En cours au Siège de l'ONU

La pandémie de COVID-19 et ses effets sur les droits de l’homme s’invitent dans les travaux de la Troisième Commission dès leur ouverture

Soixante-quinzième session,
1re & 2e séances plénières, Matin & après-midi
AG/SHC/4286

La pandémie de COVID-19 et ses effets sur les droits de l’homme s’invitent dans les travaux de la Troisième Commission dès leur ouverture

Réunis en personne dans la vaste salle de l’Assemblée générale, mais à bonne distance les uns des autres, les membres de la Troisième Commission en charge des questions sociales, humanitaires et culturelles ont entamé, aujourd’hui, les travaux de leur soixante-quinzième session en alertant, à l’occasion du débat général, sur les effets de la pandémie de COVID-19 sur les droits de l’homme et les libertés fondamentales, notamment ceux des groupes les plus vulnérables, mais aussi sur le développement des pays les moins avancés. 

« Comme vous le savez, cette période est exceptionnelle et il s’est avéré que les limitations imposées par la pandémie de COVID-19 auraient également un impact sur les travaux de la Commission », a souligné la Présidente de la Commission, Mme Katalin Annamária Bogyay, de la Hongrie, dans ses propos liminaires, en appelant chacun à « faire attention aux autres et à faire de cette session un succès ». 

Cette crise planétaire et ses impacts « ne sauraient être absents des travaux de la Troisième Commission », lui a indirectement répondu le Chili, avant d’observer que la pandémie a « mis à nu les inégalités sociales et l’urgence d’un renforcement de l’approche des droits de l’homme ».  Les derniers mois ont en effet montré que de multiples groupes vulnérables étaient plus particulièrement affectés, a-t-il souligné, s’inquiétant en particulier de la violence domestique à l’encontre des femmes et des filles. 

Dans le même ordre d’idées, le Canada s’est inquiété de la hausse alarmante des violences sexistes, tout en constatant que les femmes sont au cœur de la riposte à la COVID-19 mais se voient le plus souvent exclues des processus décisionnels.  Même constat de la part d’Israël, qui a en outre relevé qu’en cette période de restrictions diverses, trop de femmes dans le monde n’ont pas accès aux soins de santé sexuelle et reproductive. 

Tout en se félicitant que la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, « moment marquant de l’histoire » dont on célèbre cette année le vingt-cinquième anniversaire, aient suscité un engagement mondial en faveur des femmes et des filles, le Ghana a dit craindre que la COVID-19 n’entraîne un « retour en arrière ».  La délégation a néanmoins salué l’appel du Secrétaire général pour que les plans de reprise nationaux tiennent compte de la vulnérabilité des femmes. 

À l’instar des Bahamas, pour la Communauté des Caraïbes (CARICOM), ou de la Malaisie, au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), un grand nombre d’intervenants ont également mis en garde contre un recul des droits des enfants, dont un grand nombre risquent de ne pouvoir retourner à l’école malgré les efforts déployés pour développer l’apprentissage à distance.  La Namibie, qui a mis en place une plateforme à cette fin, a regretté que les écoliers soient « contraints de naviguer dans les eaux inconnues de l’éducation en ligne ». 

Au nom du Groupe restreint LBGTI, le Népal a pour sa part averti que les personnes lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes sont confrontées à des discriminations accrues dans le cadre des procédures de confinement, ce qui met en danger leur survie et leur santé, ainsi que leurs droits économiques et humains.  Il a également fait remarquer que, s’agissant de la protection de ce groupe particulièrement vulnérable, les obligations juridiques sont bien établies dans le droit international. 

Cette première séance du débat général a aussi été l’occasion pour l’Union européenne de condamner les violences exercées au Bélarus contre les manifestants pacifiques et les défenseurs des droits de l’homme, tout en se disant préoccupée par la situation des droits humains en République populaire démocratique de Corée, au Myanmar, en Syrie et en Chine.  Elle s’est ainsi inquiétée du sort de la minorité ouïghour et a exigé des autorités chinoises qu’elles autorisent l’accès à la province du Xingjang. 

Dénonçant ces « accusations infondées », la Chine a, elle, concentré ses feux sur les mesures coercitives unilatérales appliquées par « certains pays », lesquelles sapent le droit à la santé en entravant l’accès aux médicaments, à la technologie et aux équipements médicaux dans le contexte de la COVID-19.  Plus directe, Cuba a nommément accusé les États-Unis de mener une politique « génocidaire » à son encontre en maintenant son blocus contre l’île.  Selon elle, la communauté internationale ne peut autoriser le « deux poids, deux mesures » dans le domaine des droits humains, ces questions devant être abordées « sur des bases objectives et non politisées ». 

Avant même que ne débute le débat général, la Fédération de Russie avait rejeté, en son nom et celui de la Syrie, du Venezuela, de l’Iran et de Cuba, la politique du « pays hôte » visant à imposer des restrictions aux États Membres pendant la pandémie.  Elle s’était élevée particulièrement contre le refus des États-Unis d’octroyer des visas à certains membres de délégation. 

En début de séance, la Présidente de la Troisième Commission a également présenté l’organisation des travaux de l’instance et la planification des programmes.  La Commission a d’autre part adopté la liste provisoire des titulaires de mandats spéciaux appelés à lui présenter leur rapport lors de la présente session.  Enfin, elle a complété son bureau en élisant par acclamation Mme Ahlem Sara Charikhi (Algérie) et M. Khaled Mohammed AlManzlawiy (Arabie saoudite) à la fonction de vice-président, qui rejoindront Mme Pilar Eugenio (Argentine).  Mme Myriam Oehri, du Liechtenstein, occupera les fonctions de rapporteur.

La Troisième Commission poursuivra son débat général demain, mardi 6 octobre, à partir de 10 heures.

DÉBAT GÉNÉRAL

Interventions avant le débat général

M. ROMAN G. KASHAEV (Fédération de Russie), qui s’exprimait au nom de la Syrie, du Venezuela, de l’Iran et de Cuba, a rejeté la politique du pays hôte visant à discriminer et à imposer des restrictions aux États Membres pendant la pandémie, dénonçant notamment des expulsions arbitraires de membres de délégations.  Ces derniers doivent pouvoir exercer pleinement leurs droits, a fait valoir le représentant, s’élevant contre le refus des États-Unis d’octroyer des visas à certains membres de délégation, ce qui les empêche d’accéder au Siège.  Il a également dénoncé les limitations imposées pour les déplacements dans New York.  Ces mesures limitent les droits et privilèges de nos pays prévus par la Charte.  Malgré les requêtes déposées, aucune solution n’a été trouvée, a-t-il déploré, souhaitant que l’on empêche les travaux de l’ONU de devenir les « otages de desseins politiques ».  Enfin, demandant que soit garanti le principe d’égalité entre les États Membres, il a exhorté la Présidente à effectuer un suivi de ces questions afin de garantir l’efficacité des travaux de la Troisième Commission.  

Suite à cette intervention, M. ALEJANDRO GONZÁLEZ BEHMARAS (Cuba) a formé le vœu qu’en matière d’organisation, cette session soit conduite de manière « transparente et inclusive ».

Ouverture du débat général

M. NEIL ORIN PIERRE (Guyana), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a observé que la pandémie continue de semer le chaos dans notre monde, avec des conséquences d’envergure et des effets néfastes pour la réalisation du Programme 2030.  Ses effets à long terme sur le développement social sont encore plus importants que les répercussions sur la santé, a estimé le représentant.  Et des décennies de progrès risquent d’être mises à mal.  Le Groupe des 77 et de la Chine estime que les discussions devraient se concentrer sur ces conséquences et sur les mesures pragmatiques destinées à venir à bout des inégalités.  À cet égard, a-t-il souligné, le Groupe considère que le renforcement du multilatéralisme et l’intensification de la coopération sont fondamentaux pour le développement durable et le Programme d’action de Copenhague.

Pour le délégué, il convient d’appuyer les pays en développement et la coopération Sud-Sud devrait compléter la coopération Nord-Sud.  Saluant les efforts déployés pour aider les familles vulnérables, il a exhorté les États Membres à investir davantage dans les outils relatifs à la famille.  Il a également souhaité que les personnes âgées participent activement à la vie sociale des sociétés.  Il s’est déclaré inquiet des effets de la pandémie pour la santé et le bien-être de ces personnes, appelant à ce qu’elles puissent jouir de tous leurs droits.  Des mesures pérennes sont possibles si nous conjuguons nos efforts, a-t-il dit.  Il a aussi préconisé l’intégration des questions de handicap dans les plans de réponse et de reprise à la COVID-19.  Il a ensuite indiqué que le Groupe présentera quatre projets de résolution à cette session, notamment sur le thème de la famille alors qu’approche la trentième Année internationale de la famille.  Enfin, se disant préoccupé par les injustices qui touchent les communautés vulnérables, il a appelé à redoubler d’efforts dans la mise en œuvre du Programme d’action de Durban contre le racisme et du Programme d’action de Beijing pour l’accélération de l’égalité femmes-hommes.

Mme AYA KAMAL IBRAHIM HASSAN (Égypte), au nom du Groupe des États d’Afrique, a réaffirmé l’appui du Groupe à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), citant son rôle de chef de file.  Elle s’est dite préoccupée par les effets multidimensionnels et profonds de la pandémie de la COVI-19, en raison notamment des disparités socioéconomiques.  Ces écarts risquent de se creuser davantage et ralentir les progrès, a-t-elle prévenu.  La déléguée a ensuite appelé à redoubler d’efforts pour trouver un vaccin, soulignant qu’une fois disponible, celui-ci devra être disponible pour tous pour que personne ne soit laissé de côté.  De même, l’intervenante a appelé à la suppression de la dette pour les pays les moins avancés.

Après avoir souligné l’importance de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing ainsi que de la Convention de Copenhague, Mme Hassan a indiqué que le Groupe présentera des projets de résolution sur l’élimination des mutilations génitales féminines, de la fistule obstétricale, et des pratiques préjudiciables à l’égalité entre les sexes qui, a-t-elle ajouté, affectent de nombreuses femmes et filles en Afrique.

Le Groupe a également fait part de sa détermination à lutter contre la corruption et s’est engagé en faveur de la lutte et de la prévention en matière de stupéfiant.  Par ailleurs, le Groupe des États d’Afrique estime que la Déclaration de Durban est le socle de la lutte contre le racisme et doit servir de guide à la communauté internationale pour promouvoir le respect des droits humains.

Mme MUDITA BAJRACHARYA (Népal), au nom du Groupe restreint LBGTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes), créé en 2018, a indiqué que l’objectif général du Groupe est de faire respecter les droits de l’homme quels que soient le sexe des personnes et leur sexualité.  Elle a noté à cet égard que les obligations juridiques sont bien établies dans le droit international et a souligné que les États ont la responsabilité de défendre les personnes LGBTI.

Elle a indiqué que les personnes LGBTI sont confrontés à des discriminations accrues, notamment dans le cadre des procédures de confinement face à la pandémie.  À cet égard, leur survie et santé, ainsi que leurs droits économiques et humains ont été mis en danger, a-t-elle dénoncé.  Elle a également signalé que les restrictions en matière de déplacement peuvent avoir un impact particulièrement délétère pour les personnes souffrant de maladies chroniques et qui ont besoin de soins particuliers.

Notant qu’un pourcentage élevé de personnes LGBTI ont des revenus modestes et un accès difficile aux soins, elle a jugé essentiel que les ripostes des gouvernements mondiaux prennent en compte les personnes LGBTI.  Cela ne doit pas être sujet à polémique, c’est juste la seule chose à faire car c’est humain, a-t-elle déclaré. 

M. BJÖRN OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a rappelé que les droits de l’homme sont universels et interdépendants.  Il a réaffirmé l’engagement de l’UE en faveur de l’autonomisation des femmes et la mise en œuvre du cessez-le-feu mondial auquel a appelé le Secrétaire général l’ONU.  Le représentant s’est élevé contre les attaques visant des défenseurs des droits de l’homme et a condamné le fait que certains membres de la société civile se voient refuser l’accès au Siège de l’ONU.  Tous les États Membres ont l’obligations de mettre en œuvre les traités auxquels ils sont parties, en particulier ceux relatifs aux droits de l’homme, a-t-il souligné, avant de rappeler la responsabilité particulière de ceux qui sont élus au Conseil des droits de l’homme.  La protection de la souveraineté nationale ne peut suffire pour justifier la torture ou les abus, a fait valoir le délégué.

Il s’est ensuite déclaré préoccupé par les événements au Bélarus, indiquant que l’UE ne reconnaît pas les résultats de l’élection présidentielle dans ce pays.  Condamnant les violences contre les manifestants pacifiques et les défenseurs des droits de l’homme, il a appelé à la libération immédiate de toutes les personnes illégalement détenues.  Évoquant par ailleurs la situation en RPDC et au Myanmar, le représentant a exhorté ces deux pays à se conformer à leurs obligations en matière de droits de l’homme et à coopérer avec l’ONU.  M. Skoog a également rappelé que plus d’un million de personnes ont été déplacées en Syrie et s’est dit gravement inquiet du ciblage délibéré de civils et de personnels humanitaires dans ce pays, condamnant au passage les détentions arbitraires, les cas de torture et les disparitions forcées.  Il a réitéré l’appel de l’UE en faveur d’un renvoi de cette situation à la CPI.  S’agissant de la Chine, il a une nouvelle fois exprimé son inquiétude quant au sort de la minorité ouïgoure et a demandé qu’un accès au Xingjang soit autorisé par Beijing.  La Chine doit respecter les droits et la liberté d’expression des minorités et garantir l’équité des procès, a-t-il dit.  Enfin, soulignant l’importance pour les droits des femmes d’une mise en œuvre effective du Programme d’action de Beijing, il a assuré que l’UE fera tout le nécessaire pour que les promesses de ce Programme deviennent une réalité.

M. ANTÓNIO GUMENDE (Mozambique), au nom de la Communauté de développement de l’Afrique austral (SADC), a souligné que l’égalité des sexes est le vecteur du développement économique et social et un moyen efficace d’éliminer la pauvreté.  C’est pourquoi, la SADC s’engage à éliminer tous les obstacles à l’égalité des sexes au niveau national et régional. 

Il a indiqué que de nombreux défis affectent l’Afrique australe, notamment en ce qui concerne la discordance entre droit statutaire et le droit coutumier, la mise en œuvre des lois concernant l’accès aux ressources, l’inégalité des sexes dans le monde du travail et le fardeau disproportionné du travail de soin non rémunéré qu’assument les femmes.  Face à ces défis, une stratégie multidimensionnelle régionale pour l’autonomisation des femmes est en cours de mise en œuvre.

Après s’être préoccupé de la persistance du racisme et de la xénophobie dans le monde, il a indiqué que l’Afrique australe compte plus d’un million de réfugiés et de demandeurs d’asile et cinq millions de déplacés, soulignant la complexité de gestion de ces populations, qui requièrent de nombreuses ressources.  Il a fait savoir qu’en 2020, la SADC a adopté un projet de plan d’action quinquennal pour opérationnaliser le mémorandum d’accord conclu avec le HCR.  Une conférence régionale est également prévue sur cette question.  Face à la pandémie de COVID-19, il est essentiel de ne pas laisser les réfugiés de côté, a-t-il affirmé.

Mme SHEILA GWENETH CAREY (Bahamas), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a déclaré que la lutte contre les inégalités est fondamentale pour le progrès social et parvenir à un développement durable pour tous.  Elle a estimé que les vulnérabilités de la CARICOM, y compris la menace des changements climatiques, ont été exacerbées par les effets désastreux de la pandémie de COVID-19 qui exerce également une pression supplémentaire sur les systèmes de santé.

Elle a souligné la grande importance que la CARICOM accorde aux enfants, en particulier en ce qui concerne la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD), déplorant que la pandémie ait diminué les progrès de la région.  La pandémie a perturbé l’instruction de plus de 5 millions d’élèves et de 200 000 enseignants et les limitations de ressources des États de la Communauté affectent l’accès au tutorat en ligne et menacent d’élargir les écarts socioéconomiques.  Or, pour reconstruire après la pandémie, une attention particulière doit être accordée à l’éducation, à la santé et à la sécurité des enfants, qui sont les principaux éléments constitutifs du futur de la région, a-t-elle souligné.

La CARICOM continue par ailleurs de travailler assidûment à la mise en œuvre de programmes régionaux visant à lutter contre les effets néfastes de la violence contre les femmes et les filles, notamment en comblant les lacunes législatives et politiques, en renforçant les institutions, en fournissant des services et un soutien de qualité aux victimes de violence et à leurs familles, en produisant des données désagrégées et en autonomisant les organisations de femmes.

Poursuivant, Mme Carey a noté les effets de la pandémie de COVID-19 sur les peuples autochtones.  Elle a salué le cadre des Nations Unies d’avril 2020 pour la réponse socioéconomique immédiate à la COVID-19 qui reconnaît que les peuples autochtones sont parmi les plus à risque.  « Nous continuons à travailler pour assurer la participation effective de nos populations autochtones au processus de décision », a-t-elle indiqué.  

En outre, la représentante a signalé que le niveau élevé de criminalité dans la Communauté des Caraïbes reste une source de grave préoccupation, situation qui a été aggravée par la pandémie de COVID-19.  « La pandémie nous a amenés à reconsidérer nos approches nationales et collectives visant à protéger la vie dans ces temps incertains. »

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a assuré que son association fait tout son possible pour riposter à la pandémie, en tenant compte de son caractère multidimensionnel.  Si cette crise risque de provoquer une pause dans les projets de l’ASEAN, elle ne remet pas en cause les engagements pris dans le cadre de sa Vision 2025.  L’ASEAN reste engagée à intensifier la coopération régionale afin de mettre les communautés vulnérables au cœur de son action et faciliter un relèvement rapide.  Pour atténuer l’incidence de cette pandémie, a poursuivi le représentant, l’ASEAN s’emploie à mettre en œuvre la Convention relative aux droits de l’enfant.

Notant qu’à l’instar de la COVID-19, la criminalité ne connaît pas de frontières et profite même de la pandémie pour abuser des groupes vulnérables, le représentant a indiqué que l’ASEAN travaille à cette question dans le cadre de la coopération régionale et des plans nationaux.  Par ailleurs, l’Association met en œuvre son plan d’action contre la radicalisation et l’extrémisme violent.  S’agissant de la cybercriminalité, le plan d’action de l’ASEAN vise des ripostes efficaces, a-t-il ajouté, avant de préciser que l’Association s’oppose à la légalisation des drogues illicites à des fins non médicales.  L’ASEAN défend des sociétés sans drogues et son mécanisme de coopération régionale a permis la coordination des saisies.  Pour le délégué, la coopération internationale doit permettre d’œuvrer ensemble contre la COVID-19, pour la promotion du développement socioéconomique et la protection de l’enfant.  Ce n’est que grâce à cette coopération que nous pourrons édifier un avenir meilleur, a-t-il conclu.

M. ZHE ZHANG (Chine), au nom d’un groupe de pays, a déclaré que face à la pandémie actuelle, une riposte efficace exige une coopération internationale pour garantir les efforts de relèvement.  Cependant, a-t-il déploré, des mesures coercitives unilatérales appliquées par certains pays sont non seulement contraires aux principes de la Charte, mais ont des conséquences indéniables sur les droits des personnes et font obstacle au bien-être des populations, notamment dans les pays les plus touchés.

Il a indiqué que les mesures coercitives unilatérales sapent le droit à la santé en entravant l’accès aux médicaments, à la technologie médicale, et aux équipements médicaux, notamment dans le contexte de la COVID-19.  À cet égard, il s’est félicité de l’appel du Secrétaire général du 26 mars 2020 en faveur de l’élimination des sanctions dans le cadre de la lutte contre la COVID-19.  Il s’est également félicité de l’adoption d’une résolution dans ce sens par l’Assemblée générale.  Le représentant a ensuite appelé à la levée complète des mesures coercitives afin de garantir une riposte intégrale et efficace face à la COVID-19.  « La solidarité mondiale et la coopération internationale sont les armes les plus puissantes pour venir à bout de la COVID-19 », a-t-il insisté.

Poursuivant, M. Zhang a déploré que, 25 ans après l’adoption de la Déclaration de Durban et de son Programme d’action, des décès tels que celui de George Floyd continuent de faire la « Une » des journaux et que de nombreuses personnes continuent de perdre la vie en raison du racisme et de la violence policière.  Ces cas viennent nous rappeler la discrimination chronique profondément enracinée dans les sociétés, touchant les minorités, notamment les personnes d’ascendance africaine.  Il s’est aussi dit très préoccupé par la situation sanitaire des migrants et de centres de détention dans certains pays.

À titre national, le représentant de la Chine a dénoncé les accusations « sans fondement » émises par l’Union européenne.

M. MAMMALIYEVA (Azerbaïdjan), au nom du Mouvement des pays non alignés, a reconnu que la solidarité, le respect, la paix et l’amitié entre États sont des valeurs fondamentales des relations entre États pour réaliser l’ensemble des droits économiques des peuples.

Il a souligné que les droits humains doivent être pris en compte sans discrimination, au cours d’un dialogue équitable, juste, respectant la non-ingérence dans les affaires des États et en tenant particulièrement compte des situations particulières à chaque pays.  Il a noté que les chefs d’État et de gouvernement du Mouvement ont fait part des causes multiples des crises qui apparaissent et qui exigent un effort complet de la part de tous.  Le représentant a souligné qu’il est important d’empêcher les crises alimentaires qui, a-t-il indiqué, posent des obstacles sérieux à la lutte contre la pauvreté et la faim. 

En conclusion, le représentant a réitéré l’engagement des États du Mouvement à renforcer le multilatéralisme tout en respectant au pied de la lettre la Charte des Nations Unies. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a jugé impératif de garantir l’indépendance des Procédures spéciales et de faciliter leurs visites sur le terrain.  La représentante a plaidé pour le renforcement et la modernisation des organes de traités, avant d’insister sur l’abolition « universelle » de la peine de mort.  Concernant l’égalité des sexes, elle a dénoncé l’augmentation « exponentielle » de la violence basée sur le sexe depuis le début de la pandémie de COVID-19.  La lutte contre les violences sexuelles et conjugales, les intimidations, les harcèlements, le mariage des enfants ou encore la cyberviolence méritent toute notre attention, a encore déclaré la délégation.  Aucune tradition, religion, valeur culturelle ou coutume ne peut justifier les violations des droits des femmes et des filles, a martelé la représentante. 

À l’aube du vingtième anniversaire de la Conférence sur le racisme, il ne saurait y avoir non plus de complaisance avec la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  La Belgique, a indiqué la représentante, a créé une conférence interministérielle relative à la lutte contre le racisme et travaille à un plan d’action national.  C’est à tous, a-t-elle conclu, d’assurer la protection des droits et libertés fondamentaux.  Concernant le vingtième anniversaire des deux Protocoles à la Convention relative aux droits de l’enfant, la Belgique a pris l’initiative d’une déclaration conjointe qui sera rendue publique le 12 octobre prochain, a encore annoncé la représentante.

Pour M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon), la lutte contre la COVID-19 ne doit pas être utilisée comme prétexte pour saper l’état de droit, la démocratie et les droits de l’homme. Il s’est dit préoccupé par la propagation de l’extrémisme violent, des discours de haine et de l’intolérance.  En outre, le Japon ne peut pas accepter que les effets économiques et sociaux de la pandémie annulent les progrès réalisés en matière d’égalité des sexes au cours des dernières décennies.

M. Ishikane a annoncé que le pays accueillera le quatorzième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, ainsi que le Forum des jeunes, à Kyoto, en mars 2021.  Le Japon est également déterminé à accueillir les Jeux olympiques et paralympiques de Tokyo l’été prochain « comme preuve de la victoire de l’humanité sur la pandémie ».  Les Jeux de Tokyo 2020 seront une excellente occasion d’embrasser la diversité et l’inclusion, sans tolérance pour aucune discrimination, a-t-il affirmé. 

M. ROBERT KEITH RAE (Canada) a signalé que la pandémie a exacerbé la situation des droits humains, relevant que les femmes assument une part disproportionnée de ce fardeau et s’inquiétant également de la hausse des violences sexistes.  L’autonomisation des femmes a également enregistré un recul.  C’est un signal d’alarme, a-t-il dit.

Le représentant a par ailleurs souligné que les chocs économiques et les changements climatiques exigent une riposte rapide.  Il a ensuite indiqué qu’avec la Zambie, le Canada présentera un projet de résolution sur les mariages d’enfant forcés et précoces ainsi qu’un texte sur les droits de l’homme en Iran.

M. Rae a, en outre, indiqué que les femmes sont au cœur de la riposte à la COVID-19 mais que celles-ci sont exclues des processus décisionnels.  Enfin, il a exhorté à la lutte contre toutes les formes de racisme, notamment contre les Noirs.

Mme ADELA RAZ (Afghanistan) a jugé que, pour reconstruire en mieux, il importe d’accorder une attention particulière aux questions sociales, humanitaires et culturelles.  Rappelant que, le 11 septembre dernier, l’Assemblée générale a adopté une résolution sur la COVID-19, elle a estimé que les grandes commissions, à commencer par la Troisième, doivent s’appuyer sur cette base commune.  Dans ce contexte, l’Afghanistan s’attachera à œuvrer à la protection et à la promotion des droits humains et des droits des personnes en situation de vulnérabilité.  En dépit des nombreuses difficultés auxquelles il est confronté, le pays a enregistré des progrès dans les questions qui intéressent la Troisième Commission, a souligné la représentante.  Elle a ainsi fait état de la création d’un haut conseil des femmes chargé de travailler à l’autonomisation des femmes, notamment dans les provinces.  Dans le même ordre d’idées, le nom de la mère figure désormais sur les cartes d’identité nationales, a-t-elle ajouté.  En outre, le Gouvernement afghan met en œuvre la deuxième phase de son plan sur les femmes et la sécurité.  En partenariat avec ONU-Femmes, il a aussi lancé des plans d’action locaux.

Il vient, d’autre part, en aide aux personnes déplacées, aux réfugiés et aux migrants.  S’agissant des personnes handicapées, la déléguée a indiqué que son gouvernement a établi un quota dans la fonction publique.  Il s’emploie aussi à garantir la continuité dans l’éducation des plus de neuf millions d’enfants scolarisés avant la pandémie.  À cet égard, il a publié un plan d’action et s’est engagé à atteindre les 3,7 millions qui ne peuvent, pour l’heure, regagner leur établissement scolaire.  Enfin, a poursuivi la représentante, les autorités afghanes se concentrent, en cette période de pandémie, sur la fourniture de services aux plus vulnérables, en collaboration avec toutes les institutions pertinentes.  Après 40 années de guerre, la paix est au cœur de ses efforts, a-t-elle encore souligné, rappelant que, le 12 septembre dernier, se sont ouvertes des négociations entre le Gouvernement afghan et les Taliban.  Avant de conclure, la représentante s’est dite confiante qu’avec l’appui international, son pays saura créer un cadre pour la préservation de la paix et le retour à la prospérité.  

M. GUILLERMO ROQUE FERNANDEZ DE SOTO VALDERRAMA (Colombie) a déclaré que la COVID-19 a imposé d’énormes défis qu’il s’agit de relever collectivement, et avec détermination, notre engagement étant d’aller de l’avant en dépit de tous les obstacles à venir.  Le Programme 2030 est justement la feuille de route de l’action collective visant à garantir que personne ne soit laissé de côté.  Le représentant a mis l’accent sur le travail important des gouvernements, du secteur privé et de la société civile pour atteindre les objectifs.  Il a expliqué que son pays centre son attention sur la réduction des inégalités, conformément à son Plan national de développement (PND) 2018-2022. 

Le pays a ainsi mis en place des politiques sociales axées sur une croissance économique durable, l’élimination de la pauvreté, la couverture sanitaire universelle, l’accès à une éducation de qualité et aux services sociaux de base, et l’égalité des sexes, dont les politiques sont définies par le Programme d’action de Beijing.  L’accès est également mis sur la petite enfance, l’adolescence et la jeunesse, comme en atteste le fait que la Colombie ait lancé, le 14 août dernier, l’Alliance nationale contre la violence faite aux garçons, aux filles et aux adolescents.  Le représentant a aussi parlé des peuples autochtones qui jouissent d’une protection et d’une reconnaissance constitutionnelles, grâce à une approche multidimensionnelle de l’égalité.

Le pays insiste d’ailleurs sur le « Plan d’action opportune de prévention et protection des droits individuels et collectifs à la vie, la liberté, l’intégrité et la sécurité des défenseurs des droits de l’homme, des femmes et hommes chefs de file sociaux, des communautés et des journalistes ».  Le représentant a conclu sur la lutte contre la criminalité organisée dont le narcotrafic et l’exploitation illégale des ressources naturelles.  Il a rappelé le principe de « responsabilité commune et partagée ».

M. CHRISTIAN BRAUN (Luxembourg) a déclaré qu’avec la crise actuelle, nous risquons de perdre le bénéfice des progrès dans la réalisation des objectifs de développement durable, en particulier s’agissant des populations les plus vulnérables, femmes, enfants, mais aussi migrants et refugiés.  C’est pour cela que le Luxembourg participe à l’accueil des mineurs non accompagnés mais réserve également 1% de son revenu national brut corrigé de l’endettement à l’aide publique au développement.

Le représentant a réitéré son plein soutien à toutes les instances multilatérales de promotion des droits de l’homme, notamment à la Cour pénale internationale et au Mécanisme international, impartial et indépendant pour la Syrie.  Ces mécanismes doivent disposer des moyens pour agir, tout comme la communauté internationale ne doit pas se «  dérober  » devant sa responsabilité́ s’agissant de la situation des Rohingya au Myanmar, a encore plaidé la délégation.  

Par ailleurs, le Luxembourg, qui a fait le choix d’une politique étrangère féministe, continuera son engagement dans la lutte contre toutes formes de discrimination.  Il poursuivra de même le chantier qui vise à donner à la société civile la place qui lui revient dans les enceintes de l’Organisation des Nations Unies.  Ces objectifs sont une priorité dans le cadre de la candidature du Luxembourg en tant que membre du Conseil des droits de l’homme.

M. SASS, délégué de la jeunesse de la Hongrie, a rappelé qu’il y un an, dans cette même Commission, « je parlais de la prévention, de la vaccination et de la santé mentale » et personne n’imaginait, alors, leur importance.  Depuis, nous avons appris qu’il fallait davantage prendre au sérieux la prévention, a ajouté ce jeune médecin qui a exhorté les jeunes à ne pas avoir peur de demander de l’aide.  Pour lui, les jeunes doivent jouer un rôle de chef de file. 

Prenant à son tour la parole, la représentante de la Hongrie a souligné l’appui de son pays aux minorités et plaidé pour l’établissement d’un cadre juridique contraignant.  « Nous sommes les défenseurs des minorités religieuses » et avons été parmi les premiers à nous joindre à l’Alliance de défense des minorités religieuses en 2020.  Elle a, en outre, défendu les femmes qui doivent être autonomisées et s’est enorgueillie des outils et stratégies de la politique hongroise pour aider les femmes.  Investir dans les générations futures est un autre combat que mène la Hongrie pour qui, les droits des enfants sont essentiels, notamment en cette période de pandémie. 

M. ROMAN G. KASHAEV (Fédération de Russie) a constaté que la crise liée à la pandémie de COVID-19 a clairement fait apparaître une augmentation des divisions au sein de la communauté internationale.  Elle a notamment montré que certains États ne sont pas prêts à mettre de côté leurs intérêts nationaux et à privilégier la coopération, a-t-il déploré.  Plus grave encore, selon lui, certains États veulent remplacer les principes du droit international par un soi-disant ordre international basé sur des règles.  De plus, certains utilisent le Conseil des droits de l’homme pour s’ingérer dans les affaires intérieures d’autres États.  Pour le représentant, le temps est venu de réfléchir à des normes morales et éthiques, notamment en ce qui concerne la désignation et la prestation de serment du Président du Conseil. 

La pandémie a également montré que les problèmes liés au racisme et à la discrimination raciale n’ont pas été réglés, a poursuivi le délégué.  Il a jugé inadmissibles les tentatives de glorifier le nazisme et les idéologies semblables.  Condamnant à cet égard les tentatives visant à faire d’éléments néonazis des « héros de libération nationale », il a appelé les structures pertinentes de l’ONU d’y veiller et les pays concernés à mettre fin à ces violations.  Au moment où l’ONU passe au format en ligne pour ses travaux, il a également invité tous les États à participer à la mise en œuvre de la Convention sur la cybercriminalité.  Enfin après avoir demandé à la Commission des stupéfiants de l’ONU de se saisir de la pandémie dans le cadre du Consensus de Vienne, il a salué la tenue d’une session extraordinaire de l’Assemblée générale contre la corruption en 2021. 

M. ENRIQUE AUSTRIA MANALO (Philippines) a expliqué que son pays a lancé un programme de rapatriement des migrants sans précédent dans son histoire.  Si des milliers de migrants philippins sont en première ligne pour lutter contre la pandémie, plus de 345 000 autres ont été rapatriés après avoir perdu leur emploi.  Le Gouvernement a donc pris en charge les frais de rapatriement et fourni une assistance financière aux bénéficiaires qualifiés.  Par contre, a ajouté le représentant, des milliers de gens de mer sont toujours à bord de navires qui ne peuvent pas accoster en raison des restrictions liées à la COVID-19.  Les Philippines ont donc établi « une voie verte » pour faciliter le débarquement et la rotation des équipages.  Le représentant a rappelé que le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières constitue un excellent cadre de solidarité et de coopération pour soutenir les migrants en ces temps difficiles.

Par ailleurs, M. Manalo a réaffirmé l’engagement des Philippines à garantir un environnement sûr et sécurisé dans lequel tous les citoyens jouissent des droits de l’homme et des libertés fondamentales, « à l’abri de la criminalité et du fléau des drogues illicites ».  Il a souligné que l’État a la prérogative souveraine de prendre des mesures pour lutter contre la criminalité et le terrorisme et d’adopter des lois pour protéger les intérêts nationaux.  Enfin, il réitéré son appel à « mettre fin à la militarisation et à la politisation des droits de l’homme ». 

M. MILENKO ESTEBAN SKOKNIC TAPIA (Chili) a souligné que la crise mondiale engendrée par la pandémie de la COVID-19 et ses effets ne sauraient être absents des travaux de la Troisième Commission, d’autant que les sujets abordés par celle-ci ont une incidence directe sur la vie des personnes.  La pandémie a, une fois de plus, mis à nu les inégalités sociales et l’urgence d’un renforcement de l’approche des droits de l’homme et de la protection.  Les derniers mois ont montré que de multiples groupes vulnérables étaient plus particulièrement affectés, a-t-il estimé, s’inquiétant notamment de l’augmentation de la violence domestique.

En cette période complexe, il faut que la protection des droits de l’homme soit le point de mire mondial, a-t-il affirmé.  Aujourd’hui plus que jamais, a-t-il encore encouragé, le caractère universel des droits de l’homme exige d’approfondir et de mettre l’accent sur la valeur de la protection de l’État, de la démocratie, du dialogue et de la coopération internationale, ce qui est en lien direct avec notre conception du multilatéralisme, qui privilégie la recherche du consensus autour des questions d’intérêt commun.  Face à une crise mondiale, le caractère universel des droits de l’homme renforce la capacité préventive du système multilatéral, lequel tire profit à son tour de la participation de la société civile, des secteurs privé et académique, et de tous les acteurs pertinents, a précisé M. Skoknic Tapia.

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a déclaré que la pandémie de COVID-19 a plongé le monde dans une crise sanitaire et économique aiguë, dont la gravité n’a pas été vue depuis un siècle.  Les effets socioéconomiques négatifs de la pandémie de COVID-19, qui s’ajoutent aux défis existants tels que le fardeau élevé de la dette, la réduction des recettes fiscales, les sorties de capitaux et le manque d’accès adéquat et suffisant aux marchés financiers, ne sont pas de bon augure pour l’avenir des pays en développement, a-t-il prévenu.  Les niveaux élevés de chômage, en particulier chez les jeunes, pourraient potentiellement entraîner une déstabilisation politique et sécuritaire de certaines de nos sociétés.

Face à cette situation, le Gouvernement namibien a fait preuve d’un leadership fort en mettant en place un Comité national de coordination des urgences sanitaires sous l’égide du Ministère de la santé et des services sociaux.  Le Gouvernement namibien a, en outre, introduit le Système de gestion des incidents et renforcé la fonctionnalité d’urgence en santé publique, qui est devenu la base centrale à partir de laquelle opèrent tous les intervenants de la COVID-19 au niveau national.  Il a fait savoir que l’un des secteurs les plus durement touchés est celui de l’éducation. 

Le représentant s’est ensuite inquiété de la féminisation de la pauvreté et a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour empêcher que les femmes soient privées d’éducation et de soins de santé, exclues de la prise de décisions, des structures économiques et du processus de production, victimes de violence, et se voient refuser l’accès à la propriété.

Après avoir appelé à appuyer la promotion et la protection des droits de l’homme dans le monde, en particulier par le dialogue et des moyens pacifiques, le délégué a demandé la pleine mise en œuvre de toutes les résolutions de l’ONU sur la Palestine et le Sahara occidental et à la levée de l’embargo imposé à Cuba et des sanctions à l’encontre du Zimbabwe.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a relevé le contexte extraordinaire de cette session de l’Assemblée générale marqué par la pandémie de COVID-19 et toutes ses conséquences.  C’est une période où il faut renouveler notre engagement en faveur du multilatéralisme, de la coopération internationale et des droits de l’homme.  À cet égard, la Troisième Commission est un espace pour faire avancer l’ordre du jour international relatif aux droits de l’homme, par le biais d’un dialogue « franc et ouvert ».

La santé étant un droit de l’homme, il faut, a souligné le représentant, renforcer la coopération internationale pour garantir à tous un accès juste, transparent, efficace et approprié aux outils de prévention, aux vaccins et autres fournitures médicales de la lutte contre cette pandémie et celles qui suivront, conformément à la résolution 74/274, adoptée en avril 2020, à l’initiative du Mexique.

Mon pays, a poursuivi le représentant, souligne la nécessité d’aligner la coopération avec les divers organismes et agences de l’ONU avec les priorités nationales.  Il a promis la présentation au cours de cette session d’un projet de résolution sur la protection des enfants contre le harcèlement qui intègre les nouvelles réalités imposées par la pandémie, tout en se penchant sur le fléau du harcèlement en ligne.  Avec la Suisse, le Mexique sera aussi cofacilitateur du projet de résolution relatif au moratoire sur l’application de la peine de mort, pour avancer sur cette peine « cruelle, inhumaine et dégradante ». 

Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE (Ghana) s’est d’abord réjouie qu’en dépit des restrictions imposées par la pandémie, les membres de la Troisième Commission puissent se rencontrer en personne.  Elle a ensuite évoqué les résultats de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, organisée en 1995, se félicitant que ce « moment marquant de l’histoire » ait entraîné un engagement mondial en faveur des droits des femmes et des filles.  Toutefois, a-t-elle regretté, des lacunes demeurent de toute évidence et la pandémie fait même craindre des retours en arrière.  La représentante a salué à cet égard de l’appel du Secrétaire général pour que les plans de reprise nationaux tiennent compte de la vulnérabilité des femmes.

Au Ghana, a-t-elle précisé, des progrès ont été réalisés dans les 12 domaines clefs du Programme d’action de Beijing, avec l’adoption de mesures sur les plans législatif et réglementaire.  S’agissant des succès enregistrés, Mme Pobee a fait état de changements institutionnels, d’une augmentation du nombre de femmes occupant des postes politiques, d’avancées en matière de santé génésique et d’une baisse de la mortalité infantile et maternelle.  En revanche, a-t-elle poursuivi, la violence faite aux femmes et aux filles reste un sujet de vive préoccupation.  Pour y remédier, des mesures sont prises contre le phénomène de la violence domestique, avec des enquêtes menées dans les foyers.  Le Gouvernement progresse par ailleurs dans le domaine de la protection des droits de l’enfant.  Les soins médicaux pour les plus jeunes se sont améliorés, de même que l’accès à l’éducation, notamment aux niveaux les plus bas du système éducatif.  Tout est mis en œuvre également pour lutter contre la traite des enfants, les mariages précoces et les mutilations génitales féminines, a-t-elle assuré.  Enfin, alors que la communauté internationale célèbre les 75 ans de l’ONU, elle a réaffirmé l’attachement de son pays aux droits universels, appelant à un renforcement du dialogue entre États Membres sur les mesures permettant à tous d’accéder aux traités des droits de l’homme.

Bien que nous soyons tous confrontés à la crise liée à la COVID-19, « nous ne devons pas la laisser devenir une crise des droits humains », a plaidé le représentant de la Slovaquie, réaffirmant l’appui de son pays à l’action du Secrétaire général en faveur des droits de l’homme.  Alors que nous nous préparons à une deuxième vague de la pandémie ou tentons d’en atténuer les effets, nous devons améliorer notre réponse à la violence domestique et mieux protéger les personnes vulnérables, a-t-il ajouté.  Pour le représentant, les enfants, en particulier, souffrent à plusieurs titres de cette crise dans la mesure où la COVID-19 les empêche de s’instruire, d’avoir des contacts sociaux et des activités physiques.  De fait, a-t-il souligné, elle provoque chez eux des impacts qui peuvent les affecter à vie.  Il est donc urgent, selon lui, de prévenir ces effets néfastes et d’investir dans « notre plus jeune génération ».

Cette crise n’est malheureusement pas seule à se produire actuellement, a-t-il poursuivi, avant d’exprimer sa profonde préoccupation quant à la situation des droits de l’homme au Bélarus.  Condamnant la violence inacceptable contre les manifestants, l’opposition et les représentants des médias et de la société civile, il a appelé au dialogue, à la tenue d’élections libres et équitables et au rétablissement de la démocratie et de l’état de droit, estimant que ce sont « les seules voies possibles » pour le Bélarus.  Avant de conclure, le représentant a exhorté la communauté internationale à s’attaquer aux causes structurelles de l’inégalité de genre.  « Nous ne pouvons pas laisser de côté plus de la moitié de la population mondiale », a-t-il souligné. 

Le représentant de la Tunisie s’est déclaré particulièrement préoccupé par les répercussions « stupéfiantes » de l’augmentation de la violence domestique et des pratiques néfastes pendant la pandémie de COVID-19.  Pour y remédier, la Tunisie a pris des mesures immédiates, notamment la mise en place d’une ligne téléphonique d’urgence et la prise en charge à distance des cas de violence domestique.  Un centre de refuge a aussi été mis en place dès le mois d’avril, en partenariat avec la société civile.  Cette initiative illustre en outre le rôle crucial que jouent les ONG et les défenseurs des droits de l’homme pour soutenir nos objectifs communs dans le domaine des droits de l’homme, a-t-il ajouté.

Le représentant a relevé que les défis sans précédent provoqués par la COVID-19 ont conduit les États Membres à prendre des mesures exceptionnelles qui ont parfois relégué au second plan les considérations relatives aux droits de l’homme.  En raison du manque de ressources et de mécanismes permettant d’entrer en contact avec les Nations Unies, de plus en plus d’ONG risquent d’être exclues des discussions sur les questions clés relatives aux droits de l’homme, s’est-il inquiété, relevant que cette situation se produit dans un contexte déjà considéré comme un rétrécissement de l’espace civique. 

Il a appelé l’ONU à donner l’exemple, en commençant par rassurer les organisations de la société civile, les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme sur la valeur de leur contribution et en travaillent en vue d’atténuer les défis et les restrictions auxquels ils sont confrontés en raison de la pandémie.

La crise sanitaire actuelle a également entraîné la récession mondiale la plus profonde depuis des décennies, qui a épuisé les ressources des gouvernements et des populations, en particulier dans les pays à faible et moyen revenu.  Selon les estimations, 265 millions de personnes supplémentaires pourraient être confrontées à de graves pénuries alimentaires d’ici la fin de l’année 2020.  Si notre action collective ne s’y attaque pas de manière adéquate, ses conséquences se feront sentir pendant des années avec l’érosion du capital humain et le recul de décennies entières de progrès en matière de développement durable, ce qui risque, a-t-il prévenu, d’alimenter les moteurs sous-jacents du terrorisme.

Le représentant du Liechtenstein a noté que si les obligations juridiques des États de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales sont claires, leur jouissance reste trop souvent « utopique ».  À ses yeux, la pandémie de COVID-19 a révélé et exacerbé de profondes inégalités et injustices dans le monde, contribuant aux lacunes de la protection des droits de l’homme.  Il est donc important, selon lui, de s’assurer que les mesures de restrictions prises pour contenir la pandémie sont « nécessaires, proportionnées, limitées dans le temps et réversibles si les circonstances le permettent ».

Dans ce contexte, une coordination plus efficace et une intégration des droits de l’homme au sein du système des Nations Unies sont nécessaires d’urgence, a poursuivi le délégué.  Il a appelé à des liens plus solides et plus cohérents entre Genève et New York et à une coopération plus solide entre le Conseil des droits de l’homme et les autres principaux organes de l’ONU, en particulier le Conseil de sécurité.  À cet égard, il s’est dit préoccupé par les violations des droits de l’homme en cours, notamment en Syrie et au Myanmar.  Il a également exprimé son inquiétude quant à l’impunité persistante face à ces violations.  Assurer la responsabilité est une condition préalable nécessaire à la justice et à la paix, a-t-il souligné, réitérant l’appui de son pays aux travaux des mécanismes de reddition de comptes mis en place par l’Assemblée générale et le Conseil des droits de l’homme.

Jugeant que la CPI offre la voie la plus concrète vers la justice pour les victimes de crimes contre l’humanité, de génocide et de crimes de guerre, il s’est dit déçu que le Conseil de sécurité continue d’ignorer les appels des États, du système des Nations Unies et des victimes en faveur de renvois à la CPI.

Réaffirmant ensuite l’engagement de son pays à lutter contre l’esclavage moderne et la traite des êtres humains, le représentant a observé que les activités en ligne se sont multipliées avec la pandémie, et avec elles le recrutement et l’exploitation de victimes.  Face à la cybercriminalité, le Liechtenstein a mis en place un partenariat public-privé et un programme d’action visant à éradiquer l’esclavage, a précisé le délégué.  Selon lui, l’Assemblée générale, et en particulier sa Troisième Commission, les procédures spéciales créées par le Conseil des droits de l’homme et le Conseil de sécurité peuvent jouer un rôle important dans la diffusion de ces programmes.

Trop de violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire persistent aujourd’hui, a regretté le représentant de la France pour qui ces violations témoignent d’une dangereuse remise en cause du multilatéralisme fondé sur des règles et les institutions qui l’incarnent.  Dans les zones de crise, en particulier, ces violations se multiplient et continuent de viser des populations civiles et les personnels humanitaires et médicaux.  « L’espace humanitaire est un patrimoine commun.  Nous devons le protéger!» a-t-il lancé.

Le représentant a ensuite réitéré l’appel à un cessez-le-feu mondial tel que prévu par la résolution 2532 du Conseil de sécurité.  Il a indiqué que la France prendra en parallèle des initiatives pour assurer l’effectivité du droit international, notamment la lutte contre l’impunité des crimes commis.  Dans le domaine des droits de l’homme son pays est préoccupé par la recrudescence des violations des engagements internationaux par les États.  Dans certains domaines, nous assistons à des reculs et des silences complices, s’est alarmé le délégué pour qui le préambule de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 reste « malheureusement pleinement d’actualité ».

En parallèle, la pandémie de COVID-19 a constitué un défi supplémentaire pour le respect des droits de l’homme, a poursuivi le représentant.  Dans ce contexte, la France défend notamment la promotion des femmes et des filles.  Il a aussi annoncé l’organisation, en juin 2021, avec ONU-Femmes et le Mexique, du Forum « Génération Égalité » pour identifier des initiatives innovantes entre femmes et hommes.  La France entend également défendre celles et ceux qui défendent les droits de l’homme, a-t-il ajouté, notant qu’au cours des 20 dernières années plus de 3 500 défenseurs ont été tués dont plus de 300 en 2019.  Enfin, la France, se fixe également comme priorité de défendre la liberté d’expression et d’information.

La pandémie ne doit pas être utilisée comme prétexte pour faire taire les voix dissidentes, a déclaré le représentant de la République tchèque, qui s’est dit profondément préoccupé par l’état des droits de l’homme dans plusieurs pays.  Il a dénoncé en particulier la situation qui prévaut au Bélarus depuis les élections présidentielles.  « Les gens sont punis, battus et torturés simplement pour avoir exercé leurs droits fondamentaux, tels que le droit de manifester pacifiquement et de participer aux affaires publiques.  C’est inacceptable. »

Le représentant s’est également inquiété de la fermeture de l’espace de la société civile en Russie.  Les lois sur les « agents étrangers » et les « organisations indésirables » ont fixé, selon lui, de sérieuses limites à la capacité des ONG à opérer et ont de graves répercussions sur la liberté d’expression.  En outre, la République tchèque souligne la détérioration de la situation des droits de l’homme dans la République autonome de Crimée, annexée illégalement.

Le représentant du Pérou a déclaré que la pandémie de COVID-19 a entraîné une crise sanitaire et économique sans précédent.  Le représentant a, à cet égard, estimé que les vaccins qui seront découverts devront être déclarés « biens publics mondiaux ».  Il est essentiel que la reprise économique, s’accompagne d’un développement social inclusif.  « C’est pour cela qu’il faut renforcer le multilatéralisme pour que nous soyons unis », a-t-il estimé.  Les libertés fondamentales ont toujours été défendues par le Pérou, mais la pauvreté affaiblit la démocratie, a-t-il regretté.

En outre, le délégué a estimé que l’avenir de nos sociétés se trouve dans les enfants, et que les inégalités les plus marquées concernent les premières années de la vie.  Les enfants sont les victimes cachées de la pandémie.  « Nous ne saurions permettre que les progrès réalisés dans le développement des plus jeunes soient remis en cause par la pandémie », a-t-il affirmé.

En ce qui concerne les peuples autochtones, le représentant a estimé qu’il faut répondre à leurs besoins de façon respectueuse de leur culture.  Par ailleurs, il a estimé que les personnes âgées sont un groupe prioritaire qu’il faut protéger.  Enfin, le représentant a estimé qu’il fallait réaffirmer la solidarité en ce qui concerne les déplacements de populations, comme c’est le cas des 5 millions de réfugiés du Venezuela.

La représentante de Cuba a souligné qu’en plus de son bilan en vies humaines, la pandémie de COVID-19 va entraîner de graves conséquences économiques et sociales.  Elle a constaté que les pays en développement en payaient le plus lourd tribut, aux dépens de leur population et de leur développement.  Face à cette épreuve mondiale, nous devons édifier un nouvel ordre international juste et équitable, qui élimine en particulier les mesures coercitives unilatérales, a-t-elle poursuivi, estimant que la communauté internationale ne peut autoriser les « deux poids, deux mesures » dans le domaine des droits humains.  Ces questions doivent être abordées « sur des bases objectives et non politisées », a-t-elle martelé, avant de dénoncer une nouvelle fois le blocus inhumain imposé à Cuba par les États-Unis depuis six décennies.

Il s’agit d’une violation massive de tous les droits humains des Cubains et un obstacle au développement du pays, a insisté la déléguée.  Observant que ce blocus a été renforcé avec les années, « ce qui confirme le caractère génocidaire de cette politique », elle a accusé les États-Unis de manipuler la question des droits humains, par exemple en ajoutant Cuba sur la liste des pays violant la liberté de religion.  Au milieu de cette pandémie, une campagne de discrédit a, en outre, été lancée contre Cuba sans aucun fondement, alors que le pays a envoyé des équipes médicales à travers le monde.  Pour la représentante, ce blocus se retourne contre ses auteurs puisqu’il affecte les citoyens américains en les empêchant de se rendre à Cuba et de bénéficier des produits cubains.  C’est d’autant plus grave, selon elle, que 200 000 personnes ont perdu la vie du fait de la gestion de la pandémie par le Gouvernement américain, lequel, a-t-elle ajouté, ne condamne même pas la suprématie blanche.  Les États-Unis oublient que le peuple cubain n’a pas de bien plus précieux que son indépendance.  « Nous avons instauré une culture de la résistance et du sacrifice.  Nous continuerons à édifier une société toujours plus juste et à défendre les causes du Sud, en procurant notre aide à ceux qui en ont besoin », a-t-elle conclu.

La représentante du Honduras a mis en exergue « l’importance et l’urgence particulières » des travaux de la Troisième Commission en cette période de pandémie dont l’impact multidimensionnel affecte la santé, l’éducation, la migration, les services sociaux de base et les droits de l’homme.  La pandémie a eu des effets sans commune mesure sur les femmes dans toutes les sphères, a alerté la représentante.  Au Honduras, comme partout ailleurs dans le monde, les femmes représentent la majorité du personnel de santé.  Le niveau de violence familiale a augmenté de manière significative, tandis que l’accès de la mère et de l’enfance à la santé s’est restreint.  La représentante a donc plaidé en faveur d’une égalité « réelle » des sexes, insistant sur l’accès à la santé sexuelle et reproductive, l’égalité salariale et la participation à la prise de décisions. 

S’attardant sur la situation des migrants, la représentante a noté que la pandémie a aggravé leur précarité du fait de leur dépendance à l’économie informelle, du manque d’accès aux systèmes de protection et à de conditions de vie et de travail où la distanciation sociale est impraticable.  Le Honduras, a-t-elle souligné, renouvelle son ferme engagement en faveur du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières et son ferme appui aux travaux du Forum d’examen de la migration internationale. 

Pour le représentant d’Israël, la pandémie de COVID-19 nous a montré à quel point les progrès sont fragiles: alors que nous commémorons le vingt-cinquième anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, nous assistons à une augmentation dévastatrice de la violence fondée sur le sexe dans un contexte de blocages et de couvre-feux.  Des rapports alarmants font état d’une augmentation des mariages d’enfants, précoces et forcés et un nombre croissant d’enfants -garçons et filles- même après la pandémie, risquent de ne jamais retourner à l’école.  Il a aussi relevé que les femmes n’ont pas accès aux soins de santé sexuelle et reproductive, et que les personnes LGBTI ne peuvent pas obtenir le soutien médical dont elles ont besoin.

La pandémie et les restrictions nécessaires pour la combattre sont utilisées par certains comme des outils politiques, a-t-il déploré.  Certains profitent du fait que l’attention du monde est concentrée sur la pandémie pour poursuivre leurs programmes malveillants et commettre des crimes contre leurs propres peuples, ainsi que contre d’autres.  La lutte contre la pandémie de COVID-19, a-t-il souligné, ne doit pas se faire au détriment de la lutte pour « nos valeurs ».

Cette pandémie nous a appris que, aussi divers que soient nos programmes, nos besoins fondamentaux sont similaires.  Elle nous a obligés à coopérer plus que jamais.  Cet esprit d’unité a permis d’aboutir à l’une des réalisations les plus significatives de ces dernières décennies en termes de négociations de paix: un traité de paix entre Israël, les Émirats arabes unis et le Royaume de Bahreïn, s’est-il félicité.  Pour une région aussi troublée, c’est un grand pas en avant et le début d’une nouvelle ère - une ère dans laquelle la paix apportera plus de paix, et où plus de pays choisiront de voir Israël comme l’ami qu’il est, plutôt que comme l’ennemi qu’il n’a jamais été.

Le représentant de l’Estonie a estimé qu’en ce qui concerne les droits des femmes, des progrès restent à faire, insistant notamment sur la nécessité de lutter contre ceux qui veulent inverser la tendance.  Il a également déploré que les voix des femmes ne sont pas suffisamment prises en compte dans les processus de paix.  Il a ensuite exhorté les États à ne pas fermer l’accès à Internet en période de pandémie.

S’agissant de la liberté d’expression et du droit de manifester, le représentant s’est félicité de la résolution prise par le Conseil des droits de l’homme au sujet du Bélarus, condamnant dans la foulée les répressions contre les journalistes et les manifestants.  Il s’est également inquiété de la dégradation de la situation en Crimée, relevant notamment que les Tatares de Crimée sont devenus la principale cible de l’occupant.

En outre, le représentant a regretté qu’en Syrie, une génération entière d’enfants n’a rien connu d’autre que la guerre, s’alarmant par ailleurs des obstacles qui entravent l’acheminement de l’aide humanitaire en Syrie.

Il est de notre responsabilité non seulement de lutter contre la pandémie, mais aussi de protéger tous les droits de l’homme et de réaliser les objectifs de développement durable, a déclaré la représentante de la Norvège.  Les droits et les normes démocratiques sont remis en question, a-t-elle déploré.  « Ceux qui défendent nos droits, qu’il s’agisse de journalistes, d’écologistes, de féministes, de défenseurs des droits des LGBTI et des autres minorités, sont excessivement limités dans leur travail et font de plus en plus l’objet de représailles. »

Partout dans le monde, les femmes risquent désormais d’être les plus durement touchées par les impacts économiques et sociaux de la pandémie, s’est inquiétée la représentante.  La violence sexiste a explosé, tandis que le manque d’accès aux soins de santé, notamment à la santé et aux droits sexuels et reproductifs, a des effets graves et durables sur les femmes et les filles.  Nos efforts de réponse et de relèvement, y compris notre réponse humanitaire, doivent donc avoir une perspective sexospécifique.  La voix des jeunes doit également être entendue, a argué la représentante.  À cet égard, les lacunes numériques doivent être comblées pour garantir une participation et des chances égales pour tous.

Le représentant de l’Arabie saoudite a évoqué les différentes réformes significatives adoptées dans son pays, notamment en matière des droits de la femme, l’objectif étant, a-t-il dit, de parvenir à l’égalité entre les sexes.  Ainsi, a-t-il poursuivi, les femmes en Arabie saoudite occupent des postes de responsabilité: elles sont vice-ministres, ambassadrices, dirigent des entreprises, et elles sont également présentes dans la magistrature.  Il a également parlé des différentes initiatives mises en œuvre dans le pays visant à autonomiser les femmes sur le marché du travail.

Le représentant a également parlé de l’amélioration du cadre juridique et institutionnel relatif à la protection de l’enfance.  Il s’agit d’un cadre complet visant à protéger les mineurs de moins de 18 ans contre les cas de négligence et d’abus.  Le Ministère de la justice a ainsi fixé l’âge minimum de mariage.  Enfin et depuis la propagation de la pandémie de COVID-19, le Ministère de l’éducation a pris des mesures rigoureuses notamment en assurant l’enseignement à distance ainsi qu’une supervision.

La représentante de la Slovénie a souligné que les droits humains reconnaissent les mêmes droits pour tous les humains, sans aucune distinction.  « Nous estimons que la paix et la sécurité vont de pair », a-t-elle souligné, tout comme les droits humains vont de pair avec cela.  Elle a aussi insisté sur l’importance de l’égalité des femmes et des filles et la nécessité de leur permettre de prendre part au processus de paix.

La représentante a déclaré que préserver un environnement sain et propre permet d’assurer l’avenir de l’humanité.  Le développement économique rapide a entraîné des progrès pour l’humanité, mais aussi des menaces sur les droits humains, s’est-elle inquiétée, appelant à redoubler d’efforts pour créer un monde plus équitable.

Citant les propos d’une jeune femme slovène, la représentante a dit que « les jeunes vivent l’inégalité entre les sexes différemment de nos jours.  Nous les rencontrons dès le départ et nous le savons ».  En Slovénie, a-t-elle enchaîné, un quart des femmes sont représentées au Parlement et 27% d’entre elles occupent des fonctions de direction.  Cependant, les femmes slovènes assurent deux heures de travail domestique de plus que les hommes et sont payées 8% moins.  Accéder à l’égalité demande donc du travail et de la volonté, a-t-elle conclu.

La représentante de la Finlande a souligné les conséquences sévères de la pandémie sur les droits des femmes et des filles, avec notamment une aggravation de la violence à leur endroit.  « Il est de la plus haute importance que tous les États s’unissent pour stopper cette ‘pandémie fantôme’ », a-t-elle souligné.  Mettre fin à la violence faite aux femmes et filles, qui est en soi un objectif, est aussi crucial pour réaliser le Programme 2030, a poursuivi la délégation.

Elle a défendu un accès en toutes circonstances aux services de santé sexuelle et reproductive.  Elle a aussi jugé crucial un accès universel à une éducation sexuelle de qualité et peu onéreuse, sur la base d’éléments scientifiques solides, afin de fournir aux jeunes les informations nécessaires à la prise de décisions éclairées s’agissant de leur santé et sexualité.  « L’intersectionnalité est une approche essentielle en vue de la promotion de l’égalité entre les genres. »  Elle a ainsi condamné toutes les formes de discriminations, y compris les discriminations intersectionnelles.  La mission a enfin affirmé que la protection des droits des peuples autochtones est une priorité de longue date pour la Finlande et appelé à poursuivre les consultations avec ces peuples en vue d’une représentation accrue aux réunions de l’ONU les concernant.

Le représentant de l’Australie a souligné que son pays est convaincu que les pays qui respectent les principes des droits de l’homme sont à même de coopérer afin de promouvoir le bien commun, rendant ainsi le monde plus sûr.  Il s’est dit particulièrement préoccupé par les incidences importantes de la COVID-19 sur les personnes victimes de discrimination, en particulier les peuples autochtones, les femmes et les filles ainsi que les personnes handicapées ou âgées.  Alors que nous nous efforçons de contrôler la propagation de la pandémie, « nous devons également lutter contre la désinformation qui va à l’encontre des valeurs de l’Australie », a-t-il déploré.  Il s’est dit également préoccupé par les détentions arbitraires et mis en garde que la pandémie ne doit pas servir de prétexte à cette fin.

La représentante de l’Argentine a estimé que les secteurs les plus défavorisés subiront le plus durement les conséquences négatives de la COVID-19.

En tant que membre du Conseil des droits de l’homme, l’Argentine estime qu’il faut respecter les droits humains des personnes âgées, se disant par ailleurs très préoccupés par les répercussions de la COVID-19 sur ces dernières.

La représentante a ensuite pointé les incohérences du cadre légal en matière des droits humains et a réclamé un instrument juridiquement contraignant pour les droits des personnes âgées.  Par ailleurs, elle a souligné la nécessité de faire avancer le droit des personnes LGBTI.

La représentante du Liban a rappelé la fragilité de son pays suite à l’explosion qui a frappé la ville de Beyrouth, tout en louant la force de la société civile.  Ces héros sont bien souvent des femmes libanaises, a-t-elle souligné.  Les femmes sont des agents du changement.  Mais trop de femmes se voient refuser la possibilité de prendre des décisions et de réaliser leurs droits, a-t-elle regretté, déplorant la lenteur des progrès dans ce domaine.

Elle a rappelé qu’en raison de l’explosion du 4 août, quelques 600 000 enfants risquent de subir des traumatismes de longue durée.  « Je ne me sens plus comme avant l’explosion », disent-ils.  Malgré tous les orages, nous nous relèveront et nous nous battrons pour un monde meilleur, a-t-elle estimé en conclusion.

Pour le représentant (Royaume-Uni), le respect des droits de l’homme est essentiel pour le système international.  Ici et au Conseil des droits de l’homme, nous devons traiter des questions les plus pressantes en la matière et faire la lumière sur leur violation pour traduire en justice leurs auteurs. 

Soulignant que la promotion et la protection des droits de l’homme sont une des priorités internationales du Royaume-Uni, le représentant s’est préoccupé que certains pays, sous prétexte de la pandémie, ignorent leurs obligation. 

Le représentant du Myanmar a dit que son gouvernement a, depuis 2015, multiplié les dépenses pour la santé et élaboré un plan pour la promotion du rôle des femmes.   Il a mentionné la stratégie de son pays pour endiguer la criminalité et pour lutter contre la traite des personnes, ainsi que le Plan stratégique 2020-2024 visant à protéger les droits des femmes et des filles.  L’accent a été mis sur la lutte contre les violences faites aux femmes, dont le confinement a montré la vulnérabilité, a poursuivi le Représentant du Myanmar.  Le délégué a également cité une loi de 2019 alignant la législation interne sur la Convention relative aux droits de l’enfant, ainsi que les mesures prises pour protéger les enfants dans les camps.  « Le Myanmar protège les enfants », a-t-il assuré.  Enfin, le délégué a déclaré que son pays entend tout faire pour se montrer à la hauteur des défis du développement.

Le représentant de l’Égypte a noté le supplice que constitue la pandémie pour les pays en développement.  Le droit à la vie et le droit à la santé ont été compromis, a-t-il dit.  Il a ensuite insisté sur l’importance des droits économiques et sociaux et sur les vulnérabilités révélées par le virus.  Il faut œuvrer à la création d’une protection universelle, a déclaré le délégué.  Il a dénoncé la montée de l’intolérance, ainsi que la persistance des conflits et des occupations étrangères, avant d’appeler à agir pour empêcher que les jeunes ne succombent aux sirènes des extrémistes.  Il a dénoncé les acteurs qui ont voulu imposer leurs points de vue étroits dans les débats sur les droits de l’homme, en s’érigeant comme défenseurs de valeurs prétendument supérieures et en brisant le consensus international.  « Il faut éviter toute politisation dans ce domaine. »  Enfin, le délégué a appelé à faire fond sur le bien commun et à promouvoir la bonne entente entre les peuples.

La représentante du Bangladesh a souligné que l’approche du développement de son pays, qui est centrée sur le peuple et sur la société tout entière, l’a bien préparé à riposter à la pandémie.  Le pays est tout de même préoccupé par l’impact à long terme de cette pandémie sur les acquis du développement.  Le Gouvernement, a indiqué la représentante, a très vite pris une série de mesures contre les risques sanitaires et l’impact socioéconomique.  Mais ces efforts ont exercé une énorme pression sur des ressources déjà modestes.  Mon pays, a rappelé la représentante, abrite, en ce moment, plus de 1,1 million de Rohingya depuis plus de trois ans.  Comme aucun règlement de la crise n’est en vue, nous demandons l’appui de cette Commission, a dit la représentante. 

Comme beaucoup de pays récipiendaires, le Bangladesh a été frappé par la chute des envois de fonds des migrants, la hausse du chômage et le retour de ses travailleurs migrants pour lesquels se posent les questions de la réhabilitation et de la recherche d’un nouvel emploi.  Après avoir souligné l’impact de la pandémie sur les femmes et les enfants, la représentante a alerté du risque de la traite des personnes, du travail des enfants et autres formes d’exploitation et d’abus.  Elle a demandé à la Commission des directives « fermes, reflétant la réalité actuelle ».  Nous devons, s’est impatientée la représentante, aller au-delà des rhétoriques et se mettre ensemble pour empêcher un recul dans les acquis de cette Commission en matière de développement durable.

Si certaines mesures ont été prises pour empêcher la propagation de la pandémie de COVID-19, la représentante de la Pologne a estimé que celles-ci ne doivent pas pour autant affecter les libertés fondamentales et doivent donc être limitées dans le temps.  Nous ne pouvons pas fermer les yeux et justifier les changements en matière de droits de l’homme, a-t-elle souligné.  Elle s’est également élevée contre les discours haineux à l’encontre des minorités, notamment religieuses, en particulier, les discours antimusulmans et anti-israéliens.  En tant que pays ayant vécu une transition démocratique pacifique, la Pologne a regretté l’ampleur des violences commises au Bélarus avant et après les élections du 9 août dernier, et « dont les résultats ne peuvent être reconnus ».

La représentante de Trinité-et-Tobago a estimé que le multilatéralisme est nécessaire pour réaliser un monde de paix.  Mais avec la COVID-19, les progrès réalisés par la poursuite des objectifs de développement durable risquent d’être remis en cause.  La représentante a loué le système social mis en place dans son pays.  L’éducation est la clef du succès et les besoins des enfants sont prioritaires, a-t-elle estimé.  « Nous voulons tout faire pour reconstruire en mieux. »

Pour la représentante, la participation des femmes est la clef du relèvement après la COVID-19, d’où l’importance d’empêcher la discrimination.  Elle s’est aussi déclarée préoccupée par la recrudescence des violences domestiques durant la période du confinement.   La représentante a, en outre, noté que les populations autochtones, bien que très minoritaires à Trinidad-et-Tobago, doivent être reconnues.

La propagation de la COVID-19 menace d’accélérer les revers au plan du développement et d’affaiblir le respect des droits humains, a mis en garde la représentante de la Suède.  Pour lutter contre la pandémie, l’égalité entre les sexes, la démocratie, les droits humains et l’état de droit doivent être préservés, et les normes internationales doivent aussi être défendues, a-t-elle souligné.  De son côté, la Suède se mobilise au travers de différentes institutions pour les femmes et la démocratie.  Il faut placer les femmes et les filles au cœur de « notre action » a insisté la déléguée.  Pour finir, la Suède a rappelé l’initiative « Drive For Democracy », qui met en évidence l’importance de la démocratie, tout en appuyant la société civile ainsi que les droits à la liberté d’expression qui sont essentiels pour toute société démocratique.

Le représentant de l’Inde a dit que la politique d’inclusion sociale en Inde est basée sur la philosophie du Mahatma Gandhi, c’est à dire le respect de la nature de chacun.  Il a souligné l’importance de la coopération internationale pour protéger les droits de l’enfant.  « Nous voulons un développement piloté par les femmes, et pas seulement pour les femmes. »  Il a demandé une évaluation sincère des efforts menés jusqu’à présent pour améliorer les droits humains.  Il a mis en garde contre toute sélectivité dans le domaine des droits humains et souligné l’importance de la relation entre espace numérique et droits de l’homme.  Il a exhorté les détenteurs de mandats au sein du Conseil des droits de l’homme à s’acquitter de leurs tâches de manière impartiale.  Le droit à l’autodétermination ne doit pas être brandi de manière abusive pour compromettre l’intégrité territoriale d’un pays, a-t-il dit, en rappelant que l’Inde est une ancienne colonie.  Enfin, le délégué a indiqué que son pays prône une politique de tolérance zéro vis-à-vis des groupes criminels et extrémistes.

Le représentant de l’Espagne a estimé que l’égalité entre les sexes est menacée en raison de la COVID-19.  « C’est un défi urgent pour toutes les sociétés », a-t-il déclaré, soulignant la nécessité de se montrer ambitieux lors de ce débat sur cette question.  Il a regretté que les enfants figurent parmi les plus touchés par la pandémie.  À cet égard, il s’est déclaré engagé dans la lutte contre la violence faite aux enfants. 

Il a aussi appuyé la lutte contre la discrimination contre les identités de genre, soulignant que les personnes LGBTI doivent pouvoir bénéficier des mêmes droits que le reste de la population.  À cet égard, la communauté internationale doit collaborer avec l’expert des Nations Unies en charge de ces questions, a-t-il estimé.  Le représentant a par ailleurs estimé que les personnes handicapées doivent être aidées au-delà du seul droit du travail. 

La représentante du Vietnam a déclaré que les conséquences graves de la pandémie de COVID-19 ont mis en lumière les faiblesses à l’échelle mondiale.  Les inégalités structurelles ont été flagrantes, sans compter les répercussions sur la dégradation de l’environnement.  Ce contexte de crise internationale devrait, selon elle, encourager l’unité et la solidarité plutôt que la confrontation.  Il faut, par ailleurs, respecter la souveraineté et les principes de non-ingérence, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies, a affirmé la représentante pour qui l’ONU joue un rôle central dans la promotion et la protection des droits de l’homme.  Pour sa part, le Viet Nam a fait de la promotion de ces droits une priorité pour qu’il n’y ait pas de laissés-pour-compte.  Et le résultat est là: en dépit de la pandémie, l’économie montre des signes de relance et le PIB a enregistré une croissance positive ces derniers mois, de 1,8%, s’est-elle félicitée.

Droits de réponse

La République arabe syrienne a déclaré que l’Union européenne (UE) avait fini par faire sienne la devise de Goebbels qui disait que plus on répète un mensonge, plus les gens finissent par y croire.  Le mensonge est dans la nature de la culture occidentale, a-t-elle dit.  La délégation a affirmé que certains pays occidentaux essaient de masquer leur terrorisme économique, décriant le sort des enfants syriens privés de chauffage dans leur maison en raison des sanctions unilatérales.  Les crimes commis par les gouvernements de ces pays représentent des crimes de guerre, a-t-elle déclaré.  Concernant la déclaration du représentant du Canada, la Syrie a rappelé que dans ce pays, les femmes autochtones ont été stérilisées dans des hôpitaux ces 10 dernières années, ce qui représente un génocide. 

La Chine a fait part de son « dégoût » suite aux interventions de l’UE, du Canada et de la République tchèque.  Elle a affirmé que la déradicalisation au Xinjiang avait permis de mettre fin au terrorisme.  « Si ces pays se soucient vraiment des droits de l’homme, ils devraient examiner ce qu’ils font eux-mêmes à l’égard les migrants et se pencher sur les pratiques de leurs alliés, comme les États-Unis, plutôt que des nôtres, a-t-elle affirmé

Le Canada a constaté que selon la Chine et la Syrie, il n’y aurait pas de droits de l’homme universels.  « Selon elles, nous n’avons pas le droit de commenter les violations qui ont lieu dans ces pays. »  Il a rappelé l’importance de mettre en place des systèmes de reddition de comptes.  Le représentant du Canada a rappelé que ces deux pays ont dit: « Vous avez des problèmes avec les autochtones et donc vous ne pouvez pas parler des milliers de morts en Syrie ou les actions de la Chine au Xinjiang ou à Hong Kong. »  Il a enfin accusé de raciste la déclaration du délégué syrien.

La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a affirmé qu’un million de personnes avaient été enrôlées de force par le Japon au courant du siècle dernier, notamment des milliers de femmes coréennes qui ont servi en tant qu’esclaves sexuelles.  Elle a appelé le Japon à stopper sa campagne politisée contre la RPDC, à s’excuser et verser des indemnités aux victimes, dénonçant par ailleurs un « complot de forces hostiles qui entendent souiller la dignité » de son pays. 

Le Japon a appelé la RPDC à prendre des mesures concrètes sur la question des personnes enlevées.  Il a affirmé que les ressortissants coréens ne sont pas l’objet de discriminations au Japon, « au contraire ».  La RPDC doit œuvrer avec le Japon pour un avenir meilleur, a affirmé la délégation. 

L’Ukraine s’est indignée qu’un pays comme la Fédération de Russie, qui a interdit la langue ukrainienne en la remplaçant par le Russe, se permette de la critiquer, dénonçant en outre l’occupation russe du territoire ukrainien.  Elle a invité la Russie à mettre en œuvre les décisions de la Cour internationale de Justice (CIJ) relative à la Crimée.  Elle a également accusé la Russie d’imposer des restrictions aux militants des droits de l’homme et aux journalistes, « sans parler des atteintes aux libertés fondamentales de ses propres citoyens », et d’empoisonner des opposants russes à l’étranger.

Exerçant son deuxième droit de réponse, la Chine a déclaré être indignée par la réponse du Canada.  « Ce pays se pose toujours en défenseur des libertés et ne regarde pas vraiment son propre bilan, notamment les pressions exercées à l’encontre des populations autochtones. »  À propos du Xinjiang et de Hong Kong, il n’est pas question de droits humains, mais de préserver la sûreté nationale de notre peuple, a affirmé la délégation qui a conseillé au Canada de cesser de pratiquer le deux poids, deux mesures. 

À son tour, la RPDC a rappelé que le Japon ne peut se soustraire à ses responsabilités ni réécrire l’histoire: « Nos relations ne seront pas au beau-fixe sans dédommagements et la fin de la discrimination à l’encontre des citoyens coréens. »

Le Japon a réitéré son engagement à régler la question des enlèvements et a exhorté la RPDC à travailler avec lui.

La République arabe syrienne s’est élevée contre les allégations du Canada qui impose, au côté de son « alliée » l’Union européenne, des sanctions unilatérales coercitives contre la Syrie.  Ces sanctions coercitives unilatérales, qui ont été d’ailleurs qualifiées d’illégitimes par les Nations Unies, imposent un diktat sur le peuple en violation du droit international.

Le Canada a indiqué que la Chine a arrêté deux ressortissants canadiens qui croupissent à présent dans des prisons chinoises.  Si vous pensez que nous insulter va vous aider à régler le problème, vous vous trompez, a-t-il déclaré.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Au Conseil de sécurité, querelle de procédure autour des activités de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques en Syrie

8764e séance – après-midi
CS/14318

Au Conseil de sécurité, querelle de procédure autour des activités de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques en Syrie

Le Conseil de sécurité a à nouveau affiché ses divisions sur le dossier syrien, lors d’une séance houleuse qui s’est tenue en personne sur le volet des armes chimiques de la crise en Syrie.  À l’issue d’un vote de procédure, la proposition de la Fédération de Russie de faire intervenir l’ancien Directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, M. José Bustani, a été rejetée par 3 voix pour, 6 contre et autant d’abstentions. 

Cela n’a pas empêché le représentant permanent de la Fédération de Russie –pays qui préside le Conseil ce mois-ci– de donner lecture intégrale de la déclaration de M. Bustani à sa place, suscitant de vives réactions de la part de plusieurs membres du Conseil, dont la France et le Royaume-Uni, qui ont estimé que cette initiative enfreignait le règlement intérieur de l’organe chargé de maintenir la paix et de la sécurité internationales.  

« Le fait que le résultat de ce vote vous ait déplu ne vous autorisait pas à abuser de votre fonction de Président », a lancé la France à l’adresse du Russe en constatant que « c’est la première fois que le Conseil a à se prononcer sur la prise de parole d’un intervenant  ».  Le Royaume-Uni a reproché à la délégation russe son attitude «  méprisante  », estimant que la résolution 2118 (2013) du Conseil définit clairement le point figurant à son ordre du jour. 

Lorsque la Russie avait proposé, la dernière fois qu’elle présidait le Conseil en 2019, de faire participer des intervenants, cela avait été approuvé, mais la situation est ici différente, a argué la délégation britannique, car « la Russie est partie à l’utilisation d’armes chimiques en Syrie ».  La Chine au contraire a estimé que l’expertise de M. Bustani apporterait une « plus-value » aux travaux du Conseil. 

Présentant par visioconférence le dernier rapport mensuel de l’OAIC sur les progrès accomplis dans l’élimination du programme d’armes chimiques syrien, la Secrétaire générale adjointe et Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, Mme Isumi Nakamitsu, a déclaré que depuis son dernier exposé devant le Conseil, le 10 septembre, son Bureau n’avait reçu aucune information supplémentaire de la part de la Syrie concernant la mise en œuvre complète de la résolution 2118 (2013). 

Alors que le Secrétariat devrait conduire deux cycles d’inspection dans les centres de recherche scientifique syriens de Barzah et Jamrayah, la République arabe Syrienne n’a toujours fourni aucune information ou justification au sujet de la découverte d’un produit chimique inscrit au tableau 2 sur le site de Barzah, a relevé la Haute-Représentante.  

De son côté, la Mission d’établissement des faits de l’OIAC a rendu le 2 octobre dernier deux rapports au sujet d’allégations distinctes d’utilisations d’armes chimiques à Alep le 24 novembre 2018 et à Saraqib le 1er août 2016, a-t-elle ajouté.  

«  Nous n’avons rien à cacher ni à craindre  », a commenté la Syrie, pour qui la séance d’information du 28 septembre avait été l’occasion d’entendre des experts chevronnés dont les exposés et informations fiables ont démontré selon lui le degré de « politisation » de l’OIAC par certains gouvernements.  Il a tenu à rappeler que l’OIAC avait reçu le prix Nobel de la paix en 2013 pour avoir aidé la Syrie à éliminer son stock d’armes chimiques, avant d’inviter son Directeur général actuel à « rectifier le tir ».  Par la voix du représentant russe donc, M. Bustani a assuré avoir été démis de ses fonctions en 2002 à la demande des États-Unis, en raison de sa défense de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, avant d’accuser l’OIAC de cultiver l’« opacité » là où elle devrait ferait preuve de transparence. 

La représentante américaine a pour sa part rappelé que le 9 juillet, le Conseil exécutif de l’OIAC avait décidé que le régime d’Assad devait, dans un délai de 90 jours, déclarer son stock d’armes chimiques et ses installations de production restants.  « Ce délai expire dans deux jours », a-t-elle souligné, en espérant que « le régime d’Assad » respectera cet échéancier, salué par plusieurs membres du Conseil.  La Turquie a déclaré attendre « avec impatience » les conclusions des enquêtes de la Mission d’établissement des faits de l’OIAC. 

La République islamique d’Iran a, quant à elle, plaidé pour une mise en œuvre complète, équilibrée et non discriminatoire de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques et un renforcement de l’autorité de l’OIAC, considérant elle aussi que des abus avaient été commis par cette Organisation aux dépens de la Syrie, de même que par le Conseil de sécurité. 

L’utilisation répétée d’armes chimiques par le régime contre son propre peuple est un fait « incontestable », « confirmé » à plusieurs reprises par les équipes de l’OIAC et de l’ONU, a martelé la France, qui en a voulu pour preuve le rapport « accablant », publié le 8 avril 2020, de l’Équipe d’enquête et d’identification de l’OIAC sur les attaques menées à l’arme chimique par les unités de l’armée de l’air du Gouvernement syrien.  « Restaurer la crédibilité du régime d’interdiction, c’est aussi l’une des conditions d’une paix juste et durable en Syrie sur la base de la résolution 2254  », a encore souligné la France. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni), au nom de plusieurs délégations, a exprimé des « objections » quant à la participation, au titre de l’article 39 du règlement intérieur provisoire du Conseil de sécurité de M. José Bustani, premier Directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Pour ces délégations, ce dernier avait quitté l’OAIC « des années » avant l’adoption de la résolution 2118 (2013), et par conséquent, n’était pas « compétent » pour participer à la réunion de ce jour.  Pour cette raison, les délégations ont demandé un vote sur l’opportunité de sa participation. 

Pour la Chine, au contraire, M. Bustani connaît bien le dossier des armes chimiques.  Son expérience en la matière apporterait une « plus-value » au travail du Conseil.  Par le passé, le Conseil a déjà eu recours à des intervenants de cette nature, a estimé le représentant. 

La France et l’Allemagne ont appuyé les arguments développés par le Royaume-Uni, arguant qu’en 2018, la Fédération de Russie s’était opposée, pour des motifs similaires à ce que le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme de l’époque, M. Zeid Ra’ad Al Hussein, participe à une réunion du Conseil de sécurité.  

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a, de son côté, affirmé qu’il n’y avait pas de précédent à ce qu’un intervenant invité par le Président du Conseil de sécurité soit rejeté.  En ce qui la concerne, la Fédération de Russie n’a pas pour habitude de rejeter la participation d’un invité, y compris lorsqu’elle ne partage pas ses points de vue.  En tant que Président, il a déclaré avoir l’autorité de lire le règlement, a dit le représentant russe. 

Résultat du vote: 3 pour; 6 contre et 6 abstentions  

Mme IZUMI NAKAMITSU Secrétaire générale adjointe et Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, a déclaré que depuis son dernier exposé devant le Conseil de sécurité, le 10 septembre dernier, son Bureau avait continué de travailler en coopération avec l’OIAC.  En revanche, depuis cette date, le Bureau des affaires de désarmement n’a reçu aucune information supplémentaire de la part de la Mission syrienne concernant les questions soulevées par la résolution 2118 (2013). 

Par ailleurs, le Secrétariat technique a poursuivi ses activités, y compris dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Il a notamment déployé le 3 octobre dernier une nouvelle équipe d’évaluation à Damas.  Le Secrétariat devrait conduire deux cycles d’inspection dans les centres de recherche scientifique syriens de Barzah et Jamrayah.  Mais à ce jour, la République arabe Syrienne n’a toujours fourni aucune information ou explication technique concernant la découverte d’un produit chimique inscrit au tableau 2 sur le site de Barzah

En outre, la Mission d’établissement des faits de l’OIAC continue d’étudier les éléments relatifs à l’utilisation d’armes chimiques en Syrie.  Deux rapports ont été publiés le 2 octobre dernier concernant deux allégations distinctes d’utilisations d’armes chimiques à Alep le 24 novembre 2018 et à Saraqib le 1er août 2016, a-t-elle indiqué. 

Intervenant en sa qualité de coporte-plume du dossier sur les armes chimiques, M.  VASILY A. NEBENZYA (Fédération de Russie) a considéré que ce qui s’est passé aujourd’hui est une autre preuve déplorable de la situation actuelle au sein du Conseil.  Le tableau que certains pays essaient de dépeindre n’a rien à voir avec la réalité, a-t-il poursuivi, avant de qualifier le résultat du vote de procédure de « honte »  qu’il faut inclure dans les « annales de l’histoire ». Sachant que l’exposé de l’ancien Directeur général de l’OIAC n’a pas été accepté, la Russie en a donc fait lecture à la place de M. Bustani.  

En tant que premier Directeur général, Bustani a été démis de ses fonctions sur l’initiative américaine car il défendait la Convention sur les armes chimiques.  Aucun État partie ne devait être au-dessus du lot, quelle que soit la taille de son économie et de son influence politique.  Nous avons rencontré bien des défis mais nous les avons relevés pour défendre l’ONU et ses principes.  Des règles et des méthodes d’analyse ont été mises en place, a-t-il rappelé.  Des questions graves sont maintenant posées sur l’indépendance et l’impartialité de certains travaux, a signalé M. Nebenzia, notamment s’agissant de l’attaque à Douma en Syrie.  L’organisation internationale Courage l’a invité à participer à différentes tables rondes pour entendre les préoccupations d’un responsable de l’OIAC inquiet de l’attitude de celle-ci.  Les membres d’une des tables rondes se sont alors dit alarmés par cette situation et ont prié les inspecteurs de soumettre des informations vérifiées.  D’aucuns ont publié un appel en vue de lancer un processus de transparence aux fins de restaurer la crédibilité de l’OIAC, a poursuivi la délégation russe.  Cette organisation n’a pas réagi et reste caractérisée par l’opacité, a-t-elle martelé, en insistant sur le fait que son travail doit être transparent et respecter les dispositions de la Convention sur les armes chimiques.  L’OIAC doit regagner la confiance du public dont elle jouissait autrefois, a-t-il ajouté.  Grâce aux intervenants à la réunion du 28 septembre, nous avons pu procéder à un dialogue ouvert, mais certains intervenants ont tout simplement tenté de bloquer les experts.  Leurs arguments n’ont rien de nouveau, mais l’époque où nous pouvions tenir des débats techniques sur le rapport du Directeur général de l’OIAC est révolue, a constaté l’ambassadeur russe. 

Le premier rapport sur l’attaque à Douma a été repoussé par l’Occident, a-t-il critiqué.  Cela fut aussi le cas en 2017, à Latakié, alors qu’il n’y avait aucune raison à ce que la République arabe syrienne utilise des armes chimiques à l’époque, d’autant que toutes les installations chimiques avaient été fermées.  Les conclusions de la Mission d’établissement des faits n’ont pas été approuvées sous le prétexte qu’il n’avait pas été prouvé que des armes chimiques ont été utilisées par les groupes d’opposition.  L’ambassadeur russe a indiqué que, dès le début de la création de cette mission, certains états ont remis en question ses conclusions.  « Plus rien ne surprendra à ce stade », a-t-il lancé, car tout ce qui vient de l’OIAC est associé à des affirmations fallacieuses.  Il en de même s’agissant de l’incident survenu avec Navalny, l’opposant russe.  Comme l’a indiqué M. Bustani, il faut faire en sorte que l’OIAC fonctionne correctement. Quant à la Russie, elle continue à appeler de ses vœux des enquêtes fiables et à lutter contre le mensonge, a conclu le représentant. 

M. NEBENZIA (Fédération de Russie) a ensuite pris la parole en sa capacité nationale pour qualifier le blocage des experts de l’OIAC de «  sans fondement », et fustiger une tendance ayant abouti selon lui à rendre impossible tout débat objectif sur le dossier des armes chimiques.  Il a rappelé que les critiques de son pays visaient le Secrétariat technique de l’OIAC, critiques ayant montré clairement que cet organisme fait œuvre de machinations, ne reconnait pas que les incidents sur lesquels il enquête, sans jamais pouvoir conclure à l’implication de l’armée syrienne dans des enquêtes sur l’utilisation de l’arme chimique, relèvent de véritables mises en scène.  D’un rapport objectif produit par les équipes de M. Bustani, nous sommes passés à un rapport plus commode pour le camp occidental, un rapport dénué de fondement technique, a poursuivi le représentant permanent.  À Apamée et à Hama, l’armée syrienne n’avait aucune raison d’utiliser des armes chimiques, puisqu’en effet elle reprenait de manière conventionnelle jusqu’à 75% du territoire aux forces d’opposition.  Le représentant a ensuite affirmé que le Secrétariat technique de l’OIAC n’était rien d’autre qu’un instrument de l’Occident pour asseoir son influence politique et poursuivre par un autre moyen une interminable campagne anti-Russie.  Nous n’avons rien à cacher, or l’OIAC de M. Arias cherche à nous accuser, a encore lancé le représentant russe, qui a assuré le Conseil de la volonté de son pays que soient menées des enquêtes objectives.  « Mais nous lutterons toujours contre la désinformation et le mensonge », a-t-il souligné, souhaitant que lors de la prochaine réunion sur ce point à l’ordre du jour M. Arias soit présent pour répondre de manière exhaustive aux questions de son pays et d’experts indépendants.  

Mme KELLY CRAFT (États-Unis) a rappelé qu’il y avait plusieurs semaines, « à la demande de la Russie », la consultation mensuelle du Conseil de sécurité sur les armes chimiques syriennes s’était déroulée dans un format ouvert, et que la Russie avait ensuite parrainé, le 28 septembre, une réunion selon la formule Arria, réunion qu’elle a qualifiée de « tentative désespérée mais ratée de répandre davantage la désinformation » et de détourner l’attention des efforts en cours des nations responsables pour rendre le « régime d’Assad » responsable de son utilisation des armes chimiques.  

Mme Craft a accusé la Russie de « protéger le régime d’Assad » de ses responsabilités.  Pour les États-Unis, « la triste réalité est qu’en dépit de la condamnation internationale, le régime a continué à utiliser des armes chimiques contre le peuple syrien et refusé de coopérer avec l’OIAC ».  L’utilisation d’armes chimiques par le « régime d’Assad » est bien documentée et a été confirmée par l’ancien Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU et, plus récemment, par l’équipe d’enquête et d’identification de l’OIAC, a poursuivi la représentante. L’OIAC a fait état des refus du régime syrien de coopérer et de divulguer l’intégralité de son programme chimique, a-t-elle précisé.  

Pour Mme Craft, ces divers rapports prouvent le non-respect par la Syrie de la Convention sur les armes chimiques et de la résolution 2118 du Conseil de sécurité.  Ils illustrent clairement « le mépris total du régime pour la vie humaine et les obligations internationales de la Syrie ». 

Mme Craft a rappelé que le 9 juillet, le Conseil exécutif de l’OIAC avait décidé que le régime d’Assad devait, dans un délai de 90 jours, déclarer son stock d’armes chimiques et ses installations de production restants.  Ce délai, a-t-elle rappelé, expire dans deux jours.  Les États-Unis espèrent que « le régime d’Assad » respectera ce calendrier et attendent le rapport du Directeur général de l’OIAC sur sa réponse.  Mme Craft a conclu en rappelant les réunions prochaines du Conseil exécutif de l’OIAC, du 6 au 9 octobre, et de la Conférence des parties à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, à partir du 30 novembre.  

M. ABDOU ABARRY (Niger) a commencé par déplorer l’image donnée par le Conseil de sécurité lors du vote de ses membres sur la participation à cette séance de l’ancien directeur de l’OIAC.   Il a estimé que les auteurs d’attaques à l’arme chimique doivent rendre compte de leurs actes.    Le représentant a réitéré que toute exploitation, autre que celle devant conduire le Conseil à une pleine mise en œuvre de la résolution 2118, du rapport des experts et des conclusions qui en sont issues, doit être évitée, car ce document pourrait servir de base pour situer les responsabilités, et par conséquent, ouvrir la voie à d’éventuelles poursuites contre les responsables devant les tribunaux compétents.  Les divergences de vues entre les membres du Conseil doivent céder la place à une analyse sereine et technique des résultats des enquêtes menées, afin de garantir l’intégrité de l’OIAC.  En outre, la composition de toute équipe devant enquêter sur tous les incidents répertoriés doit être inclusive et participative pour éviter que les conclusions ne soient contestées.  De plus, la coopération entre la Syrie et le Secrétariat de l’OIAC doit se maintenir et se faire de bonne foi pour régler toutes les questions restantes concernant la déclaration initiale de la Syrie, pour faire avancer les travaux de l’équipe d’évaluation des déclarations (DAT).  Tous les incidents relatifs à l’utilisation d’armes chimiques en Syrie doivent exiger la même attention, et être traités avec la même diligence.  Enfin, le Niger est d’avis que les informations selon lesquelles des groupes armés non étatiques, en l’occurrence des groupes terroristes seraient en possession d’armes chimiques doivent être prises au sérieux, afin notamment qu’elles ne soient pas utilisées ou transférées à d’autres groupes non étatiques, a prévenu le représentant.   

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a dénoncé l’attitude « méprisante » de son homologue russe, estimant que la résolution 2118 (2013) du Conseil établit clairement le point à l’ordre du jour du Conseil.  Lorsque la Russie avait proposé, lors de sa présidence l’an dernier, la participation d’intervenants externes, cela avait été approuvé, mais ici ce n’est pas le cas car la Russie est partie à l’utilisation d’armes chimiques en Syrie.  Ce type de situation ne fera que politiser les débats, a -t-il prévenu, en précisant que M. Bustani avait démissionné de l’OIAC bien avant que ne se pose le problème de ce type d’armes en Syrie, laquelle, du reste n’était pas encore partie à la Convention.  Si la Russie souhaitait avoir un dialogue franc, elle aurait participé à la réunion organisée par l’Estonie, au lieu de quoi, elle a sciemment laissé un siège vide dans une séance publique. 

Abordant le thème du jour, le Royaume-Uni a demandé à la Syrie de compléter sa déclaration initiale en répondant aux questions de la mission d’établissement des faits.  Cela touche au cœur même du respect de la Convention sur les armes chimique, a ajouté la délégation.  Elle s’est félicitée de la décision du Conseil exécutif de l’OIAC, dont la date butoir est demain, espérant que la Syrie se conformerait aux dispositions de la Convention et coopérerait pleinement avec l’OIAC. 

Le 2 octobre, la Mission d’établissement des faits a publié ses conclusions sur l’attaque chimique perpétrée à Alep et à Latakié, a rappelé le représentant. Il aurait été utile que la Syrie et la Russie fournissent des preuves sur cette attaque au chlore, a-t-il relevé, avant d’encourager toutes les parties à continuer à agir de bonne foi avec ladite mission. 

Mme DESHONG (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a estimé que la clarification de toutes les questions en suspens concernant la déclaration initiale reste essentielle, reconnaissant les efforts continus de la Syrie et du Secrétariat technique pour parvenir à une résolution définitive.  Nous nous félicitons de l’accord sur une prorogation de six mois de l’accord tripartite entre l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), le Bureau des services d’appui aux projets et la Syrie.  L’accord reste pertinent et démontre l’esprit de coopération est nécessaire dans tous les aspects de ce dossier.  « Comme indiqué précédemment, nous avons pris note de la décision du 9 juillet du Conseil exécutif concernant la Syrie.  Nous continuerons de suivre cette question de près et attendons le rapport imminent, ainsi que le débat de fond sur la question lors de la Conférence des États parties en novembre », a ajouté la représentante, qui a rappelé que la mise au point, le stockage, le transfert ou l’utilisation d’armes chimiques doivent être empêchés et le consensus existant contre cette forme de guerre répréhensible préservé. 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a tenu à rappeler qu’en 2018, la Russie s’était opposée à ce que le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, M. Ra’ad Al Hussein, prenne la parole devant le Conseil de sécurité à un moment critique.  Le Haut-Commissaire qui, lui, était en fonctions à l’époque, n’avait pas pu intervenir, a-t-il rappelé.  

Le représentant a ensuite accusé la Fédération de Russie d’avoir recours à des produits chimiques contre sa propre population, comme dans le cas d’un dissident politique et de sa fille, et plus récemment, contre M. Navalny. 

M. HO PHAM (Viet Nam) a condamné, dans les termes les plus forts, l’utilisation des armes chimiques.  En tant qu’État partie à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, nous avons tous l’obligation de la respecter, a-t-il affirmé. Faisant valoir que les enquêtes sur toutes les utilisations chimiques devaient être globales, impartiales, objectives et non biaisées, le représentant a jugé impératif de poursuivre et raffermir la coopération entre la Syrie et l’OIAC. Au cours de la dernière période à l’examen, celle-ci a été positive, a estimé M. Pham, qui a noté que des amendements avaient été apportés à la déclaration initiale de la Syrie, y voyant un premier pas.  Il a toutefois déploré les divergences des parties concernées sur le dossier chimique syrien et a invité à garantir une approche impartiale et objective. 

M. GENG SHUANG (Chine) a déclaré regretter le rejet de l’intervention de M. Bustani lors de cette séance.  « C’est la preuve d’une hypocrisie remarquable de la part de l’Allemagne et des autres représentants », a affirmé le représentant, accusant ce pays de ne pas avoir parlé des armes chimiques, mais d’avoir utilisé cette estrade pour se « défouler et accuser les autres ».  « Le Royaume-Uni au moins, a fait preuve d’esprit constructif en proposant », a-t-il ajouté.  

La question des armes chimiques est une question sérieuse, qui ne doit pas faire objet de polémiques entre États, a poursuivi le représentant.  Ce n’est que lorsque les faits et la science sont étayés que l’on arrive à la vérité, a-t-il affirmé, ajoutant que, lorsque les doutes sont encore légion, il ne fallait pas tirer de conclusions hâtives, qui risqueraient de saper la crédibilité de l’OIAC et de rompre sa coopération avec la Syrie. 

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a jugé impératif que toutes les parties, y compris le Conseil de sécurité, se montrent cordiales et prévenantes les unes avec les autres dans l’examen de ce dossier particulier des armes chimiques.  « Des étapes concrètes, fondées sur un engagement constructif, sont nécessaires si nous voulons progresser », a-t-il dit.  Par ailleurs, sa délégation prend note des activités en cours de la Mission d’établissement des faits concernant divers incidents et attend avec intérêt de recevoir son rapport et a noté que l’Équipe d’enquête et d’identification poursuit ses investigations.  L’Indonésie a tenu à souligner à nouveau qu’il est essentiel que toutes les enquêtes soient menées de manière globale, impartiale et concluante, sur la base de sources vérifiées et crédibles.  Nous apprécions que le Secrétariat de l’OIAC poursuive ses activités mandatées liées au programme syrien d’armes chimiques, malgré l’impact de la pandémie de COVID-19.  Il est donc plus important que jamais d’assurer la sûreté et la sécurité du personnel sur le terrain. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a réaffirmé son engagement en faveur de l’élimination totale et définitive des armes chimiques dans le monde, armes qui constituent une violation flagrante du droit international, notamment du droit international humanitaire, ainsi qu’une menace pour la paix et la sécurité internationales.  Le représentant a tout autant appuyé l’OIAC et dit la confiance qu’il place dans son travail objectif, réalisé par son équipe de professionnels dans leur lourde tâche de reléguer aux oubliettes l’utilisation des armes chimiques par le biais d’activités diverses de supervision et de surveillance intégrale.  Il a également soutenu les efforts de l’OIAC pour identifier les auteurs d’attaques aux agents chimiques toxiques et leur faire rendre des comptes et ce, grâce à l’Équipe d’enquête et d’identification. 

M. Singer Weisinger a jugé vitale la collaboration de la République arabe syrienne avec l’OIAC afin de répondre à toutes les questions relatives à l’élimination totale des armes chimiques qui se trouvent sur le territoire syrien et en prévenir l’utilisation.  Il s’est réjoui que les autorités syriennes aient fourni des informations relatives à 8 des 22 questions en suspens, notamment deux amendements à la déclaration initiale.  Il a espéré, à cet égard que de telles informations puissent contribuer, de façon significative, à combler les lacunes de la déclaration et que l’échange d’information entre les autorités syriennes et l’OIAC se poursuivent et s’améliorent. 

M. MARTHINUS VAN SHALKWYK (Afrique du Sud) a rappelé la position de son pays, à savoir, qu’il reste opposé à l’utilisation des armes chimiques par qui que ce soit et pour quelle que raison que ce soit.  Dans la même idée, en tant que partie à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, l’Afrique du Sud est opposée à toute ingérence et politisation du travail et des enquêtes de l’OAIC.  Elle estime aussi que toute mise en cause d’un État en matière d’utilisation d’armes chimiques doit se faire sur la base de preuves irréfutables. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a dit s’être opposée à la présentation d’un exposé de M. Bustani, « car nous pensons en effet qu’il n’a pas l’expérience pertinente du sujet à notre agenda, comme expliqué avant le vote, dans une intervention commune ».  « Un exposé du responsable actuel de l’OIAC aurait été plus pertinent », a-t-elle ajouté.  

Pour la représentante, le Conseil doit se concentrer sur le nœud du problème, à savoir la réticence de la Syrie à assumer des obligations qu’elle a pourtant acceptées, de manière volontaire, en adhérant à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques.  Le fait que certains membres aient refusé d’assister au briefing du dirigeant actuel de l’OIAC est parlant, a-t-elle estimé. La représentante a ensuite condamné toute utilisation d’armes chimiques « n’importe où, par n’importe qui, pour n’importe quelle raison ».  « L’utilisation d’armes chimiques est tout simplement inacceptable.  C’est une violation du droit international », a-t-elle déclaré, attirant l’attention sur le fait que le Conseil devait agir conformément à ses déclarations et renouveler les efforts engagés pour que la Syrie respecte ses obligations en tant qu’État partie à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques.  

M. BEN LAGHA (Tunisie) a réitéré sa condamnation de l’utilisation des armes chimiques, par qui que ce soit pour quelle que raison que ce soit, avant d’exhorter la Syrie a pleinement coopéré avec l’OIAC et à se conformer à ses obligations internationales.  Pour autant, il faut que les enquêtes de cet organisme soient indépendantes et impartiales, a-t-il observé.  Ces investigations doivent également faire preuve de « prudence », compte tenu du fait qu’il existe des preuves que le groupe État islamique s’est servi d’armes chimiques en Iraq, a ajouté le représentant.  

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a salué Mme Nakamitsu pour son exposé, estimant qu’il démontrait, « s’il en était encore besoin, que le régime syrien continue de se soustraire à ses obligations internationales ».  

Le représentant a tenu à souligner que le dossier chimique syrien n’est pas clos, qu’il demeurera une priorité pour la France tant que toute la lumière n’aura pas été faite sur les allégations d’emploi d’armes chimiques et sur l’état des stocks syriens.  « Il en va de la sécurité des populations civiles », a-t-il ajouté.   

Pour M. De Rivière, l’utilisation répétée d’armes chimiques par le régime contre son propre peuple est un fait « incontestable », confirmé à plusieurs reprises par les équipes de l’OIAC et des Nations Unies.  Encore tout récemment, le 8 avril 2020, a-t-il poursuivi l’Équipe d’enquête et d’identification de l’OIAC a publié, au terme d’une investigation rigoureuse, un rapport accablant sur les attaques menées à l’arme chimique par les unités de l’armée de l’air du régime.   

Revenant sur l’engagement pris en 2013 par le régime syrien à coopérer en toute transparence et de bonne foi avec I’OIAC, M. de Rivière a jugé que, le moins que l’on puisse dire est qu’il n’a pas tenu parole.  Six ans après la résolution 2118, nous n’avons toujours pas de certitudes sur l’état des stocks chimiques syriens, a-t-il déploré, considérant qu’il était grand temps de garantir l’autorisation de l’accès au territoire syrien aux experts de l’Équipe d’enquête.   

Je pose deux questions simples, a ensuite lancé le représentant: le régime prétend qu’il n’a rien à cacher, alors pourquoi ne coopère-t-il pas avec l’OIAC ? Le régime prétend avoir détruit ses stocks en 2014, alors d’où viennent les armes chimiques qui ont été utilisées en Syrie depuis?  

M. de Rivière a déclaré avoir assisté la semaine dernière à une réunion en format Arria qui, a-t-il dit, avait pour seul objectif de continuer à propager la désinformation et à fragiliser I’OIAC.  « Il est indigne, je le dis avec force, de chercher à discréditer cette organisation professionnelle et rigoureuse sous prétexte que ses conclusions ne concordent pas avec la version que la Syrie et certains membres du Conseil de sécurité veulent faire croire.

L’emploi d’armes chimiques est un crime qui menace l’humanité tout entière et la réémergence des armes chimiques figure parmi les plus graves menaces que nous ayons à traiter, a poursuivi le représentant, et le Conseil l’a rappelé dans des termes clairs en novembre 2019.  L’emploi d’armes chimiques en tout lieu, à tout moment, par quiconque, en quelque circonstance que ce soit, est inacceptable et représente une menace pour la paix et la sécurité internationales. 

C’est pourquoi il ne peut y avoir aucune impunité.  Et c’est pourquoi la France porte depuis 2018, avec 39 autres pays et l’Union européenne, le partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques. Restaurer la crédibilité du régime d’interdiction c’est aussi l’une des conditions d’une paix juste et durable en Syrie sur la base de la résolution 2254, a encore déclaré M. de Rivière. 

Enfin, le représentant de la France a dit vivement regretter que le Président du Conseil de sécurité ait décidé d’ignorer un vote démocratique du Conseil.  « Le fait que le résultat de ce vote vous ait déplu ne vous autorisait pas à abuser de votre fonction de Président », a-t-il déclaré.  Quant à M. Bustani qui a été présenté aux membres du Conseil comme un expert « fiable et indépendant », la France a dit ne pas être sûre que la présidence russe lui ait rendu un grand service, à lui et à sa crédibilité, en lui servant de porte-voix.  « Les masques sont tombés, et je crois qu’il s’est invité à rejoindre la petite cohorte des briefers de vos Arrias régulières », a conclu M. de Rivière. 

M. GERT AUVÄÄRT (Estonie) a regretté d’emblée « qu’un débat sérieux ait été détourné par la présidence du Conseil aujourd’hui », regrettant de constater qu’après six ans on ne soit toujours pas en mesure de dire avec certitude que la Syrie a bel et bien déclaré et détruit toutes ses armes chimiques et leurs sites.  Nous ne savons pas non plus si de nouvelles attaques auront lieu, a poursuivi le représentant affirmant qu’il y avait de fortes chances que cela se produise.  Le mécanisme de la Mission conjointe OIAC-ONU ainsi que les missions d’établissement des faits de l’OIAC ont, à ce jour, confirmé à sept reprises le recours aux armes chimiques par le régime d’Assad contre son propre peuple, a rappelé le représentant.  Par conséquent, le non-respect de ses obligations internationales par le régime syrien représente une menace bien réelle, a-t-il tranché, à la fois pour les Syriens et pour la paix et la sécurité internationales.  Dès lors, le Conseil de sécurité a la responsabilité d’agir et de réagir, a exigé le représentant estonien.  Il a regretté que les autorités syriennes n’aient toujours pas donné suite à la date butoir fixée par la décision en date du 9 juillet du Conseil exécutif de l’OIAC pour qu’elles respectent leurs obligations internationales.  L’Estonie a exhorté le régime syrien à respecter ce délai. 

La délégation a ensuite dénoncé la campagne de désinformation systématique et ciblée qui, selon elle, vise à discréditer et saper le travail du Secrétariat technique de l’OIAC et de ses mécanismes d’enquête.  Avant de conclure, le représentant estonien a pointé du doigt la Fédération de Russie pour avoir cherché à « détourner » l’attention et la responsabilité du problème du programmes des armes chimiques de la Syrie, voire d’avoir déformé la réalité au lieu d’essayer d’avancer par des mesures de confiance et de mettre fin à l’impunité.  À qui profite cette campagne de désinformation? a-t-il demandé, en accusant ceux qui veulent dissimuler l’utilisation de ces armes et cherchent à empêcher la reddition de comptes.  

L’Estonie a également demandé aux autorités syriennes de respecter leurs obligations internationales et a appelé la Russie à divulguer les circonstances de l’empoisonnement de l’agent Navalny.  Le Président du Conseil de sécurité a tenu à répondre au représentant de la France qui l’avait accusé d’avoir abusé de son pouvoir en début de séance.  Il a réfuté cette accusation et a estimé qu’aujourd’hui le Conseil s’est couvert de honte en votant sur la présence ou non d’un intervenant à l’une de ses séances. 

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a dit sa confiance dans la bonne gestion de la présidence russe et le respect des dispositions de la Charte des Nations Unies.  « Nous n’avons rien à cacher ni à craindre », a-t-il déclaré, invitant à fournir à l’opinion publique la possibilité d’être informée loin de toute médiatisation de la situation sur son territoire.  Il a estimé que la séance d’information du 28 septembre avait été l’occasion d’entendre des experts chevronnés comme M. Henderson, Theodor Postol (MIT) et Aaron Mate, journaliste émérite.  Leurs exposés et informations fiables ont montré le degré de politisation de l’OIAC par certains gouvernements.  

Les représentants de certains gouvernements occidentaux n’ont pas voulu entendre certaines vérités car ils appuient des organisations terroristes, a dénoncé l’ambassadeur syrien, qui a ensuite renvoyé au rapport final de Mme Sigrid Kaad, lequel avait mis l’accent sur la coopération totale et le respect par la Syrie de tous ses engagements.  « D’où viennent les armes chimiques utilisées en Syrie », a-t-il demandé à la cantonade?  Le représentant a renvoyé à plus de 200 lettres adressées par son gouvernement détaillant l’acheminement des produits et armes chimiques sur son territoire.  Il a regretté que certaines délégations occidentales aient recouru à des termes très virulents, pourtant respectés, pour occulter la vérité.  Rappelant que l’OIAC avait reçu le prix Nobel de la paix en 2013 pour avoir aidé la Syrie à se débarrasser de ses armes chimiques, il a aussi déploré la situation actuelle qui prévaut au sein de cette Organisation. 

Il a invité les membres de l’OIAC à s’ériger contre la politisation de l’Organisation et à son Directeur général « de rectifier le tir  ».  M. Ja’afari a résumé la récente coopération syrienne avec l’OAIC présentée dans le rapport.  Les administrations américaines et leurs alliés de l’OTAN ne mentionnent nullement l’arsenal chimique ou l’arme nucléaire d’Israël, s’est-il étonné au passage. Fustigeant le mensonge qui prévaut, le représentant a préféré s’abstenir de commenter les déclarations de certains membres du Conseil dont les pays sont ceux-là mêmes qui utilisent les armes chimiques, imposent des sanctions unilatérales coercitives, exploitent les mouvements islamistes qui détruisent l’Iraq et la Lybie, et recourent à l’occupation et au blocus économique.  Le Conseil de sécurité a organisé 84 séances officielles sur la situation en Syrie, sans parler des séances à huis clos, a-t-il conclu en invitant à clore ce dossier.  

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie) a regretté que le dossier chimique syrien soit depuis bien trop longtemps devant le Conseil de sécurité et a estimé qu’il était grand temps que le Conseil assure la reddition des compte pour les crimes commis par le régime syrien contre sa population.  Depuis l’attaque de la Ghouta, cela n’a pas été fait par le Conseil de sécurité, ce qui est dangereux, a estimé le représentant, car cela pourrait encourager le régime syrien à poursuivre sur cette voie. 

La Turquie attend avec impatience les conclusions des enquêtes de la Mission d’établissement des faits de l’OIAC, et le représentant en a profité pour dire que son pays lui faisait entièrement confiance.  Les travaux de l’OIAC et de ses équipes doivent être appuyés plutôt qu’entravés, a exigé le représentant, et ceux qui sont responsables de l’utilisation d’armes chimiques doivent être traduits en justice à défaut d’encourager l’impunité. 

La Turquie appuie pleinement les efforts consentis par le mécanisme d’enquête conjoint, affirmant qu’il est impératif d’identifier et de traduire en justice ceux qui utilisent les armes chimiques, et en particulier le régime syrien pour les attaques à el Tamena.  Elle encourage en outre la poursuite de la coopération technique entre l’OIAC et le mécanisme IIIM.  En juillet dernier, le Conseil exécutif de l’OIAC a pris une décision permettant aux autorités syriennes de sortir de l’impasse actuelle en leur donnant une date butoir pour déclarer toutes leurs armes chimiques, a rappelé le représentant, qui a constaté qu’à ce jour la Syrie n’avait pas répondu.  

Dès lors, M. Sinirlioğlu a demandé que les normes interdisant l’utilisation de ce type d’armes soient collectivement renforcées.  Pour la Turquie, le Conseil de sécurité ne peut se permettre de rester « les bras croisés » devant de telles tragédies, au risque de voir le régime syrien en provoquer de nouvelles. 

M. MAJID TAKHT RAVANCHI (République islamique d’Iran) a rappelé que son pays, « victime majeure des armes chimiques », en condamnait sans ambiguïté l’utilisation.  En même temps, l’Iran plaide pour une mise en œuvre complète, équilibrée et non discriminatoire de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques (CIAC) et pour un renforcement de l’autorité de l’OIAC.  

Or, pour l’Iran, depuis plusieurs années et sur la base d’allégations non étayées, on a abusé des procédures de la Convention, de l’OIAC et du Conseil de sécurité aux dépens de la Syrie.  « Le fait est qu’en 2014, la Chef de la Mission conjointe pour l’élimination des armes chimiques en Syrie a confirmé dans son rapport final au Conseil de sécurité l’élimination de toutes ces armes », a fait observer M. Ravanji.  De même, a-t-il ajouté, l’an dernier, l’OIAC elle-même a confirmé la destruction par la Syrie de ses armes chimiques et de l’ensemble des 27 unités de production.  Or, a poursuivi le représentant, aujourd’hui l’importante coopération du Gouvernement syrien avec l’OIAC et les Nations Unies est négligée.  

Cette politique n’a pas permis de résoudre les questions en suspens, elle a au contraire divisé le Conseil, nui à la crédibilité de l’OIAC et au professionnalisme de son travail, a accusé M. Ravanji.  Pour le représentant, elle a également nui à la vocation de l’OIAC, qui est de veiller à l’élimination totale de toutes les armes chimiques, élimination qui reste à réaliser du fait du non-respect de ses engagements par le premier possesseur de telles armes parmi les États parties, à savoir les États-Unis.  La tendance actuelle au sein tant du Conseil de sécurité et de l’OIAC, qui est le fait exclusif d’intentions politisées, doit cesser, a tranché le représentant, en ajoutant que l’Iran était disposé à apporter sa contribution en ce sens. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Deuxième Commission: la menace d’une crise de la dette plane sur des économies affaiblies par la COVID-19 

Soixante-quinzième session,
2e séance – matin
AG/EF/3531

Deuxième Commission: la menace d’une crise de la dette plane sur des économies affaiblies par la COVID-19 

Une pandémie entraînant un « maëlstrom » de crises, « mettant à nu » les vulnérabilités. Cette formule a été prononcée en ce premier jour de débat général de la Deuxième Commission de l’Assemblée générale, chargée des questions économiques et financières, par le représentant de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Elle ne résume que trop bien les difficultés économiques et sociales auxquelles les États Membres se disent aujourd’hui confrontés. 

Une session « en tout point inédite », a prévenu son Président Amrit Bahadur Rai en préambule.  Par sa forme –virtuelle en grande partie– et par le fond.  Si le débat général de la Deuxième Commission se tient en présentiel, avec des représentants d’États Membres répartis sur trois salles de conférence reliées par écrans, les différents points de son ordre du jour seront discutés en séances virtuelles informelles. 

De plus, la COVID-19, qui compromet gravement la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, va influencer tous les thèmes habituellement débattus par la Commission.  Celle-ci va tenter de mettre en exergue différentes ripostes politiques, a annoncé M. Rai en détaillant les grands axes de travail, citant l’élimination de la pauvreté, la sécurité alimentaire et la nutrition, le financement du développement et de la dette, ou encore l’environnement. 

Parmi ces défis, le problème de la dette a été exposé de manière saillante.  Cette dette entravait déjà le développement et l’adaptation aux changements climatiques des pays en situation particulières; elle compromet maintenant leur adaptation sanitaire à la COVID-19, aujourd’hui priorité absolue.  La dette fut l’objet principal de l’exposé prononcé par le professeur de Columbia University et Prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, en point d’orgue de cette première journée.  L’économiste a dressé un tableau post-COVID très sombre, la pandémie ayant « dévasté l’économie mondiale comme jamais depuis probablement un siècle ».  Les pays en développement, extrêmement endettés sont en grande souffrance : « Certains débiteurs ont été invités à s’endetter par leurs créanciers et sont aujourd’hui dans une situation très difficile.  Des créanciers qui n’auraient pas bien évalué les risques, tels qu’une chute des cours des matières premières, selon l’économiste, qui prévient que le monde fait face à un risque « très palpable » d’une autre crise de la dette. 

Il a ici été rejoint par Liu Zhenmin, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, pour qui le fléau pourrait mener 70 millions de personnes à la pauvreté extrême et provoquer la malnutrition de 132 millions d’humains.  « Nous devons tout faire pour éviter une crise de la dette dans les pays en développement », a-t-il insisté.  Toutefois, si M. Liu semblait favorable à une « suppression » de la dette, M. Stiglitz est resté sceptique face à cette idée, s’en tenant à un objectif de « restructuration », absolument indispensable selon lui: à moins de « restructurer la dette », le monde en développement, les créanciers et les débiteurs « vont beaucoup souffrir  », a prévenu le lauréat du Prix Nobel. 

Le Groupe des 77 et la Chine (G77) a témoigné que les défis aigus de développement avaient été aggravés par la pandémie.  Les pays les moins avancés (PMA) ont résumé leurs vulnérabilités économiques: rentrées fiscales insuffisantes, dette non soutenable et troubles sociaux découlant des suppressions d’emplois.  Des PMA qui ont salué les mesures d’allègement de la dette décidées par le Fonds monétaire international (FMI) à leur égard, en n’y voyant néanmoins qu’un « répit insuffisant ».  Frappés par la pandémie, les pays en situation particulière ont trop d’obstacles sur leurs routes, a conclu l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) décrivant un système actuel « archaïque » réduisant les pays en développement à « la servitude ».  L’AOSIS a dès lors appelé à une reformulation du système financier des pays en développement. 

Même les prospères pays du Nord ont semblé craindre une possible crise de la dette les concernant.  À une question inquiète de Monaco à ce sujet, le Professeur Stiglitz a répondu que les États-Unis et l’Union européenne ont des capacités « gigantesques » notamment pour lever des fonds, sans encourir un risque d’inflation.  Il a aussi pointé du doigt les capacités d’imposition sous-utilisées, telles que les taxes-carbone. 

Outre une restructuration de la dette, quelle réponse aux problèmes économiques décuplés par la pandémie?  L’économie verte, formule prometteuse, a été fréquemment avancée par les délégations.  Le G77 a appelé à ne pas baisser la garde dans la lutte contre les changements climatiques, en demandant un soutien accru des efforts en ce sens des pays les plus vulnérables, tout comme les pays en développement sans littoral, qui ont mis l’accent sur la lutte contre la désertification.  M. Liu abondé dans ce sens : des mesures de stimulation seront, à ses yeux, plus efficaces si elles donnent la priorité à des investissements publics dans l’économie verte ainsi que dans l’éducation et l’amélioration des compétences des travailleurs.   Il y a vu le moyen de rebâtir une économie mondiale « plus inclusive, plus résiliente et plus durable du point de vue de l’environnement ». 

Une autre piste a été avancée: « le seul moyen de faire face est de renforcer la coopération internationale » selon le Groupe de pays de même sensibilité pour la promotion des pays à revenu intermédiaire, rejoint par le G77.  Selon lui néanmoins, la coopération Nord-Sud doit demeurer le principal canal de coopération, tandis que la coopération Sud-Sud doit venir la compléter en s’appuyant sur les principes de respect de la souveraineté, de l’indépendance et de la non-ingérence.  L’Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) a donné l’exemple de la coopération entre ses pays membres pour créer des « filets de sécurité sociaux ».  

Rejoint par le G77, M. Liu s’est, enfin, félicité des objectifs qui seront élaborés au travers de l’Examen Quadriennal Complet des activités opérationnelles du système des Nations Unies pour le développement, dont les pays en développement sans littoral attendent beaucoup.  

La prochaine réunion publique de la Deuxième Commission aura lieu demain, mardi 6 octobre, à 15 heures. 

Discours liminaires

M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal), Président de la Deuxième Commission, a remarqué en ouverture de séance que la Soixante-quinzième session serait « en tout point inédite », et que la pandémie se ressentirait dans les travaux sur le fond et sur la forme.  Il a appelé à être « pragmatique » et « réaliste », pour que la Deuxième Commission s’acquitte de ses mandats.  Il a aussi invité à ne pas oublier de prendre en compte la COVID-19 tout en gardant à l’esprit les objectifs fixés l’an dernier.  Les débats généraux seront importants dans ce contexte, selon lui.  Dans des circonstances difficiles, « nous devrons tous nous efforcer de faire en sorte que les questions importantes dans l’agenda international soient traitées ».  

 La Deuxième Commission va mettre en exergue différentes ripostes politiques à la pandémie, a-t-il annoncé, en détaillant les grands axes.  D’abord l’élimination de la pauvreté et le traitement des conséquences importantes de la pandémie sur cet objectif, ainsi que la pauvreté rurale et l’accélération des actions mises en œuvre dans le cadre de la Décennie de l’élimination de la pauvreté.  Puis, la sécurité alimentaire et la nutrition seront au cœur du deuxième grand axe. 

En troisième lieu seront traitées les énormes conséquences de la pandémie sur le versant macroéconomique, particulièrement le financement du développement et la dette.  La Commission discutera également de la situation des groupes de pays en situation particulière comme les petits États insulaires en développement (PEID) et les pays en développement sans littoral, et se penchera sur carences de la mise en œuvre des Orientations de Samoa.  « Alors que les changements climatiques se jouent des frontières », l’environnement et l’énergie seront deux autres grands axes de travail, au moment où les réponses face au réchauffement sont rendues plus compliquées par la COVID.  Le Président a indiqué à ce sujet que des manifestations parallèles concentrées sur les réponses aux catastrophes se tiendront en octobre.  

L’examen quadriennal, enfin, sera un autre axe important des travaux de la Deuxième Commission.  Celle-ci doit en effet guider les travaux des quatre prochaines années pour insuffler un nouvel élan aux efforts des Nations Unies dans la mise en œuvre du Programme des Nations Unies pour le développement durable à l’horizon 2030.  Ce sera aussi l’occasion de recommander des pratiques aux États Membres pour combattre la COVID, a appuyé le président Rai. 

Dans un contexte aussi difficile, « le monde entier attend énormément des Nations Unies cette année », a conclu le Président de la Deuxième Commission.  

La Syrie a tenu à intervenir à ce stade de la réunion pour exprimer son mécontentement quant aux restrictions de déplacement visant certains délégués, qui sont imposées par le pays hôte des Nations Unies, ainsi que les expulsions.  « Les États-Unis abusent de leur statut d’État hôte », a dit la Syrie en citant les refus de visas, notamment pour 18 délégués, « en violation du droit international ».  Les pays doivent être traités sur un pied d’égalité, a exigé la Syrie, qui a dénoncé l’absence de dialogue avec le pays hôte.  Elle a exhorté le Secrétaire général à y remédier. 

Intervenant pour une déclaration liminaire suivie d’un débat interactif avec les délégations, M. JOSEPH STIGLITZ, des États-Unis, professeur à Columbia University et Prix Nobel d’économie, a expliqué que la pandémie de COVID-19 avait « dévasté l'économie mondiale comme jamais depuis probablement un siècle ».  Le retour rapide à la normale comme on l’espérait au mois de mars est un vœu pieux, selon lui.  « Aujourd’hui, en octobre 2020, il est important de réaliser qu’il ne faut pas revenir à la situation économique initiale de janvier. »  La pandémie, a fait remarquer le professeur, a mis en relief les faiblesses de nos économies et montré que le secteur privé n’était pas prêt, avec notamment les problèmes de production de respirateurs et de masques.  À son avis, les gouvernements ont mal géré les risques, alors que d’autres virus comme Ebola ou les SRAS auraient dû les mettre sur leurs gardes.  « Nous savions à l’avance que notre époque serait caractérisée par des pandémies. » 

Les inégalités sont frappantes face à la maladie, même dans un pays riche tel que les États-Unis, a poursuivi M. Stiglitz en relevant que les disparités sont très fortes dans le domaine sanitaire.  « Nous avons vu que même des pays riches n’ont pas de système de protection sociale adéquat et des populations vivent au jour le jour pour payer leurs factures. »   Alors que les pays du monde ont mis en place le confinement, le manque de protection sociale a forcé les travailleurs à voyager dans le pays pour trouver du travail, propageant la maladie, a dénoncé le professeur.  

Pour lui, il faut utiliser les ressources limitées pour à la fois combattre la pandémie et bâtir l’avenir.  Mais ces ressources sont limitées, a-t-il de nouveau insisté.  M. Stiglitz a dégagé de ces faits plusieurs éléments-clefs.  D’abord, a-t-il dit, nous ne pourrons pas reconstruire sans prendre le dessus sur la maladie: contrôler la pandémie doit donc être « la première priorité », les dépenses devant aller en ce sens.  Ensuite, la coopération entre pays est indispensable pour développer des vaccins, des traitements et des tests.  Tout cela doit être mis à disposition du monde entier afin de contrôler la pandémie qui, plus elle durera plus elle endommagera les systèmes de santé et les systèmes économiques.  « Voilà pourquoi l’initiative du Costa Rica, sur le partage de la propriété intellectuelle de la recherche contre le virus, est si intéressante ».  À ce sujet, M. Stiglitz s’est dit extrêmement déçu par l’attitude négative de certaines entreprises et États en réponse à cette proposition.  

Notant que certaines régions du monde contrôlent le virus bien mieux que d’autres, il a relevé que les caractéristiques du succès sont de « respecter la science et de faire confiance à ses concitoyens et à son gouvernement ».  Dans les pays qui échouent, c’est exactement le contraire qui se produit.  

 Les pays en développement souffrent et sont extrêmement endettés, a-t-il aussi déploré.  « Certains débiteurs ont été invités à s’endetter par leurs créanciers et sont aujourd’hui dans une situation très difficile.  « Les créanciers n’ont pas bien évalué les risques, tels qu’une chute des cours des matières premières, et « nous sommes face à un risque très palpable d’une autre crise de la dette », a prévenu le professeur.  Une grande partie des créanciers proviennent du secteur privé, ce qu’il a invité à prendre en compte.  Beaucoup de pays ne pourront pas rembourser, il leur faudra une restructuration davantage qu’un simple moratoire qui ne permettra pas de résoudre les conséquences dévastatrices de la pandémie en rapport à la dette. 

L’Assemblée générale avait déjà failli adopter en 2015 un cadre mais une poignée de pays s’y était opposée, dont d’importants pays créanciers, a regretté M. Stiglitz.  Nous nous retrouvons donc sans cadre de restructuration de la dette souveraine.  Il n’y a pas de cadre juridique adéquat, a-t-il regretté.  

« Donc que faire? Il n’y a pas de réponse évidente sur le long terme. »  Un arrangement institutionnel doit être trouvé par les Nations Unies, selon le professeur qui a prévenu que d’autres crises adviendront.  « Soyons-en sûrs. »  M. Stiglitz a préconisé une stratégie à plusieurs volets, un cadre, afin de forcer le secteur privé à coopérer.  « On ne peut pas faire l’impossible.  À moins de restructurer, le monde en développement va souffrir énormément, et l’Histoire nous apprend qu’il y aura trop peu de restructuration et trop tard.  « Les créanciers et les débiteurs vont beaucoup souffrir, a-t-il prévenu. »

« Des pays comme les États-Unis ont des réserves immenses, leur banque centrale possède des milliards et des milliards de dollars de réserves.  Les pays en développement n’en ont pas. Les 500 milliards de droits de tirage spéciaux (DTS) pourraient faire la différence », a reconnu M. Stiglitz, tout en concédant qu’en fait, il faudrait encore bien davantage.  Voilà la magnitude de l’aide nécessaire, a conclu l’économiste. 

Débat interactif

À une question du Malawi sur l’opposition de certains pays à la création d’un cadre de restructuration de la dette, le Professeur Stiglitz a indiqué que certains pays créanciers, en position de force, préfèrent le maintien de la « loi de la jungle ».  Il y a aussi des conflits entre catégories de créanciers qui empêchent un tel mécanisme, a-t-il ajouté.  Il a indiqué n’avoir jamais cru à ces clauses d’action collective au niveau international, notamment, car ces clauses fonctionnent déjà difficilement au niveau national.  Les deux pays qui ont voté contre les DTS étaient les États-Unis et l’Inde, a-t-il dit, en confiant sa « sidération » devant un tel refus.  Des émissions de nouveaux DTS seraient pourtant salutaires, selon l’économiste.  Il a espéré qu’un éventuel changement du Gouvernement américain en janvier aboutira à de nouveaux DTS.

À une question de Monaco, qui s’interrogeait sur la possibilité d’une crise de la dette dans les pays du Nord, le Professeur Stiglitz a répondu que les États-Unis et l’Union européenne ont des capacités « gigantesques » notamment pour lever des fonds, sans encourir un risque d’inflation.  Il a aussi pointé des capacités d’imposition sous-utilisées, telles que les taxes-carbone.

Le Professeur Stiglitz a déclaré, en réponse au Nigéria, que les ressources qui existaient en 2008 pour un relèvement économique rapide n’existent plus aujourd’hui.  La croissance de la Chine, qui avait été fulgurante après la crise de 2008 entraînant une « résurrection » de l’économie mondiale, sera bien plus faible cette année, même si elle devrait être positive.  La Chine ne pourra plus jouer le même rôle qu’en 2008, et les pays développés doivent prendre le relais, a-t-il conseillé.  Il a également demandé la création d’un cadre plus juste d’imposition des sociétés internationales.  Celles-ci doivent payer une imposition juste, a-t-il dit, en notant le faible taux d’imposition qui les frappe.  Il a regretté à cet égard que peu ait été fait s’agissant de la question des paradis fiscaux aux États-Unis et au Royaume-Uni.

Au Sénégal, qui l’interrogeait sur un éventuel effacement de la dette pour éviter des « créanciers qui s’enrichissent et des débiteurs à bout de souffle », le Professeur Stiglitz a indiqué qu’un tel effacement n’était guère probable.  Il a jugé impérative la coopération mondiale face à la pandémie, alors que l’Iran dénonçait les effets délétères des sanctions unilatérales prises contre certains pays.  Il a ensuite noté que les envois de fonds des travailleurs étrangers, dont l’importance a été pointée par le Bangladesh, ont été touchés de plein fouet par la pandémie.  Les frais d’envois de ces fonds sont très élevés et s’apparentent à une véritable exploitation, d’autant que les envois sont à un niveau très bas en raison de la crise, a déclaré M. Stiglitz.  « C’est une autre défaillance du système international, à laquelle il convient de remédier. »

Proposition de décision orale

Le Président de la Deuxième Commission a proposé une décision orale selon laquelle, compte tenu des circonstances actuelles, toutes les déclarations prononcées au cours du débat général de la soixante-quinzième session seraient consignées dans les comptes-rendus de la Commission.

M. EVGENY Y. VARGANOV (Fédération de Russie) a indiqué ne pas pouvoir soutenir cette décision orale qui serait, selon elle, en contradiction avec le règlement intérieur de l’Assemblée générale.  Elle a proposé un amendement à ce projet de décision orale, prévoyant que le Président distribue une compilation des déclarations prononcées sous forme préenregistrée.

M. FERNANDO DE LA MORA SALCEDO (Mexique) a soutenu le projet de décision orale, le jugeant tout à fait conforme au règlement intérieur de l’Assemblée.  S’agissant de la proposition russe, il a dit ne pas comprendre « pourquoi la Commission ferait une différence entre les délégations » qui choisissent de faire une déclaration préenregistrée et les autres.  Pour le Mexique, toutes les délégations doivent être traitées de la même façon.

Le Président de la Deuxième Commission a déclaré qu’il consulterait le Bureau et le Secrétariat à ce sujet.

Intervention du Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales

M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a déploré les effets néfastes de la pandémie, rappelant que la maladie et les mesures prises pour la combattre ont débordé les services de santé au niveau mondial, exclu des écoles 90% des enfants de la planète, ou encore perturbé la chaîne de valeur mondiale.  Il a rappelé que le fléau pourrait mener 70 millions de personnes à la pauvreté extrême et provoquer la malnutrition de 132 millions d’humains.  

Dans un monde confronté à sa plus profonde récession depuis les années 30, a-t-il déclaré, « il importe de s’interroger sur le meilleur moyen de rebâtir une économie mondiale plus inclusive, plus résiliente et plus durable du point de vue de l’environnement ».  Pour cela, a-t-il préconisé, il est prioritaire de déployer les ressources nécessaires à la réduction de la pauvreté et des inégalités, en comblant les écarts criants dans les garanties de protection sociale et de sécurité de l’emploi.   En second lieu, des mesures de stimulation seront, à ses yeux, plus efficaces si elles comprennent en priorité des investissements publics dans l’économie verte, les remèdes aux changements climatiques, ainsi que dans l’éducation et l’amélioration des compétences des travailleurs, permettant d’atteindre les objectifs de développement durable. 

Ensuite, a noté le Secrétaire général adjoint, « nous devons tout faire pour éviter une crise de la dette dans les pays en développement ».  Il a estimé que l’initiative de suspension du service de la dette offerte par le G20 « ne sera pas suffisante et exige en renfort une suppression de la dette et sa restructuration pour en réduire réellement le fardeau ».  Enfin, il convient de mobiliser une réponse globale à la pandémie en encourageant le secteur privé à prendre en compte les objectifs de développement durable dans leurs stratégies d’entreprise.  Quant à la coopération internationale pour le développement, elle doit selon lui être encouragée et les promesses doivent être tenues à cet égard. 

En conclusion, M. Liu s’est félicité des objectifs qui seront élaborés dans les prochaines semaines pour renforcer le soutien du système de développement des Nations Unies aux pays les plus pauvres, au travers de l’examen quadriennal complet des activités opérationnelles du système des Nations Unies pour le développement. 

Débat général

M. NEIL ORIN PIERRE (Guyana), au nom du Groupe des 77 et la Chine (G/77), a souhaité que les dispositions prises lors de cette session ne créent pas de précédent.  Les défis aigus de développement auxquels nous faisons face ont été aggravés par la pandémie, a dit la mission, en exhortant la Commission à se consacrer aux moyens d’éradiquer la pauvreté.  Le G77 a appelé à remédier aux « effets en cascade » de la pandémie sans baisser la garde dans la lutte contre les changements climatiques, en demandant un soutien accru aux pays qui sont les plus vulnérables face aux changements climatiques.  Il a aussi réitéré que le commerce international est un moteur pour parvenir à une croissance économique inclusive et à l’élimination de la pauvreté. 

Le G77 a estimé que la coopération internationale est cruciale pour la relance de l’économie mondiale, avant de noter l’importance de l’Aide publique au développement (APD) pour aider les pays en développement à réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Les pays donateurs doivent honorer leurs engagements au titre de l’APD, a-t-il exigé.  Le G77 a par ailleurs déclaré que la coopération Sud-Sud vient compléter, sans la remplacer, la coopération Nord-Sud.  La coopération Nord-Sud doit demeurer le principal canal de coopération, tandis que la coopération Sud-Sud doit être guidée par les principes de respect de la souveraineté, d’indépendance et de non-ingérence.  Le G77 a aussi dit attacher de l’importance à la résolution concernant l’Examen quadriennal complet qui sera négociée au cours de la session.  Enfin, la délégation a indiqué que son Groupe s’engagera de manière constructive dans le processus conduisant au Sommet de l’ONU sur les systèmes alimentaires en 2021, qui constitue une occasion unique sur la voie de la réalisation du Programme 2030.

M. ENRIQUE AUSTRIA MANALO (Philippines), au nom du Groupe de pays de même sensibilité pour la promotion des pays à revenu intermédiaire, a reconnu des progrès en matière de renforcement du système des Nations Unies pour le développement, tout en soulignant que la pandémie de COVID-19 est un choc continuant d’hypothéquer les conditions de vie de tous, ainsi que les efforts pour parvenir au développement durable.  Des études empiriques sur les effets de la pandémie sur les pays à revenu intermédiaire nous apprennent qu’on ne peut pas prendre les indicateurs de revenus par habitant comme seuls facteurs de catégorisation, a dit le Groupe.  Il s’est inquiété de la perte de près de 500 millions d’emplois à laquelle on s’attend du fait de la forte récession de 2020.  De plus, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) s’attend à ce que les répercussions en termes d’insécurité alimentaire soient très fortes dans les pays à revenu intermédiaire.  La COVID-19 a également mis en exergue les carences sanitaires dans ces pays, qui ont des défis particuliers. 

C’est notamment pour toutes ces raisons que le Groupe de pays de même sensibilité pour la promotion des pays à revenu intermédiaire a dit vouloir s’engager dans les travaux de la Deuxième Commission, souhaitant que le système onusien prenne en compte les besoins particuliers de ces pays.  Faute de cela, les Nations Unies feraient preuve de myopie, puisque les pays à revenu intermédiaire -une centaine d’États Membres- représentent la moitié de la population mondiale.  Ils représentent aussi la majorité des exportations mondiales, a fait remarquer le Groupe.  « Le seul moyen de se relever est de renforcer la coopération internationale », a conclu la délégation. 

M. PERKS MASTER CLEMENCY LIGOYA (Malawi), au nom des pays les moins avancés PMA, a observé que la pandémie avait mis en exergue les vulnérabilités économiques et renforcé les risques existants pour les pays en développement, citant notamment des rentrées fiscales insuffisantes, une dette qui n’est pas soutenable et des troubles sociaux découlant des suppressions d’emplois.  En outre, l’action face aux changements climatiques est dans l’impasse, a relevé le Malawi.  Il a regretté la faible hausse de l’APD, alors que le Programme d’action d’Istanbul touche à sa fin.  « Nous sommes loin des objectifs fixés. »  Il a salué les mesures d’allègement de la dette décidées par le Fonds monétaire international (FMI) pour les 27 PMA, en n’y voyant néanmoins qu’un « répit insuffisant ».  Enfin, le Groupe a noté le déclin de la part des PMA dans les exportations mondiales, là encore loin de l’objectif de 2% fixé par le Programme d’action d’Istanbul. 

Mme LOIS MICHELE YOUNG (Belize), au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a rappelé que le mot d’ordre était, à l’origine, l’accélération de la Décennie d’Action pour le développement durable.  Mais il semble qu’avec la pandémie, la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) connaît des revers et que nous nous éloignons de plus en plus de idéaux des Nations Unies.  Devant sans cesse emprunter à cause des crises successives depuis plus de trente ans, les petits États insulaires en développement (PEID) demandent que des mesures concrètes soient prises pour les aider.  Certains PEID vont connaître une chute de leur croissance économique de plus de 20% cette année, a prévenu le Groupe en faisant aussi remarquer que la dépendance aux pays développés les expose aux chocs économiques et à un service de la dette élevé.

Tout cela, selon la délégation, rend difficile l’établissement d’un système sanitaire adéquat.  Des prêts ont été restructurés pour répondre aux besoins les plus urgents, mais tant que ces pays n’auront pas la marge de manœuvre nécessaire, les problèmes se multiplieront, a-t-elle prévenu.  Les changements climatiques accroissent la dette des AOSIS, a aussi fait valoir la délégation pour qui cette part de dette ne devrait pas être payée par les pays victimes des changements climatiques, qui ne sont que peu contributeurs d’émissions de gaz à effet de serre. 

 Le travail des Commissions est plus important que jamais, a ajouté l’AOSIS, qui s’est prononcé une fois encore contre l’imposition de mesures économiques coercitives contre des pays en développement.  Frappés par la pandémie, les pays en situation particulière ont trop d’obstacles sur leurs routes, a conclu l’AOSIS en appelant à une reformulation du système financier des pays en développement.  L’examen à mi-parcours des Orientations de SAMOA a montré que le système actuel est « archaïque », a dit la délégation, en le comparant à un système de « servitude » qui ne fonctionne pas.  

Mme SHEILA GWENETH CAREY (Bahamas), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a indiqué que les pays de la CARICOM sont au bord du désastre économique et font face à un « maelström » de crises découlant du choc de la pandémie, qui a mis à nu les vulnérabilités.  « Les gains en développement si durement engrangés dans la région pourraient disparaître. »  C’est pourquoi la délégation a insisté sur le besoin évident d’un appui accru des partenaires de développement de la CARICOM, y compris le système des Nations Unies pour le développement, avant de rappeler le processus de repositionnement de ce système entamé en 2016.  Les Bahamas ont salué les recommandations du Secrétaire général pour la mise à disposition de ressources durables et d’un appui adapté aux pays.

Les commissions régionales sont une branche importante de l’architecture de gouvernance dudit système, a dit la délégation, en saluant l’excellent travail de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC).  Il a plaidé pour que ces commissions continuent de répondre aux besoins spécifiques des pays.  La délégation a ensuite demandé un financement pérenne et prévisible pour les activités de développement et la concrétisation des engagements pris au titre de l’Aide publique au développement (APD).  Il a regretté que la classification de nombreux membres de la CARICOM en tant que pays à revenu intermédiaire les empêche de bénéficier d’une aide humanitaire, y compris pour faire face au virus.  Enfin, les Bahamas ont salué le renforcement de la coopération Sud-Sud qui vient compléter, sans la remplacer, la coopération Nord-Sud. 

M. NURZHAN RAKHMETOV (Kazakhstan), au nom des pays en développement sans littoral, a regretté que la COVID-19 ait anéanti les efforts de ces pays, notamment à cause de la chute du cours des matières premières.  L’examen à mi-parcours du Programme de Vienne pour les pays en développement sans littoral, l’an dernier, avait déjà montré des faiblesses au sein de ces pays, qui font déjà partie des groupes de pays les plus vulnérables, et dépendent des pays voisins pour exporter leur production.  Leur croissance devrait être négative cette année, a prévenu la délégation avant de dire que la COVID est une crise qui s’ajoute à d’autres, notamment les changements climatiques.  Plus de 520 millions de personnes sont en péril et, sans une aide adéquate, les pays en développement sans littoral pourraient devenir des laissés-pour-compte.  

 La délégation a appelé la communauté internationale, et particulièrement la Deuxième Commission, à soutenir les pays en développement sans littoral, qui ont besoin de tous les outils (APD, coopération Sud-Sud...) pour transformer leurs économies et reconstruire en mieux.  Une intégration dans les marchés mondiaux et d’importants investissements sont nécessaires pour faciliter le flux des biens en transit.  Les pays en développement sans littoral ont également besoin de davantage de soutien pour leur sécurité alimentaire face aux changements climatiques et en particulier la désertification, a ajouté le Groupe.  Enfin, soulignant que les pays en développement sans littoral dépendent largement des systèmes de soutien au développement des Nations Unies, il a espéré que l’examen quadriennal entraîne des réformes en leur faveur et la mise en œuvre accélérée du Programme de Vienne. 

Le représentant de l’Australie, au nom du Groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a indiqué que la pandémie a rendu plus lointaine encore la concrétisation du Programme 2030.  Elle a exhorté les délégations à ne pas « renégocier ce que le monde a déjà négocié » et rejeté toute renégociation des accords existants.  Elle a pointé le « relâchement » de la communauté internationale s’agissant de la réalisation du Programme 2030, alors que les efforts doivent être, au contraire, redoublés.  Le système multilatéral étant en crise, il convient de renforcer la confiance entre l’ONU et les pays bénéficiaires de son aide, y compris les PMA et les PEID, a ajouté la délégation.

Le groupe CANZ a regretté que les personnes LGBTI restent à l’écart des efforts de développement, ainsi que la lenteur des progrès en vue d’une égalité entre les genres.  Il a ensuite noté l’importance du Cadre de Sendai, premier document à consacrer cette notion de « reconstruction en mieux » qui est au cœur des efforts actuels de relèvement face à la pandémie.  Il a insisté sur l’importance de nouvelles approches sur des questions telles que la crise des liquidités, l’endettement ou bien encore la création d’emplois dans les PMA.  « Nous sommes déterminés à nous montrer à la hauteur des défis. » 

M. DINH QUY DANG (Viet Nam), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a réitéré les positions fortes de l’ASEAN concernant la volonté d’une « équité » dans l’accès au traitement contre la COVID-19.  Il a réclamé un « vaccin du multilatéralisme », autrement dit, un vaccin distribué sous la forme d’un « bien commun mondial ».  

Un Fonds COVID-19 a été créé par l’ASEAN, ainsi qu’un cadre de référence pour assurer la résilience de ses pays membres.  « La solidarité est indispensable », a-t-il ajouté, ainsi qu’une coopération entre pays pour créer des « filets de sécurité sociaux » et ainsi atténuer les mécontentements sociaux qui résulteraient des crises économiques à venir.  

« Durabilité » est le second mot d’ordre de l’ASEAN, qui a préconisé d’accélérer la trajectoire transformatrice du Programme de développement durable à l’horizon 2030, y compris par le renforcement des capacités et le transfert des technologies, des secteurs clefs pour les pays en développement. En matière d’environnement, l’ASEAN a pointé que davantage d’efforts devaient être faits.  À ce titre, l’ASEAN a réitéré son engament envers la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et l’Accord de Paris.  

M. FAKASOA TEALEI (Tuvalu), au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, a indiqué qu’un vaccin sera crucial pour la reprise d’une « vie normale » et un relèvement économique, souhaitant que tous les pays aient accès à un tel vaccin.  Tuvalu a demandé un appui aux systèmes de santé nationaux, afin notamment de lutter contre les maladies transmissibles et non transmissibles, ces dernières étant responsables de 70 à 75% des décès dans le Pacifique.  Si la pandémie est une « crise immédiate », les changements climatiques sont la plus grande menace pesant sur la sécurité et le bien-être des peuples du Pacifique, a déclaré Tuvalu.  Le virus a exacerbé la vulnérabilité de la région aux changements climatiques et souligné la nécessité d’être mieux préparé aux chocs, de baser les politiques publiques sur la science et de renforcer les efforts multilatéraux.  Tuvalu a déclaré qu’une action climatique résolue doit être la priorité de l’assistance au développement.

« Nous devons réduire l’endettement et les conséquences des changements climatiques autant que possible alors que nous reconstruisons les économies et protégeons les populations. »  La mission a demandé une pleine mise en œuvre des Orientations de Samoa, cette mise en œuvre ayant été différée par la pandémie.  Les partenariats, dotés de ressources prévisibles et pérennes, sont la pierre de touche d’une telle mise en œuvre.

Tuvalu a ensuite salué le renforcement des coordonnateurs régionaux du système des Nations Unies pour le développement, qui montre selon lui que les réformes onusiennes peuvent être efficaces.  Ainsi, pendant la pandémie, l’ONU par le biais de ses coordonnateurs a été en mesure d’apporter une aide immédiate aux pays de notre région pour atténuer ses effets, a déclaré la délégation.  Enfin, Tuvalu a souhaité que la vulnérabilité économique soit intégrée aux critères d’éligibilité à l’Aide publique au développement.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Cinquième Commission ouvre les travaux de sa session principale qui se tiendra en personne et virtuellement, compte tenu de la pandémie de COVID-19

Soixante-quinzième session
1re séance plénière – après-midi
AG/AB/4355

La Cinquième Commission ouvre les travaux de sa session principale qui se tiendra en personne et virtuellement, compte tenu de la pandémie de COVID-19

La Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires a entamé ses travaux, cet après-midi, avec en toile de fond l’examen du projet de budget-programme de l’exercice 2021, et les problèmes liés à la pandémie de COVID-19.  Comme l’a dit le Guyana, au nom du Groupe des 77 et la Chine, nous sommes « déçus » que la Commission soit privée des services d’interprétariat pour ses séances officieuses.  Le multilinguisme est l’autre victime de la pandémie, s’est lamenté Guyana devant une session qui ne prévoit que sept séances publiques.

Bien que certains des ajustements apportés aux méthodes de travail aient permis à la Commission de finir avec succès la première et la deuxième reprise de sa dernière session, le Groupe des États d’Afrique s’attend à ce que les lacunes et les problèmes rencontrés au cours de ces sessions soient comblés et résolus, a dit le Mali.  Il est d’une importance « capitale » que toutes les délégations puissent participer aux discussions, aux négociations et aux processus décisionnels, grâce aux services d’interprétation.

Le Président de la Cinquième Commission, M. Carlos Amorín, de l’Uruguay, a dit avoir prévu des réunions virtuelles et en personne.  Nous suivrons l’évolution de la situation et nous nous adapterons en conséquence, s’est engagé M. Amorín.

Commission budgétaire oblige, plusieurs délégations ont pris note des efforts déployés par les États Membres pour s’acquitter de leurs obligations financières, dans un contexte économique et financier difficile dû à la pandémie de COVID-19.  Avec la Chine, le Guyana a dénoncé le fait que la majeure partie du montant total des contributions en souffrance soient dues par un seul État Membre.  Le Groupe des 77 et de la Chine, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et l’Union européenne se sont en effet dits « extrêmement préoccupés » par la crise de liquidités que vit actuellement l’ONU, une crise « plus grave » que celle des exercices budgétaires précédents. 

Des appels ont été lancés pour que tous les États Membres s’acquittent de l’intégralité de leurs contributions annuelles dans les délais impartis et sans condition.  La Norvège a estimé que le système des droits de l’homme de l’ONU est sous-financé depuis trop longtemps et également au nom du Liechtenstein, la Suisse a dit s’engager à garantir que le pilier « droits de l’homme » reçoive du budget ordinaire les ressources nécessaires.  Les réformes menées, se sont interrogés les États-Unis, ont-elles apporté les résultats escomptés et rendu l’Organisation plus efficace et efficiente?  Dotée désormais d’un budget annuel, l’ONU doit faire preuve de transparence et être comptable de ses actes, ont martelé les États-Unis, soutenus par le Royaume-Uni.

De leur côté, le Venezuela et Cuba ont accusé les États-Unis d’« abuser de leur statut de pays hôte » et d’appliquer l’accord de Siège de manière discriminatoire, tantôt pour retarder l’octroi des visas à certaines délégations tantôt pour limiter la liberté de mouvement des délégués.  Notant que le Venezuela n’a pu régler ses contributions aux Nations Unies en raison du blocus des États-Unis, Cuba et la Fédération de Russie ont dit craindre que ce pays ne perde son droit de vote à l’Assemblée générale.

Plusieurs délégations ont commenté le programme de travail dont le Pérou qui a promis d’accorder une attention particulière au budget des missions politiques spéciales en Colombie et en Haïti.  La République de Corée a voulu que les répercussions de la pandémie de COVID-19 soient prises en compte dans le budget 2021, une occasion de passer en revue la réforme de la gestion en cours.

La Cinquième Commission se réunira, mercredi 7 octobre, à partir de 10 heures, pour examiner la question relative au barème des quotes-parts.  Elle a prévu de terminer ses travaux vendredi 11 décembre.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Élimination totale des armes nucléaires : les États soutiennent la réalisation de cet objectif de paix, acte de naissance de l’Organisation

Soixante-quinzième session,
Matin & après-midi
AG/12276

Élimination totale des armes nucléaires : les États soutiennent la réalisation de cet objectif de paix, acte de naissance de l’Organisation

« Le monde continue de vivre dans l’ombre d’une catastrophe nucléaire », a déclaré avec gravité, ce matin, M. António Guterres, lors de l’ouverture de la Réunion de haut niveau célébrant la Journée internationale pour l’élimination totale des armes nucléaires.  Pour répondre aux défis menaçant le régime de non-prolifération et enrayer toute course à de nouveaux types d’armements nucléaires, le Secrétaire général a rappelé leurs responsabilités en matière de désarmement à la Fédération de Russie et aux États-Unis, qui se partagent la majorité des quelque 14 000 têtes nucléaires de tous types actuellement déployées.  

Le Président de l’Assemblée générale, quant à lui, a mis l’accent sur la nécessité de renforcer le mécanisme onusien du désarmement nucléaire en exhortant les États Membres à mettre en œuvre les objectifs fixés par les différents instruments qui le constituent.   

Conscients que l’existence même d’arsenaux nucléaires met en péril le devenir de la planète, les ministres des affaires étrangères ont répondu aux appels de MM. Guterres et Bozkir, en reconnaissant que le seul moyen d’éliminer complètement le risque nucléaire était d’éliminer complètement et définitivement les armes nucléaires.  Plusieurs pays, comme le Costa Rica, le Pérou et l’Uruguay, ont appelé de leurs vœux un transfert des dépenses consacrées à l’arme nucléaire, lesquelles ont dépassé les 70 milliards de dollars en 2019, aux efforts de développement durable. 

Le Secrétaire général n’a pas manqué de rappeler que les Nations Unies étaient nées un an après les bombardements d’Hiroshima et Nagasaki de 1945, en se donnant précisément comme premier objectif de paix internationale l’élimination complète et totale des armes nucléaires.  Soulignant que l’unique instrument en vigueur de réduction des deux plus importants arsenaux, le traité américano-russe New Start, pourrait expirer au début de l’année prochaine, il a demandé à la Fédération de Russie et aux États-Unis de le proroger sans délai pour une durée de cinq ans.  La Suède a estimé que l’intégration de la Chine et l’inclusion d’armes stratégiques à la version prorogée du Traité en élargiraient la portée.  

Le Président de l’Assemblée générale a invité les États à reprendre la marche en avant vers un monde exempt d’armes nucléaires en s’accordant autour d’objectifs concrets et réalisables.  Il a salué à ce propos l’adoption, en 2017, du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, « premier instrument multilatéral juridiquement contraignant pour le désarmement nucléaire à avoir été négocié en 20 ans ».  Sur ce traité, dont toutes les puissances nucléaires ont boycotté l’adoption, la Thaïlande et l’Autriche ont noté avec satisfaction qu’avec 46 ratifications le Traité n’était plus qu’à 4 ratifications de son entrée en vigueur. 

Les dossiers nucléaires de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et de l’Iran ont été abordés.  La Suède, qui préside le Conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique, a appelé la RPDC à prendre des mesures fortes pour aider à dénucléariser de la péninsule coréenne, et l’Iran à revenir à la pleine mise en œuvre de ses engagements au titre du Plan d’action global commun (JCPOA), « essentiel pour la sécurité régionale et internationale ».   

Le Ministre iranien des affaires étrangères a jugé pour sa part que c’étaient les États-Unis qui, en développant de nouvelles armes nucléaires et en se retirant « illégalement » du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI), portaient atteinte à la crédibilité au TNP et sapaient la viabilité du JCPOA. 

Son homologue saoudien a accusé son pays non seulement de poursuivre des ambitions nucléaires « dangereuses » mais également de soutenir des milices terroristes au Moyen-Orient.  Concernant la sécurité dans la région, il a appelé toutes les parties prenantes à participer activement et de bonne foi à la deuxième Conférence pour la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient

Les créations de zone de ce type ont été présentées par les Ministres africains et sud-américains des affaires étrangères comme autant de garanties de sécurité contre l’emploi d’armes nucléaires et de mesures de confiance interétatiques.  Le Guatemala et la Côte d’Ivoire ont ainsi salué l’efficacité des zones exemptes d’armes nucléaires alors que le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) n’est toujours pas entré en vigueur un quart de siècle après son adoption, et que la paralysie de la Conférence du désarmement, seul instrument habilité à négocier des traités multilatéraux de désarmement, se prolonge depuis 12 ans.  

L’Inde a répété que ce n’est qu’au sein d’une Conférence du désarmement revitalisée qu’un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins militaires pourra être négocié.  La conclusion d’un tel traité, couplé au TICE, renforcerait une architecture de sécurité propice au désarmement et à la non-prolifération nucléaires, a-t-il été dit.   

Concernant le renforcement du Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui demeure la pierre angulaire du régime de désarmement et de non-prolifération nucléaires, le Secrétaire général a demandé aux États Membres d’utiliser le temps accordé par le report de la dixième Conférence d’examen du TNP pour renforcer le socle du Traité et prévoir « des progrès tangibles vers l’élimination totale des armes nucléaires ».  «  Nous avons besoin d’un multilatéralisme renforcé, inclusif et renouvelé, fondé sur la confiance, sur le droit international et ayant en son centre la sécurité humaine », a plaidé M. Guterres.  

RÉUNION PLÉNIÈRE DE HAUT NIVEAU POUR CÉLÉBRER ET PROMOUVOIR LA JOURNÉE INTERNATIONALE POUR L’ÉLIMINATION TOTALE DES ARMES NUCLÉAIRES

Déclarations d’ouverture

M. VOLKAN BOZKIR (Turquie), Président de la soixante-quinzième session de l’Assemble générale, a rappelé que les terribles conséquences des armes nucléaires avaient été démontrées il y a 75 ans quand quelque 226 000 personnes avaient perdu la vie du fait des bombardements atomiques sur le Japon.  L’ONU, a-t-il rappelé, est née de la dévastation de ces années, et l’Assemblée générale a été clairement attachée au désarmement nucléaire depuis sa création, puisque sa toute première résolution, adoptée en 1946, visait à réaliser le désarmement nucléaire mondial.

Aujourd’hui encore, les armes nucléaires constituent une grave menace pour la paix et la sécurité internationales et le seul moyen sûr d'éliminer cette menace est d'éliminer les armes elles-mêmes, a poursuivi M. Bozkir, pour qui « il n’y a pas d’alternative ».

Le Président de l’Assemblée générale a donc regretté les « pressions considérables » qui pèsent sur l’architecture de désarmement et de sécurité développée au fil des décennies, du fait de la montée des tensions mondiales.  Il a rappelé que des États parties à des accords relatifs au nucléaire s’en étaient retirés, que d’autres accords étaient sur le point d’expirer et que certains États dotés d’armes nucléaires avaient menacé d’en reprendre les essais.

M. Bozkir a appelé à un retour à « l’objectif commun » d’un monde exempt d’armes nucléaires, par le biais d’objectifs concrets réalisables et d’actions proportionnées.  À cette fin, il rappelé l’existence d’« outils » et en premier lieu le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires adopté en 2017, « premier instrument multilatéral juridiquement contraignant pour le désarmement nucléaire à avoir été négocié en 20 ans ».  Par ailleurs, le Programme de désarmement du Secrétaire général vise à engager les parties prenantes dans des discussions novatrices, afin de ramener le désarmement au cœur de nos efforts communs pour la paix et la sécurité, a ensuite expliqué le Président de l’Assemblée générale.

Cette année marque aussi le cinquantième anniversaire du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), pierre angulaire du régime mondial de désarmement et de non-prolifération, a poursuivi M. Bozkir.  Lors de la Conférence d’examen du TNP de 2020, qui se tiendra l’année prochaine, les États parties feront le bilan des progrès accomplis dans la mise en œuvre du Traité depuis 2015 et exploreront les moyens de faire avancer les progrès accomplis jusqu’à présent.  Pour le Président de l’Assemblée générale, ils devront en profiter pour renouveler leurs engagements et s'engager dans un dialogue inclusif pour prendre des mesures pratiques en matière de désarmement nucléaire.  Le désarmement nucléaire doit rester une priorité pour nous tous et nous devons continuer de poursuivre notre objectif commun, celui d’un monde exempt d’armes nucléaires, sans perdre davantage de temps, a poursuivi M. Bozkir, qui a conclu en se disant déterminé à dialoguer avec les États Membres pour discuter de la meilleure façon de progresser vers cet objectif.   

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé combien le désarmement nucléaire était une priorité de l’ONU depuis l’acte de naissance de l’Organisation.  À cet aune, il a déploré que 75 ans après la fondation de l’ONU et en dépit des terribles bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki, « le monde continue de vivre dans l’ombre d’une catastrophe nucléaire ».  Certains États considèrent les armes nucléaires comme vitales pour leur sécurité nationale, a-t-il ajouté, soulignant qu’à rebours de ces doctrines, l’élimination des armes nucléaires transcende les intérêts nationaux puisque d’elle dépend « la survie de la planète. 

Constatant que les progrès vers l’élimination totale des armes nucléaires sont au point mort et risquent de reculer, M. Guterres a déploré les tensions accrues entre États qui détiennent des armes nucléaires, lesquelles augmentent mécaniquement le risque nucléaire. 

Le Secrétaire général a ainsi exprimé son inquiétude devant le développement de programmes de modernisation des arsenaux, à l’origine d’une course à des armes nucléaires plus rapides, furtives et précises.  Confiant sa stupéfaction quant aux dépenses consacrées à cette modernisation, il a ensuite rappelé les États Membres à leurs responsabilités en matière de paix et de sécurité internationales. 

Après avoir rappelé que le seul traité en vigueur limitant la taille des plus grands arsenaux nucléaires mondiaux -le traité New Start- est appelé à expirer au début de l’année prochaine, « ce qui soulève la possibilité alarmante d’un retour à une concurrence stratégique sans retenue », il a exhorté la Fédération de Russie et les États-Unis à le proroger sans délai, et ce, pour une durée maximale de cinq ans. 

Pour M. Guterres, si le monde doit reprendre sa marche en avant vers le désarmement nucléaire, il revient en premier lieu aux États dotés d’armes nucléaires de montrer la voie en honorant leurs engagements et en prenant des mesures pratiques pour réduire le risque nucléaire.

En fin de compte, le seul moyen d’éliminer complètement le risque nucléaire sera d’éliminer complètement les armes nucléaires, a rappelé, à l’instar de ses prédécesseurs, le Secrétaire général.  S’adressant aux États parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), « qui reste la pierre angulaire du régime de désarmement et de non-prolifération nucléaires », il leur a demandé d’utiliser le temps supplémentaire qui leur a été accordé par le report de la dixième Conférence d’examen -initialement prévue au printemps 2020- pour s’assurer de résultats significatifs renforçant le socle du Traité et prévoyant des progrès tangibles vers l’élimination totale des armes nucléaires.

« J’attends avec intérêt l’entrée en vigueur du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, qui traduit le désir d’un grand nombre d’États de libérer le monde de cette menace », a par ailleurs indiqué M. Guterres. 

Évoquant la pandémie de COVID-19, qui a tant coûté en vies humaines et causé tant de ravages économiques, le Secrétaire général a exprimé sa conviction que, pour faire face aux menaces mondiales, « nous avons besoin d’un multilatéralisme renforcé, inclusif et renouvelé, fondé sur la confiance, sur le droit international et ayant en son centre la sécurité humaine ».  « C’est cette approche qui nous guidera vers notre objectif commun d’un monde exempt d’armes nucléaires », a conclu M. Guterres.

Débat général

Désarmement nucléaire général, y compris le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires du 7 juillet 2017 et l’état de la Conférence du désarmement.

L’Inde a formé le vœu que l’événement d’aujourd’hui puisse sensibiliser la communauté internationale sur la nécessité de mobiliser la volonté mondiale en faveur d’un monde sans armes nucléaires.  Le Mahatma Gandhi, dont nous célébrons aujourd’hui l’anniversaire de naissance, avait déclaré: « Ce que vous ferez sera insignifiant, mais il est très important que vous le fassiez. »  C’est dans cet esprit que l’Inde est prête à travailler avec d’autres États pour atteindre le noble objectif d’un monde sans armes nucléaires.

Comme l’a rappelé notamment le Chef de la diplomatie de la République-Unie de Tanzanie à la suite du Président de l’Assemblée générale, le désarmement nucléaire a été l’objet de la toute première résolution de l’Assemblée générale.  Pour sa part, le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) a été salué comme la pierre angulaire du mécanisme onusien de désarmement, y compris nucléaire.  C’est pourquoi le Ministre des affaires étrangères de Maurice a souhaité son renforcement, afin de lui permettre de retrouver efficacité et crédibilité.

Certains intervenants sont vu dans le report à 2021 de la dixième Conférence d’examen du TNP, initialement prévue au printemps 2020, l’occasion d’utiliser ce délai supplémentaire pour s’accorder sur une relance du traité, qui, a rappelé la Ministre des affaires étrangères du Liechtenstein, a rendu illégale l’acquisition de l’arme nucléaire par de nouveaux États tout en invitant ceux déjà dotés à réduire et éliminer à terme leurs stocks, ce qui hélas, n’est toujours pas d’actualité.  Le Président de l’Afrique du Sud a rappelé de son côté que son pays était le seul à avoir renoncé volontairement à l’arme nucléaire.  Il a également regretté l’existence actuelle de 45 000 têtes nucléaires, tandis que son homologue du Mozambique a indiqué que le récent comportement des pays dotés de l’arme nucléaire n’était pas « passé inaperçu ».  Le Ministre des affaires étrangères de l’Argentine a déploré avec d’autres que les États dotés ignorent leurs obligations au titre de l’Article VI du TNP, notamment celles de s’engager dans des négociations de bonne foi visant à un désarment nucléaire général.  

« Soixante-quinze ans après que les États-Unis ont largué des bombes atomiques sur des civils innocents à Hiroshima et Nagasaki -la première et la seule utilisation d’armes aussi horribles- cette réunion offre une occasion unique de mobiliser le monde pour libérer l'humanité du cauchemar nucléaire », a dénoncé le Ministre des affaires étrangères de la République islamique d’Iran, qui s’est livré à un réquisitoire contre Washington, auquel a fait écho son homologue de Cuba.  Le Chef de la diplomatie iranienne a accusé les États-Unis de développer de nouvelles armes nucléaires et de causer « d’immenses dommages » au TNP en se retirant illégalement du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) et du Plan d’action global commun (JCPOA).  

En outre, le « seul auteur d’une attaque nucléaire au monde » apporte un soutien « aveugle » au « seul détenteur » de l’arsenal nucléaire au Moyen-Orient, a martelé le Ministre iranien, en faisant allusion à un « régime hors-la-loi qui a ouvertement menacé les autres d’annihilation nucléaire, tout en criant au loup à propos de la prolifération ».  La communauté internationale doit contraindre Israël –qui a « l’agression inscrite dans son ADN même »– à adhérer rapidement au TNP et à se soumettre au régime d’inspection le plus rigoureux que les États parties au TNP les plus respectueux observent.  « Nous demandons également à l’Assemblée générale de déclarer comme norme juridiquement contraignante du droit international qu’une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée.  Cela devrait être suivi d’un programme concret de désarmement nucléaire limité dans le temps et de garanties de sécurité pour les États non dotés d’armes nucléaires dans l’intervalle », a ajouté le Chef de la diplomatie iranienne.

Les neuf pays détenteurs de l’arme nucléaire dans le monde ont dépensé, en 2019, 72,9 milliards de dollars –« dont la moitié par les États-Unis », selon le Ministre iranien -pour l’entretien de leurs arsenaux, a dénoncé le Ministre des affaires étrangères du Costa Rica, en demandant à ces puissances de procéder à leur élimination, à l’instar de ses homologues du Pérou et de l’Uruguay.

La Ministre des affaires étrangères de la Suède a de son côté appelé les États-Unis et la Fédération de Russie à étendre rapidement le traité New START, en se félicitant à cet égard des discussions récentes sur un accord de suivi plus large, « qui pourrait également inclure la Chine ».  Par ailleurs, en tant que Présidente du Conseil des gouverneurs de l’AIEA, la Suède, a-t-elle dit, a œuvré en faveur d’un ordre international fondé sur des règles.  « Nous soutenons les efforts visant à préserver le JCPOA et appelons l’Iran à revenir à la pleine mise en œuvre de ses engagements au titre de ce Plan d’action.  La République populaire démocratique de Corée (RPDC) doit quant à elle respecter ses obligations internationales et prendre des mesures en vue de la dénucléarisation, a ajouté la Chef de la diplomatie suédoise.

La Ministre des affaires étrangères de l’Irlande a annoncé que le 6 août dernier, qui marquait le soixante-quinzième anniversaire du bombardement d’Hiroshima, l’Irlande avait ratifié le Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN), ratification qui reflète la profonde préoccupation de son pays face aux conséquences catastrophiques d’une explosion nucléaire, et la « pure impossibilité de toute réponse humanitaire adéquate ».  La Cheffe de la diplomatie de la Jamaïque a d’ailleurs annoncé que son pays ratifierait « bientôt » le TIAN, tandis que le Ministre des affaires étrangères de la Malaise soulignait que celle-ci vient de déposer ses instruments de ratification.

Contrôle des armements nucléaires et non-prolifération, y compris l’avenir des traités sur les armements nucléaires et les questions de proliférations des armes, dont le Plan d’action global commun

Soixante-quinze ans après les bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki, les délégations se sont accordées pour déplorer qu’il existe encore près de 14 000 armes nucléaires dans le monde.  Un constat qualifié de « déprimant » par le Ministre des affaires européennes et internationales de l’Autriche, selon lequel la menace d’une confrontation nucléaire s’intensifie puisque les arsenaux nucléaires se modernisent et que de nouveaux systèmes de livraison sont en cours de développement.  

Son homologue de Cuba a, lui, trouvé « consternant » que sur les quelque 13 800 armes nucléaires comptabilisées, presque1 800 soient en état d’alerte opérationnelle et 3 720 aient déjà été déployées.  « Plus de la moitié de ces armes appartiennent aux États-Unis », a-t-il ajouté, enjoignant à la communauté internationale de ne pas « rester impassible » face à la « révision de la posture nucléaire » de ce pays, qui réduit le seuil de recours à ce type d’armes, « même en réponse à de soi-disant menaces stratégiques non nucléaires ».  Le Ministre cubain a donc rejeté la décision américaine de retrait du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) signé avec l’ex-Union soviétique, tout en exhortant Washington à reconduire le nouveau traité de réduction des armes stratégiques (New Start) conclu avec la Russie et dont la durée court jusqu’en 2021. 

« Les États dotés d’armes nucléaires ont une responsabilité particulière », a renchéri la cheffe de la diplomatie de la Suède, avant d’appeler, elle aussi, Américains et Russes à proroger rapidement le New Start, « traité essentiel pour la sécurité mondiale ».  À l’instar de son homologue autrichien, la Ministre suédoise s’est toutefois félicitée des discussions récentes sur « un accord de suivi plus large, qui pourrait également inclure la Chine ».  À ses yeux, l’inclusion d’armes non stratégiques dans un tel accord serait particulièrement importante.  

Dans ce contexte, de nombreux pays ont jugé essentiel de préserver le TNP, auquel 191 États ont adhéré depuis 1970.  Pour le Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, le TNP doit d’abord être appliqué.  À cette fin, a-t-il dit, des progrès égaux sur les trois piliers du traité sont essentiels, « y compris l’obligation pour tous les États dotés d’armes nucléaires de faire progresser le programme de désarmement ».  Un avis partagé par son homologue du Lesotho, qui a regretté que ce pilier n’ait toujours pas atteint l’universalité, 50 ans après son adoption, alors qu’il s’agit de «  l’unique régime juridique » tendant à empêcher la diffusion de la technologie des armes nucléaires, à promouvoir la coopération dans l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire et à parvenir au désarmement nucléaire.  

À cette aune, la Ministre du Lesotho a espéré que la dixième Conférence d’examen du TNP, initialement prévue cette année mais reportée à 2021 en raison de la crise liée à la COVID-19, « donnera à tous les États Membres l’occasion de parvenir à un consensus et de travailler sérieusement à la réalisation des objectifs du TNP ».  Lui emboîtant le pas, son homologue du Guatemala a souhaité que ce rendez-vous crucial ne se contente pas d’être « une répétition des accords contractés par le passé ». 

De ce point de vue, la course aux armements nucléaires à laquelle on assiste en pleine période de pandémie de COVID-19 n’augure de rien de bon, a observé le Ministre secrétaire politique du Nicaragua, estimant que « la solution à cette boîte de Pandore réside dans l’application effective de l’Article VI du TNP ». De fait, a-t-il martelé, « soit nous mettons en œuvre l’Article VI, soit nous devons nous préparer à une guerre nucléaire qui sonnera le glas de l’humanité ». 

Tout aussi circonspect, le Ministre des affaires étrangères et européennes de Malte s’est déclaré préoccupé par le non-respect par « certains États » des obligations au titre du Chapitre VI du TNP, mais aussi par la disparition du FNI et par les « revers » essuyés par le Plan d’action global commun (JCPOA), accord sur le nucléaire iranien signé en 2015 et dont les États-Unis se sont retirés en 2018.  Il a invité les parties concernées à redoubler d’efforts pour qu’elles puissent « se concentrer sur les avantages qu’une diplomatie nucléaire efficace apporterait à toutes et à tous ».   

Signe des difficultés auxquelles se heurte cette diplomatie, le Ministre des affaires étrangères du Bahreïn a reproché à l’Iran de violer le plafond fixé pour l’uranium enrichi par le JCPOA.  Il a également rappelé que son pays avait appelé Téhéran à « coopérer en toute transparence » avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) en plaçant ses installations nucléaires sous la surveillance de l’agence onusienne et ce, afin de « rassurer les pays arabes qui se trouvent de l’autre côté du Golfe arabo-persique  ».  Même son de cloche de la part de son homologue de l’Arabie saoudite, qui a accusé l’Iran de poursuivre des activités nucléaires « dangereuses » tout en soutenant des milices terroristes au Moyen-Orient.   

Leur collègue de la Suède, dont le pays préside le Conseil des gouverneurs de l’AIEA, a quant à elle appelé l’Iran à « revenir à la pleine mise en œuvre de ses engagements » dans le cadre du JCPOA.  Selon elle, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) doit également adhérer à ses obligations internationales et « prendre des mesures en vue de la dénucléarisation ». 

Zones exemptes d’armes nucléaires, y compris le projet de zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient

L’importance de la création de zones exemptes d’armes nucléaires a été au cœur de très nombreuses interventions, un nombre considérable d’intervenants rappelant l’adhésion de leur pays à l’un des traités créant une telle zone.  Ce fut le cas notamment des Présidents du Nigéria, des Comores et de la Guinée équatoriale, qui ont rappelé la participation de leur pays respectif au Traité de Pelindaba, qui a créé une telle zone en Afrique, confirmant ainsi, selon l’expression du Président comorien, leur engagement dans la « bataille contre les armes nucléaires. »  Le Groupe africain dans son ensemble a réaffirmé son engagement en faveur du Traité de Pelindaba, estimant qu’il protège le continent en évitant que n’y soient déployés des explosifs ou effectués des essais nucléaires.  Le Ministre des affaires étrangères de Maurice a rappelé que son pays avait été le premier État africain, en 1993, à avoir ratifié ledit Traité.  

Le Président du Kenya en a lui aussi souligné l’importance de ce Traité, avant d’appeler à la création de zones similaires dans d’autres régions du globe, tout comme le Lesotho, pour lequel encourager la création de zones exemptes permettra de préserver des régions entières du risque nucléaire dans le contexte actuel de défis à la paix et à la sécurité internationales et de crise du mécanisme onusien de désarmement et de non-prolifération.  Pour le Ministre de la recherche scientifique et innovation technologique de la République Démocratique du Congo, agir ainsi, c’est répondre à l’un des objectifs de notre Organisation sur le désarmement général et complet en vue d’atteindre un monde exempt d’armes nucléaires.  Le Président de la Gambie a, quant a lui, rappelé les différents protocoles de l’AIEA adoptés par son pays.  Le même engagement a été réaffirmé par le Ministre de la défense, de la justice et de la sécurité du Botswana.  

Dans le même ordre d’idée, le Premier Ministre et Ministre des finances et de la Gouvernance d’Entreprise d’Antigua-et-Barbuda et le Ministre des affaires étrangères de l’Uruguay ont souligné l’importance du Traité de Tlatelolco, qui vise à l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine.  Trinité-et-Tobago a salué l’efficacité de ces zones en tant que mesure de confiance pour avancer sur la voie d’un monde sans armes nucléaires.  Le Guatemala a invité les États-Membres qui ne l’ont pas encore fait à ratifier les traités portant création de telles zones, cela dans un contexte sécuritaire mondial que fragilisent les ambitions nucléaires déclarées de certains États et alors que le TICE échoue encore à entrer en vigueur, un demi-siècle après son adoption.  

« Les États dotés doivent dépasser leurs intérêts étroits et ne peuvent, comme ils semblent vouloir le faire, défendre le multilatéralisme tout en promouvant les armes nucléaires », a déclaré avec force le Premier Ministre d’Antigua-et-Barbuda.  Le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Viet Nam s’est voulu plus encourageant en notant les grands progrès accomplis avec notamment la création de cinq zones exemptes d’armes nucléaires dans le monde, y compris en Asie du Sud-Est depuis le Traité de Bangkok.  La Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie a, au contraire, estimé que l’objectif d’élimination des armes nucléaires était loin d’être atteint, en notant « la méfiance de plus en plus grande » entre États à ce sujet. Le Ministre du pouvoir populaire pour les affaires étrangères du Venezuela a ainsi dénoncé l’utilisation par les États-Unis de la dissuasion nucléaire à des fins « bellicistes et d’ingérence dans les affaires intérieures d’autres États. »  La Ministre des affaires étrangères de la Suède a, elle, exhorté l’Iran et la République populaire démocratique de Corée à s’acquitter de leurs obligations dans le domaine nucléaire.  

Pour l’Asie centrale, le Ministre des affaires étrangères du Kirghizstan a rappelé que son pays était l’un des parrains de l’important Traité de Semipalatinsk de 2006 portant création d’une zone exempte d’armes nucléaires dans la région.  Le Ministre des affaires étrangères du Kazakhstan a, quant à lui, tenu à rappeler la vision audacieuse et inébranlable de son pays pour parvenir à un monde exempt d’armes nucléaires, dont atteste « notre décision historique et courageuse » de fermer le site d’essais nucléaires de Semipalatinsk et de renoncer au quatrième plus grand arsenal nucléaire du monde ».  

Le Vice-Ministre des affaires étrangères du Cambodge a, pour sa part, défendu l’idée d’une Asie du Sud qui serait elle aussi exempte d’armes nucléaires et appelé le Conseil de Sécurité à œuvrer pour la réalisation de cet objectif.  

De nombreux pays ont également mis en avant le projet de zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.  « Nous estimons, qu’il est dans l’intérêt de la paix et de la sécurité internationales, de faire du Moyen-Orient une zone exempte d’armes nucléaires, a affirmé le Ministre d’État du Qatar.  En effet, a-t-il poursuivi, cette région est confrontée à de multiples défis toujours plus nombreux et des efforts concertés sont nécessaires pour désamorcer les crises existantes, étant donné le danger que représente la prolifération des armes nucléaires au Moyen-Orient, lequel a besoin de paix et de stabilité.  Pour le Qatar, la création d’une telle zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient est un élément essentiel de la prorogation du TNP. 

Le Groupe arabe, qui s’exprimait par la voix du Ministre des affaires étrangères de l’Égypte, rejette les arguments selon lesquels  il serait nécessaire de disposer de l’arme nucléaire en ces temps de tensions ou encore que l’environnement internationale ne serait pas propice au désarmement nucléaire.  Pointant du doigt Israël, dont le comportement irait, selon lui, à l’encontre des résolutions internationales pertinentes, le Ministre a jugé « urgent de redoubler d’effort pour combler les lacunes dans notre région ».  Un avis partagé par la Turquie, le Mouvement des pays non alignés (MNA) et le Groupe africain qui se sont prononcés eux aussi en faveur d’un Moyen-Orient exempt d’armes nucléaires.  

Déclaration de clôture 

Dans ses remarques de clôture, le Président de l’Assemblée générale, M. Volkan Bozkir, a déclaré que ce débat avait permis aux États Membres et à la communauté internationale dans son ensemble de réaffirmer son attachement au désarmement nucléaire.  Le Président de l’Assemblée générale a rappelé que ces armes qui ont tué des centaines de milliers de personnes à Nagasaki et Hiroshima, sont toujours à portée de main de nombreux États et que des organisations terroristes cherchent à s’en approprier.  Alors que l’architecture de désarmement internationale est menacée par les divisions entre pays, M. Bozkir a jugé impératif que chaque État Membre agisse sans tarder pour s’acquitter de ses obligations en matière de désarmement nucléaire et de non-prolifération. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité autorise les États à poursuivre encore pendant un an les opérations contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains au large des côtes libyennes

8763e séance – matin 
CS/14316

Le Conseil de sécurité autorise les États à poursuivre encore pendant un an les opérations contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains au large des côtes libyennes

Le Conseil de sécurité a adopté aujourd’hui, à l’unanimité de ses 15 membres, la résolution 2546 (2020) par laquelle il autorise les États, pour une nouvelle période de 12 mois, à poursuivre, au large des côtes libyennes, les opérations de lutte contre le trafic de migrants et la traite d’êtres humains, conformément à la résolution 2240 (2015).

Dans cette résolution, adoptée le 9 octobre 2015, le Conseil autorisait les États à inspecter les bateaux naviguant en haute mer au large des côtes libyennes s’ils ont des motifs raisonnables de soupçonner qu’ils sont utilisés pour le trafic de migrants ou la traite d’êtres humains en provenance de Libye.  Les États, soulignait le Conseil, peuvent saisir les navires inspectés dont ils ont la confirmation qu’ils sont utilisés pour ce trafic et cette traite.

Texte du projet de résolution (S/2020/957)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 2240 (2015), 2312 (2016), 2380 (2017), 2437 (2018) et 2491 (2019), ainsi que la déclaration de son président en date du 16 décembre 2015 (S/PRST/2015/25),

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Libye,

Accueillant avec satisfaction le rapport du Secrétaire général daté du 2 septembre 2020 (S/2020/876) et notamment ses observations sur la détresse des migrants et des réfugiés en Libye,

Conscient que la Charte des Nations Unies lui confie la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,

Se félicitant des mesures prises pour mettre en œuvre la résolution 2240 (2015) et souhaitant qu’elles continuent d’être appliquées, et prenant note du déploiement de l’opération militaire de l’Union européenne en Méditerranée (EUNAVFOR MED IRINI) à cet égard,

Réaffirmant qu’il faut mettre fin à l’expansion actuelle du trafic de migrants et de la traite d’êtres humains en Méditerranée au large des côtes libyennes qui mettent en danger la vie d’êtres humains et, à cette fin précise, agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Condamne tous les actes de trafic de migrants et de traite d’êtres humains ayant le territoire libyen et le large des côtes libyennes comme destination, zone de transit ou point de départ, qui fragilisent davantage le processus de stabilisation de la Libye et mettent en péril les vies de centaines de milliers de personnes;

2.    Décide de reconduire les autorisations visées aux paragraphes 7, 8, 9 et 10 de la résolution 2240 (2015) pour une nouvelle période de douze mois à compter de la date d’adoption de la présente résolution, réaffirme les dispositions du paragraphe 11 de ladite résolution et réaffirme également ses résolutions 2240 (2015), 2312 (2016), 2380 (2017), 2437 (2018) et 2491 (2019), ainsi que la déclaration de son président S/PRST/2015/25;

3.    Réfitère, à compter de la date d’adoption de la présente résolution, les demandes formulées au paragraphe 17 de sa résolution 2240 (2015), et prie le Secrétaire général de lui faire rapport, onze mois après la date d’adoption de la présente résolution, sur l’état d’avancement de son application, en particulier pour ce qui est des paragraphes 7 à 10 de sa résolution 2240 (2015);

4.    Entend suivre la situation et, le cas échéant, envisager de reconduire pour des périodes supplémentaires les autorisations découlant de la présente résolution;

5.    Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Deuxième Commission chargée des questions économiques et financières lance des travaux profondément influencés par la pandémie, dans la forme et le fond

Soixante-quinzième session,
Réunion d'organisation – matin
AG/EF/3530

La Deuxième Commission chargée des questions économiques et financières lance des travaux profondément influencés par la pandémie, dans la forme et le fond

Lors d’une réunion d’organisation tenue par visioconférence, du fait des circonstances exceptionnelles actuelles, la Deuxième Commission (questions économiques et financières) a approuvé, ce matin, l’ordre du jour et l’organisation des travaux* de sa soixante-quinzième session, qui débutera lundi 5 octobre par le débat général et se terminera au plus tard le 25 novembre. 

Le Président de la Commission, M. Amrit Bahadur Rai, du Népal, a détaillé les conditions de travail bouleversées par la pandémie de COVID-19 et précisé le thème du débat général retenu par le Bureau, lui aussi centré sur la pandémie: « Reconstruire en mieux après la COVID-19: pour une économie mondiale plus équitable, des sociétés inclusives et un relèvement durable ». 

Le débat général, qui aura lieu du lundi 5 au vendredi 9 octobre, portera sur les 14 points à l’ordre du jour**.  C’est la seule partie des débats qui sera organisée en présentiel.  Le débat général sera précédé d’un discours liminaire de M. Joseph Stiglitz, économiste des États-Unis, enseignant à l’université Columbia de New York et lauréat du prix Nobel d’économie.  Le Président de la Deuxième Commission a encouragé les délégations à engager un « débat actif » avec M. Stiglitz. 

Un débat conjoint avec le Conseil économique et social (ECOSOC) sur les infrastructures durables aura lieu le 14 octobre dans l’après-midi, suivi d’une manifestation parallèle mettant l’accent sur la réduction des risques face à la pandémie, dans l’après-midi du 15 octobre. 

Les autres débats sur chaque question à l’ordre du jour se tiendront en séances virtuelles informelles, du 12 au 19 octobre selon le calendrier publié.  La deuxième partie des travaux sera consacrée aux négociations et à l’adoption de projets de résolution.  La présentation de ceux-ci se fera cette année par écrit mais leur adoption se fera au cours de réunions en présentiel. 

Prenant la parole en fin de séance, le Groupe des 77 et de la Chine (G77) a fait part de son intérêt particulier pour les travaux de revitalisation.  Ce processus, a-t-il expliqué, devrait renforcer la Deuxième Commission en vue d’accélérer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et traiter des conséquences économiques de la pandémie de COVID-19.  « Dans les semaines à venir, la Deuxième Commission va traiter de questions d’importance essentielle, y compris l’examen quadriennal complet des activités opérationnelles de l’ONU », a pointé le G77. 

Compte tenu du contexte, le Président a consacré une bonne partie de la réunion aux détails pratiques relatifs au débat général.  Il se tiendra en présentiel, chaque délégation ayant la possibilité de s’exprimer par la voix d’une représentante ou d’un représentant présent physiquement ou, sinon, par trois autres voies: une déclaration préenregistrée, un message vidéo diffusé en direct dans la salle ou une déclaration écrite distribuée aux participants.  Les délégations, qui ne peuvent intervenir qu’une seule fois en leur nom propre au cours du débat, auront donc le choix entre quatre différents moyens de le faire. 

Il a été convenu de faire preuve de « souplesse », afin que le Bureau puisse procéder en cours de session aux ajustements dictés par d’éventuelles limites et restrictions supplémentaires liées à la pandémie de COVID-19. 

Lors des séances en présentiel de la Deuxième Commission -prévues les 5, 6, 8 et 9 octobre-, les délégués seront répartis sur trois salles de conférence (les salles 1, 2 et 3), afin de respecter les impératifs de distanciation sociale qu’exige la pandémie.  C’est ce qu’a expliqué en fin de réunion le Secrétariat de la Deuxième Commission avant de recommander, pour l’ensemble de la session, de « travailler différemment, par courriels autant que possible », et de « garder nos distances entre nous ». 

Enfin, le Président a insisté sur la nécessité d’achever les travaux dans les temps en respectant des dates limites de soumission des projets de résolution. 

Les trois Vice-Présidents de la Commission sont Mme Rosemary O’Hehir (Australie), Mme Christine Bailey (Jamaïque) et Mme Maria Danielcakova (Slovaquie), tandis que M. Diamane Diome (Sénégal) occupe le poste de rapporteur. 

La prochaine réunion de la Deuxième Commission aura lieu le lundi 5 octobre, en présentiel, à partir de 10 heures. 

*A/C.2/75/1

**A/C.2/75/L.1/Add.1

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Assemblée générale: La commémoration de Beijing+25 coïncide avec un « recul mondial » de l’égalité des sexes et des droits des femmes

Soixante-quinzième session,
Matin & après-midi
AG/12275

Assemblée générale: La commémoration de Beijing+25 coïncide avec un « recul mondial » de l’égalité des sexes et des droits des femmes

C’est un « recul mondial » de l’égalité des sexes et des droits des femmes qui a été constaté aujourd’hui à la Réunion de haut niveau qu’a organisée l’Assemblée générale pour le vingt-cinquième anniversaire de la quatrième Conférence mondiale de Beijing sur les femmes.

Après avoir visionné une courte vidéo intitulée « l’histoire mondiale des droits des femmes », le Secrétaire général de l’ONU a salué Beijing et son Programme d’action comme un « moment charnière », « un point de repère » et « un tournant », dont la « vision audacieuse » et « transformatrice » a surtout montré que les droits des femmes sont au cœur de l’égalité et de la justice partout dans le monde.  Pourtant, 25 ans après, M. António Guterres a dû constater un « recul mondial » dans l’égalité des sexes.  Chaque année, 12 millions de filles se marient avant l’âge de 18 ans et dans certaines régions du monde, le nombre de féminicides pourrait faire croire que l’on se trouve dans une zone de guerre.

Les femmes sont encore fréquemment exclues des négociations de paix, des discussions sur le climat et des rôles décisionnels et elles ne jouissent que de 75% des droits dont jouissent les hommes.  Aujourd’hui, elles sont les plus touchées par l’impact socioéconomique massif de la pandémie de COVID-19 et une autre pandémie les touche, celle des violences sexistes et des pratiques abusives et répressives, dont le mariage précoce et le déni d’accès à la santé sexuelle et reproductive. 

Les progrès ont été « trop lents et insuffisants », a tranché la Directrice exécutive d’ONU-Femmes.  Il « n’y a plus d’excuse » à la persistance des déséquilibres, en particulier dans le contexte de la Décennie d’action pour la réalisation des objectifs de développement durable, s’est impatientée Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka.  Il va falloir faire de la protection des droits et intérêts des femmes la priorité des priorités, a reconnu le Président de la Chine, M. Xi Jinping, au nom du pays hôte de la Conférence de 1995.  Aujourd’hui, je dis: « les droits des femmes et des filles ne sont pas négociables », a renchéri la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP).

Quel est le point commun entre mutilations génitales et mariages forcés? a ensuite demandé Mme Natalia Kassem.  Les inégalités entre les sexes et la volonté de contrôler le corps et la vie des femmes, a-t-elle répondu.  Depuis Beijing, l’accent est de plus en plus mis sur les « valeurs traditionnelles » pour confiner les femmes dans leur ménage et rogner leurs droits, a confirmé la Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, Mme Hilary Gbedemah.   

Les attaques contre la santé sexuelle et reproductive, mais aussi les discriminations, les emprisonnements, voire les assassinats de femmes défenseures des droits humains, de femmes autochtones, de femmes de couleur, de femmes trans, se multiplient, s’est alarmée, à son tour, Mme Sascha Gabizon.

C’est « fondamentalement » une question de pouvoir, a analysé le Secrétaire général de l’ONU, et cela commence par la représentation égale des femmes aux postes de direction, dans les gouvernements, les conseils d’administration, et à la table de négociation, partout où sont prises des décisions qui affectent la vie des gens.  « Une femme au pouvoir n’est pas une menace », a acquiescé le Président de cette soixante-quinzième session de l’Assemblée générale.  S’adressant directement aux femmes, M. Volkan Bozkir a dit parler « du pouvoir sur un podium, dans l’information, les données et la science, dans vos mots, dans le partage de votre expérience, dans une main tendue, dans la solidarité ».  Ne doutez jamais, a martelé le Président, de votre pouvoir personnel.  « Affirmez-le. »

Donnez-nous un environnement sûr « de notre enfance à notre vie adulte », a plaidé Ixchel Adolfo, jeune guatémaltèque.  Alors, a encouragé le Président de l’Assemblée, agissons aujourd’hui pour assurer l’égalité, demain.  Le pouvoir du multilatéralisme, a-t-il rappelé, est alimenté par les actions individuelles et les décideurs à tous les niveaux.  Chacun d’entre nous a le pouvoir d’imprimer le changement.  « Nous ne pouvons pas changer le passé, mais nous pouvons changer l’avenir et nous le ferons », a promis la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles, Mme Élisabeth Broderick.  La Réunion de haut niveau s’est d’ailleurs terminée par un poème intitulé « We will not wait tomorrow », « Nous n’attendrons pas demain ».

Par vidéos préenregistrées, chefs d’État et de gouvernement et ministres ont énoncé les mesures prises par leur pays pour faire avancer les 12 domaines prioritaires du Programme d’action de Beijing.

L’Assemblée générale tiendra demain, vendredi 2 octobre, à partir de 9 heures, sa Réunion de haut niveau sur la commémoration et la promotion de la Journée mondiale de l’élimination totale des armes nucléaires.

RÉUNION DE HAUT NIVEAU SUR LE VINGT-CINQUIÈME ANNIVERSAIRE DE LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES

Déclarations d’ouverture

Après avoir visionné une courte vidéo commémorative intitulée « l’histoire mondiale des droits des femmes », M. VOLKAN BOZKIR (Turquie), Président de la soixante-quinzième session de l’Assemblée générale, a solennellement ouvert la réunion de haut niveau, en appelant, d’emblée, à « un véritable changement ».  Il a exhorté les dirigeants à « agir » pour s’adapter aux défis mondiaux actuels et défendu l’égalité d’accès à l’éducation et la fin du « fléau » des violences sexuelles et sexistes. 

« Je vous exhorte à continuer à agir, à relever les défis d’un monde qui évolue rapidement.  L’engagement à s’adapter pour répondre aux besoins des peuples que nous servons est ce qui nous permettra d’accélérer la réalisation de l’égalité des sexes », a déclaré le Président.  Il nous incombe de réduire la fracture numérique, de fournir une éducation aux filles, d’offrir aux femmes des opportunités économiques égales et de mettre fin au fléau de la violence sexiste, a insisté M. Bozkir. 

Ici à l’ONU, a-t-il poursuivi, il nous incombe à l’ONU de changer le statu quo.  « Votre stylo, votre voix et votre vote, a-t-il dit aux délégués, ont le pouvoir de changer la société ».  Dans cette salle, vous ne parlez pas en votre nom propre mais au nom de ceux qui vous ont confié la responsabilité de vous assoir derrière le nom de votre pays.  « Vous êtes censés répondre aux aspirations du monde ». 

Le Président a dès lors encouragé à poursuivre l’édification normative des droits des femmes, soulignant qu’à la dernière session de l’Assemblée, les représentants ont renforcé leurs efforts et adopté des résolutions sur la fille; la prévention de la violence à l’encontre des travailleuses migrantes; et l’amélioration de la situation des femmes et des filles rurales. 

Il a appelé les États Membres à la mise en œuvre de ces résolutions ce qui, selon lui, exige plus qu’une législation: il faut changer les normes établies.  Chacun de nous doit assumer sa responsabilité individuelle de créer un monde plus juste.  Il nous faut des normes plus justes capables de garantir la consolidation de la paix, de favoriser le développement durable et de promouvoir le respect des « droits des personnes que nous servons ». 

En troisième lieu, M. Bozkir a chaleureusement remercié la société civile : « nous ne serions pas ici sans vous ».  Pour lui, il est essentiel que cette société civile continue à faire entendre sa voix, comme il y a 25 ans à Beijing.  Vous comprenez, leur a-t-il dit, la complexité des problèmes posés.  Vous êtes les experts.  Nous devons vous écouter, a ajouté M. Bozkir, qui a renvoyé au travail de la société civile au sein des communautés, à la réduction des fossés et des lacunes, plus critiques que jamais aujourd’hui avec la pandémie mondiale.  S’il n’y avait pas eu la pandémie, les représentants de la société civile seraient présents dans l’hémicycle et leurs places leur sont toujours réservées.

Le Président a rendu hommage aux femmes qui sont actuellement sur la ligne de front dans la lutte contre la propagation de la pandémie de COVID-19.  Il a aussi rendu hommage aux professionnels de la santé et travailleurs sociaux qui ont œuvré sans relâche pendant la pandémie, en particulier les femmes qui représentent 70% de la main d’œuvre.  Il a fait de même pour les femmes du secteur humanitaire qui ont façonné le cours de l’histoire.  

« Une femme au pouvoir n’est pas une menace », a martelé M. Bozkir.  Vous n’êtes ni mieux ni pires mais vous devez reconnaître notre privilège d’homme.  S’adressant à ses petites filles et aux autres, il a dit « vous pouvez tout faire » et sachez ceci : « il n’y a rien que les femmes ne puissent faire.  Osez être les premières.  Osez faire ce qu’aucune femme n’a jamais fait auparavant ».  « Nous avons besoin de femmes au pouvoir et il y a du pouvoir sur un podium, dans l’information, les données et la science, dans vos mots, dans le partage de votre expérience, dans une main tendue, dans la solidarité. »  Ne doutez jamais, a martelé le Président, de votre pouvoir personnel.  Affirmez-le. 

Mais j’ai une question, a-t-il poursuivi: quand allons-nous atteindre l’égalité des sexes?  Au cinquantième anniversaire de la Conférence de Beijing?  Au centenaire des Nations Unies?  Pourquoi attendre? a pressé le Président.  Agissons aujourd’hui pour assurer l’égalité, demain.  C’est à nous tous de le faire.  Nous voulons l’adhésion des gouvernements, de la société civile, du secteur privé, des Nations Unies et de « vous à la maison ».  Le pouvoir du multilatéralisme est alimenté par les actions individuelles, par les décideurs à tous les niveaux.  Il est temps d’égaliser les règles du jeu.  Chacun d’entre nous a le pouvoir d’imprimer le changement.  Nous sommes tous dans le même bateau et il y a « du pouvoir dans la solidarité, ne doutez jamais de votre pouvoir personnel,« affirmez le », a répété le Président.

« Moment charnière », « point de repère » et « tournant » : c’est par ses mots que M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a qualifié la Conférence de Beijing, dont la « vision audacieuse » et « transformatrice » a tout d’abord montré que les droits des femmes sont au cœur de l’égalité et de la justice partout dans le monde.  D’importants progrès ont été réalisés, comme le déclin de la mortalité maternelle de près de 40% depuis 1995 et le niveau de scolarisation des filles, plus élevé « que jamais auparavant dans l’histoire ».  Reste que la Déclaration de Beijing n’a pas été mise en œuvre dans son intégralité, a constaté le Chef de l’Organisation, en rappelant par exemple qu’une femme sur trois subit encore une forme de violence au cours de sa vie.  Chaque année, 12 millions de filles se marient avant l’âge de 18 ans et dans certaines régions du monde, le nombre de féminicides pourrait laisser croire que l’on se trouve dans une zone de guerre, s’est alarmé M. Guterres.   En 2017, dans le monde 137 femmes par jour sont mortes aux mains d’un membre de leur propre famille.

Les femmes, a poursuivi le Secrétaire général, sont encore fréquemment exclues des négociations de paix, des discussions sur le climat et des rôles décisionnels de toutes sortes.  Enfin, dans le monde entier, en moyenne, les femmes ne jouissent que de 75% des droits dont jouissent les hommes et la Banque mondiale estime qu’il faudrait 150 ans pour atteindre l’égalité salariale.  

Les femmes et les filles sont les plus touchées par l’impact social et économique massif de la pandémie de COVID-19.  Les infirmières et soignantes sont en première ligne de la réponse à la crise sanitaire, alors que les hommes occupent 70% des rôles de leadership dans le secteur de la santé.  Les femmes sont touchées simultanément par une autre pandémie, celles des violences sexistes et des pratiques abusives et répressives, dont le mariage précoce et le déni d’accès à la santé sexuelle et reproductive. 

« Si nous n’agissons pas maintenant, la COVID-19 pourrait anéantir une génération de progrès fragiles vers l’égalité des sexes », a mis en garde le Secrétaire général.  Basés sur une domination masculine de plusieurs millénaires, les systèmes et structures contemporains ont de graves conséquences pour les femmes.  La COVID-19 démontre que nous avons de toute urgence besoin d’une forte impulsion pour réaliser les promesses non tenues de Beijing. 

C’est fondamentalement une question de pouvoir, a analysé M. Guterres.  Cela commence donc par la représentation égale des femmes aux postes de direction, dans les gouvernements, les conseils d’administration, et à la table des négociations, partout où sont prises des décisions qui affectent la vie des gens.  Pour y parvenir, il faudra des mesures ciblées, notamment des actions positives et des quotas.  « C’est une question de droits de l’homme et un impératif social et économique », a martelé le Secrétaire général.

Aussi a-t-il encouragé tous les États Membres à prendre des engagements concrets, assortis d’échéanciers ambitieux en faveur du leadership des femmes et de leur égale participation.  À l’ONU, nous avons atteint la parité entre les sexes dans notre leadership au début de 2020, avec 90 femmes et 90 hommes aux postes de direction les plus élevés.  Nous œuvrons maintenant à la parité à tous les niveaux, a assuré M. Guterres.

La COVID-19 est une catastrophe, mais c’est aussi l’occasion de lancer une réflexion transformatrice qui place les femmes au premier plan de la riposte et de la reprise.  Les fonds concernés devraient remettre directement de l’argent aux femmes par les transferts et les crédits et les gouvernements, élargir les filets de sécurité sociale aux femmes qui travaillent dans l’économie informelle, tout en reconnaissant la valeur du travail non rémunéré.  Le Secrétaire général a ensuite réitéré son appel à une action urgente et globale contre la violence sexiste. 

L’ONU, a-t-il souligné, s’emploie à éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, notamment grâce à son partenariat avec l’Union européenne, intitulé « Spotlight ».  Il a exhorté les États Membres à intensifier leur soutien aux organisations de la société civile qui ont toujours été à l’avant-garde du mouvement des droits des femmes.  Le prochain Forum « Génération Égalité », coorganisé par les Gouvernements du Mexique et de la France, sera l’occasion de créer des réseaux et des partenariats en faveur du changement.  

Ces derniers temps, a constaté le Secrétaire général, nous avons vu partout dans le monde un recul dans l’égalité entre les sexes et des droits des femmes.  Il est temps d’inverser à nouveau la tendance, a déclaré M. Guterres.  « Enfin, je voudrais rectifier une idée reçue répandue.  La Conférence de Beijing ne concernait pas seulement les femmes.  Elle concernait aussi bien les femmes, les hommes, les filles et les garçons », a-t-il ajouté en conclusion.

Le Président de la Chine, M. XI JINPING, a rendu un hommage appuyé aux femmes qui ont été aux premières lignes de la lutte contre la COVID-19 partout dans le monde.  Elles se battent jour et nuit et elles ont écrit « avec dévouement et sagesse » une épopée émouvante en sauvant des vies.  Évoquant le vécu de la Chine, où deux tiers des professionnels de la santé déployés à Wuhan pendant la pandémie étaient des femmes, le Président a raconté l’histoire de cette très jeune femme qui a dit aux journalistes en arrivant à Wuhan : « à partir du moment où je porte une combinaison de protection, je ne suis plus une enfant. »  Ces mots ont ému tous les Chinois et mobilisé l’engagement sans précédent des Chinoises.

Mais, a concédé le Président, la pandémie a mis les femmes à rude épreuve à bien des égards partout dans le monde.  Il a plaidé pour qu’on leur accorde une attention particulière dans les efforts de relèvement et de reconstruction post-COVID.  Cela signifie, a précisé le Président, qu’il va falloir faire de la protection des droits et intérêts des femmes une priorité, répondre aux besoins des femmes en situation précaire et faire de l’égalité des sexes une priorité nationale partout.  Il faut éliminer les préjugés, la discrimination et la violence à l’encontre des femmes et faire de l’égalité femme-hommes un devoir moral, a renchéri le Président Xi avant d’appeler à valoriser le rôle pionnier des femmes, à mobiliser et faciliter leur créativité, à les impliquer dans les processus de prise de décisions et à les aider à pleinement s’épanouir.  La Chine soutient l’ONU dans ses efforts pour faire du travail décent des femmes une priorité mondiale.

Il y a cinq ans, le Président Xi a rappelé qu’il a proposé de tenir la réunion des dirigeants et dirigeantes du monde sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.  Je souhaite à nouveau convoquer cette manifestation, a-t-il confirmé, avant d’annoncer une contribution supplémentaire de 10 millions de dollars sur cinq ans à ONU-Femmes. 

« La Déclaration et le Programme d’action de Beijing ont ouvert une nouvelle ère dans le combat pour l’égalité des sexes », a affirmé Mme PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA, Directrice exécutive de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes).  Ces documents ont mené à des progrès considérables, dont 274 réformes législatives et normatives dans 131 pays. 

Aujourd’hui, a-t-elle dit, les femmes participent de plus en plus aux processus de paix.  En vertu du droit international, les crimes fondés sur le sexe dans les situations de conflit sont reconnus et poursuivis.  Les filles et les femmes sont davantage scolarisées et bénéficient d’un meilleur accès à la santé maternelle.  La reconnaissance des problèmes spécifiques auxquels se heurtent les filles a permis de s’attaquer aux pratiques préjudiciables, telles les mutilations génitales féminines (MGF).   

La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a tenu à rappeler qu’à la création de l’ONU en 1945, « un tournant marquant et courageux », aucune femme n’était chef d’État ou de gouvernement.  En 1995, on en comptait 12 de ces femmes, et aujourd’hui, 22 parmi les 193 États Membres. 

Les progrès sont là mais « insuffisants et trop lents », a-t-elle tranché, ajoutant que le leadership féminin, notamment celui des jeunes femmes, est « vital », compte tenu de la nécessité urgente de reconstruire en mieux après la COVID-19.  « Les femmes et les peuples du monde exigent ces changements », a insisté Mme Mlambo-Ngcuka.   

Avec la Décennie d’action pour la réalisation des objectifs de développement durable, « il n’y a plus aucune excuse pour ces déséquilibres », a-t-elle encore martelé.  Les femmes croient que le multilatéralisme et l’ONU sont indispensables, il faut donc qu’ils deviennent plus inclusifs.  

Les femmes, a précisé la Chef d’ONU-Femmes, exigent que l’on dépasse le seuil de 50% dans la représentation ou la parité dans toutes les sphères de l’économie, y compris dans les gouvernements et les conseils d’administration, sans oublier l’accès aux aides fiscales décidées dans le contexte de la COVID-19.  Les femmes, a-t-elle poursuivi, réclament une réelle participation à tous processus de paix.

Estimant que les pièces maîtresses sont désormais en place pour faire reculer l’extrême pauvreté, la Directrice exécutive a pressé: nous devons commencer maintenant.  Elle a demandé aux dirigeants du monde des engagements pour avancer rapidement, au-delà des modestes acquis enregistrés depuis 1995, lesquels sont d’ailleurs menacés aujourd’hui.  Il nous faut « des pas de géant » et pas de petits pas. 

Il est temps d’en finir avec les législations et normes discriminatoires, l’homophobie et la violence des hommes.  Ce vigoureux leadership doit s’accompagner d’une volonté sans faille, à la hauteur des défis, et d’investissements urgents dans les organisations féminines, les jeunes leaders féministes et les ministères et agences chargés de l’égalité des sexes.  Le Secrétaire général l’a fait, a souligné la Directrice exécutive, en parlant de la parité parfaite dans le système des coordonnateurs résidents.   

« Nous sommes à la croisée des chemins », a-t-elle prévenu.  Mlambo-Ngcuka a enfin remercié les parties prenantes au Forum « Génération Égalité », les jeunes pour leur « impatience radicale et constructive » et l’ONU pour sa faculté irremplaçable à rassembler le monde, comme elle l’a fait à San Francisco en 1945, à Beijing en 1995, et à New York en 2010 pour créer ONU-Femmes.  Dans le monde entier, les femmes ont foi en l’ONU et en la solidarité entre les nations.  Elles croient que le « Nous, les peuples » peut changer l’avenir lequel est « entre nos mains ». 

Alors que le monde célèbre le vingt-cinquième anniversaire de la Conférence de Beijing et de son Programme d’action qui a constitué « une percée », Mme NATALIA KANEM, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), s’est souvenue de l’enthousiasme lorsque les femmes du monde entier ont déclaré que les droits des femmes étaient des droits de la personne.  Aujourd’hui, je dis: les droits des femmes et des filles ne sont pas négociables.  Nous devons défendre les femmes et les filles face à l’adversité, s’agissant de la santé et des droits sexuels et reproductifs, essentiels pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.  

 Ce matin, a rappelé la Directrice exécutive, une fille adolescente se réveillera pour apprendre qu’elle devra subir un rituel et quelques heures plus tard, elle subira une mutilation génitale.  Ailleurs, une fillette de 5 ans entendra ses parents dire que les filles sont un fardeau qui sera « allégé » dans quelques années avec un mariage à un homme beaucoup plus âgé.

Ces scénarios se répètent au quotidien dans le monde entier, a dénoncé la Directrice exécutive.  Quel est leur point commun?  Les inégalités entre les sexes et les tentatives de contrôler le corps et la vie des femmes.  Quand l’éducation et le potentiel des femmes sont sapés, le potentiel de l’humanité l’est aussi, a averti Mme Kanem.  Oui, il y a des progrès dont il faut se féliciter en ces 25 ans depuis Beijing.  Il y a eu des avancées depuis la Conférence du Caire sur la population et le développement.  Mais la vie des femmes et des filles dans le monde entier montre bien qu’il reste un long chemin à parcourir.  C’est pourquoi, la Directrice exécutive du FNUAP   a préconisé des mesures collectives et « c’est urgent ». 

Elle a rappelé que le FNUAP en tant que Coprésident de la Coalition sur la santé et les droits sexuels et reproductifs, et à disposer de son corps, est au côté de la société civile.  Les données indiquent que seule 55% des femmes dans le monde peuvent prendre leurs propres décisions en matière de santé.  Une femme sur trois subit le traumatisme de la violence au cours de sa vie et l’année dernière, 280 000 adolescentes et jeunes femmes ont été infectées par le VIH/sida.  Plus de 800 femmes meurent chaque jour de complications liées à la grossesse et à l’accouchement.  Les violences sexuelles se sont accrues pendant la pandémie de COVID, de même que la grossesse des adolescentes.

Tous ces facteurs s’aggravent.  Dès lors, la Directrice exécutive a plaidé pour un soutien politique et des investissements ciblés, sinon, a-t-elle averti, les gains difficilement accumulés au fil des décennies seront mis en péril.  Le moment est venu de traduire les paroles en actes et surtout en financement des programmes transformateurs en faveur des femmes.  Car, a expliqué Mme Kanem, investir dans les femmes et les filles, ce n’est pas simplement une question de droit.  C’est une « décision de bons sens » qui aura des retombées positives sur l’économie.  Pour finir, elle a fait part de sa foi dans le rôle de chef de file des femmes dans les communautés et appelé, en cette Décennie d’action pour la réalisation des objectifs de

Mme HILARY GBEDEMAH, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, a dit que ce vingt-cinquième anniversaire offre l’occasion de réaffermir l’engagement à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la Déclaration et du Programme d’action de Beijing.  Au cours de ces 25 dernières années, a rappelé la Présidente, le Comité a interprété les droits de la Convention à travers sa jurisprudence et ses Recommandations générales sur les femmes dans la vie politique, la santé, l’éducation, les femmes âgées, les travailleuses migrantes, les femmes rurales, les femmes en conflit, les pratiques néfastes, la violence sexiste à l’égard des femmes, l’accès des femmes à la justice, les changements climatiques et la traite de personnes.  Les recommandations du Comité exigent des États qu’ils prennent des mesures concrètes pour actualiser leurs obligations juridiquement contraignantes en vertu de la Convention et leurs engagements politiques, conformément à la Déclaration et au Programme d’action de Beijing, a indiqué Mme Gbedemah.

La Convention, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing sont les moteurs d’un changement transformateur, a ajouté la Présidente.  La parité hommes-femmes dans l’éducation a été atteinte en moyenne au niveau mondial, le taux de mortalité maternelle a diminué de 38% entre 2000 et 2017 et plus de 150 pays ont adopté une législation portant spécifiquement sur les formes nationales ou autres de violence sexiste à l’égard des femmes.  Le Comité, a-t-elle poursuivi, a pu suivre et catalyser ces progrès en faisant ses observations finales sur les rapports périodiques des États parties, ses rapports d’enquête sur l’accès limité aux contraceptifs et à l’avortement modernes, les meurtres de femmes autochtones, les enlèvements de femmes et de filles pour le mariage forcé et les mutilations génitales féminines, ainsi que dans ses vues sur les plaintes des femmes victimes de violence sexiste ou d’autres violations.  Récemment, le Comité a recommandé une indemnité à une victime de violence sexuelle dans la guerre de Bosnie, a rappelé Mme Gbedemah.

Elle a ajouté que le développement durable ne peut se faire sans la participation égale des femmes à la prise de décisions et au leadership dans tous les domaines de la Convention, du Programme d’action de Beijing et des objectifs de de développement durable.  Le Comité, a-t-elle fait savoir, promeut une relation de renforcement mutuel entre la Convention et le Programme 2030, encourageant les États parties à rendre compte des progrès réalisés dans la réalisation des objectifs du Programme 2030 sur l’égalité des sexes.  L’année dernière, a-t-elle expliqué, une note d’orientation a été adoptée à l’intention des États parties pour l’élaboration de rapports.  En février, a informé la Présidente, le Comité adopté sa contribution au vingt-cinquième anniversaire de de la Déclaration de Beijing intitulée « Les femmes, moteurs du changement », une analyse des bonnes pratiques et des défis rencontrés dans la réalisation des objectifs de développement durable.  

Depuis Beijing, a-t-elle constaté, les normes de protection des droits des femmes sont de plus en plus attaquées, comme en témoignent les tentatives visant à diluer la Convention et l’accent mis sur les « valeurs traditionnelles » visant à confiner les femmes dans leur ménage et à rogner des droits dont les droits à la santé sexuelle et reproductive.  Les défenseures des droits humains sont confrontées à des menaces, à la violence, y compris en ligne, et à des obstacles juridiques tels que la criminalisation de leur travail ou des restrictions dans l’accès aux financements.  De plus, a ajouté Mme Gbedemah, la pandémie de COVID-19 touche les femmes d’une manière excessivement grave.

La note d’orientation sur la Convention et la COVID-19 donnent aux États les outils nécessaires pour promouvoir les droits des femmes dans leurs plans d’intervention et d’après-crise, a indiqué la Présidente, qui a annoncé que le Comité a également nommé un Rapporteur sur les représailles afin de protéger les personnes qui s’engagent ou cherchent à s’engager avec le Comité contre les menaces, les intimidations ou autres représailles.  Le Comité publie régulièrement des déclarations, souvent conjointement avec d’autres traités, pour attirer l’attention sur des questions telles que le rétrécissement de l’espace civique des femmes activistes, le harcèlement sexuel ou les droits de l’homme et les changements climatiques.

La Présidente a prévenu que, sans les ressources nécessaires, les organes conventionnels seront en retard dans leur travail, avec des conséquences désastreuses pour de nombreux titulaires de droits, y compris les femmes et les filles.  Avant de terminer, elle a appelé les États à saisir ce moment de l’histoire comme une occasion d’adopter des stratégies transformatrices fondées sur la non-discrimination et la solidarité, tant au niveau national qu’international, pour parvenir à l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et des filles et la réalisation de leurs droits fondamentaux.   

Mme ELISABETH BRODERICK, Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles, a d’emblée souligné l’importance du Programme d’action de Beijing, le plus visionnaire à ce jour pour l’égalité des sexes et les droits fondamentaux des femmes et des filles.  Aujourd'hui, il est plus important que jamais, a-t-elle insisté.  Beijing, a-t-elle estimé, n’a jamais eu pour but de « bricoler ou de simplement ajouter » les femmes aux structures existantes.  C’est pourquoi, aujourd'hui, le Groupe de travail s’adresse à toutes les jeunes filles nées à cette époque, partout dans leur diversité.  « Ces jeunes femmes dont nous avons imaginé l’avenir il y a 25 ans ». 

« Vous êtes nées à un moment où les dirigeants du monde entier ont enfin reconnu que les droits des femmes étaient des droits humains et qu’avec une action volontaire, les hommes et les femmes marcheraient un jour côte à côte sur un pied d’égalité.  Lorsque vous avez eu 15 ans, les États et les organisations de défense des droits des femmes se sont à nouveau réunis et ont convenu que la réalisation de la vision de Beijing exigeait un mécanisme supplémentaire aux Nations Unies sur les droits des femmes.  C’est ainsi que le Groupe de travail est né en 2010, a rappelé Mme Broderick.  Vous avez maintenant 25 ans.  Les promesses qui vous ont été faites à votre naissance ont-elles été tenues?  Certes, des progrès importants ont été réalisés.  Dans le monde entier, les filles ont autant de chances que les garçons de terminer l’école primaire, même si leurs chances de faire de même dans l’enseignement secondaire et supérieur dépendent encore de leur adresse et de leurs moyens.  Les possibilités de travail se sont élargies, même si, aujourd’hui encore, la qualité et les conditions d’emploi des femmes restent préoccupantes.  Vous avez maintenant de nouvelles possibilités dans la vie politique puisque la représentativité des femmes a doublé.  Aujourd’hui, de nombreux pays se sont dotés de lois contre la violence à l’égard des femmes et assurent la protection des droits sexuels et génésiques des femmes. 

Mais, il y a encore tant à faire!  Vingt-cinq ans plus tard, la discrimination contre les femmes et les filles, et l’impunité des violations persistent.  En 2020, alors que nous luttons contre une pandémie qui a un impact négatif disproportionné sur les femmes, partout, dans toutes les régions, nos progrès durement acquis sont menacés. » 

Au nom de son Groupe de travail, la Présidente s’est adressée aux dirigeants du monde entier: « comment allez-vous utiliser votre pouvoir et votre influence?  Quelles promesses ferez-vous aux filles nées aujourd’hui et comment les tiendrez-vous? »  Aujourd’hui, nous avons fait le choix de nous réunir à nouveau collectivement, comme nous l’avions fait à Beijing, pour empêcher les reculs et réaffirmer l’égalité des sexes et pour nous engager à nouveau dans la vision qui a présidé à la naissance du Programme d’action.  « Nous ne pouvons pas changer le passé, mais nous pouvons changer l’avenir et nous le ferons. »

Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIĆ, Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, a rappelé qu’elle avait participé en 1995 aux travaux de la Conférence de Beijing.  2020, a-t-elle rappelé, devait être un jalon pour mesurer les progrès réalisés au bout de 25 ans, mais en raison de la COVID-19, tout a été remis en question et la cause des femmes a essuyé plusieurs revers.  Alors qu’elle n’a pu effectuer les visites de pays prévues par son mandat, l’experte a indiqué qu’elle a publié, le 27 mars 2020, un communiqué de presse alertant sur la montée des violences domestiques à la suite des mesures de confinement imposées dans le monde entier pour lutter contre la pandémie.  

Mme Šimonović, a également annoncé qu’elle a préparé un rapport sur les conséquences de la pandémie axé sur la problématique du genre.  Se joignant à l’appel lancé par le Secrétaire général, elle a exhorté à venir à bout des résistances vis-à-vis des femmes qui sont apparues au cours de l’année écoulée.  La Rapporteuse spéciale a par ailleurs souligné la nécessité de mettre l’accent sur des formes de violences moins documentées, comme la violence en ligne et la violence à l’encontre des femmes politiques.  Elle a également annoncé qu’elle prépare un nouveau rapport sur le viol, avant de juger nécessaire pour la communauté internationale d’élaborer un plan de mise en œuvre des droits des femmes et de faire de la question de la violence contre les femmes un point « permanent » de l’ordre du jour. 

Mme NOMZAMO MBATHA, Défenseure de l’égalité des sexes et Ambassadrice de bonne volonté auprès du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), a rappelé que, en 1995 à Beijing, le monde s’était engagé à garantir l’égalité des droits et des chances aux femmes et aux filles.  Plus de 25 ans plus tard, le Programme d’action de Beijing demeure selon elle la pierre angulaire de cette promesse.  Mme Mbatha a d’ailleurs noté que les États Membres viennent de réaffirmer leur engagement en faveur de la réalisation du Programme d’action avec l’adoption du Pacte mondial sur les réfugiés, qui prévoit notamment une protection spécifique pour les femmes et les filles vivant dans des camps de réfugiés.

Pour Mme Mbatha, cette dernière question constitue l’un des plus grands défis en matière de droit de l’homme, car plus de la moitié des millions de personnes déplacées dans le monde sont des femmes et des filles.  J’ai eu la chance, a-t-elle dit, d’aller à leur rencontre dans plusieurs camps de réfugiés et j’ai été inspirée par leur résilience, leur courage et leur espoir.   Mme Mbatha s’est remémorée sa rencontre avec une jeune réfugiée de 16 ans qui souhaitait devenir médecin comme son père, qu’elle voyait tous les matins enfiler sa blouse blanche avant d’aller sauver des vies.  Mais la guerre a éclaté et sa famille a été contrainte de fuir.  « Elle a dû mettre son rêve entre parenthèses. »  

Aussi, Mme Mbatha a-t-elle souligné l’importance de garantir l’éducation des filles dans les camps de réfugiés.  En plus de la fermeture des écoles en raison de la pandémie de COVID-19, les effets à long terme risquent d’empêcher la moitié des filles refugiées de retourner à l’école, s’est-elle inquiétée, citant les prévisions du Fonds Malala pour le droit des filles à l’éducation.  Selon Mme Mbatha, de nombreuses femmes et filles déplacées risquent de voir leur famille les contraindre à des relations sexuelles et des mariages précoces, en raison des retombées économiques de la crise sanitaire.  En conclusion, Mme Mbatha a appelé les États Membres à donner la priorité à la sécurité et à la sûreté des femmes et filles déplacées, ainsi qu’à la réalisation de leurs droits.  « Il ne peut y avoir de futur sans la participation pleine et entière des femmes et des filles », a-t-elle affirmé. 

Mme SASCHA GABIZON, Directrice de « Women Engage for a Common Future », a rappelé qu’elle était présente à la Conférence de Beijing et déploré que, 25 ans plus tard, l’on assiste à des régressions.  Elle a cité en exemple les attaques contre les droits à la santé sexuelle et reproductive, mais aussi les discriminations, emprisonnements, voire assassinats de femmes défenseurs des droits humains, de femmes autochtones, de femmes de couleur, de femmes trans. Nous avons besoin de vous tous pour repousser cette régression, a lancé Mme Gabizon. 

 Les féministes de la société civile soutiennent ONU-Femmes et sa campagne « Génération Égalité », a poursuivi Mme Gabizon.  Face aux multiples crises -conflits armés, COVID-19, crise climatique et environnementale– il faut encore davantage défendre les droits des femmes car elles sont en première ligne.  En effet, elles constituent la majorité des agents du secteur de la santé, elles forment la majorité des pourvoyeurs de nourriture à leur famille alors que 800 millions de personnes sombrent dans l’extrême pauvreté et la faim et elles sont la majorité des victimes de l’aggravation de la violence sexuelle et sexiste résultant du confinement consécutif à la pandémie. 

Les causes de cette violence et de cette discrimination sont « systémiques », issues du colonialisme, de l’esclavage ou des traditions patriarcales.  Elles sont soutenues par l’exploitation économique et les lois et institutions racistes, a poursuivi la représentante de la société civile.   

Mme Gabizon a fait état de progrès, qu’elle a attribués aux efforts « inlassables » de nombreuses féministes.  Elle a cité la campagne #MeToo et la nouvelle Convention 190 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la violence et le harcèlement.  L’oratrice a appelé tous les États Membres des Nations Unies à la ratifier dès maintenant.  Elle a aussi exigé la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, de la Convention d’Istanbul, du Programme de développement durable à l'horizon 2030 et de son objectif 5 sur l’égalité des sexes.  Nous devons tous nous remettre sur les rails, a-t-elle affirmé.

Mme Gabizon a rappelé que déjà à Beijing, la société civile avait demandé aux États de cesser de financer les militaires et d’investir plutôt dans les soins de santé, la protection sociale et les droits des femmes.  Dans cette ligne, elle a demandé la fin du commerce des armes légères et l’adhésion à l’appel au cessez-le-feu mondial lancé par le Secrétaire général.  « Nous avons besoin de voir au Conseil de sécurité les femmes et les hommes affectés par les conflits et pas les pays exportateurs d’armes », a lancé Mme Gabizon.  

Nous voulons reconstruire en mieux.  Nous voulons construire pour l’avenir, a poursuivi la militante de la société civile, qui a demandé aux États de se débarrasser de leur industrie du plastique, des pesticides, de l’extraction ou encore du nucléaire.  Il faut une transition juste pour tous les travailleurs de ces secteurs, a ajouté Mme Gabizon, qui a préconisé d’investir dans une transformation « verte et soucieuse d’égalité des sexes ».

L’oratrice a plaidé pour l’annulation de la dette, une répartition équitable des futurs vaccins contre la COVID-19 et une convention fiscale des Nations Unies pour mettre fin à la « spirale des paradis fiscaux.  N’attendons pas le centenaire des Nations Unies.  Les féministes veulent le changement maintenant, a conclu Mme Gabizon.

Mme IXCHEL ADOLFO, jeune femme dirigeante du Guatemala, s’est présentée comme une volontaire de 21 ans au sein d’un réseau départemental de jeunes filles, également à la tête d’une coalition d’action sur les violences basées sur le genre.  Dans son pays, a-t-elle précisé, 61% des femmes ont entre 15 et 24 ans, 78,3% sont éduquées et 21,7% analphabètes, selon les chiffres du recensement de 2018.  Si les femmes représentent un fort pourcentage de la population nationale, elles ne sont pas prises en compte dans la prise de décisions en raison du « machisme dominant » et de « l’inégalité inhérente » des droits. 

La pandémie de COVID-19 aggrave cette situation puisque 41% des cas confirmés et 27% des décès concernent des femmes, a poursuivi Mme Adolfo.  En raison de cette crise sanitaire, nous avons été touchées dans des domaines comme l’éducation et la santé, a expliqué la jeune dirigeante.  Les femmes sont également confrontées aux violences sexuelles et sexistes, au chômage et aux grossesses précoces, a-t-elle encore souligné, faisant état de 1 262 grossesses chez des filles de 10 à 14 ans depuis janvier. 

À la lumière de ces données et au nom des adolescentes, la jeune cheffe de file a demandé à tous les responsables, hommes et femmes, de créer un environnement sûr « de notre enfance à notre vie adulte », où nulle n’aura à craindre la violence, la discrimination, l’exclusion, la disparition forcée ou la mort.  Elle a plaidé pour une « protection intégrale » depuis les premières années de la vie, pour l’éducation et l’autonomisation, l’accès aux soins de santé et la fin de la stigmatisation « lorsque nous demandons des contraceptifs ou l’aide du planning familial ».  Elle a par ailleurs souhaité que soient proposés aux jeunes femmes des emplois qui n’exigent pas des années d’expérience et des formations adéquates.  Pour y parvenir, a-t-elle conclu, « nous devons agir de concert, jeunes et preneurs de décisions, et ouvrir des espaces de dialogue parce que nous savons mieux que quiconque quels sont nos besoins ».

Débat général

Lutte contre la pauvreté et participation des femmes à la vie économique

Tous se sont accordés à dire que les femmes sont les plus durement touchées par la pandémie de COVID-19.  Comme ont dit craindre les Présidentes de l’Éthiopie et du Népal, les gains réalisés au cours des 25 dernières années, notamment sur le plan socioéconomique, risquent d’être annulés.  Le Président de la France a donc souhaité faire de l’égalité entre les femmes et les hommes une « priorité » de sa diplomatie.  Nous le devons à toutes les femmes qui ont été en première ligne face à la crise sanitaire, a-t-il martelé.  Nous le devons à toutes celles qui ont subi plus durement que les hommes les effets directs ou indirects de cette crise, aux 11 millions de filles qui pourraient ne jamais retrouver le chemin de l’école, aux femmes privées de contraception, aux victimes de féminicides et de violences domestiques.

De façon générale, l’heure est à la vigilance et à la mobilisation, a averti le dirigeant français.  En 2020, la Déclaration de Beijing n’aurait aucune chance d’être adoptée.  Partout, a-t-il dénoncé, les droits des femmes sont attaqués.  Des progrès acquis de haute lutte sont remis en cause jusque dans nos démocraties, à commencer par la liberté pour les femmes de disposer de leur propre corps et, en particulier, le droit à l’interruption volontaire de grossesse.  Son homologue de la Finlande a, lui aussi, défendu avec force les droits sexuels et reproductifs des femmes.

Parfois on subit des revers, a renchéri la Présidente de la Commission européenne, même si « nous avons de la chance au sein de l’Union européenne », car sur les 20 premiers pays du monde en matière d’égalité des sexes, 14 sont des États membres de l’Union européenne (UE).  Elle a défini une série d’actions clefs pour 2021-2025 dans trois domaines: la prévention et l’élimination de toutes les formes de violence contre les femmes et les filles; la promotion et l’autonomisation des femmes; et l’égalité salariale, car il existe toujours un écart de 16% dans l’UE.  La Présidente a promis qu’elle soumettra des mesures « contraignantes » sur la transparence salariale avant la fin de l’année.  « Nous avons besoin de transparence salariale pour que les femmes puissent prouver qu’elles sont sous-payées. »

« Frappée » lors du débat général de l’Assemblée générale par le fait que seule une petite dizaine d’États sur 193 États Membres étaient représentés par des femmes, la Présidente de la Suisse s’est enorgueillie de ce que l’« égalité des sexes n’est pas nouvelle chez nous ».  Première fois à occuper ce poste dans son pays et dans sa région, son homologue de la Géorgie, qui a salué la mémoire de la juge américaine, Ruth Bader Ginsberg, a reconnu qu’il faut faire plus pour l’autonomisation des femmes, notamment celles qui travaillent dans l’économie informelle.  Les femmes qui dépendent pour vivre de cette économique, a confirmé la dirigeante de l’Éthiopie, se trouvent dans des conditions extrêmement difficiles.  Nous ne devons pas laisser la pandémie freiner nos progrès, a plaidé son homologue du Népal, en demandant des plans de relance « solides » qui prennent en charge les besoins socioéconomiques des femmes et des filles.

Il est important, a encouragé le Président du Ghana, que le continent africain ne baisse pas les bras et continue à lutter contre les inégalités entre les sexes.  Nous avons redoublé d’efforts, a affirmé son homologue du Nigéria, pour garantir la participation des femmes à tous les aspects de la vie, notamment dans le secteur agricole grâce des crédits à taux zéro.  Même chose au Botswana, a assuré son Président où l’on poursuit la politique nationale pour l’égalité des sexes et le développement économique, centrée sur la lutte contre la pauvreté.

Préoccupée elle aussi par les effets socioéconomiques de la COVID-19, la Présidente de la Bolivie a insisté sur l’accès des femmes au crédit et l’égalité d’accès à l’emploi.  En la matière, le Président de Kiribati a indiqué que chez lui, les femmes représentent 58% de la population active et que leur taux de chômage est de 43,5% contre 33% chez les hommes.  Un « Manifeste » a été lancé pour améliorer l’accès des femmes à la microfinance.

L’égalité des sexes n’est pas seulement un droit humain fondamental: elle est liée à la performance économique et sociale globale d’une société, a martelé le Président de la Slovénie, chez qui l’écart salarial est le moins élevé au monde.  De nombreuses femmes prospèrent car des progrès ont été accomplis dans le partage plus équitable de la prise en charge de la famille.  En Macédoine du Nord, s’est désolé son homologue, les progrès sont encore insuffisants pour surmonter les obstacles en matière d’emploi, de discrimination sur le marché du travail, d’écart salarial ou de travail non rémunéré, alors que 78% des plans de développement sont alignés sur le cinquième objectif de développement durable relatif à l’égalité des sexes.

L’Égypte, a assuré son Président, a été le premier pays au monde à publier un document politique répondant aux besoins spéciaux des femmes et des filles dans le contexte de la pandémie, avec plus de 106 décisions et mesures de soutien à la femme égyptienne.  Le pays, où se trouve déjà le siège de l’Organisation de la femme arabe de la Ligue arabe, s’apprête d’ailleurs à accueillir l’Organisation pour le développement de la femme.

Ces dernières années, nous avons pris des mesures historiques pour renforcer le rôle des femmes dans la vie quotidienne, s’est félicité le Président de la Turquie.  Il a vanté le principe « Femmes fortes, Famille forte, Société forte » qui encourage la participation des femmes à la vie active.  Depuis 1995, la main d’œuvre féminine est passée de 3,9 millions à 10,6 millions de personnes et le taux d’activité des femmes a augmenté de 6,5 points pour s’établir à 34,4%.

Toutefois la pandémie de COVID-19 peut anéantir ces progrès en matière d’autonomisation des femmes.  Le Président du Malawi s’est alarmé: la fermeture d’écoles au cours de ces cinq derniers mois a entraîné « une flambée sans précédent » de grossesses précoces, de mariages d’enfants, de la violence sexiste et de la perte d’opportunités économiques pour les femmes.  La crise actuelle exige donc une évaluation objective de la façon dont nous et toutes les parties prenantes pouvons arrêter « l’hémorragie », a-t-il dit.

Mon administration continue de promulguer une législation progressiste qui « interdit » l’oppression des femmes dans les secteurs socioéconomiques, notamment dans le secteur agricole, a rassuré le Président du Zimbabwe.  Il a par exemple évoqué la création de la Banque de microfinance.  En Afrique du Sud, a indiqué son Président, des lois ont été amendées pour permettre aux femmes de devenir financièrement indépendantes et d’avoir un meilleur accès à la terre.  Le pays doit ratifier la convention de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la violence et le harcèlement sur le lieu de travail et promouvoir les petites et moyennes entreprises dirigées par des femmes avec des instruments de financement numériques.

« 2020 était censée être une année charnière pour tenir les promesses de Beijing et accélérer le changement », a conclu le Président du Kenya.  Or l’émergence de cette pandémie est sans précédent et si nous ne faisons pas attention, elle risque d’annihiler tous nos gains, a-t-il mis en garde.  « Je crois qu’il s’agit d’un appel à renforcer notre détermination à aller de l’avant et à démontrer notre résilience, en acceptant les défis que nous vivons et en les considérant plutôt comme une occasion de reconstruire en mieux. »

Accès des femmes et des filles à l’éducation et à la formation, et participation à la prise de décisions

Les filles vont davantage à l’école et les femmes participent plus à la vie politique qu’il y a 25 ans, ont majoritairement salué les États Membres, mesurant le chemin parcouru depuis l’adoption, en 1995, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing.

Loin de tout triomphalisme, la Première Ministre de l’Islande a cependant noté que le cinquième objectif de développement durable sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles est de loin celui qui accuse le plus de retard par rapport aux autres objectifs du Programme 2030.  Sur le plan de l’éducation, la pandémie de COVID-19 fait même planer la menace d’un retour en arrière, ont mis en garde les Premiers Ministres de la Suède et de la Norvège, en raison notamment du risque de recrudescence des grossesses précoces et des mariages d’enfants, du fait de la crise sanitaire.

Pour lutter contre ces phénomènes, le Vice-Président de la Sierra Leone a indiqué que son gouvernement a pris des mesures « spécifiques ».  En plus de stratégies de prévention des grossesses non désirées chez les adolescentes, l’Uruguay a dit avoir mis en place un mécanisme d’aide aux étudiantes qui auraient des enfants de moins de 5 ans, afin de leur permettre de terminer leurs études, a indiqué la Vice-Présidente du pays.  Il ne faut pas oublier, a ajouté le Président du Libéria, les autres pratiques traditionnelles qui peuvent porter préjudice à l’éducation des filles.  Le Gouvernement libérien vient d’ailleurs de fermer temporairement des écoles en brousse pour stopper les mutilations génitales féminines.   

Se défaire de telles normes culturelles n’est pas une chose aisée, a reconnu le Premier Ministre des Fidji.  Mais nous n’avons pas le choix.  Aujourd’hui dans son pays, grâce aux efforts de remise en cause des structures traditionnelles, les adolescentes fidjiennes ont plus de chance que les adolescents de mener à bien leur éducation secondaire, soit 92% d’entre elles, d’aller à l’université et de choisir leur famille comme leur carrière.  « Toute la société est perdante quand les talents de la moitié de la population sont sous-utilisés », a martelé le Chef d’État fidjien.    

La crise sanitaire a en outre limité la faculté des femmes à recevoir une formation professionnelle, compte tenu des difficultés économiques, a noté la Vice-Présidente de l’Équateur, où la majorité des 8,8 millions de femmes vit dans des zones rurales très affectées par la pandémie.  En plus de la discrimination ethnique qu’elles subissent et des difficultés qu’elles rencontrent en raison du nombre d’enfants à leur charge, ces femmes doivent travailler davantage dans leur ménage, ce qui les empêche de se former et de se lancer dans l’entreprenariat.  En Équateur, a précisé la Vice-Présidente, les femmes travaillent en moyenne 25 heures de plus que les hommes en milieu rural et 6 heures de plus en zone urbaine.

Pour remédier à ces revers durant la crise sanitaire, le Président des Seychelles a plaidé en faveur de solutions « innovantes ».  Il a dit avoir participé à la mise en place d’une plateforme mettant en lien environ 50 millions de femmes africaines, afin qu’elles puissent se former mutuellement. 

Ce sont aussi les normes traditionnelles qui font aussi obstacle à la participation des femmes à la vie politique, a déclaré le Premier Ministre de Tuvalu, au nom des 14 pays membres du Forum des îles du Pacifique.  La participation des femmes du Pacifique à la prise de décisions demeure « limitée, voire réduite ».  « Nous devons nous transformer culturellement », a-t-il lancé, devant la persistance des structures traditionnelles qui se retrouve également dans des aspects de la vie moderne.  La Première Ministre du Danemark a en effet constaté des obstacles à la participation des femmes à la démocratie en ligne. 

De nombreux pays se sont toutefois enorgueillis des progrès réalisés dans la représentation des femmes dans leurs instances décisionnelles.  La Première Ministre du Bangladesh a ainsi souligné que son pays compte « une » Chef de l’opposition et « une » Présidente du Parlement.  Le Bangladesh compte désormais plusieurs femmes juges à la tête de tribunaux importants, des professeures dans les universités publiques et des femmes ministres au Gouvernement, a ajouté la Présidente, précisant que 30% des sièges dans les collectivités locales sont réservés aux femmes.  Le même pourcentage régit notre Parlement, a indiqué le Premier Ministre de l’Eswatini.  « Nous n’avons jamais eu autant de femmes parlementaires dans l’histoire de notre pays », a annoncé la Première Vice-Présidente du Costa-Rica.

Quant aux Tonga, deux des principaux portefeuilles du Gouvernement actuel sont détenus par des femmes, a renchéri le Premier Ministre du pays, en parlant de la Ministre des infrastructures et du tourisme et de la Ministre de la santé.  Une femme a même été élue pour la première fois Gouverneure de la plus grande île du pays, s’est réjoui le Président des Comores.  La Vice-Présidente de la Colombie s’est targuée d’être la première femme de l’histoire de son pays à occuper ce poste.  Elle a également vanté les mérites de son cabinet ministériel paritaire, du nouveau Conseil consultatif colombien pour les femmes chefs d’entreprise et du Secrétariat responsable des questions liées à l’égalité des sexes au niveau régional.  « Le moment est venu de donner la vedette aux femmes colombiennes », a-t-elle lancé.  

Il y a plusieurs décennies, il aurait été « impensable » d’avoir une femme à la tête de si nombreux États, a salué la Chancelière allemande, avant d’affirmer que les pays qui ont le plus de succès socioéconomiques sont justement ceux où des femmes assument des responsabilités élevées.  La Vice-Première Ministre du Kazakhstan a même proposé à l’ONU d’appuyer la création d’« un centre anticrise assorti d’une banque de données sur les expériences dans la défense des droits de femmes ».  Il faudrait d’ailleurs que les femmes participent davantage à l’élaboration des politiques de lutte contre la pandémie, a souligné le Premier Ministre de l’Espagne.  « Quand les femmes avancent, c’est toute la société qui avance », a-t-il déclaré.  

Santé et lutte contre la violence à l’égard des femmes

« Trop de femmes  meurent dans le monde juste parce qu’elles sont des femmes, et c’est insupportable », s’est indigné la Première Ministre de la Belgique, rejointe par son homologue du Danemark, qui a salué l’action décisive des mouvements féministes et les associations de défense des droits des femmes.  Le droit à vivre à l’abri de la violence est défendu par des accords internationaux, tels que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) et la Déclaration des Nations Unies sur l’élimination de la violence contre les femmes de 1993.  Il n’empêche, «  25 ans de gains acquis de haute lutte » sont menacés par des revers et des « mouvements réactionnaires  », a poursuivi le Premier Ministre du Danemark, citant cette « triste » statistique : une femme sur trois dans le monde fera l’objet de violences au cours de sa vie.  

Le Ministre du commerce extérieur et de la coopération au développement des Pays-Bas a aussi constaté une tendance réactionnaire: après 25 ans de progrès, « les alliances sont en train de se renverser ».  Beaucoup de délégations l’ont affirmé : la pandémie de COVID entraîne des conséquences négatives et profondes s’agissant de la violence à l’égard des femmes.  La lutte contre cette violence connaît actuellement une régression dans de nombreux pays, a renchéri le Vice-Premier Ministre de l’Arménie, malgré les plans nationaux et l’éventail de lois spécifiques.   Les violences sexuelles, sexistes et domestiques se sont propagées au même rythme que la pandémie, a souligné le Premier Ministre du Danemark, et la situation est pire pour les femmes handicapées.  Le même constat a été établi par la Ministre de la condition féminine et des populations vulnérables du Pérou.  

La recrudescence des « violences sexuelles », des « intimidations », de la « discrimination », du « sexisme », des « stéréotypes » et même de la « violence en ligne » du fait des situations de quarantaine et des restrictions à la liberté de circulation pendant la pandémie, ont été dûment dénoncés par la Première Ministre de la Belgique.  Le virus «  agit dans l’ombre de manière profondément inquiétante  », selon le Ministre néerlandais.  Pour comprendre ce phénomène, le Ministre à la présidence du Portugal a dit que son pays a lancé une étude d’envergure, ayant fait de la lutte contre la violence à l’égard des femmes une « priorité », ainsi que la formation des forces de police.   

« Les femmes devraient se sentir en sécurité qu’elles soient au travail ou chez elles », a appuyé le Ministre des affaires étrangères et de la condition féminine de lAustralie, qui a aussi fait de la réduction des violences faites aux femmes « une priorité nationale », à l’instar de nombreux pays comme l’Inde où, a affirmé son Ministre de la condition féminine et de l’enfance, plusieurs lois condamnant le harcèlement sur le lieu de travail et garantissant la protection des femmes contre la violence domestique ont été adoptées.  Garantir la primauté du droit », via plusieurs lois et mécanismes de protection des victimes de la violence domestique est également une priorité de mon pays, a dit la Présidente du Sénat de l’Ouzbékistan.  Le Représentant du Pakistan a évoqué un «  numéro vert » pour prodiguer des conseils aux femmes victimes de violence.    La Ministre de la condition féminine et de l’égalité des sexes du Chili a parlé de la mise en place d’un programme intitulé « Masque-19 » permettant à toute Chilienne victime de violence de contacter des équipes de protection.   

La Serbie, a indiqué sa Vice-Première Ministre, a créé des mécanismes de coordination, dans le même esprit que le Pérou qui a adopté une loi sanctionnant la violence domestique et une ligne budgétaire spécifique, en 2019. Saint-Vincent-et-les Grenadines, a indiqué son Vice-Premier Ministre, a lui aussi mis en œuvre un plan d’action national, accompagné d’une révision de la législation pénale.  

 Aucune tradition, coutume ou religion ne saurait justifier la violence faite aux femmes, a insisté la Belgique et en la matière, le rôle de l’éducation des hommes et des jeunes a été souligné par le Danemark, qui a relevé « l’importance de la prévention pour prévenir des dangers avant qu’ils n’adviennent ». 

Plusieurs pays ont évoqué les violences sexuelles liées aux conflits.  Le Ministre des affaires étrangères de l’Iraq a cité l’adoption en 2019 d’une loi sur les rescapés pour aider les femmes ex-otages de Daech, notamment les femmes yézidies, à reprendre une vie normale et participer à la reconstruction de leur communauté.    Le Vice-Premier Ministre de l’Ukraine a prévenu que « les importants progrès » risquent de subir un revers, alors que se poursuit « l’agression armée » de la Fédération de Russie.  En dépit de nombreuses avancées, La Ministre du genre, de la famille et de l’enfance de la République démocratique du Congo (RDC), a imputé les violences sexuelles aux groupes armés.  

Quelques délégations, notamment le Portugal, ont vanté de grands progrès dans le secteur de la santé sexuelle et reproductive.  Mais dans ce secteur également, la pandémie a aggravé la situation.  Les grossesses non désirées sont en augmentation, a prévenu le Danemark, qui a rappelé que même avant la COVID-19, 800 femmes mouraient en couche chaque jour dans le monde à cause de complications. Beaucoup n’ont pas accès à des moyens de contraception.  Les enfants, a insisté le Premier Ministre du Danemark devraient avoir accès à la santé sexuelle et reproductive et décider du nombre d’enfants qu’elles veulent.  Le Forum « Génération égalité », sous la houlette d’ONU Femmes, de la France et du Mexique, mais aussi la pandémie de COVID-19 offrent l’occasion de mobiliser davantage la communauté internationale et les hommes politiques pour changer la société « comme nous l’avions rêvé à Beijing », a conclu le Danemark sur une note positive : «  aucun pays n’a atteint tous ces objectifs, c’est pourquoi il nous faut rester concentrés ». 

Droits fondamentaux des femmes

« Disons les choses clairement, même si certains disent parfois le contraire, il n’y a pas de droit universel à l’avortement », a indiqué la Ministre des femmes, de la famille et des droits de la personne du Brésil.  « Rien ne justifie ce droit hypothétique ».  Elle a estimé que le Programme d’action de Beijing doit promouvoir les valeurs de la famille, comme « socle de la société ».  Les recommandations internationales sur la santé sexuelle et reproductive doivent être mises en œuvre dans le respect des « limites » prévues par les législations nationales, a tranché la Ministre brésilienne à laquelle s’est opposée le Ministre des affaires étrangères de l’Irlande.  

Mon pays, a-t-il dit, compte investir davantage encore dans les services de santé sexuelle et reproductive et l’égalité des sexes quand l’Irlande entamera son mandat de membre non permanent du Conseil de sécurité en janvier prochain.  L’insuffisance de ces services a été invoquée par la Ministre de la femme et de la protection de la petite enfance du Tchad pour expliquer un taux de fertilité de 6,4 enfants par femme, en 2015.  Elle a également indiqué que la même année, plus de 25% de filles entre 20 et 24 ans étaient mariées avant l’âge de 15 ans.  Les mutilations génitales touchent, a-t-elle ajouté, plus de 35 % des Tchadiennes.  La Ministre des affaires sociales, de la famille et de l’enfance de la Mauritanie a indiqué que son pays s’est attelé à un véritable « changement de mentalités » sur la place de femmes dans la société, avec notamment le concours des scientifiques et des imans, dans le respect de la Charia islamique, qui est la source du « droit applicable » en Mauritanie.  

C’est également à un véritable changement de mentalités qu’a appelé la Ministre de l’égalité sociale d’Israël, qui a confié raconter le soir à ses enfants les vies des femmes d’exception telles que Marie Curie, Rosa Parks, Golda Meir ou bien encore Ruth Bader Ginsburg.  Dans ce même ordre d’idée, la Ministre du développement communautaire des Émirats arabes unis a indiqué que les femmes constituent 20% du personnel ayant travaillé au lancement de la sonde émiratie, dite « de l’espoir », pour la planète Mars.  

Une meilleure place de la femme passe par une augmentation du nombre des élues, ont souligné un grand nombre de pays, à commencer par la Ministre de la femme, de la famille et de l’enfant de la Côte d’Ivoire qui a cité la loi du 14 octobre 2019 qui institue  30 % de candidatures féminines dans tous les scrutins. Même son de cloche du côté de son homologue de l’Arabie saoudite qui a affirmé que les femmes constituent 20% des membres de la Shura, l’Assemblée consultative saoudienne, avant d’ajouter que son pays, grâce à ses « efforts colossaux », vient de se classer au second rang des pays arabes, s’agissant de la promotion de la place de la femme. « Riyad a été décrétée, capitale de la femme arabe. » 

Dans ce droit fil, la Ministre de l’autonomisation des femmes et de la protection de l’enfance de l’Indonésie a indiqué que le Parlement compte 20,5% des femmes, un chiffre en « augmentation constante » qui reste néanmoins loin de la cible de 30%.  La Ministre a souligné la nécessité d’effacer la division sociale des rôles, à l’instar de la Ministre des affaires étrangères, de la justice et de la culture du Liechtenstein qui a plaidé pour une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie privée, pour les femmes comme pour les hommes.  De son côté, la Ministre du pouvoir populaire pour la femme et l’égalité de genres du Venezuela a profité de sa déclaration pour dénoncer le « blocus criminel » imposé à son pays par les États-Unis, qui usent par ailleurs des acheminements en médicaments et nourritures comme de véritables « moyens de pression ».

Déclaration de clôture

Le Président de l’Assemblée générale a rappelé qu’en 1995, les nations du monde ont adopté la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, l’agenda mondial « le plus complet et le plus transformateur » pour l’égalité des sexes.  Il ne fait aucun doute, a dit le Président, que nous avons fait des progrès et pourtant aucun pays ne peut prétendre avoir réalisé la parité, alors que la crise actuelle menace de compromettre des gains durement acquis. 

Les discussions d’aujourd’hui, a estimé le Président, ont montré qu’il reste encore beaucoup à faire mais aussi que « nous sommes déterminés » à accélérer la réalisation de l’égalité des sexes.  Le Président a exhorté les États Membres à exploiter le « pouvoir de convocation » de l’Assemblée générale pour combattre les menaces à la société. 

Pendant des générations, a-t-il souligné, les femmes ont subi discrimination, marginalisation et difficultés.  Nous devons faire en sorte qu’aucune femme n’ait plus besoin de justifier sa présence et qu’aucune femme ne soit menacée, sous-payée et sous estimée pour le travail qu’elle fait.  Personne ne devrait être limitée par un plafond de verre ou collée au sol par une bande velcros.  Je suis heureux, a avoué le Président, que le monde ait reconnu aujourd’hui la résilience des femmes du monde entier. 

Mais, a-t-il prévenu, il faut joindre la parole aux actes.  Le Président a espéré que les femmes recouvront leur voix et leur pouvoir, qu’elles se libéreront du dénigrement, des abus et de l’oppression et qu’elles se sentiront en sécurité dans n’importe quel endroit.  Les Nations Unies se tiennent aux côtés des femmes du monde entier et la conversation que l’Assemblée générale a eue aujourd’ui est « un pas dans notre voyage commun vers l’égalité ».

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sommet sur la biodiversité: concilier relance économique et restauration des écosystèmes, nouveau nœud gordien pour la communauté internationale

Sommet sur la biodiversité,
Matin & après-midi
AG/12274

Sommet sur la biodiversité: concilier relance économique et restauration des écosystèmes, nouveau nœud gordien pour la communauté internationale

Redresser les économies nationales meurtries par la COVID-19 tout en sauvegardant les écosystèmes abîmés par l’activité humaine.  Le Sommet des Nations Unies sur la biodiversité, aujourd’hui, à New York, a mobilisé l’attention de la communauté internationale sur ce sujet en envisageant comment mener une « action urgente en faveur de la biodiversité pour un développement durable », le thème de la réunion.

Le Sommet, le tout premier du genre, a bénéficié d’un intérêt renouvelé à cause de la pandémie.  Comme plusieurs intervenants l’ont affirmé, l’origine animale du virus et sa transmission à l’homme sont pour une large part dus aux écosystèmes endommagés par ce dernier; il est même « révélateur » que ce soit précisément une telle pandémie d’origine animale qui ait reporté la quinzième Conférence sur la diversité biologique (initialement prévue en octobre) à mai 2021, et empêche les dirigeants de se réunir en personne pour le Sommet d’aujourd’hui, a pointé la Présidente de la Commission de l’Union européenne, Ursula van der Leyen.

La situation a donc recentré la défense de la biodiversité dans l’agenda international.  « L’humanité fait la guerre à la nature, et nous devons changer cette relation », a résumé le Secrétaire général.  « Les massifs coralliens en danger, la vie sauvage sur le déclin, la déforestation et les changements climatiques mettent en péril notre existence et nos écosystèmes fragiles, dont nous avons besoin pour vivre », a en effet relevé António Guterres.  Beaucoup de délégations ont appuyé son appel à « changer la donne », à l’instar de la chancelière allemande Angela Merkel.

La Décennie des Nations Unies pour la diversité biologique (2011-2020) tirant à sa fin, une nouvelle feuille de route se dessine.  La Chine, a rappelé son Président Xi Jinping, accueillera donc en mai prochain, à Kunming, la quinzième réunion de la Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique (COP 15), l’occasion d’adopter une nouvelle stratégie pour la gouvernance mondiale en matière de biodiversité.  Le Conseil mondial de la biodiversité a défini, en 2019, ce que cela exigerait, a rappelé Mme Merkel: en substance, étendre les aires protégées et restaurer les écosystèmes. 

Concernant la préservation des océans, le Forum des îles du Pacifique a réaffirmé sa détermination à mener à bien, dans des délais raisonnables, l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant, « solide et efficace », au titre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale.

Le Prince Charles de Galles, en sa qualité de Président du Prince of Wales Conservation Trust, a plaidé pour des « plans Marshall » pour sauver la planète en mettant en place une économie circulaire.  Des initiatives régionales ont également été présentées, comme le « Green Deal européen », dont l’ambition est de faire de l’Europe le premier continent climatiquement neutre à l’horizon 2050.

Mais les tensions entre sauvegarde des économies et sauvegarde de la biodiversité sont vite apparues.  Le Groupe des 77 et la Chine a soutenu que la pandémie minera les efforts futurs pour réaliser les objectifs de développement durable.  Il a donc appelé la communauté internationale à « accroître la mobilisation des ressources », suggérant en particulier aux pays développés d’augmenter « considérablement » leur engagement financier pour la mise en œuvre d’un cadre mondial pour la biodiversité post-2020 dans les pays en développement.

Pour l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), c’est justement la disparition de la biodiversité qui sape les efforts mondiaux de lutte contre la pauvreté et la faim.  « Il n’y a pratiquement aucun secteur économique qui ne dépende directement ou indirectement de la biodiversité », a insisté son Directeur, qui a appelé à transformer radicalement les économies et les comportements, en s’assurant qu’ils soient « ouverts, verts et durables ».  Et la Secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique (CDB) de rappeler que, pendant le confinement dû à la COVID-19, beaucoup d’écosystèmes avaient « poussé un soupir de soulagement ».  Dans le même sens, l’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a noté qu’on ne se rendait pas toujours compte de l’importance de la nature ni de la valeur des écosystèmes.

Alors que les gouvernements négocient le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020, la FAO a souligné le soutien fourni par le système onusien pour la « difficile » intégration de la biodiversité dans les économies et les sociétés, l’ONU aidant notamment les États Membres à l’intégrer dans des stratégies de développement vert. Chaque investissement dans la relève économique doit prendre en compte la biodiversité, a ajouté la Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) après avoir demandé de remettre en question l’exploitation sans limites des ressources naturelles: « on pensait pouvoir polluer, polluer pour parvenir à la richesse », mais les trois crises planétaires actuelles (crise climatique, crise de la biodiversité et pollution) montrent que « nous avions tort ».  « Si l’on accule la nature, on en paie le prix. » 

Concilier reprise économique et défense de la biodiversité est du domaine du possible, selon le Forum économique mondial: 191 millions d’emplois pourraient être créés d’ici à 2030 grâce aux opportunités commerciales émergeantes en lien avec la nature.  Le Secrétaire général a pris l’exemple de l’Afrique, où la Grande Muraille verte pour le Sahara et le Sahel « a déjà permis de créer 335 000 emplois ».  Le Président du Fonds mondial pour la Nature (WWF International) est allé plus loin: Une transition positive pour la nature « pourrait générer jusqu’à 10 milliards de dollars en valeur commerciale annuelle et créer près de 400 millions d’emplois au cours de la prochaine décennie » si les conditions sont remplies.  Enfin, M. Guterres a appelé les gouvernements à prendre en compte les ressources naturelles et la biodiversité comme valeurs économiques et financières, et à les « taxer ».

Le PNUE a appelé à ne pas laisser de côté les peuples autochtones, qui « possèdent ou s’occupent d’un quart des terres mondiales ».  Ils étaient représentés à ce Sommet par une jeune autochtone et membre du Conseil consultatif des jeunes sur les changements climatiques, qui a appelé les dirigeants à tenir compte des pratiques autochtones et à respecter « leur consentement préalable éclairé ».  Si elle a loué les ambitions à la hausse concernant l’établissement de zones protégées, lesquelles doivent représenter 30% de la superficie de la planète, elle a mis en garde contre d’éventuelles violations si des États Membres se lancent « dans des activités de saisie des terres ».

OUVERTURE DU SOMMET DES NATIONS UNIES SUR LA BIODIVERSITÉ

M. VOLKAN BOZKIR (Turquie), Président de la soixante-quinzième session de l’Assemble générale, a rappelé que notre existence sur la planète dépendait « entièrement » de notre capacité à protéger la nature.  Or, a-t-il rappelé, 13 millions d’hectares de forêts sont perdus chaque année, un million d’espèces risquent l’extinction et de nombreuses espèces ont perdu jusqu’à 60% de leur population en 50 ans.  Cette situation met en péril notre sécurité alimentaire, notre approvisionnement en eau, notre capacité à faire face aux maladies, a poursuivi M. Bozkir.  Il a rappelé que nos systèmes de santé dépendent de la biodiversité, notant par exemple que 70% des traitements anticancéreux proviennent de la nature.  Économiquement, la moitié du PIB mondial, soit 44 000 milliards de dollars, émane de la nature.  La perte de la biodiversité est la menace principale qui pèse sur l’humanité, a averti M. Bozkir.

Or, la dégradation des écosystèmes, ou encore les pratiques agricoles non durables mettent les écosystèmes sous pression, a poursuivi le Président de l’Assemblée générale, qui a appelé à écouter les scientifiques et à respecter le monde dans lequel nous vivons.  La COVID-19 nous offre une occasion de réagir, d’atténuer les risques, de créer un monde plus durable, a encore affirmé M. Bozkir.  Pour lui, un relèvement « vert » permettrait de dégager 10 000 milliards de dollars, ce qui rendrait possible la création de 395 millions d’emplois d’ici à 2030 et encouragerait une économie plus verte.

Aujourd’hui nous allons jeter les bases d’un nouvel ordre économique mondial en faveur d’une protection de la diversité et d’un mode de développement plus durable, a poursuivi M. Bozkir, qui a appelé à une mobilisation politique pour la biodiversité.  Il a rappelé que le sommet de ce jour comprenait deux événements distincts afin d’entendre les interventions des chefs d’État, gouvernement et ministres.  Pour M. Bozkir, la COP15 de la Convention sur la diversité biologique, en 2021 à Kunmin (Chine), doit être l’équivalent de la COP21 de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques tenue à Paris en 2015.  Elle doit permettre de créer une plateforme pour le secteur privé afin d’investir dans la protection et la promotion de la biodiversité.  Elle doit aussi permettre d’impliquer la société civile et de la faire passer d’un rôle militant à un rôle d’accompagnateur, a conclu le Président de l’Assemblée générale.

Selon le Secrétaire général de l’ONU, M. ANTÓNIO GUTERRES, « l’humanité fait la guerre à la nature, et nous devons changer cette relation ».  Les massifs coralliens en danger, la vie sauvage sur le déclin, la déforestation et les changements climatiques « mettent en péril notre existence et nos écosystèmes fragiles, dont nous avons besoin pour vivre ».

Il a lié la propagation de virus mortels comme le VIH, Ebola ou l’actuelle pandémie de COVID-19, toutes transmises aux humains par les animaux, à la dégradation de la biodiversité.  Ces virus sont la preuve de « la relation étroite entre la biodiversité et notre santé » et des incalculables conséquences de cette dégradation sur la santé des humains.

Au-delà des engagements des États Membres sur la base de l’Accord de Paris, M. Guterres a appelé à « davantage d’ambition » et à prendre conscience que la défense de la biodiversité rejoint logiquement les questions économique, sociale et des droits de la personne.  « Trop souvent, la santé environnementale est sous-estimée par les autres secteurs », a-t-il déploré en plaidant pour que les solutions fondées sur la nature soient impérativement inclues dans les plans nationaux de développement.

D’après le Forum économique mondial, 191 millions d’emplois pourraient être créés d’ici à 2030 grâce aux opportunités commerciales émergeantes en lien avec la nature, a noté le Secrétaire général.  Il a donné l’exemple de l’Afrique, où la Grande Muraille verte pour le Sahel a déjà permis de créer 335 000 emplois.

Des forêts, des océans, des écosystèmes intacts sont des possibilités pour piéger le carbone, a-t-il poursuivi.  Ces solutions sont à portée de main pour sauvegarder l’emploi selon M. Guterres, qui a appelé les gouvernements à prendre en compte les ressources naturelles et la biodiversité comme valeurs économiques et financières, et à les « taxer ».

Il a aussi invité la communauté internationale à fixer des objectifs ambitieux tout en ne laissant personne de côté, notamment les communautés rurales et forestières, et préconisé une pêche et une agriculture durables, dont dépendent bien des peuples autochtones.

Appelant à inverser la tendance, et en perspective la prochaine COP de la Convention sur la diversité biologique, le Secrétaire général a souligné qu’un Cadre 2020 de la biodiversité devra permettre de fixer des cibles mesurables et d’incorporer des mesures financières et d'évaluation des résultats.

« La nature est résiliente.  Elle peut se relever si nous cessons nos assauts incessants à son encontre », a conclu le Secrétaire général.

M. MUNIR AKRAM, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a rappelé que notre planète « diverse et accueillante » garantit l’alimentation mais aussi un air propre, des médicaments naturels et une vaste richesse pour l’humanité, tout en permettant l’évolution de notre civilisation.  Malheureusement, a-t-il constaté, « nous avons abusé de la nature ».  Ces 50 dernières années, notre économie a augmenté de 400%, ce qui a entraîné une forte hausse de la demande en énergie et en matières premières.  Ce faisant, la pollution a également progressé, avec des effets néfastes sur la nature, a souligné M. Akram, avant d’alerter contre les répercussions des pertes de biodiversité, qui sont à la fois « pernicieuses et dangereuses » pour l’humanité, notamment parce qu’elles augmentent la probabilité des zoonoses.

La COVID-19 nous a rappelé ce lien entre la nature et l’humanité, a poursuivi le Président de l’ECOSOC.  Or, a-t-il averti, lorsque nos terres et nos océans ne donneront plus de richesses, nous serons perdus.  Dans ce contexte, il est selon lui « tragique » de constater qu’aucune des cibles de Haichi pour la biodiversité ne sera atteinte d’ici à 2020.  Nous devons donc redoubler d’efforts pour protéger la biodiversité, en commençant par la réalisation des 17 ODD, tous étroitement liés les uns aux autres, a-t-il prôné.  Il a jugé à cet égard qu’il est grand temps de renoncer au modèle actuel poussant les États à lutter contre la nature et les uns et contre les autres.  Il convient de faire le choix d’un « nouveau paradigme » qui donne la priorité à la nature plus qu’à la croissance et au PIB par habitant.

À ses yeux, la mise en œuvre des objectifs de Haichi fera partie intégrante de la mise en œuvre des ODD.  L’ECOSOC s’emploiera à harmoniser les ODD avec la biodiversité, a-t-il assuré.  Il importe de lutter pour la planète plutôt que contre la planète, a insisté M. Akram.  Toutefois, alors que nous luttons contre la COVID-19, éradiquer la pauvreté et créer des infrastructures durables nécessite des moyens financiers, a-t-il relevé.  Selon lui, « la finance n’est pas la clef, c’est la volonté politique qui l’est ».  Cette volonté, « nous pouvons la trouver collectivement parmi les dirigeants du monde », a-t-il conclu, estimant que ce Sommet a « une importance existentielle ».      

M. ABDEL FATTAH AL SISI, Président de l’Égypte, pays hôte de la quatorzième session de la Conférence des Parties (COP) à la Convention sur la diversité biologique (CDB), a déclaré que le rythme croissant de la dégradation de l’environnement et de la perte de biodiversité nous obligeait désormais à agir plus rapidement et plus efficacement.  Ces changements menacent nos pays dans le monde entier, creusent le fossé entre les pays développés et les pays en développement et sapent nos efforts pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD), en particulier dans les pays en développement et les pays les moins avancés (PMA), a-t-il déclaré.  Cette dégradation, qu’aggravent les effets négatifs des changements climatiques sur la biodiversité, représente un véritable défi dans notre relation avec la nature, selon le Président Al Sisi qui a conseillé de vivre en meilleure harmonie avec la nature et de lier la biodiversité au développement durable d’une manière qui reflète la véritable essence de notre cause collective.

M. Al Sisi a rappelé que c’est pour mettre en œuvre cette vision et surmonter les lacunes que la quatorzième session de la Conférence des Parties (COP) à la Convention sur la diversité biologique (CDB), qui s’est tenue en 2018 à Charm el-Cheikh, a vu le lancement du processus sur le « Cadre de la biodiversité pour l’après-2020 », visant à atteindre un ensemble d’objectifs ambitieux soutenus par des moyens pour leur mise en œuvre.  L’Égypte veut assurer l’adoption de ce nouveau cadre lors de la prochaine COP, qui se tiendra en Chine, a annoncé le Président.  Cette adoption doit se faire de manière juste, équitable, équilibrée et inclusive, avec l’aide des gouvernements, de la société civile et du secteur privé, a poursuivi M. Al Sisi.  Il a mentionné qu’à cette fin, l’Égypte a lancé une initiative globale visant à introduire la biodiversité dans les différents secteurs en exploitant les complémentarités entre les trois conventions de Rio sur les changements climatiques, la biodiversité et la désertification.

M. Al Sisi a également rappelé que, pour soutenir les efforts de l’Afrique pour améliorer sa biodiversité, l’Égypte avait, en marge de la Conférence de Charm el-Cheikh, accueilli une réunion africaine de haut niveau consacrée aux priorités du continent en matière de préservation et de protection de la nature.  La capacité de l’Afrique en ce domaine reste subordonnée à un soutien extérieur, sous forme de financement, de transfert de technologies et de renforcement des capacités conformément au principe de la responsabilité commune mais différenciée et des capacités respectives, a ajouté le Président.

M. Al Sisi a expliqué que son pays avait depuis longtemps pris des mesures pour préserver la diversité biologique, en particulier en ce qui concerne le Nil, qu’il a qualifié de « bouée de sauvetage » d’une civilisation qui a toujours incarné les valeurs de gestion responsable des ressources.  Il a appelé à un renforcement de la coopération transfrontalière des pays voisins du fleuve, rappelant que l’eau demeurait « la pierre angulaire de tous nos efforts » pour préserver la nature et protéger la biodiversité.

Le Président égyptien a conclu en rappelant que la pandémie de COVID-19, en même temps qu’elle constitue un défi et impose des contraintes à l’action multilatérale, renforce la reconnaissance d’une responsabilité partagée envers l’avenir de cette planète et le sort des générations futures.  Il a donc souhaité que le sommet de ce jour contribue à une meilleure compréhension de l’ampleur de cette responsabilité et aboutisse à des résultats clairs qui reflètent la volonté politique commune d’améliorer la situation actuelle.

M. XI JINPING, Président de la Chine, a estimé qu’au moment où l’ONU célèbre son soixante-quinzième anniversaire et où les pays luttent contre la COVID-19, ce Sommet revêt une « portée lointaine ».  Rappelant que la Chine accueillera, en mai prochain à Kunming, la quinzième réunion de la Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique, il a assuré que ce rendez-vous sera l’occasion d’adopter une nouvelle stratégie pour la gouvernance mondiale en matière de biodiversité.  En effet, a-t-il souligné, la perte de biodiversité et la dégradation des écosystèmes constituent une menace majeure pour la survie de l’humanité.  « Il y a urgence à agir », a insisté M. Xi.

À ses yeux, il importe de promouvoir la « civilisation écologique » car la biodiversité touche au bien-être de l’humanité.  Il faut pour cela protéger la nature et concilier le développement économique et la protection écologique.  Le Président chinois a également plaidé pour une protection de l’inviolabilité des règles internationales pour renforcer la gouvernance de la biodiversité.  Il a par ailleurs noté que la biodiversité est une base du développement durable et un moyen pour le réaliser.  Il convient donc, selon lui, d’accroître nos capacités d’action face aux défis environnementaux, d’honorer nos engagements et de travailler à la réalisation des objectifs pour inverser la perte de biodiversité.

La Chine, qui dispose d’une « vision » pour la défense de la diversité biologique, œuvre à une modernisation du cadre dans lequel l’homme et la nature peuvent vivre en harmonie, a précisé M. Xi, assurant que son pays remplit scrupuleusement ses obligations au titre des conventions environnementales et a, d’ores et déjà, atteint ses objectifs pour 2020.  Il a ajouté que la Chine poursuivra ses efforts pour élever d’ici à 2030 le niveau de ses contributions à la lutte contre les changements climatiques, son but étant de parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2060.  Mais protéger la biodiversité nécessite « un effort constant et de tous » pour bâtir un « beau monde », a-t-il souligné en conclusion. 

« Conversation au coin du feu »

L’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), M. ACHIM STEINER, modérateur de cette conversation, a noté qu’on ne se rendait pas toujours compte de l’importance de la nature, de la valeur des écosystèmes, et a parlé d’un « angle mort » de nos économies.  Il a aussi mis en avant le rôle de l’éducation, et dans ce cadre celui des peuples autochtones, souvent en première ligne dans la protection de l’environnement. 

« Si nous n’y prenons garde, nous allons nous transformer en gardiens d’espèces disparues », a averti M. Steiner, pour qui il faut changer la dynamique.  Pour la première fois depuis le Sommet de Rio en 1992, la biodiversité occupe le premier plan, a-t-il également fait observer.

M. Steiner a ensuite présenté trois hautes responsables de questions environnementales, en commençant par Mme Ana María Hernández Salgar, Présidente de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques.  Rappelant qu’un million d’espèces animales et végétales étaient menacées d’extinction, il lui a demandé ce que cela signifiait sur le plan scientifique et pour l’avenir des peuples.

Mme ANA MARÍA HERNÁNDEZ SALGAR, Présidente de la Plateforme intergouvernementale science-politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), a attiré l’attention sur une étude d’ampleur mondiale ayant révélé qu’en 50 années, le monde avait perdu 14 des 18 contributions de la nature aux processus qui rendaient la vie humaine possible.

Les contributions régulatrices -telles que la pollinisation ou la capacité à réguler la qualité de l’air- ont été perdues, tout comme d’autres contributions non matérielles importantes pour le sentiment d’identité ou d’appartenance culturelle des populations, comme la production de nourriture, de fibres ou d'énergie, par exemple. 

« Les gens devraient s’inquiéter de ces tendances négatives », a-t-elle déclaré, car elles impliquent que les objectifs de 2020 en matière de biodiversité ne seront pas atteints, pas plus que les objectifs de développement durable liés à la pauvreté, à la faim, au climat, à l’eau, à la santé, à la terre et aux océans.  « Nous devons écouter les données scientifiques et prendre des décisions en conséquence », a-t-elle lancé.

Reprenant la parole, M. Steiner a présenté Mme ELIZABETH MARUMA MREMA, Secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique, à qui il a demandé d’expliquer les conséquences potentielles à attendre si le monde ne prenait pas la bonne direction face à la crise de la biodiversité.

Mme Elizabeth Maruma Mrema a rappelé que la biodiversité constituait le socle du bien-être des populations humaines.  La réalisation de nombreux objectifs de développement durable dépend de la biodiversité, qui est la base de notre développement à l’avenir, a-t-elle expliqué.  Donc, si la tendance actuelle à la perte de biodiversité se poursuit, nous ne parviendrons pas à réaliser les ODD, a-t-elle averti.  Elle a aussi rappelé que, pendant le confinement dû à la COVID-19, beaucoup d’écosystèmes avaient « poussé un soupir de soulagement ».

M. Steiner a enfin présenté Mme INGER ANDERSEN, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).

Mme INGER ANDERSEN, a évoqué des solutions pour lutter contre la perte de la biodiversité, comme « intégrer la nature dans nos villes » et dans les infrastructures agricoles.  En raison de nos modes de consommation non durable, trois crises se profilent, a-t-elle résumé: crise climatique, crise de la biodiversité et pollution.  Mme Andersen a appelé à « repenser la manière de produire et de consommer », à « prendre à bras-le-corps les problématiques d’urbanisme » et à procéder à « la restauration à grande échelle », citant en exemple la Grande Muraille verte pour le Sahel.  La représentante du PNUE a aussi appelé à ne pas laisser de côté les peuples autochtones, qui « possèdent ou s’occupent d’un quart des terres mondiales », sur le bord du chemin.

Répondant au modérateur qui lui demandait comment éviter le dilemme entre relance économique et protection de la nature, Mme Andersen a appelé à remettre en question le statu quo au sujet de l’exploitation sans limites des ressources naturelles.  « On pensait pouvoir polluer, polluer, polluer pour parvenir à la richesse.  Mais ces trois crises planétaires montrent que nous avions tort.  La COVID-19 nous l’a montré.  C’est un réveil difficile.  Si l’on accule la nature, on en paie le prix. »  Chaque investissement dans la relève économique doit prendre en compte la biodiversité, a-t-elle insisté.

Déclaration d’une personne éminente

Le PRINCE CHARLES DE GALLES, Président du Prince of Wales Conservation Trust, a dit travailler avec différents groupes pour trouver des solutions plaçant la nature au cœur des économies.  Il a rappelé ses appels lancés en faveur de « plans Marshall » pour sauver la planète en mettant en place une économie circulaire avec la nature et la restauration naturelle au cœur de tous les efforts.

Dans le cadre de cette économie circulaire, le Prince Charles a cité six éléments.  Le premier est l’application d’un calcul de prix équitable du carbone, à faire payer aux pollueurs, pour accélérer la décarbonation de l’économie.  Dans ce même objectif, il faut accélérer le développement de systèmes de capture et de stockage du carbone, a-t-il dit, avant d’appeler à la mise en place d’un marché de compensation du carbone et à la lutte contre les « subsides pernicieux » à certaines pratiques agricoles ou de pêcheries.  Le cinquième point consisterait à créer un marché des services écosystémiques pour pousser les agriculteurs à réduire les émissions de carbone et mieux utiliser les ressources en eau.  Enfin, il faut garantir un urbanisme vert qui trouve un équilibre entre urbanisation et zones rurales.

Avec tous ces éléments en tête, il faut prendre des mesures pratiques pour changer la donne sur le terrain, a poursuivi le Prince Charles.  « Si nous voulons restaurer les équilibres, il faut investir dans la nature », a-t-il poursuivi, en faisant observer que ce cercle vertueux de la nature est bien connu des peuples autochtones, qui doivent donc être mieux écoutés.

Le Prince Charles a encore plaidé pour que les systèmes agricoles et forestiers adoptent des pratiques plus durables.  Il a cité en exemple le recours à l’agriculture biologique et à la rotation des cultures, y voyant des moyens de réduire, voire d’annuler, les émissions de carbone du secteur agricole.  Pour y parvenir, les grandes entreprises agroindustrielles devront apporter leur contribution, tout comme les petits agriculteurs, a recommandé le Prince Charles.

Il a ensuite appelé à une transformation de l’industrie, là aussi, pour parvenir à une économie circulaire.  En outre, il a préconisé un accès plus facile au financement des innovations « vertes » et plaidé pour une intégration des connaissances sur la nature dans l’éducation afin d’inculquer aux enfants une perception différente des relations entre l’homme et la nature.  « Nous sommes au bord du précipice, nous savons ce que nous avons à faire.  Il nous faut à présent nous lancer », a-t-il conclu.

Déclaration d’un représentant de la jeunesse

Mlle ARCHANA SORENG, jeune autochtone et membre du Conseil consultatif des jeunes sur les changements climatiques, a présenté son intervention comme « l’appel de toute une génération » mais aussi « des peuples autochtones ».  Pour assurer la protection de la biodiversité, les dirigeants du monde doivent tenir compte des pratiques autochtones et respecter leur consentement préalable éclairé, a-t-elle demandé.  La jeune militante a également plaidé pour une approche responsable face à la perte de biodiversité: « il faut savoir ce que nous voulons protéger » et ne pas agir « aux dépens de nos droits », notamment les droits sur les terres, a-t-elle fait valoir.  À ses yeux, il convient de « défendre les deux ».

Pour Mlle Soreng, il est essentiel de revoir nos ambitions à la hausse pour les zones protégées, lesquelles doivent représenter 30% de la superficie de la planète.  Mais ce processus doit se faire sans entraîner de violation des droits de la personne, a-t-elle soutenu.  Or, « c’est ce que nous risquons de provoquer si nous nous lançons dans des activités de saisie des terres ».

« Nous, les jeunes, sommes votre principal allié pour inverser les pertes de biodiversité », a-t-elle poursuivi, regrettant que sa génération soit « marginalisée dans les prises de décisions », alors même qu’elle subit la dégradation de l’environnement.  « Nous sommes prêts à travailler avec vous », a-t-elle assuré, concluant son intervention par une question: « Êtes-vous prêts? » 

Déclarations des groupes de pays

Pour M. MOHAMED IRFAAN ALI, Président de Guyana, au nom du Groupe des 77 et de la Chine (G77 et la Chine), ce Sommet doit montrer une volonté politique d’« établir un cadre mondial pour la biodiversité après 2020, en cohérence avec le Programme 2030 ».  Ce cadre, selon M. Ali, doit également comporter un important volet de mobilisation des ressources.  Les délibérations devraient propulser la communauté mondiale sur la voie de la réalisation de Vision 2050 pour la biodiversité, à savoir « Vivre en harmonie avec la nature ».  Cela ne peut être réalisé qu’en abordant, de manière équilibrée, les trois objectifs de la Convention sur la diversité biologique, qu’il a énumérés: « la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable de ses éléments et le partage juste et équitable des avantages découlant de l'exploitation des ressources génétiques ».

Le Groupe des 77 et la Chine s’est dit profondément préoccupé par les difficultés de développement « déjà redoutables » provoquées par la pandémie de COVID-19.  Ses effets vont certainement se faire sentir bien au-delà de 2020, érodant les progrès réalisés en matière de développement depuis de nombreuses décennies, et pourraient entraver les efforts visant à stopper la perte de biodiversité mondiale, a craint le Président Ali.  Il a prévenu que les effets de la pandémie « vont exacerber la dégradation de la biodiversité » et « entraîner une augmentation considérable de la pauvreté dans le monde ».  La COVID-19 va compromettre la capacité financière des pays en développement à mettre en œuvre le programme de développement durable, a-t-il ajouté.

Le Groupe a aussi réclamé « des actions urgentes et importantes » pour réduire la dégradation des habitats naturels, stopper la perte de biodiversité ainsi que protéger et prévenir l’extinction des espèces menacées.  « Un million d’espèces sont actuellement menacées d’extinction, plus qu’à aucun autre moment de l’histoire de l’humanité », a-t-il rappelé, regrettant le nombre potentiellement élevé d’espèces qui ont disparu au cours des siècles passés, dont la plupart n’ont pas été recensées.  M. Ali a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour inverser ces tendances et protéger les écosystèmes, y compris par la restauration des forêts dégradées, une hausse sensible du boisement, le reboisement et la conservation au niveau mondial, sur la base du principe de la responsabilité commune mais différenciée.  « Mettre un terme à la perte de biodiversité est un objectif commun de l’humanité.  Chaque pays devrait s’engager dans cette entreprise pour atteindre cet objectif », a-t-il souligné.

Enfin, concernant les océans, le G77 et la Chine a appelé à conclure les négociations sur un instrument international juridiquement contraignant, dans le cadre de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale.

M. LAZARUS McCARTHY CHAKWERA, Président du Malawi, qui s’exprimait au nom du Groupe des pays les moins avancés (PMA), a déploré que, selon les Perspectives mondiales de la diversité biologique rendues publiques par le Secrétaire général, aucun des 20 objectifs d’Aichi n’ait été atteint intégralement et que 6 seulement l’ait été partiellement.  Aujourd’hui, a-t-il souligné, plus de 60% des récifs coralliens du monde sont menacés.  De plus, la dégradation des terres a réduit la productivité dans 23% de la superficie terrestre mondiale et un million d’espèces animales et végétales sont menacées d'extinction.  Si cette tendance se poursuit, entre 30 et 50% de toutes les espèces pourraient être perdues au cours de ce siècle, ce qui représente aussi « d’énormes risques pour le bien-être humain ».

Pour le dirigeant, la COVID-19 démontre que la destruction de l’environnement et des habitats naturels augmente le risque de contacts entre les humains et le monde sauvage, et donc de maladies infectieuses d’origine animale.  Avertissant que les PMA subiront probablement les pires effets de cette pandémie, il a appelé à des « mesures collectives » pour stopper la dévastation de la biodiversité, et notamment l’édification d’une « économie mondiale durable ».  Cela implique, selon lui, d’intégrer la réduction des inégalités dans les modèles de développement, d’améliorer les mécanismes d’accès et de partage des avantages, de réduire la production et la consommation non durables et d’éviter le gaspillage.

Si la Convention sur la diversité biologique prévoit de tenir compte de la situation particulière des PMA dans leurs actions en matière de financement, force est de constater que les financements ont stagné dans de nombreux pays, a souligné le Président du Malawi.  Il a donc proposé, au nom de son Groupe, que le financement public international de la biodiversité en faveur des PMA soit doublé d’ici à 2030.  Il a également appelé à soutenir le renforcement des capacités et le transfert de technologies vers les PMA pour la conservation et la restauration durable de la biodiversité.

Mme URSULA VON DER LEYEN, Présidente de la Commission de l’Union européenne, s’est demandé ce qu’il faudrait encore présenter pour plaider haut et fort en faveur de la biodiversité.  Des chiffres?  Des photos?  On fournit depuis des années les chiffres les plus frappants sur les espèces menacées de disparition, tandis que documentaristes et photographes nous montrent ces espèces qui sont en danger de disparition.  « Fallait-il qu’on fût directement et massivement affectés dans notre vie, comme par une pandémie nous enfermant tous chez nous, sans possibilité de voyager? »  Pour Mme Von der Leyen, il est révélateur que ce soit précisément une telle pandémie d’origine animale qui ait reporté la COP15 prévue en octobre à Kumming et qui empêche les dirigeants de se réunir en personne pour ce Sommet.  Nous avons toutes les informations nécessaires pour comprendre, a-t-elle affirmé.  « Le changement climatique et la perte de biodiversité se produisent sous nos yeux et se renforcent mutuellement.  Nous devons arrêter cette boucle de malheur. »  La Présidente de la Commission européenne a dit y voir une source de motivation.

Mme Von der Leyen a rappelé que 11 jours seulement après sa prise de fonctions à la tête de la Commission européenne, elle avait présenté le « Green Deal européen », feuille de route pour faire de l’Europe le premier continent climatiquement neutre à l’horizon 2050.  Cinquante actions pour 2050 ont été définies et, en mars, la Commission a proposé la toute première loi climatique continentale.  « Faut-il arrêter du fait de la pandémie?  Bien sûr que non », a-t-elle lancé.  Elle a rappelé qu’elle avait aussi proposé en mai une « stratégie de l’UE pour la biodiversité à l’horizon 2030 » pour s’attaquer aux causes de la perte de biodiversité: utilisation non durable des terres et de la mer, surexploitation des ressources naturelles, pollution et réchauffement climatique.  Cette stratégie, a-t-elle expliqué, propose des obligations légales, des objectifs et des actions, par exemple restaurer les écosystèmes et les rivières endommagés; améliorer la santé des habitats et des espèces protégés par l’UE; ramener les pollinisateurs sur les terres agricoles; verdir les villes; valoriser l’agriculture biologique; ou encore améliorer la santé des forêts européennes. 

La biodiversité est bien plus que la simple protection de la nature, a affirmé Mme Von der Leyen, qui a rappelé l’adoption par l’Union européenne d’une « stratégie de la ferme à l’assiette » car santé alimentaire et biodiversité se renforcent mutuellement.  L’Union européenne appelle tous ceux qui veulent agir à la rejoindre: États de toutes les régions du monde mais aussi organisations de développement et humanitaires, entreprises et villes, organisations de jeunesse et confessionnelles.  La Présidente de la Commission européenne a appelé à un esprit d’équipe et à un leadership déterminé, afin d’établir un nouveau cadre mondial de la biodiversité lors de la COP de Kunming, en 2021.  Elle a demandé des « règles mondiales claires et mesurables », qui nous permettent de nous responsabiliser mutuellement, et qui permettent de protéger les espèces et de renforcer notre résilience et notre bien-être.

S’exprimant au nom du Groupe des pays en développement sans littoral, M. MAGZUM MIRZAGALIYEV, Ministre de l’écologie, de la géologie et des ressources naturelles du Kazakhstan, a relevé que la biodiversité est au fondement même de la vie sur terre.  À cet égard, il a noté que la pandémie de COVID-19 vient confirmer le lien étroit unissant la protection de la nature et la santé publique.  Pour les 32 pays en développement sans littoral qu’il représente, ce sujet est d’autant plus important qu’ils ont une situation géographique défavorable.  Le Ministre a ainsi rappelé que ces pays enclavés, qui abritent 500 millions d’habitants, manquent d’accès à la mer et sont isolés des principaux marchés internationaux.  En outre, ils n’ont que de faibles capacités pour faire face aux chocs extérieurs et aux catastrophes naturelles telles que le cyclone qui a frappé le Zimbabwe et les inondations enregistrées au Népal.  Ces sinistres ont entraîné une perte de diversité biologique et des extinctions d’espèces, a déploré le Ministre.  

Dans la mesure où la biodiversité existe indépendamment des frontières, il importe que la communauté internationale augmente son ambition s’agissant de la protection des écosystèmes, a plaidé M. Mirzagaliyev.  À cette fin, le Groupe demande une accélération de l’action mondiale afin de mettre au point un cadre sur cette question et sur la réalisation des ODD d’ici à 2030.  Il nous faut aussi parvenir aux objectifs d’Aichi alors que 20 pays du Groupe accusent un retard en la matière, a-t-il ajouté, qualifiant cette mobilisation de cruciale pour l’atténuation des catastrophes naturelles, le recul des glaciers et la désertification.  

À titre national, il a assuré que son pays était attaché aux écosystèmes, comme en témoigne son projet de plan de protection de la biodiversité pour 2020 et au-delà.  Ce plan prévoit la protection de zones naturelles, notamment forestières, a-t-il précisé.  Avant de conclure, le représentant a rappelé le soutien de son Groupe à un programme mondial pour la biodiversité et espéré que ce Sommet fournira un cadre pour l’après-2020.  

Premier dialogue entre décideurs: « Combattre l’appauvrissement de la biodiversité et généraliser l’idée d’une biodiversité concourant au développement durable »

Dans une introduction liminaire au premier dialogue de cette journée, M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a appelé les États Membres à prendre cette année des engagements ambitieux pour la sauvegarde des océans et des forêts, mais aussi en matière d’énergies et de transports durables.  Le Secrétaire général adjoint a ainsi invité les délégations à profiter de ce Sommet sur la biodiversité pour faire avancer la mise en œuvre des objectifs de développement durable, dans le but, à terme, de sauver la planète.

La Chancelière de l’Allemagne, Mme ANGELA MERKEL, Coprésidente du premier dialogue, a rappelé que la destruction de l’environnement et les changements climatiques, et donc aussi la perte de diversité biologique, s’accélèrent à un rythme jamais vu auparavant dans l’histoire de l’humanité.  « Cela représente à la fois une menace pour notre qualité de vie, nos systèmes économiques et notre cohésion sociale. »  Mme Merkel a estimé que nous n’avons plus d’autre choix que de lancer ou d’intensifier des mesures durables et efficaces pour protéger nos ressources naturelles vitales.  « Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre plus de temps. »  Elle a salué au passage l’ONU pour avoir organisé ce sommet sur la biodiversité pour que la communauté internationale puisse se mettre d’accord sur les étapes suivantes. 

L’année prochaine, lors de la COP15, il va falloir adopter un nouveau cadre pour la protection de la biodiversité après 2020 pour inverser la tendance à l’échelle mondiale, a souligné la Chancelière.  Le Conseil mondial de la biodiversité avait défini, en 2019, ce que cela exigerait, à savoir étendre les aires protégées et restaurer les écosystèmes.  Pour Mme Merkel, cela signifie qu’à l’avenir, nous devons utiliser la terre et la mer de manière plus durable et les gérer de manière plus écologique.  Par « nous », elle entend tous les États, a-t-elle précisé.  Elle a salué à cet égard les nombreux États qui ont déjà fait la preuve de leur engagement en faveur d’une protection plus ambitieuse de la biodiversité en approuvant l’engagement des dirigeants en faveur de la nature, récemment présenté, et dont l’Allemagne fait partie. 

« C’est une question qui me tient à cœur », a déclaré Mme Merkel, indiquant que l’Allemagne fournit déjà un financement solide pour les mesures de protection: depuis de nombreuses années, le pays alloue annuellement 500 millions d’euros à la protection de la biodiversité dans le monde.  L’Allemagne, a ajouté sa Chancelière, souhaiterait travailler avec des donateurs privés pour créer un nouvel instrument de financement des aires protégées: le Legacy Landscapes Fund.  Avant de conclure, Mme Merkel a souligné les immenses défis à relever et les conséquences de l’inaction, qui ne fera qu’aggraver les problèmes.  « C’est à nous tous de changer la donne! »

M. IMRAN KHAN, Premier Ministre du Pakistan et Coprésident du premier dialogue, a souligné que son pays est riche en biodiversité, avec un territoire qui s’étend des massifs montagneux jusqu’aux tropiques.  Le Pakistan est de plus dominé par le deuxième sommet le plus élevé au monde, le K2.  « Nous nous sommes engagés à préserver ce patrimoine », a assuré le Chef de gouvernement, en rappelant que le Pakistan est parmi les 10 pays les plus vulnérables aux changements climatiques.  Il a rappelé que des dizaines de milliards d’arbres avaient été plantés à travers tout le pays en coopération avec la communauté locale. 

Au nom du Forum des îles du Pacifique, M. KAUSEA NATANO, Premier Ministre des Tuvalu, a souligné que la région du Pacifique possédait une biodiversité « unique », pourvue de nombreuses espèces de la flore et de la faune « que l’on ne trouve nulle part ailleurs sur Terre ».  Cependant, a-t-il mis en garde, ce caractère unique est aujourd’hui en péril.  « Nous avons l’opportunité d’agir maintenant pour faire face à cette menace mondiale, mais cela exige un véritable engagement de tous les États à prendre des mesures urgentes », a estimé le Premier Ministre.  De fait, il a salué l’élan international créé par les négociations sur le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020, au titre de la Convention sur la diversité biologique.

M. Natano a déclaré que les membres du Forum des îles du Pacifique étaient engagés en faveur du renforcement de la gestion, de l’utilisation et de la conservation de « notre vaste océan Pacifique riche en biodiversité ».  L’océan est inséparable des peuples du Pacifique, de ses cultures, de ses économies et de ses sociétés, a poursuivi le Premier Ministre, précisant que les eaux océaniques représentaient 98% du territoire de sa région.  De sorte que les États insulaires du Pacifique « sont les gardiens » de plus de 40 millions de kilomètres carrés d’océan, a-t-il précisé. 

Dans ce cadre, M. Natano a condamné la pollution marine et la pêche illégale, non déclarée et non réglementée, qui sapent selon lui les efforts de développement durable, lesquels reposent sur des « services écosystémiques marins sains ».  Dans le même temps, le Premier Ministre a rappelé que les changements climatiques menaçaient les systèmes et les espèces océaniques, mettant en péril la viabilité des pays de la région, y compris celle des grands États insulaires océaniques.

Le Premier Ministre a rappelé l’engagement de longue date du Forum des îles du Pacifique en faveur des océans durables, notamment par le biais de la Politique océanique régionale des îles du Pacifique de 2002; du Cadre pour le paysage océanique du Pacifique de 2010; de la feuille de route régionale pour des pêches durables dans le Pacifique; et du Cadre pour la conservation de la nature et les aires protégées dans la région des îles du Pacifique.  Selon lui, le leadership du groupe en la matière a abouti à la formulation de l’objectif 14 de développement durable et de ses cibles.  « L’importance de garantir un océan sain, productif et résilient doit être proprement reflétée dans le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 », a-t-il souhaité.

M. Natano a plaidé en faveur d’une action urgente de la communauté internationale pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.  Il a également appelé à utiliser le prochain dialogue sur les océans et les changements climatiques de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques pour examiner le lien entre le climat et les océans.  Le Premier Ministre a aussi invité les pays voisins des membres du Forum à se joindre au Plan d’action régional du Pacifique sur les déchets marins 2018-2025.  Il a, enfin, réaffirmé sa détermination à mener à bien, dans des délais raisonnables, l’adoption d’un instrument international juridiquement contraignant, « solide et efficace », au titre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, pour la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale.

De même que nous plaidons pour la santé de notre biodiversité océanique, nous continuons à militer pour la réduction et l’élimination de toute menace à l’encontre de nos populations et écosystèmes, notamment la pollution causée par les déchets nucléaires et radioactifs, les épaves et les reliques de la Seconde Guerre mondiale.  À cette fin, il a précisé que les dirigeants du Forum avaient approuvé la mise en service d’un organe pour entreprendre une évaluation scientifique de la contamination nucléaire dans le Pacifique, y compris sur le site d’essais nucléaires de Runit, dans la République des Îles Marshall.

M. Natano a par ailleurs mentionné les effets de la pandémie de COVID-19, dans les années à venir, sur les problèmes existants de développement régional.  Il a appelé à adopter des stratégies « claires » pour sauvegarder à la fois la biodiversité et la santé humaine tout au long de la période de récupération à venir.  « Nous devons sortir de cette pandémie unifiés, résilients et mieux placés pour protéger la biodiversité de notre Pacifique bleu et de notre planète bleue », a-t-il estimé.

Nous sommes au cœur d’une urgence planétaire alors qu’une crise en engendre une autre à un rythme accéléré, a constaté avec inquiétude le Ministre des affaires étrangères et du commerce de Bélize, M. WILFRED P. ELRINGTON, qui s’exprimait au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS).  La vitesse sans précédent à laquelle les écosystèmes sont compromis et la biodiversité se dissipe pourrait, à elle seule, déclencher un effondrement de la société humaine, a-t-il mis en garde.  L’érosion côtière et les événements météorologiques extrêmes mettent en péril les moyens de subsistance liés aux industries du tourisme et de la pêche, qui représentent plus de la moitié du PIB de nombreux petits États insulaires en développement (PEID), a expliqué le Ministre.  « Pour nos îles, la biodiversité transcende la simple valeur économique.  Notre relation avec la nature fait partie intégrante de notre histoire, de notre patrimoine culturel et de notre identité. »

Alarmé par le fait que les espèces autochtones des PEID soient les plus exposées au risque d’extinction, l’AOSIS a également souligné que les PEID sont les plus vulnérables à la dégradation et à la perte des récifs coralliens, dont plus de 25% sont sous leur juridiction.  Les causes de ces pertes irréversibles, telles que les changements climatiques, la pollution, la surexploitation, le braconnage et le commerce illégal d’espèces sauvages, sont le fait de l’homme et peuvent être évitées, a martelé M. Elrington, affirmant que nous avons les moyens de mettre un terme à cet abus de la nature et de l’inverser à condition de se fixer des objectifs mondiaux ambitieux, fondés sur la science, et de les atteindre.  Rappelant qu’en 2010, les 20 objectifs d’Aichi pour la biodiversité avaient précisément cette ambition, il a constaté à regret qu’une décennie plus tard, aucun d’entre eux n’a été pleinement atteint, et que six seulement l’ont été partiellement.  De même, en 2014, la communauté internationale s’est engagée à soutenir les efforts des PEID pour conserver la diversité biologique dans les Orientations de Samoa.  Bien que nous ayons mesuré périodiquement le progrès de la mise en œuvre, les données sont insuffisantes pour indiquer un progrès notable, a, là encore, regretté le Ministre pour lequel il ne fait pas de doute que le monde n’est pas sur la bonne voie. 

Dès lors, il a appelé à prendre des actions concrètes avant la quinzième Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique l’an prochain, en souhaitant notamment un cadre mondial de la biodiversité qui soit à la fois ambitieux et transformationnel pour la période post-2020.  Ce cadre devra être assorti de ressources adéquates et devra traiter de manière adéquate le cas particulier des PEID, a précisé M. Elrington, en insistant sur l’importance d’exploiter les synergies entre la protection de la biodiversité et le développement durable. 

« Il faut des stratégies cohérentes dans les domaines interdépendants du climat, des océans et du développement durable dans le but d’offrir des avantages optimaux aux personnes et à la nature. »  Ces stratégies, a-t-il précisé, doivent miser sur l’inclusion de toutes les parties prenantes concernées, y compris le secteur privé, la société civile, les peuples autochtones et les communautés locales.  Pour réussir la transition envisagée vers des voies durables, il faut mener un effort mondial en vue de réorienter les flux financiers vers un développement respectueux de l’environnement, a-t-il aussi recommandé, avant de conclure en réaffirmant la détermination des PEID à enrayer et à inverser la perte de biodiversité d’ici à 2030.  Le Belize et certain autres PEID ont d’ailleurs déjà adhéré à l’engagement des dirigeants pour la nature, qui a été approuvé il y a deux jours. 

« La biodiversité est indispensable et elle disparaît rapidement », a mis en garde M. QU DONGYU, Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  Parmi ses rôles essentiels, a expliqué le Chef de la FAO, la biodiversité est la garante du cycle des nutriments, de la qualité de l’air et de celle de l’eau.  C’est aussi une ressource scientifique, économique, environnementale et culturelle d’une valeur inestimable.  « Il n’y a pratiquement aucun secteur économique qui ne dépende directement ou indirectement de la biodiversité », a-t-il insisté.

Pour M. Qu, la disparition de la biodiversité sape les efforts mondiaux de lutte contre la pauvreté et la faim.  « Sans biodiversité, pas de diversité alimentaire », a-t-il ainsi noté.  Le Directeur général a par conséquent appelé à transformer radicalement nos économies et nos comportements, en s’assurant qu’ils soient « ouverts, verts et durables ».

Alors que les gouvernements négocient le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020, M. Qu a noté que le système des Nations Unies s’engageait à appuyer la « difficile » intégration de la biodiversité dans les économies et les sociétés.  L’ONU et ses agences veillent également à ce que la biodiversité soit intégrée dans leurs opérations, programmes et procédures internes, a-t-il précisé.  En ce sens, M. Qu a indiqué que le système des Nations Unies aidait les États Membres à faire de la biodiversité une partie intégrante des stratégies de développement vert, des approches innovantes dans la gestion des risques de catastrophe et de la mise en œuvre des accords internationaux et politiques publiques visant à garantir la sécurité alimentaire, les moyens de subsistance et la durabilité des sociétés.

Aux yeux du Directeur général, la restauration des écosystèmes terrestres et aquatiques, la conservation des espèces génétiques et des ressources naturelles, l’utilisation de solutions fondées sur la nature, la finance « verte » et « bleue » et les chaînes de valeur durable, ainsi que l’évolution des modes de consommation et de production sont autant de priorités qui doivent guider les démarches de la communauté internationale.

Soulignant le lien entre ce Sommet des Nations Unies sur la biodiversité et le futur Sommet de l’Organisation sur les systèmes alimentaires, qui aura lieu en 2021, M. Qu a indiqué que l’avenir de nos systèmes agroalimentaires dépendait de la biodiversité.  Quant à l’avenir de la biodiversité, il dépend de la transformation de notre système alimentaire, du développement économique vert et de la nature, a-t-il précisé.

« N’abandonnons ni les personnes ni la terre! » a conclu le Directeur général de la FAO.  « Faisons cela de manière historique, holistique, cohérente et collective! »

Mme AUDREY AZOULAY, Directrice générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), a considéré que toute crise est aussi une opportunité, avant d’évoquer la mise en œuvre d’un projet ambitieux lancé en Italie par l’organisation qu’elle dirige dans le domaine de la préservation du patrimoine en danger, en coopération avec les jeunes.  L’éducation, la science et la culture doivent être mobilisées afin de protéger les écosystèmes, a-t-elle affirmé, avant de plaider pour la conclusion d’un pacte entre les humains et la nature, pour lequel un large consensus est nécessaire, sur tous les plans, y compris le plan éthique.  Mme Azoulay a donc annoncé la création à cet égard d’un partenariat avec le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).

M. BRUNO OBERLE, Directeur général de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), a souligné que la biodiversité était menacée comme jamais auparavant dans l’histoire de l’humanité.  Il a appelé à lutter de front contre la disparition de la biodiversité, parallèlement à la lutte contre les changements climatiques, notamment en se dotant du cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020.  Ce dernier devrait permettre de donner un coup d’arrêt à la perte de la biodiversité mondiale d’ici à 2030, a estimé M. Oberle, dans l’espoir d’inverser la tendance d’ici à 2050.  Pour y parvenir, le Directeur général a appelé les gouvernements à travailler main dans la main avec les peuples autochtones et la société civile.

M. Oberle a également insisté pour inscrire les actions de préservation de la biodiversité dans le cadre des objectifs de développement durable du Programme 2030.  La nature sera un allié essentiel dans cette entreprise, a-t-il souligné, appelant à utiliser des solutions naturelles, fondées sur des normes nouvelles.  Sur le plan économique, le Directeur général a appelé à cesser d’investir dans des activités qui appauvrissent la nature.  Selon lui, les industries extractives, l’agriculture, le secteur forestier et les pèches doivent ainsi changer leurs méthodes de production.  M. Oberle a indiqué que le secteur financier était d’ailleurs de plus en plus conscient des risques présentés par la perte de la biodiversité et commençait à prendre en compte cette dimension dans ses pratiques, notamment au niveau de l’octroi de prêts. 

Mme GABRIELA CUEVAS BARRON, Présidente de l’Union parlementaire internationale, a indiqué que la pandémie de COVID-19 pousse la communauté internationale à tirer la sonnette d’alarme.  Mais les résolutions agréées à l’ONU et ailleurs doivent maintenant se traduire dans les législations nationales et dans des accords au niveau local, a-t-elle exhorté, en soulignant l’importance d’œuvrer à la mobilisation de ressources budgétaires pour concrétiser les engagements pris.  Pour cela également, il faut des lois claires qui doivent être promulguées par les parlements.  Aujourd’hui, nous pouvons être la génération qui sauve la planète, qui décide de faire face aux changements climatiques, celle que l’Union a décidé d’incarner, a ajouté sa Présidente.

« Nous sommes dans un état d’urgence planétaire », a déclaré M. PAVAN SUKHDEV, Président de WWF International.  « Lorsque j’aurai fini de parler, nous aurons perdu encore 48 hectares de forêts dans le monde.  Nos océans sont exploités jusqu’à épuisement, tout en étant remplis d’environ 12 millions de tonnes de plastique chaque année.  Le rapport Planète vivante du WWF révèle un déclin de 68% des espèces sauvages depuis 1970, causé par la perte et la dégradation de l’habitat dues principalement à un système alimentaire non durable », a-t-il précisé.  Alors que se multiplient les signes avant-coureurs d’une défaillance systémique, le message est clair, a tranché M. Sukhdev: nous devons prendre des mesures décisives aujourd’hui, pour éviter des effets désastreux sur l’humanité.  Une transition positive pour la nature pourrait générer jusqu’à 10 milliards de dollars en valeur commerciale annuelle et créer près de 400 millions d’emplois au cours de la prochaine décennie, a-t-il argué, en soulignant trois actions prioritaires.

La première, a indiqué le Président, c’est d’assurer un leadership ambitieux, en mettant la nature au centre des décisions politiques pour qu’elles répondent à cette urgence.  « Le droit à un environnement sain doit être reconnu comme fondamental », a-t-il affirmé.  Ensuite, les États doivent s’engager en faveur d’un cadre mondial de transformation de la biodiversité et de sa mise en œuvre immédiate, afin de garantir que le monde renoue avec une « nature positive » d’ici une décennie.  Pour y parvenir, il a dit qu’il fallait conserver au moins 30% de la planète et restaurer et gérer durablement le reste, en reconnaissant les droits des peuples autochtones et des communautés locales et leur rôle essentiel dans la protection de la nature.  Il a également préconisé de freiner le commerce non durable des espèces sauvages et la surpêche et de réduire de moitié l’empreinte de la production et de la consommation humaines.  Enfin, M. Sukhdev a suggéré de mettre la nature au cœur d’une relance verte et juste, d’augmenter le financement des solutions fondées sur la nature et d’éliminer les subventions qui nuisent à la nature. 

« Aujourd’hui marque une opportunité unique dans l’histoire. »  De nombreux chefs d’État ont déjà approuvé un engagement des dirigeants pour la nature afin d’inverser la perte de biodiversité d’ici à 2030, a conclu le Président: « Tous les gouvernements participant à ce Sommet des Nations Unies sur la biodiversité doivent tenir compte de cet engagement et l’accepter, si nous voulons atteindre les objectifs de développement durable pour nos enfants. »

Dans les interventions qu’ils ont faites en vidéo, COVID-19 oblige, les présidents et chefs de gouvernement ont unanimement souligné la situation « d’urgence planétaire » dans laquelle nous nous trouvons et les risques liés à la perte de la biodiversité, y compris en termes de développement durable.  Pour le Président du Costa Rica, M. CARLOS ALVARADO QUESADA, il est impératif aujourd’hui de réarticuler nos modèles de développement pour qu’ils tiennent compte de l’interdépendance entre biodiversité, changements climatiques et développement durable.  Cela suppose de réorienter les ressources vers des pratiques sans carbone qui ne détruisent plus les écosystèmes, et de pratiquer l’économie verte.  Même son de cloche du côté de la Grèce, pour laquelle la protection de la biodiversité doit faire partie intégrante du modèle de développement durable car, comme l’a dit le Ministre de l’environnement et de l’énergie de la Grèce, M. KONSTANTINOS HATZIDAKIS, « lorsque nous détruisons la biodiversité, nous détruisons le système qui protège la vie humaine », une question hautement d’actualité dans le contexte actuel de la COVID-19.

Alors qu’aujourd’hui ce sont un million d’espèces d’animaux et de plantes qui sont menacées, le Président chilien, M. SEBASTIÁN PIÑERA ECHENIQUE, a tiré la sonnette d’alarme et appelé à écouter la science et à être plus ambitieux.  Vivre en harmonie avec la nature signifie pour lui qu’il faut changer du tout au tout nos modes de vie.  Son homologue, la Présidente de l’Estonie, Mme KERSTI KALJULAID, a en effet accusé les modèles actuels de production et de consommation, d’être à l’origine de la situation actuelle, et a exigé que l’on mette fin aux pratiques néfastes d’utilisation des terres et de pollution des océans actuelles.  Cette opinion a été largement partagée par ses pairs qui ont également pointé du doigt la surexploitation des ressources naturelles à des fins économiques comme principale cause de cette perte alarmante de la biodiversité.  Pour y remédier, la France et le Chili ont lancé la coalition de haute ambition pour la nature, l’an dernier, une initiative qui vise à protéger 30% des écosystèmes de la planète d’ici à 2030, et qui s’inscrit dans le droit fil de la diplomatie écologique qu’a prônée le Président kirghize, M. SOORONBAI ZHEENBEKOV.

Beaucoup de pays ont répondu présent à l’appel lancé, en 2019, par le Conseil mondial de la biodiversité pour étendre les zones protégées et sanctuaires et restaurer les écosystèmes.  Ainsi, le Mozambique, où vivent70% des espèces endémiques africaines, a créé des zones transfrontalières de protection de ces espèces, a indiqué son Président, M. FILIPE JACINTO NYUSI, se faisant l’écho de l’appel du Président kirghize, qui a lui aussi mis l’accent sur l’importance de la coopération transfrontière pour la protection de la biodiversité et qui s’apprête même à présenter un projet de résolution sur cette question. 

D’autres pays, comme la Zambie qui compte plus de 12 500 espèces différentes de flore et de faune, ont promulgué des cadres législatifs et des politiques pour promouvoir la protection de la biodiversité et la gestion durable de l’environnement.  Concrètement, cela englobe des programmes de reforestation, ou encore la réintroduction d’espèces en voie de disparition dans les sanctuaires, a expliqué le Président de la Zambie, M. EDGAR CHAGWA LUNGU.  Sur une note positive, le Président du Botswana, M. MOKGWEETSI ERIC KEABETSWE MASISI, a fait état d’une augmentation significative de la population d’éléphants dans son pays et de la réintroduction des rhinocéros sur son territoire dont 40% sont des zones protégées.  De son côté, la Thaïlande est en train de rédiger une loi sur la biodiversité nationale et a opté pour la fermeture annuelle de ses parcs naturels pendant trois mois pour permettre à la nature de se régénérer, a expliqué son Premier Ministre, M. PRAYUT CHAN-O-CHA. 

Le Premier Ministre du Canada, M. JUSTIN TRUDEAU, a annoncé avoir dépassé sa cible de 2020 en termes de protection de 10% des zones marines canadiennes.  De plus, le Canada cherche à réaliser un plan qui consiste à conserver 25% des terres et 25% des océans du Canada d’ici à 2025 et 30% d’ici à 2030. 

Ces approches ambitieuses ont amené la Présidente de la Géorgie, Mme SALOME ZOURABICHVILI, à inciter ses pairs à repenser les dépenses faites dans la protection de la biodiversité comme un investissement porteur dans une avenir plus vert en vue de « débloquer le potentiel économique de la biodiversité ». 

Si tous s’accordaient à dire que les moyens existent pour inverser la tendance actuelle, ils ont placé leurs espoirs dans une action mondiale ambitieuse à travers le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 qui vise à intensifier les efforts pour sauver l’écosystème mondial à l’horizon 2030.  Ce cadre devrait être adopté lors d’une prochaine conférence des Nations Unies sur la biodiversité en Chine, alors que des fonctionnaires et des experts se réuniront au siège de la FAO, à Rome, du 24 au 29 février 2021, pour des négociations sur le projet initial de ce cadre et des objectifs mondiaux de biodiversité post-2020. 

M NETUMBO NANDI-NDAITWAH, Vice-Première Ministre et Ministre des relations internationales et de la coopération de la Namibie, a toutefois souligné que le succès de la mise en œuvre de ce cadre dépendra largement des moyens qui l’accompagneront, y compris en termes de transfert de technologies et de ressources financières vers le monde en développement, une opinion partagée par Mme ELBA ROSA PÉREZ MONTOYA, la Ministre de la science, la technologie et l’environnement de Cuba.  D’autres, comme la Thaïlande, ont insisté sur une approche inclusive qui implique toutes les parties prenantes, y compris le secteur privé et la société civile, et ont appelé à éduquer les jeunes générations sur les enjeux relatifs à la perte de la biodiversité. 

Deuxième dialogue entre décideurs: « Mettre la science, la technologie et l’innovation, le renforcement des capacités, l’accès aux ressources biologiques et le partage des bénéfices, le financement et les partenariats au service de la biodiversité »

« Notre monde souffre », a lancé d’emblée M. RALPH GONSALVES, Premier Ministre de St-Vincent-et-les Grenadines, et la seule solution est la coopération multilatérale, ainsi que l’établissement de partenariats essentiels entre les gouvernements, le secteur privé et la société civile.  Il a expliqué qu’en 2018, à St-Vincent-et-les Grenadines, un système d’alerte précoce avait été mis en place pour les coraux.  Le Gouvernement a décidé de travailler avec les entreprises et les consommateurs pour réduire les plastiques à usage uniques, a-t-il ajouté avant de signaler que le pays compte aussi agir au niveau des crèmes solaires afin de protéger ses atouts côtiers.  Des poubelles se trouvent pratiquement à chaque coin de rues et les coopératives sont mises à contribution pour protéger les ressources marines et terrestres.  Le Ministre a souligné que la pandémie a braqué les projecteurs sur les dangers de la perte en biodiversité et a appelé à reconstruire de manière durable. 

Face à la « perte catastrophique » de biodiversité, Mme ISABELLA LÖVIN, Vice-Premier Ministre et Ministre de l’environnement et du climat de la Suède, a appelé à l’élaboration d’une architecture qui appuie des solutions durables et des écosystèmes capables de protéger la nature, comme le préconise le Programme d’action d’Addis-Abeba.  Elle a expliqué que les investissements de la Suède dans la biodiversité et les transports durables doivent lui permettre d’émerger à nouveau de la crise, de façon plus durable, notamment en mettant un terme à l’extinction des espèces, en promouvant la propreté des eaux et en assurant la protection des zones marines, entre autres.  Elle a appelé à prêter davantage attention aux solutions naturelles, soulignant en outre l’importance de l’éducation.  Il faut donner de l’espoir aux jeunes et reconstruire mieux, a-t-elle lancé.  Elle a aussi appelé au renforcement des capacités scientifiques. 

S’exprimant au nom des 12 petits États insulaires en développement du Pacifique, M. JOSAIA VOREQE BAINIMARAMA, Premier Ministre des Fidji, a exigé une action urgente pour protéger la flore et la faune qui ornent leurs forêts et récifs.  L’océan Pacifique, a résumé M. Bainimarama, est la plus grande masse d’eau de la planète et abrite certains des écosystèmes marins les plus riches. Près de 98% de la région du Pacifique est océaniques et, par conséquent, l'océan et ses vastes ressources sont au cœur de la vie et de la prospérité future des peuples des îles du Pacifique. 

Le Pacifique, s’est alarmé le Premier Ministre, fait face à un calcul existentiel car « le monde est dans un état d'urgence planétaire ».  Sur terre, dans l’air et en mer, nous perdons la nature à un rythme sans précédent. Or la perte de biodiversité a des implications critiques pour l’humanité, de l’effondrement des systèmes alimentaires et de santé à la perturbation des chaînes d’approvisionnement. 

Alors même que le monde est aux prises avec une récession économique causée par la COVID-19, les dirigeants doivent reconnaître qu’une récession écologique pourrait avoir des conséquences pires et permanentes, a averti M. Bainimarama. C’est pourquoi « nous devons reconstruire mieux et plus bleu », a-t-il plaidé. « Nous ne pouvons pas revenir au statu quo.  »  La mort des récifs, l'épuisement des stocks de poissons et le réchauffement des mers entraînerait l'effondrement d'écosystèmes entiers, ainsi que des sociétés et des économies qui dépendent de leur vitalité. 

Dans le cadre de leur « Stratégie 2050 du continent bleu du Pacifique », a assuré le Premier Ministre fidjien, les PEID de la région travaillent à réduire leurs émissions et à renforcer leur résilience ; ils luttent pour protéger leurs océans et leurs ressources et pour montrer l’exemple. 

Au cours de ce deuxième dialogue virtuel du Sommet, les chefs d’État et de gouvernement ont souligné les priorités urgentes dans la protection de la biodiversité ainsi que les mesures déjà prises en ce sens aux niveau national et régional.  

Relevant que trois-quarts des nouvelles maladies sont dues à une relation préjudiciable entre l’homme et la nature, le Président de l’Équateur a jugé prioritaire de changer les modes de production et de consommation.  Il a également alerté sur le fait que des pratiques humaines délétères mettent en péril les Îles Galápagos, dont la conservation, a-t-il ajouté, doit être une responsabilité partagée.  Outre la consommation non durable, c’est la pollution plastique qui a le plus préoccupé le Président des Maldives car les déchets plastiques représentent 80% des débris marins en surface.  Il a appelé à l’interdiction des plastiques à usage unique d’ici à 2023, comme c’est déjà le cas aux Maldives. 

Alarmé du fait qu’un million d’espèces animales et végétales sont menacés d’extinction le Premier Ministre du Luxembourg a appelé au renforcement de l’interface entre la science et la politique et demandé de renforcer l’action multilatérale pour l’utilisation durable des ressources naturelles.  Les oiseux, les fleuves et les virus ne s’arrêtent pas aux frontières, a-t-il commenté.  Il a également jugé nécessaire de faire évoluer les systèmes financier et économique à l’image du lancement, par le Luxembourg, des premières obligations souveraines durables de l’Europe. 

« Des solutions naturelles pour l’action climatique doivent figurer au cœur des efforts », a renchérit la Premier Ministre de la Norvège, pays qui lancera, en décembre avec les Palaos, un programme de transition pour des océans propres et productifs.  La Norvège se mobilise aussi pour aider les pays avec un couvert forestier tropical à combattre la déforestation et a par ailleurs renforcé ses cibles nationales découlant de l’Accord de Paris. 

« En provoquant les extinctions d’espèces, nous nous dirigerons vers l’extinction de l’être humain », a alerté à son tour la Premier Ministre du Bangladesh qui a appelé à mettre l’accent sur la durabilité dans le cadre des investissements, et à renforcer les législations nationales et les mécanismes de surveillance.  L’accès mondial au partage des avantages doit en outre être garanti pour les véritables propriétaires des ressources et des connaissances connexes, a-t-elle souligné.  

À son tour, le Taoiseach de l’Irlande a souligné que la crise climatique et la crise de la biodiversité vont de pair et que c’est sur cette base que s’élabore la politique de son pays qui est notamment en train de créer une zone maritime protégée.  De son côté, le Premier Ministre de la République tchèque a insisté sur l’importance d’axer les démarches sur la science afin de prendre des décisions plus éclairées et mieux ciblées.  

Partisan de l’innovation, le Premier Ministre du Népal a appelé à trouver un meilleur équilibre entre les droits des personnes et l’utilisation des ressources naturelles.  Il a aussi cité les mérites de l’énergie hydraulique et fait savoir que le Népal était parvenu à éliminer le braconnage des rhinocéros et à multiplier par deux le nombre de tigre sur son territoire. 

« L’urgence environnementale est sans précédent et seul le multilatéralisme permettra d’y remédier », a déclaré à son tour le Premier Ministre de l’Espagne qui a appelé les États Membres à renforcer leurs engagements, à l’image de l’Espagne qui s’est engagé à protéger 30% de ses surfaces terrestres et maritimes.  

Préoccupé par la dégradation des sols en Afrique, le Ministre des affaires étrangers et des Sénégalais de l’étranger du Sénégal a passé en revue les initiatives prises par son pays pour protéger sa biodiversité, qui recèle 7830 espèces animales et végétales.  Le Sénégal aura toutefois besoin de coopération et d’un appui financier dans le cadre de la coopération Nord-Sud, Sud-Sud et triangulaire, a-t-il fait savoir. 

En matière de financement, le Ministre de l’énergie et des ressources naturelles de la Malaisie a expliqué que, dans son pays, des subventions sont accordées aux projets de conservation des populations autochtones et que des incitations sont versées pour encourager à élargir les zones protégées.  En outre, les populations autochtones, les communautés locales, le monde universitaire et le secteur privé sont autonomisés pour permettre à tous de participer à la protection de la biodiversité.  Le Ministre a également signalé l’établissement en cours d’un centre de biodiversité en Malaisie.  

De son côté, le Ministre de l’agriculture et de l’environnement de Cabo Verde s’est préoccupé des capacités de réaction réduites des pays insulaires face aux changements climatiques, et a appelé à plus de souplesse pour leur permettre d’accéder aux fonds existants ainsi qu’aux technologies. 

La pandémie de COVID-19 a souligné de façon brutale la nécessité de « réinitialiser la relation de l’humanité avec la nature  », a déclaré M. GUY RYDER, Directeur général de l’Organisation internationale du travail (OIT)

« Notre prospérité future, notre survie même, exigent que nous agissions de manière décisive et que nous agissions maintenant pour protéger la biodiversité.  »   

Pas moins de 1,2 milliard d’emplois dépendent directement des écosystèmes et des services qu’ils fournissent, qu’il s’agisse de nourriture et d’eau, de la régulation de notre système climatique ou de la lutte contre les vecteurs de maladies.  Donc, si nous voulons vraiment créer un travail décent pour tous dans la ligne des ODD, nous ne devons pas oublier que les emplois d’aujourd’hui et de demain dépendent de la préservation des écosystèmes et qu’ils sont sensibles à la perte de biodiversité, a expliqué M. Ryder.  

« En d’autres termes, sans planète saine, il ne peut y avoir d’économies productives ni de travail décent. »  Le relèvement post-pandémie doit s’appuyer sur la reconstruction de la relation entre les personnes et la nature.  Pour l’OIT, a rappelé son Directeur général, l’environnement est l’un des principaux moteurs du changement dans le monde du travail.  Le monde du travail a un rôle essentiel à jouer dans l’élaboration de solutions centrées sur l’homme et fondées sur la nature qui peuvent générer des emplois et des revenus, réduire la pauvreté et restaurer la biodiversité et les écosystèmes.  Enfin, a assuré M. Ryder, l’OIT peut déployer des solutions reposant sur la science et la technologie ainsi que sur les connaissances des peuples autochtones en harmonie avec la nature. 

Mme MARI PANGESTU, Directrice à la Banque mondiale, a déclaré que, selon le Forum économique mondial, les risques découlant de pertes de biodiversité pèsent sur plus de la moitié du PIB mondial.  « C’est seulement si le secteur privé, les gouvernements, les institutions telles que les nôtres et les communautés travaillent ensemble que nous pourrons y remédier. »  Elle a insisté sur les multiples partenariats noués entre la Banque mondiale et le secteur privé.  La Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique doit être, selon elle, l’occasion d’aboutir à une nouvelle donne pour la nature.  Elle a misé sur le cadre post-2020 sur la biodiversité pour insuffler une nouvelle urgence en vue de sortir de la pauvreté mondiale et retrouver une harmonie avec la nature. Enfin, elle a recommandé que les plans de relance en vue du relèvement post-pandémie soient élaborés pour le long terme et s’efforcent de forger un avenir durable. 

M. THOMAS BUBERL, Directeur exécutif du Groupe AXA, a indiqué que la perte de la biodiversité est un défi majeur et demandé des mesures urgentes pour y remédier.  AXA a rejoint l’initiative française « Act for nature » et signé un partenariat avec le WWF, a-t-il indiqué.  Il a également signalé que son groupe compte investir dans un fonds pour la biodiversité et choisir un nouveau fournisseur de données sur les risques liés à la biodiversité.  Le secteur privé est engagé pour relever le défi de la biodiversité, mais l’action publique demeure primordiale, sur la base de données scientifiques solides, a déclaré M. Buberl.  « Les décideurs politiques doivent encourager les efforts. »  Enfin, il a espéré que la prochaine Conférence des parties de la Convention sur la diversité biologique aboutira à un accord robuste, servant de feuille de route pour les années à venir. 

Mme SHINTA KAMDANI, Directrice exécutive de SINTESA Group, groupe d’investissements stratégiques indonésien, a fait remarquer que le besoin de créer des économies et des sociétés plus résilientes n’a jamais été aussi pressant.  Elle a déclaré que, selon le Forum économique mondial, des risques découlant de pertes de biodiversité pèsent sur plus de la moitié du PIB mondial.  L’Indonésie a intégré la question de la nature dans sa stratégie de développement, s’est félicitée Mme Kamdani avant de parler de son entreprise qui a, elle aussi intégré le développement durable dans son modèle, en ajoutant à son portefeuille d’activités l’énergie renouvelable et le développement d’un tourisme vert.  Une tendance qui est également à l’œuvre au sein du secteur des affaires indonésien. Elle a exhorté les gouvernements à adopter des politiques publiques permettant de remédier aux pertes en biodiversité et à aboutir à un cadre post-2020 sur la diversité biologique « robuste ».  « Ensemble, nous devons créer un monde équitable, neutre en carbone et favorable à la nature », a-t-elle conclu, en disant que la nature est « l’affaire de tous ». 

Mme VALÉRIE PLANTE, Mairesse de Montréal et Ambassadrice mondiale d’ICLEI pour la biodiversité locale, a déclaré que la pandémie de COVID-19 invite à une réflexion sérieuse quant à notre rapport avec la nature.  Alors que la perte de la biodiversité va à un rythme plus effréné que jamais, elle a jugé qu’il était temps de repenser la relation entre les humains et la nature, et de poursuivre un développement qui respecte les limites de notre planète.  

C’est pourquoi, a-t-elle enchainé, partout à travers le monde, des villes sont déjà en mode action pour protéger les écosystèmes, que ce soit par la mise en place de ceintures vertes, de corridors de biodiversité, d’aires protégées ou par la plantation d’arbres.  Et les villes, tout comme les gouvernements régionaux et locaux, sont prêtes à un partenariat pour un agenda mondial ambitieux en matière de biodiversité, tel qu’exprimé dans la Déclaration d’Édimbourg.  La communauté internationale a une occasion à saisir avec l’élaboration d’un cadre mondial pour la biodiversité, lors de la COP 15, a-t-elle ajouté.  

Après avoir informé qu’ICLEI a exprimé son appui formel à l’Engagement des dirigeants pour la nature, Mme Plante a souligné que pour que les nouveaux objectifs de protection de la biodiversité soient « enfin  » un succès, il faudra qu’ils soient ambitieux, et qu’ils prennent part à la relance face la pandémie actuelle.  Nous avons surtout, a-t-elle insisté, l’obligation d’une relance verte, durable et résiliente.  

Mme HINDOU OUMAROU IBRAHIM, Dirigeante autochtone, Défenseure des objectifs de développement durable, a déclaré que la nature est un véritable mode de vie pour les peuples autochtones.  « Elle est comme un restaurant et un supermarché ouverts à toute heure du jour et de la nuit, elle est aussi une pharmacie pour se soigner. »  Nous avons un pacte avec la nature, et si nous la protégeons, alors elle nous protégera, a-t-elle déclaré.  Elle a ajouté que les peuples autochtones sont les « ingénieurs et docteurs » de la nature et, qu’à ce titre, le monde a beaucoup à apprendre d’eux.  Le temps est venu de conclure un pacte avec la nature, a conclu la Défenseure.

Déclarations de clôture

« Le sommet d’aujourd’hui a souligné l’urgence de la lutte contre la perte de biodiversité mondiale », a déclaré Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, dans son intervention de clôture.  Cette inquiétude est partagée par un nombre croissant d’individus dans le monde, a-t-elle observé.  Les personnes –plus d’un million- ayant répondu à la consultation mondiale organisée à l’occasion du soixante-quinzième anniversaire de l’ONU ont cité les changements climatiques et la destruction de leur environnement comme leur principale préoccupation à moyen et à long terme, a indiqué la Vice-Secrétaire générale, appelant les États à « plus d’ambition et d’action ».  

Pour Mme Mohammed, la pandémie de COVID-19 a démontré que la dégradation des écosystèmes, l’empiètement humain sur ces écosystèmes et la perte d’habitats naturels peuvent conduire à l’émergence de maladies infectieuses mortelles.  Ces mêmes maux menacent la réalisation des ODD et les objectifs de l’Accord de Paris visant à limiter l’élévation de la température mondiale à 1,5°C au-dessus des niveaux préindustriels.  Or, a-t-elle constaté, nous n’avons pas réussi à atteindre les objectifs internationaux en matière de biodiversité fixés en 2010, dont beaucoup ont été intégrés aux ODD.   

Alors que le dérèglement climatique cause d’immenses dommages aux personnes et aux économies tout en accélérant les pertes naturelles, il se révèle que les solutions fondées sur la nature offrent certains des meilleurs remèdes au réchauffement de la planète et à ses impacts sur les sociétés, a poursuivi la Vice-Secrétaire générale.  C’est pourquoi ces solutions doivent avoir une place dans les contributions déterminées au niveau national, a-t-elle préconisé.   

Dans ce contexte, a-t-elle encore noté, le travail de la communauté scientifique nous permet de mesurer l’ampleur de cette urgence planétaire.  Nous prenons conscience de ce que nos modes de production et de consommation ne sont pas durables: ils vont au-delà des limites environnementales de la planète.  Mme Mohammed a donc plaidé pour que les systèmes financiers intègrent la biodiversité dans leurs calculs.  En effet, a-t-elle insisté, plus de la moitié du PIB mondial dépend en partie de la biodiversité et d’écosystèmes sains.  

Affirmant que la gestion durable de la nature est une « question fondamentale de développement durable », la Vice-Secrétaire générale y a vu une stratégie efficace pour lutter contre la pauvreté et le réchauffement climatique, à la fois en matière d’adaptation et d’atténuation.  À cette aune, a-t-elle ajouté, nous devons veiller à ce que les ambitions formulées par les chefs d’État et de gouvernement soient soutenues dans le cadre du système multilatéral, notamment à travers le développement du cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020, et qu’elles se concrétisent sur le terrain.  La reprise post-COVID-19 « nous offre l’opportunité de transformer notre relation avec notre environnement », a-t-elle conclu, en souhaitant que les plans de redressement soient « centrés sur les personnes et sensibles à la planète ».  

M. VOLKAN BOZKIR, Président de lAssemblée générale, a conclu ce sommet en soulignant que les initiatives et engagements entendus aujourd’hui posent les bases de la COP15 (Kunming, Chine).  Tout en notant l’ampleur des défis en matière de protection de la biodiversité, le Président a estimé que les messages entendus aujourd’hui donnent de l’espoir.  Il s’est dit persuadé que l’humanité est capable d’exploits incroyables.  

Malgré les difficultés imposées par la pandémie, M. Bozkir a dit que la COVID-19 donne une occasion unique de remettre les compteurs à zéro de manière verte.  Il a rappelé que la protection des moyens de subsistance passe par la protection de la biodiversité, avant d’appeler à une amélioration des modes de production et distribution des denrées alimentaires.  La dégradation de la biodiversité sape les efforts mondiaux contre la faim, a-t-il aussi souligné. 

Après avoir mis l’accent sur la nécessité de développer une agriculture durable, il a jugé important d’avancer sur les acquis de ce sommet afin de les intégrer aux préparatifs du Sommet de l’ONU sur les systèmes alimentaires prévu en 2021, dans le cadre de la Décennie d’action pour la réalisation des objectifs de développement durable.  En outre, il a jugé déterminant d’intégrer les connaissances des populations autochtones afin de reconnecter les êtres humains avec la nature. 

Le Président de l’Assemblée générale s’est dit encouragé d’avoir entendu aujourd’hui les dirigeants économiques et du monde de l’entreprise en appeler à la volonté du monde politique pour créer des lois favorables à la nature.  Il s’est félicité de la signature de la déclaration d’Édimbourg par les gouvernements infranationaux et locaux du monde entier le 31 août dernier qui demande à la Convention sur la diversité biologique de prendre des mesures fortes et audacieuses pour enrayer efficacement la perte de biodiversité et appuyer la pertinence d’un cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020. 

Il a appelé tous les acteurs à prendre des engagements ambitieux pour appuyer la protection de la biodiversité.  « Pour ce faire il faut que le multilatéralisme serve les besoins des peuples », a-t-il insisté avant de conclure : « Nous sommes tous dans le même bateau, mettons-nous au travail. »

La longue liste d’orateurs inscrits –plus de 90 pour le seul débat plénier– a contraint l’Assemblée générale à prolonger la séance au-delà de l’heure de fin du Sommet.  Les chefs d’État et de gouvernement, ainsi que les Ministres et tous les participants au Sommet sont intervenus par vidéo interposée, avec des discours préenregistrés.  Seuls le Secrétaire général, la Vice-Secrétaire générale, le Président de l’Assemblée générale et le Président de l’ECOSOC ont pris la parole à la tribune de l’Assemblée, tout en respectant les mesures barrières adoptées en temps de pandémie.  

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Conseil de sécurité: le conflit israélo-palestinien se détériore, mais certains développements « positifs » donnent des raisons d’espérer, selon l’ONU

8762e séance – après-midi 
CS/14315

Conseil de sécurité: le conflit israélo-palestinien se détériore, mais certains développements « positifs » donnent des raisons d’espérer, selon l’ONU

Entre la poursuite de la colonisation israélienne, la propagation de la pandémie de COVID-19 et l’augmentation des violences réciproques, le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient a, cet après-midi, dressé au Conseil de sécurité un tableau très sombre de l’évolution du conflit israélo-palestinien sur le terrain.  M. Nickolay Mladenov a toutefois appelé les parties à redynamiser le processus de paix, à la faveur d’une série d’« évolutions positives » récentes. 

Pour le haut fonctionnaire, en effet, la signature par Israël d’accords sur l’établissement de relations diplomatiques avec les Émirats arabes unis et Bahreïn, sous l’égide des États-Unis, la suspension du plan israélien d’annexion de certaines parties de la Cisjordanie, qui découle directement de ces accords, l’annonce des préparatifs pour la tenue d’élections générales palestiniennes et la reprise de négociations sur la paix au sein du Quatuor pour le Moyen-Orient et de la Ligue des États arabes sont autant d’« évolutions positives », au cours des deux derniers mois, sur les lesquelles les parties devraient s’appuyer pour relancer la solution des deux États. 

M. Mladenov, qui d’exprimait par visioconférence depuis Jérusalem, était venu présenter au Conseil son dernier rapport trimestriel sur l’application de sa résolution 2334 (2016).  Adopté le 23 décembre 2016 par 14 voix pour, avec l’abstention des États-Unis, ce texte exige d’Israël qu’il cesse « immédiatement et complètement » toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est. 

De ce point de vue, le Coordonnateur spécial a noté que la situation sur le terrain s’était fortement détériorée, en raison notamment de la poursuite des activités de peuplement israéliennes en Cisjordanie, marquée par la construction de nouveaux bâtiments, ainsi que par les destructions et saisies de logements palestiniens.  À cela s’ajoute la recrudescence des affrontements meurtriers entre Palestiniens et forces de sécurité israéliennes, y compris des attaques à l’arme blanche et à la voiture-bélier, ainsi que des échanges de tirs de roquettes et de missiles entre Gaza et Israël, a-t-il souligné. 

Aux yeux de M. Mladenov, cette évolution ne contribue qu’à saper les bases d’une solution politique au conflit.  Il a par conséquent appelé Israël à cesser ses activités illégales de peuplement dans les territoires occupés et a exhorté les deux parties à mettre fin aux violences réciproques afin de relancer la vision d’une solution à deux États, à l’intérieur de frontières fiables et reconnues selon le tracé d’avant 1967. 

Sur le plan financier, M. Mladenov s’est dit préoccupé par le refus de l’Autorité palestinienne de recevoir les recettes fiscales et douanières qu’Israël collecte en son nom, par le manque de financement pour répondre à la pandémie, qui ne cesse de gagner du terrain dans la zone, et par le déficit budgétaire de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), qui a besoin de 31 millions de dollars supplémentaires pour financer son action humanitaire.  Le Coordonnateur spécial a appelé Israéliens et Palestiniens à revoir la nature de leurs relations économiques et a invité les bailleurs de fonds internationaux à davantage financer l’UNRWA, tout comme la riposte à la crise sanitaire au Moyen-Orient.

À Gaza, après l’escalade de la violence entre le Hamas et Israël, M. Mladenov a salué la signature d’un mémorandum d’accord, le 13 août, grâce à la médiation du Qatar, qui s’est traduite par une diminution des tirs de roquettes et l’assouplissement des barrages israéliens dans la zone.  Le Coordonnateur spécial a également salué la tenue d’une réunion récente entre l’Autorité palestinienne et toutes les factions palestiniennes, afin de renforcer leur unité politique.

À sa suite, les États-Unis ont salué la normalisation des relations entre Israël et le monde arabe, grâce à la « diplomatie audacieuse » du Président Donald Trump qui, en prenant « le parti de l’action », a permis la signature des accords avec les Émirats arabes unis et Bahreïn.  L’Estonie s’est également félicitée du rôle « constructif » joué par les États-Unis dans la signature de ces accords, dont la Belgique a espéré qu’ils créeraient « une nouvelle dynamique » pour la résolution du conflit israélo-palestinien.  Pour le Royaume-Unis, les « étapes historiques » des deux derniers mois ont déjà eu un impact, notamment la reprise des vols directs entre Israël et les Émirats arabes unis, ainsi que les premiers accords commerciaux, des exemples dont devraient selon lui inspirer les autres États de la région. 

Les accords conclus ne doivent cependant pas occulter « l’impérieuse nécessité d’une résolution juste et durable de la question palestinienne », a déclaré le Niger.  « Un plan de paix réaliste et crédible aboutira à une véritable solution à deux États; pas à un État viable et à un Bantoustan », a renchéri l’Afrique du Sud, soutenant l’appel lancé la semaine dernière par le Président palestinien Mahmoud Abbas, lors du débat général de l’Assemblée générale, pour que le Secrétaire général entame les préparatifs, avec le Quatuor pour le Moyen-Orient et le Conseil de sécurité, d’une conférence internationale sur le conflit en 2021.  Les efforts internationaux visant à promouvoir un règlement pacifique ne peuvent en effet être couronnés de succès qu’en facilitant des négociations directes et constructives entre les parties, a secondé Saint-Vincent-et-les Grenadines.  À son tour, la Tunisie a appuyé la demande de M. Abbas, de même que la Chine, qui s’est félicitée de la suspension des plans d’annexion du territoire palestinien, qui contrevenaient au droit international.

La France a plaidé pour une « pérennisation de cette suspension », tout en espérant des avancées dans les relations intrapalestiniennes, notamment grâce au processus d’Ankara.  Il convient pour cela d’appuyer les efforts égyptiens en vue d’une réconciliation des factions palestiniennes, a quant à elle estimé la Fédération de Russie, appelant également à relancer les discussions au sein du Quatuor.  Le Viet Nam s’est de son côté alarmé de l’impact « dévastateur » de la pandémie de COVID-19 et des mesures de restriction sur l’économie palestinienne, au moment où baisse fortement l’aide étrangère.  Le pays a donc appelé les donateurs internationaux à poursuivre leur soutien, notamment à l’UNRWA.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. NICKOLAY MLADENOV, Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, qui présentait au Conseil son quatorzième rapport trimestriel sur l’application de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, a tout d’abord jugé comme un élément positif l’annonce récente d’accords concernant l’établissement de relations diplomatiques entre Israël, d’un côté, et les Émirats arabes unis et Bahreïn, de l’autre.  Ces accords ont permis de suspendre la poursuite par Israël de son plan d’annexion de certaines parties de la Cisjordanie occupée, s’est également félicité M. Mladenov, qui s’exprimait par visioconférence depuis Jérusalem.  Entre autres évolutions positives, le Coordonnateur spécial a aussi mentionné la reprise de négociations internationales pour relancer la solution des deux États à Amman et la tenue de discussions sur l’organisation d’élections générales palestiniennes. 

Toutefois, M. Mladenov s’est dit préoccupé par l’augmentation des infections de COVID-19 dans les territoires occupés et en Israël.  Il s’est félicité des engagements financiers récents pour appuyer la réponse à la pandémie, notamment à Gaza. 

Le Coordonnateur spécial s’est par ailleurs inquiété de la détérioration de la situation sur le terrain, marquée notamment par la poursuite des activités de peuplement illégales israéliennes, des affrontements violents entre Palestiniens et forces de sécurité israéliennes, des actes de violence liés aux colons, des attaques à l’arme blanche et à la voiture-bélier et des tirs de roquettes.  À ses yeux, cette évolution ne contribue qu’à saper les perspectives d’une solution politique au conflit. 

M. Mladenov a tout d’abord réaffirmé l’obligation d’Israël de mettre fin « immédiatement et complètement » à toute activité de peuplement dans les territoires occupés.  S’il a constaté qu’il n’y avait pas eu, pendant la période considérée, de nouveau projet de peuplement dans la zone C, le Coordonnateur spécial a déploré la poursuite des constructions israéliennes, ainsi que des démolitions et saisies de structures palestiniennes et des expulsions de Palestiniens dans les territoires palestiniens occupés.  Ces agissements ont entraîné selon lui le déplacement de plusieurs dizaines de Palestiniens en Cisjordanie occupée.  Des structures agricoles et d’approvisionnement en eau ont également été détruites par les autorités israéliennes, a-t-il dénoncé. 

M. Mladenov a par ailleurs déploré la persistance d’affrontements violents entre Palestiniens et forces de sécurité israéliennes, y compris les tirs de dizaines de roquettes et d’obus de mortiers depuis Gaza vers Israël, qui ont blessé des civils et créé plusieurs incendies.  Les forces de sécurité israéliennes ont riposté par des dizaines de tirs de missiles qui ont tué et blessés des civils palestiniens, a également déploré le Coordonnateur spécial, s’inquiétant en outre d’une recrudescence des attaques à l’arme blanche et à la voiture-bélier ainsi que des attaques contre des civils de la part des forces israéliennes de sécurité, qui ont coûté la vie à plusieurs personnes de part et d’autre. 

Le Coordonnateur spécial a tout autant déploré la persistance de propos incendiaires et appels à la haine proférés par les deux parties, dont des propos antisémites de responsables du Fatah et les incitations à la violence de la classe politique israélienne. 

M. Mladenov s’est toutefois félicité de la tenue d’une réunion récente entre l’Autorité palestinienne et toutes les factions palestiniennes, afin de faire avancer la question de l’unité palestinienne.  Après l’escalade de la violence entre le Fatah, le Hamas et Israël, il a également salué le rôle de médiateur assumé par le Qatar au mois d’août.  Cette initiative a conduit à la signature d’un mémorandum d’accord, le 13 août, qui a selon lui entraîné une désescalade à Gaza, marquée par une diminution des tirs de roquettes et l’assouplissement des barrages israéliens dans la zone. 

M. Mladenov s’est cependant dit préoccupé par le refus de l’Autorité palestinienne de recevoir les recettes fiscales et douanières qu’Israël collecte en son nom en vertu du Protocole de Paris.  Il s’est ainsi inquiété du manque de ressources fiscales de l’Autorité palestinienne.  Dans le même ordre d’idées, le Coordonnateur spécial a mis l’accent sur le déficit financier de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), qui a besoin de 31 millions de dollars supplémentaires pour financer sa réponse humanitaire.  M. Mladenov a également estimé que la réponse à la pandémie dans la zone était sous-financée. 

Au niveau international, le Coordonnateur spécial a salué la réunion, le 27 août et aujourd’hui, des envoyés du Quatuor pour le Moyen-Orient.  La Ligue des États arabes s’est également réunie, le 9 septembre, pour relancer du processus de paix, a-t-il ajouté. 

Face à ces développements positifs, M. Mladenov a appelé les parties à mettre un terme à la détérioration de la situation sur le terrain.  Il a notamment exhorté Israël à cesser ses activités de peuplement illégales dans les territoires occupés, ainsi qu’à mettre fin à l’augmentation des démolitions et saisies de structure palestiniennes et aux pressions israéliennes croissantes à l’encontre des civils palestiniens, notamment dans la zone C.  Le Coordonnateur spécial a aussi appelé les parties à mettre fin aux actes de violence réciproques, qu’il s’agisse des tirs de roquettes depuis Gaza, d’attaques à l’arme blanche ou des agressions de civils par les forces de sécurité israéliennes. 

Les deux parties devraient en outre revoir la nature de leurs relations économiques pour mettre fin à l’absence chronique de ressources financières de l’Autorité palestinienne, a estimé M. Mladenov, avant de demander à Israël de mettre fin à sa pratique consistant à ne pas restituer les dépouilles de Palestiniens à leurs familles, au mépris des obligations qui lui incombe en vertu du droit international humanitaire. 

Le Coordonnateur spécial a enfin indiqué que le conflit se trouvait à un « moment charnière », suite aux accords passés entre Israël, les Émirats arabes unis et Bahreïn, sous l’égide des États-Unis.  Il a appelé les parties à profiter de ce contexte favorable pour relancer la vision d’une solution à deux États souverains, vivant à l’intérieur de frontières fiables et reconnues, d’après le tracé d’avant 1967. 

M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a salué la normalisation des relations entre Israël et le monde arabe, en se félicitant des accords conclus entre Israël et Bahreïn et entre Israël et les Émirats arabes unis, grâce à la « diplomatie audacieuse » du Président Trump.  Le représentant a indiqué qu’il n’y avait eu que deux accords de ce type ces dernières décennies et que deux nouveaux accords ont donc été signés en un mois.  M. Trump a donné confiance à ses alliés régionaux pour qu’ils s’éloignent de leurs intérêts à courte vue pour une résolution du conflit, a affirmé M. Hunter, pour qui les États-Unis ont pris le parti de l’action et obtenu des résultats tangibles en vue de la coexistence pacifique entre Israéliens et Palestiniens.

Le représentant a regretté les tirs de roquettes de la part de « terroristes palestiniens » depuis Gaza les 15 et 16 septembre visant le territoire israélien alors qu’Israël célébrait la signature des accords précités.  Il a exhorté les dirigeants palestiniens à renoncer à la violence et à embrasser la paix, avant de souhaiter que d’autres pays arabes signent des accords similaires.  Enfin, M. Hunter a dit espérer que les membres du Conseil se saisiront de ces accords en vue d’une percée historique dans ce dossier. 

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a rappelé que la Palestine et son peuple demeurent sous occupation illégale et que peu de progrès ont été accomplis vers le droit de la Palestine à l’autodétermination, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à la souveraineté.  À cet égard, le représentant a réaffirmé sa position selon laquelle aucun plan de paix ou initiative de paix ne peut avoir de mérite ou de succès si toutes les parties au conflit ne sont pas incluses dans les pourparlers en tant que partenaires égaux, dès le départ.  « Un plan de paix réaliste et crédible aboutira à une véritable solution à deux États; pas à un État viable et à un Bantoustan », a-t-il tranché.  Par conséquent, l’Afrique du Sud a soutenu l’appel du Président Abbas, dans sa déclaration lors du débat général de l’Assemblée générale des Nations unies, pour que le Secrétaire général entame les préparatifs, avec le Quatuor pour le Moyen-Orient et le Conseil de sécurité, d’une conférence internationale.  Celle-ci verrait la participation de toutes les parties concernées à des discussions sur un véritable processus de paix, y compris pour résoudre toutes les questions relatives au statut final.

En ce qui concerne l’application de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, l’Afrique du Sud a demandé une fois de plus la pleine application de ses dispositions.  « De mars à août 2020, nous avons assisté à la démolition ou à la saisie de 389 structures appartenant à des Palestiniens, le taux de destruction moyen le plus élevé en quatre ans.  Cela s’est produit malgré l’indication des autorités israéliennes selon lesquelles elles s’abstiendraient de telles actions pendant la pandémie. »  Le représentant a dénoncé le fait que ces démolitions et saisies aient conduit 442 Palestiniens à se retrouver sans abri, à un moment où Israël et le territoire palestinien occupé sont sous verrouillage.  « Où ces Palestiniens, privés de leur foyer légitime, sont-ils censés aller? » s’est demandé le représentant.  La destruction, pendant une pandémie, d’infrastructures essentielles telles que l’eau, l’hygiène et l’assainissement, est un autre sujet de préoccupation, à l’heure où se généralise la tendance à se laver les mains régulièrement et à maintenir des distances sociales.

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a déclaré être profondément préoccupée par les tendances observées sur le terrain.  « L’occupation et le conflit prolongés ont causé d’immenses souffrances au peuple palestinien », a-t-elle constaté, en se disant particulièrement préoccupée par les nombreux rapports faisant état d’incidents violents contre des civils dans toute la Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est.  La représentante a ensuite attiré l’attention sur les graves violations du droit international perpétrées par Israël, malgré les appels continus de la communauté internationale en faveur de l’arrêt complet et immédiat et de l’annulation des activités de colonisation.  Aussi a-t-elle fermement appelé Israël à respecter pleinement la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité et toutes les autres dispositions pertinentes du droit international et des résolutions de l’ONU. 

À cet égard, il convient de souligner que les efforts internationaux visant à promouvoir un règlement pacifique ne peuvent être couronnés de succès qu’en facilitant des négociations directes et constructives entre les parties, a considéré la représentante.  Elle a donc appelé le Quatuor pour le Moyen-Orient à renouveler ses efforts et à rétablir la conviction parmi les Palestiniens et les Israéliens qu’un accord de paix négocié reste possible. 

À Gaza, Israël a continué d’intensifier les mesures de répression contre les Palestiniens placés sous son contrôle, essentiellement en raison de son « blocus illégal et inhumain » de Gaza, a regretté Mme King.  « Nous saluons les efforts continus des Nations Unies et de ses partenaires pour mettre en œuvre des interventions humanitaires et économiques urgentes en vue d’aider à soutenir la vie et les moyens de subsistance des Palestiniens à Gaza et appelons Israël à mettre fin à son blocus de Gaza », a conclu la représentante.

M. GENG SHUANG (Chine) a indiqué que la communauté internationale n’avait jamais oublié la question palestinienne et qu’elle souhaitait son règlement durable.  Il a invité le Conseil à écouter les Palestiniens, tout en exhortant la communauté internationale à des efforts redoublés pour obtenir le règlement de cette question.  Il a appuyé la demande de M. Mahmoud Abbas pour qu’une conférence internationale se tienne l’année prochaine sur le sujet. 

Le représentant s’est félicité de la suspension des plans d’annexion du territoire palestinien, qui contrevenaient au droit international, avant d’exhorter les parties à s’abstenir de toute mesure susceptible d’aggraver la situation.  Il a dénoncé la démolition d’un nombre sans précédent d’habitations et de structures palestiniennes en Cisjordanie, avant d’exhorter Israël à permettre l’acheminement d’une aide accrue pour Gaza.  Palestiniens et Israéliens doivent lutter main dans la main contre la COVID-19, a-t-il dit.  Enfin, M. Geng a apporté son appui aux revendications légitimes des Palestiniens et mentionné l’aide substantielle, notamment médicale, apportée par la Chine aux Palestiniens. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a rappelé qu’il est favorable à la solution des deux États et à la création d’un État palestinien viable, sur la base des frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.  Il est aujourd’hui de notre responsabilité d’œuvrer à une reprise du dialogue entre les deux parties, a estimé le représentant, la France étant convaincue qu’aucun des peuples ne saurait satisfaire ses aspirations au détriment de celles de l’autre.  Aussi la France se dit-elle prête à accompagner une reprise progressive du dialogue entre les parties, lesquelles doivent aussi reprendre leur coopération à tous les niveaux, y compris pour faire face à la pandémie actuelle. 

Le représentant a demandé la suspension des projets d’annexion des territoires palestiniens et la pérennisation de cette suspension, précisant que la colonisation ne doit pas permettre l’annexion par d’autres moyens.  C’est pourquoi il a demandé à Israël de suspendre les activités de colonisation en Cisjordanie occupée.  Sa délégation a également appelé de ses vœux des avancées dans les relations intrapalestiniennes, souhaitant que le processus d’Ankara produise des résultats en ce sens.  En conclusion, le représentant s’est dit prêt à soutenir toute initiative qui se fondera sur le droit international et les paramètres agréés. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) s’est félicité de la signature des accords entre Israël et les Émirats arabes unis et entre Israël et Bahreïn, ainsi que du rôle « constructif » joué par les États-Unis à cet égard.  Il a jugé positif qu’Israël se soit engagé à suspendre ses projets d’annexion unilatérale de zones du territoire palestinien occupé. 

Nous pensons que ces développements historiques contribuent à la paix et à la stabilité dans toute la région et donnent l’élan nécessaire pour trouver une solution globale au conflit israélo-palestinien, a ajouté le représentant.  Une solution à deux États et une paix durable ne peuvent être obtenues que par des négociations directes, en tenant compte des aspirations légitimes des deux parties et des préoccupations sécuritaires israéliennes, a-t-il ajouté.  L’Estonie exhorte donc les dirigeants israéliens et palestiniens à renouer avec des négociations constructives.  Condamnant en outre le meurtre « odieux » du rabbin Shai Ohayon le 26 août, M. Jürgenson a appelé les parties à faire preuve de la plus grande retenue pour éviter l’escalade de la violence.  Enfin, il a demandé à l’Autorité palestinienne de reprendre sa coopération sur la base d’accords avec Israël.

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a déclaré que le conflit israélo-palestinien est dans l’impasse.  La situation sur le terrain reste instable, tant à Gaza qu’en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, et les parties semblent plus éloignées que jamais, a-t-elle constaté.  Elle a, comme priorité, appelé les Israéliens et les Palestiniens à se mettre à la table des négociations sans conditions préalables et à reprendre de véritables négociations.  « C’est en effet la seule façon de parvenir à une paix juste, globale et durable. »

Elle a jugé que la normalisation des relations entre Israël et le monde arabe est un élément important pour la paix et la stabilité dans la région, en se félicitant des accords conclus entre Israël et le Bahreïn, entre Israël et les Émirats arabes unis.  « Nous espérons que ces développements créeront une nouvelle dynamique pour la résolution du conflit israélo-palestinien sur la base de la solution des deux États. »  L’annonce de la suspension des plans visant à formaliser l’annexion de certaines parties du territoire palestinien occupé est un pas dans la bonne direction, a poursuivi la déléguée.  Elle a exhorté Israël à abandonner définitivement les plans d’annexion.  L’annexion, quelles que soient son ampleur et sa dénomination, constitue une grave violation du droit international, a-t-elle estimé, en prévenant qu’elle fermera définitivement la porte à la reprise des négociations et portera le coup final à la solution des deux États. 

Mme Van Vlierberge a demandé que les activités illégales de colonisation menées par Israël, qui s’accompagnent d’expropriations, de démolitions, de confiscations et de déplacements de population, cessent immédiatement.  Elle s’est ensuite félicitée du calme relatif qui règne à Gaza suite aux escalades du mois d’août et a appelé toutes les parties à faire preuve de la plus grande retenue.  Sur le plan politique, la seule solution juste est la levée du blocus et la réouverture complète des points de passage, tout en tenant compte des préoccupations légitimes d’Israël en matière de sécurité, a plaidé la représentante.  Elle a salué les efforts récemment déployés par les factions palestiniennes en vue de leur réconciliation.  « Nous espérons que ceux-ci ouvriront la voie à des élections législatives et présidentielle authentiques, libres, équitables et inclusives sur l’ensemble du territoire palestinien, y compris à Jérusalem-Est. »

M. DINH QUY DANG (Viet Nam) s’est alarmé de l’impact « dévastateur » de la pandémie de COVID-19 et des mesures de restriction sur l’économie palestinienne, dans un contexte où l’aide étrangère à la Palestine a fortement décliné depuis le début de 2020.  Il a donc appelé les donateurs internationaux à poursuivre leur soutien pour surmonter la crise actuelle et à maintenir et à accroître l’assistance à l’UNRWA. 

« Face à ces défis multidimensionnels, la question de longue date de l’expansion continue des colonies israéliennes en Cisjordanie reste sans solution », a constaté avec regret M. Dang, qui s’est dit alarmé par la démolition de foyers palestiniens en Cisjordanie, qui a provoqué le déplacement de populations.  « Comme l’affirme clairement la résolution 2334 (2016), l’établissement par Israël de colonies de peuplement dans le territoire palestinien occupé n’a aucune validité juridique et constitue une violation du droit international et un obstacle majeur à la réalisation de la solution à deux États et à une paix juste, durable et globale », a affirmé le représentant. 

S’il a exhorté toutes les parties à s’abstenir de toute action unilatérale susceptible de conduire à des violences récurrentes, M. Dang s’est toutefois félicité de toutes les initiatives et mesures existantes visant à parvenir à un règlement global, juste et durable de la question de Palestine.  En conclusion, il a vigoureusement appuyé la solution des deux États, y compris la création de l’État de Palestine, avec Jérusalem-Est comme capitale, coexistant en paix et en sécurité avec Israël, dans des frontières sûres et internationalement reconnues sur la base des frontières d’avant 1967. 

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a rappelé que la cause profonde du conflit israélo-palestinien était l’occupation illégale des territoires palestiniens par Israël.  « En tant que telle, l’idée de promettre la paix sans s’attaquer à la cause fondamentale n’est qu’une illusion de paix », a-t-il ajouté.  Tous les efforts visant à résoudre le conflit et à instaurer la paix doivent d’abord et avant tout être entrepris avec la participation des deux principales parties, les Palestiniens et les Israéliens, a insisté le représentant.  Selon lui, « chercher une solution qui ne tient pas compte des autres parties est injuste ». 

Nous devons montrer notre soutien à l’appel du Secrétaire général exhortant les dirigeants tant israéliens que palestiniens à reprendre des négociations constructives, a poursuivi M. Djani.  Il a salué l’appel lancé à l’Assemblée générale par le Président Mahmoud Abbas pour que le Secrétaire général entame, avec le Quatuor et le Conseil de sécurité, une conférence internationale avec toutes les parties. 

En plus de faire face à la menace des expulsions forcées, la démolition de maisons, la discrimination et la violence, les Palestiniens sont maintenant également confrontés à la pandémie de COVID-19 et à ses retombées socioéconomiques, s’est inquiété M. Djani.  Le représentant a exhorté le Gouvernement israélien à mettre fin au blocus de Gaza et à permettre un accès sans entrave à l’aide humanitaire et aux biens. 

M. TAREK LADEB (Tunisie) a rappelé que les dirigeants du monde avaient, lors du débat général, réitéré leur volonté d’un règlement juste et durable de la question palestinienne, de l’édification d’un État palestinien et de la cessation de l’occupation israélienne.  Le représentant a noté l’appui international constant, y compris celui de son pays, à la cause palestinienne et à la défense des droits inaliénables et imprescriptibles du peuple palestinien.  Il a exhorté Israël à cesser ses activités de colonisation et à abandonner ses visées annexionnistes. 

M. Ladeb a précisé que la Tunisie était prête à appuyer toute initiative de paix.  Mais, a-t-il ajouté, la participation de la partie palestinienne à toute initiative est un préalable indispensable en vue d’une solution durable.  Il a exhorté le Conseil à appuyer le processus de paix et invité le Quatuor à assumer son rôle, avant de défendre la solution des deux États.  Enfin, le représentant a appuyé la demande faite par M. Mahmoud Abbas pour la tenue d’une conférence internationale de relance du processus de paix selon un calendrier défini et a souhaité un appui financier renforcé à l’UNRWA.

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) s’est déclaré profondément préoccupé par la résurgence de cas positifs de COVID-19 dans le territoire palestinien occupé et en Israël, notant une augmentation de cas ce mois-ci de 30% dans le territoire palestinien occupé et de 83% dans la bande de Gaza.  « Un cessez-le-feu permanent est essentiel pour permettre aux deux pays de répondre à cette pandémie », a-t-il souhaité.  Il s’est ensuite félicité de l’annonce faite par le Président Abbas, lors de son discours à l’Assemblée générale, concernant les préparatifs en cours pour la tenue d’élections législatives, suivies d’une élection présidentielle, avec la participation de tous les partis politiques.  Le représentant a également salué les accords de normalisation entre Israël et les Émirats arabes unis et, plus récemment, avec Bahreïn « qui devient l’un des quatre pays arabes à ouvrir un dialogue et des liens directs avec Israël ». 

Tous ces efforts et toutes stratégies doivent aboutir à combler les aspirations légitimes des Palestiniens et des Israéliens à vivre dans la paix, la prospérité et la justice après tant d’années de division, d’hostilité et de souffrance, a plaidé M. Singer Weisinger.  Il a appelé la Palestine à conserver sa place incontestée dans le monde arabe et à favoriser un engagement constructif en vue de créer de nouvelles opportunités.  « Pour de nombreux Palestiniens, cela peut sembler être l’heure la plus sombre.  Mais nous tenons à vous rappeler que c’est précisément après l’heure la plus sombre que pointe une nouvelle aube. »

La délégation dominicaine a ensuite exprimé son opposition à toute tentative d’annexion du territoire palestinien occupé, laquelle aurait de graves implications et violerait le droit international, y compris la résolution 2334 (2016) de ce Conseil.  « Les colonies contribuent non seulement à l’escalade des tensions sur le terrain, mais aussi à s’éloigner de la possibilité d’une solution pacifique à deux États, sur la base de l’inclusion sociale et de l’aspiration à une paix durable entre Israéliens et Palestiniens. »  Le représentant a réaffirmé le plein appui de son pays à une solution à deux États, telle qu’énoncée dans les différentes résolutions de l’ONU, indiquant continuer à adhérer au cadre des accords bilatéraux entre Israéliens et Palestiniens.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a rappelé que son pays s’était vivement félicité des « étapes historiques » intervenues ces deux derniers mois, avec la normalisation des relations entre « trois grands amis » du Royaume-Uni, Israël, les Émirats arabes unis et Bahreïn.  Ces mesures positives ont déjà un impact, notamment des vols directs entre Israël et les Émirats arabes unis et les premiers accords commerciaux, a-t-il indiqué, assurant que « d’autres viendront ».  Il a appelé les autres pays de la région à suivre l’exemple des Émirats arabes unis et de Bahreïn. 

Pour le représentant, il est essentiel que la communauté internationale appuie cet élan de normalisation pour progresser dans la résolution du conflit israélo-palestinien.  M. Allen a dit voir dans la suspension des plans d’annexion de la Cisjordanie une « opportunité » et a exhorté l’Autorité palestinienne à reprendre sa coopération avec Israël, dans l’intérêt du peuple palestinien.  Il a également invité les deux parties à prendre des mesures constructives et ouvertes en vue d’un retour au dialogue. 

Si la menace d’annexion semble avoir reculé, M. Allen s’est déclaré préoccupé par certaines « tendances négatives » sur le terrain.  Il a réitéré son appel aux deux parties à mettre fin à toute activité rendant la paix plus difficile à réaliser, notamment aux démolitions de biens palestiniens, qui sont contraires au droit international.  Il a appelé Israël à renoncer à de telles actions et à fournir une voie claire de construction aux Palestiniens de la zone C.  De même, a-t-il fait valoir, si Israël a le droit légitime de se défendre contre les attaques, il est essentiel que ces actions soient proportionnées pour éviter des pertes civiles.  Enfin, tout en appelant le Hamas à cesser ses tirs de roquettes sur l’État hébreu, le représentant s’est félicité des efforts de réconciliation du Fatah et du Hamas, en espérant que cela permettra la tenue d’élections démocratiques dans les territoires palestiniens occupés.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a pris note des accords signés entre Israël et Bahreïn et Israël et les Émirats arabes unis.  Il a défendu la solution des deux États et indiqué que toutes les questions relatives au statut final devraient être tranchées au moyen de pourparlers directs.  Ces pourparlers doivent commencer dès que possible. 

Le représentant a noté la proposition faite la semaine dernière lors du débat général de l’Assemblée générale par M. Mahmoud Abbas en vue d’une relance des négociations.  Aucune percée ne sera possible en faisant cavalier seul, a insisté M. Nebenzia, qui a demandé des efforts collectifs en vue de mettre en œuvre la solution des deux États, la seule qui soit possible.  Le représentant a aussi souhaité une relance des discussions au sein du Quatuor et a appuyé les efforts égyptiens en vue d’une réconciliation des factions palestiniennes.  Enfin, il a demandé l’abandon de la colonisation et des projets d’annexion d’Israël, ainsi qu’un soutien accru à l’UNRWA.

M. GUENTER SAUTTER (Allemagne) s’est félicité de la signature récente des accords de normalisation entre Israël et les Émirats arabes unis et entre Israël et Bahreïn, en reconnaissant le rôle joué par les États-Unis à cet égard.  « L’élan généré par la signature de ces accords devrait maintenant être axé sur la recherche définitive d’une solution juste, durable et globale au conflit israélo-palestinien sur la base du droit international, des résolutions pertinentes de l’ONU et des paramètres convenus au niveau international », a exhorté le représentant.  « La normalisation ne doit pas aboutir à la consolidation du statu quo, mais doit plutôt aller de pair avec la reprise des pourparlers de paix », a poursuivi M. Sautter.  L’Allemagne reste attachée à une solution négociée à deux États, dans laquelle deux États souverains, démocratiques et indépendants, Israël et la Palestine, coexisteraient en paix à l’intérieur de frontières sûres et reconnues sur la base des frontières du 4 juin 1967. 

M. Sautter a ensuite déclaré que l’Allemagne, avec ses partenaires européens et arabes, l’Égypte, la France et la Jordanie, poursuivra les efforts de bons offices pour faciliter le retour à un dialogue crédible et à un règlement pacifique négocié.  « Lors de notre réunion de la semaine dernière à Amman, nous avons souligné que des négociations aussi sérieuses, significatives et efficaces doivent être fondées sur le droit international et des paramètres convenus et être menées soit directement entre les parties, soit sous l’égide des Nations Unies, y compris le Quatuor pour le Moyen-Orient », a déclaré le représentant.  M. Sautter a également accueilli favorablement l’appel lancé par le Président Mahmoud Abbas au Secrétaire général pour qu’il convoque une conférence internationale au début de l’année prochaine avec toutes les parties concernées. 

En conclusion, M. Sautter réaffirmé que les activités de colonisation israélienne dans les territoires palestiniens occupés étaient illégales au regard du droit international et sapaient les perspectives d’un État palestinien viable et contigu dans le cadre d’une solution négociée à deux États.  « Nous sommes convaincus que les plans d’annexion israéliens sont réellement et définitivement suspendus.  Nous demandons à Israël de mettre fin à l’expansion des colonies, en particulier dans les zones critiques autour de Jérusalem-Est, et à la légalisation des avant-postes de colonies afin d’empêcher une annexion de fait », a conclu le représentant. 

M. ABDOU ABARRY (Niger) a dit avoir « suivi avec intérêt » la signature à Washington des accords de normalisation des relations entre Israël et les Émirats arabes unis et Bahreïn.  Le Niger, a-t-il précisé, soutient toute initiative qui permettra à cette région de retrouver la paix et la stabilité.  Néanmoins, le représentant a appelé à « regarder la réalité avec lucidité »: les accords conclus ne doivent pas occulter « l’impérieuse nécessité d’une résolution juste et durable de la question palestinienne », laquelle, a-t-il rappelé, est la principale source de tension au Moyen-Orient depuis des décennies.

M. Abarry a par ailleurs salué le récent rapprochement entre les factions palestiniennes, y voyant l’occasion pour les Palestiniens de parler d’une seule voix dans le processus de paix.  Il a appelé à redoubler d’efforts pour amener les parties israéliennes et palestiniennes à renouer avec le dialogue en profitant de l’occasion offerte par le réchauffement des relations entre les pays arabes et Israël, afin de revitaliser les pourparlers de paix, « conformément aux paramètres internationalement reconnus » et aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, y compris la résolution 2334.  M. Abarry a rappelé ces « principes cardinaux »: cessation de l’occupation illégale et de l’annexion des terres palestiniennes; et solution à deux États, Israël et la Palestine, vivant côte-à-côte, dans la paix et la sécurité, sur la base des frontières de 1967.

Le Niger reste en outre préoccupé par la propagation de la COVID-19 dans la région et appelle la communauté internationale à faire preuve de plus de générosité pour assurer la continuité des programmes de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).  M. Abarry a rappelé qu’Israël doit assumer les devoirs que son statut de Puissance occupante lui impose en vertu du droit international. 

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