiques et autres personnalités publiques niaient des vérités bien établies, ravivaient les tensions ethniques et avaient recours aux slogans nationalistes du passé. 

S’agissant du fonctionnement du Mécanisme, il a indiqué que conformément aux instructions du Conseil de sécurité, le Bureau du Procureur avait recouru à des mesures de cumul des fonctions et à des listes de réserve afin que le transfert des responsabilités du Tribunal vers le Mécanisme se fasse en souplesse et sans coûts excessifs.  Il a ajouté que le Bureau du Procureur du Mécanisme s’attachait fermement à rechercher les huit derniers accusés du TPIR encore en fuite. 

M. Brammertz a assuré que ses bureaux continueraient, en s’appuyant sur les seules ressources à disposition, à suivre et à soutenir l’activité des tribunaux nationaux qui jugent les crimes commis en ex-Yougoslavie et au Rwanda.  Conformément aux stratégies d’achèvement des travaux, l’établissement plus circonstancié des responsabilités dépend désormais de la capacité des juridictions pénales nationales de poursuivre les missions du TPIY et TPIR. 

Constatant les progrès réalisés par le TPIY, M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) s’est félicité qu’il n’y ait plus de fugitifs recherchés pour violations graves du droit international humanitaire depuis l’arrestation de Ratko Mladić et Goran Hadžić.  Il a mesuré les défis auxquels le Tribunal est confronté pour mener à bien la stratégie d’achèvement de ses travaux, notamment pour fidéliser le personnel.  Pour lui, les obstacles politiques, les difficultés techniques et l’absence d’un cadre juridique régional sont autant de raisons qui peuvent expliquer cette situation, et il faut entamer un dialogue pour y remédier.

Prenant note du rapport de M. Brammertz, le représentant a regretté le manque d’informations sur les disparus.  Évoquant l’expérience de son propre pays, il a souligné que l’identification des dépouilles humaines était une mesure essentielle à la réconciliation.  S’agissant du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, il s’est félicité que les délais fixés restent d’actualité.  Il a également souligné qu’il était prioritaire de poursuivre en justice les huit personnes accusées par le TPIR qui sont encore en fuite et a encouragé les États à coopérer sur cette question.  

M. GORGUI CISS (Sénégal) a déclaré que les Tribunaux pénaux internationaux avaient joué un rôle historique dans la lutte contre l’impunité, en soulignant qu’il ne saurait y avoir de paix durable sans justice.  « C’est pour cela que le cas des accusés en fuite nous préoccupe particulièrement », a-t-il dit avant d’appeler tous les États, en particulier ceux où ils pourraient se trouver, à redoubler d’efforts pour les appréhender et les juger.  Le représentant du Sénégal s’est dit particulièrement interpelé par la question de la réinstallation des huit personnes acquittées ainsi que trois personnes libérées après exécution de leur peine qui résident encore à Arusha.  S’agissant de l’exécution des peines, il a réaffirmé l’engagement de son pays, qui a repris le contrôle de huit cellules rénovées par le TPIR dans une prison répondant aux normes pénitentiaires internationales, à les rendre pleinement opérationnelles dans les meilleurs délais.    

M. RAMLAN BIN IBRAHIM (Malaisie) a salué le transfert sans heurt des fonctions résiduelles du TPIR au Mécanisme.  Le TPIR, qui a fermé ses portes, laissera une empreinte durable dans le domaine de la justice internationale, a-t-il estimé.  Le délégué s’est dit rassuré par l’engagement pris par le Président du TPIY en faveur d’un achèvement des travaux d’ici à 2017.  Revenant sur les retards pris dans le transfèrement au TPIY de personnes inculpées dans des affaires d’outrage, il a appelé les États de la région à coopérer avec le Tribunal afin d’y remédier.  Tout retard enverrait un signal erroné, a-t-il prévenu.  Le délégué a aussi plaidé pour une accélération des procédures entamées devant les tribunaux nationaux afin de lutter contre l’impunité.  Le TPIY doit continuer de partager sa longue expérience dans le domaine de la justice internationale, a-t-il recommandé.  Enfin, le représentant de la Malaisie a pleinement appuyé les travaux des Tribunaux pénaux internationaux et rappelé que l’engagement de la communauté internationale en faveur de la justice pénale internationale ne devrait pas être ébranlé.

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a rappelé l’importance de la primauté du droit et de l’état de droit, et de la lutte contre l’impunité à l’échelle internationale.  Il s’est félicité de tout ce qui a été fait pour garantir une transition sans heurt des activités des Tribunaux.  Selon lui, un mécanisme de prévention devrait permettre que des crimes qui sont « une honte pour l’humanité » ne se reproduisent plus.  Or des violations abominables du droit international humanitaire continuent d’être commises dans le monde, a-t-il déploré.  La communauté internationale doit s’en saisir « sans tenir compte des intérêts politiques des uns et des autres », et « dire aux auteurs de crimes qu’ils ne pourront pas se soustraire à la justice ».

Le représentant a également jugé importante la question de « la réinsertion de ceux qui ont été acquittés ou qui ont purgé leur peine » et il a recommandé l’utilisation optimale des ressources financières et administratives. 

M. WILMER ALFONZO MÉNDEZ GRATEROL (Venezuela) a souligné l’importance des travaux du TPIY et du Mécanisme pour la consolidation de l’état de droit.  Il s’est félicité des progrès accomplis par le TPIY dans l’achèvement de ses travaux programmé pour la fin 2017. Créé il y a 23 ans, le TPIY a apporté une contribution importante à la jurisprudence pénale internationale et à la lutte contre l’impunité, a-t-il estimé, en rappelant qu’il incombait aux États d’œuvrer au niveau national à une telle lutte contre l’impunité.  Il s’est félicité du jugement rendu dans l’affaire Karadžić, qu’il a considéré comme étant très importante pour la justice internationale.  La politisation des poursuites en justice compromet la neutralité et la qualité des décisions rendues, a-t-il prévenu, avant de souhaiter que toutes les personnes inculpées soient jugées.  Le représentant du Venezuela a également espéré que les défis rencontrés par le TPIY, notamment l’attrition de son personnel, soient réglés rapidement.  Avant de conclure, le représentant a encouragé la pratique d’audits au sein du Tribunal et du Mécanisme afin d’améliorer leur fonctionnement. 

M. LI YONGSHENG (Chine) a relevé les progrès réalisés par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY).  Il a espéré que le Tribunal continuera d’améliorer son efficacité pour accélérer ses travaux en vue de les achever d’ici la fin de 2017.  S’agissant des méthodes de travail, il a souhaité que le Tribunal fonde ses activités sur le rapport du Bureau des services de contrôle interne.

Sur la question de la coopération entre le Tribunal et la Serbie, le représentant a espéré que les deux parties continueront leur dialogue amical pour surmonter ces difficultés.  Enfin, il a qualifié de positives les mesures envisagées par le Mécanisme international appelé à réaliser les fonctions résiduelles des deux Tribunaux pénaux internationaux et a souligné qu’il était important de « réaliser les attentes du Conseil » à cet égard. 

Mme CAROLYN SCHWANGLER (Nouvelle-Zélande) a salué les efforts du Mécanisme pour maximiser son efficacité et efficience en s’appuyant sur l’expérience, les meilleures pratiques et leçons apprises du TPIY et TPIR et d’autres tribunaux.  Ses efforts pour engager de nouvelles méthodes et processus, tout en maintenant la flexibilité des nominations du personnels doivent être reconnus, a-t-elle insisté.  S’agissant des défis, elle a espéré des progrès entre le Mécanisme et le Gouvernement du Rwanda en matière d’accès aux archives. 

Elle a aussi posé la question de la réinstallation de 14 Rwandais toujours hébergés à Arusha et qui ont purgé leur peine.  Elle a jugé important que le Conseil de sécurité soutienne le TPIY jusqu’à la fin de son mandat, ainsi que le Mécanisme.  Elle a dit la nécessité d’incitations pour éviter le problème de manque de personnel. 

M. EVGENY T. ZAGAYNOV (Fédération de Russie) s’est félicité du fait que le rapport du TPIY ne contienne pas d’éléments qui pourraient augurer de davantage de retards dans l’achèvement de ses travaux.  Il a rappelé que le Conseil, dans sa résolution  2256 (2015), a demandé au TPIY, non seulement de respecter le calendrier fixé pour l’achèvement de ses travaux, mais aussi de réduire les délais de jugement.  Cela n’a pas été fait, ce qui est d’autant plus dommageable que le Tribunal est doté de ressources suffisantes, a-t-il affirmé.  

Il a estimé que l’affaire Hadžić aurait dû être achevée depuis longtemps en raison d’évidentes considérations humanitaires.  Il a affirmé que les affaires d’outrage à la Cour dans le cadre de l’affaire Šešelj, aujourd’hui terminée, ne relèvent pas du mandat du Tribunal.  Ce dernier a établi sa compétence en vertu de son règlement intérieur, a-t-il dit, avant de demander que des solutions alternatives soient envisagées.

Il a insisté sur les conclusions « alarmantes » du Bureau des services de contrôle interne (BSCI) s’agissant du fonctionnement du TPIY, conclusions que la Fédération de Russie partage pleinement.  Le Tribunal n’a pas cherché à établir des objectifs précis s’agissant de l’achèvement de ses travaux, a-t-il dit, avant de dire sa « surprise » devant l’inapplication par le Tribunal des conclusions du BSCI. 

La complexité des tâches ne doit pas justifier le sacrifice des normes judiciaires fondamentales, telles qu’un délai raisonnable de jugement.  Il a appelé le Tribunal à mettre en œuvre les conclusions du BSCI.  Enfin, le délégué a indiqué que le rapport du Mécanisme ne satisfaisait pas pleinement aux exigences de la résolution précitée.  Il n’y a pas d’informations sur le volume de travail accompli et sur les coûts afférents, a-t-il regretté.

La condamnation de Radovan Karadžić a montré qu’il est possible de traduire en justice les auteurs de violations du droit international humanitaire, s’est réjouie Mme FRANCISCA MARÍA PEDROS CARRETERO (Espagne).  Elle a relevé que les trois jugements rendus par le TPIY pendant la période à l’examen ont respecté les délais impartis, ce qui témoigne de l’engagement du Tribunal à terminer ses travaux fin 2017.  Pour la déléguée, le problème d’attrition du personnel doit être examiné comme il se doit.

Préoccupée face à la baisse de coopération avec les États de l’ex-Yougoslavie, notamment dans les affaires concernant des fonctionnaires de moyen rang et de rang élevé, la représentante a encouragé les gouvernements à prendre toutes les mesures nécessaires.  « Il est plus important que jamais que les systèmes judiciaires nationaux prennent la relève pour assurer la continuité des efforts réalisés par la communauté internationale », a-t-elle insisté.  Ainsi, la Serbie doit-elle respecter les décisions du TPIY.

Par ailleurs, a ajouté la représentante de l’Espagne, le Mécanisme international ne doit pas ménager ses efforts pour localiser les huit fugitifs accusés par le TPIR.  « Chaque jour qui passe est un affront pour les victimes », a-t-elle fait remarquer.  Face à l’impunité qui règne dans les conflits actuels, les travaux des tribunaux sont un motif d’espoir, a-t-elle estimé avant de conclure. 

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a insisté sur les accomplissements remarquables du TPIR et du TPIY dans la lutte contre l’impunité.  « Nous pouvons dire avec confiance qu’ils se sont acquittés de leur mandat avec succès et qu’ils ont ouvert la voie à un changement majeur dans la manière dont fonctionne le système judiciaire international », a-t-il dit.  Il a noté avec satisfaction les progrès accomplis par le TPIR dans l’exécution de ses travaux, y compris l’achèvement du procès de Radovan Karadžić.  Cette décision est la preuve que ceux qui ont violé les principes du droit international humanitaire seront traduits en justice un jour ou l’autre, a affirmé le représentant. 

Il a apporté son soutien à la stratégie d’achèvement des travaux du TPIY d’ici à la fin de 2017.  Il s’est dit ensuite préoccupé par l’inexécution des mandats d’arrêt délivrés par le TPIY et souligné l’importance de la coopération régionale afin d’y remédier.  Cette question, ainsi que les défis actuels relatifs au jugement des crimes de guerre par les juridictions nationales, requièrent une attention particulière du Bureau du Procureur, a-t-il estimé.  Enfin, le représentant de l’Ukraine a appuyé les efforts du Mécanisme visant à l’amélioration de ses méthodes de travail et à l’assouplissement de la gestion de son personnel.

Mme HELEN MULVEIN (Royaume-Uni) a jugé « crucial de parler d’une seule voix pour dire qu’il ne peut y avoir d’impunité pour les crimes les plus graves au niveau international ».  À cet égard, s’est-elle félicitée, la condamnation de Radovan Karadžić a montré qu’il n’y a « pas de date de péremption » dans l’administration de la justice.  S’agissant de l’affaire Mladić, elle a espéré que le jugement pourra être rendu en novembre 2017.

Tout en se disant consciente de l’érosion des effectifs du TPIY, la représentante a estimé que le personnel du Tribunal saura s’acquitter de ses tâches en vue d’assurer l’achèvement des travaux.  En outre, elle a considéré que le passage des fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux au Mécanisme international était en bonne voie.  Elle a recommandé d’adopter une approche pragmatique et de veiller à ce que les ressources ne soient pas détournées des tâches essentielles du Tribunal.

La déléguée britannique a exhorté la Bosnie-Herzégovine à coopérer avec le TPIY et s’est dite préoccupée par les difficultés rencontrées en Serbie pour exécuter les mandats d’arrêt délivrés contre certains accusés, notamment de rang intermédiaire.  Pour sa délégation, le Gouvernement serbe doit désigner de nouveaux procureurs et tous les États de la région doivent coopérer.

M. DAVID PRESSMAN (États-Unis) a souligné que les Tribunaux pénaux internationaux étaient essentiels au développement du droit international et à l’exécution de la justice.  La condamnation de Radovan Karadžić est la preuve que la justice finit par vaincre, a-t-il affirmé.  La recherche de la justice doit tenir pleinement compte de de la gravité des faits, a-t-il estimé.  Les horreurs commises à Srebrenica il y a plus de 20 ans étaient « de véritables scènes diaboliques », a-t-il rappelé avec indignation.  Un grand-père a ainsi été contraint de manger le foie de son petit-fils, a-t-il précisé.  Estimant qu’un véritable génocide avait eu lieu à Srebrenica, il a exprimé sa tristesse devant l’incapacité du Conseil de sécurité d’adopter une résolution l’année dernière pour marquer le vingtième anniversaire de ce massacre.

Nous devons être déterminés à appréhender les huit fugitifs recherchés par le TPIR, a-t-il insisté, en citant leurs huit noms.  Le représentant des États-Unis a demandé au Mécanisme de faire de ces arrestations sa priorité.  Il a ensuite mis l’accent sur la nécessité pour les États de la région de coopérer avec  le TPIY concernant les affaires d’outrage à la Cour.  La recherche de la justice ne vise pas à saper les efforts de réconciliation, bien au contraire, a conclu le délégué des États-Unis, en faisant référence à certains dirigeants qui défendent cette idée.

M. JULIO HELDER MOURA LUCAS (Angola) a estimé que la création des Tribunaux pénaux avait été « l’une des initiatives les plus pertinentes des Nations Unies pour préserver le droit international ».  Le TPIR, qui a fermé l’année passée, a ainsi bénéficié de l’appui de la communauté internationale et laissé derrière lui « un héritage important » qui contribue grandement à la réconciliation nationale.  Il a espéré que les fugitifs accusés de génocide par le TPIR pourront être arrêtés.  Il a également souhaité que soit réglé le dossier des personnes acquittées par le TPIR qui ne peuvent pas rentrer dans leur pays.

Le TPIY aurait déjà dû achever ses affaires en cours, a noté le représentant.  Les difficultés auxquelles il se heurte, notamment celles liées à ses effectifs, sont autant de sources de préoccupation.  Il a espéré que ces retards n’affecteront pas les activités actuellement traitées. 

M. TAKESHI AKAHORI (Japon) a assuré le plein appui de son pays aux travaux du TPIY et du Mécanisme.  Il a salué les jugements rendus récemment dans les affaires Karadžić et Šešelj, malgré l’acuité des défis que doit relever le Tribunal, tels que l’attrition de son personnel.  Le délégué a ensuite rappelé l’obligation qui incombe aux États Membres de coopérer avec le TPIY.  Il a ensuite dit son appréciation des efforts du Mécanisme visant à améliorer son efficacité, tout en garantissant le bon déroulement de ses procédures.

Il a néanmoins regretté les retards enregistrés dans la construction des nouveaux locaux qui doivent accueillir la division du Mécanisme à Arusha.  Il a salué la signature récente d’un accord entre le Mali et le Mécanisme relatif à l’exécution des peines.  En conclusion, le représentant du Japon a espéré que le TPIY et le Mécanisme continueraient d’apporter leur contribution à l’édification de la justice pénale internationale.

M. FRANCOIS DELATTRE (France) s’est félicité de la coopération apportée par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) à l’examen de ses méthodes de travail par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI) conformément à la résolution 2256 (2015) du Conseil de sécurité.  Il a jugé cette démarche d’évaluation parfaitement compatible avec le respect de l’indépendance judiciaire.  « Elle est même garante de la bonne administration de la justice, qui est elle-même un gage indispensable de la crédibilité de la justice pénale internationale », a insisté le représentant de la France.  Il a ajouté que la France attendait que le TPIY rende compte de la suite donnée aux recommandations du BSCI dans son prochain rapport trimestriel.  C’est le cas notamment concernant la mise en place, d’une part, d’un code de conduite et d’un mécanisme disciplinaire s’appliquant aux juges et, d’autre part, d’un système d’information centralisé relatif aux réductions d’effectifs.

Par ailleurs, le représentant a indiqué que la vocation temporaire du mandat du Tribunal, comme celui du Mécanisme résiduel impliquait qu’il était nécessaire d’adopter une gestion adaptée, faisant toute sa place à la diversité des systèmes ainsi qu’à une représentation géographique équilibrée en son sein.  Il a assuré que la France poursuivait son soutien au Mécanisme et, notamment, les efforts visant l’arrestation des fugitifs visés par les mandats d’arrêt délivrés par le Tribunal.  Concernant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), M. Delattre a indiqué que le deux affaires renvoyées par le Tribunal devant les juridictions françaises étaient traitées avec toute la rigueur et la diligence nécessaires en contact avec le TPIR, puis avec le Mécanisme résiduel. 

M. EMMANUEL NIBISHAKA (Rwanda) a salué la fermeture du TPIR l’année dernière et rappelé que 93 individus avaient été accusés de génocide.  Le Tribunal, a-t-il reconnu, a apporté une contribution immense à la jurisprudence en la matière.  Il a toutefois regretté que huit fugitifs, et d’autres suspects pour lesquels on dispose d’éléments de preuve indéniables, soient encore en liberté.  « Rien ne saurait justifier que ces individus ne soient pas jugés ou envoyés là où ils pourraient l’être », a-t-il dit.  « Le Rwanda ne baissera pas les bras jusqu’à ce que chacun soit jugé; nous le devons au million de victimes et aux survivants », a-t-il insisté.

En particulier, le représentant s’est dit préoccupé par les retards pris dans l’affaire Laurent Bucyibaruta.  Il a estimé que le procès engagé contre Octave Ngenzi et Tito Barahia devant la Cour d’assises de Paris devait être accéléré, de manière impartiale et indépendante.  En outre, il a réprouvé la décision du Procureur français d’abandonner toutes les charges contre Fr Wenceslas Munyeshyaka, qui va, selon lui, « à l’encontre de la nature des crimes commis ».

M. Nibishaka est revenu sur la question des archives du TPIR, qui représentent l’ensemble d’informations les plus complètes sur le génocide perpétré contre les Tutsis de 1994.  Le Rwanda, a-t-il prévenu, ne cessera de demander leur transfert à l’achèvement du mandat du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux.  « Nous sommes le seul propriétaire de cette histoire », a-t-il martelé.  Il est essentiel de préserver les archives pour les générations futures, a-t-il conclu en soulignant l’importance de l’éducation pour lutter contre « l’idéologie du génocide ».

M. SASA OBRADOVIĆ (Serbie) a assuré de l’engagement de son pays à coopérer avec le TPIY, indiquant que les juridictions serbes continuaient d’œuvrer à la lutte contre l’impunité.  Le Gouvernement a exécuté avec diligence les mandats d’arrêt délivrés contre Jovica Stanišić et Franko Simatović, a-t-il dit.  Ces mandats d’arrêt ont été les premiers à être exécutés, du temps de l’arrestation, toujours dans son pays, de Ratko Mladić et de Goran Hadžić, qui étaient également recherchés par le TPIY, a-t-il affirmé, s’étonnant que cette information ne figure pas dans le rapport du Procureur.

Indiquant que le bon achèvement des travaux du TPIY dépendait de la bonne coopération de la Serbie, il a rappelé que son gouvernement avait par exemple pleinement coopéré avec la Chambre d’appel s’agissant du traitement médical apporté à Vojislav Šešelj lors de son séjour provisoire en Serbie et ménagé un libre accès du Procureur du TPIY aux éléments de preuve situés en Serbie.  Jusqu’à présent, la Serbie a reçu 2 170 demandes d’assistance du Bureau du Procureur et 1 331 requêtes émanant des équipes de défense, aucune demande en souffrance n’ayant été constatée, a-t-il dit, avant de comparer ces statistiques flatteuses avec les éléments avancés par le Bureau du Procureur.

Il a pleinement partagé les préoccupations du Procureur concernant l’évidente régression dans la coopération régionale et appelé les procureurs des pays de la région à coopérer pleinement dans la lutte contre l’impunité, « sans interférence politique ».  La réunion d’une conférence régionale est envisagée à cette fin par la Serbie, a-t-il dit. 

Il a ensuite combattu « l’impression qui prévaut dans la région que la Serbie serait quelque part responsable de l’acquittement de Vojislav Šešelj », en se référant à une lettre du Président de la Croatie envoyée au Secrétaire général le 18 avril 2016.  Cela n’est pas juste, a-t-il affirmé.  Il a rappelé qu’il avait été demandé à la Serbie de respecter les jugements du TPIY, y compris l’acquittement du général Gotovina et d’autres généraux croates en dépit des éléments de preuve montrant que des violences graves avaient été commises contre des civils serbes.

Répondant aux critiques relatives à la nomination d’un procureur pour crimes de guerre, le délégué a déclaré que le processus de recrutement était en cours.  Cette élection sera la priorité du prochain gouvernement, a-t-il assuré, rappelant, qu’entre-temps, le Bureau du procureur des crimes de guerre demeurait pleinement opérationnel.  Huit condamnations pour crimes de guerre prononcées contre 15 individus ont été confirmées en 2016.

Revenant sur les allégations d’une inexécution par la Serbie de mandats d’arrêt délivrés contre trois individus pour outrage à la Cour, M. Obradović a indiqué que son gouvernement n’avait pas pu les exécuter en raison de risques à la sécurité nationale de son pays.  Vojislav Šešelj et son parti d’opposition politique ont commencé à créer des difficultés pour mon pays, menaçant ses relations bilatérales avec les pays voisins, a-t-il dit.  « Une fois de plus, la Serbie n’a jamais demandé au Tribunal d’être exemptée de ses obligations internationales, elle a uniquement demandé un report de leur exécution pendant la libération conditionnelle de  Vojislav Šešelj, en raison de circonstances menaçant ses relations bilatérales ».  Il a assuré que ce report ne créerait pas de précédent et que son gouvernement n’avait pas cherché à protéger des personnes recherchées.  Il s’est ensuite étonné que la décision du Tribunal selon laquelle les cas d’outrage à la Cour ne pouvaient pas être renvoyées devant les juridictions nationales n’ait pas fait l’objet de plus amples explications.

Enfin, il a indiqué que la récente décision de la Haute Cour serbe, selon laquelle l’exécution des mandats d’arrêt du TPIY manquait d’une base légale, ne préjugeait ne rien de la détermination de la Serbie de continuer à coopérer avec le Tribunal « de la manière la plus active possible ».

M. VLADIMIR DROBNJAK (Croatie) s’est dit choqué, inquiet et déçu du jugement de première instance dans l’affaire Šešelj en rappelant que le Président de la Croatie avait prévenu le Conseil de sécurité des conséquences de ce jugement.  Il a estimé que ce jugement semble totalement ignorer les faits établis par le TPIY.  Il s’est dit très inquiet aussi par la persistance de la Serbie de ne pas coopérer avec le Tribunal, notamment pour ce qui est de la mise en œuvre de mandat d’arrêt concernant trois accusés serbes.  M. Drobnjak s’est aussi inquiété de la présence d’accusés de crimes de guerre serbes à des manifestations politiques ou sur des plateaux de télévision en Serbie.  Illustrant son propos, il a précisé que M. Veselin Sljivancanin, accusé d’un massacre à l’hôpital de Vukovar, avait été invité à participer, le 9 mai, à une parade militaire des forces armées serbes.  Les criminels de guerre n’ont pas leur place dans des défilés ou dans des événements publics, a-t-il insisté en appelant à éviter que les démons du passé aient une influence sur notre présent et notre futur. 

M. MILOS VUKASINOVIC (Bosnie-Herzégovine) a encouragé le TPIY à terminer ses travaux à la date prévue et à transférer sans heurt ses fonctions au Mécanisme résiduel.  « La fin du mandat du TPIY ne signifie pas la fin de la lutte contre l’impunité dans mon pays », a-t-il toutefois averti.  La Bosnie-Herzégovine reste engagée à renforcer les systèmes judiciaires nationaux à tous les niveaux pour traduire en justice les auteurs de crimes atroces, a assuré le représentant. 

La Stratégie nationale des crimes de guerre a joué un rôle important pour appuyer les victimes et les témoins, et promouvoir la réconciliation.  Cette stratégie est appliquée indépendamment de l’origine nationale ou religieuse des criminels et de leurs victimes, a précisé le représentant.  Si le Bureau du Procureur de la Bosnie-Herzégovine a été en mesure de résoudre les affaires de catégorie 2, il restait toutefois, au 1er janvier 2016, 335 affaires en cours.  

Enfin, en septembre 2014, le Conseil des ministres a adopté une stratégie de réforme du secteur de la justice pour la période 2014-2018 qui devrait renforcer à long terme l’état de droit et l’indépendance des juges.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale adopte une Déclaration politique sur le VIH/sida pour d’ici à 2020 ramener à moins de 500 000 par an le nombre des nouvelles infections dans le monde

Soixante-dixième session, Réunion de haut niveau sur le VIH/sida,
97e & 98e séances plénières
AG/11786

L’Assemblée générale adopte une Déclaration politique sur le VIH/sida pour d’ici à 2020 ramener à moins de 500 000 par an le nombre des nouvelles infections dans le monde

L’Assemblée générale a adopté aujourd’hui, sans vote, au cours d’une Réunion de haut niveau, une Déclaration politique afin d’« accélérer la riposte pour lutter contre le VIH et mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030 ».  Les signataires s’engagent à ramener à moins de 500 000 le nombre des nouvelles infections par an dans le monde d’ici à 2020.

Dans ce texte de 79 paragraphes* qui suit la Déclaration d’engagement sur le VIH/sida de 2001 et les Déclarations politiques de 2006 et 2011, les chefs d’État et de gouvernement et représentants d’État et de gouvernement, réunis à New York jusqu’au vendredi 10 juin, réaffirment leur engagement à mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030 et pour atteindre cet objectif, de tirer parti des nouvelles possibilités offertes par le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Ils s’engagent également à atteindre les cibles fixées pour 2020, à savoir ramener à moins de 500 000 personnes par an le nombre de personnes nouvellement infectées par le VIH dans le monde, de même que le nombre de décès liés à des maladies associées au sida, et éliminer la stigmatisation et la discrimination liées au VIH.

Le défi est de taille car chaque jour, 6 000 nouveaux cas d’infection sont enregistrés et sur les 36,9 millions de personnes vivant avec le VIH, plus de 19 millions ne connaissent pas leur statut sérologique.

Une lueur d’espoir est venue du Secrétaire général de l’ONU.  M. Ban Ki-moon a rappelé que depuis 2000, le nombre des nouvelles infections a baissé de 35% et celui des décès de 43% depuis 2003.  Le Secrétaire général s’est félicité en particulier que le nombre des transmissions de la mère à l’enfant ait baissé de 56% en 15 ans et que quatre pays aient complètement rompu le cycle à savoir Cuba, la Thaïlande, l’Arménie et le Bélarus.  Il a émis l’espoir que le monde entier parviendra à l’objectif « Zéro infection » d’ici peu. 

Le moment est venu de proclamer collectivement notre intention d’arracher la victoire, a encouragé le Président de l’Assemblée générale, M. Mogens Lykketoft et c’est possible, car c’est la première fois dans l’histoire du VIH/sida que nous avons plus de gens sous traitement en Afrique que de nouveaux cas d’infections, a annoncé le Directeur exécutif d’ONUSIDA, M. Michel Sidibe.

Il n’en reste pas moins, comme le dit la Déclaration, que de nombreux programmes nationaux de prévention, de dépistage et de traitement du VIH offrent un accès insuffisant aux femmes, aux adolescentes, aux migrants et aux populations clefs, qui, d’après les preuves épidémiologiques, sont celles qui sont le plus à risque dans le monde, en particulier les usagers de drogues injectables, qui ont 24 fois plus de risque d’être contaminés que les adultes en général, les travailleurs du sexe, qui sont 10 fois plus à risque, les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, qui sont 24 fois plus exposés, les transgenres, qui ont 49 fois plus de risque de vivre avec le VIH, et les prisonniers, qui sont 5 fois plus à risque que les adultes en général. 

À cette disposition, plusieurs États en ont opposé une autre qui dit « Nous réaffirmons les droits souverains des États Membres d’honorer les engagements pris dans la présente Déclaration dans le respect des lois et des priorités de développement nationales et du droit international des droits de l’homme ».

La mobilisation des ressources étant le nerf de la guerre, les États s’engagent, dans la Déclaration, à mobiliser un montant de 13 milliards de dollars dans le cadre de la cinquième reconstitution du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.  Les quelque 10 milliards de dollars nécessaires chaque année ne représentent que ce que le Pentagone dépense en « trois jours », a taclé le Directeur de l’Institut de la terre de la « Columbia University », M. Jeffrey Sachs, à l’origine avec d’autres de la création du Fonds mondial.  Le Président de la Facilité internationale d’achat de médicaments (UNITAID) a fait observer que son agence a récolté trois milliards de dollars grâce aux taxes sur les billets d’avions rien que dans 8 pays, à raison d’un dollar par billet.  Il a annoncé que la semaine prochaine l’Union européenne discutera de la taxation des transactions financières internationales qui pourraient générer 35 milliards de dollars par an, soit plus que ce dont nous avons besoin pour mettre fin au VIH/sida, à la tuberculose et au paludisme.   

Dans la Déclaration, les États considèrent qu’il est primordial de disposer de médicaments d’un coût abordable, notamment génériques, et que les mesures de protection et d’application des droits de propriété intellectuelle devraient respecter l’Accord de l’Organisation mondiale du commerce sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) et être interprétées et mises en œuvre d’une manière propice au droit des États de protéger la santé publique et, en particulier, de favoriser l’accès de tous aux médicaments. 

« Signer une Déclaration politique, c’est bien mais effectuer un travail d’équipe avec les Nations Unies, c’est mieux », a souligné Melle Loyce Maturu, au nom des personnes infectées par le virus.  L’activiste Ndaba Mandela, qui a parlé de son père, fils unique de Nelson Mandela, mort du sida, a fait prendre un triple engagement: sur le dépistage, sur les préservatifs et contre la stigmatisation.

Une trentaine d’orateurs, dont les Présidents du Burkina Faso et de la République centrafricaine, la Vice-Présidente du Honduras, des chefs de gouvernement et un grand nombre de ministres de la santé ont pris la parole dans le cadre d’un débat général, tandis que se tenaient parallèlement deux tables rondes consacrées à la fin du sida pour la transformation sociale et le développement durable et au financement nécessaire.

L’Assemblée générale poursuivra sa Réunion de haut niveau demain jeudi 9 juin à partir de 10 heures.

*A/70/L.5

RÉUNION DE HAUT NIVEAU SUR LA MISE EN ŒUVRE DE LA DÉCLARATION D’ENGAGEMENT ET DES DÉCLARATIONS POLITIQUES SUR LE VIH/SIDA A/70/L.52

Déclarations liminaires

M. MOGENS LYKKETOFT, Président de la soixante-dixième session de l’Assemblée générale a ouvert la séance en rappelant que Nelson Mandela, dont le petit fils, Ndaba, militant de la lutte antisida, assiste à la Réunion, avait qualifié le VIH et le sida comme le plus grand danger auquel l’humanité sera confrontée pendant des siècles et des siècles, « un danger pire que la guerre ».  « Comme il avait raison », a estimé M. Lykketoft, pour qui il est difficile d’accepter que 34 millions de personnes soient morts de maladies liées au sida et que 14 millions d’enfants s’en soient retrouvés orphelins.  Nous ne devons pas accepter que dans ce monde plein d’opportunités « incroyables », l’on enregistre encore quelque 6 000 nouvelles infections par jour et que 36,9 millions de personnes vivent avec le VIH.

Le moment est venu de proclamer collectivement notre intention d’arracher la victoire, d’accélérer les efforts pendant les cinq années à venir et de mettre fin à l’épidémie du sida d’ici à 2030, a poursuivi M. Lykketoft.  Le Président de l’Assemblée générale a rappelé qu’il s’agit d’une épidémie qui sape le développement, qui a un énorme impact sur la croissance économique et qui peut être une source de préoccupations majeures dans les conflits et les situations postconflit. 

Mais c’est surtout une épidémie qui « hante » les gens ordinaires, en particulier dans les pays en développement.  L’épidémie frappe les femmes et les jeunes filles plus que tout autre groupe.  Elle a un impact tragique sur les jeunes qui représentent plus d’un tiers des nouvelles infections parmi les adultes et qui trop souvent n’ont pas accès à l’information, aux services et aux programmes dont ils ont besoin pour se protéger.  C’est une épidémie qui frappe plus particulièrement les consommateurs de drogues par intraveineuse, les travailleurs du sexe, les homosexuels, les transgenres et les détenus.  « Écoutons ces gens », a conseillé le Président.

Si nous voulons atteindre les objectifs fixés pour 2030, a-t-il prévenu, nous devons, dans un esprit de solidarité renforcée, mobiliser plus de ressources et les utiliser plus efficacement.  Il faut une coopération et un partenariat plus marqués.  Il faut accorder notre attention aux principes d’égalité et d’inclusion, respecter les droits de l’homme et s’ériger contre la discrimination et la stigmatisation.  Le Président a appelé, dans ce cadre, à autonomiser les filles et les femmes et à assurer leur accès à la santé sexuelle et reproductive afin qu’elles puissent vivre à l’abri de la violence. 

Nous devons être comptables de nos actes et assumer les engagements que nous prenons du haut des tribunes.  Le Président a insisté sur l’engagement visant à ne laisser personne sur le côté consacré dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  « Mettre fin à l’épidémie de sida serait l’un des plus grands accomplissements de notre temps.  Cela peut être fait et cela doit être fait », a conclu M. Lykketoft. 

Il y a 10 ans, lorsque j’ai pris mes fonctions de Secrétaire général de l’ONU, le sida dévastait encore des familles, des communautés et des nations, a déclaré M. Ban Ki-MOON.  Or, s’est-il réjoui, le nombre de personnes qui ont accès au traitement antirétroviral est passé de 3 millions en 2007 à 17 millions aujourd’hui grâce à des médicaments moins chers, à une plus grande concurrence dans l’industrie pharmaceutique et à plus de financements.  Depuis 2000, le nombre des nouvelles infections a baissé de 35% et celui des décès de 43% depuis 2003.  Le Secrétaire général s’est félicité en particulier que le nombre des nouvelles infections chez les enfants ait baissé de 56% en 15 ans et que quatre pays aient complètement rompu le cycle à savoir Cuba, la Thaïlande, l’Arménie et le Bélarus.  Il a émis l’espoir que le monde entier parviendra à l’objectif « Zéro infection » d’ici peu. 

Le Secrétaire général a vu dans les cinq prochaines années « une fenêtre d’opportunités » pour changer « radicalement » la trajectoire de l’épidémie et mettre fin au sida « pour toujours ».  Si nous n’agissons pas rapidement, a-t-il prévenu, il y a un véritable risque de voir l’épidémie rebondir dans les pays à faible et moyen revenu.  De 2016 à 2030, nous pouvons éviter environ 17,6 millions de nouvelles infections et 11 millions de morts prématurées.  Pour ce faire, a précisé le Secrétaire général, des engagements doivent être pris à chaque niveau: l’infrastructure mondiale de la santé, les États, les organisations de la société civile et les ONG et le Conseil de sécurité de l’ONU qui a traité du sida comme d’une question humanitaire et d’une menace à la sécurité.

Le Secrétaire général a donc lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle renforce et élargisse l’approche unique, multisectorielle et multipartite d’ONUSIDA et en fasse une partie intégrante du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Cela veut dire que la somme fixée de 26 milliards de dollars sera mobilisée, y compris, 13 milliards pour ces trois prochaines années.  Cela veut dire, a poursuivi le Secrétaire général, qu’il faut sensibiliser les groupes les plus vulnérables et promouvoir l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes. 

Cela veut dire, a-t-il ajouté, que l’on ne laisse personne sur le côté et que l’on se débarrasse des lois, politiques et pratiques punitives qui violent la dignité humaine et les droits de l’homme.  Cela veut dire, a-t-il enfin déclaré, que chaque personne affectée a accès à des services complets sans discrimination, qu’il s’agisse des jeunes gens, des migrants, des femmes et des filles, des travailleurs du sexe, des homosexuels, des consommateurs de drogues par intraveineuse, des transgenres et des détenus. 

M. MICHEL SIDIBE, Directeur exécutif de l’ONUSIDA, s’est félicité de ce que « nous les peuples », dont fait mention la Charte des Nations Unies dans son préambule, aient pu détourner la trajectoire du VIH/sida.  Faisant le constat de la baisse des décès liés au VIH/sida depuis 2011 et mesurant les progrès accomplis depuis lors, il a insisté sur le fait que le prix du traitement est passé de 15 000 dollars par an à 100 dollars à peine aujourd’hui.  Il s’est aussi félicité du fait que 17 millions de personnes ont pu bénéficier de soins, allant même au-delà de la cible des 15 millions.  « C’est la première fois dans l’histoire du VIH/sida que nous avons plus de gens sous traitement en Afrique que de nouveaux cas d’infections », a-t-il déclaré, sous les applaudissements nourris de la salle.

M. Sidibé a invité la communauté internationale à accorder plus d’attention à l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale qui sont les régions à la traine dans cette situation d’« embellie » dans le monde.  Il a invité les dirigeants politiques de ces régions à se mobiliser pour élargir l’accès aux traitements, rappelant que la transmission de la mère à l’enfant est devenue quasiment nulle dans des pays comme Cuba, la Chine ou encore l’Arménie.  En Afrique, on est passé, en 4 ans, d’une transmission de la mère à l’enfant de 50 000 bébés par an à 6 000 aujourd’hui.  Dans huit ans, l’objectif est de 50 enfants seulement dans le monde entier. 

« Nous, les peuples » avons pris des engagements ensemble et avons engrangé des résultats, s’est-il encore félicité, saluant de ce fait la mobilisation des « Nations Unies ».  Les portes des Nations Unies sont ouvertes à tous, sans aucune discrimination et quel que soit l’orientation sexuelle.  Nous ne pouvons réduire au silence la voix des homosexuels et des transgenres alors que nous voulons mettre fin à l’épidémie, a-t-il clamé.  Les résultats restent fragiles, quand on sait que de nombreuses femmes sont violées et infectées avec la même fréquence qu’il y a 20 ans.  La stigmatisation et la discrimination empêchent toujours des gens d’avoir accès aux soins et à la prévention.  « Le sida n’est pas fini mais on peut y mettre un terme », a conclu le Directeur exécutif d’ONUSIDA, en prévenant que les cinq prochaines années seront « cruciales ».  Nous devons « briser » cette épidémie une fois pour toutes, et si nous n’y parvenons pas, le monde ne nous le pardonnera jamais. 

Diagnostiquée séropositive à l’âge de 12 ans, après que le sida a tué sa mère deux ans plus tôt, LOYCE MATURU du Zimbabwe, a raconté une vie de désespoir, de dépression, de manque de confiance en soi, d’abus et de tentatives de suicide avant de bénéficier d’un soutien psychologique et d’être heureuse aujourd’hui de faire partie des 17 millions de personnes qui ont accès au traitement antirétroviral.  Pour venir à bout de ce fléau parmi les adolescents et les jeunes gens, a-t-elle conseillé, il faut investir dans les interventions qui ont prouvé leur efficacité.  Il faut une stratégie d’investissements claire pour, entre autres, former les personnels concernés à une prise en charge soucieuse de la sensibilité des jeunes gens, laquelle prise en charge les aiderait à ne pas répéter les mêmes erreurs.  Signer une Déclaration politique, c’est bien mais effectuer un travail d’équipe avec les Nations Unies, c’est mieux, a dit la jeune oratrice.  La Déclaration politique doit dessiner les contours d’une feuille de route pour mettre fin au sida, en prévision de la prochaine Conférence internationale.  Il faut, dans ce cadre, mobiliser les ressources pour le Fonds mondial.  « Faites confiance aux adolescents et aux jeunes et laissez les convaincre la société de changer la manière dont elle pense le VIH et le sida », a conclu l’oratrice non sans ajouter que « le temps est venu d’accélérer nos efforts ».

J’avais 19 ans quand ma mère est morte du sida et 21 ans quand mon père l’a suivie, a déclaré, M. NDABA MANDELA, petit-fils de Nelson Mandela et militant antisida.  Il a raconté qu’à la mort de son père, sa famille a eu peur.  Avant de parler à la presse, elle a tourné la question dans tous les sens pour en venir à la conclusion qu’il valait mieux parler de tuberculose ou de pneumonie.  « Bref, tout sauf la vérité. »  Mais c’est mon grand-père, a dit fièrement Ndaba, qui n’a pas eu peur de la vérité.  Il a annoncé clairement et dignement: « Mon fils unique, Makgatho Lewanika Mandela, est mort du sida ».  C’est cette déclaration qui a lancé le dialogue national sur le sida en Afrique du Sud et dans le monde entier, a souligné Ndaba Mandela et je suis ici, a-t-il dit, pour vous demander de poursuivre l’héritage de Madiba, l’héritage de leadership et d’unité.  Je suis ici pour que comme mon père, les 34 millions de personnes qui sont mortes du sida ne soient pas mortes en vain.

Je suis ici pour que les 37 millions de personnes qui vivent aujourd’hui avec le virus aient accès aux traitements antirétroviraux et vivent une vie pleine et saine en attendant d’être guéris.  Je suis ici pour vous demander que les centaines de millions de LGBT, consommateurs de drogues par intraveineuse, travailleurs du sexe, migrants, couples dont l’un est séropositif et tous les séropositifs qui vivent dans la peur et le silence puissent se réveiller tous les jours en bonne santé et vaquer comme tout le monde à leurs tâches quotidiennes.  Je suis ici pour que les 35 pays qui interdisent aux séropositifs étrangers d’entrer sur leur territoire lèvent leurs restrictions.  Je suis ici pour faire écho à « mon mentor » Michel Sidibé et aussi vous demander un triple engagement: faites-vous tester; ayez toujours au moins deux préservatifs sur vous, un pour vous et l’autre pour celui ou celle qui n’en aurait pas, et enfin, si vous apprenez qu’un ami, un collègue ou un proche est infecté, tendez-lui la main au lieu de lui tourner le dos, a conclu M. Ndaba Mandela. 

Déclaration avant adoption de la résolution

Au nom de 48 pays, le représentant de l’Argentine a déclaré qu’en ce moment crucial de la réponse mondiale contre le VIH, ces pays réaffirment leur engagement à mettre fin aux nouvelles infections et à faire en sorte que le sida ne soit plus une menace à la santé publique d’ici à 2030, y compris en temps de conflit, après les conflits et au cours d’autres situations de crise humanitaire.  Il a réaffirmé l’importance de tous les droits de l’homme et d’une approche soucieuse d’égalité entre les sexes.  En droite ligne du Programme de développement durable à l’horizon 2030, il a plaidé pour une couverture médicale universelle, l’accès aux services de santé essentiels et intégrés, les tests et le suivi et les traitements.  Il a en outre plaidé en faveur des services de santé sexuelle et reproductive et pour la protection sociale des personnes vivant avec le VIH et ceux qui prennent soin d’eux, notamment les femmes et les filles qui portent un fardeau particulièrement lourd, tout comme les enfants et les jeunes.

Le représentant a par ailleurs condamné toutes les formes de discriminations, de stigmatisations et de violences, y compris les crimes de haine visant les personnes vivant avec le VIH, celles soupçonnées d’être infectées, celles qui risquent de l’être ou celles qui sont affectées par le VIH.  Il a poursuivi en réaffirmant le caractère central de l’autonomisation des femmes et filles et de la réalisation de l’égalité des genres, tout comme la nécessité de mettre fin à toutes les formes de violence à caractère sexiste, y compris la violence venant d’un partenaire intime et le viol conjugal, entre autres.  Il a aussi appelé à la participation de la société civile et d’autres parties prenantes importantes dans la mise en œuvre de la réponse au VIH/sida, et il a enfin souhaité que le suivi de la présente réunion soit intégré à celui du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Explications de position sur la « Déclaration politique sur le VIH/sida: Accélérer la riposte pour lutter contre le VIH et mettre fin à l’épidémie du sida d’ici à 2030 » (A/70/L.52)

Le représentant du Canada a estimé que la Déclaration politique met en valeur les droits de l’homme.  Il a insisté sur l’autonomisation des jeunes filles et des femmes et sur la nécessité de leur assurer tous les services de santé dont elles ont besoin.  Il a salué l’intégration, dans la Déclaration politique, de tous les groupes sociaux, y compris les homosexuels et les transgenres, ajoutant que c’est la discrimination dont sont victimes ces deux groupes qui aggrave leur vulnérabilité au VIH.  Notre réponse collective face au VIH/sida doit tenir compte de ceux qui ont le plus besoin de notre aide, a—t-il tranché.

Son homologue du Soudan a souligné que certaines parties de la Déclaration ne font pas l’unanimité.  La Déclaration, a-t-il dénoncé, reprend des termes que la communauté internationale n’a pas clairement définis, dont « l’éducation sexuelle complète ».  Il a aussi dénoncé le fait que la Déclaration parle des usagers de drogues injectables, des travailleurs de sexe, des hommes qui ont des relations avec les hommes, des transgenres et des prisonniers, comme des cinq groupes les plus à risque, comme si cette assertion est vraie dans tous les pays du monde.  

La Déclaration politique est loin d’être un document parfait, a concédé la représentante des États-Unis, déclarant qu’elle aurait souhaité un libellé « plus musclé » sur la protection des droits de l’homme, « clef et base » de l’éradication du VIH/sida.  Il faut respecter les droits de l’homme de tous, sans exclusive, et créer un environnement politique qui facilite l’accès aux traitements et à la prévention.  « Lorsqu’il y a discrimination, c’est la santé de tout le monde qui est menacée », a-t-elle argué, en insistant sur les cinq groupes les plus à risque.  L’épidémie du VIH/sida ne disparaîtra pas grâce au Programme du développement durable à l’horizon 2030 à moins de respecter les droits de tous a-t-elle prédit.  Elle n’a pas manqué de préciser que le soutien à cette Déclaration ne signifie pas que les États adhèrent à tous les instruments internationaux cités.

La représentante de l’Australie a salué l’accent mis sur toutes les composantes sociales à risque face au VIH/sida, y compris les transgenres et les hommes qui ont des relations avec les hommes.  Faire participer les populations clefs est le moyen le plus efficace d’avoir des résultats probants, a-t-elle fait observer.  Elle s’est dite déçue que la Déclaration ne mentionne pas les discriminations dont les cinq groupes sont victimes, regrettant également que l’expression « droits sexuels » ne figure pas dans le texte.

Son homologue de Djibouti a souligné l’importance du leadership et de l’appropriation nationale dans la mise en œuvre de cette Déclaration.  Elle s’est félicitée de la mention du droit souverain de chaque État de mettre en œuvre la Déclaration dans le respect de ses lois et de sa culture.  À ce propos, a-t-elle tranché, les populations clefs identifiées dans la Déclaration ne correspondent pas à la situation de tous les pays.

Le représentant de Trinité-et-Tobago a précisé que la prophylaxie ne fait pas partie de l’arsenal national, car cela encouragerait les comportements à risque.

Le délégué de l’Indonésie a insisté sur le fait qu’il revient à chaque pays de définir ses populations à risque.  En Indonésie, a-t-il aussi insisté, c’est l’abstinence qui est considérée comme la mesure la plus efficace pour éviter le VIH/sida, laquelle est conforme aux valeurs religieuses.  Toutes les mesures en faveur des adolescents doivent être prises avec le consentement des parents, a ajouté le représentant.

Son homologue de l’Égypte a, à son tour, exprimé les réserves de son pays sur les paragraphes de la Déclaration relatifs aux populations à risque, lesquelles, s’est-il expliqué, diffèrent d’un pays à l’autre.  Il a vu dans la Déclaration des termes qui ne font pas l’unanimité au sein de la communauté internationale.

Le représentant de la République islamique d’Iran a regretté que la Déclaration ne mette pas suffisamment l’accent sur la fidélité et l’abstinence.  Il a tout simplement rejeté les termes qui ne cadrent pas avec les valeurs culturelles de son pays et relevé également que les populations à risque ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre.

Au nom du Conseil de coopération des États arabes du Golfe (CCG), le représentant de l’Arabie saoudite a exprimé les réserves de son Groupe sur certains paragraphes de la Déclaration, regrettant que les « spécificités » de son Groupe n’aient pas été prises en compte.

Son homologue de la Mauritanie a émis les mêmes réserves sur des concepts qui sont en contradiction avec la législation nationale.

Le représentant de la Libye a, à son tour, exprimé ses réserves sur tous les libellés « complexes » qui contreviennent à la culture musulmane et à la législation libyenne. 

Son homologue de la Fédération de Russie a salué le fait que la Déclaration consacre le droit souverain de chaque État de guider la mise en œuvre du texte.  Elle a regretté que le point central du document, qui est la prévention et la prise en charge des personnes infectées et affectées, ait été dilué dans un « lexique controversé ».  Les pays ne se sont jamais mis d’accord sur les cinq groupes les plus à risque.

Le représentant du Yémen a aussi émis des réserves sur des termes qui ne font pas l’unanimité au sein de la communauté internationale.

L’Observateur du Saint-Siège a estimé que les seuls moyens efficaces et sûrs de prévenir le VIH/sida est l’abstinence avant le mariage et la fidélité au sein du mariage.  Il a aussi émis des réserves sur certains termes, estimant par exemple que les services de planification familiale ne respectent pas toujours les droits humains puisque des avortements y sont pratiqués.  Il a aussi souligné que le genre n’est pas une construction sociale mais une donnée prédéfinie à la naissance et insisté sur la place centrale de la famille et des parents dans l’éducation des enfants.

Débat général

M. ROCH MARC CHRISTIAN KABORÉ, Président du Burkina Faso, a fait le point sur les progrès réalisés dans son pays, grâce au Conseil national de lutte contre le sida et au quatrième Cadre stratégique national de lutte contre le VIH/sida et les maladies sexuellement transmissibles (MST) pour la période 2016-2020.  Le Burkina Faso connait une tendance continue à la baisse et à la stabilisation de la prévalence du VIH et une amélioration de l’accès des malades au traitement.  Le Gouvernement poursuit activement sa recherche de mécanismes innovants de mobilisation des ressources notamment au niveau national.  En effet, le taux de prévalence est passé de 1,22% en 2011 à 0,9% en 2014. 

Au niveau de la prévention, il y a eu des acquis majeurs en termes de dépistage et la priorité est accordée à la prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant, avec une couverture de 98,22% des formations sanitaires en 2015, a expliqué le Président Kaboré.  Le Burkina Faso enregistre aussi une augmentation régulière du nombre de personnes qui ont accès aux traitements antirétroviraux (ARV) depuis 2010, soit 52 248 personnes en fin 2015.  Le pays a également engagé différentes initiatives pour lutter contre la stigmatisation et la discrimination, y compris sur le plan juridique et médiatique.  En termes de financement, une ligne budgétaire dans la Loi de finance est, depuis 2012, consacrée à la lutte contre le VIH et représente aujourd’hui 10 milliards de FCFA.  Le Président a saisi cette occasion pour réaffirmer son engagement en faveur de l’accélération de la prévention et du traitement du VIH en vue de « mettre fin à l’épidémie du Sida à l’horizon 2030 ».

Mme ROXANA GUEVARA, Vice-Présidente du Honduras, a souligné d’emblée l’incidence du VIH/sida sur le développement.  Il faut, selon elle, agir de manière urgente pour consacrer des investissements intelligents à la fois pour limiter les nouvelles infections et éviter les décès dus au VIH/sida.  Pour elle, il va falloir mettre l’accent sur la prévention, notamment auprès des populations clefs et des jeunes et lutter contre la stigmatisation et la discrimination, ce qui signifie, se débarrasser des lois et pratiques discriminatoires, adapter les législations nationales et permettre l’accès de tous aux traitements ARV, y compris aux traitements génériques qui sont beaucoup moins chers. 

La Vice-Présidente a dénoncé l’assassinat de René Martinez, leader de la communauté homosexuelle du Honduras, « un crime homophobe qui a été commis vendredi dernier ».  Le Gouvernement est déterminé à prendre des actions réelles et concrètes pour protéger la diversité sexuelle et fait tout pour trouver les responsables de cet acte et les traduire en justice.  La Vice-présidente a rappelé les ressources limitées de son pays, sans pour autant renoncer à redoubler d’efforts pour venir en aide aux personnes et communautés touchées.  Elle a lancé un appel à la solidarité internationale et demandé aux États de maintenir leur soutien à ONUSIDA pour qu’il maintienne sa présence au Honduras car pour elle, « la riposte n’est pas une tâche individuelle ».  Elle incombe à tous et doit pouvoir s’accomplir avec le soutien de la communauté internationale grâce à des stratégies durables pour arriver à l’objectif de « Zéro nouvelle infection ». 

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. TIMOTHY HARRIS, Premier Ministre de St Kitts et Nevis a annoncé que la CARICOM s’est fixée pour objectif d’être la première région du monde sans sida « et qu’elle peut y arriver ».  Depuis la dernière Réunion de haut niveau en 2011, la région a lancé de grandes initiatives en ce sens qui ont permis de diminuer de moitié le taux de prévalence stabilisé à 1,1% actuellement.  Le nombre de personnes ayant accès aux traitements ARV est passé de 5% à 44% et les morts liées au VIH/sida ont baissé de 20 000 à 8 800.  Le Premier Ministre a expliqué que la majorité des personnes touchées vivent dans trois pays des caraïbes où la prévalence dans les groupes les plus à risque, comme les homosexuels, peut atteindre 32%.  Il s’est également inquiété de l’augmentation de la prévalence chez les femmes et les jeunes filles, une tendance « qu’il faudra inverser ».

Saluant le soutien et le leadership régional d’ONUSIDA grâce auxquels le développement d’une approche coordonnée a été rendue possible, le Premier Ministre a souligné que les décaissements du Fonds mondial ont été cruciaux pour beaucoup de pays de la CARICOM.  D’ici à 2030, il va falloir renforcer les capacités de collecte de données, tirer les leçons de la lutte contre le sida pour renforcer les systèmes de santé qui auront également à faire face à la menace du Zika et de la Dengue et mettre l’accent sur les médicaments abordables pour ne citer que quelques domaines prioritaires. 

À cet égard, il a rappelé que les Ministres de la santé de la CARICOM, avec l’assistance technique d’ONUSIDA, ont été les premiers à négocier et signer un accord avec six grandes compagnies pharmaceutiques, en 2002 à Barcelone, sur des réductions de prix de 85 à 90%.  Cela a été le point de départ d’une collaboration avec la « Clinton Foundation » qui a élargi l’accès aux ARV dans les pays à faible et moyen revenu, et qui représente des économies de 325 milliards à ce jour.  À ce propos, le Premier Ministre n’a pas voulu conclure sans contester, une nouvelle fois, la classification des pays en fonction du seul critère du revenu par habitant et ses conséquences dont l’absence d’accès aux financements concessionnels pour la lutte contre le VIH/Sida et d’autres programmes de développement.

M. BARNABAS SIBUSISO DLAMINI, Premier Ministre du Swaziland, a indiqué que son pays entend éradiquer le VIH/sida d’ici à l’an 2022.  Cela nécessite, a-t-il relevé, une plus grande implication des personnes vivant avec le VIH et celle des hommes en tant que partenaires stratégiques de la prévention et du traitement.  Nous devons créer des filets de sécurité contre la vulnérabilité des jeunes femmes et des filles, a-t-il souligné.  Il a également plaidé pour que l’accès aux traitements ne soit pas limité aux hôpitaux, envisageant une gestion des communautés pour plus d’efficacité et une réduction plus substantielle des nouvelles infections.  Dans ce cadre, il a souligné la question du prix des traitements et appelé à une collaboration régionale pour créer des pôles d’achat, booster la recherche et la technologie et donc diminuer les prix et promouvoir une réponse régionale viable au VIH/sida.

M. RUHAKANA RUGUNDA, Premier Ministre de l’Ouganda a expliqué que son gouvernement, en partenariats avec les partenaires au développement, la société civile, les leaders religieux et communautaires a fait de grands progrès dans sa riposte nationale grâce à des interventions structurelles et biomédicales.  À la fin de 2015, le nombre des nouvelles infections est passé de 162 000 en 2011 à 83 265.  Le pays est sur le point d’éliminer la transmission de la mère à l’enfant qui était de 3% en 2015.  Le nombre des personnes qui ont accès aux ARV est passé à 834 931 personnes en décembre 2015, soit une augmentation de 57% par rapport à 2013.  L’Ouganda fait des progrès concrets vers les objectifs 90-90-90 d’ONUSIDA a affirmé le Premier Ministre puisqu’en décembre 2015, plus de 65% des personnes dépistées étaient sous traitement, dont 88% sous ARV.  Il a également annoncé qu’une enquête sera lancée en juillet 2016 pour mesurer l’impact du VIH en Ouganda et collecter des données fiables et actualisées. 

Toutefois, en dépit des progrès réalisés, 55% seulement des Ougandais se font dépister; 43% des éligibles aux ARV ne les suivent pas et les programmes à l’attention des jeunes sont limités.  Le Premier Ministre a aussi avoué que la stigmatisation et la discrimination perdurent, tout en réaffirmant la volonté de son gouvernement de parvenir à « zéro nouvelle infection et zéro décès » grâce à des programmes renforcés en faveur des jeunes, à des amendements de la législation et à un financement constant.  Le Gouvernement veut diminuer la morbidité de 70% en adoptant l’approche « test et traitement » qui s’inscrit dans celle de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). 

M. MOTHETJOA METSING, Vice-Premier Ministre du Lesotho, a souligné que le Lesotho a l’un des taux les plus élevés de prévalence avec 23% des adultes infectés.  Le pays compte 52 nouvelles infections et 26 décès liés au VIH chaque jour, alors qu’environ 19 000 enfants et 300 000 adultes vivent avec le VIH.  L’épidémie touche 26,7% de femmes et 18% des hommes; le taux de prévalence chez les adultes n’ayant pas beaucoup changé depuis 2005.  En plus du VIH, le Lesotho est fortement touché par la tuberculose avec 9 780 nouvelles infections rien que pour l’année 2014, ce qui fait que le pays a le second taux le plus important de prévalence à la tuberculose au monde.  M. Metsing a parlé des actions prises par son gouvernement afin de venir à bout de l’épidémie.  ONUSIDA doit, selon lui, faire en sorte que tous les partenaires et toutes les initiatives soient mieux coordonnés aux niveaux mondial, régional et national.  Il est évident, a souligné le Vice-Premier Ministre, que les ressources domestiques ne suffiront pas.  La communauté internationale doit augmenter son aide et trouver de nouveaux modes de financement. 

M. PAUL BIYOGHE, Vice-Premier Ministre du Gabon, a expliqué que depuis le dépistage du premier cas de sida au Gabon en 1986, son gouvernement s’est engagé à faire de la lutte contre cette pandémie une priorité, notamment par la création d’un Fonds de solidarité thérapeutique pour permettre aux personnes affectées de bénéficier d’un traitement ARV gratuit.  Dans le cadre de la mise en œuvre de la Déclaration de 2011, le dépistage y est devenu gratuit et la prise en charge globale de la femme enceinte est assurée.  Par ailleurs, l’assurance maladie universelle pour les bilans biologiques et les infections opportunistes a été mise en place, a expliqué le Vice-Premier Ministre.

Rappelant qu’en Afrique, le VIH reste une menace majeure pour la santé publique, il a reconnu que le Gabon n’échappait pas à ses multiples effets dévastateurs, et cela en dépit des efforts conjugués du Gouvernement, de la société civile, des organisations confessionnelles, du secteur privé et l’implication des personnes vivant avec le VIH.  Par conséquent, il faut renforcer la riposte car avec un taux moyen de prévalence de 4,2% en 2012, qui semble être en augmentation, le pari est loin d’être gagné, a reconnu le Vice-Premier Ministre.  Il a appelé à une plus grande mobilisation de tous qui devrait se traduire par de nouvelles formes de partenariats, des mécanismes de financement prévisibles et durables adaptés aux réalités du terrain.  Il a également averti que les progrès réalisés à ce stade pourraient devenir vains si certains pays, tels que les pays à revenu intermédiaire, restent exclus du processus d’aide internationale.

M. AMISSA-ARTHUR, Vice-Président du Ghana, a fait état des progrès réalisés de son pays: entre 2009 et 2014 le nombre des nouvelles infections a baissé de 30% et celui des décès de 43%.  Il a rendu hommage aux efforts « extraordinaires » de la société civile et des organisations communautaires pour étendre la portée et l’impact de la réponse nationale, y compris auprès des groupes les plus vulnérables.  Plusieurs défis restent à relever car la pandémie continue à s’étendre, la plupart des personnes touchées par le VIH/sida ne sont pas sous traitement, les femmes sont frappées de manière disproportionnée, la discrimination perdure et la compréhension du VIH dans la tranche des 15-24 ans reste faible.  Mais le Ghana reste déterminé à ne laisser personne sur le côté et travaille à accélérer les efforts de dépistage et de traitement dans le cadre de l’objectif 90-90-90 de l’OMS. 

À cet effet, le Gouvernement a lancé une campagne nationale intitulée « les premiers 90 » qui vise à dépister 45% de la population d’ici à 2020.  De plus, le Plan stratégique prévoit une politique de « traitement pour tous ».  Le Ghana félicite d’ailleurs le Secrétaire général pour avoir mis en place un Groupe de haut niveau sur l’accès aux médicaments et attend ses recommandations.  Il lance un appel à une action concertée au niveau international pour garantir l’accès universel aux traitements et en particulier aux ARV.  En vue de garantir des financements prévisibles et durables, le Ghana est en train de diversifier ses sources de financement.  La loi sur le financement de la lutte contre le sida est actuellement devant le Parlement, a précisé le Vice-Président qui a toutefois appelé à une augmentation significative du financement international.  « Il s’agit d’un défi mondial et d’une responsabilité mondiale », a-t-il souligné.

Pour Mme DOMINIQUE OUATTARA, Première Dame de la Côte d’Ivoire et Ambassadrice spéciale d’ONUSIDA pour l’élimination de la transmission mère-enfant et pour la promotion du traitement pédiatrique, le fait que la pandémie du sida continue de faire d’innombrables victimes, notamment parmi les femmes, les jeunes et les enfants est inacceptable.  Cette situation exige un important investissement en vue d’atteindre l’objectif de l’élimination du sida d’ici à 2030.

S’agissant de la situation en Côte d’Ivoire, elle a indiqué que la pérennisation des acquis est une priorité du pays et de la sous-région, en réduisant considérablement sa dépendance financière vis-à-vis de l’extérieur et en permettant à l’Afrique de « produire son médicament », comme l’a dit le Président Ouattara.  Même s’il reste encore beaucoup à faire, la Côte d’Ivoire a enregistré des progrès importants puisque le taux de prévalence est passé de 4,7% à 3,7% en 10 ans et que les nouvelles infections ont diminué de plus de 50%, passant de 52 000 en 2000 à 25 000 en 2014.  Plus de 150 000 personnes ont désormais accès aux antirétroviraux (ARV) dont les femmes enceintes séropositives dont le taux d’accès est passé de 46% en 2012 à 80% en 2014.  Mme Ouattara a également parlé de la loi spécifique pour la protection des personnes vivant avec le VIH/sida qui a été adoptée pour lutter contre la stigmatisation et la discrimination.

Elle a appelé à un partenariat mondial fort, en vue de mettre en œuvre une synergie d’actions, pour qu’au cours des prochaines années, nous puissions venir à bout de l’épidémie du sida.  Pour elle, l’accès équitable aux ARV est vital pour combler le fossé pédiatrique de traitement du VIH.  Elle a réclamé une mobilisation de tous et un engagement de chacun, pour la recherche de solutions locales, incluant entre autre la production d’ARV de qualité et accessibles à tous, et la mise en place de méthodes innovantes de sensibilisation et de prévention, orientée essentiellement vers la jeunesse.  Avant de conclure, Mme Ouattara a espéré que les recommandations de la réunion internationale des Ministres de la santé, sur la fin du sida pédiatrique, qui a eu lieu à Abidjan le 10 mai dernier, seront inclues dans la Déclaration politique finale.

Mme GINETTE MICHAUD PRIVERT, Première Dame d’Haïti a jugé qu’il serait prématuré de crier victoire, au regard de la magnitude de la pandémie du sida dans certaines régions et des risques toujours présents de son expansion.  Elle a rappelé que nous sommes toujours loin de l’objectif de l’universalité de l’accès aux traitements et a saisi cette occasion pour dénoncer la réduction des enveloppes d’aide publique au développement qui limite singulièrement l’accès aux traitements et aux ressources indispensables des « pays les plus meurtris par le sida ».  Il ne fait pas de doute qu’il faille intensifier les efforts de la communauté internationale, et accroitre notamment l’engagement des pays donateurs, des organisations internationales, du secteur privé et des grands groupes pharmaceutiques pour plus d’efficacité et d’efficience dans la riposte mondiale à ce fléau.

Mme Privert a évoqué la situation en Haïti qui demeure le pays le plus touché par le VIH/sida en dehors du continent africain.  Le taux de prévalence s’est stabilisé autour de 2,2% avec 60% de femmes parmi les personnes touchées par l’épidémie.  Le groupe des 20 à 49 ans est le plus frappé et la prévalence, quoique stationnaire dans l’ensemble, a augmenté chez les femmes (2,7% en 2012) pour diminuer chez les hommes (1,7% en 2012).  « En un mot, l’infléchissement de la courbe de l’épidémie du sida à l’horizon 2030 constitue pour l’État haïtien un immense défi », a affirmé la Première Dame.

Pour que les objectifs 90-90-90 de l’OMS deviennent réalistes en Haïti, il va falloir surmonter de nombreux obstacles dont l’accès universel au traitement; une meilleure prise en charge des patients dans les structures de santé; et l’accélération de la mise en place de la charge virale dans les centres de santé ainsi que la surveillance épidémiologique des résistances aux ARV en accord avec les projets régionaux HIVDR (HIV-drug resistance) de l’OMS/PAHO.  Mme Privert n’a pas manqué de souligner qu’en dépit des avancées encourageantes, l’élimination de l’épidémie à l’horizon 2030 se heurte à des défis multiples et de taille en Haïti.  L’immensité des besoins, le contexte de sous-financement actuel, l’instabilité institutionnelle, conjugués aux handicaps structurels du pays, à la faiblesse de ses infrastructures essentielles et aux carences dramatiques de l’infrastructure de santé publique, en ont singulièrement accru la complexité.

La PRINCESSE STEPHANIE DE MONACO, a souligné que face au sida, une maladie apparue récemment, « nous venons de réussir l’incroyable pari de stopper l’expansion alors qu’aucun vaccin n’a encore été trouvé ».  Pour elle, ces résultats positifs ne sont dus qu’à la volonté collective d’enrayer cette maladie et de s’organiser pour y parvenir.  Depuis 2000, la communauté internationale a réalisé des avancées notables et accepté de faire face à la réalité par le biais d’un « incroyable » engagement politique, scientifique, social et humain tant aux niveaux international, national que local.  La Déclaration du Millénaire et la création du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, ainsi que la Déclaration des Nations Unies sur les VIH de 2011 sont autant d’étapes clefs, selon Stéphanie de Monaco, qui ont permis de mettre les décideurs en ordre de bataille et de marquer des points contre la maladie. 

Ainsi, en 2016, « la conspiration du silence » faiblit et le sida n’est plus la maladie des autres, mais une maladie qui nous touche de près.  « Le sida relève de notre responsabilité collective », a estimé la Princesse qui a appelé la communauté internationale à réserver ses efforts aux plus vulnérables qui sont « malades et exclus », parce que vivant dans des pays défavorisés, parce que stigmatisés et discriminés.  Elle a préconisé un changement d’approche pour être plus efficace.  Pour cela, il faut associer les communautés locales et leurs leaders pour assurer la prévention, lutter contre la stigmatisation et rendre aux personnes vivant avec le VIH toute leur place dans la société.

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. JOSEPH KASONDE, Ministre de la santé de la Zambie, s’est félicité de l’adoption de la Déclaration, ajoutant qu’elle constituerait le cadre d’action des pays de son Groupe durant les cinq prochaines années.  Il s’est particulièrement félicité que la Déclaration ait réaffirmé le droit souverain d’honorer leurs lois et priorités de développement.  M. Kasonde a également noté que les « populations clefs » citées dans la Déclaration varient de pays à pays et qu’il appartient aux États de définir quelles sont ces populations.  En Afrique, ce sont les femmes et les adolescentes qui sont les personnes les plus exposées, a-t-il affirmé, rappelant que le sida reste la cause première de décès chez les femmes en âge de procréer en Afrique. 

M. Kasonde a ensuite rappelé les efforts et progrès réalisés en Afrique, tout en notant qu’il reste beaucoup à faire et que deux tiers des 2,1 millions de personnes infectées en 2015 dans le monde vivaient en Afrique.  Il a aussi estimé qu’il serait possible d’arriver avant 2030 à « Zéro nouvelle infection », notamment par l’éducation, la coopération avec les personnes directement concernées et les transferts de ressources.  Le Groupe africain demande dans ce cadre l’application du Programme d’action d’Addis-Abeba.  L’Afrique subsaharienne restant la région la plus touchée par le sida, il faut une réponse exceptionnelle, a poursuivi M. Kasonde.  Il a rappelé par exemple la faible proportion de jeunes qui, en Afrique australe, connaissent leur sérologie.  Il faut donc renforcer les systèmes de santé et l’éducation sexuelle.  Le Groupe africain pense qu’il faut innover pour avoir des traitements antirétroviraux à la fois plus efficaces et moins coûteux.

Intervenant ensuite en sa capacité nationale, M. Kasonde a présenté les mesures prises et les résultats obtenus par son pays.  Il a mis l’accent sur la nécessité d’associer la lutte contre le sida à d’autres politiques de santé et de développement.  Ainsi, la Zambie dispose d’un Conseil sur la lutte contre le sida, les maladies transmissibles et la tuberculose, qui travaille avec la société civile tout en rendant compte de ses activités au Ministère de la santé.  La Zambie reste en outre attachée à une politique d’éducation à la sexualité, a dit le Ministre, avant de rappeler que Lusaka a été identifiée comme une des villes test pour l’accélération de la lutte contre le sida.  Les mesures prises commencent à porter des fruits et le pays enregistre une baisse de la prévalence chez les jeunes.  La Zambie est convaincue que l’adoption de la Déclaration apportera un nouvel élan à la lutte contre la pandémie. 

Au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), Mme DORCAS MAKGATO, Ministre de la santé du Botswana, a fait le point sur l’expérience de l’Afrique australe, indiquant que si les progrès ont été significatifs pour ce qui est du traitement, la prévention reste à la traine.  Trois maladies frappent ces pays, à savoir le sida, la tuberculose et le paludisme, et, par conséquent, la SADC préconise l’intégration des politiques.  Venir à bout de l’épidémie d’ici à 2030 exige, selon elle, une combinaison de facteurs qui vont de la disponibilité des ressources adéquates et prévisibles aux approches biomédicales et comportementales.  La SADC est consciente de la nécessité d’augmenter la part des financements nationaux et s’engage à former le capital humain nécessaire, tout en espérant pouvoir compter sur l’aide financière internationale.  Parlant ensuite en sa qualité nationale, la Ministre a indiqué que son pays alloue 17% de son budget national à la santé.  Depuis le premier cas de sida au Botswana en 1985, des programmes de prévention ont été mis en place, le Botswana devenant le premier pays africain à proposer les ARV.  Plus de 95% des personnes séropositives ont désormais accès à ces traitements, a affirmé la Ministre.  Il y a tout juste une semaine, le Président a lancé l’initiative nationale « Treat all ».  Par ailleurs la transmission mère-enfant est tombée à 1,6%, a ajouté la Ministre qui s’est dite confiante que le Botswana est en bonne voie pour réaliser la cible 90-90-90 de l’OMS d’ici à 2020 puisque d’ores et déjà 83% des personnes séropositives savaient qu’elles l’étaient et 96% d’entre elles ont reçu des traitements.

M. JOSE NARRO ROBLES, Ministre de la santé du Mexique, a souligné que pour mettre fin à l’épidémie d’ici à 2030, il faudra renforcer les mesures qui ont démontré leur efficacité et faire preuve de solidarité à l’égard des pays qui ont des besoins mais peu de moyens.  Il faudra aussi reconnaitre que le sida est un problème de santé publique nuisant au développement et nous concernant tous.  À cette fin, il conviendra de citer explicitement les groupes les plus à risque.  Il ne sert à rien, a-t-il insisté, de feindre d’ignorer leur existence.  Le Ministre a appelé à la lutte contre l’homophobie et toutes les discriminations et stigmatisations contre la communauté LGBT.  Il a rappelé que son Président vient de ratifier l’engagement du pays en faveur de la non-discrimination et pour la construction d’un Mexique véritablement inclusif dans lequel chacun pourra exercer pleinement ses droits.  Le Ministre a mis l’accent sur les jeunes et adolescents, particulièrement affectés par le sida, en insistant sur la nécessité de leur offrir une éducation sexuelle laïque et scientifique, afin de leur permettre d’assumer une sexualité responsable, informée et protégée.  Il a de même mis en avant l’importance d’un accès universel au dépistage du sida et la nécessité d’utiliser de nouvelles technologies accompagnées des informations et de la confidentialité requises.

M. VICTOR SHAFRANSKY, Ministre de la santé de l’Ukraine, a rappelé que son pays avait le deuxième taux de prévalence des pays d’Europe de l’est et centrale avec environ 220 000 personnes vivant avec le sida et environ 11 000 nouvelles infections par an.  Sachant que l’Ukraine représente 19% des cas de sida dans cette région, tout progrès national aura un impact régional.  Malgré les défis actuels et grâce à l’aide des organisations internationales et des donateurs bilatéraux tels qu’ONUSIDA et le Fonds mondial, le Gouvernement ukrainien reste déterminé à lutter efficacement contre cette épidémie.  Au cours des 10 dernières années, la couverture ARV a été multipliée par 20, et la thérapie de substitution aux opiacés a été multipliée par 53, alors que le taux de transmission mère-enfant est passé de 27,8% à 3,8%.  En avril 2016, la capitale ukrainienne, Kiev, est devenue la première ville d’Europe orientale et d’Asie centrale à lancer la mise en œuvre de la stratégie « Fast track ».  Le Gouvernement ukrainien a également développé une stratégie qui met en avant les cibles 90-90-90 d’ici à 2020.

M. FERNANDO LLORCA CASTRO, Ministre de la santé du Costa Rica, a déclaré que son gouvernement s’est engagé à traiter, pour des raisons humanitaires et de santé publique, tous les cas de maladies sexuellement transmissibles, y compris la séropositivité.  Des unités mobiles sont en mesure d’établir des diagnostics dans les zones à risque et auprès des personnes transgenres et prostituées.  Le Costa Rica a lancé un processus d’évaluation de ses efforts visant à éliminer la transmission verticale du VIH/sida avec l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).  Le Ministre a espéré obtenir des données exactes pour adapter en conséquence ses actions.   

M. SHRI J.P. NADDA, Ministre de la santé et de la famille de l’Inde, a indiqué que le nombre de morts liées au sida avait diminué de 55% depuis 2007 et les nouvelles infections de 66% depuis 2000.  Près d’un million de personnes sont actuellement sous traitement antirétroviral.  Ces succès n’auraient pas été possibles sans l’accès à des médicaments à des prix abordables.  Plus de 80% des ARV sont fournis par la filière pharmaceutique de l’Inde, ce qui a permis de sauver des millions de vie dans le monde, et en particulier dans les pays en développement.  L’Inde est fière d’être l’un des principaux partenaires de la lutte contre ce fléau, et collabore avec toute une gamme de pays partenaires, et d’autres parties prenantes comme ONUSIDA.

Le Ministre a proposé cinq moyens pour une action à l’unisson de la communauté mondiale pour les cinq prochaines années: tout d’abord il faut adopter la riposte accélérée proposée par ONUSIDA avec 90% des personnes ayant accès aux traitements sans pour autant délaisser la prévention.  Parallèlement il faut augmenter les investissements, soulignant que le moment est venu pour que les pays développés en fassent plus et renforcent leurs engagements.  Ensuite, il faut garantir l’accès à des médicaments abordables, et l’Inde s’engage à exploiter toutes les flexibilités des Accords TRIPS.  Le Ministre a en outre plaidé en faveur de sociétés inclusives pour tous qui valorisent la vie humaine.  Enfin, il s’est dit d’avis que la riposte multisectorielle face au sida, qui est proposée dans la Déclaration politique, ne doit pas être sacrifiée au profit d’une approche biomédicale étroite.  Pour lui, le seul moyen de venir à bout de cette épidémie est d’agir ensemble.

M. FAUSTIN ARCHANGE TOUADERA, Président de la République centrafricaine, a rappelé la crise humanitaire sans précédent qui a frappé son pays qui en 2012, était déjà affecté par trois décennies de crises militaro-politiques.  Cette crise a ralenti la réponse multisectorielle contre le VIH et le sida.  Ainsi, entre 2013 et 2014, près du tiers des patients sous traitement antirétroviral ont été perdus de vue ou ont dû arrêter leur traitement du fait de déplacements massifs des populations et des difficultés d’organisation des soins.  Le Président a également rappelé que, pendant cette période, le pays avait pu bénéficier de l’appui de toutes les agences du système des Nations Unies, du Fonds mondial, de partenaires bilatéraux et des ONG humanitaires.  Cette assistance, a ajouté M. Touadera, a permis de faire face au double défi d’une prévalence de 4,9% en 2010 et des conséquences de la crise.  Elle a notamment permis de maintenir la courbe descendante de la prévalence sensiblement au niveau prévu.

Pourtant, de multiples défis sont à relever pour permettre à la République centrafricaine de s’associer aux autres pays afin d’accélérer l’action.  Le Président a précisé que son pays vient de se doter d’un Plan stratégique 2016-2030 pour atteindre les objectifs de développement durable et mettre en œuvre la stratégie 90-90-90 d’ONUSIDA.  Le principal objectif du pays est d’atteindre le taux de 90% de couverture des traitements antirétroviraux pour les personnes infectées, contre seulement 24% actuellement.  M. Touadera a chiffré les ressources nécessaires à 247 millions d’euros, tout en affirmant que son pays soutiendra cette mise en œuvre dans la mesure de ses moyens.  Il a lancé un appel à l’appui des partenaires au développement.

Mme VERONICA SKVORTSOVA, Ministre de la santé de la Fédération de Russie, a indiqué que pour son gouvernement, l’une des questions prioritaires du développement durable est la lutte contre le VIH/Sida.  Le pays a opté pour une stratégie nationale qui met l’accent d’une part sur la prophylaxie, y compris par des programmes d’information pour différents groupes d’âge en s’appuyant sur les médias et par des programmes de dépistage volontaire gratuits.  Actuellement 90% des enfants qui ont des mères séropositives naissent en bonne santé, a poursuivi la Ministre qui a également indiqué que l’accès aux traitements ARV a été multiplié par 5 en 5 ans.  Toutefois, la consommation accrue de drogues injectables a contribué à un pic dans les décès de personnes touchées par le VIH/sida, a-t-elle expliqué.  Son gouvernement fournit désormais les médicaments gratuitement aux séropositifs et leur coût est en baisse parce que le pays développe de plus en plus ses propres médicaments.  Pour la Ministre, le succès de l’approche intersectorielle systémique proposée par la Déclaration politique dépendra de l’efficacité des politiques nationales et de l’accès universel aux médicaments.

M. ARMEN MURADYAN, Ministre de la santé de l’Arménie, a assuré que son pays disposait d’un système intégré de services sur le VIH/sida, la tuberculose, et la santé maternelle et infantile, qui permet d’établir des diagnostics rapides et d’offrir des traitements de qualité.  À cet égard, il a salué le rôle du Fonds mondial et du programme russe d’assistance technique pour le contrôle du VIH/sida en Europe de l’Est et en Asie centrale.  Les mesures préventives ont permis de limiter à moins de 5% la prévalence du VIH dans les populations à risque et à moins de 1% chez les femmes enceintes.  De façon générale, ce taux n’atteint que 0,2% chez les adultes.

Toutefois, a averti le Ministre, la région d’Europe de l’Est et d’Asie centrale, y compris l’Arménie, enregistre aujourd’hui la croissance la plus rapide de l’épidémie de VIH dans le monde.  En Arménie, la majorité des cas déclarés ont touché des travailleurs migrants qui ont été infectés à l’étranger.  Sur une note positive, le pays n’a enregistré aucun cas de transmission de la mère à l’enfant depuis 2007, un fait qui vient d’être certifié par l’OMS.  Il s’est inquiété de la baisse du financement des donateurs, compte tenu des besoins importants. 

Pour M. HERMANN GRÖHE, Ministre de la santé de l’Allemagne, « mettre fin au sida en 2030 est une promesse gigantesque ».  C’est aussi un engagement sur lequel comptent toutes les personnes affectées, a ajouté le Ministre, qui a parlé, à propos des objectifs de développement durable, d’une « responsabilité sacrée ».  La seule chose qui manque à ce jour, a-t-il estimé, c’est l’engagement politique de mettre en œuvre les engagements de manière efficace et positive.  La Déclaration est donc un appel à tous les gouvernements pour qu’ils fassent preuve du leadership politique nécessaire pour faire en sorte que personne ne soit laissé sur le côté.  Il faudra pour cela éliminer les lois qui stigmatisent l’homosexualité ou qui ne reconnaissent pas la toxicomanie comme une maladie.  Il faudra aussi éduquer et autonomiser les filles.  Le Ministre a rappelé qu’une éducation sexuelle de qualité ne conduit pas à une sexualité plus précoce.  Au contraire, l’Allemagne est un des pays où le taux de grossesses précoces est la plus faible au monde.

M. Gröhe a rappelé que son pays avait ces dernières années augmenté son engagement financier mondial en faveur de la santé à 800 millions d’euros par an.  L’Allemagne espère le succès de la Conférence de reconstitution du Fonds mondial en septembre.  Le Ministre a aussi rappelé qu’investir dans la santé c’est investir dans l’avenir.  Il a mis en avant les très bons résultats de son pays en matière de lutte contre le VIH/sida.  Le Gouvernement a adopté une nouvelle stratégie intégrée sur le VIH, les hépatites B et C et autres maladies sexuellement transmissibles.  La stratégie vise à offrir une prévention et des soins centrés sur la personne.  Le fait de détruire le tabou sur les maladies sexuellement transmissibles et de classer le VIH avec les autres MST pourra aussi contribuer à réduire la stigmatisation associée au VIH et au sida, a précisé le Ministre.

M. IENG MOULY, Ministre et Président de l’Autorité nationale du Cambodge sur le sida, a expliqué que la réponse de son pays au sida avait bien évolué au cours des 25 dernières années, passant du contrôle de l’épidémie à l’objectif d’éliminer toute nouvelle infection d’ici à 2025.  Des lois ont été promulguées pour promouvoir la tolérance à tous les niveaux de la société et des stratégies spécifiques ont ciblé la population à risque pour qu’elle ne soit pas oubliée.  La prévalence du VIH est passée de 2% en 1998 à 0,6% en 2015. 

De plus, a poursuivi le Ministre, plus de 90% de la population est informée des risques du VIH/sida et la façon de prévenir la transmission.  Plus de 90% de la population à risque utilise des préservatifs et plus de 80% des personnes vivant avec le VIH/sida reçoivent un traitement antirétroviral et plus de 70% de ces personnes et des orphelins bénéficient d’une aide sociale, en matière de nutrition, de santé, de scolarité.  Le pays est déterminé à renforcer la qualité de sa couverture médicale, à « briser le complot du silence » en autonomisant les communautés, à augmenter de 7% ses investissements dans le secteur et à recueillir davantage de données.

Pour M. GABRIEL WIKSTRÖM, Ministre de la santé et du sport de la Suède, avec la science actuelle et les connaissances que nous possédons, nous avons les outils nécessaires pour venir à bout du sida d’ici à 2030.  Mais pour cela il faut agir, ce qui suppose une véritable coopération et coordination entre différents secteurs et au-delà des frontières.  Pour la Suède, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 offre une opportunité unique pour une réponse intégrée à cette pandémie.  Le Ministre a insisté sur la notion selon laquelle la santé est un droit de l’homme et cela indépendamment de l’ethnicité, de l’âge, du sexe et de l’orientation sexuelle.  Il a également fait valoir que les lois qui criminalisent ou discriminent les personnes séropositives violent leurs droits fondamentaux.  Ces lois et ces stigmatisations vont à l’encontre des soins universels et de la prévention.

Ainsi, le respect intégral des droits fondamentaux devient une condition essentielle pour traiter et prévenir le VIH/sida.  Pour vraiment éliminer ce fléau, il faut éliminer la stigmatisation et la discrimination qui l’accompagnent, a insisté le Ministre.  Venir à bout du Sida signifie pouvoir atteindre les personnes à risque, notamment les femmes en âge de procréer, les réfugiés, les migrants, les toxicomanes, les homosexuels et les demandeurs d’asile qui doivent être rassurés que leur séropositivité n’affectera pas leur demande.  Le Ministre a également mis l’accent sur l’importance cruciale d’une bonne éducation sexuelle dans la lutte contre le VIH/sida, ainsi que sur le rôle des jeunes dans la définition et la mise en œuvre des programmes.

La Suède a d’ores et déjà atteint les cibles 90-90-90 de l’OMS, mais comme il s’agit d’un défi mondial, elle soutient activement les efforts d’ONUSIDA.  Elle alloue 500 millions de dollars, soit 13% de son aide au développement, à la santé.

M. CLEOPA MAILU, Ministère de la santé du Kenya, a déclaré que la réponse mondiale à la pandémie du sida avait permis de structurer des services et programmes de santé et dans d’autres secteurs.  Le Kenya a appris qu’une réponse multisectorielle au sida pouvait rassembler des ressources de différentes agences gouvernementales, de communautés et d’acteurs divers en vue d’un objectif commun et d’accélérer ainsi les services même au profit des plus démunis.  Le représentant a parlé des progrès réalisés par son pays, comme la baisse de la prévalence qui est passée de 13% à 6% en 10 ans et la réduction du nombre des nouvelles infections annuelles de 110 000 à 72 000 chez les adultes.  Les nouvelles infections chez les enfants et les femmes ont été réduites de 63% depuis 2011.  Le Kenya a également permis à plus de 900 000 personnes vivant avec le VIH d’avoir accès à des antirétroviraux et 72% des Kenyans ont été testés au moins une fois.  On estime à un demi-million le nombre de vies qui ont ainsi été sauvées.

Ces résultats sont dus à de nombreux facteurs, a poursuivi le représentant qui a cité le soutien politique du Président et de la Première Dame en faveur de l’objectif des trois zéro, la qualité de la recherche nationale et un solide système de surveillance et de suivi.  Il reste, a reconnu le représentant, des défis à relever du fait notamment des disparités géographiques ou démographiques dans la prévalence.  La principale préoccupation du pays concerne la jeunesse, au sein de laquelle le sida reste la principale cause de décès et qui compte pour 46% des 72 000 nouvelles infections d’adultes recensées en 2015.

M. Mailu a rappelé le poids financier de la lutte contre le sida, expliquant que le seul coût des médicaments antirétroviraux représentait 26% du budget de son Ministère.  Il faut donc augmenter les ressources intérieures et trouver des financements durables pour une réponse à long terme.  Le Kenya demande en outre que soient levées les barrières qui peuvent menacer l’accès aux antirétroviraux.

M. ROBERTO MORALES OJEDA, Ministre de la santé publique de Cuba, a estimé que la crise économique, la stigmatisation et la discrimination continuaient d’entraver les efforts visant à mettre rapidement fin à l’épidémie de VIH/sida.  Pour atteindre les objectifs fixés, les droits à la santé et à l’éducation doivent être garantis au niveau international et les pays développés doivent augmenter leur aide économique, a-t-il estimé. 

En 2015, s’est félicité le Ministre, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a certifié que Cuba a été le premier pays du monde à éliminer la transmission du VIH et de la Syphilis de la mère à l’enfant.  Ce progrès a été rendu possible par la politique de la révolution cubaine en matière de santé, a-t-il ajouté.  Cuba offre aux personnes qui vivent avec le VIH un programme de prévention, de diagnostic et de traitement antirétroviral conforme aux recommandations de l’OMS et de l’ONUSIDA.  Le Ministre a précisé que son pays a déployé plus de 49 000 collaborateurs de santé dans 67 pays.     

M. BERNARD HAUFIKU, Ministre de la santé et des services sociaux de la Namibie, a indiqué que son pays alloue 30% du budget de la lutte contre le sida à la prévention sans pour autant mettre en cause le volet traitement.  L’engagement politique de la Namibie de mettre un terme au VIH s’accompagne de celui d’éliminer la pauvreté, a expliqué le Ministre.  À cet effet, la Namibie s’est dotée d’un cadre stratégique, qui s’accompagne d’un plan de mise en œuvre qui inclut des programmes de prévention.  Elle teste en ce moment les directives « Test and Treat » de l’OMS dans trois régions qui connaissent une forte prévalence du VIH, et ces directives seront élargies à tout le pays.  Par ailleurs, les traitements sont gratuits pour les femmes enceintes séropositives, les enfants de moins de 15 ans, les séropositifs et leurs parents.  Le Ministre a également expliqué que tous les hôpitaux de district offrent les traitements ARV et il est prévu d’aller au-delà pour atteindre les collectivités, les villages et les foyers.  L’éducation sexuelle dans les écoles est un autre facteur important dans la lutte contre ce fléau.  Parmi les défis cités par la Ministre, figurent le problème des ressources humaines, notamment de spécialistes en épidémiologie, ainsi que le dépistage chez les hommes, l’insuffisance de la planification familiale ou encore le manque de coordination au niveau national entre les principales parties prenantes.

M. PIYASAKOL SAKOLSATAYADORN, Ministre de la santé publique de Thaïlande, a déclaré que son pays avait réussi dans un premier temps à stabiliser l’épidémie du sida, avant de la réduire avec détermination.  Il a expliqué que le pays avait obtenu ses résultats par l’utilisation systématique des préservatifs chez les travailleurs du sexe au milieu des années 1990, la prévention de la transmission mère-enfant et l’accès généralisé aux antirétroviraux.  Outre un engagement politique constant, cinq éléments, les « cinq i », avaient contribué à ces résultats.  Le premier « i » est l’innovation sociale, comme l’utilisation des préservatifs et la prévention de la transmission mère-enfant.  Le deuxième « i » est l’investissement, notamment local, dans la qualification du personnel médical.  Le troisième « i » indique l’action intersectorielle et le quatrième définit l’information pour assurer la prise de bonnes décisions.  Enfin, le dernier « i » est pour « intensif ».  Il s’agit d’agir intensivement pour atteindre les populations clefs, les recruter dans des services inclusifs, tester les personnes à risque, traiter celles qui se sont révélées séropositives et veiller à assurer un cycle continu de prévention, de soins et de traitement pour les populations clefs.

M. DAVID PAGWWESESE PARIRENTYATWA, Ministre de la santé et de l’enfance du Zimbabwe, a expliqué que la riposte au sida de son pays est ancrée dans la prévention et affirmé que cela a déjà des incidences positives dont un taux de prévalence d’environ 15%.  L’accent a été mis sur le dépistage, la circoncision médicale, et la lutte contre la transmission mère-enfant et la promotion des préservatifs.  Il a espéré que grâce à ces mesures, ainsi qu’à l’initiative d’auto-dépistage, 90% de la population saura quel est son statut d’ici à 2020.  Quelque 5 millions de dollars ont été alloués à des actions de prévention, car ce volet restait à la traine par rapport au programme de traitement par ARV qui couvrait 60,2% des adultes en 2015 et 78% des enfants.

Le Zimbabwe a également lancé un partenariat public-privé pour l’approvisionnement en ARV.  Leur prix est ainsi passé de 70 à 17 dollars par mois et par personne, a expliqué le Ministre.  Avant de conclure, il a lancé un appel aux partenaires au développement pour qu’ils maintiennent, voire augmentent leurs engagements dans le cadre de ce combat.

M. SAID AIDI, Ministre de la santé de la Tunisie, a expliqué que son pays, qui a adhéré depuis les années 1980 à la riposte globale au sida, a toujours centré son approche sur l’être humain et l’a ancrée sur les principes des droits de l’homme et de l’équité en santé.  La nouvelle Constitution de la Tunisie adoptée en 2014 constitue une opportunité majeure de renforcer les acquis de la lutte contre le VIH, a-t-il ajouté, car elle renforce le respect des droits de l’homme, la parité, l’accès aux services de santé et a une protection sociale sans discrimination.

M. Aidi a rappelé que son pays avait adopté régulièrement des plans stratégiques nationaux à partir des années 2000.  Ainsi, un plan pour la période 2015-2018 a été élaboré sur la base d’une concertation réelle avec les acteurs impliqués.  Par ailleurs, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est au cœur de la réforme actuelle du système de santé tunisien.  Le Ministre a rappelé que la prévalence du sida en Tunisie reste faible mais que le pays est conscient de sa progression au sein des populations les plus exposées ou vulnérables.  La Tunisie est déterminée à y faire face et adhère à l’appel mondial lancé par ONUSIDA afin d’accélérer la riposte sans laisser personne sur le côté.  Il faut toutefois être conscient des défis, a ajouté M. Aidi, qui a cité l’accès insatisfaisant au dépistage et au traitement dans plusieurs pays, les disparités de genre et les discriminations, ainsi que le manque de ressources financières du fait de la crise mondiale.  Le Ministre a donc lancé un appel pour que l’on relève ces défis et que l’on mette fin ensemble à l’épidémie de sida d’ici à 2030, ce qui serait une contribution majeure à la réalisation des objectifs de développement durable.

M. ABDELMALEK BOUDIAF, Ministre de la santé, de la population et de la réforme hospitalière de l’Algérie, a mis l’accent sur les obstacles persistants dans la lutte contre le sida, notamment le coût élevé des médicaments et des nouvelles technologies qui constituent un lourd fardeau pour les pays du Sud.  L’accès universel pour tous, et en particulier pour les personnes vulnérables et la mise en place de financements durables à travers des fonds novateurs nationaux et internationaux et enfin la lutte contre toute forme de discrimination et de stigmatisation font également partie de ces obstacles, selon le Ministre.  Il a fait état de progrès « indéniables » en Algérie dans la lutte contre le sida qui demeure une priorité nationale.  Sa riposte nationale s’inscrit dans le cadre des objectifs de la Déclaration politique de l’ONU de 2011, a-t-il expliqué, ajoutant que ces efforts sont financés à hauteur de 95% sur le budget de l’État.  Il a également indiqué que l’accès était gratuit à toutes les prestations préventives et curatives pour tous les PVIH.  La couverture en matière de traitement ARV était de plus de 85% en 2015.

Cette riposte nationale est basée sur une approche de planification axée sur les résultats préconisés par ONUSIDA et a déjà intégré la cible des trois 90 en tant que priorité dans son plan national 2016-2020.  La contribution de l’Algérie aux efforts internationaux s’est traduite par l’organisation de deux rencontres régionales de haut niveau au cours des deux dernières années: celle sur les femmes leaders et la riposte au sida dans la région MENA et celle sur l’accélération du dépistage VIH dans la région MENA.

Table ronde 1: « Le sida dans le contexte des objectifs de développement durable: tirer parti de l’élimination du sida aux fins de transformations sociales et de développement durable »

Le Coprésident de la table ronde et Vice-Président du Ghana, M. Kwesi Bekoa Amissah-Arthur, a rappelé que la stratégie qu’ONUSIDA a adoptée l’année dernière prône l’utilisation des technologies de l’information et des médias sociaux, qui peuvent atteindre des milliards de personnes.  Son homologue et ancien Président de Fidji, M. Ratu Epeli Nailatikau, a souligné que plus que jamais la santé et le développement durable doivent aller de pair.  Il a rappelé « l’opportunité extraordinaire » offerte par le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et s’est dit très heureux que Fidji ait décriminalisé les relations entre personnes de même sexe et éliminé les restrictions aux voyages des personnes infectées par le VIH/sida.

Chacun, a-t-il plaidé, doit mettre à profit les synergies offertes par les objectifs de développement et veiller à ce que la fin du sida représente une transformation sociale.  C’est la peur qui nous empêche de créer les sociétés envisagées par le Programme de développement à l’horizon 2030, a-t-il ajouté, en appelant à des sociétés inclusives qui ne laissent personne sur le côté. 

La représentante du Kenya a rappelé que son pays a mis en place en 2009 le premier « tribunal sur le sida » qui doit veiller à l’accès aux traitements.  Ce « tribunal » s’est à ce jour saisi de plus de 300 cas de discrimination, notamment sur le lieu de travail.  Interrogée sur l’élimination éventuelle des restrictions qui s’appliquent encore dans son pays aux personnes séropositives, La Ministre de la santé de la Fédération de Russie a admis que la mesure qui date de l’époque où les ARV n’existaient pas est devenue discutable.  La situation a radicalement changé, a-t-elle avoué, affirmant qu’elle a permis d’alléger les restrictions en 2015.  La Fédération de Russie a l’intention d’aller plus loin et partage entièrement les termes de la Déclaration adoptée aujourd’hui.  Ces propos ont suscité des interrogations chez la Directrice du plaidoyer à « International Women’s Health Coalition » qui, alertant de la hausse du nombre des nouvelles infections en Europe de l’Est, a accusé la Fédération de Russie de pratiquer une politique essentiellement répressive, citant la suppression des programmes de prévention en Crimée.  Elle a aussi appelé à la dépénalisation de certains comportements et s’en est pris aux États qui criminalisent le travail sexuel, comme la France, plaidant au contraire pour une action de sensibilisation et de prévention qui inclue tous les groupes concernés.

En Suisse, a confié la Secrétaire d’État aux affaires étrangères, la politique sur la drogue qui a été adoptée après de vifs débats et qui a permis, « en intégrant plutôt qu’en discriminant », d’éliminer pratiquement le sida parmi les consommateurs de drogues.  Ces derniers ont d’ailleurs été largement inclus dans l’élaboration de la politique.  Sur la base de son expérience, la Suisse estime que toute politique de lutte contre le sida suppose une participation inclusive et transparente, dans un esprit de partenariat et de responsabilité partagée. 

Il faut une approche politique car les mesures législatives relèvent bien de la politique, a commenté le Ministre des affaires étrangères de l’Éthiopie qui a comparé le nombre des morts par an à « l’écrasement de cinq ou six jumbo-jets par jour ».  Il faut une approche politique centrée sur les droits des personnes et c’est cet élan politique qui permettra un vrai changement.  La résilience d’une société est aussi la conséquence d’un système de santé efficace et plus généralement d’une économie dynamique, ce à quoi peuvent contribuer les entreprises privées, a commenté le Directeur général de « Sarona Asset Management Inc ».  C’est en effet avec un meilleur système général de santé que l’on pourra aussi diminuer le coût de l’accès aux traitements, a acquiescé le représentant du Kenya.

Le Malawi est très fier d’avoir, avec un coût de 160 dollars par an et par personne, le programme de lutte contre le sida le plus efficace au monde, a déclaré son représentant.  Il faut accélérer la lutte, a encouragé son homologue du Brésil non seulement en continuant à faire la même chose mais aussi en utilisant des solutions novatrices.  La lutte contre la discrimination, les partenariats et les opportunités, c’est le triplé gagnant de la Thaïlande a confié son représentant.  La lutte contre le sida doit être liée à la réalisation des autres objectifs de développement durable, a estimé son homologue du Maroc, estimant que la politique de décloisonnement d’ONUSIDA a joué un rôle pionnier.  C’est aussi la politique suivie par le Maroc qui élabore actuellement un plan intégré unique de mise en œuvre des objectifs de développement durable.

C’est en effet une question de volonté politique, a reconnu la représentante de Cuba, en mettant l’accent sur le fait que la politique de santé de son pays montre son efficacité depuis 55 ans.  Cuba a réussi à éliminer la transmission materno-fœtale grâce notamment aux efforts de la société civile et à la promotion de l’égalité homme-femme.  Les partenariats entre les gouvernements et la société civile sont « essentiels », a insisté le représentant de Youth LEAD.  La société a toujours joué un rôle clef dans la lutte contre le VIH/sida en Mongolie, a souligné sa représentante qui a demandé à ONUSIDA de mettre l’accent sur le renforcement des structures gouvernementales de lutte contre l’épidémie.

À son tour, son homologue du Royaume-Uni a reconnu le rôle de la société civile et a aussi insisté sur l’éducation et l’autonomisation des filles et des femmes.  Reconnaissant le rôle de l’éducation pour la prévention qui doit être la priorité, le représentant du Pakistan a prévenu qu’il n’y aura pas de progrès si le regard des gens sur la maladie et les personnes infectées ne change pas.  Il faut mettre fin au « silence » qui entoure la maladie, a acquiescé son homologue du Pérou.  Il faut lutter contre la discrimination et la stigmatisation et assurer une vraie participation des communautés et groupes concernés.  Au-delà de la discrimination et de la stigmatisation et même de la dépénalisation du travail sexuel et de la consommation de drogues, il faut assurer des conditions de vie dignes aux personnes affectées, a souligné le représentant de « Housing Work ».  L’Assemblée générale devrait tout de même se pencher sur la question de la dépénalisation des drogues, a plaidé le Directeur exécutif de « Stop drug war.org », en prévenant que c’est la pénalisation qui conduit au partage des seringues ou à la prostitution.

Table ronde 2: « Financer l’élimination du sida: une courte période favorable »

La table était coprésidée par M. ROCH MARC CHRISTIAN KABORÉ, Président du Burkina Faso, et Mme LORENA CASTILLO DE VARELA, Première dame du Panama.  D’entrée de jeu, le Président du Burkina Faso a déclaré que les traitements du VIH doivent être démocratisés, l’Afrique important encore 98% des médicaments dont elle a besoin.  La Première Dame du Panama a appelé à la mobilisation des ressources domestiques.

En 2001 à Abuja, les pays africains se sont engagés à attribuer au moins 15% de leurs budgets nationaux annuels au secteur de la santé, a rappelé M. PETER BOEHM, Vice-Ministre de la Coopération internationale du Canada.  Nous devons veiller à ce que tout le monde respecte ses promesses, a-t-il lancé, avant d’annoncer que le Canada compte augmenter sa contribution au Fonds mondial de 20%.  Il a aussi promis 126 millions de dollars dans la recherche d’un vaccin contre le sida.

En la matière, a dit M. SAID AIDI, Ministre de la santé de la Tunisie, on ne parle de dépenses dans le secteur de la santé mais d’investissements, compte tenu des retombées positives sur la population et partant sur les économies nationales.  Il faut investir en priorité dans les populations clefs, a poursuivi Mme AWA MARIE COLL-SECK, Ministre de la santé du Sénégal, en citant les travailleuses du sexe et les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (17,5%).  Pour financer les efforts nationaux, son gouvernement entend établir des taxes spéciales sur le tabac, les boissons alcoolisées et les boissons gazeuses.

La lutte contre le VIH/sida est aujourd’hui une question de fond, a acquiescé M. JEFFREY SACHS, Directeur de l’Institut de la terre de l’Université de Colombia, États-Unis, précisant qu’il s’agit juste de 5 à 10 milliards de dollars par an, « pas plus ».  Il a rappelé comment il avait participé au plaidoyer pour la création du Fonds mondial en 2001, se souvenant que les autorités américaines ne voulaient pas s’engager.  Il a rappelé aussi que les 10 milliards de dollars nécessaires chaque année ne représentent que ce que le Pentagone dépense en « trois jours ».  La première approche est de demander au Fonds mondial quel est le montant nécessaire pour éradiquer le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme, et la deuxième de mobiliser les fonds.  « Ce n’est pas un casse-tête », a-t-il souligné en se disant prêt à interpeler personnellement « ses amis milliardaires ».

À ce stade, la communauté internationale ne contribue qu’à hauteur de 20% à la lutte contre le VIH/sida, a fait observer le représentant de Madagascar, avant que son homologue du Kazakhstan n’appelle à la baisse des prix des antirétroviraux pour atteindre l’objectif du 90-90-90.  Le Fonds mondial doit aussi financer les pays à revenu intermédiaire, a plaidé une représentante de la société civile.

Quatre-vingt-dix pour cent (90%) des fonds investis dans la lutte contre le VIH sont des fonds propres, s’est enorgueilli M. JORGE DANIEL LEMUS, Ministre de la santé de l’Argentine, qui a appelé à un meilleur financement de la recherche et de l’innovation.  Il faut des financements innovants qui soient à la fois prévisibles, durables, et additionnels, a souligné M. PHILIPPE DOUSTE-BLAZY, Conseiller spécial chargé des financements innovants du développement auprès du Secrétaire général de l’ONU et Président de Facilité internationale d’achat de médicaments (UNITAID).  Il a fait observer qu’UNITAID a récolté 3 milliards de dollars grâce aux taxes sur les billets d’avions rien que dans 8 pays, à raison d’un dollar par billet.  La semaine prochaine à Bruxelles, l’Union européenne discutera de la taxation des transactions financières internationales qui pourraient générer 35 milliards de dollars par an, plus que ce dont nous avons besoin pour mettre fin au VIH/sida, à la tuberculose et au paludisme, a-t-il fait remarquer.

Les financements innovants sont importants mais il faut aussi que les pays en développement élargissent leur assiette fiscale, a conseillé M. MARK DYBUL, Directeur exécutif du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.  Il a promis que le Fonds mondial allait faire tout ce qui est possible pour remplir sa mission.  Mais n’oublions pas que le Fonds nous appartient tous, a-t-il lancé à l’endroit des États Membres.

La question n’est pas de savoir d’où vient l’argent mais comment il est géré, a prévenu Mme RACHEL ONG, Point focal pour la communication, délégation de la Communauté du Fonds Mondial.  Les inégalités entre pays limitant leur capacité à mobiliser les fonds, la communauté internationale doit mettre la main à la poche.  Elle a également attiré l’attention des bailleurs sur les pays qui ne peuvent bénéficier des financements du Fonds mondial, comme les pays à revenu intermédiaire. 

C’est vrai, a dénoncé la représentante de la Mongolie.  Vous vous concentrez sur certains pays alors que les pays à revenu intermédiaire abritent pas moins de 70% des séropositifs dans le monde, a-t-elle objecté.  Son homologue de la Jamaïque a appuyé ces propos, alors que le représentant du Lesotho a demandé plus de fonds pour la lutte contre la tuberculose, son pays étant l’un des plus affectés au monde.  Il a aussi souhaité une aide au renforcement des capacités des ONG locales.

Dans la même veine, le délégué du Kenya a regretté que les financements du Fonds mondial ne soient pas aussi orientés vers le renforcement des systèmes de santé, rendant ces derniers éternellement dépendant de l’aide.  En matière de fonds, la représentante de la Fédération de Russie, a conseillé de solliciter plus vigoureusement le secteur privé.

Le Liban a justement besoin de ressources pour mener des projets de lutte contre le VIH/sida dans les communautés de réfugiés, a expliqué son représentant.  Cette aide est d’autant plus importante que le pays ne bénéficie pas des financements du Fonds mondial.  Un appel à la solidarité internationale a été aussi lancé par la représentante d’Haïti dont le pays envisage de réaliser l’objectif 90-90-90.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale appelle une nouvelle fois à l’accélération du Processus de Genève pour faciliter le retour des déplacés et des réfugiés géorgiens d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud

Soixante-dixième session,
96e séance plénière - matin
AG/11785

L’Assemblée générale appelle une nouvelle fois à l’accélération du Processus de Genève pour faciliter le retour des déplacés et des réfugiés géorgiens d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud

L’Assemblée générale a adopté aujourd’hui par 76 voix pour, 15 contre et 64 abstentions, une résolution sur « la situation des déplacés et des réfugiés d’Abkhazie et de la région de Tskhinvali/Ossétie du Sud (Géorgie) » par laquelle elle invite les participants aux pourparlers de Genève à redoubler d’efforts en vue d’instaurer des conditions de sécurité propices au retour volontaire de ces déplacés et réfugiés.

Préoccupée par les changements démographiques forcés résultant des conflits en Géorgie et par la situation humanitaire causée par le conflit armé d’août 2008, qui a entraîné de nouveaux déplacements forcés de civils, l’Assemblée « invite tous les participants aux pourparlers de Genève à redoubler d’efforts en vue d’établir une paix durable, à s’engager à renforcer la confiance et à prendre immédiatement des mesures pour faire respecter les droits de l’homme et instaurer des conditions de sécurité propices au retour volontaire sans entrave, dans la sécurité et la dignité de tous les déplacés et réfugiés dans leurs foyers ».  L’Assemblée souligne la nécessité de fixer un calendrier pour un tel retour.

Le représentant de la Géorgie, qui a présenté la résolution, a précisé que près de 400 000 personnes, de toutes origines et de toutes religions, ont dû fuir l’Abkhazie et la région de Tskhinvali/Ossétie du Sud en raison du conflit et de plusieurs vagues de déplacements forcés depuis le début des années 90.  Il a réitéré l’engagement de son pays en faveur des discussions de paix, ajoutant que son pays demeure impliqué de bonne foi pour atteindre des résultats tangibles.

Le Gouvernement de Tbilissi n’est pas prêt à reprendre des négociations sérieuses à Genève, a accusé le représentant de la Fédération de Russie.  Il a dénoncé la résolution comme « une initiative politisée » qui ne permettra en aucun cas d’améliorer la situation sur place et qui vise seulement à utiliser la tribune de l’Assemblée générale pour promouvoir une vision partiale et la rhétorique antirusse traditionnelle.

Dans son dernier rapport qui couvre la période allant du 1er avril 2015 au 31 mars 2016**, le Secrétaire général rappelle que c’est après les hostilités d’août 2008 dans la région de Tskhinvali/Ossétie du Sud et l’Accord de cessez-le-feu en six points conclu le 12 août 2008, que des discussions internationales ont été engagées à Genève le 15 octobre 2008, sous la coprésidence de l’Union européenne, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de l’ONU.

Ces discussions sont consacrées à des questions ayant trait à la sécurité, à la stabilité et au retour des personnes déplacées et des réfugiés.  À ce jour, 35 séries de discussions se sont déroulées dans le cadre de deux groupes de travail parallèles.  Bien que la question du sort des personnes déplacées et des réfugiés et de leur rapatriement librement consenti soit restée à l’ordre du jour, le Secrétaire général juge regrettable qu’à cause des objections de certains participants, les questions de fond aient été peu abordées et qu’aucun progrès n’ait été réalisé.  Aucun retour durable à la région d’origine n’a été enregistré durant la période considérée.

Si plusieurs délégations, dont celles du Chili et de l’Uruguay, ont expliqué leur vote d’abstention afin de ne pas interférer avec le processus de Genève, d’autres ont au contraire estimé que ce projet de résolution sert ce processus.  « Ce texte est un outil important pour encourager les participants de Genève à redoubler d’efforts, à garantir les droits de l’homme et à répondre aux questions découlant de leur mandat respectif, y compris la création de conditions propices à des retours volontaires dans la sécurité et la dignité », a ainsi estimé le représentant de l’Azerbaïdjan, qui s’est exprimé au nom de la Géorgie, de l’Ukraine, de l’Arménie et de Moldova (GUAM).

« L’Assemblée générale est la mieux placée pour envoyer un signal fort aux populations déplacées, ainsi qu’aux participants des discussions internationales de Genève pour qu’ils redoublent d’efforts en faveur de leur retour », a renchéri la représentante de la Lituanie, au nom des pays nordiques et baltes.  « Que le conflit trouve au plus vite une solution politique », s’est impatienté le représentant du Brésil.

 

*    A/70/L.51

**   A/70/879

 

CONFLITS PROLONGÉS DANS LA RÉGION DU GROUPE GUAM ET LEURS INCIDENCES SUR LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES ET SUR LE DÉVELOPPEMENT

a) Rapport du Secrétaire général (A/70/879)

b) Projet de résolution (A/70/L.51)

Déclarations

M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a rappelé le sort d’un Géorgien déplacé de 31 ans, Giga Otkhozoria, tué par de soi-disant « gardes frontière » qui lui avaient nié le droit de retourner en Abkhazie.  « Ce meurtre montre tristement le coût humain que les déplacés géorgiens ont à supporter.  C’est pourquoi nous soumettons cette résolution. »  Le représentant a rappelé que près de 400 000 personnes, de toutes origines et de toutes religions, ont dû fuir l’Abkhazie et la région de Tskhinvali/Ossétie du Sud en raison du conflit.  Plusieurs vagues de déplacements forcés ont été enregistrées depuis le début des années 90.  Sur un pays de près de 4 millions de personnes, des centaines de milliers de personnes sont déplacées et ne peuvent pas rentrer chez elles pour des raisons sur lesquelles elles n’ont aucun contrôle.  Le délégué a également dit que, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), 88% des Géorgiens déplacés veulent rentrer chez eux.  Il a rappelé que l’Assemblée générale adopte depuis huit ans cette résolution, avec un appui croissant.  Il a réitéré l’engagement de son pays en faveur des discussions de paix, ajoutant que la Géorgie demeurera impliquée de bonne foi pour atteindre des résultats tangibles.

Le représentant a ensuite rappelé la discrimination que subissent les Georgiens dans ces régions laquelle est « le prolongement d’une politique d’occupation et de nettoyage ethnique et d’une stratégie dangereuse d’annexion de facto ».  Le Gouvernement de la Géorgie ne ménage aucun effort pour assurer des conditions décentes à la population déplacée, a-t-il dit.  Rappelant les cinq responsabilités fondamentales évoquées lors du Sommet humanitaire mondial qui s’est tenu fin mai à Istanbul, le représentant de la Géorgie a déclaré que les droits des personnes déplacées doivent être reconnus, réaffirmés et protégés indépendamment des processus politiques et des négociations.  Si cette résolution ne représente le cas que d’un seul pays, l’enjeu en lui-même s’inscrit dans le cadre d’une crise humanitaire plus globale, a-t-il conclu.

Au nom du Groupe GUAM, M. YASHER ALIYEV (Azerbaïdjan) a rappelé que ce texte, en tant que projet de résolution « non politique », se concentre uniquement sur les aspects humanitaires des déplacements et appelle au respect des droits des personnes déplacées et réfugiées.  La situation humanitaire s’est encore détériorée, a-t-il alerté, depuis la dernière résolution de 2015, compte tenu des nouvelles restrictions imposées par ceux qui contrôlent l’Abkhazie et la région de Tskhinvali/Ossétie du Sud.  Ces nouvelles discriminations relatives « au statut juridique des étrangers » ciblent la liberté de mouvement, les droits de propriété, les droits sociaux et le droit à l’éducation dans la langue maternelle de la population géorgienne.  Ces restrictions pourraient déclencher une nouvelle vague de déplacements forcés, a prévenu le représentant, en ajoutant que « dans un tel contexte, nous trouvons particulièrement alarmante et inacceptable l’intention formulée par les autorités d’occupation de conduire un soi-disant référendum dans la région de Tskhinvali sur l’accession à la Fédération de Russie ».

Le représentant a rappelé que ces régions, encerclées par 60 kilomètres de fils barbelés et autres installations et soi-disant signes frontaliers, étaient inaccessibles pour la communauté internationale.  « GUAM réitère son ferme soutien à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Géorgie au sein de ses frontières internationalement reconnues ».  Il s’est aussi dit convaincu que les discussions internationales de Genève sont une plateforme importante pour remédier aux défis sécuritaires et humanitaires découlant du conflit armé de 2008.  « Ce projet de résolution est un outil important pour encourager les participants de Genève à redoubler d’efforts, à garantir les droits de l’homme et à répondre aux questions découlant de leur mandat respectif, y compris la création de conditions propices à des retours volontaires dans la sécurité et la dignité ».

Enfin, le représentant a dit que les déplacements forcés étaient un défi de taille dans les pays de GUAM, qui comptent des millions de personnes affectées par un conflit armé.  Le sort de ces personnes, y compris les personnes déplacées, doit être réglé indépendamment du manque de progrès enregistré dans la résolution des conflits, a-t-il conclu.

Au nom des pays nordiques et baltes, Mme RAIMONDA MURMOKAITĖ (Lituanie) a insisté sur la nature humanitaire de cette résolution qui fait « obligation à tous » de faire en sorte que les personnes déplacées puissent exercer leurs droits fondamentaux.  Elle a encouragé tous les participants aux discussions de Genève à s’accorder sur des mesures supplémentaires visant à améliorer la situation sécuritaire et à répondre aux besoins humanitaires de la population affectée par le conflit, en particulier les personnes déplacées.  Elle a réitéré son soutien à la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Géorgie.  Elle s’est félicitée du soutien croissant à la cause humanitaire que constitue le sort des réfugiés et personnes déplacées de l’Abkhazie et de la région de Tskhinvali/Ossétie du Sud.  L’Assemblée générale est la mieux placée pour envoyer un signal fort aux populations déplacées, ainsi qu’aux participants des discussions internationales de Genève pour qu’ils redoublent d’efforts en faveur de leur retour. 

Il ne fait aucun doute, a déclaré M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) que la crise des réfugiées représente une des questions les plus importantes à l’ordre du jour de l’Assemblée générale.  C’est aussi le cas, a-t-il ajouté, pour le Groupe GUAM.  Il a rappelé que c’est aussi une question de grande importance pour l’Ukraine, où l’agression de la Fédération de Russie a provoqué le déplacement de quelque 1,7 million de personnes.  Pour le représentant, plusieurs centaines de milliers de personnes vivent depuis le début des années 1990 dans un « trou noir ».  Le Gouvernement géorgien a pris des mesures « sans précédent » pour améliorer leur sort mais beaucoup reste à faire et les personnes déplacées ont besoin de l’attention de la communauté internationale.  Malgré les nombreuses tentatives de politiser le contenu de la résolution, sa nature reste « clairement humanitaire », a affirmé le représentant, qui a donc demandé à tous les États de mettre de côté leurs divergences politiques et de montrer leur engagement en faveur de la Charte et du droit international humanitaire.  L’Ukraine, qui soutient pleinement la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Géorgie comme elle soutient le projet de résolution, votera pour et appelle tous les États à faire de même.

Explications de vote

Expliquant son vote, le représentant de la Fédération de Russie a dénoncé un texte « politiquement motivé » qui ne permet en aucun cas d’améliorer la situation sur place.  Ce texte, qui ne reflète pas la situation dans la région, vise seulement à utiliser la tribune de l’Assemblée générale pour promouvoir une vision partiale et la rhétorique antirusse traditionnelle.  Pour plus de pertinence, le projet de résolution devrait être élaboré avec les représentants de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie, qui l’ont d’ailleurs demandé, a taclé le représentant.  Les auteurs de ce projet de résolution n’ont que faire de la situation des réfugiés, ils cherchent seulement à rappeler leur position à l’égard de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, ce qui montre une fois de plus que le Gouvernement de Tbilissi n’est pas prêt à reprendre des négociations sérieuses à Genève, a fait observer le représentant.  La partie géorgienne refuse depuis plusieurs années de reprendre ces discussions, a-t-il insisté, en annonçant un vote contre et en appelant les autres États à ne pas appuyer cette « initiative politisée ».

Cela n’a pas empêché le représentant du Canada de soutenir le texte et de se dire encouragé par les efforts constants de la Géorgie pour promouvoir un accès humanitaire sans entrave à toutes les personnes déplacées ou réfugiées de la région.  Le Canada, a ajouté son représentant, soutient sans réserve l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Géorgie dans ses frontières internationalement reconnues et considère comme illégaux et illégitimes les accords signés entre la Fédération de Russie et les autorités de fait des régions visées par la résolution.

Le représentant du Royaume-Uni a aussi annoncé un vote pour, face à une résolution, s’est-il expliqué, qui vise à consacrer les droits légitimes et inaliénables de toutes les personnes réfugiées et déplacées -plus de 250 000 déplacées en Géorgie– à rentrer dans la sécurité et la dignité dans leurs foyers.  Ce texte a un but uniquement humanitaire et il est essentiel que l'Assemblée générale montre en l’adoptant qu’elle n’oublie pas les personnes de ces régions.  Tant que ce retour ne sera pas assuré, il faudra faire davantage pour améliorer la situation des personnes déplacées.  Le Royaume-Uni lance un appel à la Fédération de Russie pour qu’elle mette fin à la définition des nouvelles frontières en Abkhazie et en Ossétie du Sud, qui empêchent le retour des personnes déplacées, a insisté le représentant.

Les mesures prises par la Géorgie pour améliorer les conditions de vie des personnes déplacées, ont été saluées par le représentant d’Israël.  Il a réitéré le soutien de son pays à la souveraineté et à l’intégrité territoriale du pays et argué que l’objectif de résoudre des conflits de longue durée ne peut être atteint que par le dialogue et non pas par des actions unilatérales.  Le représentant a annoncé son vote d’abstention.

Son homologue du Chili a aussi expliqué son vote d’abstention.  Il a argué que le texte pourrait avoir des incidences contreproductives sur les discussions internationales de Genève.  Il faut garantir l’impartialité de ce processus et ne pas politiser une situation humanitaire, a-t-il dit.

Il faut que les parties aux discussions internationales de Genève redoublent d’efforts, a encouragé la déléguée de l’Uruguay après son vote d’abstention.  Elle a dit l’attachement de son pays au respect du droit humanitaire et s’est déclarée préoccupée par la détérioration de la situation dans les régions précitées et consternée par l’augmentation du nombre de personnes déplacées.

Que le conflit trouve au plus vite une solution politique, s’est impatienté le représentant du Brésil.  Il faut créer les conditions favorables au retour des déplacés, a-t-il dit, en faisant une nouvelle fois un vote d’abstention « par peur de préjuger de questions sensibles qui doivent être abordées dans le cadre des négociations  de Genève ».  Le Brésil demande à chacun d’améliorer le sort des personnes déplacées en gardant à l’esprit leur droit au retour, a conclu le représentant.

Droit de réponse

En fin de séance, le représentant de la Géorgie a remercié l’ensemble des délégations qui ont voté « en faveur des principes et de l’humanité ».  Il a dit ne pas pouvoir répondre aux accusations de la Fédération de Russie, d’autant qu’il y a eu récemment un échange de correspondances.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

ECOSOC: des plans d’action et des feuilles de route technologiques sont nécessaires pour la réalisation des objectifs de développement durable

Session de 2016, Forum multipartite,
3e & 4e séances - matin & après-midi
ECOSOC/6771

ECOSOC: des plans d’action et des feuilles de route technologiques sont nécessaires pour la réalisation des objectifs de développement durable

Le Président du Conseil économique et social (ECOSOC), M. Oh Joon (République de Corée), a, cet après-midi, lors de la clôture du premier Forum annuel de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable, souligné la nécessité d’élaborer des plans d’action et des feuilles de route technologiques pour atteindre les 17 objectifs et les 169 cibles contenus dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  

M. Oh a ainsi plaidé pour le transfert des technologies et des innovations d’une manière correspondant aux ambitions des objectifs de développement durable.  Il a mis l’accent sur la nécessité de soutenir les technologies sociales qui sont cruciales pour changer les états d’esprits, les attitudes et les comportements.  Les technologies sociales sont importantes pour atteindre les laissés-pour-compte, a-t-il estimé.

Ce Forum, qui va se tenir jusqu’en 2030, s’inscrit dans le cadre du Mécanisme de facilitation de la technologie mandaté par le Programme d’action d’Addis-Abeba et le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a pour objectif de fournir un lieu pour faciliter l’interaction et l’établissement de réseaux entre les parties prenantes et les partenariats multipartites afin d’identifier et d’examiner les besoins et les lacunes technologiques, de renforcement des capacités, et aussi de faciliter le développement, le transfert et la diffusion des technologies pertinentes pour les objectifs de développement durable.

À compter d’aujourd’hui jusqu’en 2030, a affirmé le Président de l’ECOSOC, le Forum annuel de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable sera un lieu où les parties prenantes auront la possibilité d’expliquer la façon dont la technologie contribue aux objectifs de développement durable.

Le Coprésident du Forum, M. Macharia Kamau (Kenya), a pour sa part indiqué la nécessité pour le Forum de changer de configuration l’année prochaine, car beaucoup de travail restait à faire.  Il a souhaité avoir des discussions sur cette question avec l’ECOSOC.  Son homologue, M. Vaughan Turekian (États-Unis) a observé que le Forum avait su mobiliser le monde de la science, de la technologie et de l’innovation en faveur de la réalisation des objectifs de développement durable. 

Au cours de cette deuxième et dernière journée, les participants ont tenu quatre tables rondes sur des thèmes connexes au thème général du Forum dont une a été consacrée à « l’expérience de la jeunesse dans l’emploi de la science, de la technologie et de l’innovation au profit du développement durable ».  Les jeunes innovateurs ont plaidé pour leur participation au Mécanisme de facilitation des technologies parce qu’ils « sont doués dans la promotion et la vulgarisation de l’innovation auprès de leurs communautés ».  

THÈME GÉNÉRAL: COMPRENDRE LE POTENTIEL DE LA SCIENCE, LA TECHNOLOGIE ET L’INNOVATION POUR TOUS EN VUE DE REALISER LES OBJECTIFS DE DEVELOPPEMENT DURABLE

Session 5: Créer de la valeur ajoutée: comment nous y prenons-nous?

Mme ALEXIS BONNEL, Global Innovation Exchange, a pris l’exemple du secteur des panneaux solaires qui font aujourd’hui l’objet de plusieurs milliers d’innovations.  Mme Bonnel a souligné l’importance du partenariat notamment l’utilisation en commun des avantages comparatifs des uns et des autres.  Elle a annoncé que son organisme disposait de 70 millions de dollars de subventions qui sont disponibles.  Les gouvernements doivent promouvoir un environnement propice à l’innovation, a-t-elle dit. 

Mme LYNN St. AMOUR, Présidente et Directrice générale d’Internet-Matters, a parlé de l’expérience du Forum de la gouvernance d’Internet qui crée de la valeur ajoutée en faisant la promotion des principes et des concepts de l’utilisation d’Internet.  Elle a ajouté que le dialogue est important pour parvenir à des solutions aux problèmes qui peuvent surgir dans l’utilisation d’Internet.  Elle a révélé qu’il existe à l’heure actuelle plus de 60 initiatives régionales sur la gouvernance d’Internet.  Elle a réitéré l’importance de trouver des façons de combler le fossé numérique. 

Mme TOLULLAH ONI, de Next Einstein Fellow, a déclaré que pour créer de la valeur ajoutée dans le domaine de la santé publique, il faut un nouveau partenariat visant à établir un climat propice à l’innovation.  Elle a mis l’accent sur la nécessité de trouver des interactions entre les chercheurs qui devraient entrer en contact les uns avec les autres.  Elle a aussi préconisé de favoriser les échanges d’idées dans le domaine de la santé ainsi que les interactions entre les savants et les décideurs.  En outre, il faut réexaminer la « cohérence universitaire ».  Elle a également dénoncé les pratiques qui nuisent aux universités les empêchant de mener à bien leurs missions.  Mme Oni a dénoncé l’absence de « valeurs partagées » lorsqu’il s’agit de réaliser les objectifs de développement durable.  Pour pallier à cette absence, elle a proposé le recensement des priorités et la façon d’intéresser les gens à ces « valeurs partagées ».

Débat interactif

Animée par M. ROMAN MURENZI, Membre du Mécanisme de facilitation des technologies et Modérateur, cette table ronde a donné lieu à des échanges de vues sur le format que devrait prendre le Forum annuel de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable à l’avenir.

Le représentant du Brésil a dit que le Forum n’avait pas de mandat pour déterminer son propre format.  Cela reviendrait aux organes principaux des Nations Unies et aux États Membres. 

La représentante de Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a proposé des forums régionaux qui verraient la participation notamment de tous les membres de la société civile.  Une autre participante a voulu des rencontres locales qui se concentreraient notamment sur les obstacles et les difficultés dans la réalisation des objectifs de développement durable. 

La représentante de Global Network Exchange a déclaré que l’importance est la durabilité et l’accessibilité du Forum.  Ceci doit inclure des formats interactifs qui regroupent le plus grand nombre de participants.  Le représentant de l’Union internationale des télécommunications (UIT) a soutenu l’idée des petites rencontres au niveau local notamment pour se focaliser sur les objectifs de développement durable en général et en particulier sur les objectifs relatifs à la science, la technologie et à l’innovation.

La représentante du Groupe des Nations Unies pour les jeunes et les enfants a dit qu’il faut poursuivre la dynamique créée par le Forum et parvenir notamment à un engagement multiparti-prenante sur le suivi du Forum. 

Une représentante de la société civile a indiqué que ce Forum s’inscrit dans le cadre du Mécanisme de facilitation des technologies.  Une participante a suggéré qu’il faut se concentrer sur l’essentiel notamment la préservation des milieux de recherches comme les universités qui font l’expérience d’importants bouleversements à l’heure actuelle.

Le représentant permanent du Kenya et coprésident du Forum a plaidé pour que les objectifs de développement durable deviennent la réalité pour les individus et le Forum a un rôle à jouer.   

Le représentant de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a demandé pourquoi avons-nous toujours besoin d’objectifs de développement durable 20 ans après les Objectifs du Millénaire pour le développement qui étaient axés principalement sur la lutte contre la pauvreté?  Pour y répondre, il a déclaré que les gouvernements ont un rôle prépondérant à jouer à ce niveau.

Session 6: Dialogue ministériel: vers une feuille de route de cadres de décisions efficaces en matière de science, de technologie et d’innovation

Le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. WU HONGBO, animateur de la session, a invité les pays qui ne l’ont pas encore fait à établir des feuilles de route nationales pour la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, tout en promouvant la science, la technologie et l’innovation.

M. JOE MUCHERU, Secrétaire du Cabinet du Ministre kenyan de l’information, des communications et de la technologie, a déclaré que les politiques et stratégies mises en place au Kenya ont permis d’abord de mettre sur pied un cadre administratif et institutionnel adéquat pour l’essor de la science, la technologie et l’innovation.  Le pays entend ainsi se servir de la science, de la technologie et de l’innovation pour réaliser les objectifs de développement durable au Kenya.  Les principaux résultats escomptés sont notamment: éradiquer la pauvreté et la faim, améliorer les soins de santé et l’éducation, favoriser une formation adéquate et des emplois décents, promouvoir l’égalité des genres, et faciliter le développement des énergies renouvelables, entre autres.   

Mme MEGAN SMITH, responsable des technologies au Bureau des politiques relatives à la science et à la technologie de la Maison Blanche, États-Unis, a déclaré qu’il fallait faire fleurir les talents et leur permettre de s’épanouir, une option que les États-Unis mettent en œuvre en favorisant l’accès à la science, la technologie et l’innovation pour tous.  Elle a rappelé que le fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, avait appris à faire le codage informatique à l’âge de 14 ans.  Elle a annoncé la tenue dans la Silicon Valley d’un sommet mondial avec des innovateurs et inventeurs du monde entier, un événement auquel prendra part le Président américain Barack Obama.  Elle a fait observer que de nombreux innovateurs du secteur privé étaient intégrés dans le Gouvernement américain afin d’apporter leur contribution à la promotion de la science, de la technologie et de l’innovation, et que ces concepts pouvaient également permettre de réduire les inégalités sociales.

Mme LIGIA AMADA MELO DE CARDONA, Ministre de l’enseignement supérieur, de la science et de la technologie de la République dominicaine, a indiqué que son pays entendait vulgariser la science, la technologie et l’innovation dès l’école primaire.  Elle a déploré que cette volonté de démocratiser la science, la technologie et l’innovation se heurtât au déficit d’enseignants bien formés.  Le Gouvernement de la République dominicaine a créé un fonds pour financer les chercheurs, et ces derniers sont réunis chaque année afin de présenter les résultats auxquels ils sont parvenus.  Elle a également plaidé pour la mise en place de partenariats régionaux et bilatéraux dans le cadre de la science, la technologie et l’innovation, et en vue de résoudre les défis communs.  Dans l’optique de réduire la fracture numérique, a aussi indiqué Mme De Cardona, les autorités ont lancé un programme intitulé « la République numérique ».   

Le représentant de la Chine a plaidé pour le transfert des technologies en faveur des pays en développement, une option que la Chine met en œuvre dans le cadre de sa politique de coopération.  En outre, le pays entend créer une banque des technologies vertes, a-t-il annoncé.  Il a rappelé que son pays avait créé 189 zones pilotes de développement durable au cours de ces trois dernières années, ces zones devant servir de cadre pilote de mise en œuvre des objectifs de développement durable au niveau national.  Le pays, s’est-il en outre enorgueilli, a déjà formé plus de 10 000 scientifiques de plus de 100 pays en développement.

Une représentante de la société civile a salué l’importance de science, de la technologie et de l’innovation, mais elle a précisé qu’elles devaient être adaptées aux besoins des communautés locales.  Il faut les considérer comme un bien public, a-t-elle argué, avant d’inviter le Forum à œuvrer à la « socialisation des innovations ».  

Abondant dans le même sens, le représentant du Groupe de la Banque mondiale a souligné la nécessité de ne pas enfermer la science, la technologie et l’innovation dans une boîte, mais plutôt de les rendre disponibles aux États Membres les plus nécessiteux.

Le représentant du Canada a expliqué qu’il fallait une approche différente en matière d’appropriation de la science, de la technologie et de l’innovation qui doit tenir compte des besoins spécifiques des enfants et des femmes et servir la cause de la promotion de l’égalité des sexes.

Une déléguée de la société civile a estimé qu’il ne fallait pas croire que la science, la technologie et l’innovation n’étaient que bénéfiques, expliquant que des innovations pouvaient également contribuer à détruire les emplois, comme cela s’était vu aux États-Unis.  Elle a appelé à établir une feuille de route holistique pour ne pas suivre des idées qui risquent de créer des effets non escomptés sur le long terme. 

Pour le représentant de l’Organisation internationale du Travail (OIT), effectivement, on voit que des machines remplacent les ouvriers dans le souci de réduire les coûts du travail.

Le représentant de la France a de son côté salué ce débat qui est passé de la sphère théorique à un aspect très pratique et opérationnel sur les moyens de mieux partager l’innovation et les savoirs.  En 2014, 351 millions d’euros ont été consacrés à la recherche dans le cadre de l’aide au développement consenti par la France, a-t-il affirmé.  Il a également rappelé les promesses faites par son gouvernement à la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques de Paris (COP 21), notamment celle de contribuer à la promotion des énergies renouvelables en faveur de l’Afrique.   

Session 7: L’expérience de la jeunesse dans l’emploi de la science, de la technologie et de l’innovation au profit du développement durable

Mme HANNAH HERBST, de 2015 Discovery Education 3M Young Scientist Challenge Winner, a retracé son parcours de jeune écolière qui a commencé lorsqu’elle avait 11 ans et qu’elle avait voulu aider sa correspondante éthiopienne à avoir de l’électricité à la maison.  Ce parcours a été couronné par le prix du plus jeune innovateur de son pays.  L’innovation consistait à capter l’énergie des océans et à la transformer en énergie domestique.  Cette innovation lui a permis de rester en contact avec sa correspondante éthiopienne, d’être reçue à la Maison Blanche et de faire cet exposé aux Nations Unies.

M. DAVID MOININA SENGEH, cofondateur de Global Minimum Inc et de 2014 TED Fellow, a fait l’historique de son initiative aidant les jeunes à avoir les possibilités et les plateformes pour développer leur créativité dans le monde, notamment en Afrique.  Pour cela, a-t-il indiqué, il faut réfléchir à la façon de développer les idées au niveau local.  Il faut aussi tenir compte du fait que les jeunes africains ont compris l’importance d’Internet.  Des jeunes ont inventé une technologie palliative à l’absence de réseau Internet en Sierra Leone.  Cette innovation permet de faire de l’économie et de sauver des vies.  Qui plus est, de nombreux jeunes aident actuellement à apprendre d’autres jeunes à relever les défis du développement.  

Mme GUSTI AYU FRANSISKA DEWI, cofondatrice du Réseau des jeunes de l’Asie-Pacifique pour les changements climatiques et Coordonnatrice principale de Rainforest Alliance, a parlé de l’importance de l’autonomisation des jeunes à apprendre la science et l’innovation.  Cette autonomisation devrait mobiliser les jeunes qui n’ont pas les moyens à résoudre les problèmes de la vie quotidienne.  Elle a ajouté que son organisation aidait aussi les jeunes à participer notamment à la lutte contre les impacts du climatique.  Cette aide consiste à apprendre les méthodes de collecte de données et leur utilisation.  Elle a souligné le fait que les jeunes sont doués pour faire la promotion de leurs innovations.

Débat interactif

Cette table ronde, animée par Mme Elenita Dano, Directrice pour l’Asie du Groupe d’action sur l’érosion, la technologie et la concentration, fut une occasion de parler des défis, des obstacles ainsi que des solutions à la participation des jeunes filles, des adolescentes et des femmes dans la recherche et l’innovation. 

À cette question, une jeune étudiante de l’Université de Pennsylvanie a proposé un cours obligatoire sur la durabilité dès l’école primaire, la réduction des coûts des matériels de recherche et des solutions visant à plus de participation de chaque enfant à l’innovation.  La représentante de Global Lab Network a indiqué que son organisation réunit « virtuellement » des personnes âgées et des jeunes pour faire des partages et des échanges scientifiques sur les objectifs de développement durable.

Mme Hannah Herbst a répondu que les défis n’occultent pas les avantages à être des jeunes innovateurs.  Être adolescente donne la possibilité de faire de la science car ce n’est pas un domaine réservé.  Elle a préconisé que les jeunes puissent participer davantage dans les programmes scientifiques y compris les petits écoliers.  Pour M. David M. Sengeh, le principal obstacle pour les innovateurs dans les pays en développement est le système éducatif qui vise seulement à apprendre à lire et à écrire.  Il faut un système qui encourage les enfants à trouver des solutions aux problèmes quotidiens et à développer leurs talents et leur créativité.

S’agissant de l’accès des femmes à l’innovation, Mme Gusti A. F. Dewi a souligné l’importance d’écouter et de savoir ce dont elles ont besoin.  Elle a ajouté qu’il faut tenir compte de la situation locale, de la réalité sociale et de l’utilité des technologies pour les femmes.  Elle a déclaré que les technologies et l’innovation devraient réunir les êtres humains et ne pas créer de problèmes entre eux.

Le représentant du Groupe des enfants et des jeunes a mis l’accent sur l’importance de l’inclusion des jeunes dans la recherche et le développement.  Il faut élargir l’espace qu’occupent les jeunes dans ce domaine. 

Interrogés sur la participation des jeunes au Mécanisme de facilitation des technologies, Mme Gusti Dewi a indiqué que l’aspect le plus important était de discuter de la façon de mieux utiliser la technologie y compris le savoir-faire autochtone en adoptant une approche appliquée par les communautés locales.  Les jeunes peuvent participer à ce Mécanisme parce qu’ils utilisent un langage plus facilement compréhensible par les membres de la communauté. 

Mme Hannah Herbst a dit que les salles de classe devaient être le premier lieu de l’innovation car les enfants y passent beaucoup de leur temps.  Il faut exposer les enfants à leur vrai environnement.  M. David M. Sengeh a insisté sur le fait de traiter de la même façon les garçons et les filles.  On conditionne les filles à être des princesses et les garçons des ingénieurs ou des pilotes.  Mais être princesse n’est pas un métier.  Il faut faire de la technologie un terrain de jeu pour les gerçons et pour les filles de la même manière.  La seule façon de changer est de persister sur cette voie.  Si elles ne réussissent pas, il faut qu’elles soient encouragées à continuer à atteindre leurs objectifs.  

Session 8: La voie à suivre: valeur ajoutée par le biais du forum

M. FONSECO FILHO, Vice-Président de la Commission de la science et de la technique au service du développement des Nations Unies, a expliqué que la Commission était un organe subsidiaire du Conseil économique et social.  Elle est chargée d’examiner, entre autres, et depuis deux ans, les technologies de l’information et des communications (TIC) en tant que technologies « omniprésentes » ayant un impact mondial.  

À sa sixième session, la Commission se penchera aussi sur les activités relatives au transfert et à la diffusion des technologies et au renforcement des capacités dans le domaine des TIC qui peuvent contribuer à améliorer la compétitivité des pays en développement et des pays en transition.  M. Filho a indiqué que le défi pour la Commission était maintenant d’adapter son programme de travail afin de le rendre complémentaire au mandat du Forum.

Mme HEIDE HACKMANN, Coprésidente du Groupe des 10 experts chargé d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies, a ensuite plaidé pour plus de collaboration afin que la science, la technologie et l’innovation deviennent des biens publics.  Les 10 membres du Groupe viennent de la société civile, du secteur privé et de la communauté scientifique, et ils ont pour tâche principale de conseiller l’équipe de travail interinstitutions sur la science, la technologie et l’innovation. 

Mme Hackmann a déploré le fait que les spécialistes des technologies et les scientifiques ne soient pas toujours enclins à collaborer, et que les politiques nationales des sciences sont souvent orientées vers des besoins propres au pays même qui les définit.  Il y a donc un impératif de collaboration dans un environnement de concurrence qui fait que le présent Forum apparaît comme une plateforme d’échanges.

Dans ce contexte, elle a souhaité que le Forum ait désormais un programme de travail annuel et ne fût pas seulement une grand-messe de deux jours où chacun vient dire ce que l’on pense.  Tous les objectifs de développement durable ne doivent pas et ne peuvent pas recevoir la même attention, a-t-elle expliqué, appelant ainsi à identifier les objectifs les plus délaissés et à y accorder plus d’attention.  Elle a également reconnu que le Groupe des 10 experts chargé d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies ne peut tout faire sans l’apport d’autres parties prenantes.

Le représentant du Japon a indiqué que les systèmes de recherche traditionnels doivent être tournés désormais vers l’innovation et la recherche des solutions aux défis du monde actuel.  Cette suggestion a fait dire à une déléguée du monde universitaire que toutes les voies menant à l’innovation méritent d’être prises en compte, y compris celle des peuples autochtones.

Le représentant du Groupe de la Banque mondiale a souhaité que le secteur financier soit davantage impliqué au cours de prochains forums, tandis que M. Kamau, l’un des Présidents du Forum, a estimé qu’il serait aussi opportun d’inviter plus de ministres pour les années prochaines, afin d’impliquer les décideurs dans ces échanges de première importance pour la réalisation des objectifs de développement durable.

Remarques de clôture

M. MACHARIA KAMAU (Kenya), Coprésident du premier Forum, a estimé que nous avons maintenant la responsabilité de faire en sorte que la science, la technologie et l’innovation aient un impact sur la réalisation des objectifs de développement durable.  Ce défi est la question à laquelle il faut répondre en cherchant ce qui peut être fait rapidement pour que les laissés-pour-compte soient promus le plus rapidement possible. 

M. Kamau a insisté sur le fait que la lutte contre la pauvreté resterait le point central et que la science, la technologie et l’innovation ont un rôle important à jouer dans ce domaine.  Ce premier Forum a reconnu que beaucoup de travail restait à faire dans les prochains mois.  C’est pourquoi, a indiqué M. Kamau, la configuration du Forum pourrait changer l’année prochaine.  « Nous souhaitons avoir des possibilités de manifestations entre les sessions même au plan virtuel », a-t-il dit.  Il a souligné l’importance de dialoguer avec l’ECOSOC sur cette question.  

M. VAUGHAN TUREKIAN (États-Unis), Coprésident du premier Forum, a ajouté que le Forum avait su mobiliser le monde de la science, de la technologie et de l’innovation pour réaliser les objectifs de développement durable.  Des nouvelles découvertes ont été faites au cours de ce Forum qui ont offert un environnement favorable afin que la science, la technologie et l’innovation puissent apporter leur contribution à la réalisation des objectifs de développement durable. 

Dans ses remarques de clôture, le Président de l’ECOSOC, M. OH JOON (République de Corée), a appelé à renforcer les efforts en vue de vulgariser la science, la technologie et l’innovation dans chaque pays, et de créer des sociétés de connaissance innovantes qui utilisent la science pour éclairer les politiques.  Il a aussi plaidé pour le transfert des technologies et des innovations d’une manière correspondant aux ambitions des objectifs de développement durable.  Il a en outre fait observer que des plans d’actions sociétales et les feuilles de route technologiques étaient nécessaires afin de soutenir la réalisation des objectifs de développement durable. 

M. Oh a mis l’accent sur la nécessité pour la communauté internationale de faire des efforts majeurs pour développer et déployer des technologies lourdes de pointe, mais également pour soutenir des technologies sociales qui sont cruciales pour changer les états d’esprits, les attitudes et les comportements.  Il a précisé que les technologies sociales étaient également importantes pour atteindre les laissés pour compte.

Le Président de l’ECOSOC a poursuivi en espérant que les futurs forums qui prendront le relais s’appuieraient sur les réalisations de cette première édition, ajoutant que des options différentes étaient à explorer, par exemple l’organisation d’événements et d’activités entre diverses sessions ou un programme de travail annuel. 

Il a assuré que le vrai travail commençait maintenant, afin de rendre le Mécanisme de facilitation de la technologie véritablement opérationnel et utile pour tous.  Il a promis qu’à compter d’aujourd’hui jusqu’en 2030, le Forum annuel de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable serait un lieu où les parties prenantes auraient la possibilité d’expliquer la façon dont la technologie contribue aux objectifs de développement durable.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le Chef de la Mission de l’ONU en Libye présente une stratégie en six points pour sortir le pays de sa crise politique et sécuritaire

7706e séance – après-midi
CS/12390

Conseil de sécurité: le Chef de la Mission de l’ONU en Libye présente une stratégie en six points pour sortir le pays de sa crise politique et sécuritaire

Le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) a proposé, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, une stratégie en six points pour sortir la Libye de sa grave crise politique et sécuritaire.  M. Martin Kobler a cité, entre autres, l’approbation par la Chambre libyenne des représentants du Gouvernement d’entente nationale et la création d’une architecture sécuritaire intérimaire inclusive face à Daech, « l’ennemi de tous les Libyens ».

Le Représentant de la Libye, M. Ibrahim Dabbashi, a reproché au Représentant spécial d’avoir inclus dans son rapport* des « termes irréalistes » qui peuvent compliquer la situation politique.  Le Président du Comité créé en application de la résolution 1970 (2011) du Conseil de sécurité, M. Ramlan Bin Ibrahim, a présenté le dernier rapport de son Comité.

L’Accord politique libyen a été signé il y a près de six mois, a rappelé le Représentant spécial du Secrétaire général, M. Martin Kobler.  Signé en effet le 17 décembre à Skhirat au Maroc, l’Accord a été approuvé le 25 janvier par la Chambre des représentants.  « À ce moment critique de la transition, les faits doivent être reconnus pour ce qu’ils sont: aujourd’hui, la Libye n’a toujours pas de gouvernement approuvé officiellement », a tranché le Représentant spécial.

M. Martin Kobler a expliqué que la mise en œuvre de l’Accord était retardée parce que certaines parties n’ont pas honoré leurs engagements.  La Chambre des représentants doit encore approuver le Gouvernement d’entente nationale.  Or, la détérioration rapide de la situation humanitaire et l’escalade des tensions militaires liées à la lutte contre Daech exigent « audace, détermination et mesures décisives », a dit M. Kobler.  Le nombre de personnes déplacées en Libye est de 435 000 personnes, tandis que 6 000 familles ont dû fuir la ville de Syrte en raison des opérations contre Daech.  Quelque 1 100 migrants ont trouvé la mort en Méditerranée pour le seul mois de mai.

M. Kobler a donc proposé une stratégie en six points.  Premièrement, l’Accord politique libyen doit demeurer le seul cadre légitime de la transition jusqu’à l’adoption d’une nouvelle constitution.  En second lieu, la Chambre des représentants doit rester l’institution qui approuve et investit le Gouvernement d’entente nationale.  Après deux tentatives infructueuses en février et en avril, il est grand temps que le Président de la Chambre assume ses responsabilités et convoque une session parlementaire, dans un climat débarrassé des menaces et des intimidations, pour voter sur le Gouvernement d’entente nationale proposé, a commenté le Représentant spécial.

Troisièmement, il est « vital » que le Conseil de la présidence travaille avec son effectif complet de neuf membres.  « J’encourage les membres qui n’assistent pas aux réunions à le faire », a dit M. Kobler.  Au titre de son quatrième point, il a exhorté le Conseil de la présidence à agir rapidement pour répondre aux besoins des Libyens, ajoutant que les Nations Unies sont prêtes à lui apporter leur concours.

Cinquièmement, le Conseil de la présidence, en sa qualité de Commandant suprême de l’Armée libyenne unie, doit être le seul récipiendaire légitime de l’aide internationale dans le domaine de la sécurité.  Enfin, il faut une « architecture sécuritaire intérimaire inclusive » pour éviter les hostilités entre les différents acteurs libyens impliqués dans la lutte contre Daech.

Le Chef de la MANUL, qui a insisté sur les progrès considérables de la lutte contre Daech ces dernières semaines, a en effet mis en garde contre les risques d’affrontements directs entre les différentes forces en raison d’un manque de coordination.  La possibilité d’une nouvelle escalade militaire doit inquiéter tout le monde, a-t-il prévenu.

M. Kobler a jugé « cruciale » la décision du Conseil de la présidence d’établir un centre d’opérations conjoint contre Daech.  Il a aussi jugé « essentiel » que la MANUL rétablisse sa présence en Libye afin de répondre aux besoins les plus pressants des Libyens.  Un point de vue partagé par le représentant de la Libye, M. Ibrahim Dabbashi, qui a espéré que la Mission reviendra le plus tôt possible à Tripoli pour faire progresser la mise en œuvre de l’Accord et l’installation des institutions de l’État.

Il a jugé aussi très positive l’unanimité internationale en faveur du soutien au nouveau Gouvernement d’entente nationale.  Toutefois, a-t-il ajouté, c’est encore insuffisant car le succès passe par la pleine mise en œuvre de l’Accord, avec notamment la mise en place d’une force capable d’assurer l’ordre et la sécurité dans la capitale.

Le représentant a critiqué les rapports du Secrétariat, estimant qu’ils « manquent de professionnalisme ».  Il a ainsi demandé que l’on s’abstienne de « termes irréalistes », affirmant que cela ne peut que compliquer la situation politique en Libye.  Ainsi, il a jugé prématuré de parler à ce stade de monopole intégral de l’État sur l’usage de la force, comme le fait le rapport du Secrétaire général.  Pour le représentant, la MANUL est la première concernée par l’application « honnête » de l’Accord politique.

Enfin, il a fait observer qu’il n’y avait à ce stade aucun plan concernant les mesures à prendre après la libération de Syrte, annoncée pour la prochaine quinzaine.  Nous ne voulons pas voir la ville tomber dans les mains d’Al-Qaida après l’avoir libérée de celles de Daech, a-t-il déclaré.

Le Président du Comité créé en application de la résolution 1970 (2011) du Conseil de sécurité -Comité de l’application de l’embargo sur les armes, de l’interdiction de voyager et du gel des avoirs- a présenté le rapport couvrant la période allant du 3 mars au 6 juin.  M. Ramlan Bin Ibrahim a décrit la première application de la résolution 2146 (2014) sur les exportations illicites de pétrole brut, en expliquant qu’à la demande de la Libye, le Comité avait, le 27 avril, ajouté sur sa liste un navire qui tentait une exportation illicite.  Avant de l’inscrire, le Comité a écrit à l’État de destination, Malte, et à l’État du pavillon, l’Inde, qui ont pleinement coopéré, a-t-il affirmé.

 

*     S/2016/452

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: l’Union européenne renouvelle sa foi dans le multilatéralisme, élément clef de sa nouvelle stratégie sur la politique étrangère et la sécurité

7705e séance – matin
CS/12389

Conseil de sécurité: l’Union européenne renouvelle sa foi dans le multilatéralisme, élément clef de sa nouvelle stratégie sur la politique étrangère et la sécurité

La Haut-Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Federica Mogherini, a réaffirmé ce matin l’engagement de l’Union européenne en faveur du système multilatéral international dont les Nations Unies constituent le cœur.  À l’occasion d’une réunion du Conseil de sécurité sur « la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales », Mme Mogherini a annoncé la présentation, dans les prochaines semaines, d’une nouvelle stratégie mondiale sur la politique étrangère et la sécurité dont le multilatéralisme sera un des éléments clefs.

« L’unilatéralisme n’est pas payant », a affirmé Mme Mogherini, pour qui il ne s’agit pas, face aux multiples défis auxquels le monde est confronté, d’avoir des policiers planétaires ou des pays qui font cavalier seul.  Si le but est de mettre fin aux crises et de prévenir l’explosion d’autres, notre seul espoir est de vraiment travailler en tant que « nations unies ».  Plus la tâche est difficile, plus cette coopération doit être forte, a insisté la Haut-Représentante.  Le multilatéralisme sera d’ailleurs un des éléments clefs de la nouvelle stratégie mondiale en matière de politique étrangère et de sécurité que l’Union européenne compte présenter dans quelques semaines, a-t-elle annoncé.

En passant en revue les nombreuses crises mondiales qui affectent d’une manière ou d’une autre l’Union européenne, Mme Mogherini s’est félicitée de l’excellente coopération avec les Nations Unies.  Elle a rappelé le rôle de l’Union européenne dans chacune d’elle et mis en avant sa convergence de vues avec l’ONU.  Ainsi, alors que le Quatuor, relancé l’an dernier par l’Union européenne, s’apprête à rendre son rapport sur l’état du conflit israélo-palestinien, la Haut-Représentante a estimé qu’il ne peut y avoir de statu quo: « si la situation actuelle ne s’améliore pas, elle s’aggravera », a-t-elle mis en garde, appelant à « ne pas attendre la prochaine guerre ouverte israélo-palestinienne, qui arrivera si les parties ne reviennent pas maintenant à des négociations de fond ».   

De même, Mme Mogherini a rappelé le rôle des pays européens dans l’accord conjoint sur le nucléaire iranien, leur action humanitaire en Syrie où l’Union européenne et ses États membres financent les deux tiers des opérations de secours.  Elle a aussi parlé des initiatives de l’Union européenne en Libye, dans de nombreux États africains -y compris au sein des opérations de maintien de la paix des Nations Unies- en Ukraine ou dans les Balkans occidentaux, mais aussi en Colombie, en Afghanistan ou au Myanmar: l’Union européenne est perçue comme un acteur mondial, a rappelé la Haut-Représentante.

Mme Mogherini a cité la question des migrants et des réfugiés comme exemple à la fois de la coopération entre l’Union européenne et les Nations Unies et de l’action à long terme de l’Union européenne.  Elle a ainsi remercié le Conseil de sécurité d’avoir autorisé au printemps 2015 l’opération européenne Sophia contre les réseaux de trafiquants en Méditerranée, tout en lui demandant de soutenir avec la même unanimité son renouvèlement pour un an.  Elle a annoncé qu’elle présenterait demain devant la Commission européenne un plan pour un nouveau « partenariat sur la migration » avec les États africains.

Lors du débat, les pays de l’Union européenne, membres du Conseil, ont abondé dans le sens de Mme Mogherini.  La France a mis l’accent sur le rôle de partenaire « central » du Conseil de sécurité que joue l’Union dans la recherche de solutions durables aux grandes crises.  Le Royaume-Uni a insisté sur les valeurs de paix et de développement que partagent les Nations Unies et l’Union.  L’Espagne a rappelé que l’opération Sophia avait permis de sauver près de 15 000 vies en une année.  Ces pays ont rappelé que l’Union européenne est la première pourvoyeuse d’aide humanitaire aux réfugiés dans le monde et que ses membres participent à plusieurs opérations de maintien de la paix tout en apportant un soutien à d’autres, ainsi qu’à diverses missions politiques.  

Tous les autres membres du Conseil ont aussi salué le rôle de l’Union européenne.  L’Angola a noté que la coopération tripartite entre l’Union européenne, l’ONU et l’Union africaine représentait un élément clef de la stabilité en Afrique.  Le Venezuela a jugé « remarquable » l’action de l’Union et salué en particulier ses efforts au sein du Groupe P5+1, qui ont permis la signature de l’accord sur le dossier nucléaire iranien.  L’Uruguay a rappelé que la construction européenne dont l’Union européenne est l’aboutissement avait permis de restaurer la paix entre les pays de l’Union européenne et était, à ce titre, « un véritable modèle ».  Pour les États-Unis, l’Union européenne montre comment on peut utiliser les différents outils diplomatiques et militaires pour prévenir des crises ou intervenir quand elles éclatent, en faisant pression de manière efficace sur des États qui menacent la paix et la sécurité internationales, citant eux aussi l’accord sur le nucléaire iranien ainsi que les Accords de Minsk sur la crise ukrainienne, ainsi que leur suivi.

L’Ukraine, pour sa part, a dit apprécier la position « inflexible » de l’Union européenne et sa politique constante visant à appliquer toute la gamme des outils politico-diplomatiques conjuguée à des mesures économiques et commerciales adéquates pour restaurer la justice et corriger les torts que lui cause la Fédération de Russie.  Cette dernière a plutôt espéré que Bruxelles veillera à ce que l’Ukraine honore ses engagements dans le cadre des Accords de Minsk, dont seule l’application permettra de régler le conflit au Donbass.

Malgré « la crise » de ses relations avec l’Union européenne, la Fédération de Russie a insisté sur la contribution de cette dernière au règlement des défis mondiaux.  Elle a dit compter que l’Union européenne participera de manière constructive aux efforts internationaux visant un règlement politique en Syrie et restera un canal ouvert pour le dialogue avec les autorités syriennes. ».  Il a reproché aux partenaires européens de défendre trop souvent des approches « unilatérales et destructives », de manipuler les décisions du Groupe international de soutien et de faire de la propagande plutôt que d’effectuer un travail « conjoint, patient et précis ».  Il faut comprendre qu’on n’obtiendra pas l’effet souhaité en faisant pression sur Damas, a-t-il tranché.  La Fédération de Russie s’est aussi demandée s’il est sage d’élargir le mandat de l’opération Sophia pour y inclure le contrôle des flux d’armes illégaux vers la Libye, comme le souhaite l’Union européenne. 

Enfin, la Chine a dit appuyer l’Union européenne dans la poursuite de son rôle constructif avec les Nations Unies et le Conseil de sécurité, sous réserve toutefois que soient respectés les principes de règlement pacifique des différends et de respect de l’indépendance et de l’intégrité territoriale des États. 

COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUS-RÉGIONALES AUX FINS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES - UNION EUROPÉENNE

Déclarations

Mme FEDERICA MOGHERINI, Haut-Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a d’abord rappelé l’importance des échanges entre l’Union européenne et le système des Nations Unies dans son ensemble, et notamment avec le Conseil de sécurité, ajoutant que c’était la quatrième fois qu’elle venait s’adresser au Conseil de sécurité.  C’est sans doute la seule façon pour les Européens de procéder dans cette période difficile, dont un Moyen-Orient en ébullition, le creusement des inégalités dans le monde, les questions liées aux changements climatiques et les mouvements de populations dans  le monde.  Ces questions, a rappelé Mme Mogherini, concernent le monde entier.

Il est toutefois vrai que l’Europe est confrontée à un grand nombre de défis, a-t-elle avoué.  Elle a rappelé qu’il y a un an, elle avait dit que l’Union européenne croyait dans les Nations Unies et dans le multilatéralisme.  Aujourd’hui, a-t-elle dit, je peux ajouter que le multilatéralisme sera un des éléments clefs de la nouvelle stratégie mondiale en matière de politique étrangère et de sécurité, que l’Union européenne compte présenter dans quelques semaines.  Mme Mogherini, qui s’est félicitée de l’excellente coopération de l’Union européenne avec les Nations Unies, a rappelé que « l’unilatéralisme n’est pas payant ».  Il ne s’agit pas d’avoir des policiers du monde ou des pays qui font cavalier seul.  Il s’agit de mettre fin aux crises et de prévenir l’explosion d’autres, notre seul espoir étant de vraiment travailler en tant que « nations unies ».  Plus la tâche est difficile, plus cette coopération doit être forte, a-t-elle insisté.

La Haut-Représentante a ainsi mis l’accent sur « un conflit ancien, vieux de près de huit décennies ».  N’attendons pas la prochaine guerre ouverte israélo-palestinienne, qui arrivera si les parties ne reviennent pas maintenant à des négociations sensées.  Les autres événements dans la région rendent le problème encore plus pressant, a-t-elle ajouté, en présentant ensuite les différents avantages qu’aurait un règlement du conflit israélo-palestinien pour les autres crises du Moyen-Orient.  La perspective de la solution à deux États s’estompe et avec elle la perspective de paix, a encore affirmé Mme Mogherini, qui a rappelé notamment que la poursuite de la politique de colonisation israélienne érodait systématiquement les perspectives de la solution à deux États viables, de même que les désaccords entre les parties palestiniennes.  Il n’y a actuellement aucun processus de paix, s’est alarmée Mme Mogherini, pour qui il ne peut y avoir de statu quo: « si la situation actuelle ne s’améliore pas, elle s’aggravera ».  La Haut-Représentante a remercié les États-Unis et la Fédération de Russie pour leur travail et a rappelé que le Quatuor présentera prochainement son rapport.  Il faut susciter la confiance entre les parties, car l’impasse n’est viable pour personne, a encore déclaré Mme Mogherini.

Il faut identifier les difficultés mais il faut aussi reconnaitre les signes d’espoir quand ils apparaissent, a-t-elle poursuivi, en rappelant qu’en juillet dernier, le Conseil de sécurité avait fait sien l’accord obtenu sur le programme nucléaire iranien, qui est aujourd’hui mis en application.  Elle a rappelé que, de même, les différentes parties au conflit syrien se sont retrouvées en novembre dernier à Vienne autour d’une même table.  Reconnaissant tout de même que le processus syrien est très fragile, elle a rendu hommage au travail remarquable de l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura, tout en jugeant « vital » que l’aide humanitaire atteigne davantage de zones.  Il n’y a pas d’autres solutions pour rétablir la paix en Syrie et vaincre Daech, a-t-elle ajouté, en rappelant que l’Union européenne avait rouvert un bureau humanitaire à Damas et était devenue le premier donateur d’assistance humanitaire à ce pays.  Les divisions au sein de la communauté internationale sur le dossier syrien ne peuvent profiter qu’à Daech et contribuer au chaos.

De même, l’Iraq doit rester au premier plan du programme de travail de la communauté internationale, a estimé Mme Mogherini, qui s’est félicitée de la libération de zones autrefois contrôlés par Daech, tout en ajoutant que cette libération doit être rapidement suivie de l’accès des populations aux services sociaux de base.  L’Union européenne reste attachée à l’intégrité et à la souveraineté territoriale de l’Iraq, a-t-elle rappelé.

Mme Mogherini a également salué le travail de l’Envoyé spécial pour la Libye et mis l’accent sur les efforts de l’Union européenne en faveur de ce pays, notamment la reprise de son soutien au Gouvernement d’union nationale et le début de la mobilisation d’un train de mesures de 100 millions d’euros pour appuyer le redressement du pays.  Elle a cité le projet sur la formation des gardes-côtes libyens qui permettra aux Libyens de sauver des vies en mer, de démanteler les organisations criminelles de la traite des êtres humains et de contrôler efficacement les eaux territoriales.  Elle a aussi remercié le Conseil de sécurité d’avoir autorisé au printemps 2015 l’opération navale Sophia de l’Union européenne contre les réseaux de trafiquants.  Rappelant que l’Union européenne avait décidé le 23 mai dernier de prolonger d’un an cette opération, elle a demandé au Conseil de sécurité d’entériner cette décision, qui permettra d’appliquer l’embargo sur les armes imposé par les Nations Unies en haute mer au large de la Lybie.

Mme Mogherini s’est également attachée à d’autres crises, en rappelant notamment que la situation au Yémen mérite toute l’attention de la communauté internationale et la priorité absolue que constitue pour l’Union européenne la situation dans l’est de l’Ukraine.  Elle a salué à cet égard le travail de cartographie des besoins humanitaires et de coordination de l’assistance effectué par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).  L’Union européenne travaille en outre en étroite coopération avec l’Ukraine pour l’aider à mener les réformes dont elle a besoin, par exemple en matière judiciaire, a poursuivi Mme Mogherini. 

La Haut-Représentante a aussi rappelé que la coopération entre les Nations Unies et l’Union européenne allaient bien au-delà des marges du continent.  L’Union européenne est perçue comme un acteur mondial, a-t-elle rappelé, en citant son travail dans le processus de paix en Colombie et en Afghanistan.  Sur ces différents dossiers, l’unité du Conseil de sécurité est l’atout le plus puissant que la communauté internationale peut avoir, a insisté Mme Mogherini, qui a également suggéré une action coordonnée de l’Union européenne et des Nations Unies au Burundi, rappelé le soutien de l’Union européenne à la Mission de l’ONU en République démocratique du Congo (RDC) et souligné la nécessité de faire davantage en matière de prévention des conflits. 

Mme Mogherini a également mis en avant l’action de l’Union europééenne à long terme.  Elle a rappelé la convergence de vue entre l’Union européenne et les Nations Unies lors de l’adoption des objectifs de développement durable, en particulier sur le fait qu’il ne peut y avoir de développement sans sécurité ni de sécurité sans développement.  Elle a cité l’Accord de Paris sur le climat comme un résultat « historique » de la coopération entre l’Union européenne et les Nations Unies.  Affirmant que ces deux succès sont un moyen de dépasser le concept de sécurité à court terme, la Haut-Représentante a déclaré que la même approche s’appliquait désormais à la réponse de l’Union européenne à la crise des réfugiés et à la question des migrants. 

Au-delà des opérations FRONTEX et Sophia, la Haut-Représentante a annoncé qu’elle présentera demain à la Commission européenne un plan pour un nouveau « Partenariat sur la migration » avec les États africains.  La réponse que l’Union européenne apporte à cette crise est la mesure de son humanité, a-t-elle affirmé, avant de citer plusieurs situations humanitaires « parfois oubliées » que l’Union européenne suit de près en partenariat avec les agences des Nations Unies, comme en Éthiopie ou au Kenya.

La Haut-Représentante a aussi mis l’accent sur les grands partenariats régionaux dans lesquels l’Union européenne investit, consciente que les grands défis d’aujourd’hui sont tous transfrontières et que personne ne peut les affronter seul.  Elle a parlé notamment de l’Union africaine, mais aussi l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) et de la Ligue des pays arabes.  Parfois, il faut renforcer les organisations existantes, parfois faire preuve de créativité et créer de nouveaux formats, a-t-elle constaté.  Mais, par-delà les échecs, les changements institutionnels, la paix et la sécurité dans le monde  n’ont de chance que si nos nations et nos régions travaillent dans l’unité.  C’est pourquoi l’Union européenne reviendra toujours vers les Nations Unies, le cœur du système multilatéral international, a conclu la Haut-Représentante.

M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a cité la Haut-Représentante selon laquelle personne ne peut seul porter le monde sur ses épaules.  Malgré « la crise » qui se poursuit dans les relations entre la Fédération de Russie et l’Union européenne, la coopération ne s’arrête pas pour autant, notamment dans le contexte de l’ONU.  Le représentant a insisté sur la contribution de cette dernière au règlement des défis mondiaux, tels que le terrorisme, l’extrémisme religieux, la piraterie, le trafic de drogues, la criminalité transnationale organisée et la migration clandestine.  Il a dit compter que l’Union européenne participera de manière constructive aux efforts internationaux visant un règlement politique en Syrie sur la base de paramètres concertés qui doivent être mis en œuvre pleinement et sans condition préalable.  La fin du conflit dans ce pays serait une base « sérieuse » pour la détente au Moyen-Orient.  Plusieurs États de l’Union européenne faisant partie du Groupe international de soutien à la Syrie, le représentant a dit attendre d’eux un travail « impartial et honnête » qui enrichisse nos efforts collectifs.  Il a jugé important que l’Union européenne reste un canal ouvert pour le dialogue avec les autorités syriennes. 

Il s’est réjoui de la rencontre entre la Haut-Représentante et le principal négociateur du Gouvernement syrien, en marge des entretiens du mois de mars à Genève.  De tels contacts sont « absolument indispensables ».  Cependant, la réalité et les discussions du Conseil de sécurité montrent que les partenaires européens se permettent souvent de défendre des approches « unilatérales et destructives », de manipuler les décisions du Groupe international d’appui et de faire de la propagande plutôt que d’effectuer un travail « conjoint, patient et précis ».  Il faut comprendre, a poursuivi le représentant, qu’on n’obtiendra pas l’effet souhaité en faisant pression sur Damas. 

Toutes les parties doivent faire montre de souplesse, a-t-il insisté, en ajoutant que le principal obstacle d’un règlement politique est la position du Haut Comité des négociations: les représentants de l’aile radicale refusent tout compromis et restent attachés au renversement des autorités en place.  À Bruxelles, on est arrivé à la conclusion que ce sont précisément « ces Messieurs » qui sont les seuls à exprimer l’avis de l’opposition syrienne, ce qui est à tout le moins « une exagération ».  Il est important de veiller au caractère représentatif de l’opposition syrienne et donc d’y inclure les Kurdes du Parti de l’union démocratique, ce à quoi s’oppose ouvertement la Turquie.  Le représentant a dit attendre des partenaires européens d’user de leur influence pour régler ce problème et d’autres problèmes graves liés à la « politique égoïste et destructrice » d’Ankara.  Il faut obliger la Turquie à cesser d’attenter à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Syrie, à fermer les canaux qui alimentent les terroristes et à fermer enfin la frontière avec la Syrie.  Il a noté l’effet néfaste des sanctions unilatérales de l’Union européenne contre Damas. 

Après avoir également douté de l’efficacité des sanctions en Libye, le représentant a dit avoir appuyé la décision du Conseil de sécurité d’autoriser l’opération Sophia mais s’est demandé à quel point il est sage d’élargir le mandat pour y inclure le contrôle des flux d’armes illégaux.  S’agissant de l’Ukraine, il a regretté le rôle néfaste de Bruxelles qui a imposé l’accord d’association et encouragé ceux qui sont allés jusqu’à prendre le pouvoir par la force.  Le représentant a espéré que Bruxelles analysera cette expérience « malheureuse » et prendra des mesures constructives.  La tâche essentielle est de veiller à la mise en œuvre des Accords de Minsk.  L’application de ces Accords est la seule manière de régler le conflit au Donbass et les problèmes associés.

Le représentant a dit compter que l’Union européenne s’efforcera de faire en sorte que Kiev honore ses engagements en vertu des Accords de Minsk.  Il a rappelé à Bruxelles la situation grave en Ukraine, en particulier dans le domaine de l’état de droit, dont le manque de progrès dans les enquêtes sur les évènements de la place Maidan, de Mariopol et d’Odessa.  L’extension des zones de tensions dans le monde et l’apparition de nouveaux défis et menaces constituent en soi un argument indéniable en faveur du renforcement de la coopération internationale.  La Fédération de Russie souhaite une coopération pleine et orientée vers des objectifs stratégiques communs avec l’Union européenne mais cela doit se faire sur une base d’égalité, en prenant en compte les intérêts et les préoccupations de chacun, a conclu le représentant.

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a dit que les efforts internationaux devaient être intensifiés pour raviver le processus de paix au Moyen-Orient.  Cela ne pourra se faire tant qu’Israël continuera d’affaiblir les Palestiniens.  Le représentant a espéré que la Conférence internationale sur le Moyen-Orient qui s’est tenue à Paris sera une étape importante vers la reprise des négociations.  En Libye, la création d’un Gouvernement d’union nationale n’est qu’une étape, a-t-il dit.  Il faut désormais renforcer les structures de l’État et obtenir de la communauté internationale un appui à la mise en place d’une armée libyenne capable de protéger tous les Libyens.  Le représentant a rappelé que l’effondrement de l’État a permis à des groupes terroristes de renforcer leur présence.  Il a appuyé la création par l’Union européenne d’un centre de sensibilisation aux défis de l’extrémisme.  Il a conclu en voulant que l’on tienne compte de la dimension humaine de la crise des réfugiés et que l’on trouve des solutions pérennes à cette crise.  Le représentant a aussi exhorté l’Union européenne de poursuivre son aide à la Somalie.

M. GORGUI CISS (Sénégal) a rappelé le rôle primordial de la coopération des Nations Unies avec les organisations régionales, conformément au Chapitre VIII de la Charte.  Le Sénégal met l’accent sur un multilatéralisme efficace centré sur les Nations Unies, ce qui se transcrit par la présence de troupes sénégalaises dans de nombreuses missions des Nations Unies.  Il a constaté le développement par l’Union européenne de mécanismes de soutien aux opérations de maintien de la paix et de prévention des crises.  Il a rappelé, à cet égard, les deux Déclarations conjointes de 2007 et 2009 entre les Nations Unies et l’Union européenne sur la gestion des crises et le Plan adopté en 2012 par le Comité des politiques étrangères et de sécurité de l’Union européenne.

Le représentant a salué l’approche collective de l’Union européenne en matière de sécurité, qui se traduit par la présence des forces de ses pays membres dans de nombreuses missions de maintien de la paix, en particulier en Afrique, ou encore l’envoi d’une importante aide humanitaire et la contribution aux solutions politiques dans des États tels que l’Afghanistan.  Il a aussi relevé l’importante action de l’Union européenne en matière de prévention de conflits, citant en particulier son rôle au Sahel, ainsi que dans de nombreux autres domaines d’action, tels que les changements climatiques, l’action humanitaire, les droits de l’homme et le développement.  Il a salué notamment l’action importante de l’Union européenne en faveur de la paix en Afrique et a cité la coopération entre l’Union européenne et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).  En conclusion, le représentant a estimé que le monde gagnerait à voir un renforcement encore plus important des relations entre les Nations Unies et l’Union européenne. 

M. YOSHIFUMI OKAMURA (Japon) a insisté sur le partenariat fort entre l’Union européenne et son pays.  Nous avons des programmes de coopération en Afrique, en particulier au Niger, en Somalie et au Mali, a-t-il dit.  Au Mali, a-t-il insisté, l’Union européenne participe à la formation de la police et de la gendarmerie maliennes, tandis que le Japon fournit le matériel.  Le représentant a ensuite détaillé les efforts menés par son pays et l’Union européenne au Moyen-Orient afin, notamment, de remédier à la crise des réfugiés et de promouvoir la stabilité.  Il a appuyé la recherche de solutions politiques en Libye et au Yémen, et s’est, en conclusion,  félicité de l’étroite coopération entre l’Union européenne et l’ONU dans le cadre du Chapitre VIII de la Charte.

M. GERARD VAN BOHEMEN (Nouvelle-Zélande) a souligné le rôle joué par l’Union européenne dans la mise en œuvre des Accords de Minsk et dans la concrétisation de l’objectif d’une résolution de la crise ukrainienne dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  L’Union européenne, qui est membre du Quatuor, a un rôle clef à jouer dans la revitalisation du processus de paix au Moyen-Orient, a-t-il poursuivi, avant d’appeler le Conseil de sécurité à assumer ses responsabilités et à prendre les mesures nécessaires au retour des parties à la table des négociations.  Il a souhaité que ce Conseil examine avec attention les recommandations du Quatuor contenues dans le rapport qu’il devrait bientôt rendre public.  Concernant la Syrie, M. Van Bohemen a souligné la nécessité d’une reprise des négociations pour une transition politique dans ce pays.  Il est clair que cela est impossible tant qu’il n’y a pas d’améliorations immédiates sur le terrain, y compris une réduction des combats et une facilitation de l’accès humanitaire, a-t-il dit.  Enfin, il a salué l’appui fourni par l’Union européenne au Gouvernement et au peuple de la Libye pour restaurer la paix et la stabilité.

M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) a mis en avant les valeurs de paix et de développement que partagent les Nations Unies et l’Union européenne.  Il a rappelé que les États membres de l’Union européenne participent directement à plusieurs opérations de maintien de la paix et que l’Union européenne joue aussi un rôle important de soutien à d’autres missions de ce type ainsi qu’à diverses missions politiques, comme en Somalie.  L’Union européenne et ses États membres s’impliquent également dans la médiation et la mise en œuvre des processus de paix, comme c’est le cas s’agissant de la Syrie.  À ce propos, le représentant a tenu à souligner que les annonces de contributions humanitaires de l’Union européenne et de ses membres représentent les deux tiers du total.  Il a également rappelé le soutien financier de l’Union européenne au Gouvernement libyen.  Il n’a pas oublié de souligner l’action de l’Union européenne dans la crise des migrants en Méditerranée et rappelé que son pays compte renforcer sa contribution à l’opération Sophia de l’Union européenne.

M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne) a insisté sur le rôle clef joué par l’Union européenne dans le programme « femmes, paix et sécurité » de l’ONU.  Il s’est félicité de l’inclusion dans la stratégie mondiale de l’Union européenne d’un volet « prévention des conflits » et a salué le rôle joué par l’Union européenne dans le dossier du programme nucléaire iranien.  Il a également appuyé la récente initiative française visant à revitaliser les efforts de paix au Moyen-Orient et a souhaité, une fois que le Quatuor aura publié son rapport, que le Conseil de sécurité « accompagne » ce processus.  En Libye, il a souligné la détermination de l’Union européenne à appuyer la stabilité et à lutter contre les trafiquants.  L’opération Sophia a permis de sauver près de 15 000 vies en une année, s’est-il réjoui, avant de souhaiter que ladite opération soit dotée d’une fonction « trafic d’armes ».  Le représentant a plaidé pour une coopération forte entre pays d’origine, de transit et de destination.  L’accord avec la Turquie aura des effets positifs, a-t-il estimé, avant de souligner, une nouvelle fois, que l’Union européenne poursuit un engagement de « portée planétaire », tout en gardant un lien fort avec l’ONU. 

M. WU HAITAO (Chine) a rappelé que le Conseil de sécurité avait la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité et que les Nations Unies avaient des relations avec diverses organisations régionales en matière de paix et sécurité internationales et de développement.  Il a également rappelé le rôle important joué par l’Union européenne dans ces deux domaines, notamment en Afrique.  La Chine appuie l’Union européenne dans la poursuite de son rôle constructif avec les Nations Unies et le Conseil de sécurité, sous réserve toutefois que soient respectés les principes de règlement pacifique des différends et de respect de l’indépendance et de l’intégrité territoriale des États.  Il a aussi insisté sur le fait que chaque pays a une histoire différente et un environnement culturel différent.  Dans ce contexte, il a demandé l’équilibre entre les objectifs de sécurité et ceux de développement.  La Chine considère les relations avec l’Union européenne dans une perspective stratégique et à long terme, a dit le représentant, en manifeste la disposition de son pays à renforcer son interaction avec l’Union européenne, dans le cadre des Nations Unies, dans une optique « gagnant-gagnant ».

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a espéré que la nouvelle stratégie mondiale de l’Union européenne ne reflétera pas seulement les causes sous-jacentes de l’instabilité dans le Partenariat est-européen mais fournira aussi des mécanismes de coopération et consolidera le rôle de l’Union européenne dans le règlement des conflits.  Le représentant a d’autant plus plaidé cette cause que son pays est victime d’une tentative d’annexion illégale de la Crimée et d’une agression russe dans la partie orientale.  Ce qui s’est passé ces deux dernières années dans mon pays représente la crise la plus sérieuse en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, a souligné le représentant.  Il s’agit d’une guerre hybride qui est d’ores et déjà menée contre nous tous et dont la riposte exige une stratégie cohérente et audacieuse basée sur nos efforts communs et une bonne compréhension des sources de la menace et des remèdes.  M. Yelchenko a dit apprécier la position « inflexible » de l’Union européenne et sa politique constante visant à appliquer toute la gamme des outils politico-diplomatiques conjuguée à des mesures économiques et commerciales adéquates pour restaurer la justice et corriger les torts de la Fédération de Russie.  Il a exhorté ce pays à respecter la Charte des Nations Unies, la résolution de l’Assemblée générale sur l’intégrité territoriale de l’Ukraine et les traités internationaux.  La Fédération de Russie doit se retirer de la Crimée et honorer ses obligations en vertu des Accords de Minsk, y compris retirer son arsenal de l’Ukraine, ses forces militaires et ses mercenaires, a précisé le représentant.

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a souhaité une revitalisation du Chapitre VIII de la Charte afin d’apporter une réponse internationale forte aux défis communs, tels que l’extrémisme violent, la crise migratoire ou bien encore la criminalité transnationale organisée.  Rappelant que son pays avait accueilli de nombreux réfugiés européens au siècle dernier, il a insisté sur la complexité des crises migratoires et souligné l’importance de respecter les droits de l’homme.  M. Rosselli a ensuite salué les efforts menés par l’Union européenne pour lutter contre le terrorisme au Mali et au Sahel en coopération avec l’ONU.  L’Union européenne a un rôle éminent à jouer pour parvenir à la paix au Moyen-Orient, a-t-il ajouté, avant de saluer sa contribution s’agissant du dossier nucléaire iranien.  En conclusion, le représentant a indiqué que la construction européenne avait permis de restaurer la paix entre les pays de l’Union européenne et est, à ce titre, « un véritable modèle ». 

Mme SAMANTHA POWER (États-Unis) a rappelé que l’Union européenne reste un des grands acteurs politiques et économiques des temps modernes.  Le fait est que l’Union européenne a créé une zone de sécurité et de prospérité sans précédent et que ses principes se sont propagés bien au-delà de ses frontières, a-t-elle observé, ajoutant que l’Union européenne restait un modèle pour les autres organisations internationales.  L’Union européenne, a poursuivi la représentante, a prouvé qu’on pouvait faire pression de manière efficace sur des États qui menacent la paix et la sécurité internationales, comme elle l’a fait avec l’Iran, jouant un rôle central à la fois pour parvenir à l’accord sur le nucléaire et pour en assurer le suivi.  La représentante s’est aussi remémorée de la réponse apportée par l’Union européenne à la crise ukrainienne et son rôle dans la signature des Accords de Minsk, ainsi que l’importance de ses pressions sur les différentes parties, y compris les sanctions contre la Fédération de Russie.

L’Union européenne, a poursuivi Mme Power, montre comment on peut utiliser les différents outils diplomatiques et militaires pour prévenir des crises ou intervenir quand elles éclatent.  Elle a ainsi cité le rôle de l’Union européenne au Kosovo, mais aussi son implication en Afrique dont la participation à de multiples opérations de maintien de la paix ainsi qu’à d’importants programmes de réformes, en particulier des secteurs de la justice ou de la sécurité.  Dans toutes ces crises, l’Union européenne a pu avoir un rôle beaucoup plus important que celui qu’auraient eu ses différents membres pris séparément.

Mme Power a en effet mis en garde contre les risques d’individualisme chez certains pays européens, visibles aujourd’hui face à la crise des migrants et des réfugiés.  Les voix hostiles à l’accueil des réfugiés syriens sont nombreuses en Europe, a-t-elle dénoncé, tout en admettant qu’il en va de même dans son pays.  Mais cette crise ne saurait pousser l’Union européenne et les États-Unis à renoncer à leurs idéaux au profit d’un individualisme aveugle.

M. ISMAEL ABRAAO GASPAR MARTINS (Angola) a indiqué que les défis régionaux exigeaient des actions communes dans le cadre de la Charte des Nations Unies.  Il a relevé que la coopération tripartite entre l’Union européenne, l’ONU et l’Union africaine représente un élément clef de la stabilité en Afrique.  Il a d’ailleurs salué l’engagement que vient de renouveler l’Union européenne en faveur de ce continent.  La participation de l’Union européenne a été pertinente en République centrafricaine, en Somalie et au Mali, a-t-il dit, insistant sur l’opération Atalante de l’Union européenne contre la piraterie au large de la côte somalienne.  Toutefois, le représentant n’a pas oublié de rappeler les graves répercussions de la crise libyenne sur le continent africain.  Parlant de la crise des migrants qui a transformé la Méditerranée en un « cimetière », il a demandé le renforcement de la coopération et salué l’aide de l’Union européenne au Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et à l’Organisation internationale des Migrations (OIM).  Un partenariat fort entre l’Union européenne et l’ONU est dans l’intérêt de toute la communauté internationale, a-t-il conclu.

M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela) s’est dit convaincu du rôle positif des organisations régionales et sous-régionales, dans la prévention des conflits, le maintien et le rétablissement de la paix et le développement.  Il a rappelé la nécessité de respecter les principes de la Charte et jugé remarquable l’action de l’Union européenne, notamment ses efforts au sein du Groupe P5+1, qui ont permis de signer avec l’Iran l’accord conjoint sur le nucléaire.  Pour le Venezuela, un tel succès démontre que seul le dialogue politique constructif peut permettre de dénouer les crises internationales.  Cela démontre aussi que, face au conflit israélo-palestinien, le Conseil de sécurité et l’Union européenne doivent tout faire pour relancer les négociations entre les deux parties en vue d’une solution pacifique et durable à deux États.  Le Venezuela espère que la récente Conférence de Paris ouvrira la voie à une conférence internationale en vue d’un tel accord.  Le représentant a également jugé nécessaire que l’Union européenne se coordonne avec l’Union africaine pour mettre fin au conflit en Libye, qu’il a attribué à l’intervention militaire de 2011.

Le représentant a rappelé que la perte en vies humaines en Méditerranée du fait du trafic de migrants et de réfugiés par des organisations criminelles ne sera stoppée ni par la sécurisation ni par l’incrimination.  Cette question relève des droits de l’homme.  Il a salué, à cet égard, les initiatives de plusieurs pays de l’Union européenne pour accueillir de nombreux migrants.  Avant d’appuyer des politiques de changements de régimes, il faut tout faire pour trouver une solution politique aux conflits en cours et améliorer le sort des personnes qui vivent dans les pays ou régions marqués par de profondes inégalités économiques et sociales.  Le représentant a souhaité un renforcement des canaux de communications entre l’Union européenne et les Nations Unies .

M. RAMLAN BIN IBRAHIM (Malaisie) s’est félicité du rôle « objectif » joué par l’Union européenne au sein du Quatuor.  Il a souhaité qu’elle joue un rôle plus constructif encore au Moyen-Orient étant donné l’impasse dans laquelle se trouve le processus de paix et la « mort lente » de la solution à deux États.  Le défi de la crise des migrants en Méditerranée est trop redoutable pour être relevé par un seul pays, a-t-il poursuivi, avant de saluer l’engagement de l’Union européenne en faveur de son règlement.  Le délégué a ensuite insisté sur la pertinence de la stratégie globale de l’Union européenne pour lutter contre le terrorisme et l’extrémisme violent.  Cette stratégie vise à lutter tant contre les symptômes que contre les causes profondes du terrorisme, a-t-il estimé.  Il a dénoncé l’islamophobie qui a conduit à la marginalisation des minorités musulmanes dans les pays européens, laquelle s’est accrue depuis les attentats qui ont frappé le continent.  Il a souligné le rôle stabilisateur joué par l’Union européenne dans les Balkans et sa contribution à la normalisation des relations entre Pristina et Belgrade.  Il a enfin salué l’appui fourni par l’Union européenne à la transition démocratique au Myanmar. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a estimé que l’Union européenne constituait un acteur majeur du maintien de la paix et un partenaire de tout premier plan des Nations Unies dans ce domaine.  Son rôle, a-t-il dit, devient de plus en plus central dans la mise en œuvre des opérations de maintien de la paix, qu’il s’agisse de leur financement, des contributions militaires ou encore de leur accompagnement politique. 

Plus largement, l’Union européenne intervient en faveur de la paix et de la sécurité en utilisant tous ses instruments, dans le cadre d’une approche globale.  Ainsi, les nombreuses missions déployées par l’Union européenne, militaires comme civiles, dans le cadre de sa politique de sécurité et de défense commune, contribuent à la mise en œuvre ou à l’accompagnement des décisions de ce Conseil dans diverses régions du monde.

Elle est également un partenaire central du Conseil de sécurité dans la recherche de solutions durables aux grandes crises qui occupent son ordre du jour, a souligné le représentant français, citant le processus de paix au Moyen-Orient, le dossier syrien, la Libye ou la crise en Ukraine.

L’Union européenne est par ailleurs, selon M. Delattre, un acteur de premier plan dans la réponse à la crise globale des migrants.  Face à ce qui s’apparente à la plus grande crise de déplacés et de réfugiés depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, à l’égard de laquelle l’ensemble de la communauté internationale partage une égale exigence de solidarité et de responsabilité, l’action volontariste de l’Union européenne est trop souvent minorée ou mal comprise, a-t-il estimé, précisant que cette dernière demeurait, de loin, la première pourvoyeuse d’aide humanitaire aux réfugiés dans le monde.

L’Union européenne, a-t-il expliqué, n’oublie pas de s’attaquer aux causes profondes de la crise des migrants, comme en témoigne sa position au premier plan en matière de financement du développement, dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, mais également l’effort financier conséquent qu’elle consent en faveur des pays d’origine et de transit.

Ainsi, a ajouté le représentant français, si l’Union européenne ne peut résoudre seule la crise des migrants, elle prend bien toute sa part de responsabilité, politique, sécuritaire, financière mais également morale et humaine, pour y répondre efficacement.

Reprenant la parole, la Haut-Représentante a estimé que les différents intervenants avaient bien montré les domaines dans lesquels la coopération entre les Nations Unies et l’Union européenne pouvait se développer.  Elle a rappelé qu’il serait difficile d’imaginer de meilleures relations entre les deux organisations et repris les exemples donnés sur le rôle joué par l’Union européenne dans différentes parties du monde, que ce soit dans les Balkans occidentaux ou le Myanmar.  Concernant la lutte contre le terrorisme, elle a suggéré à la communauté internationale de faire fond sur l’action de l’Union européenne, y compris quand elle insiste sur la diversité.  Mme Mogherini a également remercié le représentant de l’Ukraine pour l’hommage rendu à l’action de l’Union européenne.  

Face à la question des migrants, elle a déclaré que l’Union européenne faisait sa part, ajoutant que ce n’était pas toujours facile à l’intérieur d’une Union « qui ne veut voir mourir personne, que ce soit en Méditerranée ou dans le désert ».  L’Union européenne, a-t-elle insisté, ne cherche pas à contrer la migration mais à la gérer.  Pour l’Union européenne, la migration est un fait, d’ailleurs plus important dans d’autres régions du monde et qui peut avoir des effets très positifs.  Ce sera le sens du nouveau train de mesures sur la migration qui sera présenté demain à la Commission européenne.  Dialogue, diplomatie et multilatéralisme resteront la méthode de l’Union européenne, comme elles sont la méthode des Nations unies, a conclu Mme Mogherini.

 

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ECOSOC: les progrès dans la science, la technologie et l’innovation seront la clef des objectifs de développement durable, affirme M. Ban Ki-moon

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ECOSOC/6769

ECOSOC: les progrès dans la science, la technologie et l’innovation seront la clef des objectifs de développement durable, affirme M. Ban Ki-moon

Le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, a affirmé ce matin que les progrès dans les domaines de la science, de la technologie et de l’innovation seront cruciaux pour réaliser les 17 objectifs et les 169 cibles contenus dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. Ban s’exprimait lors de la cérémonie d’ouverture du premier Forum annuel de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable, placé sous le thème de « la réalisation du potentiel de la science, de la technologie et de l’innovation pour l’ensemble pour atteindre les objectifs de développement durable », organisé par le Conseil économique et social (ECOSOC).

Ce Forum, qui va se tenir jusqu’en 2030, s’inscrit dans le cadre du Mécanisme de facilitation de la technologie mandaté par le Programme d’action d’Addis-Abeba et le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a pour objectif de fournir un lieu pour faciliter l’interaction et l’établissement de réseaux entre les parties prenantes et les partenariats multipartites afin d’identifier et d’examiner les besoins et les lacunes technologiques, de renforcement des capacités, et aussi de faciliter le développement, le transfert et la diffusion des technologies pertinentes pour les objectifs de développement durable.

Dans son discours, le Secrétaire général a estimé que « l’innovation est un état d’esprit et une attitude », et qu’au cours des 15 prochaines années, les progrès dans la science, la technologie et l’innovation seront la clef pour réaliser tous les objectifs de développement durable, de l’éradication de la pauvreté à la sécurité alimentaire en passant par l’énergie, l’eau et l’assainissement et les changements climatiques.  Il a invité la communauté internationale à partager les bénéfices de la science, de la technologie et de l’innovation avec ceux qui en ont le plus besoin, assurant qu’elles doivent être un véhicule d’inclusion d’éradication de pauvreté et de développement durable. 

Dans le message lu par le Vice-Président de l’Assemblée générale, le Président de l’Assemblée générale, M. Mogens Lykketoft, a pour sa part invité les gouvernements à adopter une stratégie complète sur la science, la technologie et l’innovation, souhaitant en outre que les besoins des pays en développement soient pris en compte en priorité ainsi que ceux des groupes les plus vulnérables. 

Le Président de l’ECOSOC, M. OH Joon, a, lui, invité les participants à ne négliger aucune source de connaissance, pas même celle des peuples autochtones, et à favoriser une participation de tous les acteurs de la société, y compris les jeunes qui représentent la nouvelle génération de scientifiques et d’utilisateurs des technologies.  Il a annoncé que les conclusions de ce Forum allaient servir de document de travail pour la prochaine session du Forum politique de haut niveau sur le développement durable qui est prévue le mois prochain.

Le représentant de la Thaïlande, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a enfin insisté sur la nécessité du transfert des technologies écologiquement viables en faveur des pays en développement.

L’un des intervenants de la première table ronde, M. Dick Co, enseignant à l’Université de Northwestern de Chicago, a expliqué que le transfert et le partage des technologies et des innovations demandaient la création d’une plateforme de collaboration entre chercheurs, un « écosystème de partage de connaissances » scientifiques qui seront vulgarisées dans le domaine public.

La première journée a été marquée par la tenue de quatre tables rondes sur des thèmes connexes au thème général du Forum.  Ce sera également le cas demain, au cours de la dernière journée des travaux qui sont présidés par le Représentant permanent du Kenya auprès des Nations Unies, M. Macharia Kamau, et par le Conseiller en science et technologie du Secrétaire d’État américain, M. Vaughan Turekian.  

Le Forum prendra fin demain, mardi 7 juin 2016.

PREMIER FORUM ANNUEL DE COLLABORATION MULTIPARTITE SUR LA SCIENCE, LA TECHNOLOGIE ET L’INNOVATION POUR LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Thème général: Comprendre le potentiel de la science, la technologie et l’innovation pour tous en vue de réaliser les objectifs de développement durable

Session 1: le pouvoir de la science, de la technologie et de l’innovation

Le premier Forum annuel de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable, a débuté par le mot introductif des Coprésidents, le représentant permanent du Kenya auprès des Nations Unies, M. MACHARIA KAMAU, et le Conseiller en science et technologie du Secrétaire d’État américain, M. VAUGHAN TUREKIAN.  

M. DEAN KAMEN, Président de Deka Research & Development et fondateur de l’organisation de promotion de la recherche dénommée FIRST (For Inspiration and Recognition of Science and Technology), a indiqué que le défi le plus important de l’heure était de faire émerger une nouvelle génération de scientifiques, d’ingénieurs et d’innovateurs.  

Il a expliqué avoir créé FIRST il y a 25 ans afin de répondre au manque d’engouement des jeunes pour les mathématiques, les sciences et l’ingénierie.  Il s’est donné pour objectif de rendre ces domaines aussi attractifs que le sport et les divertissements le sont pour les jeunes.  Il s’est réjoui de constater que l’organisation qui avait vu le jour aux États-Unis soit désormais présente dans 80 pays.

M. DICK CO, Directeur général de Solar fuels Institute (SOFI) et Professeur de chimie à l’Université de Northwestern de Chicago, a salué les progrès de la recherche scientifique, prenant en exemple les nombreuses recherches menées à travers le monde pour reproduire le processus naturel de la photosynthèse en laboratoire.  Il a plaidé pour que les gouvernements mettent les fonds à disposition du monde de la recherche, soulignant que les applications de celle-ci s’inscrivaient dans le processus de réalisation des objectifs de développement durable. 

Il a notamment insisté sur des financements prévisibles et adéquats, déclarant en outre qu’il est important que la science rencontre la technologie.  Pour ce faire, il a suggéré la création d’une plateforme de collaboration entre chercheurs, un « écosystème de partage de connaissances » scientifiques qui seront vulgarisées dans le domaine public.

Mme KOMAL AHMED, Fondatrice et Présidente Directrice générale de COPIA, a axé son intervention sur la lutte contre la faim aux États-Unis en évitant le gaspillage alimentaire.  La technologie peut aider à lutter contre la faim dans ces deux domaines, a-t-elle ajouté.  Elle a indiqué que sa société avait récupéré plus de 830 000 tonnes d’aliments, nourri 691 000 personnes depuis son lancement en 2011.  Mais avant la fin de 2016, elle compte nourrir un milliard de personnes dans le monde. 

Pour réaliser son ambition, la société fournit les moyens pour récupérer des biens alimentaires aux particuliers, aux entreprises et aux institutions gouvernementales, notamment en garantissant des réductions fiscales aux entreprises et particuliers qui acceptent de coopérer. 

Par ce truchement, COPIA a pu récupérer plus de 14 000 tonnes de nourriture lors du Super Bowl de 2016.  COPIA est sollicitée par de nombreux pays dans le monde pour apporter son expertise afin de nourrir des millions de réfugiés et de migrants dans le monde.  Mme Ahmed a lancé un appel à l’aide visant à mettre sur pied une politique contre le gaspillage de la nourriture au niveau mondial.

M. PLASAI (Thaïlande), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a expliqué que son Groupe était constitué de pays qui ne peuvent obtenir de réalisations en matière de développement sans le soutien des pays développés, notamment à travers le transfert des technologies.  Il a souligné que les sciences, les technologies et l’innovation sont cruciales dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, mettant l’accent sur le potentiel transformateur qui entoure les technologies de l’information et des communications (TIC). 

À ce propos, M. Plasai a plaidé pour la réduction du fossé numérique qui existe entre les États et au sein de ceux-ci.  Il a également émis le vœu que le présent Forum permettra de répondre aux besoins en infrastructures des pays en développement et d’établir des voies de renforcement de leurs institutions de recherche.  Il a enfin insisté sur la nécessité du transfert des technologies écologiquement viables en faveur des pays en développement.

M. OH JOON, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a fait observer que sur 169 cibles des objectifs de développement durable, pas moins de 56 faisaient référence aux technologies.  Il a souligné que l’établissement du Mécanisme de facilitation des technologies avait été un événement historique pour l’ONU, ajoutant que le présent Forum était l’un des instruments du Mécanisme.  Le Forum a pour vocation de miser sur la coopération technologique qui devrait concourir à la mise en œuvre des objectifs de développement durable, a-t-il dit. 

Il a invité les participants à ne négliger aucune source de connaissance, pas même celle des peuples autochtones, et à favoriser une participation de tous les acteurs de la société, y compris les jeunes qui représentent la nouvelle génération de scientifiques et d’utilisateurs des technologies.  Il a annoncé que les conclusions de ce Forum allaient servir de document de travail pour la prochaine session du Forum politique de haut niveau sur le développement durable qui est prévue le mois prochain.

M. KAIRAT ABDRAKHMANOV, Vice-Président de la soixante-dixième session de l’Assemblée générale, qui s’exprimait au nom du Président de l’Assemblée générale, M. MOGENS LYKKETOFT, a rappelé le processus d’élaboration du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et les premières mesures prises depuis septembre 2015 comme notamment l’organisation de ce premier Forum annuel de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable. 

Le Vice-Président a ajouté que la technologie pourra permettre de combler le fossé entre les pays en développement et le reste du monde en mettant un accent particulier sur l’accès à Internet.  Une action urgente et une collaboration nouvelle sont nécessaires pour mobiliser les ressources en faveur de la science, de la technologie et l’innovation. 

En outre, les gouvernements devraient adopter une stratégie complète sur la science, la technologie et l’innovation, a proposé M. Abdrakhmanov qui a poursuivi sur la nécessité des mesures de mise en œuvre.  Il a également insisté sur le fait que les besoins des pays en développement devraient être pris en compte en priorité ainsi que ceux des groupes les plus vulnérables. 

Ce Forum devrait encourager le partenariat dans le domaine du financement et du transfert de technologie, a encore affirmé le Vice-Président de l’Assemblée générale.

M. BAN KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, a indiqué que l’innovation était intégrée dans l’objectif de développement durable 17 relatif aux partenariats pour la réalisation des objectifs.  La science, la technologie et l’innovation ne doivent être limitées à l’objectif 17, a-t-il relevé, ajoutant qu’elles sont présentes dans les 17 objectifs comme des éléments importants de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Il a souligné que ces trois éléments, la science, la technologie et l’innovation, ne doivent pas se résumer à l’utilisation de nouvelles technologies ou aux logiciels.  « L’innovation est un état d’esprit et une attitude », a-t-il déclaré.  Au cours des 15 prochaines années, a-t-il poursuivi, les progrès dans la science, la technologie et l’innovation seront la clef pour réaliser tous les objectifs de développement durable, de l’éradication de la pauvreté à la sécurité alimentaire en passant par l’énergie, l’eau et l’assainissement et les changements climatiques.

M. Ban a en outre rappelé que le message qui définit les objectifs de développement durable est que « personne ne soit laissé de côté ».  Pour garder cette préoccupation de ne pas oublier les plus vulnérables, il a invité à partager les bénéfices de la science, de la technologie et de l’innovation avec ceux qui en ont le plus besoin.  Elles doivent être un véhicule d’inclusion d’éradication de pauvreté et de développement durable.  Il a affirmé que le présent Forum aurait lieu chaque année jusqu’en 2030, appelant à une participation active de toutes les parties prenantes. 

Il a notamment invité les gouvernements à établir des plans nationaux de mise en œuvre des objectifs de développement durable, précisant que ces plans devaient impliquer tous les secteurs de la société: autorités locales et nationales; société civile; secteur des affaires; organisations non gouvernementales; milieux académiques; milieux philanthropiques; institutions religieuses et culturelles.  Il a également invité les gouvernements à promouvoir la coopération entre parlements, entre institutions régionales et internationales, soulignant que bâtir de nouveaux partenariats était important pour réfléchir de manière innovante et créer des solutions mondiales. 

Le Secrétaire général a par ailleurs rappelé que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 avait été adopté après un processus de consultation mondiale ayant impliqué plus de sept millions de personnes à travers le monde.  « C’est véritablement un programme du peuple », a estimé M. Ban, ajoutant que « c’est notre déclaration mondiale d’interdépendance ». 

Session 2: Environnement favorable à l’épanouissement de la science, de la technologie et de l’innovation

M. NEBOJSA NAKICENOVIĆ, Directeur exécutif adjoint de l’Institut international pour l’analyse des systèmes (IIASA), a souligné l’importance de l’engagement des gouvernements à développer des plans d’action et des feuilles de route pour réaliser les objectifs de développement durable.  Ces plans devraient être inclusifs avec l’apport et la participation de tous les secteurs de la société.  Ils devraient être alimentés par les connaissances, les idées et les conseils venant de toutes les sources.  Il a évoqué l’importance du renforcement de l’interface sciences politiques, et d’une politique cohérente relative à la science, la technologie et l’innovation.

Mme GILLIAN MARCELLE, Directrice exécutive du Parc de recherche technologique de l’Université des Îles Vierges, a dit que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 avait aussi reconnu que le monde faisait face aux fléaux des inégalités des revenus, à la crise de l’emploi et au fossé technologique.  Pour faire face à ces défis, elle a suggéré d’utiliser les ressources et la créativité de tous les groupes humains et non pas uniquement ceux des privilégiés.  Cela permettra d’avoir des bénéfices plus importants et de toucher beaucoup plus de monde. 

Elle a regretté que le milieu financier ne fût pas présent au Forum.  Cette absence doit changer au prochain Forum.  Elle a plaidé pour la création d’un environnement propice pour faire circuler les idées et les connaissances afin de faire jaillir de nouvelles idées.  On ne peut pas continuer avec le modèle ancien basé sur les produits nationaux bruts.  Il nous faut un Programme de développement qui est lié à la science, à la technologie et à l’innovation.  Elle a souligné l’importance de la participation du secteur privé.  

Mme PAMELA McCAULEY, professeure de génie industriel et de systèmes de gestion de l’Université de « Central Florida », a déclaré que pour que la science, la technologie et l’innovation ne soient pas sources de trouble, il faut que les technologies existantes, les ressources et les processus d’innovation renforcent les services de santé, l’éducation et les infrastructures et soient les principaux moteurs de l’économie.  Elle a parlé de l’importance de déterminer la technologie requise par secteur, de la stratégie de perfectionnement professionnel et la formation de la main-d’œuvre.  Elle a enfin évoqué la nécessité de mettre en place des alliances stratégiques et des collaborations pour la science, la technologie et l’innovation.    

M. SACHIN CHATURVEDI, Directeur général du système de recherche et d’information pour les pays en développement, a dit que la condition préalable à l’épanouissement de la science, de la technologie et de l’innovation était la mise en place dans chaque pays de mécanisme volontaire sur la science, la technologie et l’innovation.  Ce mécanisme devrait notamment se pencher sur les questions de licence et du coût de la production des connaissances scientifiques, technologiques et de l’innovation.  Il a parlé de l’importance de la mise en place de banque de technologie dans et pour les pays en développement. 

M. Chaturvedi a ajouté que ce mécanisme devrait veiller au partage de connaissances.  Il a indiqué que les bailleurs de fonds devaient être conscients de l’existence de ces mécanismes et l’importance d’introduire la notion d’efficacité dans la réalisation des objectifs de développement durable: efficacité économique, efficacité environnementale et efficacité sociale.

Cette table ronde fut une occasion pour les États Membres et les organismes des Nations Unies et de la société civile de faire état de leurs politiques respectives en vue de créer un environnement favorable à l’épanouissement de la science, de la technologie et de l’innovation.  Ils ont plaidé pour que le Forum serve de « pont » pour combler le fossé technologique et scientifique.  

Mme LIGIA AMANDA MELO DE CARDONA, Ministre de l’enseignement supérieur, de la science et de la technologie de la République dominicaine, au nom de la Communauté des États de l’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), s’est dite préoccupée de la persistance du fossé numérique entre les pays développés et les pays en développement.  Pour combler ce fossé, elle a suggéré notamment l’utilisation de la technologie de l’information et des communications et le renforcement des capacités dans la réalisation des objectifs de développement durable.  Le Forum doit jeter les bases de ces transferts de technologies, a-t-elle suggéré.  Elle a aussi préconisé de donner la priorité à la mise en place de politique régionale sur la science, la technologie et l’innovation.  Au passage, elle a révélé la mise en place du plan d’action de la CELAC sur la science, la technologie et l’innovation.

Le représentant de la Barbade, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a dit que le transfert de technologie et le renforcement de capacités sont indispensables à la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  L’une des principales contraintes est l’absence de directives claires sur le transfert de technologies.  Elles devraient être rédigées en termes favorables pour les pays en développement.  Ce Forum doit traiter de l’accès aux technologies y compris le coût, a ajouté la représentante.

Le représentant du Groupe des Nations Unies pour les enfants et la jeunesse a souligné l’importance des bases des données et de l’accès aux technologies ainsi que de la mise à la disposition du public des résultats des recherches et des technologies.  Il a estimé que tous les problèmes n’ont pas de solution technologique mais a en même temps reconnu l’importance de l’accès aux technologies pour les jeunes et les enfants.

Le représentant de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a dit qu’il était important d’évaluer l’apport de la technologie pour le développement de l’éducation et de la nécessité d’investir dans la recherche et le développement.  Il a plaidé pour la mise en œuvre de politique de la science et de la technologie au niveau de chaque état en ajoutant que l’UNESCO était prête à accompagner les États Membres dans cette démarche.

Le représentant de la Chine a souligné la nécessité de créer des politiques qui permettent d’augmenter l’investissement dans la science, la technologie et l’innovation.  Le Gouvernement de la Chine a publié récemment les orientations stratégiques nationales qui visent notamment à combler les lacunes en matière d’innovation, à renforcer le poids de la science, de la technologie et l’innovation dans l’économie, à promouvoir la culture de l’innovation au sein de toute la société et pour cultiver une culture nationale de l’excellence. 

Ces orientations visent aussi à créer un environnement qui aide les scientifiques à respecter les normes éthiques les plus élevées et les normes sociales.  Elles encouragent les étudiants à s’orienter vers les filières scientifiques, technologies, et de l’innovation. 

Le représentant du Japon a parlé de la création d’un poste de conseiller scientifique en chef au Ministère des affaires étrangères.  Il a estimé que ce Forum devrait jeter le pont vers les autres activités consacrées à la science et à la technologie de l’information et des communications aux Nations Unies.  Il a annoncé que le Gouvernement avait mis en place un système conjoint de financement qui est un modèle novateur de financement des recherches.

Session 3: réaliser le potentiel de la science, de la technologie, et de l’innovation pour les objectifs de développement durable

La première table ronde de l’après-midi, animée par Mme XIAOLAN FU, Directrice du Centre de gestion de la technologie pour le développement de l’Université d’Oxford, a donné lieu à un échange dynamique qui a permis de souligner le besoin de voir des innovations bénéficier à tous, y compris les plus démunis qui n’ont pas accès aux technologies de pointe des pays développés. 

M. WILLIAN COLGLAZIER, Coprésident du Groupe des 10 experts chargés d’appuyer le Mécanisme de facilitation des technologies, a expliqué que les objectifs de développement durable exigeaient des actions et des plans détaillés sur les plans international et national.  Il faut identifier les lacunes en matière de développement de chaque pays et établir quelles technologies seraient à même de rectifier le tir, a-t-il déclaré.  Il a en outre salué le dernier rapport sur le développement durable de l’ONU, faisant observer que ce document comportait une partie fort intéressante traitant des technologies et de l’innovation.  Il a également parlé du rôle que pourraient jouer les plateformes virtuelles et autres réseaux sociaux qui peuvent permettre de connecter les innovateurs et les gens qui ont besoin de ces innovations technologiques.

M. SOLOMON ASSEFA, Directeur d’IBM recherche Afrique, a salué les innovations qui ont eu lieu en Afrique grâce aux partages de données sur l’Internet, expliquant par exemple comment la télé éducation permet de lutter contre les faibles taux de scolarisation en Afrique.  Il a aussi pris l’exemple du domaine de la médecine et de l’agriculture qui bénéficient des innovations en matière de partage des informations en temps réel, permettant par exemple aux malades de savoir quelles doses médicamenteuses ils ont besoin, ou aux agriculteurs de prendre des décisions sur leur calendrier culturel.

M. Assefa a ensuite expliqué qu’IBM octroyait des bourses et faisait des dons en Afrique afin d’y encourager la créativité scientifique.  Il a tout de même noté que le défi majeur en Afrique reste le financement de la recherche, proposant à cet effet des partenariats publics-privés. 

M. NICOLA BETTIO, du King Abdullah University of Science & Technology, a parlé des principaux domaines d’activités de son institution: l’eau, l’énergie, l’alimentation et l’environnement.  Il a expliqué que l’Arabie saoudite avait investi d’énormes sommes d’argent dans les activités de dessalement, adoptant des technologies innovantes de moindre coût et permettant ainsi au pays de pouvoir satisfaire la demande nationale en consommation d’eau douce, la troisième plus importante du monde après celle des États-Unis et du Canada, a-t-il noté.  

Il a aussi présenté des programmes de vulgarisation des technologies solaires en Arabie saoudite, indiquant que si le pays ne réussissait pas à faire la transition vers des sources d’énergie propres d’ici à 40 ans, il serait obligé d’importer le pétrole pour subvenir à ces besoins énergétiques.

Au cours du débat interactif, le délégué de l’Union européenne a encouragé la coopération multilatérale en matière de science, de technologie et d’innovation.  Il a expliqué que l’Union européenne avait mis en place un programme de recherche à l’horizon 2020, financé à hauteur de 75 milliards d’euros pour faire avancer la recherche et l’innovation.  Toutes les formes de coopération doivent être promues, a-t-il insisté en citant la coopération Nord-Sud, la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire. 

Dans le cadre, précisément, de la coopération, le représentant de l’Italie s’est félicité du succès du centre de recherche de Trieste, dans le nord du pays, et qui accueille des dizaines de chercheurs venant des pays en développement. 

La représentante de l’Afrique du Sud a souligné pour sa part que le transfert des technologies ne suffirait pas pour combler le fossé entre pays riches et pauvres.  Elle a invité ces derniers à établir des politiques nationales qui favorisent l’innovation, sans exclure du débat les couches défavorisées, surtout les populations autochtones et les handicapés. 

Pour son homologue du Monténégro, il est important de favoriser les initiatives communes de la communauté internationale, pouvant bénéficier à toute l’humanité, à l’instar de la coopération autour de la station spatiale internationale.  

Un internaute actif sur twitter a demandé combien de temps il faudrait pour passer de l’utilisation des énergies fossiles aux sources d’énergie renouvelables dans le monde, tandis qu’un jeune de la société civile a fait remarquer que la science, la technologie et l’innovation devaient s’adapter aux objectifs de développement durable, et non le contraire.

Il faut d’abord identifier les lacunes technologiques des plus pauvres et adapter l’innovation aux besoins des plus pauvres, a plaidé une autre représentante de la société civile.  Elle a déploré le fait que l’essentiel des fonds allant vers la recherche concernaient des domaines qui n’ont pas d’importance concrète pour la vie des plus démunis.

Le représentant de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a estimé que les grandes compagnies multinationales avaient bien des technologies et des innovations en direction des pauvres, mais que ces innovations étaient monétisées et vendues aux plus vulnérables alors que le défi serait de les leur transférer.

M. MACHARIA KAMAU, représentant du Kenya et Coprésident du Forum, a souligné que le défi, pour la communauté internationale, serait de choisir les technologies et les innovations qui la maintiennent dans la bonne direction, à savoir la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Il a aussi précisé mis l’accent sur la nécessité de faire en sorte que les plus démunis et les plus vulnérables puissent partager les avantages technologiques des plus aisés pour leur développement. 

Session 4: Technologies porteuses de changement pour les objectifs de développement durable

Mme CYNTHIA BREAZEAL, Fondatrice et Directrice du Groupe de la robotique personnelle du Laboratoire médiatique de l’Institut de technologie de Massachussetts, a parlé des « assistants numériques intelligents et personnalisés » ou « applications » qui aident à améliorer le travail journalier.  L’usager peut l’utiliser pour créer sa propre application et améliorer sa productivité.  Cette technologie peut notamment aider à renforcer le système éducatif et faciliter l’alphabétisation de tous.  Le prix de cette technologie baisse d’année en année.  La question est de savoir comment elle peut être utilisée par tous.  Il faut la mettre sur une plate-forme globale qui sera ouverte à tous ceux qui veulent l’utiliser.  Il s’agit d’un processus libre et ouvert qui demande la participation de tous au niveau mondial.  Mme Breazeal a cité l’exemple d’enfants éthiopiens, ougandais, tanzaniens, et sud-africains qui ont appris à lire par eux-mêmes au bout d’un an d’utilisation de ces applications.

M. ARJOON SUDDHOO, Directeur exécutif du Conseil mauricien de la recherche, a dit que Maurice devait moderniser son modèle économique tous les dix ans.  Pour les dix prochaines années, le pays doit investir dans l’économie bleue si le pays veut multiplier par trois le produit national brut (PNB) actuel de 9 200 dollars par habitant.  L’économie bleue vise à utiliser de l’eau profonde dont la base température peut contribuer à produire de l’énergie et remplacer l’énergie fossile.  Le Gouvernement a lancé aussi un plan pour faire de Maurice un centre mondial du transport maritime.  Pour M. Suddho, il faut ainsi une collaboration étroite entre le Gouvernement, la communauté scientifique, le secteur privé et la communauté internationale.

M. CARLOS MOREL, Directeur de l’Institut national brésilien de la science et de la technologie pour l’innovation dans les maladies négligées, a parlé de l’innovation de la « couronne thermique pour enfants » qui a été fabriquée par une équipe de scientifiques brésiliens pour empêcher les accouchements d’enfants avec une malformation de la tête.  Cette innovation, qui coûte seulement quelque 300 dollars, peut être transportée facilement même dans les endroits reculés. 

Les participants à cette table ronde ont fait part des innovations qui ont changé la vie des gens et ont fait la différence.

Un scientifique brésilien a demandé à ce que l’on adoptât aussi les innovations sociales les plus simples qui aideront à réaliser le développement durable.  Ces innovations à bas coût existent déjà et attendent d’être mises à la disposition du public. 

M. Arjoon Suddhoo a plaidé pour un juste équilibre entre les innovations sociales et les innovations technologies.  Les objectifs de développement durable reflètent ce besoin d’innovations technologiques et les innovations sociales, a-t-il indiqué. 

M. Carlos Morel a souligné que les innovations sociales sont très importantes et ne sont pas chères contrairement aux idées reçues.     

La représentante de la Fédération internationale des malentendants a plaidé pour la vulgarisation de la technologie du sous-titrage qui est fondamentale pour 30% de malentendants dans le monde.  Cette technologie doit être facilement accessible, a exhorté la représentante. 

Le représentant de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a dit que la technique d’isotope qui permet la « stérilisation des insectes mâles » peut aider à atteindre 9 des 17 objectifs de développement durable.  Cette même technique peut aussi aider les gouvernements à gérer les ressources en eau dont ils disposent.  M. Carlos Morel a indiqué que la technologie de l’isotope n’avait pas été très efficace contre les moustiques.

La représentante de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a fait état de l’utilisation de téléphones portables conçus spécifiquement pour les paysans d’Ouganda afin de les aider à répondre aux besoins du marché.  Cette technologie aide les paysans à se connecter aux marchés et à orienter ainsi leurs productions. 

Elle a aussi parlé du partenariat entre « Google Earth » et des producteurs agricoles en Afrique pour lutter contre la déforestation, et répondre aux impacts des changements climatiques.  Ces exemples peuvent être répliqués à condition que les innovations soient adaptables aux besoins des sociétés et qu’elles prennent en compte les systèmes sociaux locaux.  Elle a ajouté l’importance de développer des partenariats avec les acteurs sociaux. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’ECOSOC examine le rapport annuel du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies pour la coordination

Session de 2016, Réunion de coordination et d’organisation,
29e séance - matin
ECOSOC/6768

L’ECOSOC examine le rapport annuel du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies pour la coordination

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a entendu, ce matin, la Secrétaire par intérim du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies pour la coordination (CCS), Mme Simona Petrova, présenter le rapport d’ensemble de cet organe pour 2015*.

Le CCS est le mécanisme de coordination le plus important et le plus ancien au sein des Nations Unies et rassemble, sous la direction du Secrétaire général de l’ONU, les chefs des agences spécialisées, fonds et programmes des Nations Unies, de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international et de l’Organisation mondiale du commerce.

Avec l’appui de ses trois mécanismes subsidiaires, le Conseil, qui se réunit deux fois par an, vise à renforcer les synergies et à promouvoir la cohérence et la coordination à l’échelle du système des Nations Unies.

Mme Petrova a rappelé qu’en 2015 le Conseil a poursuivi ses efforts pour accélérer la mise en œuvre des Objectifs du Millénaire pour le développement, soutenir la transition vers le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et promouvoir l’emploi des jeunes.

Le Conseil a notamment adopté un ensemble de principes communs pour améliorer la capacité collective des Nations Unies à aider les États Membres dans la mise en œuvre du Programme de développement précité.

Il a également approuvé l’initiative mondiale en faveur de la création d’emplois décents pour les jeunes, qui sous l’égide de l’Organisation internationale du Travail (OIT), vise à accroître l’efficacité de l’action menée sur le plan national.

Mme Petrova a indiqué que le Conseil avait également cherché à accroître la capacité du système de tirer parti des données pour éclairer la programmation et la prise de décisions internes.  Les données jouent en effet un rôle précieux dans l’évaluation des progrès accomplis au regard des objectifs de développement durable, a-t-elle dit. 

Le Conseil a notamment approuvé l’idée d’une révolution des données à l’échelle du système qui permette à celui-ci de mieux exploiter des technologies et sources de données nouvelles à l’appui de la réalisation de ces objectifs.

Enfin, Mme Petrova a rappelé que le Conseil avait contribué, en 2015, aux travaux de la troisième Conférence mondiale des Nations Unies sur la réduction des risques de catastrophe et de la vingt et unième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.

Lors du bref débat qui a suivi la présentation de ce rapport, la représentante des États-Unis a insisté sur l’importance de données récentes et fiables pour évaluer les progrès accomplis en matière de développement durable.  Elle a salué le projet en cours qui vise à créer un catalogue des données du système des Nations Unies, rappelant qu’à la fin 2015 le catalogue comptait près de 4 000 lots de données.

Appuyé par son homologue du Chili, le délégué de la Suisse s’est, pour sa part, interrogé sur le caractère très descriptif de ce rapport.  Il y a très peu d’informations sur les décisions prises au sein du Conseil, ainsi que sur sa vision stratégique pour les prochaines années, a-t-il estimé.  « Avez-vous un Plan d’action pour le Conseil, assorti de cibles que vous souhaiteriez atteindre », a-t-il demandé à Mme Petrova.

Ce rapport a pour but de donner une idée d’ensemble des activités du Conseil et ne peut pas entrer dans les détails des actions prises par ses trois mécanismes subsidiaires, lui a répondu la Directrice du secrétariat du Conseil.

Elle a, en outre, indiqué que le Conseil concentrait ses efforts sur trois grands domaines: le suivi des grandes Conférences internationales, la mise en œuvre des objectifs de développement durable et « les questions dictées par la réalité ».

Le Conseil s’est ainsi emparé de la question des migrations, parce qu’il s’agit là de l’un des plus grands défis auxquels la communauté internationale est confrontée, a-t-elle dit, soulignant le caractère évolutif des activités du CCS.  Elle a en revanche indiqué que les trois mécanismes subsidiaires suivaient des programmes d’action très détaillés que les délégations pouvaient consulter.

Enfin, l’ECOSOC a pris note du rapport de la session inaugurale du Forum du Conseil économique et social sur le suivi du financement du développement** et décidé de transmettre les conclusions et recommandations contenues dans ce rapport au Forum politique de haut niveau sur le développement durable.

*E/2016/56; **E/FFDF/2016/3

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité pressé de déclencher une action « ferme et unifiée » contre la violence sexuelle utilisée comme tactique de guerre et de terrorisme

7704e séance – matin
CS/12386

Le Conseil de sécurité pressé de déclencher une action « ferme et unifiée » contre la violence sexuelle utilisée comme tactique de guerre et de terrorisme

Un débat ouvert sur le thème « Les violences sexuelles liées aux conflits, avec un accent particulier sur la traite des personnes » a été organisé aujourd’hui au Conseil de sécurité par la présidence française.  Plus d’une cinquantaine d’intervenants, dont le Secrétaire général de l’ONU, préoccupés par le recours croissant à la violence sexuelle comme tactique de guerre et de terrorisme, ont proposé des solutions pour lutter contre ce phénomène. M. Ban Ki-moon a dit attendre une action « ferme et unifiée » de la part du Conseil.

« Partout dans le monde, nous sommes les témoins d’un nombre effroyable d’actes de violence sexuelle commis en période de conflit », a déclaré le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon.  Nulle région n’échappe à ce fléau qui continue de frapper les femmes, les filles, les garçons et les hommes.  L’expression « violences sexuelles liées aux conflits » recouvre des actes tels que le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution, la grossesse, l’avortement, la stérilisation et le mariage forcé et toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable, perpétrés contre des femmes, des hommes, des filles ou des garçons, et ayant un lien direct ou indirect avec un conflit.

Parmi « ces formes de gravité comparable », il faut ajouter la traite des êtres humains, a souligné la Rapporteure spéciale sur la question qui a abordé la question « cachée » du trafic des travailleurs migrants vers les zones de conflit.

Dans sa déclaration, le Secrétaire général de l’ONU a néanmoins estimé qu’un élan politique sans précédent a permis de faire des progrès manifestes contre les violences sexuelles liées aux conflits.  « La communauté internationale a finalement brisé le silence et le tabou qui entouraient ce problème », s’est réjoui le Secrétaire général. 

Dans son dernier rapport sur la question*, il parle tout de même d’une situation préoccupante dans 19 pays et cite les parties, en majorité des acteurs non étatiques, soupçonnées de se livrer à des exactions.  Il y fait part de ses craintes au sujet de l’utilisation de la violence sexuelle comme « tactique de guerre » par les groupes terroristes et extrémistes violents, notamment comme « punitions et récompenses » pour consolider leur pouvoir.  La violence sexuelle, s’explique-t-il, est une stratégie délibérée pour déchirer le tissu de la société, contrôler et intimider les communautés et expulser les gens de chez eux. 

Le Secrétaire général propose 25 mesures de prévention et de répression à prendre aux niveaux national, régional et international, conscient qu’il est indispensable de promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes pour traiter des causes profondes des violences sexuelles liées aux conflits, transformer les normes socioculturelles néfastes et contrer l’extrémisme violent.  Il dit attendre du Conseil de sécurité « une réaction ferme et unifiée ». 

En ce moment même, des femmes sont vendues à Raqqa par Daech sur un véritable marché aux esclaves et les réseaux sociaux en ligne sont utilisés pour faciliter cette traite, a dénoncé la Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, Mme Zaunab Hawa Bangura.  D’après le document de réflexion** présenté par la France en vue du débat, on estime qu’en 2014, les paiements versés à titre de rançons par la communauté yézidie iraquienne à Daech pourraient atteindre jusqu’à 45 millions de dollars.

Ces violences sexuelles sont une véritable tactique terroriste, a insisté Mme Bangura.  Sans exception, le premier signe de la violence extrémiste est toujours la restriction des droits de la femme.  La violence sexuelle, a-t-elle fait observer, est le seul crime qui stigmatise la victime plutôt que l’auteur.  Il ne suffit donc pas de « ramener nos filles », comme on l’a dit pour les lycéennes enlevées par Boko Haram au Nigéria, il faut aussi les remettre dans un environnement qui les soutient.  À ce sujet, le représentant du Nigéria a précisé que le 14 avril 2016 a marqué le deuxième anniversaire de l’enlèvement des 276 jeunes filles par le groupe terroriste.  Avec les pays voisins, le Nigéria est en train de gagner la guerre contre ce groupe terroriste, a-t-il affirmé.

Les États Membres devraient concrétiser les engagements pris lors du récent Sommet humanitaire d’Istanbul et prendre des mesures pratiques pour appuyer les nouveaux mécanismes de financement pour consolider le rôle des femmes et des filles, en tant que leaders et décideurs, et pour assurer leur accès aux soins de santé sexuelle et reproductive dans les situations de crise, a plaidé la représentante du Groupe de travail des ONG sur les femmes et la paix et la sécurité, Mme Lisa Davis.

Défendant « la possibilité d’avorter en cas de viol commis en situation de conflit, y compris dans les camps de réfugiés », comme le droit essentiel de chaque femme à disposer d’elle-même, le représentant de la France et Président du Conseil de sécurité pour le mois de juin, a insisté sur l’autonomisation des femmes.  « Nous avons aussi besoin de femmes en uniforme pour rétablir la confiance », a fait valoir la représentante des États-Unis.  En tant que pays contributeur de troupes, son homologue de l’Uruguay a vu dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU un instrument important pour prévenir et faire face à la violence sexuelle. 

Face aux allégations d’exploitation et d’abus sexuels commis par le personnel de l’ONU, notamment contre des mineurs en République centrafricaine et en Somalie, le représentant de l’Angola a, comme beaucoup d’intervenants, appuyé la politique de « tolérance zéro » et souhaité une présence accrue de « conseillères » sur le terrain pour faciliter le dialogue avec les parties aux conflits.  Au niveau régional, le Sénégal a estimé que la prévention de la violence sexuelle devait commencer par la mise en œuvre des instruments régionaux existants, notamment la résolution 283 de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.

Le représentant de la Fédération de Russie, rejoint par celui de l’Égypte, a dénoncé, dans le rapport du Secrétaire général, une tendance à s’éloigner des terminologies conventionnelles et agréées par le Conseil de sécurité.

La Journée internationale pour l’élimination de la violence sexuelle dans les conflits sera célébrée, pour la première fois, le 19 juin prochain.  

LES FEMMES, LA PAIX ET LA SÉCURITÉ

Lutter contre la traite d’êtres humains dans les situations de violences sexuelles liées aux conflits

Rapport du Secrétaire général sur les violences sexuelles liées aux conflits (S/2016/361)

Lettre datée du 27 mai 2016, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent de la France auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2016/496)

Déclarations

« Partout dans le monde, nous sommes les témoins d’un nombre effroyable d’actes de violences sexuelles commises en période de conflit », a déclaré le Secrétaire général de l’ONU, M. BAN KI-MOON.  Nulle région n’échappe à ce fléau, qui continue de frapper les femmes, les filles, les garçons et les hommes, a-t-il ajouté. 

Cependant, un élan politique sans précédent a permis de faire des progrès manifestes dans la lutte contre ces crimes.  « La communauté internationale a finalement brisé le silence et le tabou qui entouraient ce problème », a reconnu le Secrétaire général.

Il a précisé que la violence sexuelle est une stratégie délibérée pour déchirer le tissu de la société, contrôler et intimider des communautés et expulser les gens de leur foyer.  C’est une menace à la paix et à la sécurité internationales, une violation grave du droit humanitaire et des droits de l’homme, et un obstacle à la réconciliation après un conflit et à la reconstruction économique.

Le Secrétaire général a salué les résolutions « historiques » du Conseil de sécurité qui confirment que la violence sexuelle est un crime de guerre, un crime contre l’humanité et un acte constitutif de génocide.  Il a vu dans la proclamation du 19 juin « Journée internationale pour l’élimination de la violence sexuelle dans les conflits » le signe supplémentaire d’un engagement accru.

M. Ban a rappelé qu’il avait lancé sa campagne « Tous unis » pour mettre fin à la violence contre les femmes et créé le poste de représentant spécial chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.  Il a assuré que les Nations Unies poursuivraient leurs efforts pour que les Casques bleus défendent les normes les plus élevées d’intégrité. 

L’ONU et ses partenaires appuient des milliers de rescapés à travers une série de mesures pratiques, ce qui n’était pas possible il y a 10 ans, a poursuivi le Secrétaire général.  La jurisprudence internationale s’est également développée.  Ainsi le verdict récent de culpabilité contre Jean-Pierre Bemba Gombo est-il « un signe que le temps de l’impunité pour la violence sexuelle en tant qu’outil de guerre est révolu », s’est-il félicité.

Dans son dernier rapport sur les violences sexuelles liées aux conflits, le Secrétaire général mentionne une situation préoccupante dans 19 pays et énumère les parties soupçonnées de se livrer à des exactions.

M. Ban s’est dit particulièrement préoccupé par « l’utilisation de la violence sexuelle comme tactique du terrorisme ».  Daech, Boko Haram et d’autres groupes extrémistes s’en servent pour attirer et retenir des combattants et pour générer des revenus.  Il est estimé que Daech a extorqué près de 45 millions de dollars pour la libération de membres de la communauté yézidie.  De même, « l’enlèvement de plus de 200 filles de Chibok, au Nigéria, est l’un des exemples les plus horribles de l’utilisation de la violence sexuelle en tant que tactique terroriste », a-t-il souligné.

Le Secrétaire général a fait valoir que les femmes et les filles ayant des enfants ont besoin d’un appui médical et psycho-social particulier et que cet appui doit s’étendre aux enfants.  De plus, « la honte et la stigmatisation qu’elles endurent devraient plutôt viser les auteurs brutaux de violences », a-t-il tenu à ajouter.

En conclusion, M. Ban a dit attendre « une réaction ferme et unifiée » du Conseil de sécurité aux préoccupations soulevées dans son rapport. 

Mme ZAINAB HAWA BANGURA, Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, a rappelé que la manière dont est comprise et traitée cette question avait été profondément changée lors de la dernière décennie et a noté des « progrès sans précédent ».  Elle a toutefois rappelé qu’en ce moment même, des femmes sont vendues à Raqqa par Daech sur un véritable marché aux esclaves et que les réseaux sociaux en ligne sont utilisés pour faciliter cette traite.  Elle a également expliqué avoir rencontré l’an dernier des filles qui avaient pu s’échapper après avoir ainsi été tenues en captivité, dont certaines ont expliqué avoir été l’objet de huit transactions en l’espace de deux ans.

Le rapport du Secrétaire général apporte un élément essentiel sur un type de crime qui a depuis longtemps été omis dans les comptes rendus officiels relatifs à la paix et à la guerre, a poursuivi Mme Bangura, pour qui le rapport démontre à la fois l’ampleur des crimes et des menaces sans précédent. 

En effet, a-t-elle relevé, sur les 48 acteurs mentionnés en annexe du rapport comme pratiquant les violences sexuelles liées aux conflits, 37 sont des groupes armés non étatiques, alors même que tous les instruments du système des Nations Unies sont faits principalement pour lier les États.

Dès lors, a ajouté la Représentante spéciale, il faut de nouvelles approches et de nouveaux outils.  Elle a cité des défis politiques et opérationnels et plaidé pour que l’on se concentre sur ceux qui commettent les violences sexuelles liées aux conflits de manière persistante.  Cela supposera le soutien du Conseil de sécurité. 

Pour Mme Bangura, ces violences sexuelles sont utilisées non pas seulement comme une tactique de guerre, mais comme une tactique terroriste, et elle a rappelé que, sans exception, le premier signe de violence extrémiste est toujours la restriction des droits des femmes.  La violence sexuelle n’est pas marginale dans l’idéologie ou la stratégie de tels groupes, elle en est partie intégrante.

La représentante spéciale a en outre rappelé qu’après avoir subi ces atrocités en captivité, les victimes sont souvent confrontées à la mise à l’écart que leur impose leur communauté.  La violence sexuelle, a-t-elle affirmé, est le seul crime qui stigmatise la victime plutôt que l’auteur.  Il ne suffit donc pas de « ramener nos filles », comme on l’a dit pour les lycéennes enlevées par Boko Haram au Nigéria, il faut aussi les remettre dans un environnement qui les soutient.  La réintégration sociale et économique est un impératif.

La représentante spéciale a également expliqué que la perspective de bénéficier d’esclaves sexuelles sert aussi à attirer des recrues dans les groupes armés, et de compensation pour les combattants, ce qui signifie que ces actes font partie de l’économie politique du terrorisme, tout comme le trafic de pétrole, de drogue ou d’antiquités.

Enfin, Mme Bangura a rappelé quelques aspects du rapport du Secrétaire général qui touchent à des aspects peu traités à ce jour des violences sexuelles liées aux conflits: le sort des enfants nés de viols, celui des violences sexuelles contre les hommes et les garçons, notamment dans le contexte de la détention et des interrogatoires, ou encore la vulnérabilité particulière des déplacés et réfugiés, à tous les stades de leur déplacement et pas seulement dans les camps.

Rappelant que, depuis son entrée en fonctions, elle avait mis l’accent sur l’appropriation et la responsabilité nationale des pays affectés, Mme Bangura a estimé que l’on avait désormais une bonne vision des lacunes du cadre normatif offert par les résolutions du Conseil de sécurité, qui servent de guide conceptuel et opérationnel à ses services.  Elle a donc demandé au Conseil de sécurité d’envisager une nouvelle résolution qui fournisse les outils nécessaires à une réponse globale et multidimensionnelle qui prenne en compte les modifications rapides du panorama international de la paix et de la sécurité.   

Mme MARIA GRAZIA GIAMMARINARO, Rapporteure spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, a expliqué que la traite des êtres humains est un « concept parapluie » sous lequel se cachent différentes formes d’exploitations ».  Le but de la traite est d’exploiter et d’abuser des gens en position de vulnérabilité et cette traite est bien souvent la conséquence des crises et des conflits.  Après avoir longuement élaboré sur ce postulat, la Rapporteure spéciale a mis l’accent sur les liens « beaucoup moins connus » entre traite des êtres humains et situations de conflit ou postconflit.  Elle a d’abord cité la question « cachée » de la traite des travailleurs migrants vers les zones de conflit puis souligné le fait que les gens qui fuient les conflits s’exposent aux trafiquants d’organes.  Elle a attiré l’attention sur les cas en Égypte où on a prélevé des organes à des réfugiés.  En troisième lieu, elle a parlé de ces réfugiées syriennes victimes de la traite qui se sont retrouvées enfermées dans des mariages forcés dans lesquels les maris les jettent dans la prostitution.  L’exploitation et la violence sexuelles est le quatrième lien qu’elle a cité, avant de s’attarder sur le dernier: le travail des enfants. 

Parmi les 14 recommandations qu’elle a faites, la Rapporteure spéciale a préconisé que la traite des enfants soit liée aux six graves violations et abus qui servent de critères à la « Liste » du Rapport annuel du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés.  Le système de l’ONU, a-t-elle poursuivi, doit accorder au travail forcé le même niveau d’attention qu’elle accorde à l’exploitation sexuelle et mettre en place une politique de « tolérance zéro » pour les violations du droit du travail.  Elle a aussi milité pour que les mesures anti-traite soient intégrées dans toutes les interventions humanitaires dans les zones de conflit.  Elle a conclu en insistant sur la protection des enfants qui ne devraient jamais être détenus pour immigration illégale.  Il faut rechercher des solutions durables au cas par cas dans le meilleur intérêt des enfants.

Mme LISA DAVIS, Représentante du Groupe de travail des ONG sur les femmes et la paix et la sécurité, a attiré l’attention sur cinq domaines.  Premièrement, a-t-elle dit, les États Membres doivent s’acquitter de leurs obligations envers ceux qui ont fui les violences liées aux conflits.  Elle a exhorté les donateurs à financer les soins de santé sexuelle et reproductive, y compris l’accès à l’avortement médicalisé.  Les États Membres devraient concrétiser les engagements pris lors du dernier Sommet humanitaire mondial et prendre des mesures pratiques pour appuyer les nouveaux mécanismes de financement pour les femmes et les filles, en tant que leaders et décideurs; pour réduire la vulnérabilité, y compris à la traite, pour assurer l’accès aux soins de santé sexuelle et reproductive dans les situations de crise, et pour mettre fin à l’impunité.

Deuxièmement, tous les gouvernements, y compris les membres du Conseil de sécurité, doivent condamner la répression accrue des militantes des droits de la femme et des organisations des femmes.  Toutes les stratégies de sécurité nationale, y compris celles relatives à la prévention et la lutte contre l’extrémisme violent, devraient être fondées sur les droits de l’homme et adhérer au droit international humanitaire.  Les efforts de la communauté internationale pour faire face à la menace de l’extrémisme violent ne peuvent réussir tant que les militantes des droits de la femme seront menacées. 

Troisièmement, la collecte des preuves sur la violence des combattants contre toutes les personnes marginalisées doit être appuyée, dont les violations des droits des LGBT en Syrie ou en Iraq.  Le Conseil de sécurité doit faire en sorte que les crimes commis contre ces personnes marginalisées en période de conflit soient jugés.  La communauté internationale dispose de nombreuses options pour soutenir l’accès à la justice aux niveaux local, national et international.  Le Conseil de sécurité et les États Membres devraient élargir leur appui politique et financier, y compris la saisine de la Cour pénale internationale.

Quatrièmement, le Conseil de sécurité doit vraiment améliorer la mise en œuvre quotidienne de sa résolution sur les femmes, la paix et la sécurité.  Il doit resserrer le lien entre protection et participation et droits de la femme et demander au personnel des missions de l’ONU de tenir des consultations régulières avec les organisations locales de femmes.  Le Conseil de sécurité doit garantir une protection adéquate aux lanceurs d’alerte dans les cas d’exploitation et d’abus sexuels commis par des Casques bleus.  Les négociations de paix doivent être transparentes et impliquer les femmes mais les efforts de ces femmes doivent être appuyés sur le long terme.  Les pourparlers de paix doivent véritablement et de manière holistique inclure les femmes et la société civile. 

Enfin, Mme Davis a estimé qu’on ne saurait assez souligner l’urgence de freiner le flux des armes qui exacerbe les niveaux de violence sexuelle.  Le Conseil de sécurité doit s’attaquer à cette question, y compris en encourageant les États à ratifier le Traité sur le commerce des armes et établir une réglementation  nationale et régionale conformément à la recommandation générale numéro 30 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  La prévention doit également tenir compte du rôle des gouvernements et des acteurs non étatiques qui facilitent le trafic d’armes, y compris les bases militaires qui deviennent des plaques tournantes de ce trafic.

« Nous devons faire plus et mieux exploiter les outils à notre disposition pour aider les rescapés de la violence sexuelle », a estimé  Mme MICHELE J. SISON (États-Unis).  Il reste des défis redoutables, a-t-elle dit, notamment lorsqu’il s’agit de tenir pour responsables de leurs actes les acteurs non étatiques, évoquant la multiplication des actes de violence sexuelle commis par des terroristes.  Les résolutions 2199 et 2253 et leur Comité sont des instruments « très importants » pour punir les responsables.  Inquiète par la migration massive à partir de la Syrie, de l’Iraq et de la Corne de l’Afrique et par « des passeurs qui demandent des faveurs sexuelles en contrepartie de leurs services », la représentante a rappelé l’annonce que son pays a faite lors du récent Sommet humanitaire d’Istanbul sur une contribution de 10 millions de dollars pour prévenir et lutter contre la violence sexuelle dans les situations d’urgence.  Les États-Unis ont aussi promis une enveloppe de 40 millions de dollars pour le soutien psycho-social des victimes, notamment au Nigéria.  La représentante a argué que l’autonomisation des femmes est une arme efficace contre l’extrémisme violent.  « Nous avons aussi besoin de femmes en uniforme pour rétablir la confiance et de parlementaires femmes pour palier aux griefs qui mènent certains à se tourner vers le terrorisme, a-t-elle conclu.  

M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne) a rappelé que la résolution 1820 (2008) a été la première résolution dans laquelle le Conseil de sécurité a examiné exclusivement le problème de la violence sexuelle dans les conflits.  Cette violence sexuelle peut être évitée si des mécanismes de condamnation, de prévention et de sanctions appropriés sont mis en place.  Le représentant a proposé plusieurs mesures concrètes au Conseil de sécurité et d’abord le renforcement du mandat de la Représentante spéciale du Secrétaire général.  Il a ensuite estimé qu’il faut mettre en place des mécanismes de coopération judiciaire, y compris à travers Interpol, pour que la traite des êtres humains fasse l’objet d’une meilleure prévention aux plans régional et international.  De même, le Conseil devrait imposer des sanctions aux individus responsables de la traite.

Le représentant a également souhaité doter toutes les missions de maintien de la paix de l’ONU de « conseillères » pour la protection des femmes, dont le coût serait imputé au budget ordinaire de l’ONU.  Pour combattre l’impunité, il faut aussi « reconnaître que les victimes de la violence sexuelle sont en fait des victimes du terrorisme » et qu’elles doivent recevoir le même niveau de protection. 

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) s’est félicité que l’Assemblée générale ait adopté l’année dernière par consensus une résolution historique proclamant le 19 juin, Journée internationale pour l'élimination de la violence sexuelle dans les conflits.  Il a appuyé les efforts initiés pour inclure les femmes à tous les niveaux des activités de maintien de la paix conformément à la résolution 1325 du Conseil de sécurité.  L’Égypte, a-t-il dit, fait partie des 17 États africains qui ont élaboré un plan national de mise en œuvre de la résolution 1325.  À ce titre, le représentant a souhaité que le rapport du Secrétaire général sur les violences sexuelles en situation de conflit se limite aux domaines encadrés par les résolutions pertinentes.  Ce rapport « déborde » car au lieu de se concentrer sur les victimes des conflits, il aborde des questions « controversées » contraires aux accords internationaux.  Le représentant en a profité pour attirer l’attention sur la situation des femmes palestiniennes et a conclu sur l’urgence de donner la priorité à la lutte contre les violences sexuelles en tant que tactique de guerre ou tactique terroriste.   

M. WU HAITAO (Chine) a appelé à mettre en œuvre une réelle politique de tolérance zéro contre les violences sexuelles et dit la volonté de son pays de contribuer à la lutte mondiale contre les horreurs auxquelles sont confrontées les femmes et les filles dans les zones de conflit.  Il a jugé urgent d’intensifier les efforts contre les groupes terroristes qui se financent grâce à la traite de femmes et filles et recourent aux violences sexuelles comme arme de guerre.  En toute chose, a prévenu le représentant, il faut respecter la souveraineté des pays concernés et leur fournir des moyens financiers, techniques et humains de lutter contre tous les aspects de la traite des femmes et des filles.  La Chine souhaite contribuer à l’avènement d’un environnement international basé sur la solidarité et la sécurité pour tous, a conclu le représentant.

M. HIROSHI MINAMI (Japon) a d’abord mis l’accent sur la construction d’un cadre juridique national et international pour lutter contre les violences sexuelles liées aux conflits et à la traite des êtres humains.  Il a rappelé l’importance d’un renforcement de l’appropriation, du leadership et de la responsabilité nationaux dans la lutte contre les violences sexuelles liées aux conflits.  À cet égard, il a mis l’accent sur les réformes des secteurs de l’armée, de la police et de la justice afin de les rendre plus à même de punir les auteurs de ces crimes.  Le Japon soutient ainsi fortement l’équipe d’experts sur l’état de droit, dont il est le principal bailleur de fonds.  Sur le plan international, le Japon estime que la Convention contre la criminalité transnationale organisée, dite Convention de Palerme, et le Protocole sur la traite des personnes sont les instruments les plus efficaces, sans oublier le rôle de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).  De même, le Japon estime que la Cour pénale internationale (CPI) peut jouer un rôle répressif tout en venant en aide aux victimes, et souhaite que le Statut de la Cour devienne enfin universel.

Le représentant a ensuite noté que la majorité des criminels mentionnés dans le rapport de la Rapporteure spéciale sont des groupes armés non étatiques.  Il faut donc se poser la question fondamentale de savoir comment contraindre de tels acteurs à respecter les normes internationales, y compris les résolutions du Conseil de sécurité.  À cet égard, le Japon salue le travail de la Rapporteure spéciale qui est parvenue à négocier avec certains de ces groupes, en République démocratique du Congo et au Soudan du sud, entre autres.  Le Japon estime que le Conseil devrait apporter son plein soutien à Mme Bangura, a conclu le représentant.

M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) s’est dit préoccupé par le recours à la violence contre la population civile, notamment par des groupes terroristes, ce qui porte atteinte aux droits de l’homme les plus fondamentaux.  D’après lui, « la violence sexuelle et la violence sexiste sont des modalités de répression et d’assujettissement odieuses ».  Il a dénoncé les grossesses, les avortements et les mariages forcés qui stigmatisent l’être humain.  Les victimes, a-t-il déploré, sont « doublement touchées », car leur santé sexuelle et procréative souffre de conséquences irrémédiables.

Le représentant a dit avoir lu avec inquiétude dans le rapport du Secrétaire général que Daech demande aux médecins d’accélérer la puberté chez les filles pour pouvoir les « vendre » plus vite.  La communauté internationale, a-t-il souligné, doit assurer les droits sexuels et reproductifs des femmes dans les conflits et protéger les enfants qui naissent dans ces conflits.  Le représentant a aussi condamné la violence contre la communauté LGBT.

Créer une chaîne de travail des institutions locales et des organisations d’aide humanitaire, aux côtés des soldats de la paix, est la seule voie possible pour réintégrer les victimes et recueillir les données indispensables sur les auteurs des exactions, a précisé le représentant.  Il a jugé que les opérations de maintien de la paix de l’ONU sont un « instrument important pour prévenir et faire face à la violence sexuelle », et qu’il faut y inclure davantage de femmes.  Pour sa part, l’Uruguay a déployé 1 000 soldats à la Mission de l’ONU en République démocratique du Congo, réaffirme son attachement à la politique de « tolérance zéro » et estime que la question examinée aujourd’hui doit être inscrite à l’ordre du jour des comités des sanctions du Conseil de sécurité.

Choqué par les données sur les viols collectifs et la violence sexuelle en période de conflit, M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) s’est félicité que le Conseil de sécurité ait « brisé le tabou ».  En tant que Président d’un des comités du Conseil de sécurité, le représentant a rappelé qu’il s’est rendu en République centrafricaine où, a-t-il noté, les enfants représentaient 41% des victimes de la violence sexuelle en 2015.  La violence sexuelle et la traite des personnes sont « la carotte et le bâton » des groupes terroristes et extrémistes.  Il est donc essentiel de comprendre leur stratégie pour la contrer.  À cause de la stigmatisation, les plaintes sont rares et « de nombreuses victimes souffrent en silence », s’est-il indigné.  « Nous devons continuer de parler ouvertement de ce problème » et élaborer des systèmes de sécurité et de justice pour prévenir la violence sexuelle et lutter contre l’impunité, a-t-il insisté.

En Ukraine, a affirmé le représentant, nous avons constaté une augmentation des cas de violence sexuelle avec l’agression russe.  Il a donc regretté que le Secrétaire général ne fasse mention dans son rapport des zones de Donetsk et de Luhansk sous le contrôle des séparatistes soutenus par la Fédération de Russie.  Il a voulu que le mandat des procédures spéciales de l’ONU s’élargisse à ces zones.

M. GORGUI CISS (Sénégal) s’est félicité que l’Assemblée générale ait adopté par consensus une résolution proclamant le 19 juin Journée internationale pour l’élimination de la violence sexuelle en temps de conflit.  Il a regretté que la question de cette violence continue de s’imposer comme une triste réalité bien qu’elle figure parmi les priorités du Conseil de sécurité depuis plus de 10 ans.  Pour chaque cas de viol déclaré dans une zone de conflit, dix ne le sont pas par peur des pressions socioculturelles.  Il a jugé indispensable que la lutte contre la traite des êtres humains soit dotée d’une stratégie holistique articulée autour de quatre piliers que sont la prévention, la protection, la réinsertion et la reddition de comptes.  Il est nécessaire d’intégrer des cadres de lutte contre la violence sexuelle dans tous les accords de paix et de cessez-le-feu et dans toutes les phases de maintien et de consolidation de la paix.  Au niveau régional, il a estimé que la prévention de la violence sexuelle devait commencer par la mise en œuvre des instruments régionaux existants, notamment la résolution 283 de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et a suggéré que l’autonomisation des femmes soit placée au cœur de la lutte contre le terrorisme.  

M. EVGENY T. ZAGAYNOV (Fédération de Russie) s’est dit choqué par l’ampleur et la cruauté sans précédent du phénomène de la violence sexuelle.  Il s’est notamment inquiété de la cruauté des groupes terroristes, notamment Daech, à l’encontre des femmes et filles.  La lutte contre la menace terroriste ne sera possible que si l’on renforce la coopération internationale.  Le représentant russe s’est dit particulièrement préoccupé par des informations faisant état de la mise en place d’une infrastructure criminelle pour exploiter les réfugiés, en particulier les mineurs non accompagnés, qu’il s’agisse de la traite, de la prostitution et de l’esclavage sexuel.

Commentant le rapport présenté aujourd’hui, le représentant a dénoncé une tendance à s’éloigner des terminologies conventionnelles et agréées par le Conseil de sécurité.  On tente, a-t-il accusé, de remplacer la notion de lutte contre la  traite des êtres humains en situation de conflit par les termes « plus flous » de « violence sexuelle dans les situations de conflit ».  Ces tentatives de revenir sur des dispositions convenues est « préoccupante » car elle efface la démarcation entre « maintien de la paix » et « criminalité et droits de l’homme ».  Évitons, a conseillé le représentant, de mettre ces questions au service de questions controversées comme l’identité sexuelle.  Le représentant a conclu en regrettant que son homologue ukrainien « ait essayé une fois de plus de rejeter sur la Fédération de Russie la responsabilité de la souffrance des populations de l’est de l’Ukraine ».

« Il n’existe aucune justification d’aucun type pour ces actes odieux », a déclaré M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela) en préconisant l’application du principe de responsabilité avec des sanctions exemplaires.  L’économie de la guerre exploite les drames humains et les secteurs les plus vulnérables de la population, a-t-il constaté.  Il s’est demandé comment promouvoir des engagements concrets dans le domaine de la prévention quand la violence sexuelle est le fait de groupes armés « qui ne sont pas qualifiés de groupes terroristes par le Conseil de sécurité » et a favorisé, dans ce cas, « des accords ponctuels ».

Selon le représentant, il faut aider les pays à renforcer leurs capacités institutionnelles et techniques pour faire face à la violence sexuelle.  S’agissant des infractions commises par le personnel de l’ONU dans le cadre des opérations de maintien de la paix, il a prôné comme les autres la politique de « tolérance zéro ».  La violence sexuelle ayant atteint des niveaux sans précédent dans les groupes terroristes au Moyen-Orient et en Afrique, il a lancé un appel à la communauté internationale pour que soit pleinement respectée l’interdiction de leur fournir des armes et un appui financier et logistique.  La lutte contre la pratique criminelle de la traite dans les conflits exige un débat élargi et démocratique avec la pleine participation des États Membres et du système des Nations Unies.

M. ISMAEL ABRAÃO GASPAR MARTINS (Angola) a jugé « totalement inacceptable » que la violence sexuelle pendant les conflits continue de se produire à grande échelle et que les auteurs de ces crimes soient récompensés par l’impunité.  « Très peu de mesures concrètes sont prises par les membres du Conseil de sécurité », a-t-il regretté. 

La violence sexuelle est devenue une tactique de guerre et une menace pour la paix et la sécurité internationales, a insisté le représentant.  Il a invoqué le Plan d’action des Nations Unies pour prévenir la violence et l’extrémisme et les dispositions prévoyant l’autonomisation des femmes qui indiquent que « les femmes sont un moteur essentiel d’une paix durable ».  Il s’est inquiété de la stigmatisation sociale et des traumatismes physiques et psychologiques infligés aux victimes.  La police et l’appareil judiciaire doivent avoir des moyens renforcés pour susciter la confiance et établir la responsabilité des criminels, les décourager et rétablir l’état de droit.  Préoccupé par les allégations d’atteintes sexuelles perpétrées par le personnel de l’ONU, notamment contre des mineurs en République centrafricaine et en Somalie, il a appuyé la politique de « tolérance zéro » et souhaité une présence accrue de conseillères sur le terrain pour faciliter le dialogue avec les parties au conflit.

M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) s’est particulièrement inquiété de la situation des femmes yezidi qui continuent d’être vendues comme de la marchandise dans les territoires contrôlées par Daech.  « Ce type de crimes se poursuit en Iraq, en Syrie, en Afghanistan et en RDC », a dénoncé le représentant.  Citant quatre mesures proposées par son pays, il a souligné l’urgence de mettre de l’ordre dans le chaos semé par des groupes comme Daech et Boko Haram.  Nous devons faire en sorte que les forces militaires et de sécurité puissent prévenir la violence sexuelle et y réagir.  La reddition de comptes ne pouvant être sélective, il faut aussi renforcer la capacité des gouvernements de poursuivre les coupables.  Nous devons lutter contre la stigmatisation à l’égard des survivants de la violence sexuelle dans les conflits et contre toute culture qui tolère ou justifie cette violence, a-t-il encore dit.  Dans ce contexte, il a regretté que la décision sur les demandes de statut consultatif auprès du Conseil économique et social (ECOSOC) de 250 ONG ait été reportée cette semaine par le Comité des ONG « sous différents prétextes ».  Il a rappelé l’utilité de ces ONG qui sont en première ligne de la lutte pour les droits de l'homme et l’autonomisation des femmes.   

M. RAMLAN BIN IBRAHIM (Malaisie) a rappelé la pertinence de la déclaration présidentielle du Conseil de sécurité de décembre 2015 sur la traite des êtres humains et la violence sexuelle.  Cette violence, a-t-il constaté à son tour, est devenue une tactique de terreur des groupes armés.  Il est donc urgent d’innover pour contrer cette terrible tendance.  Le rapport du Secrétaire général, a fait observer le représentant, démontre le caractère systématique et prémédité des actes de violence sexuelle.  Pour appâter les combattants, les groupes terroristes n’hésitent pas à promettre des esclaves sexuelles.  Il faut, a insisté le représentant, que le cinquième examen de la Stratégie des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme, prévu ce mois-ci, soit l’occasion de rechercher des moyens innovants de lutter contre la violence sexuelle, en mettant l’accent sur l’autonomisation des femmes.  Le représentant s’est particulièrement inquiété de la stigmatisation qui entoure les femmes victimes de violence sexuelle et les enfants nés de cette violence.     

M. PHILLIP TAULA (Nouvelle-Zélande) a déclaré qu’il faut redoubler d’efforts pour faire face aux conditions qui ont laissé les civils vulnérables aux abus et à l’exploitation, et permis aux groupes terroristes et criminels de commettre ces crimes en toute impunité.  Le représentant a ajouté que la flambée actuelle de violence sexuelle liée au conflit est dans la plupart des cas la conséquence des conflits prolongés et l’effondrement des mécanismes de protection et des cadres nationaux de justice.  Nous ne pourrons espérer une amélioration significative que lorsque ces conflits seront résolus et les groupes responsables de la majorité de ces crimes défaits.

Nous devons aussi contrer les récits qui tentent de rendre légitimes et de justifier ces pratiques.  Le représentant a apporté son appui à l’appel du Secrétaire général pour intégrer les efforts visant à combattre les stratégies préméditées et systématiques contre les civils, en particulier les femmes et les filles, dans les stratégies de prévention contre l’extrémisme violent.  Nous devons faire plus aux niveaux national, régional et international, a-t-il dit, en précisant que dans les pays, il faut des cadres et des processus pour poursuivre les coupables, y compris les étrangers.  Nous devons travailler étroitement avec les autres États pour identifier ces individus. 

Après avoir énuméré les efforts de la Nouvelle-Zélande, le représentant a dit qu'au niveau international, le Conseil de sécurité a un rôle à jouer, y compris à travers les régimes de sanctions contre Al-Qaida et Daech.  En tant que Présidente du Comité des sanctions contre Al-Qaida/Daech, la Nouvelle-Zélande est prête à discuter de la manière de rendre plus efficaces les mesures contre la traite des êtres humains qui est devenue « facilitateur » pour les groupes terroristes.  Il ne faut pas perdre de vue, a prévenu le représentant, la nécessité de guérir les cicatrices des individus et des communautés et de demander des comptes aux responsables.  Il est temps de tout faire pour collecter et préserver les preuves de la violence contre les femmes et les filles.     

Les causes de la traite à des fins sexuelles méritent d’être mieux prises en compte, a estimé M. FRANÇOIS DELATTRE (France).  Elles sont fondées sur une inégalité de traitement des genres et, pour y remédier, l’autonomisation des femmes doit être renforcée dans les domaines de l’éducation et de la santé.  Il a notamment défendu « la possibilité d’avorter en cas de viol commis en situation de conflit, y compris dans les camps de réfugiés ».  Il s’agit ici d’un droit essentiel de chaque femme à disposer d’elle-même, un droit dont la France a fait une priorité, a-t-il souligné. 

D’après M. Delattre, le traitement insuffisant des questions de genre par le Conseil de sécurité en raison des désaccords en son sein constitue encore un obstacle à l’amélioration de la condition des femmes dans les conflits.  De même, les violences sexuelles commises en situations de conflit et l’agenda « Femmes, paix et sécurité » sont trop souvent considérés comme distincts des menaces à la paix et la sécurité internationales.  En réalité, a-t-il poursuivi, ces formes de violences, qui font partie intégrante de la stratégie de groupes terroristes tels que Daech ou Boko Haram, constituent bien une menace à court et long termes.  Il l’a constaté en Syrie, en Iraq, en Afghanistan, au Soudan, en République démocratique du Congo, en Somalie et ailleurs.  « Car les enfants nés de violence sexuelle aujourd’hui risquent d’être les criminels, voire les terroristes de demain », a-t-il mis en garde.

Le représentant a présenté quatre propositions d’action pour le Conseil de sécurité et le Secrétariat.  Premièrement, a-t-il dit, nous devons renforcer les mandats de protection des civils des opérations de maintien de la paix.  Deuxièmement, nous devons mieux prendre en compte la question de la traite humaine, avec un travail plus approfondi d’identification des individus et des entités qui, par leur implication, financent les groupes terroristes.  Ensuite, a-t-il continué, nous devons intégrer plus systématiquement ces crimes à la dimension sexuelle dans les efforts de médiation et de négociation d’accords de paix ou de cessez-le-feu.  Enfin, a-t-il conclu, nous devons renforcer le rôle et la participation des femmes dans les stratégies de lutte contre la traite et le terrorisme.  

« Le devoir d’exemplarité s’applique à tous », a également jugé le représentant, et il est essentiel que l’ONU et ses États Membres adoptent des mesures concrètes pour prévenir et lutter contre toute forme de violence sexuelle.

Au nom des pays nordiques, M. OLOF SKOOG (Suède) a déclaré qu’une réponse globale exige de placer les efforts dans l’agenda plus large de la paix et du développement durable, à savoir traiter des causes sous-jacentes des conflits, lutter contre la pauvreté et renforcer les capacités nationales, avec la mise à disposition des ressources sur le long terme.  Pour que cette approche réussisse, il faut un changement de perspective à différents niveaux et d’abord accorder plus d’attention à la prévention, ce qui veut dire faire passer les femmes du rôle de victimes à celui d’agents du changement, renforcer les liens entre émancipation économique des femmes, participation politique des femmes et exercice des droits de la femme, transformer les institutions, les normes et les comportements et impliquer les hommes et les garçons à la promotion de l’égalité entre les sexes. 

Il faut aussi une approche institutionnelle plus holistique et plus cohérente, ce qui veut dire des partenariats plus dynamiques et une appropriation nationale renforcée et des processus inclusifs, y compris avec les acteurs non étatiques.  Enfin, la lutte contre la traite et la violence sexuelle liée aux conflits requiert des ressources et un engagement à long terme et en la matière, le Réseau des médiatrices des pays nordiques dont l’objectif est de contribuer aux efforts de médiation de l’ONU, est l’une des illustrations de l’engagement de ces pays.

M. HARALD BRAUN (Allemagne) a jugé notable que, même dans le contexte de conflits aussi brutaux que ceux de la Syrie ou de l’Iraq, la violence sexuelle puisse encore se distinguer dans leur horreur et a rappelé les atrocités subies notamment par les femmes yézidies, dont certaines ont trouvé refuge en Allemagne.  Pour notre pays, a poursuivi le représentant, les régimes de sanctions des Nations Unies peuvent être des instruments utiles pour lutter contre la violence sexuelle.  Il faut toutefois aller plus loin et y inclure la perspective « genre », par exemple en considérant la violence sexuelle comme un déclencheur de sanctions.  Le représentant a ensuite rappelé le rôle que peuvent jouer les associations de femmes face à la violence sexuelle et les liens entre cette violence, la traite et les conflits.  Il s’est félicité des efforts consentis pour mieux intégrer les dispositions de la résolution 1325 sur les femmes, la paix et la sécurité dans le système onusien mais a estimé que l’on pourrait faire plus, notamment en rattachant cette question aux objectifs de développement durable.

Mme KATALIN ANNAMARIA BOGYAY (Hongrie) a déclaré que de nombreuses étapes devraient être franchies pour l’efficacité de la lutte contre cette menace mondiale qu’est la violence sexuelle liée au conflit et la traite des êtres humains.  Les États doivent jouer un rôle plus actif et assumer leur leadership.  La représentante a réaffirmé l’engagement de son gouvernement en la matière et insisté sur l’importance qu’il y a à mettre en œuvre effectivement les instruments internationaux pertinents.  Elle a ajouté que les efforts de prévention et de protection sont nécessaires pour protéger les femmes et les filles affectées par les conflits de la traite.  Les États doivent aussi faire en sorte que ceux qui sont envoyés pour protéger les populations ne soient pas complices de leur exploitation.  Insistant pour conclure sur l’obligation de traduire les présumés coupables ne justice, elle a souligné l’appui de son pays à la participation des femmes à la prévention et la résolution des crises. 

M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a salué cette réunion comme le moyen de consolider l’engagement international en faveur de la lutte contre la violence sexuelle dans les conflits, après l’adoption de la résolution 2253 (2015) qui condamnait l’enlèvement des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle et la déclaration présidentielle de décembre dernier.  La Convention des Nations unies contre le crime organisé et son Protocole, ainsi que l’expertise des agences spécialisées telles que l’ONUDC constituent de bonnes bases pour le rapport du Secrétaire général et son suivi, a ajouté le représentant.  Après avoir rappelé les différentes contributions de son pays, M. Cardio a préconisé une approche holistique, comme l’Italie le fait déjà en matière de migrations. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a estimé que la Journée internationale pour l’élimination de la violence sexuelle liée au conflit, qui sera célébrée pour la première fois le 19 juin, représente un moment idoine pour dresser un bilan des progrès accomplis et des défis à relever.  Il a rappelé le caractère essentiel de la reddition de comptes et estimé que les Tribunaux pénaux internationaux avaient fait progresser de manière importante la lutte contre l’impunité, citant an particulier l’arrêt Akayesu du Tribunal pénal international pour le Rwanda  qui, en 1998, a estimé que les agressions sexuelles constituaient en la circonstance un acte de génocide.  Il a de même rappelé que la Cour pénale internationale (CPI) avait, en mars dernier, jugé responsable, au titre de la responsabilité du supérieur hiérarchique, Jean-Pierre Bemba Gombo, des viols commis par ses subordonnés.  Ces verdicts importants lancent un message clair: l’impunité en matière de violence sexuelle liée aux conflits n’est pas une option, a déclaré M. Wenaweser.

Le représentant a rappelé que la première déclaration présidentielle sur la traite des êtres humains, adoptée en décembre dernier, mettait l’accent sur l’importance de la coopération internationale et les questions soulevées dans le document de réflexion de la présidence française en sont la suite logique.  Le Liechtenstein apprécie notamment les suggestions présentées pour une action concrète du Conseil de sécurité dans le cadre de ses activités spécifiques à certains pays.  Le Liechtenstein voit aussi d’importantes possibilités dans le suivi des flux financiers générés par la traite, qui est non seulement un crime international mais aussi une des sources les plus lucratives de financement du crime organisé.

Enfin, a conclu le représentant, le Liechtenstein plaide pour que l’on lutte contre la culture de l’impunité.  Là où les juridictions  nationales échouent, la justice pénale internationale doit intervenir.  Aux termes du Statut de Rome, a-t-il rappelé, l’esclavage -interdit par le jus cogens et néanmoins largement répandu et impuni– peut constituer un crime contre l’humanité et l’esclavage sexuel, un crime de guerre.  La Cour pénale internationale pourrait jouer un rôle « catalytique » en poursuivant de tels crimes, a conclu le représentant.

M. IOANNIS VRAILAS, de la délégation de l’Union européenne, a rappelé que la traite était très marquée par le genre.  Les plus récentes données de l’Union européenne montrent que la traite à des fins d’exploitation sexuelle est la forme la plus répandue et vise principalement les femmes et les filles.  Il a également noté une augmentation alarmante du nombre de victimes et appelé à un effort de la communauté internationale pour lutter contre les formes les plus haineuses d’exploitation que les groupes terroristes imposent aux populations, traitant les femmes et les filles comme des biens susceptibles d’être échangés, donnés ou trafiqués.  Il a également rappelé le cynisme de l’économie de guerre qui permet, en exploitant des êtres humains, de s’enrichir et de financer des causes destructrices.  Le représentant a souligné que si les cas de Daech est bien connu, il y a aussi d’autres groupes terroristes qui agissent de la même manière dont Boko Haram.  La menace est mondiale comme le montrent les situations en Syrie, au Yémen, en Somalie au Sahel ou encore en République démocratique du Congo.  Il faut mieux comprendre le lien entre violence sexuelle liée aux conflits et traite des personnes, a-t-il encore plaidé.

L’Union européenne met en avant le renforcement de la dimension préventive aux niveaux mondial, régional et national.  Elle demande que soit mieux prise en compte la dimension humaine, et notamment que l’on accorde davantage d’importance et de moyens à la protection des civils, ainsi qu’aux politiques et pratiques d’assistance humanitaire en faveur des survivantes.  Une telle assistance doit être multidimensionnelle et inclure des soins médicaux, psychologiques ainsi que des services juridiques et une assistance socioéconomique. 

L’Union européenne insiste également sur le renforcement de la réponse judiciaire.  Les États doivent renforcer leur législation interne et mettre en œuvre les conventions internationales existantes, et notamment la Convention des  Nations Unies contre le crime organisé et son Protocole sur la prévention de la traite.  Ils doivent aussi utiliser pleinement les moyens créés par le Conseil de sécurité pour combattre la violence sexuelle liée aux conflits, y compris en renforçant les régimes de sanctions.  L’Union européenne salue donc le fait que le Conseil ait, dans sa résolution 2253 (2015), introduit des critères liés à l’exploitation sexuelle dans la définition des groupes terroristes.  L’Union européenne salue également l’importante contribution de la CPI et du Bureau du Procureur, tout en rappelant le caractère complémentaire de la Cour: c’est aux États qu’il incombe en premier lieu de poursuivre les auteurs de tels crimes.

M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a déclaré que le Gouvernement géorgien ne ménage aucun effort pour développer et mettre en œuvre des normes élevées pour la protection des droits de la femme.  Il a attiré l’attention sur la situation humanitaire et des droits de l’homme dans les territoires occupés de Géorgie qui représentent des « trous noirs » où aucun mécanisme international de surveillance n’est autorisé à travailler.  Dans ces territoires, les droits de la femme font l’objet de violations graves.  Sur le plan international, le Ministère géorgien de la défense a, pour sensibiliser ses soldats de la paix, incluent dans la formation pré-déploiement les questions liées au genre et les résolutions pertinentes de l’ONU, a affirmé le représentant. 

Mme CAITLIN WILSON (Australie) s’est félicitée de l’accent mis par le Plan d’action des Nations Unies pour la prévention de l’extrémisme violent et a exhorté le Conseil d’adopter des mesures concrètes pour le mettre en œuvre et contrer ainsi l’utilisation des violences sexuelles comme tactique terroriste.  Pour l’Australie, le rapport du Secrétaire général donne d’utiles recommandations en ce sens.  L’Australie, a-t-elle dit, soutient les efforts des Nations Unies et de la communauté internationale et estime que le Conseil devrait améliorer encore ses capacités d’alerte précoce et de prévention.

Mme Wilson a rappelé que la lutte contre la violence à l’encontre des femmes constitue une priorité du Gouvernement australien et une composante de sa politique étrangère et de ses programmes d’assistance.  Lutter contre la traite des êtres humains et l’esclavage est un moyen important de lutter contre ces violences, a-t-elle ajouté, en précisant que son pays avait lancé en mars dernier une stratégie contre la traite et l’esclavage, dans le cadre de laquelle l’Australie travaille avec plusieurs États partenaires de la région Asie-Pacifique pour renforcer la réponse judiciaire.  Cette stratégie, a-t-elle précisé, comprend quatre piliers: prévention et dissuasion, détection et enquête, poursuites, et protection et soutien aux victimes.

Selon Mme MARÍA EMMA MEJÍA VÉLEZ (Colombie), il faut adopter d’urgence des mesures de prévention qui prennent en compte la vulnérabilité particulière des femmes et des enfants dans le contexte des conflits.  Comme dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, des réponses conjointes et articulées sont nécessaires.  Elles doivent se reposer sur la coopération internationale et la participation de la société civile, en l’occurrence les organisations de femmes. 

Pour sa part, le Gouvernement colombien a développé une stratégie interinstitutionnelle de lutte contre la traite des personnes, a indiqué la représentante qui a constaté « avec plaisir » que le Secrétaire général a souligné dans son rapport que le processus de paix a bien progressé en Colombie et que des normes ont été adoptées pour aider les victimes de la violence sexuelle.  Elle a mentionné l’Accord du 15 mai dernier relatif à la sortie des mineurs des camps des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) et salué l’aide apportée par la Représentante spéciale du Secrétaire général.       

Mme SYLVIE LUCAS (Luxembourg) a rappelé que la situation sur le terrain restait malheureusement en décalage avec la volonté affirmée maintes fois par la communauté internationale d’endiguer et d’éliminer la violence sexuelle.  Elle a aussi noté que, si la majorité des parties figurant dans l’annexe du rapport du Secrétaire général comme recourant à la violence sexuelle dans les conflits sont des groupes non étatiques, les États ne sont pas pour autant innocentés.  Elle a cité, à cet égard, le régime syrien dont l’« arsenal de la terreur » contribue aux déplacements massifs des populations.  Mme Lucas a ensuite dénoncé comme un nouveau « paroxysme de l’horreur » l’économie de guerre mise en place par Daech, dans laquelle la traite des personnes à des fins sexuelles joue un rôle central.  C’est pourquoi, a ajouté la représentante, la résolution 2253 (2015) du Conseil de sécurité, qui inscrit sur la liste relative aux sanctions quiconque transfère des fonds à Daech dans le cadre de l’exploitation sexuelle, de traite ou de commerce, est si importante.

Le Luxembourg soutient pleinement les recommandations du Secrétaire général, notamment son appel à ce que le Conseil ajoute les violences sexuelles aux critères de désignation de tous les comités des sanctions et que ces derniers veillent à inscrire de manière systématique sur leurs listes les auteurs présumés de violence sexuelle.  Le Luxembourg souhaite que le Conseil s’engage pour que les auteurs présumés de violence sexuelle systématique ou leurs commanditaires, soient traduits en justice, par exemple en déférant à la CPI les situations dans lesquelles de telles violences sont commises.  Mme Lucas a rappelé que le déni et l’impunité sont les deux obstacles majeurs à la lutte contre la violence sexuelle dans les conflits.  Nier que la violence sexuelle a une incidence sur la sécurité et la paix, c’est offrir l’impunité aux auteurs de ces actes, a encore affirmé la représentante.

M. KAIRAT ABDRAKHMANOV (Kazakhstan) a dit que la violence liée au conflit doit être abordée dans toutes ses dimensions étant donné qu’elle est liée, directement ou indirectement, à la nature du conflit, au profil des auteurs, aux victimes, au climat d’impunité, à l’effondrement de l’État, aux problèmes transfrontaliers ou aux violations des accords de cessez-le-feu.  Contre la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, tous les efforts des Nations Unies nécessiteront une coordination avec les structures régionales, sans oublier que l’État est le premier responsable de l’élaboration des lois et du renforcement du système judiciaire. 

Le représentant a plaidé pour une pleine mise en œuvre des résolutions 2170 et 2253 du Conseil de sécurité, estimant que certaines des recommandations faites après l’examen des régimes de sanctions de juin 2015 contribueraient à améliorer l’impact des mesures contre les individus et entités impliqués dans la traite.  Il a confirmé l’appui de son pays à la politique de « tolérance zéro » et plaidé pour que les femmes soient pleinement impliquées dans les processus de prévention et de règlement des conflits et de la reconstruction postconflit.  

Mme MINNA-LIINA LIND (Estonie) a souligné l’importance d’une bonne coopération régionale et sous-régionale en Europe, compte tenu de l’augmentation alarmante du nombre de victimes de la traite des êtres humains.  Elle a jugé important de promouvoir l’égalité des sexes et de combattre les stéréotypes et les normes sociales qui encouragent la discrimination et la violence contre les femmes.  L’Estonie en est à son deuxième plan d’action national sur l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité relative aux femmes, à la paix et à la sécurité.  Dans le cadre de la lutte contre l’impunité, la représentante a réitéré le rôle clef de la Cour pénale internationale.   

M. DAVID DONOGHUE (Irlande) a rappelé qu’il y a désormais huit ans que le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1820, qui reconnait la violence sexuelle dans les conflits comme un crime de guerre et un crime contre l’humanité.  Et pourtant, a-t-il constaté, le recours à ce type de violence comme arme de terreur se poursuit dans de nombreux conflits, y compris sous la forme de la traite des femmes et filles à des fins d’exploitation sexuelle, une forme de traite en hausse alarmante.  Pour traiter de cette situation, il faut avant tout mettre en œuvre les mesures prises dans le cadre du thème « les femmes, la paix et la sécurité », a déclaré le représentant.  Pour l’Irlande, les résolutions 1325 et 2242 du Conseil de sécurité, ainsi que d’autres textes importants comme la déclaration présidentielle adoptée en décembre dernier, ont créé un cadre juridique solide et une base sur laquelle on peut lutter contre la traite en fonction du contexte.  Toutefois, a-t-il ajouté, les normes ne sont rien sans l’action; il faut donc agir.

M. Donoghue a estimé que l’on commençait à observer certains résultats positifs et a cité en particulier la participation active des femmes colombiennes dans le processus de paix en cours dans le pays.  Il a aussi mentionné un séminaire actuellement en cours à Dublin sur la problématique homme-femme, dans le contexte des opérations de maintien de la paix.  Mais, pour chaque exemple positif, on trouve d’autres cas de violence terribles, a ajouté le représentant.  La traite à des fins d’exploitation sexuelle est un crime dont les effets se poursuivent longtemps après, compte tenu de la stigmatisation des victimes par leur propre communauté.  Il faut donc assurer la lutte contre l’impunité pour de tels crimes, y compris par le biais de la justice pénale internationale, et il faut venir en aide aux victimes.  Enfin, le représentant a rappelé que l’on ne pourrait lutter contre le fléau de la traite sans consentir davantage d’efforts pour prévenir et résoudre les conflits.

Mme RAIMONDA MURMOKAITĖ (Lituanie) a déclaré que pour lutter contre la violence sexuelle liée au conflit, il faut sortir de la perspective « c’est un monde d’hommes ».  Même l’outil le plus performant pour lutter contre ce fléau ne marchera pas si les femmes continuent d’être les spectatrices des négociations de paix, de la consolidation de la paix et du relèvement après conflit.  Cette lutte requiert l’intégration de la perspective « genre » dans les travaux du Conseil et de tout le système des Nations Unies, avec des actions cohérentes et crédibles.   Là où les actions nationales ne sont pas possibles, les mécanismes internationaux de justice peuvent jouer un rôle, y compris la Cour pénale internationale. 

Elle a appelé le Conseil à bien utiliser les sanctions et estimé que la lenteur de la procédure de sanctions contre l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) inscrite sur la « liste » du Secrétaire général rappelle la nécessité d’une approche vigoureuse.  Les critères d’inscription dans la « liste » devraient être redéfinis pour inclure la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle.  Pour aider les victimes, les dirigeants communautaires, religieux et laïcs doivent déplacer la stigmatisation vers les auteurs des crimes.  La société civile et les ONG ont un rôle à jouer. 

M. JAMAL JAMA AL MUSHARAKH (Émirats arabes unis) s’est réjoui de l’attention portée par la communauté internationale aux victimes de la violence sexuelle dans les conflits.  Cette violence, pratiquée par des groupes extrémistes, fait partie intégrante de l’économie de guerre et de la stratégie de la terreur.  Le représentant a souligné l’importance qu’il y a à lutter contre la propagande extrémiste en ligne, en particulier sur les réseaux sociaux.  Il a rendu hommage aux efforts des Nations Unies en général et plus spécialement ceux de la Représentante spéciale du Secrétaire général et a réaffirmé l’appui de son pays.

Mme CRISTINA MARIA CERQUEIRA PUCARINHO (Portugal) s’est dit choquée par la propension du phénomène de la traite des personnes à travers le monde, dont la violence sexuelle qui en découle.  Elle a estimé que cette traite constitue une des formes les plus graves des violations des droits de l'homme.  La tendance à la hausse de ce phénomène touche d’abord les femmes et les filles, a-t-elle dit, en appelant à la pleine mise en œuvre de la résolution 2242 du Conseil de sécurité et du Plan d’action du Secrétaire général pour la prévention de l’extrémisme violent, en tant que piliers des stratégies de prévention de la violence sexuelle en situation de conflit.

La représentante a également jugé crucial de lutter contre l’impunité et de s’assurer que tous les auteurs de la violence sexuelle soient poursuivis.  Elle a exhorté le Conseil de sécurité à utiliser tous les mécanismes existants pour combattre cette violence et souligné la nécessité de mieux protéger les femmes dans les missions de maintien de la paix et de continuer d’appliquer strictement la politique de « tolérance zéro ».  Le Portugal est le premier pays européen à endosser la campagne « Blue Heart » contre la traite des êtres humains lancée par l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).

M. SYED AKBARUDDIN (Inde) a rappelé le renforcement considérable du cadre normatif de la lutte contre la violence sexuelle dans les conflits dans le cadre des Nations Unies, et notamment du Conseil de sécurité.  Pourtant, ces violences continuent du fait notamment de la persistance de très nombreux conflits, alors que le terrorisme et son financement deviennent de plus en plus transnationaux.  Le représentant a regretté le manque de collaboration entre États, en citant en exemple l’incapacité de ces derniers à adopter une convention globale de lutte contre le terrorisme.  Il a également demandé que, sous le thème « les femmes, la paix et la sécurité » soient prises en compte les questions de développement et de genre qui, a-t-il insisté, relèvent des prérogatives d’autres organes de l’ONU.  Si le Conseil doit faire plus, les travaux normatifs qui sont menées en dehors du Conseil sont également très importants, a ajouté M. Akbaruddin.

Il a rappelé que les poursuites judiciaires constituent un élément de prévention important du fait de leur rôle dissuasif.  Il a demandé au Conseil de sécurité d’être plus proactif dans l’adoption et la mise à jour des listes des personnes et entités soumises à des sanctions.  Il a rappelé que son pays avait présenté cette semaine un projet de loi très complet tendant à mieux protéger les victimes de la traite.

M. VIRACHAI PLASAI (Thaïlande) a rappelé que c’est l’État qui a la responsabilité principale de prévenir et de protéger ses citoyens et les personnes relevant de sa compétence afin qu’elles ne deviennent pas victimes de la traite des personnes.  Il appartient aux États de renforcer leurs capacités pour détecter les trafics d’êtres humains, enquêter et désorganiser les réseaux.  Pour le représentant, il faut avant tout s’attaquer aux causes fondamentales des conflits et mettre l’accent sur les personnes les plus exposées, comme les réfugiés sans papier, les femmes et les enfants non accompagnés.  Le représentant a également rappelé l’importance des échanges entre les services de renseignements des États d’origine, de transit et de destination des migrants, et entre les organisations internationales et régionales.

M. Plasai a rappelé que la violence sexuelle comme tactique de guerre est un crime de guerre et un crime contre l’humanité, dont les auteurs doivent être poursuivis.  Lutter contre l’impunité est l’une des tâches les plus importantes à accomplir, a-t-il rappelé, avant de demander au Conseil de sécurité  de renforcer son régime de sanctions ciblées contre les individus et entités impliqués dans la violence sexuelle dans les conflits.  Il a également demandé la mise en place de régimes de surveillance efficaces pour assurer le suivi des sanctions.  Le représentant a par ailleurs estimé que la présence d’effectifs féminins dans les opérations de maintien de la paix contribue à créer un environnement plus sûr pour les femmes et les filles et à créer une voie de communication, de partage d’informations et de confiance susceptible de permettre aux autorités d’identifier les auteurs de violence sexuelle.  Dans ce contexte, la Thaïlande a fait des efforts constants pour former son personnel féminin des opérations de maintien de la paix, a déclaré M. Plasai.

M. DAVID YITSHAK ROET (Israël) a dit que le rapport du Secrétaire général est un tragique catalogue d’histoires et de chiffres qui heurte notre conscience.  La violence sexuelle est une arme de guerre et de terreur utilisée par le régime d’Assad pour briser la résistance du peuple.  Il faut combattre l’esclavage sexuel qui est devenu aujourd’hui pour les militants islamistes un moyen de recrutement, une source de revenus et un moyen de terroriser les populations.  Mettant l’accent sur la lutte contre l’impunité, il a dit que tous les auteurs de violence ou d’exploitation sexuelle doivent être poursuivis.  Pensons aux 219 filles de Chibok au Nigéria qui ne sont toujours pas rentrées chez elles, pensons à ces milliers de filles yézidies qui sont vendues et revendues entre militants de Daech.  Et si ces filles étaient nos filles, a conclu le représentant.

Mme BÉNÉDICTE FRANKINET (Belgique) a rappelé que la lutte contre la violence sexuelle était une priorité de son pays.  Elle a également rappelé que la répression était un élément essentiel de la prévention de la violence sexuelle dans les conflits, du fait de son rôle dissuasif.  C’est pourquoi la Belgique fait de la lutte contre l’impunité une de ses priorités.  L’intégration de la dimension de genre est une autre composante essentielle de la lutte contre la violence sexuelle et c’est un des deux éléments essentiels du plan d’action national de lutte contre la traite étalé jusqu’en 2019.  La Belgique juge également impératif de discuter avec les leaders religieux et moraux qui peuvent contribuer à reporter sur les auteurs de la violence sexuelle la stigmatisation qui frappe souvent et injustement les victimes.

M. MAHLATSE MMINELE (Afrique du Sud) a dit que les femmes devaient être présentes dans tous les processus de prise de décisions et tous les programmes de protection des civils.  Il s’est dit encouragé par le rôle majeur de l’Union africaine et son engagement à intégrer la sexospécificité dans toutes ses politiques.  Il a dit l’importance d’avoir des médiatrices dans les conflits et a appelé à tout mettre en œuvre pour que la violence sexuelle cesse d’être utilisée comme tactique de guerre ou de terrorisme.  Il a demandé que les principes d’égalité homme-femme soient intégrés dans tous les processus de gouvernance pour que la voix des femmes et leurs préoccupations soient prises en compte.   

M. MICHAEL BONSER (Canada) a rappelé que la violence sexuelle sous toutes ses formes est fortement préjudiciable à la capacité des femmes d’apporter une contribution utile à la vie, à leur communauté et à leur pays, alors qu’une telle contribution est un préalable essentiel à une paix et une prospérité durables.  Du fait de son rôle de premier plan dans la sensibilisation aux conséquences du mariage des enfants, précoce ou forcé, le Canada est particulièrement préoccupé par les informations faisant état d’une forte augmentation de ces mariages dans les situations de conflit et de déplacement.  C’est pourquoi le pays a financé une étude sur la manière dont les pratiques traditionnelles changent en situation de conflit et de déplacement.  L’étude a permis de dégager des stratégies.

Estimant que la traite est un affront aux droits fondamentaux et à la dignité humaine, le Canada pense qu’il faut s’y attaquer en appliquant pleinement les lois nationales et le droit international.  Le Canada, qui compte parmi les premiers pays à avoir ratifié le Protocole des Nations Unies contre la traite des personnes, prend très au sérieux les obligations qui en découlent.  Le représentant a en outre rappelé que son gouvernement a lancé un réexamen de son aide internationale pour déterminer le meilleur moyen d’aider les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables et harmoniser ses priorités avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il s’agit de savoir comment inscrire dans l’aide internationale du Canada l’autonomisation des femmes et des filles et la promotion et la protection de leurs droits.  Le représentant a sollicité la contribution de tous les acteurs à cet examen, dont les observations devraient être présentées avant la fin du mois de juillet.

M. PAUL ALEX MENKVELD (Pays-Bas) a jugé essentiel de s’attaquer à la traite des êtres humains et à la violence sexuelle en situation de conflit.  La réalité transfrontalière du phénomène d’exploitation sexuelle nous impose de lutter contre cette traite aux niveaux local, régional et mondial.  Soulignant l’importance de la prévention, il a prévenu qu’il est impossible de protéger les femmes si elles ne sont pas autonomisées et si elles ne participent pas au processus de prise de décisions.  Le temps est venu de reconnaitre les liens étroits entre protection des femmes et leur participation efficace dans les processus de maintien et de consolidation de la paix, et de reconstruction postconflit.  Cela passe par une meilleure coopération avec les communautés locales et la société civile qui savent comment contacter les victimes et identifier les auteurs de la violence sexuelle.  Il faut apporter un soutien aux femmes et aux filles afin qu’elles puissent surmonter la stigmatisation, a-t-il encore ajouté.  

M. ANTONIO DE AGUIAR PATRIOTA (Brésil) a rappelé que la violence sexuelle dans les conflits pouvait constituer un crime contre l’humanité.  Le Brésil se félicite des initiatives multilatérales pour attirer l’attention sur ce fléau, comme la Journée internationale du 19 juin.  Le représentant a rappelé que la CPI avait entamé son premier procès dans lequel il fait état du recours à la violence sexuelle comme arme de guerre, en l’occurrence en République centrafricaine.  Le représentant a en outre estimé qu’il fallait reconnaitre le rôle des femmes comme acteurs et non pas seulement comme victimes, dans le maintien et la consolidation de la paix, et la reconstruction postconflit.  Il a rappelé que, dans le cadre de la coopération Sud-Sud ou dans celui des opérations de maintien de la paix, le Brésil avait des programmes de sensibilisation aux questions du genre et de violence sexuelle.

M. ABDERRAZZAK LAASSEL (Maroc) s’est alarmé de la répétition, de la multitude et de la persistance de la violence sexuelle dans les conflits, malgré les avancées historiques constatées depuis l’adoption en 2000 de la résolution 1325.  Les informations obtenues sur les milliers de femmes enlevées par les groupes terroristes Daech et Boko Haram révèlent des méthodes et des pratiques barbares et inhumaines.  La majorité des victimes restent silencieuses par peur des représailles ou de la stigmatisation.  La prévention et la lutte contre la violence sexuelle ne seront efficaces, a prévenu le représentant, que si elles s’appuient sur une réelle volonté politique internationale et des mesures fermes contre tous ceux qui continuent d’agir au mépris du droit international et des normes de protection des femmes et des enfants.  La lutte contre la criminalité et les poursuites judiciaires ne suffisent pas à combattre la traite des êtres humains.  « Il est impératif de l’incriminer et d’assurer la protection des victimes », a insisté le représentant du Maroc.

M. MATEO ESTREME (Argentine) a rappelé que son pays avait joué un rôle important dans l’adoption par l’Assemblée générale de la résolution proclamant, le 19 juin, Journée internationale pour l’élimination des violences sexuelles dans les conflits.  L’Argentine appuie fermement le travail de la Représentante spéciale du Secrétaire général et rappelle le rôle des juridictions pénales internationales  pour définir et combattre la violence sexuelle dans les situations de conflit.  Le représentant a en effet estimé qu’il faut redoubler d’efforts pour poursuivre les auteurs de ces « crimes de guerre », aider les victimes et assurer leur réintégration sociale.  Pour l’Argentine, ces questions prioritaires doivent être prises en compte dans les mandats des opérations de maintien de la paix et dans la composition de leur personnel.  Par ailleurs, l’Argentine considère que les abus sexuels commis dans le cadre des opérations de maintien de la paix sont « inadmissibles et désastreuses » pour l’image des Nations Unies.  Elle appuie donc pleinement la politique de « tolérance zéro » et celle pour l’assistance aux victimes.

M. CLAUDE BOUAH-KAMON (Côte d’Ivoire) a rappelé que son pays, qui a connu une décennie de crise, a aussi connu au cours de cette période des cas de violences sexuelles.  Dans sa ferme volonté de s’attaquer à ce phénomène, le Gouvernement ivoirien a, outre les dispositifs juridiques existants, mis en place une stratégie nationale.  Dans ce cadre, le Ministère de la défense a lancé plusieurs initiatives depuis 2011 dont un plan d’action des Forces armées ivoiriennes (FRCI) contre les violences liées au conflit qui se déclinent en quatre axes: le renforcement des capacités des FRCI, pour répondre aux violences sexuelles liées au conflit, en prenant en charge les victimes et en poursuivant les auteurs; le renforcement du cadre institutionnel pour la prévention et la répression des violences sexuelles au sein des FRCI; l’accroissement des résultats de la lutte contre l’impunité; et le suivi-évaluation des activités et efforts de lutte contre les violences sexuelles commises par les FRCI.  Le représentant a assuré que le Gouvernement ivoirien est déterminé à lutter contre la violence sexuelle et à la prévenir.  Il a demandé que l’on ne mentionne plus les FRCI dans les rapports du Secrétaire général.

M. HAIDAR (Nigéria) a estimé que les femmes qui vivent dans les zones de conflit, pour la plupart non combattantes, souffrent autant sinon plus que les soldats en service actif.  Il faut étudier davantage la prévalence de la violence sexuelle dans les conflits pour trouver des solutions durables.  Pour le Nigéria, il faut, au-delà des situations de conflit actif, s’intéresser à toutes les situations humaines.  Comme les conflits n’existent pas dans le vide, il faut dès lors s’interroger sur la violence sexuelle dans le contexte plus large de la société humaine.  Le représentant a souligné le caractère essentiel de la prévention, quel que soit le contexte.  Le Nigéria soutient donc les mesures prises par les Nations Unies pour adapter ses indicateurs d’alerte précoce de la violence sexuelle dans les conflits.

Le représentant a condamné dans les termes les plus vifs l’enlèvement, la traite et la maltraitance des femmes et des filles par les groupes extrémistes et y a vu la nécessité pour la communauté internationale de combattre d’urgence l’extrémisme violent et les idéologies qui l’alimentent.  Il a rappelé que le 14 avril 2016 a marqué le deuxième anniversaire de l’enlèvement de 276 jeunes filles par le groupe terroriste Boko Haram.  Avec les pays voisins, le Nigéria est en train de gagner la guerre contre ce groupe terroriste, a affirmé le représentant qui a noté que le Conseil de sécurité avait, dans sa résolution 2242, qualifié la violence sexuelle à la fois de tactique de guerre et de tactique terroriste.  Cela est évident dans le cas de Boko Haram ou encore de Daech, a-t-il acquiescé.

Il y a donc un certain mérite à aligner les efforts de lutte contre l’extrémisme violent et de celle contre la violence sexuelle dans les conflits, a-t-il dit, en mettant en avant les efforts de son pays qui utilise une approche multidimensionnelle incluant la paix, la sécurité et le développement et mettant l’accent sur la dé-radicalisation, le renouveau économique et la lutte contre la propagande extrémiste.

M. OMER DAHAB FADL MOHAMED (Soudan) a regretté de n’avoir pas pu rencontrer la Représentante spéciale du Secrétaire général sur les violences sexuelles pour discuter du contenu du rapport présenté aujourd’hui au Conseil de sécurité lequel, a dénoncé le représentant, n’a pas tenu compte du point de vue de la délégation du Soudan.  Ce rapport, s’est-il étonné, a été présenté aux États que 24 heures à peine avant son examen au Conseil de sécurité.  Le représentant a jugé « inacceptable » que ce rapport renouvelle les accusations contre les Forces armées du Soudan dont certains membres auraient commis un viol collectif en 2014.

Illustrant ensuite les efforts de son pays, le représentant a attiré l’attention sur la loi contre la traite des êtres humains et la Conférence régionale de haut niveau de 2014 sur la lutte contre ce fléau dans la Corne de l’Afrique.  Notant que le paragraphe 63 du rapport précise que 53% des agressions sexuelles signalées se produisent lorsque les victimes se rendent dans des zones isolées, il a estimé que son pays ne pouvait être tenu responsable des crimes commises dans les zones qu’il ne contrôle pas.  

M. OLIVIER MARC ZEHNDER (Suisse) a mis l’accent sur la vulnérabilité des personnes déplacées, la traite utilisée comme moyen d’alimenter les conflits armés et  l’importance de la lutte contre l’impunité.  Il a rappelé que les personnes déplacées non enregistrées, et notamment les femmes et les filles, étaient particulièrement vulnérables à la traite des êtres humains, car victimes faciles pour des réseaux criminels organisés.  La Suisse préconise une approche globale et estime que les politiques migratoires restrictives qui limitent les chances des femmes et filles de quitter les zones de conflit ne peuvent qu’augmenter encore leur vulnérabilité.  Il faut donc, par la négociation et le dialogue constructif,  rectifier ces politiques.

Le représentant a rappelé que la traite était devenue un élément à part entière de l’économie de guerre, contribuant au financement des groupes armés et servant d’incitation au recrutement des combattants.  Il est important de prendre conscience que la traite alimente ainsi les conflits armés et qu’il est fondamental d’assurer la participation des femmes et filles dans le développement de stratégies de lutte contre ce fléau, le terrorisme et l’extrémisme violent.  Le cinquième examen de la Stratégie antiterroriste mondiale constitue une occasion d’en discuter.  Par ailleurs, la Suisse juge important de renforcer le dialogue avec les groupes armés non étatiques afin qu’ils se conforment davantage au droit international humanitaire et aux droits de l’homme et soutient en ce sens l’ONG « Appel de Genève » qui discute avec ces groupes en leur faisant signer des engagements volontaires sur le respect des normes internationales.

La Suisse soutient les efforts de la Cour pénale internationale (CPI) et du Bureau du procureur pour lutter contre l’impunité pour les crimes sexuels et plaide pour une approche holistique dans le traitement des survivants de telles violences.  À cet égard, la Suisse soutient les efforts en République démocratique du Congo visant à fournir aux victimes une représentation légale devant les tribunaux et les efforts de documentation des cas de violence sexuelle.  Enfin, le représentant a rappelé que la Suisse insiste sur l’importance d’une action globale contre la traite et l’exploitation et les abus sexuels par le personnel des  Nations Unies.  Elle demande au Secrétaire général de poursuivre sans relâche et sans délai ses efforts.

M. GÜVEN BEGEÇ (Turquie) a dit que son pays promeut activement la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité et toutes celles qui ont suivi.  En raison de sa situation géographie particulière de pont entre deux continents, la Turquie est particulièrement concernée par la traite des êtres humains.  Le pays fournit deux types de soutien: un programme d’appui aux victimes et un programme d’aide au retour.  Le représentant a souligné, à son tour, l’importance de l’autonomisation des femmes, en expliquant que la Turquie appuie des programmes en ce sens en Afghanistan et en Somalie.  Entre 2013 et 2015, a-t-il précisé, le programme humanitaire pour la prévention et la réponse à la violence sexuelle en faveur des femmes syriennes a été mené par les Ministères turcs de la famille et des affaires sociales, en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP).  

M. IGNACE GATA MAVITA WA LUFUTA (République démocratique du Congo) a rappelé que le long conflit dont l’est de son pays a été le théâtre est à l’origine du recours à la violence sexuelle comme arme de guerre.  Le rétablissement de la paix a apporté de grands changements, et de grands progrès ont été réalisés tant dans la lutte contre ces violences, qui ont baissé de 80%, que dans l’assistance aux victimes, a ajouté le représentant, qui a cité les rapports du Secrétaire général.  Il a affirmé la volonté de son gouvernement de respecter ses engagements internationaux, notamment pour lutter contre l’impunité au sein des Forces armées et pour apporter une aide aux victimes et assurer leur réinsertion sociale.  Ces programmes ont été menés avec les ressources propres du Gouvernement, avec l’assistance de la communauté internationale via le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général, a précisé le représentant, qui a remercié les Nations Unies et les partenaires de son pays pour leur appui.

M. AMJAD QASSEM AGHA (République arabe syrienne) a dénoncé la campagne de diabolisation menée par les médias internationaux alors que son gouvernement n’a cessé de coopérer avec la communauté internationale.  Il a regretté que le rapport dont est saisi le Conseil de sécurité n’examine pas le sort des femmes syriennes dans les camps de réfugiés des pays voisins.  Il a dit avoir vu des informations faisant état de la traite des êtres humains dans les campagnes turques pour le trafic d’organes.  Le rapport, a-t-il aussi dénoncé, ne dit rien sur les femmes du Golan syrien occupé ni des Palestiniennes victimes de toutes les formes de traitement dégradant.  « Des centaines de femmes palestiniennes sont victimes des violations des droits de l'homme commises par l’entité juive », a-t-il insisté, avant de proclamer la détermination de son pays à appuyer la mise en œuvre de toutes les mesures internationales contre toutes les formes de violence sexuelle. 

Reprenant la parole, le représentant de la Turquie a répondu à son homologue syrien en citant une partie du rapport de la Rapporteure spéciale qui fait état de cas de violence sexuelle imputés aux autorités de la Syrie, en particulier dans les centres de détention et d’interrogatoire.

Tout ce que j’ai dit, a rétorqué le représentant de la République arabe syrienne, a été puisé dans les informations diffusées par les medias turcs.  La Rapporteure spéciale sait parfaitement ce qui se passe dans les camps de réfugiés en Turquie et dans les pays limitrophes, a-t-il répété.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’ECOSOC demande l’intensification de la « transversalisation » de la problématique hommes-femmes au sein du système des Nations Unies

Session de 2016, Réunion de coordination et d’organisation
27e & 28e séances - matin & après-midi
ECOSOC/6767

L’ECOSOC demande l’intensification de la « transversalisation » de la problématique hommes-femmes au sein du système des Nations Unies

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a demandé, aujourd’hui, que l’on poursuive et intensifie les mesures prises pour « transversaliser » la problématique hommes-femmes dans l’ensemble des politiques et programmes de l’Organisation des Nations Unies, notamment en augmentant les ressources allouées à cette entreprise.

Cette proposition de l’ECOSOC est contenue dans l’une des sept résolutions qu’il a adoptées en cette deuxième journée de sa réunion de coordination et d’organisation.

Une table ronde, en matinée, sur cette même question, avait permis aux intervenants de discuter des acquis du système des Nations Unies en matière de mise en œuvre de l’approche genre, et des voies et moyens d’améliorer la prise en compte de ce principe par les États Membres, en tenant compte du nouveau programme de développement international.

Au sujet, précisément, de ce programme, le représentant du Mexique a déclaré qu’il faut aller au-delà de l’objectif 5, consacré à l’égalité des sexes, et s’assurer que la question du genre est intégrée de manière transversale dans le processus de mise en œuvre des autres objectifs de développement durable.  Pour ce faire, il a estimé nécessaire d’avoir des données sexospécifiques qui vont aider dans l’établissement des indicateurs nationaux relatifs à l’approche genre.   

Malheureusement, la plupart des États n’investissent pas dans les moyens idoines pour la collecte et l’analyse des données sexospécifiques, a déploré M. Papa Seck, d’ONU-Femmes.  Il a aussi précisé qu’en plus des fonds, il faudrait également assurer le renforcement des capacités des professionnels de la statistique sur les questions liées à l’égalité des sexes.

En vertu d’une autre résolution présentée par la Commission de la condition de la femme, et adoptée après un vote, l’ÉCOSOC a réaffirmé que l’occupation israélienne demeurait le principal obstacle à l’amélioration de la condition des Palestiniennes, à leur promotion, à leur autonomisation et à leur participation au développement de leur société.

Pour l’ECOSOC, leur rôle dans la prise des décisions concernant la prévention et le règlement des conflits doit être accru, tandis qu’il convient de veiller à ce qu’elles participent et soient associées sur un pied d’égalité à toutes les initiatives tendant à l’instauration, au maintien et à la promotion de la paix et de la sécurité.

L’Observatrice de l’État de Palestine a fait part de sa satisfaction après cette adoption, appelant la communauté internationale à être « ferme » dans sa volonté de faire respecter le droit international, y compris celui de son peuple qui aspire à une solution juste et durable à ses problèmes.   

L’ECOSOC, dans une résolution intitulée les aspects sociaux du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), adoptée également à l’issue d’un vote, demande à la communauté internationale d’accroître son soutien et de respecter ses engagements s’agissant de réaliser des progrès dans les domaines essentiels au développement économique et social de l’Afrique.  

Par ailleurs, le Conseil a décidé que le thème prioritaire retenu pour la session d’examen et la session directive du cycle de 2017-2018 de la Commission du développement social serait « Stratégies d’élimination de la pauvreté visant à parvenir à un développement durable pour tous ».   

Il a en outre demandé instamment aux États Membres de continuer d’accorder une attention particulière au renforcement du développement social, en particulier à l’élimination de la pauvreté et à la réduction des inégalités, en appuyant le plein emploi productif et un travail décent pour tous et en favorisant l’inclusion sociale.

Enfin, l’ECOSOC a pris note du rapport de la Directrice générale de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur l’Équipe spéciale interorganisations des Nations Unies pour la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles, et des recommandations qu’il comporte.

La réunion de coordination et d’organisation de l’ECOSOC prend fin demain, vendredi 3 juin, en matinée.

RÉUNION DE COORDINATION ET D’ORGANISATION

Questions de coordination, questions relatives au programme et autres questions: transversalisation de la problématique hommes-femmes dans l’ensemble des politiques et programmes du système des Nations Unies  

M. ANTONIO DE AGUIAR PATRIOTA, Président de la Commission de la condition de la femme, a fait le compte rendu de la dernière session de la Commission qu’il préside.  Il a indiqué qu’à la soixantième session de la Commission en mars dernier, un message fort avait été envoyé sur l’urgence et l’importance d’une mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 respectueuse de l’approche genre.  La Commission a notamment proposé des pistes devant guider les gouvernements dans l’établissement des législations nationales prenant en compte l’égalité des sexes.

En outre, la Commission a établi un programme de travail pluriannuel, allant de 2017 à 2019, avec les thématiques de discussions annuelles suivantes: l’autonomisation économique de la femme en 2017, l’autonomisation des femmes et filles rurales en 2018 et les systèmes de protection sociale et les femmes pour la session de 2019.

Mme LAKSHMI PURI, Directrice exécutive adjointe, Bureau d’appui intergouvernemental et des partenariats stratégiques d’ONU-Femmes, a ensuite présenté le Rapport du Secrétaire général sur la transversalisation de la problématique hommes-femmes dans l’ensemble des politiques et programmes du système des Nations Unies (E/2016/57).

Le rapport évalue les progrès accomplis dans l’exécution du Plan d’action à l’échelle du système des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et la prise en compte de la problématique hommes-femmes dans les activités opérationnelles du système des Nations Unies pour le développement.

Les recommandations présentées à l’issue de ce rapport sur la façon de soutenir l’accélération de la prise en compte de la problématique hommes-femmes dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 seront portées à l’examen du Conseil économique et social lors de sa session de 2016. 

Le rapport se termine par une recommandation appelant à aider les États Membres qui le demandent à utiliser et exploiter pleinement les connaissances et le savoir-faire du système des Nations Unies concernant la prise en compte intégrée et systémique de la problématique hommes-femmes, en se fondant sur les mandats de tous les organismes des Nations Unies et leurs contributions à la mise en œuvre du Programme 2030 compte tenu de la problématique hommes-femmes.

Table ronde sur « la transversalisation de la problématique hommes-femmes dans l’ensemble des politiques et programmes du système des Nations Unies »

La table ronde, animée par Mme LAKSHMI PURI d’ONU-Femmes, a permis aux intervenants de discuter des acquis du système des Nations Unies en matière de mise en œuvre de l’approche genre, et des voies et moyens d’améliorer la prise en compte de ce principe par les États Membres, en tenant compte du nouveau programme de développement international.

M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a déclaré qu’il faut aller au-delà de l’objectif 5, consacré à l’égalité des sexes, du Programme de développement durable à l’horizon 2030, et s’assurer que la question du genre est intégrée de manière transversale dans le processus de mise en œuvre des autres objectifs de développement durable.  Pour ce faire, il a estimé qu’il était nécessaire d’avoir des données sexospécifiques qui permettront l’établissement des indicateurs nationaux relatifs à l’approche genre.  Il a également insisté sur le besoin d’assurer un suivi annuel de la mise en œuvre de tous les 17 objectifs de développement durable.

Mme EVA JOHANNSON, Conseillère en genre au Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a parlé du Plan d’action à l’échelle du système des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (SWAP ou ONU-SWAP).  Ce plan d’action a été lancé en 2012 afin de mettre en œuvre la politique en matière d’égalité des sexes de sa plus haute instance dirigeante, le Conseil des chefs de secrétariat des Nations Unies, présidé par le Secrétaire général.  Mme Johannson a indiqué que le FNUAP avait introduit le SWAP dans toutes ses politiques et dans l’évaluation des résultats du Fonds, une approche beaucoup plus efficace que celle consistant à mettre en œuvre un programme séparé consacré exclusivement à l’approche genre.

M. PAPA SECK, spécialiste des politiques de recherche et de données à ONU-Femmes, a indiqué que le système onusien comprenait un groupe d’experts interagences qui travaille sur les données sexospécifiques.  Il a expliqué que la plupart des États n’investissaient malheureusement pas dans les moyens idoines pour la collecte et l’analyse des données sexospécifiques.  En 2013, a-t-il fait observer, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) avait relevé qu’à peine 2% des fonds annuels consacrés aux statistiques avaient servi à la collecte des données relatives au genre.  Il a appelé à plus de financements en faveur de données sexospécifiques, précisant qu’outre des fonds, il faudrait également assurer le renforcement des capacités des professionnels de la statistique sur les questions liées à l’égalité des sexes.

Mme Puri a affirmé que la Fondation Gates venait, fort opportunément, d’allouer 80 millions de dollars à la collecte des données sur le genre à travers le monde.

Le représentant du Royaume-Uni a ensuite demandé ce qu’il en était du vœu de voir une parité parfaite des genres dans les postes de haut rang au sein du système des Nations Unies.

Mme APARNA MEHROTRA, responsable de la Division de la coordination et point focal sur les questions liées aux femmes dans le système des Nations Unies (ONU-Femmes), a déclaré que des ajustements conséquents seraient faits en vue d’améliorer les aspects déficients du SWAP dans sa deuxième phase de mise en œuvre qui débute en 2017.  Elle a déclaré qu’avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030, les agences onusiennes seront désormais appelées à mesurer la mise en œuvre de l’objectifs de développement durable 5 relatif à l’égalité des sexes, chaque agence allant en outre établir un suivi de l’approche genre, appliquée de manière transversale, dans les objectifs de développement durable qui sont proches de son mandat. 

Au sujet de la parité au sein du personnel onusien de haut rang, elle a expliqué qu’il fallait tenir compte des départs à la retraite afin de prévoir un remplacement des personnels masculins par ceux féminins afin de combler le fossé, sachant que d’autres variables peuvent également entrer en considération dans le choix des fonctionnaires.

Adoption de résolution

L’ECOSOC a adopté par consensus la résolution intitulée « Transversalisation de la problématique hommes-femmes dans l’ensemble des politiques et programmes du système des Nations Unies » (E/2016/L.17).

En vertu de ce texte, l’ECOSOC demande instamment que l’on poursuive et intensifie les mesures prises pour transversaliser la problématique hommes-femmes dans l’ensemble des politiques et programmes de l’Organisation des Nations Unies, notamment en augmentant les ressources allouées à cette entreprise dans la mesure qu’exigent les objectifs d’égalité des sexes, conformément à toutes les résolutions de l’Organisation sur la question, en particulier les siennes. 

Questions sociales et questions relatives aux droits de l’homme: promotion de la femme

Adoption de résolution

L’ECOSOC a adopté deux résolutions contenues dans le rapport qui lui a été présenté par la Commission de la condition de la femme.

Par la résolution I, adoptée par consensus, L’ECOSOC prend note du programme de travail pluriannuel de la Commission de la condition de la femme.

Le Conseil économique et social a ensuite adopté la résolution II, intitulée « La situation des femmes palestiniennes et l’aide à leur apporter », après un vote avec 27 voix pour, 2 contre (États-Unis et Australie) et 19 abstentions.

Par cette résolution, l’ECOSOC réaffirme que l’occupation israélienne demeure le principal obstacle à l’amélioration de la condition des Palestiniennes, à leur promotion, à leur autonomisation et à leur participation au développement de leur société, et souligne qu’il importe de s’employer à accroître leur rôle dans la prise des décisions concernant la prévention et le règlement des conflits et de veiller à ce qu’elles participent et soient associées sur un pied d’égalité à toutes les initiatives tendant à l’instauration, au maintien et à la promotion de la paix et de la sécurité.

Après cette adoption, l’observatrice de l’État de Palestine a fait part de sa satisfaction, appelant la communauté internationale à être « ferme » dans sa volonté de faire respecter le droit international, y compris celui des Palestiniens qui aspirent à une solution juste et durable à leurs problèmes.  Elle a précisé que les Palestiniens souhaitaient vivre dans un État libre et indépendant, installé sur les frontières qui étaient en vigueur en 1967, et avec Jérusalem-Est comme capitale.

L’ECOSOC a adopté le rapport des travaux de la soixantième session de la Commission de la condition de la femme (20 mars 2015 et 14-24 mars 2016), et le programme de travail provisoire de sa soixante et unième session tel que contenu dans le rapport de la Commission (E/2016/27).

Questions de coordination, questions relatives au programme et autres questions: Prévention et maîtrise des maladies non transmissibles

M. WERNER H. OBERMEYER, Directeur exécutif adjoint du Bureau de New York de l’Organisation mondiale de la Santé, a présenté le rapport de la Directrice générale de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur l’Équipe spéciale interorganisations des Nations Unies pour la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles (E/2016/53).

La Directrice générale de l’OMS y indique que le nombre de pays ayant doté leur ministère de la santé d’unités opérationnelles sur les maladies non transmissibles a commencé à augmenter.  Ces progrès ont incité les membres de l’Équipe spéciale à affirmer qu’il est possible d’atteindre, d’ici à 2030, l’objectif mondial de réduction d’un tiers de la mortalité prématurée imputable aux maladies non transmissibles. 

M. Obermeyer a souligné que les préparatifs sont déjà engagés dans l’optique de la troisième réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur les maladies non transmissibles, prévue en 2018, et faisant suite à celles de 2011 et 2014.

Adoption de résolution

L’ECOSOC a adopté par consensus la résolution intitulée « Équipe spéciale interorganisations pour la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles » (E/2016/L.16).  Par ce texte, il prend note du rapport de la Directrice générale de l’Organisation mondiale de la Santé sur l’Équipe spéciale interorganisations des Nations Unies pour la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles, et des recommandations qu’il comporte.

Questions sociales et questions relatives aux droits de l’homme: développement social

Mme CHANDRA ROY-HENRIKSEN, Responsable de la Division des politiques sociales du Département des affaires économiques et sociales (DAES), a présenté le rapport du Secrétaire général portant sur la réalisation et le suivi des objectifs de l’Année internationale de la famille (E/2016/7).

Le rapport rend compte des initiatives prises récemment afin de réaliser les objectifs de l’Année internationale de la famille, célébrée en 1994, et d’en assurer le suivi, tant au niveau national qu’international, et il s’intéresse à la poursuite de l’élaboration de la politique familiale dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Dans le rapport, les États Membres et autres parties prenantes sont encouragés à poursuivre leurs efforts en faveur de la réalisation et du suivi des objectifs de l’Année internationale de la famille; d’envisager d’appliquer des politiques et des programmes axés sur la famille dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, afin notamment d’éliminer la pauvreté et la faim, de promouvoir le bien-être de tous à tout âge, de promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie et de parvenir à l’égalité des sexes; et de réviser la législation familiale, en fonction du contexte national, afin que les femmes aient accès à la justice dans des conditions d’égalité.

M. ION JINGA (Roumanie), ancien Président de la Commission du développement social, a présenté le rapport de la cinquante-quatrième session de la Commission.  Il a indiqué que les débats ont permis de rappeler l’importance de soutenir l’épanouissement des groupes sociaux les plus défavorisés, notamment dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Le représentant du Mexique a déclaré que son gouvernement venait d’adopter une loi qui permet désormais « le mariage égalitaire » pour tout citoyen âgé d’au moins 18 ans.  Dans cette optique, les consulats du Mexique à travers le monde ont désormais l’obligation d’apporter les modifications nécessaires sur les documents d’état civil, notamment si les détenteurs estiment avoir changés de sexe, ou s’ils veulent épouser un partenaire de même sexe.

Adoption de résolutions

L’ECOSOC a adopté trois résolutions contenues dans le rapport de la Commission du développement social (E/2016/26).  Ainsi, par la résolution I, intitulée « Organisation future des travaux et méthodes de travail de la Commission du développement social », l’ECOSOC décide de continuer à organiser selon un cycle de deux ans la session d’examen et la session directive de 2017 et 2018 de la Commission.

Il réaffirme également que les membres du Bureau de la Commission continueront d’être élus pour un mandat de deux ans correspondant à la session d’examen et à la session directive du cycle de 2017-2018, et il décide en outre que le thème prioritaire retenu pour la session d’examen et la session directive du cycle de 2017-2018 sera le suivant: « Stratégies d’élimination de la pauvreté visant à parvenir à un développement durable pour tous ».

Par ailleurs, en vertu de ce texte, l’ECOSOC décide d’envisager le caractère biennal des résolutions de la Commission afin d’éliminer les redondances et les chevauchements et de promouvoir la complémentarité des travaux et des négociations portant sur des questions proches ou similaires dont lui-même et l’Assemblée générale sont saisis.

La résolution II intitulée « Aspects sociaux du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique » a aussi été adoptée par vote, avec 26 voix en faveur, 16 contre et aucune abstention.

Dans ce texte, l’ECOSOC demande à la communauté internationale d’accroître son soutien et de respecter ses engagements s’agissant de réaliser des progrès dans les domaines essentiels au développement économique et social de l’Afrique, et salue les mesures prises par les partenaires de développement pour renforcer leur coopération dans le cadre du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique.

Par la suite, la résolution III, intitulée « Repenser et renforcer le développement social dans le monde contemporain » a été adoptée par consensus.  En vertu de ce texte, le Conseil économique et social demande instamment aux États Membres de continuer d’accorder une attention particulière au renforcement du développement social, en particulier à l’élimination de la pauvreté et à la réduction des inégalités, en appuyant le plein emploi productif et un travail décent pour tous et en favorisant l’inclusion sociale.

L’ECOSOC a enfin approuvé le rapport de la cinquante-quatrième session de la Commission du développement social et le programme provisoire de la cinquante-cinquième session. 

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