Devant le Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial pour les Grands Lacs note un manque de confiance entre les pays de la région défavorable à la mise en œuvre de l’Accord-cadre

8227e séance – matin
CS/13286

Devant le Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial pour les Grands Lacs note un manque de confiance entre les pays de la région défavorable à la mise en œuvre de l’Accord-cadre

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs, M. Said Djinnit, a regretté, ce matin, devant le Conseil de sécurité, le manque de confiance entre les pays de la région qui continue de saper les progrès en vue de la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo (RDC) et la région, cinq ans après sa signature le 24 février 2013.

Au cours d’une séance consacrée à l’examen de la situation dans la région des Grands Lacs, principalement en RDC et au Burundi, et au dernier rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre*, l’Envoyé spécial a insisté sur le fait que la paix dans l’une des régions les « plus volatiles et les plus complexes du continent » passe par des mesures visant à dissiper la méfiance entre le Burundi, l’Ouganda, la RDC et le Rwanda. 

En RDC, l’Envoyé a déploré une situation sécuritaire préoccupante où les « forces négatives » sévissent dans l’est du pays, attaquant et terrifiant la population, provoquant souffrances et déplacements et renforçant le manque de confiance entre les pays de la région.  Il est tout de même revenu sur quelques progrès tels que la défaite du M23 et l’affaiblissement des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), ou encore la création de mécanismes de renforcement de la confiance et le renforcement de la coopération économique et de l’intégration. 

M. Said Djinnit a souligné que l’exploitation illégale des ressources naturelles en RDC contribuait à financer les « forces négatives » et à priver le pays des fonds qui pourraient servir à la croissance et au développement.  Au cours d’une réunion à Addis-Abeba en février dernier, il a été noté que, même si les progrès dans la mise en œuvre de l’Accord-cadre sont lents, cet accord demeure « un outil crucial pour la promotion de la coopération, de la paix et de la stabilité dans la région », en complément du Pacte de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL).  Il faut donc tenir compte des avantages comparatifs de chaque instrument afin d’éviter des chevauchements de mandats et d’assurer complémentarité et synergie entre ces deux mécanismes. 

Au nom de son chef d’État, qui est à la fois Président du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba et Président de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL), le représentant du Congo a rappelé que Brazzaville a accueilli, le 19 octobre 2017, le Sommet de la CIRGL et la réunion du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre.  Le Mécanisme a retenu trois recommandations majeures: neutralisation des forces négatives; rapatriement des combattants désarmés; et dialogues et processus politiques dans la région, lesquels sont des recommandations clefs de l’Accord-cadre. 

Alors que le renforcement de l’efficacité de la brigade d’intervention de la MONUSCO est en cours d’examen, l’Envoyé spécial a souligné l’importance de s’attaquer au financement des groupes armés, en luttant contre l’exploitation illicite et le trafic des ressources naturelles.  Il a aussi invité toutes les parties à s’engager dans le rapatriement des combattants étrangers désarmés et de leur famille, et a souligné que le Mécanisme entend lancer cet exercice à Goma à la fin du mois.

En ce qui concerne le soutien au dialogue politique et au processus électoral, l’Envoyé spécial a indiqué qu’en RDC, en dépit des progrès dans la préparation des élections, des tensions persistent entre le Gouvernement et l’opposition sur les conditions de l’organisation des élections de décembre 2018 que la plupart des membres du Conseil de sécurité ont souhaitées crédibles et pacifiques.

Insistant sur le respect de la souveraineté nationale, la Fédération de Russie a plaidé pour l’implication des pays de la région, des organisations sous-régionales et de la communauté internationale.  Son homologue de la Suède a souligné combien il est important que la voix des femmes de la région soit entendue dans les processus politiques.

Si l’Éthiopie a exhorté les responsables congolais à faire preuve de retenue dans ce processus électoral, le représentant de la France a demandé le respect du calendrier électoral et la mise en place d’un climat apaisé « dans lequel tous les candidats peuvent se déclarer et faire campagne librement sans craintes de représailles ».  Les élections ne sauraient être une fin en soi, a tempéré le délégué du Congo pour qui la pérennisation de la paix et de la stabilité dans la sous-région, à laquelle les peuples aspirent, nécessite aussi d’autres ressorts. 

Face à l’inquiétude de plusieurs pays, dont la Suède, la Pologne et les États-Unis s’agissant de la situation politique tendue au Burundi avant le référendum constitutionnel, le délégué du Congo a plutôt noté que la libération de 740 prisonniers, dont une majorité était condamnée pour participation au mouvement insurrectionnel de 2015, est un motif d’apaisement.  Il a assuré que le Président Sassou Nguesso poursuit également ses efforts pour décrisper le climat et améliorer les relations entre le Rwanda et le Burundi.

Préoccupés par le nombre croissant de réfugiés et de déplacés dans la région, la plupart des orateurs ont appelé à une assistance humanitaire appropriée, regardant vers la Conférence des donateurs prévue le 13 avril à Genève. 

* S/2018/209

LA SITUATION DANS LA RÉGION DES GRANDS LACS

Rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région (S/2018/209)

Déclarations

M. SAID DJINNIT, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la région des Grands Lacs, a déclaré que les « forces négatives » dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), y compris les Forces démocratiques alliées (ADF), continuaient d’attaquer et de terrifier la population, provoquant souffrances et déplacements et renforçant le manque de confiance entre les pays de la région.  Les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) restent, pour leur part, actives et exercent un contrôle sur leurs anciens membres désarmés et les membres de leur famille vivant dans des camps de transit, dont la présence renforce du reste les tensions avec la population locale.  La question des anciens membres du M23 qui sont au Rwanda et en Ouganda reste encore à être traitée, a-t-il ajouté. 

M. Djinnit a rappelé qu’à la réunion du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région, le 19 octobre dernier à Brazzaville, les pays signataires et les garants avaient, entre autres, décidé de renforcer la brigade d’intervention de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et de rapatrier, sans conditions et au plus tard le 20 octobre 2018, les membres des FDLR désarmés et les membres de leur famille qui vivent dans des camps en RDC, ainsi que des anciens combattants du M23 qui demeurent au Rwanda et en Ouganda.  Le Mécanisme entend lancer le rapatriement des combattants désarmés et des membres de leur famille à Goma à la fin de ce mois.

En ce qui concerne le soutien au dialogue pacifique et au processus électoral, l’Envoyé spécial a dit mettre l’accent sur la situation en RDC et au Burundi, deux des principaux États parties à l’Accord-cadre. 

En RDC, en dépit des progrès dans la préparation des élections, des tensions persistent entre le Gouvernement et l’opposition sur les conditions de l’organisation des élections.  M. Djinnit a insisté sur la mobilisation du soutien régional et international pour la mise en œuvre de l’Accord du 31 décembre 2016 et la tenue d’élections crédibles et pacifiques.  À cet égard, l’Envoyé spécial a dit avoir engagé des contacts avec les garants de l’Accord-cadre et les dirigeants régionaux, particulièrement le Président de la République du Congo, M. Denis Sassou Nguesso, et celui de l’Angola, M. João Lourenco, ainsi qu’avec l’Union africaine et d’autres partenaires.

En ce qui concerne le Burundi, la situation politique et des droits de l’homme y reste préoccupante, notamment du fait que le pays va vers un référendum constitutionnel.  En consultation avec l’Envoyé du Secrétaire général, M. Michel Kafando, M. Djinnit dit avoir encouragé les dirigeants régionaux à rester informés sur la crise et à soutenir les efforts de facilitation de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), afin d’assurer le progrès du dialogue interburundais et maintenir l’héritage de l’Accord d’Arusha.

Le troisième point majeur tient aux causes profondes des conflits dans la région.  L’Envoyé spécial a relevé que la poursuite de l’exploitation illégale du commerce des ressources naturelle en RDC contribuait à financer les « forces négatives » et à priver le pays des fonds pouvant servir à la croissance et au développement.  Il a invité les pays de la région à lutter contre ce commerce illégal.  De même, les violations des droits de l’homme et l’impunité restent au cœur de l’instabilité dans la région.  Des cas récents d’extradition de dirigeants de groupes armés sont encourageants, mais des efforts plus concertés sont nécessaires pour renforcer la coopération judiciaire.  C’est pourquoi les services de M. Djinnit et la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) œuvrent à l’opérationnalisation du Réseau de coopération judiciaire de la région des Grands Lacs, établi en 2016.  C’est également avec l’appui de la CIRGL et de l’équipe régionale des Nations Unies que des consultations des parties prenantes sur la question des déplacements forcés sont en préparation, afin de sensibiliser sur l’ampleur du problème et d’y trouver des solutions durables et aux conflits dans la région. 

L’ONU soutient également les femmes, les jeunes et la société civile afin que ces groupes puissent jouer un rôle clef dans la promotion des objectifs de l’Accord-cadre.  La promotion du rôle des femmes dans la paix et le processus politique est l’objet d’une mission en préparation au Burundi, en RDC, en République centrafricaine (RCA) et au Soudan du Sud avec la collaboration de la CIRGL et de l’Union africaine. 

L’Envoyé spécial a souligné que son bureau avait continué à mobiliser les dirigeants de la région à travers les mécanismes de gestion de l’Accord-cadre, notamment pour promouvoir le dialogue et la coopération entre les pays signataires de ce texte.  Il a souligné qu’au cours d’une réunion à Addis-Abeba en février dernier, et portant sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre, il a été noté que, même si les progrès dans sa mise en œuvre sont lents, l’Accord-cadre demeure un outil crucial pour la promotion de la coopération, de la paix et de la stabilité dans la région, en complément du Pacte de la CIRGL.  M. Djinnit a cité quelques progrès, tels que la défaite du M23 et l’affaiblissement des FDLR, tout comme l’établissement des mécanismes de renforcement de la confiance, ainsi que le renforcement de la coopération économique et de l’intégration.  Néanmoins, a-t-il regretté, le manque de confiance entre les pays de la région continue de saper les progrès. 

Pour parvenir à la paix dans la région, l’Envoyé spécial a donc prôner de prendre des mesures pour dissiper la méfiance entre les pays des Grands Lacs, à savoir la RDC, l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi.  Il a indiqué qu’au cours de sa rencontre, le 29 mars dernier, avec le Président Sassou Nguesso, qui est Président de la CIRGL et Président du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre, avaient été évoquées les possibilités de renforcement des relations entre ces pays par le recours aux bons offices des dirigeants de la région.  En outre, alors que le renforcement de l’efficacité de la brigade d’intervention de la MONUSCO est en cours d’examen, l’Envoyé spécial a souligné l’importance de s’attaquer au financement des groupes armés en luttant contre l’exploitation illicite et le trafic des ressources naturelles.  Il a aussi invité toutes les parties à s’engager dans le rapatriement des combattants étrangers désarmés.

Il ne faut pas non plus perdre de vue la situation au Burundi, a poursuivi l’Envoyé spécial, notant qu’un plus grand engagement des dirigeants de la région et de l’Union africaine, avec le soutien des Nations Unies, était nécessaire afin de revigorer le dialogue entre tous les acteurs du pays. 

M. Djinnit a également invité les pays de la région et les acteurs humanitaires à s’entendre pour proposer des solutions régionales durables à la crise humanitaire préoccupante qui sévit dans les Grands Lacs.  Il a également évoqué le problème du chevauchement des mandats et des objectifs entre l’Accord-cadre et le Pacte de la CIRGL, en tenant compte des avantages comparatifs de chaque instrument et de la nécessité d’assurer complémentarité et synergie entre ces deux mécanismes. 

En conclusion, M. Djinnit a rappelé que les Grands Lacs restaient l’une des régions les plus volatiles et les plus complexes du continent, alors même qu’ils pourraient sensiblement contribuer à la stabilité et au développent de l’Afrique.  Il a donc invité le Conseil de sécurité à continuer d’exhorter toutes les parties prenantes à œuvrer en faveur de l’objectif commun d’une paix et d’une stabilité durables.

M. RAYMOND SERGE BALÉ (République du Congo), s’est exprimé au nom du Président Sassou Nguesso, Président du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba et Président de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL).  Cinq ans après la signature, le 24 février 2013, de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo (RDC) et la région, il est temps d’évaluer le degré d’engagement de chacun des signataires, a-t-il estimé.  Il a rappelé que, le 19 octobre 2017 à Brazzaville, ont eu lieu conjointement le septième Sommet de la CIRGL et la huitième Réunion du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre.  Cette rencontre a adopté les recommandations du Mécanisme d’autofinancement de l’initiative régionale sur la lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, afin d’éradiquer le fléau et de parvenir, à terme, à la gestion durable des ressources naturelles.  Le Mécanisme a retenu trois recommandations majeures: neutralisation des forces négatives; rapatriement des combattants désarmés; et dialogues et processus politiques dans la région. 

M. Balé a évoqué la réunion tripartite sur la situation politique et sécuritaire de la région, entre les Présidents des deux Congo et de l’Angola, à Brazzaville, le 9 décembre dernier, et à Kinshasa, le 14 février de cette année.  Il a annoncé qu’une troisième réunion du genre aura lieu à Luanda.  En outre, le Président Sassou Nguesso a reçu, le 9 janvier dernier, le Président de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya, à la suite de la répression des marches des catholiques qui ont eu lieu le 31 décembre 2017 à Kinshasa.

Le représentant a salué les avancées du processus électoral en RDC, mais a parlé de nombreux défis qui pourraient compromettre la réussite du processus, notamment le respect de la feuille de route par l’ensemble de la classe politique; le financement des élections et la logistique indispensable à sa réalisation; des difficultés pour atténuer les revendications de l’opposition désormais reprises par l’Église catholique; et la sécurisation du pays par rapport à l’activisme des groupes armés.  Il a noté que l’appui et l’accompagnement de la communauté internationale s’avéraient déterminants, soulignant aussi le respect de la souveraineté et de l’indépendance de la RDC. 

En ce qui concerne le Kenya, M. Balé a salué l’engagement pris, le 9 mars dernier, par le Président, M. Uhuru Kenyatta, et le chef de l’opposition, M. Raila Odinga, qui ont décidé de réconcilier le pays.  Le Président de la CIRGL et du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre et ses pairs ont par ailleurs déploré la persistance de la violence en République centrafricaine (RCA) et réitéré leur appel à la communauté internationale afin qu’elle apporte son soutien plus ferme au processus de stabilisation et de réconciliation nationale.  Le processus de dialogue conduit par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) au Soudan du Sud est du reste suivi avec attention.

Pour le cas du Burundi, le suivi du processus a permis de noter qu’un référendum constitutionnel est prévu en mai 2018, même si le processus de dialogue conduit par la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE), bien que grippé, devra être relancé sous l’impulsion du Médiateur, le Président Museveni, et le Facilitateur, l’ancien Président Mkapa.  M. Balé a estimé que la libération de 740 détenus prisonniers, dont une majorité condamnée pour participation au mouvement insurrectionnel de 2015, est un motif d’apaisement dans la crise sociopolitique dans le pays.  Le Président Sassou Nguesso poursuit également ses efforts pour décrisper le climat et améliorer les relations entre le Rwanda et le Burundi. 

Revenant à la situation en RDC, M. Balé a invité la communauté internationale à se projeter au-delà des échéances électorales qui ne sauraient être une fin en soi.  Pour lui, la pérennisation de la paix et de la stabilité dans la sous-région, à laquelle les peuples aspirent, nécessite aussi d’autres ressorts que les consultations électorales.  Il a rappelé que la RDC était le « centre névralgique de la région des Grands Lacs », faisant observer que ce n’est pas en vain qu’elle constitue la pierre angulaire de l’Accord-cadre.  Il faut donc l’aider à recouvrer une stabilité durable pour qu’elle joue le rôle auquel ses immenses potentialités la prédisposent, a-t-il conclu. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a souligné l’importance d’élections crédibles et acceptées par tous en République démocratique du Congo, qu’il a jugées cruciales pour la stabilité du pays et de la région.  À cette fin, le représentant a demandé le respect du calendrier électoral et la mise en place d’un climat apaisé « dans lequel tous les candidats peuvent se déclarer et faire campagne librement sans craintes de représailles ».  « Le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales est crucial », a-t-il ajouté.

M. Delattre a également plaidé pour une meilleure intégration régionale, afin de garantir la bonne coopération entre les États de la région.  « C’est un objectif privilégié par l’Union africaine et par la France, qui a adapté ses politiques de soutien et ses instruments afin d’inscrire son action dans une perspective régionale », a-t-il expliqué.  L’Institut français de Goma, -« la Halle des volcans »- inauguré il y a six mois, souhaite s’adresser à la jeunesse de toute la région, a-t-il déclaré. 

Le règlement du défi posé par les « forces négatives » dans la région requiert tout d’abord un engagement militaire, a estimé M. Delattre, pour qui c’est notamment le rôle de la brigade d’intervention de la MONUSCO fournie par la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).  Pour le représentant, le mandat renouvelé de la MONUSCO doit lui permettre de mener des « actions offensives décisives ».  Il a ensuite plaidé pour une action politique pour démobiliser, rapatrier et réintégrer ces combattants dans leur pays d’origine, avant d’appeler à une lutte accrue contre les trafics illégaux de ressources naturelles.  « Tant que ces trafics subsisteront, aucune stabilisation durable ne pourra être envisagée », a-t-il dit, avant de demander une action forte et concertée des pays de la région et un engagement continu des partenaires internationaux pour la transparence des industries extractives et une meilleure traçabilité des minerais. 

« Cinq ans après la signature de l’Accord-cadre, des progrès visibles et notables dans sa mise en œuvre seraient un signe extrêmement positif de l’engagement de tous les pays signataires pour la stabilité et le développement de la région des Grands Lacs », a conclu M. Delattre. 

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a jugé inquiétant l’état de la sécurité dans la région des Grands Lacs, tout en notant « les progrès modestes » accomplis jusqu’à présent.  Il a souligné l’importance du rôle joué par les « forces négatives » et a dit espérer que le Conseil accorderait à cette question l’attention nécessaire.  Il a appelé à la bonne tenue des élections en République démocratique du Congo et exhorté les responsables congolais à faire preuve de retenue.  Il a souligné l’importance du rôle joué par le Président Sassou Nguesso, du Congo, avant de demander la pleine application de l’Accord d’Arusha au Burundi. 

L’application de l’Accord-cadre est cruciale pour toute la région, a poursuivi le représentant, tout en notant les difficultés qui subsistent.  Enfin, M. Alemu a dit son accord avec le constat établi dans le rapport du Secrétaire général sur la situation dans la région des Grands Lacs. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a rappelé que la stabilité dans la région des Grands Lacs avait un impact sur celle de tout le continent.  Les acteurs de la région peuvent s’appuyer, a-t-il dit, sur l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région.  Soulignant qu’avec la paix, les énormes sommes d’argent englouties dans le conflit pourraient être réorientées vers le développement, il a invité les pays de la région à régler leurs différends par le dialogue. 

Insistant sur le respect de la souveraineté nationale, le représentant a plaidé pour l’implication des pays de la région, des organisations sous-régionales et de la communauté internationale pour la paix en République démocratique du Congo.  Il a tenu à faciliter le Président du Congo, M. Sassou Nguesso, pour sa présidence des deux mécanismes et les efforts consentis, avec son pair d’Angola, pour la paix en RDC.  Il a jugé cruciale la tenue des élections en décembre prochain en RDC, de même que la période postélectorale qui s’ensuivra.  Il a enfin invité la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) à travailler étroitement avec les autorités de la RDC, avant de se féliciter d’une normalisation en cours de la situation au Burundi. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a fait observer que la situation en République démocratique du Congo affectait toute la région, et que tout ce qui se passerait en RDC au cours des prochains mois serait décisif pour la stabilité de toute la région.  Le Royaume-Uni appuie la mise en œuvre de l’Accord-cadre et attend la tenue des élections en décembre prochain.

Le Royaume-Uni est préoccupé par le non-rapatriement des combattants désarmés et par la prolifération de la violence dans certaines régions de la RDC, qui a conduit 4,5 millions de Congolais à fuir leur domicile.  Le Royaume-Uni invite donc les acteurs de la région à s’unir et à coopérer. 

Mme Pierce a déclaré que seules des élections crédibles qui respectent la Constitution sont gage de la sortie de crise en RDC, insistant sur l’importance du respect du code électoral et des dispositifs de l’Accord du 31 décembre 2016, notamment la libération des prisonniers politiques. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a estimé que l’Accord-cadre était la pierre angulaire de la stabilité de la région, ajoutant que son application devait se faire dans le respect de la souveraineté des pays de la région.  Il a demandé des efforts accrus contre les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), avant de déplorer la lenteur de la mise en œuvre de l’Accord-cadre.  La République démocratique du Congo et la Mission des Nations Unies dans ce pays doivent coopérer pleinement, a poursuivi le représentant en insistant sur le rôle déstabilisateur des « forces négatives » en RDC. 

M. Polyanskiy a demandé le rétablissement de l’autorité de l’État congolais dans les zones libérées des rebelles et regretté que des personnes déplacées soient recrutées par les forces négatives.  Une autre menace est la présence en RDC d’éléments sud-soudanais fidèles à Riek Machar, a ajouté le représentant.  Ce dernier a enfin estimé que toute solution politique intérieure dans les pays connaissant des tensions électorales serait favorable à la stabilité régionale, mais a ajouté qu’imposer des solutions de l’extérieur était inacceptable. 

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a insisté sur la fragilité de la situation dans la région des Grands Lacs, avant de plaider pour des « solutions africaines à des défis africains ».  Il a apporté son soutien à l’Union africaine et à la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et salué la coopération des pays de la région pour faire face à la menace posée par les groupes armés.  La MONUSCO doit apporter son soutien au Gouvernement de la RDC face à ces groupes armés, a-t-il déclaré.  Enfin, le représentant a appuyé le processus de paix et rappelé l’aide que son pays apporte au développement des secteurs agricoles et des infrastructures des pays de la région des Grands Lacs. 

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire) a salué des progrès dans les Grands Lacs, même si les perspectives de paix et de sécurité durables dans la région continuent de se heurter à des défis sécuritaires, politiques et humanitaires.  Il a invité l’Envoyé spécial du Secrétaire général à poursuivre ses efforts en vue de la mise en œuvre effective de l’Accord-cadre.  En ce qui concerne la RDC, la Côte d’Ivoire appelle toutes les parties à la mise en œuvre de l’Accord de la Saint-Sylvestre dans un climat apaisé, en vue de la tenue effective d’élections crédibles le 23 décembre prochain.

La Côte d’Ivoire salue les efforts du Facilitateur pour le Burundi, M. Benjamin Mkapa, en vue de relancer le dialogue politique interburundais, sous l’égide de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE).  Le représentant a salué la décision prise par les chefs d’État de la CAE, lors du sommet du 23 février dernier en Ouganda, de continuer de soutenir le processus politique burundais. 

M. Tanoh-Boutchoué a par ailleurs déploré la dégradation de la situation sécuritaire et humanitaire en RDC, notamment dans l’est du pays, et a salué la volonté des Nations Unies de neutraliser les groupes armés à travers le renforcement des moyens de la brigade d’intervention de la force de la MONUSCO, en collaboration avec les autorités congolaises.  Le représentant a également salué les efforts déployés par la communauté internationale, les organisations humanitaires, les États voisins et les ONG locales, en vue d’apporter une assistance humanitaire aux populations dans le besoin, et il a encouragé les donateurs à contribuer au succès de la conférence internationale humanitaire de haut niveau pour la RDC, prévue le 13 avril 2018 à Genève.  Il a conclu en appelant au soutien des Nations Unies et de l’ensemble de la communauté internationale pour une meilleure mise en œuvre de l’Accord-cadre, le jugeant indispensable pour la paix et la stabilité dans cette partie du continent africain. 

M. DIDAR TEMENOV (Kazakhstan) a salué les efforts des pays signataires pour la mise en œuvre de l’Accord-cadre, jugeant cette dernière vitale pour la stabilité de la région.  Il s’est dit préoccupé par les cycles récurrents de violence et de conflits et la détérioration de la situation humanitaire dans la région.  Il a notamment appelé à renforcer les capacités des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) dans leur lutte contre les groupes armés, avec l’assistance de la brigade d’intervention de la MONUSCO.  Il a aussi appelé au rapatriement des combattants désarmés en RDC et dans les pays voisins, souhaitant que la réunion des garants de l’Accord-cadre, qui a eu lieu à Addis-Abeba du 24 au 26 février dernier, produise des résultats positifs. 

Le Kazakhstan est préoccupé par le manque de progrès dans le dialogue interburundais et invite toutes les parties prenantes à faire des efforts pour établir un dialogue constructif, dans l’esprit de l’Accord d’Arusha. 

M. Temenov a indiqué que la souffrance de 11 millions de déplacés de la région devait être au cœur des actions de la communauté internationale, assurant que les engagements des donateurs étaient cruciaux, notamment à l’occasion de la conférence des donateurs qui aura lieu à Genève, le 13 avril.  Le représentant a en outre souligné l’importance de la lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles dans la région, rappelant que les fruits de ces trafics alimentent les groupes armés.  Il a insisté sur le besoin de renforcer le lien entre sécurité et développement dans le cadre des mesures pour venir à bout de la crise politique, sécuritaire et socioéconomique de la région.

M. OLOF SKOOG (Suède) a appuyé les efforts régionaux robustes consentis pour mettre en œuvre l’Accord-cadre, en particulier la revitalisation du Mécanisme régional de suivi et l’engagement des présidents de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs.  L’ONU a un rôle important d’appui à ces efforts à jouer, a-t-il estimé. 

Jugeant que la situation en RDC était la plus pressante, le représentant a appelé tous les acteurs à appuyer la tenue d’élections crédibles, transparentes, inclusives et pacifiques dans ce pays le 23 décembre prochain. 

Le représentant a souligné combien il est important que la voix des femmes de la région soit entendue et a demandé qu’elles jouent un rôle accru dans les processus politiques dans la région, en particulier dans un contexte d’élections.  Beaucoup doit encore être fait pour mettre en œuvre les Déclarations de Nairobi et prendre les mesures nécessaires pour promouvoir le processus de désarmement, démobilisation, réintégration, et réinstallation ou rapatriement, a conclu M. Skoog. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a souligné les difficultés graves que connaît la région des Grands Lacs, en particulier la détérioration de la situation humanitaire.  Pour les surmonter, le représentant a appelé à une coopération régionale forte, en soulignant le rôle de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).  Il a souligné l’importance de la neutralisation des groupes armés et de la promotion des droits de l’homme pour que l’impunité ne prévale pas. 

Nous devons remédier aux causes profondes des souffrances des populations, a poursuivi M. Alotaibi, qui a rappelé les espoirs soulevés par la signature, il y a cinq ans, de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région, avant de déploré que les souffrances soient toujours aussi aiguës.  Enfin, le représentant a plaidé pour une unification des efforts des gouvernements de la région pour faire face à la menace grave posée par les groupes armés au plan régional. 

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a mentionné les progrès significatifs accomplis depuis la signature de l’Accord-cadre, tels que la réduction de la présence de groupes armés étrangers, même si des « défis sérieux » subsistent.  Des membres de groupes armés, y compris les ex-combattants du M23 et les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), n’ont pas encore été rapatriés, a-t-il fait observer, en jugeant que l’Accord-cadre était l’instrument idoine pour régler ces défis.  Le représentant a ensuite exhorté les Gouvernements de la RDC et du Burundi à respecter les droits humains et à ménager un espace politique suffisant pour les partis pacifiques, les médias et la société civile.  Ils détiennent la clef des portes ouvrant sur la stabilité, a-t-il déclaré. 

Pour M. van Oosterom, seuls des efforts régionaux permettront de régler les défis actuels.  Le représentant a souligné le rôle crucial joué par l’Union africaine, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs.  Enfin, il a cité un proverbe africain: « Lorsqu’un homme est piqué par une abeille, il ne détruit pas toutes les ruches. »  Il en va de même pour l’Accord-cadre: des défis demeurent mais avec les efforts nécessaires, sa mise en œuvre peut être renforcée, a conclu le représentant. 

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a rappelé que la signature de l’Accord-cadre, il y a cinq ans, avait suscité des espoirs, avant d’inviter les signataires à œuvrer à sa mise en œuvre afin de parvenir à la stabilité dans la région.  Il a rappelé que cette région, l’une des plus riches en ressources naturelles, était victime des actions des multinationales qui utilisent des mécanismes néocoloniaux pour exploiter les ressources de la région.  La Bolivie est également préoccupée par la situation humanitaire dans la région, avec des millions de déplacés et de réfugiés.  Enfin, le représentant a salué les processus électoraux en cours dans la région et insisté sur le fait que l’Accord-cadre était un exemple qui devrait être reproduit.

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) a déclaré qu’il fallait rétablir l’état de droit et restaurer le processus électoral, notamment au vu des tensions politiques en RDC, au Burundi, en République centrafricaine et au Soudan du Sud.  Il a également demandé de renforcer la lutte contre les activités commerciales illégales, afin d’inciter les combattants à se lancer dans le processus de désarmement, démobilisation et réintégration. 

Le représentant s’est dit préoccupé par le nombre de déplacés et de réfugiés et la grave crise humanitaire sévère qui s’ensuit dans la région.  Il a souhaité que des efforts supplémentaires soient consentis pour la mise en œuvre de l’Accord-cadre, invitant enfin la communauté internationale à continuer d’accorder une attention particulière à la situation dans la région des Grands Lacs.

Mme ELAINE MARIE FRENCH (États-Unis) a rappelé le lien entre la stabilité en RDC et la stabilité dans l’ensemble de la région, avant de dénoncer les activités des groupes armés.  La représentante a déploré la lenteur du processus électoral en RDC et exhorté l’Envoyé spécial à se concentrer sur l’avancement de celui-ci.  La RDC doit organiser des élections crédibles pour une transition pacifique du pouvoir, a-t-elle rappelé, avant de mettre en exergue le rôle de la Communauté de développement de l’Afrique australe et de l’Union africaine à cette fin. 

Mme French s’est dite préoccupée par le prochain référendum sur une réforme constitutionnelle au Burundi, estimant qu’il pourrait exacerber les tensions.  L’irrespect de l’Accord d’Arusha nourrit les tensions au Burundi et dans la région, a-t-elle affirmé.  Enfin, elle a demandé à l’Envoyé spécial d’œuvrer au renforcement du Mécanisme régional de suivi. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a indiqué que seule une approche régionale cohérente permettrait de régler les défis de la région et d’instaurer une paix durable.  Le représentant a insisté sur la nécessité de respecter le calendrier électoral en RDC et de promouvoir le dialogue interburundais.  Il s’est dit préoccupé par la situation humanitaire dans la région des Grands Lacs, qui compte 11 millions de personnes déplacées, plaidant pour que soit apportée une protection adéquate aux femmes et aux enfants.  Enfin, il a demandé une action coordonnée et robuste face aux groupes armés de la région. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Haïti: le Conseil de sécurité proroge le mandat de la MINUJUSTH jusqu’au 15 février 2019 et envisage son retrait « à compter du 15 octobre 2019 »

8226e séance – matin
CS/13285

Haïti: le Conseil de sécurité proroge le mandat de la MINUJUSTH jusqu’au 15 février 2019 et envisage son retrait « à compter du 15 octobre 2019 »

La Chine et la Fédération de Russie s’abstiennent du fait d’une référence élargie au Chapitre VII de la Charte, également contestée par Haïti

Le Conseil de sécurité a décidé, ce matin, de proroger d’un an, jusqu’au 15 février 2019, le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), tout en en préparant activement un retrait envisagé « à compter du 15 octobre 2019 ».  La Fédération de Russie et la Chine se sont abstenues lors du vote, estimant que la référence au Chapitre VII de la Charte avait été étendue de manière inappropriée, et le représentant d’Haïti a également émis des « réserves » sur cette référence. 

Adoptée par 13 voix pour, zéro contre et 2 abstentions, une semaine après le premier débat du Conseil consacré à la MINUJUSTH depuis son entrée en fonctions le 15 octobre dernier, la résolution 2410 (2018) rappelle que la Mission a pour mandat « d’aider le Gouvernement à renforcer les institutions de l’état de droit en Haïti, à appuyer et à développer encore la Police nationale d’Haïti (PNH) et à suivre la situation en matière de droits de l’homme, à en rendre compte et à l’analyser ». 

Le Conseil réaffirme que, dans le contexte de l’amélioration de l’état de droit en Haïti, il est essentiel de renforcer le secteur de la justice et les moyens de la Police nationale d’Haïti.  À cette fin, il encourage le Gouvernement, en collaboration avec la MINUJUSTH, à œuvrer à l’application des 11 critères pour la stratégie de sortie de la MINUJUSTH, établis par le Secrétaire général dans son rapport daté du 20 mars.  La résolution cite ainsi « l’adoption des projets de code pénal et de code de procédure pénale, le renforcement des systèmes judiciaire et pénitentiaire haïtiens, l’augmentation des mécanismes internes de contrôle et de responsabilisation dans les secteurs de la police, l’administration pénitentiaire et de la justice, la mise en place d’un conseil électoral permanent, l’adoption de la loi sur l’entraide judiciaire, le règlement de la question du placement en détention provisoire prolongée, et l’approbation de mesures de lutte contre la violence communautaire ». 

En outre, le Conseil engage le Gouvernement à « prendre de toute urgence » les mesures appropriées pour faire en sorte que la Police nationale d’Haïti et l’appareil judiciaire respectent et défendent les droits de l’homme comme élément essentiel de la stabilité d’Haïti.  Il demande à la MINUJUSTH d’assurer un suivi et de fournir un appui en la matière.

Le Conseil, qui envisage « d’adapter le mandat de la MINUJUSTH et ses effectifs de police, s’il y a lieu, pour préserver les progrès accomplis par Haïti dans l’instauration d’une sécurité et d’une stabilité durables » autorise par ailleurs la Mission à « user de tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de son mandat » d’appui et de renforcement de la PNH et à « protéger les civils menacés de violences physiques imminentes, dans la limite de ses moyens et de ses zones de déploiement ».

En même temps, dans l’optique d’un retrait de la Mission, envisagé « à compter du 15 octobre 2019 », le Conseil décide d’une réduction du nombre des unités de police constituées, qui sera ramené « entre le 15 octobre 2018 et le 15 avril 2019 » à cinq, contre sept actuellement.  Le nombre des autres policiers sera maintenu à 295. 

La résolution prépare en effet activement la stratégie de sortie de la Mission et prie le Secrétaire général de lui fournir à cette fin toute une série de rapports. 

Ainsi, le Secrétaire général devra, à partir du 1er juin prochain, présenter tous les 90 jours au Conseil de sécurité un rapport sur l’application de la présente résolution, ainsi que les « progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie de retrait ». 

À cette fin, le Secrétaire général devra, dès son rapport de juin, présenter « des dates et des indicateurs plus précis en vue de la réalisation des objectifs fixés » établis en partenariat avec le Gouvernement et l’équipe de pays des Nations Unies.  En outre, dans son rapport du 1er septembre 2018, il devra présenter « un état actualisé de l’avancement du calendrier de transfert des tâches et responsabilités au Gouvernement », en vue d’un retrait progressif de la Mission et d’une « intensification approximative des activités et programmes pertinents de l’équipe de pays des Nations Unies d’ici au 15 octobre 2019 ».

Par ailleurs, le Secrétaire général devra « dépêcher une mission d’évaluation stratégique en Haïti d’ici au 15 février 2019 » et formuler au Conseil, dans le rapport trimestriel d’évaluation du 1er mars 2019, des recommandations sur le rôle futur de l’ONU en Haïti, notamment toutes recommandations en faveur d’un retrait progressif ou d’une sortie.  Le Conseil « affirme son intention d’envisager, en fonction des conclusions de son examen des conditions de sécurité sur le terrain et de la capacité globale d’Haïti d’assurer la stabilité, le retrait de la MINUJUSTH et le passage à une présence des Nations Unies autre qu’une opération de maintien de la paix à compter du 15 octobre 2019 ».

Immédiatement après le vote, le représentant de la Fédération de Russie a expliqué son abstention par le fait que, malgré une évolution favorable de la situation en Haïti, certains éléments clefs du texte avaient été renforcés, notamment la possibilité de recourir au Chapitre VII, qui porte sur « l’action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d’actes d’agression ».  Auparavant, ce recours se limitait aux activités devant garantir la sécurité physique des habitants et des Casques bleus eux-mêmes, a–t-il poursuivi, faisant état de sa « surprise » face à un renforcement « inexpliqué » de la pression ainsi exercé par la Mission. 

La situation en Haïti constitue-t-elle une menace pour la paix ou est-ce une tentative supplémentaire de certains pays d’utiliser le Conseil pour faire pression sur un État souverain? a demandé le représentant russe, qui a répété que la situation qui prévaut en Haïti ne relève pas du Chapitre VII et déploré que la position de Port-au-Prince ait été ignorée.  « Le Chapitre VII, s’il s’applique en Haïti, doit être envisagé uniquement pour des questions de sécurité physique », a-t-il tranché.

La position de la Fédération de Russie a été partagée en partie par les délégations de la Bolivie et de la Guinée équatoriale, qui ont néanmoins voté en faveur du projet de résolution.  La Guinée équatoriale estime notamment que la résolution aurait dû être adoptée en application du Chapitre VI de la Charte –le règlement pacifique des différends- et la Bolivie a regretté qu’on ait renoncé au libellé employé ces 14 dernières années.  Comme la Chine, la Bolivie regrette en outre que la position de certains membres du Conseil n’ait pas été prise en compte. 

Le représentant russe, qui a par ailleurs déploré que le texte adopté laisse de côté les agissements d’organisations non gouvernementales accréditées auprès de l’ONU susceptibles de constituer des atteintes sexuelles, a également dit savoir qu’il existe « des tensions » entre le Chef de la MINUJUSTH et les autorités haïtiennes. 

De fait, le représentant d’Haïti a jugé « surprenante » la mention du Chapitre VII dans le cadre d’un « mandat d’accompagnement » du Gouvernement de son pays.  Insistant notamment sur cette référence au Chapitre VII, il a en outre exprimé ses « réserves » sur les aspects du préambule et des parties du dispositif de la résolution n’ayant pas fait l’objet de consensus au sein du Conseil.

Pays porte-plume, les États-Unis ont déploré que certains membres aient « essayé de créer la confusion » s’agissant du libellé du texte.  Nous sommes ici pour réaffirmer notre soutien à Haïti et à son gouvernement, a affirmé la représentante, appuyée par ses homologues du Royaume-Uni, de la France et des Pays-Bas.  Ces derniers ont, tout comme leurs collègues éthiopien, péruvien et polonais, regretté que le Conseil n’ait pas pu adopter le texte à l’unanimité. 

Il est regrettable que le Conseil n’ait pas pu conserver sa pratique antérieure, s’agissant des textes relatifs à Haïti, a ainsi déploré le représentant de la Pologne, pour qui cette absence d’unanimité constitue « un message négatif envoyé à un pays qui est en pleine phase de transition ». 

Le représentant du Pérou a pour sa part souligné que le rôle du Conseil allait au-delà du mandat de la Mission et rappelé l’importance d’une relation dynamique entre les Nations Unies et Haïti.  Dans le même sens, le Royaume-Uni a appelé de ses vœux une coopération accrue entre les autorités haïtiennes, la MINUJUSTH et l’équipe de pays de l’ONU, tout en jugeant nécessaire de recourir au Chapitre VII afin de mettre pleinement en œuvre le mandat de la Mission. 

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI

Rapport du Secrétaire général sur la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (S/2018/241)

Texte du projet de résolution (S/2018/286)

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant ses résolutions antérieures sur Haïti, en particulier ses résolutions 2350 (2017), 2313 (2016), 2243 (2015), 2180 (2014), 2119 (2013), 2070 (2012), 2012 (2011), 1944 (2010), 1927 (2010), 1908 (2010), 1892 (2009), 1840 (2008), 1780 (2007), 1743 (2007), 1702 (2006), 1658 (2006), 1608 (2005), 1601 (2005), 1576 (2004), 1529 (2004) et 1542 (2004),

Constatant qu’au cours de l’année écoulée Haïti a fait des progrès considérables vers la stabilité et la démocratie, l’amélioration de la sécurité et de la situation humanitaire et la consolidation de ses institutions démocratiques grâce à un transfert pacifique du pouvoir, avec notamment l’appui de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH),

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité d’Haïti,

Considérant que, de manière générale, la situation en matière de sécurité est restée stable depuis qu’il a adopté sa résolution 2350 (2017), ce qui a permis de fermer la MINUSTAH, de réduire les effectifs militaires et d’effectuer une transition en bon ordre vers la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH),

Notant le rôle joué par la MINUJUSTH pour ce qui est d’aider toutes les branches de l’État haïtien à renforcer les institutions de l’état de droit, d’appuyer et développer encore la Police nationale d’Haïti pour qu’elle puisse améliorer la sécurité en Haïti, et de suivre la situation des droits de l’homme, en rendre compte et l’analyser, soulignant qu’il importe que les Nations Unies et la communauté internationale continuent d’appuyer la sécurité et le développement d’Haïti à long terme, en particulier en renforçant les capacités du Gouvernement, en se fondant sur les réalisations de ces dernières années et en les consolidant, et encourageant les autorités haïtiennes à parer aux risques d’instabilité qui persistent de longue date,

Rappelant ses résolutions 1645 (2005) et 2282 (2016) et réaffirmant que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef d’appliquer ses stratégies de consolidation et pérennisation de la paix pour faire face aux difficultés étroitement liées entre elles que connaît le pays, faisant valoir que le développement durable contribue à la consolidation et à la pérennisation de la paix et soulignant à cet égard l’importance des principes d’appropriation et d’inclusion ainsi que le rôle que la société civile peut jouer pour faire progresser les processus et les objectifs nationaux de consolidation de la paix afin de garantir que les besoins de tous les segments de la société soient pris en compte,

Constatant qu’Haïti fait face à des défis humanitaires majeurs et affirmant que pour asseoir durablement la stabilité, il est essentiel de faire progresser la reconstruction et le développement économique et social du pays grâce à une aide internationale au développement efficace et coordonnée et à un renforcement des moyens dont disposent ses institutions pour tirer parti de cette aide,

Réaffirmant que la sécurité doit aller de pair avec un développement durable sur les plans économique, social et environnemental, y compris grâce à des initiatives en matière de réduction des risques et de préparation aux catastrophes naturelles dans un pays qui y est extrêmement vulnérable, et que le Gouvernement est appelé à jouer un rôle de premier plan dans ces initiatives avec l’aide de l’équipe de pays des Nations Unies,

Réaffirmant également qu’il encourage la MINUJUSTH, agissant en coopération avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et les acteurs internationaux compétents, à continuer d’aider le Gouvernement à combattre efficacement la traite des êtres humains, conformément à la résolution 2388 (2017), ainsi que les autres formes de criminalité transnationale organisée, à savoir les trafics de stupéfiants et d’armes en Haïti, conformément au droit international,

Rappelant la résolution 71/161 de l’Assemblée générale relative à la Nouvelle stratégie de lutte contre le choléra en Haïti de l’Organisation des Nations Unies, notant que le nombre des cas présumés de choléra continue de diminuer et réaffirmant qu’il importe que la communauté internationale continue d’appuyer l’action menée par l’ONU pour lutter contre le choléra en Haïti,

Soulignant qu’il importe que le Gouvernement et ses partenaires internationaux et régionaux apportent un concours effectif au Plan stratégique 2017-2021 de la Police nationale d’Haïti afin de mieux préparer la Police nationale à répondre aux troubles de l’ordre public et à gérer les menaces contre la sécurité et de réduire le besoin d’un appui de la communauté internationale,

Rappelant ses résolutions 2378 (2017) et 2382 (2017), par lesquelles il a prié le Secrétaire général de veiller à ce que les données relatives à l’efficacité des opérations de maintien de la paix, y compris celles portant sur l’exécution de ces opérations, soient centralisées pour améliorer l’analyse et l’évaluation des opérations des missions sur la base de critères précis et bien définis,

Reconnaissant que, pour promouvoir l’état de droit et la sécurité en Haïti, il est essentiel de renforcer les institutions nationales des droits de l’homme, notamment en faisant respecter le droit à un procès équitable, en facilitant l’accès à la justice, en luttant contre la corruption et l’impunité, en luttant contre la criminalité et la violence sexuelle et sexiste, en appliquant le principe de responsabilité et en faisant respecter les droits humains, y compris ceux des femmes et des enfants,

Affirmant l’importance d’une étroite coordination entre la MINUJUSTH et l’équipe de pays des Nations Unies et engageant la MINUJUSTH, agissant conformément à la stratégie de sortie sur deux ans et à ses objectifs, à chercher en étroite collaboration avec l’équipe de pays des Nations Unies les moyens de combler les éventuels déficits de capacités pour préparer la réduction des effectifs de la Mission, et engageant également la MINUJUSTH, l’équipe de pays des Nations Unies et tous les organismes concernés des Nations Unies à coordonner étroitement leur action, en consultation avec le Gouvernement, dans le cadre du transfert des responsabilités,

Accueillant avec satisfaction le rapport du 20 mars 2018 du Secrétaire général (S/2018/241), y compris la stratégie de sortie et ses objectifs,

Conscient que la Charte des Nations Unies lui confie la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Décide de proroger le mandat de la MINUJUSTH jusqu’au 15 avril 2019 afin d’aider le Gouvernement à renforcer les institutions de l’état de droit en Haïti, à appuyer et à développer encore la Police nationale d’Haïti, et à suivre la situation en matière de droits de l’homme, à en rendre compte et à l’analyser, dans le but de déterminer s’il y a lieu ou non de le renouveler;

2.    Réaffirme que, dans le contexte de l’amélioration de l’état de droit en Haïti, il est essentiel de renforcer le secteur de la justice et les moyens de la Police nationale d’Haïti pour que le Gouvernement puisse rapidement assumer la pleine responsabilité de la sécurité nationale;

3.    Décide que la composante de police de la MINUJUSTH conservera sept unités de police constituées et 295 policiers hors unités constituées jusqu’au 15 octobre 2018, et que la composante de police de la MINUJUSTH sera ramenée à cinq unités de police constituées entre le 15 octobre 2018 et le 15 avril 2019 et gardera 295 policiers jusqu’au 15 avril 2019, toute réduction des effectifs devant tenir compte de l’évolution de la situation en matière de sécurité en Haïti et être ajustée en conséquence;

4.    Prie le Secrétaire général de lui rendre compte, dans des rapports  qu’il lui présentera tous les 90 jours à partir du 1er juin 2018, de l’application de la présente résolution, y compris des éventuels cas de non-exécution du mandat et des mesures prises pour y remédier;

5.    Prie en outre le Secrétaire général, dans son rapport du 1er juin 2018, en partenariat avec le Gouvernement et l’équipe de pays des Nations Unies, d’établir des dates et des indicateurs plus précis en vue de la réalisation des objectifs fixés, aux fins d’un transfert des tâches et des responsabilités au Gouvernement, en coordination avec l’équipe de pays des Nations Unies, comme le prévoit la stratégie de sortie sur deux ans figurant dans son rapport en date du 20 mars 2018;

6.    Prie le Secrétaire général de lui faire part, dans les rapports qu’il lui présentera tous les 90 jours à compter du 1er juin 2018, des progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie de retrait assortie d’objectifs, notamment au regard des indicateurs, étapes et cibles définis pour atteindre les objectifs fixés, et des effectifs de la mission prévus au titre de la stratégie;

7.    Encourage le Gouvernement, en collaboration avec la MINUJUSTH, dans le cadre des tâches qui lui ont été dévolues en matière d’état de droit en vertu de son mandat et conformément à la stratégie de sortie sur deux ans assortie d’objectifs clairs, à œuvrer notamment à l’application des critères établis, y compris à l’adoption des projets de code pénal et de code de procédure pénale, au renforcement des systèmes judiciaire et pénitentiaire haïtiens, à l’augmentation des mécanismes internes de contrôle et de responsabilisation dans les secteurs de la police, de l’administration pénitentiaire et de la justice, à la mise en place d’un conseil électoral permanent, à l’adoption de la loi sur l’entraide judiciaire, au règlement de la question du placement en détention provisoire prolongée, et à l’approbation de mesures de lutte contre la violence communautaire;

8.    Prie en outre le Secrétaire général de lui soumettre, dans son rapport du 1er septembre 2018, un état actualisé de l’avancement du calendrier de transfert des tâches et responsabilités au Gouvernement, en coordination avec l’équipe de pays des Nations Unies, en vue d’un retrait de la mission et d’une progressive montée en puissance des activités et programmes pertinents de l’équipe de pays des Nations Unies d’ici au 15 octobre 2019, tout en s’inspirant des objectifs fixés dans le cadre de la stratégie de sortie prévue sur deux ans;

9.    Prie le Secrétaire général de dépêcher une mission d’évaluation stratégique en Haïti d’ici au 15 février 2019 et, en conséquence, de lui formuler, dans le quatrième rapport d’évaluation de 90 jours qu’il lui présentera au plus tard le 1er mars 2019, des recommandations sur le rôle futur de l’ONU en Haïti, notamment toutes recommandations en faveur d’un retrait progressif ou d’une sortie;

10.   Affirme son intention d’envisager, en fonction des conclusions de son examen des conditions de sécurité sur le terrain et de la capacité globale d’Haïti d’assurer la stabilité, le retrait de la MINUJUSTH et le passage à une présence des Nations Unies autre qu’une opération de maintien de la paix à compter du 15 octobre 2019;

11.   Engage le Gouvernement à prendre de toute urgence les mesures appropriées pour faire en sorte, avec l’appui de la communauté internationale et selon que de besoin, que la Police nationale d’Haïti et l’appareil judiciaire respectent et défendent les droits de l’homme comme élément essentiel de la stabilité d’Haïti et demande à la MINUJUSTH d’assurer un suivi et de fournir un appui en la matière, conformément à son mandat;

12.   Prie le Représentant spécial du Secrétaire général de continuer à jouer un rôle de bons offices et de sensibilisation politique aux fins de la bonne exécution du mandat, y compris par l’élaboration, en étroite coordination avec le Gouvernement, d’une stratégie visant à résoudre les problèmes politiques afin d’avancer sur la voie de l’établissement d’un état de droit et de créer une dynamique de progrès systématiques;

13.   Demande instamment au Représentant spécial du Secrétaire général et à la MINUJUSTH de travailler en étroite coordination avec le Gouvernement et prie instamment ce dernier de faciliter le mandat et les opérations de la Mission;

14.   Autorise la MINUJUSTH à user de tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de son mandat en vue d’appuyer et de renforcer la Police nationale d’Haïti;

15.   Autorise également la MINUJUSTH à protéger les civils menacés de violences physiques imminentes, dans la limite de ses moyens et de ses zones de déploiement, s’il y a lieu;

16.   Prie le Secrétaire général de veiller à ce que la MINUJUSTH conserve les moyens, notamment médicaux et aériens, dont elle a besoin pour pouvoir déployer rapidement des forces de sécurité dans tout le pays à l’appui de la Police nationale d’Haïti;

17.   Réaffirme combien il importe que la MINUJUSTH tienne pleinement compte, dans tous les aspects de son mandat, de la question transversale que constitue la problématique femmes-hommes et aide le Gouvernement haïtien à garantir la participation et la représentation pleines et effectives des femmes à tous les niveaux;

18.   Se félicite des initiatives du Secrétaire général d’instaurer, dans toutes les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, une culture de l’efficacité qui donne effet à la Politique relative à la vérification et à l’amélioration de la préparation opérationnelle, de conduire des évaluations de la performance notamment des effectifs de police, et d’utiliser le Système de préparation des moyens de maintien de la paix afin que les décisions en matière de déploiement, de remédiation et de rapatriement du personnel des Nations Unies soient fondées sur les résultats, et lui demande de poursuivre ses efforts à cet égard;

19.   Rappelle sa résolution 2272 (2016) et toutes les autres résolutions des Nations Unies pertinentes, et prie le Secrétaire général de continuer de prendre toutes les mesures nécessaires pour que l’ensemble du personnel de la MINUJUSTH observe scrupuleusement la politique de tolérance zéro de l’Organisation des Nations Unies à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles et de le tenir informé à ce sujet, et exhorte les pays qui fournissent des contingents et du personnel de police à redoubler d’efforts pour prévenir les comportements répréhensibles et à veiller à ce que tous les cas dans lesquels leur personnel serait impliqué fassent l’objet d’enquêtes crédibles et transparentes et à ce que les personnes responsables soient sanctionnées;

20.   Entend continuer à examiner la situation en Haïti et envisager d’adapter le mandat de la MINUJUSTH et ses effectifs de police, s’il y a lieu, pour préserver les progrès accomplis par Haïti dans l’instauration d’une sécurité et d’une stabilité durables;

21.   Décide de rester activement saisi de la question.

 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

La Commission de la population et du développement ouvre sa session 2018 sur le thème « villes durables, mobilité humaine et migrations internationales »

Cinquante et unième session,
2e et 3e séances – matin & après-midi
POP/1072

La Commission de la population et du développement ouvre sa session 2018 sur le thème « villes durables, mobilité humaine et migrations internationales »

« Villes durables, mobilité humaine et migrations internationales », ce thème choisi cette année par la Commission de la population et du développement, qui a ouvert sa session 2018 aujourd’hui, touche à des questions « très importantes et très complexes ».  Il s’agit, s’est expliquée la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), de questions « qui parlent des gens, de leur vie, de leur santé, de leurs droits, de leur sécurité et de leurs opportunités ».

Le défi de la Commission sera d’examiner ce thème « dans toute sa complexité », a acquiescé la Vice-Secrétaire générale de l’ONU.  Comme le départ des jeunes peut signifier des pertes pour leur pays d’origine, on ne peut parler de migration sans parler de développement durable et de la nécessité pour les gouvernements d’investir dans les gens et de construire des villes inclusives et durables, a ajouté Mme Amina J. Mohammed.

Les enjeux ont été mis en évidence par le Sous-Secrétaire général aux affaires économiques et sociales.  M. Elliot Harris a rappelé que la population urbaine mondiale est passée de 750 millions de personnes dans les années 1950, à environ 4 milliards à l’heure actuelle, une croissance qui a radicalement changé le paysage des établissements humains, « avec toutes les conséquences que cela entraîne sur les conditions de vie, l’environnement et le développement durable ».  Dans certains pays aux villes mal préparées, l’afflux massif de nouveaux arrivants a même provoqué la chute du PIB, a mis en garde le Président-Directeur général du GORA Corp, M. Gora Mboup.

Dans son rapport, le Secrétaire général indique que la part de la population mondiale vivant en milieu urbain devrait passer de 55% en 2018 à 60% en 2030 pour atteindre 47% en Afrique, 56% en Asie, 71% en Océanie, 77% en Europe et plus de 80% dans les Amériques.

L’urbanisation incontrôlée peut limiter les possibilités et accentuer les inégalités, prévient, à son tour le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), dans son rapport.  À l’heure actuelle, environ 828 millions de personnes, soit un citadin sur trois, vit dans des taudis, c’est-à-dire dans un logement dépourvu d’accès à une source d’eau améliorée ou à des installations sanitaires améliorées ou encore caractérisé par un espace de vie insuffisant. 

La question est de savoir comment assurer aux nouveaux arrivants et aux communautés d’accueil une vie meilleure? a résumé la Directrice exécutive du FNUAP.  Mme Natalia Kanem a misé sur les jeunes et le dividende démographique qui est devenu « un cri de ralliement ».  La Directrice exécutive a cité une étude du Bureau d’appui à la consolidation de la paix et du FNUAP qui détruit le mythe « explosion démographique des jeunes égale risque accru de violence ».  L’étude montre au contraire comment tous les jours, des jeunes travaillent dans leurs communautés pour apporter la paix, améliorer la gouvernance et défendre les droits de l’homme.  Les jeunes peuvent contribuer au développement économique de leur société, « à condition de pouvoir exploiter leur potentiel », a reconnu l’Union européenne. 

Même son de cloche du côté du Groupe des États d’Afrique qui a reconnu que le continent, où d’ici à 2063, 62% des 2,5 milliards d’Africains vivront dans les villes, a tout intérêt à libérer « l’énergie créative » des jeunes, en augmentant les investissements dans l’éducation, la formation professionnelle, la santé et le logement.  La Norvège a ajouté l’autonomisation des femmes et leur droit de décider de leur corps et de leur sexualité.  « Nous ne pouvons pas accepter que la religion ou de soi-disant valeurs traditionnelles soient utilisées comme une excuse pour priver les femmes de leurs droits. »

Pour aller de l’avant, a conseillé la Vice-Secrétaire générale, nous devons comprendre la situation en constante mutation dans laquelle nous opérons.  Il est essentiel de générer et d’utiliser des données qui permettent une meilleure intégration des changements démographiques dans la planification des politiques et les interventions.  « L’histoire de l’humanité, c’est l’histoire de la mobilité humaine », a-t-elle rappelé, en parlant de questions reprises dans le Programme d’action du Caire sur la population et le développement mais aussi dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et le Nouveau Programme pour les villes. 

Nul doute qu’elles seront au cœur des futurs pactes mondiaux pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, et sur les réfugiés que l’Assemblée générale négocie en ce moment.  L’Union européenne a d’ailleurs mis en garde contre les chevauchements et s’est félicitée que le Président de la Commission ait proposé que la résolution sur le thème de cette année se concentre sur le lien entre urbanisation et migration. 

En début de séance, la Commission a élu Mme Nicola Barker-Murphy, de la Jamaïque, et MM René Lauer, du Luxembourg, et Jawad Ali, du Pakistan, aux vice-présidences.  Le représentant pakistanais assumera également les fonctions de Rapporteur.

La Commission, qui a adopté son ordre du jour provisoire et approuvé l’organisation de ses travaux, poursuivra ses travaux demain, mardi 10 avril, à partir de 10 heures.

MESURES POUR LA POURSUITE DE LA MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME D’ACTION DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT AUX NIVEAUX MONDIAL, RÉGIONAL ET NATIONAL

Déclarations liminaires

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a souligné que le thème de cette année « Villes durables, mobilité humaine et migrations internationales » renvoie à l’engagement commun en faveur d’un monde inclusif durable.  Nous vivons, a constaté la Vice-Secrétaire générale, dans un monde démographiquement dynamique et divers où les populations sont plus que jamais liées, par l’information, la communication, le commerce et la mobilité.  Les pays ont des structures d’âge de plus en plus différentes et nous voyons des niveaux élevés d’urbanisation en Europe et en Amérique et une croissance urbaine rapide en Asie et en Afrique.  Les gens circulent à un rythme plus rapide dans leurs frontières et la migration internationale devient plus complexe, davantage de pays étant à la fois pays d’origine, de transit et de destination.

Ces dynamiques viennent de plusieurs facteurs et d’abord les conflits, les faibles perspectives économiques et les changements climatiques qui poussent les gens à partir.  Mais il faut aussi tenir compte des gens qui partent tout simplement à la recherche d’un meilleur emploi et d’une meilleure éducation ou pour rejoindre des membres de leurs cercles social ou familial.  La migration est une caractéristique essentielle de notre monde et dans une large mesure, elle fait une contribution positive à la société. 

Pourtant les préoccupations sont bien réelles et le défi de la Commission sera d’examiner le thème de cette année dans toute sa complexité, a prévenu la Vice-Secrétaire générale.  Par exemple, le départ des jeunes peut signifier des pertes pour leur pays d’origine.  On ne peut donc parler de migration et d’urbanisation sans parler de développement durable et de la nécessité pour les gouvernements et la communauté d’investir dans les gens et de construire des villes inclusives et durables.  La Vice-Secrétaire générale a donné l’exemple de Sao Paolo, une ville qui a réussi à gérer la migration grâce à ses structures et institutions de gouvernance, ses politiques et sa législation.  La ville a d’ailleurs lancé une campagne de sensibilisation à la xénophobie.  Les villes sont aussi en première ligne dans l’accueil des réfugiés.  À Londres, par exemple, un nouveau schéma a été lancé pour encourager les groupes communautaires à parrainer une famille de réfugiés.  Un service en ligne permet à tout individu de soutenir des réfugiés, laissant ainsi aux autorités locales l’occasion de se concentrer sur les services publics. 

Pour aller de l’avant, a insisté la Vice-Secrétaire générale, nous devons comprendre la situation changeante dans laquelle nous opérons.  Il est essentiel de générer et d’utiliser des données qui permettent une meilleure intégration des changements démographiques dans la planification des politiques et les interventions.  La Vice-Secrétaire générale a donné l’exemple de la Zambie, qui, avec l’aide du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), génère des indicateurs de développement au niveau des districts, lesquels ont enrichi le septième plan national de développement et permis de mobiliser des investissements dans les secteurs de la santé et de l’éducation au profit des enfants et des jeunes.  Un autre bon exemple est l’étude menée en République dominicaine qui montre la contribution des migrants haïtiens au PNB mais aussi leur manque d’accès aux services. 

La réforme du système de développement des Nations Unies nous permettra, a promis la Vice-Secrétaire générale, de mieux aider les gouvernements.  Les coordonnateurs résidents pourront ainsi mettre les meilleurs talents de l’ONU au service des gouvernements et améliorer la capacité d’une nouvelle génération d’équipes de pays de faire de la planification et de la programmation, en se fondant sur des changements démographiques complexes et en constante mutation, y compris en travaillant avec les gouvernements pour améliorer la collecte, l’analyse et l’utilisation des données.  Les réformes aideront aussi l’ONU à aider plus efficacement les gouvernements à améliorer leur planification et leur gouvernance des villes et en faire des centres de la diversité, de l’intégration et de la tolérance. 

L’histoire de l’humanité, c’est l’histoire de la mobilité humaine, celle de gens qui partent à la recherche d’une vie meilleure qu’il s’agisse de moyens financiers, d’accès à l’éducation et à un emploi décent ou d’une meilleure protection de leur liberté personnelle, a conclu la Vice-Secrétaire générale. 

Le thème de cette année touche à des questions « très importantes et très complexes », a prévenu la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), Mme NATALIA KANEM.  Il s’agit, s’est-elle expliquée, de questions qui parlent des gens, de leur vie, de leur santé, de leurs droits, de leur sécurité et de leurs opportunités.  Citant un sondage effectué par le FNUAP auprès des jeunes au Caire, à Beyrouth et à Tunis, la Directrice exécutive a constaté que ces jeunes parlent surtout de désespoir des villes qu’ils ont quittées, de l’insécurité et des troubles.  Ils ont aussi avoué que, partis, ils sont confrontés à des menaces, des abus et à des situations bien plus difficiles que celles qu’ils imaginaient.  Mais si c’était à refaire, ils le referaient, ont-ils tous admis. 

Aujourd’hui, le monde compte un milliard de migrants et rien que l’année dernière, plus de 65 millions de gens ont dû fuir de chez eux, « un record », a souligné la Directrice exécutive.  La majorité d’entre eux se concentrent dans les villes, avec l’espoir d’une vie meilleure.  La question est de savoir comment assurer cette vie meilleure pour eux et pour ceux qui les accueillent dans leurs villes?  Les gouvernements, a-t-elle répondu, reconnaissent l’importance d’investir dans les jeunes.  C’est la raison pour laquelle le dividende démographique, découlant de l’accès aux jeunes à l’éducation et aux opportunités économiques, est devenu « un cri de ralliement ».  La Directrice exécutive a attiré l’attention sur une étude du Bureau d’appui à la consolidation de la paix et du FNUAP qui montre qu’un jeune sur quatre dans le monde est affecté par la violence ou un conflit armé.  L’étude détruit le mythe « explosion démographique des jeunes égale risque accru de violence ».  Elle montre au contraire comment tous les jours, les jeunes travaillent dans leurs communautés pour apporter la paix, améliorer la gouvernance et défendre les droits de l’homme. 

Investissons dans les jeunes, a encouragé la Directrice exécutive, et plaçons notre confiance en eux pour relever les défis auxquels nous sommes confrontés.  « Le dividende démographique peut conduire au dividende pacifique », a-t-elle dit, avant de tuer un autre mythe: le développement élargit l’horizon et les aspirations et offre les moyens de partir.  Contrairement à ce qu’on pense, les gens des pays les moins avancés sont les moins susceptibles de partir. 

Passant à la protection de ceux qui ont réussi à partir, la Directrice exécutive a insisté sur le fait que le non accès aux services de santé sexuelle et reproductive est une des causes principales des morts et des maladies parmi les femmes et les filles déplacées.  Le FNUAP dit: « des accouchements sûrs, même ici », a déclaré la Directrice exécutive, parce que migrer enceinte accroît les risques de complication.  La santé sexuelle et reproductive doit être ouverte à tous les migrants, y compris les réfugiés et il faut lever les barrières des coûts, des centres de santé débordés, de la langue, du manque de transport, de la pollution ou encore du logement indécent.  Des services pour tous peuvent contribuer à atténuer la méfiance entre les gens et à lutter contre la discrimination, la xénophobie, le racisme voire la violence. 

Plus une personne bouge moins elle a de chance d’apparaître dans les données, a prévenu la Directrice exécutive, en conclusion.  Elle a donc insisté sur la qualité des données pour comprendre les motivations et les conditions de vie des migrants.  À la veille de son cinquantième anniversaire, le FNUAP se concentre sur trois résultats stratégiques: zéro demande non satisfaite en matière de planification familiale, zéro mortalité maternelle due à un évènement évitable et zéro violence et pratique néfaste contre les femmes et les filles.  La Directrice exécutive a averti que le financement de la collecte des données et de l’analyse des politiques stagnent depuis 2005 et celui de la santé sexuelle et reproductive, depuis 2011.

M. ELLIOT C. HARRIS, Sous-Secrétaire général chargé du développement économique et Économiste en chef de l’ONU, a souligné que malgré l’évolution des défis démographiques, deux choses sont restées constantes au cours des derniers 70 ans, à savoir la valeur intrinsèque du travail de la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales (DAES) qui produit l’information essentielle sur les tendances et politiques démographiques pour éclairer les délibérations de la Commission de la population et du développement.  Le second élément est le besoin de la Commission de prodiguer des conseils avisés aux gens chargés d’élaborer les politiques sur les tendances démographiques actuelles et futures.

M. Elliot a souligné que le Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement, adopté au Caire en 1994, a été, est et restera une étape historique pour le développement humain, mettant en évidence les liens indispensables entre tous les domaines de la population et du développement.  Ce Programme d’action doit continuer d’éclairer nos actions mondiales, a-t-il plaidé, y compris, sur « les villes durables, la mobilité humaine et les migrations internationales ».  Il a rappelé que dans les années 1950, environ 750 millions de personnes vivaient dans des villes, alors que de nos jours, la population urbaine est constituée d’environ 4 milliards de personnes.  Cette croissance change radicalement le paysage des établissements humains, a-t-il relevé tout en notant qu’elle a des conséquences sur les conditions de vie, l’environnement et le développement durable. 

L’Économiste en chef de l’ONU a noté que la mobilité humaine ne cesse de croître, avec un nombre de migrants internationaux se chiffrant à 160 millions au moment de la Conférence du Caire en 1994 et à 258 millions aujourd’hui.  Une urbanisation rapide et une mauvaise gestion des migrations posent des défis sérieux au développement durable, a-t-il prévenu.  Les gouvernements nationaux et locaux doivent travailler ensemble pour mettre en œuvre les politiques qui tirent parti des bénéfices de l’urbanisation et des migrations internationales, tout en atténuant leurs aspects négatifs potentiels. 

Le Sous-Secrétaire général chargé du développement économique a par ailleurs rappelé que le Département des affaires économiques et social travaille en collaboration avec des agences des Nations Unies, la communauté des chercheurs et la société civile.  Le Département est conscient de l’importance des partenariats, car venir à bout des défis majeurs du développement mondial exige du système des Nations Unies qu’il soit « uni dans l’action ».  Il a rappelé que l’ONU a entrepris une réforme transformative, une « route vers une meilleure ONU », le but étant de démonter les silos institutionnels au lieu d’en créer de nouveaux.  Il a souhaité que la présente session enrichisse vraiment les négociations sur le futur pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.

Le Directeur de la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales, M. JOHN WILMOTH, a constaté que le débat sur les changements démographiques se concentre souvent sur quatre mégatendances: la croissance de la population, le vieillissement de la population, l’urbanisation et la migration internationale.  Ces mégatendances sont particulièrement importantes dans le contexte du Programme de développement à l’horizon 2030 puisque chacune d’entre elles est à la fois la cause et la conséquence d’autres processus majeurs du processus de développement.  L’année dernière, l’attention s’était focalisée sur le vieillissement de la population.  Cette année, ce sera l’urbanisation et la migration internationale.

La Commission, qui cette année, va mettre sa pierre à l’édifice du futur pacte mondial pour des migrations sûres, a cette caractéristique séduisante qu’elle travaille sur les trois piliers du développement durable: social, économique et environnemental.  En effet, depuis Thomas Malthus, les questions de population sont considérées comme des questions de viabilité des activités humaines, en tenant compte de la taille et des caractéristiques de la population mais aussi de la trajectoire anticipée du changement.

Débat général sur le thème « Villes durables, mobilité humaine et migrations internationales »

Au nom du G77 et la Chine, M. MOHAMED EDREES (Égypte) a appelé les organisations internationales et régionales, et la société civile, à travailler de concert pour promouvoir le renforcement des capacités et la coopération technique et contribuer ainsi à l’amélioration de la collecte, de la diffusion et de l’analyse des données sur les villes durables et la mobilité humaine.  Il a aussi appelé les États à honorer leurs engagements à assurer le plein respect des droits des réfugiés, des personnes déplacées et des migrants, « quel que soit leur statut », et à appuyer les villes d’accueil, conformément à la coopération internationale.  Dans cet environnement de ralentissement économique, d’instabilité financière, d’insécurité alimentaire, de crise de l’eau potable et d’impacts négatifs des changements climatiques, sans compter la résistance antimicrobienne et les maladies nouvelles et émergentes, le G77 et la Chine plaident pour le renforcement des efforts collectifs pour s’attaquer aux questions de population et de développement de manière intégrée et globale.

M. PHILIPP CHARWATH (Autriche), au nom de l’Union européenne, a estimé que pour créer des villes durables, l’innovation est essentielle.  Elle permet d’exploiter le potentiel économique et de tirer parti de la forte densité de population, comme un système de transport et de logements plus énergétiquement efficace et des services de base plus rentables. 

L’autre défi est d’assurer l’accès aux soins de santé sexuelle et reproductive à des populations en croissance rapide, en particulier les adolescents, les femmes et les filles, les personnes vulnérables.  À cet égard, il faut reconnaître le fardeau disproportionné du VIH-sida et des grossesses non désirées que portent les adolescentes et les jeunes femmes et la nécessité de politiques ciblées et d’investissements pour assurer un accès à la santé sexuelle et reproductive, aux contraceptifs modernes et à une éducation sexuelle complète.

Il faut, a insisté le représentant, tenir compte de la « grande cohorte » des jeunes dans les villes.  Il faut investir dans les jeunes car ils peuvent contribuer au développement économique s’ils ont les moyens d’exploiter leur potentiel.  Pour profiter du dividende démographique, il faut donc accorder une attention particulière aux droits de l’homme de tous les enfants, adolescents et jeunes, sans distinction d’aucune sorte, dont l’orientation et l’identité sexuelles. 

Le représentant a estimé que les questions de la mobilité humaine et des migrations internationales relèvent exclusivement du futur pacte mondial sur les migrations.  Il s’est donc félicité que le Président de la Commission ait proposé que la résolution sur le thème de cette année se concentre sur le lien entre urbanisation et migration.  Évitons les chevauchements, a voulu le représentant. 

Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. ALADE AKINREMI BOLAJI (Nigéria) a souligné que l’Afrique est une des « composantes majeures » de l’accélération de l’urbanisation dans le monde, le continent devant compter, dans les 15 prochaines années, davantage de zones urbaines que rurales et 55% de citadins.  Selon ONU-Habitat, la contribution de l’Afrique à l’urbanisation mondiale doit passer de 11,3% en 2010 à 20,2%.  Mais la faculté des villes africaines à faire face à l’accélération de la mobilité humaine, notamment en ce qui concerne l’emploi, les services sociaux de base et la sécurité, s’avère limités.  Cette situation, a-t-il expliqué, rend les autorités et bien souvent les communautés urbaines à l’exode rural.

En Afrique, la migration et la mobilité humaine sont liées au terrorisme, aux guerres civiles, à la sécheresse ou aux catastrophes naturelles mais dominées par l’exode rural.  Selon les estimations, d’ici à 2063, 62% d’une population de 2,5 milliards d’Africains vivront dans les villes.  L’Afrique doit donc miser sur le renforcement des capacités humaines, la création d’emplois et l’élargissement de l’accès aux services sociaux de base.

L’Afrique doit promouvoir une utilisation durable de l’espace, en favorisant des transports publics bien intégrés et des économies d’énergie.  Elle a tout intérêt à libérer « l’énergie créative » des jeunes, en augmentant les investissements dans l’éducation, à la formation professionnelle, à la santé et au logement.  Cela nécessitera l’amélioration des systèmes juridiques, institutionnels et réglementaires mais aussi la mobilisation de financements innovants.

L’Afrique, a poursuivi le représentant, s’engage à coopérer pour assurer des migrations sûres, ordonnées et régulières et à veiller au plein respect des droits et au traitement humain des migrants, quel que soit leur statut.  Le continent s’engage à veiller à la libre circulation des personnes et des biens pour promouvoir les liens entre zones rurales et urbaines et l’intégration régionale.  Les politiques migratoires doivent être formulées de manière à maximiser les bénéfices des migrations et à en minimiser les coûts et les répercussions.

Ces politiques doivent donc se baser sur des faits et tenir compte de la situation des plus vulnérables, à commencer par les femmes et les enfants.  Il faut, a conclu le représentant, des partenariats bilatéraux, régionaux et internationaux pour réduire les obstacles à la libre circulation et assurer le plein respect des droits des migrants.  La migration doit devenir « un instrument de développement mutuel », a insisté le représentant, en plaidant pour des politiques de promotion de l’intégration des migrants et des rapatriés.

Au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (groupe CANZ), M. CELESTE KINSEY (Canada) a demandé la pleine mise en œuvre du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement.  Il a souligné que la pleine réalisation des droits humains, y compris les droits à la santé sexuelle et reproductive, l’éradication de la pauvreté, la promotion de l’égalité entre les genres et l’autonomisation de toutes les femmes et filles, est essentielle à l’édification d’un monde plus pacifique, plus inclusif et plus prospère.  Il a mentionné les principes qui, selon lui, devraient guider les négociations.  En premier lieu, la réalisation du potentiel humain n’est pas possible sans le respect des droits humains de tous, a-t-il déclaré.  « Cela veut dire qu’il faut remédier efficacement aux discriminations, à la violence et aux violations persistantes des droits humains, y compris à l’encontre des femmes et des filles. »

En second lieu, le développement ne peut être durable s’il n’est pas égalitaire et inclusif, a-t-il poursuivi, en appelant à la création de partenariats solides avec la société civile.  Il a encouragé les États à faire en sorte que les réponses apportées à l’urbanisation, à la mobilité humaine et aux migrations internationales visent à la mise en œuvre des objectifs de développement durable, « y compris pour les groupes marginalisés et vulnérables, tels que les migrants, les réfugiés et les LGBTIQ2 ».  Enfin, le délégué a souligné l’importance d’éviter tout doublon dans les négociations en cours sur les deux pactes internationaux.

M. SALEH BIN MOHAMMAD AL NABIT (Qatar) a reconnu que la migration et le développement sont les deux faces d’une même pièce.  Des migrations non réglementées constituent un défi majeur, et l’important est d’investir dans et pour les populations.  Le Qatar ne ménage aucun effort pour aider les réfugiés et les personnes déplacées, en particulier les jeunes victimes de conflits.  Le Qatar participe activement à la lutte contre la traite de personnes, l’esclavage, le travail forcé et le travail des enfants.  Mais, a souligné le représentant, mon pays est confronté depuis 10 mois à un blocus qui limite l’importation de marchandises, dont la nourriture et les médicaments. 

Avec une population estimée à 105 millions d’habitants, l’équilibre entre croissance démographique et croissance économique est plus que jamais pressant pour les Philippines, a relevé M. ERNESTO M. PERNIA.  Le pays tient compte de sa jeunesse et de sa population active croissante qui offre la possibilité de tirer parti du dividende démographique.  Des réformes politiques sont en cours dans les secteurs de l’éducation et de la santé, et le Gouvernement entend mettre en œuvre la loi sur la parenté responsable et la santé reproductive, laquelle institutionnalise les principes et objectifs de la Conférence du Caire.  Le représentant a annoncé que son pays autorise désormais les méthodes modernes de planification familiale.  L’utilisation des contraceptifs est passée de 38% en 2013 à 40% en 2017, ce qui a conduit à une baisse du taux de fertilité, de 3 enfants en 2013 à 2,7 enfants en 2017.

M. Pernia a souligné que la moitié de la population philippine vit dans les villes, ce qui fait de son pays, l’un des champions de l’urbanisation de la région Asie-Pacifique.  Le Gouvernement a lancé un vaste plan d’’infrastructures pour créer des villes durables et le programme « Construire, Construire, Construire » accorde ainsi la priorité, pour les quatre prochaines années, aux infrastructures essentielles afin de renforcer la mobilité humaine et la connectivité tout en impulsant la croissance économique.  Un autre programme, « Vert, Vert, Vert » envisage de transformer les 145 villes du pays en communautés durables, conformément au Nouveau Programmes pour les villes.  Tous les gouvernements locaux doivent préparer et mettre en œuvre des plans de gestion des terres et des politiques de zonage, dont l’établissement et l’utilisation de systèmes d’information sur les migrations afin de suivre les mouvements de la population dans le pays.  Le Gouvernement entend aussi lancer la toute première enquête nationale sur les migrations cette année afin d’établir des données sur les modèles migratoires.

Le pays compte 10 millions d’émigrés qui contribuent à l’économie nationale grâce à l’envoi de fonds.  Les Philippines ont donc établi des partenariats internationaux pour veiller au respect des droits des Philippins de l’étranger.  Le représentant a invité les pays développés et les partenaires à aider les pays en développement, y compris les pays à revenu intermédiaire, à renforcer leurs capacités de relever les défis liés à la viabilité des villes, à la mobilité humaine et aux migrations internationales.

M. ANDREI DAPKIUNAS (Bélarus) a jugé nécessaire d’élaborer un programme de mobilité à l’échelle nationale qui permettrait d’assurer une migration ordonnée, sûre et régulière.  Le Bélarus est frappé par le phénomène de l’exode rural.  Pour y faire face, le Gouvernement a mis en place une politique de développement des villes moyennes et petites.  Il a adopté une politique visant à réguler les migrations internes et à encourager la création de villes respectueuses de l’environnement.  Cette politique veut préserver les capacités du milieu rural de protéger son environnement.  Un projet pilote baptisé « la campagne de l’avenir » aide les familles à retourner en zone rurale.  Le projet « la petite patrie » vise à préserver le patrimoine des campagnes et son environnement.  Le représentant a ensuite souligné l’importance des données statistiques « essentielles pour pouvoir prendre des mesures de développement durable en faveur des populations ». 

Mme CUI LI, Vice-Ministre de la Commission nationale de la santé et de la planification familiale de la Chine, a indiqué que son pays compte la plus importante population de migrants au monde, 244 millions de personnes, soit 18% de la population nationale.  Elle a expliqué que les trois quarts de ces migrants sont originaires des zones rurales et que cette migration à large échelle avait permis d’optimiser la production tant dans les zones urbaines que rurales et d’élever le niveau de vie de la population.  La Chine est toutefois entrée dans une période de transition critique, les mouvements de population connaissant un ralentissement et le pays étant affronté au phénomène de vieillissement de sa population.  Ces dernières années, la Chine a mis l’accent sur l’accès des migrants aux services de la santé.  Elle plaide pour que l’on tienne compte de la mobilité humaine dans les programmes de développement.  Les acquis du développement doivent être accessibles à tous et promouvoir un accès équitable aux services publics.  La représentante a appelé à une meilleure collaboration afin de pouvoir élaborer les bonnes stratégies démographiques et mieux analyser les flux migratoires.

M. TAREK TAWFIK, Vice-Ministre de la santé de l’Égypte, a dit que dès les années 60, le Gouvernement a adopté des politiques de développement de nouvelles villes.  Des sites ont été identifiés pour créer ces nouvelles zones urbaines qui devaient accueillir plus de 20 millions d’habitants et en 1988, une loi sur leur gestion a été adoptée.  Compte tenu de l’importante diaspora égyptienne, le Gouvernement accorde une attention particulière aux questions d’urbanisation et de migrations.  Cette diaspora envoie chaque année au pays quelque 17 milliards de dollars, soit plus que les recettes du tourisme ou l’aide publique au développement (APD).  L’Égypte participe activement à la lutte contre la migration clandestine et coopère dûment avec les pays de destination, dans le cadre d’accords bilatéraux.  En 2010, des lois contre la migration clandestine et la traite des personnes ont été adoptées, suivies en 2017 par la Commission nationale de lutte contre la migration clandestine.

Mme PATRICIA CHEMOR RUIZ, Conseil national de la population du Mexique, a appelé à une bonne urbanisation, avertissant qu’une expansion non contrôlée des villes exacerbe les inégalités.  La représentante a affirmé que son pays déploie de nombreux efforts pour connecter les milliers de localités isolées au réseau des services sociaux.  Elle a, à son tour, plaidé pour des investissements dans les talents des populations, dont les jeunes qui doivent se voir offrir des opportunités d’emploi à l’étranger.  Pour sa part, le Mexique s’est engagé à adopter des politiques favorables aux 8,5 millions de migrants de la région, car pour le pays, la migration est une chance à saisir.

M. RENATA SZCZĘCH (Pologne) a souligné l’importance du rôle des villes dans le développement socioéconomique et détaillé la politique urbaine de son pays, une politique qui vise à renforcer la capacité des villes à créer des emplois et à améliorer la qualité de vie de ses habitants.  Le délégué a également mentionné le rôle actif joué par la Pologne dans la mise en œuvre du programme urbain de l’Union européenne.  Il a estimé que les négociations sur les deux pactes relatifs aux migrations et aux réfugiés ont pour objectif d’établir le cadre d’une large coopération internationale.  Ce cadre, a-t-il estimé, doit nous aider à regagner le contrôle des mouvements migratoires, tout en nous permettant d’apporter une aide importante à ceux qui en ont besoin, en premier lieu dans leur région d’origine.

S’il a reconnu la contribution potentielle des migrants au développement durable, le représentant a estimé que l’ampleur sans précédent des migrations clandestines rend quasiment impossible toute influence positive.  Il faut des politiques pour des migrations régulières, ordonnées et sûres, contrôlées par des États souverains et responsables qui coopèrent dans un cadre commun équilibré, a-t-il insisté.  La Pologne cherche à attirer des travailleurs migrants qualifiés pour remédier à la diminution de sa population active, a dit le représentant en s’enorgueillissant du rôle clef de la Pologne dans la stabilisation de la situation migratoire en Europe.  La majorité des migrants en Pologne sont des Ukrainiens qui bénéficient de facilités pour accéder au marché de l’emploi.

Mme GIFTY TWUM-AMPOFO, Vice-Ministre du genre, de l’enfance et de la protection sociale du Ghana, a déclaré que la croissance urbaine au Ghana a été principalement le fait de l’exode rural et d’une hausse naturelle de la démographie due au taux élevé de fertilité provoqué par les mariages et les grossesse précoces, l’offre insuffisante de planification familiale dans les zones rurales et les taux élevés de pauvreté.  La population du Grand Accra grandit à un taux de 3,1% contre 2,4% pour tout le pays.  Accra abrite la moitié de la population du Grand Accra.  En conséquence, la capitale et les autres zones urbaines devaient faire face à l’émergence des bidonvilles et ses corollaires dont l’évacuation des déchets et la pression sur les infrastructures sociales et économiques.

Pour créer des villes durables, le Ghana a élaboré un cadre de politique urbaine qui a pour objectif de promouvoir des établissements urbains durables, intégrés dans l’espace et développés avec logements, infrastructures adéquates, institutions efficientes et environnement de vie et de travail sain.  Deux nouveaux ministères dont l’un chargé des bidonvilles et des centres urbains et l’autre chargé de l’eau et de l’assainissement ont été créés.

Au niveau international, le Ghana qui était un pays d’accueil de migrants est devenu un pays d’origine.  Des jeunes ghanéens partent pour des voyages périlleux dans le désert par des moyens peu orthodoxes pour l’Europe et autres destinations.  Face à cette situation, le Gouvernement a élaboré sa politique nationale de migration pour gérer les flux migratoires par la réduction de la pauvreté et le développement durable.  Le Gouvernement a aussi pris des mesures pour éliminer les facteurs qui poussent les gens à migrer et aider à endiguer les migrations internes et internationales par un certain nombre de mesures concrètes.  Ces mesures et initiative vont de l’éducation aux opportunités économiques pour la jeunesse. 

Mme MAYSOON AL-ZOUBI (Jordanie) a souligné que les migrations internationales et la mobilité humaine occupent le devant de la scène internationale depuis 70 ans mais la scène jordanienne aussi, depuis que des vagues de migrants ont été forcés de fuir les conflits et les guerres dans leur pays pour se réfugier dans le Royaume hachémite.  Ces migrations ont affecté différents aspects de la vie jordanienne et lourdement pesé sur les ressources limitées du pays.  La Jordanie, a insisté la représentante, joue un rôle humanitaire « indéniable » puisqu’elle a accueilli 1,3 million de réfugiés syriens, ces sept dernières années, malgré la rareté de ses ressources et le peu de soutien de la communauté internationale.  Cet afflux massif a fait augmenter le taux de croissance démographique, altérer la structure de la population et retarder la réalisation du dividende démographique. 

Le grand nombre de Syriens qui s’est déversé sur le marché de l’emploi jordanien, en particulier dans le secteur informel, a fait chuter drastiquement l’offre d’emplois aux Jordaniens.  De même, l’augmentation des taux des mariages précoces, des naissances non déclarées et du travail des enfants syriens a eu une incidence culturelle et sociale négative.  Malgré tout, la Jordanie reste sur sa voie humanitaire et continue d’être un modèle de leadership régional et mondial face à la crise des réfugiés.  Le succès de modèle, a prévenu la représentante, exige néanmoins un appui soutenu et renforcé de la part des partenaires clefs pour préserver la résilience de la Jordanie et atténuer l’impact de ces crises régionales sans précédent.  Le pays, qui compte désormais près de 2,9 millions non-Jordaniens, connait une explosion de la population qui rend difficile la récolte des fruits du dividende démographique, a insisté une dernière fois la représentante. 

La diversité est un trait caractéristique des Brésiliens, s’est enorgueilli M. HUSSEIN KALOUT (Brésil).  Le pays, a-t-il insisté, tire sa force de sa diversité.  La migration est un phénomène humain à gérer et non un problème à résoudre.  Dans toutes les politiques, l’accent doit être mis sur l’être humain, le genre, la situation des enfants et les droits de l’homme.  Ces politiques doivent reconnaître que les migrants et la migration apportent des avantages significatifs aux pays d’origine comme aux pays de destination, dont le rajeunissement de la population et l’apport de compétences et de connaissances.  Les migrants, a insisté le représentant, créent des entreprises et donc des revenus et des investissements. 

C’est la lutte contre la discrimination, la pénalisation de la migration, le racisme, la xénophobie et l’intolérance qui doit être au cœur de nos débats, a estimé le représentant.  Les compatriotes qui vivent à l’étranger doivent être traités avec dignité et avoir accès à la justice, à la santé sexuelle et reproductive, à l’éducation et à un travail décent.  Depuis 2017, le Brésil s’est doté d’un cadre juridique qui est peut-être l’un des plus modernes au monde.  La nouvelle loi élargit les droits civiques, sociaux, culturels et économiques et les libertés fondamentales aux migrants, y compris les droits à la santé, l’éducation, la liberté d’expression et d’association, la protection de l’emploi, la possession d’avoirs financiers et non financiers.  La loi dispose que nul ne peut être incarcéré en raison de son statut migratoire.

M. VICTOR MORARU (République de Moldova) a dit que son pays faisait face au vieillissement de la population et à la baisse du taux de fécondité et de l’espérance de vie.  Ces tendances ont été exacerbées par l’émigration.  La fuite des cerveaux affecte véritablement le développement durable du pays.  En 2017, avec le soutien du FNUAP, une « nouvelle vision conceptuelle » a été élaborée dont la priorité est le bien-être démographique et non plus la sécurité démographique.  Pour y parvenir, des politiques proactives ont été mises en place pour réformer la politique de l’emploi et de la santé, sans oublier les congés parentaux pour mieux concilier vie familiale et vie professionnelle.  Pour contrer l’émigration, le Gouvernement a mis en œuvre des réformes politiques importantes dans les domaines économiques, judiciaires, sociaux et éducatifs.  La modernisation des infrastructures, des services publics, du climat des affaires et des lois pour les petites et moyennes entreprises, sans oublier la lutte contre la corruption a aussi été lancée. 

Le Gouvernement fait en sorte que le système éducatif réponde aux besoins du marché du travail.  Il a amélioré les cadres politiques et institutionnels du secteur de l’éducation pour promouvoir l’enseignement technique et professionnel et développer des partenariats entre le marché du travail et les instituts de formation.  Le représentant a insisté sur la coopération internationale et les partenariats entre pays d’origine, de transit et de destination.  À cet égard, le « Partenariat sur la mobilité » entre la République de Moldova et l’Union européenne offre un important instrument pour faire face à la question de la gestion des frontières, de la migration irrégulière, de la lutte contre la traite des personnes et du lien entre migration et développement.  La République de Moldova s’active sur le front des accords bilatéraux, s’agissant en particulier des droits de l’homme des migrants. 

M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a vu dans les négociations de la Commission un processus complémentaire à celles sur le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.  De même, il a jugé importantes les lignes directrices politiques que la Commission peut apporter aux futures discussions du Forum politique de haut niveau en vue de la réalisation de l’objectif 11 du développement durable relatif aux villes et aux communautés durables. 

L’Argentine est le pays d’Amérique latine qui reçoit le plus grand nombre de migrants, a rappelé le représentant, qui a cité le chiffre de 1,35 million permis de résidence que son pays a accordés depuis 2012, conformément à une politique migratoire « historiquement ouverte et accueillante », respectueuse des droits humains des migrants et partant du principe que la migration enrichit la société d’un apport multiculturel en plus de contribuer au commerce, au tourisme et au développement du pays.  En outre, l’Argentine a ratifié la plus grande partie des instruments internationaux de protection des migrants, réfugiés et apatrides.

L’Argentine espère que le Programme d’action du Caire et le Consensus de Montevideo contribuent avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030 à aborder ces questions dans la perspective des droits de l’homme.  Pour le représentant, il est évident que les thèmes de la population sont liés d’une manière ou d’une autre à ceux des objectifs de développement durable.  Au-delà des thèmes propres aux travaux de la Commission, il a plaidé pour que celle-ci traite de questions transversales mentionnées dans le Programme d’action. 

Le représentant a souhaité que la Commission de la population continue d’être un espace de discussions constructives, ce qui est nécessaire pour dégager des consensus qui permettront d’apporter des réponses cohérentes et complètes aux questions relatives aux villes durables et à la migration.  Il a regretté qu’après le succès de la session de 2016, il n’ait pas été possible à la dernière session de parvenir à un résultat négocié.  L’Argentine renouvèle donc son engagement en faveur du multilatéralisme et du travail de la Commission et s’engage à travailler de manière constructive à cette session, a conclu le représentant.

M. NONTAWAT CHANDRTRI (Thaïlande) a révélé que son pays a attiré des millions de travailleurs migrants temporaires et permanents, légaux et illégaux, des pays voisins et d’ailleurs.  En 2016, près de quatre millions de non-thaïlandais vivaient dans le pays, avec une contribution à l’économie nationale estimée à 2 milliards de dollars par an ou autour de 6,2% du PIB.  Face à ces tendances et ces défis, le Gouvernement a élaboré un plan national de développement de la population de 20 ans avec une attention particulière sur l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et la création de villes et établissements humains ouverts à tous, sûrs, résilients et durables. 

Promouvoir un accès équitable et abordable aux infrastructures sociales de base comme les services de santé, le transport public, l’éducation contribue à des villes durables et a un impact positif sur la mobilité humaine.  Se basant sur sa couverture sanitaire universelle, le Gouvernement a approuvé, en 2001, un programme obligatoire d’assurance médicale pour les migrants.  Les enfants de migrants ont accès à l’éducation de base de neuf ans indépendamment de leur nationalité ou statut juridique.  Chaque société doit pouvoir trouver ses propres moyens de faire face aux changements démographiques de manière équilibrée, bien planifiée et globale.    

M. GUSTAVE BAMBARA (Burkina Faso) a constaté que les pays en développement sont dans une dynamique urbaine qui nécessite une nouvelle vision pour mettre l’urbanisation au service du développement culturel et social, de la protection de l’environnement et d’une croissance économique durable.  Il a expliqué que son pays connait un taux d’urbanisation rapide, la population urbaine étant passé de 12,7% en 1985 à 22,7% en 2006, et estimé à 31,5% en 2016.  Il a indiqué qu’outre l’augmentation de besoins fondamentaux comme le logement, l’eau et l’emploi, la situation engendre des défis liés à la maîtrise de l’étalement urbain et la construction d’habitats précaires.

Le représentant a indiqué que le plan national de développement économique et social du Burkina Faso pour la période 2016-2020 porte notamment sur la promotion de la santé des populations et l’accélération de la transition démographique.  La mise en œuvre du plan, conjugué à la politique nationale de l’habitat et du développement urbain, doit ainsi permettre au pays de contrôler la dynamique de l’urbanisation en réduisant les mouvements de population vers les grandes villes.  Dans cette perspective, a-t-il poursuivi, le Burkina Faso entend mettre en place un mécanisme de protection sociale pour tous, garantir la sécurité alimentaire, promouvoir l’accès à l’éducation, créer des emplois décents dans les zones rurales et construire des villes durables, entre autres.  Le pays entend aussi protéger l’accès des migrants au travail, au logement et aux services sociaux de base.

M. TORE HATTREM (Norvège) a rappelé que 50% de la demande en moyens contraceptifs n’est pas satisfaite dans 45 pays et que, globalement, les complications de grossesse et postaccouchement sont la première cause de mortalité chez les femmes âgées de 15 à 19 ans.  La pauvreté a le visage d’une femme, a-t-il poursuivi, en notant que, parmi les 815 millions de personnes qui ont faim dans le monde, 6 sur 10 sont des femmes.  M. Hattrem a jugé essentiel d’autonomiser les femmes et défendu leur droit de décider de leur corps et de leur sexualité.  Une éducation sexuelle complète est cruciale.  « Nous ne pouvons pas accepter que la religion ou de soi-disant valeurs traditionnelles soient utilisées comme une excuse pour priver les femmes de leurs droits », a-t-il prévenu.  Il a demandé la lutte contre les mariages précoces et forcés et rappelé que la protection des droits de l’homme n’est pas le produit du développement mais un contributeur important au développement.

Le délégué a souligné l’importance de la question des migrations, puisque pratiquement tous les pays sont des points de départ, de transit ou de destination.  Si migrer peut autonomiser les hommes et les femmes en leur offrant de nouvelles opportunités, ce n’est pas sans risques, a-t-il reconnu, en parlant de risques plus élevés pour les femmes, les jeunes et les enfants.  « Nous devons faire plus pour protéger les migrants vulnérables, y compris les femmes et les enfants, des abus sexuels et garantir leur accès aux services de santé sexuelle et reproductive nécessaires. »

M. Hattrem a mentionné les « dilemmes » auxquels fait face la Commission cette année.  « Puisque nous négocions de manière parallèle un pacte mondial pour des migrations et un autre sur les réfugiés, nous devons éviter les chevauchements.  Il a voulu que l’on fasse fond sur ce qui a déjà été agréé, y compris la nécessité de normes internationales en matière de statistiques.  Il a rappelé que son pays ne fait pas la distinction entre migrants en situation régulière et en situation irrégulière s’agissant de l’accès aux services sociaux et médicaux.  Cependant, comme nous l’avons expliqué lors des négociations sur les pactes mondiaux, nous devons faire une distinction entre migrants en situation régulière et en situation irrégulière s’agissant du niveau des services fournis, à l’exception des enfants qui doivent pouvoir recevoir toutes les prestations indépendamment de leur situation. 

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a souligné que les villes sont les moteurs de la croissance économique, ces dernières offrant de meilleures perspectives de revenus et étant d’importants marchés.  Mais l’urbanisation peut aussi être marquée par la pauvreté et la marginalisation, a-t-il averti, à l’instar des établissements informels où vivent 880 millions de personnes, soit plus des populations combinées de l’Union européenne et des États-Unis.  Il a souligné que l’action au niveau des villes sera essentielle à la réalisation du développement durable, deux tiers des objectifs de ce développement pouvant de surcroît seulement être réalisés « dans et avec les villes ».

Le représentant a estimé que pour être bénéfique aux pays d’origine, de transit et de destination, et aux migrants eux-mêmes, la migration doit être bien gérée et se dérouler de manière sûre, ordonnée et régulière.  Il a rappelé certaines des contributions de l’Allemagne à l’élaboration du futur pacte mondial pour les migrations.

Le délégué a constaté qu’en 2017, les femmes représentaient 50% des migrants internationaux.  Il a averti que dans les contextes de conflits, caractérisés par l’effondrement des systèmes d’appui, de santé et de droits sexuels et reproductifs, des femmes et des filles se retrouvent menacées.  Quelque 60% des cas de mortalité maternelle ont lieu dans des « contextes fragiles ».  Le représentant a indiqué que la politique de coopération au développement de l’Allemagne accorde la priorité à la promotion de la santé et des droits sexuels et reproductifs.  Le Gouvernement allemand, plaide de surcroît fermement en faveur d’une politique de planification familiale sexospécifique et axée sur le respect des droits ainsi que pour une éducation sexuelle qui tiennent compte de l’orientation sexuelle et de la diversité de genre.  Il a aussi insisté sur l’importance des données pour appuyer la planification politique.  Il a fait part d’une initiative de son pays qui permet d’aider les pays partenaires à recueillir et analyser les données nécessaires à l’élaboration des politiques démographiques ou urbaines.

M. JUAN CARLOS ALFONSO PRAGA (Cuba) a dit qu’en matière de développement, le Gouvernement a pris des mesures conformes à ses engagements internationaux comme les objectifs de développement durable.  Le développement social est l’élément fondateur de ces mesures.  Cuba est un pays à revenu intermédiaire grâce notamment à la performance de son système éducatif et de santé, et ce, en dépit du blocus économique imposé par les États-Unis.  La principale caractéristique de la population est son faible taux de croissance depuis 40 ans.  Depuis 2013, Cuba a modifié la loi sur la migration circulaire ou le retour des réfugiés immatriculés.  Cinquante-cinq pour cent de la population vivent dans 54 villes qui ont toutes élaboré des plans d’occupation des sols.  Près de 70% du budget du pays sont consacrés à la santé, l’éducation, la population et les logements.  Les pauvres, a prévenu le représentant, réclament dans le monde entier une meilleure redistribution des richesses et une meilleure protection de l’environnement.

M. SHAZAD NAWAZ CHEEMA (Pakistan) a dit que les neuf millions de Pakistanais dans le monde contribuent activement au développement du pays et de leurs communautés d’accueil.  Le Pakistan est l’un des pays les plus peuplés au monde et plus de 60% de sa population ont moins de 21 ans.  Ce dividende démographique peut être utilisé pour la croissance économique et, pour ce faire, le Gouvernement a développé une feuille de route du développement axé sur les jeunes.  Il est aussi disposé à travailler avec le reste du monde pour gérer les migrations internationales.  Le Gouvernement a d’ailleurs créé un groupe de travail à cet égard.  Le Pakistan, pour sa part, met l’accent sur le développement du milieu rural, la lutte contre la pauvreté et la création de projets d’appui aux objectifs de développement durable.

Mme FATEMEH ALIPANAH (République islamique d’Iran) a souligné que les zones urbaines bien planifiées sont importantes pour la croissance économique et le développement des sociétés.  Cependant les zones urbaines font face à des défis notables sur le plan de la durabilité, que ce soit en matière d’infrastructures, d’éducation, d’emploi et de services, notamment dans les pays en développement où se trouve la majorité des « mégavilles ».  Elle a voulu que l’on réponde à ces défis en promouvant la coopération internationale, et en renforçant les capacités et le transfert de technologies, entre autres.  La représentante a ensuite insisté sur la responsabilité première des gouvernements, s’agissant de l’élaboration des politiques urbaines et migratoires, notamment en ce qui concerne les exigences d’entrée, de résidence et d’emploi.

Elle a indiqué que plus de 70% de la population de l’Iran vit dans une zone urbaine, ce qui est largement au-dessus de la moyenne mondiale.  Face à ce phénomène, le Gouvernement a mis sur pied de nombreuses initiatives axées, entre autres, sur l’autonomisation des femmes, des jeunes et des personnes âgées, ainsi que sur l’élimination de la pauvreté et des inégalités dans les zones urbaines.  Elle a par ailleurs indiqué que son pays accueillera, du 22 au 24 octobre, à Téhéran, la septième Conférence ministérielle Asie-Pacifique sur le logement et le développement urbain.

Mme SANDRA MORENO (Honduras) a souligné que la migration est une composante essentielle de la transition urbaine.  Elle appelé au renforcement des synergies entre migration et développement à tous les niveaux et à la promotion de politiques migratoires planifiées et bien gérées.  Elle a indiqué que dans la région d’Amérique latine et des Caraïbes, le taux d’urbanisation, qui était de 41% en 1950, est passé à 70% en 2010 et que dans 20 ans, 90% de la population de la région vivra en zone urbaine.

Au Honduras, 40% de la population vit en zone urbaine, un taux qui devrait doubler à l’avenir.  Cette situation nécessite l’élargissement de l’accès des personnes vulnérables aux services de base et l’élimination des bidonvilles.  La représentante a parlé de la situation à Tegucigalpa, qui connaît le taux de pauvreté urbaine le plus important du pays.  Une stratégie a été lancée pour garantir l’accès de tous à des logements et à des services adéquats afin de prévenir, notamment, la prolifération des bidonvilles.  Grâce à ces initiatives, la capitale hondurienne est sur le point de devenir une ville durable, s’est-elle félicitée.

Mme ANAT FISHER-TSIN (Israël) a dit que son pays avait mis en œuvre un processus d’absorption fiable centré sur des services sociaux améliorés, la formation linguistique et la construction de communautés.  Dans les années 90, Israël a accueilli près d’un million de juifs de l’ancienne Union soviétique.  Afin d’absorber sans heurt cette vague de nouveaux immigrés, les dirigeants israéliens ont organisé des programmes d’intégration et adapté les services sociaux.  Le Gouvernement a créé des bourses de soutien pour les nouveaux migrants, des programmes de formation linguistique pour les enfants et les adultes, et a alloué aux autorités locales des fonds pour développer les services en faveur des immigrés.  Israël a encouragé les immigrés à s’établir dans des villes fortes et améliorées.  Le Gouvernement les a aidés à trouver et acheter des maisons et encouragé les propriétaires à louer leurs appartements aux immigrés, en offrant des exemptions fiscales sur les revenus tirés des loyers. 

Les employeurs qui ont recruté des immigrés ont reçu des aides financières et de nombreux programmes de formation professionnelle.  Cette approche promeut non seulement la cohésion sociale et l’intégration économique mais aussi la viabilité, en particulier pour les plus jeunes générations.  Israël donne la priorité à l’accès à l’éducation.  Les enfants des migrants ont droit à des aides scolaires de la maternelle au lycée.  Les étudiants migrants ont droit aux bourses d’études et peuvent participer aux cours préparatoires aux universités et recevoir des conseils gratuits.  C’est le succès des jeunes qui permet aux sociétés de prospérer.

La représentante a estimé que l’autonomisation des femmes est la priorité des priorités.  Le Gouvernement donne aux femmes migrantes des programmes de formation qui leur permettent d’acquérir des compétences professionnelles et de poursuivre des opportunités économiques et d’être des leaders.  Aujourd’hui, près des 40% de la population israélienne sont de la première génération d’immigrés et 40% sont de la deuxième génération née en Israël.  Notre population d’immigrés fait partie intégrante de notre société et a contribué à la croissance économique, aux découvertes scientifiques et aux développements technologiques.  Elle a enrichi notre pays avec son art, sa musique et sa cuisine.  En 70 ans, les immigrés ont tissé des fils encore plus colorés dans le riche tissu d’Israël, s’est réjouie la représentante. 

Pour Mme HELENA DEL CARMEN YÁNEZ LOZA (Équateur), il est impératif de traiter correctement des questions du mouvement des populations des campagnes vers les villes, entre villes de taille différentes  ou encore d’un pays à un autre, en tenant compte du fait que les villes sont le centre de l’activité sociale, économique et politique et que s’y concentre une part toujours croissante de la population mondiale.  Elle a également rappelé que la Conférence mondiale sur la population et le développement de 1994 avait reconnu le lien étroit entre migration, urbanisation et développement, ainsi que les risques liés à une concentration excessive ou à une croissance effrénée de l’urbanisation.

La représentante a rappelé que la Conférence Habitat III a établi une nouvelle feuille de route pour faire de l’urbanisation le moteur d’une croissance économique durable et inclusive, du développement social et culturel et de la protection de l’environnement.  Elle a réitéré l’engagement de l’Équateur en faveur du Nouveau Programme des villes, dont la mise en œuvre contribuera à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Mme Yánez Loza a également rappelé le rôle joué par la Conférence de haut niveau de 2006 sur la migration internationale et le développement et la Déclaration adoptée lors de la seconde réunion de ce type en 2013, qui reconnaissait la mobilité humaine comme un facteur fondamental du développement durable.

La représentante a ensuite présenté les efforts de son pays pour incorporer le Programme de développement durable à l’horizon 2030 dans son système de planification nationale, dont le principal est le Plan national de développement « Toute une vie » qui porte sur la période 2017-2021.  De même, pour faciliter la mobilité humaine, l’Équateur a pris des initiatives pour que ses ressortissants et les étrangers sur son sol bénéficient sur un pied d’égalité des services sociaux, tels que l’éducation, la santé, la protection sociale ou l’emploi.

M. MARKUS SCHWYN (Suisse) a indiqué que le potentiel de développement qu’offre la migration peut être davantage utilisé si les questions de migration sont systématiquement intégrées dans les politiques sectorielles ou dans les stratégies de développement régionales, nationales ou locales.  Il a indiqué que la Suisse cible l’intégration des migrants et des réfugiés dans les mesures d’accompagnement concernant l’utilisation potentielle de leur force de travail.  À cette fin, le Gouvernement vise à relever le niveau de qualification des travailleurs « indigènes » et étrangers et à intégrer les réfugiés reconnus et les personnes admises à titre provisoire au marché du travail.  Il a expliqué qu’en Suisse, 2,5 millions de personnes âgées de 15 ans ou plus sont issues de la migration, et que leur intégration constitue un enjeu majeur de la société.  À cette fin, des données fiables et différenciées ont été établies.  Il a ensuite parlé du projet « City Statistics », établi pour le « monitorage » des villes durables et qui fournit des informations et des points de comparaison sur plusieurs aspects des conditions de vie dans les villes suisses et européennes.

Débat interactif

Cette discussion a été l’occasion pour le Président-Directeur général du GORA Corp, M. GORA MBOUP de faire un exposé sur l’urbanisation et la migration.  Les migrations sont essentielles pour les villes en particulier celles qui font face au vieillissement de leur population, a souligné l’ancien Chef de l’observatoire mondial des villes d’ONU-Habitat.  C’est la recherche d’emploi, l’accès à une meilleure éducation, les conflits et les catastrophes qui poussent les gens à partir pour les villes.  Dans des villes non préparées, l’afflux massif de nouveaux arrivants s’accompagnent de l’apparition des bidonvilles comme en Afrique où deux tiers des citadins vivent dans ce genre de quartiers, sans confort et risquant à tout moment d’être expulsés.  Dans certains pays africains, l’urbanisation accélérée a même fait chuter le PIB.  Pour contribuer au développement, l’urbanisation doit être règlementée.

Dans une ville comme Dubaï, 10% seulement de la population est émiratie, le reste est constitué de migrants qui forment le gros de la population active et font tourner l’économie.  Aux États-Unis, les migrants ont contribué à la renaissance de villes comme Detroit et dans les villes européennes, ils ont inversé la courbe du vieillissement de la population. 

Les migrants apportent aussi des solutions à leur pays d’origine: en 2016, leurs envois de fonds s’élevaient à 575 milliards de dollars, soit plus que l’aide publique au développement (APD).  Partenaires au développement, les migrants assurent un tiers du PIB dans certains pays, donc sans eux, les gens seraient encore plus tentés de fuir leur pays.  Mais tous les migrants ne sont pas des pourvoyeurs de fonds.  Il y a aussi les réfugiés qui désormais sont les boucs émissaires des partis politiques et de leurs discours populistes.  La crise des migrants continue de frapper, comme en atteste le chiffre de 3108 morts en 2017. 

M. GORA MBOUP a plaidé pour un partenariat mondial impliquant les gouvernements, les institutions financières, le secteur privé et les migrants qui devront être traités comme des partenaires.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Syrie: après l’attaque chimique de Douma, les appels au Conseil de sécurité se multiplient pour recréer un mécanisme de responsabilisation

8225e séance – après-midi
CS/13284

Syrie: après l’attaque chimique de Douma, les appels au Conseil de sécurité se multiplient pour recréer un mécanisme de responsabilisation

Après les deux nouvelles attaques chimiques qui ont frappé la ville syrienne de Douma, dans la Ghouta orientale, le 7 avril, l’Envoyé spécial pour la Syrie, M. Staffan de Mistura, et l’Adjoint de la Haut-Représentante aux affaires de désarmement, M. Thomas Markram, ont exhorté, cet après-midi, le Conseil de sécurité, réuni en urgence, à retrouver son unité pour créer une nouvelle structure d’établissement des responsabilités.  Les États-Unis, qui ont imputé ces attaques « au régime d’Assad », ont dit être sur le point de prendre « une décision importante » pour que justice soit rendue en Syrie.

M. Markram a indiqué que les deux attaques chimiques perpétrées à Douma auraient tué au moins 49 personnes et fait des centaines de blessés.  Plus de 500 personnes présenteraient des symptômes typiques d’une attaque chimique.  L’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) est en train de rassembler des informations sur cet incident par le biais de sa Mission d’établissement des faits et « fera le point sur cette attaque devant les États parties après avoir conclu son enquête », a-t-il assuré, ajoutant que « l’emploi d’armes chimiques ne peut devenir le statu quo ».  M. de Mistura a pour sa part exhorté le Conseil à s’unir et à créer un mécanisme d’enquête.  « Faire autrement, ou ne rien faire, revient à accepter qu’un tel défi est insurmontable. »

Plus généralement, l’Envoyé spécial a appelé le Conseil à agir « avec unité et raison », face à des tensions internationales accrues, « avec des confrontations potentielles ou réelles possibles ».  Le danger d’escalade supplémentaire a surgi au-delà de la Ghouta orientale, avec des rapports d’attaques aériennes contre la base de « T4 » syrienne, a noté M. de Mistura, qui a déclaré que personne n’avait revendiqué la responsabilité de cet acte, ce que le représentant de la République arabe syrienne a ensuite contesté. 

Nombreux ont été les membres du Conseil à appeler à la création d’un mécanisme « indépendant et impartial » d’attribution des responsabilités et appuyé un projet de résolution des États-Unis en ce sens.  « Nous devons immédiatement mener des consultations afin de sortir de l’impasse actuelle », a affirmé le délégué de la Suède.  Comme plusieurs autres délégations, la France a rappelé que la disparition du Mécanisme d’enquête conjoint en novembre dernier, « en raison des deux vetos successifs de la Russie », avait privé le Conseil d’un « outil de dissuasion essentiel ».  Le représentant de la Fédération de Russie a, pour sa part, rappelé que son pays avait lui aussi proposé un nouveau mécanisme d’enquête, ajoutant que le projet de résolution « est prêt ».

La Fédération de Russie ayant proposé que la Mission d’établissement des faits de l’OIAC se rende « immédiatement » sur place sous la protection des forces russes, la représentante du Royaume-Uni a, tout comme son homologue du Kazakhstan, appuyé l’idée, tout en dénonçant les « larmes de crocodile » versées par la Russie.  De même, pour la France, il n’existe « aucun doute » sur les auteurs de l’attaque de Douma.

« Comment peut-on accuser Damas avant même que commence l’enquête à laquelle vous appelez? » s’est étonné le représentant russe, qui a contesté l’existence même d’une attaque chimique à Douma, affirmant qu’il n’y avait « pas de trace de produit chimique et encore moins de blessés dans les hôpitaux » et affirmant que les images relevaient d’une mise en scène tournée par les Casques blancs. 

Le représentant de la Fédération de Russie a en outre répliqué vivement aux accusations menées contre son pays, dénonçant la voie de la confrontation choisie par la France, le Royaume-Uni et les États-Unis.  « Le ton utilisé a dépassé les limites, et pas même du temps de la guerre froide on n’avait vu ce genre de discours contre mon pays », a-t-il grondé, en demandant à ses homologues occidentaux s’ils étaient conscients de la situation extrêmement dangereuse vers laquelle ils poussent le monde.  « Partout où vous allez, c’est le chaos qui en découle », leur a-t-il lancé, affirmant, dénonçant leur « absence de stratégie » sur toutes les questions avant de rappeler qu’il n’y avait jamais eu d’armes chimiques en Iraq en 2003.  Par ailleurs, il a affirmé que le groupe Jeïch el-Islam, qui contrôlait Douma jusqu’à hier, était en possession d’armes chimiques. 

Le représentant de la République arabe syrienne a lui aussi dénoncé la « mise en scène » de Douma, « digne de Hollywood », estimant qu’elle ne servait qu’à justifier une attaque contre son pays, lequel, a-t-il répété, « ne possède pas d’armes chimiques », avant d’accuser la France, le Royaume-Uni et les États-Unis d’être des « menteurs professionnels ». 

Le représentant du Kazakhstan a déploré l’effet « destructeur » de ces « accusations mutuelles non appuyées sur les résultats d’une enquête sur le terrain ».  « Mais quel est l’objectif des parties à utiliser des armes chimiques contre leurs propres populations? » s’est-il enquis, en demandant, lui aussi, la création urgente d’un mécanisme d’enquête. 

Par ailleurs, plusieurs intervenants ont fait référence à l’affaire de Salisbury, examinée le 5 avril par le Conseil pour la deuxième fois, à la demande de la Fédération de Russie.  Le représentant russe a du reste fait valoir que la réunion se tenait à sa demande et sous l’intitulé « Menaces contre la paix et la sécurité », ce qui fait que la question de l’attaque de Douma n’en constituait, selon lui, qu’un aspect parmi d’autres.  Les Pays-Bas, qui avaient, comme plusieurs autres membres du Conseil, demandé une réunion d’urgence au titre de la situation au Moyen-Orient, ont répliqué que le Conseil avait failli tenir deux réunions séparées « parce qu’un membre permanent du Conseil de sécurité a voulu faire barrage » à la discussion sur le sujet d’actualité qu’est l’attaque chimique de Douma, avant de l’accuser de préférer voir une communauté internationale spectatrice et couvrir les crimes de son allié, le régime syrien.  À cet égard, le représentant du Koweït a rappelé que le peuple syrien « n’en peut plus » de voir se succéder les réunions du Conseil sans que cela ne se traduise par une quelconque amélioration sur le terrain. 

« Que le Conseil agisse ou n’agisse pas », la représentante des États-Unis a assuré que son pays était déterminé à faire en sorte que le « monstre » qui commet des attaques chimiques contre le peuple syrien rende des comptes.  Parlant de « décisions importantes en cours de préparation », elle a affirmé que l’Histoire retiendrait ce jour, « un jour où le Conseil soit s’est acquitté de ses responsabilités, soit les a abandonnées ». 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

M. STAFFAN DE MISTURA, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, a déclaré que la réunion d’urgence d’aujourd’hui soulignait la gravité des événements qui se sont déroulés en Syrie ces derniers jours, ainsi que leurs graves conséquences pour les civils.  Ces événements se sont déroulés à un moment de tensions internationales accrues, avec des confrontations potentielles ou réelles possibles.  Appelant le Conseil à trouver un moyen d’aborder ces événements avec unité et raison, il a rappelé qu’un cessez-le-feu fragile avait tenu à Douma pendant la plus grande partie du mois de mars.

En revanche, depuis le 31 mars, le Gouvernement syrien a empêché les Nations Unies de poursuivre les pourparlers et, à partir du 8 avril, Douma a été le théâtre de bombardements aériens et notamment d’attaques contre des civils et de destruction d’infrastructures civiles.  Le groupe Jeïch el-Islam a demandé l’engagement des Nations Unies, mais pas le Gouvernement syrien.  Le week-end dernier, des photos ont commencé à circuler sur les médias sociaux montrant des hommes, des femmes et des enfants sans vie ou agonisant, et des organisations non gouvernementales sur le terrain ont affirmé avoir vu des civils en proie aux effets des armes chimiques.

Comme l’a dit le Secrétaire général, l’ONU n’est pas en mesure de vérifier ces allégations, « mais elle ne peut les ignorer », a poursuivi M. de Mistura.  Alors que plusieurs États ont fait allusion au fait que le Gouvernement syrien était responsable de ces actes, ce dernier s’en est défendu, a relevé l’Envoyé spécial.  Pour lui, c’est une raison de plus pour une enquête approfondie, et il a souligné que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) avait entamé une enquête préliminaire sur les allégations, et « pour l’amour de Dieu », il a invité le Conseil à faire en sorte qu’un mécanisme soit mis en place pour enquêter sur ces allégations.

La Fédération de Russie a indiqué qu’elle avait conclu un accord avec Jeïch el-Islam et que jusqu’à 8 000 combattants et 40 000 membres de leurs familles évacuaient Douma, a ensuite précisé l’Envoyé spécial, qui a ajouté que certains détenus avaient été libérés.  L’accord prévoit que les civils qui ont décidé de rester soient placés sous la protection de la Fédération de Russie, a-t-il détaillé.  M. de Mistura a donc exhorté ce pays et le Gouvernement syrien à assurer la protection de ces civils et à se recentrer immédiatement sur l’application de la résolution 2401 (2018) du Conseil de sécurité. 

Le danger d’escalade supplémentaire a également surgi au-delà de la Ghouta orientale, avec des rapports d’attaques aériennes contre la base syrienne dite « T4 », dont, a-t-il ajouté, personne n’a revendiqué la responsabilité.  Les États-Unis et la France ont spécifiquement nié toute responsabilité dans cette attaque, tandis que la Fédération de Russie et la Syrie ont laissé entendre qu’Israël était responsable, a-t-il fait observer.  L’Organisation des Nations Unies n’a pas été en mesure de vérifier ou d’attribuer la responsabilité de cette attaque de manière indépendante, mais elle a instamment invité toutes les parties à faire preuve de retenue. 

L’Envoyé spécial a insisté sur le fait que la lutte contre l’usage d’armes chimiques doit être la priorité du Conseil de sécurité car les civils payent un lourd tribut.  Il a aussi insisté sur le fait que, pour la première fois, il estimait que la situation présentait un risque non pour la sécurité régionale, mais pour la sécurité internationale. 

M. THOMAS MARKRAM, Adjoint à la Haut-Représentante pour les affaires de désarmement, a mentionné les informations faisant état de l’emploi présumé d’armes chimiques à Douma, en Syrie, le week-end dernier.  Selon les informations parvenues la veille, au moins 49 personnes auraient été tuées et des centaines d’autres blessées lors d’une attaque à l’arme chimique, a-t-il déploré.  Plus de 500 personnes présenteraient des symptômes confirmant une telle attaque.  Il a précisé que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) était en train de rassembler des informations sur cet incident par le biais de sa Mission d’établissement des faits.  Cette mission fera le point sur cette attaque devant les États parties après avoir conclu son enquête, a-t-il précisé. 

« Il y a, malheureusement, peu à dire qui n’a pas été dit », a poursuivi M. Markram.  Il a rappelé que l’emploi des armes chimiques était injustifiable et que les responsables devraient rendre des comptes.  « Le fait que ces vues ont été exprimées ici, à maintes reprises, ne diminue pas la gravité avec laquelle le Secrétaire général considère ces allégations », a-t-il insisté, en répétant que ce que nous voyons en Syrie ne peut pas être laissé sans réponse.  Il a exhorté le Conseil à s’unir face à cette menace continue: « le Conseil doit s’acquitter de ses responsabilités », a-t-il ajouté.  Faire autrement, ou ne rien faire, revient à accepter qu’un tel défi est insurmontable, a encore affirmé M. Markram, pour qui « l’emploi d’armes chimiques ne peut devenir le statu quo, pas plus que nous ne pouvons continuer à abandonner les victimes de telles armes ».

En conclusion, M. Markram a déclaré que l’impunité ne devait pas l’emporter et a souhaité que le Conseil s’unisse autour d’un nouveau mécanisme d’établissement des responsabilités. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dit avoir fait convoquer cette réunion sous le point « menaces contre la paix et la sécurité internationales » parce que les responsables des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France se sont lancés sur la voie de la confrontation vis-à-vis de la Fédération de Russie et de la Syrie par des moyens tels que le chantage et la diffamation.  Pour lui, « le ton utilisé a dépassé les limites » et « pas même du temps de la guerre froide » on n’avait vu ce genre de discours contre son pays.  Il a rappelé qu’en 2015, le Président russe avait déjà évoqué « des expérimentations de l’Occident au Moyen-Orient ».  Selon le représentant, « l’Occident fait montre d’absence de stratégie sur toutes les questions ».  « Partout où vous allez, c’est le chaos qui en découle », leur a-t-il lancé en leur demandant s’ils étaient conscients de la situation extrêmement dangereuse vers laquelle ils poussent le monde. 

M. Nebenzia a salué le fait que, grâce à la Fédération de Russie et aux résolutions du Conseil de sécurité, les populations de la Ghouta orientale avaient pu être libérées.  Il a réfuté les allégations sur une modification de la composition sociologique des sites libérés.  Il a aussi salué les difficiles négociations menées avec les groupes armés, qui ont abouti au départ de ces derniers, alors que d’autres combattants ont préféré rester et bénéficier de la grâce présidentielle, en droite ligne du principe onusien de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).  Il a accusé les forces occidentales d’œuvrer à la préservation de foyers d’opposition aux alentours de la capitale syrienne.

Pour la Fédération de Russie, les « rumeurs » d’utilisation du chlore ou d’autres gaz toxiques qui ont été reprises par l’Occident ont eu pour origine les « soi-disant sauveteurs des Casques blancs ».  Il a même accusé certains membres du Conseil de sécurité de faire parvenir, par voie de courriel, des informations sensibles aux groupes d’opposition en Syrie.  Pourquoi Damas aurait-il besoin de mener ces attaques chimiques? a-t-il demandé, tout en soulignant que la Fédération de Russie et l’Iran avaient été immédiatement mis également au banc, sans aucune enquête.  Il a accusé le groupe Jeïch el-Islam d’être en possession d’armes chimiques et affirmé que « la trajectoire qu’aurait suivie la bombe larguée par le Gouvernement syrien n’est pas naturelle », car le projectile aurait survolé des toitures pour aller directement sur les victimes. 

M. Nebenzia a en outre fait part de son étonnement face au fait que certaines des délégations qui avaient également appelé à une réunion du Conseil avaient déjà prévu un texte de résolution sur « l’usage d’armes chimiques ».  On doit d’abord enquêter, a-t-il martelé, affirmant que la Fédération de Russie avait envoyé des spécialistes sur le terrain et que ces derniers n’avaient vu de présence ni de chlore ni de substance neurotoxique.  Aucun habitant n’a confirmé avoir vécu une quelconque attaque chimique, et les responsables de l’hôpital local ont affirmé n’avoir pas reçu de victime, a-t-il ajouté.  De plus, les représentants du Croissant-Rouge arabe syrien ont nié avoir été à l’origine de la déclaration que l’on veut leur attribuer sur l’assistance aux victimes.

Pour la Fédération de Russie, il faut mettre en œuvre les propositions de l’OIAC qui a dit, par la voix de son Directeur, être prête à enquêter « dès demain ».  Les autorités syriennes sont prêtes à accueillir la Mission d’établissement des faits, a-t-il assuré.  Le Gouvernement syrien avait déjà lancé des mises en garde contre de telles attaques imaginaires mais le Conseil de sécurité les a sciemment ignorées, « parce que vous voulez une autre liquidation d’un autre gouvernement de la région », a-t-il accusé. 

M. Nebenzia a aussi dénoncé le fait que des informations sur les découvertes de substances toxiques dans des zones précédemment tenues par les groupes rebelles n’avaient pas attiré l’attention du Conseil, citant des cas de sites identifiés.  Il a également accusé des instructeurs militaires américains d’avoir formé des groupes d’opposition sur des « provocations à l’arme chimique » pour justifier des frappes aériennes.  Il a dénoncé les frappes de ce matin sur la base syrienne « T4 ».  Pour la Fédération de Russie, c’est là exactement le même scénario qui fut mis en place l’an dernier avant les prétendues attaques chimiques qui avaient entraîné le tir de missiles Cruise américains sur une base syrienne. 

Pour la Fédération de Russie, les « fake news » de dimanche dernier font penser à « l’affaire de Salisbury » et semblent avoir pour but de créer un « front antirusse ».  Aujourd’hui, les Britanniques s’éloignent d’une enquête et « troublent les pistes », a-t-il affirmé.  Il a accusé le Secrétaire au Foreign Office du Royaume-Uni de poursuivre sa « campagne de diffamation » contre son pays, évoquant même des interceptions de services secrets qui auraient fait état du « paquet livré » et de « deux personnes supprimées ». 

S’adressant ensuite à la représentante des États-Unis, le représentant a affirmé que son pays ne quêtait pas leur amitié: il « ne leur demande rien et n’attend rien d’eux ».  « Nous voulons juste des relations normales et vous y renoncez en méprisant toute norme de diplomatie », a regretté M. Nebenzia.  La Fédération de Russie n’a qu’un seul ennemi: le terrorisme international.  Elle propose donc aux États-Unis de coopérer pour « résoudre les problèmes de sécurité du monde », et non ceux que les États-Unis inventent.  Le représentant a conclu en demandant une réunion publique du Conseil de sécurité sur Raqqa.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a rappelé que le Conseil de sécurité s’était réuni il y a cinq jours à l’occasion de l’anniversaire de l’attaque au gaz sarin de Khan Cheikhoun, pour constater que, trois jours après cette réunion, une attaque chimique dévastatrice est rapportée dans la ville de Douma, qui aurait fait 45 morts tandis que plus de 500 personnes souffrent de ses conséquences.  Pour le représentant, « il s’agit d’une nouvelle série d’attaques chimiques en Syrie, et cela est inacceptable ». 

M. van Oosterom a fait observer que son pays figure parmi les neuf États membres du Conseil de sécurité qui ont demandé cette réunion en urgence pour faire face à cette attaque horrible.  Il a ensuite rappelé que le Conseil avait failli tenir deux réunions aujourd’hui « parce qu’un membre permanent du Conseil de sécurité a voulu faire barrage » à la discussion sur le sujet d’actualité, à savoir l’attaque chimique de Douma.  Il a accusé ce membre du Conseil de préférer voir une communauté internationale spectatrice et couvrir les crimes de son allié, le régime syrien.

Les Pays-Bas proposent donc de condamner en premier lieu l’usage des armes chimiques, soulignant que le silence et l’impunité ne sont pas une option, et qu’une simple condamnation ne suffit pas.  Il a donc également invité le Conseil à assumer ses prérogatives de protection.  Il a également appelé les États garants du processus d’Astana à user de leur influence pour prévenir toute nouvelle attaque et s’assurer de la cessation des hostilités et de la désescalade de la violence, en droite ligne de la résolution 2401 (2018).  Il a plaidé pour un cessez-le-feu immédiat à Douma afin de permettre d’apporter une aide humanitaire et immédiate aux victimes de cette attaque et faire en sorte que le personnel humanitaire puisse faire son travail.  Les Pays-Bas ont en outre rappelé que la majorité des Membres des Nations Unies ont signifié qu’ils ne voulaient pas que des membres permanents du Conseil de sécurité utilisent leur droit de veto dans les cas d’atrocités de masse. 

M. van Oosterom a également parlé de responsabilisation, accusant le Conseil de ne pas être en mesure de gérer la crise syrienne du fait qu’un membre permanent y est partie et a démontré qu’il défendrait le régime syrien à tout prix.  Le représentant a plaidé pour la mise en place d’un mécanisme susceptible de prendre le relais du travail du défunt Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU afin d’identifier les auteurs de l’attaque, indépendamment des politiques à l’œuvre au sein du Conseil.  Pour les Pays-Bas, la fin du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint ne doit pas signer la fin de l’histoire, signalant qu’après la cessation de ses activités, six autres attaques chimiques imputées au régime ont été recensées. 

L’ONU est plus grande que le Conseil de sécurité seul et peut compter sur le pouvoir de l’Assemblée générale, a ensuite rappelé M. van Oosterom, qui a invité à faire fond sur le travail important de l’OIAC et du Mécanisme conjoint d’enquête.  Il a du reste salué l’enquête immédiate lancée par l’OIAC et a souhaité que la Mission d’établissement des faits ait un accès total au site et bénéficie de la coopération de toutes les parties.  Pour les Pays-Bas, le renvoi de la situation en Syrie devant la Cour pénale internationale est la voie la plus appropriée vers la responsabilisation et la justice, et il a conclu en insistant sur le fait qu’il ne saurait y avoir d’impunité pour l’utilisation d’armes chimiques. 

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a déclaré qu’elle a prié pour ne plus avoir à montrer des photos d’enfants victimes d’armes chimiques au Conseil de sécurité comme elle l’avait fait il y a un an.  Malheureusement, des femmes et des enfants qui se cachent dans des sous-sols et sont le visage de l’innocence ont été les victimes de gaz chimiques samedi, à Douma.  Nous savons que des dizaines de personnes ont péri, a poursuivi Mme Haley, pour qui seul un « monstre » peut être responsable d’une telle attaque.  Un tel monstre n’est en rien ému par des photos d’enfants morts, a-t-elle affirmé, en accusant aussi la Russie, allié du régime syrien, de ne pas éprouver de honte.  Des photos d’enfants morts n’ont aucun d’effet sur la Russie, qui a pris en otage les civils syriens, ici à l’ONU, en opposant son droit de veto à 11 reprises pour protéger Assad, a-t-elle déploré. 

La Russie a en effet « tué » le Mécanisme d’enquête conjoint, a déclaré Mme Haley.  La représentante a, dans le même temps, déploré que le Conseil ait, au nom de l’unité, fermé les yeux sur les agissements de la Russie.  Nous ne parlons pas ici d’un différend entre la Russie et les États-Unis mais de l’emploi d’armes chimiques, a-t-elle poursuivi, avant de demander la création d’un mécanisme impartial et indépendant pour identifier les responsables, en dénonçant l’obstructionnisme de la Russie.

Mon pays est convaincu que ce « monstre » doit rendre des comptes, a ajouté Mme Haley, qui a averti qu’une « décision importante » était sur le point d’être prise.  « L’heure est venue de rendre justice », a-t-elle affirmé.  Pour la représentante, l’Histoire retiendra ce jour, « un jour où le Conseil soit s’est acquitté de ses responsabilités, soit les a abandonnées ».  Quoi qu’il en soit, les États-Unis sont déterminés à agir, a conclu la représentante. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a indiqué que les victimes des deux nouvelles attaques chimiques à Douma présentaient des symptômes typiques d’une exposition à un agent neurotoxique puissant, combiné au chlore pour en augmenter l’effet létal.  « L’expérience et les rapports successifs du Mécanisme d’enquête conjoint font qu’il n’existe aucun doute sur les auteurs de cette nouvelle attaque », a-t-il déclaré, en désignant les forces armées syriennes qui ont, seules, le savoir-faire pour mettre au point de telles substances toxiques. 

M. Delattre a déclaré que le régime syrien et ses alliés, russes et iraniens, sont engagés en vue de la victoire finale, mais aussi de la destruction maximale dans la Ghouta orientale.  Ces attaques sont intervenues soit avec l’accord tacite ou explicite de la Russie, soit malgré elle et en dépit de sa présence militaire sur le terrain, a-t-il affirmé. 

Pointant l’extrême gravité des enjeux de cette nouvelle attaque, le représentant a exigé deux choses de la Russie.  La première est l’arrêt des hostilités et l’instauration d’un cessez-le-feu immédiat, conformément à la résolution 2401 (2018), que le « régime de Damas » n’a toujours pas appliquée.  La seconde consiste en la création d’un nouveau mécanisme d’enquête international, qui permettrait de consigner tous les paramètres de l’attaque de Douma et de contraindre ses responsables à répondre de leurs actes.  « La disparition du Mécanisme d’enquête conjoint en novembre dernier, en raison des deux vetos successifs de la Russie, nous a privés d’un outil de dissuasion essentiel », a poursuivi le représentant de la France, qui a dit soutenir le projet de résolution des États-Unis sur la question.  Le « régime d’Assad » doit trouver de notre part une « réponse unie et implacable », a-t-il conclu.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a dit sa colère devant les attaques à Douma.  Les armes chimiques ne doivent pas devenir monnaie courante dans les conflits, a-t-elle déclaré en pointant la responsabilité éminente des membres du Conseil pour empêcher une telle situation. 

Malheureusement, la Russie n’en est pas convaincue, a déploré la représentante, qui a accusé ce pays, le « régime syrien » et l’Iran d’être à la source de l’instabilité mondiale.  Elle a déclaré le « régime syrien » responsable de cette nouvelle attaque avant d’appuyer l’idée de l’envoi d’une mission de l’OIAC sur place sous la protection des forces russes. 

Le Royaume-Uni soutient en outre le projet de résolution des États-Unis visant à créer un nouveau mécanisme d’enquête indépendant.  Nous n’avons rien à cacher, mais il semble que la Russie et l’Iran ont quelque chose à craindre, a-t-elle fait observer avant d’affirmer que « la responsabilité des atrocités commises en Syrie repose sur les épaules du régime syrien et de ses alliés russes et iraniens ». 

Mme Pierce a dénoncé les « larmes de crocodile » versées par la Russie ainsi que sa tentative de faire diversion en ressuscitant le conflit Est-Ouest.  Revenant sur l’attaque de Salisbury, elle a estimé qu’il s’agissait d’une affaire différente de l’emploi d’armes chimiques en Syrie mais que les deux situations avaient néanmoins un point commun: le refus de la Russie de s’opposer à l’emploi irresponsable d’armes chimiques.  « Nous ne voulons pas isoler la Russie mais c’est ce pays qui s’isole de lui-même », a-t-elle affirmé. 

M. WU HAITAO (Chine) a rappelé la position de son pays, opposé à toute utilisation d’armes chimiques par qui que ce soit.  La Chine est favorable à une enquête complète et impartiale pour identifier les auteurs de l’attaque et le représentant a salué le rôle du Conseil de sécurité et de l’OIAC pour élucider les faits et faire en sorte que les armes chimiques ne soient plus utilisées. 

Pour la Chine, la seule solution à la crise en Syrie est politique et la communauté internationale doit respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie.  Opposée à toute utilisation de la force, la Chine invite l’ONU à œuvrer à une solution pacifique en Syrie.  Elle estime par ailleurs que la lutte contre le terrorisme doit faire partie de la solution à la crise syrienne et que la communauté internationale doit lutter contre les entités inscrites sur les listes de sanctions du Conseil. 

Revenant à « l’affaire Skripal », le représentant a appelé à une enquête objective et en droite ligne de la Convention sur les armes chimiques, tout en invitant les parties concernées à éviter de prendre toute mesure qui ferait monter les tensions. 

M. OLOF SKOOG (Suède) a déclaré que l’impunité ne devait pas prévaloir en Syrie.  Pour le représentant, la réponse à apporter à l’emploi d’armes chimiques en Syrie met à l’épreuve la crédibilité de ce Conseil.  « Malgré les difficultés, nous pouvons mettre de côté nos divergences et nous unir », a-t-il déclaré, ajoutant: « Il est temps de faire preuve d’unité. » 

M. Skoog a demandé une enquête immédiate sur les informations alarmantes en provenance de Douma, avant d’appeler au déploiement urgent de la Mission d’établissement des faits de l’OIAC en Syrie.  Toutes les parties au conflit, y compris les autorités syriennes, doivent coopérer avec la Mission, a poursuivi le représentant.  Il a souhaité une intensification des efforts du Conseil visant à la création d’un nouveau mécanisme « impartial et indépendant » permettant d’identifier les responsables de l’emploi d’armes chimiques en Syrie.  « Nous devons immédiatement mener des consultations afin de sortir de l’impasse actuelle », a conclu M. Skoog. 

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) a estimé que « ce crime atroce semble être la réponse cynique à la réunion tenue la semaine dernière par le Conseil de sécurité pour commémorer l’attaque au gaz sarin de Khan Cheikhoun l’an dernier ».  Il a invité les parties en Syrie, notamment la Fédération de Russie et l’Iran, à prendre les mesures nécessaires pour éviter une autre utilisation d’armes chimiques dans le pays.  Il a aussi invité les acteurs de la crise à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire.

Pour la Pologne, il est regrettable que la reconduction du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint ait été bloquée du fait d’un veto.  Ce fait a conduit à l’impunité, a-t-il déclaré, tout en invitant les membres du Conseil à remettre sur pied le Mécanisme.  Pour la Pologne, « c’est le minimum que nous puissions faire pour la mémoire des victimes de toutes les villes où ces armes ont été utilisées ».

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a jugé préoccupante la poursuite de l’emploi d’armes chimiques en Syrie, ajoutant que les responsables devaient rendre des comptes.  Il a demandé une enquête à Douma par la Mission d’établissement des faits de l’OIAC et a exhorté toutes les parties à coopérer avec elle.  Le représentant a appelé le Conseil à s’unir en vue de créer un nouveau mécanisme d’attribution des responsabilités et de remédier ainsi au vide institutionnel actuel. 

M. Alemu a aussi déploré le manque d’unité du Conseil, qui compromet sa crédibilité.  Nous avons besoin d’un dialogue entre grandes puissances, a-t-il dit, avant d’appeler à la tenue de consultations précoces pour désamorcer les vives tensions actuelles. 

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire) a insisté sur la nécessité de mettre en place un mécanisme de responsabilisation et de lutte contre l’impunité, afin de mettre un terme à l’usage répété des armes chimiques en Syrie.  Il a donc invité le Conseil à retrouver l’unité qui avait été la sienne quand il s’était agi de mettre en place le Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU.  Le représentant a regretté la non-application de la résolution 2401 (2018) et demandé la cessation des hostilités.  Seul un processus politique inclusif en Syrie pourra mettre définitivement fin au conflit, a-t-il conclu, en précisant que cette solution politique devrait être conforme à la résolution 2254 (2015). 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a rappelé que les informations de la presse internationale ont fait état de plus de 40 victimes après des attaques chimiques à Douma, en Syrie.  Il a noté qu’une mission de l’OIAC était sur le terrain, mais a regretté le fait que ses futures conclusions ne seront pas contraignantes.  Il a donc souhaité qu’un mécanisme onusien soit à l’œuvre pour établir des faits et assurer la poursuite des coupables en justice.  Face à la crise actuelle, M. Ndong Mba a estimé que le Conseil avait deux options: soit il renforce la présence internationale dans le pays et prépare une intervention militaire future, soit il poursuit les processus de Genève et d’Astana.  Rappelant que les interventions militaires avaient toujours créé désolation et destruction, le représentant a demandé aux pays ayant une influence en Syrie et en Palestine d’œuvrer à l’allégement des souffrances des populations. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a noté que la situation au sein du Conseil de sécurité devenait de plus en plus tendue, soulignant que des accusations mutuelles non appuyées sur les résultats d’enquête sur le terrain n’auraient qu’un effet destructeur et ne pourraient pas conduire aux résultats que le monde attend de cet organe.  Concernant la situation à Douma, le Kazakhstan a toujours condamné l’usage d’armes chimiques et il appelle à des enquêtes immédiates afin de clarifier les faits.  Le représentant a demandé s’il existait d’autres sources d’information crédibles en dehors des Casques blancs pour confirmer les informations alléguées.  Observant que le nombre de victimes variait selon les sources, il n’en a pas moins affirmé qu’une seule victime serait une victime de trop.

M. Umarov a ensuite rappelé que le représentant de la République arabe syrienne avait averti le Conseil de sécurité, à plusieurs reprises, sur le fait que des groupes terroristes essayaient de transférer des armes chimiques dans la Ghouta orientale.  Il a regretté que ces informations n’aient pas été prises au sérieux et qu’aucune vérification n’ait été faite.  « Nous ne défendons aucune partie au conflit », a-t-il affirmé, en insistant pour avoir des vérifications objectives.  Pour le Kazakhstan, il ne faut pas oublier l’aspect le plus important de l’enquête, le mobile.  « Quel est l’objectif des parties à utiliser des armes chimiques contre leurs propres populations? » s’est-il enquis, en demandant à qui un tel acte profite.  Nous en venons encore, a-t-il poursuivi, à demander un mécanisme d’enquête urgent dont la mise en activité ne dépend que des membres influents du Conseil de sécurité.  En conclusion, le représentant a souhaité que la Mission d’établissement des faits de l’OIAC se rende sur le site de l’attaque au plus vite. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a déploré la détérioration de la situation en Syrie, ainsi que l’inaction du Conseil.  Le Conseil est divisé, si bien que la crise syrienne perdure, a-t-il constaté, en condamnant l’attaque chimique perpétrée à Douma le 7 avril.  Il a demandé la création d’un nouveau mécanisme d’attribution des responsabilités « impartial et indépendant » afin de mettre fin à l’impunité et appuyé le projet de texte américain qui va en ce sens.  Le Conseil doit agir à cette fin, il doit assumer ses responsabilités, a poursuivi le représentant pour qui « nous ne pouvons pas tolérer l’utilisation d’armes chimiques en Syrie ».  En conclusion, M. Alotaibi a rappelé que le peuple syrien « n’en peut plus » de voir se succéder les réunions du Conseil sans que cela ne se traduise par une quelconque amélioration sur le terrain. 

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a condamné l’emploi d’armes chimiques, que rien ne peut justifier.  Il a demandé la création d’un nouveau mécanisme d’attribution des responsabilités « impartial et indépendant » et appelé à éviter de « politiser » cette question.  Le représentant a en outre demandé l’application de la résolution 2401 (2018), dénoncé tout bombardement de la population civile et demandé un accès humanitaire sans entrave en Syrie.  Il a ensuite plaidé pour une solution politique en Syrie et exprimé son rejet de toute mesure unilatérale, qui ne peut que mettre à mal la recherche d’une telle solution.  Enfin, il a souhaité une enquête indépendante pour faire toute la lumière sur l’attaque de Salisbury. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a exprimé la vive préoccupation de son pays face à l’utilisation d’armes chimiques contre des populations.  Il a rappelé qu’il s’agit d’une violation du régime de non-prolifération et du droit international humanitaire.  Il a invité les parties en Syrie à respecter la résolution 2401 (2018) du Conseil et à collaborer avec la Mission d’établissement des faits de l’OIAC qui se rendra sur le terrain.  Pour le Pérou, toute réponse au conflit syrien doit respecter la Charte de l’ONU et le Pérou s’oppose à toute utilisation ou menace d’utilisation de la force pour résoudre la crise syrienne.  Le représentant a lancé un appel aux membres du Conseil afin que cet organe retrouve son unité, avant d’appeler à mener une enquête et à sanctionner les auteurs des crimes atroces commis en Syrie. 

M. NEBENZIA (Fédération de Russie) a repris la parole pour accuser la délégation des États-Unis de manquer à ses obligations en désignant des gouvernements légitimes par l’expression de « régime », y compris à l’encontre de son propre pays.  Il a averti que si une telle chose devait se reproduire, sa délégation déposerait une motion d’ordre.  Il a ensuite fait observer que, pour la représentante du Royaume-Uni, la différence entre Douma et Salisbury tient à ce que, dans le second cas, une enquête en bonne et due forme est en cours.  Il a donc dit attendre les résultats de celle-ci, dénonçant l’euthanasie rapide des animaux de compagnie de la famille Skripal, faisant observer que tant Sergei Skripal que sa fille Yulia se seraient rendus dans un restaurant avant d’être pris de malaise et déplorant le fait qu’un membre de la famille des deux victimes ait vu sa demande de visa refusée par les autorités du Royaume-Uni.  Il a également affirmé que la CIA (Central Intelligency Agency) avait proposé aux Skripal de venir s’établir aux États-Unis sous un nouveau nom, ce qui, selon lui, empêcherait son pays de s’entretenir avec des témoins clefs.  Le représentant a en outre affirmé que la présente séance était bien placée sous le point de l’ordre du jour du Conseil intitulé « menace contre la paix et la sécurité internationales », et que l’attaque de Douma n’en représentait qu’un aspect. 

Revenant à la question syrienne, M. Nebenzia a estimé qu’on « s’approche d’un point dangereux ».  Comment accuser Damas avant même que commence l’enquête à laquelle vous appelez? s’est étonné le représentant.  Pour la Fédération de Russie, « il n’y a pas eu d’attaque chimique, il n’y a pas de trace de produit chimique et encore moins de blessés dans les hôpitaux » et les images présentées ont clairement été tournées par les Casques blancs.  Le représentant a enfin assuré que sa délégation était prête à présenter un texte sur un nouveau mécanisme d’enquête si les autres États sont prêts à en discuter.  « Le projet de résolution russe est prêt », a-t-il affirmé.

Mme PIERCE (Royaume-Uni) a repris à son tour la parole pour indiquer que l’enquête sur l’attaque de Salisbury est en cours.  Elle a ajouté que son pays s’acquitte de ses obligations en vertu de la Convention sur les armes chimiques, contrairement à la Syrie.

M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a dénoncé les menaces des États-Unis contre son pays et le manque de crédibilité du Gouvernement américain.  Aucune arme chimique n’a été trouvée en Iraq, a-t-il rappelé, avant de condamner « l’agression d’Israël perpétrée ce matin » dans la province de Homs et qui a fait, selon lui, 14 victimes.  Grâce à l’appui des États-Unis, Israël jouit de l’impunité pour ses actes, a ajouté le représentant, qui s’est étonné que les membres occidentaux du Conseil n’aient pas mentionné cette attaque dans leurs interventions.  Il a aussi reproché à l’Envoyé spécial d’avoir dit que l’on ne savait pas d’où venait l’attaque aérienne contre le site « T4 », affirmant que le Premier Ministre d’Israël, M. Benjamin Netanyahu, en avait lui-même revendiqué la responsabilité.

Pour M. Ja’afari, cette agression israélienne est une réponse indirecte aux succès engrangés par les forces syriennes contre les terroristes, notamment dans la Ghouta orientale.  Il a dénoncé les « mensonges » proférés au Conseil par certains membres permanents, qualifiés de « véritables menteurs professionnels ».  Ces mensonges avaient déjà conduit à l’occupation de l’Iraq et à la destruction de la Libye, a accusé M. Ja’afari.

Le représentant a ensuite estimé que l’intervention de la représentante des États-Unis était en contradiction avec un entretien récent donné par le général Mattis, Secrétaire à la défense des États-Unis, au magazine Newsweek, dans lequel ce dernier indiquait qu’il n’y a pas de preuve que le Gouvernement syrien a utilisé des armes chimiques.  « Où est la cohérence dans le Gouvernement américain? » a-t-il demandé.

Pour M. Ja’afari, les États-Unis, le Royaume-Uni et la France ont accumulé les mensonges et veulent entraîner le Conseil dans ce jeu mensonger.  Il a affirmé que des centaines de civils avaient pu quitter Douma en toute sécurité grâce à un accord passé entre son gouvernement et un groupe terroriste.  Il a dénoncé le caractère fallacieux des interventions prononcées sur la situation humanitaire dans la Ghouta, avant de mentionner les 145 lettres envoyées par son pays au Conseil dans lesquelles il informe du danger posé par l’emploi d’armes chimiques par des groupes terroristes en Syrie, et qui n’ont selon lui pas reçu la moindre réponse. 

M. Ja’afari a dénoncé des « mises en scène » visant à justifier une agression armée contre la Syrie et ses alliés.  Mon gouvernement n’a pas d’armes chimiques, a-t-il réaffirmé, en dénonçant les campagnes de désinformation lancées par les groupes armés.  Enfin, le représentant a déclaré que son pays était disposé à faciliter le travail d’enquête d’une équipe de la Mission d’établissement des faits à Douma.  « La Syrie ne possède pas d’armes chimiques, condamne leur utilisation et coopère pleinement avec l’OIAC », a-t-il une nouvelle fois affirmé en dénonçant une fois de plus la « mise en scène de Douma, digne de Hollywood ». 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Attaque de Salisbury: Royaume-Uni et Fédération de Russie se renvoient des accusations devant un Conseil de sécurité hanté par l’usage d’armes chimiques

8224e séance – après-midi
CS/13279

Attaque de Salisbury: Royaume-Uni et Fédération de Russie se renvoient des accusations devant un Conseil de sécurité hanté par l’usage d’armes chimiques

Un mois après l’attaque menée à Salisbury, au Royaume-Uni, contre deux ressortissants russes, M. Sergei Skripal et sa fille Yulia, à l’aide d’un agent neurotoxique, le Conseil de sécurité s’est de nouveau penché aujourd’hui sur cette affaire, à la demande cette fois de la Fédération de Russie, mise en cause.  Le représentant russe a, de nouveau, véhémentement nié toute implication de son pays dans une « affaire bien trouble, inventée de toutes pièces, voire une véritable conspiration », qualifiant les accusations comme un « théâtre de l’absurde » et soupçonnant les pays occidentaux de chercher à discréditer la Fédération de Russie.  Au-delà de l’agression de Salisbury, c’est aussi le spectre d’une utilisation croissante des armes chimiques qui hantait le Conseil. 

Le 14 mars, c’était le Royaume-Uni qui avait porté l’affaire devant le Conseil de sécurité, estimant que cette agression -opérée avec un agent neurotoxique de qualité militaire appartenant à la famille des Novitchok, mis au point à l’époque de l’Union soviétique– indiquait, selon les termes de la Première Ministre britannique, Mme Theresa May, une implication « hautement probable » de l’État russe. 

Cet après-midi, le représentant de la Fédération de Russie, M. Vassily Nebenzia, a rappelé que le recours à une arme chimique, « s’il y en a eu », constitue bien une menace à la paix et la sécurité internationales et justifie la saisine du Conseil de sécurité.  Faisant observer que le Royaume-Uni n’avait pas donné de nouvelles informations depuis le 14 mars, il a annoncé d’entrée que son pays souhaitait « informer en détail » le Conseil. 

M. Nebenzia s’est longuement attaché à dénoncer les « accusations odieuses et absolument pas prouvées » à l’encontre de son pays.  Convoquant successivement le Docteur Goebbels et le lapin blanc d’Alice au pays des merveilles de Lewis Carrol, il a dénoncé un « théâtre de l’absurde », dans lequel la Russie se voyait sommée de reconnaître son implication avant d’avoir le droit de coopérer à l’enquête sur l’agression. 

Raillant le « niveau intellectuel des accusations, qui ferait presque sourire », M. Nebenzia a dénoncé « une guerre de propagande » menée par le Royaume-Uni et ses alliés, entraînés par lui dans son « exemple dangereux ».  Guerre qui, a-t-il ajouté, est menée en utilisant les médias occidentaux, présentés comme « l’arme la plus dangereuse de notre époque » et accusés de « répéter constamment le même mensonge, afin qu’il devienne la vérité », selon la « méthode du Docteur Goebbels ».  Le représentant a d’ailleurs affirmé que « le Novitchok n’est pas une substance d’origine russe », mais un nom « inventé en Occident » pour qualifier des agents neurotoxiques « fabriqués aux États-Unis et au Royaume-Uni », ajoutant que le laboratoire de Porton Down, proche de Salisbury, possède bien des agents. 

Si le Royaume-Uni n’avait pas demandé cette réunion, il est heureux de « faire la lumière sur l’attaque de Salisbury », a rétorqué sa représentante, Mme Karen Pierce, qui a détaillé « l’enquête très complexe » lancée par son pays et expliqué l’ampleur des moyens déployés par le fait qu’une « arme de destruction massive a été utilisée dans mon pays ». 

Opposant aux « 30 versions » de l’incident, que M. Nebenzia reprochait au Royaume-Uni d’avoir présentées depuis un mois, les « 24 théories » de la Russie pour se disculper, Mme Pierce a insisté sur la responsabilité « hautement probable » de la Russie, y compris le fait que l’État russe a commandité des assassinats par le passé.  Une accusation reprise par les États-Unis qui ont rappelé la « longue tradition russe d’assassinats d’État, notamment au Royaume-Uni ».

La représentante britannique a aussi répondu aux allégations de la Russie selon lesquelles son pays n’aurait pas respecté les procédures prévues par la Convention sur les armes chimiques.  Elle a vu dans la demande russe d’une enquête conjointe une démarche de « pompier pyromane ».  « Je n’accepte aucune leçon de morale au sujet de cette Convention de la part d’un pays qui ne recule devant rien pour faire obstacle à tout établissement des responsabilités dans l’emploi d’armes chimiques en Syrie », a-t-elle ajouté.

Au-delà de l’agression de Salisbury et du soutien sans faille apporté au Royaume-Uni par les États-Unis et les membres européens du Conseil, lors d’une réunion qui n’a « rien appris », selon les mots du représentant russe, c’est la question du recours croissant à des armes chimiques dans le monde qui se trouvait en toile de fond. 

La « campagne de discrédit lancée contre la Russie » vise d’ailleurs, selon son représentant, à discréditer la position de son pays sur le volet « armes chimiques » de la crise syrienne.  De fait, Mme Pierce a accusé la Russie de s’évertuer à « saper l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) », après avoir provoqué la fin du Mécanisme d’enquête conjoint ONU-OIAC sur les attaques chimiques en Syrie.

C’est pourquoi, de la Chine à l’Éthiopie et du Kazakhstan au Koweït, les membres du Conseil ont condamné une nouvelle fois toute utilisation des armes chimiques.  Face à la « réémergence tous azimuts, au Moyen-Orient, en Asie, et désormais en Europe », de ces armes « barbares aux conséquences meurtrières », le représentant de la France a appelé à l’engagement de tous pour rétablir l’interdiction absolue des armes chimiques et dénoncer des « tentations, jeux tactiques et politiques qui ne sont pas à la hauteur des enjeux et des responsabilités d’un membre du Conseil de sécurité ». 

La France, a martelé le représentant, n’acceptera jamais de laisser dans l’impunité ceux qui utilisent ou développent des agents toxiques.  Dans le même sens, les États-Unis ont rappelé qu’ils avaient, lors de la séance d’hier du Conseil sur les armes chimiques en Syrie, pressé la communauté internationale de réagir et d’empêcher la banalisation de ces armes. 

LETTRE DATÉE DU 13 MARS 2018, ADRESSÉE AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ, PAR LE CHARGÉ D’AFFAIRES PAR INTÉRIM DE LA MISSION PERMANENTE DU ROYAUME-UNI DE GRANDE-BRETAGNE ET D’IRLANDE DU NORD AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2018/218)

Déclarations

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a rappelé que le Conseil de sécurité a organisé, le 14 mars dernier, une séance d’information sur la base « d’accusations odieuses et absolument pas prouvées » sur une attaque commise contre deux ressortissants russes vivant au Royaume-Uni, M. Sergei Skripal et sa fille Yulia.  Faisant observer qu’il n’y a pas eu depuis lors de nouvelle séance d’information sur le sujet, il a exprimé le souhait d’« informer en détail » le Conseil de sécurité.

M. Nebenzia a rappelé les faits: le recours à une arme chimique, s’il y en a eu, constitue une menace à la paix et la sécurité internationales et justifie la saisine du Conseil de sécurité.  Il a rappelé que M. Skripal avait été condamné en 2006 pour espionnage au profit du Royaume-Uni, puis gracié en 2010.  Il vit depuis lors au Royaume-Uni et pour la Russie, il ne présente aucune menace, a affirmé le représentant qui a estimé que, dès lors, toute une série de questions se posent.  Pourquoi, même si pour prendre une attitude cynique, la Russie aurait-elle attendu huit ans et choisi d’agir à deux semaines de l’élection présidentielle et à quelques semaines de la Coupe du monde de football?  Nous connaissons tous les histoires d’espionnage et les romans policiers mais « pourquoi aurait-on choisi le moyen le plus dangereux »?

« De plus en plus de questions se posent », a avoué le représentant, qui a rappelé que tant la Première Ministre que le Ministre des affaires étrangères du Royaume-Uni avaient parlé d’entrée de jeu d’un agent neurotoxique russe, le Novitchok.  Si cet agent a été placé sur la porte de la maison de M. Skripal, comment se fait-il que lui et sa fille n’auraient été affectés que quelques heures plus tard alors que le policier qui s’est rendu sur les lieux a été tout de suite gravement affecté?  Pour M. Nebenzia, la seule explication, c’est la présence d’un antidote.  Il a rappelé que le centre de Porton Down, connu pour avoir élaboré des armes chimiques, était très proche. 

Le laboratoire de Porton Down a parlé d’un agent neurotoxique de qualité militaire mais dont l’origine exacte n’a pas été identifiée, a poursuivi le représentant.  Il a ajouté que, selon le laboratoire, aucun antidote n’avait été administré aux Skripal.  Il a aussi déclaré que le médecin du centre avait ajouté qu’une telle substance n’aurait pas pu quitter les murs du laboratoire.  Qu’est-ce qui ne pourrait en aucun cas quitter les murs du laboratoire? s’est étonné M. Nebenzia.

« Le Novitchok n’est pas une substance d’origine russe », a-t-il affirmé.  Ce nom « de consonance russe » a été « inventé en Occident » pour qualifier des agents neurotoxiques fabriqués aux États-Unis et au Royaume-Uni.  Le laboratoire de Porton Down possède bien des agents de ce type.  Citant diverses « prétendues informations » de la presse britannique, le représentant a affirmé qu’on est dans « un théâtre de l’absurde » et a demandé s’il existait encore des « informations ». 

Plutôt que d’utiliser « le mégaphone de la diplomatie », il faut fournir des réponses claires à des questions précises, a conseillé le représentant, qui a estimé que toute l’affaire souffre d’un « manque de réflexion » de la part des autorités politiques britanniques qu’il a accusées d’avoir fait le choix des « déclarations sensationnelles » sans songer qu’elles leur « reviendraient comme un boomerang ».

Le représentant a en outre accusé Londres d’avoir entraîné ses alliés dans son « exemple dangereux », en provoquant des expulsions de diplomates par dizaines, y compris des membres de la mission diplomatique de la Fédération de Russie auprès des Nations Unies à New York.  Le représentant s’en est pris aux États-Unis qu’il a accusés d’avoir « fait preuve d’un dédain total vis-à-vis du fonctionnement du Siège des Nations Unies » puis d’avoir violé à de multiples reprises leurs engagements diplomatiques, y compris en saisissant des propriétés diplomatiques de la Fédération de Russie, notamment à New York, ou encore en limitant la liberté de mouvement des diplomates russes en poste au Siège des Nations Unies à New York.  Le représentant a demandé aux États-Unis de revenir sur ces mesures et de ne plus en prendre. 

Il a répété qu’on a affaire à un « nouveau système de droit » dans lequel on « accuse sans preuve, sur la base de simples soupçons ».  « Où est passé la bonne Angleterre?  S’agit-il d’une perte de professionnalisme ou d’une nouvelle culture politique? » a lancé le représentant qui a reproché au Royaume-Uni de se moquer de son pays en présentant « 30 versions différentes ».

M. Nebenzia a poursuivi sa série de questions.  Où se trouvaient les Skripal pendant les quatre heures qui se sont écoulées entre la prétendue contamination et le moment où on les a retrouvés?  Où a-t-on trouvé si rapidement un antidote contre une substance inconnue?  Avec qui Sergei Skripal était-il en contact?  Où sont les enregistrements des caméras de surveillance?  Où sont les animaux de compagnie qui vivaient dans la maison des Skripal et dans quel état sont-ils? a-t-il demandé, trouvant très rapides les conclusions de Scotland Yard alors qu’il faudrait normalement, selon lui, « des semaines » pour en tirer.  Pourquoi les autorités britanniques n’autorisent-elles pas les autorités russes à entrer en contact avec des ressortissants russes? a-t-il encore demandé.

Pour le représentant, l’enquête est « très loin d’être finie ».  Il a réaffirmé que son pays est prêt, conformément aux accords internationaux, à répondre dans un délai de 10 jours.  Au lieu de cela, Londres a préféré lancer un ultimatum, exigeant des explications complexes dans un délai de 24 heures.  « On ne peut pas s’adresser à la Russie de cette manière », s’est indigné le représentant.  Mon pays, a-t-il dit, a réclamé, hier, une enquête conjointe russo-britannique lors de la réunion du Conseil exécutif de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) mais la demande a été bloquée.  Le représentant a fait observer que « la majorité des États Membres » avaient en fait refusé de soutenir la position britannique.

Le niveau intellectuel des accusations contre la Russie ferait presque sourire, a-t-il raillé, en s’en prenant notamment au Ministre britannique des affaires étrangères, M. Boris Johnson, qui avait, entre autres, comparé la prochaine Coupe du monde de football en Russie aux Jeux olympiques de Berlin de 1936, sous le régime nazi.  L’URSS avait boycotté les Jeux, alors que le Royaume-Uni y été représenté officiellement, a taclé le représentant. 

M. Nebenzia a réaffirmé, comme le 14 mars, que le Royaume-Uni mène une « guerre de propagande » contre la Russie.  Il a décrit les médias occidentaux comme « l’arme la plus dangereuse de notre époque », les accusant de « répéter constamment le même mensonge, pour qu’ils deviennent la vérité », et estimant que c’était là la « méthode du Docteur Goebbels ».

« Tout ce qui se passe correspond à ce que nous avons dit depuis le début », à savoir que l’affaire Skripal fait partie d’une « campagne de discrédit lancée contre la Russie » que l’on accuse aujourd’hui de cacher certains arsenaux et de violer la Convention sur les armes chimiques.  Il s’agit, a-t-il tranché, de remettre en question la légitimité politique de la Russie et de discréditer notre position sur le volet « armes chimiques » de la crise syrienne. 

Face à cette « affaire bien trouble, inventée de toutes pièces, voire une véritable conspiration », nous « arriverons à la vérité, sur la base de la Convention sur les armes chimiques, a affirmé M. Nebenzia, qui a insisté sur le respect des procédures prévues par la Convention et réclamé l’accès consulaire aux deux membres de la famille Skripal, estimant qu’un « acte odieux, peut-être même terroriste », a été commis contre deux de nos ressortissants au Royaume-Uni. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a déclaré qu’elle ne souhaitait pas cette réunion mais s’est dite heureuse de faire la lumière sur l’attaque de Salisbury.  Après celle-ci, mon pays a lancé une enquête très complexe, forte de 250 enquêteurs, comprenant l’examen de 5 000 heures de vidéos, de 1 300 éléments de preuve et l’audition de 500 témoins, a-t-elle dit, avant de souligner l’indépendance de la police britannique.  De tels moyens ont été déployés parce qu’une arme de destruction massive a été utilisée dans mon pays, a-t-elle poursuivi.  La déléguée a indiqué que Yulia Skripal est désormais en mesure de parler et poursuit sa convalescence.  Elle devrait bientôt pouvoir se prononcer sur l’offre de protection consulaire formulée par la Russie, a-t-elle poursuivi. 

La déléguée a ensuite étayé la très probable responsabilité de la Russie par le fait que la Russie a produit l’agent neurotoxique incriminé, le « Novitchok ».  Nous savons aussi que l’État russe a pu commanditer des assassinats par le passé, a-t-elle rappelé.  La déléguée a expliqué l’emploi de l’expression « hautement probable » pour pointer la responsabilité de la Russie en raison du fait que, dans son pays, seule une juridiction peut établir une responsabilité.  Mais cela ne doit en aucun cas jeter de doute sur la culpabilité de la Russie, a-t-elle dit. 

Elle a rappelé que le laboratoire britannique qui a examiné les échantillons prélevés sur les lieux de l’attaque a conclu qu’il s’agit bien du « Novitchok ».  Elle a ensuite dénoncé les différentes théories avancées par la Russie - 24 plus précisément.  L’attaque a ainsi été présentée par la Russie, tour à tour, comme l’acte de groupes terroristes ou bien comme une diversion pour détourner l’attention du Brexit, a-t-elle dit.

Elle a indiqué que son pays a demandé une aide auprès de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), sur la base de l’article 8 de la Convention sur les armes chimiques.  Tout ce que nous avons fait est conforme à la Convention, a-t-elle tranché.  « Je n’accepte aucune leçon de morale au sujet de cette Convention de la part d’un pays qui ne recule devant rien pour faire obstacle à tout établissement des responsabilités dans l’emploi d’armes chimiques en Syrie. »  Elle a précisé que l’OIAC a dépêché, le 21 mars, une équipe technique chargée de prélever des échantillons environnementaux et médicaux.  Les analyses vont ensuite être renvoyées à l’OIAC qui préparera son rapport, a-t-elle dit, ajoutant que son pays s’empressera de diffuser les informations contenues dans ledit rapport. 

Concernant la demande russe relative à une enquête conjointe, la déléguée a utilisé la métaphore du « pompier pyromane ».  Maintenant qu’elle n’a pas pu obtenir son enquête conjointe, la Russie s’évertue désormais à saper l’OIAC, a-t-elle dit.  Elle a dénoncé la demande du Ministre russe des affaires étrangères que des experts russes participent à l’enquête sur l’attaque de Salisbury.  « Cela ne sera plus une enquête indépendante alors. »

La déléguée a dénoncé le discrédit jeté par la Russie sur le Mécanisme d’enquête conjoint, les actes d’agression russes en Crimée et en Géorgie ou bien encore les tentatives de coup d’État au Monténégro.  Chacune de ces actions est accompagnée d’une campagne de désinformation orchestrée par la Russie, a-t-elle accusé.  Elle a conseillé au Conseil de rester saisi de cette question, avant d’accuser la Russie de saper les institutions internationales qui « nous protègent tous ».  Nous n’avons rien à cacher, mais je pense que la Russie a beaucoup à craindre, a-t-elle conclu. 

Mme KELLEY A. ECKELS-CURRIE (États-Unis) a rappelé que son pays avait saisi l’occasion de la séance d’hier sur les armes chimiques en Syrie pour inviter la communauté internationale à réagir et empêcher la banalisation de ces armes.  Elle a vu dans la séance d’aujourd’hui une tentative de la Russie « d’utiliser le Conseil de sécurité à des fins politiques et de semer le doute » sur ce qui s’est passé à Salisbury.  Nous discutons, a-t-elle rappelé, de l’utilisation « odieuse » d’un agent neurotoxique contre deux personnes qui vivaient paisiblement au Royaume-Uni.  La représentante a réaffirmé l’appui « infaillible » et la solidarité « totale » des États-Unis au Royaume-Uni.  Soit la Russie a utilisé sciemment un agent neurotoxique militaire, soit elle ne contrôle pas ses armes, a tranché la représentante.  Pour elle, l’expulsion de plus de 130 agents russes par plus de 20 pays témoigne de la profonde préoccupation de la communauté internationale face au comportement de la Russie. 

« La Russie a une longue tradition d’assassinats d’État notamment au Royaume-Uni », a estimé la représentante qui a rappelé que les plus hautes autorités russes avaient averti que « les traitres » seraient « des cibles ».  La vérité de l’implication de la Russie dans l’affaire de Salisbury demeure, a-t-conclu, en prévenant que le Conseil de sécurité ne saurait être utilisé pour « hypothéquer la vérité ». 

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a rappelé que l’usage d’armes chimiques est « inacceptable » et constitue une grave violation du droit international.  Il a noté que 20 ans après l’entrée en vigueur de la Convention sur les armes chimiques, le respect des normes est de plus en plus sapé.  Il est de l’intérêt de tous, a-t-il prévenu, de tout mettre en œuvre pour maintenir l’usage d’armes chimiques dans la catégorie des tabous et préserver l’intégrité du régime pour la paix et la stabilité mondiales.  Le représentant a réitéré sa solidarité avec les deux victimes et avec le peuple et le Gouvernement du Royaume-Uni.  Il a espéré qu’une enquête indépendante sera menée et que la coopération prévue par la Convention sera de mise afin de traduire les auteurs en justice.  L’Éthiopie prend note du fait que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) a été saisie par le Gouvernement britannique et espère que le rapport de cette organisation spécialisée clarifiera les faits.  En attendant, M. Alemu a invité les parties impliquées à coopérer avec l’OIAC et à n’épargner aucun effort pour résoudre cette question selon les normes prévues par la Convention.  Le manque de confiance et la détérioration des relations entre les grandes puissances ne feront que contribuer à saper davantage l’ordre international établi, a-t-il dit craindre. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) est revenu sur les faits « choquants, graves et inacceptables ».  Le représentant a renouvelé le soutien « plein et entier et la totale solidarité » de la France au Royaume-Uni.  Alors que le laboratoire britannique de Porton Down a confirmé l’appartenance du gaz identifié à la famille des Novitchok, alors que le Royaume-Uni poursuit son enquête dans le plein respect de la Convention sur les armes chimiques, je tiens à redire toute la confiance de la France dans les travaux menés par les enquêteurs britanniques », a déclaré M. Delattre.

La France, a-t-il dit, se tient à la disposition du Royaume-Uni, s’il souhaite avoir recours à l’expertise française.  Je souhaiterais également saluer la décision du Directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) d’accéder à la demande britannique de dépêcher une mission d’assistance au Royaume-Uni.  L’enquête engagée doit être menée à son terme, en toute indépendance et sans aucune interférence.  Au vu des éléments que le Royaume-Uni a communiqués jusqu’ici, a poursuivi le représentant, « nous partageons son évaluation selon laquelle il n’y a pas d’autre explication plausible que la responsabilité de la Russie ».

La Russie prône la coopération et la France s’étonne donc du refus russe de répondre aux questions du Royaume-Uni.  Nous invitons la Russie à faire toute la lumière sur les responsabilités liées à l’inacceptable attaque de Salisbury et à déclarer à l’OIAC d’éventuels programmes qui ne l’auraient pas été, a ajouté le représentant pour qui l’interdiction des armes chimiques est au cœur du régime de non-prolifération « qui fonde notre système de sécurité collective ».  Dans ce contexte, la réémergence tous azimuts, au Moyen-Orient, en Asie, et désormais en Europe, de ces armes « barbares aux conséquences meurtrières » ne peut pas être tolérée.

La gravité des enjeux nous impose de nous engager, ensemble, pour rétablir l’interdiction absolue des armes chimiques et impose à chacun de coopérer, de se ressaisir et de s’affranchir des tentations, des jeux tactiques et politiques, qui ne sont pas à la hauteur des enjeux et des responsabilités d’un membre du Conseil de sécurité.  La France, a martelé le représentant, n’acceptera jamais de laisser dans l’impunité ceux qui utilisent ou développent des agents toxiques.  « Nous rappelons notre plein soutien aux institutions existantes, en particulier l’OIAC », a dit le représentant, promettant que la France restera pleinement engagée pour soutenir leur action et par tous les moyens à sa disposition.  C’est notamment l’objet du « Partenariat international contre l’impunité en cas d’utilisation d’armes chimiques » créé en janvier dernier.

M. WU HAITAO (Chine) a dit suivre de très près l’affaire de Salisbury et a rappelé que son pays avait dûment réaffirmé sa position devant le Conseil exécutif de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Il a noté que ce dernier n’a pu parvenir à une conclusion commune et que les parties n’ont pas pu s’entendre.  Pour la Chine, toute utilisation d’arme chimique est « inacceptable » et tout auteur d’une attaque doit être poursuivi.  La Chine réclame une enquête « impartiale et objective » afin de tirer des « conclusions irréfutables ».  Elle invite les parties concernées à coopérer et à éviter les mesures qui pourraient aggraver les tensions.  Alors que la communauté internationale est confrontée à de nombreux défis, toutes les parties devraient renoncer à la mentalité des confrontations et de la guerre froide au profit d’une coopération bénéfique pour tous, a conclu le représentant. 

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a rappelé que son pays a une réputation internationale bien connue comme farouche opposant aux armes de destruction massive, y compris les armes chimiques et les substances toxiques.  Le Kazakhstan condamne donc de manière « catégorique » toute utilisation d’armes de destruction massive qu’il juge « immorale, inhumaine et contraire aux principes de l’humanité ».  Le représentant a condamné l’incident de Salisbury et a dit espérer des éléments « factuels » confirmant l’usage d’agents chimiques et les individus impliqués, acteurs étatiques ou pas.  Il a appelé à une enquête approfondie, objective et impartiale, conforme aux normes du droit international et menée en vertu de la Convention sur les armes chimiques. 

Le représentant a dit aussi souhaiter la normalisation des relations, le rétablissement de la confiance entre les parties, la préservation de l’intégrité de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), la poursuite des efforts communs contre les menaces à la sécurité et l’abandon de la mentalité des « prétendus blocs ».  Il a enfin souhaité que cette question soit résolue dans les normes internationales et selon l’esprit et les principes de la Déclaration d’Astana de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur « la vision d’une communauté de sécurité euro-atlantique et eurasienne ».

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a dit partager l’opinion de la délégation britannique selon laquelle il est très probable que la Russie soit responsable de l’attaque de Salisbury.  « Il n’y a pas d’autre explication plausible », a-t-il admis.  Il a noté que le Royaume-Uni coopère avec l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) dans le cadre de son enquête policière et agit conformément à la Convention sur les armes chimiques.  Nous appelons la Russie à répondre aux questions du Royaume-Uni, a-t-il encouragé, avant de réclamer l’établissement des responsabilités dans chaque cas d’emploi d’armes chimiques. 

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) a rappelé que la position de son pays a été dûment présentée par les plus hautes autorités nationales dès le lendemain de l’attaque et que des mesures diplomatiques ont été prises pour confirmer la solidarité totale de la Pologne avec le Royaume-Uni.  Le représentant a vu dans l’incident de Salisbury « un autre exemple de la violation de la Convention sur les armes chimiques ».  Tout acte de ce type ne saurait rester impuni, a-t-il poursuivi, y voyant une menace à la sécurité de tous puisqu’il sape le régime international de désarmement. 

Le représentant a félicité le Gouvernement britannique pour la transparence dont il a fait preuve et de sa coopération avec l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Il a dit attendre avec intérêt les résultats de l’enquête indépendante de l’OIAC.  Il a en outre rappelé que le Conseil européen a pleinement appuyé la position du Royaume-Uni sur la « probabilité élevée » de l’implication de la Russie dans l’attaque, estimant, à son tour, qu’il n’y a pas d’autre explication plausible. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) s’est inquiété des menaces pesant sur le régime de non-prolifération et a dénoncé l’attaque de Salisbury.  Il a demandé une enquête et souligné le rôle de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), en tant qu’institution « neutre ».  Il a condamné l’emploi d’armes chimiques et rappelé que le Koweït est partie à la Convention sur les armes chimiques depuis 1997.

M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a rejeté de manière catégorique l’emploi d’agents chimiques comme arme, y voyant une grave menace à la paix et la sécurité internationales.  Le représentant a demandé une enquête impartiale, indépendante et « dépolitisée », dans le respect de la Convention sur les armes chimiques et a appelé à la coopération des parties concernées, « essentielle pour avancer ». 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a demandé une enquête indépendante et impartiale sur l’attaque de Salisbury.  Les conclusions de cette enquête devront être rendues publiques et les auteurs traduits en justice, a-t-il dit.  Il a appelé la Russie et le Royaume-Uni à assumer leurs responsabilités de membres permanents du Conseil et à régler leur différend de manière pacifique.  Le délégué a souhaité l’apaisement et rappelé l’opposition de son pays à la production et à l’emploi d’armes chimiques. 

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a apporté son soutien à la déclaration faite par la représentante du Royaume-Uni en insistant sur trois points.  En premier lieu, l’attaque de Salisbury est inacceptable et les Pays-Bas l’ont déjà condamnée fermement lors de la séance du 14 mars.  Ils sont pleinement solidaires du Royaume-Uni. 

En deuxième lieu, les Pays-Bas apportent leur plein soutien à l’enquête dirigée par le Royaume-Uni: les auteurs de ce crime odieux doivent être poursuivis en justice.  Les autorités britanniques travaillent en ce sens et ont reçu l’assistance technique de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), ce qui a été reconfirmé hier à l’occasion de la réunion du Conseil exécutif de l’Organisation, lors de laquelle son Directeur général a confirmé que le Royaume-Uni avait respecté les procédures prévues.  Il n’y a donc aucune raison pour que quiconque retarde, écarte, mette en cause ou tente de discréditer l’enquête en cours. 

Enfin, les Pays-Bas estiment comme le Royaume-Uni qu’il est « hautement probable » que la Fédération de Russie soit responsable de l’attaque et qu’il n’existe aucune autre explication plausible.  En conséquence, les Pays-Bas demandent à la Fédération de Russie de collaborer pleinement avec l’enquête, en fournissant à l’OIAC toutes ses informations sur le programme Novitchok.  Toute utilisation d’armes chimiques constitue une menace à la paix et la sécurité internationales que le Conseil de sécurité ne peut ignorer, a prévenu le représentant. 

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire) a réitéré la position de principe de sa délégation qui est celle de la condamnation de toute utilisation d’armes chimiques, quelle qu’en soit la forme, en temps de paix comme de guerre.  Le représentant a souligné qu’il était impérieux de faire toute la lumière sur l’utilisation d’agent chimique neurotoxique à Salisbury, en collaboration avec les organes compétents en la matière, notamment l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  À cet égard, le représentant a exhorté tous les États à fournir toutes les informations nécessaires à l’OIAC, en vue de situer les différentes responsabilités.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a condamné tout emploi d’armes chimiques, lequel constitue une menace à la paix internationale.  L’attaque de Salisbury doit faire l’objet d’une enquête dans le cadre de la Convention sur les armes chimiques, a-t-il dit, souhaitant que les résultats soient connus de tous. 

Reprenant la parole, M. NEBENZIA (Fédération de Russie) a regretté que l’on n’ait « rien appris » aujourd’hui.  Il faut avancer sur la voie de la vérité, a-t-il conseillé, en remerciant les Pays-Bas pour avoir invité son pays à coopérer avec le Royaume-Uni.  Mais, a-t-il fait observer, la coopération ne peut fonctionner de la manière dont l’a proposée le Royaume-Uni: on nous demande, « pourquoi avez-vous fait cela? », on répond « nous ne l’avons pas fait », on nous rétorque, « non, comment l’avez-vous fait?  Fournissez-nous des preuves - et reconnaissez que c’est vous! »  Personne ici ne se rend-il compte que c’est réellement le théâtre de l’absurde? s’est impatienté le représentant qui a, en conséquence, présenté au Conseil un exemplaire d’Alice au pays des merveilles et lu le passage du jugement en citant le grand lapin blanc.  M. Nebenzia a encore noté que la représentante du Royaume-Uni a annoncé sa volonté de diffuser les conclusions de l’enquête de l’OIAC.  Il a dit attendre ces conclusions avec impatience et espérer qu’elles seraient « plus concrètes que ce qui a été entendu aujourd’hui ». 

La représentante du Royaume-Uni a confirmé que sa délégation partagerait avec les membres du Conseil toutes les informations sur l’enquête. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité demande au Gouvernement burundais de s’engager en faveur du dialogue politique et de protéger les droits de l’homme

8223e séance – après-midi
CS/13278

Le Conseil de sécurité demande au Gouvernement burundais de s’engager en faveur du dialogue politique et de protéger les droits de l’homme

« Profondément préoccupé » par la lenteur du dialogue interburundais et « l’immobilisme » du Gouvernement, le Conseil de sécurité a, dans une déclaration présidentielle adoptée cet après-midi, exhorté ce dernier à s’engager afin d’aboutir à un accord avant les élections de 2020.

Le dialogue est le seul processus viable en vue d’un règlement politique durable au Burundi, insiste le Conseil.  Il exprime par ailleurs l’espoir que les élections de 2020 seront « libres, régulières, transparentes, pacifiques et pleinement ouvertes à tous ».

Dans cette déclaration, le Conseil condamne « fermement » les violations des droits de l’homme commises dans le pays, y compris les exécutions extrajudiciaires, les actes de torture et les « actes de harcèlement et d’intimidation » visant la société civile et les journalistes.

Il exhorte le Gouvernement burundais à protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales, « conformément à la Constitution du pays et à ses obligations internationales ».  Tous les responsables de violations, « y compris les membres des forces de sécurité et de partis politiques », doivent être traduits en justice, demande le Conseil. 

Par ailleurs, il exhorte le Gouvernement à renouer les liens avec les partenaires internationaux, en particulier l’ONU, « d’une manière constructive et dans un esprit de confiance mutuelle ».  Le Conseil regrette en particulier que le Gouvernement ait suspendu toute coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

Le Gouvernement s’était pourtant engagé devant le Conseil des droits de l’homme à rétablir la pleine coopération mutuelle avec ledit Haut-Commissariat et à accepter la visite d’une équipe de trois experts en vue de collecter des informations sur la situation des droits de l’homme.

Le Haut-Commissariat et le Gouvernement doivent dialoguer afin de trouver « rapidement » une solution permettant au premier de reprendre pleinement ses activités, notamment de surveillance et de communication de l’information, insiste le Conseil dans sa déclaration.

Enfin, constatant la suspension de l’aide par un certain nombre de partenaires, le Conseil appelle le Gouvernement à créer des « conditions propices à la reprise de l’assistance » afin de faire face à la dégradation « persistante » de la situation humanitaire.  Le Burundi compte près de 180 000 personnes déplacées et 3,6 millions de personnes dans le besoin.

LA SITUATION AU BURUNDI

Déclaration du Président du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité demeure profondément préoccupé par la situation politique au Burundi, la lenteur des progrès dans le dialogue interburundais engagé sous les auspices de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et l’immobilisme du Gouvernement burundais à cet égard.  Il rappelle sa déclaration S/PRST/2017/13.

Le Conseil salue et appuie l’engagement qu’ont de nouveau pris l’Union africaine et la CAE, lors du 30e Sommet de l’Union africaine et du 19e Sommet de la CAE, de trouver une solution pacifique à la situation politique au Burundi grâce à un dialogue ouvert à tous, sur la base de l’Accord d’Arusha du 28 août 2000 et de la Constitution du Burundi, et réaffirme son appui à la facilitation dirigée par l’ancien Président B. Mkapa, sous la médiation du Président Museveni.  Il demeure profondément préoccupé par la lenteur des progrès réalisés dans le cadre de ce dialogue et demande à toutes les parties prenantes burundaises de prendre part activement et sans conditions au processus.  Il est crucial que toutes les parties, et plus particulièrement le Gouvernement, s’engagent en faveur du processus mené sous les auspices de la CEA et parviennent à un accord avant les élections qui se tiendront en 2020.  Le Conseil souligne en outre que le dialogue est le seul processus viable en vue d’un règlement politique durable au Burundi.

Le Conseil souligne qu’il importe au plus haut point de respecter, dans la lettre et dans l’esprit, l’Accord d’Arusha, qui a aidé le Burundi à connaître une décennie de paix, et s’inquiète de ce que la situation qui règne au Burundi porte gravement atteinte aux progrès notables réalisés grâce à l’Accord d’Arusha, ce qui a des conséquences désastreuses au Burundi et dans la région.  Il exhorte les garants de l’Accord à s’acquitter de leurs obligations à cet égard, pour s’assurer du respect de l’Accord dans son intégralité.

Le Conseil demande à l’Organisation des Nations Unies, à l’Union africaine, à la CAE, à la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs et aux garants de l’Accord d’Arusha de coordonner leurs efforts pour aider les parties prenantes burundaises à régler les questions en suspens dans l’application de l’Accord d’Arusha.  Il note avec appréciation que l’Union africaine s’est dite prête à dépêcher au Burundi son Comité de haut niveau des chefs d’État.

Le Conseil réaffirme qu’il est fermement attaché à la souveraineté, à l’indépendance politique, à l’intégrité territoriale et à l’unité du Burundi.  Il souligne qu’il importe d’appliquer l’Accord d’Arusha, demande aux autorités burundaises de prendre toutes les initiatives politiques en se fondant sur un large consensus de toutes les parties prenantes, lequel requiert des conditions politiques et de sécurité qui inspirent confiance à tous les acteurs politiques et, à cet égard, appuie avec force la décision que l’Union africaine a prise à son 30e Sommet.  Il affirme que toutes ces conditions sont un préalable aux initiatives politiques prévues.

Le Conseil demande aux États de la région de contribuer à trouver une solution politique à la situation qui règne au Burundi, de s’abstenir de toute ingérence, notamment de n’appuyer les activités des mouvements armés d’aucune manière, et de respecter les obligations que leur impose le droit international, et rappelle à cet égard les engagements qu’ils ont pris dans l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région et la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.

Le Conseil exprime l’espoir que les élections prévues pour 2020 au Burundi seront libres, régulières, transparentes, pacifiques et pleinement ouvertes à tous, avec la participation de tous les partis politiques et une participation pleine et égale des femmes à l’ensemble du processus.  Il souligne également que pour permettre la tenue d’élections crédibles, il faudra pouvoir compter sur des améliorations considérables de la situation politique et de la situation des droits de l’homme, en particulier pour ce qui est des libertés fondamentales, notamment la liberté de la presse et la liberté des acteurs de la société civile, comme les défenseurs des droits de l’homme, ainsi que sur des progrès dans la réconciliation.

Le Conseil exprime sa vive préoccupation face à la dégradation persistante de la situation humanitaire, avec près de 180 000 personnes déplacées, 3,6 millions de personnes dans le besoin et plus de 429 000 Burundais cherchant refuge dans les pays voisins, salue les pays hôtes pour leurs efforts et demande aux gouvernements de la région de s’assurer que la décision de retour est volontaire et prise en connaissance de cause et que le retour se fait dans la sécurité et dans la dignité.

Le Conseil constate qu’un certain nombre de partenaires bilatéraux et multilatéraux ont suspendu leur aide financière et technique au Gouvernement burundais, compte tenu de la situation au Burundi, et encourage les partenaires bilatéraux et multilatéraux et le Gouvernement burundais à poursuivre leur dialogue afin que le Gouvernement burundais crée des conditions propices à la reprise de l’assistance.  Il se félicite que l’aide apportée par les partenaires bilatéraux et multilatéraux améliore la situation humanitaire et demande aux État Membres de continuer d’aider à répondre aux besoins humanitaires dans le pays.

Le Conseil condamne fermement toutes les violations des droits de l’homme ou atteintes à ces droits perpétrées au Burundi, quels qu’en soient les auteurs, y compris les exécutions extrajudiciaires, les violences sexuelles, les arrestations et détentions arbitraires, y compris celles qui touchent des enfants, les disparitions forcées, les actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, les actes de harcèlement et d’intimidation commis contre les organisations de la société civile et les journalistes et la restriction des libertés fondamentales, ainsi que le recours aveugle aux attaques à la grenade, particulièrement contre des civils.

Le Conseil réaffirme que c’est au Gouvernement burundais qu’il incombe au premier chef d’assurer la sécurité sur son territoire et de protéger sa population, dans le respect de l’état de droit, des droits de l’homme et du droit international humanitaire, selon qu’il convient.  Il exhorte le Gouvernement burundais à respecter, protéger et garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, conformément à la Constitution du pays et à ses obligations internationales, à adhérer à l’état de droit, à traduire en justice et à faire répondre de leurs actes tous les responsables de violations du droit international humanitaire ou de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits, selon qu’il convient, notamment les violences sexuelles et toutes les violations et atteintes commises contre des enfants, y compris les membres des forces de sécurité et de partis politiques.

Le Conseil note les mesures prises par le Gouvernement burundais pour lever les interdictions visant certaines organisations de la société civile, annuler des mandats d’arrêt et libérer un certain nombre de détenus comme suite à la grâce présidentielle du 31 décembre 2017.  Il exhorte le Gouvernement burundais à prendre d’autres mesures pour protéger et garantir les droits de l’homme et les libertés fondamentales pour tous, et assurer leur respect, conformément à la Constitution du pays et à ses obligations internationales.

Le Conseil regrette à nouveau que le Gouvernement burundais ait suspendu toute coopération et toute collaboration avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, présent dans le pays depuis 1995 pour renforcer les institutions qui œuvrent en faveur de l’état de droit au Burundi, et demande au Haut-Commissariat et au Gouvernement de dialoguer afin de trouver rapidement une solution permettant au Haut-Commissariat de reprendre pleinement ses activités, notamment de surveillance et de communication de l’information, et de s’acquitter de son mandat.  Il rappelle que le Gouvernement burundais s’est engagé à la 36e session du Conseil des droits de l’homme à rétablir la pleine coopération mutuelle avec le Conseil des droits de l’homme et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, notamment la pleine coopération avec le Bureau du Haut-Commissariat à Bujumbura, et à accepter la visite d’une équipe de trois experts du Haut-Commissariat chargée de collecter des informations sur la situation des droits de l’homme au Burundi.  Il note que les échanges à propos des révisions à apporter au projet de mémorandum d’accord entre la République du Burundi et l’Organisation des Nations Unies concernant l’actualisation du mandat du Bureau du Haut-Commissariat au Burundi se poursuivent depuis plus d’un an et exhorte le Gouvernement burundais à finaliser l’accord avec le Haut-Commissariat sans plus tarder.

Le Conseil se déclare de nouveau préoccupé par les retards importants pris dans le déploiement des observateurs des droits de l’homme et des experts militaires de l’Union africaine.  Il appuie la demande de l’Union africaine tendant à ce que le mémorandum d’accord concernant les activités de ses observateurs des droits de l’homme et experts militaires soit rapidement signé, ce qui leur permettra de mener pleinement dans le pays les tâches prévues dans leur mandat.

Le Conseil salue la contribution des soldats de la paix burundais servant dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et celles dirigées par l’Union africaine, et souligne à nouveau qu’il importe de respecter les normes de l’Organisation des Nations Unies.

Le Conseil exhorte le Gouvernement burundais à renouer les liens avec les partenaires internationaux, en particulier l’Organisation des Nations Unies, d’une manière constructive et dans un esprit de confiance mutuelle.  Il renouvelle son plein appui au Secrétaire général et à son Envoyé spécial dans les efforts qu’ils déploient pour engager le dialogue et collaborer avec le Gouvernement burundais pour aider à sortir de l’impasse politique actuelle et favoriser un processus de réconciliation ouvert à tous.  Il prie par ailleurs le Secrétaire général et le Gouvernement burundais de parachever et d’appliquer l’Accord sur le statut de la mission pour le Bureau de l’Envoyé spécial, de façon à œuvrer avec le Gouvernement burundais et les autres parties prenantes concernées en faveur du dialogue interburundais tenu sous les auspices de la Communauté d’Afrique de l’Est dans les domaines de la sécurité et de l’état de droit, à dialoguer avec toutes les parties prenantes à la crise et à œuvrer avec toutes les parties burundaises à l’élaboration de mesures de confiance, en vue d’améliorer la situation des droits de l’homme et les conditions de sécurité et d’instaurer un climat propice au dialogue politique.  Il se félicite de la participation active de la formation Burundi de la Commission de consolidation de la paix, qui sert de plateforme viable pour le dialogue entre le Burundi et ses partenaires, en suivant une approche globale pour régler la situation politique et socioéconomique.

Le Conseil est déterminé à continuer de suivre de près la situation au Burundi.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale suit les recommandations de sa Commission budgétaire et bloque, à son tour, l’accès de la première classe au personnel de l’ONU

Soixante-douzième session,
81e séance plénière – après-midi
AG/12007

L’Assemblée générale suit les recommandations de sa Commission budgétaire et bloque, à son tour, l’accès de la première classe au personnel de l’ONU

L’Assemblée générale a adopté, aujourd’hui, sans vote, les sept projets de résolution soumis par sa Cinquième Commission* chargée des questions administratives et budgétaires et confirmé la décision « de ne plus autoriser les fonctionnaires des Nations Unies à voyager en première classe.  L’Assemblée a aussi confirmé la tenue, au mois de septembre, de la réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose.

À partir d’aujourd’hui pour le personnel de l’ONU, l’accès de la première classe** est bloqué et le Secrétaire général est prié d’inciter les fonctionnaires à voyager à titre volontaire en classe économie et premium économie plutôt qu’en classe affaires chaque fois que possible.  Il doit aussi présenter des recommandations sur l’application du « seuil unique » qui permettrait de déterminer quand les fonctionnaires de rang inférieur à celui de sous-Secrétaire général sont autorisés à voyager en classes affaires. 

Pour ceux qui n’ont pas le statut de fonctionnaire mais sont autorisés à voyager en première classe, l’Assemblée les invite à opter à titre volontaire pour la classe immédiatement inférieure, à l’exception des pays les moins avancés (PMA) et des membres des organes et organes subsidiaires, comités, conseils et commissions de l’ONU.

Informée par sa Cinquième Commission que l’organisation de la réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose***, le deuxième jour du débat général de sa prochaine session, coûtera la somme de 59 700 dollars, l’Assemblée a confirmé la réunion, étant entendu que les frais seront ponctionnés sur les budgets des Départements des affaires de l’Assemblée générale et des services de conférence (DAAGSC) et de l’information (DPI).

L'Assemblée a souscrit aux conclusions du Comité consultatif sur les questions administratives et budgétaires (CCQAB) sur la construction d’un nouveau bâtiment pour la division d’Arusha**** du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda.  L’Assemblée avait fixé un budget total de 8 787 733 dollars, dont 7 737 362 dollars pour l’exécution du projet et 1 050 371 dollars pour les imprévus.  Le CCQAB lui conseille de demander au Secrétaire général de lui présenter un rapport sur le budget final*****; les coûts directs et indirects liés aux malfaçons et aux retards; et la somme finale imputée sur la réserve pour imprévus.

En revanche, l’Assemblée générale a reporté à la deuxième partie de sa reprise de session sa décision sur le taux de remboursement aux pays fournisseurs de contingents et de personnel de police.  Pour l’utilisation du fonds de réserve******, c’est carrément à la session prochaine que l’Assemblée générale a reporté sa décision.  Quant au projet de restructuration******* de la présence régionale du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, la décision est reportée à 2019.

Enfin, l’Assemblée se félicite que le Corps commun d’inspection (CCI), le Comité des commissaires aux comptes (CCC) et le Bureau des services de contrôle interne du Secrétariat (BSCI) coordonnent leurs activités******** et les engage à continuer de mettre en commun leurs données d’expérience, leurs connaissances, leurs pratiques de référence et les enseignements qu’ils tirent de leur expérience avec les autres organes d’audit et de contrôle des Nations Unies, ainsi qu’avec le Comité consultatif indépendant pour les questions d’audit, en vue d’éviter les chevauchements d’activités et les doubles emplois et de renforcer les effets de synergie, la coopération, l’efficacité et l’efficience, sans préjudice des mandats respectifs des organes d’audit et de contrôle.

L’Assemblée engage les chefs de secrétariat des organisations à suivre les recommandations du CCCI et à examiner les éventuelles possibilités d’améliorer la coordination de leurs activités.  Les organes délibérants de ces organisations doivent aussi examiner à fond les recommandations du CCI les concernant, à en débattre et à y donner sans tarder une suite concrète.

La prochaine réunion de l’Assemblée générale sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.

*Voir communiqué de presse AG/AB/4275

**A/72/681/Add.1

*** A/72/811

****A/C.5/72/L.25

***** A/72/669/Add.1

******A/72/682/Add.1

*******A/72/681/Add.1

********A/72/810

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Appels à l’unité du Conseil de sécurité pour créer un nouveau mécanisme d’établissement des responsabilités dans l’emploi d’armes chimiques en Syrie

CS/13276

Appels à l’unité du Conseil de sécurité pour créer un nouveau mécanisme d’établissement des responsabilités dans l’emploi d’armes chimiques en Syrie

Un an, jour pour jour, après l’attaque au gaz sarin perpétrée à Khan Cheikhoun, dont la responsabilité a été imputée au Gouvernement syrien par le Mécanisme d’enquête conjoint de l’ONU et de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), l’Adjoint de la Haute Représentante aux affaires de désarmement, M. Thomas Markram, a exhorté, ce matin, le Conseil de sécurité à s’unir pour créer une nouvelle structure d’établissement des responsabilités.  Le 16 novembre dernier, le Conseil n’était pas parvenu à renouveler le mandat du Mécanisme.

Comme un projet de résolution des États-Unis est sur la table, le délégué de la Fédération de Russie a accusé les pays occidentaux de vouloir créer une nouvelle structure présentant les mêmes défauts que le Mécanisme d’enquête conjoint, dont le travail, selon lui, ne pouvait pas être pris « au sérieux ».

Le représentant russe a parlé après que l’Adjoint de la Haute Représentante aux affaires de désarmement a fait le point sur la mise en œuvre de la résolution 2118 (2013) relative à l’élimination du programme d’armes chimiques de la Syrie*.  M. Thomas Markram a tout d’abord mentionné les efforts syriens pour détruire les deux usines restantes d’armes chimiques.  Leur destruction, que l’OIAC vérifiera, doit s’achever dans un délai de deux ou trois mois, a-t-il annoncé.

M. Markram a néanmoins déclaré que la déclaration initiale que la Syrie a faite ne peut être considérée comme « exacte et complète ».  L’Adjoint de la Haute Représentante a indiqué que la Mission d’établissement des faits de l’OIAC, dont une équipe séjourne actuellement à Damas, remettra son prochain rapport dès qu’elle aura recueilli suffisamment d’informations sur les allégations d’emploi d’armes chimiques.  Cette Mission n’est néanmoins pas en mesure d’identifier les responsables, puisque cette tâche incombait au Mécanisme d’enquête conjoint, a-t-il rappelé.

M. Markram a en effet déploré le « ralentissement apparent » des efforts –voire leur arrêt complet– pour établir les responsabilités, alors que les allégations d’emploi d’armes chimiques en Syrie n’ont pas cessé.  Il a exhorté le Conseil à s’unir, comme il avait su le faire en adoptant la résolution 2118 (2013), pour créer un mécanisme adéquat.  « Il ne saurait y avoir d’impunité », a conclu l’Adjoint.

Cet appel a été relayé par la plupart des délégations, le représentant de l’Éthiopie exhortant le Conseil à remédier au « vide institutionnel » actuel.  Accusant le Conseil de perdre de vue l’aspect humain des attaques chimiques, la déléguée des États-Unis a rendu un hommage appuyé à l’action d’un médecin syrien, le docteur Mourad qui s’est levé à l’énonciation de son nom.  Du fait de l’inaction du Conseil, le régime syrien, « avec l’appui d’un membre permanent du Conseil de sécurité », utilise ces armes « pratiquement une fois toutes les deux semaines », a dénoncé la représentante américaine.

Son homologue des Pays-Bas, qui a vanté le « travail méticuleux » du Mécanisme d’enquête conjoint, a demandé un nouveau mécanisme qui déciderait, de manière indépendante, de la façon dont il veut mener ses enquêtes et opérerait « indépendamment » du Conseil, y compris pour l’établissement des responsabilités.  « Le Conseil devrait s’unir autour du projet de résolution des États-Unis », a-t-il déclaré, appuyé par le représentant du Koweït.

Rappelant que son pays n’avait pas pu soutenir le renouvellement du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint, en raison du caractère « fallacieux » de ses enquêtes, le délégué de la Fédération de Russie a affirmé qu’il n’était pas opposé à la création d’une structure indépendante.  Il a attiré l’attention sur son propre projet de résolution et précisé que toute nouvelle structure devrait rassembler des experts compétents, issus de toutes les régions du monde et que sa direction serait assumée par les cinq membres permanents du Conseil, qui prendraient leur décision par consensus.  Sur la base d’une enquête rigoureuse, le Conseil déciderait alors de l’établissement des responsabilités.  Malheureusement, a déploré le représentant, « mes collègues occidentaux veulent un mécanisme à leur convenance ».

Le délégué de la Syrie, qui a assuré que son pays s’est dûment acquitté de ses engagements en vertu de la résolution 2118 (2013), a dénoncé « l’art de la désinformation et de la tromperie » des États-Unis, du Royaume-Uni et de la France qui ont mis en scène, la « pièce de Khan Cheikhoun » pour ternir la réputation du Gouvernement syrien.

Les délégations des trois pays incriminés sont revenues sur l’attaque commise à Salisbury, au Royaume-Uni, le 4 mars 2018, avec un « gaz russe », a confirmé la représentante britannique.  Son homologue de la Fédération de Russie a demandé la convocation demain à 15 heures d’une séance publique du Conseil de sécurité sur ce sujet.

*S/2018/823

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

 

Lettre du 28 mars 2018, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général (S/2018/283)

 

Déclarations

M. THOMAS MARKRAM, Directeur et Adjoint de la Haute Représentante aux affaires de désarmement, a fait le point sur la mise en œuvre de la résolution 2118 (2013) relative à l’élimination du programme d’armes chimiques de la Syrie, alors qu’il y a un an, jour pour jour, de telles armes, en l’occurrence du gaz sarin, étaient utilisées à Khan Cheikhoun.  Le Secrétaire général avait alors parlé d’atrocités, a rappelé M. Markram.  Le Directeur a mentionné les efforts de la Syrie pour détruire les deux installations restantes de fabrication d’armes chimiques.  Leur destruction que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) vérifiera, doit s’achever dans un délai de deux ou trois mois à compter de son début.  Le Directeur a ajouté que la destruction effective de ces deux installations est un pas essentiel dans la pleine mise en œuvre de la résolution 2118.

M. Markram a souligné que les discussions entre l’OIAC et la Syrie n’ont pas permis de régler toutes les questions en suspens.  « L’OIAC n’est toujours pas en mesure d’affirmer que la Syrie a fait une déclaration qui peut être considérée comme exacte et complète », a-t-il dit, en rappelant que le Secrétaire général a demandé une coopération accrue de la part de la Syrie.  Il a ensuite précisé que la Mission d’établissement des faits de l’OIAC continue son travail, une équipe séjournant actuellement à Damas pour faire la lumière sur les allégations d’emploi d’armes chimiques portées à l’attention du Directeur général de l’OIAC par le Gouvernement syrien.  Le prochain rapport de la Mission sera soumis dès lors que suffisamment d’informations auront été collectées pour aboutir à une conclusion tangible.

Le Directeur a rappelé que les conclusions de la Mission ne détermineront pas les responsables car c’est une tâche qui incombait au Mécanisme d’enquête conjoint ONU-OIAC dont le mandat n’a malheureusement pas été renouvelé.  M. Markram a ainsi déploré le ralentissement apparent des efforts –voire leur arrêt complet– pour établir les responsabilités, alors que les allégations d’emploi d’armes chimiques n’ont pas cessé.

La persistance des allégations souligne la nécessité de parvenir à un accord sur un mécanisme adéquat d’établissement des responsabilités, a-t-il insisté, ajoutant que les responsables doivent être traduits en justice.  Il ne saurait y avoir d’impunité, a martelé M. Markram, pour qui, l’unité du Conseil, telle qu’on l’a vue lors de l’adoption de la résolution 2118 (2013), est un gage de succès. 

Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a constaté que parfois le Conseil de sécurité perd de vue l’aspect humain des attaques chimiques.  Elle a donc raconté deux histoires, celle d’un militaire américains gazé en France en 1917, et celle d’un médecin syrien, le docteur Mourad, un siècle plus tard à Khan Cheikhoun, lors d’une attaque chimique qui a fait près de 100 morts et 500 blessés.  Après la toute première utilisation d’armes chimiques, pendant la Première Guerre mondiale, les États ont décidé de bannir ces armes, de manière absolue.  On pouvait donc espérer, s’est désolée la représentante, que ces armes ne seraient plus mentionnées que dans les livres d’histoire et les musées.

Mais, le « régime d’Assad » est arrivé et le monde a découvert avec horreur, en 2013, l’emploi d’armes chimiques contre une population, la propre population du « régime d’Assad ».  La représentante a fait l’historique des réactions de la communauté internationale et des mesures prises depuis lors, pour constater que, malgré les espoirs, le régime syrien poursuit ses agissements « avec l’appui d’un membre permanent du Conseil de sécurité », qui a fait voler en éclat le consensus et, avec lui, le Mécanisme d'enquête conjoint OIAC-ONU.  

Il y a quelques années encore, une seule attaque aux armes chimiques nous aurait fait réagir, a souligné Mme Haley.  Mais aujourd’hui, du fait de l’inaction du Conseil de sécurité et de la communauté internationale, « un régime utilise ces armes pratiquement une fois toutes les deux semaines » et il fait des émules.  Mme Haley a cité l’attaque de Salisbury, au Royaume-Uni, mais aussi l’utilisation d’armes chimiques en Malaisie.  Elle a dit voir le spectre d’un retour en arrière « vers un monde que nous pensions avoir quitté, un monde dans lequel un gaz sans odeur, sans couleur, peut s’insinuer jusque dans nos maisons et nous étouffer.  Si nous n’agissons pas et si nous ne changeons pas de cap, « voici le monde qui sera bientôt le nôtre », a averti Mme Haley.

Elle a rappelé que l’Assemblée générale avait elle aussi adopté une résolution sur la création du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables.  Les États-Unis, a-t-elle poursuivi, appuient en outre l’initiative de la France de créer le Partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques.  Mme Haley a rendu un hommage appuyé à l’action du docteur Mourad, présent dans la salle, affirmant qu’il doit être « une source d’inspiration » pour le Conseil.  Le docteur Mourad ne renonce jamais, ne s’arrête jamais, a affirmé Mme Haley, qui a exhorté le Conseil à ne pas s’arrêter lui non plus de lutter pour l’éradication des armes chimiques. 

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a rappelé que l’OIAC n’est toujours pas en mesure d’affirmer que la Syrie a fait une déclaration qui peut être considérée comme exacte et complète.  Il a en conséquence exhorté la Syrie à coopérer avec l’OIAC, avant de rappeler l’attaque atroce commise à Khan Cheikhoun le 4 avril 2017 par le « régime d’Assad ».  Il a aussi rappelé que le rapport du Mécanisme d’enquête conjoint avait déjà pointé le doigt sur la responsabilité de Daech dans les attaques au gaz moutarde commises à Oum Housh, les 15 et 16 septembre 2016.  « L’emploi d’armes chimiques ne doit pas rester impuni », a tonné le représentant qui a déploré, une nouvelle fois, que le mandat du Mécanisme d’enquête conjoint n’ait pas été renouvelé à cause « des calculs politiques ».  Comme « ça ne peut être la fin de l’histoire », le représentant a appelé à l’action sur la base des conclusions du Mécanisme d’enquête conjoint et de la Mission d’établissement des faits de l’OIAC.  Le renvoi de la situation en Syrie à la Cour pénale internationale (CPI) est le moyen le plus adéquat pour rendre justice, a-t-il martelé.

Le représentant a demandé la création d’un mécanisme qui pourrait poursuivre le « travail méticuleux » du Mécanisme d’enquête conjoint, un mécanisme qui déciderait, de manière indépendante, de la façon dont il veut mener ses enquêtes, identifierait les responsables parmi toutes les parties au conflit et opérerait indépendamment du Conseil, y compris pour l’établissement des responsabilités.  Le représentant a donc a exhorté le Conseil à s’unir autour du projet de résolution des États-Unis.

Nous devons envisager tous les instruments en dehors de ce Conseil pour promouvoir l’établissement des responsabilités dans l’emploi des armes chimiques, a ajouté le représentant dont le pays est prêt à jouer un rôle de chef de file.  Il a apporté son soutien au « Partenariat international contre l’impunité en cas d'utilisation d’armes chimiques » car s’agissant de ces armes, le Conseil ne peut s’arrêter au milieu du gué.  « L’impunité ne saurait gagner. »

Mme Karen PIERCE (Royaume-Uni) a salué la présence du docteur Mourad aujourd’hui, avant de rappeler que l’on a déjà conclu à la responsabilité du « régime d’Assad » dans l’attaque de Khan Cheikoun.  Malgré les promesses que la Syrie et la Russie ont faites en 2013, de nombreux autres emplois d’armes chimiques ont eu lieu.  La représentante a donc douté de la destruction effective des armes chimiques par la Syrie, estimant que ce pays n’avait pas déclaré toutes ses armes.  Elle a relevé des lacunes et des incohérences dans les déclarations syriennes, prévenant qu’on ne saurait tolérer l’impunité.  La représentant a rappelé que c’est la Russie qui, en novembre dernier, avait empêché le renouvèlement du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU.  Ce n’est pas seulement en Syrie que la Russie fait preuve d’un tel dédain, a accusé Mme Pierce, qui est revenue sur l’attaque de Salisbury commise avec un « gaz russe ».  Nous ne pouvons nous permettre d’échouer dans la lutte contre les armes chimiques, que ce soit en Syrie, au Royaume-Uni ou dans n’importe quel endroit dans le monde, a-t-elle conclu.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) s’est réjoui que durant la période considérée, des progrès aient été enregistrés dans la destruction des deux usines de production d’armes chimiques restantes.  Le représentant a appelé l’OIAC, le Gouvernement syrien et le Bureau des Nations Unies pour les services d’appui aux projets (UNOPS) à intensifier leurs efforts aussi longtemps que les circonstances resteront favorables.  Le représentant s’est dit préoccupé par le fait que les questions en suspens n’aient pu être clarifiées, s’agissant de la déclaration initiale de la République arabe syrienne.  Il a exhorté le Gouvernement syrien et l’OIAC à coopérer plus étroitement et à multiplier les interactions afin de corriger les lacunes et les incohérences et les contradictions.  Ils pourraient demander au Conseil, a suggéré le représentant, des propositions pratiques sur la manière d’intensifier leur coopération.  Ils devraient montrer les obstacles concrets qui les empêchent d’obtenir des résultats. 

Le représentant a souligné que le Conseil n’a pas encore rétabli son « potentiel d’investigation ».  Il a espéré que les deux porte-plumes n’épargneront aucun effort pour trouver un terrain commun et avancer.  Le facteur le plus perturbant, a poursuivi le représentant, est la poursuite des allégations sur l’emploi d’armes chimiques.  Il faut des mesures proactives qui établissent clairement que l’emploi de ces armes compromet tous les efforts internationaux visant à trouver une solution globale à la crise politique et militaire en Syrie, a-t-il dit.  En l’occurrence, les actions militaires unilatérales, qui iraient au-delà des décisions légitimes du Conseil, « ne sont pas une option », a martelé le représentant.  Il est « extrêmement » important et nécessaire de surmonter les divergences au sein du Conseil et tout aussi vital de lever tous les obstacles à la conduite d’une enquête impartiale et indépendante pour identifier ceux qui utilisent des armes chimiques en Syrie. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a rappelé, à son tour, que la réunion d’aujourd’hui coïncide, jour pour jour, avec l’attaque survenue à Khan Cheikhoun, au cours de laquelle au moins 80 personnes ont perdu la vie.  Un an plus tard, le déchaînement de violence se poursuit en Syrie et le régime syrien n’a pas cessé de recourir à des armes chimiques, a accusé le représentant.  La responsabilité du régime syrien a été établie publiquement et sans ambiguïté.  Aucune tentative pour discréditer et faire oublier les conclusions des mécanismes créés pour établir les responsabilités, ne pourra changer cette réalité: le travail du Mécanisme d'enquête conjoint OIAC-ONU ne sera pas oublié.

À ceux qui s’emploient à réfuter la responsabilité du régime syrien, je rappelle, a poursuivi M. Delattre, qu’il n’est pas possible à ce jour de confirmer que la Syrie a déclaré l’intégralité de ses stocks et capacités en 2013.  L’utilisation continue d’armes chimiques en Syrie est une indication incontestable que des stocks de sarin, de chlore existent.  Devant ces éléments, soit la Syrie a menti au moment de souscrire à ses obligations, soit elle a poursuivi un programme clandestin, en violation de ses obligations.  On ne peut donc ici que renouveler notre appel au régime syrien à répondre à toutes les interrogations restées sans explications et qui sont nombreuses.

Le représentant a ajouté que l’impunité de ceux qui ont contribué à la réémergence de ces armes brise le tabou de leur utilisation et contribue à leur prolifération.  L’emploi sur le territoire britannique d’un agent neurotoxique de qualité militaire, il y a tout juste un mois, confirme toute la justesse de nos inquiétudes.  Dans ce contexte, l’impunité ne peut devenir la règle, en Syrie comme ailleurs.  Il ne peut y avoir d’impunité pour les responsables de l’utilisation d’armes chimiques contre les civils.  Ils auront à répondre de leurs actes. 

La question de l’établissement des responsabilités ne peut donc être éludée.  D’ores et déjà des preuves sont collectées en particulier par le Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie, créé par l'Assemblée générale.  Ces preuves sont conservées et utilisées pour servir dans le cadre de procédures judiciaires nationales voire internationales car il n’y aura pas de paix durable en Syrie sans justice pour les victimes syriennes.  La justice devra être une dimension à part entière de toute solution politique, conformément à la résolution 2254 (2015) et au Communiqué de Genève.  « Je le redis aujourd’hui: alors que les pays du processus d’Astana se réunissent en Turquie, Genève est la seule enceinte permettant d’obtenir une solution durable au conflit », a martelé le représentant français.

Les risques d’érosion du régime de non-prolifération sont majeurs si nous laissons prévaloir l’impunité.  C’est pour cela que la France a lancé en janvier dernier un partenariat ouvert et pragmatique en ce sens: non pas pour rentrer dans des enjeux tactiques que l’on pourrait vouloir nous imputer mais parce que la conviction de la France, c’est que l’immensité des enjeux nous oblige à surmonter les blocages et à agir, et non à abdiquer nos responsabilités.

Au-delà des différences politiques contingentes, il est des règles fondamentales qui ne peuvent être transgressées.  Il n’y a donc de place ni pour le constat d’impuissance, ni pour le fatalisme, ni pour l’instrumentalisation politique.  Il en va de notre crédibilité future et de notre capacité à préserver les futures générations face aux risques d’érosion du régime de prolifération et de notre système de sécurité.  

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a rappelé que depuis l’incident de Kahn Cheikhoun, son pays demande qu’une enquête internationale soit immédiatement menée, de manière indépendante et neutre.  Le Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU a pu arriver à des conclusions sur l’identité des responsables de cet incident douloureux et d'autres incidents.  Toutefois, le Conseil de sécurité a été incapable de faire rendre des comptes à quiconque, de sorte que la justice que nous espérions a disparu, du fait de la division du Conseil qui a conduit à l’arrêt du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint.  Le Koweït appuie pleinement les travaux des Nations Unies, de l’OIAC et de sa Mission d’établissement des faits.  Le représentant a appelé la Syrie à coopérer avec l’OIAC pour corriger les contradictions sur son programme d’armes chimiques.  Nous ne pouvons, a-t-il prévenu, accepter la situation actuelle, à savoir l’utilisation continue des armes chimiques, plus de quatre ans après l’adoption de la résolution 2118 (2013). 

Plus d’une fois, a rappelé le représentant, le Koweït a exprimé son plein appui à des mécanismes d’établissement des responsabilités qui remporteraient l’adhésion de tous les membres du Conseil, de manière à assurer l’indépendance, la neutralité et le professionnalisme et dont le mandat serait exclusivement de dire qui est responsable de l’utilisation des armes chimiques en Syrie.  Le Conseil pourrait alors faire rendre des comptes aux responsables, conformément au principe zéro impunité consacré dans la résolution 2118.  Je crois, a estimé le représentant, que ces éléments sont présents dans le projet de résolution des États-Unis.  Il a donc appelé tous les membres du Conseil à considérer ce texte comme une bonne base de négociations sur un mécanisme futur.  Il n’a pas manqué de saluer les efforts de l’Assemblée et le Mécanisme international qu’elle a créé.

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a déploré la poursuite de l’emploi d’armes chimiques en Syrie un an après l’attaque odieuse de Khan Cheikhoun.  Les responsables doivent être traduits en justice sur la foi d’éléments de preuve solides, a-t-il déclaré, avant de plaider pour une « réponse unifiée » du Conseil.  Sans cette unité, les dommages infligés au régime de non-prolifération pourraient être irréversibles, a prévenu M. Alemu.  Il a salué les préparatifs en vue de la destruction des deux usines restantes d’armes chimiques en Syrie et espéré qu’elles seront bel et bien détruites.  Le délégué a jugé crucial que la Mission d’établissement des faits de l’OIAC puisse continuer son travail mais le Conseil doit répondre au vide institutionnel actuel en créant un mécanisme d’enquête « indépendant, impartial et professionnel » qui identifierait les responsables publics comme non étatiques, a conclu M. Alemu, en appelant à la « restauration de l’unité du Conseil ».

M. WU HAITAO (Chine) a dit avoir toujours condamné les attaques contre les civils et rappelé l’opposition de son pays à l’utilisation d’armes chimiques quelles que soient les circonstances.  La Chine appuie toute enquête impartiale pour que les responsables rendent des comptes à la justice.  Elle juge indispensable la mise en place d’un nouveau mécanisme d’enquête indépendant et voyant que tous les membres du Conseil sont d’accord sur ce point, elle rappelle les propositions faites par la Fédération de Russie.  La Chine, a poursuivi le représentant, se félicite des progrès réalisés pour détruire les deux usines restantes de produits chimiques en Syrie et souhaité que le Gouvernement syrien continue de coopérer avec l’OIAC pour régler toutes les questions en suspens.  Seul un règlement politique pourra mettre fin au conflit syrien, a conclu le représentant, qui a souhaité la reprise le plus vite possible des pourparlers de Genève, tout en saluant la tenue d’un sommet dans le cadre du processus d’Astana.

M. JUAN MARCELO ZAMBRANA TORRELIO (Bolivie) a salué les efforts du Gouvernement syrien pour détruire les deux usines restantes d’armes chimiques, tout en l’exhortant à renforcer sa coopération avec l’OIAC.  Le délégué s’est dit vivement préoccupé par les allégations d’emploi d’armes chimiques, un tel emploi étant « injustifiable et criminel » en toutes circonstances.  Il a apporté son appui à la Mission d’établissement des faits de l’OIAC, avant de demander la création d’un nouveau mécanisme permettant d’identifier les responsables de l’emploi d’armes chimiques.  Si nous prétendons créer un nouveau mécanisme, il est crucial de ne pas politiser ce Conseil, a déclaré le délégué.  Le Conseil doit montrer son unité à la communauté internationale.  Le représentant de la Bolivie a rejeté, une nouvelle fois, toutes les sanctions unilatérales.

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a condamné l’utilisation continue d’armes chimiques en Syrie dont les auteurs doivent être tenus pour responsables.  Nous ne pouvons pas accepter l’impunité.  Concernant la mise en œuvre de la résolution 2118 (2013), le représentant s’est dit profondément préoccupé que l’OIAC soit toujours incapable de confirmer le caractère exact et complet de la déclaration initiale de la Syrie sur son programme d’armes chimiques.  Il y a encore un certain nombre de questions graves en suspens, a relevé le représentant, affirmant que le Directeur général de l’OIAC a dit, le mois dernier, que le nombre de ces questions est passé de 5 à 22 dont plusieurs concernent le Centre d’études et de recherches scientifiques syrien.  Le représentant a de nouveau appelé les autorités syriennes à coopérer pleinement et proactivement avec l’OIAC.  Tous les documents requis doivent être soumis sans délai.

M. Orrenius Skau a regretté que le Conseil n’ait pas réussi à se mettre d'accord sur la prorogation du mandat du Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU, en novembre dernier.  Un mécanisme de contrôle est essentiel pour protéger le régime international de désarmement et de non-prolifération et garantir la redevabilité en Syrie.  La Suède, a dit le représentant, appuie tous les efforts internationaux visant à combattre l’utilisation et la prolifération des armes chimiques par des États ou des acteurs non étatiques, partout dans le monde.  Nous assumerons nos responsabilités de mettre fin à l’impunité, a promis le représentant, expliquant que c’est la raison pour laquelle son pays a adhéré au Partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques, une initiative de la France visant à compléter et soutenir le travail des forums et mécanismes multilatéraux existants. La Suède continuera aussi de soutenir la Commission d’enquête internationale du Conseil des droits de l’homme et de travailler à la création d’un nouveau mécanisme indépendant et impartial sur l’utilisation d’armes chimiques en Syrie.

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire) a pris note de la destruction de toutes les armes chimiques syriennes envoyées en dehors du territoire syrien par les États parties à l’OIAC, ainsi que de 25 des 27 unités de production d’armes chimiques déclarées par la République arabe syrienne.  Il a également salué les efforts des parties concernées qui ont conduit à l’amendement apporté à Beyrouth à l’Accord tripartite en vue de la destruction des unités de production restantes et s’est félicité de la soumission régulière par la Syrie de ses rapports mensuels au Comité exécutif de l’OIAC.

Toutefois, le représentant a noté la persistance de défis majeurs et donc demandé à la Syrie d’apporter « une réponse adéquate aux questions en souffrance » sur la destruction des unités de production restantes, sa déclaration initiale sur son arsenal chimique et les activités du Centre d’études et de recherches scientifiques.  Pour la Côte d’Ivoire, toute utilisation d’armes chimiques constitue une violation de la Convention sur les armes chimiques et de la « norme internationale durement gagnée qui interdit ces armes ».  Le représentant a en outre rappelé que son pays avait signé, le 23 janvier dernier à Paris, la Déclaration de principe sur le Partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques.  Il a, en conclusion, a appelé le Conseil de sécurité à retrouver son unité d’action pour mettre en place un mécanisme consensuel chargé de situer les responsabilités dans l’utilisation des armes chimiques en Syrie et à mettre définitivement fin à leur usage dans ce conflit.

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) s’est félicité des efforts de la Mission d’établissement des faits et a exprimé sa très vive préoccupation face à l’incapacité de l’OIAC de confirmer que la déclaration initiale présentée par la Syrie, il a y quatre ans, est exacte et complète.  Il a invité la Syrie à coopérer pour expliquer ces « lacunes et incohérences ».  Le représentant a rappelé que le Mécanisme d'enquête conjoint avait jugé suffisantes les preuves de la responsabilité des autorités syriennes dans l’attaque de Khan Cheikhoun.  Or, il n’y a eu aucune poursuite judiciaire et l’utilisation d’armes chimique est devenue « presque quotidienne » dans ce conflit.  Le représentant a donc engagé les parties concernées à négocier un mécanisme d’enquête impartial et professionnel pour remplacer le défunt Mécanisme d'enquête conjoint OIAC-ONU.  Il a estimé, à cet égard, que le projet de résolution des États-Unis est un bon point de départ. Il s’est à son tour indigné de l’utilisation inédite, il y a un mois à Salisbury, au Royaume-Uni, d’un agent chimique.  « Les responsables doivent être identifiés et punis », a martelé le représentant. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a invité le Conseil à briser un « tabou ».  L’emploi d’armes chimiques en Syrie est bel et bien une atteinte à la paix et à la sécurité internationales.  Il a indiqué qu’un accord politique inclusif en Syrie est la seule manière de mettre un terme au recours aux armes chimiques.  Le délégué a exhorté le Conseil à se mettre d’accord sur un nouveau mécanisme d’établissement des responsabilités « impartial et professionnel ».  Il a invité les membres du Conseil à réfléchir à l’Article 26 de la Charte des Nations Unies qui stipule « afin de favoriser l’établissement et le maintien de la paix et de la sécurité internationales en ne détournant vers les armements que le minimum des ressources humaines et économiques du monde, le Conseil de sécurité est chargé d'élaborer des plans qui seront soumis aux Membres de l’Organisation en vue d'établir un système de réglementation des armements ».  Le délégué a condamné, une nouvelle fois, l’attaque de Khan Cheikhoun, perpétrée il y a un an.

M.  VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a condamné, une nouvelle fois, l’attaque de Khan Cheikhoun.  Un an s’est écoulé mais les circonstances de cet incident n’ont toujours pas été tirées au clair, a-t-il estimé.  Il a répété que le travail du Mécanisme d’enquête conjoint ne pouvait pas être pris au sérieux d’un point de vue professionnel, ce Mécanisme s’étant ingénié, s’est-il expliqué, à prouver une conclusion qui avait été arrêtée en amont, à savoir la culpabilité de Damas.  Dénonçant la mauvaise foi du Président du Mécanisme, le représentant a affirmé que les experts ne s’étaient même pas rendus sur les lieux de l’incident, basant leurs résultats « fallacieux » sur les informations transmises par des « groupes douteux tels que les Casques blancs ».  La Fédération de Russie n’a donc pas pu soutenir le renouvellement du mandat du Mécanisme.  Mais, a assuré le représentant, mon pays n’est pas opposé à la création d’une structure indépendante sur laquelle il a même fait circuler un projet de résolution.  Toute nouvelle structure, a précisé le représentant, doit regrouper des experts compétents, toutes les régions du monde.  C’est sur la base d’une enquête rigoureuse de la nouvelle structure que le Conseil pourrait alors décider de l’établissement des responsabilités, en coopération avec les comités des sanctions pertinents.  La direction de cette nouvelle structure, a encore précisé le représentant, serait assumée par les représentants des cinq membres permanents du Conseil qui prendraient leur décision par consensus.

Malheureusement, « mes collègues occidentaux » veulent un mécanisme à leur convenance, avec les mêmes défauts que l’ancien Mécanisme, a déploré M. Nebenzia.  Il a accusé la France et ses alliés de saper, avec leur récente initiative, la crédibilité de l’OIAC et du régime de non-prolifération.  Il a dénoncé l’attaque perpétrée par les États-Unis le 7 avril 2017, soit trois jours après l’incident de Khan Cheikhoun, contre une base aérienne syrienne.  Ce ne sont pas des enquêtes impartiales que ces capitales souhaitent mais la destruction pure et simple du Gouvernement syrien, a asséné le représentant en révélant des « soupçons en vérité bien établis ».  Il a demandé la convocation demain d’une réunion publique du Conseil sur l’attaque de Salisbury.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est dit alarmé par la récurrence de l’utilisation d’armes chimiques contre la population civile en Syrie et l’absence d’accord sur un mécanisme d’établissement des responsabilités.  Il a dénoncé ces « crimes atroces » commis en violation du régime de non-prolifération, y voyant une grave menace pour la paix et la sécurité internationales que ce Conseil de sécurité ne peut tolérer.  Le représentant a salué l’accord conclu à Beyrouth entre l’OIAC, les Nations Unies et le Gouvernement syrien sur la destruction des dernières usines d’armes chimiques.  Mais il s’est dit inquiet des incohérences dans la déclaration initiale du Gouvernement syrien, faite il y a plus de quatre ans lors de son adhésion à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques.  Il a donc demandé aux autorités syriennes de fournir toutes les informations requises sans plus de délai.  Il a rendu hommage au travail de la Mission d’établissement des faits de l’OACI, tout en estimant que ce travail devrait être complété par un mécanisme indépendant qui permettra d’établir les responsabilités, conformément au droit international et au droit international humanitaire.  

M. MOUNZER MOUNZER (République arabe syrienne) a insisté sur le fait que son pays s’était dûment acquitté de ses engagements au titre de la Convention sur les armes chimiques et de la résolution 2118 (2013), et ce, « malgré le comportement hostile de certaines parties », nationales ou régionales.  Le Gouvernement syrien a été en mesure d’éliminer ses armements chimiques en un temps record, a poursuivi le représentant, qui a regretté qu’au lieu de saluer les efforts du Gouvernement syrien, certains membres de ce Conseil tentent d’exploiter cette tribune pour continuer de « propager des informations fausses ».  Il a dénoncé les États-Unis, « qui n’ont pas détruit leur propre arsenal chimique » ou encore le Royaume-Uni et la France qui, comme les États-Unis, « maîtrisent l’art de la désinformation et de la tromperie ».

On invente même, s’est amusé le représentant, de nouveaux formats de réunion dans le seul but de ternir la réputation du Gouvernement syrien et de le faire tomber, a encore accusé le représentant qui a dénoncé les « mises en scènes des Casques blancs » mais aussi la « pièce de Khan Cheikhoun, mise en scène par certains membres permanents du Conseil de sécurité ».  Le représentant a ensuite accusé ces membres permanents du Conseil de sécurité de se complaire « dans le déni ».  Plusieurs membres du Conseil, s’est-t-il expliqué, ont considéré comme fausses les conclusions du Mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU sur l’attaque de Khan Cheikhoun.  Le Mécanisme, a-t-il affirmé, avait refusé de visiter le site, préférant se fonder sur des déclarations de « témoins présentés par des terroristes ».

Pour la République arabe syrienne, l’utilisation d’armes chimiques et d’autres armes de destruction massive est « un crime contre l’humanité », a affirmé le représentant, qui a répété que l’armée syrienne n’y avait jamais recouru et n’a plus de telles armes.  En revanche a-t-il poursuivi, l’armée syrienne a, comme la population civile, été victime d’attaques chimiques, notamment au chlore.  Le représentant a rappelé que son pays a adressé au Conseil de sécurité « plus de 130 lettres » sur la fabrication et l’utilisation d’armes chimiques par des groupes terroristes, dont le Front el-Nosra.  Mais, s’est-il étonné, ces lettres sont restées sans réponse.

Avec « leur passé colonial », le représentant s’est dit surpris que les États-Unis, le Royaume-Uni et la France prétendent se présenter aujourd’hui comme des « défenseurs de la justice ».  Il a rappelé que la ville de Raqqa avait été « presque totalement détruite du fait des attaques de la coalition internationale ».  Il s’en est pris à la « prétendue initiative française » de Partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques, qu’il a vue comme une « tentative de créer un mécanisme parallèle et politisé » pour servir les intérêts d’États déterminés à renverser le Gouvernement syrien.  Un tel mécanisme ne vise pas à poursuivre les auteurs de crime, mais à les protéger, a-t-il tranché.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Forum des partenariats de l’ECOSOC entend des appels à une meilleure utilisation des mégadonnées et à un secteur privé au service du bien de l’humanité

Session de 2018 -
Forum des partenariats– matin & après-midi
ECOSOC/6898

Le Forum des partenariats de l’ECOSOC entend des appels à une meilleure utilisation des mégadonnées et à un secteur privé au service du bien de l’humanité

Avec près de 2,5 milliards d’internautes, les mégadonnées sont « la ressource la plus précieuse au monde », « le pétrole du XXIe siècle ».  C’est ce qu’a appris aujourd’hui du magazine « The Economist », le Conseil économique et social (ECOSOC) qui tenait la session 2018 de son Forum des partenariats sur le thème « partenariats pour des sociétés résilientes et inclusives: les contributions du secteur privé ».

Lancé depuis 2008, le Forum a depuis connu un nouvel élan avec l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030, à la suite duquel les dirigeants du monde avaient appelé le milieu des affaires à exploiter sa créativité et son sens de l’innovation pour surmonter les défis du développement durable, conformément à l’objectif 17 du Programme 2030 sur les partenariats.

Cette édition 2018 a réuni un grand nombre de représentants des gouvernements, de la société civile, du secteur privé, des fondations, du système des Nations Unies, des universités, qui ont discuté de la contribution du secteur privé aux objectifs de développement durable et des craintes nées de l’utilisation des mégadonnées.

Avec près de 2,5 milliards d’internautes, 6,5 milliards de téléphones mobiles et plus de 10 milliards d’objets connectés, les mégadonnées ont donné lieu au scandale « Cambridge analytica », du nom du Centre de recherche britannique qui aurait exploité les données personnelles des utilisateurs de Facebook pour influencer le vote sur le Brexit au Royaume-Uni et l’élection de Donald Trump aux États-Unis.

Consciente de l’importance de cette nouvelle donne, l’ONU a lancé en 2009 l’initiative « Global Pulse » pour assurer une exploitation « sûre et responsable » des mégadonnées en tant que « bien public mondial ».  Les participants au débat n’ont pas caché leurs inquiétudes devant les dérives potentielles et ont prôné un partenariat fort entre ceux qui collectent les données, ceux qui les analysent et ceux qui les utilisent pour le bien de l’humanité.

Des exemples ont été données.  À Sao Paulo, les données transmises par les téléphones portables contribuent à une meilleure gestion des embouteillages.  En Ouganda, c’est la lutte contre les épidémies qui a été améliorée grâce aux mégadonnées.  Avec ses sept satellites braqués sur la Terre, « Global Impact Initiatives, Planet Inc. » a affûté les armes contre la déforestation ou l’urbanisation sauvage.  Mais les dangers sont là et ont conduit la représentante de « MasterCard » à réclamer un « code de responsabilité ».

Le secteur privé ne peut plus continuer à fonctionner au détriment des gens et de son environnement, a prévenu la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies.  Il doit travailler pour « le bien de l’humanité », a insisté Mme Amina J. Mohammed, et en particulier en faveur des groupes les plus vulnérables comme les jeunes, les femmes, les handicapés, les personnes âgées et les réfugiés. 

Nous attendons du secteur privé des modi operandi durables, a renchéri la Présidente de l’ECOSOC, Mme Marie Chatardová.  Il a été démontré, a-t-elle expliqué, qu’une nouvelle manière de fonctionner pourraient créer 12 000 milliards de dollars d’opportunités d’affaires et 380 millions d’emplois d’ici à 2030.

L’ECOSOC a tenu une brève séance au cours de laquelle elle a décidé* que le débat consacré aux affaires humanitaires de sa session de fond 2018 se tiendra sous la forme de trois tables rondes sur le thème « restaurer l’humanité, respecter la dignité humaine et ne laisser personne de côté: agir de concert pour réduire les besoins humanitaires, les risques et la vulnérabilité des populations ».

Le Conseil économique et social a également élu le Luxembourg à la Commission de la population et du développement jusqu’en 2021.  Les autres postes vacants seront pourvus à une date ultérieure.

*E/2018/L.6

CONVERSATION DE HAUT NIVEAU: DE L’ENGAGEMENT AUX RÉSULTATS: CONTRIBUTIONS DU SECTEUR PRIVÉ À LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

La contribution du secteur privé pour la réalisation des objectifs de développement est un débat qui n’est pas nouveau.  En l’an 2000, a été lancé le Pacte mondial qui est un accord international mis en place par les Nations Unies pour encourager les entreprises à s’engager sur le chemin du développement durable.  Le Pacte mondial réunit aujourd’hui plus de 8 000« entreprises citoyennes » de 160 pays différents autour de 10 principes universels articulés autour des droits de l’homme, des normes internationales du travail, de la lutte contre la corruption et de la protection de l’environnement.

Aujourd’hui, des acteurs du secteur privé ont présenté quelques exemples d’initiatives qui contribuent « au bien mondial ».  La Conseillère générale dans la compagnie d’assurance Aviva, Mme Kirstine Cooper, a parlé d’une alliance d’entreprises, la « World Benchmarking Alliance », qui a permis d’établir un « système de notation » de la performance des entreprises en fonction des objectifs de développement durable.  Des États comme les Pays-Bas et le Danemark appuient cette alliance, mais un plus grand soutien de la communauté internationale permettrait de gagner en importance.  

En Afrique du Sud, a témoigné M. Dan Matjila, Président de la compagnie sud-africaine « Public Investment Corporation », l’entreprise envoie régulièrement des questionnaires à près de 200 sociétés pour mesurer leur engagement en faveur de l’environnement et leur attribuer une note, selon le modèle des agences de notation financière.

Quant à l’essor des groupes vulnérables, Mme Rie Vejs-Kjeldgaard, Directrice des partenariats à l’Organisation international du Travail (OIT), a fait observer que 50% à 60% des salaires les plus bas au monde sont touchés par les femmes, alors que parmi les 10% des rémunérations les plus élevées du monde, seulement 35% concernent les femmes.

C’est pour y remédier, a expliqué M. Bob Wigley, Président de « UK Finance », qu’une initiative de promotion de la parité salariale a été lancée sur la place financière de Londres, la « City », lieu réputé pour son machisme.  Pour accélérer le mouvement de parité, le Ministère britannique des finances a lancé en mars 2016 la « Charte pour les femmes dans la finance », signée à ce jour par plus de 200 entreprises qui se sont engagées en faveur de la parité. 

M. Wigley a également souligné l’importance de la technologie de la chaîne de blocs pour trouver des solutions aux problèmes sociaux.  Cette technologie est une base de données à écriture unique sur un réseau d’ordinateurs, faisant appel au codage informatique pour rendre infalsifiable un registre public.  Cela pourrait aider par exemple à sécuriser les méthodes d’identification des populations dont des centaines de millions dans le monde n’ont pas de carte d’identité.  Avec la chaîne de blocs, on peut aussi vérifier les flux de capitaux et renforcer ainsi la lutte contre la corruption, a ajouté M. Vincent Molinari, Président de « Liquid M Capital ».

M. Peter Rhee, Vice-Président des affaires publiques à « Samsung Electronics », a présenté un projet qui favorise la formation des jeunes des pays en développement aux métiers de la technologie.  Des plateformes numériques servent ainsi de site de formation à distance et d’accompagnement des jeunes dans le monde du travail.

Pour rester dans le domaine didactique, M. Sameer Raina de « Digital Divide Data (DDD) », a présenté un programme de formation des jeunes aux métiers du numérique qui a permis de créer, dans des pays en développement, un pool d’ingénieurs capables de travailler pour des multinationales, tout en restant dans leur propre pays ou dans d’autres pays en développement.

Un apport financier et un encadrement des agricultrices colombiennes a permis de faire de leur coopérative une véritable multinationale, a témoigné M. Ricardo Oteros Sánchez-Pozuelo, Président de « Supracafé ».  Il a expliqué que grâce à au soutien de son entreprise, ces femmes produisent désormais 550 000 kg de café par an.  Un café biologique qui est vendu à des prix avantageux, permettant l’émancipation économique de ces veuves de la guerre civile.

Dans la même veine, une représentante de « Global Impact Sourcing Coalition », a déclaré que son organisation illustre la façon dont les entreprises peuvent travailler en faveur de l’emploi inclusif.  Une collaboration de 40 entreprises, dont Microsoft, Bloomberg et Tech Mahindra, a permis de faire avancer une pratique commerciale appelée « sourcing d’impact » privilégiant les fournisseurs qui offrent des opportunités d’emplois aux plus vulnérables.

Devant ces exemples concrets, le représentant du Groupe des 77 et la Chine (G77) a insisté sur des partenariats robustes, transparents et durables, tenant compte des besoins nationaux.  Il a jugé que les Nations Unies doivent éviter que ces nouveaux partenariats ne bouleversent les choses.  Les pays développés doivent rester fidèles à leur engagement en matière d’aide publique au développement (APD) et d’allègement de la dette publique des pays en développement. 

Le représentant des pays les moins avancés (PMA) a voulu que l’on n’oublie pas les partenariats déjà engagés mais non encore concrétisés, comme la Banque de technologies.  Il ne faut pas oublier tous ces partenariats dans le secteur des infrastructures et du commerce, a ajouté le délégué des pays en développement sans littoral.

Ce sont les bonnes politiques qui font les bons partenariats, a souligné l’Observateur permanent de la Chambre de commerce internationale (CCI) aux Nations Unies, M. Andrew Wilson.  Les gouvernements doivent renoncer à leur « dogmatisme », a conseillé le Président de « UK Finance ».  Il a donné l’exemple de la technologie de fabrication des objets plastiques biodégradables qui se heurte toujours au refus des gouvernements, coincés dans leur dogmatisme « antipollution des écosystèmes terrestres et marins ».

CONVERSATION DE HAUT NIVEAU: LE RÔLE DU SECTEUR PRIVÉ DANS LA LIBÉRATION DU POTENTIEL DES MÉGADONNÉES POUR LE BIEN PUBLIC

« La ressource la plus précieuse au monde », voilà comment la publication financière « The Economist » qualifie les mégadonnées qui sont même décrites comme le pétrole du XXIe siècle.  Le monde compte aujourd’hui plus de 7 milliards d’êtres humains dont quelque 2,5 milliards d’internautes et 2 milliards d’actifs sur les réseaux sociaux, sans oublier les 6,5 milliards de téléphones mobiles et les 10 milliards d’objets connectés. 

Une quantité incroyable de données est produite en ligne, que ce soit par les opérations de paiement, les commentaires, les visites sur les sites Internet, les médias sociaux, les photos, les vidéos ou même les émoticônes.  Les grandes entreprises recueillent cette multitude de données -mégadonnées- sur les caractéristiques démographiques, les comportements, les attitudes des clients, le genre de technologies utilisées pour prédire les tendances futures et peut-être même augmenter leurs ventes.  C’est de ce contexte qu’est né le scandale « Cambridge analytica », du nom du Centre de recherche britannique, soupçonné d’avoir exploité les données personnelles des utilisateurs de Facebook pour influencer les votes sur le Brexit ou l’élection de Donald Trump aux États-Unis.

C’est conscient de l’importance des mégadonnées que l’ONU a lancé l’initiative « Global Pulse » en 2009 qui consiste, dans des laboratoires à Jakarta, à Kampala et New York, à exploiter les mégadonnées « de manière sûre et responsable » en tant que « bien public mondial ».  C’est l’appel qui a été lancé aujourd’hui par de nombreux orateurs.  

Animateur du débat, M. Robert Kirkpatrick, Directeur de l’initiative Global Pulse, a expliqué que face à ce flux d’informations, les citoyens semblent avoir baissé les bras, laissant leurs informations aux mains d’entreprises privées alors que la confidentialité des communications est protégée par la Déclaration universelle des droits de l’homme.  

Les mégadonnées en elles-mêmes ne servent pas à grand-chose, a souligné M. Anil Arora, Statisticien en chef à l’Agence nationale canadienne des statistiques.  Pour être utilisables, les données doivent être regroupées, transformées et analysées.     Au nom du secteur de la téléphonie mobile, Mme Ana María Blanco, Directrice des politiques et des relations internationales au Groupe Spéciale Mobile Association (GSMA), a expliqué les applications concrètes des mégadonnées, comme pour la lutte contre la pollution dans la ville de Sao Paulo.  Les données transmises par les téléphones mobiles aux autorités contribuent à identifier avec précision les zones de grands embouteillages et d’agir en conséquence.

La Banque mondiale s’est par exemple appuyée sur des mégadonnées fournies par le GSMA pour rétablir les systèmes de transports affectés par le séisme de 2010 en Haïti, a affirmé M. Bjorn Gillsater, Représentant spécial du Groupe de la Banque mondiale auprès des Nations Unies à New York.

En Ouganda, le laboratoire de « Global Pulse » a aidé les autorités à utiliser les mégadonnées pour lutter contre les épidémies, a témoigné M. Eddy Mukooyo, Président de la Commission de lutte contre le sida de l’Ouganda.  En même temps, a-t-il souligné, des médias traditionnels comme la radio sont mis à contribution pour atteindre les populations des zones reculées.  Grâce à mon entreprise, a rebondi Mme Rachel Samrén, Vice-Présidente de Millicom, des infrastructures de connectivité ont apporté l’Internet à haut débit à des femmes parmi les plus démunis dans les pays en développement.  Elle s’est félicitée d’avoir ainsi contribué à la réduction du fossé numérique entre les sexes.

Avec pas moins de sept satellites braqués sur la Terre en permanence, Global Impact Initiatives, Planet Inc offre une vue en temps réel de l’évolution des écosystèmes, a expliqué son Vice-Président, M. Andrew Zolli.  Avec ces données, on peut cibler la lutte contre la déforestation en Bolivie ou anticiper les mesures contre l’urbanisation sauvage à Dar es-Salam, s’est-il enorgueilli en se félicitant que les mégadonnées puissent renforcer la résilience des communautés.

La représentante du Grand groupe des enfants et des jeunes a tout de même appelé à la transparence dans l’utilisation de ces mégadonnées et à la mise en place d’institutions « responsables ».

Plaidant pour un « code de responsabilité », Mme JoAnn Stonier, Chef des données à MasterCard, a reconnu que de nombreuses entités essayent de tirer parti des données inscrites sur les cartes bancaires.  Elle a voulu l’introduction d’« un sens de l’éthique ».  C’est pourquoi, ont proposé plusieurs orateurs, il faut un partenariat fort entre ceux qui collectent les données, ceux qui les analysent et ceux les utilisent comme « bien public mondial ».

Certains États, dont la République de Corée et le Mexique, ont également appelé à la prudence et à la mise en place d’un environnement où les mégadonnées servent véritablement au bien et à l’essor des populations.  Adoptant une position médiane, M. Stefan Schweinfest, Directeur de la Division des statistiques du Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies, a dit qu’il faut allier mégadonnées et méthodes statistiques traditionnelles.

En conclusion, l’Économiste en chef des Nations Unies, M. Elliot Harris, a invité le secteur privé à œuvrer au renforcement des capacités des plus vulnérables.  Aux gouvernements, il leur a suggéré d’établir des cadres de partenariats avec le secteur privé, afin de « renforcer le nexus entre le secteur privé et les communautés », sans oublier le rôle des partenaires au développement.  Concluant en économiste, il a dit: nous avons déjà perdu 17% du temps dévolu à la mise en œuvre du Programme de développent durable à l’horizon 2030.

La Présidente de l’ECOSOC a invité les Nations Unies à ouvrir de nouvelles perspectives de partenariats dans lesquels les acteurs étatiques et non étatiques auraient les mêmes obligations et les mêmes responsabilités pour réaliser notre vision commune de « ne laisser personne de côté ».  Elle a promis que les conclusions du Forum seront prises en compte par la Réunion spéciale de l’ECOSOC, prévue le mois prochain à New York, sur « des sociétés inclusives, résilientes et durables à travers la participation de tous ».  Ces conclusions seront également soumises au Forum politique de haut niveau sur le développement durable, prévu en juillet.

 

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Haïti: le Conseil de sécurité cherche les moyens d’assurer grâce à la MINUJUSTH une transition sans heurt du maintien à la pérennisation de la paix

8220e séance – matin
CS/13274

Haïti: le Conseil de sécurité cherche les moyens d’assurer grâce à la MINUJUSTH une transition sans heurt du maintien à la pérennisation de la paix

Il existe aujourd’hui une occasion unique pour la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), l’Équipe de pays des Nations Unies, la communauté internationale et le Gouvernement haïtien de travailler ensemble à la sécurité et au développement à long terme, a plaidé ce matin devant le Conseil de sécurité, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean-Pierre Lacroix.  À la veille du renouvèlement du mandat de la Mission, États membres du Conseil et « Amis d’Haïti » ont insisté sur la nécessité de réussir la transition du maintien vers la pérennisation de la paix et le développement durable d’un État qui a retrouvé la stabilité politique après des « décennies d’abandon ». 

Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, qui s’est rendu en Haïti à la mi-mars, a présenté le rapport du Secrétaire général sur la MINUJUSTH, le premier depuis l’entrée en fonctions de la Mission le 15 octobre dernier, à l’issue d’une transition de six mois pendant laquelle la précédente Mission, la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), a transféré ses compétences en partie aux autorité haïtiennes, en partie à l’Équipe de pays et en partie à la nouvelle opération de maintien de la paix, seule du genre actuellement à ne compter aucun Casque bleu.  Cette transition a été saluée comme un succès par de nombreuses délégations, en premier lieu par celles des États-Unis et du Brésil, lequel a dirigé pendant 13 ans la Force de la MINUSTAH. 

M. Jean-Pierre Lacroix a décrit la MINUJUSTH comme « pleinement opérationnelle » et mettant en œuvre son mandat.  Il a présenté son mode opératoire -une composante civile concentrée dans la zone de Port-au-Prince et des unités mobiles pluridisciplinaires se déplaçant dans les 10 départements du pays- comme étant conforme à l’esprit de la Mission, marqué par une « empreinte légère et non intrusive ».  Il s’agit pour la MINUJUSTH de réaliser son mandat tout en assurant une « transition sans heurt » vers un développement inclusif et durable, grâce à une approche cohérente, globale et intégrée conforme aux réformes en cours aux Nations Unies et à la vision de prévention du Secrétaire général.

Dès la création de la nouvelle Mission par la résolution 2350 (2017), il y aura un an le 13 avril prochain, le Conseil avait demandé au Secrétaire général de lui présenter « une stratégie de sortie sur deux ans bien établie et assortie d’objectifs clairs ».  Ce matin, le Secrétaire général adjoint a estimé que la série de 11 objectifs présentés dans le rapport constituait un cadre « ambitieux mais souple », dans lequel les Nations Unies peuvent avec confiance transformer leur présence dans le pays.  Là aussi, il a été largement soutenu par les intervenants.

En outre, ces 11 objectifs « font écho » aux priorités récemment annoncées par le Président Jovenel Moïse pour réformer l’État et consolider la stabilité politique et sociale, a affirmé M. Lacroix qui s’est dit encouragé par les indices récents d’une plus grande convergence des priorités nationales et de la Mission, souhaitant une « relation saine » entre la Mission, le Gouvernement et la population.

Une telle relation est conditionnée par le « respect scrupuleux des obligations réciproques » et un « authentique esprit de solidarité, de respect mutuel et de confiance », a précisé le représentant d’Haïti, qui a rappelé que le mandat de la MINUJUSTH s’inscrit « dans une perspective différente de la Mission précédente », axée sur la stabilisation.  « Mécanisme d’accompagnement et de consolidation des acquis, l’horizon temporel de la MINUJUSTH ne peut être que limité », a-t-il ajouté, estimant que la stratégie de retrait proposée impliquait un calendrier « qui devra être établi de concert par les deux parties, en fonction de jalons et de points de repères convenus ». 

Mais « au-delà d’un calendrier, la sortie de la Mission doit se fonder sur la réalisation progressive du mandat et l’évolution de la situation sur le terrain », a mis en garde l’Argentine, membre du Groupe des Amis d’Haïti. Ces derniers ont plaidé pour que la présence de la Mission soit ajustée le cas échéant afin de préserver les progrès accomplis au cours des 13 années du mandat de la MINUSTAH.  Comme l’a rappelé la France, les succès engrangés grâce au soutien international « dépendent désormais de la volonté des autorités haïtiennes de s’approprier le travail réalisé jusqu’à présent ».

Or, le pays est loin d’avoir relevé tous les défis.  Pour l’Union européenne, le retour à un fonctionnement constitutionnel normal est certes une condition sine qua non pour permettre à Haïti de faire face aux multiples défis politiques, économiques, sociaux et environnementaux auxquels il est confronté, mais ce n’est pas une condition suffisante.  Pour arracher « les racines encore intactes de l’instabilité », il faut, « d’urgence, des réformes courageuses », a plaidé son représentant, pour qui « des signes de la volonté de réforme ont été donnés, qu’il faut désormais concrétiser ».

Pour la plupart des délégations, ces réformes concernent la justice -notamment son accès-, le secteur pénitentiaire, la professionnalisation de la police, la protection et la promotion des droits de l'homme et la lutte contre l’impunité.  Les Pays-Bas ont ainsi fait état de « cas inacceptables de violation des droits de l’homme par la Police nationale ».  Le représentant d’Haïti s’est dit « sensible » à ces questions, affirmant que « des réponses sont en train d’être apportées ».  « L’état de droit ne se divise pas », a-t-il ajouté, rejetant toutefois la responsabilité de la situation actuelle sur des « décennies d’abandon ». 

Il reste que la présence de l’ONU ne doit pas être limitée de manière trop radicale au regard des besoins du pays, a estimé le représentant de la Pologne, pour qui, néanmoins, « le verre est à moitié plein » et qui a souhaité que la prospérité future du pays ne dépende plus de la présence d’une opération de l’ONU. 

À cet égard, le Secrétaire général adjoint a estimé, comme après lui la représentante du Royaume-Uni, qu’en créant à l’unanimité la MINUJUSTH, le Conseil avait accordé à Haïti un « vote de confiance » et de reconnaissance des progrès réalisés, progrès dont il y a, selon M. Lacroix, tout lieu de penser qu’ils sont irréversibles.

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI

 

Rapport du Secrétaire général sur la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) (S/2018/241)

 

Déclarations

M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, qui a déclaré qu’il s’était rendu en Haïti les 14 et 15 mars, a affirmé que la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) était pleinement opérationnelle et mettait en œuvre son mandat.  Il a expliqué son mode de déploiement, avec une composante civile concentrée dans la zone de Port-au-Prince et des unités mobiles pluridisciplinaires pour suivre l’évolution politique et celle de l’état de droit et discuter avec les communautés et autres acteurs dans l’ensemble des 10 départements.  Ce mode opératoire est conforme à l’esprit de la Mission qui est lié à son empreinte légère et non intrusive.

En même temps, la Mission a placé 135 officiers de police auprès de la Police nationale haïtienne (PNH) dans les 10 départements et 23 membres des services pénitentiaires dans 9 des 18 prisons que compte le pays.  Enfin, la présence de sept unités de police constituées dans cinq régions permet de satisfaire aux prescriptions de soutien opérationnel à la PNH.  La Mission travaille en coopération étroite avec les 19 agences et programmes des Nations Unies présents dans le pays, ainsi qu’avec le Bureau de l’Envoyée spéciale du Secrétaire général, Mme Josette Sheeran, afin de réaliser son mandat tout en assurant une transition sans heurt vers un développement inclusif et durable, grâce à une approche cohérente, globale et intégrée conforme aux réformes en cours et à la vision de la prévention du Secrétaire général. 

L’objectif principal est de s’appuyer sur les réalisations de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) et de consolider la stabilité et la sécurité dans le pays, pour faciliter son développement à long terme, ce qui suppose des fondements plus solides en matière d’état de droit et de respect des droits de l'homme, a poursuivi M. Lacroix.

La MINUJUSTH a mis en œuvre en coopération avec l’Équipe de pays des Nations Unies diverses activités pour soutenir ses objectifs, préparant ainsi le terrain pour des changements plus systémiques, a poursuivi le Secrétaire général adjoint.  Ainsi, la Mission assiste la Police nationale haïtienne dans la mise en œuvre de son plan stratégique de développement 2017-2021, en particulier par son programme de mentorat.  Dans un autre domaine clef, la Mission appuie les mesures visant à limiter la détention provisoire prolongée et la surpopulation carcérale, en coopération notamment avec le barreau de Port-au-Prince.

Pour M. Lacroix, le rôle de la Mission en matière de suivi des droits de l'homme permet de disposer d’un système d’alerte précoce et d’analyse structurelle qui la rend en mesure d’ajuster son rôle de plaidoyer et son soutien spécialisé.  Toutefois, a-t-il ajouté, la faiblesse actuelle des institutions de l’état de droit génère des défis et encourage une culture de l’impunité.  Il faut donc encore renforcer les institutions nationales de droits de l’homme.

Pour être efficace, une opération de maintien de la paix comme la MINUJUSTH doit entretenir une « relation saine » avec le Gouvernement et la population, fondée sur la solidarité et la confiance mutuelle, a fait observer M. Lacroix, qui s’est dit encouragé par les efforts du Président Moïse pour créer un climat de changement et améliorer la vie quotidienne de la population, y compris par l’initiative de la « Caravane pour le changement ».  Tout en notant que les relations entre la Mission et le Gouvernement auraient pu être plus harmonieuses, le Secrétaire général adjoint s’est dit encouragé par les indices récents d’une plus grande convergence des priorités nationales et de la Mission.  Il a notamment salué le fait que le Président Moïse ait annoncé récemment ses priorités en matière de réforme de l’État et de maintien de la stabilité politique et sociale.  Les 11 objectifs fixés par le Secrétaire général dans son rapport font écho à cette vision, a-t-il estimé.

Dès lors, il existe une occasion unique pour la MINUJUSTH, l’Équipe de pays des Nations Unies, la communauté internationale et le Gouvernement haïtien de travailler ensemble à la mise en œuvre des priorités communes indiquées dans la résolution 2350 (2017), a poursuivi M. Lacroix, qui a rappelé que, malgré les progrès, le pays devait encore surmonter de nombreux défis et risques dans le cadre de la transition du maintien de la paix vers le développement.  Il a mentionné en particulier les incertitudes économiques persistantes et l’exclusion sociale qui en résulte, notamment pour les jeunes et les plus vulnérables. 

Si parvenir à ses résultats doit rester notre priorité commune, nous avons déjà commencé à préparer la transition vers une présence onusienne sans maintien de la paix, a expliqué le Secrétaire général adjoint, qui a rappelé que l’un des instruments de cette transition était le Plan-cadre des Nations Unies pour l'aide au développement.  Il faudra aussi combler toutes les lacunes qui pourraient apparaître dans le temps imparti et le Secrétaire général adjoint a dit compter sur une collaboration étroite avec le Gouvernement et d’autres partenaires pour assurer le succès de la transition.

À cet égard, les 11 objectifs fixés représentent un cadre « ambitieux mais souple », dans lequel les Nations Unies peuvent avec confiance transformer leur présence dans le pays, a estimé M. Lacroix.  Le Secrétariat fournira dans les mois à venir au Conseil de sécurité des évaluations qualitatives et quantitatives des progrès et tendances, a promis le Secrétaire général adjoint, pour qui une sortie fondée sur des objectifs largement partagés et fruits de consultations larges est l’approche qui convient pour préserver les acquis de la stabilisation obtenue par plus d’une décennie de consolidation de la paix en Haïti.

Le vote unanime du Conseil qui a créé la MINUJUSTH, il a y aura un an le 13 avril, a été un « vote de confiance en Haïti, de reconnaissance des progrès réalisés par ce pays », a encore affirmé M. Lacroix.  Pour le Secrétaire général adjoint, il y a tout lieu de penser que ce progrès est irréversible.  Nous devons tous invertir dans ce succès, a-t-il insisté.  Il a conclu en rappelant qu’en annonçant la semaine dernière son initiative « Action pour le maintien de la paix », le Secrétaire général avait présenté comme un facteur critique le soutien du Conseil de sécurité à ses opérations de maintien de la paix et, dans le cas présent, au succès de la MINUJUSTH et d’Haïti. 

Mme AMY NOEL TACHCO (États-Unis) a salué la transition exemplaire entre la MINUSTAH et la MINUJUSTH, avant de se dire encouragée par le chemin parcouru par Haïti, s’agissant en particulier de la Police nationale.  La promotion de l’état de droit et le renforcement des capacités de la police sont essentiels, a-t-elle dit.  La déléguée a exhorté le Gouvernement haïtien à renforcer le secteur judiciaire, à lutter contre la surpopulation carcérale et à accroître la participation des femmes dans les processus de prise de décisions afin de garantir l’avenir du pays après le départ de la MINUJUSTH.  Elle a salué la stratégie de sortie échelonnée de la Mission et souligné qu’il reste encore beaucoup de travail à abattre jusqu’au retrait de la Mission.  Mon pays est un partenaire de longue date d’Haïti, a-t-elle dit, en se félicitant qu’un nouveau chapitre de l’histoire du pays soit en train de s’écrire.

Pour M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie), la communauté internationale doit continuer d’afficher un front uni pour appuyer le développement économique et social d’Haïti, en consultation avec le Gouvernement haïtien.  Le mandat de la MINUJUSTH est à cet égard déterminant, a dit le représentant.  Nous avons deux ans pour nous acquitter de toute une série de tâches et atteindre nos objectifs, conformément aux 11 critères fixés pour assurer la sortie de la Mission, a poursuivi le représentant.  Il a souhaité un renforcement de la coopération entre la Mission et le Gouvernement haïtien dans les domaines de l’état de droit, de la justice et des droits de l’homme.  Il s’est félicité des programmes de réformes nationales, en particulier le renforcement et la modernisation du secteur de la justice et le programme visant à améliorer les services sociaux.  Il a encouragé le Parlement haïtien à poursuivre son travail en matière de justice, notamment le Code pénal.  Il est indispensable, a-t-il insisté, de garantir l’état de droit et de créer des bases solides pour le développement à long terme.  Le représentant s’est également félicité de la coopération régionale d’Haïti avec la Communauté des Caraïbes (CARICOM)

Il a salué le programme de mentorat de la Mission au profit de la police haïtienne, ainsi que son travail dans le domaine des droits de l’homme et de l’état de droit.  Le représentant a ensuite rappelé que la communauté internationale devait honorer ses engagements en matière de lutte contre le choléra, qui reste un problème majeur.  Lutter contre ce fléau est une priorité, a-t-il rappelé.  En conclusion, il a rappelé l’attachement de son pays au principe d’appropriation nationale et invité la MINUJUSTH à s’acquitter de son mandat dans le plein respect de la souveraineté et de l’indépendance d’Haïti.

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a noté que la terrible épidémie de choléra qui a ravagé le pays pendant plus de huit ans semble « enfin en voie d’être maîtrisée ».  Préoccupée par les cas inacceptables de violation des droits de l’homme par la Police nationale, la déléguée a demandé la mise en place de mécanismes renforcés de surveillance dans le secteur public.  Elle a plaidé pour une collaboration étroite entre la MINUJUSTH et le Gouvernement, et souhaité une stratégie conjointe détaillée pour poser les jalons de l’achèvement de la phase « maintien de la paix ».  Soulignant la nécessité d’une présence crédible et légitime de l’ONU dans le pays, la représentante a salué la politique de tolérance zéro appliquée par le Secrétaire général face à l’exploitation et aux atteintes sexuelles commises par le personnel de l’ONU.  La Mission précédente, la MINUSTAH, doit rendre compte des actes commis par le passé, a-t-elle conclu. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a rappelé les catastrophes naturelles et les « complications politiques » qui avaient pendant longtemps empêché le pays d’avancer sur la voie du développement durable.  Il s’est félicité de la création de la MINUJUSTH l’an dernier et de la coopération entre les autorités haïtiennes et la Mission en vue de réaliser les 10 objectifs fixés pour 2019.  Cette coopération, a-t-il rappelé, doit déboucher l’an prochain sur le passage vers la phase « développement » avec l’appui de l’Équipe de pays des Nations Unies.  Le représentant a jugé les 11 objectifs fixés « ambitieux mais réalisables ».  Il a aussi voulu que l’on tienne compte des facteurs qui peuvent nuire au progrès dans le pays, en particulier le choléra, une question très importante puisque liée aux ressources en eau, aux services de santé et à la stabilité, en général.  Le représentant a enfin plaidé pour le respect de l’autorité de l’État, de l’état de droit et des droits de l’homme.  Il a insisté sur le renforcement des institutions judiciaires.

M. PAWEL RADOMSKI (Pologne) a souligné les progrès accomplis en Haïti, grâce notamment à la « caravane du changement » qui a amélioré le quotidien des Haïtiens.  Il a salué le rôle crucial joué par la MINUJUSTH en vue notamment de promouvoir les droits de l’homme et de renforcer les capacités de la Police nationale.  Il a souhaité que les postes vacants au sein de la Mission soient pourvus le plus rapidement possible.  Le délégué a ensuite souligné l’importance qu’il y a à lutter contre les violences sexuelles et contre la surpopulation carcérale et invité le Gouvernement haïtien à faire davantage dans ces domaines.  La présence de l’ONU ne doit pas être limitée de manière « trop radicale » au regard des besoins du pays, a argué le représentant qui a néanmoins souhaité que la prospérité future du pays ne dépende plus de la présence d’une opération de l’ONU.  « Pour nous, le verre est à moitié plein », a-t-il conclu.

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) s’est félicitée de la mise en place d’une stratégie de sortie pour la MINUJUSTH en coopération avec les autorités haïtiennes, estimant qu’elle fixe des critères très clairs en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain.  En conséquence, l’Éthiopie soutient le renouvèlement pour un an du mandat de la Mission, ce qui lui permettra de continuer d’aider le Gouvernement à renforcer l’état de droit et les institutions correspondantes.  La représentante a toutefois noté les défis à relever en matière de justice et de système pénitentiaire ainsi que les efforts de la Mission en la matière.  Elle a pris note également des progrès réalisés en matière de sécurité.

Haïti reste toutefois très fragile dans certains domaines, a fait observer la représentante qui a appelé à une politique dynamique de la part des autorités et souhaité que la Mission apporte le soutien requis aux efforts du Gouvernement, en coopération avec la société civile et d’autres acteurs.  Elle a plaidé pour que le nouveau partenariat noué entre les Nations Unies et Haïti permette d’assurer le développement durable du pays, et s’est notamment félicitée de l’enveloppe de 3 millions de dollars accordée au pays par le Fonds pour la consolidation de la paix pour renforcer le rôle des femmes et des jeunes dans les mécanismes de résolution des conflits.  Elle a également salué l’appui apporté par les organisations régionales et sous-régionales, y compris la Communauté des Caraïbes (CARICOM), actuellement présidée par Haïti.  En conclusion, la représentante a réitéré la solidarité de l’Éthiopie avec la « nation sœur » d’Haïti qui s’efforce de consolider les acquis des dernières années et de relever les défis actuels.

M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUÉ (Côte d’Ivoire) s’est dit convaincu que la présence de la MINUJUSTH constitue une réelle opportunité devant permettre de consolider les acquis et de soutenir les efforts du Gouvernement haïtien en vue d’une « sortie de l’actuelle opération de maintien de la paix ».  Il a appuyé la décision de la mise en place prochaine, en collaboration avec le Gouvernement haïtien, d’un mécanisme de suivi des progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de la stratégie de sortie de crise, assortie d’un calendrier et des indicateurs arrêtés d’un commun accord.  Sur le plan sécuritaire, les progrès enregistrés dans la professionnalisation de la Police nationale ne doivent pas nous faire perdre de vue que la situation d’ensemble demeure vulnérable, a-t-il prévenu.  Le délégué a appuyé la nouvelle stratégie de l’ONU visant à éradiquer l’épidémie de choléra.  Il a encouragé le Conseil à donner à la MINUJUSTH et à l’Équipe de pays des Nations Unies les moyens nécessaires à la réussite de leur mission, « dans le cadre du renouvellement du mandat de la MINUJUSTH ».

M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït) a d’abord mis l’accent sur le volet politique, pour se féliciter du travail effectué par le Président Moïse, d’Haïti, en coopération avec le Parlement.  Il a dit attendre avec impatience la publication du Code pénal et du Code de procédure pénale.  Il s’est ensuite félicité de l’amélioration de la sécurité et de la baisse de la criminalité, et demandé aux autorités de consolider les acquis en utilisant les compétences des Nations Unies et notamment de la MINUJUSTH, en renforçant l’état de droit et la lutte contre l’impunité et la corruption.  Le représentant s’est également inquiété des violations des droits de l’homme et a souhaité que les autorités traduisent leurs auteurs en justice.  Après avoir noté les progrès réalisés dans la lutte contre le choléra, il a salué le travail de la MINUJUSTH et a apporté son appui aux éléments du rapport du Secrétaire général concernant les critères à réaliser pour assurer la stratégie de sortie de la Mission.  Ces critères permettront de satisfaire aux objectifs de développement durable, a-t-il estimé.

M. WU HAITAO (Chine) a noté l’amélioration graduelle de la situation sécuritaire en Haïti grâce aux efforts de la Police nationale, entre autres.  Les pays de la région et la communauté internationale doivent continuer à accompagner Haïti sur la route du développement durable, a-t-il poursuivi.  Il a salué le bon fonctionnement de la MINUJUSTH et souhaité une coopération accrue entre cette dernière et le Gouvernement.  Enfin, le délégué a rappelé que son pays a contribué au Fonds d’affectation spéciale pluripartenaire des Nations Unies pour la lutte contre le choléra en Haïti et exhorté tous les États Membres à appuyer la nouvelle stratégie de l’ONU en vue d’éradiquer l’épidémie.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) s’est félicitée des progrès constants réalisés en Haïti et des initiatives pour la justice pénale, ainsi que de la nouvelle approche des Nations Unies face au choléra.  La représentante a ainsi approuvé la manière dont la MINUJUSTH apporte son soutien au Gouvernement haïtien, estimant qu’il s’agit d’un véritable « vote de confiance » en faveur d’Haïti, qui permettra une transition sans heurt vers le développement durable.  La représentante a appelé le Gouvernement à assumer la mise en œuvre de réformes centrales et à long terme pour assurer le développement et la stabilité du pays, en particulier en matière de justice, de police et de droits de l'homme, mais aussi pour autonomiser les femmes.  L’ONU doit agir de manière intégrée et mettre l’accent sur la coopération entre l’Équipe de pays, la Mission et le Fonds pour la consolidation de la paix.  Enfin, la stratégie de sortie devra se faire conformément aux critères établis par le Secrétaire général.

Le transfert des compétences vers l’Équipe de pays est un processus complexe, a averti Mme Pierce, pour qui l’établissement de seuils devrait permettre d’éliminer les risques.  Elle a rappelé la nécessité d’une coopération fondée sur la confiance entre les autorités nationales et les Nations Unies.  Pour sa part, le Royaume-Uni coopérera avec les Nations Unies et Haïti pour garantir l’application d’une politique de tolérance zéro face à l’exploitation et aux atteintes sexuelles commises par le personnel de l’ONU.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a souhaité que la MINUJUSTH soit dotée des moyens nécessaires en vue d’accompagner dans les meilleures conditions possibles la Police nationale haïtienne lors de ses opérations sur le territoire national, « y compris avec l’appui de capacités aériennes et médicales ». Ce soutien international ne représente néanmoins qu’une transition vers une pleine appropriation par les autorités haïtiennes du maintien de l’ordre public, a-t-il poursuivi.  S’agissant du renforcement de l’état de droit, autre axe du mandat de la Mission, le délégué a souligné l’importance du vote d’un code pénal et d’un code de procédure pénale avant la fin du mandat de la MINUJUSTH.

Les succès engrangés grâce au soutien international dépendent désormais de la volonté des autorités haïtiennes de s’approprier le travail réalisé jusqu’à présent, a-t-il déclaré.  Défendant une politique « active et ambitieuse » en matière des droits de l’homme, M. Delattre a appelé à un suivi attentif de ce sujet majeur lors de la mise en œuvre du mandat de la MINUJUSTH.  Il a notamment souhaité une amélioration du système pénitentiaire, la défense des droits des femmes et le respect des droits des citoyens face à l’État.  Enfin, M. Delattre a appelé au renouvellement du mandat de la MINUJUSTH avant d’entamer une transition vers une nouvelle forme de la présence de l’ONU en Haïti.

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a souhaité que le processus futur de transition entre la MINUJUSTH et l’Équipe de pays des Nations Unies soit bien planifié et mené « dans l’esprit de la pérennisation de la paix ».  Alors que l’Équipe de pays doit s’acquitter de plus en plus de tâches, les donateurs doivent faire en sorte que les agences onusiennes aient les ressources nécessaires pour appuyer efficacement le processus de consolidation de la paix en Haïti, a-t-il dit.  Le délégué a rappelé que la MINUJUSTH est la seule mission de maintien de la paix de l’ONU qui ne comporte que des composantes purement civile et policière.  Nous devons tirer les leçons de cette expérience lorsque nous nous pencherons sur les stratégies de transition et de retrait d’autres missions onusiennes, a-t-il estimé.  Le délégué a demandé que tous les cas d’exploitation et d’atteintes sexuelles fassent l’objet d’une enquête approfondie.  Enfin, il a exhorté tous les États Membres à contribuer au Fonds d’affectation spéciale pluripartenaire des Nations Unies pour la lutte contre le choléra en Haïti.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a jugé très utiles les évaluations du Secrétaire général adjoint et a dit avoir constaté des progrès très encourageants.  Il a salué les efforts des autorités haïtiennes pour développer un état de droit, et notamment l’initiative présidentielle de la « Caravane du changement ».  Il a constaté la participation accrue d’Haïti à des organisations internationales et régionales, notamment la présidence de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Comme pour toute opération de maintien de la paix, il est indispensable de tenir compte à chaque étape de la MINUJUSTH de l’avis du Gouvernement hôte et du principe d’appropriation nationale, a rappelé le représentant.  Une assistance adéquate est importante pour le Gouvernement, à qui il appartient de définir les tâches et priorités en matière de consolidation de la paix et de développement.

Le représentant s’est dit préoccupé par la situation humanitaire du pays, qui subit toujours les conséquences de l’ouragan Matthews.  Il a pris note du retour progressif des populations, tout en faisant observer que ces retours créaient aussi un fardeau supplémentaire pour les communautés.  Il s’est félicité des progrès de la Police nationale haïtienne mais s’est dit préoccupé par les informations faisant état de crimes d’abus sexuels commis par des agents humanitaires appartenant à des organisations internationales.  Alors qu’il s’apprête à renouveler le mandat de la MINUJUSTH, le Conseil de sécurité doit s’assurer que les réalités du terrain ont bien été prises en compte, notamment en ce qui concerne la structure de la mission, a encore estimé le représentant, qui a conclu en souhaitant pour Haïti « un gouvernement fort et une société unie » qui, ensemble, pourront renforcer les capacités du pays.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a salué le dialogue politique mené en Haïti avec tous les secteurs clefs du pays en vue de l’élaboration d’une stratégie de développement.  Il a demandé une amélioration du secteur judiciaire, ainsi qu’une diminution de la durée des détentions préventives.  Il a appelé la MINUJUSTH à se concentrer sur le renforcement des capacités de la Police nationale et sur les moyens de garantir l’indépendance du secteur judiciaire haïtien.  Il a pris note de la stratégie de sortie échelonnée de la MINUJUSTH et défendu une coopération accrue entre la Mission et le Gouvernement.  Il a ensuite rappelé qu’Haïti assume la présidence actuelle de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  La lutte contre le choléra en Haïti doit rester prioritaire, a conclu le représentant du Kazakhstan.  

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) s’est dit attaché à la pérennisation de la paix en Haïti et a rappelé que son pays avait fourni près de 6 000 hommes à la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH).  Aujourd’hui, la MINUJUSTH, qui a pour mandat d’organiser une transition viable, doit, a dit le représentant, aider à la mise en place d’institutions viables de protection et de promotion des droits de l'homme, « une des activités essentielles du mandat ».  Le représentant a plaidé pour des mesures spécifiques contre l’imputé et pour la protection des femmes et des enfants.  Il importe aussi, a-t-il poursuivi, d’assurer une coordination ordonnée en vue de la transition vers le développement durable.  Le représentant a plaidé à cet égard pour un renforcement de la présence onusienne, l’implication des institutions financières internationales et une plus grande participation des femmes et des jeunes.  Il a enfin rappelé les « efforts colossaux » du Secrétaire général pour obtenir l’appui de la communauté internationale dans la lutte contre le choléra et a demandé aux États Membres d’apporter l’assistance nécessaire. 

M. DENIS RÉGIS (Haïti) a indiqué « qu’un nouvel ordre des choses » a émergé en Haïti.  Le pays est aujourd’hui en paix et dans le sillage des élections démocratiques de 2017, la stabilité institutionnelle et l’autorité de l’État ont été restaurées, les acquis démocratiques sont consolidés, les institutions prévues par la Constitution fonctionnent régulièrement.  Le représentant a loué « la certitude politique retrouvée ».  Parmi les indicateurs de progrès, il a mentionné la très nette diminution de la criminalité violente, le renforcement de la lutte contre la corruption, « y compris dans le cadre du dossier Petro Caribe » ou bien encore le professionnalisme accru de la Police nationale.  Le délégué s’est dit « sensible » aux questions relatives à l’accès à la justice, au renforcement du système judiciaire ou au non-respect des droits de la personne.  Des réponses sont en train d’être apportées, a-t-il affirmé, ajoutant que ces problèmes sont la résultante de « décennies d’abandon ».  Le délégué a indiqué que son gouvernement a également pris note des préoccupations face à certains cas « isolés » d’abus de droits de l’homme perpétrés par des représentants des forces de l’ordre.  Les deux incidents signalés dans le rapport du Secrétaire général font l’objet « de la plus sérieuse attention » de la part des autorités compétentes, a assuré le délégué.  « L’état de droit ne se divise pas. »

Le délégué a redit toute la valeur qu’attache son gouvernement au mandat de la MINUJUSTH, qui s’inscrit dans une perspective différente de la Mission précédente qui était axée sur la stabilisation.  Mécanisme d’accompagnement et de consolidation des acquis, l’horizon temporel de la MINUSJUSTH ne peut être que limité, a-t-il dit.  Le délégué a noté la stratégie de retrait proposée par le Secrétaire général, selon un calendrier qui devra être établi de concert par les deux parties, « en fonction de jalons et de points de repères convenus ».  Comme il l’a fait valoir, le Gouvernement adhère au principe d’une évolution de la Mission vers une présence de l’ONU s’inscrivant dans un cadre de renforcement des capacités au lieu du maintien de la paix.

M. Régis a souhaité la poursuite de la coopération entre Haïti et l’ONU, dans le cadre d’un partenariat fort, qui favorise réellement de nouvelles avancées dans tous les secteurs de l’état de droit.  Rien de tout cela ne sera possible sans le respect scrupuleux des obligations réciproques et en dehors d’un authentique esprit de solidarité, de respect mutuel et de confiance, a-t-il prévenu.  Le délégué a souhaité un accompagnement de la communauté internationale en vue de favoriser les conditions d’une stimulation vigoureuse de la croissance et de la réduction de la pauvreté et a salué l’initiative de la « retraite sur la transformation d’Haïti » lancée par le Secrétaire général.  S’agissant de l’épidémie de choléra, qui continue de sévir malgré les progrès enregistrés, le délégué a souhaité que la nouvelle initiative du Secrétaire général « permette enfin la concrétisation des deux volets de la nouvelle approche de l’ONU contre le choléra ».  Le Fonds d’affectation spéciale n’a pu recueillir jusqu’à présent qu’un peu plus de 7 millions de dollars, ce qui est nettement insuffisant au regard des 400 millions de dollars nécessaires, a-t-il déploré.  En conséquence, M. Régis a appelé à « un sursaut de bonne volonté » et à l’exploration de sources de financement « innovantes et prévisibles » afin que les victimes, leurs proches et leurs ayants droit puissent recevoir la juste compensation qui leur est due.  Enfin, le délégué a assuré que son pays entend approfondir son dialogue avec le Conseil de sécurité, le Secrétariat et toutes les instances de l’ONU.

M. JOÃO PEDRO VALE DE ALMEIDA, Chef de délégation de l’Union européenne, a rappelé que le mandat principal de la MINUJUSTH est le renforcement de l’état de droit, de la police et la défense et la promotion des droits de l'homme.  Il a constaté la fin d’un long cycle d’instabilité institutionnelle avec l’élection du Président Moïse et d’un nouveau Parlement.  L’Union européenne s’en félicite et considère ce retour à un fonctionnement constitutionnel normal comme une condition sine qua non pour que le pays puisse faire face aux nombreux défis politiques, économiques, sociaux et environnementaux auxquels il est confronté.

Toutefois, cette condition nécessaire n’est pas suffisante, a poursuivi le représentant qui a estimé que « les racines de l’instabilité sont encore intactes ».  Il faut donc, d’urgence, des réformes courageuses » de la Constitution, du système électoral et du système judiciaire, en particulier pour assurer l’accès de tous à une justice impartiale, équitable et efficace.  Pour l’Union européenne, « des signes de la volonté de réforme ont été donnés, il faut désormais les concrétiser » et saisir l’occasion historique offerte par cette période de relative stabilité et de légitimité démocratique.  Le représentant a insisté sur le caractère clef d’une « réforme consensuelle et profonde du système électoral ».

Il a appuyé le travail de la MINUJUSTH mais a estimé, malgré les progrès, que la « situation sécuritaire demeure très fragile ».  Le représentant a donc jugé essentiel de compléter le travail de renforcement et de professionnalisation de la Police nationale haïtienne, d’insister sur une réforme de la justice et du système pénitentiaire et de consolider les droits de l'homme.  Il faut pour cela à la Mission « une période de temps suffisante pour la transition des responsabilités à l’Équipe de pays », y compris pour assurer l’irréversibilité des réformes menées.

Tout en répétant l’appréciation positive de l’Union européenne face à la MINUJUSTH, M. de Almeida a estimé qu’il fallait « d’ores et déjà penser  à l’avenir ».  Dès lors, l’organisation de la transition de la Mission est fondamentale et, pour l’Union européenne, il faudra notamment accorder une attention spéciale au respect des droits de l'homme dans l’action sécuritaire et à l’accès à une justice impartiale pour tous.  Il est essentiel que la police et le système judiciaire haïtiens soient efficacement préparés à assumer toutes les tâches actuellement réalisées par la Mission, a-t-il averti.  L’Union européenne soutiendra les autorités haïtiennes pour qu’elles puissent consolider leur engagement et leurs efforts, a conclu le représentant. 

Au nom du Groupe des Amis d’Haïti, M. MARC-ANDRE BLANCHARD (Canada) a souligné la nécessité de mettre en œuvre des réformes structurelles en Haïti en vue notamment de promouvoir les droits humains, de lutter contre la surpopulation carcérale, d’accroître la participation des femmes dans les processus de prise de décisions ou d’améliorer la qualité des services publics.  Il a insisté sur l’importance de la lutte contre la corruption et l’impunité dans le pays.  « Le renforcement de l’état de droit et des institutions démocratiques est crucial pour la stabilité et la prospérité de long terme du pays ».  Appelant de ses vœux une coopération accrue entre la MINUJUSTH et le Gouvernement, M. Blanchard a appuyé le renouvellement du mandat de la Mission pour une année supplémentaire, avant de souhaiter que les critères de retrait de la Mission soient affinés, en étroite collaboration avec les autorités haïtiennes.  Les conditions sur le terrain doivent être rigoureusement examinées et la présence de la Mission doit être ajustée en vue de préserver les progrès accomplis en Haïti, a-t-il déclaré.  Enfin, le délégué a exhorté tous les États Membres à soutenir les efforts de lutte de l’ONU contre le choléra.

M. ALEJANDRO GUILLERMO VERDIER (Argentine) s’est félicité du dernier rapport du Secrétaire général et notamment des dispositions sur la stratégie de sortie.  L’Argentine, a-t-il rappelé, insiste depuis longtemps sur le fait qu’au-delà d’un calendrier, la sortie de la Mission doit se fonder sur la réalisation progressive du mandat et l’évolution de la situation sur le terrain, afin de ne pas menacer les acquis des 14 années de la MINUSTAH.  Le représentant a relevé que les objectifs de la stratégie de sortie intégraient la nécessité d’harmoniser le mandat de la Mission avec le Plan-cadre des Nations Unies pour l’aide au développement 2017-2021.  Il a ensuite détaillé les progrès réalisés par la Mission, tout en soulignant les efforts déployés par les autorités nationales haïtiennes.  Il a cité en exemple les progrès considérables dans la lutte contre le choléra, lesquels doivent encore être poursuivis, notamment par la mobilisation des ressources nécessaires.

L’Argentine continuera de fournir des forces de police à la Mission tout en poursuivant son assistance bilatérale à Haïti, a également affirmé le représentant, qui a pris note de la reconstitution de Forces armées nationales en souhaitant que cette décision souveraine ne perturbe pas le plan de développement stratégique de la Police nationale haïtienne.

Mme MARIA DEL CARMEN DOMÍNGUEZ ÁLVAREZ (Chili) a loué le rôle fondamental joué par la MINUJUSTH et appuyé une stratégie de sortie échelonnée de la Mission en fonction de la réalité sur le terrain.  Nous ne pouvons pas nous permettre de compromettre les progrès enregistrés en Haïti, a-t-elle dit.  La Mission ne pourra consolider ces acquis que si elle coopère étroitement avec tous les acteurs nationaux, a-t-elle poursuivi.  La déléguée a pris note de la diminution des cas de choléra dans le pays et appuyé la nouvelle stratégie de l’ONU visant à éradiquer l’épidémie.  Elle a demandé à tous les États Membres d’imiter le Chili et d’apporter une contribution au Fonds d’affectation spéciale pluripartenaire des Nations Unies pour la lutte contre le choléra en Haïti.  Enfin, la représentante a souligné la nécessité de s’attaquer aux causes profondes de la vulnérabilité du pays notamment face aux catastrophes naturelles et salué à ce titre le Plan de réponse humanitaire élaboré par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA).

M. MAURO VIEIRA (Brésil) a constaté avec satisfaction que la transition entre la MINUSTAH et la MINUJUSTH avait pu se faire sans conséquences négatives sur la stabilité et la sécurité nationale, y voyant un signe du succès de la MINUSTAH, y compris du retrait progressif de sa composante militaire et du transfert réussi des responsabilités à la Police nationale haïtienne.  Le représentant a insisté sur le succès de la MINUSTAH, dont la Force a été dirigée pendant ses 13 années d’existence par le Brésil.  Il a cité diverses « expériences positives », comme la coopération entre le personnel civil et militaire sur le terrain, la communication auprès des communautés, les mesures de confiance ou encore le rôle important confié aux femmes, voyant dans ces approches innovantes de possibles modèles pour d’autres missions.  Tout en se félicitant de la diminution de la criminalité et du nombre des homicides, M. Vieira a toutefois invité à la prudence et a souhaité la poursuite par la MINUJUSTH des projets à impact rapide et des projets communautaires de réduction de la violence, estimant qu’ils avaient contribué à la stabilisation.

M. Vieira a pris note de la stratégie de sortie sur deux ans préconisée par le Secrétaire général pour la transition vers une présence des Nations Unies qui ne soit plus une opération de maintien de la paix.  Il a salué le fait que les 11 objectifs définis comme critères de sortie aient été adoptés en étroite coopération avec le Gouvernement haïtien.  Il a souhaité que cette consultation se poursuive tout au long de l’examen de la stratégie de sortie.  À cet égard, il a encouragé tant la Mission que le Gouvernement à profiter du mandat de la Mission pour mettre en pratique un ambitieux programme de réforme de l’état de droit, afin que le pays puisse consolider les gains de stabilité acquis ces 14 dernières années.

Enfin, le représentant a encouragé la prorogation d’un an du mandat de la MINUJUSTH avec un budget et une composante de police inchangés.  Le Brésil aurait toutefois préféré que la référence au Chapitre VII de la Charte de l’ONU dans le projet de résolution se limite aux activités de la composante police.  Par ailleurs, le Brésil reste engagé à long terme en faveur d’Haïti.  Si ses Casques bleus sont partis, son engagement reste ferme, comme en témoigne la coopération bilatérale croissante, a conclu le représentant. 

M. FRANCISCO GONZÁLEZ (Colombie) a salué la transition sans heurts entre la MINUSTAH et la MINUJUSTH et le bon fonctionnement de cette dernière.  Il n’y aura pas de stabilité en Haïti sans le renforcement des institutions démocratiques, a-t-il prévenu.  Il a rappelé que la MINUJUSTH a pour tâches essentielles de promouvoir l’état de droit et de renforcer les capacités de la Police nationale.  Il a souhaité la mise en œuvre de réformes profondes du secteur judiciaire haïtien ainsi que l’affectation de davantage de ressources pour financer les efforts de formation de la Police nationale.  En conclusion, le délégué a salué la souplesse affichée par le Conseil de sécurité dans l’évaluation du mandat de la Mission, en tenant compte de la situation sur le terrain. 

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