En cours au Siège de l'ONU

Cinquième Commission: le Secrétariat de l’ONU répond aux interrogations de la Fédération de Russie sur le bien-fondé des mesures d’austérité

Soixante-quatorzième session,
19e séance – matin
AG/AB/4348

Cinquième Commission: le Secrétariat de l’ONU répond aux interrogations de la Fédération de Russie sur le bien-fondé des mesures d’austérité

Alors que la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires examinait aujourd’hui l’exécution du budget 2018-2019, la Fédération de Russie a contesté l’ampleur de la crise financière de l’ONU et interpelé son Contrôleur sur le bien-fondé des mesures d’austérité, allant même jusqu’à accuser le Secrétariat de violer ses règles financières.  Sans les mesures prises, a répondu M. Chandru Ramanathan, le débat général de septembre n’aurait même pas pu avoir lieu.  Les pratiques budgétaires du Secrétariat sont parfaitement légales et justifiées par le déficit de trésorerie sans précédent en 2019, a insisté le Contrôleur.

Dans son deuxième rapport sur l’exécution du budget-programme 2018-2019, le Secrétaire général note* que les déficits de trésorerie auxquels l’ONU a dû faire face ont été sans commune mesure avec ceux des 10 dernières années.  L’Organisation a manqué d’argent plus tôt dans l’année et est restée dans le rouge plus longtemps.  Pour faire face à cette crise, le Secrétariat a pris un certain nombre de mesures d’austérité, dont la limitation des dépenses non liées au personnel, le report des paiements, la réduction des avances pour les projets pluriannuels et le gel des recrutements. 

Au cours du dernier trimestre de cette année, des mesures supplémentaires ont été adoptées pour limiter les voyages officiels, reporter certains achats, réduire des dépenses liées à la gestion des installations, dont l’interruption des escalators entre les 2e et 4e étages du Siège de l’ONU, et reporter des réunions.  Compte tenu de la situation, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) recommande** d’approuver la suspension de certaines dispositions du Règlement financier et des règles de gestion financière de l’ONU, pour qu’un montant de 25,19 millions de dollars, au titre des crédits de 2016-2017, ne soit pas restitué aux États Membres et puisse être utilisé en 2020.

Mais, s’est étonnée la Fédération de Russie, le CCQAB a pourtant reconnu que le ratio de liquidité s’est amélioré en 2019 par rapport à 2018 et que le montant des contributions non versées n’est pas pire qu’en 2017.  Comment, dans ces conditions, justifier les mesures « dites d’austérité », qui ont entravé cette année le travail des délégations? s’est interrogé la Fédération de Russie, en voulant en savoir plus sur les économies réalisées grâce à ces mesures.  Avant de nous prononcer sur les 25,19 millions de dollars qui ne seraient pas restitués aux États Membres, peut-on connaître les soldes des tribunaux fermés?

La Fédération de Russie a expliqué que c’est seulement en additionnant ces derniers avec les soldes du compte spécial et des opérations de maintien de la paix fermées, soit 385 millions de dollars, que les États Membres pourront évaluer le montant des réserves que le Contrôleur sera autorisé à utiliser en cas d’urgence, comme il le fait déjà en empruntant auprès des comptes des opérations clôturées, « en violation » du Règlement financier et des règles de gestion financière de l’ONU. 

Si le ratio de 2019 est meilleur, a professé le Contrôleur, c’est tout simplement parce que nous n’avons pas été en mesure de couvrir les dépenses.  Cette année, a-t-il insisté, l’ONU a connu le déficit de trésorerie le plus important depuis 2010.  Nous n’étions même pas certains de pouvoir payer les salaires en novembre, a-t-il rappelé, arguant que sans les mesures d’austérité, l’ONU aurait accusé un déficit de 600 millions de dollars dès le mois de septembre.  Si nous avions suivi à la lettre le Règlement, le débat général aurait été perturbé, a encore rappelé le Contrôleur.  Par ailleurs, a-t-il affirmé, rien dans le Règlement financier n’interdit les emprunts sur les comptes des opérations de maintien de la paix au profit du budget ordinaire.

Malgré les mesures d’austérité et le gel des recrutements, l’ONU accuse toujours un déficit de 221 millions de dollars, a poursuivi le Contrôleur, précisant qu’après le paiement des salaires de décembre sur les réserves, il ne restera que 13 millions de dollars pour payer les factures.  « Ne pensez pas qu’en 2019 nous étions en meilleure forme qu’en 2018, car ce n’est évidemment pas le cas », a martelé le haut fonctionnaire.

Par ailleurs, les États Membres étaient saisis d’une demande*** de crédit de 103 690 800 dollars, avant actualisation des coûts, pour financer en 2020 le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, soit une hausse de 5 641 700 dollars par rapport aux crédits ouverts pour 2019.  Le Secrétaire général attribue cette tendance aux ressources nécessaires à la division d’Arusha qui a ouvert, en 2018, une affaire d’outrage dite « Turinabo et consorts » et qui espère l’arrestation de l’un des trois derniers fugitifs mis en accusation par le Tribunal pénal international pour le Rwanda.

L’arrestation « éventuelle » d’un fugitif, commente**** le CCQAB, ne devrait pas être inscrite dans un projet de budget.  Les sommes doivent être demandées une fois le fugitif arrêté.  Le Comité consultatif recommande par conséquent une enveloppe de 97 962 400 dollars, correspondant également à des coupes liées au dépenses en personnel et aux voyages officiels.  Jugeant ces réductions « arbitraires et injustifiées », le Groupe des 77 et la Chine se sont dits préoccupés par la concentration des ressources à la division de La Haye, alors que la charge de travail est plus lourde à Arusha. 

Également en désaccord avec les recommandations du CCQAB, le Groupe des États d’Afrique a appuyé le montant proposé par le Secrétaire général, une enveloppe que la Tanzanie aurait souhaité plus importante.  Ces délégations ont en outre appelé à une solution pour que le Tribunal spécial résiduel pour la Sierra Leone soit hébergé à la division d’Arusha, sans incidence sur l’exécution des mandats respectifs.

La Commission a aussi examiné une demande***** de 49 450 100 dollars de crédit pour la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), entre le 1er juillet 2019 et le 30 juin 2020.  Une partie de l’enveloppe devrait financer la liquidation administrative de la Mission, officiellement clôturée depuis le 15 octobre 2019 et remplacée par le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH).  Ici aussi, le CCQAB recommande****** une réduction de 327 200 dollars.  Il explique qu’étant donné que depuis la création du BINUH, les ressources demandées pour lui visent à financer le déploiement de 13 policiers hors unités constituées et de 2 membres du personnel fournis par des gouvernements, il faut réduire les ressources proposées pour le déploiement à la MINUJUSTH de 11 policiers des Nations Unies et de 2 agents fournis par des gouvernements pour la période du 16 octobre au 31 décembre 2019.

La prochaine séance publique de la Cinquième Commission sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

*A/74/583
**A/74/583
***A/74/566, A/74/355 et A/74/355/Corr.1
****A/74/593
*****A/74/532
******A/74/589

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale clôt l’Année internationale des langues autochtones et entend des appels à des mesures urgentes pour les protéger

Soixante-quatorzième session,
Manifestation sur les langues autochtones, matin & après-midi
AG/12230

L’Assemblée générale clôt l’Année internationale des langues autochtones et entend des appels à des mesures urgentes pour les protéger

« Un peuple qui renonce à sa langue, consciemment ou pas, est un peuple qui renonce à son identité et à ses droits culturels », a prévenu aujourd’hui le Président de l’Assemblée générale, M. Tijjani Muhammad-Bande, au cours de la cérémonie de clôture de l’Année internationale des langues autochtones.  Après la traditionnelle prière du Chef de la nation Onondaga, Tadodaho Sidney Hill, qui a remercié la Terre nourricière de continuer à remplir la mission que Dieu lui a confiée, l’Assemblée a entendu des nouvelles alarmantes, exigeant des États des mesures urgentes pour protéger les 4 000 langues parlées par 6% de la population mondiale à peine, lesquels représentent 15% des populations les plus pauvres de la planète. 

Les mauvaises nouvelles ne se sont pas arrêtées là: les langues autochtones sont toutes condamnées à disparaître.  Selon des estimations prudentes, relayées par la Présidente de l’Instance permanente sur les questions autochtones, plus de la moitié des langues du monde auront disparu d’ici à 2100, alors que d’autres estimations disent que 95% de ces langues n’existeront plus ou seront gravement menacées d’ici à la fin de ce siècle.  À ce jour, 96% des 6 700 langues ne sont parlées que par 3% de la population mondiale et la vaste majorité d’entre elles sont des langues autochtones. 

La Déclaration de 2007 sur les droits des peuples autochtones appelle pourtant les États à protéger le droit de ces peuples de revivifier, d’utiliser, de développer et de transmettre aux générations futures leur histoire, leur langue, leurs traditions orales, leur philosophie, leur système d’écriture et leur littérature.  Les peuples autochtones, dit la Déclaration, ont le droit d’établir et de contrôler leurs propres systèmes et établissements scolaires où l’enseignement est dispensé dans leur propre langue.  Lorsque je suis allée pour la première fois à l’école, je me suis rendu compte que les enfants ne parlaient qu’espagnol alors que tous nos parents parlaient d’autres langues, a confié Yalitza Aparicio, actrice mexicaine et Ambassadrice de bonne volonté de l’UNESCO qui vient d’un pays « où les enfants ne savent même pas qu’ils vivent parmi 68 langues autochtones » et qui a pris la décision d’organiser une conférence sur ces langues. 

Le « triste sort » de la jeune guatémaltèque de 7 ans, décédée en mars dernier dans un centre de détention d’immigrés clandestins aux États-Unis, a été raconté par la Présidente du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones.  La petite Jakelin Caal et son père ne pouvaient communiquer que dans leur langue maternelle.  Plus au nord, Albert Razine, un enseignant russe de 72 ans s’est immolé par le feu en septembre dernier pour protester contre la négligence de sa langue maternelle, l’oudmourte.  Il est temps de s’unir pour assurer la survie de nos langues, a lancé le Chef de l’Assemblée des Premières Nations du Canada où il y a de fortes chances que les langues autochtones ne survivent pas à ce siècle puisque seulement un membre des Premières Nations sur cinq parle couramment sa langue. 

Cette Année internationale des langues autochtones ne doit être que « le prélude d’un chemin plus long » a encouragé le Coordonnateur du système de l’ONU pour le suivi de la première Conférence mondiale sur les peuples autochtones de 2014.  Au moment où nous clôturons l’Année internationale, a ajouté le Président de l’Assemblée, sachons qu’une langue, c’est la perspicacité scientifique, c’est l’éclair de sagesse et ce sont des pratiques communautaires qui font passer les civilisations d’un stade à un autre. 

Le message de cette Année internationale, a renchéri la Présidente du Parlement sami, doit être un message d’espoir, d’amour partagé pour les langues autochtones et enfin, un appel ferme à la proclamation d’une décennie.  Le Coprésident du Comité de pilotage de l’Année internationale a dit attendre avec impatience la proclamation de cette décennie pour arrêter des mesures idoines.  Le Président de l’Assemblée a espéré qu’avec la coopération des établissements pédagogiques et de recherche, du secteur privé et de la société civile, une action décisive pourra être prise.  Il faut promouvoir les langues autochtones en tant que patrimoine de l’humanité, car l’apprentissage de ces langues est essentiel pour promouvoir le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a souligné la Chef de la liaison new-yorkaise de l’UNESCO.  Malheureusement, a reconnu le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, nous n’avons pas de données précises et il est donc urgent que le Programme mondial du recensement de la population et du logement pose, en 2020, la question spécifique de l’utilisation régulière des langues autochtones dans les foyers. 

Nous voulons veiller à la pertinence de nos langues dans un monde en mutation technologique, dans les zones urbaines, les services publics, l’éducation, les médias et la culture populaire, a réclamé la Présidente du Parlement sami.  Le Chef de l’Assemblée des Premières Nations du Canada s’est réjoui de l’augmentation du nombre des locuteurs des langues autochtones.  Ces langues sont bien vivantes, a confirmé la Présidente du Mécanisme d’experts.  Elle a affirmé, recherches à l’appui, qu’elles sont utilisées dans les sciences, notamment pour l’étude des plantes médicinales, mais aussi dans la diplomatie.  Mais ces langues pourraient être davantage protégées si les États en avaient la volonté. 

Il faut, a-t-elle martelé, des mesures et politiques correctives, car dans des pays comme le Canada ou les États-Unis, les gouvernements avaient, par le passé, mis en place des politiques visant à réprimer et supprimer les langues autochtones.  Ces États pourraient aujourd’hui protéger ces langues en consacrant à leur résurrection au moins les mêmes moyens qu’à leur destruction.  Je suis habité par un « sentiment incroyable » d’espoir en voyant les langues autochtones promues à l’ONU, a conclu le Président de l’Institut des études aborigènes d’Australie.  Après avoir entendu une trentaine d’orateurs, le Président de l’Assemblée générale a estimé que cette année augure d’un meilleur avenir pour les langues autochtones dont la préservation est cruciale pour la coexistence pacifique, la bonne gouvernance et le développement durable. 

L’Assemblée générale tiendra une autre séance publique demain, mercredi 18 décembre, à partir de 10 heures, pour précisément se prononcer sur les recommandations de sa Troisième Commission dont une sur la décennie des langues autochtones 2022-2032.  1er postage :2.50pm

MANIFESTATION DE HAUT NIVEAU MARQUANT LA CLÔTURE DE L’ANNÉE INTERNATIONALE DES LANGUES AUTOCHTONES EN 2019 (A/RES/73/156)

M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE, Président de l’Assemblée générale, a rappelé qu’en 2017, l’Assemblée avait adopté la Déclaration sur les droits des peuples autochtones pour que ces derniers puissent revivifier, utiliser, développer et transmettre aux générations futures leur histoire, leur langue, leur tradition orale, leur philosophie, leur système d’écriture et leur littérature.  Les Nations Unies, s’est réjoui le Président, ont clairement été à l’avant-poste des efforts visant à articuler les moyens de relever les défis auxquels sont confrontés les peuples autochtones dans le monde moderne.  Mais, a-t-il prévenu, les défis persistent: chaque mois, deux langues autochtones disparaissent de la surface de la terre et le statu quo serait très grave.  Les 4 000 langues autochtones actuelles sont parlées par 6% de la population mondiale à peine, lesquels représentent 15% des populations les plus pauvres de la planète. 

Pourquoi l’extinction d’une langue, d’un peuple ou d’une culture autochtone importe?  Pour plusieurs raisons, a répondu le Président.  La première raison tient au rôle de la langue.  La langue, a-t-il expliqué, permet à l’individu de penser sa place dans l’univers et surtout de développer cette vision du monde pour trouver des solutions aux problèmes urgents.  Les traditions autochtones ont été des moyens sûrs d’acquérir et de transmettre les connaissances de génération en génération.  Nous le voyons, a estimé le Président, avec la médecine des plantes, les techniques du tissage, la manière de préserver la nourriture, les modes d’administration publique et le règlement des différends.  Les percées de la pharmacie moderne arrivent rarement si elles ne s’appuient pas sur ce que l’on sait déjà. 

L’on sait aussi, a poursuivi le Président, que le progrès humain dépend des interactions entre tout l’éventail des langues et des traditions du monde.  La diversité linguistique est essentielle pour préserver l’héritage commun de l’humanité et cette diversité, reconnue comme essentielle pour la survie de l’humanité, est en péril chaque fois qu’une langue s’éteint.  Avec la mort d’une langue, ses locuteurs autochtones perdent une part essentielle de leur identité. 

Parmi les progrès, le Président a cité la création de l’Instance permanente sur les questions autochtones, les auditions informelles avec ces peuples et la sensibilisation de l’opinion publique à leur sort.  Les Nations Unies ont été au front dès 1982, s’est-il enorgueilli.  Le Président a espéré qu’avec la coopération des établissements pédagogiques et de recherche, du secteur privé et de la société civile, une action décisive pourra être prise pour protéger les langues autochtones.  Plutôt que de jeter la pierre les uns les autres, concentrons-nous, a-t-il encouragé, sur les mesures à prendre pour la survie des langues qui se parlent encore. 

Les peuples autochtones méritent la fierté de parler leur propre langue et l’école a un grand rôle à jouer.  En intégrant les langues autochtones dans le cursus scolaire, l’école remplira effectivement sa mission vitale de protéger les langues de l’érosion interne et des attaques externes.  Les peuples autochtones doivent savoir que leurs langues sont leurs cultures et que leurs cultures sont la manifestation de leurs espoirs comme partie intégrante de l’humanité.  Un peuple qui renonce à sa langue, consciemment ou pas, est un peuple qui renonce à son identité et à ses droits culturels, a prévenu le Président.  Au moment où nous clôturons l’Année internationale des langues autochtones, sachons qu’une langue c’est la perspicacité scientifique, c’est l’éclair de sagesse et ce sont des pratiques communautaires qui font passer les civilisations d’un stade à un autre.  Le Président n’a pas manqué de remercier l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et les autres agences pour avoir préparé le document stratégique de l’Année internationale. 

Le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. LIU ZHENMIN, a estimé que si importante fusse-t-elle, l’Année internationale des langues autochtones n’a jamais été que le prélude d’un chemin plus long.  L’Assemblée générale devrait en effet adopter une résolution, le 18 décembre, sur la proclamation de la Décennie des langues autochtones qui commencerait en 2022.  Ce sera l’occasion de traiter de la « crise silencieuse » de beaucoup de langues autochtones dans le monde. 

La marginalisation, l’expropriation et autres violations des droits des peuples autochtones se poursuivent malgré la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, a alerté le Secrétaire général adjoint.  Il ne fait aucun doute que les peuples autochtones doivent être émancipés politiquement, économiquement et socialement.  Ils ne devraient pas avoir à renoncer à leur langue et à leur culture, ou à migrer pour des raisons économiques, pour préserver leurs moyens de subsistance.

Les langues, a souligné à son tour le Secrétaire général adjoint, façonnent la manière dont nous communiquons.  Elles sont intrinsèquement liées à la culture, à l’histoire et à l’identité des peuples autochtones.  Chaque fois qu’une langue disparaît, le monde perd des connaissances traditionnelles précieuses et malgré leur immense valeur, les langues autochtones disparaissent à une vitesse alarmante.  Malheureusement, a reconnu le Secrétaire général adjoint, il n’y a pas de recensement ou de données précises sur ces langues.  Il est donc urgent que le Programme mondial du recensement de la population et du logement pose, en 2020, la question spécifique de l’utilisation régulière des langues autochtones dans les foyers. 

Un trop grand nombre des 370 millions d’autochtones, a conclu le Secrétaire général adjoint, ne jouit toujours pas de ses droits fondamentaux.  La discrimination et l’exclusion systématiques sont toujours là, menaçant leur mode de vie, leur culture et leur identité.  C’est le contraire, s’est indigné M. Zhenmin, de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des personnes autochtones et du Programme de développement durable à l’horizon 2030, en particulier de ses dispositions sur des sociétés inclusives et l’égalité pour tous.  Dès lors, il reste beaucoup à faire pour stopper et inverser cette tendance, a-t-il conclu.

Mme MARIE-PAULE ROUDIL, Chef de la liaison new-yorkaise de l’UNESCO, a dit, à son tour, que les activités de cette Année internationale n’ont été que les prémices de ce qu’il faut faire.  Les 900 manifestations organisées ont été largement médiatisées et l’UNESCO a lancé des projets reposant sur les technologies de l’information et des communications.  L’Organisation lancera aussi un atlas électronique des langues autochtones et des plateformes d’apprentissage.  Les peuples autochtones sont les gardiens de connaissances et autres biens immatériels, dont les langues.  Il faut protéger et promouvoir ces langues en tant que patrimoine de l’humanité, car l’apprentissage de ces langues et, plus généralement, le multilinguisme sont essentiels pour promouvoir la mise en œuvre du Programme 2030.  La représentante a salué la décision du Mexique d’organiser une réunion de haut niveau sur les langues autochtones.  Elle a aussi félicité Yalitza Aparicio, Ambassadrice de bonne volonté de l’UNESCO.  Une actrice, nominée aux Oscars, peut apporter une contribution précieuse, s’est-elle expliquée. 

Justement, Mme YALITZA APARICIO a regretté que dans son pays, le Mexique, la plupart des enfants ne savent pas qu’ils vivent parmi 68 langues autochtones.  Enfant, a-t-elle confié, je me suis rendu compte que mon père parlait une langue différente de celle de ma mère et je n’ai jamais compris pourquoi moi et mes frères étions obligés de ne parler qu’espagnol à la maison.  Lorsque je suis allée à l’école, tous les enfants faisaient de même alors que leurs propres parents parlaient d’autres langues.  J’ai vite compris qu’en nous coupant de nos racines, on nous avait privés d’une façon de voir le monde.  Je n’en veux pas à mes parents qui croyaient bien faire et qui pensaient que l’espagnol nous ouvrirait des opportunités.  Nous devons, a encouragé l’Ambassadrice de bonne volonté, être fiers de nos ancêtres et de nos langues qui sont les « codes » de notre histoire.  Mon souhait, c’est de contribuer à mieux faire connaître les communautés autochtones et leurs langues, parce que c’est l’ignorance qui entraîne la discrimination.  Les langues autochtones enrichissent le monde.  Les langues maternelles sont belles et il faut se reconnecter à ses racines, pour un monde plus riche et plus uni, a conclu la jeune actrice. 

Le Ministre de la culture et du patrimoine de l’Équateur et Coprésident du Comité de pilotage de l’Année internationale des langues autochtones a estimé qu’il est plus que jamais important de préserver et promouvoir les langues autochtones.  Pour ce faire, M. JUAN FERNANDO VELASCO TORRES a dit attendre la proclamation de la Décennie internationale des langues autochtones qui devrait permettre de se concentrer sur le défi de l’extinction des langues autochtones et d’arrêter les mesures idoines pour protéger cet élément important du patrimoine immatériel de l’humanité.

Pour Mme AILI KESKITALO, Présidente du Parlement sami de Norvège et Coprésidente du Comité de pilotage de l’Année internationale des langues autochtones, le fait que l’Année ait réuni les peuples autochtones, leurs amis et les représentants de différentes agences onusiennes mérite en soi d’être célébré.  Alors que nous amorçons le tournant vers la Décennie, elle a exigé des agences onusiennes et des États Membres l’implication effective des peuples autochtones.  Cette Année, a-t-elle poursuivi, a montré que les avancées technologiques ont beaucoup à offrir aux langues autochtones, à condition qu’elles se soucient de notre « consentement libre, préalable et informé ».  Elle a estimé que la réunion que l’UNESCO a organisée avec les peuples autochtones, les fournisseurs de technologies et les universitaires a prouvé la nécessité d’une décennie des langues autochtones. 

Le monde vit une évolution technologique rapide et il faut veiller à ce que les langues autochtones ne soient pas à la traîne.  Nous devons pouvoir appliquer nos langues à toutes les opportunités technologiques et veiller à leur pertinence dans un monde en mutation, dans les zones urbaines, les services publics, l’éducation, les médias et la culture populaire, a exigé Mme Keskitalo, avant de murmurer les paroles d’un rap de l’artiste sami, Ailu Valle: « Je n’ai pas besoin de mots quand je vois la toundra ».  La chanson, dont le titre en anglais est « Les rayons du soleil », parle du lien entre savoir autochtone, culture et nature.  Saviez-vous que le mot « toundra » est un mot en sami de kildin qui veut dire « plaine montagneuse sans arbre »?

Je vous dis cela, a expliqué la Présidente du Parlement sami, parce que ces dernières semaines à Madrid, dans les négociations sur le climat, nous n’avons pas réussi à protéger nos terres et nos moyens de subsistance.  « J’en ai le cœur brisé », a-t-elle avoué, parce que les défis écologiques menacent nos langues compte tenu de leur lien avec nos savoirs et nos modes de vie.  « Notre toundra change », s’est-elle alarmée.  Les arbres poussent aujourd’hui là où il ne devrait pas en avoir.  Bientôt, le seul souvenir qu’il nous en restera sera le mot « toundra » ou « duottar » en sami du Nord.  Or, la mémoire de nos terres est ancrée dans nos langues et c’est « à la fois triste et merveilleux » de voir la manière dont nos langues reflètent notre vision du monde.  Pour donner vie aux mots du Secrétaire général: nous ne pouvons laisser tomber, il faut, a conclu la Présidente, continuer de se battre pour la justice climatique.  Cette Année internationale a été une reconnaissance de la responsabilité mondiale à l’égard des langues autochtones et son héritage doit être un message d’espoir, d’amour partagé pour ces langues et enfin, un appel ferme à une décennie des langues autochtones.

Après avoir salué l’Assemblée générale en langue autochtone, M. PERRY BELLEGARDE, Chef de l’Assemblée des Premières Nations du Canada (APN) a déclaré: nos langues nous lient dans nos cérémonies, à nos terres, à nos eaux et à notre droit à l’autodétermination et c’est le cas pour tous les peuples autochtonesNous voulons que nos enfants grandissent dans leurs langues belles et riches, car ces langues passent toujours de la bouche des gardiens du savoir aux oreilles des jeunes qui veulent cette connexion « vitale » avec leurs ancêtres et qui veulent transmettre cette connexion aux générations futures.  « C’est leur droit fondamental », a martelé le Chef. 

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, a-t-il rappelé, consacre notre droit inhérent à utiliser, revivifier et transmettre aux générations futures nos langues, nos systèmes d’écriture, notre littérature et les noms que l’on donne aux communautés, aux lieux et aux personnes.  « Ce n’est pas un objectif abstrait. »  La colonisation a causé un profond préjudice à nos cultures et traditions et l’UNESCO nous dit aujourd’hui que plus de la moitié des langues autochtones pourraient disparaître avant la fin de ce siècle, s’est alarmé le Chef.  Au Canada, comme ailleurs, des générations entières ont été arrachées à leurs foyers et communautés parce que les gouvernements ne voulaient pas qu’elles grandissent comme membres des Premières Nations, des Inuits ou des Métis.  Les enfants étaient enlevés, obligés d’oublier leur langue, voire battus et abusés pour avoir parlé leur langue maternelle. 

Vous comprendrez maintenant, a-t-il dit, que quand nous parlons nos langues et que nos jeunes s’engagent à les apprendre et à les parler, ce n’est rien moins qu’une « victoire héroïque ».  Au Canada, a-t-il alerté, il y de fortes chances que les langues autochtones ne survivent pas à ce siècle.  Dans un pays où seulement un membre des Premières Nations sur cinq parle couramment sa langue, il faut apprendre les langues autochtones tout au long de la vie car les gens doivent avoir l’occasion de les parler dans chaque aspect de leur vie.  « Ce ne doit pas être une chose extraordinaire mais bien une chose quotidienne. » 

Notre langue, a-t-il conclu, c’est ce que nous sommes comme partie intégrante de l’humanité.  Nos langues incarnent les riches contributions que nos peuples ont fait au monde parce qu’elles expriment notre sagesse, notre vision du monde, nos lois et la vie de nos ancêtres.  Nos langues, a-t-il ajouté, incarnent notre connaissance traditionnelle de l’équilibre avec la Terre nourricière, un équilibre vital pour notre survie face aux défis écologiques.  Il est temps de s’unir pour assurer la survie de nos langues et nous ne pouvons nous permettre d’attendre.  Le Chef s’est réjoui de l’augmentation du nombre des locuteurs mais aussi de la loi C-91, de ses engagements et des bases qu’elle jette pour l’avenir.  Il a aussi souligné que le document stratégique de l’Année internationale fixe un agenda pour protéger et revivifier les langues autochtones et qu’un de ses éléments importants, est l’engagement en faveur de la « Décennie internationale des langues autochtones ».

Mme ANNE NUORGAM, Présidente de l’Instance permanente sur les questions autochtones, a déclaré que l’Année internationale a été le fruit d’un processus qui a débuté il y a bien des années.  L’Instance permanente avait en effet relevé que les langues autochtones risquaient de disparaître, et recommandé la tenue, en 2008, puis en 2016, d’une réunion d’un groupe d’experts sur la question.  Les réunions ont abouti à d’importantes recommandations, notamment la proclamation d’une année internationale, ce qui a été fait.  Cette année, l’Instance a d’ailleurs consacré une discussion thématique aux langues autochtones, réitérant qu’elles représentent des systèmes complexes du savoir évoluant depuis des millénaires et inextricablement liés aux terres, aux eaux, aux territoires et aux ressources.  Les peuples autochtones sont la clef, non seulement pour la préservation des écosystèmes mais également pour la transmission de leur culture, de leurs us et coutumes et de leur histoire. 

Les langues font partie intégrante du patrimoine et de l’identité de ces peuples et, partant, chaque langue autochtone représente un cadre unique pour la compréhension du monde.  Tout effort visant à promouvoir et à revivifier les langues autochtones doit être effectué par les peuples autochtones eux-mêmes, aidés par les États et les entités de l’ONU, a souligné la Présidente.  L’Instance permanente a recommandé une démarche reposant sur tous les droits de l’homme et les libertés fondamentales, conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, en particulier les articles 3 et 4 qui stipulent que les peuples autochtones ont le droit de revivifier, d’utiliser, de développer et de transmettre aux générations futures leur histoire, leur langue, leurs traditions orales; et d’établir et contrôler leurs propres systèmes et établissements scolaires où l’enseignement est dispensé dans leur propre langue. 

La propagation des langues autochtones, a argué la Présidente, permet un meilleur accès à la santé et à l’éducation.  Il faut savoir, a-t-elle dit, que les obstacles linguistiques entravent les procédures juridiques, car sans tribunal et institution accessibles, les peuples autochtones sont vulnérables aux actions de tous ceux qui menacent leurs terres, ressources naturelles et culturelles, lieux sacrés ou moyens de subsistance.  Les États doivent formuler des politiques, avec des financements appropriés, qui reposent sur les faits, des stratégies à long terme et des cadres de réglementation et une implication directe des autochtones. 

Selon des estimations prudentes, plus de la moitié des langues du monde auront disparu d’ici à 2100, alors que d’autres estimations disent que 95% de ces langues n’existeront plus ou seront gravement menacées d’ici à la fin de ce siècle.  À ce jour, 96% des 6 700 langues actuelles ne sont parlées que par 3% de la population mondiale.  La vaste majorité des langues sont des langues autochtones qui sont toutes condamnées à disparaître.  Devant ce constat, a conclu la Présidente de l’Instance, l’Instance permanente a vivement appuyé la proclamation de la Décennie internationale des langues autochtones 2022-2032. 

Mme KRISTEN CARPENTER, Présidente du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, a estimé que la communauté internationale a bien compris que les langues autochtones sont importantes pour le respect des droits individuels et collectifs des autochtones.  Elle a évoqué le triste sort de la jeune guatémaltèque de 7 ans, décédée en mars dernier dans un centre de détention d’immigrés clandestins aux États-Unis.  Jakelin Caal et son père ne pouvaient communiquer que dans leur langue maternelle.  Mme Carpenter a aussi parlé d’Albert Razine, un enseignant russe de 72 ans qui s’est immolé par le feu en septembre dernier pour protester contre la négligence de sa langue maternelle, l’oudmourte.  Sur une bannière trouvée à côté de son corps, on pouvait lire: « si ma langue disparaît demain, je suis prêt à mourir aujourd’hui ».  Il est inacceptable que les peuples autochtones aient à mourir pour protéger leur langue ou pour n’avoir pas été compris. 

La Présidente a tiré les leçons de l’Année internationale et la première est que les langues autochtones sont bien vivantes chez leurs locuteurs mais qu’elles pourraient être davantage protégées et promues si les États en avaient la volonté.  Deuxièmement, l’Année a montré qu’il faut des mesures et politiques correctives, car dans des pays comme le Canada ou les États-Unis, les gouvernements avaient, par le passé, mis en place des politiques visant à réprimer et supprimer les langues autochtones.  Ces États pourraient aujourd’hui protéger ces langues en consacrant à leur résurrection au moins les mêmes moyens qu’ils consacraient à leur destruction. 

Enfin, la troisième leçon tirée de l’Année internationale est que les langues autochtones ne sont pas archaïques comme certains voudraient le faire croire.  Des recherches ont en effet discrédité cette thèse.  Les langues sont aujourd’hui utilisées dans les sciences, notamment pour l’étude des plantes médicinales.  Elles sont aussi utilisées dans la diplomatie: les Navajos des États-Unis ont par exemple, dans leurs discussions avec le Gouvernement, utilisé leur langue pour expliciter des concepts comme le respect, la restitution, l’harmonie et pour expliquer comment protéger les sites secrets en vertu du droit coutumier navajo.  La langue sibérienne qui existe depuis des siècles est désormais entrée dans les nouvelles technologies et les médias sociaux, grâce notamment à des accords entre les principaux locuteurs et les entreprises technologiques.  Pour protéger les langues autochtones, a conclu Mme Carpenter, il faut travailler en coopération avec les peuples autochtones, et cela pourrait se faire dans le cadre de la Décennie des langues autochtones, si l’Assemblée générale suit la recommandation de sa Troisième Commission.

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Conseil de sécurité: inquiétudes face à l’absence de formation d’un gouvernement de transition au Soudan du Sud

8689e séance – après-midi
CS/14055

Conseil de sécurité: inquiétudes face à l’absence de formation d’un gouvernement de transition au Soudan du Sud

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan du Sud a dressé, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, un état des lieux de la situation dans ce pays qui témoigne, selon lui, d’un manque de volonté politique de parvenir à la paix que souhaite la population civile.

Alors qu’un tiers de la période de prolongation de 100 jours de la période de prétransition au Soudan du Sud s’est déjà écoulé, M. David Shearer a notamment averti que ce nouveau délai a provoqué une nouvelle désillusion pour les citoyens du pays qui considèrent que bien peu de progrès ont été faits.

Le cessez-le-feu tient et apaise les tensions, avec moins de victimes civiles et d’enlèvements, a-t-il relevé, mais les combats continuent avec des pics de violence politique par endroit.  Surtout, la décision de reporter par deux fois la désignation d’un gouvernement de transition a érodé les espoirs et la confiance et laissé penser qu’il manquait aux parties une volonté d’aboutir, a ajouté le responsable, qui a mis en garde contre un nouveau basculement dans la violence.

Dans deux mois, a-t-il enchaîné, l’arrivée de la saison sèche qui a toujours favorisé les combats, coïncidera avec le délai imposé aux dirigeants qui devront dire s’ils sont prêts à établir un gouvernement de transition pour envisager l’avenir et des élections d’ici à trois ans.  Les retards et les inondations ayant attisé les tensions, tout choix mal avisé pourrait créer les conditions idoines pour une tempête parfaite, a averti le Représentant spécial.

Parmi les signes encourageants, M. Shearer a cité la présence à Djouba de M. Riek Machar -exilé au Soudan voisin– même si ce dernier ne s’est toujours pas vu délivrer de passeport sud-soudanais.  Si les parties veulent avancer elles le peuvent: c’est une question de volonté politique et d’esprit de concessions, a insisté le Représentant spécial.  En attendant, la première occasion de déterminer si cette volonté politique existe sera l’évaluation, attendue début janvier, des progrès accomplis au bout de 50 jours de prolongation dans plusieurs domaines clefs, à commencer par la réduction des forces. 

Mais pour l’heure, chaque partie est soupçonnée de mobiliser ses forces pour la guerre, s’est-il inquiété, affirmant qu’en privé, les partisans de chaque partie conviennent qu’ils se tiennent prêts à reprendre les armes.

Lors de la récente visite du Conseil sur le terrain, les dirigeants se sont d’ailleurs accusés les uns les autres de l’absence de progrès sans parvenir à exprimer publiquement leur engagement en faveur du cessez-le-feu, a d’ailleurs déploré la délégation des États-Unis, qui a affirmé avoir « perdu confiance » dans les dirigeants du Soudan du Sud et ne plus être convaincue de leur volonté de répondre aux besoins de la population.

« Le manque de progrès est flagrant », a asséné la représentante des États-Unis qui, à l’instar de nombreuses délégations, a regretté qu’aucun compromis n’a été trouvé sur les frontières des États, une question « centrale », comme l’a souligné la France.

De son côté, la Présidente du Comité mis en place, conformément à la résolution 2206 (2015) concernant le Soudan du Sud, Mme Joanna Wronecka, qui s’est rendue sur place début octobre, s’est dite convaincue que la pleine application de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud, en particulier s’agissant des arrangements de sécurité temporaires, est cruciale pour la stabilité du pays.  Elle a également regretté que les pays de la région ne prennent pas de mesures concrètes pour appliquer les sanctions décrétées par le Conseil de sécurité, concernant notamment l’embargo sur les armes et le libre déplacement de personnes normalement frappées d’interdiction de voyager.

S’exprimant aussi à titre national, la représentante de la Pologne a dénoncé l’absence totale de reddition de comptes, et signalé, comme l’a fait notamment la Belgique, que des individus auteurs de crimes et de graves crimes, violations et d’abus contre des enfants ont pu être renommés à des fonctions officielles, encourageant ainsi une culture d’impunité.  Avec la France et la République dominicaine notamment, l’Allemagne a aussi dénoncé le recrutement d’enfants par des groupes armés et la perpétuation de violences sexuelles, même si celles-ci tendent à baisser. 

Pour la Fédération de Russie en revanche, il est inutile de « dramatiser »: prolonger la période de prétransition était indispensable et la réduction des affrontements, comme l’acheminement de l’aide humanitaire, ont déjà eu une influence positive sur le retour des réfugiés.  La délégation russe a également appelé à s’abstenir de toutes sanctions, affirmant que l’embargo sur les armes avait déjà eu des répercussions négatives sur le maintien de la sécurité.

La Chine aussi a salué « d’importants progrès » depuis la signature de l’Accord revitalisé.  La délégation a appelé à épauler les autorités du Soudan du Sud en s’appuyant sur les organisations régionales comme l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD – (S/2019/936)

Déclarations

M DAVID SHEARER, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan du Sud, a indiqué qu’à ce jour, un tiers de la période de prolongation de 100 jours de la période de prétransition au Soudan du Sud s’était déjà écoulé.  Même si ce nouveau délai a permis d’apaiser les tensions parce que le cessez-le-feu a tenu, il a cependant provoqué une nouvelle désillusion pour les citoyens du Soudan du Sud qui considèrent que bien peu de progrès ont été faits.

M. Shearer a signalé qu’en optant pour la paix l’an dernier, les parties ont lancé un processus de transformation qui a déjà porté ses fruits avec moins de victimes civiles et d’enlèvements.  Même si la violence sexuelle demeure un problème atroce, 295 victimes ont été enregistrées en 2019 contre 1 300 signalées l’an dernier et au moins 645 000 personnes déplacées ont par ailleurs pu regagner leur foyer.

Mais la décision de reporter par deux fois la nomination d’un gouvernement de transition a érodé les espoirs et la confiance et laissé penser qu’il manquait aux parties une volonté politique, a poursuivi le responsable.  Selon lui, deux voies s’ouvrent dorénavant au pays: la première consisterait à former un nouveau gouvernement d’unité qui rétablirait la confiance et la paix, permettrait le retour des déplacés et, à terme, la tenue des élections.  L’alternative serait une incapacité des parties à aboutir et un nouveau basculement dans la violence, a dit M. Shearer qui a mis en garde contre des « souffrances immenses » pour la population et un pays privé d’avenir.  « Tel est le choix à faire maintenant, pour les générations futures », a-t-il insisté.

Le Représentant spécial a indiqué que les soutiens au Soudan du Sud n’ont pas manqué tout au long des trois derniers mois: l’Ouganda a accueilli un sommet tripartite et des réunions de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) sans compter les visites de son Président ainsi que du vice-président sud-africain.  Pour sa part, l’Union africaine a gardé l’œil en permanence sur la situation et les 15 membres du Conseil de sécurité se sont rendus à Djouba pour y rencontrer les parties sur leur terrain.

M. Shearer a aussi dit que la présence de M. Riek Machar à Djouba depuis cinq jours et ses discussions en tête à tête avec M. Salva Kiir ont redonné espoir.  « On peut toujours trouver de bonnes raisons pour justifier un nouveau retard mais si les parties veulent avancer elles le peuvent: c’est une question de volonté politique », a-t-il insisté. 

Selon le Représentant spécial la première occasion qui permettra de déterminer si cette volonté politique existe sera l’évaluation, début janvier, des progrès accomplis au bout de 50 jours dans plusieurs domaines clefs, à commencer par la réduction des forces.  Il a aussi insisté sur l’importance d’accélérer la formation et l’unification des forces nationales, se préoccupant toutefois du fait que seulement 76 000 soldats ont été cantonnés et que souvent, les combattants abandonnent les sites de cantonnement pour se nourrir.  De plus chaque partie est soupçonnée de mobiliser ses forces dans la perspective de combats.  M. Shearer a aussi indiqué que le Comité de travail sur la prétransition doit veiller à acheminer les ressources là où elles sont nécessaires mais que la transparence du financement est nécessaire pour atténuer les soupçons, comme l’ont rappelé les Nations Unies, l’UA et l’IGAD.  Il importe également de résoudre la question du statut de Riek Machar qui attend toujours de se voir délivrer un passeport sud-soudanais, a enchaîné le Représentant spécial qui a toutefois qualifié d’encourageante la présence de ce dernier à Djouba depuis cinq jours.

En outre, les parties sont encore divisées au sujet du tracé des frontières et donc sur l’accès aux ressources et ces divisions sont de plus en plus liées à l’appartenance ethnique.  M. Shearer a appelé les parties à examiner ces questions de façon ouverte et à « accepter une solution qui ne sera idéale pour personne ».  Il a en outre estimé que cette question ne devrait pas être l’objet d’un référendum qui, a-t-il expliqué, serait beaucoup trop onéreux et risquerait d’aggraver les divisions ethniques. 

Quand on rencontre les différentes parties, le message est toujours le même: personne ne veut reprendre la voie de la guerre, a enchainé M. Shearer.  Mais en privé, certains responsables reconnaissent qu’ils sont prêts à prendre les armes si leurs leaders le leur ordonnent.  Jusqu’ici le cessez le feu a été respecté mais il faut rester vigilant, a-t-il prévenu.  Un pic de violence communautaire peut déboucher sur des violences politiques plus graves comme on l’a vu autour de Maiwut, et ce sont toujours les civils qui en payent le prix. 

Il a également cité les inondations qui ont touché 900 000 personnes et indiqué que dans le cadre de sa réponse d’urgence le Programme alimentaire mondial (PAM) a utilisé les stocks prépositionnés pour 2020 et que 72 000 tonnes de vivres avaient été perdues.  Cette situation signifie que les besoins seront importants pour venir en aide à 5,6 millions de personnes, pour un coût de 1,5 milliard de dollars, a prévenu M. Shearer.

Dans deux mois, a-t-il enchaîné, l’arrivée de la saison sèche qui a toujours favorisé les combats, coïncidera avec le délai imposé aux dirigeants qui devront dire s’ils sont prêts à établir un gouvernement de transition pour envisager l’avenir et des élections d’ici à trois ans.  Les retards et les inondations ayant attisé les tensions, tout choix mal avisé pourrait créer les conditions idoines pour une tempête parfaite, a averti le Représentant spécial, insistant sur l’importante responsabilité qui revient aux dirigeants de mettre un terme à la crise.

Mme JOANNA WRONECKA, Présidente du Comité mis en place conformément à la résolution 2206 (2015) concernant le Soudan du Sud, a détaillé la visite qu’elle a effectuée au Soudan du Sud, en Ouganda, au Soudan et en Éthiopie du 6 au 15 octobre 2019 afin notamment de mieux se rendre compte de la mise en œuvre des sanctions et de renforcer la coopération avec les États concernés. 

Sur le plan politique, elle s’est dit convaincue que la pleine application de l’Accord revitalisé, en particulier s’agissant des arrangements de sécurité temporaires, est cruciale pour la stabilité du pays.  Déplorant les violences de la « terrible guerre civile » au Soudan du Sud, elle a souligné, avec une vive préoccupation, l’absence de toute reddition de comptes.  « Lors de ma visite à Djouba, Bentiu et Yei, certains de mes interlocuteurs ont indiqué que les communautés dans le pays ne comprennent pas pleinement ce régime de sanctions », a-t-elle dit. 

Elle s’est inquiétée du fait que la région ne prend pas les mesures concrètes s’agissant de la mise en œuvre des sanctions et a encouragé les pays voisins à conduire les inspections en application de la résolution 2428 (2018) concernant l’embargo sur les armes.  « Il est également déplorable que des individus visés par des sanctions continuent de se déplacer sans entraves dans la région, parfois grâce à des passeports de pays de la région. » Dans seulement un très petit nombre de cas, les États ont transmis au Comité les demandes d’exemptions d’interdiction de voyager. 

La Présidente a ensuite rappelé le rapport intérimaire soumis par le Groupe d’experts sur le Soudan du Sud et exhorté les pays de la région à renforcer leur coopération avec ledit groupe et le Comité.  Elle a ensuite détaillé les réunions tenues par le Comité durant l’année écoulée, mentionnant notamment l’exposé fait en août dernier par la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.  Elle a également indiqué que depuis son dernier exposé devant ce Conseil, le Comité a reçu quatre demandes d’exemption à l’embargo sur les armes, qui ont toutes été accordées.  Aucune demande d’exemption aux interdictions de voyager n’a été reçue.

Enfin, la Présidente a exhorté les États Membres à renforcer leur engagement avec le Comité, à rechercher des clarifications sur les mesures et procédures d’exemption et à lui soumettre leurs demandes en exemption. 

Mme KELLY CRAFT (États-Unis) a indiqué que son pays et la communauté internationale ont « perdu confiance » dans les dirigeants du Soudan du Sud et ne sont plus convaincus de leur volonté de répondre aux besoins de la population, qui aspire à la paix.  Lors de la récente visite du Conseil sur le terrain, a-t-elle noté, les dirigeants se sont accusés les uns les autres de l’absence de progrès sans parvenir à exprimer publiquement leur engagement en faveur du cessez-le-feu.  Depuis un mois que le délai a été accordé, les progrès sont limités, les parties sont officiellement engagées à trouver des modalités de sécurité pour le cantonnement de leurs troupes, mais il existe des informations crédibles faisant état de recrutement des deux côtés.  En outre des bâtiments civils sont toujours occupés et Djouba reste militarisée.

Aucun compromis n’a été trouvé sur les frontières des États, a encore regretté Mme Craft.  Aux appels à l’application du principe de responsabilité, le Gouvernement répond en nommant à des postes des personnes accusées de crimes graves.  Les violations des droits de l’homme, notamment ceux des enfants, se poursuivent et les conseils d’experts sont ignorés.  Des dirigeants ont autorisé, pour certains d’entre eux, des dépenses de santé qui dépassent les dépenses de santé de tout le pays, s’est-elle indignée.  En outre, les femmes sont empêchées de participer au processus de paix, tandis que la sécurité des travailleurs humanitaires est menacée et leur accès au terrain entravé.

« Le manque de progrès est flagrant », a asséné la représentante.  Or, la prolongation du délai de 100 jours doit permettre aux dirigeants de s’engager en faveur d’un gouvernement d’unité.  Si l’Accord de paix revitalisé est véritablement mis en œuvre, il peut garantir la paix et la sécurité, a-t-elle dit, mais pour que des progrès tangibles soient constatés, les pays de la région doivent s’assurer que les dirigeants rendent de comptes.  Toute la région souffrira si le processus de paix échoue, a-t-elle mis en garde.  « Il faudra davantage que des mots pour parvenir à la paix. »  Ainsi, les parties doivent s’engager à garantir un accès humanitaire sans entrave et sans délai.  Enfin, a fait valoir Mme Craft, la volonté des groupes armés de s’en prendre aux civils justifie un embargo strict sur les armes et le maintien des sanctions.  De plus, si les dirigeants s’avèrent incapables d’appliquer les clauses de l’Accord, il conviendra d’envisager un régime des sanctions élargi.  À ce stade, c’est la crédibilité des dirigeants du Soudan du Sud qui est remise en question, a conclu la représentante américaine.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud), s’exprimant au nom des trois pays africains membres du Conseil de sécurité, Afrique du Sud, Guinée équatoriale et Côte d’Ivoire (A3), a déclaré que l’Accord revitalisé continuait d’être la « lueur d’espoir » et le « gouvernail » qui guidera la reconstruction du Soudan du Sud et apportera la paix et la stabilité au pays.  Pour cette raison, la prorogation de la période de prétransition pour une durée de 100 jours supplémentaires est une aubaine qui devrait permettre au gouvernement de progresser sur les questions contentieuses, dont la résolution est nécessaire à la pleine mise en œuvre de l’Accord revitalisé.  Parmi celles-ci, il y a notamment les questions portant sur les arrangements de sécurité et les frontières.  Les A3 encouragent les parties, et plus particulièrement Salva Kiir et Riek Machar, à continuer le dialogue en se saisissant des cadres de l’Union africaine et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  Les A3 demandent aussi à cette dernière organisation de régler la question du statut final de Riek Machar. 

Le représentant a ensuite estimé que bien que les progrès dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé demeurent limités, le maintien de la cessation des hostilités est encourageant.  Pour cette raison, les A3 appellent au maintien du cessez-le-feu pour le bien des populations.  IL a appelé tous les groupes de rejoindre le processus politique et en particulier l’IGAD à faire en sorte que Thomas Cirillo et Paul Malongo rejoignent l’Accord revitalisé.  Les A3 saluent par ailleurs l’intention du Gouvernement de débloquer 40 millions de dollars pour la mise en œuvre de cet Accord.  Ils l’encouragent enfin à continuer sa lutte contre les graves défis auxquels est confronté le pays, en particulier les violences sexuelles et les violations des droits de l’homme.  Les auteurs doivent être tenus responsables, a conclu le représentant, appelant aussi la communauté internationale à continuer d’apporter son assistance aux plus vulnérables au Soudan du Sud. 

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a déclaré que de toute évidence, le processus de paix au Soudan du Sud se trouve à une étape cruciale.  Il est donc nécessaire de surpasser les obstacles, en réglant des questions clefs sur les arrangements de sécurité et les frontières, a dit le représentant.  Il a également souligné le rôle primordial des organisations régionales dans la résolution de la situation.  L’Allemagne se félicite des pressions que ces dernières exercent sur les parties.  Elle souhaite aussi que l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) partage avec le Conseil de sécurité son rapport à mi-parcours. 

Par ailleurs, l’Allemagne qui vient de contribuer à hauteur de cinq millions de dollars au Fonds d’affectation spéciale pour la résilience de la MINUSS estime aussi que les questions humanitaires et des droits de l’homme doivent être une priorité.  À ce titre, M. Schulz a dit que le recrutement des enfants par les groupes armés doit cesser, de même que les violences sexuelles.  Les auteurs doivent être tenus responsables, a-t-il encore plaidé.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a regretté que la formation du Gouvernement de transition ait été à nouveau reportée.  « Ce report doit être le dernier », a prévenu la délégation, ajoutant qu’il était indispensable de rester sur le chemin tracé par l’Accord revitalisé.  « C’est la seule option dont nous disposons. »  Pour cette raison, la France demande au Gouvernement sud-soudanais et à l’opposition d’utiliser les 65 prochains jours pour créer les conditions nécessaires à la formation d’un gouvernement d’unité nationale.  « Même si tout ne pourra pas être réglé en 65 jours », la question des frontières intérieures est « centrale » dans ce conflit, a poursuivi la représentante, appelant les parties à faire, à court terme, preuve d’un esprit de compromis et s’engager sur le nombre d’États et sur un mécanisme de négociation.  La question du statut final de M. Riek Machar doit également être réglée et un passeport lui être délivré, a plaidé la délégation. 

Mme Gueguen a également déclaré que la paix ne pourra être durable que si elle est inclusive.  Cela signifie que la participation des femmes et le respect des quotas prévus par l’Accord sont essentiels.  Pour cette raison, la France appelle les garants de cet accord, ainsi que les acteurs régionaux à ne ménager aucun effort.  Car, selon elle, seule une pression régionale concertée pourra inciter les parties à faire des concessions nécessaires.  Il serait enfin important de réfléchir au meilleur moyen pour les Nations Unies d’appuyer les efforts régionaux, a conclu la représentante. 

M. JOSÉ MANUEL TRULLOLS YABRA (République dominicaine) s’est dit préoccupé par la prolongation de la période transitionnelle et par le fait que l’Accord de paix reste, dans une large mesure, non appliqué.  La mise en œuvre de cet accord est « une obligation morale et éthique aux innombrables avantages sociopolitiques et économiques pour la population » sud-soudanaise, a insisté le représentant.  À cet égard, il a salué la récente réunion entre le Président Kiir et M. Machar, qui ont annoncé leur décision de former le Gouvernement d’union nationale même s’ils ne parviennent pas à résoudre tous leurs différends avant la date limite.

Néanmoins, M. Trullols Yabra a regretté que ce scénario soit assombri par les tensions intercommunautaires ainsi que par la grave situation humanitaire.  Aussi, a-t-il jugé nécessaire de lancer des programmes pour le développement de la résilience et l’atténuation des risques liés aux changements climatiques.  Il a en outre lancé un appel pour que des mesures soient adoptées afin de mettre un terme aux violences sexuelles et au recrutement d’enfants soldats, ainsi que pour la signature du mémorandum d’accord sur le Tribunal mixte pour le Soudan du Sud.  À cet égard, il a salué les forces pro-Machar pour la mise en place des plans d’action relatifs à la violence sexuelle et félicité la MINUSS pour la coordination des cours mobiles dans les zones ayant un accès limité à la justice et pour son rapprochement avec la police sud-soudanaise.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a déclaré que la réunion qui a eu lieu la semaine dernière entre Salva Kiir et Riek Machar marque un pas important dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud.  Ces rencontres en face à face sont des mesures de confiance extrêmement précieuses mais elles ne sauraient remplacer la mise en œuvre globale des dispositions de l’Accord de paix, a-t-elle néanmoins souligné, surtout pour ce qui est des arrangements sécuritaires et du nombre d’États et de leur frontière.  La représentante a affirmé que les citoyens du Soudan du Sud attendent un gouvernement transitionnel inclusif et fonctionnel et a demandé à tous les signataires de l’Accord de travailler ensemble dans un esprit de compromis et de bonne foi.

La représentante s’est dite préoccupée par la lenteur dans la mise en place des arrangements nécessaires et a dit déceler un manque de volonté politique de la part des signataires de l’Accord.  Ces derniers doivent faire le nécessaire pour assurer une bonne transition et la formation d’un gouvernement transitionnel, a-t-elle insisté.  À ce sujet elle a réaffirmé qu’il ne peut y avoir de paix durable sans inclusivité, en plaidant notamment pour une plus forte représentation des femmes dans les organes et institutions de prise de décisions impliqués à tous les stades du processus de paix.

Tout en saluant le fait que le cessez-le-feu a très largement été respecté, la représentante est néanmoins alarmée par les affrontements qui ont eu lieu dans certaines zones de l’Équatoria-Occidental et de l’Équatoria-Central et par leurs conséquences sur la population civile.  Elle a demandé au Gouvernement de traduire les responsables de ces actes en justice et d’assurer la protection des civils.  La Pologne insiste en outre sur l’importance de l’engagement régional pour parvenir à une paix durable au Soudan du Sud, et salue le rôle joué par l’ Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).

Pour M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique), les défis de la mise en œuvre du processus de paix au Soudan du Sud sont nombreux et complexes.  « Les civils ont besoin que tous les combats cessent pour pouvoir reconstruire leur vie, leur maison et leurs moyens de subsistance. »  La réalisation la plus importante du processus de paix actuel est probablement le cessez-le-feu, a relevé le représentant, et il appartient entièrement aux dirigeants politiques de veiller à ce que leurs troupes le respectent.  Il a ajouté qu’il était préoccupé par le fait que des combats continuent dans certaines parties des Équatorias et que la violence intercommunautaire et sexuelle et la criminalité persistent.  Les conditions ne paraissent pas encore propices pour un retour volontaire, sûr et digne et bien informé des personnes déplacées.  Ensuite, a poursuivi M. Pecsteen de Buytswerve, « le peuple sud-soudanais a besoin de justice ».  Il a ainsi exhorté le Gouvernement à mettre fin à la culture de l’impunité, à enquêter de manière approfondie sur tous les abus et à traduire en justice les responsables des crimes.  Il faut également rendre opérationnels rapidement tous les mécanismes de justice transitionnelle, notamment le Tribunal mixte pour le Soudan du Sud. 

En outre, le peuple doit pouvoir exercer ses droits civils et politiques, a défendu le représentant qui s’est dit « inquiet des pouvoirs apparemment incontrôlés des services de sécurité nationale ».  Il a demandé des enquêtes sur les informations faisant état de détentions illégales de membres de la société civile et des médias.  Les prisonniers politiques et les prisonniers de guerre doivent être libérés sans délai.  Enfin, la population souffre d’une grave crise humanitaire, a constaté M. Pecsteen de Buytswerve.  D’importants défis à l’accès humanitaire persistent, que ce soit à cause des hostilités ou à cause des attaques contre le personnel et les biens des organismes humanitaires.  Les experts estiment que les perspectives de sécurité alimentaire n’ont jamais été aussi terribles, a rappelé le délégué qui a encouragé l’élite politique du Soudan du Sud « à se mettre au travail ». 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a salué les rencontres qui ont eu lieu en novembre et encore récemment à Djouba entre MM. Machar et Kiir et remercié l’Ouganda et l’Éthiopie, ainsi que l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) pour leur appui.  Sur le plan humanitaire, le représentant a espéré qu’avec le cessez-le-feu un environnement propice serait mis en place pour le retour des réfugiés et des personnes déplacées.  Il a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour alléger les difficultés de la population, rappelant que près de 6 millions de personnes souffrent de la faim ou de la malnutrition au Soudan du Sud.  Le représentant a salué le rôle de la MINUSS, en particulier ses activités de bons offices pour consolider la paix au Soudan du Sud.  Il a condamné les attaques contre les volontaires de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en octobre, appelant au respect par tous du droit humanitaire et des droits de l’homme.  Il a conclu en espérant que des progrès seraient prochainement enregistrés par le Conseil.

Concernant la situation politique, M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) s’est dit convaincu que l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud offrait des opportunités uniques pour la paix et la stabilité dans le pays.  Au sujet de l’extension de 100 jours de la période de prétransition, il a remarqué que « l’heure tournait » et que les parties prenantes devaient utiliser ce laps de temps pour progresser dans leurs négociations, en faisant preuve de bonne volonté et de compromis.  Il a appelé au déboursement rapide et transparent des fonds pour l’Accord, et soutenu le rôle de conseil et d’assistance technique de la MINUSS pour la mise en œuvre de l’Accord.

Sur le volet sécuritaire, M. Djani a souligné que le cessez-le-feu dans le pays devait être préservé.  Il s’est réjoui de la diminution générale de la violence, excepté dans la région de l’Équatoria, tout en notant que les récents combats tribaux et affrontements internes signalés dans des régions pourtant relativement calmes ces derniers mois montrait que la situation sécuritaire demeurait fragile.  S’agissant de la situation humanitaire, le représentant a déploré que 7,5 millions de personnes aient besoin d’assistance, y compris à la suite des inondations récentes, que 4,54 millions d’individus se trouvent en situation d’insécurité alimentaire sévère, et qu’une solution durable soit désespérément attendue par 1,5 million de déplacés internes et 2,2 millions de réfugiés.  Il a conclu en réclamant que les acteurs humanitaires disposent de l’espace nécessaire au Soudan du Sud afin qu’ils puissent effectuer leur travail. 

M. HAITAO WU (Chine) a déclaré que depuis la signature de l’Accord de paix revitalisé, la situation a fait d’importants progrès, notamment en termes de sécurité et de violence.  La Chine, qui reconnaît cependant que des défis demeurent, estime que la communauté internationale doit continuer d’appuyer les efforts du Gouvernement.  Cela dit, elle doit reconnaître le rôle premier des autorités soudanaises.  C’est à elles que revient la responsabilité de mettre en œuvre de cet Accord.  Il ne faut que les appuyer, les assister et les soutenir financièrement le cas échéant, a insisté le représentant.  Selon lui, la communauté internationale doit également s’appuyer sur les organisations régionales, dont l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  Elle doit enfin pourvoir l’aide humanitaire dont les populations ont besoin.  En ce qui la concerne, la Chine n’a cessé d’appuyer le processus politique au Soudan du Sud.  Elle a également envoyé des convois d’aide humanitaire, a assuré le représentant, appelant les autres pays à faire de même. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a estimé que la tâche du Conseil était d’aider ce jeune État à surmonter ses défis et a appelé à ne pas dramatiser la situation, soulignant les efforts déployés et notant certains progrès.  Il a jugé essentiel que les parties fassent montre de disposition à dialoguer et d’esprit de compromis et a salué les rencontres régulières entre MM. Machar et Kiir, qualifiant ce type de contact d’indispensable.  Il a également salué la conclusion d’un accord sur un cabinet de ministres tout juste annoncée par M. Machar. 

La réduction des affrontements et l’acheminement de l’aide humanitaire ont eu une influence positive sur le retour des réfugiés du Soudan du Sud, a poursuivi le représentant pour qui ces événements sont liés au renforcement de la confiance entre belligérants sur le terrain.  Le plus important est que les parties respectent le cessez-le-feu et s’en tiennent à ces accords, a-t-il dit.  À cet égard, prolonger la période de prétransition était indispensable, même si cela ne répondait pas totalement aux attentes des habitants du Soudan du Sud.

S’agissant des non signataires, le délégué russe les a appelés à souscrire le plus rapidement possible aux engagements de l’État.  Il a également appelé les acteurs régionaux à conserver l’unité de leur approche afin d’apporter une solution africaine aux problèmes africains.  Il faut renforcer la confiance pour éviter de répéter les erreurs du passé, a-t-il insisté. 

Enfin, la Russie demande de ne pas exercer de pression en imposant des sanctions ou des restrictions unilatérales sur les dirigeants, a indiqué M. Polyanskiy pour qui le fruit des efforts des médiateurs régionaux a fait apparaître une lueur d’espoir.  Il a également relevé que la mise en œuvre de l’embargo sur les armes a sapé certains secteurs des forces de sécurité et les ont empêchées de régler le conflit.  Le représentant a souhaité que la formation du Gouvernement soit suivie d’un examen du régime de sanctions.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a déclaré que le Conseil de sécurité doit répéter le message déjà lancé en juin dernier, à savoir que toutes les parties doivent s’engager à mettre en œuvre l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud, y compris en formant un gouvernement de transition.  Tout en se félicitant des rencontres de haut niveau entre le Président Salva Kiir et M. Riek Machar, le représentant a dit « ne pas comprendre » pourquoi ce dernier n’a toujours pas de passeport sud-soudanais, alors qu’il négocie pour faire partie du Gouvernement de transition.  En outre, le représentant britannique a estimé que le cessez-le-feu actuel doit être maintenu.  Le Conseil de sécurité doit pour sa part se tenir aux côtés des Sud-Soudanais pour « les protéger des comportements d’une élite égoïste » et faire en sorte que ceux qui commettent des crimes rendent des comptes, a-t-il conclu. 

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a regretté les retards permanents pour mettre en place un gouvernement provisoire d’union nationale revitalisé, qui ne font qu’alimenter l’incertitude de la population sud-soudanaise et exacerber la violence ethnique et intercommunautaire.  Soulignant l’urgence de plus grandes avancées dans les accords transitoires de sécurité, il a qualifié l’atelier sur les Mécanismes conjoints de sécurité, qui s’est tenu en novembre, de « pas positif » qui ne demande qu’à être suivi de mesures concrètes.  Il a espéré que la rencontre récente entre MM. Kiir et Machar y contribuera, de même qu’elle permettra de poser les bases d’un accord sur la question du nombre et des limites des États. 

Préoccupé par les affrontements sporadiques entre le Gouvernement et les forces d’opposition dans la région de l’Équatoria, le représentant a de nouveau appelé les groupes non signataires à s’engager pour la paix au Soudan du Sud, le dialogue étant le seul moyen de parvenir à une paix définitive.  L’intérêt collectif doit prévaloir pour parvenir à un cessez-le-feu définitif, a-t-il conclu.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Cinquième Commission: Pour 2020, le fonds de réserve fait un bond de 300%, aux dépens de la « discipline budgétaire », selon le Japon

Soixante-quatorzième session,
18e séance – matin
AG/AB/4347

Cinquième Commission: Pour 2020, le fonds de réserve fait un bond de 300%, aux dépens de la « discipline budgétaire », selon le Japon

La Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, a appris, ce matin, au grand désespoir du Japon, que les dépenses à imputer au fonds de réserve en 2020 ont fait un bond de 300%*.  La Commission était aussi saisie d’une demande** de crédit pour l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) et pour les activités de l’Éminente personnalité chargée de superviser l’enquête*** sur les circonstances de la mort de l’ancien Secrétaire général de l’ONU, Dag Hammarskjöld. 

L’année dernière, l’Assemblée générale avait approuvé pour le fonds de réserve en 2020, un montant de 21 794 200 dollars.  Or, le Secrétaire général indique, dans son dernier rapport, que les dépenses à imputer « éventuellement » sur ce fonds s’élèvent à 64 520 500 dollars, soit 42 726 300 dollars de plus que le montant approuvé.  Nous voyons un bond de 300%, s’est énervé le Japon, alors que les États Membres avaient déjà pris « une décision « difficile ».  Ce n’est pas la première fois, a fait observer le Japon, que nous voyons ce genre de dépassements.  Ils surviennent depuis l’exercice 2012-2013 mais leurs niveaux ne cessent d’augmenter au fil des ans.  Cela montre, a tranché le Japon, que la discipline budgétaire s’affaiblit à l’ONU.

Il est incompréhensible, a-t-il poursuivi, de voir un dépassement record en 2020, alors que c’est la première année du cycle budgétaire annuel et donc un temps plus court pour le fonds de réserve.  Nous sommes vraiment préoccupés par la vitesse avec laquelle la discipline budgétaire cède du terrain, a répété le Japon qui a voulu que l’on examine sérieusement les pratiques liées à ce fonds, que l’on cesse d’y recourir pour couvrir des dépenses qui n’ont rien d’« imprévues » et que l’on revienne à la discipline budgétaire.

Dans ses commentaires, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) confirme**** que cette situation, dans laquelle le montant des dépenses découlant de mandats nouveaux ou élargis dépasse le montant du fonds de réserve, s’est déjà produite lors des exercices biennaux 2006-2007, 2012-2013, 2014-2015, 2016-2017 et 2018-2019.  Il rappelle aussi que l’Assemblée générale avait alors préféré ouvrir des crédits pour les montants présentés dans les rapports correspondants plutôt que de les imputer sur le fonds.

Les délégations ont aussi épluché une demande de crédit de 130 227 800 dollars pour l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour, pendant la période allant du 1er janvier au 31 mars 2020, soit une augmentation de 1 242 350 dollars (1%) par rapport à la moitié des crédits ouverts pour la période de six mois allant du 1er juillet au 31 décembre 2019.  La période de trois mois, explique le Secrétaire général, est une période de consolidation, en attendant les décisions sur les modalités de retrait de l’Opération que le Conseil de sécurité devrait prendre une fois que la situation sur le terrain aurait été évaluée.

Le CCQAB, qui appuie la demande, estime***** tout de même que le Secrétaire général aurait dû présenter un projet de budget pour l’exercice de 12 mois allant du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020 au lieu d’une autorisation d’engagement pour une période de trois mois.

Le Soudan s’est dit conscient du défi que représente le retrait de la MINUAD.  Pour y faire face, il a dit étudier une stratégie de sortie fondée sur trois axes: l’appui aux projets programmatiques, en particulier la réduction de l’empreinte environnementale de la Mission, l’évaluation environnementale globale conjointe et le renforcement des capacités du personnel local pour le préparer au départ de la Mission.  Le Groupe des États d’Afrique, qui a pris note des rapports spéciaux du Secrétaire général et du Président de la Commission de l’Union africaine sur une approche à l’échelle du système, y compris les priorités ajustées de la MINUAD et un concept de transition, a exhorté l’ONU à se montrer « responsable » s’agissant de la réduction des effectifs ou de la stratégie de sortie. 

Nous rappelons, a-t-il dit, que le mandat de l’Opération est d’aider le Conseil de sécurité à réaliser un objectif global, à savoir une solution politique durable et une sécurité garantie au Darfour.  Le Groupe a appelé le Secrétaire général à tirer parti de l’expérience de la liquidation des missions comme celles en Côte d’Ivoire et au Libéria.  Notant que la réduction des effectifs veut dire abolition de postes, en particulier ceux du personnel local, le Groupe a demandé que l’on aide ce personnel par le renforcement de ses capacités, l’organisation de foires de l’emploi et d’autres mesures pour le préparer au marché compétitif du travail.  Le temps que ce personnel a passé aux Nations Unies devrait l’avoir doté de compétences et d’une expérience recherchées, a souligné le Groupe.  

La Commission était également saisie d’une demande de crédit de 145 700 dollars pour l’Éminente Personnalité chargée de superviser le processus d’enquête sur les circonstances de la mort de Dag Hammarskjöld, pendant la période allant de janvier 2020 à juin 2021.  Le CCQAB estime****** que, si elle était adoptée par l’Assemblée générale, cette résolution entraînerait une ponction du fonds de réserve.

Enfin, les États Membres ont examiné le rapport******* du Secrétaire général sur les incidences des variations des taux de change et d’inflation sur le projet de budget du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux pour 2020.  L’actualisation******** des coûts se traduirait par une minoration de 3 488 400 dollars, de 106 054 900 dollars à 102 566 500 dollars, relève le CCQAB. 

Le projet de budget du Mécanisme sera justement examiné au cours d’une séance publique que la Cinquième Commission a prévu de tenir, mercredi 18 décembre, à partir de 10 heures.

* A/C.5/74/14
** A/74/562
*** A/RES/72/252
**** A/74/7/Add.29
***** A/74/592
****** A/74/7/Add.30
******* A/74/586
******** A/74/7/Add.31

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: les présidents des organes subsidiaires appellent à revoir les régimes des sanctions et à davantage d’unité entre les membres

8688e séance – matin
CS/14054

Conseil de sécurité: les présidents des organes subsidiaires appellent à revoir les régimes des sanctions et à davantage d’unité entre les membres

Le Conseil de sécurité a entendu, ce matin, les exposés de cinq présidents de ses organes subsidiaires, dont neuf comités des sanctions, également représentants de pays dont le mandat en tant que membre du Conseil de sécurité s’achève à la fin de cette année. Il s’agissait des représentants de la Côte d’Ivoire, de la Guinée équatoriale, du Koweït, du Pérou et de la Pologne.

Certains ont plaidé pour un renforcement des régimes des sanctions à l’encontre de personnes ou d’entités qui, selon eux « sapent la paix », tandis que d’autres ont demandé la levée des mesures dans les pays où la situation s’est améliorée. 

Par ailleurs, les présidents des comités ont déploré les divisions et dissensions qui marquent le Conseil de sécurité.  Ils ont appelé les membres à rester unis sur les questions dont ils sont saisis. 

Ainsi, dans une République centrafricaine (RCA) « fragilisée » par l’impunité dont jouissent les groupes armés, ces acteurs doivent se poser la question de savoir si le fait de voir leurs noms apparaître dans un rapport aboutira à l’imposition de sanctions.  Sinon, ils verront le fait qu’aucun nom n’ait été ajouté à la liste depuis 2017, « comme le signe de l’intérêt décroissant de la communauté internationale envers la RCA », a prévenu le Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2127 (2013) concernant ce pays, M. Kacou Houadja Léon Adom, de la Côte d’Ivoire.  

De même, l’impunité rampante dont jouissent les groupes armés en République démocratique du Congo (RDC) doit être sanctionnée par un « message clair », en particulier dans le contexte où, certains individus frappés par des sanctions continuent de commettre des abus contre des civils et de bénéficier de liquidités issues notamment de l’exploitation des ressources naturelles, a estimé le Président du Comité établi en application de la résolution 1533 (2004) concernant la RDC, M. Mansour Ayyad Sh. A. Alotaibi, du Koweït.

De son côté, la représentante de la Pologne, Présidente du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1518 (2003) concernant l’Iraq, du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1591 (2005) concernant le Soudan et du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2206 (2015) concernant le Soudan du Sud, a de son côté plaidé pour une levée des sanctions concernant le Soudan.

Selon Mme Joanna Wronecka, les sanctions ne devraient pas être une fin en soi, mais un outil, y compris pour soutenir les accomplissements des autorités. 

Or, a-t-elle observé, la situation s’est « grandement améliorée », au Darfour, justifiant que le Conseil de sécurité explore les différentes options, y compris « de nouvelles initiatives visant à réduire le régime de sanctions dans un avenir prévisible ».

La situation en Guinée-Bissau n’est certes pas marquée par une évolution mais, a argumenté le Président du Comité des sanctions créé par la résolution 2048 (2012) relative à la Guinée-Bissau, M. Anatolio Ndong Mba, de la Guinée équatoriale, toutes les composantes de la société bissau-guinéenne estiment que les responsables ne sont pas les militaires mais les dirigeants politiques.

De ce fait, les sanctions qui pèsent sur eux devraient être levées, a-t-il plaidé, insistant sur le fait que depuis l’imposition de ces sanctions en 2012, les militaires sanctionnés ont maintenu une conduite républicaine et respectueuse de l’ordre constitutionnel et des lois, s’abstenant d’interférer dans la vie politique.

Par ailleurs, le Président du Groupe de travail informel du Conseil de sécurité sur les Tribunaux internationaux, M. Luis Ugarelli, du Pérou, a insisté sur la nécessité de voir le Conseil uni autour du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (Mécanisme résiduel) pour préserver l’héritage de la justice internationale.

M. Adom, qui présidait également le Groupe de travail sur les opérations de maintien de la paix, a indiqué que son rapport d’activité 2019 n’avait pu être adopté en raison de « dissensions » entre certains membres du Conseil de sécurité, qui s’opposent sur des questions relatives à la problématique du renseignement dans les opérations de maintien de la paix.

Ces divisions, en plus d’avoir des conséquences sur le fonctionnement même des organes subsidiaires, empêchent parfois le Conseil de sécurité de s’entendre sur des actions même mineures, d’autant plus que « certains membres du Conseil rejettent « ostensiblement » le principe de sanctions et refusent de les mettre en œuvre, a déploré Mme Wronecka.

EXPOSÉS DES PRÉSIDENTS DES ORGANES SUBSIDIAIRES DU CONSEIL DE SÉCURITÉ

Déclarations

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire), Président du Comité du Conseil de sécurité crée par la résolution 2127 (2013) concernant la République centrafricaine et du Groupe de travail sur les opérations de maintien de la paix, a déclaré que durant son mandat de Président du Comité des sanctions, il avait constaté que les différents interlocuteurs rencontrés, en particulier les représentants d’États, méconnaissaient la nature, les objectifs et le contexte d’ensemble des sanctions imposées par l’ONU.  En tant que représentant d’un pays qui a lui-même fait l’objet de sanctions de l’ONU, il lui a été plus facile d’expliquer aux autorités de Bangui que les sanctions ciblées, telles que l’embargo sur les armes, le gel des avoirs ou l’interdiction de voyager, ne visent pas à punir les pays et leur population, mais à contribuer à apporter la paix et le développement dans des pays en crise, a-t-il dit. 

M. Adom a également déclaré qu’il fallait continuer d’isoler les personnes et entités qui menacent le processus de paix en République centrafricaine (RCA), prennent pour cibles des femmes, des enfants, commettent des violences sexuelles, entravent les opérations humanitaires et attaquent les établissements scolaires, les lieux de culte et même les soldats de la paix.  « Les acteurs doivent savoir qu’ils auront à répondre de leurs actes. »  Ils devraient se poser la question de savoir si le fait de voir leur nom apparaître dans un rapport aboutira à l’imposition de sanctions et au gel de leurs avoirs et à l’interdiction de voyager.  « Ils devraient se demander si le fait que la communauté internationale s’intéresse à eux ne leur vaudra pas de se retrouver à La Haye », a-t-il poursuivi, avant de présenter quelques réflexions nées de son mandat de Président du Comité 2127.

D’après le représentant, les problèmes que rencontre aujourd’hui la RCA peuvent être mieux traités en intensifiant la coopération régionale.  Celle-ci peut en effet contribuer à éradiquer les activités illicites telles que le trafic d’armes, de munitions, de ressources naturelles et le déplacement de combattants armés dans les États de la région.  À cette fin, et en coopération avec le Groupe d’experts, le Comité a poursuivi un dialogue avec les États, notamment en les invitant à certaines réunions, afin de recueillir leurs points de vue.  De telles réunions ont eu lieu les 26 janvier et 7 septembre 2018, de même que les 29 janvier et 6 septembre 2019. 

M. Adom a également déclaré que durant ses visites de terrain, il a pu mesurer à quel point la RCA était « fragilisée par l’impunité dont jouissent les groupes armés », qui transgressent librement l’Accord de paix et commettent des atrocités contre les civils.  Or, l’article 35 dudit accord mentionne la possibilité de sanctions contre les personnes qui ne le respecteraient pas, a-t-il souligné, appelant le Comité à assumer ses responsabilités et « envisager de nouvelles sanctions contre les personnes et entités qui violent l’Accord de paix ».  Sinon, a-t-il prévenu, les auteurs verront le fait qu’aucun nom n’ait été ajouté à la Liste depuis 2017, « comme le signe de l’intérêt décroissant de la communauté internationale envers la RCA ».

S’exprimant en sa capacité de Président du Groupe de travail sur les opérations de maintien de la paix, M. Adom a indiqué que les travaux de 2018 avaient notamment porté sur les thèmes de la protection des civils dans un environnement difficile; la génération stratégique des forces dans les opération de maintien de la paix; les femmes et la paix et la sécurité; la sûreté, la sécurité et la performance des Casques bleus dans un environnement asymétrique et les leçons apprises de l’opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire. 

En 2019, le Groupe a travaillé sur les relations entre les missions et les États hôtes; le bilan de la mise en œuvre de la réforme du maintien de la paix du Secrétaire général, l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) et sur la coopération entre l’ONU, les organisations régionales dans le maintien de la paix, le cas de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et de la Force conjointe du G5 Sahel. 

Concluant, M. Adom a indiqué que le rapport d’activité 2019 que la Côte d’Ivoire avait préparé, et qui reprenait fidèlement les propos exprimés par les experts, n’a pu être adopté « en raison des dissensions entre certains membres du Conseil de sécurité ».  Ils s’opposent sur des questions relatives à la problématique du renseignement dans les opérations de maintien de la paix.  La Côte d’Ivoire exhorte ces États à faire des concessions afin que ledit rapport puisse être adopté comme document du Conseil de sécurité.  À défaut, a-t-il prévenu, la Côte d’Ivoire se réserve le droit de le publier à titre national. 

M. LUIS UGARELLI (Pérou), Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1373 (2001) concernant la lutte antiterroriste, du Groupe de travail du Conseil de sécurité créé par la résolution 1566 (2004) concernant la lutte antiterroriste, du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2140 (2014) sur le Yémen et du Groupe de travail informel du Conseil de sécurité sur les Tribunaux internationaux, a insisté sur la nécessité de voir le Conseil uni autour du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (Mécanisme résiduel) pour préserver l’héritage de la justice internationale.  Ces Tribunaux, a-t-il rappelé, ont renforcé la lutte contre l’impunité et la dissuasion de crimes atroces, et promu la réconciliation tout en développant une jurisprudence pénale internationale.  Au cours des deux dernières années, le Groupe de travail s’est réuni à plusieurs reprises pour discuter des rapports semestriels et adopter une déclaration présidentielle ainsi que la résolution 2422 (2018) qui appelle les États à coopérer avec le Mécanisme.  Il a souhaité au représentant du Viet Nam qui lui succède beaucoup de succès pour continuer de développer cette approche constructive. 

En second lieu, le Pérou a assumé la présidence du Comité contre le terrorisme (CCT) en s’appuyant sur sa propre expérience.  À cet égard, le représentant a insisté sur l’importance des visites de terrain qui permettent au Comité d’évaluer les forces et faiblesses des États Membres, de développer si besoin une assistance technique et de partager les informations concernant les nouvelles pratiques des terroristes et comment les contrer.  Ainsi le CCT a réalisé des visites dans 31 pays, dont 5 pays membres du Conseil, et il est important que ceux-ci soient les premiers à accepter ces visites, a-t-il souligné.  Le CCT a veillé à entretenir des relations étroites et coordonnées avec le Bureau de lutte contre le terrorisme pour renforcer les activités de l’ONU en la matière.  Le Comité, a encore précisé M. Ugarelli, a également 22 sessions d’information sur des domaines spécifiques intéressant les États Membres, comme la sécurité maritime et l’aviation civile, l’usage des drones et l’émergence de nouvelles menaces.  Mais le CCT a également veillé à la protection des droits de l’homme dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent – en particulier les droits des réfugiés et le droit humanitaire.  Enfin le Comité a préparé des documents politiques sur les Principes directeurs de Madrid relatifs aux combattants terroristes étrangers. 

Enfin, en tant que Président du Comité des sanctions sur le Yémen, le Pérou a accordé une importance particulière à ce pays compte tenu de la crise humanitaire qui le frappe et a voulu envoyer un signal ferme aux acteurs concernés indiquant qu’ils s’exposaient à des sanctions.  Le Comité a effectué sa première visite dans la région pour sensibiliser aux objectifs des sanctions du Comité 2140 et obtenir des informations claires sur leur mise en œuvre.  Cette visite a permis un dialogue et une coopération renforcée entre le Comité et les États de la région.  Pour le représentant les rapprochements ainsi obtenus plaident en faveur de nouveaux rapprochements entre les acteurs régionaux qui permettent d’avancer dans les solutions politiques impulsées par l’ONU.  M. Ugarelli a appelé à cette occasion à un soutien fort et continu au Groupe d’experts du Comité 2140 pour qu’il puisse continuer de travailler de manière indépendante et impartiale, et protégé de toute pression.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne), Présidente du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1518 (2003) concernant l’Iraq, du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1591 (2005) concernant le Soudan et du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2206 (2015) concernant le Soudan du Sud, a évoqué le travail accompli depuis deux ans. 

S’agissant du Comité 1518, la représentante a dit avoir recherché des moyens créatifs de soutenir l’Iraq afin qu’il récupère ses avoirs et progresse dans la procédure de radiation d’entités et d’individus de la liste de sanctions du Comité.  Dans ce cadre, elle a fait état de consultations avec les membres pertinents du Conseil au sujet « de nouvelles initiatives visant à réduire le régime de sanctions dans un avenir prévisible ».  Lors d’une première réunion, tenue le 9 janvier 2019, a-t-elle indiqué, la délégation iraquienne a fait circuler un document intitulé « Mécanisme d’action pour la récupération des avoirs », lequel a été transmis au Comité.  À l’occasion de la seconde réunion, le 12 février 2019, le Représentant spécial d’INTERPOL auprès des Nations Unies a informé le Comité d’un possible accord de coopération inspiré d’accords similaires avec d’autres comités de sanctions. 

Selon Mme Wronecka, cette approche créative a contribué à revigorer les travaux du Comité.  En l’espace de deux ans, a-t-elle observé, nous avons vu progresser la procédure de radiation d’entités figurant sur la liste du Comité.  C’est ainsi qu’au mois de décembre 2019, le nombre de ces entités s’élève à 76, contre 169 deux ans plus tôt.  Cette réduction de plus de moitié du nombre des entités visées est le résultat des efforts déployés par le Comité et la Mission permanente en Iraq, s’est-elle félicitée, encourageant l’Iraq à soumettre de nouvelles requêtes en ce sens afin que les 76 entités restantes soient retirées de la liste dès que possible.  Elle a également formé l’espoir que le Comité reste actif en 2020 sous la direction du Représentant permanent de l’Estonie. 

Évoquant ensuite les Comités concernant le Soudan et le Soudan du Sud, Mme Wronecka s’est attardée sur la mise en œuvre des sanctions et sur leur efficacité.  À ses yeux, ces sanctions ne devraient pas être une fin en soi mais un outil servant un motif spécifique établi par la communauté internationale.  « Pour que le régime soit effectif, il convient que les sanctions soient soumises régulièrement à la réflexion du Conseil et inscrite dans un contexte politique élargi », a-t-elle fait valoir.  À cet égard, elle a estimé qu’il était de la responsabilité du président d’un comité d’approfondir le dialogue entre son organe et le pays soumis à des sanctions.  C’est dans cet esprit, a-t-elle dit, qu’elle s’est rendue au Soudan, au Soudan du Sud et dans les pays de la région en 2018 et 2019, invitant ces derniers à participer à chacune des réunions des Comités.  Dans le même temps, elle s’est employée à renforcer les contacts des Comités avec d’autres organes subsidiaires du Conseil de sécurité, notamment le Comité des sanctions sur la Libye, ainsi qu’avec les Représentants spéciaux du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés et pour les violences sexuelles commises en période de conflit. 

Pour la représentante, la pleine mise en œuvre du régime de sanctions 2206 peut servir à protéger le processus de paix au Soudan du Sud et à écarter les menaces pesant sur l’application de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud et sur la formation du gouvernement de transition.  Elle s’est déclarée convaincue que l’embargo sur les armes, introduit l’an dernier par le Conseil, a joué un rôle important dans la réduction des souffrances des populations civiles. 

Abordant ensuite le régime de sanctions appliqué au Soudan, elle a réaffirmé que la situation au Darfour s’est « grandement améliorée » depuis l’imposition de ce régime.  Selon elle, il ne fait aucun doute que la situation au Darfour est intimement liée au processus politique actuel dans le pays.  De fait, les changements politiques au Soudan sont l’occasion de parvenir à un accord de paix complet et inclusif au Darfour, a-t-elle souligné, encourageant le Conseil à explorer les différentes options en vue de soutenir les accomplissements des autorités et du peuple soudanais, conformément à la résolution 2455 (2019). 

S’agissant enfin du fonctionnement des organes subsidiaires, Mme Wronecka a reconnu que le président d’un comité dispose d’une autonomie et d’une liberté d’action limitées, d’autant plus que « certains membres du Conseil rejettent ostensiblement le principe de sanctions ».  Les comités prenant leurs décisions par consensus, les divisions politiques au sein du Conseil ont parfois empêché de s’entendre sur des actions même mineures, a-t-elle déploré.  De même, alors que les résolutions du Conseil appellent à une mise en œuvre du régime de sanctions, certaines délégations n’ont pas appuyé ces mesures dans le cadre des comités et n’ont pas soutenu le travail des groupes d’experts.  Elle a toutefois qualifié d’unique et enrichissante son expérience à la tête de ces comités et souhaité bonne chance à ses successeurs, respectivement l’Estonie pour l’Iraq et le Soudan, et le Viet Nam pour le Soudan du Sud. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït), Président du Comité établi en application de la résolution 1533 (2004) concernant la République démocratique du Congo, a indiqué que le Comité, pendant sa présidence de deux ans, a tenu des réunions avec la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et le Service de la lutte antimines sur la neutralisation des groupes armés, la surveillance de l’embargo sur les armes ou bien encore l’exploitation des ressources naturelles.  Il a mentionné sa première visite dans le pays en mai de cette année afin d’obtenir des informations de première main sur la mise en œuvre des sanctions. 

Très constructives, les deux années passées ont mis en lumière les défis que le Comité doit relever, mais aussi les bonnes pratiques qui pourraient être pérennisées, a expliqué M. Alotaibi.  Il a appelé le Conseil à continuer de combattre l’impunité rampante des groupes armés en RDC et à « envoyer un message clair à tous ceux qui veulent saper la paix et la sécurité dans le pays et la région ».  Certains individus frappés par des sanctions continuent de commettre des abus contre des civils et de bénéficier de liquidités générées par des taxes illégalement imposées à la population et par l’exploitation des ressources naturelles.  Ces individus réussissent à se soustraire aux sanctions en ne voyageant pas et en n’utilisant pas le système bancaire pour leurs transactions.

Le représentant a rappelé que l’obligation qui incombe aux États Membres de notifier le Comité avant de fournir un appui militaire aux autorités congolaises permet d’améliorer la surveillance et le travail de traçabilité du Comité et du Groupe d’experts.  Cela est nécessaire pour le règlement de la crise en RDC et dans la région des Grands Lacs, parce que les armes et équipements militaires qui sont moins traçables peuvent se retrouver entre les mains de groupes armés pour attaquer des civils, des travailleurs humanitaires ou des Casques bleus à l’est du pays.

M. Alotaibi a indiqué que les sanctions, pour être efficaces, doivent être pleinement mises en œuvre par les États Membres, par le biais notamment d’une coopération avec ce Comité, le Secrétariat et le Groupe d’experts.  Enfin, le Président a souligné l’importance d’appuyer le travail dudit Groupe, qui a fourni au Comité une masse d’informations considérable sur les derniers développements de la situation à l’est de la RDC.  Les experts n’ont ménagé aucun effort pour obtenir des informations crédibles et écarter les éléments erronés, a-t-il dit.  « Au nom du Comité, laissez-moi souligner l’importance capitale que nous attachons au travail, à l’indépendance, mais aussi à la sécurité des experts. »

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale), Président du Comité des sanctions créé par la résolution 2048 (2012) relative à la Guinée-Bissau, a rappelé que ce pays traverse une crise politique chronique, dont les causes profondes ne sont toujours pas réglées.  Les efforts internationaux et régionaux pour trouver une solution durable semblent porter leurs fruits sur le terrain, puisque certaines dispositions clefs de l’Accord de Conakry ont été appliquées, mais la véritable solution reste entre les mains des dirigeants.

Le Président du Comité des sanctions a espéré que le second tour de l’élection présidentielle en Guinée-Bissau, qui aura lieu le 28 décembre, débouchera sur le transfert pacifique du pouvoir aux mains du nouveau Président élu et mette définitivement un terme à l’incertitude politique.  Lors de sa seconde visite dans le pays à la fin du mois d’octobre, M. Ndong Mba a relevé que « le manque de volonté politique pour parvenir à une solution se fonde uniquement sur des intérêts et des ambitions personnels ».  Cela étant dit, depuis l’imposition des sanctions en 2012, les militaires sanctionnés ont maintenu une conduite républicaine et respectueuse de l’ordre constitutionnel et des lois, s’abstenant d’interférer dans la vie politique.  Toutes les composantes de la société bissau-guinéenne plaident pour la levée des sanctions contre les militaires, estimant que les responsables de l’instabilité politique ne sont pas les militaires mais les dirigeants politiques, a-t-il fait observer. 

Pour sa part, le représentant a jugé opportun que le Conseil de sécurité envisage de lever les sanctions envers les militaires, ou même le régime des sanctions lui-même, après la fin du cycle électoral et le transfert du pouvoir au Président élu.  Avant de transmettre son mandat au Tunisien Moncef Baati, M. Ndong Mba a encouragé la communauté internationale à continuer d’apporter son soutien à la Guinée-Bissau.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale adopte des textes sur l’assistance humanitaire et les secours en cas de catastrophe, dans le contexte d’une augmentation « exponentielle » des besoins

Soixante-quatorzième session,
48e & 49e séances plénières, matin & après-midi
AG/12229

L’Assemblée générale adopte des textes sur l’assistance humanitaire et les secours en cas de catastrophe, dans le contexte d’une augmentation « exponentielle » des besoins

La multiplication des crises dans le monde ayant accru les besoins humanitaires de « manière exponentielle », le Président de l’Assemblée générale a déclaré aujourd’hui qu’« échouer à protéger et à autonomiser ceux qui vivent des tragédies serait un échec pour l’humanité ».  M. Tijjani Muhammad-Bande s’exprimait à la fin du débat sur le renforcement de la coordination de l’aide humanitaire et des secours en cas de catastrophe fournis par les organismes des Nations Unies, à l’issue duquel l’Assemblée générale a adoptée cinq projets de résolution, dont deux ont fait l’objet de votes séparés à la demande des États-Unis. 

Aujourd’hui, a constaté le Président de l’Assemblée générale, les crises humanitaires sont plus longues et gagnent en taille et en complexité.  Des générations entières grandissent dans les camps de réfugiés.  Quelque 70,8 millions de personnes dans le monde ont été forcées de fuir de chez elles et leur nombre augmente.  En 2018, les plans d’aide humanitaire ont ciblé le nombre record de 97,9 millions de personnes.  Les besoins de financement ont culminé à 25,1 milliards de dollars.  Malgré le montant record de 15,2 milliards de dollars généreusement versés, le déficit de financement a oscillé autour de 40%, comme il le fait depuis cinq ans, dit le Secrétaire général dans son rapport (A/74/81).

Plutôt que de simplement réagir aux conséquences humanitaires des catastrophes et des crises, nous devons consacrer davantage d’énergie et de ressources à la préparation à l’action précoce, a préconisé l’Union européenne.  Investir davantage dans les alertes et financer les prévisions permettra d’agir avant que les catastrophes surviennent ou que les violences gagnent en intensité, a-t-elle fait valoir.  Avec des crises qui touchent plus de personnes sur de plus longues périodes, la communauté internationale doit faire plus même si cela signifie faire différemment, a renchéri le Royaume-Uni, qui a fait part de sa détermination à travailler à une approche nouvelle et plus solide de la gestion des risques de catastrophe « qui n’ont plus rien d’imprévisible ». 

Tout indique, a par exemple confirmé la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, que si la communauté internationale adopte des mesures pour renforcer la résilience à la crise climatique, « nous pourrions réduire le nombre de personnes nécessitant une aide à 70 millions en 2030, et voire à 10 millions en 2050 ».  Mais « il faut agir maintenant ».  Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a attiré l’attention sur trois problèmes « dommageables » à l’aide humanitaire: le déficit de confiance, les populations « indûment privées de leur liberté à cause de leur association avec certains groupes armés » et les conflits en milieu urbain. 

Adoptée par consensus après le rejet de l’amendement des États-Unis opposés aux références à la « santé sexuelle et procréative », la résolution sur la « coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles », a expliqué le Groupe des 77 qui l’a présentée, reconnaît le lien clair entre secours d’urgence, relèvement et développement, et réaffirme que pour garantir une transition sans heurt entre ces trois phases, les secours d’urgence doivent être fournis de manière à appuyer le relèvement à court et à moyen termes pour parvenir, à long terme, au développement.  La résolution met surtout l’accent sur l’impact sur les catastrophes naturelles, leur ampleur et leur envergure croissantes.  Elle souligne l’importance de l’action précoce pour en limiter et minimiser les conséquences. 

En 88 paragraphes sur 20 pages, la résolution encourage aussi une implication plus marquée du secteur privé dans les activités de gestion des risques de catastrophe et d’assistance humanitaire et appelle à la multiplication des efforts pour mobiliser un appui financier prévisible et pluriannuel et des ressources supplémentaires grâce à des approches financières par anticipation.  Abritant à elle seule 18% des réfugiés dans le monde, dont plus de 3,6 millions de Syriens, la Turquie a proposé dans les prochains mois, un débat sur le financement novateur et souple d’une aide humanitaire estimée à 26,8 milliards de dollars en 2020, soit une augmentation « exponentielle », a fait observer la Suède, en présentant le texte sur « le renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies » qui a été adopté par consensus et cette fois aussi, après le rejet des amendements américains. 

La résolution au nombre record de 100 coauteurs est la même que l’année dernière.  Plutôt que de changer ses 76 paragraphes, nous avons préféré, a expliqué la Suède, mené une discussion « stratégique » sur les défis humanitaires, « pas ceux d’hier mais ceux d’aujourd’hui et de demain », et sur la manière d’appuyer ensemble et au mieux le système d’assistance humanitaire de l’ONU.  Il en est ressorti, a affirmé la Suède, le sentiment renouvelé d’un « profond engagement » en faveur de l’action humanitaire « ici à l’ONU ».  Nous ne sommes pas toujours d’accord dans cet hémicycle, mais nous le sommes sur les principes humanitaires et sur notre responsabilité partagée à l’égard de ceux qui sont dans le besoin.  C’est « important, rassurant et véritablement inspirant », s’est réjouie la Suède. 

Ce qui l’est moins, c’est certainement l’augmentation du nombre absolu des membres du personnel affectés par des incidents sur le terrain, dont une augmentation du nombre de morts parmi le personnel humanitaire.  Les attaques contre les locaux et les missions médicales de l’ONU ne cessent de s’amplifier, a dénoncé l’Union européenne, en présentant le texte sur la « sûreté et sécurité du personnel humanitaire et la protection du personnel des Nations Unies », adopté par consensus.  La résolution reconnaît une fois encore les menaces diverses et multidimensionnelles auxquelles sont confrontés ces personnels et encourage tous les efforts visant à renforcer les partenariats et les échanges d’informations ainsi que l’évaluation des risques entre l’ONU, ses agences humanitaires et d’autres organisations humanitaires.  Une coopération forte entre acteurs travaillant en vertu des mêmes principes peut mener à une action collective forte en matière de prévention et d’atténuation des risques sécuritaires dans les situations de crise. 

Sans les agents humanitaires, il n’y a pas d’aide possible.  « L’équation est simple » mais sa simplicité cache la tâche la plus complexe et la plus difficile: atteindre les gens dans le besoin tout en garantissant la sécurité du personnel, a martelé l’Union européenne, qui a aussi présenté la résolution sur l’« assistance au peuple palestinien », adoptée par consensus.  Pour un changement « fondamental » à Gaza, le texte appelle toutes les parties à prendre des mesures urgentes, en droite ligne de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, y compris la fin du blocus, l’ouverture totale des points de passage et l’accès humanitaire, tout en tenant compte des préoccupations sécuritaires légitimes d’Israël. 

Quant au Bélarus, il a présenté le texte sur les « conséquences durables de la catastrophe de Tchernobyl » dont le but est de poursuivre la coopération pour aider les pays concernés à réaliser les objectifs de développement durable.  Le texte prend note de la mise sur pied de la nouvelle arche de confinement, financée par plus de 45 pays donateurs au moyen de fonds gérés par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement.  Il prie le Président de l’Assemblée générale d’organiser, dans les limites des ressources existantes, une séance extraordinaire commémorative marquant le trente-cinquième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl le 26 avril 2021.

Demain, mardi 17 décembre, dès 10 heures, l’Assemblée générale tiendra une manifestation de haut niveau pour marquer la fin de l’Année internationale des langues autochtones. 

RENFORCEMENT DE LA COORDINATION DE L’AIDE HUMANITAIRE ET DES SECOURS EN CAS DE CATASTROPHE FOURNIS PAR LES ORGANISMES DES NATIONS UNIES, Y COMPRIS L’ASSISTANCE ÉCONOMIQUE SPÉCIALE

Pour l’examen de cette question, l’Assemblée générale était saisie des rapports du Secrétaire général sur la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire et la protection du personnel des Nations Unies (A/74/464), le renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies (A/74/81), le Fonds central pour les interventions d’urgence (A/74/138), la coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles: de la phase des secours à celle de l’aide au développement (A/74/319), l’assistance au peuple palestinien (A/74/89) et les conséquences durables de la catastrophe de Tchernobyl (A/74/461). 

M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a présenté le projet de résolution sur les « conséquences durables de la catastrophe de Tchernobyl » (A/74/L.30) et insisté sur une coopération internationale, menée sous l’égide de l’ONU, pour parer aux conséquences de la catastrophe nucléaire survenue à Tchernobyl, il y a 35 ans.  Pays le plus petit de la zone de contamination, le Bélarus, a affirmé le représentant, subit encore ces conséquences sur un quart de son territoire.  Le principe de base du projet de résolution, a-t-il dit, est de poursuivre la coopération pour aider les pays concernés à réaliser les objectifs de développement durable.  Le représentant a signalé que la nouvelle arche de confinement, financée par plus de 45 pays donateurs au moyen de fonds gérés par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, est désormais en place à Tchernobyl.  Il a également mis en exergue d’autres projets, avant d’attirer l’attention sur le fait que le projet de résolution prie le Président de l’Assemblée générale d’organiser une séance extraordinaire commémorative marquant le trente-cinquième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl le 26 avril 2021.  La santé, le climat et la sécurité écologique sont parmi les axes fondamentaux de l’assistance nécessaire aux régions sinistrées, a conclu le représentant. 

Au nom de l’Union européenne, M. JUKKA SALOVAARA (Finlande) a présenté le texte intitulé « Sûreté et sécurité du personnel humanitaire et protection du personnel des Nations Unies » (A/74/L.32) et a souligné la complexité du paysage humanitaire actuel: le nombre et la magnitude des besoins dépassent très largement les ressources disponibles et les crises sont de plus en plus longues.  Les risques sont plus graves alors que leur nature est de plus en plus imprévisible.  Le travail humanitaire, a insisté le représentant, dépend de ceux qui ont le courage et la détermination de le faire.  Sans les agents humanitaires, il n’y a pas d’aide possible.  « L’équation est simple » mais sa simplicité cache la tâche la plus complexe et la plus difficile: atteindre les gens dans le besoin tout en garantissant la sécurité du personnel.  Cette nouvelle réalité, a reconnu le délégué, n’épargne pas le personnel des Nations Unies et le personnel médical.  La noblesse de leur mission ne les protège même plus. 

L’année dernière, s’est inquiété le représentant, nous avons vu quelques tendances préoccupantes: une augmentation du nombre absolu des membres du personnel affectés par des incidents, dont une augmentation du nombre de morts parmi le personnel humanitaire.  Les attaques contre les locaux et les services médicaux de l’ONU ne cessent de s’amplifier, a dit le représentant.  La redevabilité laisse à désirer, contribuant au sentiment d’impunité et à la répétition d’actes ignobles.  Les lois nationales et internationales offrent des cadres solides mais la redevabilité traîne des pieds.  Nous avons, a insisté le représentant, la responsabilité collective de protéger les personnels onusien et humanitaire et de faire rendre des comptes à ceux qui les mettent en danger.

Le projet de résolution, a expliqué le représentant, reconnaît une fois encore les menaces diverses et multidimensionnelles et encourage tous les efforts visant à renforcer les partenariats et les échanges d’informations ainsi que l’évaluation des risques entre l’ONU, ses agences humanitaires et d’autres organisations humanitaires.  Une coopération forte entre acteurs travaillant en vertu des mêmes principes peut mener à une action collective forte en matière de prévention et d’atténuation des risques sécuritaires dans les situations de crise.  La résolution reconnaît aussi l’importance du droit international dans la lutte contre le terrorisme. 

Le délégué a ensuite présenté le texte intitulé « Assistance au peuple palestinien » (A/74/L.33) et indiqué que la plus grande priorité doit être l’atténuation des tensions afin d’éviter un nouveau conflit à Gaza.  Il est également jugé indispensable d’assurer le retour de l’Autorité palestinienne à Gaza pour améliorer de manière durable les conditions de vie et la situation humanitaire.  Mais pour des résultats à long terme, il faut « un changement fondamental » à Gaza.  C’est pourquoi le texte appelle une fois de plus toutes les parties à prendre des mesures urgentes, en droite ligne de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, afin de changer la situation humanitaire, politique, sécuritaire et économique de Gaza, y compris par la fin du blocus, l’ouverture totale des points de passage et l’accès humanitaire, tout en tenant compte des préoccupations sécuritaires légitimes d’Israël. 

L’Union européenne, a dit le représentant, continuera de soutenir les efforts de l’ONU et de l’Égypte en vue de la réunification de Gaza et de la Cisjordanie sous une seule et légitime Autorité palestinienne.  L’Union européenne compte également poursuivre son soutien au peuple palestinien, y compris les réfugiés.  Le délégué a rappelé que l’Union européenne est le premier donateur de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (l’UNRWA) et qu’elle a été la première à répondre à ses appels pour des fonds additionnels pendant la crise financière « extraordinaire » de ces deux dernières années. 

Présentant le projet de résolution A/74/L.34 au nom d’un nombre record de 100 coauteurs, Mme ANNA-KARIN ENESTRÖM (Suède) a d’abord indiqué que cette année marque le vingt-huitième anniversaire de la résolution historique 46/182 de décembre 1991 qui a jeté les bases du système humanitaire actuel des Nations Unies.  Les besoins humanitaires ont augmenté de manière exponentielle ces dernières années, à cause des guerres, des conflits prolongés, des catastrophes naturelles et de l’impact des changements climatiques.  Mais l’objectif des efforts collectifs reste intact par rapport à 1991: « venir efficacement en aide aux femmes et aux hommes affectés par les crises ».  Cette année, a indiqué la représentante, les négociateurs n’ont pas modifié le texte de la résolution à l’exception de quelques ajustements mineurs techniques.  Le projet de cette année est donc le même que celui de l’année dernière. 

Les délégations ont plutôt mené une discussion « stratégique » sur les défis humanitaires, « pas ceux d’hier mais ceux d’aujourd’hui et de demain », et sur la manière d’appuyer ensemble et au mieux le système d’assistance humanitaire de l’ONU.  Il en est ressorti, a affirmé la représentante, le sentiment renouvelé d’un « profond engagement » en faveur de l’action humanitaire « ici à l’ONU ».  Nous ne sommes pas toujours d’accord dans cet hémicycle, mais nous le sommes sur les principes humanitaires et notre responsabilité partagée à l’égard de ceux qui sont dans le besoin.  C’est « important, rassurant et véritablement inspirant. »  La représentante s’est dite fière de présenter une résolution qui est le fruit du dévouement de beaucoup d’États Membres, petits et grands, de ceux qui fournissent l’assistance humanitaire, qui sont sujets aux catastrophes naturelles et qui ont appris comment les atténuer, qui ont souffert de la violence et d’un conflit armé, forçant les gens à fuir, et de ceux qui accueillent généreusement les personnes en besoin de protection.  Le nombre record de coauteurs, a ajouté la représentante, démontre la véritable nature mondiale de la solidarité humanitaire.  Une adoption par consensus enverrait un message important au système des Nations Unies et au monde entier sur l’engagement collectif à un système effectif de réponse humanitaire.  Il est important d’envoyer ce message ensemble, en tant que « nations unies », a conclu la représentante, qui a appelé à un large appui à cette tradition du consensus humanitaire de 29 ans. 

Également au nom de l’Inde, la représentante a établi les besoins humanitaires à 26,8 milliards de dollars, les crises étant plus graves et plus longues.  Elle a aussi mis l’accent sur la complexité de l’assistance humanitaire dans des crises multidimensionnelles.  Elle a aussi insisté sur la valeur ajoutée d’un financement souple, non préaffecté et prévisible. 

La Suède, a-t-elle souligné, n’a cessé d’augmenter son aide financière au cours des cinq dernières années et la marine indienne a été la première à répondre à la catastrophe provoquée par le passage du cyclone Idai au Mozambique et dans les autres pays.  L’Inde, qui reste déterminée à fournir son aide, a d’ailleurs lancé la « Coalition pour les catastrophes humanitaires ». 

Au nom du Groupe des 77 et la Chine, M. RIYAD H. MANSOUR, Observateur permanent de l’État de Palestine, a présenté le projet de résolution « Coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles: de la phase de secours à celle de l’aide au développement » (A/74/L.31).  Il a indiqué que le texte réaffirme l’importance de cette coopération internationale et les principes directeurs du renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies.  La résolution, a-t-il poursuivi, insiste sur la responsabilité première des pays affectés de lancer, organiser, coordonner et mettre en œuvre l’assistance humanitaire sur leurs territoires.  Le texte reconnaît toujours le lien clair entre secours d’urgence, relèvement et développement, et réaffirme que pour garantir une transition sans heurt entre ces trois phases, les secours d’urgence doivent être fournis de manière à appuyer le relèvement à court et à moyen termes pour parvenir, à long terme, au développement. 

La résolution de cette session, a dit le représentant, met surtout l’accent sur les changements climatiques et leur impact sur les catastrophes naturelles.  Elle accueille, à cet égard, avec satisfaction le Sommet Climat 2019 du 23 septembre et prend note des initiatives et des engagements multipartenaires qui y ont été présentés.  La résolution parle aussi de l’ampleur et de l’envergure croissantes des catastrophes naturelles et insiste sur la nécessité de redoubler d’efforts pour renforcer les capacités des communautés en les aidant à se préparer et à répondre aux catastrophes et à s’en relever.  Le texte souligne l’importance de l’action rapide pour limiter et minimiser les conséquences potentielles des catastrophes naturelles.  Elle encourage en outre les États à mettre au point des approches cohérentes pour relever les défis des déplacements et prend note des initiatives pertinentes à ce propos. 

Tout en reconnaissant la contribution importante des écosystèmes sains pour réduire les risques de catastrophe et renforcer la résilience des communautés, la résolution encourage tous les États, les entités des Nations Unies et autres acteurs pertinents à promouvoir des approches fondées sur les écosystèmes et des solutions reposant sur la nature pour la réduction des risques de catastrophe à tous les niveaux et durant toutes les phases de gestion et réduction des risques.  La résolution encourage aussi les efforts accrus et une implication plus marquée du secteur privé dans les activités de gestion des risques de catastrophe et d’assistance humanitaire.  Elle appelle à la multiplication des efforts pour mobiliser un appui financier prévisible et pluriannuel afin de réduire les besoins, les risques et les vulnérabilités, et des ressources supplémentaires grâce à des approches financières par anticipation.  La résolution couvre tout l’éventail des catastrophes naturelles, de l’action rapide aux efforts de reconstruction pour remettre sur pied des communautés fortes et réaliser le développement durable.  Cette année, le texte appelle les États Membres, les organisations humanitaires et autres parties prenantes à assurer un accès à l’eau potable et aux services d’assainissement et d’hygiène à tous, en particulier les femmes et les filles.

L’Observateur palestinien a ensuite commenté le projet de résolution relatif à l’assistance au peuple palestinien (A/74/L.33).  Il a salué le rapport du Secrétaire général qui montre les besoins immenses des Palestiniens et l’impact de l’assistance internationale dans leur vie quotidienne.  L’Autorité palestinienne, a-t-il dit, a élaboré un plan sur les principaux défis de développement et la mobilisation des ressources nécessaires.  À l’exception de l’assistance fournie par l’ONU à l’éducation, qui s’ajoute à celle de certaines nations « fraternelles et amies », il n’y a pas d’aide réelle pour les infrastructures.  L’Autorité palestinienne a été « très pragmatique » mais l’occupation israélienne, sous toutes ses manifestions, demeure l’obstacle principal à l’exercice du droit naturel et inaliénables des Palestiniens au développement, a souligné l’Observateur. 

Mme COURTNEY NEMROFF (États-Unis) a présenté un amendement (A/74/L.35) au projet de résolution relatif à la coopération internationale en matière d’aide humanitaire, et un autre (A/74/L.36), au texte sur le renforcement de la coordination de l’aide humanitaire.  Le premier amendement vise à remplacer le paragraphe 62 qui se lit: « Encourage les gouvernements, les autorités locales, les organismes des Nations Unies et les organisations régionales, et invite les donateurs et les autres pays fournisseurs d’aide à prendre en considération les vulnérabilités et les capacités des femmes et des filles en mettant en place des programmes soucieux de l’égalité des sexes, qui tiennent notamment compte de leurs besoins en matière de santé sexuelle et procréative et envisagent des moyens de lutter, pendant des situations d’urgence et après une catastrophe, contre la violence sexuelle et fondée sur le genre et diverses formes d’exploitation, et en allouant les ressources nécessaires aux activités de réduction des risques de catastrophe, aux interventions et aux activités de relèvement qu’ils mènent en coopération avec les gouvernements des pays touchés ».  L’amendement consiste à ajouter « conformément aux lois et aux politiques nationales » après « santé sexuelle et procréative ».

Le deuxième amendement vise à remplacer le paragraphe 58 qui se lit: « Encourage les États Membres à veiller, en coopération avec les organismes humanitaires compétents des Nations Unies, à ce que les besoins humanitaires de base des populations touchées, notamment pour ce qui est de l’eau potable, de l’alimentation, du logement, des soins de santé, y compris en matière de sexualité et de procréation, de l’éducation et de la protection, de l’énergie, de l’informatique et des communications, lorsque cela est possible, soient pris en compte dans l’action humanitaire, notamment en fournissant, en temps opportun, des ressources suffisantes, tout en faisant en sorte que leur mobilisation collective respecte strictement les principes humanitaires ».  L’amendement est le suivant: « Encourage les États Membres à veiller, en coopération avec les organismes humanitaires compétents des Nations Unies, à ce que les besoins humanitaires de base des populations concernées, notamment pour ce qui est de l’eau potable, de l’alimentation, du logement, des soins de santé d’importance vitale, de la promotion de la santé et de la prévention des maladies tout au long de la vie, de l’assistance aux victimes de violence sexuelle et fondée sur le genre, y compris l’éducation sanitaire et la protection, et de l’accès sur demande et en connaissance de cause à des services de planification familiale, ainsi que pour ce qui est de l’énergie, de l’informatique et des communications, lorsque cela est possible, soient pris en compte dans l’action humanitaire, notamment en fournissant, en temps opportun, des ressources suffisantes, tout en faisant en sorte que leur mobilisation collective respecte strictement les principes humanitaires ».

Le paragraphe 50 se lit: « Encourage également les États Membres à veiller, en coopération avec les organismes humanitaires compétents des Nations Unies, à ce que les femmes et les filles bénéficient, dès le début des situations d’urgence, de services de soins de santé de base, y compris d’un accès fiable et sans risque aux services de soins de santé sexuelle et procréative et de soins de santé mentale, et à un soutien psychosocial, estime à cet égard que cette aide protège les femmes, les adolescentes et les nourrissons contre des maladies ou des décès évitables lors des situations d’urgence humanitaire, et demande aux États Membres, à l’Organisation des Nations Unies et aux autres acteurs intéressés d’accorder à ces programmes l’attention qu’ils méritent ».

L’amendement se lit: « Encourage également les États Membres à veiller, en coopération avec les organismes humanitaires compétents des Nations Unies, à ce que les femmes et les filles bénéficient, dès le début des situations d’urgence, d’un accès fiable et sans risque aux soins de santé de base, y compris aux soins de santé mentale et à un soutien psychosocial, estime à cet égard que cette aide protège les femmes, les adolescentes et les nourrissons contre des maladies ou des décès évitables lors des situations d’urgence humanitaire, et demande aux États Membres, à l’Organisation des Nations Unies et aux autres acteurs intéressés d’accorder à ces programmes l’attention qu’ils méritent ».

La représentante a rappelé que son pays est le plus grand contributeur à l’aide, assumant le tiers du total reçu l’an dernier par les agences onusiennes.  Elle a déploré que les besoins humanitaires de certains pays aient été sous-financés l’an dernier, alors que les besoins y sont importants.  Elle a cité le Yémen, la République arabe syrienne, le Soudan du Sud, Haïti, la Somalie et le Venezuela.  La représentante a exhorté les partenaires à augmenter leur contribution, tout en plaidant pour la transparence et le contrôle des dépenses.  Elle a aussi plaidé pour la cohérence entre les efforts humanitaires et de développement.  Les États-Unis, a-t-elle souligné, apportent tout leur soutien aux victimes des violences sexuelles.  Mais, a-t-elle martelé, l’avortement n’a pas sa place dans la santé sexuelle et procréative ni dans la santé mentale. 

Déclarations

Au nom des dix États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), Mme NOOR QAMAR SULAIMAN (Brunéi Darussalam) a rappelé que l’Asie du Sud-Est a enregistré ces derniers temps quelques-unes des pires catastrophes naturelles: 424 au cours de la seule année 2018, du séisme suivi d’un tsunami à Palu, des éruptions volcaniques à Bali au super typhon Mangkut aux Philippines, en passant par les inondations extrêmes en République démocratique populaire lao, au Viet Nam, au Myanmar et au Cambodge.  Outre les vies humaines, a-t-elle relevé, ces catastrophes naturelles ont coûté 1,2 milliard de dollars en dommages causés aux infrastructures, aux propriétés et à l’agriculture.  Pour la représentante, ces sinistres transfrontaliers nécessitent des réponses coordonnées et transfrontalières.  C’est pourquoi, a-t-elle dit, l’ASEAN a mis en place des dispositifs permettant des actions intégrées et collaboratives, à commencer par l’Accord sur la gestion des catastrophes et les réponses d’urgence (AADMER), qui vise à faciliter la coopération régionale en la matière.  Cet accord a débouché sur la création du Centre de coordination de l’assistance humanitaire de l’ASEAN qui, depuis novembre 2011, a permis d’apporter une réponse à 31 catastrophes majeures dans sept États membres de l’ASEAN, notamment grâce au déploiement de l’Équipe de réponse et d’évaluation de l’ASEAN (ASEAN-ERAT). 

Dans le même temps, a indiqué la représentante, l’ASEAN a continué à œuvrer au renforcement de ses capacités dans le domaine de la gestion des catastrophes.  En mars dernier, son centre d’assistance humanitaire a entrepris un premier examen du contrôle des risques et de la gestion des catastrophes.  L’Association a également fait progresser son système logistique d’urgence (DELSA) en installant des centres satellitaires en Thaïlande et aux Philippines, en plus des installations déjà opérationnelles à Subang, en Malaisie.  Il s’agit de permettre la mobilisation de moyens d’urgence pour les zones affectées par des catastrophes dans le cadre du plan « Une ASEAN, une réponse ».  Enfin, a ajouté la déléguée, l’ASEAN a tenu son cinquième dialogue de politique stratégique sur la gestion des catastrophes, centré cette année sur la résilience régionale, avec pour objectif de développer le programme de travail de l’AADMER pour la période 2021-2025. 

M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne (UE), a constaté que le paysage humanitaire est aujourd’hui confronté à des violations sans précédent du droit international humanitaire, ce qui est particulièrement préoccupant en cette période marquée par le soixante-dixième anniversaire des Conventions de Genève et la trente-troisième Conférence de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.  Dans ce contexte, l’Union européenne entend travailler au renforcement du respect du droit international humanitaire tout en garantissant que les mesures de lutte contre le terrorisme et les sanctions ne fassent pas obstacle à l’assistance humanitaire et se conforme au droit international.  Pour le représentant, refuser l’accès de l’aide humanitaire à des populations civiles et utiliser la faim comme arme de guerre constituent de graves violations du droit international humanitaire et il convient de condamner ces pratiques dans les termes les plus forts.  De même, la redevabilité doit être garantie.  À cette fin, a-t-il dit, des enquêtes complètes, rapides et impartiales doivent être menées, y compris, et en dernier recours, par la Cour pénale internationale (CPI). 

Observant par ailleurs qu’au cours de la seule année 2018, 131 travailleurs humanitaires ont payé de leur vie leur engagement sur le terrain, le représentant a rappelé les obligations de la communauté internationale à leur égard.  Quel que soit leur mode de recrutement, qu’ils œuvrent pour les Nations Unies ou pour le mouvement de la Croix-Rouge ou des ONG, les travailleurs humanitaires méritent notre respect et notre protection, notamment contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, a-t-il affirmé.  Il s’est également déclaré préoccupé par les déplacements forcés, notant que le nombre des personnes affectées dépasse les 70 millions cette année, soit la situation la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale.  Si bon nombre traversent les frontières, la majorité d’entre elles –41 millions- sont déplacées dans leur propre pays, a-t-il signalé, avant de se féliciter de la création d’un groupe de haut niveau sur les déplacements internes, dont la vocation est de fournir des solutions concrètes et sur le long terme à ces questions. 

Face à la nature complexe et durable des crises contemporaines, il importe de renforcer la coordination de tous les acteurs pertinents, ce qui va bien au-delà de l’assistance d’urgence, a encore plaidé le représentant.  Il faut pour cela travailler à des résultats collectifs et considérer ensemble les besoins et les vulnérabilités afin que toutes les parties prenantes puissent contribuer en fonction de leurs capacités.  Soucieuse de rester aux avant-postes de l’assistance humanitaire, l’Union européenne maintiendra son action pour répondre aux crises les plus aiguës, chez ses voisins européens comme au Moyen-Orient, dans la Corne de l’Afrique, au Sahel, en Asie et en Amérique latine, a assuré le représentant. 

Toutefois, plutôt que de simplement réagir aux conséquences humanitaires des catastrophes et des crises, nous devons consacrer davantage d’énergie et de ressources à la préparation à l’action précoce, a préconisé le délégué.  À cet égard, a-t-il souligné, l’Union européenne est déterminée à mieux intégrer les changements climatiques et la préservation de l’environnement dans ses plans d’urgence, tout en s’employant à anticiper plus effectivement les besoins humanitaires.  Investir davantage dans les alertes précoces et financer les prévisions permettra d’agir avant que les catastrophes surviennent ou que les violences gagnent en intensité, a-t-il fait valoir.  Il a enfin estimé que la communauté internationale contribuera à maintenir le consensus international sur le cadre normatif de l’ONU en matière d’action humanitaire en adoptant la résolution soumise par l’Union européenne pour garantir la sécurité des personnels humanitaires ainsi que le texte présenté par le Groupe des 77 concernant les conséquences des catastrophes naturelles. 

L’Ukraine est un pays européen puissant avec une économie développée et des normes sociales plutôt élevées, et pendant près de 70 ans, il n’a pas connu les horreurs de la guerre, a souligné Mme OKSANA KOLIADA, Ministre des territoires temporairement occupés et des personnes déplacées de l’Ukraine.  Elle a mis l’accent sur la situation à Pisky, « une bourgade respectable près de Donetsk », où six familles sont terrées chez elles pour échapper aux tirs quotidiens.  Brandissant une photo récente d’enfants vivant dans ce « territoire occupé », elle a ajouté: cela fait maintenant 2 075 jours que « mon pays souffre de l’agression armée de la Fédération de Russie ».  Elle a avancé le chiffre de 13 000 morts dont 3 345 civils et 298 étrangers - les passagers du vol MH-17 abattu par un missile russe.

La représentante a affirmé que 100 000 enfants ukrainiens vivent à proximité de la zone de conflit où le déminage est impératif alors que 1,4 million de personnes ont été forcées de fuir après l’occupation de la Crimée et des régions de Donetsk et de Louhansk.  Elle a fait état de persécutions contre les civils ukrainiens en Crimée, y compris des arrestations, de la fermeture d’écoles ukrainiennes et de l’anéantissement de l’identité des Tatars de Crimée.  À ce jour, 500 citoyens russes ont été installés en Crimée en 2014 et la militarisation de la péninsule progresse.

« Nous voulons unifier notre pays », a affirmé la représentante, en expliquant que l’objectif initial est de parvenir à « la réintégration mentale » et, dans un deuxième temps, à la récupération des territoires.  Remerciant tous ceux qui apportent un soutien à l’Ukraine durant « ces temps difficiles », et en particulier les 50 organisations humanitaires internationales qui travaillent des deux côtés de la ligne de conflit, la représentante a rappelé qu’en cinq ans, cette aide a représenté 540 millions de dollars dont 3,5 millions d’Ukrainiens ont profité.  Aujourd´hui, a-t-elle estimé, le moment est venu de passer à une transition graduelle de la réponse humanitaire d’urgence à des programmes de développement efficaces.

Pour l’Ukraine, il s’agit maintenant de simplifier au maximum l’accès des résidents des territoires « temporairement occupés » aux services publics de base; de mettre l’accent sur des programmes de développement de ces régions, notamment les infrastructures, et de redéfinir la politique d’information « parce que c’est dans le monde de l’information que l’agression russe a commencé ».  L’Ukraine met également l’accent sur le suivi de la situation, en particulier en Crimée, pour recenser tous les cas de violation des droits de l’homme et y donner suite à travers des mécanismes de réponse efficaces et rapides.  Le Gouvernement ukrainien, conjointement avec le Parlement, a adopté une série de documents réglementaires visant à assurer la protection des droits des prisonniers de guerre, des civils illégalement détenus et des victimes de la persécution politique dans les territoires temporairement occupés, a encore précisé la représentante.

M. TALAL S. S. S. ALFASSAM (Koweït) a demandé le renforcement de la coordination de l’assistance humanitaire, notamment celle fournit par l’ONU.  Il a ensuite souligné que l’aide publique au développement (APD) fournie par son pays a atteint le double de la proportion internationalement agréée, à savoir 0,7% du produit national brut (PNB).  Il a expliqué que 10% de cette aide va aux pays affectés par les catastrophes, principalement par le biais des mécanismes onusiens.  Il a d’ailleurs rappelé les chiffres de la contribution du Koweït aux diverses agences humanitaires de l’ONU pour 2020, tels qu’ils avaient été annoncés en novembre dernier.

Mme MAHA YAQOOT JUMA YAQOOT HARQOOS (Émirats arabes unis) s’est associée à la déclaration de l’Observateur de l’État de Palestine, avant d’insister sur l’assistance ventilée par sexe, groupe d’âge et handicap, dans toutes activités de l’ONU.  Elle a appelé de ses vœux un financement plus prévisible et à une coopération accrue dans l’évaluation des risques pour aider, entre autres, les coordonnateurs résidents à mieux orienter leur travail. 

Mme HANNE MELFALD (Norvège) a expliqué que son pays répond en priorité aux crises de protection qui aggravent les situations humanitaires en République arabe syrienne, au Yémen, au Soudan du Sud ainsi que dans beaucoup d’autres pays en situation de conflit.  La Norvège participe aussi au travail pour briser le cercle vicieux qui a fait des conflits interminables, la norme dans plusieurs régions du monde.  Des efforts particuliers doivent être faits pour éviter que les populations de ces régions soient laissées pour compte.  Dans de tels contextes, l’éducation est la clef, a jugé la Norvège, qui a aussi appelé à redoubler d’efforts pour éviter les déplacements forcés de population. 

Jugeant l’échelle des violences sexuelles et sexistes dans les situations de crise et de conflit « inacceptable », et soulignant que le recours à ce type de violences comme armes de guerre est un problème répandu dans les crises humanitaires, la représentante a rappelé que son pays a accueilli une conférence consacrée à ce problème cette année.  Les États Membres s’y sont engagés à donner 363 millions de dollars au Fonds de prévention des violences sexuelles et sexistes en 2019 et au-delà.  La Norvège, à elle seule, s’est engagée à fournir 115 millions de dollars sur trois ans.  La représentante a regretté que les termes « santé sexuelle et procréative », qui étaient consensuels par le passé, soient désormais attaqués dans plusieurs résolutions.  Derrière ces attaques, a prévenu la représentante, ce sont la sécurité et le bien-être des femmes et des filles, ainsi que ceux des hommes et des garçons, qui sont attaqués.  L’accès universel à l’éducation et à la santé, y compris l’éducation sexuelle, sauve des vies, a-t-elle martelé. 

Mme UMAIRA MOHAMED (Maldives) s’est dite solidaire des petits États insulaires en développement qui ont été frappés par des ouragans et qui souffrent toujours de leurs conséquences.  Elle a parlé de l’ouragan Dorian auquel on fait maintenant référence comme « la tragédie générationnelle » des Bahamas.  Malgré les progrès faits dans l’anticipation, la préparation et la réponse aux catastrophes naturelles, « nous ne sommes pas encore en mesure d’en sortir sans saper nos perspectives de développement à long terme », a constaté la représentante.  Cela est d’autant plus vrai pour les petits États insulaires en développement, comme les Maldives, qui font face à des menaces pluridimensionnelles et qui sont particulièrement vulnérables à l’impact des catastrophes naturelles.

Nation insulaire à faible élévation, les Maldives continuent de combattre les défis posés par les changements climatiques et les catastrophes naturelles.  Il a fallu plus de cinq ans pour reconstruire après le tsunami de 2004 et les habitants de deux îles totalement dévastées ont dû être relocalisés, a expliqué Mme Mohamed.  Elle a confié que « reconstruire » signifie, pour les Maldives, détourner des fonds alloués au développement pour protéger l’environnement et l’océan.  En 2004, un centre national de gestion des catastrophes a été mis en place pour prendre des mesures proactives et éviter et/ou réduire l’impact de ces catastrophes.  Le mandat du centre a été élargi en 2018, lequel est devenu Autorité nationale de la gestion des catastrophes.  Le Gouvernement des Maldives mise également sur des infrastructures résilientes au climat, les énergies renouvelables pour réduire sa dépendance au pétrole importé, les stations de traitement des eaux et l’assainissement ainsi que sur des mécanismes de gouvernance de pointe et alignés sur les avancées technologiques.

La représentante a assuré que les Maldives sont activement engagées dans la Coalition pour une infrastructure résiliente face aux catastrophes.  Ce n’est qu’à travers la coopération que nous pourrons parvenir à des résultats concluants sur les plans international, régional, national et local et atteindre nos objectifs de développement durable, a martelé Mme Mohamed, en exhortant la communauté internationale à honorer les engagements pris dans le contexte du Programme de développement durable à l’horizon 2030, de l’Accord de Paris sur le climat, du Cadre de Sendai sur la réduction des risques de catastrophe, du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement et des Orientations de Samoa sur les petits États insulaires en développement.  En conclusion, la déléguée a insisté sur l’importance qu’il y à impliquer, à former et à financer les communautés pour en faire des partenaires dans la réduction des risques de catastrophes. 

Mme RAZIYE BILGE KOCYIGIT GRBA (Turquie) a fait remarquer que les conflits armés, la persécution, les catastrophes naturelles et la famine continuent de pousser un nombre important de personnes loin de chez elles, faisant plus de déplacés que jamais et rendant les besoins humanitaires chaque fois plus importants, et ce, à une vitesse galopante.  Elle a mis aussi en avant les souffrances des personnes prises au piège des situations d’urgence complexes et celles du personnel humanitaire qui fait de son mieux pour apporter quelque soulagement aux personnes dans le besoin.  Elle a déploré que le dernier rapport sur la situation humanitaire dans le monde brosse un tableau encore plus sombre du paysage: chaque jour, 37 000 personnes fuient un conflit, la violence ou les violations des droits de l’homme.  Quelque 13,6 millions de personnes ont fui ce genre de situations tandis que les catastrophes naturelles ont jeté sur les routes quelque 17,2 millions de personnes.  Le nombre des réfugiés, quant à lui, a continué à grimper pour atteindre les 25,9 millions début 2019.  À elle seule, la Turquie abrite 18% des réfugiés dans le monde. 

La représentante s’est attardée sur la « pire crise humanitaire du monde », le Yémen, et a condamné les responsables de cette « plus grande catastrophe humanitaire de l’histoire » causée par l’homme.  En dépit des immenses défis, a-t-elle encore dit, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a mené une des plus grandes opérations humanitaires, appuyée concrètement par les agences turques.  De son côté, la tragédie humanitaire en Syrie entame sa neuvième année, avec plus de 13 millions de personnes nécessitant de l’aide, 6,6 millions de déplacés et 5,6 millions de réfugiés éparpillés dans la région.  La Turquie a accueilli plus de 3,6 millions de Syriens dont elle s’efforce d’améliorer les conditions de vie, en facilitant, chaque mois, le passage sécurisé de l’assistance humanitaire.  Les agences humanitaires et de développement turques travaillent aussi en Somalie, au Soudan, à Cox’s Bazar et dans d’autres régions dévastées par les conflits ou les catastrophes naturelles.  La représentante a réitéré l’engagement de son pays à poursuivre ces efforts, en tant que principal donateur, avec 8,4 milliards de dollars d’assistance humanitaire en 2018. 

Elle a pointé la nécessité d’accroître les ressources financières par des idées novatrices et la mobilisation rapide des ressources du Fonds central pour les interventions d’urgence (CERF) et aux fonds de financement commun basés dans les pays, dont l’impact sur le terrain est « fascinant ».  Elle a aussi proposé, dans les prochains mois, un débat sur le financement novateur et souple de l’aide humanitaire.  « N’oublions jamais qu’aucun problème humanitaire n’est local. »  Toutes les crises humanitaires ont des répercussions mondiales, a-t-elle déclaré en conclusion. 

M. AHMAD SAIF Y. A. AL-KUWARI (Qatar) a dit qu’en 2018, le Fonds qatari pour le développement a déboursé la somme de 585 millions de dollars en faveur de plusieurs pays.  Pas moins de 500 millions dollars de contributions pluriannuelles ont été annoncés pour les agences de l’ONU.  Le Qatar reste engagé à soutenir l’assistance humanitaire, notamment le CERF.  L’Émir a d’ailleurs annoncé en septembre dernier une contribution de 100 millions de dollars pour les petits États insulaires en développement et les pays les moins avancés (PMA) confrontés aux effets néfastes des changements climatiques.  Le représentant a également mentionné le milliard de dollars offert aux Palestiniens au cours de ces huit dernières années. 

M. DOMINIQUE MICHEL FAVRE (Suisse) a soutenu l’approche de la Suède, facilitatrice de la résolution humanitaire omnibus de cette année, consistant à « tenir en lieu et place des négociations traditionnelles, des échanges interactifs sur différentes thématiques ».  Il a qualifié cette démarche d’« innovante » et souligné que son pays s’intéresse aux thèmes transversaux tels que la protection des populations civiles, le respect du droit international humanitaire, les enjeux liés au contre-terrorisme ou encore l’impact des conflits dans les contextes urbains.  Concernant les données dans le domaine humanitaire, M. Favre a souligné que la Suisse accueillera en octobre prochain, à Berne, le Forum mondial de l’ONU sur les données.

L’aide humanitaire, a souligné le représentant, doit être fournie conformément aux principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance.  Il a jugé primordial que le cadre légal du droit international humanitaire soit respecté par toutes les parties prenantes d’un conflit armé, et que les auteurs de violations du droit international soient poursuivis.  Par ailleurs, l’accès aux personnes dans le besoin doit être assuré, et la protection des travailleurs humanitaires renforcée.  Il est aussi du devoir des États Membres de renforcer la protection des victimes de conflits armés et des missions médicales, conformément aux Conventions de Genève et à leurs Protocoles additionnels. 

La Suisse, a-t-il poursuivi, souligne que les phénomènes de déplacements forcés à la suite de conflits, de catastrophes naturelles ou liés aux changements climatiques nécessitent non seulement une étroite coordination des différents instruments de l’aide humanitaire et du développement, mais également la promotion de la paix et des droits de l’homme.  Jugeant enfin crucial de prêter « toute notre attention » à la question des déplacés internes, M. Favre a salué la création du Groupe de haut niveau sur les déplacements internes, qui sera basé à Genève. 

M. BEN COLLINS (Nouvelle-Zélande) s’est dit très préoccupé par la tendance à prendre pour cible le personnel et les installations médicales pendant les conflits armés actuels.  Le représentant a parlé en particulier de la multiplication par trois des cas de rougeole, cette année.  Dans la région Pacifique, a-t-il indiqué, des jeunes ont perdu la vie à cause de cette maladie entièrement évitable.  Nous devons prendre des mesures proactives pour prévenir la propagation des maladies et œuvrer à leur éradication, a souligné le délégué.  À son tour, il a déploré « les nombreuses attaques » contre les droits à la santé sexuelle et procréative, les droits des femmes et les droits des personnes LGBTI.  Ce sont, a-t-il martelé, des droits universaux qu’il nous revient de respecter et de protéger. 

Le délégué a noté l’ampleur des défis actuels dans un contexte marqué par des besoins qui vont en grandissant et des ressources qui vont en diminuant.  Il a appuyé les approches de financement innovantes, une coopération plus étroite entre partenaires de développement et humanitaires et une appropriation locale des initiatives, en vue d’aboutir à une action humanitaire plus efficace. 

M. BRIAN PATRICK FLYNN (Irlande) a constaté, à son tour, que les besoins humanitaires augmentent dans le monde, que les crises se complexifient et que les travailleurs humanitaires évoluent dans un environnement de plus en plus difficile.  Il a appelé à soutenir le système humanitaire afin qu’il puisse effectuer sa tâche « immense ».  Réduire les besoins humanitaires est d’ailleurs la pierre angulaire de la politique de développement irlandaise, « Un monde meilleur », inaugurée cette année.  L’Irlande s’y engage de nouveau à consacrer 0.7% de son PIB à l’aide publique au développement (APD) d’ici à 2030.  Appelant à redoubler d’efforts pour traiter les causes sous-jacentes des besoins humanitaires, le représentant a souligné que son pays est fermement engagé à consolider la paix et qu’il contribue régulièrement aux effectifs du maintien de la paix depuis 1958.  Si l’Irlande est élue au Conseil de sécurité en 2021-2022, elle fera tout son possible pour traiter les racines des conflits, afin de réduire les besoins humanitaires, a assuré le représentant. 

Profondément inquiet du manque de respect du droit international humanitaire à l’approche du soixante-dixième anniversaire de la Convention de Genève, il a plaidé pour la création et le maintien d’un environnement permettant aux agents humanitaires d’agir sans contrainte.  Pour l’Irlande, les États Membres sont collectivement responsables du respect du droit international humanitaire, et doivent s’assurer que les agents humanitaires ont l’accès et le soutien nécessaires pour aider les populations dans le besoin. 

Le monde fait face à des besoins humanitaires croissants en termes de financement et de personnes à aider, a constaté M. TATSUHIKO FURUMOTO (Japon).  Le nombre des personnes qui auront besoin d’une aide humanitaire et d’une protection étant estimé à 168 millions en 2020, le représentant a souligné qu’il faudra une somme de 28,8 milliards de dollars.  Le Japon a donc décidé de débloquer 98 millions de dollars supplémentaires en 2019 pour les Nations Unies et les autres organisations humanitaires.  Ses équipes sont également à pied d’œuvre au Mozambique, en RDC, à Djibouti et à Samoa, sans compter les contributions en nature qu’il a fait à sept autres pays.

Le délégué s’est attardé sur la situation humanitaire en Syrie, se disant préoccupé par les 11 millions de Syriens qui auront besoin d’une aide humanitaire en 2020.  Il a annoncé « avec fierté » que son pays a fait, la semaine dernière, une contribution supplémentaire de 14 millions de dollars à quatre organisations pour répondre à la crise dans le nord-est syrien.  Une partie de ces fonds est consacrée à ce qui sera une contribution inédite au fonds de financement commun pour la Syrie.

Le Japon est également alarmé par l’écart frappant entre l’intervention humanitaire en situation de conflit et le démarrage des programmes de développement à long-terme.  C’est pourtant au moment où les réfugiés rentrent dans leur pays d’origine qu’il faut avoir les ressources pour consolider la paix.  Dès lors, le Japon reste un fervent défenseur du « lien » humanitaire-développement-paix, un concept ancré dans les travaux de pionniers comme Sadako Ogata, ancienne Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.  Le représentant s’est félicité du Forum mondial sur les réfugiés qui se tiendra demain à Genève.  Nous avons l’intention d’y faire une contribution significative dans le contexte du « lien », a-t-il annoncé.

Il a aussi insisté sur les applications concrètes de l’innovation et de la technologie pour répondre aux besoins sur le terrain, en citant notamment l’exemple de l’agriculture durable à l’âge du numérique, un thème abordé en marge de la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD 7).  Le Japon a d’ailleurs annoncé des initiatives comme l’introduction de marchés virtuels pour les producteurs agricoles au Mozambique ou encore des technologies de l’information et des communications dans les communautés rurales en Tanzanie.

M. AGUSTÍN SANTOS MARAVER (Espagne) a suggéré de renforcer les mécanismes existants pour prévenir et mettre un terme aux violations de la Convention de Genève.  En ce sens, la Cour pénale internationale joue un rôle fondamental et dispose du mandat pour juger les violations les plus graves du droit international humanitaire, à savoir les crimes de guerre.  Dans le même temps, M. Santos Maraver a souhaité mettre en valeur la Commission internationale humanitaire d’établissement des faits, le seul mécanisme permanent créé spécifiquement pour enquêter sur les faits liés aux infractions et violations graves du droit international humanitaire. 

En outre, a-t-il ajouté, l’Assemblée générale pourrait renforcer les mécanismes de collecte et d’analyse de données sur les graves violations du droit international humanitaire et promouvoir les mécanismes d’enquête systématique et exhaustive, et ce de manière impartiale et indépendante.  Le représentant a également conseillé de renforcer et protéger les domaines prioritaires insuffisamment protégés ou facilement attaqués, tels que la santé et l’éducation en période de conflit, sans oublier, a-t-il poursuivi, de garantir l’action humanitaire dans la lutte contre le terrorisme ou dans le contexte de sanctions.  Face au contexte humanitaire actuel, marqué par une hausse exponentielle des besoins, la coordination et l’efficacité dans l’identification des personnes les plus vulnérables et des besoins urgents sont capitales si l’on veut que personne ne soit laissé pour compte, a estimé M. Santos Maraver.  Il faut mieux coordonner les actions humanitaires avec celles du développement. 

M. WU HAITAO (Chine) a insisté sur le fait que l’assistance humanitaire doit se faire dans le respect de la Charte des Nations Unies et la résolution 46/182 de l’Assemblée générale, tout en adhérant aux principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance.  De même, les activités humanitaires se doivent de respecter la souveraineté des pays hôtes.  Il est hors de question qu’elles s’ingèrent dans les affaires intérieures des États et qu’elles se laissent politiser.  Il nous sera possible, a dit le représentant, de réduire les besoins humanitaires si l’on s’attaque aux symptômes et causes profondes des crises par des politiques intégrées.  La communauté internationale doit bien sûr répondre aux besoins humanitaires à court terme, mais surtout les aider à mettre en œuvre le Programme 2030 et à renforcer leur résilience aux catastrophes naturelles et aux changements climatiques.  Il faut donc augmenter l’assistance financière et technique, en tenant compte des priorités et besoins des pays affectés.  La Chine, a conclu le représentant, apporte un soutien substantiel aux pays affectés par les crises humanitaires, à la fois de manière bilatérale que multilatérale. 

Mme KAITLYN SHELAGH ELIZABETH PRITCHARD (Canada) a indiqué que son pays continue d’être un fervent partisan d’une action humanitaire prenant en compte la dimension du genre, afin de s’assurer que les besoins des groupes vulnérables soient satisfaits.  Le Canada, a-t-elle dit, est à la tête de l’Appel à l’action pour la protection contre la violence basée sur le genre dans les situations d’urgence, qui vise à prévenir et réprimer ce type de violence sur le terrain au niveau international. 

La représentante a déclaré que son pays a toujours défendu un financement prévisible, flexible et de qualité de l’aide humanitaire, avant de rappeler les 870 millions de dollars donnés en 2018 pour une assistance d’urgence aux populations vulnérables par temps de crise.  Près de 15 millions de dollars ont, dans cette somme, financé une approche holistique pour remédier aux besoins urgents des populations touchées par les conflits et l’épidémie du virus Ebola en République démocratique du Congo.  Depuis 2017, le Canada a fourni 109,21 millions de dollars d’assistance humanitaire au Bangladesh et au Myanmar. 

Enfin, alors que l’ordre international est menacé, la déléguée a indiqué que la priorité de son pays, s’il est élu au Conseil de sécurité pour les années 2020-2022, sera de « promouvoir notre humanité commune et de construire des ponts ». Cela signifie le renforcement du dialogue pour une synergie plus étroite entre aide humanitaire et efforts de maintien de la paix, le maintien des civils au cœur des efforts et une prise en compte toujours plus accrue de la dimension du genre dans la protection des civils, a conclu Mme Pritchard.

M. MOHAMMAD AL HAFIZ MOHD NADZIR (Malaisie) a appelé toutes les parties concernées à garantir la sécurité du personnel humanitaire en appliquant les principes et règles du droit international, y compris le droit international humanitaire et des droits de l’homme.  La Malaisie, a-t-il ajouté, poursuivra son assistance aux communautés et pays qui en ont besoin, en suivant une approche triple: une aide de gouvernement à gouvernement (bilatérale ou multilatérale), un engagement par le biais des ONG et une participation des personnes pour les personnes.

La Malaisie continuera à soutenir les efforts des Nations Unies destinés à améliorer le système d’assistance humanitaire internationale et compte y contribuer en renforçant les compétences des travailleurs humanitaires, a indiqué le représentant.  Il a salué l’OCHA et les autres agences de l’ONU concernées pour leur travail sur le terrain, rappelant la promesse de don de son pays à l’OCHA pour l’aide à différents pays africains et à l’Iraq.  Il a aussi rappelé que la Malaisie abrite un des six entrepôts de fournitures humanitaires des Nations Unies et contribue à son fonctionnement à hauteur de 1 million de dollars par an.

Rappelant que son pays est un des plus touchés par les catastrophes naturelles, Mme KIRA CHRISTIANNE DANGANAN AZUCENA (Philippines) a remercié la communauté internationale pour son aide humanitaire, en particulier l’OCHA.  Les urgences humanitaires, qu’elles soient d’origine naturelle ou humaine, ont augmenté de manière exponentielle, et une part de plus en plus importante des ressources mondiales limitées est consacrée à l’assistance humanitaire, a constaté la représentante.  Pour faire face à cette équation, elle a préconisé une collaboration avec le secteur privé et l’exploitation des sources financières non traditionnelles.  Il faut aussi intégrer l’atténuation et la gestion des risques de catastrophe dans les politiques de développement, a-t-elle pressé. 

M. MOHAMED KAMAL ALI ELHOMOSANY (Égypte) a procédé à une description détaillée des étapes traversées par le peuple palestinien, avec leur lot de souffrances, depuis maintenant des décennies d’occupation étrangère, sans grand espoir d’une solution rapide à cause de l’obstination d’Israël à faire fi des résolutions internationales.  Dénonçant ce cercle vicieux de souffrances, le représentant a estimé que le seul moyen de le briser réside dans une solution juste et globale par l’établissement d’un État indépendant sur la base des frontières d’avant 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale.  Il a rappelé la série de résolutions de l’ONU et les processus de paix comme l’Initiative de paix arabe.  En attendant la solution attendue par tous, il est du devoir de la communauté internationale de tendre une main solidaire au peuple palestinien, a dit le représentant. 

Il a salué l’UNRWA compte tenu de son rôle indispensable en faveur des réfugiés palestiniens et le Comité spécial de liaison pour la coordination de l'assistance internationale aux Palestiniens (AHLC) qui contribue entre autres à la reconstruction urbaine dans les Territoires palestiniens occupés, à Gaza plus particulièrement, et au déblayage des débris après des années de destruction par les forces israéliennes. 

M. DMITRY S. CHUMAKOV (Fédération de Russie) a insisté sur le respect de la résolution 46/182 de l’Assemblée générale sur l’aide humanitaire.  Il s’est élevé contre toute politisation de l’assistance humanitaire et a insisté sur le respect de la souveraineté du pays hôte.  Sur le front humanitaire, il n’y a pas de gagnant mais il pourrait y avoir plusieurs perdants, a-t-il prévenu, mettant en garde contre les activités contraires aux normes agréées.  Le délégué n’a pas manqué de dénoncer le fait que l’Ukraine continue de politiser l’aide humanitaire.  Dans ce pays, a-t-il affirmé, les obstacles à l’aide humanitaire sont érigés par le régime de Kiev.  La Fédération de Russie est prête, a-t-il affirmé, à accueillir les délégations étrangères pour qu’elles vérifient par elles-mêmes certaines situations mentionnées par l’Ukraine.  Au sujet des territoires sinistrés par la catastrophe de Tchernobyl, le représentant a indiqué que son pays poursuit les efforts de relèvement avec ses voisins. 

Il a indiqué que cette année, son pays a versé la somme de 50 millions de dollars aux entités humanitaires de l’ONU, et en particulier au Programme alimentaire mondial (PAM) et ses activités en Afrique.  D’autres actions en faveur du continent africain viennent d’être décidées au Sommet Russie-Afrique de Sotchi, a rappelé le représentant.

Mme NERYL LEWIS (Australie) a considéré la référence au Pacte de Marrakech sur les migrations comme « un ajout inutile » dans le texte sur la coopération internationale en matière d’aide humanitaire.  Elle a rappelé les principes de cette aide, appuyé les initiatives prévues en faveur des personnes handicapées et la recherche de solutions politiques aux causes sous-jacentes des crises humanitaires. 

Mme MONRADA YAMKASIKORN (Thaïlande) a déclaré qu’ayant érigé l’assistance humanitaire en priorité de sa politique interne et externe, son pays demeure profondément préoccupé par ces millions de personnes dans le monde qui sont affectées par les conséquences des urgences humanitaires causées par les conflits, les épidémies, les catastrophes naturelles dévastatrices ou encore l’extrême pauvreté.  Ces phénomènes ont pris une ampleur et une intensité sans précédent au cours de ces dernières années et exigent une réponse plus rapide et plus efficace.  La représentante a donc appelé à des efforts concertés pour une assistance « concrète » et à temps.  Elle a attiré l’attention sur le sort des femmes et des enfants, avant de rappeler les principes directeurs de l’aide humanitaire, à savoir l’humanisme, l’impartialité, la neutralité et l’indépendance. 

La préparation aux catastrophes, le renforcement de la résilience et la réponse sont inséparables, a-t-elle estimé, expliquant que le Gouvernement thaïlandais s’applique à promouvoir ces aspects et la réduction des risques de catastrophe conformément au Cadre de Sendai et aux Principes de Bangkok.  La Thaïlande a accueilli, le 21 juin dernier, la troisième Réunion mondiale des équipes médicales d’urgence, à laquelle ont participé 90 pays et quelque 200 organisations humanitaires. 

M. THOMAS RATHMELL WOODROFFE (Royaume-Uni) s’est alarmé des besoins humanitaires dans le monde.  Les prévisions pour 2020 montrent que près de 168 millions de personnes dans 53 pays -soit une personne sur 45 dans le monde- auront besoin d’une assistance et d’une protection.  Dans de nombreux cas, les crises dureront plus de 10 ans.  Nous sommes confrontés à des crises de plus en plus diverses: les conflits armés mettent en danger des millions de vies au Yémen, en Syrie, au Soudan du Sud et au Nigéria.  Ebola continue de menacer le développement en République démocratique du Congo et en Ouganda.  Les changements climatiques ont entraîné des inondations et des cyclones en Afrique australe.  De plus, a ajouté le représentant, la violence contre les travailleurs humanitaires et les violations du droit international humanitaire sont à la hausse.  Pour relever ces défis, il est plus important que jamais de travailler ensemble pour mobiliser « nos ressources et nos idées » afin d’anticiper les défis humanitaires et d’aider ceux qui sont dans le besoin. 

À cet égard, a-t-il rappelé, le Royaume-Uni est le troisième donateur bilatéral des fonds humanitaires dans le monde.  Il a cité pêle-mêle, les financements humanitaires bilatéraux pluriannuels pour faire face à plus de 30 crises et le soutien financier substantiel aux Nations Unies et au Comité international de la Croix-Rouge.  Le Royaume-Uni est à ce jour le plus grand soutien du CERF.  Cependant, avec des crises qui touchent plus de personnes sur de plus longues périodes, la communauté internationale doit faire plus même si cela signifie qu’il faut faire les choses différemment.  En effet, a-t-il poursuivi, bien que les États Membres aient fourni, en 2019, une aide humanitaire record de quelque 16 milliards de dollars, ce montant demeure, toutefois, insuffisant pour couvrir les besoins.  C’est pourquoi, le Royaume-Uni continue d’œuvrer en faveur d’un système humanitaire plus efficace, compte « doubler » le montant de ses versements d’ici à 2025 et travailler avec ses partenaires pour mieux évaluer les besoins et établir les priorités. 

En parallèle, le représentant s’est dit impatient de voir comment les États Membres peuvent donner un nouvel élan aux priorités de la réforme humanitaire, notamment à travers un système plus responsable.  Il a fait part de la détermination de son pays à travailler à une approche nouvelle et plus solide de la gestion des risques de catastrophe qui n’ont plus rien d’imprévisible.  Pour finir, il s’est dit déçu que les États Membres soient contraints d’examiner des amendements.  L’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles doit être au cœur de l’action humanitaire, a-t-il martelé. 

Mme ANAT FISHER-TSIN (Israël) a estimé que la bonne façon de gérer les crises humanitaires est de combiner l’assistance immédiate avec une stratégie à plus long terme.  Des institutions fortes et transparentes, la gouvernance démocratique et l’état de droit permettent également d’éviter les crises ou de mieux y faire face.  Chaque pays peut jouer un rôle pour réduire le nombre de personnes touchées par une crise humanitaire, a argué la délégation, que ce soit par des contributions financières ou par la fourniture d’une assistance coordonnée en hommes ou en matériel, ou encore par le partage de bonnes pratiques de préparation aux crises.  C’est ce que fait Israël, qui envoie régulièrement aux quatre coins du monde des médecins, des infirmiers, des spécialistes en recherche-secours et des ingénieurs pour apporter un répit immédiat et sauver des vies, et ce, quelle que soit la couleur politique du pays concerné, a assuré la délégation.

M. ROBERT MARDINI, Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a porté l’attention des délégations sur trois problèmes dommageables à la protection des personnes et à l’octroi de l’aide humanitaire: le déficit de confiance, les populations « indûment privées de leur liberté à cause de leur association avec certains groupes armés » et les conflits en milieu urbain.  Concernant le déficit de confiance, il a rappelé que la confiance entre travailleurs humanitaires est une base sans laquelle il est difficile de fournir l’aide et de protéger les personnes vulnérables.  Les acteurs humanitaires doivent mériter la confiance et en retour les États doivent prouver qu’ils accordent cette confiance, en préservant un espace humanitaire géographique et réglementaire, et en facilitant une action humanitaire impartiale dans le respect du droit international humanitaire.

Le représentant s’est dit inquiet pour les individus privés de leurs droits juridiques à cause de leur association, réelle ou supposée, à certains groupes armés ou désignés comme terroristes.  Des gouvernements maintiennent des individus dans un flou juridique sans leur offrir les protections auxquelles ils ont pourtant droit.  Le droit international humanitaire, a-t-il martelé, s’applique à toute personne affectée par un conflit armé, sans exception.

Le représentant a aussi jugé essentiel que les opérations menées par les autorités en milieu urbain s’effectuent dans le respect de la loi.  Dans un monde à urbanisation rapide, les conflits armés en milieu urbain peuvent avoir des conséquences dévastatrices sur les populations et les infrastructures dont elles dépendent pour vivre.  Le représentant a enfin appelé tous les États Membres et les parties aux conflits armés à s’abstenir d’utiliser des armements explosifs à grand impact dans les zones urbaines fortement peuplées, conformément à la Déclaration conjointe du Président du CICR et du Secrétaire général de l’ONU. 

Une fois de plus, les catastrophes climatiques et météorologiques ont frappé de plein fouet le monde en 2019, avec des conséquences locales catastrophiques, a relevé M. RICHARD BLEWITT, Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.  Il a cité l’ouragan Dorian dans les Caraïbes, les inondations en Sierra Leone, le cyclone Idai en Afrique australe, la sécheresse en Afghanistan, les inondations en Iran et les vagues de chaleur en Europe.  Grâce à ses 14 millions de volontaires dans le monde, la Fédération sait, a-t-il dit, que les phénomènes météorologiques extrêmes sont plus fréquents et plus graves et que leur impact est plus aigu pour les personnes vivant dans des situations vulnérables.  Selon les prévisions de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), plus de 140 millions de personnes pourraient bientôt être obligées de partir de chez elles du fait des effets des changements climatiques, de la pénurie de l’eau, des mauvaises récoltes et de l’élévation du niveau de la mer.  Se référant au rapport que sa Fédération a publié cette année, il a chiffré en milliards de dollars le coût de l’inaction face à la crise climatique et évalué à plus de 200 millions le nombre de personnes par an qui auront besoin d’une aide, contre 108 millions aujourd’hui. 

Le scénario le plus pessimiste indique que le coût financier annuel d’ici à 2030 sera de 20 milliards de dollars, a alerté l’intervenant.  Malgré ces sombres prédictions, tout indique que si la communauté internationale adopte des mesures pour renforcer la résilience à la crise climatique, « nous pourrions réduire le nombre de personnes nécessitant une aide à 70 millions en 2030, et voire à 10 millions en 2050 ».  Mais « il faut agir maintenant ».  À cet égard, il a conseillé aux gouvernements et aux acteurs humanitaires et du développement de réduire la vulnérabilité sur le long terme par des infrastructures plus résilientes.  Il faut aussi anticiper les risques, améliorer l’alerte précoce et renforcer l’intervention d’urgence.  Il faut enfin reconstruire et réparer en prévision de la prochaine urgence.  M. Blewitt est revenu sur la trente-troisième Conférence de la Fédération qui s’est tenue la semaine dernière, à Genève, et à l’issue de laquelle une série de résolutions ont été adoptées sur des questions cruciales pour l’avenir, telles que le respect du droit international humanitaire ou les politiques pour ne laisser personne de côté.  Parmi les autres recommandations, il a cité la nécessité de s’atteler aux maladies mentales et aux besoins psychosociaux des personnes touchées par les conflits armés et les catastrophes naturelles.  Il n’a pas oublié de mentionner l’importance qu’il y a à associer les femmes dans les processus de prise de décisions de sa Fédération. 

Le Président de l’Assemblée générale, M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE, a jugé « crucial » que l’Assemblée générale continue de faire évoluer les politiques et de renforcer les normes pour mieux s’attaquer aux crises humanitaires.  Aujourd’hui, a-t-il constaté à son tour, les crises humanitaires sont plus longues et gagnent en taille et en complexité.  Les inégalités se creusent dans les pays et entre eux; la faim s’aggrave; les maladies infectieuses se répandent; les violations des droits de l’homme et l’exclusion politique et sociale sont toujours là; le nombre des conflits armés augmente; et les acteurs armés non étatiques menacent encore plus la sécurité des pays.  En conséquence, des générations grandissent dans les camps de réfugiés: quelque 70,8 millions de personnes dans le monde ont été forcées de fuir de chez elles et leur nombre augmente.  Nous avons, a rappelé le Président, fait la promesse de ne laisser personne de côté.  Nous devons donc faire plus pour prévenir les crises humanitaires et déployer davantage d’efforts pour traiter les causes sous-jacentes des crises.

L’urgence climatique et la dégradation de l’environnement, a poursuivi le Président, exacerbe les crises.  Huit des crises alimentaires les plus graves aujourd’hui sont liées soit à des conflits soit à des chocs climatiques.  Le Président a d’ailleurs jugé déconcertant que la Conférence des États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP25) n’ait pu se mettre d’accord sur des questions importantes.  Mais, a-t-il encouragé, nous devons travailler ensemble pour parvenir à la neutralité carbone et maintenir la hausse de la température terrestre à 1,5 degré Celsius.  L’Accord de Paris sur le climat et le Programme 2030 sont tous deux des instruments centrés sur l’homme.  Ils sont un hommage au multilatéralisme.  Dans quelques semaines à peine, a rappelé le Président, nous entrerons dans la Décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable.  Mes priorités pour cette session sont d’ailleurs ancrées dans le Programme 2030: prévention des conflits, élimination de la pauvreté et zéro faim, action climatique, éducation de qualité et inclusion, en particulier des jeunes et des femmes.

Maintenant que nous célébrons le soixante-dixième anniversaire des Conventions de Genève, n’oublions pas, a dit le Président, que les principes humanitaires sont la clef.  Il a rendu hommage au personnel humanitaire cible d’attaques multiples.  La semaine dernière, a-t-il conclu, les États Membres ont « investi dans l’humanité » au cours des annonces de contribution au CERF.  L’approche novatrice du Fonds trouve un écho dans les efforts visant à abandonner le travail en silos.  Nous renforçons, a affirmé le Président, la collaboration entre les organisations humanitaires et celles du développement.  Le système des coordonnateurs résidents doit désormais travailler étroitement avec l’OCHA.  Mais nous devons aussi promouvoir encore plus de synergies, renforcer le nexus humanitaire-développement et rationnaliser le travail.  Comme il est prévu qu’en 2020, 167,7 millions de personnes auront besoin d’assistance humanitaire, il faut, a ajouté le Président, redoubler d’efforts.  Échouer à protéger et autonomiser ceux qui vivent des tragédies serait un échec pour l’humanité. 

Adoption des projets de résolution

Au nom d’un groupe de pays, la représentante du Canada a regretté que l’accès à la santé sexuelle et procréative ait été remis en question dans le libellé de plusieurs textes, alors que la violence sexuelle prend un rythme plus fréquent.  En outre, les bonnes interventions peuvent faire reculer la mortalité infantile et maternelle dans les situations d’urgence humanitaire.  L’accès à ces services est donc « indispensable », a argué la représentante, en appelant tous les États à rejeter catégoriquement les amendements proposés. 

Au nom de l’Union européenne, son homologue de la Finlande a salué le Maroc pour des consultations « ouvertes et transparentes » sur la résolution relative à la coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles.  La représentante a aussi félicité le Maroc pour s’être efforcé de prendre en considération les commentaires de toutes les délégations.  Elle a profondément regretté, à son tour, la décision des États-Unis qui, pour la deuxième fois, ont introduit un amendement sur une résolution aussi importante qui est traditionnellement adoptée par consensus. 

La représentante a rappelé le large accord obtenu durant les négociations pour modifier le paragraphe 59 de la résolution sur le renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies, lorsqu’il est apparu clairement que les efforts « longs et concertés » ne permettraient pas de trouver un libellé acceptable par tous.  Les membres de l’ONU ont toujours eu des vues divergentes sur la santé sexuelle et procréative, mais jusqu’ici, ils sont toujours tombés d’accord sur un libellé « scrupuleusement rédigé et équilibré ».  La représentante a voulu que l’on n’oublie pas que le Programme 2030 reflète l’engagement partagé de la communauté internationale en faveur de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles, y compris en termes d’accès universel aux services de soins de santé.  Affaiblir ce libellé, c’est créer un précédent et c’est reculer, et c’est aussi saper les engagements pris par les États Membres.  La coopération internationale exige que l’on agisse de façon responsable et saper le consensus ne peut qu’engendrer des conséquences négatives, avec des répercussions préjudiciables sur les droits les plus fondamentaux des femmes et des filles qui ont besoin d’une assistance humanitaire. 

La représentante de la Suède a rappelé que c’est son pays qui a toujours présenté le texte sur le « renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies ».  Ce texte, a-t-elle insisté, a toujours été adopté par consensus, un consensus qui est un message fort de soutien aux Nations Unies et aux acteurs humanitaires sur le terrain, mais aussi le signe de notre responsabilité collective de soulager les souffrances des populations dans le besoin.  La représentante a donc jugé « dommage » qu’un État ait présenté un amendement sur un libellé qui revient chaque année depuis près de trois décennies.  « Protégez le consensus » en votant contre cet amendement, a-t-elle pressé.

La résolution sur la « coopération internationale en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles: de la phase des secours à celle de l’aide au développement » (A/74/L.31) a été adoptée par consensus après le rejet, par 6 voix pour (Colombie, États-Unis, Guatemala, Nicaragua, Qatar et Fédération de Russie), 106 voix contre et 25 abstentions, de l’amendement américain sur le paragraphe 62 (A/74/L.35).  Le paragraphe initial a été adopté par 136 voix pour, l’opposition des États-Unis et les absentions du Guatemala, de la Fédération de Russie, du Soudan et du Togo. 

La résolution sur le « renforcement de la coordination de l’aide humanitaire d’urgence fournie par les organismes des Nations Unies » (A/74/L.34) a été adoptée par consensus après le rejet des amendements américains sur les paragraphes 58 et 59 (A/74/L.36) par 4 voix pour (États-Unis, Guatemala, Nigéria et Qatar), 112 voix contre et 26 abstentions.  Les paragraphes initiaux ont été adoptés par 140 voix pour, l’opposition des États-Unis et du Qatar et les abstentions du Guatemala, du Nicaragua, du Soudan et du Togo. 

Les résolutions sur les « conséquences durables de la catastrophe de Tchernobyl » (A/74/L.30), la « sûreté et sécurité du personnel humanitaire et protection du personnel des Nations Unies » (A/74/L.32) et l’« assistance au peuple palestinien » (A/74/L.33) ont été adoptées par consensus.

La représentante des États-Unis s’est rangée au consensus mais s’est dissociée des paragraphes visés par ses amendements.  Selon notre entendement, a-t-elle précisé, les résolutions de l’Assemblée générale ne sont pas juridiquement contraignantes et ne modifient en rien le droit coutumier international.  Nous rejetons aussi, a-t-elle ajouté, toute référence à la Cour pénale internationale (CPI) et toutes les références à la santé sexuelle et procréative quand elle promeut la pratique de l’avortement.  En ce qui concerne le Programme 2030, l’Accord de Paris et le Pacte de Marrakech sur les migrations, notre position est bien connue, a souligné la représentante.

Son homologue de la Hongrie a aussi rejeté toutes les références au Pacte de Marrakech sur les migrations auquel son pays n’est pas partie. 

Le représentant du Chili a utilisé les mêmes arguments pour rejeter à son tour les références au Pacte mondial sur les migrations. 

Non partie au Pacte, le Brésil a, par la voix de son représentant, regretté des références à un document qui n’a pas sa place dans le contexte de l’assistance humanitaire. 

Le délégué de l’Algérie a, à son tour, souligné qu’aux yeux de son pays le Pacte n’a aucune valeur contraignante et qu’il doit être mis en œuvre en fonction des priorités de chaque État. 

Son homologue de la Libye a avancé les mêmes arguments. 

Le représentant du Qatar a, quant à lui, émis des réserves sur les références à la santé sexuelle et procréative, soutenant une nouvelle fois les amendements américains. 

Pour nous, a dit le représentant de l’Italie, le consensus ne change rien à notre position sur le Pacte de Marrakech sur les migrations auquel nous ne sommes pas parties. 

Commentant en particulier le texte sur la sécurité du personnel humanitaire, le représentant de la Fédération de Russie s’est dissocié des références à la Cour pénale internationale (CPI) et au Statut de Rome.  Dans son état actuel, s’est-il expliqué, la Cour ne peut être considérée comme un outil permettant d’atteindre les objectifs en matière de sécurité. 

Ses réserves ont été partagées par le représentant de l’Arabie saoudite

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: l’Afghanistan appelé à respecter les résultats de l’élection présidentielle et à protéger les civils en attendant la paix

8687e séance – après-midi
CS/14053

Conseil de sécurité: l’Afghanistan appelé à respecter les résultats de l’élection présidentielle et à protéger les civils en attendant la paix

Près de trois mois après la tenue du scrutin présidentiel et toujours dans l’attente de la proclamation des résultats, l’Afghanistan a été appelé, cet après-midi, par les membres du Conseil de sécurité à respecter l’issue du vote et à décréter un véritable cessez-le-feu sur tout le territoire pour protéger la population, en attendant la conclusion d’un accord de paix.

Tout en se félicitant du relativement bon déroulement du vote, le 28 septembre 2019, malgré une faible participation liée aux menaces sécuritaires, le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies (MANUA), M. Tadamichi Yamamoto, a dénoncé la persistance d’un niveau de violence alarmant contre les civils: ces derniers ont encore payé au troisième trimestre 2019 le plus lourd tribut à la guerre depuis que la MANUA a entrepris de comptabiliser les victimes il y a 10 ans.  M. Yamamoto présentait le dernier rapport en date du Secrétaire général sur l’évolution de la situation dans ce pays.

Cette violence, comme celle, « injustifiable », qui a visé récemment des travailleurs humanitaires, perdure malgré la reprise des négociations de paix au Qatar entre les États-Unis et les Taliban, a déploré le Représentant spécial pour qui l’escalade des violences pour acquérir des positions dans le cadre des négociations de paix est « inacceptable ».  M. Yamamoto a condamné, en particulier ,les attaques qui ont tué un employé des Nations Unies et un médecin japonais engagé de longue date dans le pays.

Quel que soit le résultat des élections, la paix sera la priorité du nouveau Gouvernement issu des urnes, a-t-il martelé en l’appelant à « progresser » notamment sur les droits de l’homme, la justice et la bonne gouvernance et en faveur du respect d’un véritable cessez-le-feu sur tout le territoire.  Mais attention à protéger les intérêts « de toute la société afghane, y compris les femmes et les jeunes », a-t-il prévenu.

Racontant la mort d’un père de famille, tué dans son village par un tir de drone devant ses très jeunes enfants, la représentante de la jeunesse afghane, Mme Aicha Khurram –première fille à occuper la fonction– a indiqué qu’il y avait parfois 100 morts civils en une seule journée dans son pays, dont 65% de la population a moins de 25 ans.  « Comment croire encore à l’avenir ?», a-t-elle demandé en citant une fillette rencontrée dans un orphelinat, qui craint de se retrouver à mendier dans les rues « toute son enfance » pour survivre.

« Nous serons tous jugés par l’histoire », a asséné Mme Khurram en appelant le Conseil de sécurité et les Nations Unies en général à se porter garant des droits des jeunes afghans dans les pourparlers de paix renoués entre Américains et Taliban -y compris « ceux des jeunes taliban », a-t-elle insisté– et d’un véritable cessez-le-feu.  « Je suis ici devant vous parce que vous êtes aussi leurs Nations Unies », a-t-elle plaidé. 

S’exprimant après elle, la représentante de l’Afghanistan a fait valoir que la présence de Mme Khurram et la sienne constituaient la preuve de l’évolution de son pays, vantant le difficile chemin parcouru et les réformes engagées.  « Ceux qui ont voté ont ainsi voulu rejeter la violence », a-t-elle assuré en espérant la proclamation rapide des résultats toujours en suspens, comme l’ont fait remarquer de nombreuses délégations sans cacher leur impatience.  Pour l’Allemagne, ce processus a déjà pris « trop de temps » et « il faut mettre fin à cette incertitude dans le pays ».  De l’avis de la France, « la crédibilité de l’élection dépend désormais de l’annonce des résultats et de leur acceptation par tous les candidats ». 

Par ailleurs, le représentant allemand a jugé « certes merveilleux » de voir l’Afghanistan représenté au Conseil par deux femmes; mais cela le serait encore plus si la moitié du Gouvernement était composée de femmes et s’il se concentrait sur le bien-être de la population, a-t-il nuancé en insistant sur leur association au processus de paix de Doha.

L’objectif de ces discussions est de sortir le pays du cycle des dernières années pour faire en sorte que l’Afghanistan cesse d’être un sanctuaire pour les groupes terroristes, a relevé la représentante américaine, insistant elle aussi sur la participation « pleine et entière » des femmes et des jeunes.  Les Taliban doivent réduire les violences et montrer qu’ils sont engagés en faveur de la paix, a insisté le Royaume-Uni.

La Fédération de Russie, qui entend notamment faciliter la paix dans le cadre du « Format de Moscou », a également appuyé la reprise du dialogue entre les États-Unis et les Taliban.  En raison de la proximité de ses frontières avec l’Asie centrale, la Russie s’est dite inquiète de la présence persistante de combattants de Daech dans le nord-est de l’Afghanistan et de cellules dormantes qui constituent une menace pour la région « du sud de la Russie ».  De plus, la croissance des stupéfiants est un véritable problème pour l’Afghanistan mais aussi pour l’ensemble de la région et pour le monde entier car les narcodollars sont une source de financement majeure du terrorisme, a rappelé le représentant russe.

La Chine enfin a appelé à suivre de près toutes les nouvelles difficultés qui pourraient survenir après la publication des résultats des élections.  Elle a aussi réclamé le retrait de toutes les forces étrangères pour appuyer l’Afghanistan sur le chemin de la réconciliation. 

Sur le plan humanitaire, et compte tenu des besoins de la population, les Nations Unies comptent aider plus de sept millions de personnes l’an prochain, a signalé M. Yamamoto qui espère ainsi mobiliser plus de 733 millions de dollars.

LA SITUATION EN AFGHANISTAN ET SES CONSÉQUENCES POUR LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES (S/2019/935)

Déclarations

M. TADAMICHI YAMAMOTO, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), est revenu sur l’élection présidentielle du 28 septembre 2019.  Le taux de participation a été modeste en raison des menaces sécuritaires et les résultats n’ont toujours pas été proclamés, mais le scrutin s’est développé dans des conditions nettement meilleures et surtout beaucoup plus transparentes que lors des précédentes élections, a-t-il noté.

La Commission électorale indépendante a obtenu les résultats et décompté les votes en présence des candidats et observateurs, et les résultats ont été transmis de manière électronique.  Plus de 4 000 plaintes ont déjà été traitées par la Commission des plaintes électorales, tandis que certains candidats se sont aussi plaints de certains aspects techniques du vote, a informé le Représentant spécial.  Ces nombreux échanges ont bloqué l’audit et les décomptes dans sept provinces et viennent contribuer au blocage des résultats qui devraient cependant être proclamés sans tarder, a déclaré M. Yamamoto en saluant le rôle de ces deux commissions.  Il a appelé toutes les parties prenantes à permettre aux institutions de traiter les plaintes, conformément à la législation et à accepter les résultats du scrutin.

Par ailleurs, la guerre continue de faire un nombre considérable de victimes en Afghanistan.  Le Représentant spécial a déploré l’augmentation sans précédent du nombre de victimes civiles au cours de la période allant de juillet à septembre, qui n’a jamais été aussi élevé depuis que la MANUA a commencé à recenser systématiquement des données à ce sujet, en 2009.  M. Yamamoto s’est dit préoccupé par les attaques délibérées contre les civils, en particulier au moyen d’engins explosifs improvisés et lors des opérations aériennes.  Jugeant « inacceptable » l’escalade des violences pour acquérir des positions dans le cadre des négociations de paix, il a appelé toutes les parties à redoubler d’efforts pour réduire les pertes civiles. 

Le responsable s’est aussi dit alarmé par les attaques contre les humanitaires, notant la mort d’un employé des Nations Unies lors d’une attaque contre son véhicule.  Il a également déploré l’assassinat du médecin humanitaire japonais septuagénaire Tetsu Nakamura, « un véritable choc ».  Malheureusement, ce ne sont pas les seules attaques contre les humanitaires. 

De même, M. Yamamoto a dénoncé les attaques contre les défenseurs des droits de l’homme, dont plusieurs ont péri ou ont été arrêtés par le directorat de la sécurité alors qu’ils enquêtaient contre des abus commis contre des enfants dans la province du Logar, et il a promis d’œuvrer à renforcer leur protection.

Peu importe le résultat des élections, a-t-il estimé, car conserver la paix sera la priorité du Gouvernement afghan.  « Alors que nous attendons les résultats des élections, les efforts de paix n’ont pas pris fin. »  Les négociations entre les États-Unis et les Taliban ont repris et des efforts sont en cours pour le dialogue interafghan.  Le Président Ghani a présenté son point de vue lors de la conférence ministérielle, pour le cœur de l’Asie à Istanbul.  Mais certaines questions doivent encore progresser, notamment sur les droits de l’homme, la justice et la bonne gouvernance et aussi concernant un véritable cessez-le-feu, a poursuivi le Représentant spécial.  Le Gouvernement doit veiller à protéger les intérêts de toute la société afghane, y compris les femmes et les jeunes.  C’est aussi nécessaire pour lutter contre le terrorisme et la présence de Daech en Afghanistan, sans compter que la paix en Afghanistan bénéficierait aux peuples et aux pays de la région. 

M. Yamamoto a notamment insisté sur la participation des femmes à toutes les activités de la société afghane, saluant la création du groupe des Amis des femmes afghanes par le Royaume-Uni et l’Afghanistan, ici à New York, le mois dernier, pour intégrer les femmes au processus de paix.  Il s’agit d’un engagement ferme à cet égard et pour lutter contre les violences perpétrées contre les femmes et les jeunes. 

L’Afghanistan doit enfin pouvoir compter sur l’appui des bailleurs de fonds pour garantir son développement à long terme, a plaidé le responsable.  La première conférence ministérielle pour le développement sous la houlette du nouveau Gouvernement se tiendra la semaine prochaine et ce sera la dernière d’ici à 2024.  De son côté, a-t-il demandé, le pays doit prendre des mesures concrètes contre la corruption et l’impunité.

Sur le plan humanitaire, les Nations Unies comptent aider, en 2020, plus de sept millions de personnes et doivent pour y parvenir mobiliser plus 733 millions de dollars. 

L’objectif immédiat est cependant de s’assurer que les résultats des élections soient crédibles et acceptés par toutes les parties prenantes, a conclu M. Yamamoto.

Mme AISHA KHURRAM, représentante de la jeunesse afghane, a évoqué le sort tragique des enfants afghans qui ont perdu un parent dans le conflit meurtrier qui frappe leur pays depuis des décennies, que ce soit à la suite d’un attentat-suicide ou d’une frappe de drone.  Comme l’a dit une fillette dans un orphelinat qu’elle a visité: « comment puis-je encore croire en l’avenir?  Je ne veux pas être réduite à mendier dans la rue pendant toute mon enfance ».  Cette catastrophe humanitaire est bien réelle et se passe aujourd’hui et non pas au siècle dernier, s’est indignée la jeune femme avant d’asséner: « nous serons tous jugés par l’histoire.  Que ce soit pour l’injustice que nous autorisons et/ou pour le silence que nous avons choisi, une chose est sûre: il est illusoire de croire que nous serons pardonnés. »

Il y a tous les jours plus de 100 morts et blessés en Afghanistan, a poursuivi la jeune femme.  Souvent ce sont les civils, notamment les jeunes et les enfants, qui sont témoins, voire victimes, de la violence impitoyable des parties belligérantes, s’est-elle indignée.  Cette guerre a détruit nos rêves et nos vies, et pourtant, au cœur de ce chaos, « nous, les jeunes afghans saluons la résolution 2250 (2015) du Conseil de sécurité qui m’a permis d’être ici aujourd’hui devant vous pour faire passer leur message ».  Cette violence pointe du doigt l’urgence de mettre fin au conflit afghan par le truchement d’un accord négocié, a poursuivi Mme Khurram, qui a plaidé pour une paix équilibrée et durable pour éviter tout potentiel retour en arrière.

En ce moment crucial pour l’Afghanistan, marqué par la récente élection présidentielle, le processus de paix en cours et le retrait potentiel des troupes étrangères, il faut définir le sort et l’avenir du pays, alors même que le peuple afghan n’en peut plus de la violence, a plaidé Mme Khurram.  Il ne s’agit plus seulement de terrorisme, a-t-elle dit, mais d’une « guerre contre les civils » qui ne veulent rien d’autre que la paix.  Avec 63% de jeunes de moins de 25 ans, la population afghane est jeune et fait les frais de ce conflit qui a marqué leurs vies depuis des décennies maintenant.  « Je suis ici devant vous parce que vous êtes aussi leurs Nations Unies et que ma génération est convaincue que seule la vérité peut engendrer une action internationale », a confié l’intervenante. 

Son message au nom des jeunes afghans se veut être un message d’espoir, même si cet espoir est aujourd’hui pris en otage par leur peur d’être exclus, oubliés ou tout simplement sacrifiés.  Au cours des deux derniers mois, Mme Khurram a multiplié ses efforts pour toucher la jeunesse au sens large, que ce soit par des visites dans les universités, les orphelinats ou les groupes communautaires ou encore par une enquête en ligne qu’elle a lancée et l’hashtag #Afghan youth call; leur message commun, répété encore et encore, est clair: « nous voulons la paix, une vie en sécurité, l’accès à l’éducation et nous voulons être entendus sur des décisions qui touchent notre avenir ».  Comme l’a constaté la représentante de la jeunesse, la réconciliation et la paix sont désormais les plus grandes priorités en Afghanistan et les jeunes des deux côtés du conflit veulent être associés aux pourparlers de paix pour que la réconciliation puisse avoir des chances d’être durable.

Un an après le début des pourparlers de paix entre les États-Unis et les Taliban à Doha, les jeunes afghans revendiquent un mécanisme transparent qui protège leurs droits et leurs acquis dans tout « deal » potentiel.  « Ils demandent au Conseil de sécurité de jouer un rôle proactif dans le processus de paix afghan et de devenir le garant de leurs droits dans l’accord de paix.  Ils exigent également un arrêt immédiat de la violence, un cessez-le-feu dans tout le pays et l’inclusion des jeunes, y compris des jeunes taliban, dans le processus de paix », a conclu Mme Khurram.

Mme ADELA RAZ (Afghanistan) a mis l’accent sur le rôle que joue en Afghanistan une nouvelle génération de femmes éduquées.  Elle a déclaré que la nouvelle représentante de la jeunesse symbolisait « l’Afghanistan post-2001 ».  La représentante a appelé à préserver les gains réalisés ces 18 dernières années.  Elle a expliqué que l’adoption d’une nouvelle constitution a ouvert la voie à une république qui défend l’égalité de tous les citoyens.  La nouvelle république offre des services de santé, d’éducation et la sécurité pour tous, et a institué un système démocratique qui a offert aux Afghans, lors des élections présidentielle et législatives de 2004 et 2005, l’opportunité d’élire leurs dirigeants pour la première fois depuis des décennies.  Elle s’est félicitée du premier transfert démocratique de pouvoir en Afghanistan avec l’élection présidentielle de 2014 et de la mise en place d’une décennie de transformation économique 2015-2024. 

Sur le plan juridique, Mme Raz a cité l’adoption de 400 lois qui ont permis de moderniser les institutions afghanes.  «  Le succès de ces réformes est évident, a-t-elle dit avant de citer une croissance de 90% des revenus internes depuis 2015.  Elle a estimé que la tenue de l’élection présidentielle le 28 septembre 2019 a permis de franchir une nouvelle étape dans le rejet de l’idéologie extrémiste au bénéfice de valeurs démocratiques.  Il appartient aujourd’hui à la commission électorale de publier le résultat des votes après avoir répondu à toutes les plaintes.

Par ailleurs, a précisé la représentante, le Président Ghani a présenté au mois d’octobre un plan de paix et de stabilité en sept points pour promouvoir un processus de paix conduit par les Afghans eux-mêmes dans le cadre de pourparlers directs entre les Taliban et le Gouvernement.  Ce plan vise à éviter la répétition du conflit et à mettre en place des systèmes de vérification crédibles pour faire face aux menaces que posent les réseaux terroristes et les organisations criminelles transnationaux, et autres acteurs non étatiques.  Enfin, à l’avenir, ce plan vise à promouvoir le développement en mettant l’accent sur des réformes institutionnelles visant à renforcer la gouvernance et la lutte contre la corruption.  Mme Raz a expliqué que le Gouvernement a identifié des mesures immédiates pour mieux coordonner les efforts et définir les priorités pour réaliser la paix, dont la tenue de « mini jirga ».  Le processus de paix ne peut avancer que s’il y a un cessez-le-feu immédiat des Taliban, a-t-elle souligné.  Nous avons créé le groupe des amis des femmes afghanes le mois dernier avec le soutien de partenaires internationaux, a-t-elle ensuite rappelé, avant de prévenir qu’aucune paix réelle ne pourra aboutir sans la participation totale des femmes

La représentante afghane s’est inquiétée des menaces que constituent les Taliban, Al-Qaida et Daech.  Elle s’est félicitée des succès rencontrés par les forces afghanes en notant qu’après des opérations militaires menées dans le nord-est de l’Afghanistan, 243 combattants et leurs familles se sont rendus dans la province de Nangarhar.  L’Afghanistan apprécie le soutien des forces de l’OTAN qui continuent d’entraîner nos forces de sécurité tout en fournissant des conseils pour lutter contre le terrorisme, a-t-elle ajouté.  Elle a aussi mis l’accent sur la nécessité de réfléchir aux mesures à prendre contre l’idéologie des terroristes et leurs sources de financement.  Elle a appelé à une approche régionale concrète de la lutte contre la criminalité transnationale organisée.  Elle a cité 3 000 opérations menées en 2019 contre le trafic de drogue qui a abouti à l’arrestation de 800 personnes.  Enfin, Mme Raz a remercié la communauté internationale d’avoir rendu « l’impossible possible » avant d’appeler à redoubler d’efforts pour consolider les valeurs démocratiques et les acquis obtenus grâce aux sacrifices des Afghans et de la communauté internationale. 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a jugé que le processus électoral afghan avait déjà pris « trop de temps ».  Il a appelé la Commission électorale à faire son travail mais le processus, a-t-il ajouté, doit aboutir pour donner des résultats et permettre une transition.  « Il faut mettre fin à cette incertitude dans le pays », a-t-il insisté.  Le représentant s’est dit « frappé » par le nombre record des victimes civiles qui semblent représenter aujourd’hui la cible des terroristes. 

L’Allemagne, a indiqué M. Heusgen, est prête à contribuer à la suite du dialogue interafghan à Doha.  Toutefois, a-t-il souligné, les pourparlers de paix ne peuvent se faire sans les femmes.  Si le processus doit faire l’objet d’une appropriation nationale pour parvenir à une paix pérenne, il faut aussi aller « plus loin » et garantir une véritable participation des femmes et des jeunes dans toutes les sphères de la société.  Il est certes « merveilleux » de voir deux femmes représenter ici, au Conseil de sécurité, l’Afghanistan, mais ça le serait encore plus si la moitié du Gouvernement était composée de femmes et si celui-ci se concentrait sur le bien-être de la population, a relevé le représentant.  Le Gouvernement afghan doit servir la population, garantir l’état de droit et lutter contre l’impunité, a-t-il répété, avant de conclure en espérant que la période électorale allait prendre fin sans tarder.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a salué la résilience de l’Afghanistan et a appelé les membres du Conseil de sécurité à soutenir le pays pour parvenir à la paix et à un retour à la normale.  Se félicitant des nombreuses évolutions positives, le représentant de l’Indonésie a appelé à continuer de progresser avec attention dans le domaine de la justice et de la gouvernance, ainsi que dans le domaine de l’inclusivité et des droits des personnes.  Il s’est félicité de la tenue, en septembre, des élections dans plus de 4 000 bureaux de vote, y voyant la démonstration de l’attachement des Afghans à un système démocratique.  Le travail pour la réconciliation nationale, la bonne gouvernance et le développement doit se poursuivre, a-t-il insisté.

Concernant la protection des civils, le représentant de l’Indonésie s’est préoccupé du fait qu’au troisième trimestre 2019, 41% des victimes civiles étaient des femmes et des enfants.  Il a particulièrement déploré les attaques contre les travailleurs humanitaires.  Il a dit l’importance d’un processus de paix « par et pour les Afghans »  avec un rôle accru accordé aux femmes et aux jeunes afghans.  « Nous appuyons le renforcement des capacités des femmes », a-t-il insisté.  Il a précisé que l’Indonésie a accueilli récemment à Jakarta un dialogue sur le rôle des femmes dans l’appui à la paix et la prospérité lors duquel des femmes afghanes de zones rurales et urbaines ont pu partager leur expérience avec des femmes indonésiennes. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a indiqué suivre de près la situation en Afghanistan et s’est dit préoccupé par la fréquence des actes terroristes majeurs et du nombre de victimes civiles.  Il s’est également dit vivement inquiet par la présence de Daech car, malgré les efforts, ces combattants sont parvenus à préserver leurs positions et la présence de cellules dormantes dans le nord-est, ainsi que des canaux de recrutement de jeunes afghans.  Cette situation constitue « une menace pour les voisins d’Asie centrale et du sud de la Russie », a-t-il averti.  De même, la croissance des stupéfiants est un véritable problème pour l’Afghanistan, mais aussi pour l’ensemble de la région et pour le monde entier car les narcodollars sont une source de financement majeur du terrorisme et il est indispensable de renforcer les efforts internationaux pour lutter contre ce fléau.

La Russie, a poursuivi le représentant, est en faveur d’une paix durable, attendue de longue date par les Afghans, et appuie le processus mené par et pour les Afghans.  Elle est prête à fournir une pleine assistance à ces efforts comme elle fait déjà dans le cadre du « Format de Moscou » et dans le cadre du Dialogue interafghan à Moscou et elle appuie la reprise du dialogue entre les États-Unis et les Taliban.  M. Nebenzia a aussi jugé « utile » de faire participer les partenaires pakistanais, comme ce fut le cas à Pékin en juin et à Moscou en octobre.  Mais pour lui, la société afghane est à la veille d’une nouvelle étape et la clé est entre les mains des Afghans eux-mêmes.  Après l’élection présidentielle du 28 septembre, le représentant a déploré les difficultés et le retard du décompte qui donne lieu à des tentatives de déstabilisation et des manifestations d’ampleur.  La population a donné ses voix et ce processus doit aboutir à une société stable et unie, a-t-il conclu en appelant à une coopération internationale et régionale renforcée.

M. JUN ZHANG (Chine) a estimé que le processus de reconstruction était dans l’incertitude et que la paix restait précaire en Afghanistan.  Il a jugé indispensable d’accompagner l’Afghanistan afin d’améliorer la situation sécuritaire qui s’est détériorée dernièrement avec de nouvelles frappes aériennes qui ont fait de nombreuse victimes civiles.  La Chine va suivre de près toutes les nouvelles difficultés qui pourraient survenir suite à la publication des résultats des élections.  « Nous appelons aussi au retrait de toutes les forces étrangères conformément à des pratiques bien établies » a insisté le représentant.  Il a appelé à appuyer vigoureusement une Afghanistan qui avance sur le chemin de la réconciliation.  « Nous appuierons toutes les parties afghanes qui placeront les intérêts de la population avant tout autre intérêt », a-t-il insisté

M. Zhang a fait savoir que la Chine était prête à créer une plateforme de négociation pour les Afghans.  Il a aussi souligné les efforts de coopération de la Chine pour améliorer la croissance économique de l’Afghanistan, citant notamment les soutiens accordés par son gouvernement pour construire des hôpitaux et des universités.  Il a également parlé des initiatives lancées dans le cadre de la nouvelle Route de la soie pour favoriser l’intégration de l’Afghanistan dans l’économie de la région. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) s’est fait l’écho de tous ceux qui ont condamné les récentes attaques, « injustifiables » et « odieuses » contre les Nations Unies et le médecin japonais.  Les Taliban prétendent s’exprimer au nom de l’Afghanistan mais, même s’ils ne participent pas directement à ce type d’attaques, ils contribuent à un climat favorable à leur perpétration, a-t-elle déploré.  Or un accord entre les Etats-Unis et les Taliban est indispensable au lancement d’un dialogue interfghan entre les Taliban et le Gouvernement.  Pour Mme Pierce, les Taliban doivent réduire les violences et montrer qu’ils sont engagés en faveur de la paix.  Elle a aussi insisté sur le rôle des femmes dans le processus de paix.

La représentante a par ailleurs appelé les parties prenantes à respecter l’intégrité des organes électoraux qui travaillent à l’achèvement du processus et dit attendre avec impatience les résultats du scrutin présidentiel.  Enfin, s’agissant du développement économique du pays et de ses besoins essentiels, les engagements pris à Bruxelles en 2016 prendront fin l’an prochain et 2020 verra une nouvelle conférence qui doit permettre de finaliser les objectifs de la Décennie de la transformation, a-t-elle rappelé.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a regretté la faible participation à l’élection présidentielle du 28 septembre, en raison de la peur insufflée par les Taliban pour dissuader les citoyens de voter.  Il a encouragé la Commission électorale indépendante et la Commission du contentieux électoral à annoncer les résultats de manière transparente, impartiale et indépendante et à traiter les plaintes conformément à la loi, afin que les résultats soient acceptés par tous.  Il a salué tous les efforts déployés pour appuyer le dialogue de paix entre les Afghans et les Taliban, le 24 septembre, à Doha, et les réunions organisées avec des pays de la région pour parvenir à un consensus régional sur la paix et la stabilité en Afghanistan.  M. Ndong Mba a encouragé le Gouvernement afghan à continuer d’intégrer les femmes à ce processus de paix et s’est félicité des progrès législatifs entrepris pour éliminer la violence contre les femmes et les filles afghanes.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a rendu hommage au docteur Tetsu Nakamura, citoyen afghan d’honneur, qui a été victime d’une embuscade au début du mois.  Elle a estimé que le bon déroulement de la récente élection présidentielle a démontré que la population afghane chérit les principes démocratiques.  « Nous devons tous saluer cet acte de bravoure » ,a-t-elle dit avant d’appeler l’élite politique afghane à ne pas laisser tomber la population.  Elle a également appelé toutes les parties et responsables politiques à respecter le résultat des élections. 

Poursuivant, Mme Wronecka a condamné dans les termes les plus forts les activités terroristes prenant pour cibles des civils et des infrastructures publiques.  Elle a dit que la récente attaque contre la base de Bagram qui a visé un hôpital constitue une grave violation du droit international humanitaire.  Elle a appelé à appuyer le processus de paix, soulignant que la situation ne pouvait être résolue que par le biais de moyens politiques.  Elle a appuyé un processus de paix « par et pour les Afghans » qui prenne en compte les droits des femmes et des minorités. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a félicité le peuple et le Gouvernement afghans pour la récente élection « historique ».  Le peuple s’est levé comme un seul homme, a dit le représentant, affirmant qu’il reste cependant des étapes majeures à franchir.  Parmi ces étapes, il y a le processus que l’Afghanistan doit mener pour ramener la paix et la stabilité, après 40 ans de guerre.  Selon le représentant, le Conseil de sécurité doit aider les Afghans à mener à bien ce processus politique.  Sur le plan sécuritaire, le rapport du Secrétaire général montre les défis auxquels ce pays est confronté, a noté le représentant.  Il a souligné la nécessité de mener un dialogue politique interne et avec les pays de la région, avant de réitérer l’appui et le soutien de son pays à l’Afghanistan et à son peuple « frère ». 

Dans l’attente des résultats de l’élection présidentielle du 28 septembre dernier, Mme ANNE GUEGUEN (France) a salué le courage des Afghans qui ont bravé les menaces pour se rendre aux urnes.  Elle a ainsi estimé que la participation des électeurs, quoiqu’en deçà des précédents scrutins, avait atteint un niveau « encourageant ».  Quant aux opérations de votre, a ajouté la représentante, malgré des difficultés techniques, elles se sont déroulées de manière satisfaisante.  À ses yeux, « la crédibilité de l’élection dépend désormais de l’annonce des résultats et de leur acceptation par tous les candidats ».  À cette fin, elle a estimé que le décompte des voix devait se faire dans la transparence.  La représentante a donc appelé la Commission électorale indépendante à communiquer de façon plus ouverte tout au long du processus.

Mme Gueguen a indiqué que le futur gouvernement aurait la lourde tâche de mener à bien le processus de paix interafghan.  Ce dernier devra être suffisamment ouvert pour ne laisser personne de côté, a-t-elle précisé, tout en insistant sur la préservation des acquis en matière de justice, d’état de droit et de respect des libertés fondamentales, y compris les droits des femmes, pour garantir une paix durable.  La représentante s’est cependant dite préoccupée par la poursuite des violences en Afghanistan, où le nombre de victimes civiles n’avait pas atteint un tel niveau depuis 2009.  Elle a, par conséquent, appelé à maintenir l’engagement des Nations Unies à lutter contre le terrorisme dans le pays.  Elle a également espéré que les discussions entre les États-Unis et les Taliban se solderont par une baisse significative des violences, dans la perspective de l’instauration d’un cessez-le-feu durant les futures négociations de paix interafghanes.  Enfin, la France appelle à garantir un accès sûr et sans entrave aux personnes dans le besoin sur l’ensemble du territoire afghan, ainsi qu’à protéger les agents humanitaires, le personnel de santé et les infrastructures civiles et humanitaires.

M. JOSÉ MANUEL TRULLOLS YABRA (République dominicaine) a félicité le peuple afghan pour avoir exercé son droit de vote de manière décisive malgré les dangers et les obstacles sécuritaires.  Il a fait part de sa reconnaissance aux forces de sécurité afghanes pour avoir su maintenir la sécurité durant tout le processus électoral.  Il a appelé la communauté internationale, notamment le Conseil de sécurité, à jouer un rôle essentiel pour accompagner ce processus électoral. 

Le représentant a estimé que les négociations directes entre le Gouvernement et les Taliban représentent la voie idoine pour mettre fin au conflit.  Il s’est dit préoccupé par le nombre élevé des victimes civiles, et a appelé les parties à respecter le droit humanitaire et à protéger les civils.  Il a estimé que l’adoption d’une nouvelle loi sur la protection des enfants est un nouveau pas dans la bonne direction, tout en notant que le conflit afghan est celui qui fait le plus de victimes parmi les enfants.  Il s’est félicité des initiatives prises par l’Afghanistan pour éliminer les violences faites aux femmes et aux filles. 

M. TIEMOKO MORIKO (Côte d’Ivoire) a indiqué que l’impasse du processus politique actuel demeurait une source de préoccupation.  Il importe donc que les résultats de l’élection présidentielle soient publiés dans les meilleurs délais et que les parties s’engagent résolument à relancer le processus de paix.  Dans ce contexte, a ajouté le représentant, toutes les initiatives visant à promouvoir la paix dans les écoles, les universités et les groupes de la société civile méritent d’être encouragées.  M. Moriko a invité les Taliban à donner des gages de leur volonté à participer aux négociations en cessant les violences et en renouant le dialogue politique direct avec les autorités afghanes.  Il a appelé tous les pays de la région à soutenir ces pourparlers devant garantir la paix, la stabilité et la sécurité régionales. 

Préoccupé par l’insécurité en Afghanistan, M. Moriko a estimé que les efforts de la communauté internationale devraient tendre à faire cesser les violences meurtrières qui affectent durablement les populations les plus vulnérables.  S’agissant de la situation humanitaire, il a exhorté la communauté internationale à maintenir son appui financier, afin de fournir l’assistance nécessaire aux populations en détresse.  Le délégué a encouragé les forces engagées en Afghanistan à renforcer davantage les opérations conjointes avec les forces de défense et de sécurité dans les provinces les plus affectées par l’insécurité.  Enfin, il a appelé les parties prenantes à tenir les promesses de financements en faveur de l’armée afghane. 

M. LUIS UGARELLI (Pérou) s’est dit très préoccupé par l’exacerbation de la violence dans plusieurs régions afghanes, qui a fait de nouvelles victimes dans la population civile, et a condamné l’attentat contre un véhicule de la MANUA.  Pour lui, cette situation délicate montre l’urgence de disposer d’un cadre d’accord minimal, qui contribue à inverser les tendances négatives sur le terrain et à lancer des négociations directes entre les Taliban et les représentants du Gouvernement.  En ce sens, il est important que les pays ayant le plus d’influence sur les parties exercent la pression politique nécessaire pour que la rhétorique de confrontation et les accusations réciproques soient mises de côté, a-t-il dit. 

Parvenir à une paix durable exigera un large consensus sur une vision partagée de l’avenir, a ajouté le représentant, soulignant que tous les secteurs de la population afghane doivent être dument représentés dans les processus politiques.  Par ailleurs, il a jugé essentiel que la communauté internationale augmente ses contributions destinées à stabiliser et réactiver l’économie locale, ainsi que la mise en place de programmes d’infrastructure et de développement créant des postes de travail et offrant de l’espoir et des perspectives aux plus jeunes. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a salué le rôle important de la MANUA dans le processus électoral afghan.  Elle a encouragé les autorités électorales à communiquer de manière proactive avec toutes les parties prenantes et à préserver l’intégrité de ce processus.  Dans les prochains jours, lorsque les résultats seront annoncés par la Commission électorale indépendante, toutes les parties devront agir de manière responsable, faire preuve de retenue et à canaliser les plaintes éventuelles vers les mécanismes juridiques existants.

S’agissant de la recherche de la paix, la représentante s’est félicitée de l’échange récent de prisonniers comme mesure de confiance.  La Belgique appuie pleinement le rôle central du Gouvernement afghan dans le processus de paix et appelle les Taliban à s’engager dans les pourparlers avec le Gouvernement.  Pour qu’un accord de paix soit durable, il doit à tout prix préserver les acquis en termes de droits des femmes qui doivent notamment activement prendre part au processus de paix.  Dès lors, la Belgique salue le lancement, le mois dernier, du deuxième Plan d’action national sur la résolution 1325 (2000), ainsi que l’inclusion de l’Afghanistan dans l’initiative conjointe Union européenne-ONU Spotlight pour combattre la violence sexuelle contre les femmes et les filles.  Elle appuie en outre les objectifs du Groupe des Amis des femmes en Afghanistan qui récemment été lancé à New York.

Rappelant que l’Afghanistan est le conflit « le plus meurtrier au monde pour les enfants », avec plus de 2 400 morts au cours des neuf premiers mois de cette année, Mme Van Vlierberge a dénoncé ce niveau de violence « inacceptable ».  La Belgique s’est engagée à faciliter la négociation d’un produit consensuel du Conseil en ce qui concerne la situation des enfants et le conflit armé en Afghanistan.  Enfin, la délégation condamne fermement les attaques visant le personnel de l’ONU ainsi que les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes et appelle les autorités afghanes à ne ménager aucun effort pour identifier et traduire en justice leurs auteurs.  La représentante en a profité pour rappeler à toutes les parties leur obligation de respecter le droit international humanitaire et de prendre des mesures immédiates pour éviter les pertes civiles. 

M. MARTHINUS VAN SHALKWYK (Afrique du Sud) a déclaré que seul un processus politique inclusif et large conduisant vers un règlement négocié du conflit permettra à l’Afghanistan de réaliser une paix durable et la stabilité.  Il a estimé que tout engagement pour la paix durable et la sécurité du peuple afghan devrait être examiné.  Toutefois, il importe que tous les secteurs de la société et du Gouvernement afghans soient inclus dans ces discussions, et de faire en sorte qu’une paix globale et inclusive soit établie et maintenue. 

Le délégué a également insisté sur l’importance de l’inclusion et de la participation des femmes.  Les perspectives uniques des femmes afghanes fourniraient également un autre point de vue nécessaire au processus de paix, a-t-il estimé.  Les niveaux élevés de violence qui continuent de sévir en Afghanistan, en particulier les attaques aveugles contre des civils, des femmes, des enfants et des personnes âgées, restent une préoccupation pour l’Afrique du Sud, a poursuivi le représentant qui a appelé toutes les parties à assurer la protection des civils et respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Avant de terminer, M. Van Shalkwyk a souhaité que la Commission électorale puisse terminer ses travaux conformément au processus électoral et annoncer les résultats de l’élection présidentielle. 

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a déclaré que ce n’est qu’avec une participation pleine et entière des femmes et des jeunes que l’Afghanistan pourra s’en sortir.  Les États-Unis, qui sont pleinement engagés dans les processus afghans, espèrent que le décompte des voix se poursuivra en toute transparence et dans des délais raisonnables.  Ils appellent les candidats qui contesteront les résultats à le faire par les moyens légaux.

Mme Norman-Chalet a condamné en outre tous les actes de violence commis contre les populations civiles, notamment ceux commis par les groupes terroristes, dont Al-Qaida.  Son pays, a-t-elle assuré, reste proche des femmes afghanes et entend continuer d’appuyer les négociations interafghanes, y compris avec les Taliban.  L’objectif de ces discussions est de sortir l’Afghanistan du cycle de ces dernières années pour faire en sorte qu’il cesse d’être un sanctuaire pour les groupes terroristes, a-t-elle conclu. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: Les A3 appellent à prévenir une « déferlante terroriste »

8685e séance – matin
CS/14050

Conseil de sécurité: Les A3 appellent à prévenir une « déferlante terroriste »

Les A3, les trois pays africains membres du Conseil de sécurité, ont prévenu, ce matin, que le Mali et le Burkina Faso constituent aujourd’hui les dernières digues contre l’expansion des groupes jihadistes vers les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest, et qu’en cas de rupture de cette digue, « la déferlante terroriste » aurait l’occasion de contrôler les ports et les énormes potentiels économiques de la sous-région et d’y installer un califat islamique. 

« L’Afrique de l’Ouest et le Sahel deviendraient alors le point de diffusion du « cancer terroriste », dont les métastases pourraient se répandre dans d’autres contrées du monde », a prévenu la Côte d’Ivoire, également au nom de l'Afrique du Sud et de la Guinée équatoriale. 

Cette analyse a fait suite au tableau alarmant dressé par le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), M. Mohamed Ibn Chambas et le Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, M. Smail Chergui.  Les deux dignitaires ont tous deux alerté que malgré les efforts, la situation se dégrade toujours, marquée par des violences intercommunautaires et des actes de terrorisme qui « hantent » la région d’Afrique de l’Ouest.  La récente attaque contre un camp militaire au Niger qui a fait plus de 70 morts a notamment été évoquée.

M. Chambas a attribué cette violence à de nombreux facteurs, citant notamment la mauvaise gouvernance, la corruption, l’absence de respect des droits de l’homme, ou encore la présence massive d’armes et de groupes criminels.

Notant en outre que près de 70% de la population de l’Afrique de l’Ouest continue de dépendre de l’agriculture et de l’élevage pour vivre, le Représentant spécial a appelé à trouver des équilibres entre ces deux activités, de façon à éviter les conflits intercommunautaires opposant les populations d’éleveurs à ceux de cultivateurs, notamment au Mali, au Burkina et au Niger. 

De son côté, M. Chergui a prévenu que les liens entre les groupes armés de la région sont de plus en plus sophistiqués.  Ces derniers alimentent les conflits locaux, agissant même parfois en médiateurs pour les régler, et participent à des trafics d’armes, d’or, de combustibles et d’espèces animales sauvages dans plusieurs pays pour financer leurs activités. 

Face à une situation aggravée par la vulnérabilité de la sous-région aux changements climatiques et la pénurie alimentaire, M. Chergui a appelé le Conseil de sécurité à repenser le soutien militaire qui y est apporté, mais aussi à appuyer la Déclaration de Bamako sur l'accès aux ressources naturelles et conflits entre les communautés, adoptée en novembre par l’Union africaine, un texte qui, a-t-il expliqué, encourage notamment les États membres à élaborer un cadre politique pour gérer les conflits locaux.

« Ensemble, l’Union africaine et l’ONU devraient coprésider un mécanisme coordonné sur la stratégie au Sahel et condamner la stigmatisation de certains groupes dans la région, a-t-il estimé, avant d’exhorter à redoubler d’efforts, car, a-t-il prévenu, « l’absence de solidarité aux niveaux régional et national est préoccupante ».

Mais pour les A3, le Conseil de sécurité doit également porter son attention sur la Libye.  En leur nom, la Côte d’Ivoire a notamment demandé une implication décisive du Conseil afin de trouver une solution durable au conflit libyen, véritable « boîte de pandore », dont l’ouverture, a-t-elle souligné, a exacerbé l’insécurité et l’instabilité en Afrique de l’Ouest et au Sahel.

« Le fait est que les pays de l’Afrique de l’Ouest payent aujourd’hui le prix de l’intervention militaire de l’OTAN en Libye », a renchéri la Fédération de Russie qui a rejeté l’idée que le terrorisme dans cette sous-région a des causes internes.  « Mais au lieu de répondre à la question de savoir d’où viennent ces arsenaux d’armes lourdes, nos partenaires occidentaux préfèrent parler d’extrémisme violent et élaborer des concepts nouveaux, tout en cherchant à sous-traiter la lutte contre ce phénomène à des entités étrangères », a déploré la délégation.

La France, le Royaume-Uni ou encore l’Allemagne ont toutefois souligné que les causes profondes de la situation « alarmante » au Sahel et autour du bassin du lac Tchad sont connues.  Ces délégations ont ainsi cité les fragilités économiques, la faiblesse des États, les trafics et les impacts des changements climatiques qui exacerbent les antagonismes entre communautés.  La délégation française a notamment réclamé « un sursaut » et appelé le Conseil à encourager les États concernés à améliorer leur gouvernance et à favoriser la cohésion sociale. 

La bonne gouvernance et des forces de sécurité capables et responsables sont en effet essentielles à la prévention de la violence, ont acquiescé les États-Unis qui ont souligné qu’une réponse militaire à elle seule ne suffit pas.  La délégation a aussi insisté sur l’impératif que les citoyens aient confiance en la capacité de leurs gouvernements à les protéger, sinon, « ils chercheront d’autres moyens de protection, y compris l’adhésion à des groupes violents ou criminels ».

Pour sa part, la Belgique a relevé que le sentiment d’injustice est un facteur majeur d’instabilité, évoquant notamment les cas de règlement des conflits fonciers sur la base d’intérêts personnels et de corruption.  « Il est indispensable d’éviter les amalgames entre terrorisme, extrémisme, violences intercommunautaires, conflits interethniques ou religieux et violence insurrectionnelle pour ne pas tomber dans le piège d’une lecture simpliste de la région », a estimé la délégation.

Un autre moyen de répondre à la situation est d’accélérer le rythme du développement pour éliminer les ferments de la violence intercommunautaire, a de son côté assuré la Chine.

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE

Déclarations

M. MOHAMED IBN CHAMBAS, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), intervenant par visioconférence depuis Dakar au Sénégal, a déclaré que les violences intercommunautaires, de même que les actes de terrorisme en Afrique de l’Ouest hantent la région.  La récente attaque contre un camp militaire au Niger est un exemple de cette violence qui fait de lourdes pertes y compris dans les forces de sécurité.

Il a également signalé que les incidents dans la région montrent comment les actes de terrorisme et les violences intercommunautaires s’entrecroisent parfois.  Mais, a-t-il aussi insisté, il faut éviter de faire des amalgames, car les causes profondes des conflits ont été clairement identifiées.  Ces causes sont relatives à l’absence d’opportunités, la mauvaise gouvernance, la mauvaise gestion des ressources naturelles, la corruption, l’absence d’alternance politique ou encore l’absence de respect des droits de l’homme.  À cela il faut ajouter la présence massive d’armes et de groupes criminels.

M. Chambas s’est ensuite livré à une analyse des conflits intercommunautaires opposant les populations d’éleveurs à ceux de cultivateurs, notamment au Mali, au Burkina et au Niger.  Il a insisté sur le fait que près de 70% de la population de l’Afrique de l’Ouest continue de dépendre de l’agriculture et de l’élevage pour vivre.  Cela implique, a-t-il expliqué, qu’il faut trouver des équilibres entre ces deux activités, de façon à éviter les conflits.  Il s’est également inquiété de la situation au Burkina Faso, en proie à une montée de la violence extrémiste et intercommunautaire dans ses régions du nord, provoquant le déplacement de 500 000 personnes. 

Chacune de ces situations est spécifique et exige donc des réponses spécifiques, a poursuivi le Représentant spécial, ajoutant que dans ce domaine, les organisations régionales sont analogues à l’ONU.  À son niveau, le Secrétaire général a adopté le cadre de conformité de la Force conjointe du G5 Sahel et l’Union africaine a adopté, en novembre dernier, la Déclaration de Bamako sur l'accès aux ressources naturelles et conflits entre les communautés que le Conseil de sécurité se doit d’appuyer.  La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) recense pour sa part les bonnes pratiques, y compris les outils traditionnels de résolution des différends, a indiqué M. Chambas.

Mais, a estimé le Représentant spécial, il faudrait faire plus encore pour lutter contre la violence intercommunautaire, notamment avec les jeunes, les réseaux sociaux ou les initiatives locales.  Dans le même temps, il faut réduire les capacités financières des groupes armés, a-t-il indiqué, insistant sur le rôle des sanctions dans ce domaine. 

M. Chambas a souligné que le Conseil de sécurité a un rôle décisif à jouer pour appuyer tous les possibles domaines d’interventions.  Il a notamment insisté sur le soutien aux efforts de renforcements de la sécurité et de l’application de la loi, ainsi que sur la lutte contre la criminalité et le commerce illicite, notant que le trafic de l’or a enregistré une augmentation notable.

M. SMAIL CHERGUI, Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, s’exprimant par visioconférence depuis Addis-Abeba, a averti que la situation sécuritaire s’aggrave dans la région malgré les efforts déployés par les États et la communauté internationale pour y rétablir la sécurité.  Il a notamment prévenu que les liens étroits entre groupes armés de la région sont de plus en plus sophistiqués: ils participent à des trafics d’armes, d’or, de combustibles et d’espèces sauvages pour financer leurs activités et alimentent les conflits locaux, agissant même parfois en médiateurs pour les régler.  Ces groupes utilisent le Mali et le Niger pour la vente de motos, de pièces détachées et de carburant et vendent également du bétail volé au Nigéria, en Côte d’Ivoire et au Ghana, entre autres.  La situation est aggravée par la vulnérabilité de la région aux changements climatiques et la pénurie alimentaire débouche sur une augmentation des déplacements dans la région et rend les jeunes plus sensibles à la propagande extrémiste.

Cette situation gravissime a également provoqué la fermeture de 2 850 écoles au Burkina Faso, au Mali et au Niger à cause des violences, et des centaines d’écoliers ont été enlevés, violés, tués par des extrémistes.  La présence de l’État est faible dans de nombreuses régions et l’autorité gouvernementale est remise en cause même là où elle est présente.

M. Chergui a rappelé que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine avait demandé, en avril dernier, l’élaboration d’un cadre crédible pour prévenir et régler les conflits locaux et intercommunautaires comme ceux liés à la transhumance.  L’UA a également convoqué une conférence sur les ressources naturelles et les conflits communautaires et adopté la Déclaration de Bamako qui encourage notamment les États membres à élaborer un cadre politique pour gérer les conflits locaux.  Elle appelle aussi à un plan d’action pour appuyer les efforts nationaux et régionaux de règlement des conflits locaux et demande aux gouvernements de faire preuve d’unité.  La Déclaration demande aussi que soient élaborées des pratiques exemplaires et recommande le lancement d’un processus de réflexion pour collecter les données relatives aux conflits et promouvoir une solution africaine, conforme aux pratiques et traditions.  Elle insiste en outre pour rétablir la confiance entre l’État et la population. 

Le 13 décembre dernier, a poursuivi M. Chergui, le Conseil de paix et de sécurité a estimé que la Déclaration de Bamako le dotait d’une feuille de route a même de l’aider à répondre aux conflits locaux.  Mais malgré ces efforts, la tendance n’est pas inversée et la situation se dégrade toujours, a-t-il déploré. 

M. Chergui a appelé le Conseil de sécurité à appuyer la Déclaration de Bamako, mais aussi à reprendre et repenser le soutien militaire apporté à la région.  Selon lui, il importe d’adopter une approche socioéconomique globale qui intègre le renforcement de la présence de l’État.  Ensemble, l’Union africaine et l’ONU devraient coprésider un mécanisme coordonné sur la stratégie au Sahel et condamner la stigmatisation de certains groupes dans la région a-t-il estimé, avant d’exhorter à redoubler d’efforts, car l’absence de solidarité aux niveaux régional et national est préoccupante. 

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a commencé par présenter ses condoléances aux familles des plus de 70 soldats nigériens tués lors de l’attaque terroriste du 10 décembre.

Elle a constaté que l’Afrique de l’Ouest est en proie à une « explosion » de l’extrémisme violent et des conflits intercommunautaires alors que les cellules jihadistes tentent de prendre racine.  Ces groupes alimentent la violence en exploitant les griefs locaux, l’absence de l’État et les tensions intercommunautaires existantes.  Elle s’est inquiétée de la fréquence et de la complexité grandissante des attaques menées par l’État islamique dans le Grand Sahara contre les Forces de sécurité au Mali et au Sahel, des agissements de Boko Haram et du groupe État islamique en Afrique de l’Ouest dans la région du lac Tchad et des menaces que fait peser le conflit libyen à la région du sahel.  Cette violence touche les civils de la manière la plus aiguë, réduisant la sécurité alimentaire et déplaçant plus de 900 000 personnes. 

Lorsque les communautés sentent qu’elles doivent rivaliser pour des ressources limitées ou qu’elles ne peuvent pas compter sur leurs gouvernements pour fournir des infrastructures de base, des opportunités économiques et une protection, elles sont plus susceptibles de se sentir lésées.  Les citoyens doivent avoir confiance que leurs gouvernements peuvent les protéger et les protégeront.  Sinon, ils chercheront d’autres moyens de protection, y compris l’adhésion à des groupes violents ou criminels.  La bonne gouvernance et des forces de sécurité capables et responsables sont essentielles à la prévention de la violence, a argumenté Mme Norman-Chalet. 

Pour inverser cette tendance et créer des conditions de paix et de stabilité, Mme Norman-Chalet a souligné qu’une réponse militaire à elle seule ne suffit pas, notant qu’une résilience des sociétés aux menaces de l’extrémisme violent nait des efforts communautaires.  Il faut également une gouvernance inclusive et représentative dans l’ensemble de l’Afrique du l’Ouest et du Sahel, y compris en ce qui concerne l’accès aux services et aux ressources.  Les dirigeants doivent par ailleurs être responsabilisés à tous les niveaux et jouer un rôle actif dans le respect du contrat social entre les citoyens et leurs gouvernements. 

La représentante a ensuite indiqué que les États-Unis financent nombre de programmes pour appuyer ces solutions.  En 2017 et 2018, ils ont déboursé plus de 5,5 milliards de dollars pour soutenir la stabilité et la sécurité à long terme en Afrique de l’Ouest.  Dans la région du lac Tchad, ils ont fourni près de 470 millions de dollars d’aide pour lutter contre les facteurs sous-jacents des conflits et lutter contre les menaces terroristes.  Elle a aussi cité les initiatives « Jeunes leaders africains » et « Prosper Africa », de même que le Partenariat pour le développement du Sahel du Département d’État investissent dans le renforcement des capacités et le soutien au commerce et à l’investissement.  Mais pour combattre la violence régionale et renforcer la stabilité, un plus grand engagement des gouvernements régionaux s’impose, a-t-elle souligné.

Intervenant au nom des trois pays africains (A3) élus au Conseil de sécurité, M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a dit que l’année 2019 restera sans aucun doute pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, du point de vue sécuritaire et humanitaire, l’une des années les plus sombres du fait des violences intercommunautaires et des attaques des groupes terroristes.  Il a déclaré que les réponses aux problématiques sécuritaires et humanitaires actuelles doivent être élaborées dans le cadre d’une approche pluridimensionnelle, fondée sur la promotion d’un dialogue national inclusif.  Le représentant a réitéré son soutien au G5-Sahel et à la Commission du bassin du lac Tchad, afin d’opérationnaliser davantage la Force conjointe et la Force multinationale mixte, mais aussi de soutenir les initiatives de développement, devant permettre le relèvement économique et social des zones affectées par les violences intercommunautaires.  Il a souligné l’importance de la société civile et des médias pour battre en brèche l’idéologie et la rhétorique radicale des groupes terroristes.  « Les pays africains élus au Conseil de sécurité sont également d’avis que le caractère transnational et transrégional des violences intercommunautaires et de l’extrémisme violent exige une coopération renforcée en matière de sécurité, de défense et de développement économique et social », a dit le représentant des A3. 

Par ailleurs, M. Adom a salué les « efforts héroïques » du Mali et du Burkina Faso pour lutter contre les violences intercommunautaires et l’extrémisme violent, en dépit de conjonctures économiques particulièrement difficiles.  « Le Mali et le Burkina Faso constituent les dernières digues contre l’expansion des groupes jihadistes vers les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest », a estimé le représentant avant de prévenir que la rupture de ces digues offrirait à la déferlante terroriste l’occasion de contrôler les ports et les énormes potentiels économiques de la sous-région et d’y installer un califat islamique.  « L’Afrique de l’Ouest et le Sahel deviendraient alors le point de diffusion du cancer terroriste, dont les métastases pourraient se répandre dans d’autres contrées du monde », a-t-il craint avant d’ajouter que les enjeux de la lutte contre les violences intercommunautaires et de l’extrémisme vont bien au-delà de l’espace géographique ouest-africain et sahélien. 

Citant une urgence sécuritaire régionale et internationale, le représentant des pays africains élus au Conseil a lancé un appel pressant à la communauté internationale et aux partenaires au développement, afin qu’ils accroissent leurs contributions multiformes aux initiatives de développement en cours dans la région.  Il a demandé une implication décisive du Conseil afin de trouver une solution durable au conflit libyen, véritable « boîte de pandore », dont l’ouverture a exacerbé l’insécurité et l’instabilité en Afrique de l’Ouest et au Sahel et créé les conditions propices à l’installation des groupes terroristes.  Il a salué l’engagement pris par les chefs d’État et de gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le 14 septembre 2019 à Ouagadougou, et ceux de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), le 1er décembre dernier à Dakar, pour lutter contre l’extrémisme violent et le terrorisme. 

M. JUN ZHANG (Chine) a noté que la situation en Afrique de l’Ouest demeure stable « en général » et que l’économie se développe bien, mais que la région se heurte à des menaces qui méritent le soutien de la communauté internationale.  Les violences communautaires en sont une, ainsi que la prolifération des armes et le terrorisme.  Ainsi, Boko Haram s’est développé en Afrique de l’Ouest et en même temps, les liens entre les deux phénomènes –terrorisme et violences communautaires- se sont multipliés et la communauté internationale doit y répondre.

Il faut, selon le représentant, accélérer le rythme du développement pour éliminer les ferments de la violence intercommunautaire liée aux rivalités pour les ressources naturelles.  Les droits des communautés doivent être garantis et les services publics fournis à tous.  La Chine aide les communautés locales en renforçant les infrastructures et les possibilités d’éducation et de formation, mais il faut aussi favoriser les réponses pacifiques aux crises et promouvoir la déradicalisation, endiguer le flux de terroristes étrangers et les réseaux qui les financent, a-t-il insisté en appelant sur ce point à la coopération des services de renseignement.  M. Zhang a encore souligné la nécessité de trouver une « réponse africaine aux problèmes africains ».  Le G5 Sahel et la Force conjointe constituent une réponse précieuse et la communauté internationale doit soutenir les Nations Unies pour qu’elles apportent leur soutien à ces efforts, notamment via la Mission de l’ONU en Afrique de l’Ouest et au  Sahel.

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a estimé que le thème abordé aujourd’hui ne correspond pas à l’ordre du jour.  Il était question de discuter du terrorisme et non de l’extrémisme violent, un concept qui, a-t-il affirmé, ne fait pas l’objet d’une reconnaissance internationale.

Le représentant a ensuite déclaré que son gouvernement était davantage préoccupé par la création et l’implantation du groupe État islamique en Afrique de l’Ouest.  Il rejette aussi l’idée, véhiculée ici, que le terrorisme en Afrique de l’Ouest a des causes internes.  Or, il faudrait élargir l’analyse et inclure la question de l’ingérence extérieure dans les affaires internes, « comme c’est le cas en Syrie ».

Le fait est, a expliqué M. Kuzmin, que les pays de l’Afrique de l’Ouest payent aujourd’hui le prix de l’intervention militaire de l’OTAN en Libye.  Mais au lieu de répondre à la question de savoir d’où viennent ces arsenaux d’armes lourdes, nos « partenaires occidentaux » préfèrent parler d’extrémisme violent et élaborer des concepts nouveaux, tout en cherchant à sous-traiter la lutte contre ce phénomène à des entités étrangères. 

Si les promoteurs de la prévention de l’extrémisme violent sont si convaincus de l’efficacité de cette approche, ils n’ont qu’à l’accepter dans leurs propres pays, où des idées racistes, xénophobes et néonazis prolifèrent, au lieu de cherche à l’imposer aux pays en développement, a poursuivi le représentant.

Pour sa part, la Fédération de Russie suit de près la situation en Afrique de l’Ouest et apporte son aide aux pays de la région, notamment en appuyant la formation des forces de sécurité locales.  M. Kuzmin a appelé les promoteurs de la prévention de l’extrémisme violent à faire de même, sans ingérence dans les affaires internes de ces pays.

Après avoir présenté ses condoléances aux familles des soldats nigérians tués la semaine dernière dans une attaque jihadiste, Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a souligné combien cette réunion est importante.  L’Afrique de l’Ouest reste confrontée à de graves défis transnationaux: changements climatiques, extrémisme violent et terrorisme, pauvreté, migration irrégulière, trafic d’êtres humains, d’armes et de drogue.  C’est pourquoi elle a jugé important de renforcer la résilience de ces pays face aux menaces émergentes, y compris celles d’ordre ethnique et religieux.  À  cet égard, la représentante a souligné le rôle des institutions religieuses et la nécessité de renforcer les capacités des gouvernements locaux face aux tentatives de déstabilisation de la région.  Autonomiser les communautés marginalisées qui sont extrêmement vulnérables à l’influence des groupes extrémistes violents peut constituer, à ses yeux, une partie de la solution.  Elle a également évoqué l’inégalité des genres qui est une autre source de préoccupation.  « Nous devons investir dans la capacité des femmes à prévenir l’extrémisme violent dans leurs communautés. »

Mais au-delà, a conclu Mme Wronecka, faire face à tous ces défis requiert une approche holistique de toutes les parties prenantes, notamment à travers la mise en œuvre de la stratégie de stabilisation en faveur des pays sous la menace de Boko Haram, le plan d’investissement prioritaire pour le G5 Sahel et la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. 

M. LUIS UGARELLI (Pérou) a insisté sur les liens étroits entre terrorisme et crime organisé et sur la nécessité de renforcer la coordination des États.  Les mesures doivent être conformes au droit international humanitaire et aux droits de la personne pour garantir la légitimité de la réponse, a-t-il souligné.  S’il a salué la réunion de la CEDEAO sur ce thème en septembre dernier, le représentant a aussi jugé important de démanteler les structures qui permettent le trafic de drogue en Afrique de l’Ouest ainsi que le trafic d’armes légères et de ressources naturelles, qui favorisent la corruption des institutions.  De même, il est impératif de lutter contre les causes profondes des violences communautaires, aggravées par les groupes terroristes qui détruisent les possibilités de proposer des solutions pacifiques en favorisant un groupe par rapport à un autre et en jouant des tensions et des conflits entre communautés pour mener des attaques aveugles.  Pour le Pérou, il faut conjuguer la riposte au terrorisme et une approche multidimensionnelle pour garantir de meilleures conditions de vie aux civils.  À cette fin la communauté internationale doit apporter son concours au développement dans la sous-région.  Car il n’y a pas d’autre activité préventive à mener pour l’édification d’une paix durable que de créer des sociétés plus ouvertes, notamment aux femmes et aux jeunes.

M. JAMES ROSCOE (Royaume-Uni) a déclaré que les initiatives militaires ne peuvent à elles seules venir à bout de l’extrémisme violent, tant il y a de causes internes à ce phénomène, notamment la mauvaise gouvernance, la corruption et l’absence d’opportunités.  En ce qui le concerne, le Royaume-Uni, qui soutient les efforts entrepris dans cette lutte, enverra 250 soldats au Mali en 2020.  Le pays a versé 6,6 millions de dollars au titre de l’aide bilatérale et plusieurs autres millions à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).  Au nord du Nigéria, le Royaume-Uni a déployé 15 millions de dollars et 28 autres millions dans l’État de Borno pour lutter contre l’enrôlement des jeunes dans les groupes armés.  Le Royaume-Uni mise également sur l’investissement économique, comme le montre la tenue prochaine, le 28 janvier, à Londres, du sommet Afrique-Royaume-Uni pour stimuler les investissements économiques.

Le représentant a déclaré que les Nations Unies aussi ont un rôle à jouer, notamment par le biais de la coordination entre les acteurs de développement présents dans la région et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS).  Les Nations Unies peuvent aussi se servir du régime des sanctions pour lutter contre les sources de financement des groupes terroristes et l’accès aux armes, a-t-il conclu. 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a dit la nécessité de bien comprendre et identifier les racines de la violence pour pouvoir les combattre.  Il s’est dit optimiste et encouragé par les progrès mis en évidence par l’examen stratégique du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) s’agissant de l’état de la démocratie, de la justice, de l’état de droit et des droits de l’homme.  En même temps, il s’est inquiété de la détérioration de la situation sécuritaire en raison de l’augmentation de l’extrémisme violent, des activités criminelles et terroristes et de l’exploitation des conflits liées aux ressources, phénomènes qui sont exacerbés par les changements climatiques et les développements démographiques.  Il a cité le déplacement de 4,4 millions de personnes rien qu’au Sahel en raison de la vulnérabilité alimentaire, de la malnutrition, des épidémies et de la violence.  Les tensions entre éleveurs et fermiers et autres acteurs, en raison de la raréfaction des ressources, forment des terreaux propices à la propagation de la violence et du terrorisme.  Tout en notant l’importance de promouvoir la parité entre les genres pour prévenir la violence, le représentant a fait remarquer que les femmes ne sont pas seulement des victimes et qu’il est temps de se pencher plus avant sur leur radicalisation. 

Par ailleurs, M. Heusgen a souligné la nécessité d’une nouvelle perspective « holistique » pour appuyer les secteurs de la sécurité et de la justice afin d’augmenter l’acceptation de l’autorité de l’État.  Une approche intégrée est particulièrement nécessaire pour tacler la criminalité transnationale organisée, dont le trafic de drogue et d’armes ainsi que la traite des êtres humains.  L’Allemagne, a-t-il assuré, est engagée à soutenir des mesures de stabilisation, de concert avec des partenaires internationaux, afin de restaurer et de maintenir la paix et la sécurité dans l’ensemble de la région. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a estimé que la dernière attaque au Niger montre l’ampleur des défis auxquels sont confrontés les pays de la région.  Il faut donc s’attaquer aux causes profondes, notamment en matière de développement, et renforcer la gouvernance.  Il a constaté que plusieurs initiatives de l’ONU visent ces objectifs et a appelé à renforcer la cohésion entre elles afin de lutter contre l’extrémisme violent et consolider les gains de la Force du G5 Sahel et de la Force conjointe. 

Pour le représentant, il faut mettre l’accent sur les aspects sociaux des conflits et œuvrer à la réconciliation entre les communautés pour appuyer la stabilité « comme on l’a vu pratiqué avec succès au Mali ».  Les Nations Unies ont plusieurs bureaux et missions en Afrique de l’Ouest, donc le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest (UNOWA) qui a besoin d’appui pour renforcer son mandat et ses ressources pour s’acquitter de sa mission au mieux.  Il a aussi salué les efforts des pays de la région via la CEDEAO notamment lors de son sommet de septembre dernier.  Le rôle de prévention de conflit de l’ONU doit être renforcé, a par ailleurs estimé le représentant. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a évoqué une situation « alarmante » au Sahel et autour du bassin du lac Tchad avec des populations civiles en première ligne face aux violences, notamment les femmes et les enfants.  Les causes profondes de cette instabilité sont connues, a-t-il insisté, citant les fragilités économiques, les faiblesses des États, les trafics et les impacts des changements climatiques qui exacerbent les antagonismes entre communautés.  Réclamant « un sursaut », le représentant a appelé le Conseil de sécurité à encourager les États concernés à améliorer leur gouvernance et à favoriser la cohésion sociale. 

Au Mali, a constaté M. de Rivière, la mise en œuvre de l’accord de paix a pris trop de retard.  Car la solution appartient d’abord aux États concernés qui doivent développer des stratégies politiques alliant sécurité et réponse humanitaire.  Alors que la France réunira les cinq pays du G5 Sahel début 2020 pour poursuivre la lutte contre le terrorisme, le représentant a demandé un soutien, y compris de la part de l’ONU, aux initiatives régionales comme la Force conjointe du G5.  Cependant la réponse militaire n’est qu’une partie de la réponse, a-t-il rappelé.  Certains mécanismes de règlement des conflits ont fait leur preuve, et il convient de les soutenir.  De même, il faut aider les États à installer des services publics et à réaliser le potentiel des pays, notamment sur le plan agricole. 

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a souligné la nécessité de remédier aux causes profondes de l’insécurité dans la région.  Il a plaidé pour un appui aux efforts régionaux et nationaux, en particulier la Force conjointe G5 Sahel et la Force multinationale mixte.  Il est important que ces initiatives bénéficient d’un soutien accru au sein de la population, a-t-il dit.  La poursuite des auteurs de violations et l’application du principe de responsabilité aux forces de sécurité sont des aspects importants de toute stratégie visant à « gagner les cœurs ». 

Le délégué a ensuite rappelé l’importance de la réconciliation des communautés, au moyen du dialogue et de la médiation, afin de s’assurer que les griefs sous-jacents soient bien identifiés.  Il a enfin estimé que toute réponse sécuritaire doit s’inscrire dans une stratégie plus large visant à contrer l’extrémisme violent.  En restaurant la légitimité de l’État, en remédiant aux causes profondes et en promouvant la cohésion et l’unité nationale, nous pourrons parvenir à une stabilité durable, a conclu M. Djani.

M. JOSÉ MANUEL TRULLOLS YABRA (République dominicaine) s’est dit préoccupé par la grave détérioration de la sécurité en Afrique de l’Ouest et au Sahel, résultat de la propagation de réseaux extrémistes violents, qui exacerbent les tensions entre communautés, et de leurs liens avec la criminalité transnationale organisée.  Il a également relevé l’impact des changements climatiques comme facteur de risque pour la sécurité puisqu’une grande partie de la population de la région doit chaque jour faire face au manque d’eau, à la diminution des surfaces cultivables, à l’érosion des sols ou aux sécheresses, ce qui affecte la sécurité alimentaire, la santé et les moyens de subsistance.  Aussi, a-t-il jugé nécessaire de continuer à soutenir les pays de la région dans l’évaluation des risques et la conception de stratégies d’atténuation et de résilience.

Par ailleurs, le représentant a fait observer que la prolifération d’armes légères de petit calibre exige une attention particulière.  Il a mis en avant la collaboration avec les organismes régionaux, qui renforcent les mécanismes locaux et se concentrent sur le maintien de la paix et la consolidation de la cohésion sociale.  En outre, l’investissement dans les zones rurales est essentiel pour créer des opportunités, en particulier pour les jeunes, afin de prévenir et atténuer les conflits pour les ressources naturelles. 

Pour M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique), il est indispensable d’éviter les amalgames entre terrorisme, extrémisme, violences intercommunautaires, conflits interethniques ou religieux et violence insurrectionnelle pour « ne pas tomber dans le piège d’une lecture simpliste de la région ».  Dès lors, et alors que le contexte général est bien connu, la réponse sécuritaire ne saurait suffire, a-t-il insisté.  Il a relevé que le sentiment d’injustice est un facteur majeur d’instabilité, citant les cas de règlement des conflits fonciers sur la base d’intérêts personnels et de corruption: l’État est alors perçu non seulement comme partial mais surtout, il perd sa légitimité aux yeux de ses concitoyens, a-t-il insisté.  Les communautés nomades connaissent le même sentiment d’injustice par exemple dans le cas de vols de bétails, qui se multiplient. 

Pour la Belgique, la réponse à ce sentiment d’injustice et d’impunité est le renforcement de l’état de droit et en stimulant les synergies entre justice formelle et traditionnelle afin qu’elles se complètent et apportent une réponse aux racines profondes des violences.

Le représentant a également prévenu que l’absence de sécurité des populations civiles favorise l’apparition de milices et cette défaillance de l’État impose à la communauté internationale de continuer de renforcer son appui aux forces de sécurité et de défense d’Afrique de l’Ouest.  Il a souligné que c’est aux États eux-mêmes qu’incombe la responsabilité première d’assurer la sécurité de leurs citoyens.

Mme Norman-Chalet (États-Unis) a repris la parole en fin de réunion suite à la déclaration de la Fédération de Russie et a reconnu que le titre de la séance n’était pas correct.  En conséquence, il sera corrigé comme suit dans le procès-verbal: « Paix et sécurité en Afrique de l’Ouest. »

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Afghanistan: le Conseil de sécurité prolonge le mandat de l’Équipe de surveillance du Comité des sanctions dont le régime se poursuit

8686e séance – matin
CS/14052

Afghanistan: le Conseil de sécurité prolonge le mandat de l’Équipe de surveillance du Comité des sanctions dont le régime se poursuit

En adoptant à l’unanimité de ses membres la résolution 2501 (2019), le Conseil de sécurité a décidé, cet après-midi, de reconduire son régime de sanctions en Afghanistan.  Ces sanctions -gel des avoirs, interdiction de voyager et embargo sur les armes– sont prescrites par la résolution 2255 (2015).

Elles visent les personnes et entités qui, avant la date d’adoption de la résolution 1988 (2011), étaient désignées comme Taliban, ainsi que les autres personnes, groupes et entités associés aux Taliban, désignées par le Comité visé par cette même résolution.

Pour aider ce Comité à s’acquitter de son mandat, la présente résolution prolonge le mandat de l’Équipe d’appui analytique et de surveillance de l’application des résolutions 1267 (1999) et 1989 (2011) pour une période de 12 mois, alors qu’il devait expirer ce mois-ci.

L’Équipe de surveillance est chargée de réunir des informations sur les cas de non-respect des mesures imposées dans la résolution 2255 (2015), pour en informer le Comité, et de fournir aux États Membres, « sur leur demande », une assistance en matière de renforcement des capacités.

La résolution adoptée aujourd’hui contient une annexe qui détaille les attributions de l’Équipe de surveillance.

Texte du projet de résolution S/2019/945

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses précédentes résolutions sur le terrorisme international et la menace qu’il constitue pour l’Afghanistan, en particulier ses résolutions 1267 (1999), 1333 (2000), 1363 (2001), 1373 (2001), 1390 (2002), 1452 (2002), 1455 (2003), 1526 (2004), 1566 (2004), 1617 (2005), 1624 (2005), 1699 (2006), 1730 (2006), 1735 (2006), 1822 (2008), 1904 (2009), 1988 (2011), 1989 (2011), 2082 (2012), 2083 (2012), 2133 (2014), 2160 (2014) et 2255 (2015), ainsi que les déclarations de sa présidence sur la question,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de l’Afghanistan,

Réaffirmant également son soutien à la paix, à la stabilité et à la prospérité en Afghanistan,

Soulignant qu’il est vivement préoccupé par les conditions de sécurité qui règnent en Afghanistan, notamment par les actes de violence et de terrorisme que continuent de commettre les Taliban et les groupes qui leur sont associés, dont le Réseau Haqqani, et Al-Qaida, l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL) et les éléments qui leur sont affiliés,

Renouvelant son soutien à la lutte contre la production illicite et le trafic de stupéfiants en provenance d’Afghanistan et de précurseurs chimiques à destination de ce pays, conscient que le produit illicite du trafic de drogues constitue une part substantielle des ressources financières des Taliban et de leurs associés, et conscient de la menace que les Taliban, les groupes armés illégaux et les criminels, notamment les trafiquants de drogues et ceux qui se livrent à l’exploitation illicite des ressources naturelles, continuent de représenter pour la sécurité et la stabilité en Afghanistan,

Demandant instamment une réduction immédiate de la violence dans la perspective d’un cessez-le-feu afin de créer un climat propice aux négociations de paix,

Réaffirmant qu’il faut faire en sorte que le régime de sanctions actuel concoure effectivement à l’effort de promotion de la réconciliation que fait le Gouvernement afghan pour rétablir la paix, la stabilité et la sécurité dans le pays,

Se félicitant des efforts tendant à entamer des négociations entre Afghans qui associent toutes les parties, l’objectif étant de parvenir à un accord de paix durable propre à mettre fin au conflit en Afghanistan et à faire en sorte que le pays ne soit plus jamais un sanctuaire pour le terrorisme international,

Conscient que, malgré l’intensification de l’action menée pour faire avancer la réconciliation, la situation en Afghanistan reste une menace pour la paix et la sécurité internationales, et réaffirmant qu’il faut repousser cette menace par tous les moyens dans le respect de la Charte des Nations Unies et du droit international, y compris les droits de l’homme, le droit des réfugiés et le droit humanitaire, et insistant à cet égard sur l’importance du rôle que les Nations Unies jouent dans cette entreprise,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

Mesures

1.Décide que tous les États continueront de prendre les mesures prescrites par le paragraphe 1 de la résolution 2255 (2015) à l’encontre des personnes et entités qui, avant la date d’adoption de la résolution 1988 (2011), étaient désignées comme Taliban, ainsi que des autres personnes, groupes, entreprises et entités associés aux Taliban dans la menace qu’ils constituent pour la paix, la stabilité et la sécurité de l’Afghanistan, désignés par le Comité visé au paragraphe 35 de la résolution 1988 (ci-après « le Comité »), dans la Liste relative aux sanctions imposées par la résolution 1988 (2011) (ci-après « la Liste »);

2.Décide que, pour aider le Comité à s’acquitter de son mandat, l’Équipe d’appui analytique et de surveillance de l’application des résolutions 1267 (1999) et 1989 (2011) (Équipe de surveillance), créée en application du paragraphe 7 de la résolution 1526 (2004), continuera de seconder le Comité pendant une période de douze mois à compter de la date d’expiration de son mandat actuel en décembre 2019, dans le cadre du mandat ci-annexé, prie le Secrétaire général de prendre les dispositions nécessaires à cet effet et souligne qu’il importe de veiller à ce que l’Équipe de surveillance reçoive le soutien administratif et l’appui de fond dont elle a besoin pour s’acquitter de son mandat de façon effective, sûre et ponctuelle, compte tenu notamment des précautions à observer dans les situations à haut risque, sous la direction de son organe subsidiaire, le Comité;

3.Charge l’Équipe de surveillance de réunir des informations sur les cas de non-respect des mesures imposées dans la résolution 2255 (2015), dont elle tiendra le Comité informé, et de fournir aux États Membres, sur leur demande, une assistance en matière de renforcement des capacités, encourage les membres du Comité à chercher à remédier aux manquements à ces mesures et à porter ceux-ci à l’attention de l’Équipe de surveillance ou du Comité, et charge l’Équipe de surveillance d’adresser au Comité des recommandations sur les mesures à prendre pour faire respecter lesdites mesures;

4.Décide d’examiner activement l’application des mesures édictées dans la présente résolution et d’envisager d’y apporter des ajustements, selon que de besoin, afin d’appuyer la paix et la stabilité en Afghanistan;

5.Décide de rester activement saisi de la question.

Annexe

Conformément au paragraphe 3 de la présente résolution, l’Équipe de surveillance est placée sous la direction du Comité, ses attributions étant les suivantes:

a)Présenter chaque année au Comité, par écrit, un rapport détaillé et indépendant sur la façon dont les États Membres auront mis en œuvre les mesures énoncées au paragraphe 1 de la présente résolution, comportant des recommandations précises concernant l’amélioration de la mise en œuvre des mesures et de nouvelles mesures envisageables;

b)Aider le Comité à passer régulièrement en revue les noms inscrits sur la Liste, notamment en se rendant dans les États Membres au nom de l’organe subsidiaire du Conseil qu’est le Comité, et en maintenant le contact avec eux en vue d’étoffer le dossier du Comité sur les faits et circonstances entourant l’inscription de tout nom sur ladite liste;

c)Aider le Comité à assurer le suivi des demandes d’information adressées aux États Membres, notamment celles qui concernent la mise en œuvre des mesures visées au paragraphe 1 de la présente résolution;

d)Présenter au Comité pour examen et approbation, selon qu’il convient, un programme de travail détaillé dans lequel l’Équipe de surveillance exposera les activités qu’elle prévoit de mener pour s’acquitter de sa mission, y compris les déplacements qu’elle envisage d’effectuer au nom du Comité;

e)Réunir, pour le compte du Comité, des informations sur les cas signalés de non-respect des mesures visées au paragraphe 1 de la présente résolution, notamment, mais pas uniquement, en exploitant les informations obtenues auprès des États Membres, en prenant contact avec les parties concernées et en réalisant des études de cas, de sa propre initiative aussi bien qu’à la demande du Comité, et formuler des recommandations sur les cas de non-respect étudiés en vue de leur examen par le Comité;

f)Présenter au Comité des recommandations de nature à aider les États Membres à mettre en œuvre les mesures visées au paragraphe 1 de la présente résolution et à préparer leurs propositions d’inscription sur la Liste;

g)Aider le Comité à examiner les propositions d’inscription sur la Liste, notamment en recueillant et en lui transmettant les informations relatives à l’inscription proposée et en établissant le projet de résumé des motifs visé au paragraphe 26 de la résolution 2255 (2015);

h)Porter à l’attention du Comité tout fait nouveau ou digne d’intérêt qui puisse justifier une radiation de la Liste, par exemple la publication d’informations sur une personne décédée;

i)Consulter les États Membres avant de se rendre dans certains d’entre eux dans le cadre de son programme de travail approuvé par le Comité;

j)Engager les États Membres à communiquer des noms et des éléments d’identification supplémentaires à faire figurer dans la Liste, conformément aux instructions du Comité;

k)Consulter, selon que de besoin, le Comité, le Gouvernement afghan ou tout État Membre concerné aux fins de l’identification de personnes ou d’entités susceptibles d’être ajoutées à la Liste ou d’en être radiées;

l)Présenter au Comité des éléments d’identification et autres renseignements complémentaires afin de l’aider à tenir la Liste à jour et à veiller à ce que les informations y figurant soient aussi exactes que possible;

m)Réunir, évaluer et suivre l’information concernant la mise en œuvre des mesures, notamment par les principales institutions publiques afghanes, et les éventuels besoins d’assistance en matière de renforcement des capacités, en rendre compte et formuler des recommandations à ce sujet; effectuer des études de cas, s’il y a lieu; et étudier à fond toute autre question pertinente selon les instructions du Comité;

n)Consulter les États Membres et d’autres organisations et organes compétents, y compris la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan et d’autres entités des Nations Unies, et mener un dialogue suivi avec leurs représentants à New York et dans les capitales, en tenant compte de leurs observations, tout particulièrement en ce qui concerne les questions qui pourraient être évoquées dans les rapports de l’Équipe de surveillance visés au paragraphe a) de la présente annexe;

o)Coopérer étroitement avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et engager un dialogue régulier avec les États Membres et les autres organisations concernées, dont l’Organisation de Shanghai pour la coopération, l’Organisation du Traité de sécurité collective et les Forces maritimes combinées, sur les liens entre le trafic de stupéfiants et les personnes, groupes, entreprises et entités qu’il y a lieu d’inscrire sur la Liste en application du paragraphe 1 de la résolution 2255 (2015), et établir les rapports demandés par le Comité;

p)Présenter, dans le cadre de son rapport périodique détaillé, une mise à jour du rapport spécial établi par l’Équipe de surveillance en application du paragraphe p) de l’annexe de la résolution 2160 (2014);

q)Consulter les services de renseignement et de sécurité des États Membres, y compris dans le cadre régional, afin de faciliter les échanges de renseignements et de faire mieux appliquer les mesures;

r)Se concerter avec les représentants du secteur privé concernés, notamment les institutions financières, pour s’informer des modalités pratiques du gel des avoirs et élaborer des recommandations aux fins du renforcement de cette mesure;

s)Coopérer étroitement avec le Comité des sanctions contre l’EIIL et Al-Qaida faisant suite aux résolutions 1267 (1999) et 1989 (2011) et les autres entités des Nations Unies chargées de la lutte contre le terrorisme pour fournir des informations sur les mesures prises par les États Membres en ce qui concerne les enlèvements et prises d’otage contre rançon et sur les tendances et l’évolution dans ce domaine;

t)Consulter le Gouvernement afghan, les États Membres, les représentants du secteur privé concernés, y compris ceux des institutions financières et ceux des professions et entreprises non financières intéressées, et les organisations internationales compétentes, dont le Groupe d’action financière (GAFI) et ses organes régionaux, afin de faire connaître le régime des sanctions et de prêter assistance pour que ces mesures soient appliquées conformément à la recommandation 6 du GAFI sur le gel des avoirs et aux directives connexes;

u)Consulter le Gouvernement afghan, les État Membres, les représentants du secteur privé concernés et les autres organisations internationales, dont l’Organisation de l’aviation civile internationale, l’Association du transport aérien international, l’Organisation mondiale des douanes et INTERPOL, en vue de faire connaître et de mieux comprendre les modalités pratiques de l’interdiction de voyager – notamment en exploitant les renseignements préalables sur les voyageurs (Advanced Passenger Information) communiqués aux États Membres par les compagnies aériennes – et du gel des avoirs et d’élaborer des recommandations aux fins du renforcement de l’application de ces mesures;

v)Consulter le Gouvernement afghan, les État Membres, les organisations internationales et régionales et les représentants du secteur privé concernés au sujet de la menace que les engins explosifs improvisés font peser sur la paix, la sécurité et la stabilité en Afghanistan, en vue de faire connaître cette menace et de préconiser, conformément aux responsabilités qui leur sont confiées au paragraphe a) de la présente annexe, des mesures propres à la dissiper;

w)Collaborer avec les organisations internationales et régionales compétentes afin de faire mieux connaître et respecter les mesures;

x)Coopérer avec INTERPOL et les États Membres afin de se procurer des photographies et une description physique des personnes inscrites sur la Liste et, si la législation nationale le permet, d’autres données biométriques et des éléments biographiques à inclure dans les notices spéciales, et afin également d’échanger des informations sur les nouvelles menaces;

y)Aider les autres organes subsidiaires du Conseil de sécurité et leurs groupes d’experts, à leur demande, à intensifier leur coopération avec INTERPOL, comme le prévoit la résolution 1699 (2006);

z)Aider le Comité à fournir aux États Membres, sur leur demande, une assistance en matière de renforcement des capacités pour leur permettre de mieux mettre en œuvre les mesures;

aa)Faire rapport au Comité, à intervalles réguliers ou à sa demande, en présentant des communications orales ou écrites sur ses travaux, y compris sur les visites qu’elle a effectuées auprès d’États Membres et sur ses activités;

bb)Étudier la nature de la menace que les personnes, groupes, entreprises et entités associés aux Taliban font peser sur la paix, la stabilité et la sécurité de l’Afghanistan et les meilleurs moyens d’y faire face, notamment en instaurant des échanges avec des chercheurs, des établissements universitaires et des spécialistes, compte tenu des priorités établies par le Comité, et rendre compte à celui-ci de ses travaux;

cc)Réunir des informations, notamment auprès du Gouvernement afghan et d’autres États Membres, sur les voyages effectués dans le cadre des dérogations accordées, conformément au paragraphe 20 de la résolution 2255 (2015), et faire rapport au Comité, selon qu’il conviendra;

dd)S’acquitter de toute autre responsabilité que pourrait lui confier le Comité.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Yémen, Haïti, Ebola, criminalité informatique: la Cinquième Commission accélère le pas pour finir ses travaux à temps d’ici Noël

Soixante-quatorzième session,
17e séance – matin
AG/AB/4346

Yémen, Haïti, Ebola, criminalité informatique: la Cinquième Commission accélère le pas pour finir ses travaux à temps d’ici Noël

À huit jours de la fin de ses travaux, le 24 décembre à minuit, contre la date du 13 décembre, prévue auparavant, la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires a accéléré, ce matin, la cadence, en passant en revue les ressources demandées pour financer, en 2020, pas moins de deux missions politiques spéciales, une mission humanitaire et un comité d’experts, soit 80,5 millions de dollars de crédits au total.

Les États Membres étaient saisis d’une demande* de crédit de 53 613 400 dollars pour la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), soit 4,5% de moins qu’en 2019.  Créée le 16 janvier dernier par le Conseil de sécurité, la MINUAAH a pour mission de faciliter l’application de l’Accord sur la ville de Hodeïda et les ports de Hodeïda, de Salif et de Ras Issa.  Conscient des incertitudes liées au démarrage et à l’environnement opérationnel difficile de la Mission, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) note** toutefois avec préoccupation que les ressources approuvées pour 2019 ont été « largement sous-utilisées ».  Il recommande par conséquent une réduction de 3%, soit 1 191 534 dollars, des ressources demandées pour 2020.  Le CCQAB recommande également de ne pas approuver le reclassement de P-3 à P-4 du poste de spécialiste des ressources humaines/partenaire à Hodeïda pour 2020 et la création d’un poste temporaire P-3 à la Division des finances des missions.

Les délégations étaient en outre saisies d’une demande*** de crédit de 20 395 200 dollars pour le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH).  Créé le 16 octobre dernier par le Conseil de sécurité, pour une période initiale de 12 mois, le BINUH a pris le relais de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), la dernière des sept opérations de maintien de la paix établies en Haïti depuis 1993.  Jugeant « insuffisantes » les informations fournies par le Secrétaire général, le CCQAB recommande**** de réduire l’enveloppe demandée de 103 400 dollars, correspondant à une coupe de 5% du budget pour le matériel informatique, les consultants et les voyages officiels.

Ces coupes ont préoccupé la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Pour assurer le succès du BINUH, la CARICOM a exhorté les États Membres à allouer à ce dernier les ressources dont il a besoin.  Au nom de 11 pays d’Amérique latine, le Mexique a souligné que l’appui des Nations Unies demeure « indispensable » pour construire un « futur viable » en Haïti.  Il convient, a rappelé Haïti, de garder à l’esprit que l’entrée en fonction du BINUH, en octobre dernier, s’est faite dans un contexte politique, économique et social difficile, marqué par de « grandes turbulences socioéconomiques ».  Il faut veiller à ce que la mission politique spéciale se montre à la hauteur de ces enjeux, a-t-il voulu.

Par ailleurs, le Secrétaire général demande***** 6 454 600 dollars pour financer, durant le premier semestre de 2020, le Bureau du Coordonnateur des Nations Unies pour l’action d’urgence contre l’Ebola, en République démocratique du Congo (RDC), jusqu’à la date de son retrait, prévue le 30 juin 2020.  Créé le 23 mai 2019 pour lutter contre la dixième épidémie d’Ebola en RDC, le Bureau a, par son action, contribué à une forte diminution du nombre de cas d’infection enregistrés en octobre et en novembre 2019.  Jugeant que les prévisions de dépenses ne sont pas suffisamment justifiées et que la présentation du budget manque de clarté », le CCQAB recommande******, compte tenu du retrait imminent du Bureau, d’ouvrir un crédit de 5 600 000 dollars, soit 854 600 dollars de moins, à prélever sur le fonds de réserve.

Les délégations se sont en outre penchées sur l’incidence******* d’un projet de résolution******** émanant de la Troisième Commission.  Intitulé « Lutte contre l’utilisation des technologies de l’information et des communications à des fins criminelles », le texte porte création d’un comité intergouvernemental spécial d’experts chargé d’élaborer une convention internationale générale sur la lutte contre l’utilisation des technologies de l’information et des communications à des fins criminelles.  Il prévoit en outre que le comité tienne, en août 2020 à New York, une session d’organisation de trois jours visant à définir le plan et les modalités de ses futures activités.  Le CCQAB estime********* que, si elle était adoptée par l’Assemblée générale, cette résolution rendrait nécessaire l’ouverture de 59 400 dollars de crédit supplémentaire en 2020, à imputer sur le fonds de réserve.

Enfin, les États Membres étaient saisis d’une demande de prorogation**********, jusqu’à fin 2020, des mesures exceptionnelles visant à faciliter la participation de tous les États Membres au détachement de militaires et de policiers en service actif auprès de l’ONU.  Concrètement, ces mesures visent à lever les obstacles résultant du conflit entre les dispositions du Statut et du Règlement du personnel de l’ONU et le droit interne de certains États Membres.  Tout en recommandant d’autoriser cette prorogation, le CCQAB demande*********** toutefois au Secrétaire général de fournir, dans son prochain rapport sur le financement des opérations de maintien de la paix, des informations plus précises concernant les mesures de droit interne incompatibles avec les dispositions de l’Organisation et le nombre de membres du personnel concernés par ce problème.

La prochaine réunion de la Commission aura lieu demain, mardi 17 décembre, à partir de 10 heures, et portera notamment sur le Fonds de réserve de l’ONU.

*A/74/6 (Sect. 3)/Add.7
**A/74/7/Add.23
***A/74/6 (Sect. 3)/Add.8
****A/74/7/Add.24
*****A/74/544
******A/74/7/Add.27
*******A/C.5/74/12
********A/C.3/74/L.11/Rev.1
*********A/74/7/Add.28
**********A/74/546
***********A/74/584

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.