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Le Forum politique de haut niveau achève une semaine marquée par l’engagement fort des États Membres et de toutes les parties prenantes au Programme 2030

Forum politique de haut niveau, Session de 2018
13e, 14e & 15e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6939

Le Forum politique de haut niveau achève une semaine marquée par l’engagement fort des États Membres et de toutes les parties prenantes au Programme 2030

La Réunion du Forum politique de haut niveau pour le développement durable organisée sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC) a achevé, ce soir, sa première semaine de travaux, l’occasion pour la Présidente du Conseil, Mme Marie Chatardová, et le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. Liu Zhenmin, de noter l’engagement fort des États Membres et de toutes les parties prenantes au Programme de développement durable à l’horizon 2030.  

Mme Chatardová a rappelé pour sa part que si le Forum a évalué les progrès dans six objectifs de développement durable, les participants ont aussi insisté sur le caractère indivisible, intégré et interconnecté des 17 objectifs.  L’élan autour du Programme 2030 reste fort et il est essentiel de garder le même niveau d’énergie alors que nous avançons vers l’année 2019 où le Forum politique se réunira en juin et en septembre, cette fois sous les auspices de l’Assemblée générale.

Cette semaine, a poursuivi la Présidente, nous avons entendu des progrès dans de nombreux domaines: le déclin du nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté et de la mortalité maternelle et infantile, le déclin du nombre de personnes vivant sans électricité, ainsi que des efforts concrets pour intégrer les objectifs de développement durable dans les plans et stratégies nationaux de développement.

De nombreux pays, a ajouté la Présidente, assurent la cohérence des actions de mise en œuvre du Programme 2030, de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, du Cadre de Sendai et du Plan d’action d’Addis-Abeba ainsi que d’autres accords internationaux.  Autre progrès, les données désagrégées et les statistiques ont gagné du terrain.

Parmi les difficultés évoquées cette semaine, la Présidente a souligné les poches de pauvreté qui persistent dans les zones rurales, les quatre milliards de personnes sans protection sociale, ainsi que l’augmentation du nombre de conflits conduisant des millions de personnes au déplacement et 18 pays à l’insécurité alimentaire.  À cela s’ajoutent les pertes d’espèces, la pollution urbaine ou encore l’accès limité à l’énergie propre.

De plus, les flux migratoires augmentent et la capacité de répondre aux besoins spécifiques des migrants sont sous pression partout.  Les femmes et les filles sont disproportionnellement touchées par les catastrophes et les conflits.  Nombre d’entre elles sont privées de leurs droits fondamentaux.

 Le message de cette semaine est clair, selon la Présidente: « la solution existe ».  Pour l’accès à l’eau, il y a la gestion intégrée des ressources.  Pour l’énergie, il y a les sources renouvelables: en 2017, 17 pays ont généré ainsi plus de 90% de leur électricité.

Un des sujets examinés aujourd’hui avait trait au renforcement du partenariat mondial et à l’amélioration des moyens de mise en œuvre.  Les intervenants ont souligné que la cohérence politique et un environnement favorable pour le développement durable à tous les niveaux sont essentiels.

 Autre solution retenue par la Présidente, en vue de ne laisser personne de côté, il faut aider les plus vulnérables à prendre leur destin entre leurs mains et à trouver leur place parmi les acteurs du développement.  La collecte de données est un outil pour cela, car elle permet d’attirer l’attention des décideurs politiques et du public sur les préoccupations concrètes des groupes marginaux, d’où découlent des changements politiques grâce à de nouvelles lois et campagnes de sensibilisation. 

 « On nous a rappelé que la transformation vers des sociétés durables et résilientes est vraiment alimentée par les citoyens et leurs autorités locales », a rappelé de façon pertinente Mme Chatardová, avant d’ajouter que « le changement n’est pas facile et rien ne peut remplacer l’impact des politiques nationales et de l’action ».

 Le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales a déclaré que le Forum a répondu à ses attentes et s’est avéré être un lieu de convergence dynamique où la cohérence des politiques est soulignée et où les plus pauvres et les plus vulnérables figurent en tête des préoccupations.   

 « On a maintenant une vision plus claire des lacunes et des actions requises. »  M. Liu a également apprécié les nouvelles idées présentées, tant par les gouvernements que par les communautés.  Cela répond au besoin urgent d’intervenir et de prendre des mesures, notamment pour répondre aux besoins des pays dans des situations particulières.

« Je suis très rassuré de la convergence des points de vue de tous les acteurs pour travailler ensemble », a-t-il déclaré.  Il a promis le soutien du Département des affaires économiques et sociales aux États Membres dans leurs efforts pour progresser vers les objectifs.

Cette cinquième journée a été marquée par des discussions sur deux objectifs de développement durable -le 15 (préserver et restaurer les écosystèmes terrestres) et le 17 (renforcement des moyens de mise en œuvre et de revitalisation du partenariat mondial pour le développement durable)- avant de faire le bilan sur la réussite du Programme 2030.  « Ne laisser personne de côté: sommes-nous en train de réussir? »

Le Forum politique de haut niveau sur le développement durable dont le thème cette année est « Transformation vers des sociétés durables et résilientes » poursuivra ses travaux lundi 16 juillet et entamera la réunion ministérielle consacrée à l’examen volontaire national de 47 pays. 

FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE ORGANISÉ SOUS LES AUSPICES DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Table ronde sur l’objectif 15 de développement durable: préserver et restaurer les écosystèmes terrestres

Cette table ronde, présidée et animée respectivement par le Vice-Président de l’ECOSOC, M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) et M. RENE CASTRO, Sous-Directeur en charge du Département du climat, de la biodiversité, des terres et des eaux de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a offert l’opportunité aux États, aux agences onusiennes et autres organisations internationales, ainsi qu’à la société civile et aux universitaires et chercheurs, de rappeler que le déclin actuel de la biodiversité, lié à la déforestation et la dégradation des terres, aura des conséquences négatives sur la mise en œuvre de tous les objectifs de développement durable.

La réalisation de l’objectif 15 de développement durable est donc essentielle pour fournir des services respectueux de l’environnement, assurer des systèmes alimentaires durables et mieux atténuer les effets des changements climatiques.  En effet, les végétaux fournissent 80% de notre alimentation, et nous dépendons de l’agriculture en tant que ressource économique et moyen de développement.  Les forêts recouvrent 30% de la surface de la planète et abritent plus de 80% des espèces d’animaux, de plantes et d’insectes que compte le monde.  Malheureusement, sur 8 300 espèces d’animaux d’élevage connues, 8% ont disparu et 22% sont en voie d’extinction.  En outre, chaque année 13 millions d’hectares de forêts sont perdus tandis que la dégradation continuelle des zones arides a conduit à la désertification de 3,6 milliards d’hectares.     

Pour avoir une vue d’ensemble des conséquences de la déforestation et de la dégradation des terres, Mme HEATHER PAGE, de la Division de statistique du Département des affaires économiques et sociales (DAES), a fait une brève présentation de la mise en œuvre de l’objectif 15.  La mise en œuvre complète de toutes les mesures de gestion durable des forêts pourrait permettre de faire cesser la déforestation, a-t-elle assuré en constatant que la déforestation s’est déjà ralentie.  La dégradation des terres, a-t-elle rappelé, menace aussi la sécurité et le développement de tous les pays ainsi que la survie de plus d’un milliard de personnes.  Elle a salué l’augmentation de la superficie et du nombre d’aires protégées à travers le monde, tout en déplorant l’augmentation du nombre d’espèces vivantes menacées d’extinction, notamment à cause des méthodes agricoles non durables ou encore du fait d’espèces exotiques envahissantes qui affectent la santé des écosystèmes à travers le globe.

« Les services écosystémiques ne cessent de dépérir », a dépeint l’orateur principal, M. SIMON LEVIN, professeur d’écologie et de biologie de l’évolution et Directeur du Centre de biocomplexité de l’Université de Princeton aux États-Unis, en expliquant que cela va de pair avec la diminution des ressources hydriques et forestières.  Les écosystèmes montagneux ont tout de même augmenté de 2%.  Pour mesurer les efforts mondiaux, il a conseillé de se baser sur de meilleures données et une plus grande coopération entre États.  Il faut aussi trouver les moyens de garantir l’équité en tenant compte des groupes vulnérables comme les populations autochtones, tout en veillant à adopter une approche holistique qui intègre tous les systèmes écologiques.

Ce n’est qu’une simple fraction des ressources naturelles qui est exploitée pour les besoins des hommes, a tenu à rappeler l’animateur du débat, M. Castro, de la FAO.  Ainsi, l’homme consomme à peine 10% des espèces de poisson existantes.  C’est la même tendance avec les plantes, car à peine 6 000 espèces représentent 63% de la consommation mondiale de végétaux.  Pour cet expert, si les décideurs ne prennent pas les décisions idoines, alors les flux migratoires vont s’accentuer, puisque les gens vont continuer de se diriger vers des zones où les ressources seront disponibles.

Revenant à la charge pour prévenir des risques encourus, Mme ANNE LARIGAUDERIE a prévenu que « tous les services écosystémiques sont en déperdition ».  L’experte, qui est Secrétaire exécutive de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), un organisme qui publie des rapports régionaux sur les écosystèmes terrestres, a en effet indiqué que ses quelque 550 experts sont formels sur ce point.  Elle a en même temps reconnu que les choses peuvent évoluer différemment, comme on le voit déjà avec l’augmentation des aires protégées à travers le monde, notamment en Afrique.  De nombreuses mesures restent encore à l’étape de projet, a-t-elle quand même averti.  Les rapports laissent voir que la plupart des cibles en matière de biodiversité ne seront pas réalisées, notamment les 20 objectifs du plan décennal d’Aichi relatifs à la diversité biologique, couvrant la période 2011-2020.  Ces objectifs visent à faire que, d’ici à 2020, les écosystèmes soient résilients et continuent de fournir des services essentiels, préservant ainsi la diversité de la vie sur Terre, et contribuant au bien-être humain et à l’élimination de la pauvreté.

Si on adoptait une sorte d’accord sur les forêts, comme celui qui a été conclu à Paris sur le climat, les choses pourraient tout de même changer positivement, a estimé Mme CÉCILE BIBIANE NDJEBET, Directrice du réseau des femmes africaines pour la gestion communautaire des forêts (REFACOF), organisation basée au Cameroun.  Mme Ndjebet a noté que la déforestation a des conséquences plus graves sur les femmes et les enfants, notamment ceux issus des peuples autochtones.  Il faut donc s’assurer que ces femmes soient davantage impliquées dans la mise en œuvre des mesures de restauration des forêts, dans le cadre d’un dialogue multipartite.  Il faudrait déjà insister sur la certification forestière afin de promouvoir la reforestation, tout en soutenant les initiatives communautaires qui ont fait leur preuve à travers le monde, a proposé l’experte.  

Le rôle des femmes pour la réalisation de l’objectif 15 a également été évoqué par Mme GERTRUDE KABUSIMBI KENYANGI, Directrice exécutive de « Support for Women in Agriculture and Environment », organisation basée en Ouganda.  Elle a recommandé que « toutes les mesures prises dans le domaine de la préservation des écosystèmes adoptent désormais une approche sexospécifique ».  Il faut aussi tenir compte de l’avis des populations autochtones qui sont, en fait, les propriétaires des aires qui les entourent.  Des aires dont elles ont contribué à la préservation parfois depuis des siècles.  Elle a aussi insisté sur le droit de la propriété foncière en faveur des femmes, plaidant pour davantage d’équité entre les sexes dans le cadre du partage des bénéfices tirés de l’exploitation forestière.  

Ces bénéfices pour les fermiers des pays en développement seront plus importants s’ils veillent à bien conserver les forêts, a affirmé Mme JILL BLOCKHUS, Directrice des partenariats internationaux à « The Nature Conservancy ».  Une meilleure gestion des forêts est aussi favorisée par les obligations vertes car celle-ci contribuent à atténuer les effets des changements climatiques.  Certains pays développés tels que le Royaume-Uni, la Norvège et l’Allemagne ont à cet égard promis 5 milliards de dollars entre 2016 et 2020.  La Norvège a même signé un accord pour débloquer 1 milliard de dollars en faveur de l’Indonésie et du Brésil dans le cadre des obligations vertes.  Ces prêts, dont les taux d’intérêt sont presque inexistants, sont donc essentiellement orientés vers la durabilité des écosystèmes.  Pour Mme Blockhus, ce genre de produits financiers permet aux pays en développement d’œuvrer à la préservation de l’environnement tout en améliorant leur statut auprès des agences de notation, puisque ces dernières attribuent de bonnes notes à ce genre d’investissements.

Un nouveau concept de paiement des services écologiques a par ailleurs été présenté par M. ROY BROUWER, professeur et économiste de l’environnement au Département d’économie de l’Université de Waterloo (Canada).  Il s’agit, à l’inverse du principe du pollueur-payeur, de faire que le gouvernement, des communautés locales ou des partenaires privés payent les communautés ou les parties prenantes impliquées dans les services des bassins versants.  Cela veut dire qu’une communauté vivant en amont d’un cours d’eau ou sur une colline recevrait des rétributions des parties prenantes situées en aval, afin de récompenser les efforts écologiques engagés, efforts qui profitent à ceux situés en bout de chaîne écologique.  Une telle approche économique et écologique, a expliqué le professeur Brouwer, permet de préserver davantage les forêts et les ressources en eaux.

Ces ressources en eaux sont au cœur même de la Convention de Ramsar sur les zones humides, a relevé Mme MARTHA ROJAS-URREGO, Secrétaire générale de la Convention de Ramsar.  La Convention datant de 1971 a adopté une large définition des zones humides comprenant tous les lacs et cours d’eau, les aquifères souterrains, les marécages et marais, les prairies humides, les tourbières, les oasis, les estuaires, les deltas et étendues intertidales, les mangroves et autres zones côtières, les récifs coralliens et tous les sites artificiels tels que les étangs de pisciculture, les rizières, les retenues et les marais salants.  L’experte a précisé que 40% des espèces vivantes du monde évoluent et se reproduisent dans des zones humides, or ces zones ont un fort potentiel de séquestration de carbone.  Mais 40% des zones humides du monde ont été perdues ces 40 dernières années, et 76% des espèces y vivant sont menacées de disparition, a-t-elle déploré.  Il faut se rappeler que la vie sur terre n’est pas possible sans eau, et que les zones humides ont un rôle majeur pour la production et la préservation de cette eau, d’où l’importance de tenir compte de la santé des zones humides du globe dans tous les efforts liés à l’objectif 15 de développement durable, a conclu Mme Rojas-Urrego.

M. CHIAGOZIE CHIMA UDEH, membre du Conseil d’administration de la Fondation planter pour la planète, s’exprimant au nom du grand groupe des enfants et des jeunes, a indiqué que, selon une évaluation de l’Université de Yale, il y a 3 000 milliards d’arbres dans le monde.  Les jeunes de la Fondation entendent ajouter le tiers de ce nombre, soit 1 000 autres milliards d’arbres, notamment dans des pays du Sud, afin de contribuer à la séquestration du carbone.  Un projet en ce sens a été lancé, en avril dernier, avec un coût estimé à un euro par arbre.  Ces jeunes lèvent des fonds à cet effet et ils sont certains que les fonds sont disponibles, quand on sait que le G7 dépense plus de 854 milliards de dollars à des fins militaires.  Le groupe des volontaires a dit la même chose en plaidant pour des moyens conséquents pour les aider à poursuivre leur action dans le monde.  L’an dernier en Inde, un million de personnes ont ainsi planté 66 millions d’arbres en une journée.  

Au cours de l’échange avec les délégations, celles-ci sont revenues sur les questions relatives aux autochtones, à l’alimentation, au rendement agricole, à la biodiversité et aux forêts.  La représentante de la Norvège a ainsi appelé à plus de soutien aux populations autochtones, car il est prouvé que les forêts dont elles ont la charge sont celles qui sont les plus vivantes.

La représentante du grand groupe des femmes a également plaidé pour l’amélioration des conditions de vie des populations autochtones, notamment les femmes qui subissent des pratiques patriarcales en matière de gestion des terres.  Il faut donc s’écarter de ces modèles et faire respecter les droits des femmes, y compris ceux liés au foncier qui influent directement sur leur capacité de production alimentaire.  Évoquant la diversité alimentaire qui est aujourd’hui compromise, la représentante du Comité permanent de la nutrition des Nations Unies a plaidé pour des systèmes alimentaires sains. 

Toujours en ce qui concerne l’alimentation, le représentant du Fonds international de développement agricole (FIDA), a expliqué que grâce à de bonnes politiques et des pratiques agricoles durables, on peut éradiquer la pauvreté tout en restaurant les écosystèmes terrestres.  L’intérêt de l’agriculture durable est évident pour le grand groupe des agriculteurs et des petits propriétaires forestiers dont les membres sont parmi les plus affectés par la dégradation des terres en ce qu’elle sape la production des aliments.  L’innovation et les partenariats sont des moyens de pallier ce problème, a-t-elle prescrit.  À propos d’innovation, le représentant de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a parlé d’un programme utilisant l’énergie nucléaire pour augmenter le rendement agricole au Maroc. 

La représentante de la Convention sur la biodiversité a affirmé que la biodiversité pourrait aider à résoudre les problèmes actuels.  Mais il faudrait tenir compte des connaissances traditionnelles en matière de préservation de la biodiversité.  Il faut aussi qu’un sommet des chefs d’État soit organisé, juste après 2020, afin de sensibiliser l’opinion internationale sur la question de la perte de la biodiversité.  En effet, 2020 marque la fin du cycle 2011-2020 qui est la Décennie pour la biodiversité des Nations Unies.

Il faut savoir que 47 États se sont déjà engagés à restaurer 160 millions d’hectares de terres dégradées d’ici à 2020, a signalé le représentant du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).  Un projet, le « défi de Bonn », envisage même une restauration de plus de 350 millions d’hectares de terres dégradées dans le monde à l’horizon 2030, soit presque la superficie de l’Inde.

La déléguée de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a rappelé que leur classement annuel des espèces en danger, la liste rouge, alerte sur la menace d’extinction de 94 000 espèces vivantes.  Enfin, le représentant de la République démocratique du Congo (RDC) a dit qu’avec plus d’un milliard d’hectares de forêts, son pays fait partie du problème mais voudrait également faire partie de la solution si jamais des fonds étaient mobilisés pour accompagner les efforts nationaux.

Examen de la mise en œuvre de l’objectif 17 de développement durable: renforcement des moyens de mise en œuvre et de revitalisation du partenariat mondial pour le développement durable

La Rédactrice en chef de l’édition américaine de Financial Times, Mme GILLIAN TETT, a animé cette table ronde sur le renforcement des moyens de mise en œuvre et de revitalisation du partenariat mondial pour le développement durable.

La responsable de la Section de la surveillance des objectifs de développement durable de la Division de statistique des Nations Unies, Mme YONGYI MIN, a ouvert la discussion en parlant de l’aide publique au développement (APD) des membres du Comité d’aide au développement (CAD), qui a légèrement baissé en 2017 en raison principalement du coût de l’aide humanitaire pour les réfugiés.  L’aide au développement des pays de l’OCDE et du CAD totalise 147 milliards de dollars en 2017.  Cinq pays ont respecté le taux de 0,7% du PIB consacré à l’aide publique au développement (APD).  La connexion Internet haut débit reste largement inaccessible dans le monde en développement, a ajouté Mme Min en donnant le taux de 6% de ces pays seulement qui ont accès au haut débit.  La part des pays les moins avancés (PMA) dans l’exportation mondiale a en outre diminué entre 2013 et 2016.  L’experte a encore indiqué que si de nombreux pays de l’Afrique subsaharienne ont des plans nationaux de statistiques, trois seulement ont été financés.  Elle a noté que la part de l’APD consacrée au renforcement des capacités statistiques a oscillé autour de 0,3% depuis 2010 malgré des demandes croissantes. 

Il est essentiel de multiplier les ressources en faveur des infrastructures, a avancé le représentant de la Jamaïque, M. COURTENAY RATTRAY.  Toutefois, la mobilisation du financement public est handicapée par les dettes dans les pays en développement.  Il faut donc exploiter les mécanismes de financement innovants, a-t-il conseillé, arguant que les pays endettés ont besoin de marges de manœuvre financières et des mécanismes exemptés des risques pour pouvoir mettre en œuvre les objectifs de développement durable.  Il a en même temps averti que ces financements innovants n’étaient pas des panacées.  Les États Membres doivent en outre éviter les pratiques nuisibles qui sapent la mise en œuvre des objectifs de développement durable.

Quelles infrastructures financer en priorité?  M. Rattray a souligné l’importance d’investir dans des infrastructures civiles résilientes comme l’assainissement, l’eau et l’énergie.  Si le manque de financements persiste, a-t-il indiqué, il manquera 3 000 milliards de dollars de financements cumulés d’ici à 2050.  Le représentant a également mis l’accent sur le rôle des banques de développement et des institutions financières régionales dans le financement de la mise en œuvre du Programme 2030.  Face à la faiblesse de la mobilisation des ressources pour les financements des infrastructures dans les PMA, les petits États insulaires en développement (PEID) et les pays en développement sans littoral, il a conseillé d’optimiser les recettes fiscales et de respecter les engagements pris dans le cadre de l’APD.

Une autre piste a été proposée par le délégué du Bangladesh, M. MASUD BIN MOMEN: promouvoir et libéraliser le commerce international.  Il faut aussi améliorer les flux financiers réguliers dont dépendent des pays comme le Bangladesh.  Il a rappelé la nécessité de l’appui international aux pays vulnérables aux catastrophes, car ces pays ont besoin d’appui technique pour mettre en place des systèmes d’assurance pour ces types de dégâts.  Le représentant a aussi souligné le rôle de la technologie qui est nécessaire pour aider à rattraper les retards de développement technologique.

L’objectif 17 est comme un système de positionnement global « GPS » pour le Programme 2030, a donné comme image le Représentant spécial de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) auprès des Nations Unies, M. ROBIN OGILVY, en assurant que cet objectif est à notre portée.  Soulignant l’importance des données pour réaliser cet objectif, il a appelé à investir davantage dans ce domaine, afin de disposer des données nécessaires à la mise en œuvre.  M. Ogilvy a ensuite encouragé à utiliser les technologies nouvelles car « c’est vital ».  Les gouvernements devraient se doter de plans nationaux sur les nouvelles technologies, a-t-il suggéré.  Le troisième levier pour la mise en œuvre est le financement, a-t-il avancé.  L’OCDE met d’ailleurs au point des nouveaux outils pour suivre le flux de l’aide des donateurs, même si une grande partie des financements doit venir de la mobilisation des ressources nationales.  Il a lui aussi plaidé pour que les gouvernements améliorent leurs recettes fiscales et s’inspirent de l’exemple de l’association des Inspecteurs des impôts sans frontières qui a pu mobiliser « 321 millions de dollars » l’année dernière.

Revenant sur le sujet de la technologie, le Président de « Global Solutions Summit », M. ALFRED WATKINS, a indiqué que la technologie permet de faire des choses à petite échelle, fournir de l’eau et distribuer de l’électricité.  Pour lui, il faut mettre l’accent sur trois domaines: le renforcement des capacités, les mesures pour renforcer la mise en œuvre locale de l’objectif 17 et la création d’un écosystème global de mise en œuvre.  Des solutions éprouvées et rentables existent et ne demandent qu’à être déployées, a ajouté l’orateur en citant notamment la création d’un écosystème de déploiement efficace où les gouvernements, les fournisseurs et les partenaires de sensibilisation travaillent en collaboration avec les partenaires financiers et communautaires.

Il faut 90 000 milliards de dollars pour financer les objectifs de développement durable avant 2050.  C’est ce qu’a rappelé le Chef responsable des investissements d’Aviva, M. STEVEN WAYGOOD, en soulignant que « les entreprises souffrent lorsque les sociétés souffrent ».  En comparaison, l’actif total des entreprises cotées en bourse est de 60 000 milliards de dollars.  Pour M. Waygood, le Programme 2030 est un échec en termes de marché.  Il a donc présenté une feuille de route pour des marchés de capitaux durables.  Ce document explique comment le milieu financier, la société civile, les organisations non gouvernementales et d’autres acteurs peuvent coopérer pour avancer ensemble pour atteindre l’objectif 17.  Réitérant que l’argent est disponible, M. Waygood a estimé que l’ONU, en tant que partenaire, peut aider à sécuriser les marchés de capitaux de plusieurs manières.  L’ONU, a-t-il précisé, peut en effet tenir les entreprises responsables de leur impact sur les objectifs de développement durable.  Des entreprises privées comme la « World Benchmarking Alliance » élabore et fournit des indices de performance d’entreprise alignés sur les objectifs de développement durable afin d’aider les entreprises et les investisseurs à conduire le changement en sensibilisant et en promouvant une « course des entreprises sur la durabilité ».  Pour sa part, Aviva a publié une série d’articles pour aborder ces questions y compris des mesures à prendre pour assurer la durabilité.           

Face à cette « course » stimulante entre les entreprises en faveur de la durabilité, le Directeur de Madhyam, M. KAVALJIT SINGH, a dénoncé la guerre commerciale en cours qui risque de conduire à la guerre des devises au détriment des échanges mondiaux.  Ces guerres présentent des dangers pour les échanges de denrées nécessaires en direction des pays en développement, a craint le Directeur qui a demandé le respect et le renforcement du système commercial mondial représenté par l’Organisation mondiale du commerce (OMC).  Il a aussi dénoncé l’endettement de nombreux pays en développement et la volatilité des marchés financiers qui risquent de perpétuer la pression subie par le marché des devises.  Avant de conclure, il a demandé la mobilisation des banques de développement pour financer les projets de développement.  Ce sont des instruments qui permettent de remédier aux défauts des marchés, a-t-il estimé.  M. Singh a également réclamé l’organisation d’un forum mondial sur les banques de développement.

Les délégations ont débattu de ces questions en faisant d’abord valoir leurs préoccupations ou leurs engagements en faveur de l’APD.  Alors que le Viet Nam est inquiet de la diminution de 0,6% de l’APD en 2016, la France a affirmé y avoir consacré 0,45% de son PIB en 2015.  La France vise un taux d’engagement de 0,50% en 2022 qui sera adossé à l’Accord de Paris sur les changements climatiques, a précisé le représentant, tandis que son homologue de la Suède a dit vouloir consacrer 1% de son PIB à l’APD.  La Turquie a pour sa part consacré 8 milliards de dollars en 2017 à l’APD, ce qui représente 0,8% de son PIB.  Le pays abrite aussi la Banque des technologies pour les PMA.  L’Union européenne a promis de faire respecter l’engagement en matière d’APD de ses pays membres.

L’APD et les envois de fonds ne sont cependant pas suffisants pour réaliser le Programme 2030, a fait observer le Chef responsable des investissements d’Aviva en prévenant que c’est sur le marché privé qu’il faut trouver l’argent pour financer les objectifs de développement durable.  Les entreprises privées ont d’ailleurs une responsabilité pour appuyer la mobilisation des ressources nationales, a ajouté la Finlande après avoir souligné l’importance de la collecte efficace des recettes fiscales et de la lutte contre l’évasion fiscale.

Enfin, la République dominicaine a regretté que son pays, qui est passé de la catégorie PMA à celle de pays à revenu intermédiaire, ait moins d’options pour accéder aux financements à taux abordables, des financements qui sont toujours autant nécessaires pour financer son développement.

La parole a été donnée aux grands groupes de la société civile, qui ont demandé de les inclure dans les partenariats de mise en œuvre du Programme 2030, pour qu’ils ne soient plus laissés de côté.  Le groupe des personnes âgées a aussi réclamé des financements plus importants pour gérer les questions liées au vieillissement.  Le grand groupe des peuples autochtones demande, quant à lui, l’indemnisation de ces peuples et des mesures urgentes contre leur exclusion et discrimination du système socioéconomique.

Ne laisser personne de côté: sommes-nous en train de réussir?

Les participants de cette table ronde se sont efforcés de répondre à cette question fondamentale, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 ayant en effet pour promesse essentielle de ne laisser personne de côté.

« Non, nous sommes en train d’échouer », a déclaré avec franchise M. ANDREW GILMOUR, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme de l’ONU.  Il a dénoncé les attaques menées contre le multilatéralisme, les « forces impersonnelles » de la mondialisation, les politiques délibérées de pillage des eaux et terres des peuples autochtones, les assassinats des défenseurs des droits de l’homme, les discriminations institutionnalisées contre les Rohingya ou bien encore les destructions de propriétés palestiniennes.  Cet état de fait n’est pas inévitable et nous pouvons agir, a-t-il dit en dénonçant le partage inégal des richesses.  « Un PDG d’une grande marque de luxe gagne en 4 jours ce que gagne une ouvrière du textile au Bangladesh en une vie. »  Les individus sont laissés de côté en raison de discriminations persistantes, a-t-il accusé.  « Tous sont égaux mais certains le sont plus que d’autres », a-t-il dit, paraphrasant George Orwell.  Il a déploré le fait que les migrants soient traités comme des criminels, dénonçant aussi la montée de la xénophobie et le rétrécissement de l’espace public.  Se voulant néanmoins optimiste, M. Gilmour a néanmoins déclaré que des progrès peuvent encore être accomplis. 

Les retards pris par les PMA sur « tous les objectifs de développement durable » ont été l’une des principales préoccupations de M. DOUGLAS KEH, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui s’est aussi inquiété de la situation des pays à revenu intermédiaire face à la montée des inégalités, tandis que les petits États insulaires en développement sont confrontés à un stress hydrique important.  Malgré les discours, certaines communautés sont bel et bien laissées de côté, a-t-il déclaré.  Une des raisons du retard pris, selon lui, est le manque de capacité de nombreux pays en matière de collecte de données ventilées.  Pour y remédier, l’accès à la technologie doit être envisagé comme une composante essentielle du développement, a-t-il préconisé.

« Les besoins des plus pauvres doivent être hissés au premier rang des priorités », a renchéri M. MAHI AMADOU DEME, du Ministère de l’économie et des finances du Sénégal, rappelant la promesse essentielle du Programme 2030.  Il a détaillé la stratégie suivie par son pays en la matière, à laquelle est associé un large éventail de ministères et de représentants de la société civile.  « Il faut mettre le paquet sur les foyers qui vivent dans l’extrême pauvreté afin de les extraire de ce cercle vicieux. »  Il s’est dit en faveur d’une vigoureuse politique de partage des richesses et pour une correction des inégalités par la mise en place de mécanismes de protection sociale.  Il a mentionné un programme de transferts financiers en faveur des ménages les plus pauvres, conditionné notamment à l’inscription des enfants à l’état civil et à leur scolarisation.  Enfin, M. Deme a souligné la nécessité de procéder au profilage statistique des plus pauvres et de mener des campagnes publiques de sensibilisation en faveur du Programme 2030.

« Il faut comprendre qui sont les personnes laissées de côté afin d’avancer », a lancé Mme RITTA OKSANEN du Ministère des affaires étrangères de la Finlande.  Se concentrer sur la collecte des données ventilées n’est pas suffisant, selon elle, car leur interprétation est également cruciale.  S’agissant de l’objectif relatif à l’eau, elle a rappelé les difficultés d’accès à cette ressource pour les plus pauvres, en particulier les femmes.  « Les consommateurs doivent savoir les conséquences que leurs choix peuvent avoir », a-t-elle dit, sur l’objectif relatif aux modes de production et de consommation durables.  Enfin, elle a souligné l’importance d’une gestion forestière durable.

Mme ALICIA BÁRCENA IBARRA, de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), a, elle, passé en revue les objectifs 7, 11 et 17, même si elle a déclaré que séparer les distincts objectifs n’est pas la bonne idée.  Elle a apprécié que 147 pays aient désormais des politiques d’énergie renouvelable, soit trois fois plus par rapport aux dernières années.  « Néanmoins, un milliard de personnes n’ont pas d’accès à l’électricité, cela est inimaginable », a-t-elle déclaré.  Elle a mis en garde contre les effets pervers et distorsions que peuvent avoir les subventions apportées au secteur énergétique.  « Quel type de ville voulons-nous? » a-t-elle demandé, s’agissant de l’objectif 11, en souhaitant que plus de temps soit consacré à son examen.  Il faut fournir des biens publics aux villes, a-t-elle préconisé, afin de combattre les logiques de discrimination et de ségrégation.  « L’objectif 17 est le plus difficile à atteindre, sachant que l’APD ne sera pas suffisante. »  Enfin, elle a mis en garde contre le début de guerre commerciale que connaît le monde, qui risque d’entraver les efforts en vue de réaliser ledit objectif.

Mme SAKIKO FUKUDA-PARR, du Comité des politiques de développement de l’ONU, a dit que 14 plans nationaux de développement soumis l’an dernier dans le cadre du Programme 2030 étaient suffisamment détaillés.  Mais peu de pays accordent, dans les faits, la priorité aux personnes les plus vulnérables et c’est la logique actuelle qui prévaut, a-t-elle dit.  Trop peu de rapports parlent en outre de l’environnement macroéconomique, pourtant essentiel.  Seulement 12 pays sur 43 à avoir présenté un rapport l’an dernier ont parlé des peuples autochtones, a-t-elle déploré.

« Mon pays assume ses responsabilités pour que les générations futures bénéficient du Programme 2030 », a déclaré Mme SOPHIE HOWE, Commissaire aux générations futures du Pays de Galles.  « Les générations futures ne doivent pas être les grandes oubliées du développement durable. »  Elle a mentionné une loi adoptée en 2016 par son pays créant ce poste de commissaire destiné à veiller sur les intérêts des générations futures, une loi vue comme un exemple par l’ONU, a-t-elle dit.  « Ne tombons pas dans le piège du court-termisme », a-t-elle martelé en indiquant que « notre incapacité à nous consacrer au long terme ne fait qu’accroître les inégalités ».

Mme VICTORIA TAULI CORPUZ, Rapporteure spéciale sur les droits des personnes autochtones, a dressé un tableau alarmant du respect des droits des personnes autochtones.  Les droits des peuples autochtones ne sont tout simplement pas pris en compte, pas plus que leurs savoirs traditionnels, a-t-elle dit en dénonçant, en outre, les pratiques des industries d’extraction minière dont souffrent ces personnes.  « Près de 15% des personnes vivant dans l’extrême pauvreté dans le monde appartiennent aux peuples autochtones. »  Elle a souhaité l’adoption d’une déclaration ministérielle sur la centralité des droits des peuples autochtones dans la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

S’agissant des personnes âgées, Mme SYLVIA BEALES, des Gray Panthers, a prévenu que 22% de la population mondiale en 2050 seront des personnes âgées.  « Nous sommes le groupe qui connaît la plus forte expansion démographique. »  Elle a jugé à cet égard essentielle la réalisation de l’objectif 10 et demandé des villes propres et sûres pour les personnes âgées.  Toute politique globale en faveur des personnes âgées doit être basée sur le respect de leurs droits, a-t-elle réclamé.  « Les normes existent, appliquons-les. »  En conséquence, la volonté politique est cruciale, de même que des mécanismes de financement robustes, a-t-elle conclu.  « Nous devons nous convaincre nous-même que nous pouvons relever le défi des inégalités tout au long de la vie. »

Dans la discussion interactive, les délégations ont mentionné leurs initiatives pour réaliser le Programme 2030, dont le Chili a rappelé le caractère « indivisible ».  La Mauritanie a placé la protection sociale au cœur de sa stratégie en faveur des 150 000 foyers les plus pauvres.  L’Estonie a, elle, misé sur la numérisation, avec succès pour l’instant, a dit la déléguée de ce pays, « même si cette recette ne fonctionnera peut-être pas ailleurs ».  La Suisse a évoqué le défi pressant posé par les migrations pour la réalisation du Programme, tandis que le délégué de la Sierra Leone a axé son discours sur l’accès des plus pauvres à la justice, une priorité pour son pays.

Certaines parties prenantes, notamment du groupe de l’éducation, ont dénoncé le mode économique actuel « dévastateur » qui veut des consommateurs et non pas des citoyens éclairés.  Le grand groupe des femmes a vigoureusement fustigé les discriminations pesant sur les femmes et demandé des « politiques féministes », en particulier pour combler le manque de données statistiques par rapport aux hommes et assurer l’accès des femmes à la terre.  Enfin, le groupe des personnes handicapées a, lui aussi, déploré le « manque criant » de statistiques sur ces personnes.  « Si les personnes handicapées ne sont pas comptées, elles ne comptent pas. »

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité proroge pour un an le mandat de l’Opération UA-ONU au Darfour, dans l’optique d’un retrait le 30 juin 2020

8311e séance – matin
CS/13422

Le Conseil de sécurité proroge pour un an le mandat de l’Opération UA-ONU au Darfour, dans l’optique d’un retrait le 30 juin 2020

Le Conseil de sécurité a adopté aujourd’hui à l’unanimité la résolution 2429 (2018) prorogeant le mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) jusqu’au 30 juin 2019.  Le représentant du Soudan a commenté le texte. 

Le 29 juin dernier, le Conseil avait décidé, par sa résolution 2363 (2017), de reconfigurer la MINUAD, créée en 2003, afin de l’adapter à une quasi-cessation des combats.  L’Opération répond désormais à une double démarche: d’une part, la protection militaire, l’enlèvement des restes explosifs de guerre, les secours d’urgence dans la région du Djebel Marra, la stabilisation de la situation, l’appui à la police et l’aide au renforcement des institutions garantes de l’état de droit dans les autres régions du Darfour; et, d’autre part, un mandat général de protection des civils, de médiation des conflits intercommunautaires et de suivi des questions liées à la réforme du secteur de la sécurité.

Dans la résolution 2429 (2018) adoptée ce matin et contenant 55 paragraphes de fond, le Conseil prend note des recommandations du Secrétaire général et du Président de la Commission de l’Union africaine sur une approche systémique comprenant un nouveau concept assorti de priorités adaptées et un concept de transition en collaboration avec l’équipe de pays des Nations Unies échelonnée sur deux ans, dans l’optique du retrait de la Mission le 30 juin 2020 et de sa liquidation d’ici à décembre 2020, sous réserve qu’aucun changement important n’intervienne dans les conditions de sécurité et que les grands indicateurs soient atteints. 

La MINUAD est appelée à fusionner cette approche systémique avec son approche actuelle à deux volets, l’objectif étant de prévenir une résurgence du conflit et de permettre au Gouvernement, à l’équipe de pays des Nations Unies, à la société civile, ainsi qu’aux acteurs de la communauté internationale de préparer à terme son retrait. 

L’effectif maximum autorisé de militaires est d’emblée ramené à 4 350 personnes et celui des policiers, maintenu à 2 500 personnes.  Le Conseil prie le Secrétaire général et le Président de la Commission de l’Union africaine de produire avant le 1er mai 2019, une évaluation des progrès dans la mise en œuvre de la restructuration, de l’incidence des nouvelles réductions sur la situation des droits de l’homme, de la coopération du Gouvernement soudanais avec la MINUAD, de l’élimination des obstacles bureaucratiques auxquelles se heurte l’Opération et de la question de savoir si la situation permet de nouvelles réductions et si les capacités de l’équipe de pays des Nations Unies et du Gouvernement soudanais ont atteint un niveau suffisant pour absorber les anciennes tâches de l’Opération.

Le Conseil réexaminera, d’ici au 30 juin 2019, l’ampleur et le rythme des restructurations et des nouvelles fermetures et en attendant, décide que les priorités stratégiques de la MINUAD sont la protection des civils et la surveillance des droits de l’homme; la médiation entre le Gouvernement et les mouvements armés non signataires, et l’appui au règlement par la médiation des conflits intercommunautaires. 

Le représentant du Soudan, M. Omer Dahab Fadl Mohamed, a remercié les membres du Conseil de sécurité pour leur compréhension et leur consensus sur la prorogation du mandat de la MINUAD.  La réalité dans l’État du Darfour est « très claire », a-t-il dit. Depuis 2015, la région connaìt la sécurité et une situation humanitaire stabilisée, comme le reconnaissent de nombreuses sources, y compris le Conseil de sécurité lui-même qui s’est rendu sur place.  Le Gouvernement et toutes les institutions du Soudan, a poursuivi le représentant, reconnaissent l’importance de la phase de la consolidation de la paix et espèrent pouvoir compter sur l’appui de la communauté internationale au développement.

Mon Gouvernement, a assuré le représentant, a bien l’intention de restaurer l’autorité de l’État au Darfour et de s’attaquer aux causes profondes du conflit, comme le lui demande la résolution adoptée aujourd’hui.  L’adoption du texte coïncide d’ailleurs avec l’annonce qu’a faite hier le Président soudanais sur un cessez-le-feu complet, a souligné le représentant.

Texte de projet de résolution (S/2018/693)

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant toutes ses résolutions antérieures et toutes les déclarations de son président concernant la situation au Soudan et soulignant qu’il importe de s’y conformer pleinement,

Réaffirmant avec force son attachement à la souveraineté, à l’unité, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale du Soudan et sa détermination à aider le Gouvernement soudanais, dans le plein respect de sa souveraineté, à relever les divers défis qui se présentent au Soudan,

Rappelant l’importance des principes de règlement pacifique des différends internationaux, de bon voisinage, de non-ingérence et de coopération régionale dans les relations entre les États de la région,

Réaffirmant les principes fondamentaux du maintien de la paix, y compris le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou pour la défense du mandat, et considérant que le mandat de chaque mission de maintien de la paix est adapté à la situation du pays concerné, et rappelant la déclaration de son président publiée sous la cote S/PRST/2015/22,

Rappelant toutes ses résolutions sur les femmes, la paix et la sécurité, le sort des enfants en temps de conflit armé, la protection du personnel humanitaire et du personnel des Nations Unies, et la protection des civils en période de conflit armé,

Soulignant, sans préjudice de la responsabilité première qui lui incombe au regard du maintien de la paix et de la sécurité internationales, l’importance du partenariat entre l’Organisation des Nations Unies et l’Union africaine, conformément au Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, pour ce qui est du maintien de la paix et de la sécurité en Afrique, notamment au Soudan,

Prenant note du Communiqué PSC/PR/COMM.(DCCLXXVIII) du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine sur le renouvellement du mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD),

Rappelant la résolution 2378 (2017), par lequel il a prié le Secrétaire général de veiller à ce que les données relatives à l’efficacité des opérations de maintien de la paix, y compris celles portant sur l’exécution de ces opérations, soient centralisées pour améliorer l’analyse et l’évaluation des opérations des missions sur la base de critères précis et bien définis, et rappelant également sa résolution 2242 (2015), dans laquelle il avait émis le souhait de doubler le nombre de femmes dans les contingents militaires et les effectifs de police des opérations de maintien de la paix des Nations Unies,

Situation actuelle

Notant avec satisfaction une amélioration dans les conditions de sécurité tout en se déclarant préoccupé par le fait que la sécurité générale demeure précaire au Darfour en raison d’activités déstabilisatrices de nombreux acteurs, notamment d’éléments de mouvements armés, d’unités auxiliaires des forces gouvernementales soudanaises et de milices, qui amplifient l’insécurité, les menaces contre les civils au Darfour, les violences intercommunautaires, les actes criminels et le manque de développement et d’état de droit,

Se félicitant de la réduction des affrontements militaires entre les forces gouvernementales et les groupes rebelles, notant les cessations unilatérales des hostilités annoncée par le Gouvernement soudanais et par l’Armée de libération du Soudan-faction Minni Minawi, le Mouvement pour la justice et l’égalité-Gibril et le Mouvement de libération du Soudan-Conseil de transition,

Se déclarant préoccupé par la poursuite des accrochages dans le Jebel Marra, qui se sont traduits par des incendies de villages, de nouveaux déplacements de civils et des restrictions de l’accès humanitaire, condamnant toutes violations des cessations unilatérales des hostilités et priant instamment toutes les parties au conflit de respecter les cessations unilatérales des hostilités, là où elles ont lieu, et d’accepter immédiatement un cessez-le-feu permanent,

Rappelant sa résolution 2117 (2013) et se disant préoccupé par la menace que font peser sur la paix et la sécurité au Darfour le transfert illicite, l’accumulation déstabilisatrice et le détournement d’armes légères et de petit calibre, ainsi que par les risques que les engins non explosés continuent de faire courir à la population civile, constatant le rôle de la Force conjointe soudano-tchadienne de surveillance des frontières et le programme de collecte d’armes lancé par le Gouvernement à cet égard, et notant que le programme a contribué à la réduction de la violence et de la criminalité intercommunautaires,

Demandant à nouveau à toutes les parties au conflit au Darfour de mettre fin immédiatement à la violence, y compris aux attaques visant les civils, les soldats de la paix et le personnel humanitaire,

Notant que, en dépit de leur diminution substantielle, les conflits intercommunautaires restent l’une des principales sources de violence au Darfour et se déclarant préoccupé par la persistance des conflits intercommunautaires portant sur les terres, l’accès à l’eau et aux autres ressources, les problèmes liés à la migration et les rivalités tribales, notamment avec l’intervention d’unités paramilitaires et de milices tribales, ainsi que par la persistance des attaques contre les civils, de la violence sexuelle et sexiste et des violations graves commises sur la personne d’enfants, et par le fait que certains des grands griefs à l’origine du conflit restent sans réponse,

Se félicitant des efforts faits par le Gouvernement soudanais, notamment les autorités locales, pour rétablir l’ordre public en déployant au Darfour des ressources policières, pénitentiaires et judiciaires supplémentaires, tant humaines que matérielles, notant que les capacités dans le domaine de l’état de droit restent limitées, exhortant le Gouvernement soudanais à poursuivre et renforcer les efforts déployés afin de mettre fin à l’impunité et d’offrir aux civils un environnement plus protecteur, sans discrimination, en particulier en ce qui concerne les violations des droits des femmes et les atteintes à ces droits et la violence sexuelle et sexiste ainsi que les violations et les sévices graves commis sur la personne d’enfants, et saluant le rôle important que la MINUAD a joué dans le renforcement des institutions garantes de l’état de droit, et notant les demandes des responsables étatiques et locaux relatives au renfort de l’assistance prêtée par l’équipe de pays des Nations Unies et la MINUAD pour renforcer les capacités en matière d’état de droit, en particulier au profit de la police soudanaise et des institutions judiciaires et pénitentiaires, aux fins de la création d’un climat protecteur,

Soulignant que quiconque est responsable de violations du droit international humanitaire, de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits doit répondre de ses actes et qu’il incombe au premier chef au Gouvernement soudanais de protéger les civils, notamment les femmes et les enfants, se trouvant sur son territoire et sous sa juridiction, y compris contre d’éventuels crimes contre l’humanité et crimes de guerre,

Situation humanitaire et déplacements et questions de développement

Se félicitant de la diminution substantielle du nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays, tout en se déclarant préoccupé qu’un nombre important de personnes, environ 2 millions, dont la plupart ont besoin d’aide humanitaire, restent déplacées de longue date, et que de nouveaux déplacements de civils aient eu lieu aux premier et deuxième trimestres de 2018 par suite d’accrochages dans le Jebel Marra, que ces affrontements aient eu des conséquences négatives pour les opérations humanitaires dans ces régions, et priant le Gouvernement soudanais de faciliter immédiatement le libre accès de la MINUAD et des acteurs humanitaires aux populations qui ont besoin d’aide humanitaire, notamment dans ces régions de conflit,

Notant avec satisfaction des améliorations dans la création d’un environnement protecteur, et notant la diminution du nombre d’allégations d’atteintes aux droits fondamentaux ou de violations de ceux-ci, tout en reconnaissant que la MINUAD peut bien moins suivre et vérifier les violations des droits de l’homme et les exactions qui auraient été commises dans les régions dont elle s’est retirée et exprimant son inquiétude quant au fait que les déplacés continuent de rencontrer de graves problèmes de sécurité, courant notamment le risque d’être tués, violés ou harcelés quand ils sortent des camps pour essayer de trouver des moyens de subsistance et quant au nombre inquiétant d’actes de violence sexuelle et sexiste et de violations graves à l’égard des enfants, ainsi que des constatations faites en février 2018 par la Représentante spéciale du Secrétaire général chargé de la question de la violence sexuelle dirigée contre les femmes en temps de conflit armé, selon lesquelles les victimes de violence sexuelle font souvent face à la dénégation, à la honte et à la stigmatisation, qui les retiennent de dénoncer le crime ou de demander de l’aide, ce qui aggrave encore leur souffrance et le défaut de justice et de respect du principe responsabilité,

Encourage le Gouvernement soudanais à s’assurer rapidement que les bases d’opérations de la MINUAD qui ont déjà été transférées et celles qui le seront à l’avenir sont utilisées conformément à l’accord conclu entre la MINUAD et le Gouvernement soudanais,

Soulignant qu’il importe que le Gouvernement soudanais lutte contre les causes profondes du conflit et étende l’autorité de l’État, notamment en renforçant l’état de droit et le respect des droits de l’homme, à tout le Darfour afin de permettre la transition vers la consolidation de la paix dont le peuple du Darfour devrait rapidement retirer des bénéfices réels,

Constatant les effets défavorables des changements climatiques, des changements écologiques et des catastrophes naturelles, entre autres facteurs, sur la situation au Darfour, notamment du fait de la sécheresse, de la désertification, de la dégradation des terres et de l’insécurité alimentaire,

Reconnaissant que la crise nationale économique et en carburant que subit actuellement le Soudan a des incidences négatives sur la situation humanitaire, la sécurité alimentaire et la capacité qu’ont les institutions publiques soudanaises, notamment la police, à assurer services et accès à des zones du Darfour, se déclarant préoccupé que cela ait conduit à l’augmentation du nombre total de personnes ayant besoin d’aide humanitaire au Soudan, qui est passé de 5,5 millions à 7,1 millions, et appelant le Gouvernement soudanais à garantir un accès humanitaire sûr et sans entrave pour répondre aux besoins les plus urgents de la population, et exhortant les donateurs, les autorités régionales du Darfour et le Gouvernement soudanais à fournir les ressources nécessaires pour aider ceux qui en ont besoin, y compris par l’intermédiaire de l’équipe de pays des Nations Unies, et à entreprendre des activités pour appuyer la transition vers la consolidation de la paix, et priant le Gouvernement soudanais et les autorités locales de veiller à la création de conditions propices au bon déroulement desdites activités, y compris en améliorant l’accès des acteurs du développement et de la consolidation de la paix,

Priant instamment le Gouvernement soudanais de veiller à ce que le Bureau de suivi de l’accord de paix au Darfour reçoive des ressources suffisantes lui permettant de poursuivre le travail de l’ancienne Autorité régionale pour le Darfour et des commissions, invitant instamment les donateurs et le Gouvernement soudanais à honorer leurs promesses et à s’acquitter de leurs obligations dans les meilleurs délais, notamment à respecter les engagements pris à la conférence tenue à Doha en avril 2013,

Affirmant que le développement peut favoriser l’instauration d’une paix durable au Darfour, notant que la Stratégie de développement du Darfour ne couvre que la période allant jusqu’en 2019 et appelant le Gouvernement soudanais et les donateurs à s’intéresser à l’examen stratégique de la Stratégie de développement du Darfour et à lui apporter leur appui, dans le but de prolonger cette dernière jusqu’en 2025, et demandant également aux donateurs de s’assurer que les ressources correspondent aux besoins réels du Darfour en matière de développement,

Rappelant que, dans le Document de Doha pour la paix au Darfour, le Gouvernement soudanais et les autres signataires se sont engagés à assurer l’accès sans entrave des secours humanitaires aux populations dans le besoin et la protection du personnel humanitaire et de ses opérations dans les zones placées sous leur contrôle et à garantir à la MINUAD, dans l’exercice de son mandat, une liberté totale de circulation partout au Darfour et à tout moment, et rappelant également le rôle de la Commission de suivi du Document de Doha pour la paix au Darfour s’agissant d’évaluer le suivi du Document,

Situation politique

Rappelant qu’il ne peut y avoir de solution militaire au conflit au Darfour et qu’un règlement politique associant toutes les parties est essentiel pour maintenir la paix, et soulignant qu’il importe de s’attaquer aux causes profondes du conflit, notamment à celles tenant à la gestion des terres, à l’eau et à d’autres ressources, réaffirmant à cet égard qu’il appuie le Document de Doha, cadre viable pour le processus de paix au Darfour, et sa mise en œuvre accélérée et notant que la capacité qu’a la MINUAD de faire avancer la mise en œuvre du Document de Doha pour la paix au Darfour pâtit des retards pris et de l’absence de règlement politique global entre le Gouvernement soudanais et les mouvements armés non signataires,

Renouvelant son soutien au Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine et à sa feuille de route, regrettant que l’exécution de cette dernière n’ait pas progressé, priant instamment toutes les parties de reprendre immédiatement avec le Groupe les négociations sur la feuille de route pour progresser sans attendre dans l’exécution de celle-ci, notamment en signant des accords de cessation des hostilités et d’aide humanitaire établis par les parties, conformément à la première phase prévue dans la feuille de route, et exhortant les signataires à examiner les options viables mutuellement acceptables d’application de la feuille de route et exhortant les groupes non signataires à se joindre sans délai aux négociations,

Notant que le Gouvernement soudanais a continué de se déclarer disposé à inviter les groupes d’opposition ne participant pas au Dialogue national à s’y joindre, et encourageant le Gouvernement à instaurer un climat de plus grande ouverture qui inciterait ces groupes à y prendre part, y compris en ce qui concerne les recommandations convenues dans le document national et les modalités de leur application, et à rejoindre le Dialogue national, qui porte notamment sur la rédaction d’une nouvelle constitution,

Constatant que les dispositifs locaux de règlement des différends jouent un rôle important dans la prévention et le règlement des conflits intercommunautaires, en particulier ceux qui portent sur les ressources naturelles, demandant instamment que soient intensifiés les efforts visant véritablement à prévenir les différends au niveau local qui sont à l’origine de la violence et les conséquences qu’ils ont pour les populations civiles locales, saluant les efforts déployés par les autorités soudanaises, appuyées par la MINUAD, et ceux faits dans le même sens par l’équipe de pays des Nations Unies et la société civile, notamment par l’intermédiaire du Fonds pour la paix et la stabilité des communautés au Darfour, se félicitant du caractère prometteur de la conclusion de plusieurs accords de paix intercommunautaires, avec l’aide de l’Opération, de l’équipe de pays des Nations Unies et de la société civile, et les engageant vivement à poursuivre dans cette voie en collaboration avec le Gouvernement soudanais afin de trouver des solutions durables à ces conflits,

Accueillant avec satisfaction les initiatives, notamment régionales, engagées en étroite concertation avec le Gouvernement soudanais, pour ce qui est de s’attaquer aux causes profondes du conflit au Darfour et de promouvoir une paix durable, louant les efforts faits par le Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine, conduit par le Président Thabo Mbeki, et ceux déployés par la Représentante spéciale conjointe pour assurer la paix, la stabilité et la sécurité au Darfour, notamment en appuyant les efforts internationaux, régionaux et nationaux faits pour relancer le processus de paix et le rendre plus ouvert,

Demandant à toutes les parties de s’acquitter des obligations que leur imposent le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, soulignant qu’il lui importe qu’il soit mis fin à l’impunité, notamment en amenant les responsables à répondre de leurs actes et en traduisant en justice les auteurs de crimes, y compris de violences sexuelles et sexistes, commis par toutes les parties au Darfour, demandant instamment au Gouvernement soudanais d’honorer ses obligations à cet égard, appréciant le rôle du Procureur spécial pour le Darfour nommé par le Gouvernement soudanais, en particulier dans des affaires de violence sexuelle et sexiste, et soulignant qu’il reste des progrès à faire, notamment dans les enquêtes et l’engagement de poursuites contre les auteurs de violences sexuelles et sexistes, quel que soit leur camp, demandant à nouveau que le projet de mémorandum d’accord donnant à la MINUAD et à l’Union africaine le statut d’observateur auprès du Tribunal spécial avance rapidement, et priant le Gouvernement soudanais d’enquêter au plus vite sur les attaques visant l’Opération et d’en poursuivre les auteurs,

Se déclarant à nouveau préoccupé par les conséquences défavorables de l’instabilité au Darfour pour la stabilité du Soudan tout entier et de l’ensemble de la région, se déclarant gravement préoccupé par la présence de mouvements armés du Darfour dans les zones de conflit hors du Soudan et par leur implication dans le trafic de migrants, le crime, le banditisme et le mercenariat, et encourageant la coopération entre les acteurs étatiques régionaux dans le cadre de la lutte contre les problèmes transfrontaliers, tels que la contrebande d’armes, en vue d’instaurer la paix et la stabilité au Darfour et dans la région, et rappelant à cet égard l’embargo sur les armes, tel que prévu au paragraphe 9 de la résolution 1556 (2004) et au paragraphe 7 de la résolution 1591 (2005), et révisé au paragraphe 9 de la résolution 1945 (2010)et au paragraphe 4 de la résolution 2035 (2012),

Félicitant la MINUAD pour la réussite de la mise en œuvre de la résolution 2363 (2017), notamment pour l’achèvement des première et deuxième phases de sa restructuration, et lui renouvelant son soutien sans réserve,

Prenant note avec satisfaction du rapport spécial du Secrétaire général et de la Présidente de la Commission de l’Union africaine en date du 1er juin 2018 (S/2018/530) concernant la MINUAD (le rapport spécial),

Notant avec satisfaction que la MINUAD bénéficie d’une plus grande liberté de circulation, et que la délivrance de visas au personnel de l’Opération et la livraison de conteneurs lui appartenant s’est améliorée, mais se déclarant préoccupé par les restrictions toujours en vigueur, notamment celles que le Gouvernement soudanais impose à la conduite de patrouilles de nuit au Darfour et celles qui empêchent l’Opération et les acteurs humanitaires de se rendre rapidement, comme suite aux signalements actuels de faits de violence dans la région du Jebel Marra, dans des zones où se produisent des affrontements, les obstacles, notamment d’ordre bureaucratique, auxquels se heurte l’Opération, qui continuent de compromettre sa capacité de s’acquitter de son mandat, notamment les restrictions sur les visas frappant certaines de ses composantes, en particulier la Section des droits de l’homme, et les retards constants dans la livraison des conteneurs lui appartenant, notant que le Gouvernement soudanais s’est engagé à coopérer avec l’Opération et le personnel humanitaire sur toute question logistique, et appelant le Gouvernement soudanais à honorer pleinement et en toute circonstance son engagement à veiller à ce que le personnel humanitaire et l’Opération puissent travailler pour aider à répondre aux besoins de base,

Considérant que la situation au Soudan menace la paix et la sécurité internationales,

1.    Décide de proroger jusqu’au 30 juin 2019 le mandat de la MINUAD;

2.    Rappelle son soutien exprimé dans la résolution 2363 (2017) à l’adoption par la MINUAD d’une double démarche, présentée au paragraphe 2 de ladite résolution, maintient son soutien à cette démarche, prend note des recommandations formulées par le Secrétaire général et le Président de la Commission de l’Union africaine dans le rapport spécial (S/2018/530), dans lequel est présentée une approche systémique pour le Darfour, qui comprend un nouveau concept de l’Opération assorti de priorités adaptées pour l’Opération et d’un concept de transition en collaboration avec l’équipe de pays des Nations Unies échelonnée sur deux ans, dans l’optique du retrait de la Mission le 30 juin 2020 et de sa liquidation d’ici à décembre 2020, sous réserve qu’aucun changement important n’intervienne dans les conditions de sécurité au Darfour et que les grands indicateurs soient atteints;

3.    Demande à la MINUAD de fusionner l’approche systémique pour le Darfour axée sur le maintien de la paix et visant à apporter des solutions durables aux facteurs de conflit avec l’approche actuelle à deux volets de l’Opération, l’objectif étant de prévenir une résurgence du conflit et de permettre au Gouvernement, à l’équipe de pays des Nations Unies, à la société civile, ainsi qu’aux acteurs de la communauté internationale de préparer le retrait à terme de l’Opération;

4.    Souligne qu’il importe de suivre l’évolution de la situation sur l’ensemble du territoire du Darfour, de procéder à des examens réguliers du déploiement des forces dans la zone géographique de la MINUAD et de laisser une certaine souplesse à l’Opération de manière qu’elle puisse intervenir dans l’ensemble du Darfour, là où la situation l’exige;

5.    Décide que l’effectif maximum autorisé de militaires de la MINUAD sera ramené à 4 350 personnes au cours de la période de prorogation du mandat, à moins qu’il ne décide d’ajuster l’ampleur et le rythme de cette réduction;

6.    Autorise le maintien de l’effectif nécessaire de policiers à 2 500 personnes, membres d’unités de police constituées et policiers hors unités constituées confondus, qui est essentiel à l’exécution du mandat de la MINUAD, appuie les recommandations formulées dans le rapport spécial sur l’augmentation du personnel déployé dans certaines unités de police constituées;

7.    Prie le Secrétaire général, dans le deuxième des rapports qu’il présente tous les 90 jours, demandé au paragraphe 53, et le Secrétaire général et le Président de la Commission de l’Union africaine, en consultation avec la MINUAD, de produire avant 1er mai 2019 dans le cadre d’un examen stratégique, une évaluation des points suivants:

i)    Les progrès dans la mise en œuvre de la restructuration présentée aux paragraphes 5 et 6 de la présente résolution;

ii)   L’incidence globale des nouvelles réductions sur les domaines dans lesquels la MINUAD a cessé d’intervenir, y compris les besoins de protection, les violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits, la violence sexuelle et sexiste et les violations graves commises sur la personne d’enfants, et les violations du droit international humanitaire, et la capacité des acteurs humanitaires et du développement de fournir une aide;

iii)  La coopération du Gouvernement soudanais avec la MINUAD, notamment sa capacité de garantir que l’Opération jouisse d’une liberté totale de mouvement et puisse faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire sur tout le territoire du Darfour, ainsi que de la faculté d’ouvrir et de fermer des bases opérationnelles et la possibilité pour les forces de la MINUAD de retourner sans restriction ni obstacle dans toutes les régions du Darfour, y compris celles dont l’Opération s’est retirée;

iv)   L’élimination des obstacles d’ordre bureaucratique auxquels se heurte la MINUAD, notamment en ce qui concerne les formalités de dédouanement, les autorisations de vol et la délivrance des visas;

v)    La question de savoir si la situation sur le terrain permet toujours de nouvelles réductions;

vi)   La question de savoir si les capacités de l’équipe de pays des Nations Unies et du Gouvernement soudanais, notamment de la police soudanaise et des institutions pénitentiaires et judiciaires soudanaises, ont atteint un niveau suffisant pour lui permettre d’absorber les anciennes tâches de la MINUAD, notamment l’évaluation des préparatifs présentés aux paragraphes 17 et 52 de la présente résolution;

8.    Exprime son intention de réexaminer, d’ici au 30 juin 2019, l’ampleur et le rythme des restructurations et des nouvelles fermetures, compte tenu des résultats de l’examen stratégique du 1er mai 2019 demandé au paragraphe 7 de la présente résolution;

9.    Souligne que, compte tenu de l’évolution des conditions de sécurité, toute réduction des effectifs de l’Opération devrait être fondée sur les progrès faits dans la réalisation des indicateurs et des objectifs de référence énoncés au paragraphe 50, et sur la situation sur le terrain, de manière progressive, échelonnée, souple et réversible, et que la réduction de sa composante personnel en tenue devrait préserver le caractère hybride de l’Opération et viser en priorité à conserver les contingents les plus performants;

10.   Souligne qu’il faut prévoir des effectifs appropriés compte tenu de la restructuration de la MINUAD, en particulier pour permettre d’accorder une importance accrue à la stabilisation de la situation au Darfour;

11.   Décide que les priorités stratégiques redéfinies de la MINUAD, telles que recommandées dans le rapport spécial, sont les suivantes:

i)    La protection des civils, la surveillance des droits de l’homme et le signalement de toute atteinte à ces droits, notamment du fait de violence sexuelle et sexiste et de violations graves commises sur la personne d’enfants, la facilitation de l’aide humanitaire et la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire;

ii)   La médiation entre le Gouvernement soudanais et les mouvements armés non signataires, sur la base du Document de Doha pour la paix au Darfour;

iii)  L’appui au règlement par la médiation des conflits intercommunautaires ou des autres conflits locaux risquant de compromettre les conditions de sécurité, y compris grâce à l’adoption de mesures visant à s’attaquer aux causes profondes de ces conflits, en collaboration avec le Gouvernement soudanais, l’équipe de pays des Nations Unies et la société civile;

12.   Demande que la MINUAD continue d’articuler toutes ses activités et de mobiliser ses ressources autour de ces priorités, cesse toutes les autres tâches qui ne relèvent pas d’elles et poursuive son entreprise de rationalisation en conséquence, et que les composantes civile et de police de l’Opération travaillent ensemble de manière intégrée, demande à l’Opération, l’équipe de pays des Nations Unies et les autres entités des Nations Unies opérant au Darfour de renforcer l’intégration et souligne que la bonne répartition des tâches et la coordination entre l’Opération et l’équipe de pays des Nations Unies sont déterminantes;

13.   Réaffirme que la MINUAD doit continuer d’accorder la priorité aux éléments ci-après dans ses décisions sur l’utilisation des capacités et ressources disponibles: a) la protection des civils sur l’ensemble du territoire du Darfour; b)     l’accès sûr et sans entrave de l’aide humanitaire, et la sûreté et la sécurité du personnel et des activités humanitaires, conformes aux dispositions applicables du droit international et aux principes directeurs de l’ONU relatifs à l’aide humanitaire; et demande à la MINUAD d’utiliser au mieux ses capacités, en coopération avec l’équipe de pays des Nations Unies et d’autres acteurs internationaux et non gouvernementaux, pour appliquer sa stratégie globale intégrée et atteindre ces objectifs;

14.   Souligne combien il importe que le Gouvernement soudanais, y compris les autorités locales, les entités des Nations Unies et les acteurs du développement œuvrent de concert, notamment pour stabiliser la situation, améliorer les conditions de sécurité et rétablir l’autorité de l’État;

15.   Décide, en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, d’accorder l’autorisation de prendre toutes les mesures requises qui sont prévues au paragraphe 16 de la résolution 1769 (2007) et exposées plus en détail au paragraphe 16 de la présente résolution, et exhorte la MINUAD à décourager toute menace contre elle-même ou son mandat;

16.   Décide que la MINUAD devra, conformément aux priorités stratégiques présentées dans le paragraphe 11 de la présente résolution, exécuter les tâches prévues au paragraphe 15 de la résolution 2363 (2017);

17.   Appuie la recommandation du Secrétaire général, à savoir la création de bureaux de liaison communs à la MINUAD et à l’équipe de pays des Nations Unies dans les capitales de tous les États du Darfour, sauf ceux où des bases d’opérations seraient maintenues, qui regrouperaient, dans la mesure du possible et dans la limite des ressources existantes, les grandes composantes de la MINUAD et le personnel de l’équipe de pays, afin de former des équipes conjointes, comme décidé d’un commun accord par la MINUAD et l’équipe de pays;

18.   Demande à la MINUAD de collaborer avec l’équipe de pays des Nations Unies aux fins de la facilitation de la transition de l’Opération, selon que de besoin et conformément aux tâches pertinentes visées au paragraphe 16 ci-dessus, par l’intermédiaire des bureaux conjoints de liaison des États et pour les activités conjointes exposées dans le rapport spécial:

19.   Souligne que la composante police de la MINUAD devrait axer ses activités en particulier sur les activités ci-après, comme indiquées au paragraphe 44 du rapport spécial:

i)    L’appui de la protection physique des civils et la facilitation de l’aide humanitaire;

ii)   La création d’un environnement propice à la protection en coordonnant le renforcement et la formation de la Police soudanaise au Darfour;

iii)  Des initiatives de police de proximité axées notamment sur la lutte contre la violence sexuelle et sexiste et la protection de l’enfance, menées en collaboration avec l’équipe de pays des Nations Unies et avec la participation des bureaux de liaison des États et de Khartoum;

20.   Souligne que la responsabilité du rétablissement de la paix et de la sécurité au Darfour incombe au premier chef au Gouvernement soudanais et exhorte ce dernier à tout mettre en œuvre pour appuyer la MINUAD et l’équipe de pays des Nations Unies et pour collaborer avec elles afin de réaliser les tâches exposées dans le paragraphe 18 de la présente résolution;

21.   Souligne qu’il importe de doter l’équipe de pays des Nations Unies de ressources lui permettant d’apporter l’appui décrit dans la présente résolution, et encourage les États Membres et les organisations compétentes à envisager de verser les contributions volontaires nécessaires;

22.   Prend note de la recommandation faite au Haut-Commissariat aux droits de l’homme, dans le rapport spécial, d’ouvrir au Soudan un bureau ayant pour mission de contribuer à renforcer la protection des droits de l’homme et prie le Gouvernement soudanais d’entamer des pourparlers avec le Haut-Commissariat dans le cadre de la mise en place et des activités d’un bureau au Soudan ayant plein mandat pour la protection et la promotion des droits de l’homme;

23.   Souligne le rôle crucial que joue l’Union africaine dans la stabilisation du Darfour et encourage le Gouvernement soudanais, la MINUAD et l’équipe de pays des Nations Unies de collaborer avec la Commission de l’Union africaine, par l’intermédiaire de ses services compétents, afin d’appuyer l’exécution des tâches énoncées au paragraphe 18 de la présente résolution, ainsi que le processus politique, la réforme du secteur de la sécurité et le désarmement, la démobilisation et la réintégration;

24.   Se félicite des efforts déployés pour améliorer l’efficacité de la MINUAD, souligne à cet égard que l’Opération devrait avoir plus de souplesse en ce qui concerne ses déploiements militaires dans l’ensemble du Darfour et accroître la présence sur le terrain des policiers hors unités constituées et prie le Secrétaire général de veiller à ce que cette nécessité soit prise en compte dans les mémorandums d’accord et états des besoins par unité convenus par les pays qui fournissent des contingents et des effectifs de police à la MINUAD et l’Organisation des Nations Unies;

25.   Prie la MINUAD de veiller à ce que tout appui fourni à des forces de sécurité non onusiennes soit strictement conforme à la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’Organisation des Nations Unies à des forces de sécurité non onusiennes, et prie le Secrétaire général de rendre compte, dans les rapports qu’il lui présentera, des progrès réalisés dans la mise en œuvre de cette politique;

26.   Se félicite des initiatives prises par le Secrétaire général en vue d’instituer une culture de la performance dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et l’engage à poursuivre les efforts qu’il fait pour établir un dispositif de gestion de la performance intégré et l’appliquer à la MINUAD, et prie le Secrétaire général de s’employer à augmenter le nombre de femmes au sein de l’Opération et de veiller à ce que ces dernières participent de manière effective à tous les aspects des opérations;

27.   Prie la MINUAD de veiller à inclure l’analyse des disparités entre les sexes et l’expertise technique en la matière dans toutes les étapes de la planification des missions, de l’élaboration, de l’exécution et de l’examen des mandats et du retrait des missions, en faisant en sorte que, en dépit de toute réduction de ses effectifs, les droits et l’autonomisation des femmes et des filles soient protégés et promus, que les besoins de celles-ci soient pris en compte et que leur participation soit assurée, ou que le flambeau soit transmis de façon viable à cet égard, la prie également de lui présenter des rapports plus détaillés sur la question et la prie en outre d’aider à renforcer les capacités des femmes pour ce qui est de participer au processus de paix, notamment au moyen de la représentation politique, de l’autonomisation économique et de la protection contre la violence sexiste;

28.   Exhorte les missions des Nations Unies présentes dans la région, notamment la MINUAD, la Force intérimaire de sécurité des Nations Unies pour Abyei (FISNUA), la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), à travailler en étroite coordination, et prie le Secrétaire général d’assurer une coopération efficace entre ces missions;

Situation politique

29.   Se félicite des progrès accomplis dans la mise en œuvre de certains éléments du Document de Doha pour la paix au Darfour, notamment de l’adhésion audit document du Mouvement de libération du Soudan-Deuxième révolution, de l’intégration d’anciens rebelles dans les structures gouvernementales du Soudan et du processus en cours de dialogue et de consultation interne au Darfour, mais se dit préoccupé par les retards qui continuent d’être pris dans l’application générale du Document, en particulier des dispositions ayant trait aux réparations et à l’instauration de conditions favorables au retour des déplacés et des réfugiés; prie instamment les parties signataires du Document de l’appliquer dans son intégralité, prend note de la création du Bureau de suivi de l’accord de paix au Darfour, qui remplace l’Autorité régionale pour le Darfour, et demande instamment au Gouvernement et aux parties signataires du Document de s’assurer que les institutions créées en vertu de ses dispositions ont les ressources et l’autonomie nécessaires pour s’acquitter de leur mandat; exige que les mouvements armés non signataires du Document s’abstiennent de faire obstacle à son application; engage la MINUAD ainsi que l’équipe de pays des Nations Unies à continuer de s’employer activement à appuyer la mise en œuvre du Document;

30.   Se déclare préoccupé par la restriction des libertés politiques, notamment le placement en détention de nombreux membres de l’opposition politique en janvier 2018, certains d’entre eux ayant toutefois été depuis libérés; et encourage le Gouvernement soudanais à favoriser l’instauration d’un climat propice à la participation de l’opposition aux processus politiques, y compris au Dialogue national, ainsi qu’à sa participation à la mise en œuvre des recommandations issues du Dialogue national et à tout suivi à venir, et aux élections nationales prévues en 2020;

31.   Insiste sur l’importance de l’action que mène le Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine, engage toutes les parties au conflit à coopérer avec celui-ci de manière constructive afin que la feuille de route qu’il a établie soit intégralement appliquée et, à cet égard, condamne la position de ceux qui refusent de se joindre immédiatement et sans conditions préalables au processus de médiation, y compris l’Armée de libération du Soudan-faction Abdul Wahid, prie instamment cette dernière de s’associer au processus de paix, sans poser de conditions préalables, afin de parvenir à la cessation des hostilités, première étape vers un accord de paix global et durable, et fait part de son intention d’envisager de prendre de nouvelles mesures contre toute partie qui entraverait le processus de paix;

32.   Réaffirme son appui à la tenue d’un dialogue interne au Darfour, dans un climat d’ouverture et dans le strict respect des droits civils et politiques des participants, favorisant notamment la participation pleine et entière des femmes et des déplacés;

33.   Demande qu’il soit mis fin d’urgence aux conflits intercommunautaires, à la criminalité et au banditisme qui touchent les civils, prend acte des activités de médiation menées par les autorités soudanaises et les médiateurs locaux là où il y a de tels affrontements, appelle à la réconciliation et au dialogue, souligne la nécessité de trouver des solutions durables aux causes profondes des conflits intercommunautaires, et salue la volonté de la MINUAD d’intensifier son action en faveur de la médiation dans ce conflit, dans le cadre de son mandat et de ses priorités stratégiques;

Sécurité

34.   Exige de toutes les parties au conflit du Darfour qu’elles mettent fin immédiatement à tous les actes de violence, notamment aux attaques contre des civils, des soldats de la paix ou des acteurs humanitaires, et s’engagent à respecter un cessez-le-feu durable et permanent afin d’instaurer une paix stable et durable dans la région;

35.   Accueille avec satisfaction la recommandation qu’a faite la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit au Gouvernement soudanais d’envisager d’adopter avec l’Organisation des Nations Unies un communiqué conjoint concernant la lutte contre les violences sexuelles liées aux conflits, notamment en coopérant étroitement avec le bureau de la Représentante spéciale, la MINUAD et l’équipe de pays des Nations Unies, en s’attachant à assurer l’accès des personnes ayant subi des violences sexuelles aux services médicaux, psychosociaux, juridiques et socioéconomiques, à suivre, à analyser et à échanger des documents et des informations sur les violences sexuelles, à prendre des mesures fondées sur l’état de droit en ce qui concerne les violences sexuelles liées aux conflits, et à engager le dialogue avec le secteur de la sécurité, les chefs religieux et la société civile; exige des parties au conflit qu’elles fassent immédiatement cesser tous les actes de violence sexuelle et sexiste et qu’elles prennent et tiennent des engagements précis et assortis de délais pour lutter contre la violence sexuelle, conformément à la résolution 2106 (2013), la MINUAD appuyant et suivant de près leur concrétisation, notamment par l’intermédiaire de conseillers pour la protection des femmes; prie instamment le Gouvernement soudanais, avec l’appui de l’Organisation des Nations Unies, en particulier la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit, et de l’Union africaine, d’élaborer un cadre structuré qui permettra d’aborder la question des violences sexuelles liées aux conflits sous tous ses aspects, de coopérer avec la MINUAD pour faire en sorte que les faits de violence sexuelle et sexiste fassent l’objet de rapports circonstanciés, que toutes les mesures nécessaires soient prises en réaction à de tels actes, que des services soient offerts aux personnes qui ont subi des violences sexuelles et que les auteurs de telles violences aient à répondre de leurs actes; prie la MINUAD de mieux suivre et analyser les cas de violence sexuelle et sexiste et les mesures prises pour combattre cette violence et de mieux en rendre compte, notamment en déployant rapidement des conseillers pour la protection des femmes; prie le Secrétaire général de veiller à l’application des dispositions pertinentes de ses résolutions 1325 (2000) et 2242 (2015) et de ses résolutions ultérieures sur les femmes et la paix et la sécurité, notamment celles qui visent à promouvoir la participation pleine et effective des femmes et des organisations féminines de la société civile à toutes les étapes des processus de paix, en particulier au règlement des conflits, à la planification du relèvement et à la consolidation de la paix, et de faire figurer des informations à ce sujet dans les rapports qu’il lui présentera; prie la MINUAD de suivre et d’évaluer les progrès réalisés à cet égard et demande au Secrétaire général d’en rendre compte dans les rapports qu’il lui présentera;

36.   Se félicite de l’engagement pris par le Secrétaire général d’appliquer rigoureusement sa politique de tolérance zéro à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles, prend note des diverses mesures prises par la MINUAD et les pays fournisseurs de contingents et de personnel de police pour combattre l’exploitation et les atteintes sexuelles, souligne qu’il importe au plus haut point que les pays qui fournissent des contingents et du personnel de police, ainsi que la MINUAD, selon le cas, fassent le nécessaire pour enquêter aussi rapidement que possible sur les allégations d’exploitation et d’atteintes sexuelles, conformément à la demande du Secrétaire général, exhorte tous les pays fournisseurs de contingents et de personnel de police à prendre les mesures voulues pour traduire en justice les agents responsables d’exploitation et d’atteintes sexuelles, et souligne qu’il faut prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles et améliorer les mesures prises pour donner suite aux allégations, conformément à sa résolution 2272 (2016);

37.   Rappelle la déclaration de son président S/PRST/2015/22 et sa résolution 2272 (2016), et prie le Secrétaire général de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour s’assurer que la MINUAD respecte pleinement la politique de tolérance zéro du Secrétaire général à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles et de veiller à ce que les antécédents de tous les membres du personnel de l’Opération soient vérifiés afin de s’assurer qu’ils n’ont eu aucun comportement sexuel répréhensible pendant qu’ils étaient au service des Nations Unies et de le tenir informé des progrès réalisés par l’Opération à cet égard dans les rapports qu’il lui adresse, et prie instamment les pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police de prendre les mesures de prévention appropriées, notamment d’organiser avant le déploiement une formation solide de sensibilisation au problème de l’exploitation et des atteintes sexuelles, et de veiller à ce que les membres de leurs contingents qui se rendraient coupables de tels actes aient à en répondre pleinement;

38.   Constate avec satisfaction que le Gouvernement soudanais a exécuté le plan d’action pour la protection des enfants contre les violations dans les conflits armés, notamment en vue de mettre fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants dans ses forces armées et ses forces de sécurité, et que le Secrétaire général a radié le Gouvernement soudanais des listes consignées dans son rapport sur le sort des enfants en temps de conflit armé, encourage le Gouvernement soudanais à poursuivre les efforts d’ordre préventif qu’il fait en faisant du plan d’action un plan national de prévention des violations graves contre les enfants, à continuer d’appliquer le mécanisme de dépôt de plainte au niveau local et à développer les registres d’état civil et les activités de sensibilisation, exige que les parties au conflit mettent immédiatement fin à toutes violations et atteintes commises sur la personne d’enfants et que le Gouvernement soudanais traduise les auteurs en justice, exhorte l’Armée de libération du Soudan-faction Minni Minawi et le Mouvement pour la justice et l’égalité-Gibril d’accélérer la pleine application de leurs plans d’action respectifs visant à la cessation du recrutement et de l’utilisation d’enfants et demande à l’Armée de libération du Soudan-faction Abdul Wahid d’engager le dialogue avec l’Organisation des Nations Unies aux fins de la cessation et de la prévention des violations graves contre les enfants; et prie le Secrétaire général:

a)    De continuer de suivre les violations graves commises sur la personne d’enfants et d’en rendre compte dans le cadre du mécanisme de surveillance et de communication, notamment en déployant des conseillers pour la protection de l’enfance, et d’inclure des informations à ce sujet dans les rapports qu’il lui présentera;

b)    De poursuivre le dialogue avec les parties au conflit en vue de l’élaboration et de la mise en œuvre des plans d’action susmentionnés, conformément à sa résolution 1612 (2005) et à ses résolutions ultérieures sur le sort des enfants en temps de conflit armé;

39.   Condamne vigoureusement toutes les tueries commises dans le cadre de conflits intercommunautaires et les agressions contre des civils perpétrées par des membres de milices et des éléments armés, constate les limites des mécanismes locaux traditionnels de règlement des différends face aux actes criminels et atteintes graves aux droits de l’homme perpétrés dans le cadre de conflits intercommunautaires et aux violences comme les meurtres, les coups et blessures, les enlèvements, les violences sexuelles et sexistes ou encore la destruction de biens et de moyens de subsistance, note le caractère récurrent de ces conflits intercommunautaires et la menace qu’ils font peser sur la protection des civils, la paix et la stabilité, et demande instamment au Gouvernement soudanais, avec l’appui de la MINUAD et de l’équipe de pays des Nations Unies, de lutter contre l’impunité en cours en veillant à amener les auteurs d’atteintes et de violations des droits de l’homme commises dans le cadre des conflits intercommunautaires au Darfour et les milices perpétrant des attaques à répondre de leurs actes;

40.   Se déclare vivement préoccupé par la quantité toujours importante d’armes, en particulier d’armes légères et de petit calibre, qu’il reste au Darfour et par l’utilisation, y compris par les milices, de telles armes contre des civils, note les efforts déployés par le Gouvernement soudanais pour réduire le nombre d’armes au Darfour dans le cadre de la campagne de collecte d’armes et de sa contribution, dont il a été fait état, à l’amélioration des conditions de sécurité, prie la MINUAD de continuer de coopérer avec le Groupe d’experts sur le Soudan afin de le seconder dans sa tâche, encourage la MINUAD à continuer de fournir une assistance technique et logistique à la Commission du Soudan pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration et exhorte le Gouvernement soudanais à mener, conformément aux normes internationales sur le contrôle des armes légères et en pleine coopération avec la MINUAD, un réel processus de désarmement non sélectif et complet;

Situation humanitaire et déplacements

41.   Condamne toutes les violations du droit international humanitaire ainsi que les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits, notamment celles qui sont associées à la violence sexuelle ou sexiste sous toutes ses formes, en particulier la prise pour cible délibérée des civils et les attaques aveugles ou disproportionnées; et exige que toutes les parties au Darfour mettent immédiatement fin aux attaques contre les civils, les soldats de la paix et le personnel humanitaire et respectent les obligations que leur imposent le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire, selon qu’il convient, et que le Gouvernement soudanais amène les auteurs de ces attaques à répondre de leurs actes;

42.   Se déclare vivement préoccupé par la situation humanitaire au Darfour et par les menaces et agressions contre le personnel et les installations humanitaires, prend note de l’amélioration de l’accès humanitaire et se dit préoccupé que l’accès à certaines zones de conflit où vivent des populations vulnérables demeure limité, notamment à des zones où l’insécurité règne, et que des restrictions aux déplacements et des contraintes bureaucratiques entravant l’accès humanitaires soient imposées par les forces gouvernementales et, dans une moindre mesure, par les milices et les mouvements armés;

43.   Exprime son inquiétude concernant l’insuffisance des fonds dont disposent les acteurs humanitaires; souligne qu’il importe que les membres des organismes humanitaires se voient accorder leurs visas et leurs autorisations de voyage en temps voulu, que les accords techniques soient traités rapidement et que les restrictions appliquées au recrutement et au travail du personnel ainsi qu’à la sélection des partenaires soient allégées; exige du Gouvernement soudanais, de toutes les milices, y compris les unités auxiliaires des forces gouvernementales, des mouvements armés et de toutes les autres parties concernées qu’ils veillent à ménager aux organisations humanitaires et à leur personnel un accès sûr, rapide, impartial et libre aux populations dans le besoin dans l’ensemble du Darfour, afin qu’elles puissent leur apporter l’aide humanitaire nécessaire, conformément aux dispositions applicables du droit international et aux principes directeurs des Nations Unies concernant l’aide humanitaire, notamment l’humanité, l’impartialité, la neutralité et l’indépendance;

44.   Constate avec satisfaction quelques progrès dans la situation des droits de l’homme, mais condamne les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits qui continuent d’être commises au Darfour ou qui sont liées au Darfour, notamment les exécutions extrajudiciaires, le recours excessif à la force, les enlèvements de civils, les violences sexuelles et sexistes, les violations graves commises sur la personne d’enfants et les arrestations et détentions arbitraires; demande au Gouvernement soudanais d’enquêter sur les allégations relatives à ces violations et d’en traduire les responsables en justice; se déclare vivement préoccupé par la situation de toutes les personnes ainsi détenues, parmi lesquelles se trouvent des membres de la société civile, des déplacés et un spécialiste des droits de l’homme rattaché à la MINUAD; souligne qu’il importe de s’assurer que la MINUAD, dans les limites de son mandat actuel, et d’autres organisations compétentes puissent veiller au sort de ces personnes; et à cet égard demande instamment au Gouvernement soudanais de coopérer totalement avec la MINUAD à cette fin, d’amener les responsables à répondre de leurs actes et de faciliter l’accès des victimes à la justice; engage le Gouvernement soudanais à s’acquitter pleinement de ses obligations et notamment à lever l’état d’urgence au Darfour, à libérer tous les prisonniers politiques, à garantir la liberté d’expression, à autoriser les observateurs de la MINUAD à accéder aux zones dans lesquelles ils souhaitent se rendre et à veiller à leur liberté de circulation, ce qui exclut toute arrestation et toute détention de membres du personnel de l’Opération;

45.   Note que le Gouvernement soudanais a déclaré souhaiter que les personnes déplacées retournent dans leur région d’origine ou s’installent dans les zones où elles ont été déplacées; souligne que tout retour doit se faire dans de bonnes conditions de sécurité, en toute dignité, sur la base du volontariat et dans le respect du droit international applicable; note avec satisfaction l’accroissement du nombre de retours mais regrette que beaucoup d’entre eux ne soient pas viables, les causes profondes du conflit, dont l’insécurité et du défaut de services de base, de moyens de subsistance, de perspectives et d’accès à la terre et à l’eau dans les zones de retour, n’ayant pas été suffisamment combattues; et souligne qu’il importe de parvenir à des solutions dignes et durables pour les réfugiés et les déplacés et d’assurer leur pleine participation à la préparation et à la mise en œuvre de ces solutions;

46.   Prie toutes les parties au conflit au Darfour de créer les conditions propices au rapatriement librement consenti, informé, sûr, digne et durable des réfugiés et des déplacés ou, le cas échéant, à leur intégration locale ou à leur installation dans un lieu tiers et, dans le cadre du mandat qui lui a été donné en matière de protection des civils, se félicite des efforts que continue de déployer la MINUAD pour renforcer la protection des déplacés; souligne qu’il convient de mettre en place un mécanisme qui permette d’évaluer dans quelle mesure ces retours se font effectivement de manière volontaire et en toute connaissance de cause, et qu’il importe de se pencher sur les problèmes fonciers pour mettre en œuvre des solutions durables au Darfour;

47.   Prie l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement soudanais de tenir compte, dans les programmes qu’ils appliquent au Darfour, des répercussions néfastes des changements climatiques et écologiques et des catastrophes naturelles, entre autres facteurs, notamment en engageant des évaluations des risques et des stratégies de gestion des risques relatives à ces facteurs, et prie le Secrétaire général de faire figurer des informations sur ces évaluations dans les rapports qu’il est tenu de présenter selon qu’il convient;

Difficultés d’ordre opérationnel

48.   Rend hommage aux membres du personnel de la MINUAD qui ont sacrifié leur vie dans l’exercice de leurs fonctions pour la cause de la paix au Darfour; demande instamment à la MINUAD de prendre toutes les mesures nécessaires, dans le cadre de ses règles d’engagement et de comportement, pour protéger le personnel et le matériel des Nations Unies; condamne l’impunité dont continuent de jouir ceux qui s’en prennent aux soldats de la paix et, à cet égard, exhorte le Gouvernement soudanais à tout mettre en œuvre pour traduire en justice tous les auteurs de tels crimes et à coopérer avec la MINUAD à cette fin;

49.   Note avec satisfaction que les possibilités d’enlèvement des restes explosifs de guerre se multiplient, les conditions de sécurité s’étant améliorées dans certaines zones du Darfour, souligne que la MINUAD devrait, en collaboration avec le Service de la lutte antimines, poursuivre ses activités de déminage, en particulier dans les zones de retour, et prie l’Opération de coopérer avec les partenaires compétents, notamment le Centre national de lutte antimines, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), pour préparer la transition et les activités qu’il devrait rester à mener au moment du retrait de la MINUAD;

50.   Prend note des progrès qui continuent d’être accomplis en ce qui concerne la délivrance des visas, le dédouanement des cargaisons de la MINUAD, la liberté de circulation et le traitement des documents de voyage, constate de nouveau avec inquiétude que l’Opération rencontre encore certains obstacles dans l’exécution de son mandat, y compris les restrictions ciblées que continuent de subir en matière de visas certains de ses éléments, notamment la Section des droits de l’homme, les retards dans le traitement de ses conteneurs ainsi que les limitations à l’accès et aux déplacements dues à l’insécurité, à la criminalité et aux importantes restrictions de circulation mises en place par le Gouvernement soudanais, les milices et les groupes armés, y compris celles imposées par le Gouvernement aux patrouilles nocturnes dans l’ensemble du Darfour et d’autres empêchant l’Opération de se rendre à temps dans les zones qui connaissent des conflits intercommunautaires; demande à toutes les parties au Darfour de lever tous les obstacles empêchant l’Opération de s’acquitter pleinement et correctement de son mandat, notamment en assurant sa sécurité et sa liberté de circulation; et, à cet égard, exige du Gouvernement soudanais, en communication et en étroite collaboration avec les divers organismes qui dépendent de lui et avec les administrations locales à tous les niveaux, qu’il s’engage de nouveau en faveur de l’Accord sur le statut des forces et qu’il en respecte intégralement et sans délai les dispositions, notamment celles qui concernent les mouvements des patrouilles dans les zones touchées par le conflit et les autorisations de vol, ainsi que celles permettant à l’Opération de faire pleinement usage des moyens aériens à sa disposition et celles permettant le dédouanement rapide de son matériel au point d’entrée au Soudan et la délivrance de visas dans les meilleurs délais;

51.   Prie le Gouvernement soudanais d’accorder sans délai des autorisations pour les vols de la MINUAD entre les cinq États du Darfour afin de donner davantage de souplesse à l’Opération, et d’informer rapidement les divers organismes qui dépendent de lui et les administrations locales à tous les niveaux de l’octroi de ces autorisations, et souligne que la restructuration de la MINUAD doit s’accompagner d’une capacité accrue pour ce qui est de réagir aux menaces de manière rapide et adaptée en vue de protéger les civils;

52.   Constate avec préoccupation que la MINUAD a été empêchée de retourner régulièrement dans les zones où elle a fermé des bases d’opération alors que le Gouvernement soudanais l’avait autorisée à le faire, et prie instamment le Gouvernement soudanais d’assurer à l’Opération un accès sans entrave à l’ensemble du Darfour, y compris aux zones d’où elle s’est retirée;

Plan de retrait

53.   Prie le Secrétaire général d’inclure dans son rapport trimestriel initial un plan de retrait détaillé de la MINUAD assorti d’objectifs clairs, fondé sur la recommandation énoncée dans le rapport spécial (S/2018/530, annexe), selon laquelle certaines dispositions du Document de Doha pour la paix au Darfour pourraient servir à établir des indicateurs de succès en vue du retrait à terme de l’Opération, ainsi que les objectifs existants de l’Opération et des renseignements à jour selon que de besoin, l’accent étant mis sur les objectifs et indicateurs dont le Gouvernement soudanais a la responsabilité dans les domaines de la protection des civils, de la réforme du secteur de la sécurité, de l’état de droit, des solutions durables et des droits de l’homme, et le prie également d’inclure dans son rapport une recommandation sur la manière dont les progrès accomplis dans la réalisation de l’ensemble des objectifs de retrait devraient être suivis;

54.   Prend note des consultations entre l’Organisation des Nations Unies, l’Union africaine et le Gouvernement soudanais, notamment dans le cadre du Mécanisme tripartite et du Groupe de travail mixte au cours de l’année écoulée, y compris l’examen des questions d’ordre opérationnel et logistique relatives au fonctionnement et au plan de retrait de la MINUAD;

55.   Demande à la MINUAD de chercher en étroite collaboration avec l’équipe de pays des Nations Unies les moyens de combler les éventuels déficits de capacités pour préparer le retrait de l’Opération, notamment un plan de mobilisation des ressources nécessaires au transfert des responsabilités, demande à l’Opération, à l’équipe de pays des Nations Unies et à tous les organismes compétents des Nations Unies de coordonner étroitement leur action, en consultation avec le Gouvernement, dans le cadre du transfert des responsabilités; et encourage la communauté internationale et les donateurs à appuyer le développement des activités et programmes de l’équipe de pays des Nations Unies visant à aider le Gouvernement soudanais à poursuivre les efforts qu’il fait pour maintenir une paix durable;

Présentation de rapports

56.   Prie le Secrétaire général de lui faire rapport tous les 90 jours à compter de l’adoption de la présente résolution sur la MINUAD, en lui communiquant des informations sur:

i)    La situation politique et humanitaire et les conditions de sécurité au Darfour, notamment en rendant compte de manière détaillée des cas de violence et d’agression contre des civils, y compris les actes de violence sexuelle et sexiste et les violations graves commises sur la personne d’enfants, quels qu’en soient les auteurs, ainsi que de l’accès donné à l’Opération pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, y compris dans les zones d’où elle s’est retirée;

ii)   Les faits survenus et les progrès accomplis dans la réalisation des priorités stratégiques de l’Opération énoncées au paragraphe 11 de la présente résolution, des objectifs et des indicateurs concernant le retrait à terme de l’Opération indiqués au paragraphe 53 de la présente résolution, et de la stratégie de transition conjointe de l’Opération et de l’équipe de pays des Nations Unies ainsi que dans le transfert des tâches et des responsabilités à l’équipe de pays;

iii)  Les violations de l’Accord sur le statut des forces, y compris les agressions ou les menaces d’agression contre l’Opération, les violations du droit international humanitaire commises par quelque partie au conflit, ainsi que les restrictions d’accès et les obstacles opérationnels importants, tels que ceux liés aux services de dédouanement et de visas;

iv)   Les progrès réalisés dans la réalisation de la restructuration et de la réduction des effectifs de la composante militaire de l’Opération et ses conséquences, notamment sur les besoins de protection et les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits;

v)    Les faits survenus et les progrès accomplis dans la mise en œuvre de mesures stratégiques visant à remédier aux causes profondes des conflits intercommunautaires et du plan d’action pour la prévention et le règlement de ces conflits;

vi)   Les faits survenus et les progrès accomplis dans le règlement des problèmes auxquels l’Opération fait face;

vii)  Les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits, commises notamment contre des femmes et des enfants, et les violations du droit international humanitaire, de manière plus étoffée, détaillée et complète;

viii) Les faits survenus en ce qui concerne l’appui que l’Opération apporte aux mécanismes de règlement des conflits locaux, notamment les progrès accomplis dans l’action menée pour assurer la participation pleine et entière des femmes;

ix)   L’état d’avancement du processus de paix, notamment pour ce qui est de l’application du Document de Doha pour la paix au Darfour et de la feuille de route du Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine;

x)    L’application de la résolution;

57.   Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale élit l’Islande au Conseil des droits de l’homme

Soixante-douzième session
106e séance plénière – matin
AG/12040

L’Assemblée générale élit l’Islande au Conseil des droits de l’homme

Après le récent retrait des États-Unis du Conseil des droits de l’homme, l’Assemblée générale a pourvu le siège devenu vacant en élisant, ce matin, à la majorité simple des 193 votants, l’Islande, pour un mandat qui commence ce jour et viendra à expiration le 31 décembre 2019.

L’Islande a recueilli 172 voix, la France une voix.  Dans une lettre* du 2 juillet 2018, le représentant permanent du Luxembourg, en sa qualité de Président du Groupe des États d’Europe occidentale et autres États, au sein duquel le siège était vacant, avait informé l’Assemblée générale de la candidature de l’Islande.

Créé le 15 mars 2006 pour remplacer la Commission des droits de l’homme, le Conseil des droits de l’homme est composé de 47 États répartis comme suit: 13 États d’Afrique, 13 États d’Asie et du Pacifique, 8 États d’Amérique latine et des Caraïbes, 7 États d’Europe occidentale et autres États et 6 États d’Europe orientale.

Sur un autre point de son ordre du jour, l’Assemblée a ensuite examiné le rapport** de la Commission des questions politiques spéciales et de la décolonisation (Quatrième Commission) intitulé « Étude d’ensemble de toute la question des opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects ».

Elle a adopté sans vote le projet de résolution recommandé par la Commission dans le paragraphe 6 dudit rapport.  Avec ce texte, l’Assemblée fait siennes les propositions, recommandations et conclusions du Comité spécial des opérations de maintien de la paix, énoncées au chapitre V de son rapport, et décide que le Comité spécial continuera, conformément à son mandat, de procéder à une étude d’ensemble de toute la question des opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects.

Le Comité spécial fera ensuite le point sur la suite donnée à ses propositions antérieures et examinera toute nouvelle proposition concernant le renforcement des moyens dont dispose l’Organisation pour s’acquitter de ses responsabilités dans ce domaine.

La prochaine séance plénière de l’Assemblée générale sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

*A/72/924

** A/72/449/Add.1

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

République centrafricaine: le Conseil de sécurité demande instamment aux groupes armés de déposer les armes et la « campagne d’hostilité » contre la MINUSCA

8309e séance – matin
CS/13420

République centrafricaine: le Conseil de sécurité demande instamment aux groupes armés de déposer les armes et la « campagne d’hostilité » contre la MINUSCA

Le Conseil de sécurité a, ce matin, demandé instamment aux groupes armés opérant en République centrafricaine de déposer les armes et de cesser toutes les formes de violence ainsi que la « campagne d’hostilité » menée contre la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation dans ce pays (MINUSCA), qui font un nombre inacceptable de morts, de blessés et de déplacés, sur fond d’« incitation exacerbée à la haine et à la violence ethniques et religieuses ».

Dans une déclaration lue au nom des autres membres du Conseil par son Président pour le mois de juillet, le Représentant permanent de la Suède, M. Olof Skoog, le Conseil réaffirme qu’il est « urgent et impératif » de dénoncer les responsables de violations du droit international humanitaire et des droits de la personne.  Il souligne également qu’il importe que la Cour pénale spéciale entre « vraiment en activité », que la commission vérité, justice, réparation et réconciliation soit mise en place et les autres mécanismes de responsabilisation nationaux, renforcés. 

Le Conseil demande aux autorités centrafricaines d’entreprendre la réforme du secteur de la sécurité afin de constituer des forces de défense nationale et de sécurité intérieure « multiethniques, professionnelles, représentatives et bien équipées », de procéder au désarmement, à la démobilisation et au rapatriement des membres de groupes armés et d’accélérer l’application de la stratégie nationale pour le relèvement et la consolidation de la paix.

La déclaration exhorte en outre les autorités du pays à prendre sans tarder toutes les mesures nécessaires pour faire progresser, entre autres, le dialogue avec les groupes armés et promouvoir la réconciliation nationale, l’extension de l’autorité de l’État.

Le Conseil se félicite à cet égard de la demande faite de réactiver les commissions mixtes bilatérales entre la République centrafricaine, d’une part, et le Cameroun, le Soudan et le Tchad, d’autre part, et engage les pays concernés à coopérer pour résoudre les problèmes transfrontières.

Par ailleurs, le Conseil de sécurité se réjouit des mesures actuellement prises par le Secrétariat de l’ONU pour obtenir sans tarder les forces supplémentaires autorisées afin d’accroître la flexibilité et la mobilité de la MINUSCA, conformément à la résolution 2387 (2017).

LA SITUATION EN REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Déclaration du Président du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité se déclare profondément préoccupé par les actes de violence qui continuent d’être perpétrés par les groupes armés, à Bangui et dans le reste du pays, contre les civils, les soldats de la paix des Nations Unies et les agents humanitaires, ainsi que par les violations du droit international humanitaire, les violations des droits de l’homme et les atteintes à ces droits, notamment celles commises contre les enfants et les violences sexuelles et sexistes en période de conflit, qui entraînent un nombre inacceptable de morts, de blessés et de déplacés.  Le Conseil condamne également fermement l’augmentation des actes d’incitation à la haine et à la violence ethniques et religieuses qui menacent la paix et la stabilité en République centrafricaine, ainsi que la campagne d’hostilité menée contre la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) et d’autres acteurs internationaux.

Le Conseil exhorte les groupes armés, à Bangui et dans le reste du pays, à cesser toutes formes de violence, d’activités déstabilisatrices et de restrictions à la liberté de circulation des personnes, de déposer les armes, immédiatement et sans conditions, et de participer dans un esprit constructif au processus de paix.  Il réaffirme le besoin urgent et impératif de traduire en justice les responsables de violations du droit international humanitaire, de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits.  Il rappelle également que le fait de se livrer à des actes d’incitation à la violence, en particulier à motivation ethnique ou religieuse, et ainsi de perpétrer ou d’appuyer des actes qui compromettent la paix, la stabilité et la sécurité en République centrafricaine constitue un fondement pour des désignations aux fins de sanctions conformément à la résolution 2399 (2018).

Le Conseil réaffirme son soutien au Président Faustin-Archange Touadera dans ses efforts pour pérenniser la paix et la stabilité en République centrafricaine et exhorte les autorités centrafricaines à prendre, sans délai, toutes les mesures nécessaires pour faire progresser le dialogue avec les groupes armés et promouvoir la réconciliation nationale, l’extension de l’autorité de l’État, la réforme du secteur de la sécurité et la lutte contre l’impunité, qui revêtent la plus haute priorité.  Le Conseil souligne également qu’il importe d’achever l’opérationnalisation de la Cour pénale spéciale, de mettre en place la Commission Vérité, Justice, Réparation et Réconciliation et de renforcer les autres mécanismes nationaux d’établissement des responsabilités.  Le Conseil demande aux autorités centrafricaines de mettre en œuvre la réforme du secteur de la sécurité afin de constituer des forces de défense nationale et de sécurité intérieure multiethniques, professionnelles, représentatives et bien équipées, de procéder au désarmement, à la démobilisation et au rapatriement des membres de groupes armés et d’accélérer la mise en œuvre du Plan national de relèvement et la consolidation de la paix.

Le Conseil réaffirme son soutien à l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine et à sa feuille de route adoptée à Libreville le 17 juillet 2017, qui constituent le principal cadre pour une solution politique en République centrafricaine, comme les autorités centrafricaines en ont convenu et sous leur direction.  Le Conseil se félicite de la conclusion de la deuxième série de consultations du Panel de facilitateurs de l’Initiative africaine et souligne la nécessité urgente de progresser davantage dans l’ouverture d’un dialogue ambitieux et inclusif entre les autorités centrafricaines et les groupes armés, associant tous les secteurs de la société et favorisant la participation entière et effective des femmes, avec l’appui constant de la MINUSCA et d’autres partenaires, afin de parvenir sans délai à un accord politique global.  Le Conseil encourage également le Président Faustin-Archange Touadera à consolider et à renforcer l’adhésion du pays au processus de paix et préconise une meilleure coordination des efforts en soutien à l’Initiative africaine.

Le Conseil souligne l’importance du rôle et de l’engagement de haut niveau de l’Union africaine, de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et des États voisins pour la promotion d’une paix et d’une stabilité durables en République centrafricaine, et demande à tous ces acteurs de resserrer leur coordination et d’intensifier leurs efforts pour les prochaines étapes de la mise en œuvre de la feuille de route de Libreville.

Le Conseil se félicite de la première réunion tenue à Bangui, le 11 avril 2018, du Groupe international de soutien à la République centrafricaine, coprésidée par l’Union africaine, la Communauté économique des États de l’Afrique centrale et l’Organisation des Nations Unies, qui avait pour objet de promouvoir un engagement durable et cohérent en faveur des efforts de stabilisation et de relèvement en cours en République centrafricaine.  Il se félicite à cet égard de la demande faite de réactiver les commissions mixtes bilatérales entre la République centrafricaine, d’une part, et le Cameroun, le Soudan et le Tchad, d’autre part, et encourage les pays concernés à coopérer pour résoudre les problèmes transfrontaliers.  Il se félicite également de la visite conjointe à Bangui, du 10 au 13 avril 2018, du Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Pierre Lacroix, et du Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, Smaïl Chergui, et souligne l’importance de la synergie entre les deux organisations pour l’appui au processus de paix en République centrafricaine.

Le Conseil réaffirme son ferme soutien au Représentant spécial, Parfait Onanga-Anyanga, ainsi qu’à la MINUSCA dans l’exécution de son mandat à l’appui des autorités centrafricaines, en particulier à l’action menée pour la protection des civils, notamment en adoptant une posture proactive et robuste, pour appuyer le processus de paix, et pour mettre en place des conditions de sécurité favorables à l’acheminement de l’aide humanitaire, conformément aux dispositions de la résolution 2387 (2017).

Le Conseil rend hommage à la bravoure des soldats de la paix des Nations Unies qui ont sacrifié leur vie au service de la paix et se félicite à cet égard de l’extradition par la République démocratique du Congo vers la République centrafricaine du commandant anti-balaka Wekanam Crepin et d’autres individus soupçonnés d’avoir participé à l’attaque qui a coûté la vie à cinq soldats de la paix des Nations Unies et à des attaques contre des civils.  Il se félicite des mesures prises pour améliorer la sûreté et la sécurité du personnel des Nations Unies.  Il souhaite que se poursuivent les efforts déployés pour continuer d’optimiser les résultats de la MINUSCA et attend avec intérêt les rapports sur la performance des pays fournisseurs de contingents ou de personnel de police. Il se réjouit également des mesures actuellement prises par le Secrétariat pour obtenir sans tarder les forces supplémentaires autorisées afin d’accroître la flexibilité et la mobilité de la MINUSCA, conformément aux dispositions du paragraphe 32 de la résolution 2387 (2017).

Le Conseil prend note des différentes mesures prises par la MINUSCA et les pays fournisseurs de contingents et de personnel de police pour combattre l’exploitation et les agressions sexuelles, qui ont permis de réduire le nombre de cas signalés, se déclare toutefois toujours gravement préoccupé par les nombreuses allégations de ce type à l’encontre des soldats de la paix en République centrafricaine ainsi qu’à des forces non onusiennes, réaffirme la nécessité pour les pays qui fournissent des contingents ou du personnel de police ainsi que la MINUSCA, selon le cas, d’ouvrir sans tarder des enquêtes sur ces allégations de façon crédible et transparente et de faire en sorte que les auteurs de telles infractions pénales ou de fautes répondent de leurs actes, et souligne qu’il faut prévenir l’exploitation et les agressions sexuelles et renforcer les mesures prises pour donner suite aux allégations, conformément à la résolution 2272 (2016).

Le Conseil se félicite du travail réalisé par la mission militaire de formation PSDC de l’Union européenne en République centrafricaine (EUTM-RCA), ainsi que de l’appui des autres partenaires internationaux et régionaux à la formation des forces de défense et de sécurité nationale et au renforcement de leurs capacités, et il encourage une coordination effective avec la MINUSCA et l’EUTM-RCA à cet égard.  Le Conseil se félicite de la bonne collaboration en cours entre les autorités centrafricaines et les partenaires internationaux, y compris la MINUSCA et l’EUTM-RCA, en vue du redéploiement progressif et durable des forces armées centrafricaines et des forces de sécurité intérieure formées par l’EUTM-RCA et d’autres partenaires internationaux, dans le contexte plus large de l’extension de l’autorité de l’État et de la consolidation de la sécurité, et souligne qu’il importe de prendre des mesures de renforcement des capacités à l’appui des forces de sécurité intérieure.  Le Conseil exprime à cet égard son intention d’examiner les recommandations que le Secrétaire général a transmises au Conseil de sécurité, comme demandé au paragraphe 43 a) iv) de la résolution 2387 (2017).

Le Conseil se dit vivement concerné par la situation humanitaire en République centrafricaine où près de la moitié de la population a besoin d’une assistance humanitaire, y compris par la situation alarmante des réfugiés et des déplacés. Le Conseil exige de nouveau que toutes les parties autorisent et facilitent pleinement l’acheminement rapide, en toute sécurité, et sans entrave de l’aide humanitaire destinée aux personnes qui en ont besoin.  Il encourage les États Membres à répondre d’urgence aux besoins humanitaires dans le pays, recensés dans le Plan de réponse humanitaire pour 2018.

Le Conseil réaffirme son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République centrafricaine et rappelle l’importance des principes de non‑ingérence, de bon voisinage et de coopération régionale.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Forum politique de haut niveau examine « l’aspect sombre » de la réalisation des objectifs de développement durable

Session de 2018,
10e,11e & 12e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6938

Le Forum politique de haut niveau examine « l’aspect sombre » de la réalisation des objectifs de développement durable

Pour sa quatrième journée de travaux, le Forum politique de haut niveau pour le développement durable, organisé sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC), s’est penché sur « l’aspect sombre » de la réalisation des objectifs de développement durable, au cours des trois tables rondes de la journée, en présence des grands groupes et autres parties prenantes.

Les États essaient de montrer les aspects positifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en occultant « l’aspect sombre », a fustigé Mme Luisa Emilia Reyes Zúñiga, du grand groupe des femmes, modératrice de cette table ronde intitulée « Transformation vers des sociétés viables et résilientes - perspectives de la société ».

« Les grands groupes ne sont pas vos ennemis; ils sont de votre côté », a-t-elle lancé en dénonçant les tentatives de brider leur parole.  Même son de cloche du côté de l’un des panélistes, M. Vitalice Meja, de « Reality of Aid Network Africa », qui a ironisé sur le fait que dès que les États alignent leur plan de développement national sur le Programme 2030, c’est que « tout va bien dans le meilleur des mondes possibles ».

« Mais non, ce n’est pas le cas », a-t-il dit en demandant que la société civile soit mieux associée à la réalisation dudit Programme, « comme il se doit ».  Une franchise partagée par Mme Jolly Amatya, du grand groupe des enfants et des jeunes, qui a affirmé que « le caractère volontaire de la mise en œuvre des objectifs de développement durable ne doit pas servir d’excuse pour ralentir les progrès ».

Comme de nombreux orateurs, elle a réclamé un changement de paradigme économique, loin de l’actuel où « seule la croissance est recherchée sans prise en compte des conséquences négatives sur les plans économique et environnemental ».  Le grand groupe des autorités locales, par la voix de M. Berry Vrbanovic, maire de la ville canadienne de Kitchener, a également exprimé ses doléances en réclamant que les collectivités locales soient associées davantage à l’élaboration des plans nationaux.  « Nous ne voulons plus être une note de bas de page. »

Les participants aux deux tables rondes de la matinée ont affiché leur scepticisme face à la réalisation des objectifs de développement durable.  « Nous voulons les réaliser mais nous sommes en panne.  L’élan est retombé », a déclaré la déléguée du grand groupe des organisations non gouvernementales.  Même constat pour la représentante de la France qui a indiqué que « peu de parties prenantes se sont appropriées ces objectifs ».  « Ils ne sont pourtant pas une nouvelle obligation mais une nouvelle grille de lecture », a-t-elle dit.

Le pessimisme prévalait aussi du côté de la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Mme Vera Songwe, qui a indiqué que les inégalités n’ont pas diminué en dépit de la croissance des économies en Afrique.  « En d’autres termes, nous continuons de créer des pauvres et des inégalités », a dit celle qui était l’une des panélistes de la première table ronde de la journée intitulée « Mise en œuvre des objectifs de développement durable: enseignements tirés dans les différentes régions ».

« De même que dans d’autres régions, les progrès ne sont pas suffisants pour les pays d’Asie et du Pacifique », a renchéri le Secrétaire exécutif adjoint de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), M. Kaveh Zahedi.  « Un seul objectif est sur la bonne voie d’être atteint en 2030, à savoir l’accès universel à l’éducation.  Beaucoup reste à faire en qui concerne l’intégration sociale et l’emploi décent », a-t-il déploré.

La dernière table ronde de la journée consacrée à l’examen de l’objectif 12 sur la consommation et production responsables a, elle, vu M. Shaswat Sapkota, de la Division de statistique du Département des affaires économiques et sociales (DAES) faire montre d’un optimisme prudent.  Il s’est ainsi félicité du fait que 93% des 250 plus grandes compagnies du monde font désormais des rapports sur la durabilité, ainsi que les trois quarts des 100 plus grandes entreprises de 49 pays. 

      « De même, en 2018, 108 pays avaient développé des politiques nationales de production et consommation durables, y compris de nombreux pays d’Afrique subsaharienne et d’Amérique latine », s’est enorgueilli M. Sapkota.  Enfin, cette journée a été marquée par les appels lancés par les représentants des peuples autochtones pour le respect de leurs droits, en particulier fonciers. 

« Comment peut-on faire du développement alors que nos terres sont militarisées?  Comment faire, alors que les multinationales sont plus écoutées que les populations autochtones? » a demandé Mme Alma Sinumlag, Chargée de programme du « Cordillera Women Education and Action Research Center » (Asia-Pacific Civil Society Mechanism).

Le Forum politique de haut niveau pour le développement durable poursuivra ses travaux demain, vendredi 13 juillet, à partir de 10 heures.

FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE ORGANISÉ SOUS LES AUSPICES DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Mise en œuvre des objectifs de développement durable: enseignements tirés dans les différentes régions

La table ronde, animée par la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), Mme ALICIA BÁRCENA IBARRA, avait pour objectif d’aider les États Membres et toutes les parties prenantes à mieux comprendre les tendances régionales, les difficultés et les progrès, ainsi que les occasions à ne pas manquer, dans le contexte de la mise en œuvre des objectifs de développement durable dans les régions. 

« La croissance est de retour en Afrique », elle est à 3,1%, a commencé par dire la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Mme VERA SONGWE, tout en tempérant son observation: ce chiffre n’est pas suffisant pour atteindre les objectifs de développement durable et éliminer la pauvreté.  En effet les inégalités n’ont pas diminué en dépit de la croissance des économies en Afrique, ce continent connaissant toujours des niveaux élevés d’extrême pauvreté.  « En d’autres termes, nous continuons de créer des pauvres et des inégalités. »  Par ailleurs, 18 pays africains connaissent des problèmes de dettes.  « Comment vont-ils financer leur développement? »  Mme Songwe a également mentionné les difficultés structurelles comme les retards technologiques et le chômage.  En outre, le continent reste intrinsèquement vulnérable aux changements climatiques.  Il connaît des taux élevés de dégradation et d’épuisement des terres, des forêts et des ressources de la biodiversité. 

Pour relever les défis africains, il faut d’abord une prise de conscience de l’interdépendance des objectifs de développement durable avec les engagements internationaux existants, a poursuivi Mme Songwe.  Il faut aussi des données fiables sur lesquelles baser les programmes et une hiérarchisation des interventions stratégiques.  La Secrétaire exécutive a constaté quelques tendances émergentes en Afrique comme la conception d’outils de planification pour soutenir les objectifs de développement durable, ou l’amélioration de l’accès aux technologies.  La CEA suggère au continent africain de donner la priorité aux investissements dans l’accès à l’eau et à l’assainissement, à l’amélioration de la performance du système de santé, à l’intégration de l’urbanisation dans les plans de développement, aux investissements dans les technologies et les infrastructures qui réduisent les pertes après récolte, et dans l’amélioration de l’accès du monde rural à l’énergie. 

Pour la région arabe, le Secrétaire général adjoint de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), M. MOHAMED ALI ALHAKIM, a indiqué que 60% de la population a moins de 30 ans et que les femmes ne représentent que 20% de la population active.  De nombreux pays sont confrontés à la pénurie d’eau, a-t-il indiqué parmi les difficultés de la région.  Les examens volontaires auxquels se sont soumis plusieurs gouvernements ont montré la nécessité de renforcer le financement du développement, les partenariats public-privé, les questions transfrontalières, la technologie et l’innovation et la collecte de données. 

Il est essentiel de trouver des solutions régionales aux défis régionaux, a conseillé M. Alhakim qui a noté les efforts déployés pour forger des partenariats, notamment avec la Ligue des États arabes, les institutions financières régionales, les universités et la société civile.  La CESAO, qui est une plateforme pour de telles discussions, a organisé le Forum arabe pour le développement durable qui a réuni 300 participants, tandis que la trentième session ministérielle de la Commission a vu la participation de 200 représentants des universités, des médias et de la société civile.  Le message principal de ces réunions est que la stabilité institutionnelle et la capacité de reconstruire sont nécessaires pour bâtir sur le long terme.  La région a en outre besoin de la communauté internationale pour bâtir la paix régionale, notamment en République arabe syrienne et au Yémen.

En Europe, des progrès ont été faits dans de nombreux domaines comme l’élimination de la pauvreté, la réduction des inégalités, la santé et le bien-être, a déclaré à son tour la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Europe (CEE), Mme OLGA ALGAYEROVA.  Les objectifs pour lesquels la situation n’est pas satisfaisante concernent des domaines dans lesquels la région a une responsabilité au niveau mondial, comme les modes de production et de consommation durable, ou les changements climatiques.  La région connaît en outre une situation disparate en matière de la santé, certains pays faisant mieux que d’autres.  La Secrétaire exécutive a recommandé d’anticiper les problèmes à venir et commencer à agir maintenant.  Les défis de la région peuvent être regroupés en trois segments: créer des économies plus dynamiques, résilientes et inclusives; réduire les pressions environnementales et utiliser les ressources plus durablement; et améliorer la connectivité dans la région et le développement de nouvelles formes de mobilité. 

De même que dans d’autres régions, les progrès ne sont pas suffisants pour les pays d’Asie et du Pacifique, a constaté le Secrétaire exécutif adjoint de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), M. KAVEH ZAHEDI.  Un seul objectif est sur la bonne voie d’être atteint en 2030, à savoir l’accès universel à l’éducation.  Beaucoup reste à faire en qui concerne l’inclusion et l’emploi décent, a-t-il dit en soulignant aussi les inégalités de revenus, d’accès à l’assainissement et dans la gestion des changements climatiques.  « Pour corriger le tir, nous avons mis en place une feuille de route pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable. »  Elle est axée sur la lutte contre les inégalités sous toutes ses formes, le renforcement de la résilience dans les domaines de la santé et de l’éducation, la lutte contre les inégalités, le renforcement de la résilience des sociétés.

Le Secrétaire exécutif a poursuivi la liste des problèmes de la région.  Certains pays à revenu faible ou intermédiaire ont des taux de mortalité quatre à cinq fois plus élevés que dans les pays à revenu élevé.  De plus, en 2017, la région subissait 43% de tous les événements catastrophiques enregistrés au monde. Jusqu’à 35% de la population dans les zones touchées risque de tomber en dessous du seuil de pauvreté à la suite des catastrophes, a-t-il dit.  La CESAP s’efforce donc de promouvoir les moyens permettant aux pays de progresser vers la réalisation des objectifs.  Elle a publié une feuille de route régionale pour la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en Asie et dans le Pacifique.

Pour l’Amérique latine et les Caraïbes, c’est Mme ALICIA BÁRCENA IBARRA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), qui a fait le bilan de la mise en œuvre du Programme 2030 en énonçant les principaux obstacles: le retour du protectionnisme au niveau international, la menace de la guerre commerciale, la réduction généralisée des budgets publics dans de nombreux pays, le creusement des inégalités technologiques entre les pays en développement et les pays développés, les obstacles aux transferts de fonds et la corruption.  Sur ce dernier point, elle a indiqué que 65% des populations de la région se méfient de leurs institutions.  La région, a-t-elle poursuivi, a décidé de donner la priorité aux Caraïbes en transformant les 17 objectifs de développement durable en plans nationaux de développement pour chaque pays.  Le défi suivant est de financer les objectifs, puis d’assurer le suivi de la mise en œuvre.  Mme Bárcena Ibarra a insisté sur le fait que les objectifs de développement durable sont indivisibles.  Un autre point sur lequel elle s’est montrée ferme: il faut changer de modèle de consommation, car celui-ci est la mère de tous nos maux.

À son tour, Mme TATYANA VALOVAYA, membre du Conseil d’administration de la Commission économique eurasienne, a souligné l’énorme potentiel de la région dans la mise en œuvre du Programme 2030.  L’intégration économique est un facteur essentiel pour atteindre les objectifs, a-t-elle poursuivi.  Ce n’est pas étonnant, selon elle, si l’Europe et l’Asie se trouvent au même niveau dans la réalisation des objectifs car ce sont les deux régions les plus intégrées l’une à l’autre et individuellement.  Ces deux régions devraient néanmoins améliorer l’accès universel à l’énergie fiable et durable, et progresser dans la réduction des inégalités dans les pays et entre les pays.  La Secrétaire exécutive de la CEE s’est d’ailleurs réjouie que les « conseils, les exemples, les suggestions, les expériences » de la CEE soient bien utilisés dans toute la région eurasienne. 

Le dernier exposé a attiré l’attention sur le non-respect des droits des peuples autochtones, en particulier les droits fonciers.  Mme ALMA SINUMLAG, Chargée de programme du « Cordillera Women Education and Action Research Center » (Asia-Pacific Civil Society Mechanism), a posé une série de questions pour alerter sur cette situation.  « Comment peut-on faire du développement alors que nos terres sont militarisées?  Comment faire, alors que les multinationales sont plus écoutées que les populations autochtones? »  Elle a expliqué qu’il faut participer à différents forums internationaux pour se faire entendre.  « Mais nous sommes étonnés que nos voix ne sont pas retenues dans les documents finaux de ces forums », a regretté Mme Sinumlag qui a affirmé la disposition des peuples autochtones à mettre en œuvre les objectifs de développement durable. 

Alors que de nombreuses délégations ont salué les contributions des commissions économiques régionales, le Mexique a exprimé sa préoccupation quant à la proposition de limiter leurs compétences et le fait qu’elles seraient appelées à devenir de simples groupes de réflexion dans le cadre de la réforme de l’ONU.

Le grand groupe des enfants et des jeunes a dénoncé le peu de place accordée aux jeunes et aux enfants au Forum et dans les commissions régionales.  Ce à quoi la Secrétaire exécutive de la CEE a répondu que sa commission souhaitait travailler plus étroitement avec les jeunes.  Elle a demandé à l’Union européenne de se joindre à la CEE sur cette question.  Dans le même esprit d’inclusion, le représentant des travailleurs et des syndicats a demandé que l’Organisation internationale du Travail (OIT) participe aux discussions régionales et qu’une approche inclusive soit suivie dans les forums régionaux. 

La Palestine, soutenue par l’Afrique du Sud, a regretté que la CESAO et la CESAP n’aient pas parlé de l’occupation israélienne du territoire palestinien qui est selon elle le principal obstacle à la paix, à la stabilité et à la prospérité au Moyen-Orient.  Israël a répondu que « le peuple palestinien a les autorités qu’il ne mérite pas ».  Il a conseillé de mettre en œuvre les objectifs de développement, pour ne laisser personne de côté. 

Dans la même région, l’Iraq a demandé une aide soutenue des commissions régionales pour rattraper les retards du pays causés par les guerres qu’il a subies.  Le Secrétaire général adjoint de la CESAO a répondu que sa commission dispose d’un portefeuille d’activités importantes en Iraq.  Nous continuerons de soutenir ce pays, a-t-il assuré.

En réponse à une remarque de la CEA, le Togo a dit que l’accès à l’eau dans son pays est passé de 50% à 52% entre 2015 et 2017.  La Mauritanie a rappelé qu’il faut un investissement de 34,2 milliards de dollars par an pour atteindre l’accès universel à l’électricité, en particulier dans les zones rurales avant 2030.  Quant au Viet Nam, le pays a besoin de ressources financières, techniques et humaines pour faire face aux conséquences des changements climatiques.

Face à toutes ces préoccupations, l’Union européenne a promis de promouvoir l’intégration régionale pour qu’elle bénéficie en particulier aux pays en développement.  Le délégué a ajouté que l’Union fera des investissements dans les collectes de données au niveau local. 

Car, comme l’a dit le Secrétaire exécutif adjoint de la CESAP, les questions régionales doivent être traitées au niveau régional, par exemple pour gérer les tempêtes de sable dans les régions arabes et du Moyen-Orient, ou encore pour la collecte des données régionales.  La Secrétaire exécutive de la CEA a ajouté qu’il faut encore plus d’intégration régionale et de prise de responsabilité au niveau régional pour accélérer les avancées.  En outre, il faut que les ressources locales et nationales restent sur place pour qu’elles contribuent au développement local et national.

Transformation vers des sociétés viables et résilientes - perspectives de la société: session organisée avec les grands groupes et autres parties prenantes

Libérer la parole des parties prenantes et grands groupes sur le processus de réalisation des objectifs de développement durable était l’objectif visé par cette table ronde, comme l’a indiqué la modératrice, Mme LUISA EMILIA REYES ZÚÑIGA, du grand groupe des femmes.  Les États Membres essaient en effet de montrer les aspects positifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en occultant l’aspect sombre, a-t-elle dit, en dénonçant la « conditionnalité cachée des donateurs » et les tentatives visant à brider la parole des parties prenantes.  « Les parties prenantes ne sont pas vos ennemis; elles sont de votre côté », a-t-elle lancé aux États Membres.

« On ne peut atteindre les objectifs de développement durable sans prendre en compte les catastrophes naturelles », a dit Mme HAYDEE RODRIGUEZ, de Unión de Cooperativas de Mujeres Productoras « Las Brumas », une des parties prenantes de Sendai qui s’est présentée comme une paysanne du Guatemala.  Sa coopérative vise à réduire les risques, a-t-elle dit, en remerciant « Dieu et l’ONU » de pouvoir s’exprimer ce jour.  Sa coopérative gère un fonds de résilience communautaire face aux risques de catastrophe, ses efforts étant reconnus par le Gouvernement.  La clef d’un tel modèle est la volonté politique.  Tous les talents de la société doivent être pris en compte pour réaliser les objectifs de développement durable, a-t-elle insisté.  Elle a enfin exhorté les États Membres à dialoguer avec le grand groupe des femmes en vue de réduire les risques de catastrophes naturelles, dans le respect du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030) et du Programme 2030.

Le grand groupe de la communauté scientifique et technique s’est exprimé par la voix de M. RUBEN ZONDERVAN, de « Earth System Governance Project », de l’Université de Lund (Suède).  Il a souligné l’importance de son groupe pour collecter et traiter les données nécessaires au suivi des objectifs de développement durable.  La science permet également d’expliquer les principes directeurs de ces objectifs, qui sont très ambitieux, a-t-il déclaré.  Il a donné des explications sur le projet « le monde en 2050 » qui sera présenté la semaine prochaine et qui esquisse des pistes pour la réalisation des objectifs de développement durable à l’adresse des États Membres.  Il a déploré l’inégal accès aux connaissances scientifiques dans le monde, avant d’insister sur l’importance des universités.

« Le monde n’est pas aussi simple que nous le pensons », a déclaré Mme JOLLY AMATYA, du grand groupe des enfants et des jeunes.  « Le grand défi est d’agir concrètement. »  Elle a réclamé un changement de paradigme économique, loin de l’actuel où seule la croissance est recherchée sans prise en compte des conséquences négatives sur les plans économique et environnemental.  Elle a demandé la protection des droits de la nature et une prise en compte de la pollution.  « Le caractère volontaire de la mise en œuvre des objectifs de développement durable ne doit pas servir d’excuse pour la lenteur des progrès accomplis », a-t-elle mis en garde.  Dans la même veine, Mme Amatya s’en est prise aux partenariats public-privé, qui « privatisent les profits et socialisent les pertes », avant de demander l’élaboration de normes communes sur ces partenariats.  Elle a également dénoncé le transfert massif de richesse –16,3 mille milliards de dollars depuis 1980- des pays en développement vers les pays développés via les transactions économiques entre les résidents du pays et le reste du monde, avant de souhaiter, pour remédier à cet état de fait, l’imposition d’une taxe sur les transactions financières.  « Les droits de l’homme sont réels; les identités sexuelles et de genre sont multiples; aucun être humain n’est illégal; plus de croissance économique ne veut pas forcément dire plus de bien-être; la technologie n’est pas neutre », a-t-elle martelé en conclusion sous un tonnerre d’applaudissements.

« Les États Membres ont aligné leur plan de développement national sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030, tout va donc bien dans le meilleur des mondes », a ironisé M. VITALICE MEJA, de « Reality of Aid Network Africa », de la société civile.  « Mais non, ce n’est pas le cas », a-t-il dit, en demandant que la société civile soit mieux associée à la réalisation dudit Programme, « comme il se doit ».  Il a déploré le manque de clarté sur la mobilisation des parties prenantes, avant de demander une réappropriation nationale des rapports nationaux rédigés dans le cadre du Programme avant leur présentation.  « Cela ne suffit pas de reconnaître les grands groupes à l’ONU, il faut qu’ils le soient au niveau national », a-t-il conclu en dénonçant la violence accrue contre les ONG de défense des droits de l’homme.

De son côté, M. BERRY VRBANOVIC, maire de la ville de Kitchener (Canada), représentant du grand groupe des autorités locales, a parlé d’un « tsunami positif depuis l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ».  Les autorités locales s’en sont emparées, malgré leur manque de moyens, a-t-il dit.  Pour une réelle appropriation, nous avons besoin d’un appui politique de haut niveau et d’alliances plus robustes, a-t-il déclaré.  Environ, 45% des États ont associé les autorités locales à l’élaboration de leur rapport volontaire.  « Nous ne voulons plus être une note de bas de page dans la réalisation des objectifs de développement durable. »

La défense des droits de l’homme et la promotion d’un modèle économique et social plus respectueux de ces droits et de l’environnement ont été au cœur de nombreuses interventions faites lors de la discussion interactive qui a suivi les présentations des panelistes.

La Norvège a déploré les intimidations à l’endroit des défenseurs des droits de l’homme et les attaques contre la liberté de réunion et d’expression, indiquant que 197 défenseurs de l’environnement ont été assassinés en 2017.  La déléguée du grand groupe des peuples autochtones a dénoncé les structures de pouvoir qui ne profitent qu’à une poignée.  « Nos droits sont foulés au pied », a-t-elle dit.  Même impression du côté des personnes âgées, tandis que la déléguée des personnes handicapées a indiqué que 170 millions d’entre elles n’ont pas d’accès à l’eau et l’assainissement dans le monde.  « Nous sommes attaquées pour la simple raison que nous sommes des groupes de femmes », a dit pour sa part la déléguée du grand groupe des femmes.  De son côté, l’Union européenne a demandé que plus d’espace soit laissé à la société civile.  

« Les personnes doivent être placées au centre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, pas les profits », a réclamé le grand groupe des travailleurs et des syndicats.  Enfin, certains orateurs ont déploré une nouvelle fois les lenteurs dans la réalisation des objectifs de développement durable.  « Nous voulons les réaliser mais nous sommes en panne », a déclaré la déléguée du grand groupe des organisations non gouvernementales.  « L’élan est retombé », a-t-elle dit.  La France a fait le constat que « peu de parties prenantes se sont appropriées les objectifs de développement durable ».  Ces objectifs ne sont pourtant pas une nouvelle obligation mais une nouvelle grille de lecture, a ajouté la délégation.

Table ronde interactive sur l’objectif 12 de développement durable: Consommation et production responsables

Au début de la table ronde, la Vice-Présidente de l’ECOSOC, Mme INGA RHONDA KING, de Saint-Vincent-et-les Grenadines, a précisé que ce segment vise à identifier les défis relatifs à la consommation et la production responsables aux niveaux mondial, régional et national, tout en mettant l’accent sur les enseignements tirés de l’expérience et meilleures pratiques.

M. SHASWAT SAPKOTA, de la Division de statistique du Département des affaires économiques et sociales (DAES), a présenté un aperçu de la mise en œuvre de l’Objectif 12 de développement durable (ODD).  Il a relevé que l’exploitation des matières premières dans les pays en développement soutient les modes de consommation dans les pays riches.  On constate donc que l’empreinte « matérielle » des pays développés est pratiquement le double de celui des pays en développement.  M. Sapkota s’est félicité du fait que 93% des 250 plus grandes compagnies du monde font désormais des rapports sur la durabilité, ainsi que les trois quarts des 100 plus grandes entreprises de 49 pays.  De même, en 2018, 108 pays avaient développé des politiques nationales de production et consommation durables, y compris de nombreux pays d’Afrique subsaharienne et d’Amérique latine.

L’empreinte « matérielle » dont a parlé M. Sapkota, désigne, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la quantité de matières premières extraites dans le monde pour satisfaire la demande de consommation finale dans un pays donné.  Elle met en évidence la quantité de matières premières requises à tous les niveaux de la chaîne d’approvisionnement, nationale et internationale.  Au niveau mondial, l’empreinte matérielle a augmenté de 48,5 milliards de tonnes en 2000 à 69,3 milliards de tonnes en 2010.  Deux régions ont contribué à la plus grande partie de cette empreinte: l’Asie de l’Est et l’Asie du Sud-Est, avec 28,6 milliards de tonnes et l’Europe et l’Amérique du Nord, avec 21,9 milliards de tonnes.

L’empreinte « matérielle » par habitant a augmenté de 8 tonnes à 10,1 tonnes entre 2000 et 2010.  Elle est en hausse dans quasiment toutes les régions, ce qui signifie que, au niveau mondial, il faut maintenant davantage de matières premières pour satisfaire les besoins de consommation par personne.  En 2010, la région Australie et Nouvelle-Zélande avait l’empreinte « matérielle » par habitant la plus élevée, avec 34,7 tonnes par habitant, alors que l’Afrique subsaharienne avait la plus faible, avec 2,5 tonnes par habitant.  L’empreinte « matérielle » par habitant des régions développées dépasse de loin celle des régions en développement.  En d’autres termes, une grande partie des matières premières extraites dans le monde sert donc bien les besoins et les habitudes de consommation finale des populations des régions développées.  

« Ce que nous faisons ici c’est assurer l’avenir de nos enfants et leur léguer une planète en bon état », a recadré M. PETER THOMPSON, Envoyé spécial du Secrétaire général pour l’océan.  Quelque 2,1 milliards de personnes n’ont toujours pas accès à l’eau potable alors que 24% de la nourriture est gaspillée dans le monde pendant que certaines parties de la planète meurent de faim.  L’océan s’acidifie et les mers se réchauffent.  L’Envoyé spécial a exigé un « investissement plus concret et plus volontariste à tous les niveaux », conscient que les contributions nationales en vertu de l’Accord de Paris sur les changements climatiques ne suffiront pas à contenir l’augmentation de la température en-deçà de 2oC.  C’est un nouveau partenariat qui est nécessaire, un partenariat entre secteur privé, secteur public et consommateurs.  L’Envoyé spécial a dit placer beaucoup d’espoir dans l’économie circulaire qui s’articule autour du recyclage. 

Il a été appuyé par la France et la Finlande qui ont dit miser sur la transformation des déchets en ressources.  La France a dit avoir adopté une feuille de route avec des cibles claires, des dates butoirs et l’objectif de créer 300 000 nouveaux emplois.  De nombreux autres pays comme la Norvège, l’Estonie, l’Irlande, l’Italie, la Belgique ou encore la Pologne ont parlé de leurs plans nationaux sur l’économie circulaire.  L’Envoyé spécial a aussi attiré l’attention sur le dynamisme et l’énergie des jeunes pour relever le défi de la durabilité, un point de vue partagé par la Norvège et le grand groupe des enfants et des jeunes.

Il faut impérativement réajuster le tir même si la transition vers des modes de consommation et de production responsables reste un véritable défi, a pressé M. ELLIOT HARRIS, Sous-Secrétaire général chargé du développement économique au DAES.  « Nous vivons au-dessus de nos moyens sur cette planète. »  L’Indonésie l’a peut-être compris: Mme NUR H. RAHAYU, Directrice de la foresterie et de la conservation de l’eau au Ministère indonésien de la planification du développement a parlé du nouvel étiquetage des produits de consommation qui montre leur origine industrielle.  Les normes de production « plus propres » ont également été renforcées alors qu’un travail de sensibilisation des consommateurs est en cours, dans un langage « simple et facilement compréhensible ».  Le plastique et les couches jetables sont devenus les ennemis publics numéro 1. 

L’Union européenne a d’ailleurs appelé à des mesures strictes de toute urgence pour limiter la consommation du plastique.  Il faut offrir des incitations au consommateur pour qu’il se dirige vers des produits durables, a renchéri Mme PETRA BAYR, Présidente du Comité pour le développement durable du Parlement autrichien.  Le consommateur doit aussi apprendre « à réparer plutôt qu’à remplacer » et exiger des services publics « propres ».  L’oratrice a dénoncé au passage les échecs de la privatisation de certains de ces services.  Le secteur privé et le secteur public doivent obéir à des règles « claires », a-t-elle martelé émettant des doutes sur l’approche « base volontaire ».  Non, a-t-elle estimé.  Il faut des lois et des normes « strictes », sans quoi les systèmes économiques resteront les mêmes et le secteur privé continuera à placer les profits avant les droits de l’homme et l’environnement. 

En tant que parlementaire, Mme Bayr a aussi insisté sur des systèmes fiscaux « robustes » car sans impôts, les gouvernements n’auront pas les ressources nécessaires pour financer les programmes de développement durable.  Le manque de ressources, c’est l’obstacle principal qu’a cité, avec l’absence d’expertise, Mme JANE NYAKANG’O, Présidente de la table ronde africaine sur les modes de consommation et de production durables.  L’Afrique s’organise.  Elle a des points focaux nationaux qui assurent le suivi du « Cadre décennal de programmation concernant les modes de consommation et de production durable » (10YPF).  Plusieurs pays africains se sont dotés de stratégies sur l’économie verte, comme le Kenya, mais, à bien des égards, le continent en est toujours au stade des projets pilote.  Il n’a ni argent ni savoir-faire, a souligné Mme Nyakang’o qui a également insisté sur la disponibilité d’indicateurs clairs pour faciliter l’intégration des modes de consommation et de production durables dans les programmes économiques.  Peut-être suffirait-il, a suggéré le Mali, de revenir à l’agriculture traditionnelle « durable par nature » et arme efficace contre l’appauvrissement des sols, réceptacles des déchets toxiques déversés par les multinationales, a ajouté l’Ouganda.

Les progrès, c’est ce que M. ULF JAECKEL a voulu mettre en avant.  Le Chef de Division au Ministère allemand de l’environnement et membre du Conseil du « Cadre décennal de programmation concernant les modes de consommation et de production durable » (10YPF) a rappelé que le Cadre est un mécanisme mondial de mise en œuvre du douzième objectif de développement durable, appuyé par plus de 130 points focaux nationaux qui supervisent des programmes englobant la sensibilisation des consommateurs.  Le premier bilan du Cadre a débouché sur l’initiative « Un plan pour une planète » qui facilite la coopération entre les différents partenaires, y compris les gouvernements.  En Allemagne, par exemple, un programme a été lancé en 2016 pour baisser le prix des produits verts.  Faire baisser la consommation de viande, construire des maisons plus petites, renoncer aux voyages en avion, voilà quelques idées qu’a suggérées, Mme AMY LUERS, Directrice exécutive de « Future Earth ».  Il faut, s’est-elle expliquée, insister sur les systèmes institutionnels et culturels, car la promotion d’un mode de vie plus durable est une tâche multisectorielle qu’il faut aborder au niveau systémique, avec l’aide de la société civile et du milieu scientifique.  Il faut tout simplement « pénaliser les pollueurs », a tranché M. JULIUS H. CAINGLET, du grand groupe des syndicats et des travailleurs.  Les programmes sociaux doivent être complétés par des incitations fiscales à la création d’emplois verts, a estimé l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Tout le monde doit s’y mettre, entreprises, ONU et société civile, a conclu le Réseau « One Planet ».             

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil réfléchit aux moyens de gérer les risques de sécurité liés au climat

8307e séance – matin
CS/13417

Le Conseil réfléchit aux moyens de gérer les risques de sécurité liés au climat

Comprendre et gérer les risques de sécurité liés au climat, c’est ce que le Conseil de sécurité s’est efforcé de faire aujourd’hui, avec l’aide de la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, du Ministre iraquien des ressources hydriques, de la représentante du Forum international des populations autochtones sur les changements climatiques et du Président de Nauru.

L’impact des changements climatiques va bien au-delà de l’aspect strictement environnemental, a estimé d’emblée Mme Amina J. Mohammed, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, qui est revenue sur la visite qu’elle vient d’effectuer dans la région du lac Tchad.  « Qu’est-ce qui a finalement été à l’origine du conflit?  La disparition du lac est un des facteurs clefs », a-t-elle dit, en reprenant les propos du Secrétaire exécutif de la Commission du bassin du lac Tchad.  Les changements climatiques sont un « multiplicateur de risques », a averti la Vice-Secrétaire générale. 

La course aux ressources limitées, la destruction des infrastructures essentielles, l’interruption des services publics et le déplacement massif des populations sont un test pour la résilience des institutions et des structures de gouvernance, a acquiescé le Président de Nauru, au nom des 12 petits États insulaires en développement du Pacifique.  En Iraq, l’absence d’accords bilatéraux et multilatéraux applicables à l’utilisation raisonnable et équitable de l’eau pointe déjà vers des conflits potentiels, a alerté le Ministre des ressources hydriques de l’Iraq, M. Hassan Janabi.

Lorsque la survie d’une communauté dépend de son accès à l’eau, les risques d’un conflit lié à cette ressource sont bien réels, a renchéri Mme Hindou Ibrahim, représentante du Forum international des peuples autochtones.  Les jeunes, appauvris et marginalisés, n’ont plus que deux choix soit rejoindre les rangs d’un groupe terroriste ou essayer de traverser la Méditerranée vers l’Europe. 

Il est temps que le Conseil de sécurité rattrape la réalité, s’est impatientée la Ministre suédoise des affaires étrangères et Présidente du Conseil pour le mois de juillet.  Après sept ans de débats, il est temps, a insisté Mme Margot Wallström, que le Conseil approfondisse sa compréhension de la manière dont les changements climatiques interagissent avec les moteurs des conflits. 

La Ministre a appelé le Conseil à améliorer ses outils, ses analyses et sa collecte d’informations pour mieux s’attaquer aux défis sécuritaires liés aux changements climatiques.  Ce faisant, il faut tenir compte des pays qui sont en première ligne et apprendre de leur expérience et des meilleures pratiques.  Il est désormais impératif que les Nations Unies comblent leur retard et prennent le leadership en facilitant et coordonnant les efforts mondiaux, avec l’aide des partenaires et parties prenantes régionaux. 

Le Sommet sur les changements climatiques de septembre 2019, convoqué par le Secrétaire général, sera un moment crucial pour faire des progrès, a-t-elle espéré.  En prévision, la Ministre a prôné la création d’une « maison institutionnelle » au sein des Nations Unies, de préférence sous la direction d’un représentant spécial.  Surveiller les points de bascule potentiels du nexus climat-sécurité; faciliter la coopération régionale et transfrontalière sur les questions relatives au climat; lancer la diplomatie préventive; et soutenir des situations post conflit quand les changements climatiques sont un facteur de risque, sont autant de fonctions qu’un représentant spécial pourrait commencer à assumer, en coordination avec les autres entités pertinentes des Nations Unies, a précisé le Président de Nauru, insistant ainsi sur une proposition que les petits États insulaires en développement du Pacifique font depuis 2011.  Nous devons embrasser tout l’éventail des autres acteurs, dont les autorités locales, le secteur privé et les ONG qui peuvent apporter leadership, innovation et argent, a ajouté la Vice-Secrétaire générale de l’ONU. 

Mais le Conseil de sécurité est-il le cadre idéal pour parler de ces questions?  Face à l’importance et à l’urgence des enjeux, la France a appelé les États Membres à dépasser « les arguties institutionnelles ».  L’Assemblée générale et le Conseil de sécurité doivent s’exprimer sur cet enjeu de paix et de sécurité « qui nous concerne tous », a-t-elle tranché.  Qu’elles viennent d’une agression militaire ou d’un risque climatique, quand des menaces claires pèsent sur la sécurité et la survie des pays, le Conseil de sécurité doit réagir, a acquiescé l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), en prenant le contre-pied de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) qui a argué de l’incapacité du Conseil à agir face aux défis des changements climatiques, étant donné que la réaction ne peut être ni militaire ni basée sur des sanctions.  Le Conseil examine-t-il la pollution de l’air ou des eaux que les opérations militaires et ses sanctions unilatérales entraînent? a ironisé la Fédération de Russie qui a vu dans les discussions d’aujourd’hui un moyen de servir des « intérêts politiques ».  Le Président de Nuaru s’est voulu clair: La nomination d’un représentant spécial sur le climat et la sécurité ne doit en aucun cas élargir le mandat du Conseil de sécurité.  Comme son titre l’implique, ce représentant spécial répondra au Secrétaire général.  Ceci dit, a ajouté le Président, pour pouvoir prendre des décisions et exécuter son mandat de prévention des conflits et de maintien de la paix, le Conseil doit avoir de meilleures informations, analyses et mécanismes d’alerte rapide sur les risques de sécurité liés au climat. 

 Si vous voulez vraiment nous aider, a conclu la représentante du Forum international des peuples autochtones sur les changements climatiques, en parlant du Sahel, investissez plutôt dans le développement, aidez les petites organisations qui soutiennent les femmes et les enfants, cherchez avec nous des stratégies de développement adaptées, facilitez l’accès au financement en milieu rural et surtout ne perdez pas de vue que les changements climatiques sont avant tout une question de sécurité pour des millions de personnes.

MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Comprendre et gérer les risques de sécurité liés au climat

Déclarations

Cette année, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) a confirmé que 2015, 2016 et 2017 ont été les années les plus chaudes que la planète ait jamais connues, a prévenu la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, M. AMINA J. MOHAMMED.  La concentration de dioxyde de carbone continue d’augmenter, ce qui veut dire des risques aggravés de vagues de chaleur, d’inondations, de sécheresses et de feux de forêts, avec des conséquences « disproportionnées » pour les groupes socialement vulnérables et marginalisés. 

L’impact des changements climatiques, a-t-elle prévenu, va bien au-delà de l’aspect strictement environnemental.  Il n’est pas étonnant en effet que les pays les plus touchés soient aussi ceux qui sont les plus vulnérables aux conflits et à la fragilité.  Cet impact sur la sécurité peut prendre différentes forces: pertes de moyens de subsistance, insécurité alimentaire et menaces sur les ressources naturelles, comme en témoigne le bassin du lac Tchad que la Vice-Secrétaire générale vient elle-même de visiter dans une mission conjointe avec l’Union africaine et la Ministre suédoise des affaires étrangères. 

Le bassin, a-t-elle expliqué, vit une crise due à une conjugaison de facteurs politiques, socioéconomiques, humanitaires et environnementaux.  Le lac Tchad a perdu plus de 90% de sa superficie depuis les années 1960, conduisant à une dégradation écologique, à la marginalisation socioéconomique et l’insécurité qui touchent 45 millions de personnes.  L’on y voit une baisse de la résilience face aux crises humanitaires, le déclin des activités économiques, des pertes dans la production agricole et le manque d’opportunités d’emplois.  Les jeunes, marginalisés, sont plus exposés au risque de la violence extrémiste et deviennent un terreau fertile pour des groupes comme Boko Haram. 

La nature multidimensionnelle de la crise au nord-est du Nigéria, au Cameroun, au Tchad et au Niger, a poursuivi la Vice-Secrétaire générale, souligne la relation « complexe » entre changements climatiques et conflit.  Nous devons, a-t-elle dit, appréhender les changements climatiques comme un des facteurs conduisant au conflit.  Ce phénomène, a-t-elle prévenu, est un « multiplicateur de risques » et comme l’a dit le Secrétaire exécutif de la Commission du bassin du lac Tchad: « Qu’est-ce qui a finalement été à l’origine du conflit? La disparition du lac Tchad est un des facteurs clefs ».  L’action contre les changements climatiques est donc une partie intégrante de la culture de la prévention et du maintien de la paix, a souligné la Vice-Secrétaire générale. 

Les Nations Unies, a-t-elle affirmé, sont déterminées à mobiliser toutes leurs capacités pour comprendre et répondre aux risques sécuritaires liés au climat.  L’ONU améliore ses stratégies d’évaluation et de gestion des risques et s’efforce de déployer des efforts mieux coordonnés entre toutes ses entités du système, comme l’explique le prochain rapport du Secrétaire général sur le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel et comme en témoigne la révision de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.  Les Nations Unies aident aussi les États membres de la Commission du bassin du lac Tchad à mettre en œuvre leurs stratégie et programme de stabilisation, y compris le plan de développement pour la reconstitution du lac. 

L’année prochaine, a indiqué la Vice-Secrétaire générale, le Secrétaire général entend convoquer en septembre un sommet sur le climat pour fortifier les ambitions autour de l’Accord de Paris.  Quelle est notre tâche? a demandé Mme Mohammed.  Contrôler les émissions de gaz à effet de serre pour maintenir l’augmentation de la température en deçà de 2 degrés Celsius et poursuivre les efforts pour la limiter à 1,5 degré.  Il faut aussi suivre attentivement les risques liés au climat et appuyer les programmes qui placent les femmes au cœur des efforts car on sait que les changements climatiques les affectent de manière disproportionnée.  Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) s’y emploie déjà avec la distribution de filets de pêche plus solides pour augmenter les prises. 

Nous devons aussi, a ajouté la Vice-Secrétaire générale, renforcer les capacités institutionnelles et les partenariats.  Les organisations régionales ont un rôle à jouer, et l’Union africaine et l’Union européenne sont parmi celles qui développent des cadres contre le nexus climat-sécurité au Sahel.  Nous devons également embrasser tout l’éventail d’autres acteurs, dont les autorités locales, le secteur privé et les ONG qui peuvent apporter leadership, innovation et argent. 

M. HASSAN JANABI, Ministre des ressources hydriques de l’Iraq, a rappelé que le déclin des précipitations à travers le monde, et la mauvaise gestion des ressources en eau, exacerbent le problème de la rareté de l’eau, causant des déplacements massifs de population et des migrations forcées.  Il s’est dit tout particulièrement préoccupé par les menaces qui pèsent sur les bassins des fleuves en Iraq et au Moyen-Orient, découlant directement des changements climatiques et de la rivalité autour des ressources hydriques.  L’absence d’accords bilatéraux et multilatéraux applicables ou de cadres régionaux pour l’utilisation raisonnable et équitable de l’eau, de même que l’insuffisance du respect du droit international en vue de protéger les droits de tous les pays riverains, contribuent à des conflits potentiels, a analysé le Ministre. 

Les effets conjugués des changements climatiques et des modes opérationnels des grands barrages ont conduit à la baisse de 50% du niveau de l’Euphrate au cours de ces 20 dernières années, modifié le cycle des saisons et favorisé la désertification, a-t-il rappelé.  L’Égypte et l’Iraq ont été contraints de prendre cette année des mesures draconiennes pour répondre à la diminution de leurs ressources hydriques, en réduisant les terres cultivables et en interdisant la culture du riz et du maïs, récoltés en été, a expliqué M. Janabi.  Il s’agit d’une mesure sans précédent dans l’histoire de notre pays, qui remet en cause des traditions économiques, sociales et culturelles profondément ancrées parmi les segments les plus fragiles de la population.

Il est donc juste que la communauté internationale intervienne pour renforcer la résilience des communautés, en soutenant des programmes d’adaptation aux changements climatiques, qui sont non seulement nécessaires, mais aussi moins coûteux que l’accueil des migrants, sans compter les tentatives vouées à l’échec de faire revenir ces migrants dans leur région d’origine, a estimé le Ministre.  En prenant des mesures proactives et préventives, la communauté internationale peut éviter des tragédies humaines, la plupart de ces mesures étant d’ailleurs une obligation juridique pour les États parties à la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification et à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, a-t-il relevé.  Il a aussi fait référence à la grave détérioration de l’environnement dans le delta iraquien à l’embouchure du Golfe, la fameuse voie d’eau connue sous le nom de « Shatt al-arab », un écosystème millénaire qui a été affecté par la montée des eaux salées.  Le même danger menace le delta du Nil, avec pour corollaire la chute de millions de personnes dans la pauvreté, a souligné le Ministre, en lançant en conclusion un plaidoyer en faveur de la « diplomatie de l’eau ».

Mme HINDOU IBRAHIM, Forum international des peuples autochtones sur les changements climatiques, a appelé les membres du Conseil de sécurité à s’attaquer sans plus tarder aux changements climatiques, en les considérant comme un véritable « risque sécuritaire ».  Je suis, a-t-elle dit, la porte-parole des millions de personnes « humiliées » et condamnées à la pauvreté à cause de l’impact du dérèglement climatique facteur potentiel de conflit.  Rappelant qu’au Sahel, 90% de l’économie repose sur l’agriculture et le pastoralisme, elle a insisté sur les conséquences dévastatrices de la sécheresse et des vagues de chaleur.  Lorsque la survie d’une communauté dépend de son accès à l’eau, les risques d’un conflit lié à cette ressource est bien réel, a-t-elle prévenu, à son tour.  « Il n’y a pas assez d’eau pour toute le monde, le fermier et l’éleveur, les villes, les campagnes ».  Voilà pourquoi l’impact des changements climatiques peut pousser les gens à se battre pour leur survie.

Au niveau régional, l’oratrice a pointé du doigt une réalité où l’on voit les changements climatiques alimenter le terrorisme qui peut ainsi tirer parti de la pauvreté pour recruter les jeunes et les plus vulnérables.  Au niveau international, les changements climatiques provoquent l’insécurité: si son emploi sur place ne lui permet pas de gagner assez pour subvenir aux besoins de sa famille, l’homme partira pour chercher ailleurs.  Ses deux seuls choix possibles sont soit de rejoindre les rangs d’un groupe terroriste ou d’essayer de traverser la Méditerranée vers l’Europe.  Soyons honnêtes, s’est impatientée l’oratrice, ces gens-là migrent déjà à cause des changements climatiques.  Elle a donc demandé à la communauté internationale d’offrir aux jeunes du Tchad, du Mali, du Burkina Faso et du Niger « un autre avenir que l’émigration ».

Si vous voulez nous aider à rétablir la paix au Sahel, investissez dans le développement, aidez les petites organisations qui soutiennent les femmes et les enfants, cherchez avec nous des stratégies de développement adaptées, facilitez l’accès au financement en milieu rural et surtout ne perdez pas de vue que les changements climatiques sont avant tout une question de sécurité pour des millions de personnes.

La Ministre des affaires étrangères de la Suède, Mme MARGOT WALLSTRÖM, a rappelé avoir rencontré, la semaine dernière, des hommes et des femmes qui font face, au quotidien, aux conséquences que les changements climatiques ont sur la paix et la sécurité.  Ces gens sont des migrants et des déplacés par la sécheresse et les inondations.  Ce sont des chefs de famille qui ne peuvent plus nourrir les leurs parce que leurs moyens de subsistance traditionnels, que ce soit la pêche ou l’agriculture, se sont évaporés, ouvrant la voie aux tensions.  La Ministre a aussi parlé de ces femmes leaders qui travaillent dans leur communauté pour empêcher que les jeunes ne soient victimes de la radicalisation des groupes qui ciblent les plus vulnérables.

Il est temps, s’est impatientée la Ministre, que le Conseil de sécurité rattrape la réalité.  Après sept ans de débats, il est temps qu’il approfondisse sa compréhension de la manière dont les changements climatiques interagissent avec les moteurs des conflits.  La Ministre a identifié cinq domaines et d’abord mieux comprendre les risques sur la sécurité liés au climat.  Le Conseil doit aussi améliorer ses outils, ses analyses et sa collecte d’informations pour mieux s’attaquer aux défis sécuritaires liés aux changements climatiques et par exemple, en investissant dans des mesures d’alerte rapide.

Troisièmement, il faut créer une « maison institutionnelle » au sein des Nations Unies, de préférence sous la direction d’un représentant spécial qui aurait la responsabilité de rassembler toutes les informations des différentes entités mais aussi des acteurs extérieurs.  La Suède va, par exemple, lancer un réseau du savoir sur la sécurité climatique dédié aux changements climatiques et la sécurité à Stockholm, au cours de cet été.  Ce réseau, qui entend améliorer la compréhension collective sur ces questions, sera ouvert à l’ONU et d’autres acteurs qui auront ainsi accès à des analyses factuelles. 

Quatrièmement, la Ministre suédoise a dit qu’en concevant notre réponse, nous devons tenir compte des pays qui sont en première ligne et apprendre de leur expérience et des meilleures pratiques.  Elle a ainsi cité les cas du Népal ou du Soudan qui, avec le soutien de l’ONU, ont pris des mesures, dont des projets pilotes qui répertorient les risques de sécurité liés au climat, afin d’établir des mesures d’interventions et de planification visant à renforcer la résilience.  Elle a aussi cité le Forum des gouverneurs du bassin du lac Tchad établi l’an dernier, ou encore l’initiative de la Grande muraille verte pour le Sahara et le Sahel que la Commission de l’Union africaine pilote.  Mme Wallström a également rappelé que des organisations régionales telles que l’Union africaine (UA), l’Union européenne (UE), tout comme les petits États insulaires en développement du Pacifique, l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) et la Communauté des Caraïbes (CARICOM) apportent déjà une dynamique à la réponse internationale sur les risques de sécurité liés au climat.  Il est désormais impératif que les Nations Unies comblent leur retard et prennent le leadership en facilitant et coordonnant les efforts mondiaux, avec l’aide des partenaires et parties prenantes régionaux.  Le Sommet sur les changements climatiques de septembre 2019, convoqué par le Secrétaire général, sera un moment crucial pour faire des progrès, a-t-elle espéré.

M. EUGENE RHUGGENAATH, Premier Ministre de Curaçao (Pays-Bas) a expliqué qu’en tant que petit État insulaire en développement, Curaçao peut témoigner du lien indéniable entre changements climatiques et sécurité.  Le dérèglement climatique menace la stabilité sociale et peut mener à des mouvements de population et donc à des tensions régionales.  Lorsque les changements climatiques menacent la stabilité internationale, le Conseil de sécurité a la responsabilité d’agir, a-t-il souligné.

Nous doutions-nous, il y a 15 ans, qu’en 2018, des millions de personnes autour du lac Tchad auraient besoin d’une aide d’urgence pour survivre? a demandé le Premier Ministre qui a également parlé de la Somalie et des petits États insulaires en développement.  Nous ne pouvons pas changer le cours de l’histoire, mais nous pouvons changer la manière dont nous en tirons les leçons.  Le Premier Ministre a appelé à des réponses rapides aux signes avant-coureurs des risques climatiques.  Il faut s’attaquer aux causes profondes des changements climatiques et prévenir l’instabilité et les conflits.

Se félicitant de ce que le Conseil de sécurité ait reconnu les risques de sécurité liés au climat, notamment dans sa résolution 2349 (2017) sur le bassin du lac Tchad, le Premier Ministre s’est aussi réjoui que le Conseil commence à prouver « sa réactivité ».  Le Conseil doit assurer des actions appropriées au niveau des Nations Unies, à New York et sur le terrain, dans les pays affectés.  Cela suppose que les Nations Unies aient les capacités adéquates, à commencer les capacités d’analyse pour évaluer les risques et lancer rapidement des alertes.  Il faut également de meilleures capacités de gestion des risques, ce qui passe par une programmation efficace des efforts de prévention, de stabilisation et de développement tenant compte du lien entre climat et conflit.  L’ONU doit avoir une « maison institutionnelle » sur ces questions, a estimé, à son tour, le représentant.  La « maison » serait en charge de la coopération et de la coordination de toutes les entités du système des Nations Unies.  Pour leur part, les Pays-Bas accueillent la Conférence annuelle sur la sécurité de la planète et invitent toutes les parties intéressées à faire le meilleur usage possible de cette plateforme pour explorer les solutions aux défis climatiques que rencontrent le Mali, l’Iraq, la région du lac Tchad et les petits États insulaires en développement des Caraïbes.

M. YERZHAN ASHIBAYEV, Vice-Ministre des affaires étrangères du Kazakhstan, a estimé que les menaces sécuritaires relatives aux changements climatiques doivent être envisagées dans le cadre d’une diplomatie climatique et des efforts de prévention de l’ONU.  Une telle prévention doit prendre la forme d’une action en temps opportun pour renforcer la résilience par des mesures d’atténuation et d’adaptation, dans le cadre de la coopération internationale.  Rappelant que la problématique des changements climatiques est une priorité de son pays, le Vice-Ministre a affirmé que le Kazakhstan, déterminé à honorer l’Accord de Paris, a pris des mesures pour réduire sa propre dépendance aux énergies fossiles d’ici à 2030, et la remplacer par des énergies renouvelables d’ici à 2050.  En outre, de juin à septembre 2017, Astana a accueilli EXPO 2017 sur le thème des « Énergies futures », qui a permis de partager les pratiques optimales dans le domaine des énergies renouvelables et aider les pays en développement, a ajouté M. Ashibayev.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a promis que son pays va travailler avec les autres pour que l’ONU trouve des solutions aux problèmes sécuritaires liés aux changements climatiques car le lien climat-sécurité n’a rien d’abstrait.  Les migrations, causées par les effets négatifs des changements climatiques, ont des répercussions sur tous les pays.  Selon la Banque mondiale, a fait observer la représentante, les changements climatiques risquent d’annihiler les progrès économiques du siècle dernier, posant les risques de conflits et d’insécurité.  Le Royaume-Uni a donc déboursé pas moins de 7,7 milliards de dollars pour financer des mesures d’adaptation et d’atténuation dans le monde.  Le pays entend collaborer avec l’Inde, la Chine et les États-Unis sur la question des risques de sécurité liés au climat. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a jugé très important de comprendre que les changements socioéconomiques profonds provoqués par les changements climatiques sont à l’origine de crises humanitaires et des conflits.  Ils relèvent donc bien du mandat du Conseil de sécurité.  Ce dernier doit renforcer sa coordination avec le système des Nations Unies, et notamment avec les organes et les agences qui travaillent sur les changements climatiques.  Le Pérou est particulièrement vulnérable aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles, a rappelé le représentant.  La fonte des glaciers tropicaux andins et les inondations provoquent insécurité alimentaire et émigrations, avec les défis que l’on sait sur la paix et la sécurité nationales.  Le représentant a plaidé pour une action multilatérale.

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a estimé qu’il est tout à fait naturel que le Conseil de sécurité examine des questions relatives aux catastrophes naturelles et autres phénomènes qui ont des répercussions sur les populations.  « Nous sommes tous du même côté et faisons le choix de la résilience », a souligné le représentant, en ajoutant que son pays, qui est l’un des centres des innovations, apporte son assistance partout dans le monde.  Il a décrit des projets visant à rétablir l’accès à l’eau et à l’électricité dans des communautés iraquiennes libérées de Daech.  Les États-Unis, a-t-il précisé, ont déboursé pas moins de 265 millions de dollars depuis 2014 pour le programme de reconstruction de l’Iraq mis en œuvre par le PNUD.  Le représentant a aussi parlé des projets menés avec d’autres gouvernements comme ceux des Pays-Bas et de la Suède.  Les États-Unis, a-t-il conclu, sont préoccupés par la situation du bassin du lac Tchad et par les défis particuliers que doivent relever les petits États insulaires en développement (PEID).

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a souligné que, même si les évènements climatiques extrêmes sont souvent les plus visibles, d’autres phénomènes aux effets moins immédiats, tels que la sècheresse, la salinisation des sols ou la montée des eaux, contribuent à la dégradation des terres, à l’érosion côtière ou à la baisse des ressources en eau.  Ces impacts négatifs sur les ressources naturelles, dans le contexte de populations et d’économies vulnérables, peuvent générer ou réactiver des conflits entre communautés, provoquer des déplacements de population et menacer, à terme, la paix et la sécurité internationales.  C’est une réalité vécue durement dans de nombreuses régions du monde, du Sahel au Moyen-Orient, a constaté M. Delattre avant de tirer la sonnette d’alarme en affirmant que l’impact du dérèglement climatique menace aussi de nombreuses autres régions, aujourd’hui stables.

Face à l’importance et à l’urgence des enjeux, la France appelle les États Membres à dépasser « les arguties institutionnelles ».  L’Assemblée générale et le Conseil de sécurité doivent s’exprimer sur cet enjeu de paix et de sécurité qui nous concerne tous.  Le représentant a saisi cette occasion pour « rassurer tout le monde »: indépendamment du fait que cette question soit discutée à l’ONU, la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et l’Accord de Paris ne seront pas remis en cause et restent le cadre multilatéral de référence.  M. Delattre a rappelé à tous ceux qui sont concernés que la priorité est de ratifier l’Accord de Paris et « qu’il nous reste collectivement à adopter les règles d’application de cet Accord en décembre prochain sous la présidence polonaise de la COP24 ».  Pour lui, il s’agit là d’une condition essentielle pour maintenir la dynamique positive qui s’est ouverte à Paris en 2015 et pour tenir l’engagement collectif de contenir l’élévation de la température moyenne en dessous de 2 degrés Celsius et si possible de 1,5 degrés Celsius.

M. Delattre a également expliqué que le fait de parler de l’impact des changements climatiques sur la paix et la sécurité internationales s’inscrit en fait dans une démarche préventive des conflits.  Il a appelé à mettre en place une véritable diplomatie préventive dans ce domaine et a soutenu « avec force » la vision et l’ambition du Secrétaire général sur la prévention des conflits et le continuum de paix qui doit pleinement intégrer des facteurs de déstabilisation, y compris ceux liés aux changements climatiques et à l’effondrement de la biodiversité.

S’agissant des moyens à mettre en œuvre pour que les Nations Unies disposent de solides capacités d’analyse des risques climatiques, pour chaque région du monde, il a dit qu’il faut passer « à l’étape suivante » et formuler des recommandations aux gouvernements nationaux, aux agences des Nations Unies et aux organisations régionales, pour prévenir les effets des changements climatiques sur la sécurité et protéger et restaurer la biodiversité.  La France part du principe que l’ensemble du système des Nations Unies doit être mobilisé sur ces enjeux.  Elle se tient prête, aux côtés de l’ONU, à construire une diplomatie multilatérale du XXIe siècle qui intègre pleinement les impacts des changements climatiques dans une démarche de prévention des conflits.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a rappelé que son pays est une « figure de proue » de la lutte contre les changements climatiques, grâce à l’utilisation de « technologies de pointe ».  Mais force est de constater que la réunion d’aujourd’hui nous préoccupe, a-t-il avoué, dans la mesure où elle constitue une tentative supplémentaire de créer des liens « abstraits » entre la problématique environnementale et la paix et la sécurité internationales.  On tente d’imputer aux changements climatiques la détérioration de situations porteuses d’un conflit, a-t-il résumé.  Or, le Conseil de sécurité n’a ni l’expertise ni les moyens de relever le défi des changements climatiques, a tranché le représentant, en rappelant que chaque État a la responsabilité de définir ses propres mesures, dans le respect des instruments juridiquement contraignants en vigueur.

Pour justifier l’introduction de cette question à l’ordre du jour du Conseil, s’est étonné le représentant, on présente les changements climatiques comme un « multiplicateur » de conflits.  Pourquoi alors passer sous silence les conséquences des opérations militaires menées dans plusieurs théâtres de conflit, par exemple les bombardements de l’OTAN sur le territoire de l’ex-Yougoslavie, qui ont pollué l’air, ont eu une incidence sur le taux de prévalence des cancers et la santé reproductive.  En outre, « la présence illégale, qui perdure, des forces de la coalition occidentale sur le territoire de la Syrie » ne fait que ralentir les efforts du Gouvernement syrien pour venir en aide à sa population.  Qu’il s’agisse des opérations militaires ou des sanctions unilatérales, la pollution de l’air ou des eaux qu’elles entraînent devraient tout aussi bien être examinées au Conseil de sécurité.  Les discussions d’aujourd’hui ne servent que des « intérêts politiques », a affirmé le représentant, qui s’est opposé à l’introduction de thématiques transversales. 

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a déploré le fait que les pays en développement, qui ont le moins contribué au réchauffement de la planète, soient aujourd’hui ceux qui en payent le prix fort, alors que certains pays industrialisés refusent d’assumer leur responsabilité.  La représentante s’est attardée sur le phénomène des migrants climatiques qui pourrait conduire à de nouveaux conflits.  Elle a néanmoins estimé que le Conseil de sécurité n’est pas l’organe approprié pour traiter de ces questions et pour faire face à cette situation « délicate et sensible », il est impérieux d’examiner ses causes profondes.  Notre modèle de civilisation, s’est expliquée la représentante, consacre la concentration des richesses dans les mains d’une minorité qui recours à des moyens militaires pour s’approprier les ressources naturelles des plus faibles.  La Bolivie insiste sur le principe des responsabilités communes mais différenciées et sur le transfert des technologies pour booster les mesures d’atténuation et d’adaptation.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a estimé que les changements climatiques sont l’une des principales menaces qui pèsent sur la communauté internationale.  Il a alerté du risque de voir des populations dont les moyens de subsistance sont affectés par la sécheresse s’affronter pour le monopole de ressources hydriques en voie de raréfaction.  Selon le représentant, il est donc indispensable de progresser dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris, condition sine qua non pour réduire les risques du réchauffement planétaire.  L’Assemblée générale et le Conseil économique et social (ECOSOC) devraient continuer de jouer leur rôle de « chefs de file » pour formuler des stratégies et délibérer sur les questions relatives aux changements climatiques, a relevé le représentant, avant d’attirer l’attention sur les initiatives des organisations sous-régionales.

M. MA ZHAOXU (Chine) a invité à la coopération internationale pour faire face aux défis climatiques.  Il a donc plaidé pour une assistance aux pays en développement, notamment par le transfert de technologies et le renforcement des capacités.  La communauté internationale doit également garantir l’égalité et la justice et s’assurer que les règles internationales soient respectées par tous.  C’est pourquoi la Chine invite tous les États à respecter les accords climatiques, notamment l’Accord de Paris qui doit être mis en œuvre en tenant compte des besoins des pays en développement, conformément au principe des responsabilités communes mais différenciées.  La Chine suggère que les pays s’engagent en faveur du développement durable, pour atténuer les risques de sécurité liés au climat.  La Chine est disposée à poursuivre son soutien aux autres pays du Sud, a affirmé le représentant.

M. ILAHIRI ALCIDE DJÉDJÉ (Côte d’Ivoire) a reconnu la prise de conscience et l’engagement du Conseil de sécurité, depuis 2007, à trouver des solutions durables aux impacts des changements climatiques sur la paix et la sécurité mondiales.  La situation du lac Tchad, dont dépendent environ 20 millions de personnes, est à elle seule emblématique des effets dévastateurs des pénuries environnementales sur la paix et la stabilité, a-t-il remarqué, expliquant que la baisse des ressources hydriques et halieutiques du lac représente un facteur de tensions, voire de recrudescence de l’activité Djihadiste. 

La Côte d’Ivoire, pays essentiellement agricole, n’échappe pas à la réduction à grande échelle de sa couverture forestière, liée en grande partie à la fois à l’activité humaine et à une baisse de la pluviométrie, elle-même induite par les changements climatiques, a précisé son représentant.  En effet, on est passé de 16 millions d’hectares de forêts en 1950 à moins de 3,4 millions d’hectares en 2015. 

Ce phénomène inquiétant, que connaissent également d’autres pays d’Afrique subsaharienne, constitue, avec la désertification, la raréfaction des terres arables et les pénuries d’eau imputables aux épisodes de sécheresse, des facteurs d’instabilité dans des régions où l’accès et le contrôle des ressources sont devenus des enjeux sociopolitiques générateurs de conflits, qui prennent parfois des tournures identitaires et religieuses dramatiques.  À ce titre, il a rappelé l’implantation de Boko Haram et d’autres réseaux criminels transnationaux dans le bassin du lac Tchad et a expliqué le potentiel de radicalisation d’une frange de la jeunesse par le chômage et la pauvreté.  Le représentant a également constaté la résurgence de mouvements autonomistes au Sahel, autre région frappée par les changements climatiques.

Le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’Union africaine, préoccupé par les défis sécuritaires liés aux changements climatiques, a d’ailleurs organisé le 21 mai à Addis Abeba, une séance publique consacrée au lien entre les changements climatiques et les conflits en Afrique et la réponse aux implications sécuritaires, a rappelé M. Djédjé dont la délégation souscrit aux recommandations issues de cette rencontre.  Ces dernières insistent sur la nécessité de renforcer la résilience des États africains face aux changements climatiques, ainsi que leur prise en compte dans les stratégies nationales et régionales de prévention des conflits.

Le représentant a saisi cette occasion pour appeler l’attention du Conseil sur l’existence en Afrique de nombreuses initiatives, fondées sur l’engagement des États à s’approprier leur sécurité collective, dans des cadres multilatéraux privilégiant une approche préventive, par le dialogue et le règlement pacifique des différends liés à la gestion des ressources naturelles et au climat.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a estimé que jamais Boko Haram n’aurait pu s’enraciner dans le bassin du lac Tchad sans la sècheresse et la désertification qui ont durement touché cette sous-région.  À l’évidence, la paix et la sécurité internationales sont menacées par les changements climatiques, a-t-il estimé, en faisant part de ses préoccupations quant aux affrontements provoqués par la volonté des parties concernées de s’approprier des ressources limitées.  Aussi, la question climatique devrait-elle être prise en compte dans tous les rapports du Secrétaire général au Conseil de sécurité, a préconisé le représentant, qui a dit attendre de meilleures analyses et informations

Mme MARIUSZ LEWICKI (Pologne) a appelé le Conseil à mieux évaluer les risques sécuritaires liés au climat en vue d’œuvrer à une prévention des conflits.  À cette fin, le Conseil devrait notamment avoir des informations pertinentes et précises et se doter d’un mécanisme d’alerte précoce.  On ne saurait surestimer le rôle crucial de statistiques précises sur les risques liés aux changements climatiques, a-t-elle dit, voyant là un élément essentiel de prévention des conflits.  Elle a souhaité des discussions régulières au Conseil, dont elle a souligné le rôle complémentaire par rapport à l’Assemblée générale.  C’est une position que nous cesserons de défendre, a-t-elle dit.  La représentante a rappelé que son pays va, cette année, assurer la Présidence de la vingt-quatrième Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 24).  Nous garderons à l’esprit que les questions sécuritaires liées au climat constituent des menaces « fondamentales » pour les petits États insulaires en développement (PIED) et les pays les moins avancés (PMA), a-t-elle conclu. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a déclaré que même si le Conseil de sécurité n’est pas l’instance la plus appropriée pour débattre des changements climatiques, un phénomène aux multiples ramifications, il est tout de même important que cet organe, comme les autres organes du système onusien, examine les liens entre ce phénomène et son mandat.  Pour le Koweït, il est important que les défis des changements climatiques soient abordés dans le respect du principe des responsabilités communes mais différenciées, lequel est consacré dans de nombreux accords multilatéraux comme l’Accord de Paris.  Une action internationale solidaire est la clef pour faire face à ce défi, a relevé le représentant, en invitant les pays industrialisés à respecter leur engagement de réduire les émissions de gaz à effet de serre.  Il a aussi rappelé que les efforts internationaux auxquels le Koweït participe activement doivent tenir compte des spécificités de chaque pays. 

Au nom des 12 petits États insulaires en développement du Pacifique, M. BARON D WAQA, Président de Nauru, a d’emblée prévenu: Accord de Paris ou pas, les changements climatiques ne s’arrêteront pas et, de notre vivant, nous ne reviendrons jamais à un climat « normal ».  La situation, s’est-il résigné, continuera de se détériorer pendant des décennies, que les objectifs mondiaux soient atteints ou pas.  Les manifestations extrêmes vont gagner en fréquence et en ampleur et nous devons très sérieusement faire attention à ce que le potentiel des changements climatiques abruptes ne dépasse pas le seuil critique.  Nous ne savons toujours pas, a prévenu le Président, comment nos systèmes humains seront affectés par ces facteurs « nouveaux et sans précédent ».  Certaines des plus grandes menaces ne tiendront peut-être pas à l’impact biophysique des changements climatiques mais plutôt à notre échec à y répondre.  La course aux ressources limitée, la destruction des infrastructures essentielles, l’interruption des services publics et le déplacement massif des populations seront un test pour la résilience de nos institutions et nos structures de gouvernance, a encore alerté le Président.

Les changements climatiques seront « la » question du siècle prochain et nous y sommes très peu préparés.  Le Président a donc réitéré son appel à la nomination d’un représentant spécial sur le climat et la sécurité qui comblerait un vide dans le système des Nations Unies et fournirait au Conseil les informations dont il a besoin pour s’acquitter de son mandat.  Surveiller les points de bascule potentiels du nexus climat-sécurité; faciliter la coopération régionale et transfrontalière sur les questions relatives au climat; lancer la diplomatie préventive; et soutenir des situations post conflit quand les changements climatiques sont un facteur de risque, sont autant de fonctions que le représentant spécial pourrait commencer à assumer, en coordination avec les autres entités pertinentes des Nations Unies, a précisé le Président, insistant ainsi sur une proposition que les petits États insulaires en développement du Pacifique font depuis 2011. 

La nomination du représentant spécial ne doit en aucun cas élargir le mandat du Conseil de sécurité.  Comme son titre l’implique, ce représentant spécial répondra au Secrétaire général.  Ceci dit, a ajouté le Président, pour pouvoir prendre des décisions informations et exécuter son mandat de prévention des conflits et de maintien de la paix, le Conseil doit avoir de meilleures informations, analyses et mécanismes d’alerte rapide sur les risques de sécurité lié au climat.  En sept ans, le Conseil a pris des mesures « timides » qui naturellement ne suffisent pas.  C’est la raison pour laquelle, a conclu le Président, il faut un représentant spécial sur le climat et la sécurité.

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives) s’est demandé: le Conseil de sécurité doit-il débattre des changements climatiques? Cette question, a-t-il répondu, n’a pas lieu d’être.  Demandons-nous plutôt si le Conseil de sécurité doit agir quand les activités humaines conduisent à la destruction des îles, des villes, et, bien entendu, de la vie des nations.  L’Alliance salue donc ce débat et souligne que les questions d’atténuation et d’adaptation, de transfert de technologies, entre autres, relèvent de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC).  Mais quand existent des menaces claires à la sécurité et à la survie des pays, qu’elles viennent d’un risque climatique ou d’une agression militaire, le Conseil de sécurité doit réagir.

Alors que la saison des ouragans s’annonce, un certain nombre de petits États insulaires en développement (PEID) sont toujours confrontés aux conséquences de la dernière saison qui a déraciné des communautés entières.  Les changements climatiques ne sont pas un thème de l’avenir.  Le danger est bien présent et le potentiel qu’il devienne une force déstabilisatrice sur les plans national et régional est bien réel.  Le représentant a plaidé pour plus de ressources aux mesures d’adaptation, appelant aussi à l’établissement d’un mécanisme international chargé de gérer les dommages et les pertes que subissent les pays.  Il a voulu que le système des Nations Unies appréhende mieux les risques de sécurité liés au climat, voulant que le Conseil de sécurité évite l’« erreur historique » d’ignorer les menaces à la paix et la sécurité internationales que fait peser le climat.  Les effets dévastateurs des phénomènes climatiques continueront de sévir, tant que l’on n’identifiera pas quelle agence de l’ONU est la mieux armée pour y répondre. 

Au nom des 14 États Membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Mme PENNELOPE ALTHEA BECKLES (Trinité-et-Tobago) a souligné qu’il existe bien une menace à la paix et à la sécurité internationales, laquelle ne peut rester sans réponse.  Toutefois la structure actuelle du Conseil de sécurité ne peut répondre aux changements climatiques car la réponse ne peut être militaire ou basée sur des sanctions.  Tout en saluant le Conseil pour avoir soulevé la problématique du dérèglement climatique et de ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales, la représentante a exigé que ce thème reste dans le cadre exclusif de la Convention pertinente des Nations. 

Elle n’a pas oublié de mettre l’accent sur le poids « disproportionnel » que supportent les petits États insulaires en développement.  La menace des changements climatiques, dont la montée du niveau de la mer, exige une réponse préemptive qui comprenne à la fois l’évaluation des risques, la planification et des financements adéquats, a estimé Mme Beckles qui n’a pas hésité à rappeler que la saison des ouragans en 2017 a rendu Antigua-et-Barbuda « totalement inhabitable » et a fait reculer de plusieurs décennies le développement de la Dominique.

Les chefs d’État de la CARICOM ont adopté une Déclaration sur les changements climatiques lors de la réunion qu’ils ont tenue, du 6 au 8 juillet, en Jamaïque, dans laquelle ils demandent un effort mondial pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre.  Ils appellent aussi la communauté internationale à venir en aide aux Caraïbes et à soutenir leurs efforts pour renforcer la résilience face au dérèglement climatique.

Au nom du Groupe des États arabes, M. OMER DAHAB FADL MOHAMED (Soudan) a estimé que les rôles de l’Assemblée générale et de l’ECOSOC ne doivent pas être ignorés dans la réponse aux défis des changements climatiques.  Évitons les doublons, s’est impatienté le représentant.  Le réchauffement de la planète, a-t-il néanmoins poursuivi, exacerbe les tensions et constitue indubitablement un facteur de conflit, avec des répercussions sur des populations contraintes à la fuite devant la raréfaction des ressources hydriques et naturelles, les vagues de chaleur ou encore la désertification.  Le Soudan est lui-même touché de plein fouet par ce phénomène, a souligné le représentant, en rappelant la responsabilité « historique » des pays développés.  Parmi les problèmes les plus graves auxquels le Groupe arabe est confronté, il a cité l’absence de coordination de l’assistance à la mise en œuvre des mesures d’atténuation et d’adaptation.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Forum politique de haut niveau examine les quatre catégories de pays en situation particulière et les progrès en matière de villes résilientes

Forum politique de haut niveau, Session de 2018,
7e, 8e & 9e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6937

Le Forum politique de haut niveau examine les quatre catégories de pays en situation particulière et les progrès en matière de villes résilientes

 

Le Forum politique de haut niveau pour le développement durable organisé sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC) a consacré sa troisième journée de travaux à examiner les perspectives des pays les moins avancés, des petits États insulaires en développement, des pays en développement sans littoral et des pays à revenu intermédiaire.

Les participants ont aussi fait le bilan de la mise en œuvre de l’objectif 11 de développement durable -villes et établissements humains inclusifs, sûrs, résilients et durables– qui, malgré le manque global de progrès, a suscité de l’espoir au vu de certaines réalisations. 

La première table ronde a été l’occasion pour les États Membres et les organisations non gouvernementales de se pencher sur les problèmes de développement durable auxquels se heurtent les petits États insulaires en développement (PEID) et d’étudier les moyens de renforcer leur résilience grâce à une meilleure gestion des ressources en eau et de l’énergie durable. 

La Haut-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, Mme Fekitamoeloa Katoa ‘Utoikamanu, a rappelé que les phénomènes météorologiques extrêmes qui ont frappé les PEID l’an dernier constituent un signal d’alarme sans équivoque.  « Le stress hydrique, la croissance démographique, le coût élevé de l’importation des carburants fossiles sont des défis de taille pour ces pays. »  Ce qui fait que la résilience et la viabilité sont loin d’être la réalité pour les PEID, a averti Mme Katoa.

Le Ministre de l’environnement, des terres et du développement agricole de Kiribati, M. Alexander Teabo, a donné l’exemple des projets menés dans son pays en matière d’eau et d’assainissement en vue de préserver la santé des habitants.  Des réservoirs d’eau gérés par les communautés et destinés à recueillir l’eau de pluie ont ainsi été mis en place.  

Ce qu’il faut, pour pallier le stress hydrique, c’est une gestion intégrée des ressources en eau, ont argué plusieurs intervenants.  M. Adrianus Vlugman, de l’Organisation panaméricaine de la santé, a en outre proposé que les femmes jouent un rôle de premier plan dans cette gestion.

Les PEID ont aussi été présentés comme ayant un potentiel extraordinaire s’agissant des énergies renouvelables, pour autant qu’il soit exploité.  Mais cela exige des partenariats robustes et un renforcement des capacités, a prévenu la Haut-Représentante.

Mme Tessa Williams-Robertson, de la Banque de développement des Caraïbes, a indiqué que la stratégie pour baisser le coût de l’énergie dans les PEID passe notamment par la création d’un environnement propice aux investissements du secteur privé.  La Banque a pris des initiatives notamment pour contribuer au financement de l’exploitation de l’énergie géothermique.

Les perspectives des pays les moins avancés, des pays en développement sans littoral et des pays à revenu intermédiaire dans la réalisation des objectifs de développement durable ont été au centre des débats de la deuxième table ronde.  Ces pays, qui totalisent plus de six milliards d’habitants, font face à des difficultés spécifiques, en particulier la pauvreté, selon le Directeur du contrôle et de l’évaluation des politiques publiques de la Colombie, M. Felipe Castro Pachón.

Au nom des pays les moins avancés, le Bangladesh a appelé à la mobilisation des ressources financières et techniques en faveur des PMA.  Il a aussi demandé de l’aide pour le renforcement des ressources nationales, pour la Banque de technologies pour les pays les moins avancés, pour le renforcement des capacités de prévention, et pour continuer d’appuyer les PMA qui sont passés dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire.  Il a aussi réclamé une session consacrée exclusivement aux PMA.

La spécialiste politique principale de l’Alliance pour les villes de la Belgique, Mme Maruxa Cardama, a prôné la mise en place de cadres nationaux de politique urbaine pour créer une vision de transformation et demandé d’investir dans les infrastructures essentielles dont le financement est de l’ordre de 850 milliards de dollars jusqu’en 2050.

La troisième table ronde fut justement l’occasion d’examiner la mise en œuvre de l’objectif sur les villes et les établissements humains inclusifs, sûrs, résilients et durables, et de constater le manque global de progrès.  Les participants n’ont pas caché les difficultés rencontrées, certains d’entre eux n’hésitant pas à tirer la sonnette d’alarme quand on sait, par exemple, que 1,6 milliard de personnes dans le monde n’ont pas un logement adéquat.  L’Inde a indiqué, par exemple, que son pays doit bâtir l’équivalent de la ville de Chicago chaque année pour répondre aux besoins en logement.

L’objectif 11 ne sera pas atteint à moins que les États Membres ne développent une politique de logement basée sur les droits humains, a prévenu Mme Leilani Farha, Rapporteuse spéciale de l’ONU sur le logement durable.  De son côté, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la sécurité routière, M. Jean Todt, a plaidé pour une meilleure sécurité routière.

« Incluez les gouvernements locaux! » a lancé le maire de la ville de Genk, M. Wim Dries, qui a recommandé de suivre le principe de subsidiarité dans l’élaboration des programmes et stratégies.  « Placées au plus près des citoyens, les autorités locales sont en effet les mieux placées pour répondre à leurs besoins. »

Il faut aussi intégrer systématiquement la perspective sexospécifique dans les plans de développement urbains, a renchéri Mme Shaila Shahid, d’International Centre for Climate Change and Development.

La Réunion du Forum politique de haut niveau pour le développement durable se poursuivra demain, jeudi 12 juillet, à 9 heures.

FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE ORGANISÉ SOUS LES AUSPICES DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Transformer nos sociétés pour les rendre viables et résilientes: perspective des petits États insulaires en développement

Ce débat a été l’occasion de se pencher sur les obstacles au développement durable auxquels se heurtent les petits États insulaires en développement (PEID) et d’étudier les moyens de renforcer la résilience des îles et des communautés au niveau de l’eau et de l’énergie durable.  Ces pays connaissent en effet un stress hydrique important.  Ils ont des économies dépendantes du tourisme et sont très exposés aux conséquences des changements climatiques et aux catastrophes naturelles, a rappelé Mme HENRIETTA ELIZABETH THOMPSON, déléguée de la Barbade et modératrice de la discussion.

L’eau douce étant intrinsèquement liée à la vie humaine, M. ALEXANDER TEABO, Ministre de l’environnement, des terres et du développement agricole de Kiribati, a souligné le défi de taille que cette ressource représente pour les PEID, compte tenu de la vulnérabilité de ces pays aux catastrophes naturelles et de leur éloignement géographique.  « On ne nous entend pas, on ne nous écoute pas », s’est-il plaint.  Il a rappelé que son pays est composé d’une trentaine d’îles d’une altitude faiblement élevée, comptant 110 000 habitants.  Kiribati a connu une grave sécheresse, tandis que les nappes phréatiques sont polluées.  Face à ces défis, Kiribati mène de nombreux projets dans le domaine de l’eau et de l’assainissement en vue de préserver la santé des habitants, a-t-il dit.  Des réservoirs d’eau gérés par les communautés et destinés à recueillir l’eau de pluie ont ainsi été mis en place.  « L’eau est essentielle pour réaliser les objectifs de développement durable », a-t-il dit, en plaidant pour une gestion intégrée et durable des ressources en eau douce.  « Kiribati a besoin de toute l’aide possible. »

Mme TESSA WILLIAMS-ROBERTSON, de la Banque de développement des Caraïbes, a attiré l’attention sur le fait que l’énergie est très coûteuse dans les PEID.  Des financements concessionnels sont disponibles mais difficiles à obtenir pour ces pays.  Elle a indiqué que la stratégie pour baisser le coût de cette énergie passe notamment par la création d’un environnement propice aux investissements du secteur privé.  Les États des Caraïbes, qui sont souvent endettés, ne peuvent pas investir dans le secteur de l’énergie, a-t-elle constaté, en appelant dans le même temps au renforcement de leurs capacités institutionnelles.  L’experte y a vu une occasion pour la communauté internationale d’apporter une aide précieuse en fournissant un financement concessionnel adéquat, des instruments financiers novateurs en termes de réduction du risque et une aide technique.  Enfin, elle a détaillé les initiatives de la Banque, notamment ses contributions au financement de l’exploitation de l’énergie géothermique à Saint-Vincent-et-les Grenadines et la Grenade, ainsi qu’à l’installation de lampadaires équipés en ampoule LED économes en énergie.

M. ADRIANUS VLUGMAN, de l’Organisation panaméricaine de la santé, a détaillé les défis des pays de la région concernée dans le secteur de l’eau et de l’énergie, tels que des politiques énergétiques mal coordonnées, un éclatement des responsabilités entre différents ministères, une vulnérabilité aux changements climatiques, la survenue de catastrophes naturelles extrêmes et des ressources aquifères limitées.  Face au stress hydrique, beaucoup de pays se tournent vers la désalinisation, qui est pourtant une option coûteuse pour obtenir de l’eau potable.  La solution, à son avis, c’est la gestion intégrée des ressources en eau au sein de laquelle les femmes jouent un rôle de premier plan.  Une gestion qui a l’avantage d’être transversale et que l’on peut qualifier de gagnant-gagnant.  Enfin, M. Vlugman a pris comme exemple, pour illustrer son propos, l’utilisation d’eaux usées comme engrais en Jamaïque.

Mme FEKITAMOELOA KATOA ‘UTOIKAMANU, Haut-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, a déclaré que les phénomènes météorologiques extrêmes qui ont frappé les PEID l’an dernier constituent un signal d’alarme sans équivoque.  Elle a ensuite mentionné certaines initiatives en faveur de ces pays, dont le programme eau et assainissement de l’UNICEF doté d’un budget de 80 millions de dollars.  Malgré les quelques progrès, la résilience et la viabilité sont loin d’être la réalité pour les PEID, dont elle a souligné l’extrême vulnérabilité aux changements climatiques qui menacent la vie même.  « Le temps presse », a-t-elle lancé.  Le stress hydrique, la croissance démographique, le coût élevé de l’importation des carburants fossiles, dont les PEID sont très dépendants, sont des défis de taille pour ces pays.  Ceux-ci, par leur positionnement géographique, ont néanmoins un potentiel extraordinaire s’agissant des énergies renouvelables pour autant qu’il soit exploité, a-t-elle fait remarquer.  « Pour cela, nous avons besoin de partenariats robustes et d’un renforcement des capacités, sous peine de voir les PEID laissés pour compte. »

Mme ASSYS CLARIBEL THEN MARTE, Directrice exécutive d’Alianza ONG, a plaidé pour une association plus étroite des citoyens aux projets dans le domaine énergétique.  En République dominicaine, 47 petites centrales hydrauliques en milieu rural ont pu être construites grâce aux citoyens, a-t-elle dit.  L’expertise des femmes en particulier est précieuse pour une gestion durable des ressources en eau, a fait valoir Mme RHONDA ROBINSON, de la Communauté du Pacifique, avant d’appeler à un partage des bonnes pratiques entre PEID et demander une évaluation rigoureuse des risques associés aux catastrophes naturelles.  La question du financement sera cruciale pour atteindre l’objectif 6 sur l’eau propre et l’assainissement, a-t-elle ajouté. 

La lancinante question du financement a été au cœur de la discussion interactive qui a suivi, le délégué de Maurice n’ayant pas fait mystère des « très grandes difficultés » rencontrées par les PEID pour décrocher des financements pour des projets nationaux dans le domaine des énergies renouvelables.  Les procédures d’accès à ces financements sont très lourdes, a-t-il expliqué, en demandant à ce qu’elles soient rationalisées.  « Le revenu national par habitant ne peut pas être en outre le seul critère d’accès à ces financements », selon le délégué.  Cette question est d’autant plus importante, a-t-il poursuivi, que la mobilisation des ressources intérieures est entravée par une base fiscale limitée.

Même son de cloche du côté de Trinité-et-Tobago qui, s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a demandé, compte tenu des ressources financières limitées des PEID, un allègement de la dette et le respect des engagements pris au titre de l’aide publique au développement (APD).  Belize a lu une récente déclaration de la CARICOM, dans laquelle celle-ci demande notamment à la communauté internationale des « efforts accrus » pour atténuer les conséquences des changements climatiques.  Un appel entendu par l’Union européenne qui a promis un appui plus important à ces pays, tout en soulignant l’importance d’une « stabilisation macroéconomique ».

Enfin, cette discussion a été marquée par des appels à « tourner la page du mode de production capitaliste », selon l’expression de la déléguée du grand groupe des enfants et des jeunes, tandis que la représentante du grand groupe des organisations non gouvernementales s’est élevée contre la privatisation des ressources hydriques.  « Intéressons-nous aux personnes plutôt qu’aux profits », a renchéri la déléguée de la société civile.

Transformation vers des sociétés durables et résilientes: perspectives des pays les moins avancés, des pays en développement sans littoral et des pays à revenu intermédiaire

L’animatrice de la discussion, Mme KARIN FERNANDO, Administratrice principale chargée de recherche au Centre d’analyse de la pauvreté du Sri Lanka, a rappelé que les habitants des pays les moins avancés (PMA), des pays en développement sans littoral et des pays à revenu intermédiaire représentent six milliards de personnes. 

En ce qui concerne les PMA, le Ministre d’État pour la durabilité environnementale de l’Éthiopie, M. KABA URGESSA, a présenté la situation socioéconomique qui prévaut dans ces pays en insistant sur la nécessité d’avoir des stratégies, notamment dans les domaines foncier, agricole, environnemental et industriel.  Son pays a fait des efforts pour avoir une résilience climatique qui consiste, entre autres, à la captation du carbone.  Une politique de restauration de la couverture forestière et foncière est notamment en cours.  S’agissant de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, le plan de croissance de l’Éthiopie a été aligné sur les objectifs de développement durable et d’autres initiatives africaines de développement comme le plan de couverture forestière touchant 100 millions d’hectares.  L’Éthiopie vise une couverture forestière de 15 millions d’hectares.  En résumé, a dit le Ministre, nous sommes en mesure de faire face au stress hydrique et en situation d’indépendance alimentaire.

La Haut-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, Mme FEKITAMOELOA KATOA ‘UTOIKAMANU, a lancé deux messages, le premier étant que « nous devons accélérer notre appui à ces trois catégories de pays pour qu’ils aient une capacité proactive de gestion et d’atténuation des événements relatifs aux changements climatiques et environnemental ».  Le deuxième, c’est que « nous devons accélérer leur accès aux financements, rationaliser les procédures d’accès et de décaissement, sans pour autant compromettre la transparence et la responsabilité ».  Face aux défis spécifiques des PEID, elle a demandé des actions urgentes pour faciliter leur accès à une énergie fiable et durable et à la connectivité.  « Nous devons aussi assurer que les PMA et les PEID ne traînent pas en arrière en matière d’innovation et de technologie. »  Il est également urgent, a-t-elle ajouté, de se focaliser sur l’accès universel et inclusif aux services sociaux de base pour tous, et l’accès aux financements et aux renforcements de capacités. 

S’intéressant en particulier aux pays à revenu intermédiaire, le Directeur du contrôle et de l’évaluation des politiques publiques de la Colombie, M. FELIPE CASTRO PACHÓN, a présenté les défis rencontrés par ces pays en soulignant ce qui leur est nécessaire pour réaliser le Programme 2030, avant de se vanter des bons résultats obtenus par la Colombie.  Il y a 109 pays à revenu intermédiaire, a-t-il indiqué en précisant que la pauvreté est encore très présente chez eux.  Pour pouvoir en sortir, il leur a recommandé de diversifier leurs économies et de saisir l’opportunité des partenariats internationaux pour traiter tous les problèmes, notamment dans les domaines technologique, scientifique et financier.

Pour sa part, la Colombie se trouve à la phase de consolidation de la paix conclue l’année dernière; elle devra pérenniser cette nouvelle stabilité.  Pour y parvenir, elle a besoin de nouvelles sources de financement, de nouveaux investissements dans les zones évitées jusque-là par le secteur privé.  Elle a besoin de renforcer ses institutions en vue de créer un environnement favorable aux investissements.  « Face à la diminution des ressources nationales à cause de la chute du prix du pétrole, nous devons être plus innovants, réduire les impôts dans les zones touchées par le conflit, lancer des incitations financières pour que les entreprises s’installent dans ces zones, et aussi utiliser les revenus du pétrole dont 10% sont réservés à la recherche et au développement. »  Avec la nouvelle taxe sur les sacs en plastique, l’utilisation de ceux-ci a diminué de 30% en moins d’un an.  

La spécialiste politique principale de l’Alliance pour les villes de la Belgique, Mme MARUXA CARDAMA, a rappelé que son organisation examine un certain nombre de secteurs dans plusieurs pays pour y créer une approche systémique de la résilience.  Elle a prôné la mise en place de cadres nationaux de politique urbaine pour créer une vision de transformation, en accordant une attention particulière aux villes secondaires.  Les politiques qui fonctionnent sont celles qui traitent les problèmes des gens et qui sont menées en collaboration avec eux, a-t-elle remarqué.  Des politiques qui tiennent compte de tous les citoyens et de leurs droits, y compris le droit à la terre.  Les politiques qui marchent sont celles qui fonctionnent pour tous, a répété la spécialiste.  « Nous devons savoir comment gérer les bidonvilles avec leurs habitants, il faut travailler et appuyer les agents locaux, ainsi que professionnaliser les administrations locales », a suggéré Mme Cardama.  Avant de terminer, elle a souligné la nécessité d’investir dans les infrastructures essentielles, ce qui nécessite un financement de 850 milliards de dollars jusqu’en 2050, soit 26 milliards de dollars par an.

Pour mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 dans tous ces pays d’une façon qui intègre les personnes handicapées, le Président du Forum africain des personnes handicapées, M. IDRISS MAÏGA ALZOUMA, a fait plusieurs recommandations: il faut garantir une croissance inclusive, prévoir l’accès inclusif au transport, militer pour l’autonomisation des personnes handicapées, intégrer le handicap dans les politiques locales, collecter des données inclusives et, de manière générale, respecter les engagements pris dans le cadre de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

Au nom des pays les moins avancés, le représentant du Bangladesh a appelé à la mobilisation des ressources financières et techniques en faveur des PMA, en demandant aussi une aide à la mobilisation des ressources nationales, une aide pour la Banque de technologies pour les pays les moins avancés, le renforcement des capacités pour se préparer aux chocs, et la poursuite de l’appui aux PMA qui sont devenus des pays à revenu intermédiaire.  Il faudrait une session consacrée exclusivement aux PMA, a-t-il plaidé.

Le délégué des Philippines a observé qu’il n’y a pas de solution universelle applicable à tous les problèmes et valable pour tous les pays.  Il a reconnu en même temps la difficulté à trouver des solutions individuelles.

Le Népal a demandé le rejet du système de castes dans les pays où cela se pratique pour que les populations affectées puissent être intégrées dans la réalisation du Programme 2030.  Le représentant du Qatar a rappelé les 10 messages de la réunion de Doha de septembre 2017 sur les villes durables, en particulier la nécessité de prendre des mesures immédiates afin de protéger les écosystèmes terrestres face à l’accroissement du nombre d’habitants.

L’Union européenne a souligné l’importance des politiques de développement à long terme qui tiennent compte de la spécificité de chaque pays des trois catégories.  La représentante du grand groupe des peuples autochtones s’est plainte que ces peuples soient laissés de côté.  « Les pays dans lesquels nous vivons ignorent nos besoins. »  Elle a appelé les gouvernements à prendre en compte les conditions spécifiques de ces peuples, à faire cesser le trafic et l’utilisation d’armes sur leurs territoires, à abolir les politiques discriminatoires, et à assurer l’inclusion des autochtones dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable.

Quant à la représentante du grand groupe des femmes, elle a jugé prioritaire d’obtenir des budgets publics tenant compte de l’égalité des sexes, des transports publics qui se soucient des besoins des femmes, ainsi que des financements pour les femmes entrepreneures.  Il faut des mesures fortes contre la violence sexiste dont sont victimes les femmes dirigeantes sociales ou entrepreneuriales, a ajouté la représentante. 

Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables

Les participants à cette table ronde ont fait le point sur les avancées dans la réalisation de l’objectif 11 et n’ont pas caché les difficultés rencontrées, certains d’entre eux n’hésitant pas à tirer la sonnette d’alarme.

D’abord, M. BENJAMIN RAEOF, du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU, a fait un bref exposé statistique sur l’objectif 11 de développement durable.  Entre 2000 et 2014, la population vivant dans des bidonvilles a augmenté, tandis que 91% de la population urbaine mondiale a respiré un air impur en 2016.  Près de 4,2 millions de personnes meurent d’un air pollué, a-t-il déploré.  Enfin, il a rappelé la difficulté pour une majorité de villes de gérer les déchets solides, ainsi que les conséquences graves des catastrophes naturelles pour le logement. 

Puis, Mme LEILANI FARHA, Rapporteuse spéciale de l’ONU sur le logement durable, a pris la parole pour déplorer le manque global de progrès.  L’objectif 11 ne sera pas atteint à moins que les États Membres ne développent une politique de logement basée sur les droits humains, a-t-elle déclaré.  Au-delà des chiffres –1,6 milliard de personnes dans le monde n’ont pas un logement adéquat-, elle a évoqué la condition de nombreux habitants du monde vivant, dormant, mangeant et déféquant dans les rues.  Elle a dénoncé ces entreprises de gestion d’actifs usant de leur puissance financière pour faire du logement un instrument de profit, « avalant des quartiers entiers » et « créant des villes pour les riches et les touristes ».  Ces attaques en règle contre la dignité humaine sont vues comme des caractéristiques normales du nouvel ordre économique, a-t-elle déploré.  Elle a plaidé pour un changement fondamental afin de remédier à la crise « indigne » du logement, en demandant que le droit au logement soit consacré dans les législations nationales.  Les stratégies doivent se concentrer sur les besoins des plus démunis, faire en sorte qu’il n’y ait plus de personne sans logement, clarifier les obligations des acteurs privés et réguler les marchés immobiliers.  La réalisation du droit au logement doit être le fait des États et ne peut pas être déléguée aux acteurs privés, a-t-elle conclu.

Mme PENNY ABEYWARDENA, Commissaire au Bureau des affaires internationales de la Mairie de la ville de New York, a indiqué que sa ville est la première au monde à soumettre directement à l’ONU un examen volontaire local, mettant en lumière les synergies entre objectifs de développement durable et « OneNYC », la stratégie de développement durable de la ville.  Grâce à cette stratégie, la ville de New York a purifié l’air et l’eau, enregistré une nette augmentation des salaires, créé des emplois et triplé le nombre d’enfants ayant accès à une éducation précoce.  Enfin, elle a rappelé les efforts de la ville pour influencer les négociations actuelles en vue d’un accord global sur les migrations via la mise sur pied d’une coalition de 50 villes en Amérique du Nord, en Amérique du Sud, en Europe et en Afrique. 

M. JEAN TODT, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la sécurité routière, a rappelé qu’1,3 million de personnes meurent chaque année sur les routes, la moitié d’entre elles dans des milieux urbains.  Dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, ces pertes en vies humaines représenteraient une perte économique de près de 5% du PIB.  Loin d’être une considération théorique, la sécurité routière est cruciale pour des villes viables, a-t-il dit, en appelant à une réduction massive du nombre de victimes.  Il a plaidé pour le développement de transports en commun sûrs et pour l’intégration de l’impératif sécuritaire dans la planification de la politique de transports.  Il a mentionné certains progrès accomplis dans des villes comme New York, Minneapolis ou encore Copenhague qui ont misé sur la promotion du transport multimodal et l’installation de pistes cyclables.  Dans des villes comme Bogota et Ahmedabab, en Inde, le développement du réseau de bus a permis d’améliorer la sécurité routière.  Celle-ci est cruciale pour que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables, a-t-il conclu.

Tranchant avec la tonalité pessimiste de certains propos, Mme MAIMUNAH MOHD SHARIF, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour les établissements humains, a tenu à souligner quelques « success stories », dont le cadre de développement spatial utilisé à Johannesburg, basé sur la vision du maire de la ville dite des « couloirs de la liberté ».  Visant à réparer les injustices héritées de l’apartheid, cette approche a unifié des quartiers autrefois ségrégués et développé les transports en commun, aboutissant notamment au désenclavement de Soweto.  Le programme « les villes saoudiennes du futur » a permis de repenser, avec l’aide d’ONU-Habitat, les contours de 17 villes de ce pays, a-t-elle ajouté.  Au titre des recommandations, elle a souligné la nécessité d’agréer une définition globale des notions d’urbanité et de ville comme unités d’analyse.  « Une définition commune serait précieuse pour nos efforts. »  Enfin, elle a demandé la collecte de statistiques au niveau des villes avant qu’elles ne soient agrégées au niveau national.  

Mme MEERA ALSHAIKH, Chef de projet à Smart Dubai aux Émirats arabes unis, a dit que la stratégie de son pays vise à augmenter la part de l’énergie propre de 25 à 50%, à réduire l’empreinte carbone de 70% et à augmenter la réutilisation des eaux usées de 95% d’ici à 2036.  La quatrième révolution industrielle des technologies est au cœur de notre stratégie en la matière, a-t-elle dit.  Un autre axe est le développement de partenariats pour une utilisation commune des infrastructures.  Enfin, elle a jugé que l’échange de bonnes pratiques entre villes sera crucial pour atteindre l’objectif 11.  « Plutôt que de réinventer la roue, nous devons créer un cadre grâce auquel les villes pourront identifier les lacunes et échanger des bonnes pratiques. »

« Incluez les gouvernements locaux! » a lancé M. WIM DRIES, maire de la ville de Genk, en notant que ce n’est pas le cas aujourd’hui.  « Nous sommes dignes de confiance et nous devons avoir un siège à la table du Programme de développement durable à l’horizon 2030, pas seulement lors de son élaboration, mais lors de sa mise en œuvre et de son suivi. »  Ainsi, les examens volontaires nationaux doivent refléter fidèlement les vues des gouvernements locaux, a-t-il demandé.  S’il a reconnu le rôle des autres niveaux de gouvernance pour réaliser l’objectif 11, il a recommandé de suivre le principe de subsidiarité dans l’élaboration des programmes et stratégies.  « Placées au plus près des citoyens, les autorités locales sont en effet les mieux placées pour répondre à leurs besoins », a-t-il tranché.

De son côté, Mme SHAILA SHAHID, de International Centre for Climate Change and Development, a dénoncé la marginalisation des femmes en milieu urbain. L’urbanisation accroît les inégalités entre hommes et femmes, les femmes vivant dans des bidonvilles étant les plus touchées, a-t-elle regretté.  La protection des femmes et des filles en milieu urbain exige des changements systémiques, a-t-elle dit, en demandant notamment que la perspective sexospécifique soit intégrée systématiquement dans les plans de développement urbains.  

Dans la discussion interactive qui a suivi, les délégations ont détaillé leurs politiques du logement, à l’instar du délégué de l’Inde qui a indiqué que son pays doit bâtir l’équivalent de la ville de Chicago chaque année pour répondre aux besoins en logement.  « Nous sommes confiants que l’Inde réalisera le Programme de développement durable à l’horizon 2030 dans les temps impartis », a-t-il dit, ajoutant que si « l’Inde peut réussir, tous les pays peuvent réussir ».  De son côté, la Fédération de Russie s’est lancée dans un ambitieux programme de rénovation de logements dans le pays, 15 millions de personnes en ayant déjà bénéficié, tandis que la Thaïlande a détaillé le programme d’aide au logement pour les ménages les plus pauvres.

Au Brésil, il manque six millions de logements, a concédé le délégué de ce pays, précisant que pourtant quatre millions de logements ont été construits depuis 2009.  Des aides financières au logement et des taux d’intérêt préférentiels sont disponibles, a-t-il dit.  La déléguée du Kenya a indiqué que le droit au logement est consacré dans la Constitution du pays et que 100 000 logements au loyer modeste ont été construits ces dernières années.  En Turquie, la population vivant dans des bidonvilles est passée de 23 à 11%, selon le représentant de ce pays.  « Alger est devenue la première capitale africaine sans bidonvilles », a renchéri le représentant de l’Algérie, tandis que son homologue du Maroc a dit que 58 villes marocaines ne comptent plus de bidonvilles.  Le délégué de la Sierra Leone a, lui, exhorté à investir dans le foncier dans son pays.

La qualité de vie dans les villes a été abondamment évoquée, notamment par les délégations du Liban et du Bahreïn qui ont présenté leurs initiatives en la matière.  « La technologie nucléaire permet d’améliorer la qualité de l’air, comme cela est le cas en Indonésie », a déclaré le délégué de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).  Le délégué des Pays-Bas a aussi lié urbanité, logement et radicalisation extrémiste de certains jeunes.  Les villes sont des lieux ouverts et de rencontre et doivent le rester, a-t-il dit, en faisant allusion aux flux migratoires récents en Europe.  « Les villes sont en première ligne face aux migrations », a déclaré la délégation de la Suisse.  Enfin, l’observateur de la Palestine a indiqué que 5 000 structures urbaines ont été détruites en raison de l’occupation israélienne.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Forum politique de haut niveau se penche sur les moyens de rendre les sociétés viables et résilientes

Forum politique de haut niveau, Session de 2018,
4e, 5e & 6e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6936

Le Forum politique de haut niveau se penche sur les moyens de rendre les sociétés viables et résilientes

Pour sa deuxième journée de travaux, le Forum politique de haut niveau pour le développement durable organisé sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC) s’est penché sur les moyens de rendre les sociétés viables et résilientes face aux inévitables chocs politique, économique, climatique ou bien encore face à la « destruction créatrice » découlant des changements technologiques.

Pour la première des trois tables rondes organisées de la journée, le Forum, tout à son examen de la mise en œuvre des ambitieux objectifs de développement durable, fil conducteur de ses huit journées de travaux, a pu entendre la Secrétaire générale adjointe de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) prôner la mise en place de mécanismes de protection sociale.

« Les politiques économiques et sociales devraient être axées sur les travailleurs plutôt que sur les secteurs », a ajouté Mme Isabelle Durant.  Celle-ci a également préconisé l’effacement de la dette, ou le moratoire, pour les pays qui subissent des chocs.  « En libérant des fonds, le pays est mieux préparé à d’éventuels chocs futurs. »

Les catastrophes naturelles ont été au cœur de la présentation du représentant de « 100 Resilient Cities », M. Jeb Brugmann qui a pris l’exemple de Porto Rico après le passage de l’ouragan Maria en 2017 pour illustrer la complexité du concept de résilience.  Partageant la même fibre sociale que la déléguée de la CNUCED, il a dénoncé le fait qu’après une catastrophe, le Gouvernement et les assureurs, à travers leurs procédures de financement, empêchent l’utilisation des fonds de relèvement pour le développement. 

« Nous avons besoin d’une éducation aux catastrophes à tous les niveaux. »  C’est ce qu’a prôné le Coordonnateur de l’Institut du développement durable de l’Université des Indes occidentales (Jamaïque), M. David Smith, qui a plaidé pour un financement de la recherche et un meilleur accès aux informations scientifiques, en particulier dans les pays en développement et les pays insulaires en développement.  « Il faut bâtir le capital humain et aider les personnes à trouver le financement nécessaire pour qu’elles puissent s’adapter à la résilience. »

Auparavant, la déléguée de la CNUCED avait vanté l’efficacité des technologies innovantes, avant, pendant et après les chocs, ainsi que pour accélérer les progrès et le développement en général.  « La télédétection a ainsi été utilisée pour identifier les zones vulnérables à la désertification, conduisant à des initiatives de reboisement », a-t-elle dit, tout en prédisant un bouleversement total de l’économie lorsque l’utilisation des imprimantes 3D sera généralisée. 

L’apport de la science, de la technologie et de l’innovation (les « STI ») au service du développement durable, mais aussi le potentiel déstabilisant de ces derniers pour les sociétés, ont été au cœur de la deuxième table ronde de la matinée.  « Le rôle des sciences est crucial pour réaliser les objectifs de développement durable », a d’emblée déclaré la Coprésidente du groupe de scientifiques chargé de rédiger le Rapport mondial pour le développement durable, en recommandant aux scientifiques et aux décideurs politiques d’établir davantage de liens entre eux.

Le paradoxe, a fait remarquer un chercheur au sein de l’Université de Vienne pour la technologie, c’est que trois milliards de personnes sont actuellement laissées pour compte par les STI, alors qu’ils sont la clef pour réaliser le développement durable.  Face à la « destruction créatrice » des changements technologiques dont parlait l’économiste Joseph Schumpeter, il a préconisé de lisser les effets de ces changements et de rechercher des synergies.

Certaines délégations ont détaillé les stratégies de leurs pays s’agissant des STI et les progrès déjà engrangés.  Le Kenya consacre ainsi 2% de son PIB à ce secteur, tandis que l’Afrique du Sud est bien classée selon l’Indice mondial de l’innovation.

Enfin, un même vent de pessimisme que lors de la journée précédente a soufflé sur la troisième table ronde de la journée consacrée à l’examen de l’objectif 7 « Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable ».

Alors qu’il avait noté, la veille, des retards dans la réalisation de l’objectif 6 relatif à l’eau propre et l’assainissement, le Forum n’a pu faire qu’un constat similaire s’agissant dudit objectif 7.  « Le monde n’est pas encore en voie d’atteindre l’accès universel à de tels services d’ici à 2030 », a déclaré sans ambages une responsable de la Section de suivi des objectifs de développement durable de la Division de statistique de l’ONU.

« Il faut 12 à 15 milliards de dollars par an pour atteindre cet objectif d’ici à 2030 », a renchéri le délégué du Bangladesh, qui a déploré, à l’instar de nombreuses délégations, le non-respect de la promesse de l’aide publique au développement (APD) et la faiblesse des ressources internes. 

Loin de jeter l’éponge, la Présidente-Directrice générale de la Fondation européenne du climat, qui a lié accès universel à l’énergie et Accord de Paris sur les changements climatiques, a appelé à une forte mobilisation internationale, nécessaire pour « gagner cette bataille ».  « Il faut parachever la décarbonisation du secteur énergétique d’ici à 2030 pour réaliser cet objectif. »

Même volontarisme du côté de la Directrice exécutive d’ENERGIA Zambie, un réseau fondé par un groupe de femmes impliquées dans le travail sur le genre et l’énergie dans les pays en développement.  Invitant les États à « redresser la situation, à 12 ans de la réalisation des objectifs de développement durable », elle a appelé à « intégrer le genre dans les politiques énergétiques, utiliser tout ce qui est possible pour la distribution hors réseau et accroître les investissements dans les nouvelles capacités de production d’énergie ». 

La Réunion du Forum politique de haut niveau pour le développement durable se poursuivra demain, mercredi 11 juillet, à 9 heures.

FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE ORGANISÉ SOUS LES AUSPICES DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Transformation des sociétés pour les rendre viables et résilientes

Les participants à cette troisième table ronde intitulée « Transformation des sociétés pour les rendre viables et résilientes » animée par Mme EMILY WILKINSON, Chargée de recherche sur le risque et la résilience à l’Institut de développement à l’étranger du Royaume-Uni, ont fait part de leurs propositions et solutions pour aider les sociétés et les personnes à être ou à devenir résilientes.

La Secrétaire générale adjointe de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), Mme ISABELLE DURANT, a rappelé combien les pays en développement sont vulnérables aux chocs en raison de leurs faiblesses structurelles.  Au cours d’une réunion sur le sujet tenue le mois dernier, les participants venus des États Membres ont, dans leurs recommandations, préconisé à ces pays d’élargir leur base économique pour atténuer les conséquences des chocs et des aléas du marché.  En outre, les politiques économiques et sociales devraient être axées sur les travailleurs plutôt que sur les secteurs, a-t-elle dit, en prônant aussi la mise en place de mécanismes de protection sociale.  L’effacement de la dette ou le moratoire pour les pays qui subissent des chocs est un autre outil qui peut faciliter le relèvement: en libérant des fonds, le pays est mieux préparé à d’éventuels chocs futurs.

Mme Durant a également vanté l’efficacité des technologies innovantes, avant, pendant et après les chocs, ainsi que pour accélérer les progrès et le développement en général.  Par exemple, a indiqué Mme Durant, la télédétection a été utilisée pour identifier les zones vulnérables à la désertification, conduisant à des initiatives de reboisement.  En outre, lorsque les imprimantes 3D seront largement utilisées, l'économie sera totalement bouleversée et il faudra adapter les approches de la résilience.  Elle a invité à regarder de près la résilience des petits États insulaires en développement, car ils sont quotidiennement menacés par les chocs.  « Nous devons tirer des leçons de leurs expériences pour mieux nous préparer à notre propre résilience. »  Elle a aussi préconisé la diversification économique de manière à éviter la concentration des chocs sur un seul secteur. 

Dans le paysage mondial actuel, il faut plus que jamais des communautés et des sociétés résilientes, a enchaîné le Directeur exécutif adjoint du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), M. DEREJE WORDOFA, avant d’expliquer que le FNUAP vise à renforcer leur résilience dans trois domaines: mettre fin à la mortalité maternelle; améliorer l’accès à la planification familiale; et mettre fin aux pratiques néfastes telles que les mutilations génitales féminines.  De telles actions renforcent la résilience de nombreuses manières, en particulier en période de conflit.  Les efforts du FNUAP ciblent spécifiquement les jeunes, a-t-il précisé.  Les efforts se sont également concentrés sur la lutte contre la violence sexiste et sur une meilleure compréhension des données démographiques, qui identifient les vulnérabilités et fournissent des informations pour une planification efficace.

En Afrique, a ajouté le haut fonctionnaire, près de 60% de la population a moins de 35 ans.  Les jeunes sont considérés comme les causes et les moteurs des conflits et les jeunes femmes sont considérées comme des victimes.  Cependant, une étude récente du FNUAP montre que les jeunes participent à la prévention et à la résolution des conflits.  Si des investissements stratégiques sont faits dans l’éducation et l’emploi, le potentiel des jeunes peut être élargi.  Les obstacles tels que l’inégalité, l’exclusion et la discrimination à l’encontre des jeunes devraient être aplanis, a encore prôné l’expert.  Répondre à ces défis est essentiel et le FNUAP travaille avec de nombreux États Membres pour, entre autres, améliorer la situation et rendre les communautés plus résilientes.

Le représentant de « 100 Resilient Cities », M. JEB BRUGMANN, a parlé du programme des 100 villes résilientes de la Fondation Rockefeller qui aide les villes à définir ce dont elles ont besoin pour renforcer leur résilience.  Il a pris l’exemple de Porto Rico après le passage de l’ouragan Maria en 2017 pour illustrer la complexité du concept de résilience.  Porto Rico était déjà en pleine crise avant d’être frappé, a-t-il dit.  Il subissait des tensions multiples notamment un niveau élevé de pauvreté, des soins de santé inadéquats, une eau de mauvaise qualité et des pannes de courant constantes, qui ont rendu l’île inapte à répondre aux imprévus.  Tirant les leçons de l’ouragan Katrina et de l’ouragan Sandy, une stratégie de résilience a été réimaginée pour Porto Rico, puis lancée en vue des milliards de dollars prévus pour le fonds de relèvement du Gouvernement.  M. Brugmann a souligné la nécessité de concevoir la résilience de manière globale et a dénoncé le fait qu’après une catastrophe, le Gouvernement et les assureurs, à travers leurs procédures de financement, empêchent l’utilisation des fonds de relèvement pour le développement. 

Une éducation aux catastrophes à tous les niveaux.  C’est ce qu’a prôné le Coordonnateur de l’Institut du développement durable de l’Université des Indes occidentales (Jamaïque), M. DAVID SMITH, en appelant à renforcer les institutions et les capacités humaines pour que le prochain ouragan et la prochaine crise économique ne posent pas autant de problèmes.  Il a aussi plaidé pour un financement de la recherche et un meilleur accès aux informations scientifiques.  Il est indispensable que tout le monde ait accès à l’information, en particulier dans les pays en développement et les pays insulaires en développement.  Il faut bâtir le capital humain et aider les personnes à trouver le financement nécessaire pour qu’elles puissent s’adapter à la résilience. 

Les défis de la résilience ne peuvent être résolus que dans les cadres multilatéraux, et grâce à la coopération aux niveaux régional et transfrontalier, a fait valoir pour sa part le Coordonnateur des activités économiques et environnementales de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), M. VUK ŽUGIĆ.  À cet égard, l’Europe, a-t—il indiqué, accorde beaucoup d’importance à l’intégration et la coopération, ainsi qu’aux partenariats, essentiels pour la mise en œuvre du Programme 2030. 

L’une des priorités de l’Union européenne est en effet de renforcer la capacité des États et des secteurs principaux des pays, et donc la résilience, a indiqué la délégation en précisant que cette politique se base sur le respect des droits de l’homme et de l’état de droit et a pour but la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Elle a averti que la résilience, ce n’est pas préserver le statu quo, mais prendre en compte les risques au moment de la programmation et de la planification.  Il faut aussi prendre en compte les forces et les vulnérabilités du pays.

Les Philippines ont expliqué, à ce propos, avoir adopté une politique de résilience qui est passée de la réponse aux catastrophes à la prévention des risques, en tirant les leçons des dernières catastrophes ayant frappé le pays.  Celles-ci avaient coûté plus de 200 milliards de dollars à l’économie, l’équivalent de 2% du produit intérieur brut.  La nouvelle politique comprend notamment un plan de développement des villes résilientes et met l’accent sur les faiblesses des villes à combler, notamment le système de transport, la fiscalité urbaine et l’habitat. 

La Suisse est également exposée à plusieurs sortes de dangers, a indiqué sa représentante en présentant une mesure prise pour y faire face: une application à télécharger sur les téléphones portables pour préparer les citoyens et partager les informations utiles en cas de catastrophes.

La déléguée du Honduras a préconisé, elle aussi, l’approche préventive en matière de résilience.  Une approche qui doit être conforme au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe, et qui doit être intégrée dans les politiques de développement notamment avec la construction d’infrastructures résilientes.

En République islamique d’Iran, a indiqué la délégation, le Gouvernement consacre 2% du budget à la résilience.  Il alloue aussi 50 millions de dollars aux activités à un centre d’informations sur la prévention des catastrophes. 

Pour la représentante du grand groupe des organisations non gouvernementales, la résilience passe par la création d’un système d’alerte rapide, une protection sociale efficace, un bon accès aux financements, ainsi que la participation de la société civile.

La représentante du grand groupe des enfants et des jeunes, Mme MARIKRIS DE GUZMAN, a d’ailleurs souligné que la résilience commence dès le plus jeune âge et a, de ce fait, conseillé aux États d’adopter un plan national efficace de résilience des jeunes qui assure leur sécurité et leur inclusion.  Pour Mme de Guzman, il est donc important d’investir dans les connaissances, les services sociaux et ne pas se concentrer que sur les catastrophes.

En ce qui concerne le Groupe des personnes handicapées, sa représentante a fait remarquer la difficulté à identifier les obstacles à la résilience de ces personnes, du fait du manque des données de qualité les concernant.  Elle a donc suggéré d’investir dans la collecte de données sur ces personnes et d’examiner en priorité leurs difficultés spécifiques dans le domaine de l’emploi.

De son côté, le grand groupe des peuples autochtones a attiré l’attention sur un obstacle majeur qui entrave la résilience de la plupart des régions autochtones: leur militarisation.  « Cette situation doit changer », a-t-il dit en demandant au Forum d’y apporter une réponse.

« Il faut continuer de réfléchir aux conséquences des catastrophes naturelles », a dit en conclusion le Vice-Directeur de l’Université des Nations Unies (UNU) pour qui la première étape consiste à réduire la vulnérabilité climatique.  Vue la vitesse actuelle des changements climatiques, les gouvernements doivent anticiper les conséquences des catastrophes à l’aide notamment de la coopération sur le renforcement de la résilience. 

Promouvoir la science, la technologie et l’innovation en faveur des objectifs de développement durable

Comment combler les écarts et inégalités découlant des progrès technologiques?  Comment faire en sorte que ces progrès ne laissent personne de côté?  Ce sont les questions formulées par la modératrice de cette discussion, Mme NORMA MUNGUÍA ALDARACA, du Mexique, auxquelles les intervenants ont tenté d’apporter des éléments de réponse.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, M. TOSHIYA HOSHINO, représentant du Japon, a présenté une synthèse des travaux du Forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation du développement durable, dont la troisième édition s’est tenue début juin, en sa qualité de Coprésident dudit Forum.  La science, la technologie et l’innovation ne sont pas encore pleinement considérées comme essentielles pour atteindre les objectifs de développement durable, a-t-il regretté, en appelant à y remédier.

M. JUAN SANDOVAN MENDIOLEA, représentant du Mexique et également Coprésident du Forum précité a, lui, rappelé les thèmes des 10 sessions organisées lors de cet évènement.  Les effets des changements technologiques, les conséquences des changements climatiques, le besoin d’innovation mais aussi les inquiétudes soulevées par les avancées scientifiques ont été les principaux thèmes évoqués.

« Le rôle des sciences est crucial pour réaliser les objectifs de développement durable », a d’emblée déclaré Mme ENDAH MURNININGTYAS, Coprésidente du groupe de scientifiques chargé de rédiger le Rapport mondial pour le développement durable, de l’Indonésie.  Les sciences nous aident en outre à comprendre pleinement les liens entre les objectifs de développement durable.  Néanmoins, il y a un décalage entre les sciences et les politiques élaborées et il nous revient de le combler, a-t-elle dit, en appelant à des liens plus étroits entre scientifiques et décideurs politiques au service du développement durable.  Elle a fait valoir que les sciences permettent de comprendre l’avenir et de le déchiffrer.  C’est pourquoi il faut, a-t-elle ajouté, des investissements dans les sciences et une promotion des savoirs autochtones.  Les sciences permettent d’identifier les risques et, ainsi, aident à l’élaboration des politiques visant à y remédier, a-t-elle conclu.

Le paradoxe, a fait remarquer M. NEBOJSA NAKICENOVIC, de l’Université de Vienne pour la technologie, c’est que trois milliards de personnes sont actuellement laissées pour compte par la science, la technologie et l’innovation (STI), alors que les STI sont la clef pour réaliser le développement durable.  Il a même parlé de véritable poussée des inégalités, avant de décrire les six transformations majeures nécessaires pour réaliser les objectifs de développement durable: une révolution numérique autour de l’intelligence artificielle; l’avènement de « villes intelligentes »; une gestion environnementale durable; une transition démographique bien gérée; de nouveaux modes de production et de consommation; et une énergie sans carbone.  Enfin, il a souligné le côté déstabilisant des changements technologiques dans le droit fil de l’économiste Joseph Schumpeter qui parlait de « destruction créatrice ».  L’enjeu sera de lisser les effets de ces changements et de parvenir à des synergies, a-t-il conclu.

M. CARSTEN FINK, de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), a centré son propos autour de l’Indice mondial de l’innovation et son lien pour réaliser l’objectif 9: « Bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l’innovation. »  Cet indice mesure l’innovation dans 126 économies et permet de guider les décideurs politiques dans l’élaboration des politiques.  Il a livré les 10 premiers pays du classement de 2018: la Suisse, les Pays-Bas, la Suède, le Royaume-Uni, Singapour, les États-Unis, la Finlande, le Danemark, l’Allemagne et l’Irlande.  Au niveau régional, l’Amérique du Nord se classe première, suivie de l’Europe.  Il a détaillé le système mis en place pour l’innovation par la Chine, grâce auquel ce pays occupe la dix-septième place du classement.  C’est le seul pays à revenu intermédiaire à y figurer.  Enfin, M. Fink a indiqué que les trois principaux « faisceaux » technologiques se trouvent en Asie: à Tokyo, Shenzhen et Séoul.

Pour ce qui concerne l’Afrique, M. ERNEST FOLI, de l’Institut de recherche forestière du Ghana, a indiqué que la transformation du continent sera endogène et ne pourra venir que d’elle-même.  La dépendance vis-à-vis de l’extérieur devra donc être réduite, a-t-il dit.  Les STI seront un élément clef de cette transformation, a-t-il poursuivi, en relayant l’appel lancé en ce sens par l’Union africaine en 2017.  M. Foli a par ailleurs souligné l’importance de la sécurité alimentaire pour réaliser les objectifs de développement durable, avant d’appeler à une création d’emplois suffisants pour absorber la croissance démographique.  Enfin, la lutte contre les maladies est cruciale pour le développement durable de l’Afrique, a-t-il observé. 

Dans la discussion interactive qui a suivi, les orateurs ont avancé des pistes de réflexion pour faire en sorte que les STI promeuvent au mieux le développement durable tout en réduisant les inégalités économiques.  Le grand groupe des femmes a recommandé la promotion de savoirs traditionnels, en particulier ceux des femmes autochtones, tandis que le grand groupe des enfants et des jeunes a plaidé pour une gouvernance volontariste afin de maximiser les bénéfices des STI.  En outre, le secteur privé est un acteur essentiel pour mettre les STI au service du développement durable, a fait remarquer la Finlande.  La Fédération de Russie a, pour sa part, souligné l’importance des recherches sur le génome.

Les STI sont cruciales pour la viabilité environnementale, a renchéri la déléguée de l’Union européenne.  « Nous continuerons d’investir dans les STI, y compris en appui aux pays en développement », a-t-elle promis, répondant ainsi au vœu de l’Indonésie qui a demandé le renforcement des capacités des pays en développement.  Le Bénin a jugé crucial un tel renforcement, en particulier lors de la phase d’amorçage d’une innovation, tandis que la Turquie a souligné l’importance, à cette fin, de la récente opérationnalisation de la Banque des technologies.

Les orateurs ont par ailleurs détaillé les stratégies de leurs pays et organisations.  Le Kenya consacre ainsi 2% de son PIB aux STI, a dit le délégué de ce pays, tandis que son homologue de l’Afrique du Sud s’est félicité du bon classement du sien selon l’Indice mondial de l’innovation.  La Banque islamique de développement a, de son côté, mis en place un fonds de 500 millions de dollars pour les STI. 

Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable

Au début de la table ronde, le Ministre de l’énergie de la Thaïlande, M. SIRI JIRAPONGPHAN, a été invité par la Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), Mme MARIA CHATARDOVÁ, à dire quelques mots après le sauvetage des jeunes footballeurs et de leur coach en Thaïlande.  Le Ministre a confirmé que les 12 garçons et leur coach ont pu être sauvés et sont aujourd’hui sains et saufs.  « Merci de vos nombreuses preuves de solidarité.  La solidarité internationale qui nous a permis de sortir d’affaire montre que le monde peut travailler ensemble pour réaliser les objectifs de développement durable avec le bon cœur qu’il a montré en Thaïlande », a estimé le Ministre.

La discussion a démarré avec l’exposé de Mme HEATHER PAGE, de la Section de suivi des objectifs de développement durable de la Division de statistique de l’ONU, qui a dressé un état des lieux concernant l’accès à l’électricité dans le monde: de 2000 à 2016, la proportion de la population mondiale ayant accès à l’électricité a augmenté de près de 10%, atteignant ainsi 87%.  L'Asie du Sud et l’Afrique subsaharienne sont les deux régions avec la plus grande proportion de personnes n’ayant pas accès à l’énergie, bien que les deux régions aient fait des progrès considérables.  Mais le monde n’est pas encore en voie d’atteindre l’accès universel d’ici à 2030.  Environ 41% de la population mondiale n’a toujours pas accès aux carburants et aux technologies propres, a-t-elle signalé, soulignant qu’environ quatre millions de décès sont causés chaque année par la pollution intérieure et des modes de cuisson inefficaces.  Si la production d’énergie renouvelable est en pleine expansion, l’utilisation de formes modernes d’énergie renouvelable à des fins de transport reste relativement faible.

Le modérateur du débat, M. ADNAN Z. AMIN, Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie renouvelable (IRENA), a constaté que le secteur énergétique est marqué aujourd’hui par un impératif: « décarboniser ».  Il a de plus constaté que l’énergie renouvelable est actuellement utilisée dans de nombreux pays: 147 ont adopté des politiques de promotion de l’énergie renouvelable contre 48 en 2004.  Parallèlement, le coût moyen de cette énergie est descendu à 3 cents le kilowatt.  Quelle est la politique pour réaliser l’objectif de développement durable 7 sur l’accès universel à l’énergie?  C’est à cette question que les participants à cette table ronde devaient répondre.

Le Ministre de l’énergie de la Thaïlande, M. SIRI JIRAPONGPHAN, a dit que l’accès à l’électricité a été possible dans son pays grâce à l’investissement consenti par le Gouvernement pour que chaque maison soit raccordée au réseau électronique.  Chaque foyer paie aujourd’hui le même prix pour le courant en Thaïlande où une centrale électrique tournant à l’aide de gaz naturel a permis de stabiliser le coût sur l’ensemble du territoire.  Le prix dans les zones rurales isolées est par ailleurs subventionné. 

L’accès universel à l’énergie est l’un des moyens de mise en œuvre de l’Accord de Paris sur les changements climatiques, a poursuivi la Présidente-Directrice générale de la Fondation européenne du climat, Mme LAURENCE TUBIANA, en appelant à une forte mobilisation internationale pour parachever la « décarbonisation » du secteur énergétique d’ici à 2030 et gagner cette bataille.  Elle s’est réjouie que des pays grands consommateurs comme la Chine et l’Inde investissent beaucoup dans le secteur de l’énergie renouvelable.  Les villes et les entreprises doivent être encouragées à utiliser cette énergie dont le coût doit continuer de baisser, a estimé Mme Tubiana.  La « décarbonisation » du transport est en outre fondamentale.   

Mme SHEILA OPARAOCHA, Directrice exécutive d’ENERGIA, Zambie, a apporté le regard de son réseau fondé par un groupe de femmes impliquées dans le travail sur le genre et l’énergie dans les pays en développement.  Le manque d’accès universel à l’énergie pose des problèmes en ce qui concerne les modes de cuisson, de préparation des aliments et de leur conservation, a-t-elle indiqué en soulignant la nécessité d’utiliser la technologie moderne dans ces domaines.  Pour redresser la situation, à 12 ans de la réalisation des objectifs de développement durable, elle a recommandé d’intégrer le genre dans les politiques énergétiques.  Elle a aussi conseillé d’utiliser tout ce qui est possible pour la distribution d’énergie « hors réseau », et d’accroître les investissements dans les nouvelles capacités de production d’énergie en donnant la priorité aux femmes entrepreneures et aux besoins des femmes au foyer. 

Il faut trouver une solution au problème de l’énergie utilisée par les ménages pour la cuisson, a insisté le Directeur politique du Département de l’énergie et des changements climatiques du Ministère des affaires étrangères de la Norvège, M. HANS OLAF IBREKK, en interpellant les entreprises privées à ce sujet.  Il a aussi appelé à un changement de mentalité chez les femmes aux foyers pour qu’avec elles on trouve une solution à cette question.  M. Ibrekk a aussi demandé à réexaminer ce qui a été fait pour mobiliser des ressources nationales pour l’énergie.  Pourquoi n’a-t-on pas réussi à avoir plus de financements pour les pays en développement afin de relever ce défi? a voulu savoir le responsable.

Si le secteur privé investit 7 milliards de dollars par an dans les services énergétiques durables, cela suffira pour compléter le financement public consacré à cet objectif, a assuré un expert de la Banque mondiale, M. RICCARDO PULITI, qui est Directeur principal d’Energy and Extractive Industries Global Practice.  Mais il faut pour cela savoir attirer les investissements privés, a-t-il relevé en invitant les gouvernements à créer les conditions propices.  Il faut aussi qu’il y ait une concurrence suffisante pour que les prix soient compétitifs et pour faire diminuer les risques.  Des crédits à long termes, ainsi qu’un cadre réglementaire prévisible et stable sont nécessaires pour développer ce nouveau secteur, a indiqué M. Puliti.

La Présidente de GEIDO-US, Mme MENGRONG CHENG, a vanté le fait que la province chinoise de Shanghai dépasse désormais le Portugal dans la production d’énergie renouvelable.  La production d’énergie verte couvre neuf jours de consommation par mois de toute la province, s’est-elle réjouie. 

La question des services énergétiques durables a aussi été examinée sous l’angle des peuples autochtones.  La production d’énergie renouvelable entraîne souvent le déplacement et la destruction de leurs moyens de subsistance, a fait remarquer la représentante du grand groupe des peuples autochtones- TEBTEBBA, Mme JOAN CARLING.  « Nous ne sommes pas opposés à l’énergie renouvelable mais il faut faire participer les peuples autochtones à ces projets.  Autrement, nous courons vers l’échec. »  Cela implique aussi un renforcement des connaissances et des capacités de ces peuples, a-t-elle ajouté, souhaitant qu’ils soient véritablement en mesure d’utiliser l’énergie renouvelable en étant conscients de leurs avantages.  Il faut aussi des politiques cohérentes qui tiennent compte des droits l’homme, de la justice et de la responsabilité y compris du secteur privé. 

Au nom des pays les moins avancés, le représentant du Bangladesh a dit que ces pays ont un long chemin à parcourir avant de parvenir à l’accès universel à l’énergie.  Plus d’un milliard de personnes sont toujours privées d’électricité, a-t-il regretté en rappelant qu’il fallait 12 à 15 milliards de dollars par an pour atteindre l’objectif 7 d’ici à 2030.  Il a déploré au passage le non-respect des promesses faites au titre de l’aide publique au développement (APD) et la faiblesse des ressources internes. 

En Israël, le Gouvernement a consenti des efforts pour réduire son empreinte énergétique, a indiqué le représentant de ce pays qui abrite de nombreuses sociétés de recherches sur les véhicules intelligents.  D’ici à 2050, 40% du parc automobile national devrait rouler avec de l’énergie verte.  La représentante des jeunes néerlandais a dit qu’aux Pays-Bas, l’on se sert beaucoup du vélo.  Les jeunes font en moyenne plus de 300 kilomètres à vélo avant d’entrer dans la vie d’adulte.  Ils veulent une transition rapide vers l’utilisation de l’énergie propre et réduire l’empreinte carbone de 40% d’ici à 2030. 

La Suisse vise la réduction de 30% de sa consommation d’énergie fossile en concentrant ses efforts sur les voitures et le secteur du bâtiment.  Les centrales nucléaires seront fermées à la fin de leur cycle de vie et ne seront pas remplacées, a annoncé la délégation.  La Suède a insisté sur l’urgence d’abandonner la consommation d’énergie fossile, tandis que l’Irlande a parlé de son nouveau programme d’investissement lancé cet année, qui consacrera 20 milliards d’euros dans les énergies renouvelables pour les 10 prochaines années.  Le Kenya a pour sa part mis en place le service « pay as you go » pour répondre aux besoins d’énergie domestique à coût abordable pour les familles modestes. 

L’Union européenne, qui a exhorté à appliquer l’Accord de Paris sur les changements climatiques, milite pour l’élimination des subventions de l’énergie fossile et l’accès aux énergies renouvelables.  Elle consacrera 3,7 milliards d’euros à ces objectifs.  Le grand groupe des enfants et des jeunes a énuméré les exigences du groupe: investir davantage dans l’éducation des jeunes à l’énergie renouvelable, renouveler les engagements de financement du Fonds vert afin de mettre en œuvre l’Accord de Paris et faire passer les investissements de l’énergie fossile vers les énergies renouvelables. 

Pour le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), les trois cibles énergétiques doivent être visées ensemble.  Les séparer aurait permis de faire des progrès dans un domaine mais aurait retardé les résultats dans d’autres.  De plus, il est très difficile d’accroître la part de l’énergie renouvelable de manière significative si l’énergie est utilisée de manière inefficace.  Il est également difficile d’étendre rapidement l’accès à l’énergie si l’on ignore les technologies d’énergie renouvelable.  Autre constatation du PNUE: l’utilisation d’équipements inefficaces et en fin de vie rend d’autant plus difficiles l’accroissement de l’approvisionnement en énergie et l’accès aux zones non desservies.  Ces trois cibles sont liées intrinsèquement et une approche systémique est nécessaire pour les réaliser, a expliqué le PNUE.

La Présidente-Directrice générale de la Fondation européenne pour le climat a proposé trois pistes pour avancer dans cette direction.  En premier lieu, il faut généraliser l’accès des ménages et des producteurs à l’énergie.  En deuxième lieu, il faut construire des unités de production d’énergie renouvelable dans tout le territoire.  En troisième lieu, elle a préconisé la production décentralisée de l’énergie renouvelable.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sahel: De retour d’une « mission tripartite de solidarité », trois femmes leaders dépeignent, devant le Conseil de sécurité, une région « entre espoir et désespoir »

8306e séance – matin
CS/13414

Sahel: De retour d’une « mission tripartite de solidarité », trois femmes leaders dépeignent, devant le Conseil de sécurité, une région « entre espoir et désespoir »

De retour d’une « mission tripartite de solidarité », qui l’a conduite au Soudan du Sud, au Tchad, puis au Niger, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohammed, est venue défendre, ce matin, au Conseil de sécurité le rôle des femmes dans les processus de paix en cours au Sahel, région fragilisée par les effets conjugués de l’insécurité et des changements climatiques.

À ses côtés sur le terrain comme au Conseil, figuraient l’Envoyée spéciale de l’Union africaine pour les femmes, la paix et la sécurité, Mme Bineta Diop, et la Ministre des affaires étrangères de la Suède, Mme Margot Wallström qui, présidant la séance du Conseil, a résumé son sentiment en disant que le Sahel oscillait « entre espoir et désespoir ».

La numéro 2 de l’ONU a commencé par rappeler que femmes et filles paient le plus lourd tribut aux conflits qui sévissent dans la région, ce qui est tout particulièrement vrai des Sud-Soudanaises, victimes de violences aussi bien dans les camps de personnes déplacées qu’en dehors.  Mais Mme Mohammed a également attiré l’attention sur le sort des Tchadiennes dans les zones rurales, visées par les agissements de Boko Haram, qui enrôle de plus en plus souvent de femmes pour commettre des actes terroristes.

Le paradoxe, c’est que les investissements réalisés sur le plan sécuritaire par les États concernés se font au détriment des « investissements dans les structures sociales », a relevé de son côté l’Envoyée spéciale de l’Union africaine, qui a expliqué que le désœuvrement et le sentiment d’abandon de la jeunesse du bassin du lac Tchad font d’elles une « proie facile » pour des groupes extrémistes comme Boko Haram.

Pour la Ministre suédoise des affaires étrangère, le cas de la jeune Halima, mariée de force à l’âge de 15 ans et entraînée par cette organisation terroriste à commettre des attentats-suicides, avant de s’engager dans la prévention de l’extrémisme violent et de devenir le « symbole » de ce que peuvent faire les femmes pour la paix et la sécurité, révèle l’importance de doter la lutte antiterroriste d’une approche « genre » et droits de l’homme.

Dans les trois pays visités, les femmes rencontrées ont vigoureusement plaidé pour leur « inclusion, représentation et participation » aux processus de paix et de prise de décisions, et aux mécanismes de gouvernance, à tous les échelons de la société, alors qu’elles ne sont que 3% à prendre part à l’application de l’Accord de paix au Mali, par exemple.

Cette implication commence au niveau communautaire, où les femmes, lorsqu’elles se réapproprient l’Islam comme « instrument de paix », peuvent faire échec aux organisations terroristes, a argué la Vice-Secrétaire générale de l’ONU. Sur ce point, l’Envoyée spéciale de l’UA a cité en exemple la « stratégie innovante » des femmes leaders religieux au Tchad qui luttent contre la radicalisation des jeunes en investissant notamment dans l’éducation et la diffusion d’une interprétation inclusive du Coran.

Conscient du rôle et de la place qui reviennent aux femmes dans le développement et la gestion des crises, le Tchad, a affirmé son Ministre des affaires étrangères, M. Cherif Mahamat Zene, a entrepris d’importantes réformes pour éliminer d’ici à 2030 toutes les inégalités, les discriminations et les violences basées « sur le genre », avec un accent particulier sur l’éducation des filles et l’alphabétisation des adultes. 

Son intervention a toutefois révélé les difficultés auxquelles se heurtent les gouvernements de la région, leurs capacités étant rognées par les engagements militaires consentis dans le cadre de la Force conjointe du G5 Sahel.  Dans ce contexte, le Chef de la diplomatie tchadienne s’est félicité de la révision de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel à travers le plan d’appui, qui devrait associer les États concernés et tenir compte de leurs priorités.

Après des décennies d’assistance humanitaire et au développement, s’est expliqué le Ministre, « nous sommes au regret de constater que les résultats en termes d’impact sur les populations civiles sont très loin des attentes ».  Le Ministre Tchadien des affaires étrangères a donc annoncé que, tirant les leçons du passé, le Tchad entend désormais évaluer l’action des partenariats au développement par des « résultats concrets et quantifiables » en termes d’amélioration des conditions de vie des populations.

Le Ministre a espéré que cette mission tripartite ouvrira « une nouvelle page dans notre partenariat », loin de « l’approche compartimentée » mise en cause aujourd’hui par la déléguée du Royaume-Uni.

« La sécurité a un coût, et trop souvent il s’impose au détriment de la population », a reconnu la Vice-Secrétaire générale.  « Le Président du Niger, par exemple, nous a présenté son ‘‘plan de renaissance’’ pour répondre aux besoins de base de la population nationale, mais il a été entravé par la chute des prix de l’uranium et du pétrole, et les dépenses relatives au maintien de la sécurité dans le pays », a expliqué Mme Mohammed. 

De son côté, la représentante des Pays-Bas a porté à l’attention des membres du Conseil l’existence d’un conflit exacerbé par les changements climatiques dans le bassin du lac Tchad, celui qui oppose cultivateurs et éleveurs, et qui « aurait déjà tué plus de femmes que Boko Haram ».

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE

Déclarations

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a fait le compte rendu de la mission qu’elle a effectué ces derniers jours au Soudan du Sud, au Niger et au Tchad, la deuxième de la sorte, après celle de l’an dernier au plus haut niveau au Nigéria et en République démocratique du Congo (RDC).  Quatre problématiques se sont imposées à elle, ainsi qu’à l’Envoyée spéciale de l’Union africaine pour les femmes, la paix et la sécurité, Mme Bineta Diop, et à la Ministre des affaires étrangères de la Suède, Mme Margot Wallström.  La première, c’est la nécessité de réagir au coût élevé que les femmes et les filles paient dans ce conflit, une conclusion qui a paru particulièrement évidente au Soudan du Sud, où elles se sont confiées sur les violences auxquelles elles sont confrontées aussi bien dans les camps de personnes déplacées qu’en dehors.  Mais des femmes vivant dans les zones rurales du Tchad se sont également fait l’écho de l’insécurité causée par les agissements de Boko Haram, qui recourt de plus en plus souvent à des femmes pour commettre des attentats-suicides.

Par ailleurs, les membres de la délégation ont entendu des appels répétés pour qu’il y ait davantage d’inclusion, de représentation et de participation dans tous les secteurs de la société.  Les femmes veulent être parties prenantes aux processus de prise de décisions.  « Au Soudan du Sud, elles demandent que leurs voix soient prises en compte dans les processus de paix en cours à Djouba, Addis-Abeba et Khartoum.  Au Tchad et au Niger, elles plaident pour la mise en œuvre de la législation relative à un quota pour leur participation politique, et la reconnaissance de leur rôle dans l’économie et dans la prévention de l’extrémisme violent », a précisé la numéro 2 de l’ONU.  Une meilleure représentation au niveau communautaire est impérative, a-t-elle insisté.  Les femmes qui sont des leaders religieux au sein de leurs communautés respectives sont une voix puissante contre l’inégalité entre les sexes et les attaques visant les droits des femmes qui sont au cœur de la stratégie des organisations terroristes.  « En enseignant le Coran, elles adressent un message selon lequel le Coran et l’Islam sont à la fois pour les hommes et les femmes, et que c’est une religion de paix », a-t-elle lancé.

En outre, il faut absolument veiller à ce que les pays fragilisés aujourd’hui n’échouent demain.  Au Tchad et au Niger, les gouvernements font face à des défis qui leur ont été imposés de l’extérieur, notamment sur le plan sécuritaire, ou qui ne connaissent pas de frontières, comme les changements climatiques, et dont l’impact sur leurs économies est profond.  « Le Président du Niger, par exemple, nous a présenté son ‘‘plan de renaissance’’ pour répondre aux besoins de base de la population nationale, mais il a été entravé par la chute des prix de l’uranium et du pétrole, et les dépenses relatives au maintien de la sécurité dans le pays », a poursuivi Mme Mohammed.  « La sécurité a un coût, et trop souvent il s’impose au détriment de la population. » 

« Dans ce contexte, il est déterminant que nous nous mobilisions », a-t-elle plaidé, en particulier en augmentant l’aide au développement dans ces pays en difficulté.  Il s’agit d’une question de dignité humaine, mais aussi de paix et de sécurité, selon elle.  Enfin, au cours de son déplacement, la délégation a ressenti le besoin urgent d’opérationnaliser les politiques, cadres et programmes mis en place par la communauté internationale sur la question « femmes, paix et sécurité », en faisant notamment référence à la résolution 1325 (2000) et aux sept résolutions qui l’ont consolidée, ainsi qu’à la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.

Mme BINETA DIOP, Envoyée spéciale du Président de la Commission de l’Union africaine pour les femmes, la paix et la sécurité, a expliqué que la Mission tripartite de solidarité ONU-UA-Suède, à laquelle elle a participé au Soudan du Sud, au Tchad et au Niger, avait mis en exergue les réalités poignantes des femmes et des filles confrontées à la radicalisation et l’extrémisme violent.  Rappelant que les régions du lac Tchad et du Sahel sont frappées de plein fouet par les extrémistes de Boko Haram et d’autres groupes radicalisés, elle a évoqué la mobilisation des pays régionaux pour combattre ce mal qui frappe aveuglément au-delà des frontières.

Cependant, les investissements faits en matière de sécurité par les États qui font partie des pays aux plus faibles revenus sur le plan mondial se font au détriment des investissements dans les structures sociales, a-t-elle souligné.  Illustrant son propos, elle a remarqué que les succès enregistrés contre Boko Haram avaient permis le retour de nombreux jeunes dans la région du lac Tchad, mais ces jeunes y sont confrontés au manque d’offres d’emploi et se sentent délaissés, constituant ainsi à nouveau des « proies faciles pour les groupes radicalisés ».

Au Niger, elle a pu constater les effets dévastateurs de la pauvreté et le manque d’opportunité des familles, et leur impact sur les jeunes, en particulier les jeunes femmes.  Elle a été particulièrement touchée par l’importance de la pratique des mariages précoces dans cette région, avec pour conséquence des corps complètement meurtris par des fistules, et des jeunes filles ostracisées, stigmatisées et abandonnées à elles-mêmes.  Dans la seule clinique disponible, il n’y avait qu’un seul médecin pour réparer les corps de ces jeunes filles, a regretté Mme Diop.  Tout en reconnaissant que cette pratique existait avant l’essor de la radicalisation, elle demeure convaincue que son exacerbation s’explique par la pauvreté des familles déplacées par les conflits qui les pousse à donner leurs filles en mariage de façon précoce.

À côté de cette réalité troublante, la Mission tripartite a également pu apprécier la résilience des femmes et leur détermination à contribuer à la recherche de solutions.  À titre d’exemple, elle a cité la stratégie innovatrice des femmes leaders religieux au Tchad qui luttent contre la radicalisation des jeunes en investissant notamment dans l’éducation et la transmission d’une interprétation inclusive du Coran.  Au Niger, les femmes utilisent le plan d’action national sur la résolution 1325 pour se faire entendre dans les processus de prise de décisions sur la paix, la sécurité et le développement. 

Les femmes sont certes victimes des violences liées aux conflits, mais elles sont aussi des moteurs pour des initiatives visant à répondre aux défis posés, a estimé Mme Diop.  Elle a souligné que les réponses aux défis sécuritaires de cette région passent par des investissements dans le développement de l’être humain pour éviter la radicalisation et l’extrémisme qui frappent le Sahel.  Les femmes ont souligné l’importance des investissements dans l’éducation et la nécessité de renforcer les capacités des femmes et des jeunes avec la création d’emplois.  Elles ont appelé à une présence plus soutenue de l’État et de la communauté internationale pour subvenir aux besoins de base comme les soins, l’eau, la nourriture, dont le manque est utilisé par les groupes extrémistes pour gagner certaines franges de la société à leur cause.

Mme Diop a appelé la communauté internationale à soutenir les efforts du Tchad et du Niger dans la lutte contre l’extrémisme violent, en partie pour éviter que les investissements sur le plan sécuritaire ne se fassent au détriment des besoins de la population.  Les initiatives comme la plateforme ministérielle de coordination des stratégies pour le Sahel permettent de mobiliser des ressources et définir les priorités régionales.  L’Union africaine a également défini une stratégie pour la région du Sahel qui offre un cadre inclusif pour une action coordonnée de l’Union africaine.

Mais, pour Mme Diop, la bataille sécuritaire passe aussi impérativement par des investissements permettant de répondre aux besoins des populations de la région, notamment les femmes et les jeunes.  La prévention s’impose, notamment par des investissements dans l’éducation, la gestion des ressources naturelles, la création d’emplois, la protection de la femme et de la jeune fille et la promotion de leur rôle de leadership dans la recherche de la paix.  Pour Mme Diop, les femmes sont des partenaires de choix et elles doivent être armées pour pouvoir dire non au mariage précoce et à l’extrémisme.  « Elles doivent pouvoir lire le Coran et transmettre à leurs enfants le message de paix qui en découle. »

Mme MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a rendu compte de la mission qu’elle a effectuée au Sahel aux côtés de la Vice-Secrétaire générale de l’ONU et de l’Envoyée spéciale de l’Union africaine pour les femmes, la paix et la sécurité, Mme Bineta Diop.  Les pays que j’ai visités, a-t-elle constaté, oscillent « entre espoir et désespoir ».  Espoir, parce que le Sahel est béni par une abondance de ressources humaines, culturelles et naturelles, dont l’énergie solaire et son spectaculaire potentiel de croissance, et par la population la plus jeune au monde, 64,5% des habitants ayant moins de 25 ans.  La Ministre a aussi rencontré une société civile « vibrante et déterminée ». 

Mais elle a vu du désespoir, compte tenu du sous-développement chronique, du terrorisme et de l’extrémisme violent, du peu de respect des droits de l’homme et des effets négatifs du changement climatique.  Quelque 2,4 millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire et l’insécurité croissante a aggravé les vulnérabilités.  Les budgets nationaux sont presqu’en totalité consacrés à la sécurité, au détriment de l’éducation et de la santé.  La Ministre, qui a attiré l’attention sur l’assèchement du lac Tchad et ses conséquences socioéconomiques, s’est réjouie qu’au Niger comme au Tchad, elle a vu des femmes rassembler leur force pour s’attaquer ensemble à leurs problèmes, y compris le manque d’accès à la santé sexuelle et reproductive et aux services sociaux de base. 

La mission conjointe, a souligné la Ministre, portait sur tous les aspects du travail des Nations Unies: la paix et la sécurité, les droits de l’homme, l’assistance humanitaire et le développement.  La mission a donc souligné l’importance de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et de son plan d’appui pour réaliser les objectifs de développement durable et l’Agenda 2063 de l’Union africaine.  L’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes sont d’ailleurs l’une des cinq priorités de la Stratégie, a rappelé la Ministre.

Prises ensemble, ces questions ne concernent pas seulement les femmes.  Ce sont des questions de paix et de sécurité, a souligné la Ministre.  Évoquant la jeune Halima, mariée de force à 15 ans et formée par Boko Haram aux attentats-suicides, avant de s’engager dans la prévention de l’extrémisme violent et de devenir le symbole de ce que peuvent faire les femmes pour la paix et la sécurité, la Ministre a estimé que la lutte contre le terrorisme doit adopter une approche « genre » et des droits de l’homme, qu’il s’agisse de la prévention de la radicalisation, des opérations antiterroristes ou de l’appui aux victimes. 

Que peut-on faire de plus, à la veille du vingtième anniversaire de la résolution 1325? La Ministre a répondu en lançant quelques défis au système des Nations Unies et à tous les États Membres pour que d’ici à 2020, les opérations de maintien de la paix et les missions politiques exécutent avec efficacité le mandat « femmes, paix et sécurité ».  Le Conseil de sécurité, a-t-elle dit, doit faire entendre la voix des femmes à la table des négociations de paix mais aussi dans cette salle.  Les mandats des missions doivent inclure une perspective « femmes, paix et sécurité » et être bien financés.  La perspective « genre » doit systématiquement être incluse dans les rapports et le suivi des missions.  La Ministre a annoncé qu’à l’occasion du débat annuel sur la résolution 1325, la Suède compte organiser un forum de la société civile. 

M.  GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est préoccupé du sort des femmes et des filles du Sahel qui sont particulièrement touchées par l’insécurité alimentaire, la pauvreté, les conflits armés, l’extrémisme violent, la discrimination entre les sexes et les violences sexuelles.  Cette situation, a-t-il dit, exige une stratégie intégrale et coordonnée qui s’attaque à ses causes profondes et promeuve l’autonomisation de la femme, l’égalité de genre et l’accès à la justice.  Le Pérou est convaincu que la participation des femmes à la vie politique et aux prises de décisions est cruciale pour la résolution des conflits et le maintien de la paix.  Cela passe par l’éducation, la création d’emplois et la lutte contre l’impunité, mais il faut pour cela que les victimes aient confiance dans les institutions nationales. 

Le représentant a souhaité que le Conseil de sécurité reste uni sur la question du développement progressif et de la mise en œuvre du programme sur les femmes, la paix et la sécurité.  Il a aussi appelé à renforcer le travail en commun des différentes organisations de femmes avec le Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité, que le Pérou préside conjointement avec la Suède.  Autre élément important pour la délégation, tenir compte de la perspective genre dans l’exécution des activités de la Force conjointe du G5 Sahel.  De même, dans le cadre de la réforme des opérations de maintien de la paix, il a conseillé de veiller à la compétence des Casques bleus en matière de protection des droits de l’homme pour les femmes et les filles.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a salué l’initiative de l’UA visant à rendre progressivement transversale la problématique du genre dans l’architecture de paix et de sécurité.  Il a insisté sur le fait qu’il faut traduire dans les actes les engagements pris en faveur des femmes d’Afrique, plaidant notamment pour un environnement protecteur qui va renforcer la sécurité des femmes et leur offrir la justice, dont des services appropriés pour les survivantes des violences sexuelles liées aux conflits.  Le Kazakhstan souhaite également voir le respect de l’approche genre dans toutes les composantes de la Force conjointe du G5 Sahel, conformément à la résolution 2391 (2017).  Le représentant a relevé que beaucoup reste à faire pour la mise en œuvre des recommandations des Nations Unies relatives à l’inclusion des femmes dans les pourparlers de paix afin de résoudre la crise du Sahel.  Les processus de prise de décisions et la vie politique au Sahel doivent comprendre 30% de femmes et 15% des budgets nationaux doivent être alloués au développement et à la consolidation de la paix, dont la promotion de l’égalité des genres.

Le délégué a relevé que le financement des initiatives relatives aux triptyque femmes-paix-sécurité reste insuffisant.  Il faut fournir les fonds nécessaires pour veiller à ce que le maintien de la paix et les missions politiques aient suffisamment d’expertise, d’autorité et de capacités en matière de genre.  Combler le fossé du financement peut se faire par de plus grandes réformes, a-t-il suggéré, en proposant aussi une meilleure coordination des stratégies au sein du système onusien et une collaboration renforcée avec des partenaires externes.  De plus, une meilleure collecte des données et de meilleurs rapports sont tout aussi importants pour le succès de la promotion de l’initiative femme, paix et sécurité.  Il faut donc davantage de données nationales ventilées par sexe sur la mise en œuvre des divers engagements.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a attiré l’attention sur trois questions d’importance relatives aux femmes, à la paix et à la sécurité au Sahel: les implications sécuritaires des changements climatiques sur les femmes; les défis posés par l’étendue des conflits entre cultivateurs et éleveurs; l’importance de la participation des femmes dans les processus de prise de décisions.  Les changements climatiques affectent de manière disproportionnée les femmes au Sahel, que ce soit sur le plan sécuritaire, ou sur celui de la raréfaction des moyens de subsistance.  Par ailleurs, a poursuivi la délégation, dans la région du lac Tchad et plus largement au Sahel, femmes et filles sont les premières victimes du conflit entre cultivateurs et éleveurs, exacerbé par les changements climatiques: des veuves sont chassées de leurs terres; des femmes et des filles deviennent vulnérables aux assauts sexuels et à la pression économique.  « Ce conflit aurait déjà tué plus de femmes que Boko Haram », a affirmé la représentante.  Elle s’est en conclusion prononcée en faveur de l’augmentation du nombre de femmes dans la mise en œuvre de l’accord de paix au Mali, où elles ne représentent que 3%, « un chiffre scandaleusement faible ».

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a remercié la Ministre des affaires étrangères de la Suède pour l’impulsion qu’elle a donnée aux travaux du Conseil de sécurité pour qu’il « tourne la page de l’approche compartimentée qu’il a eue jusque-là ».  Elle a encouragé des visites plus fréquentes de cette nature.  La participation des femmes aux processus de paix et de prise de décisions est essentielle, a-t-elle dit, se disant particulièrement marquée par le message des femmes rencontrées lors de cette visite tripartite notamment leur volonté d’occuper des postes politiques pour être mieux représentées.  La question de l’autonomisation économique des femmes et l’exercice de leurs droits sont autant d’éléments à garantir pour permettre aux pays concernés de prospérer.  Pour la représentante, le lien entre sécurité et développement est réel et les femmes doivent participer tant à la politique qu’à l’économie de leurs pays. 

Le Royaume-Uni envisage de renforcer sa présence dans la région du Sahel, a annoncé la représentante, précisant qu’il s’agit, entre autres, d’aider ces pays à progresser sur le front de l’égalité femmes-hommes.  Il s’agit aussi d’aider les déplacés et les réfugiés et de contribuer à l’amélioration des services de planification familiale et des programmes contre les changements climatiques.  Face à la déscolarisation de millions d’enfants, due, en partie, aux groupes terroristes, avec un impact disproportionné sur les filles, également victimes des mariages précoces, la représentante a souligné que l’éducation est un domaine prioritaire pour son gouvernement.  Le Royaume-Uni contribue activement au Fonds « Education cannot wait ». 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a rappelé que malgré les progrès dans la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), les femmes sont toujours victimes de l’insécurité qui règne dans plusieurs régions du monde, dont le Sahel.  Il a dit placer beaucoup d’espoirs dans la Force conjointe du G5 Sahel et a fermement appuyé la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, s’agissant en particulier de la lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent.  Si les débats annuels du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité nous permettent de suivre les progrès réalisés dans la mise en œuvre des résolutions pertinentes, il est nécessaire de tenir compte de la spécificité de chaque situation, a estimé le représentant, soulignant que la responsabilité première de la protection des femmes incombe aux gouvernements. 

Mme Nikki R HALEY (États-Unis) a expliqué que tout au long de sa carrière elle a cherché à encourager les femmes à faire entendre leur voix.  Reconnaissant que cette approche soit également celle des Nations Unies, elle a rappelé que pour ce qui est de la région du Sahel, le Conseil de sécurité a dit à plusieurs reprises que la seule solution est une approche globale, incluant l’autonomisation des femmes.  Lorsque les femmes participent à la consolidation de la paix, les accords comprennent les priorités sociales, a-t-elle souligné.  En autonomisant les femmes, on réduit les besoins de maintien de la paix et on promeut le bien-être, l’éducation, la santé, a affirmé la représentante, ajoutant « tous ces facteurs se conjuguent ».

Les États-Unis, a-t-elle poursuivi, sont déterminés à autonomiser les femmes et veillent à ce que l’aide américaine leur bénéficie directement « pour que ces pionnières, ces femmes extraordinaires qui changent le visage de leurs sociétés, puissent s’épanouir ».  Les autres investissements américains, par exemple, dans les économies émergentes visent à élargir l’accès des femmes aux capitaux et au microcrédit, a encore expliqué la représentante.  S’agissant de la lutte contre l’extrémisme violent, elle a, à son tour, prôné le renforcement de la présence des femmes dans les processus de prise de décisions.  « Tous ces efforts sont liés par un fil rouge: autonomiser les femmes conduit à des sociétés plus prospères et plus pacifiques ».

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a attiré l’attention sur le sort des populations au Sahel, dont certaines vivent dans des zones privées des services de base en raison des changements climatiques et de l’insécurité.  Relevant que les femmes sont les premières victimes de ces fléaux, il s’est élevé contre l’utilisation de plus en plus fréquente par Boko Haram des femmes pour perpétrer des attentats-suicides ou des attaques terroristes.  Pour relever de tels défis, le représentant a rappelé à la communauté internationale la nécessité de redoubler d’efforts dans la mise en œuvre des instruments pertinents que sont le Plan d’action de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur les femmes, la paix et la sécurité, la Force conjointe du G5 Sahel, la Vision 2020 de la CEDEAO, l’Agenda 2063 de l’Union africaine et le Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

M. YAO SHAOJUN (Chine)a salué la visite conjointe ONU-Union africaine-Suède au Sahel, une région qui connaît de nombreux défis politiques et économiques avec un impact négatif sur la paix et la sécurité.  Le représentant a mis en avant le rôle des organisations régionales et les processus nationaux qu’il faut aider, en tenant compte de l’opinion des femmes.  La communauté internationale doit aussi investir dans le renforcement des capacités antiterroristes nationales.  Après s’être félicité du plan de suivi de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, le représentant a insisté sur la coopération de la communauté internationale avec les mécanismes régionaux et infrarégionaux ».  Il faut, s’est-il expliqué, respecter la souveraineté de l’Afrique et l’aider à gérer ses crises, par un soutien à la Force conjointe G5 Sahel.  C’est ce que fait la Chine, a conclu le représentant.

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a assuré que de nombreux pays d’Afrique ont pris des mesures pour développer des plans nationaux relatifs à la résolution 1325 (2000) sur les femmes, la paix et la sécurité.  Pour l’Éthiopie, la protection des femmes du Sahel passe par la gestion des causes profondes des conflits.  La déléguée a donc proposé la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent et des actions pour faire face aux impacts négatifs des changements climatiques.  Elle a salué le Plan des Nations Unies pour le soutien au Sahel lancé récemment à Nouakchott, arguant que cette évolution, couplée au G5 Sahel, et à la Stratégie intégrée des Nations Unies pourra produire des résultats durables, y compris l’amélioration de la vie des plus vulnérables, dont les femmes et les enfants. 

Mme Guadey a salué la coopération entre l’ONU et l’UA, laquelle s’est manifestée à travers la visite conjointe au Sahel.  Elle a estimé que cette collaboration pourrait par exemple être axée sur la participation active des femmes et groupes de femmes aux processus de paix, à la prévention des conflits et à la protection des droits de la femme en temps de conflit ou dans les situations post conflit.  Selon elle, il faudrait explorer la possibilité de mener ce genre de visite conjointe dans d’autres régions d’Afrique affectées par des conflits et qui font partie du programme de travail du Conseil de sécurité.  Mme Guadey a également proposé la possibilité d’utiliser les bons offices de l’Envoyée spéciale du Président de la Commission de l’Union africaine pour les femmes, la paix et la sécurité, afin de faire avancer cette problématique au niveau du continent.

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a relevé que la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) continue de se heurter à des difficultés, comme en témoigne la situation au Sahel, région où les femmes sont vulnérables aux problèmes d’insécurité posés par les organisations terroristes et la criminalité transnationale organisée.  Dans le bassin du lac Tchad, les « pratiques » de Boko Haram sont « intolérables » et doivent être punies, a tranché la représentante, en apportant son soutien à l’approche holistique privilégiée par la Force conjointe du G5 Sahel.  Par ailleurs, au Soudan du Sud, le rôle joué par l’Autorité intergouvernementale du développement (IGAD), dans le cadre du Forum de revitalisation a permis de donner aux femmes de la société civile un rôle dans le processus de paix en cours.  Tant que celles-ci ne seront pas des acteurs de premier plan dans ces processus, la paix ne sera pas garantie, a prévenu la délégation.

Également au nom de l’Allemagne, M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a estimé que la visite conjointe de la Vice-Secrétaire générale et de l’Envoyée spéciale de l’Union africaine est un exemple concret de la mise en œuvre de l’agenda « femmes, paix et sécurité ».  Seule une action combinée sur les plans politiques, sécuritaire, du développement et des droits des femmes est à même de favoriser une stabilisation durable du Sahel, a estimé le représentant, ajoutant que la France et l’Allemagne sont résolument engagées en faveur de la paix et la sécurité dans cette région.  À cet égard, il a évoqué l’engagement de la France à travers son rôle de médiation internationale, aux côtés de la MINUSMA, en soutien à la mise en œuvre de l’Accord de paix au Mali.  Sur le plan sécuritaire, le représentant a rappelé le déploiement de l’opération Barkhane ainsi que le soutien apporté à la montée en puissance de la Force conjointe G5 Sahel.  De son côté, l’Allemagne apporte une forte contribution à la MINUSMA et une aide au développement et humanitaire.  Cet engagement pour la paix et la sécurité au Sahel est essentiel pour lutter efficacement contre les violences auxquelles les femmes sont trop souvent exposées dans la région, a expliqué M. Delattre.

L’Alliance pour le Sahel, qui a été lancée en juillet 2017 par la France et l’Allemagne, en partenariat avec les principaux bailleurs de fonds et les pays de la région, entend favoriser une aide plus rapide, plus coordonnée et mieux ciblée en faveur des groupes défavorisés, y compris les femmes.  Le représentant a précisé que cette Alliance s’inscrit dans le cadre plus général fixé par la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.

Le représentant a reconnu que la participation des femmes aux processus de paix dans la région « reste encore insuffisante ».  Au Mali, par exemple, la résolution durable de la crise dépend d’une implication de l’ensemble de la société malienne, notamment des femmes, qui doivent être impliquées au sein du Gouvernement mais aussi du Parlement et au niveau local.  Elles doivent participer à la mise en œuvre de l’Accord de paix.

La France et l’Allemagne soutiennent l’initiative prise par l’Union africaine d’établir un Réseau de femmes leaders africaines et encouragent tous les États Membres à s’associer à cette initiative, par exemple en devenant membre du Groupe des Amis de ce Réseau, qui est coprésidé par le Ghana et l’Allemagne.  La France et l’Allemagne saluent également l’engagement de l’Organisation internationale de la Francophonie et ses efforts pour soutenir les initiatives des femmes francophones, a conclu le représentant. 

M. ILAHIRI ALCIDE DJÉDJÉ (Côte d’Ivoire) a indiqué que les nouveaux défis sécuritaires tels que la montée du terrorisme, l’extrémisme violent, la radicalisation et les changements climatiques ont un impact négatif sur la capacité des femmes à jouer pleinement leur rôle dans le domaine de la paix et de la sécurité.  Il a rappelé que face aux défis des femmes du Sahel, le Conseil de sécurité avait adopté la résolution 2349 (2017) qui intègre la triple dimension sécuritaire, humanitaire et de développement à long terme, s’attaquant aux causes profondes de la crise que sont, notamment, la pauvreté, le sous-développement, les inégalités ou encore la détérioration de l’environnement.  Il a aussi salué le lancement par les Nations Unies, depuis le 30 juin 2018, d’un plan d’appui intitulé « Sahel, terre d’opportunités », en vue de promouvoir une paix durable et une croissance inclusive dans la région du Sahel, ainsi que pour autonomiser les femmes et les jeunes.

Au plan sous-régional, M. Djédjé a rappelé que le triptyque « femmes, paix et sécurité » bénéficie d’une attention particulière du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel qui travaille en étroite collaboration avec la CEDEAO, notamment sur la promotion de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) et des résolutions subséquentes.  Il a également plaidé pour que les pays du bassin du lac Tchad et la communauté internationale veillent à la protection des femmes qui demeurent le plus souvent les premières victimes des conflits.  Dans cet élan, ils doivent garantir leur participation dans tous les efforts de consolidation de la paix, étant entendu que la participation des femmes aux processus de paix permet d’en garantir la pérennité et l’inclusivité.  La Côte d’Ivoire salue également la création du Réseau des femmes leaders africaines en 2017, une structure qui vise à accroître la contribution des femmes à la stabilisation sur le continent, dans l’optique de la réalisation de l’Agenda 2063 de l’Union africaine et des objectifs de développement durable.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a salué le fait que les femmes constituent 22% des effectifs des Casques bleus de la MINUSMA.  Il a condamné les opérations criminelles de Boko Haram et de Daech au Sahel, dont les femmes sont les premières victimes.  Le représentant a apporté son soutien à la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, qui fait de la participation des femmes aux processus de paix et électoraux une priorité de son mandat.   Il a estimé qu’il y a une chance de rétablir la paix dans la région, et qu’elle passe par une synergie entre l’Union africaine et l’ONU.

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) a insisté sur la nécessité de mettre pleinement en œuvre la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et de mobiliser plus de ressources en sa faveur.  Le représentant a en outre estimé que la résolution 2349 (2017) sur le bassin du lac Tchad représente un pas important vers l’inclusion des femmes dans la paix et la sécurité de la région ainsi que l’Appel à agir, adopté lors de la Conférence de haut niveau sur les femmes, la violence et le terrorisme en Afrique, organisée à Dakar en avril 2018.  Le représentant a encouragé les Nations Unies et le Conseil de sécurité, en particulier, à promouvoir le rôle des femmes en tant qu’agents du changement.  Il a d’ailleurs appelé à l’évaluation régulière du « cadre normatif » mis en place par le Conseil de sécurité, au cours de ces 18 derniers mois.  Il a insisté sur des mesures visant à favoriser la participation des femmes aux élections démocratiques, aux processus de prise de décisions et aux négociations de paix.  La dimension « genre » et la participation des femmes doivent être dûment incluses dans les mécanismes d’alerte rapide, de médiation et de règlement de conflits, a insisté le représentant. 

M. MAHAMAT ZENE CHERIF, Ministre des affaires étrangères, de l’intégration africaine, de la coopération internationale et de la diaspora du Tchad, a souligné que la visite de terrain dans une région où se concentrent des réfugiés et des déplacés internes -en majorité des femmes et des enfants- a permis à la délégation conjointe ONU-UA de toucher du doigt les conséquences dramatiques de l’effet conjugué des attaques terroristes et des changements climatiques sur les populations vulnérables.  Les conflits et crises autour du Tchad ont entraîné notamment l’afflux de réfugiés et de déplacés estimés à plus de 700 000 sur l’ensemble du territoire, a-t-il indiqué, en notant que « des femmes courageuses avec un esprit de résilience et une forte détermination bravent chaque jour tous les obstacles pour assurer la survie de leur famille ». 

Conscient du rôle et de la place des femmes dans le processus de développement et dans la gestion des crises, le Gouvernement tchadien, a affirmé le Ministre, a entrepris d’importantes réformes pour éliminer d’ici à 2030 toutes les inégalités, les discriminations et les violences basées sur le genre.  Le Gouvernement met un accent particulier sur l’éducation des filles et l’alphabétisation des adultes sans lesquelles la compréhension de la portée des réformes sera limitée. 

Mais les difficultés économiques auxquelles fait face le Tchad limitent ses capacités d’action déjà fortement réduites par les engagements militaires dans la lutte contre le terrorisme dans le bassin du lac Tchad et dans le Sahel.  Le Ministre a donc lancé un appel à tous les partenaires au développement dont les Nations Unies pour un changement d’approche en vue de passer de l’aide humanitaire « classique » à des efforts conjugués axés sur le développement durable et la résilience.  Il s’est donc félicité de la vision consistant à revoir la Stratégie des Nations Unies pour le Sahel à travers le plan d’appui et souligné la nécessité d’impliquer fortement les pays concernés et de tenir compte de leurs priorités. 

Après des décennies d’assistance humanitaire et au développement, s’est expliqué le Ministre, « nous sommes au regret de constater que les résultats en termes d’impact sur les populations civiles sont très loin des attentes ».  Il a donc annoncé que, tirant les leçons du passé, le Tchad entend désormais évaluer l’action des partenariats au développement par des résultats concrets et quantifiables en termes d’amélioration des conditions de vie des populations. Le Ministre a espéré que la visite de la Vice-Secrétaire générale de l’ONU ouvrira « une nouvelle page dans notre partenariat ».

Reprenant la parole, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a salué la réaction encourageante des membres du Conseil de sécurité à la visite conjointe qu’elle a menée avec l’Union africaine et la Suède.  S’adressant au Ministre tchadien, elle a reconnu l’importance de remanier la Stratégie intégrée, un élément qui ne saurait être sous-estimé.  Elle a insisté sur une action conjointe assortie d’investissements suffisants.  Il s’agit en effet d’intervenir dans des pays fragilisés et de se retrouver parfois dans une situation où il n’y a qu’une clinique débordée.  Le Plan en 8 points pour le Niger, a rappelé la Vice-Secrétaire générale, était suffisamment financé mais le pays a dû gérer la crise créée par Boko Haram qui, il faut le reconnaître, « devient une alternative à ce que les gouvernements n’arrivent pas à offrir à leur peuple ».  Il faut absolument inverser cette tendance, a prévenu la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, qui a appelé à soutenir l’Initiative pour le bassin du lac Tchad et le Réseau des femmes leaders africaines.  Il faut agir maintenant, a pressé la Vice-Secrétaire générale, confiante que la réforme du système des Nations Unies pour le développement mènera à une meilleure cohésion des efforts.  Le cadre Union africaine-Nations Unies pour la paix, la sécurité et le développement s’inscrit précisément dans cette optique, a-t-elle souligné. 

À son tour, l’Envoyée spéciale de l’Union africaine pour les femmes, la paix et la sécurité s’est faite l’écho des préoccupations des Sud-Soudanaises qui veulent faire partie du processus de paix et des mécanismes nationaux de gouvernance.  Mon bureau, a-t-elle indiqué, soutient actuellement 22 plans nationaux.  Il faudrait qu’au moins la moitié des pays africains se dotent d’un tel plan à l’avenir et que leur mise en œuvre soit évaluée à l’échelle du continent.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Pour son édition 2018, le Forum politique de haut niveau pour le développement durable de l’ECOSOC commence par examiner les progrès et les retards

Forum politique de haut niveau, Session 2018,
1re, 2e & 3e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6935

Pour son édition 2018, le Forum politique de haut niveau pour le développement durable de l’ECOSOC commence par examiner les progrès et les retards

La Réunion du Forum politique de haut niveau pour le développement durable organisée sous les auspices du Conseil économique et social (ECOSOC), dont les travaux se dérouleront sur huit journées, a ouvert ses portes ce matin sur des appels à éliminer les obstacles qui entravent la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Elle s’achèvera le 19 juillet par l’adoption d’une déclaration ministérielle. 

Les progrès dans la mise en œuvre du Programme 2030, les données, l’eau et l’assainissement, telles étaient les questions examinées aujourd’hui au cours de trois tables rondes.

La Présidente de l’ECOSOC, Mme Marie Chatardová, a annoncé la venue d’au moins 80 ministres et vice-ministres, ainsi que 2 500 acteurs non étatiques participant aux séances officielles comme aux manifestations parallèles pour lesquelles le Forum a reçu 600 demandes.  « La présence de tous ces participants montre le rôle fédérateur des objectifs de développement durable. »

Si l’on veut transformer le monde, il faut mobiliser les communautés, les organisations, les entreprises et les populations, a, de fait, reconnu Mme Chatardová en faisant le lien avec le thème du Forum cette année: « Transformer nos sociétés pour les rendre viables et résilientes. »

Les discours d’ouverture ont souligné les progrès réalisés depuis 2015, année de naissance des objectifs de développement durable.  D’après le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. Liu Zhenmin, les États Membres ont travaillé d’arrache-pied pour traduire cette « vision transformative » du monde en « résultats concrets ».  La proportion des ménages vivant en dessous du seuil d’extrême pauvreté, notamment, a diminué de manière significative, passant de 27% en 2000 à 9% en 2017.  De plus, la mortalité maternelle s’est beaucoup réduite depuis 2000, notamment en Afrique subsaharienne où elle a diminué de 35%.

Mais les intervenants, comme le Secrétaire général dans son rapport*, ont prévenu qu’il reste du chemin à faire.  La faim, par exemple, a augmenté récemment pour la première fois en 10 ans.  M. Liu a déploré que 38 millions de personnes souffrant d’insécurité alimentaire se soient ajoutées aux 815 millions comptabilisées en 2015.  En outre, 3 personnes sur 10 n’ont pas accès à une eau sûre, 892 millions de personnes pas accès à des toilettes et 4 enfants sur 10 souffrent de diarrhée en Afrique subsaharienne.  Ce qui a fait dire aux participants à la table ronde de l’après-midi qu’il fallait s’attaquer à cette crise hydrique et en parler davantage à l’ONU.  « Trois heures tous les quatre ans », ce n’est pas assez, a déclaré la déléguée de la France. 

Mesurer les progrès et les retards est considéré comme un élément crucial de la réalisation du Programme 2030, raison pour laquelle M. Liu a insisté sur le renforcement des données et des systèmes statistiques en constatant des progrès trop lents depuis 2015.  Un propos tempéré par le Chef de la Commission statistique des Nations Unies et Statisticien en chef du Kenya, M. Zachary Chege, pour qui on se précipite un peu trop en mesurant déjà les progrès dans la réalisation des objectifs au lieu de se focaliser d’abord sur leur mise en œuvre.

De toutes les façons, il faudra une quantité énorme de données aux niveaux national et mondial pour évaluer le niveau de réalisation des objectifs, a prévenu la statisticienne en chef des États-Unis, Mme Nancy Potok.  Quantité et qualité obligent, la cofondatrice d’Open Data Watch, Mme Shaida Badiee, a chiffré à 200 millions de dollars par an les besoins de financement pour garantir la collecte de données fiables dans le monde.

Pour sa part, M. Alex Steffen, cofondateur du magazine en ligne www.worldchanging.com, a plaidé pour remplacer l’économie du passé par une nouvelle économie qui permettra la réalisation des objectifs de développement durable.  Une économie où les entreprises payent des compensations lorsqu’elles nuisent au développement durable, a prôné l’Envoyée spéciale du Secrétaire général sur le handicap et l’accessibilité, Mme María Soledad Cisternas Reyes.  Une économie où les entreprises pollueuses soient redevables d’une taxe carbone, a renchéri M. Jeffrey Sachs, Directeur du Centre pour le développement durable de Columbia University.

M. Sachs a jeté la pierre en particulier sur les industries, notamment pétrolière, qui défendent des intérêts particuliers.  Il a aussi lancé un appel aux 2 208 milliardaires que compte le monde pour qu’ils consacrent seulement 1% de leur fortune au développement.  « J’appelle M. Mark Zuckerberg à investir personnellement dans ces objectifs », a lancé M. Sachs.

Pendant cette session, les six objectifs suivants se verront consacrer chacun une séance entière: Eau propre et assainissement (6), Énergie propre et d’un coût abordable (7), Villes et communautés durales (11), Consommation et production responsables (12), Vie terrestre (15) et Partenariats pour la réalisation des objectifs (17).

En outre, le but ultime du Programme 2030 étant de « ne laisser personne de côté », des séances du Forum seront consacrées aux pays dans des situations particulières, aux sociétés résilientes, ainsi qu’au secteur science-technologie-innovation.  Les leçons tirées des expériences régionales et les perspectives des grands groupes de la société seront également mises à l’honneur.  Pour ce qui est de la réunion ministérielle de la semaine prochaine, elle sera consacrée aux examens nationaux volontaires de 47 pays. 

La Réunion du Forum politique de haut niveau pour le développement durable se poursuivra demain, mardi 10 juillet, à 9 heures.

* E/2018/64

FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE ORGANISÉ SOUS LES AUSPICES DU CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Déclarations

La Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), Mme MARIE CHATARDOVÁ (République tchèque) a d’abord invité les participants au Forum à visionner une vidéo qui a mis en exergue les travaux des huit jours de réunion sur la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Ce Forum, a ajouté la Présidente, est une occasion de jeter un regard sur les réalisations obtenues dans la poursuite des objectifs de développement durable.  « Nous sommes plus proches aujourd’hui de la réalisation de ces objectifs », s’est-elle réjouie.

« Votre présence confirme que l’engagement pour les objectifs est vivant et se porte bien. »  La Présidente a signalé que plus de 80 ministres et vice-ministres devaient se réunir dans le cadre du Forum, avec en outre 600 demandes de manifestations parallèles qui ont été reçues.  En ce qui concerne les acteurs non étatiques, plus de 2 500 d’entre eux se sont inscrits pour participer au Forum, a-t-elle précisé en soulignant que leur présence montre le rôle fédérateur des objectifs de développement durable.

Selon Mme Chatardová, ces objectifs sont ambitieux car ils n’appellent pas seulement le changement mais visent une transformation du monde.  Ils exigent plus que de l’implication et de la bonne volonté de la part des gouvernements.  Elle a souligné que les engagements pris par les dirigeants mondiaux en septembre 2015 engageaient les sociétés dans leur ensemble.  Si l’on veut transformer le monde, il faut mobiliser les communautés, les organisations, les entreprises et les populations, a-t-elle martelé.

Pour elle, « les objectifs de développement durable doivent nous inspirer à viser haut ».  Ils doivent être les critères utilisés par les populations et les institutions pour mesurer la réussite de leurs activités.  Ils devraient être le programme sur la base duquel les populations tiennent les gouvernements responsables.

« Comment faire en sorte que les populations aient leur mot à dire dans les décisions qui ont des conséquences sur leurs vies: tel est le thème de mon mandat à la présidence de l’ECOSOC », a rappelé Mme Chatardová.  Elle a expliqué que l’ECOSOC avait exploré comment la société civile, le secteur privé, les universités et les autres secteurs pouvaient aider à faire avancer la réalisation des objectifs de développement durable.

M. Milan Kundera, un écrivain tchèque, a écrit que « la pire des choses n’est pas que le monde soit privé de liberté, mais que les gens désapprennent leur liberté ».  Trop de gens ont désappris qu’ils ont le droit d’être engagés en politique et dans les processus de prise de décisions, a constaté la Présidente avant de rappeler le seizième objectif de développement durable qui vise à rendre la prise de décisions participative et inclusive.  C’est la raison pour laquelle les gouvernements, les organisations non gouvernementales, les grands groupes et les autres parties prenantes sont les bienvenus à ce Forum, a lancé la Présidente de l’ECOSOC.

Elle a rappelé que ce Forum est le fruit d’un processus préparatoire riche.  Cette année a encore montré que le Programme 2030 bénéficie d’une forte appropriation au niveau régional, a-t-elle dit en citant les cinq forums régionaux organisés par les commissions régionales des Nations Unies et les gouvernements hôtes.  Elle a aussi parlé des autres réunions de préparation avant d’annoncer que durant les huit prochains jours, les participants auront l’occasion de partager leurs expériences et de réfléchir sur les défis et les obstacles sur la route des objectifs de développement durable.

« Le rapport du Secrétaire général nous apprend que nous avons encore du chemin à faire pour atteindre les objectifs », a averti la Présidente en expliquant que les six objectifs choisis pour être examinés par ce Forum se verraient consacrer chacun une séance entière.  Le thème de cette année, a rappelé Mme Chatardová, est « Transformation vers les sociétés durables et résilientes », une vision fondamentale pour éliminer la pauvreté, augmenter la prospérité et ne laisser personne de côté.  C’est également la raison pour laquelle des sessions seront consacrées aux pays dans des situations particulières, à la science, à la technologie et à l’innovation.  « La dernière séance fera le point pour savoir si nous sommes en train d’améliorer la vie de ceux qui sont les plus exclus. »  Avant de terminer, la Présidente a déclaré que la réunion ministérielle de la semaine prochaine sera consacrée aux examens nationaux volontaires de 47 pays. 

Selon le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. LIU ZHENMIN, depuis l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030 il y a trois ans, les États Membres ont travaillé d’arrache-pied pour traduire cette « vision transformative » du monde en « résultats concrets ».  Dans le cadre du Forum politique de haut niveau pour le développement durable de cette semaine, a-t-il poursuivi, ces pays auront l’opportunité de faire le point sur les progrès réalisés, en se basant sur les données issues de leurs systèmes statistiques nationaux, telles que rapportées au sein du système global utilisé pour le suivi de la mise en œuvre du Programme 2030.

Aux yeux du Secrétaire général adjoint, de nombreux individus bénéficient aujourd’hui de meilleures conditions de vie par rapport à il y a 10 ans.  La proportion des travailleurs du monde entier vivant avec leur famille en dessous du seuil d’extrême pauvreté a notamment diminué de manière significative, passant de 27% en 2000 à 9% en 2017.  Toutefois, a nuancé le représentant, les sécheresses et catastrophes naturelles liées aux changements climatiques et l’émergence de nouveaux conflits font obstacle à la réalisation de progrès plus rapides. 

Pour commencer, selon lui, de nombreuses poches de pauvreté persistent dans les zones rurales, où la proportion des personnes vivant en dessous des seuils de pauvreté nationaux est plus importante qu’en milieu urbain.  La protection sociale est d’une importance capitale pour remédier à ces situations, a poursuivi le Secrétaire général adjoint.  Or, selon lui, près de 4 milliards de personnes n’ont bénéficié d’aucune protection sociale en 2016, notamment les groupes les plus vulnérables, tels que les femmes avec des enfants en bas âge, les personnes âgées, les personnes handicapées, les enfants et les personnes sans emploi. 

« Pour la première, fois depuis 10 ans, la faim augmente », a également déploré le représentant, ajoutant qu’environ 38 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire se sont ajoutées aux 815 millions comptabilisées en 2015.

Sur le plan de la santé, M. Liu a indiqué que des progrès significatifs avaient été réalisés.  Il a notamment mentionné le recul de la mortalité maternelle depuis 2000, notamment en Afrique subsaharienne, où elle a diminué de 35% et où la mortalité des enfants de moins de 5 ans s’est aussi réduite de 50%.  De plus, a-t-il ajouté, certaines formes de discrimination à l’encontre des femmes ont diminué.  En Asie du Sud, notamment, le risque de mariage des filles a été réduit de 40% depuis 2000.  Le Secrétaire général adjoint a toutefois souligné que les discriminations à l’encontre des femmes demeuraient très importantes à l’échelle mondiale.

S’agissant de l’agriculture, M. Liu a mentionné la réduction des zones forestières et la surexploitation des sols qui s’ajoutent à la montée des températures, aux sécheresses et aux catastrophes naturelles.  Les petits États insulaires en développement (PEID), a-t-il souligné, ont particulièrement souffert de ces conditions climatiques défavorables.  Aussi, a-t-il dit, la transition vers des sociétés viables et résilientes dépendra de la mise en œuvre de modes de production durable.

Le représentant a également mentionné l’augmentation des conflits violents, qui ont forcé 68,5 millions de personnes dans le monde à fuir leur foyer.  Parallèlement, a regretté le Secrétaire général adjoint, l’aide publique au développement (APD) et la coopération Sud-Sud ne fonctionnent pas de manière satisfaisante.  En effet, selon lui, seuls cinq pays donateurs ont atteint le ratio d’APD requis en 2017.

Par ailleurs, M. Liu a insisté sur le besoin de disposer de données fiables pour mesurer les progrès.  Or, selon lui, le renforcement des données et des systèmes statistiques a été trop lent au cours des trois dernières années.  Nous devons davantage développer les outils pour la collecte, l’analyse et la production des données, a-t-il martelé.  Il ne nous reste plus que 12 ans pour mettre en œuvre ce Programme transformateur, a rappelé en conclusion le Secrétaire général adjoint.  « Ces objectifs sont pourtant à portée de main », a-t-il affirmé.

M. JEFFREY SACHS, Directeur du Centre pour le développement durable de Columbia University, a déclaré que les objectifs de développement durable sont réalisables, mais ne sont pas encore réalisés.  Le principal obstacle est la cupidité des plus riches, a dénoncé l’orateur en faisant remarquer que les ressources sont disponibles.  L’autre obstacle est la résistance des intérêts particuliers, comme ceux de l’industrie pétrolière, du secteur de l’énergie, de la finance et de l’industrie pharmaceutique.  L’industrie pétrolière cherche à pallier la baisse de la consommation d’énergie fossile, a dénoncé M. Sachs qui a aussi pris le refus du Gouvernement américain de soutenir, à l’échelle mondiale, l’allaitement maternel comme exemple de la résistance de l’industrie pharmaceutique.

M. Sachs a ensuite félicité la Suède en tant que premier pays à être le plus près d’atteindre les objectifs de développement durable, ainsi que l’Europe qui est la région du monde se rapprochant le plus vite de ces objectifs.  Les 10 pays les plus proches des objectifs sont européens, a-t-il annoncé.  La Suède et le Danemark sont aussi les deux premiers pays au classement de l’indice du bonheur, ce qui prouve que le développement est la voie du bonheur. 

Les États-Unis figurent à la trente-cinquième place de l’indice du bonheur national brut, a aussi précisé M. Sachs.  « Ce pays a réduit les impôts pour les riches sans pour autant investir dans l’éducation, la santé, les infrastructures », a-t-il noté en constatant que cela ne rapproche pas des objectifs de développement durable.  Pour parvenir à ces objectifs, le plus important est de garantir une éducation de qualité, un bon système de santé, une énergie propre, ainsi qu’une alimentation et une agriculture durables, a suggéré le Directeur qui croit que les pays riches peuvent facilement financer les efforts au lieu d’offrir des réductions pour les riches.  Ces pays riches doivent en outre aider les pays pauvres, a-t-il ajouté.

M. Sachs a aussi lancé un appel aux 2 208 milliardaires que compte le monde –dont la richesse est évaluée à plus 10 000 milliards de dollars- pour qu’ils consacrent seulement 1% de leur fortune au développement.  Cela représente déjà 90 milliards de dollars qui pourraient permettre de scolariser tous les enfants du monde, a-t-il observé.

« J’appelle M. Mark Zuckerberg à investir personnellement dans ces objectifs », a lancé M. Sachs en s’adressant aussi aux sociétés offshores et aux cinq géants de la technologie qui sont valorisées à plus 5 000 milliards de dollars.

Les transactions financières doivent aussi être taxées, a-t-il proposé.  Il faut instaurer en outre des taxes carbone pour les entreprises pollueuses.  Pour leur part, les industries pétrolières doivent participer au reboisement dans le monde pour protéger la planète du réchauffement climatique.  Il faut, enfin, réprimer l’évasion fiscale, a conseillé M. Sachs.  Tout le monde doit payer ses impôts pour que chaque enfant ait un avenir, a-t-il plaidé, arguant que « si les enfants n’ont pas d’avenir nous n’avons tout simplement pas d’avenir ».

L’Envoyée spéciale du Secrétaire général sur le handicap et l’accessibilité, Mme MARÍA SOLEDAD CISTERNAS REYES, a déclaré que le Programme 2030 était un outil « très puissant » pour la mise en œuvre du développement durable à l’échelle mondiale.  Cependant, de nombreux points faibles et obstacles persistent, selon elle, concernant cette mise en œuvre.

Force est notamment de constater, a regretté l’Envoyée spéciale, le manque de financement pour la réalisation des objectifs fixés.  Si certains pays développés offrent des exemples de mise en œuvre intéressants, les pays les moins avancés (PMA) sont, selon elle, majoritairement en retard.  Pour la représentante, le meilleur moyen d’allouer davantage de fonds au développement durable dans ces pays est de lutter contre l’évasion fiscale et la corruption, afin d’éviter que des fonds susceptibles de financer le développement ne se perdent dans des paradis fiscaux. 

Davantage de fonds doivent ainsi être consacrés à l’éducation et à la promotion de l’égalité entre hommes et femmes, a poursuivi l’Envoyée spéciale.  Outre ces deux piliers, elle a également appelé les entreprises privées à s’engager davantage en faveur des droits de l’homme et du Programme 2030, en évitant notamment de prendre des mesures allant à l’encontre du développement durable.  Lorsque des entreprises portent atteinte au développement durable, elles doivent payer des compensations, a-t-elle estimé, ajoutant que les entreprises privées devraient également favoriser les franges et secteurs défavorisés pour promouvoir l’intégration au travail.

Pour cela, l’Envoyée spéciale a appelé à accroître les investissements privés pour parvenir à l’accessibilité universelle.  Plus d’un milliard de personnes dans le monde vivent avec un handicap et plus de 800 millions d’individus sont des personnes âgées, a-t-elle rappelé.  « Il ne faut pas l’oublier. »  Aux yeux de la représentante, les entreprises privées ont d’ailleurs intérêt à rechercher l’accessibilité universelle, car ces personnes âgées et personnes handicapées sont aussi des consommateurs potentiels.  En conclusion, l’Envoyée spéciale a appelé les États Membres et les acteurs privés à prendre appui sur le Forum de cette semaine pour redynamiser leur engagement en faveur du Programme 2030.

M. ALEX STEFFEN, cofondateur du magazine en ligne www.worldchanging.com, a reconnu que depuis 2015, année de naissance des objectifs de développement durable, des progrès ont été faits.  « En même temps, personne ne pense que nous allons très vite », a-t-il constaté.  Mais pour lui, la vitesse et le rythme ne sont pas des problèmes; c’est la solution existante qui pose problème.  On pense depuis longtemps que le développement durable va réduire les tensions entre les pays riches et les pays pauvres, a-t-il rappelé en avertissant que ce n’est pas le cas. 

« Nous sommes à la veille de transformations majeures, d’un énorme bond en avant », a estimé M. Steffen en appelant à aller plus vite.  La réalité est que nous avons deux économies mondiales et non une, a-t-il relevé en mettant en évidence la concurrence entre les deux: l’une est prédatrice et freine les efforts pour réaliser le développement durable, en s’opposant aux règlementations pour faire des progrès dans le domaine de l’énergie, de l’environnement, de la consommation, entre autres. 

Selon M. Steffen, « notre tâche consiste à surmonter les crises et à déployer de nouvelles solutions pour dépasser les solutions non viables ».  Pour lui, la solution repose dans la vitesse.

Partout dans le monde, a-t-il poursuivi, les gens travaillent pour mettre en œuvre les progrès sociaux et les changements technologiques.  « Si nous ne les mettons pas en pratique, l’échec est une possibilité », a-t-il prévenu.  « Ce qui se passe dans mon pays, aux États-Unis, ne doit pas nous faire peur; M. Donald Trump ne doit pas nous faire peur. »  Pour M. Steffen, le Président des États-Unis est « un homme du passé » et « il faut regarder plus loin que de lui ».  M. Steffen a donc misé sur la diffusion de l’innovation et plaidé pour remplacer l’économie du passé par une nouvelle économie qui permettra la réalisation des objectifs de développement durable.  Ces deux facteurs doivent être réalisés car ils ne sont pas opposés, a-t-il argué.  Il a réitéré que le problème est l’ancien modèle économique et que la seule façon d’avancer est de le prendre de vitesse.

Suivi des progrès dans la réalisation des objectifs de développement durable

Les intervenants de la table ronde portant sur le thème « Suivi des progrès dans la réalisation des objectifs de développement durable » se sont penchés sur l’importance des données statistiques en vue de réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, en particulier s’agissant de l’égalité des genres abondamment évoquée.  Comment mieux exploiter ces données, proprement vitales pour atteindre les objectifs de développement durable?, a résumé Mme EMILY PRYOR, Directrice exécutive de Data2X et modératrice de cette table ronde.  Les différents orateurs n’ont pas fait mystère des nombreux retards accusés dans ce domaine.

« Il y a toujours des personnes qui doutent de l’ampleur des inégalités entre les sexes, c’est pourquoi les statistiques sont essentielles », a déclaré Mme ASA REGNER, Directrice exécutive adjointe d’ONU–Femmes.  Le Programme 2030 peut changer la vie des filles et des femmes, pour autant qu’il soit mis en œuvre, a-t-elle continué.  Elle a passé en revue les progrès accomplis cette dernière décennie, avec une scolarisation plus longue des filles et une participation accrue des femmes à la vie publique, « même si ces progrès sont lents, il faut bien en convenir ».  Une femme sur cinq dans le monde a ainsi été, sur les 12 derniers mois, victime de violences sexuelles ou physiques de la part de son partenaire.  Elle a par ailleurs mentionné la condition des femmes en milieu rural, le sort des femmes handicapées et les inégalités entre femmes.  Aux États-Unis, une femme autochtone d’Amérique a trois fois plus de chances de ne pas avoir de couverture sanitaire qu’une femme blanche.  Enfin, Mme Regner a reconnu que « nous avons à notre disposition seulement le tiers des statistiques nécessaires pour assurer le suivi des progrès dans la réalisation des objectifs de développement durable ».

« Les statistiques sont au cœur de la reddition de comptes », a déclaré M. PADRAIG DALTON, Directeur général du Bureau de statistiques de l’Irlande.  Ces statistiques permettent également aux décideurs de prendre des décisions de meilleure qualité et d’éviter le gaspillage des ressources publiques.  Il a insisté sur la fiabilité des données pour gagner la confiance des décideurs et des citoyens, « c’est pourquoi la transparence est requise dans la collecte desdites données ».  Il a aussi rappelé que les données brutes doivent être traitées et dégrossies pour les rendre plus accessibles et donc utilisables par les décideurs.  « Nous devons parler la langue des décideurs. »  Il a pris l’exemple de la crise du logement récente en Irlande et le travail de son bureau pour arriver à un indice du logement pertinent.  Enfin, M. Dalton a détaillé le portail statistique de son bureau consacré aux objectifs de développement durable.

Mme GRACE BEDIAKO, experte de la Commission de planification du développement du Ghana, a indiqué qu’un comité ministériel a été mis en place dans son pays pour assurer la mise en œuvre du Programme 2030.  En outre, le Président du Ghana est sérieusement impliqué dans le suivi de la mise en œuvre, tandis que les objectifs de développement durable sont pleinement pris en compte lors des discussions budgétaires annuelles.  Elle a insisté sur l’importance de la volonté politique pour réaliser le Programme 2030. Chacun peut et doit participer à la réalisation de ces objectifs, l’inclusion étant cruciale, a-t-elle conclu. 

« J’aimerais attirer l’attention sur l’absence de données s’agissant des inégalités économiques, en particulier sur la propriété des terres », a déclaré Mme SOFIA MONSALVE SUÁREZ, Secrétaire générale de FIAN international.  Il n’y a ainsi pas d’indicateur pour mesurer la concentration de la propriété des terres.  Elle a également mis l’accent sur l’importance de l’aspect qualitatif plutôt que quantitatif des statistiques.  « Pour savoir si nous allons dans la bonne direction s’agissant des objectifs de développement durable, il aurait été préférable qu’une femme venue du Yémen ou de la République centrafricaine se soit exprimée ce matin. »  Si elle a reconnu l’importance d’une véritable « révolution des données », elle a, dans le même temps, insisté sur le danger que les « mégadonnées » soient instrumentalisées à des fins incompatibles avec les droits de l’homme.  « Ces données peuvent accroître le pouvoir de grands groupes qui disposent déjà de beaucoup de pouvoir », a-t-elle prévenu. 

Réagissant sur le sujet des mégadonnées, le Directeur général du Bureau des statistiques de l’Irlande a indiqué que « la perfection est l’ennemi du bien » et que les mégadonnées ne sont pas une solution, mais une partie de la solution au défi statistique.  « Elles doivent avoir une véritable valeur ajoutée. »

De son côté, l’experte de la Commission de planification du développement du Ghana est revenue sur la distinction entre aspect qualitatif et quantitatif qui, a-t-elle estimé, n’est pas sans provoquer une tension dans le débat public.  « L’enjeu est de développer une méthodologie qui prenne en compte l’importance de la confidentialité des données et qui, surtout, ne laisse personne pour compte. »  La Directrice exécutive adjointe d’ONU–Femmes a, elle, insisté sur le besoin de débusquer ce qui se cache « derrière les chiffres » et l’apport des chercheurs à cette fin, en prenant l’exemple des violences faites aux femmes.

Prenant la parole, la délégation de la Suisse a appelé à investir dans les systèmes de collecte statistique, « sinon nous continuerons de comparer des pommes et des poires ».  Elle a également demandé une meilleure coordination au sein du système onusien, en particulier entre la Commission de statistique et l’ECOSOC.  « Nous devons innover et nous adapter au changement », a renchéri le Chef du Bureau des statistiques de l’Italie.  La déléguée de la République démocratique populaire lao a, elle, plaidé pour le renforcement des capacités statistiques des pays en développement, lequel est au cœur de la politique en la matière suivie par l’Union européenne, selon son représentant.

L’acuité du défi statistique a été soulignée avec éloquence par de nombreux orateurs, dont le représentant du grand groupe des enfants et des jeunes, qui a parlé « d’un tableau sombre ».  Seuls 57% des cibles retenues par les objectifs de développement durable devraient être atteintes par les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a admis le délégué de cette organisation.  Il a néanmoins noté les progrès réalisés par ces pays s’agissant de l’égalité entre les sexes, cet objectif bénéficiant d’engagements ambitieux au sein de l’OCDE.  Enfin, le représentant du Groupe des personnes handicapées a déploré qu’il n’y ait pas de données sur le handicap au niveau mondial.  « Si nous ne sommes pas comptés, nous ne comptons pas et nous resterons invisibles. »

Les meilleures données pour le développement durable

Cette table ronde sur les « meilleures données pour le développement durable », animée par la Directrice exécutive de Data2X, Mme EMILY PRYOR, devait répondre à la problématique posée par le Chef de la Commission de statistique des Nations Unies et statisticien en chef du Kenya, M. ZACHARY MWANGI CHEGE, qui s’est étonné du fait que l’on se précipite à mesurer déjà les progrès dans la réalisation des objectifs de développement durable et non l’état de leur mise en œuvre.  Pour cela, a-t-il indiqué, il faut un système de statistique efficace, impartial, viable et disponible au moment opportun, ce que n’ont pas les pays en développement.

Ces pays sont pris au piège du sous-développement statistique; ils souffrent du manque de coordination et de financement pour leurs systèmes statistiques nationaux, a-t-il poursuivi.  Le Plan d’action de Marrakech pour la statistique de 2004 vise à aider les pays à identifier leurs priorités et établir un plan stratégique en matière de statistique, a-t-il rappelé.  La Banque mondiale a aussi développé un autre programme qui vise à aider les pays dans le besoin à élaborer des stratégies et des plans d’action dans ce domaine.  Pour sa part, a ajouté M. Chege, la Commission de statistique des Nations Unies est en train d’élaborer un plan de renforcement de capacités à court et moyen termes dans les domaines des statistiques environnementales, administratives, et des données sur les handicaps.

La statisticienne en chef des États-Unis, Mme NANCY POTOK, a prévenu que pour évaluer les objectifs de développement durable, il faudra une quantité énorme de données aux niveaux national et mondial.  Le rôle des bureaux de statistique à cet égard est de s’assurer de la validité des données, a-t-elle précisé.  Comme l’utilisation des données repose sur les agences statistiques nationales, les capacités de celles-ci dans les pays en développement devraient être renforcées, a-t-elle ajouté, ce qui nécessite des partenariats entre la société civile, le secteur privé, et les gouvernements. 

Dans cet environnement complexe, il faut des données fiables et de grande qualité qui viennent des agences nationales de statistiques, a insisté Mme Potok en faisant valoir que ces agences produisent depuis longtemps des données en toute transparence.  Elles ont aussi veillé à la protection des données, en particulier les données sur la vie privée.  Mme Potok a lancé un appel pour le renforcement des agences statistiques mondiales, pour qu’elles puissent mener à bien leurs missions.  Dans 25 pays d’Afrique et d’Asie, il n’y a même pas eu de recensement de population entre 2006 et 2016, a-t-elle déploré.  Elle a conclu son exposé en appelant à investir dans la production de données permettant d’aider à réaliser les objectifs de développement durable.

C’est d’ailleurs sur le financement des données que la cofondatrice d’Open Data Watch, Mme SHAIDA BADIEE, a focalisé son intervention.  On a besoin de 200 millions de dollars par an pour avoir des données fiables dans le monde, en particulier dans les pays en développement, a-t-elle signalé, jugeant que « ce montant n’est pas énorme comparé aux salaires des deux meilleurs joueurs de football au monde ».  Le Plan d’action mondial du Cap concernant les données du développement durable permettra d’unir les pays dans la mise en œuvre du Programme 2030 et de financer les données, a-t-elle espéré.  Elle a en outre appelé à donner l’appui politique nécessaire pour le financement des données et accroître les ressources nationales et internationales à l’appui du développement.

La Directrice générale adjointe de l’Institut de la statistique de la Jamaïque, Mme LEESHA DELATIE-BUDAIR, a renchéri en soulignant le rôle central du Plan d’action mondial du Cap.  Ce Plan met l’accent sur le financement des systèmes de statistique des pays en développement, des pays en situation particulière et des pays à revenu intermédiaire.  Il prévoit la numérisation des données, ce qui nécessite un financement important.  « Mais comment mobiliser le financement dans les pays vulnérables? », a demandé Mme Delatie-Budair.  « Comment avoir les compétences nécessaires pour la collecte et l’utilisation des données?  Comment renforcer les capacités institutionnelles? »

En ce qui concerne la mobilisation du financement, le Chef de la Commission de statistique des Nations Unies a souhaité que les décideurs politiques reconnaissent l’importance de l’investissement dans les capacités statistiques nationales.  La coopération technique, qui vient après, est aussi fondamentale en ce qu’elle permet de moderniser les systèmes nationaux, notamment dans le recensement des populations. 

La statisticienne en chef des États-Unis a pour sa part prôné « un financement simple et adéquat », par les gouvernements, de leurs systèmes nationaux de statistiques.  Les gouvernements doivent assurer la participation de la société civile et du secteur privé pour avoir un financement pérenne, a-t-elle ajouté.  Pour le représentant de l’Afrique du Sud, des mécanismes de financement sont importants notamment pour le renforcement des capacités technologiques.  Son homologue de la Suisse a préconisé de développer une approche différente du financement des données pour le développement durable.

Le représentant de l’Italie est revenu sur l’importance de la coopération pour combler les lacunes en matière de statistique, une coopération entre les pays, les organisations régionales et les organisations internationales.  Il a aussi mentionné le rôle du Plan d’action mondial du Cap en matière de renforcement de capacités des systèmes nationaux de statistiques, un plan qui doit évoluer en fonction des réalités.  Le Chef de la Commission de la statistique des Nations Unies a également plaidé pour l’application de ce Plan d’action « pour espérer voir le bout du tunnel ».

Garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau

Les intervenants de cette discussion ont examiné l’objectif 6, « Garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau », la question de l’eau et de l’assainissement étant au cœur de nombreuses tensions dans le monde.  « Nous sommes mal partis pour réaliser cet objectif », a affirmé sans ambages une oratrice, résumant le sentiment général.  Diverses solutions pour faire face à cette véritable « crise hydrique », notamment l’importance d’une volonté politique robuste, ont été avancées.

Mme YONGYI MIN, Département des affaires économiques et sociales de l’ONU, a livré des chiffres pour guider la discussion.  Environ 71% de la population utilise une eau sûre, 3 personnes sur 10 n’y ayant pas accès.  Près de 892 millions de personnes continuent de faire leurs besoins à l’air libre, en particulier en Afrique et en Inde, tandis que 2 milliards de personnes souffrent de stress hydrique, caractérisé par un possible manque d’eau à l’avenir en raison notamment des changements climatiques.  De surcroît, de 2012 à 2016, les financements pour améliorer l’accès à l’eau et l’assainissement ont diminué de 25%.

M. STEFAN UHLENBROOK, du Programme eau de l’ONU, a présenté le rapport de synthèse sur l’objectif 6 en louant les efforts colossaux des États, « même si on est encore loin du compte ».  Il a prévenu que « si la tendance se maintient, nous n’atteindrons pas cet objectif 6 ».  Des milliers d’enfants continuent de mourir en raison d’une mauvaise hygiène liée à l’eau et la demande en eau va aller en croissant à l’avenir, augmentant le stress hydrique.  Si 80% des pays du monde ont jeté les bases d’une gestion intégrée des ressources hydriques, beaucoup reste encore à faire, a-t-il affirmé.  La bonne gouvernance de l’eau est cruciale et peut permettre de passer de la pauvreté à la prospérité, a-t-il dit, en appelant à davantage d’investissements dans ce secteur.  « L’urgence de la crise hydrique ne saurait être exagérée. »

Pour sensibiliser sur la question, Mme MINA GULI, coureuse de fond et activiste, a indiqué qu’elle allait courir 100 marathons en 100 jours pour alerter sur la crise hydrique.  « L’eau, c’est la vie.  L’eau, c’est l’avenir. »  Or 4 enfants sur 10 souffrent de diarrhée en Afrique subsaharienne, a-t-elle déploré, avant d’évoquer le sort des jeunes filles chargées dans de nombreux pays de ramener l’eau du puits.  Sécheresse, pollution, tensions géopolitiques, les défis sont nombreux.  « Près de 40% de la population mondiale connaît le stress hydrique. »  Elle a évoqué des solutions pour y remédier avec la mise en place d’un système de gestion intégrée en eau et de technologies économes en eau, ainsi que la sensibilisation du grand public.  « Économiser l’eau doit devenir tendance. »

« Nous devons agir maintenant, c’est une question de survie », a renchéri M. DANILO TURK, Président du Groupe mondial de haut niveau sur l’eau et la paix.  Le stress hydrique est une question de paix et de sécurité internationales.  Il a déploré, face à cette situation, un leadership politique insuffisant et une expertise technique déficiente.  Tout n’est pas négatif, a-t-il nuancé, en mentionnant certains succès.  Il a loué la coopération de quatre pays autour du fleuve Sénégal, un exemple pour le monde, et s’est dit encouragé par les progrès accomplis en Asie centrale.  Autre signe positif, selon M. Turk, l’attention croissante du Conseil de sécurité sur cette question en vue de prévenir des conflits armés.  Il a plaidé pour une gestion intégrée de l’eau et la coopération transfrontalière autour de bassins d’eau, ainsi que pour la fourniture d’un appui international dans ce domaine.  « Voilà deux appels que ce Forum pourrait lancer. »

Un dialogue constant entre tous les acteurs autour de la question de l’eau, c’est ce qu’a prôné M. CALLIST TINDIMUGAYA, du Ministère de l’eau et de l’environnement de l’Ouganda, qui a aussi plaidé pour une mobilisation robuste de ressources.  Il a détaillé les progrès de son pays en vue de concrétiser l’objectif 6, soulignant l’importance d’un cadre institutionnel fort.

« Nous devons être plus ambitieux sur la question de l’eau », a ajouté Mme CLAUDIA SADOFF, Directrice générale de l’Institut international de gestion de l’eau.  Elle a souligné l’importance de la technologie, mentionnant par exemple la surveillance de l’irrigation des champs au moyen de drones.  Des lois pourraient être prises pour contraindre les ménages à être plus économes en eau, notamment en utilisant des appareils électroménagers gaspillant moins d’eau, a-t-elle suggéré.  « Nous devons aussi recycler davantage les eaux usées. »  Elle a plaidé pour une meilleure gouvernance de l’eau, arguant que la « crise de l’eau est une crise de gouvernance ».  « Si nous gérons mal l’eau, les conséquences sont tragiques. »  Elle a également appelé à des partenariats multisectoriels et à une collecte rigoureuse des statistiques.  « Changeons de paradigme, car l’eau est une ressource rare. »

Abordant la question de l’eau sous un angle à la fois juridique et pragmatique, Mme LUCÍA RUIZ, Vice-Ministre de l’environnement du Pérou, a dit que le droit à l’eau est inscrit dans la Constitution du Pérou, pays qui est très touché par le stress hydrique.  L’eau doit être utilisée de manière plus efficace, a-t-elle dit, en plaidant pour une gestion intégrée, « verte », de l’eau.  Les citoyens doivent être étroitement associés à cette gouvernance, en particulier les peuples autochtones, a—t-elle dit, en louant la sagesse inestimable de ces populations au Pérou lorsqu’il s’agit de gérer l’eau.  Enfin, elle a insisté sur l’importance d’un financement suffisant pour améliorer « la sécurité hydrique ».  La coopération avec le secteur privé pourrait aider à combler les lacunes de financement, a-t-elle conclu.

M. THOMAS STRATENWERTH, du Ministère de l’environnement de l’Allemagne, a insisté sur les liens entre l’objectif 6 et les autres objectifs.  « Nous devons changer de paradigme de communication sur l’eau en parlant davantage des solutions », a-t-il aussi conseillé.  Il a appelé à une stabilisation plus efficace des écosystèmes et suggéré la création d’une carte prépayée qui permettrait d’accéder à des ressources en eau en évitant le gaspillage.  Enfin, il a souhaité que l’ONU consacre davantage de temps à cette question cruciale de l’eau, en organisant notamment un débat de haut niveau. 

En Asie et en Afrique, Water and Sanitation for the Urban poor œuvre en vue de créer des unités permettant de répondre aux besoins en eau des consommateurs, comme à Nairobi, a indiqué M. NEIL JEFFERY en se prévalant de bons résultats à Accra et à Maputo.  Il a mis en garde contre la contamination des eaux par des matières fécales venues du secteur agricole.  Il a, par ailleurs, souligné l’importance d’appuyer les petites villes qui connaissent souvent une expansion rapide.

Le manque d’hygiène dû à une eau impropre est un problème sensible pour les femmes du Mozambique, a signalé M. FLORENCIO MARERUA, WaterAid Mozambique.  Ainsi, les femmes de son pays ont peur de tomber enceintes en raison du risque de décès de l’enfant et de la mère, lié notamment au manque d’hygiène, ce qui lui a fait dire qu’il faut adopter une approche révolutionnaire face à la mortalité infantile et maternelle.  Près de 7% des enfants au Mozambique meurent avant l’âge de 5 ans et 3 300 femmes meurent chaque année en couches, a-t-il précisé.  C’est pourquoi il a plaidé pour que « les dirigeants politiques fassent preuve de volonté politique et accordent l’attention nécessaire à la question de l’eau. 

M. NEY MARANHAO, Agence de l’eau du Brésil, a rappelé la mise en place d’un système de transfert de subsides en 2003 dans le nord-est du Brésil, région qui était alors confrontée à une grave sécheresse.  D’autres programmes ont permis de relever ce défi d’une sécheresse qui a duré six années, a-t-il dit.  « Nous devons augmenter la résilience face aux phénomènes extrêmes. »  Mais le représentant a déploré que trop souvent l’on règle les défis du XXIsiècle avec des idées du XXsiècle.

Dans la discussion générale qui a suivi, les délégations ont détaillé l’action menée pour faire face au stress hydrique et promouvoir une gestion intégrée de l’eau.  Des investissements considérables ont été consentis en vue d’améliorer les indices de croissance du secteur de l’eau à travers la construction de 76 barrages, de 8 857 forages, de 13 unités de dessalement d’eau et de 177 stations d’épuration d’eaux usées, a assuré le délégué de l’Algérie

Le Mexique encourage les nouvelles technologies pour garantir un accès à l’eau, tandis que le délégué de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a souligné la pertinence des technologies nucléaires pour une gestion intégrée de l’eau, via « l’hydrologie isotopique ».  « Dans la région du Sahara, l’Agence intervient dans cinq bassins. »

Le Kenya installe des distributeurs en eau, tandis que le Rwanda modernise son système d’évacuation des eaux usées.  En Fédération de Russie, « 96% des ménages ont accès à une eau potable en milieu urbain, 72% en milieu rural ».  L’accès à l’eau potable est de 100% en Autriche, alors qu’Israël recycle 90% de ses eaux usées.

Un autre axe de discussion a été le besoin d’une coopération internationale forte afin de réduire les tensions autour de l’eau.  L’Union européenne continuera ainsi d’étoffer sa diplomatie de l’eau, a promis la déléguée de l’Union, en apportant son soutien à l’Accord de Paris sur les changements climatiques, tandis que la Finlande a loué les accords transfrontaliers sur des bassins d’eau.  L’observateur de la Palestine a souligné le stress hydrique extrême que connaît la population de Gaza et fustigé l’occupation israélienne.

Enfin, de nombreuses délégations, comme celles de la France et du Mexique ou d’El Salvador, ont déploré le temps très limité consacré à la question de l’eau au sein de l’ONU.  Trois heures tous les quatre ans, ce n’est pas assez, a déclaré la déléguée de la France. 

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