En cours au Siège de l'ONU

Réuni au niveau ministériel, le Conseil de sécurité réfléchit aux moyens de renforcer le partenariat avec l’Afrique pour y promouvoir paix et sécurité

8627e séance – après-midi
CS/13965

Réuni au niveau ministériel, le Conseil de sécurité réfléchit aux moyens de renforcer le partenariat avec l’Afrique pour y promouvoir paix et sécurité

Sous l’impulsion de la Fédération de Russie, qui en préside les travaux en septembre, le Conseil de sécurité a organisé, cet après-midi, une réunion au niveau ministériel sur les partenariats visant à renforcer la paix et la sécurité en Afrique, théâtre du plus grand nombre de conflits au monde.

La Chef de Cabinet du Secrétaire général, Mme Maria Luiza Ribeiro Viotti, a indiqué à cette occasion que la collaboration entre l’ONU, l’Union africaine et ses États membres et les différentes communautés économiques régionales de l’Afrique n’avait jamais été « aussi conséquente ».  Elle en a voulu pour preuve le fait que le Fonds pour la paix de l’Union africaine totalise des contributions d’un montant de 124 millions de dollars à ce jour, « le niveau le plus important mobilisé depuis sa création », et que son Unité d’appui à la médiation, de même que le réseau FemWise, sont désormais opérationnels.

Mme Ribeiro Viotti s’est aussi félicitée du renforcement du partenariat entre l’ONU et l’Union africaine grâce à la signature, depuis 2017, de deux cadres conjoints : le Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité et le Cadre de développement durable conjoint Union africaine-ONU.

Au cours d’une séance où nombreux ont été les orateurs à reconnaître la nécessité d’une appropriation par l’Afrique de ses priorités continentales, le Président de la Commission de cette organisation régionale, M. Moussa Faki Mahamat, a assuré que l’Union africaine n’avait aucun « agenda spécifique », avant de plaider en faveur d’un partenariat respectueux et « non supplétif ».

Il a illustré son propos par le dossier libyen, marqué « depuis le départ » par une « marginalisation frustrante » de l’Afrique, avec une pluralité d’intervenants extérieurs au continent « dont chacun poursuit un agenda qui lui est propre ».  Cette configuration a, selon lui, clairement montré ses limites et la crise ne cesse de s’approfondir, exigeant un « mécanisme conjoint d’exécution » mettant l’Afrique « au cœur » du dispositif, a affirmé M. Mahamat, pour qui il s’agit de « bon sens » et de « recherche d’efficacité ». 

Le Président de la Commission de l’Union africaine a été rejoint sur ce point par le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, M. Sergey Lavrov, qui a estimé que la Libye était devenue le théâtre d’une ingérence étrangère, et plus généralement que l’Afrique était soumise à des « diktats » imposés par des puissances étrangères.  Le Chef de la diplomatie russe lui a proposé la coopération de son pays, présentée comme respectueuse des principes de neutralité et d’impartialité consacrés par la Charte des Nations Unies, notamment s’agissant de ses programmes de formation des Casques bleus.

Force est de reconnaître que le choc libyen a favorisé, depuis 2011, la prolifération des armes et des réseaux de criminalité transnationale, a tranché M. Marcel Amon-Tanoh, Ministre des affaires étrangères de Côte d’Ivoire, exigeant un partenariat renforcé entre l’ONU et l’Union africaine.  Dans le seul espace de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), on a recensé plus de 2 200 attaques faisant 11 500 morts et des milliers de déplacés au cours des quatre dernières années, a poursuivi le Ministre.  Sans remettre en cause les initiatives existantes, les chefs d’État de la CEDEAO ont donc décidé de fédérer leurs moyens et le sommet extraordinaire que l’organisation sous-régionale vient de consacrer, à Ouagadougou, à la lutte contre le terrorisme a ainsi adopté un plan d’action d’un montant d’un milliard de dollars qui sera financé sur des ressources internes, a précisé M. Amon-Tanoh.

« Nous devons aussi aller plus loin en ce qui concerne le cofinancement par l’Union africaine et l’ONU des prochaines opérations africaines de paix », a estimé son homologue de la France, M. Jean-Yves Le Drian, appuyant ainsi la Chef de Cabinet du Secrétaire général.  La France apporte donc « son soutien à la démarche de l’Union africaine visant à ce que le Conseil de sécurité autorise, au cas par cas et selon des modalités précises, le recours aux contributions obligatoires, en complément de la contribution de l’Union africaine, pour financer ces mêmes opérations », a-t-il expliqué, une position également soutenue par le Royaume-Uni, mais qui butte toujours sur les réticences des États-Unis, pour lesquels toute résolution éventuelle du Conseil de sécurité sur ce point « devra prendre en compte des éléments tels que le partage des responsabilités et les normes de comportement en vigueur dans le maintien de la paix ».

La France n’en a pas moins salué le travail engagé par le Secrétaire général de l’ONU et le Président de la Commission de l’Union africaine sur la question, en particulier l’engagement pris au Sommet de Kigali de 2016 par l’Union africaine de financer 25% du coût de ces opérations d’ici à 2020, via son Fonds pour la paix.

Pour M. Jean-Christophe Belliard, le Secrétaire général adjoint de l’Union européenne, la prévention des conflits est une « obligation de la communauté internationale et non pas une ingérence », car c’est dans la prévention des conflits qu’on peut éviter des interventions plus énergiques, a expliqué M. Belliard.  L’Union européenne demeure engagée à poursuivre une démarche multidimensionnelle coordonnée des acteurs publics sur les plans sécuritaire, humanitaire, et du développement a-t-il poursuivi, citant le Sahel comme « le meilleur exemple de cette approche intégrée ».

Les initiatives de paix et de sécurité africaines menées par la communauté internationale doivent nécessairement respecter les engagements pris par les Africains en ce qui concerne la « gouvernance sécuritaire » du continent, dont la coordination a été assignée clairement à l’Union africaine, a encore déclaré M. Belliard.  Il a rappelé que, depuis 2007, l’Union européenne avait consacré 2,7 milliards d’euros au financement des initiatives africaines menées dans le cadre de l’architecture de paix et de sécurité du continent. 

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE: PARTENARIAT VISANT À RENFORCER LA PAIX ET LA SÉCURITÉ RÉGIONALE (S/2019/743)

Déclarations

Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI, Chef de Cabinet du Secrétaire général, a indiqué que la collaboration entre l’ONU, l’Union africaine et ses États membres et les différentes communautés économiques régionales de l’Afrique n’avait jamais été aussi importante.  Elle a salué la détermination des chefs d’État et de gouvernement africains à répondre de manière holistique aux défis à la paix et à la sécurité, citant notamment le fait que l’Union africaine avait choisi de placer l’année 2020 sous le thème « Faire taire les armes à feu: créer les conditions propices au développement de l’Afrique ».  Elle a également relevé que le Fonds pour la paix de l’Union africaine s’était procuré 124 millions de dollars à ce jour, « le niveau le plus important de contributions mobilisées depuis sa création », et que son Unité d’appui à la médiation, de même que le réseau FemWise, étaient désormais opérationnels.  Elle s’est aussi félicitée du renforcement du partenariat entre l’ONU et l’Union africaine grâce à la signature de deux cadres conjoints: le Cadre commun ONU-Union africaine pour un partenariat renforcé en matière de paix et de sécurité et le Cadre de développement durable conjoint Union africaine-ONU.

Selon Mme Ribeiro Viotti, les progrès se manifestent également au niveau des pays, aussi bien au sein des processus de paix que dans la vie des personnes.  Elle a rappelé la tenue d’élections libres et crédibles en 2018 à Madagascar, grâce à une coordination rapprochée entre la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), l’Union africaine et l’ONU, ainsi que la signature, à l’issue d’un processus de négociation mené par l’Union africaine, de l’Accord politique relatif à la situation en République centrafricaine.  En Guinée-Bissau, le Groupe des Cinq continue d’appuyer les efforts de rétablissement de la stabilité, tandis qu’au Soudan la signature, le mois dernier, d’une déclaration constitutionnelle, à la suite des efforts menés par l’Éthiopie et l’Union africaine, a permis d’établir un gouvernement civil de transition.

La Chef de Cabinet a aussi parlé de l’intensification de la coopération entre l’ONU, l’Union africaine et les organisations sous-régionales dans le domaine des processus électoraux, citant notamment les efforts déployés par le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel en Sierra Leone, au Nigéria et au Sénégal.  L’ONU appui aussi la mise en œuvre des recommandations d’une étude de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de la Commission économique pour l’Afrique sur les défis liés au pastoralisme et à la sécurité dans cette région.  Mme Ribeiro Viotti a également indiqué que l’ONU et l’Union africaine coopéraient de manière rapprochée pour que les voix des femmes et des jeunes fassent partie intégrante du processus de paix, pour ensuite évoquer l’alignement des stratégies de l’ONU et de l’Union africaine dans la région du Sahel. 

Mme Ribeiro Viotti a appelé la communauté internationale à appuyer les efforts de l’Afrique de manière plus efficace et à renforcer davantage les capacités institutionnelles afin d’entreprendre des mesures de diplomatie préventive.  Elle a insisté sur le rôle central que jouent les opérations de paix dans les efforts de l’ONU, notant que plus 80 000 Casques bleus sont actuellement déployés dans sept opérations de maintien de la paix à l’échelle du continent.  Elle a de plus signalé que l’Afrique est devenue la plus importante région contributrice de contingents, pour ensuite saluer la coopération directe entre l’ONU et l’Union africaine au sein même des opérations de paix.

« Cependant, nous pouvons faire encore mieux », a tempéré la Chef de Cabinet.  Mme Ribeiro Viotti a notamment appelé à assurer le financement prévisible, durable et souple des opérations de paix dirigées par l’Union africaine et autorisées par le Conseil de sécurité, et à appuyer, grâce à la Commission de consolidation de la paix, les infrastructures nécessaires à la paix aux niveaux local et national.  Il importe également que la communauté internationale appuie l’initiative « Faire taire les armes à feu » de l’Union africaine, a-t-elle indiqué, précisant que le Secrétariat, agences, fonds et programmes de l’ONU sont en train de renforcer l’appui aux objectifs de cette initiative.

MOUSSA FAKI MAHAMAT, Président de la Commission de l’Union africaine, a salué l’élaboration d’une architecture de paix aux organes relativement efficaces, qui reflète un socle de valeurs partagées sur le principe que les problèmes africains doivent être résolus par les Africains et que le fardeau doit être supporté, pour l’essentiel, par les ressources propres de l’Afrique.

Sur cette base, l’Union africaine a proposé au Conseil de sécurité un modèle original de financement des missions de maintien de la paix, assuré par l’Union africaine et aussi par le Conseil, seul vrai responsable de la paix dans le monde, sur les ressources éligibles de l’organisation: cette question est aujourd’hui au cœur des préoccupations en matière de paix et de sécurité en Afrique, a rappelé M. Mahamat. 

Pour le Président de la Commission de l’Union africaine, les menaces à la paix sur le continent appellent d’urgence des approches innovantes car les mécanismes et réponses traditionnels ne répondent plus vraiment aux besoins.  Il a cité à cet égard le terrorisme et les trafics en tous genres, insaisissables par des modèles anciens.

Les coûts et les lourdeurs bureaucratiques des déploiements traditionnels les rendent inadaptés, obsolètes et inefficaces, a-t-il insisté, en souhaitant un nouveau modèle doté de mécanismes juridique, politique, financier et opérationnel, mieux adapté au contexte africain.  L’Union africaine est prête à travailler avec le Conseil en ce sens.

Des avancées significatives ont été obtenues avec la normalisation en République démocratique du Congo, en République centrafricaine et même au Soudan du Sud et en Somalie, ainsi qu’autour du bassin du lac Tchad, a estimé M. Mahamat.  Mais ces progrès ne doivent pas cacher les fragilités qui demeurent, ni les zones d’ombre.

Ainsi, au Sahel, les efforts contre le terrorisme ne donnent pas encore les résultats attendus.  Les pays du Groupe de cinq pays du Sahel (G5 Sahel) se sont regroupés pour mutualiser leurs ressources, mais le soutien du Conseil est ici essentiel ainsi qu’une vraie solidarité internationale, a plaidé le Président de la Commission. 

M. Mahamat s’est également étendu sur la crise libyenne, marquée « depuis le départ » par une « marginalisation frustrante » de l’Afrique, avec une pluralité d’intervenants extérieurs au continent « dont chacun poursuit un agenda qui lui est propre ».  Cette configuration de traitement du dossier libyen a montré ses limites et la crise ne cesse de s’approfondir, a-t-il affirmé.  Pour l’Union africaine, il faut d’abord, pour sortir de cette situation, clairement décider qu’il n’y a pas de solution militaire à cette crise, appliquer avec rigueur l’embargo sur les armes d’extrême urgence et engager un processus de négociation politique inclusif.

Ceci requiert un « mécanisme conjoint d’exécution » mettant l’Afrique au cœur du dispositif, a affirmé M. Mahamat, pour qui il ne s’agit pas là d’ego de la part de l’Union africaine mais de bon sens et de recherche d’efficacité.  L’Union africaine n’a aucun agenda spécifique mais cherche un partenariat respectueux et non supplétif recevant des ordres, a-t-il conclu. 

M. SERGEY V. LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a déclaré que le maintien de la paix et de la sécurité en Afrique était une mission cardinale, alors que ce continent est secoué de conflits et sous le coup de plusieurs menaces.  À la suite de leur lutte de libération acharnée pour l’accession à l’indépendance, dans laquelle la Russie a joué un rôle historiquement important, les pays africains se sont retrouvés confrontés à des diktats imposés par des puissances extérieures, a poursuivi M. Lavrov.  Le Ministre en a voulu pour preuve le cas de la Libye, devenue à ses yeux le théâtre d’une ingérence étrangère. 

En République centrafricaine et au Soudan du Sud, des accords de paix sont en train d’être mis en œuvre, grâce au courage des pays voisins qui se sont mobilisés pour assurer une médiation, a ensuite estimé M. Lavrov.  Toutefois, a-t-il ajouté, les dirigeants africains ne sont pas en mesure de résoudre tous leurs problèmes par eux-mêmes, ils ont besoin à cet égard de l’aide de la communauté internationale.

Considérant comme de la plus haute importance la coopération dans le domaine de la paix et de la sécurité, M. Lavrov a déclaré que sa délégation était prête à négocier à un projet de résolution qui sera présenté au Conseil de sécurité par la « troïka » africaine, dans laquelle il a vu un maillon reliant le Conseil de sécurité à l’Union africaine. 

La coopération russe, a assuré M. Lavrov, s’appuie sur les principes de neutralité et d’impartialité consacrés par la Charte des Nations Unies.  C’est dans ce contexte que la Fédération de Russie finance des programmes de formation des Casques bleus, avec un accent particulier sur les policières africaines.  En outre, deux cargaisons d’armes russes viennent d’être livrées en République centrafricaine.  Pour la Fédération de Russie, il est primordial de créer des forces armées efficaces et de renforcer les capacités des institutions étatiques, deux domaines dans lesquels ce pays prête également assistance, a encore assuré le Ministre. 

Pour M. MARCEL AMON-TANOH, Ministre des affaires étrangères de Côte d’Ivoire, la détérioration inquiétante de la situation sécuritaire sur le continent appelle de la part des organisations régionales des réponses urgentes et concertés, axées sur des partenariats stratégiques solides et mutuellement bénéfiques pour tous les acteurs.  Ces partenariats permettront d’atteindre les résultats visés sans compréhension de dynamiques à l’œuvre sur des terrains aussi variés que la pauvreté ou les groupes armés.

Pour être efficace l’action doit avant tout s’orienter vers l’appui aux stratégies de lutte contre la pauvreté, a poursuivi le Ministre.  Toutefois, le renforcement des capacités et des institutions régionales dans les domaines de prévention des conflits est tout ainsi indispensable.

Dans la sous-région d’Afrique de l’Ouest, la Côte d’Ivoire se félicite de la coopération entre la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS).  La Côte d’Ivoire souhaite d’ailleurs vivement le renforcement des capacités de la CEDEAO comme celles de l’Union africaine, car ce sont des outils d’alerte précoce, de veille stratégique et d’identification des conflits.

Dans l’espace de la CEDEAO, on a recensé plus de 2 200 attaques faisant 11 500 morts et des milliers de déplacés au cours des quatre dernières années, a poursuivi M. Amon-Tanoh.  Sans remettre en cause les initiatives existantes, les chefs d’État de la CEDEAO ont en donc décidé de fédérer leurs moyens et le sommet extraordinaire que l’organisation sous-régionale vient de consacrer à Ouagadougou à la lutte contre le terrorisme a ainsi adopté un plan d’action d’un montant d’un milliard de dollars qui sera financé sur des ressources internes, a poursuivi le Ministre.

Mais force est de reconnaître que le choc libyen a favorisé depuis 2011 la prolifération des armes et des réseaux criminels transnationaux, a encore fait observer M. Amon-Tanoh, ce qui impose, pour s’y opposer, un partenariat renforcé entre l’ONU et l’Union africaine.  Car, a-t-il conclu, les menaces dans la région pèsent bien au-delà de ses frontières.

M. SIMEON OYONO ESONO ANGUE, Ministre des affaires étrangères et de la coopération de la Guinée équatoriale, a déclaré que la prolifération des armes légères et de petit calibre, le trafic de ressources naturelles, la faiblesse des institutions de l’État figuraient parmi les principales raisons de l’instabilité du continent africain.  Ces causes sont trop souvent aggravées par la montée de l’extrémisme et du terrorisme, de même que par les changements climatiques, tous les phénomènes qui provoquent en conséquence des migrations massives. 

Après avoir souligné le rôle joué par les opérations de paix de l’Union africaine, M. Esono Angue a rappelé qu’en février 2019, son pays avait présenté une résolution sur le thème: « Faire taire les armes en Afrique: coopération entre l’Organisation des Nations Unies et les organisations régionales », laquelle avait été adoptée par le Conseil.  Une fois mis en œuvre, ce texte sera de nature à pacifier le continent, a estimé le Ministre.  Il a également jugé nécessaire que soient mobilisées les communautés économiques régionales dans la formulation des mécanismes de règlement et de prévention des conflits en Afrique. 

Mme NALEDI PANDOR, Ministre des relations internationales d’Afrique du Sud, a salué les avancées réalisées en réponse aux aspirations de l’Union africaine dans le cadre de l’initiative « Faire taire les armes en Afrique d’ici à 2020 », qui a permis de régler certains conflits de longue date.  Depuis que l’Organisation de l’unité africaine (OUA) est devenue l’Union africaine en 2002, le continent s’est doté d’un cadre solide face aux défis en matière de sécurité et aux menaces, a-t-elle estimé.  Ces cadres ont pour certains mué en initiatives sous-régionales qui ont permis au continent de réduire les conflits armés et violents.

Malgré ces progrès, les défis restent complexes et portent sur des questions transversales entre la paix et la promotion du développement, de l’accès aux ressources de la bonne gouvernance, a tempéré la Ministre.  Pauvreté, marginalisation, inégalité, chômage, pillage des ressources, ingérence extérieure ou encore changements climatiques ont encouragé l’instabilité et l’insécurité.  C’est aussi le cas de la mauvaise gouvernance ou de l’aventurisme militaire.

Les conséquences se font ressentir sur le continent et sur d’autres régions.  C’est pourquoi des partenariats solides sont nécessaires.  Pour que l’Afrique puisse atteindre la paix et la prospérité, il faut mettre en œuvre les aspirations du continent.  Les Nations Unies apportent une contribution considérable en Afrique, notamment avec les soldats de la paix et via le système des Nations Unies pour le développement, a relevé Mme Pandor.

L’Union africaine et les organisations régionales ont montré pour leur part un fort leadership en réagissant rapidement grâce à leur connaissance des situations et des dynamiques régionales, a plaidé la Ministre.  Mais, lorsque les missions se retirent pour céder la place à la reconstruction, il faut pouvoir coordonner les efforts et les harmoniser entre les différents acteurs.  La Commission de consolidation de la paix (CCP) des Nations Unies et le cadre d’action de l’UA pour la reconstruction et le développement après un conflit doivent travailler main dans la main pour assister les pays concernés, a poursuivi Mme Pandor, pour qui il convient d’associer les femmes et les jeunes, car ce sont les conditions sine qua non d’une paix durable.  Mais il est indispensable que ces organismes se complètent et œuvrent à des objectifs communs, a-t-elle averti.

M. SHEIKH SABAH KHALID AL HAMAD AL SABAH, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Koweït, a expliqué que la coopération entre l’ONU et l’Union africaine avait connu des développements majeurs ces dernières années, grâce à la signature d’une déclaration conjointe visant à renforcer leurs axes de collaboration.  Il a appelé à préserver les efforts en cours pour conserver les divers gains, afin de rendre plus efficaces les opérations de paix africaines, tout en préconisant le développement de sociétés participatives, seules à même de garantir une stabilité durable. 

Le Ministre a rappelé les principes de « l’Agenda 2063: L’Afrique que nous voulons », qui affirme qu’il faut consolider la paix et la tolérance, la bonne gouvernance et les droits de l’homme.  Selon lui, l’Afrique assure la « continuité stratégique » de la paix dans le monde arabe. 

Se disant en phase avec le rapport de l’ancien Secrétaire général sur les causes profondes des conflits en Afrique, M. Al Sabah a affirmé qu’il ne saurait y avoir de paix sans développement ni de développement sans paix, un principe de réciprocité qui, a-t-il ajouté, est au fondement de la politique étrangère du Koweït vis-à-vis des nations africaines.  Le Koweït s’est ainsi engagé à réaliser des investissements d’un montant d’un milliard de dollars en vue d’améliorer les infrastructures africaines.  Enfin, le Chef de la diplomatie koweitienne a souligné que l’ONU devait faciliter l’application de la résolution « Faire taire les armes » adoptée le 27 février dernier.

M. WANG YI, Ministre des affaires étrangères de la République populaire de Chine, a appuyé les pays africains dans la recherche de solutions africaines aux problèmes africains.  Aider le continent à accéder à la paix et à la sécurité est un devoir de la communauté internationale et il faut l’appuyer et renforcer ses capacités en ce sens, a-t-il ajouté.  L’Afrique représente un cinquième de la population mondiale, a rappelé le Ministre, pour qui le grand nombre des questions abordées par le Conseil de sécurité concernant le continent témoignent de l’importance de ses sujets.

En traitant leurs problèmes eux-mêmes les pays africains -qui connaissent le mieux la situation- ont renforcé leurs partenariats et le Conseil de sécurité devrait être à l’écoute de leurs points de vue, a poursuivi M. Yi.  Ces dernières années ont montré un approfondissement de cette coopération et cet élan doit être poursuivi, a-t-il affirmé.

Le défi principal pour le continent africain reste le manque de capacités et de financement, a estimé le Ministre.  Aussi, le Conseil de sécurité et la communauté internationale doivent-ils assumer leurs responsabilités.  La Chine appelle les membres du Conseil à parvenir à un consensus sur ce point au plus vite.

M. Yi a aussi salué la création d’un gouvernement de transition au Soudan, assurant que la Chine se tenait prête à travailler avec lui.  Par ailleurs, l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) devrait se retirer au plus vite, en juin, pour que ses ressources soient affectées ailleurs, a-t-il estimé.  À propos de la Libye, il a prôné une solution par les Libyens et pour les Libyens, avec le soutien des organisations régionales, Union africaine et Ligue arabe.

La Chine préconise des partenariats fondés sur les principes de bonne foi et de sincérité en vue d’une solution garantissant les intérêts communs, a encore affirmé le Ministre.  La Chine appuie le renforcement des capacités de l’Afrique à maintenir la paix en allouant des centaines de millions de yuans. 

M. JEAN-YVES LE DRIAN, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a rappelé que l’Afrique n’était pas en attente de notre générosité, mais de partenaires.  C’est la raison pour laquelle la France se tourne vers elle pour y nouer des partenariats économiques durables, « d’égal à égal », investir dans le secteur privé, dans les innovations et la jeunesse.  Ce sera d’ailleurs le thème du prochain sommet Afrique-France qui sera organisé à Bordeaux en juin 2020, a annoncé le Chef de la diplomatie française. 

S’agissant du partenariat entre l’Union africaine et l’ONU, M. Le Drian a cité trois exemples récents couronnés de succès, à commencer par le soutien apporté par l’ONU et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) aux efforts de l’Union africaine à Madagascar.  Des efforts conjugués qui ont permis de renforcer la transparence et la crédibilité de l’élection présentielle de 2018 dans ce pays, a-t-il estimé.

En République centrafricaine, a poursuivi M. Le Drian, l’action conjuguée de l’Union africaine et de l’ONU a permis la signature, le 6 février dernier, de l’Accord de paix entre le Gouvernement et les groupes armés.  Et au Sahel, l’action conjointe de l’ONU, l’Union africaine, de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et du G5 Sahel est indispensable, comme en témoignent la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, où l’ONU et l’Union africaine jouent un rôle clef au sein du comité du suivi, mais aussi la lutte antiterroriste, avec le soutien logistique de la MINUSMA à la Force conjointe du G5 Sahel.  Le Ministre a ensuite suggéré d’approfondir le partage de l’information d’alerte précoce, pour mieux anticiper et prévenir les crises. 

Nous devons aussi aller plus loin en ce qui concerne le cofinancement par l’Union africaine et l’ONU des prochaines opérations africaines de paix, a estimé M. Le Drian.  La France apporte donc son soutien à la démarche de l’Union africaine visant à ce que le Conseil de sécurité autorise, au cas par cas et selon des modalités précises, le recours aux contributions obligatoires, en complément de la contribution de l’Union africaine, pour financer ces opérations.  Le Ministre a donc salué le travail engagé par le Secrétaire général de l’ONU et le Président de la Commission de l’Union africaine sur cette question, en particulier l’engagement pris au Sommet de Kigali de 2016 par l’Union africaine de financer 25% du coût de ces opérations d’ici à 2020, via son fonds pour la paix.

Mme RETNO LESTARI PRIANSARI MARSUDI, Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, a affirmé que son pays partageait la volonté de partenariat à tous les niveaux avec l’Afrique, détaillant un partenariat qui ne nuise pas, qui apporte des retombées économiques au continent et lui permette de progresser.

Les problèmes de paix et de sécurité auxquels sont confrontées certaines régions de l’Afrique sont de plus en plus complexes et chaque situation suppose une solution adaptée à la situation sur le terrain, a poursuivi la Ministre.  Pour l’Indonésie, la communauté internationale doit accompagner les efforts du continent dans la recherche de la paix et la sécurité, mais il est aussi nécessaire de renforcer les partenariats avec les organisations sous-régionales.  La coopération interrégionale compte également beaucoup, comme celle établie entre l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et l’Union africaine sur des questions d’intérêts communs.

Enfin, il est important d’accroître le soutien international au développement des capacités africaines, dans le domaine des infrastructures, du commerce et des stratégies industrielles, a encore estimé la Ministre.  L’Indonésie, pour sa part, contribue à sept missions de maintien de la paix de l’ONU en Afrique et continuera de le faire, car elle entend être un partenaire dans le maintien de paix et de la sécurité. 

Pour M. JACEK CZAPUTOWICZ, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, le principe « des solutions africaines aux problèmes africains » reste valable.  Néanmoins, les défis du continent en matière de sécurité, et en premier lieu ceux du terrorisme et de l’extrémisme, ne connaissent pas de frontières, a-t-il remarqué en citant les cas du Mali, de la Libye et de la Somalie.  Il s’agit là de menaces de sécurité qui concernent d’autres pays que ces trois-là et même toute la région.  Elles exigent des solutions sur mesure sur le terrain et des efforts conjoints internes et internationaux.

Le Ministre a dit voir dans la résolution 2475 (2019) adoptée par le Conseil de sécurité cette année et qui porte sur l’initiative « Faire taire les armes en Afrique », un pas supplémentaire vers la stabilisation de la situation sur le continent à travers une coopération internationale renforcée.  Mais cette « collaboration étroite » ne signifie pas un transfert complet de la responsabilité à des organisations régionales et sous-régionales.  Les Nations Unies doivent répondre aux conflits de manière globale et avec tous les moyens disponibles, allant de la prévention, au maintien et à la consolidation de la paix.  À cette fin, une coopération plus intense entre l’ONU et l’Union africaine est cruciale, notamment pour ce qui est de développer et renforcer les bases institutionnelles de l’Union africaine, a reconnu M. Czaputowicz. 

Dès lors, la Pologne soutient les efforts visant à renforcer la médiation et la diplomatie préventive, le règlement pacifique des conflits et de leurs causes profondes.  Elle salue le leadership de l’Afrique de l’Ouest et des pays du Sahel qui sont à l’origine d’initiatives pour répondre aux défis sécuritaires de la région.  La Pologne reconnait aussi l’action de l’Union africaine et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour renforcer la sécurité dans les zones frontalières.  Les initiatives régionales pour faire face au terrorisme et au crime transnational organisé sont également bienvenues.  M. Czaputowicz a cité en exemple le rôle de la Force multinationale mixte contre Boko Haram, celui de la Force conjointe G5 Sahel et celui de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) dans la facilitation du processus de paix au Soudan du Sud.

Forte de son expérience, la Pologne rappelle l’importance d’institutions fortes et redevables pour la stabilité politique et la croissance économique en période de transition démocratique.  Pour le Ministre, la faiblesse des institutions de l’État est l’une des sources de l’insécurité et de l’instabilité en Afrique.  M. Czaputowicz a appelé à mettre l’accent sur les liens qui existent entre coopération dans les domaines de la sécurité et du développement pour construire des pays plus résilients et plus autosuffisants.

La Pologne est également consciente du fait que l’absence de perspectives pousse les jeunes Africains à s’embarquer dans des « voyages dangereux à l’étranger » et à se radicaliser.  Fort de ce constat, l’aide au développement de la Pologne mise sur l’éducation et la formation professionnelle pour offrir des opportunités aux jeunes en Afrique et répondre aux besoins des enfants et jeunes handicapés. 

M. NESTOR POPOLIZIO BARDALES, Ministre des affaires étrangères du Pérou, a appelé à renforcer les capacités de suivi et d’alerte précoce à l’échelle du continent africain, notamment en renforçant les différents Bureaux politiques de l’ONU de la région.  Il a jugé crucial d’y développer une diplomatie préventive et d’avoir recours aux moyens pacifiques de résolution des différends.  Il a estimé que les efforts déployés pour augmenter les normes d’efficacité et de performance des opérations de maintien de la paix devaient tenir compte des avantages comparatifs des institutions mondiales aussi bien que régionales.  Il a salué l’expérience africaine en matière de lutte contre le terrorisme, notamment par le truchement de la Force conjointe du G5 Sahel, pour ensuite insister sur l’importance d’un financement prévisible, durable et souple des opérations de paix de l’Union africaine. 

Le Ministre a par ailleurs appelé au renforcement mutuel du Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, l’objectif final étant d’enrayer les causes sous-jacentes des conflits, de promouvoir la croissance économique et d’appuyer la participation des femmes et des jeunes en tant qu’agent du changement.

M. BRUNO VAN DER PLUIJM (Belgique) a rappelé que la Belgique, tout comme l’Union européenne, plaide depuis longtemps pour un partenariat renouvelé, « plus global, plus dynamique et plus ambitieux » avec le continent africain.  Il a appelé à dépasser les antagonismes du passé et à travailler encore plus étroitement avec l’Union africaine dans le but de « faire taire les armes » en Afrique.  Il faut aussi travailler davantage ensemble au développement, aux droits humains et à la bonne gouvernance, « puissants vecteurs de stabilité », a-t-il dit.

M. Van Der Pluijm s’est réjoui des progrès enregistrés dans la revitalisation du Fonds pour la paix de l’Union africaine, estimant par ailleurs que les opérations de l’Union africaine devaient pouvoir bénéficier d’un financement solide et prévisible.  Il a appelé le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine à aller « un pas plus loin » dans la coordination et la collaboration, jugeant que l’analyse des risques devait être mieux alignée.  Il a également prévenu que ce « partenariat renouvelé » ne serait pertinent que s’il prenait en compte la diversité africaine.  Il a insisté sur le principe de subsidiarité, qui prévoit qu’une action publique doit être conduite en priorité au niveau le plus approprié.  En la matière, il a relevé que certaines crises étaient bien gérées à un niveau sous-régional, notamment en Gambie ou en Guinée-Bissau.  Il a cependant souligné que le principe de subsidiarité ne devait en aucun cas servir de prétexte à l’inaction et ne saurait être une barrière à des avancées.

M. Van Der Pluijm a conclu en rendant hommage aux femmes africaines, « qui prouvent chaque jour qu’elles sont prêtes à transformer le continent ».

M. HEIKO MAAS, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, a déclaré qu’il faut continuer de s’engager au-delà des crises immédiates, pour travailler sur les liens entre paix et développement.  C’est la raison pour laquelle son gouvernement à l’intention de verser 15 millions de dollars de plus au Fonds de consolidation de la paix.  Selon lui, la communauté internationale a besoin de nouer des partenariats plus solides avec l’Afrique, dans le respect des priorités continentales.  Faisons en sorte que le Conseil de sécurité soit une instance vers laquelle les civils africains puissent placer leurs espoirs à l’avenir, a ajouté le Chef de la diplomatie allemande. 

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a prôné une approche intégrée des Nations Unies en Afrique, estimant que l’Union européenne et l’ONU étaient des partenaires indispensables sur le continent.  Ces efforts, étroitement liés à ceux des organisations sous-régionales, ont porté leurs fruits au Soudan en 2019 ainsi qu’en République centrafricaine, a-t-il estimé.

La coopération et la coordination sur toute une gamme de questions continuent d’être un élément vital des stratégies de partenariat entre l’Union africaine, l’ONU et le Royaume-Uni qui reconnait le rôle essentiel joué par l’Union africaine dans les activités de paix sur le continent, comme il appuie la contribution des Nations Unies aux opérations de paix des Africains, au cas par cas et sur la base de certaines normes prédéfinies.

Le Royaume-Uni entretient pour sa part un partenariat de défense de longue date en matière de sécurité avec l’Afrique, a poursuivi le représentant.  Ainsi, le Royaume-Uni a formé l’été dernier des troupes du Malawi avant leur déploiement en République démocratique du Congo.

Mais on ne peut avoir de véritables débats sur ces questions sans inclure les femmes et filles africaines, qui seront d’ailleurs au cœur d’une conférence à Londres en novembre, a poursuivi M. Allen.  Les recherches et les études suggèrent que les processus de paix incluant des femmes ont plus de 35% de chances supplémentaires de perdurer, a-t-il fait valoir.

Sécurité, développement et bonne gouvernance sont étroitement imbriqués, a encore rappelé M. Allen.  En tant que principal contributeur en matière de développement en Afrique, le Royaume-Uni continuera à tout faire pour améliorer le quotidien des Africains et va contribuer à mobiliser les investissements privés dans le cadre d’un sommet début 2020 à Londres.  Mais il s’agit avant tout d’insister sur le fait que ce sont les Africains qui façonnent l’avenir du continent, a conclu le représentant. 

M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a indiqué que son pays avait versé 13,4 milliards de dollars d’aide financière à l’Afrique au cours de l’année, une somme qui témoigne de l’engagement de Washington auprès du continent.  Il a souligné l’importance de renforcer les liens avec différents partenaires. 

L’un des défis qui se posent à la coopération, c’est bien sûr le financement des opérations de paix de l’Union africaine, a rappelé le représentant, qui a déclaré que son gouvernement appuyait les efforts de l’ONU pour établir des systèmes en mesure de fournir des financements prévisibles.  Mais tout nouveau mécanisme nécessitera une approche réaliste et toute résolution éventuelle du Conseil de sécurité devra prendre en compte des éléments tels que le partage des responsabilités et les normes de comportement en vigueur dans le maintien de la paix, a-t-il averti.

M. MIGUEL VARGAS MALDONADO, Ministre des affaires étrangères de la République dominicaine, a estimé que les situations au Mali, au Soudan, en Libye ou en Somalie, démontraient que les menaces auxquelles est confrontée l’Afrique doivent être abordées de manière holistique.  Cependant, a-t-il précisé, la responsabilité fondamentale d’y répondre appartient aux pays africains, qui doivent bénéficier du soutien de la communauté internationale.  Le Ministre s’est attardé sur l’importance de l’initiative « Faire taire les armes en Afrique », se félicitant des progrès réalisés par les États africains dans l’opérationnalisation de la feuille de route pour parvenir à sa mise en œuvre. 

Pour faire face aux défis qui se posent en Afrique, il faut se pencher sur les causes immédiates et profondes de ces conflits, avant que ces situations n’échoient à l’ordre du jour du Conseil, a recommandé M. Vargas Maldonado.  Il a exhorté les organisations régionales à cimenter la confiance et la volonté politique nécessaires pour faire advenir la paix durable sur le continent, jugeant indispensable à cette fin le leadership de l’Union africaine. 

M EHAB FAWZY, Ministre adjoint des affaires étrangères de l’Égypte, a estimé que la meilleure manière de garantir paix et sécurité dans le monde et en particulier sur le continent africain consistait à traiter des racines profondes des problèmes.  Mais pour prévenir les conflits et les crises et éviter ainsi qu’elles n’éclatent, il est important de mettre l’accent sur la résolution des problèmes africains par les Africains, a-t-il ajouté.  Il a insisté sur la diplomatie préventive et sur la gestion de la reconstruction après les conflits, faisant valoir que son pays consentait des efforts considérables dans ces domaines, y compris pour relancer les politiques africaines sur le sujet.

Des efforts doivent cependant être engagés au niveau international et pour garantir la coordination entre le Conseil de sécurité et l’Union africaine sur les questions figurant à leurs ordres du jour commun, a poursuivi M. Fawzy.

Enfin, tous les efforts régionaux et internationaux doivent respecter la souveraineté des États et le rôle central des gouvernements, conformément aux priorités nationales, a insisté le Ministre adjoint.  Une paix durable ne saurait en effet être obtenue sans renforcer les capacités des gouvernements à étendre leur présence sur leur territoire.

M. Fawzy a conclu en mettant également l’accent sur le développement pour aller vers la pérennisation de la paix et de la stabilité.  C’est dans ce cadre que l’Égypte s’apprête à lancer le Forum d’Assouan pour la paix et le développement, les 11 et 12 décembre.

M. JEAN-CHRISTOPHE BELLIARD, Secrétaire général adjoint de l’Union Européenne, a relevé qu’hormis l’Union européenne, l’Afrique est le seul continent à s’être doté des moyens et instruments pour assurer la paix et la stabilité sur son territoire.  Grâce à l’Union africaine, il n’existe plus de conflits majeurs sur son territoire, a-t-il estimé.  Mais des défis sécuritaires importants demeurent souvent liés à l’incapacité des États à assurer une présence sécuritaire sur tout leur territoire ou à répondre aux aspirations de leur population.  Ces fragilités sont aggravées par les menaces et trafics transnationaux qui encouragent le terrorisme.  Il faut donc continuer de se mobiliser pour soutenir les États africains et à ce titre, l’engagement fervent de l’Union africaine au Soudan a valeur d’exemple.

Pour l’Union européenne, la prévention des conflits est une obligation de la communauté internationale et non pas une ingérence, car c’est dans la prévention des conflits qu’on peut éviter des interventions plus énergiques, a expliqué M. Belliard.  L’Union européenne demeure engagée à poursuivre une approche intégrée, qui exige une démarche multidimensionnelle coordonnée des acteurs publics sur les plans sécuritaire, humanitaire, et du développement a-t-il poursuivi, citant le Sahel comme « le meilleur exemple de cette approche intégrée » adoptée par l’Union européenne.

Les initiatives de paix et de sécurité africaines menée par la communauté internationale doivent nécessairement respecter les engagements pris par les Africains en ce qui concerne la « gouvernance sécuritaire » du continent, dont la coordination a été assignée clairement à l’Union africaine, a encore déclaré M. Belliard.  Il a rappelé que, depuis 2007, l’Union européenne avait consacré 2,7 milliards d’euros au financement des initiatives africaines menées dans le cadre de l’architecture de paix et de sécurité du continent.  Par ailleurs, l’Union africaine et l’Union européenne ont établi un partenariat stratégique lors de leur premier sommet au Caire en 2000 et le dernier sommet en date à Abidjan, en mai 2018, a permis de redéfinir les priorités communes.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

De la « coalition pour l’espoir » de l’Iran aux changements climatiques, le débat de l’Assemblée générale placé sous le signe des tensions régionales

Soixante-quatorzième session,
5e et 6e séances plénières - Matin et après-midi
AG/12187

De la « coalition pour l’espoir » de l’Iran aux changements climatiques, le débat de l’Assemblée générale placé sous le signe des tensions régionales

Le deuxième jour du débat général a été marqué par la venue du Président de l’Iran qui, face au risque d’embrasement du Golfe persique, a proposé de créer une « coalition pour l’espoir » réunissant les pays de la région, arguant que « la sécurité ne peut être ni achetée, ni fournie par des gouvernements étrangers ». 

La vaste majorité des 31 chefs d’État et les six chefs de gouvernement qui se sont succédé à la tribune ont également prévenu de l’urgence qu’il y a à régler le problème des changements climatiques, à l’instar de nombreux pays africains, mais aussi du Premier Ministre des Fidji qui a fustigé l’inaction des nations « trop aveugles pour voir la catastrophe qui se déploie à leurs pieds ou trop impotentes pour faire ce qu’il faut ».

Arguant que la communauté internationale se trouve à un moment déterminant qui définira le cours de l’histoire, M. J. V. Bainimara a notamment exhorté le monde à s’unir autour de ses intérêts communs pour combattre un ennemi des plus puissants: « un monstre que nous avons créé nous-mêmes; une planète en surchauffe qui titube sous le poids de nos excès, nous qui avons pris la résilience pour acquis ».

Le Premier Ministre de la République tchèque, M. Andrej Babiš, a toutefois trouvé injuste et faux de prétendre que personne ne faisait rien.  « En tant que Membres des Nations Unies, nous avons une responsabilité commune envers notre planète.  Cependant, en tant que dirigeants de nos pays, nous avons une responsabilité envers nos citoyens.  Nous avons un mandat pour leur assurer une économie prospère et la protection de l’environnement », a-t-il résumé.

Outre les changements climatiques, nombre de dirigeants se sont préoccupés de la persistance de divers foyers de tensions dans le monde, à commencer par le Président Rouhani, de l’Iran, qui a expliqué que la « coalition pour l’espoir » qu’il préconise permettrait de renforcer les relations pacifiques et amicales entre pays voisins et d’assurer « collectivement » la liberté de navigation et la sécurité de l’approvisionnement énergétique, ainsi que la libre circulation du pétrole et d’autres ressources dans le détroit d’Ormuz et au-delà. 

« Notre région est au bord de l’effondrement et une simple maladresse pourrait attiser un feu terrible », a mis en garde M. Rouhani qui a appelé à ne tolérer aucune « intervention provocatrice étrangère ». 

Le Chef d’État iranien a également précisé que son retour à la table de négociation sur le Plan d’action global commun ne se fera qu’une fois les sanctions américaines levées.  « Je vous le dis sans ambages: si vous êtes satisfaits avec le minimum, alors nous aussi nous en accommoderons, mais si vous voulez davantage alors vous devez donner davantage », a affirmé le Président Rouhani qui a sommé les partenaires de l’Iran de revenir à la « réalité » des négociations, faisant observer que « la séance photo est la dernière étape des négociations, pas la première ». 

Les tensions dans la région ont également préoccupé le Président Salih de l’Iraq qui a lui aussi jugé nécessaire de mettre en place un système de sécurité collective.  « Nous n’accepterons pas de servir de tremplin pour une guerre contre nos voisins », a-t-il prévenu, tout en estimant que l’Iraq peut devenir un pôle économique pour la région.  Il a en outre appelé à faire de la lutte contre l’extrémisme et la création de perspectives pour les jeunes de la région des priorités immédiates. 

Toujours au Moyen-Orient, le Président du Liban a dénoncé, pour sa part, le recours permanent à la raison du plus fort, y voyant le « cœur du problème » pour les peuples de la région.  Pointant « certains pays et organisations internationales », M. Michel Aoun a par ailleurs dénoncé les « allégations faisant état d’une situation sécuritaire incontrôlée en Syrie » visant, selon lui, à « susciter des inquiétudes chez les personnes déplacées ».  Il a dit craindre que ces dernières ne deviennent « otages d’un éventuel troc dans le cadre d’une solution politique internationale à venir » et a prévenu qu’une telle attitude pourrait de facto pousser son gouvernement à encourager le processus de retour des réfugiés, en accord avec l’État syrien, afin de résoudre cette problématique « qui menace l’existence même du Liban ».

La situation en Libye s’est également imposée, notamment en raison de l’appel du Chef d’État libyen au lancement d’une mission d’établissement des faits du Conseil de sécurité et de la Cour pénale internationale (CPI) sur les attaques lancées par le général Khalifa Haftar.  « Dans ce conflit, le silence est aussi une arme pour les agresseurs », a notamment souligné M. Faiez Mustafa Serraj. 

Le Président du Mali s’est, pour sa part, particulièrement soucié des répercussions de la situation en Libye sur le Sahel.  Prévenant que l’environnement demeure volatile, il a souligné que les pays du G5 Sahel étaient conscients qu’une stratégie « tout sécuritaire » ne saurait apporter une paix durable dans la région.  Toujours en Afrique, le Président de la République centrafricaine, M. Faustin Archange Touadéra, a plaidé, pour sa part, pour une levée totale de l’embargo sur les armes pour permettre à l’État d’étendre son autorité sur l’ensemble du territoire national.

Du côté des Amériques, ce sont les répercussions de la crise au Venezuela qui ont le plus préoccupé les chefs d’État de la région qui sont intervenus aujourd’hui.  Le Président de la Colombie, M. Iván Duque, a notamment accusé la « dictature vénézuélienne » d’être un maillon supplémentaire de la chaîne du terrorisme transnational et a affirmé disposer de preuves formelles démontrant la « complicité » de M. Nicolás Maduro qui abriterait, sur le territoire vénézuélien, des éléments de l’Armée de libération nationale (ELN), un groupe rebelle colombien. 

Ce deuxième jour a également été marqué par la première intervention, depuis la tribune, du nouveau Président de l’Ukraine, M. Volodymyr Zelinski, qui a brandi une balle de 12,5 millimètres depuis la tribune, pour ensuite déplorer que « l’on résout les problèmes par les armes et non pas par les mots et le dialogue ». 

Le débat général de l’Assemblée générale se poursuivra demain, jeudi 26 septembre à partir de 9 heures.

Suite du débat général

M. VOLODYMYR ZELENSKYY, Président de l’Ukraine, a relevé que tous les pays représentés à l’Assemblée générale ont des valeurs et des problèmes différents, mais quelque chose les unit: « chacun d’entre nous a prononcé une première allocution depuis cette tribune ».  Qu’avez-vous ressenti à ce moment-là, lorsque le mélange de pragmatisme et de réalité géopolitique n’avait pas encore épuisé votre foi en votre capacité de pouvoir changer le monde? leur a-t-il demandé.  « Rappelez-vous combien il était important pour vous de faire passer le message, de vous faire entendre?  Je ressens la même chose aujourd’hui », a-t-il avoué. 

Il a ensuite cité le cas de Vasyl Slipak, un chanteur d’opéra ukrainien de renommée mondiale dont la carrière a été coupée court dans le Donbass « par une balle » alors qu’il défendait son pays contre l’agression russe.  Brandissant une balle depuis la tribune, M. Zelensky a indiqué que l’engin de 12,5 millimètres qui avait coûté la vie à l’artiste lyrique peut s’acheter pour moins de 10 dollars.  « Voilà le coût d’une vie humaine aujourd’hui », a déploré le Président ukrainien en s’exclamant: « bienvenue au XXIsiècle, un siècle de possibilités, comme celle d’être tué au lieu d’être écouté et entendu ». 

Il s’est attardé sur le conflit que connaît son pays depuis cinq ans, précisant que celui-ci avait fait, à ce jour, 13 000 morts et 1,5 million de déplacés.  Il a affirmé que mettre fin à la guerre, regagner tous les territoires ukrainiens occupés et rétablir la paix sont ses principaux objectifs, mais a prévenu qu’il ne le fera pas au coût de la vie de ses citoyens.  Il a réclamé l’appui de la communauté internationale pour mettre fin à cette guerre « qui fait rage au centre de l’Europe ». 

« On ne peut pas fermer les yeux sur ce genre de chose et penser que cela ne nous concerne pas », a mis en garde M. Zelensky en rappelant que c’est précisément l’absence de volonté et l’inaction qui étaient à l’origine de deux guerres mondiales.  L’Ukraine n’a pas oublié et elle a toujours fait la preuve de son attachement à la paix, notamment en renonçant à son arsenal nucléaire, a-t-il ajouté.  Elle croit en un avenir et en un effort collectif qui pourrait faire émerger un monde nouveau, un monde où chacun serait entendu et respecté, qu’on soit une puissance nucléaire ou pas. 

Le Président ukrainien a précisé qu’il ne remet pas en question la crédibilité du système international, et surtout pas celle de l’ONU, mais a néanmoins estimé qu’une révision de ce système s’impose.  « Au final, qu’est-ce qui unit les nations aujourd’hui: les catastrophes et les conflits ou des valeurs et objectifs communs? » s’est-il interrogé. 

Que faut-il faire lorsque les fondements même de la sécurité internationale sont compromis, a-t-il poursuivi, constatant que chaque guerre représente une menace pour la civilisation dans son ensemble.  « L’humanité a toujours su trouver des solutions pour raccourcir les distances ou soigner les malades, mais une chose n’a jamais changé, à savoir que l’on résout les problèmes par les armes et non pas par les mots et le dialogue. » 

Il a alerté que les avancées technologiques sont telles qu’en l’espace de temps suffisant pour prononcer quelques mots, des mondes entiers peuvent être rayés de la carte.  Dès lors, M. Zelensky a estimé que chaque dirigeant doit assumer sa part de responsabilité pour son pays, mais aussi le reste du monde.  À ses yeux, un dirigeant fort, c’est celui qui garde à l’esprit l’importance de chaque vie humaine.  « Sinon quelle est la finalité des réunions que nous avons ici?  S’agit-il simplement d’une tribune pour annoncer des bonnes intentions alors que les actes ne suivent pas? » a-t-il ironisé.  C’est pourtant les vies de sept milliards de personnes qui en dépendent puisque les principes de base de ce scenario sont fixés ici, a-t-il commenté.

Citant les écrivains Erich Maria Remarque et Ernest Hemingway, il a appelé à un nouvel état d’esprit qui fasse fi de l’agression, de la colère et de la haine, avant de mettre en garde qu’à défaut, les générations futures, « ces générations paralysées », connaîtront d’autres guerres.  « Nous devons tout faire pour qu’il n’y ait pas de troisième guerre mondiale », a-t-il conclu sur une note grave. 

M. KLAUS WERNER IOHANNIS, Président de la Roumanie, a renouvelé l’engagement de son pays en faveur du multilatéralisme.  Il a passé en revue le chemin parcouru par la Roumanie depuis la chute du rideau de fer pour adopter les « valeurs occidentales » et respecter le droit international, pour ensuite faire part de son soutien à la réforme de l’ONU.

Le Président roumain s’est inquiété des « conséquences dévastatrices » des changements climatiques qui, a-t-il indiqué, n’épargnent pas la Roumanie.  Il a détaillé les actions menées par son pays pour limiter le réchauffement climatique, respecter l’Accord de Paris et atteindre les 17 objectifs de développement durable.  Il a également souligné le rôle de la Roumanie au sein de l’Union européenne pour faire avancer la transition vers une économie neutre en carbone.

Évoquant les questions sécuritaires, M. Iohannis a dénoncé des « actions délibérées visant à saper la sécurité », citant notamment le cas de la mer Noire.  Il a dénoncé des ingérences qui minent la sécurité des États avec la présence de troupes étrangères sur le territoire d’autres nations et l’utilisation de « techniques hybrides ».  Il a ensuite insisté sur le respect des résolutions de l’Assemblée générale de l’ONU. 

M. Iohannis est également revenu sur la participation de son pays aux missions de maintien de la paix de l’ONU, notamment au Mali.  Il a fait part de sa profonde préoccupation face à la propagation du terrorisme, notamment lorsque des missions diplomatiques sont prises pour cibles.  Il a déploré la mort de deux citoyens roumains et les blessures subies par un troisième lors d’un récent attentat à Kaboul, en Afghanistan. 

M. BARHAM SALIH, Président de l’Iraq, a rappelé que l’ONU se fonde sur la coopération afin de réaliser les valeurs qui la sous-tendent et régler les conflits par des moyens pacifiques.  Ce cheminement est long, jonché de succès et d’échecs, mais les espoirs de millions de personnes s’appuient encore sur « notre Organisation », a-t-il dit.

Il a ensuite indiqué parler au nom d’un pays qui continue de lutter contre le terrorisme, en essayant de préserver la dignité de ses citoyens, tout en cherchant à parvenir à la paix et au développement durables.  Le projet terroriste de Daech avait pour but de détruire l’Iraq et la région, et les Iraquiens ont consentis d’énormes sacrifices dans leur combat contre ce fléau, aux côtés de leurs alliés, a poursuivi M. Salih.  L’histoire ne l’oubliera pas.  L’Iraq a réussi à déjouer le projet takfiri, a-t-il tranché.

Faisant état d’avancées positives, le Président a appelé à les consolider en tenant compte de tout ce qu’a subi le peuple iraquien ces 40 dernières années.  Pratiquement aucun autre pays n’a subi ce qu’a enduré l’Iraq sur la durée, a-t-il estimé.  Il a demandé à la communauté internationale de reconnaître cet exploit, tout en lui rappelant qu’il existe encore de nombreux défis à relever, lesquels exigent une coopération internationale afin de répondre, notamment, aux causes profondes des problèmes de l’Iraq et de la région. 

M. Salih a tiré la sonnette d’alarme face aux foyers terroristes dangereux qui cherchent à réémerger, en Syrie notamment.  Notre région est frappée par des conflits et des guerres et il faut impérativement trouver des solutions pour sortir de cette impasse, notamment en Syrie où une solution politique s’impose de toute urgence, a-t-il estimé.  Il a également réaffirmé le droit légitime du peuple palestinien à créer son propre État sur ses territoires, et a dénoncé l’annexion du plateau du Golan par Israël. 

Le Chef de l’État iraquien s’est également inquiété de constater que la sécurité des pays du Golfe est prise pour cible.  La communauté internationale doit apporter son aide pour faire face à cette situation qui, a-t-il mis en garde, pourrait avoir des incidences graves sur la région et le monde.  Nous n’avons pas besoin d’une nouvelle guerre dans la région, s’est-il impatienté, en appelant au dialogue.  Il a souligné que la lutte contre l’extrémisme et la création de perspectives pour les jeunes de la région sont des priorités immédiates, « alors faisons en sorte de calmer les tensions et adoptons une approche constructive ». 

À cet égard, le Président a reconnu l’importance que revêt la stabilité de l’Iraq pour le reste de la région et s’est engagé à tout faire pour que sa stabilité soit durable.  L’Iraq doit devenir une passerelle pour une plus grande coopération, a voulu le Président, en appelant à mettre en place un système de sécurité collective pour la région.  « Nous n’accepterons pas de servir de tremplin pour une guerre contre nos voisins », a-t-il prévenu, rappelant notamment les liens culturels et religieux « très forts » qui unissent l’Iraq et l’Iran, mais aussi la Turquie.  Un Iraq démocratique, uni et stable permettra de rapprocher les voisins et de renforcer la coopération entre ces pays, a-t-il souligné.  Dès lors M. Salih espère que ces pays voisins et la communauté internationale veilleront à ce que l’Iraq n’ait pas à payer pour leurs conflits. 

Il a expliqué que son gouvernement s’est fixé pour priorité de consolider les acquis, de reconstruire un pays ravagé par la guerre et de créer un environnement propice au retour des réfugiés iraquiens, tout en offrant des opportunités aux générations futures et en luttant contre la corruption et le terrorisme « qui vont main dans la main ».  En effet, il faut assécher collectivement les sources de financement du terrorisme, un fléau qui concerne tout le monde, a affirmé le Président.

M. Salih a rappelé que le patrimoine pluriconfessionnel et historique de la Mésopotamie fait de l’Iraq une culture de tolérance.  Il a plaidé pour un projet à grande échelle pour la reconstruction de l’Iraq et au retour de l’investissement privé, estimant que l’Iraq peut devenir un pôle économique pour la région.  Avant de conclure son intervention, il a prononcé en kurde quelques mots sur l’Islam en tant que religion de paix.

Le Libéria est un franc succès des Nations Unies, a déclaré M. GEORGE MANNEH WEAH, Président du Libéria, dès l’entame de son discours, revenant brièvement sur la guerre civile qui a dévasté son pays pendant 14 ans.  Sous les auspices de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), la plus grande opération de maintien de la paix dans l’histoire de l’Organisation, les Libériens ont pu jouir de 16 ans de paix.  Depuis le départ de la MINUL, il y a deux ans, la responsabilité de la paix repose désormais sur le Gouvernement, a dit le Président, qui s’énorgueillit que son pays soit une référence en matière de démocratie en Afrique. 

« Il n’y a pas de prisonniers politiques » au Libéria, a-t-il poursuivi.  Les libertés de presse, d’expression et d’association sont respectées et les manifestations qui ont lieu de temps en temps sont l’expression de la maturité de notre démocratie.  Cependant, il a fait part de l’émergence de « menaces rampantes » à la paix et stabilité du pays, accusant certains individus, à l’intérieur et à l’extérieur du pays, notamment des candidats malheureux aux élections, de véhiculer à travers les réseaux sociaux et autres supports, un discours de haine avec comme objectif d’accéder au pouvoir par des moyens non démocratiques.  « Cela est inacceptable et ne doit en aucun cas être encouragé », s’est-il emporté, invitant l’ensemble des Libériens, y compris la majorité et l’opposition, à respecter les règles de droit.

M. Weah a ensuite rappelé que la Commission Vérité et réconciliation, créée en vertu de l’Accord de paix global signé à Accra (Ghana) en août 2003 qui a mis fin à la guerre , s’était prononcée en faveur de l’établissement d’un tribunal pénal extraordinaire pour juger les personnes accusées d’avoir commis de graves violations des droits de l’homme et des crimes économiques entre 1979 et 2003, ainsi que la mise en place d’un mécanisme de résolution des conflits le Programme Case à palabres, traditionnellement en usage au Libéria. 

Le Président libérien a aussi rappelé que l’année dernière, depuis cette même tribune, il avait marqué sa préférence pour le dialogue en tant que mécanisme de résolution des conflits pour que le Gouvernement et le peuple puissent ensemble axer davantage leurs « efforts » sur la réduction de la pauvreté, la croissance, le développement économique que sur la vengeance. 

Cependant, depuis lors, a-t-il poursuivi, de plus en plus de voix se sont élevées pour appeler à l’établissement d’un « tribunal économique et pour crimes de guerre ».  Il a expliqué que ces voix émanent aussi bien de victimes de guerre que des présumés coupables qui souhaitent libérer leur conscience.  De nombreuses organisations internationales ainsi que certains partenaires internationaux soutiennent aussi cette idée. 

Le Président a avoué ne pas comprendre cette ferveur soudaine en faveur de l’établissement d’une telle cour, une décennie après les premières recommandations issues de l’Accord de paix d’Accra.  Néanmoins, a-t-il assuré, notre gouvernement reste à l’écoute et reconnaît l’importance de s’accorder sur un mécanisme capable d’assurer la paix, la stabilité, la justice et la réconciliation, mais aussi d’améliorer nos perspectives de relèvement économique.

Il a indiqué avoir d’ores et déjà entamé un large processus de consultations inclusives auprès de la législature nationale et des partenaires internationaux stratégiques, afin de définir des questions pertinentes, liées notamment au cadre juridique, au calendrier, à l’emplacement et au financement.

Il a appelé à un large soutien alors que « nous nous embarquons dans cette importante entreprise nationale ». 

Sur le volet économique, il a parlé de la mise en œuvre du « Pro-Poor Agenda for Prosperity and Development », « compas pour la reconstruction, le développement et la modernisation ».  Il a cependant fait état d’importants défis de mise en œuvre en raison notamment de la chute du prix des principales exportations du pays, de manque de revenus et de déséquilibres structuraux.  Il a annoncé que son administration avait récemment mis sur pied un nouveau cadre d’incitations à l’investissement et d’allégements fiscaux et a invité les investisseurs à se saisir de cette opportunité.  Le leadership et la gestion de la Banque centrale sont en cours de réorganisation afin de la rendre plus efficace, et un dialogue économique national a été initié récemment.

Pour finir, il a fait part de la détermination de son pays à demeurer engagé en tant que membre responsable de la communauté internationale sur les plans, bilatéral, régional et multilatéral. 

M. MICHEL AOUN, Président du Liban, s’est tout d’abord félicité du vote, le 16 septembre dernier, par l’Assemblée générale, de la résolution relative à la création de « l’Académie de l’homme pour la rencontre et le dialogue » au Liban et a remercié les pays ayant parrainé ce projet.  « La paix véritable est celle qui reste celle qui unit les humains et non pas celle inscrite sur le papier », a-t-il affirmé, insistant sur le rôle du Liban comme terre de « convergence et de dialogue ».

Évoquant les changements climatiques, il a indiqué que son pays soutient l’initiative lancée par le Président autrichien visant à atteindre des bilans carbone nationaux neutres en 2050.  Il a rappelé que le Liban a été un des premiers pays à signer l’Accord de Paris de 2015.

Il a souligné que le Liban a lancé un « plan d’action national complet » pour l’exécution de la résolution 1325 concernant les droits des femmes, la paix et la sécurité.  Il a précisé que les travaux menant à la création d’une commission nationale des droits de l’homme et d’un comité contre la torture sont achevés.

M. Aoun s’est ensuite inquiété « de l’impact négatif de grande ampleur qu’entraîne la crise des personnes déplacées sur notre territoire sur les plans politique, social, économique et environnemental ».  Il a averti que cette crise « menace de façon grave » tout programme de développement durable au Liban.  Il a appelé les dirigeants du monde à contribuer au retour « en toute sécurité » des déplacés en Syrie.  « La communauté internationale ne peut pas se contenter de fournir une assistance minimale aux personnes déplacées dans les terres d’asile », a-t-il martelé. 

« Aujourd’hui, les conditions d’un retour sont réunies », a estimé le Président libanais.  Invoquant « les experts internationaux », il a affirmé que la situation sécuritaire est stabilisée dans la majeure partie de la Syrie et que les affrontements militaires ne concernent plus que la région d’Edleb.  Il a également dit que 250 000 personnes sont rentrées en Syrie sans qu’aucune information concernant des persécutions ou des mauvais traitements n’ait été signalée. 

Pointant « certains pays et organisations internationales », M. Aoun a dénoncé des « allégations faisant état d’une situation sécuritaire incontrôlée en Syrie » visant à « susciter des inquiétudes chez les personnes déplacées ».  Il a dit craindre que ces dernières ne deviennent « otages d’un éventuel troc dans le cadre d’une solution politique internationale à venir ».  « Une telle attitude pourrait de facto pousser le Liban à encourager le processus de retour des réfugiés, en accord avec l’État syrien, afin de résoudre cette problématique qui menace l’existence même du pays », a-t-il prévenu.

M. Aoun s’est notamment appuyé sur l’exemple des réfugiés chypriotes au Liban, en 1974, pour illustrer la possibilité d’un retour rapide après un cessez-le-feu malgré l’absence de solution politique.  Il a pris le cas des réfugiés palestiniens, présents au Liban depuis 1948, comme contre-exemple: l’attente d’une solution politique et l’exécution de la résolution 194 de l’ONU sur leur retour restant vaine depuis plus de 70 ans. 

Le Président libanais a aussi mis en garde contre la réduction du financement de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) qui exerce « une pression sociale et financière accrue » sur les réfugiés palestiniens.  Il a avancé que la jeunesse palestinienne « au lieu d’être demandeuse d’enseignement, n’a plus soif que de revanche », pour ensuite appeler les pays contributeurs à l’UNRWA à doubler leur effort financier. 

Abordant la question israélo-palestinienne, M. Aoun a affirmé que « toutes les pratiques israéliennes sont en contradiction avec les principes des Nations Unies ».  Il a évoqué, entre autres: « la judaïsation de Jérusalem, la politique systématique de colonisation, la législation contraire aux droits de l’homme, la reconnaissance de l’annexion de territoires occupés par la force, et les promesses d’annexions de nouveaux territoires ». 

M. Aoun a aussi a dénoncé les violations répétées de la résolution 1701, qui a mis fin à la guerre de 2006, par Israël.  Il a notamment considéré « l’acte offensif qui a eu lieu le mois dernier dans une zone résidentielle du cœur de Beyrouth comme la violation la plus grave de cette résolution ». 

Le Chef de l’État a réaffirmé les droits territoriaux du Liban sur les fermes de Chebaa, les collines de Kfarchouba et le nord du Ghajar, qu’il considère comme « occupés par Israël ».  Il a précisé que le Liban ne laisserait pas passer une occasion de fixer ses frontières internationales, terrestres et maritimes, annonçant dans la foulée que le Liban commencera des opérations de forage du pétrole et du gaz dans ses eaux territoriales avant la fin de l’année. 

Il a dénoncé le recours permanent à la raison du plus fort comme le « cœur du problème » pour les peuples du Moyen-Orient.  Élargissant son point de vue, il a évoqué « un principe pervers qui mène aujourd’hui les stratégies politiques et a fait perdre au monde sa stabilité ».  « Toutes les opportunités pour résoudre les conflits se sont perdues, cédant la place au chaos », s’est-il notamment inquiété.

M. Aoun a considéré l’ONU comme le seul recours pour garantir le droit international.  « Aucune justice ne pourra être établie, aucun droit ne sera préservé, aucune paix ne sera trouvée tant que le principe qui prévaut dans le monde restera: je suis fort donc j’ai raison! » a-t-il conclu.

Alors que l’ONU fait face aux multiples défis auxquels est confrontée l’humanité, les sept décennies qui se sont écoulées depuis sa création démontrent que « le multilatéralisme est un ingrédient essentiel pour la paix mondiale », a observé M. MSWATI III, Chef d’État du Royaume d’Eswatini.  Cet effort collectif, qui s’appuie sur la coopération, a notamment permis d’arracher plus d’un milliard de personnes à la pauvreté, a-t-il applaudi, reconnaissant toutefois que des menaces continuent de peser sur la paix, prenant la forme de conflits violents ou d’atrocités de masse.  Déplorant que certains de ces conflits soient « parrainés par ceux qui pensent avoir le droit d’imposer leur idéologie aux autres nations du monde », il a appelé le Secrétaire général à décourager ces comportements contraires aux objectifs de l’Organisation. 

Pour le souverain, le thème du débat général de cette session de l’Assemblée générale, à savoir « Dynamiser les efforts multilatéraux pour l’éradication de la pauvreté, l’éducation de qualité, l’action contre les changements climatiques et l’inclusion », renvoie au rôle essentiel que jouent les Nations Unies dans la période actuelle.  Notant que la plupart des défis contemporains, qu’il s’agisse du terrorisme, des changements climatiques, des migrations ou de la criminalité transnationale organisée, ne peuvent être traités sans recourir à la coopération multilatérale, il a invité l’Assemblée générale à s’employer à réduire les écarts entre les nations et à promouvoir l’action collective.  À cet égard, a-t-il relevé, si la communauté internationale a déjà fait beaucoup pour atténuer la pauvreté, d’autres investissements sont nécessaires pour aider les pays en développement à atteindre les objectifs de développement durable d’ici à 2030.  Or, l’austérité économique mondiale rend aujourd’hui aléatoire le financement de tels efforts pour des pays comme l’Eswatini, a mis en garde le monarque, affirmant compter sur l’intégration des économies africaines pour relever ce défi. 

Au-delà des conflits, le continent africain est confronté aux défis de maladies telles que la fièvre hémorragique Ebola, le VIH/sida, le paludisme et la tuberculose, a-t-il poursuivi.  Or, au lieu de se concentrer sur leurs objectifs de développement, nombre d’États africains sont confrontés à des problématiques de financement pour répondre à l’urgence sanitaire, a souligné le monarque, réclamant notamment des fonds supplémentaires pour combattre le paludisme en Afrique.  Il a cependant indiqué que son royaume figurait parmi les 21 pays du monde en capacité d’inverser la transmission du paludisme indigène d’ici à 2020, ce qui reviendrait à éradiquer la maladie dans le pays.  Après avoir lancé un fonds consacré à la lutte contre cette pathologie, l’Eswatini compte faire de même avec le VIH/sida afin d’éliminer cette menace d’ici à 2022, a-t-il dit, saluant le soutien des partenaires du Royaume, à commencer par le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

Enfin, s’agissant des changements climatiques, le Roi d’Eswatini s’est inquiété des implications de ce fléau sur le développement de l’Afrique.  « Les catastrophes naturelles ne connaissent plus de limites dans la région de l’Afrique australe et les pays les plus gravement affectés ne disposent des ressources et des capacités suffisantes pour répondre à de tels défis », a-t-il alerté, se prononçant, là encore, pour une action collective afin de créer un fonds régional permanent à cet effet ainsi que des centres humanitaires sous-régionaux, équipés pour venir en aide rapidement aux victimes.  « Le prix à payer, si nous ne réagissons pas promptement aux changements climatiques, sera trop élevé », a insisté le Roi Mswati III.

« Le Moyen-Orient est ravagé par les flammes des guerres, les bains de sang, les agressions, l’oppression et les fanatismes religieux et sectaires », a déclaré M. HASSAN ROUHANI, Président de la République islamique d’Iran, à l’entame de son intervention.  Le peuple opprimé de Palestine en est la plus grande victime, a-t-il affirmé, pour ensuite estimer que les plans « imposés » par les États-Unis et les sionistes, comme « le deal du siècle », qui reconnaissent Beit-ul Moqaddas comme capitale du régime sioniste et l’accession du Golan syrien et d’autres territoires occupés, sont sans aucun doute voués à l’échec.

Pendant ce temps, l’assistance et la coopération régionale et internationale de l’Iran en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme a été bien plus déterminante, a-t-il poursuivi, en voulant pour preuve la coopération avec la Russie et la Turquie dans le cadre des Accords d’Astana ainsi que la proposition de paix pour le Yémen, proposée par l’Iran, qui a conduit à l’Accord de paix de Stockholm sur le port de Hodeïda.

Je viens d’un pays qui a subi et résisté à un « terrorisme économique sans pitié », a poursuivi le Président iranien.  Il a accusé le Gouvernement américain, en imposant des sanctions extraterritoriales et en faisant planer des menaces contre d’autres nations, d’avoir déployé beaucoup d’efforts pour priver l’Iran des avantages liés à sa participation à l’économie mondiale.  Il a également accusé les États-Unis d’avoir eu recours à « la piraterie internationale » en faisant un usage à mauvais escient du système bancaire international.

Après avoir souligné que les Iraniens ont été les pionniers des mouvements des défenseurs de la liberté dans la région et qu’ils n’ont jamais accepté de courber l’échine face à l’agression étrangère, le Président Rouhani a dit « ne pas croire en l’invitation de ceux qui revendiquent avoir imposé les pires sanctions de l’histoire contre la dignité et la prospérité de notre nation ». 

Comment peut-on comprendre, face au meurtre silencieux d’une grande nation et les pressions exercées sur les vies de 83 millions d’Iraniens, que les responsables du Gouvernement américain s’enorgueillissent de telles pressions et des exploits de leurs sanctions imposées à une panoplie de pays allant de l’Iran au Venezuela, de Cuba à la Chine et la Russie, s’est-il indigné.  La nation iranienne n’oubliera jamais ces crimes et ne pardonnera jamais à ces criminels, a-t-il déclaré sans ambages.

M. Rouhani a ensuite dénoncé l’attitude du régime américain actuel vis-à-vis du Plan d’action global commun, une attitude qui, à ses yeux, non seulement foule au pied les dispositions de la résolution 2231 du Conseil de sécurité, mais représente aussi une violation de la souveraineté et de l’indépendance politique et économique de tous les pays du monde. 

Il a fait savoir qu’en dépit du retrait américain du Plan d’action global commun, et pendant une année entière, l’Iran a pleinement respecté ses engagements nucléaires en vertu de cet accord.  L’Iran a également donné la possibilité à l’Europe de compenser pour les États-Unis en honorant les 11 engagements qu’elle a pris.  Mais, a regretté le Président, « les belles paroles n’ont pas été suivies d’actions ».  Lorsque les États-Unis ne respectent pas les résolutions du Conseil de sécurité et lorsque l’Europe est incapable d’agir, nous n’avons pas d’autres choix que de nous fonder sur notre dignité et force nationales.  « Ils nous appellent à négocier alors qu’ils tournent le dos aux traités et accords », s’est indigné M. Rouhani. 

Ce dernier a ensuite annoncé que tant que des sanctions seront imposées à la nation iranienne, sa réponse à toute offre de négociation sera négative.  « Si vous souhaitez une réponse positive, et pour qu’il y ait des pourparlers, il faut respecter les accords », a-t-il martelé, et « si le Plan d’action global commun est important pour vous, alors vous pouvez revenir à son cadre et lever les sanctions afin d’ouvrir la voie à la reprise des négociations ».  « Je vous le dis sans ambages », a poursuivi M. Rouhani, « si vous êtes satisfaits avec le minimum, alors nous aussi nous en accommoderons, mais si vous voulez davantage alors vous devez donner davantage ».  Plutôt qu’un « simulacre de négociations », M. Rouhani a sommé les contreparties de l’Iran de revenir à la réalité des négociations, faisant observer que « la séance photo est la dernière étape des négociations, pas la première ».

Poursuivant, le Chef de l’État iranien a indiqué que la doctrine sécuritaire de l’Iran se fonde sur le maintien de la paix et de la stabilité dans le golfe Persique et sur la liberté de navigation dans le détroit d’Ormuz.  Il a constaté que de récents développements ont gravement mis en jeux cette sécurité, estimant toutefois que la sécurité et la paix dans le golfe Persique, la mer d’Oman et le détroit d’Ormuz pourraient être assurées avec la participation des pays de la région et le libre flux du pétrole et d’autres ressources énergétiques.  Il a invité les pays directement concernés par les développements récents dans le golfe Persique et le détroit d’Ormuz à rejoindre la « Coalition pour l’espoir », dans le but de promouvoir la paix, la stabilité et le progrès, mais aussi de renforcer la compréhension mutuelle et les relations pacifiques et amicales entre eux. 

Il a expliqué que cette initiative vise à englober plusieurs voies de coopération, afin d’assurer collectivement la sécurité de l’approvisionnement énergétique, la liberté de navigation et le libre transfert du pétrole et d’autres ressources depuis et vers le détroit d’Ormuz et au-delà.  La Coalition pour l’espoir se fonde sur des principes importants, a-t-il précisé, citant notamment le respect mutuel, le dialogue, le respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté, l’inviolabilité des frontières internationales et les principes de non-agression et de non-ingérence dans les affaires internes des uns et des autres.  La présence des Nations Unies semble indispensable à M. Rouhani pour venir appuyer cette Coalition, et le Ministre des affaires étrangères de l’Iran fournira plus de détails sur cette initiative aux nations bénéficiaires.

M. Rouhani a ensuite vu dans la formation d’une coalition de sécurité pour la région sous commandement étranger un exemple flagrant d’ingérence dans les affaires de la région.  Il a estimé que la « sécurisation de la navigation » va à l’encontre du droit à la libre navigation et du droit au développement et risque d’exacerber les tensions et de mettre en péril la paix et la stabilité régionales. 

Le Président iranien a affirmé que la sécurité de la région ne pourra être assurée que lorsque les troupes américaines se seront retirées, et qu’elle ne saurait être garantie par les armes américaines.  Après 18 ans, les États-Unis ont échoué à endiguer le terrorisme, a-t-il souligné, tandis que l’Iran a réussi à combattre le fléau de Daech avec l’appui des pays voisins. 

La sécurité ne peut être ni achetée, ni fournie par des gouvernements étrangers, a tranché le Président iranien, avant de déclarer que la paix, la sécurité et l’indépendance de « nos voisins sont notre paix, notre sécurité et notre indépendance ».  L’Amérique n’est pas notre voisin, a-t-il souligné, martelant que l’Iran s’adresse ici à ses voisins et qu’en cas d’incident « nous demeurerons seuls ». 

Les États-Unis se trouvent ici-même, pas au Moyen-Orient et les États-Unis ne sont pas l’avocat de quelque nation que ce soit, a-t-il martelé.  Si les flammes de l’incendie au Yémen se sont propagées au Hijaz aujourd’hui, il faut trouver le coupable et le punir plutôt que d’accuser des innocents, s’est-il impatienté.  M. Rouhani a de plus présagé que la sécurité de l’Arabie saoudite sera garantie une fois qu’on aura mis fin à l’agression contre le Yémen et non pas en sollicitant des étrangers.  Il a estimé que la solution pour la paix dans la péninsule arabique et la sécurité du golfe Persique devraient être recherchées au sein de la région elle-même et non pas à l’extérieur.  Il a douté de la capacité des États-Unis à y parvenir, rappelant notamment leurs échecs en Afghanistan, en Syrie et en Iraq sans oublier leur soutien au « talibanisme et au daechisme ».

Notre région est au bord de l’effondrement et une simple maladresse peut attiser un feu terrible, a mis en garde M. Rouhani en appelant à ne pas tolérer toute « intervention provocatrice étrangère ».  Pour l’Iran l’alternative consiste à renforcer la consolidation entre toutes les nations qui partagent un intérêt commun dans le golfe Persique et la région d’Ormuz.  Le message de la nation iranienne est clair, a déclaré le Président iranien s’adressant directement à ces nations: « investissons dans l’espoir d’un avenir meilleur plutôt que dans la guerre et la violence.  Revenons à la justice, à la paix, au droit, aux engagements, aux promesses et à la table de négociation ».

M. TOMMY ESANG REMENGESAU JR, Président des Palaos, a noté que son archipel, bien que figurant parmi les plus petits États Membres de l’ONU, est un pays qui compte dans le monde du fait de son sens des responsabilités en matière de protection de l’environnement marin et du système climatique.  « En tant qu’État océanique, nous croyons fermement que notre petite nation insulaire a beaucoup à apporter à ces efforts mondiaux », a-t-il dit.  Rappelant que la protection de l’océan est une tradition multimillénaire pour les Palaos, il a indiqué que son pays avait su gérer son environnement marin avec le temps, au point de disposer à présent des récifs coralliens les mieux préservés au monde.  Face au problème de surpêche induit par la mondialisation, M. Remengesau Jr a annoncé qu’il lancera en janvier 2020 le sanctuaire national marin des Palaos, qui transformera en zone d’interdiction de pêche 80% de sa Zone économique exclusive (ZEE), soit 500 000 kilomètres carrés d’océan.  Les 20% restants sont réservés à la pêche artisanale, a-t-il précisé. 

En tant que coprésident du Groupe de haut niveau pour une économie océanique durable, M. Remengesau Jr a dit œuvrer avec 13 autres chefs d’État au « rééquilibrage du contrat passé par l’humanité avec l’océan ».  Alors que le Groupe prépare ses recommandations en vue de la deuxième Conférence sur les océans, qui se tiendra l’an prochain à Lisbonne, il a réitéré son appel aux industriels et au secteur privé pour qu’ils se joignent à cet effort.  Il a également déclaré attendre beaucoup des négociations sur l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant relatif à la biodiversité marine dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale. 

Évoquant à son tour les changements climatiques, il a noté que le dernier rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) fait état d’un réchauffement et d’une acidification des océans, ce qui a pour effet de menacer le cycle de vie des poissons et les récifs de corail.  « Pour un pays comme les Palaos, dont l’économie, la culture et le mode de vie sont dépendants de l’océan, il s’agit d’une préoccupation existentielle », a-t-il souligné, appelant à une prise de conscience mondiale.  Après avoir remercié le Secrétaire général pour l’organisation du Sommet Action Climat 2019, il s’est dit honoré d’avoir contribué aux travaux préparatoires sur la transition énergétique et d’avoir présenté les solutions des petits États insulaires en développement (PEID).  À cet égard, il a assuré que son pays progressait dans la réalisation des objectifs de développement durable, tout en estimant que des partenariats et une plus grande coopération multilatérale permettraient d’accélérer ce processus.  Il a ainsi déclaré attendre avec impatience l’ouverture d’un bureau des Nations Unies pour le Pacifique Nord, échelon indispensable, selon lui, pour soutenir les efforts des PEID micronésiens en matière d’ODD. 

Mme SALOME ZOURABICHVILI, Présidente de la Géorgie, a expliqué que la première priorité de son pays était la paix.  Elle a dit que la Géorgie, qui participe actuellement aux missions de maintien de la paix en Afghanistan, au Mali et en Afrique centrale, a souffert de nombreuses invasions aux cours des siècles.  « Tbilissi, la capitale de la Géorgie a été détruite 26 fois, notre territoire a été occupé durant des courtes et longues périodes, notre religion et notre identité ont été réprimées, mais nous avons survécu et aujourd’hui nous sommes fiers de faire partie des pays démocratiques développés », a dit la Présidente de la Géorgie. 

Elle a expliqué que cette résilience était la réponse de la Géorgie lors de la guerre de 2008 suivie de l’occupation de 20% de son territoire par la Russie.  Elle a mis l’accent sur les souffrances des populations qui vivent autour de la ligne de démarcation dans les villes et villages divisés, où les incidents et provocations sont devenus une réalité quotidienne autour des « nouvelles frontières illégales ».  Elle s’est fait l’écho des difficultés rencontrées par les populations qui vivent dans les territoires occupés de l’Abkhazie et Tskhinvali, théâtres de violations permanentes des droits de l’homme, de restrictions de liberté de mouvement et d’accès aux services de santé et d’éducation.  « Les points de passage aux deux régions occupées sont régulièrement fermées, ce qui est source de souffrance humanitaire », a ajouté Mme Zourabichvili. 

La Présidente a également alerté que la langue géorgienne et la langue abkhaze, reconnues par la Constitution géorgienne, sont menacées de disparition dans l’Abkhazie occupée et que le peuple abkhaze connaît une réduction drastique de sa population.  Elle a appelé à la sauvegarde de cette riche diversité qui a fait que les Arabes ont appelé le Caucase « la montagne des langues ».  Elle a précisé que son pays ne disposait pas de troupes près de la ligne d’occupation et avait renoncé unilatéralement à l’usage de la force. 

Face à cette situation, la Géorgie a tendu la main aux citoyens des territoires occupés pour qu’ils puissent avoir accès à l’éducation et à la santé et participer au développement économique de la Géorgie, « lorsqu’ils n’en sont pas empêchés ».  Elle a également indiqué que la Géorgie avait accueilli 1,5 million de touristes russes en 2018 sans le moindre incident. 

Mme Zourabichvili a souhaité qu’un changement intervienne tout en reconnaissant que ce changement ne pouvait pas émaner de la seule initiative de son pays.  « Nous avons besoin de l’engagement de tous pour parvenir à la paix durable dans la région », a-t-elle souligné.  Elle a notamment appelé à modifier la dimension politique des formats existants afin de mener des discussions de fond.  Il faut, a-t-elle dit, passer de négociations d’experts à des négociations politiques afin que le « format de Genève » puisse permettre de résoudre le conflit, et pas uniquement de le gérer.  Elle a souhaité que toutes les opportunités de dialogue soient utilisées pour pousser la Russie à reprendre les discussions autour de la stricte mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu, et permettre à la Mission de surveillance de l’Union européenne d’observer l’ensemble du territoire géorgien. 

Retraçant le chemin parcouru par son pays depuis la « restauration » de son indépendance, il y a 28 ans, la Présidente s’est félicitée des progrès réalisés par la Géorgie dans la consolidation de la démocratie.  Elle a cité, notamment, l’adoption d’un système proportionnel pour les élections parlementaires de 2020.  Elle a précisé que la Constitution géorgienne de 1921 avait permis aux femmes de voter et d’être élues.  Elle a cité l’objectif d’un budget de l’éducation atteignant 6% du PIB d’ici à 2022, avant de souligner les difficultés de son pays pour faire face aux besoins de 300 000 personnes déplacées. 

M. FAUSTIN ARCHANGE TOUADERA, Président de la République centrafricaine, a constaté que c’est « à l’ère de la mondialisation que nous sommes soumis aux périls des nationalismes et du repli identitaire », s’inquiétant du fait que « le rejet de l’autre et l’extrémisme s’expriment de plus en plus violemment ».  Il a affirmé que c’est dans un sursaut collectif de mutualisation de leurs efforts que les États Membres viendront à bout des divers foyers de tensions et de crises qui persistent dans le monde.  « Le défi qui nous est posé en tant que leaders c’est d’avoir le courage d’oser: oser nous remettre en question pour sortir des solutions novatrices, efficaces et efficientes afin de consolider la paix, la stabilité et créer des bases solides d’un développement durable », a-t-il dit.

Passant aux préoccupations sécuritaires, M. Touadera a indiqué qu’en Afrique, l’état des lieux laisse constater que la prolifération des armes légères et de petit calibre constitue une menace réelle pour la paix et la sécurité.  Il a estimé que l’exemple du Sommet conjoint CEDEAO-CEEAC (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest/Communauté économique des États de l’Afrique centrale), qui s’est tenu à Lomé en juillet 2018, doit inspirer des actions davantage concertées et coordonnées au moment où la circulation des armes légères et de petit calibre défie les frontières nationales.  Il a aussi souligné que la mise en œuvre effective du Traité sur le commerce des armes réduirait sensiblement cette menace qui pèse sur le continent.

Le Chef de l’État a ensuite appelé à impulser une « dynamique vertueuse » d’éradication de la pauvreté par des actions « concrètes et fortes ».  Il a annoncé avoir engagé son gouvernement à élaborer le Plan de relèvement et de consolidation de la paix en Centrafrique qui, a-t-il expliqué, prend en compte les grandes orientations du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ainsi que celles de l’Agenda 2063 de l’Union africaine. 

Dans le sillage de la reconstruction nationale, a-t-il poursuivi, mon pays veut miser sur une éducation qui allie la qualité à la rationalisation des ressources.  « Investir sur l’apprenant, mais aussi sur l’enseignant, c’est notre pari », a-t-il affirmé, ajoutant que les efforts sont également à orienter vers les opportunités qu’offrent les nouvelles technologies.  Il a également appelé à ouvrir une discussion à l’échelle internationale sur l’éducation « afin de sortir d’un certain nombre de pièges tels que les programmes d’éducation pour tous qui finissent par être de simples séances d’alphabétisation ».

Dans son intervention, M. Touadera s’est également préoccupé de l’exploitation abusive des ressource naturelles.  Il a appelé « avec insistance » à la mise en œuvre effective de l’Accord de Paris et a fondé l’espoir de voir sensiblement réduit le taux de carbone par les pays développés et la tenue des engagements financiers s’agissant des crédits carbones.  Sans inventer de nouvelles actions, a-t-il estimé, notre responsabilité collective est de mettre en œuvre les résolutions issues de la COP24, ainsi que les recommandations émises à la Conférence d’Addis-Abeba sur le financement du développement durable.

Le Chef de l’État a ensuite salué la mobilisation de la solidarité internationale qui a permis à la République centrafricaine d’ouvrir une nouvelle page de son histoire grâce à la signature de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation entre son gouvernement et les 14 groupes armés, le 6 février 2019.  Il a indiqué qu’en bénéficiant de l’appui de tous les partenaires de la sous-région, « nous enregistrons des progrès, certes modestes mais sûrs » au sujet de l’extension de l’autorité de l’État sur toute l’étendue du territoire national, des réformes dans le secteur de la sécurité et de la défense.

M. Touadera a toutefois signalé que la situation de son pays reste fragile malgré quelques avancées « réelles », indiquant notamment que les groupes armés continuent à s’approvisionner en matériels de guerre et en munitions par des voies illicites.  Il a salué le vote unanime du Conseil de sécurité de la résolution 2488 (2019) qui a permis d’alléger l’embargo sur les armes en faveur des forces de défenses et de sécurité du Gouvernement.  Toutefois, a-t-il ajouté, je réitère solennellement la demande du Gouvernement et l’aspiration légitime du peuple centrafricain en faveur d’une levée totale de cet embargo pour permettre à l’État d’étendre son autorité sur l’ensemble du territoire national.  Il a notamment argué que le rapport à mi-parcours, du 15 juin 2019, soumis par son gouvernent démontre que les conditionnalités fixées par le Comité des sanctions ont été remplies, en plus de progrès « significatifs » dans le processus de réforme des secteurs de défense et de sécurité.  « Pour venir à bout de la crise qui a secoué mon pays, j’en appelle à une action multilatérale, dynamique, concertée, cohérente et coordonnée », a-t-il déclaré.

À l’entame d’un discours autrement centré sur la consolidation de la paix dans son pays et la crise vénézuélienne, M. IVÁN DUQUE MÁRQUEZ, Président de la Colombie, a souligné combien les changements climatiques étaient « le principal défi » de l’humanité. 

En tant que Président d’un pays composé à plus 40% de forêts tropicales humides, M. Duque Márquez a affirmé que la Colombie était l’une des nations les plus exposées au monde aux effets des changements climatiques.  Il est clair, a-t-il dit, que la déforestation de l’Amazonie est « directement liée » aux groupes armés illégaux en quête de territoires pour s’adonner à leurs activités illicites, lesquelles sont elles-mêmes financées par le trafic de drogue.  Pour mettre un terme à cette situation, le Président a affirmé que son gouvernement était parvenu, cette année, à réduire d’environ 17% la déforestation dans son pays.  M. Duque Márquez a précisé que, plus tôt, ce mois-ci, son pays avait signé, aux côtés de six autres pays amazoniens, le « pacte de Leticia », dont l’objectif est de protéger la plus grande forêt tropicale au monde, dévastée depuis plusieurs semaines par des incendies.

Passant à la consolidation de la paix en Colombie, le Président Duque Márquez a mis l’accent sur les efforts pour instaurer une « culture de la légalité » dans le pays, suite à l’accord de paix signé, en 2016, entre son gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC-EP).  Dans ce cadre, il a précisé que la démobilisation, le désarmement et la réinsertion des anciens guérilleros suivait son cours, à l’image des 29 projets productifs » dont ont bénéficié à ce jour 1 934 ex-combattants. 

« Aujourd’hui, c’est une nation unie qui s’exprime devant cette Assemblée, confiante dans sa capacité à venir à bout de la violence par l’entremise de la légalité », a affirmé le Chef de l’État, avant de remercier la communauté internationale pour la création de la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie.  M. Duque Márquez a toutefois lancé un avertissement à ceux qui « persistent sur la voie de la criminalité ».  Il y a quelques semaines, a-t-il expliqué, un « groupe de narcoterroristes », allié à la « dictature qui opprime le peuple vénézuélien », a tenté d’intimider la Colombie « sous de faux prétextes idéologiques ».  M. Duque Márquez a indiqué que son gouvernement n’avait pas cédé aux menaces de ce groupe, soutenu selon lui « par des économies illégales basées sur le narcotrafic ». 

Pour preuve de sa détermination à lutter contre ce trafic, le Chef de l’État a mentionné que son gouvernement était parvenu, pour la première fois en sept ans, à limiter l’essor de la culture de coca dans le pays.  « Plus il y a de coca, moins il y a de paix », a-t-il insisté, qualifiant le trafic de drogue de « prédateur de l’environnement », de « nid de la corruption » et de « carburant du terrorisme ».  Afin de lutter plus efficacement contre les conséquences de ce trafic, le Chef de l’État a indiqué qu’il militait, aux côtés d’autres, pour la création d’une cour internationale anticorruption.

Passant à la crise vénézuélienne, M. Duque Márquez a indiqué qu’au moins 4,2 millions de personnes avaient fui le pays, en raison de la « dictature brutale » de M. Nicolás Maduro.  « Ils fuient une nation naguère riche et aujourd’hui famélique, qui a été une démocratie et est aujourd’hui un régime autoritaire sans ressources ni libertés », a-t-il déclaré.  Selon lui, depuis le début de la crise, 1,4 million de Vénézuéliens ont trouvé refuge en Colombie, qui les a accueillis « à bras ouverts ».  Le Chef de l’État a rappelé que son pays, aux côtés de plus de 50 autres nations membres du Groupe de soutien de Lima, avait reconnu la « présidence légitime » de M. Juan Guaidó. 

« La dictature vénézuélienne est un maillon supplémentaire de la chaîne du terrorisme transnational », a en outre affirmé M. Duque Márquez.  « Ses structures corrompues sont à la solde des cartels de la drogue ».  Le Chef de l’État a affirmé qu’il disposait de preuves formelles de l’appui octroyé par le régime de M. Maduro à des « groupes criminels et narcotrafiquants », lesquels tenteraient, depuis le Venezuela, « d’attenter à la Colombie ».  Il a indiqué qu’il entendait remettre très prochainement ces preuves au Président de l’Assemblée générale et au Secrétaire général de l’ONU, y compris un dossier de 128 pages démontrant la « complicité » de M. Maduro, qui abriterait les éléments de l’Armée de libération nationale (ELN), un groupe rebelle colombien. 

M. Duque Márquez a exhorté M. Maduro à « mettre fin à l’usurpation » en cédant la place à un Gouvernement de transition, dans l’attente de la tenue d’élections libres au Venezuela.  « Les crimes de Maduro contre son peuple n’ont d’égal que ceux de Slobodan Milošević en ex-Yougoslavie », a-t-il martelé, précisant que pas moins de 16 pays latino-américains partageaient son point de vue.  Aux yeux de M. Duque Márquez, en effet, le régime de M. Maduro « représente une menace pour le maintien de la paix et la sécurité du continent ».  Aussi a-t-il appelé la communauté internationale à adopter des sanctions à son encontre, au nom de la sauvegarde des droits et libertés des Colombiens comme des Vénézuéliens. 

Alors que nous approchons des 75 ans de l’organisation mondiale, de nombreux peuples sont malheureusement laissés de côté, a regretté M. DANNY FAURE, Président des Seychelles.  En cause: « l’inaction et les lacunes » qui plongent aujourd’hui l’humanité dans la menace des conflits, la misère économique et les changements climatiques.  Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser les peuples dans la désillusion et perdre les visions d’espoir et de sécurité sur lesquelles les Nations Unies ont été bâties, a-t-il dit. 

Le Président a indiqué qu’aux Seychelles, l’individu est placé au centre du développement pour qu’il vive dans la dignité et réalise son plein potentiel afin de contribuer à « notre vibrante démocratie ».  L’approche inclusive est, à ses yeux, la voie qui mènera les nations vers un avenir durable et sûr, et le multilatéralisme la clef pour réunir ensemble les peuples pour une prospérité mutuelle et une paix durable. 

Plus que d’autres, les États insulaires doivent avoir foi en l’ordre international multilatéral, car isolés par nature, dépendants du reste du monde pour leurs moyens de subsistance, l’action ou l’inaction des autres nations impactent directement leur survie, a expliqué le Président Faure.  S’il est vrai que le développement a sorti nos peuples de la pauvreté, en revanche, avec la surexploitation des ressources, nous condamnons l’avenir des générations futures, a-t-il mis en garde. 

M. Faure s’est réjoui de voir les jeunes à travers le monde prendre position pour assurer leur avenir.  Il a expliqué que dans son pays, des organisations non gouvernementales dirigées par les jeunes forment des partenariats avec le Gouvernement pour hiérarchiser la lutte contre les changements climatiques, la pollution et d’autres menaces à l’environnement.  Pour nous, insulaires, l’océan reste l’unique moyen de subsistance mais représente aussi un style de vie.  C’est pourquoi, les Seychellois exploitent le potentiel des océans pour atteindre les objectifs de développement durable inscrits dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

« Nous sommes devenus les champions d’Afrique en matière d’économie bleue », s’est-il enorgueilli, ajoutant que son pays travaille avec les partenaires intéressés pour un déploiement international de l’économie bleue.  Les Seychelles demeureront à l’avant-garde du discours sur les changements climatiques, et comptent se battre avec un sens de l’urgence passionné contre les inégalités qui impactent directement son pays, a-t-il martelé.  Il s’est pleinement engagé en faveur de la création d’un cadre juridiquement contraignant pour conserver nos océans, « car si nous voulons survivre, c’est la seule voie qui nous reste ».  De fait, a-t-il conclu, les Seychellois n’ont pas le luxe de s’interroger sur la question du «et si on », car la situation exige une action maintenant. 

M. MOHAMED OULD CHEIKH EL GHAZOUANI, Président de la Mauritanie, a déclaré que son pays a axé ses stratégies de développement sur les objectifs de développement durable et obtenu des résultats tangibles.  « Nous avons centré nos efforts sur le développement des énergies renouvelables tant éolienne que solaire », a-t-il ajouté, avant de préciser que 40% de l’énergie consommée aujourd’hui en Mauritanie est d’origine renouvelable.  « Avec d’autres pays du Sahel, la Mauritanie a lancé l’initiative de la grande enceinte verte pour contrer les effets des changements climatiques sur nos ressources agricoles », a-t-il ajouté.  Le Président de la Mauritanie a aussi mis l’accent sur les initiatives de son pays pour lutter contre la désertification et valoriser de larges étendues de terres afin qu’elles puissent à nouveau être cultivées.  « Nous avons rationalisé l’exploitation de nos ressources maritimes et œuvré avec 10 États du Sahel dans le cadre de l’initiative énergie du Sahel - Desert to Power (DtP) ».  Il a expliqué que cette initiative vise, en partenariat avec la Banque africaine du développement (BAD), à transformer le désert en énergie et raccorder à l’électricité 29 millions d’Africains d’ici à 2020. 

Poursuivant, le Président a indiqué que la Mauritanie poursuit ses efforts pour atteindre l’objectif de l’éducation obligatoire et gratuite pour tous et la parité entre les genres, avant de citer l’amélioration de la couverture sanitaire universelle grâce au développement des infrastructures et de compétences médicales.  « Nous avons mis l’accent sur la formation des jeunes » a aussi dit M. El Ghazouani, avant de mettre l’accent sur les efforts de son pays pour promouvoir la bonne gouvernance, la sauvegarde des droits de l’homme, la démocratie et la protection des libertés tant individuelles que collectives.  Il a aussi cité la création de mécanismes juridiques susceptibles d’éliminer la corruption.  Faisant le lien entre développement et sécurité, le Président de la Mauritanie a indiqué que son pays a mis en place une stratégie de lutte contre le terrorisme et autres formes d’extrémisme qui s’appuie sur une approche globale qui tient compte des dimensions intellectuelle, économique et sociale.  Il a par ailleurs indiqué que son pays allait accueillir 50 000 réfugiés maliens en attendant le retour à la paix dans ce pays voisin. 

Mme KERSTI KALJULAID, Présidente de l’Estonie, s’est félicitée qu’une génération après les problèmes « d’occupation » qu’ont connus les pays baltes, son pays soit élu membre du Conseil de sécurité des Nations Unies.  Elle a affirmé que forte de son histoire, l’Estonie fait preuve de considération pour les États faibles, ceux dont la voix nécessite d’être amplifiée par un système multilatéral.  « Le multilatéralisme n’est rien d’autre que la compassion envers le destin des autres », a expliqué la Présidente, et l’Estonie en a bénéficié quand elle a reconquis son indépendance et reconstruit son État.  En conséquence, l’Estonie ne parle pas des autres pays, mais parle avec les autres pays, a-t-elle nuancé. 

Affirmant que l’autorité morale des Nations Unies, « tuteur global de l’humanité », était chère à son cœur, l’Estonie, en sa qualité de seul pays gouverné de manière entièrement digitale, a orienté son intervention sur l’impact des nouvelles technologies et ses éventuels dangers.  « Beaucoup nous suivent de près dans la cybersphère, a appuyé la Présidente.  De nouvelles menaces sur notre souveraineté apparaissent, liées à la cybercriminalité et au fait que le cyberespace est devenu un nouvel espace militaire », a-t-elle expliqué.  Revendiquant à cet égard une meilleure protection du cyberespace, l’Estonie travaillera au sein du Conseil de sécurité pour veiller à ce que le droit international soit aussi appliqué dans l’espace digital.

Soutenant sans réserve les réformes engagées par le Secrétaire général, la Présidente de l’Estonie a souhaité que l’ONU joue un rôle de leadeur en bénéficiant des dernières avancées technologiques.  « Internet est un outil formidable pour éduquer les filles, offrir un emploi aux femmes, et donc réduire la croissance démographique par l’émancipation des femmes », a souligné Mme Kaljulaid.

Concernant les changements climatiques, l’Estonie joue sa part.  C’est de ce pays qu’est né le mouvement de la « Journée mondiale du nettoyage », aujourd’hui présent dans 179 pays et territoires, y compris l’Antarctique, mobilisant plus de 20 millions de personnes, a-t-elle notamment rappelé.  Le secteur des start-ups estonien a quant à lui promis de parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2030. 

Insistant sur le rôle déterminant des entreprises et de la société civile dans l’action contre les changements climatiques, la Présidente estonienne a noté que la communauté internationale péchait par la nature « fragmentée » des actions entreprises.  Cette fragmentation « est un obstacle pour un modèle de développement global.  C’est un obstacle pour prendre à bras le corps le développement de l’énergie solaire, même si nous savons qu’une superficie n’excédant pas celle de l’Espagne suffirait à combler tous les besoins de la planète en énergie ».  Selon l’Estonie, seules les Nations Unies et le multilatéralisme permettront à l’humanité de surmonter cette fragmentation des volontés.

M. ALPHA CONDÉ, Président de la Guinée, a déclaré qu’un monde plus juste, plus inclusif et solidaire a toujours fait partie de ses rêves, se disant nostalgique d’une période où on mettait la personne humaine, son devenir et sa condition au centre de nos préoccupations.  « Nous oublions que nous avons comme mission et devoir de protéger et respecter notre prochain et préserver cette terre que nous avons empruntée de nos ancêtres et que nous devons transmettre à notre tour aux générations futures », a-t-il affirmé, appelant à « reprendre conscience de nos valeurs ». 

Il a rappelé comment, tout au long de sa vie, il a eu pour ambition de contribuer concrètement à une Guinée plus juste et solidaire, où chaque citoyen, indépendamment de ses origines et de son statut social puisse, s’épanouir dans un environnement sain.  Les premières années ont été difficiles et il a fallu faire des choix difficiles, mais la Guinée a surmonté cette période grâce à la responsabilité et à la collaboration de tous les Guinéens, s’est-il félicité.

Remettre la Guinée sur la carte des investisseurs n’a pas été non plus facile, mais nous assistons enfin à une forte croissance des investissements privés en Guinée dans tous les secteurs, a souligné le Président guinéen.  En ce qui concerne la lutte contre la pauvreté, le Gouvernement guinéen a créé l’Agence nationale de financement des collectivités locales et l’Agence nationale d’inclusion économique et sociale. 

M. Condé a précisé que la participation au processus de prise de décisions des jeunes et des femmes est au centre des actions du Gouvernement, avec la mise en place d’un programme de microcrédit, des centres d’autonomie modernes, des formations dans toutes les filières, le recrutement de 6 857 femmes dans la fonction publique pour la période 2010-2018, et 3 314 paysannes formées en technique améliorée de production agricole.

En plus du respect de la parité dans les effectifs scolaires et universitaires ainsi que l’élimination du mariage précoce et d’autres pratiques discriminatoires, la Guinée a aussi mis en place des programmes de partenariats public-privé au service des jeunes et des femmes pour combattre le chômage. 

Le Président guinéen a aussi indiqué qu’il a été possible de lancer beaucoup de projets dans le domaine des infrastructures « qui ont changé le visage de la Guinée ».  D’importants projets de construction de logements sociaux, d’infrastructures routières, ferroviaires, portuaires avec la mise en place de zones économiques spéciales permettront à la Guinée de devenir un pays exportateur de produits finis, s’est-il félicité.

Sur le plan environnemental et la lutte contre le réchauffement climatique, a-t-il poursuivi, la Guinée s’est engagée à réduire de 13% les émissions des gaz à effet de serre.  Un vaste programme de reboisement de deux millions d’hectares sur toute l’étendue du territoire guinéen est prévu d’ici à 2030.  Le Président guinéen a également rappelé le lancement de l’Initiative pour les énergies renouvelables en Afrique lors de la COP21.  Sous la présidence guinéenne de l’Union africaine, un engagement ferme de tous les pays africains de faire de cette initiative un modèle pour tous a été pris, dont les mots d’ordre sont le développement durable et le respect du climat.

Il a ensuite annoncé que le Conseil d’administration de l’AREI, du 23 septembre dernier, avait confirmé que l’objectif de financement de 10 gigawatts d’électricité pour le continent qui avait été fixé pour fin 2020 sera largement dépensé, ayant déjà atteint à la date d’aujourd’hui le financement de plus de 200 projets énergétiques équivalents à une puissance de 9,99 gigawatts.

M. Condé a expliqué que ceci permettra de donner de l’énergie propre à des millions de foyers répartis dans toutes les régions du continent, précisant que deux tiers des Africains n’ont pas accès à l’électricité.  Le Président a ensuite lancé un appel pour solliciter l’implication de plus de partenaires publics et privés à investir dans le secteur des énergies renouvelables en Afrique.  « Ceci permettra à notre continent d’exploiter plus efficacement ses ressources et de rendre la vie plus agréable et attractive à nos jeunes, pour qu’ils puissent enfin considérer l’émigration comme un choix et non comme une contrainte inévitable », a-t-il affirmé.

Le Président Guinéen a conclu en déclarant que « lorsque l’Afrique parle d’une seule voix, elle gagne.  Quand l’Afrique gagne, c’est le monde qui gagne car l’Afrique est l’avenir du monde ».

M. EDGAR CHAGWA LUNGU, Président de la Zambie, a affirmé que l’éradication de la pauvreté est faisable, évoquant les progrès remarquables réalisés dans ce domaine.  La malnutrition et l’analphabétisme des jeunes ont également baissé substantiellement.  Mais un million de personnes continuent de vivre dans une pauvreté extrême, a-t-il déploré, avant d’appeler à veiller à ce qu’aucun enfant n’aille plus se coucher affamé, et que personne ne soit obligé de choisir entre envoyer sa fille à l’école ou au travail.

Le Président zambien a ensuite applaudi le leadership de l’ONU dans la lutte contre les changements climatiques qui, s’est-il inquiété, entravent les efforts visant à relever le niveau de vie des pauvres dans le monde.  Il a aussi signalé que l’impact des changements climatiques dans sa région est dévastateur: des cyclones ont affecté trois des voisins de la Zambie, qui a elle-même subi une sécheresse qui a provoqué une baisse de la productivité agricole et des niveaux de l’eau pour la production hydroélectrique. 

Il a souligné que l’impact des changements climatiques nécessite des efforts de collaboration mondiaux, et un soutien aux stratégies d’atténuation et d’adaptation.  De plus, améliorer l’accès au soutien financier, particulièrement pour les pays aux ressources limitées, leur permettrait de contribuer à l’effort mondial et de supporter la charge des coûts induits par les changements climatiques, a-t-il dit.

M. Lungu s’est également attardé sur la nécessité de sécuriser et promouvoir la faune et la flore, et d’établir des partenariats avec les communautés et le secteur privé pour ce faire, améliorant ainsi les bénéfices économiques issus de la nature.

Le Président zambien a ensuite rappelé que la plupart des pays africains n’ont pas pu atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement, en raison de divers problèmes, à commencer par l’insuffisance des ressources financières.  Il a prévenu que dans sa poursuite des objectifs de développement durable, il est probable que cette tendance se poursuive, à moins que l’Afrique ne conçoive des moyens plus innovants de relever ses défis en matière de développement.

Il a indiqué que la Zambie a ciblé les membres de la société les plus vulnérables pour améliorer leur capacité à s’impliquer dans la vie économique et sociale du pays.  Des mesures ont été prises pour fournir une éducation de base à tous et un programme de réforme de la santé est aussi en cours.  Regrettant cependant que ces mesures et programmes ne soient pas suffisants pour atteindre les résultats voulus, principalement à cause de ressources financières limitées, le Président zambien a appelé tous les partenaires à se joindre aux efforts pour améliorer la vie des peuples.

Le Président zambien a également appelé les Nations Unies et les organisations humanitaires à aider la Zambie à s’occuper des réfugiés, et a exhorté tous les partenaires à se joindre aux efforts pour protéger les enfants et les jeunes, citant notamment les « énormes progrès » de la Zambie dans sa campagne pour mettre fin au mariage des enfants.

Il a par ailleurs parlé des contributions de la Zambie au mécanisme régional de prévention des conflits et d’efforts de consolidation de la paix, et son accueil d’une rencontre de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) sur la mise en œuvre des résolutions 1540 et 2004 du Conseil de sécurité visant à prévenir la prolifération des armes nucléaires, chimiques et biologiques aux acteurs non étatiques, dont les terroristes.  La communauté internationale doit sérieusement se soucier du spectre du terrorisme international, a souligné le Président zambien, pour protéger la vie humaine.

Le Président zambien a indiqué que les Nations Unies restent la seule institution multilatérale capable de faire face aux défis de notre monde.  Pour être efficace, il est nécessaire de réformer les Nations Unies.  Notamment, le Conseil de sécurité devrait être davantage représentatif, démocratique et redevable.

M. IDRISS DEBY ITNO, Président du Tchad, a averti que « notre rêve commun » de bâtir un monde stable et paisible est en train de céder le pas à l’angoisse et à l’incertitude, soulignant que la question de la pauvreté est liée à celle des crises et des conflits, des migrations et des dérèglements climatiques.  Il a souligné que l’élimination de la pauvreté revêt une importance capitale et que les ressources à mobiliser à cet effet sont à la portée de la communauté internationale, « pourvu qu’elle fasse preuve de volonté et de détermination ».  Les priorités et attentes de l’Afrique sont connues, et les résultats attendus du Programme 2030 sont loin d’être au rendez-vous. 

Le Président tchadien a constaté que l’absence des résultats tangibles par rapport aux engagements contractés touche également la lutte contre les changements climatiques, prévenant que les graves conséquences des changements climatiques se font sentir en Afrique et en particulier au Sahel comme le prouvent l’avancée du désert, la déforestation ou encore la dégradation des sols.

Par ses effets pervers, le dérèglement climatique exacerbe aussi les crises et conflits autour des ressources naturelles, provoque insécurité alimentaire et exodes massifs des populations, rend aléatoire l’accès aux services sociaux de base et accentue la pauvreté au point de pousser les jeunes chômeurs à tomber dans les bras des groupes terroristes, a-t-il dit.

Réitérant son appel à une réduction des gaz à effet de serre et au renforcement de la résilience aux changements climatiques, le Président Deby Itno a souligné que l’Accord de Paris n’est crédible que s’il s’accompagne d’actions concrètes.  Il a insisté sur l’impérieuse nécessité, pour les pays développés, de tenir leur engagement de répondre aux besoins des pays en développement en matière d’atténuation et d’adaptation.

Abordant ensuite la question de l’éducation, « levier de premier plan pour un développement durable, le Président tchadien s’est inquiété du fait que des centaines de millions d’enfants sont privés d’accès à une éducation de base, ainsi que de l’immensité des défis à relever et de l’insuffisance des ressources disponibles.  D’où la nécessité, pour le Président, d’une mobilisation constante pour accompagner les efforts des pays les moins nantis pour donner la chance à tous les enfants du monde d’accéder à une éducation de qualité.

Le Président Deby Itno s’est aussi soucié de la montée du terrorisme en Afrique qui compromet les efforts de développement.  Il a expliqué que le Tchad est mobilisé tant dans le cadre de la Force multinationale mixte des pays du bassin du lac Tchad que dans celui de la Force conjointe du G5 Sahel pour faire face à cette menace.  Cet élan de mobilisation des États ne saurait laisser indifférente la communauté internationale dont le soutien est vital pour gagner son combat, a-t-il rappelé, réitérant l’appel des États du G5 Sahel au Conseil de sécurité d’assurer un financement pérenne à la Force conjointe du G5 Sahel sur le budget ordinaire des Nations Unies.  Par ailleurs, dans l’optique de la mutualisation des forces, le Président tchadien a souligné la nécessité d’une coordination plus poussée des forces au Sahel dans le respect de la vocation de chaque entité.

Poursuivant, le Président tchadien s’est penché sur la situation « toujours préoccupante » en Libye, relevant que les efforts entrepris sont compromis par les confrontations armées interlibyennes, elles-mêmes aggravées par des interférences extérieures.  Le règlement de la crise passera par la prise de conscience des Libyens eux-mêmes, a estimé le Président tchadien.  Il a souligné que le retour de la paix et de la stabilité en Libye conditionne le retour de la paix et de la stabilité dans les pays voisins.  Il a ainsi plaidé en faveur d’une forte implication de l’Union africaine et des Nations Unies dans la recherche d’une solution durable. 

Le Président tchadien a ensuite souligné que la question de la réforme de l’ONU, et notamment celle du Conseil de sécurité mérite toute l’attention requise.  L’Afrique ne demande pas autre chose que la réparation d’un préjudice à un continent qui compte plus d’un milliard d’âmes, privé injustement de sa place légitime dans le système des Nations Unies, a-t-il affirmé.

M. JUAN ORLANDO HERNÁNDEZ ALVARADO, Président du Honduras, a déclaré que son pays a souffert de la corruption pendant des décennies.  Il a souligné les efforts de son gouvernement pour mettre fin à l’impunité et lutter contre une criminalité qui, a-t-il déploré, a fait du Honduras le pays le plus dangereux du monde.  « Grâce au démantèlement des réseaux de criminalité organisée, nous avons des institutions beaucoup plus solides et les taux d’homicide ont été divisés par 2 », s’est cependant félicité le Président hondurien, avant de citer la création de forces spéciales chargées de lutter contre les extorsions.  Il a précisé que la criminalité organisée à fait 66 000 morts en 15 ans dans son pays.  Il a dénoncé la persistance d’activités d’intimidation de la part des groupes criminels qui, a-t-il affirmé, s’attaquent à l’économie par le biais d’une guerre de désinformation qui trouve parfois son origine au Venezuela, dirigé par le Président Maduro. 

Par ailleurs, le Président du Honduras a exhorté les États à développer des opportunités en faveur des plus vulnérables afin qu’ils ne soient plus obligés de migrer.  Il a remercié le Mexique pour son aide au développement du secteur privé et à la reforestation du Honduras, ainsi que le Secrétaire général de l’ONU pour son appui au plan intégré de développement de l’Amérique centrale.  « Nous sommes sur la voie de la réalisation des objectifs de développement durable », a assuré M. Hernández Alvarado.

En outre, le Président du Honduras a estimé qu’une des causes des migrations est la crise du café liée aux faibles prix et aux changements climatiques.  Il a expliqué que la vie de 120 millions de familles de producteurs de café dans le monde serait améliorée si les producteurs de café obtenaient des prix décents pour leur récolte.  Précisant que le Honduras fait partie, avec le Porto Rico et le Myanmar, des trois territoires du monde les plus touchés par les aléas climatiques, il a regretté la difficulté d’accéder à des fonds verts. 

À l’approche de leur soixante-quinzième anniversaire, les Nations Unies doivent se réformer et évoluer pour répondre efficacement aux défis du XXIe siècle, a d’emblée estimé M. SCOTT MORRISON, Premier Ministre de l’Australie.  Et pour remplir son mandat, l’ONU doit garder à l’esprit les principes et les valeurs qui fondent son action, a-t-il dit, relevant que les valeurs démocratiques libérales de l’Organisation sont aussi celles de l’Australie.  « Nous pensons qu’elles devraient rester les principes directeurs de l’ONU à l’avenir », a plaidé le Chef du Gouvernement australien, pour qui l’Organisation est le gardien de l’ordre fondé sur des règles mais aussi des mécanismes de dialogue et d’arbitrage qui l’étayent.  Il a ainsi rappelé que, le mois dernier, l’Australie a ratifié un traité établissant une nouvelle frontière maritime avec le Timor-Leste, à la suite de la toute première conciliation initiée en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. 

Rappelant, à cet égard, que l’ONU travaille en partenariat avec l’Australie pour faire du Pacifique une région plus durable et résiliente, il a mis l’accent sur la réponse de son pays, une « île continent », aux défis environnementaux dont l’un des plus urgents est, à ses yeux, la protection des océans.  L’Australie est ainsi en première ligne pour combattre la pollution au plastique qui étouffe les océans, la surexploitation des zones de pêche, la destruction des habitats marins et les changements climatiques, a-t-il souligné, évoquant également le rôle de leader de son pays en matière de recyclage et d’innovations comme le « bioplastique ».  Affirmant soutenir les travaux du Groupe de haut niveau sur l’économie océanique durable, il a souligné les actions menées par l’Australie en faveur des océans et de la biodiversité marine dans le cadre de l’Organisation maritime internationale (OMI) et du G20. 

M. Morrison a ensuite évoqué les actions prises par son pays pour lutter contre les changements climatiques, affirmant obtenir de vrais résultats en la matière.  L’Australie n’est responsable que de 1,3% des émissions mondiales, s’est-il enorgueilli.  Mieux encore, elle aura dépassé en 2020 les promesses faites dans le cadre du Protocole de Kyoto, avec une réduction de ses émissions de gaz à effet de serre supérieure de 367 millions de tonnes à ses engagements.  « Peu de pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) peuvent en dire autant », a-t-il commenté. 

Si l’Australie a plus que respecté ses objectifs de Kyoto, il en ira de même avec ceux de l’Accord de Paris sur le climat, a poursuivi le Premier Ministre, rappelant l’engagement de son pays en faveur d’une réduction de ses émissions de gaz à effet de serre de 26 à 28% en dessous des niveaux de 2005 d’ici à 2030.  « Cela revient à réduire de moitié les émissions par personne en Australie, soit une baisse de deux tiers des émissions par unité de PIB », a-t-il insisté, avant de mettre en exergue le plan de solutions climatiques de 3,5 milliards de dollars mis en œuvre par son gouvernement pour soutenir des projets de transition énergétique. 

« L’Australie a désormais l’investissement par habitant le plus élevé au monde en matière de technologies énergétiques propres et un foyer australien sur cinq est équipé d’un toit à panneaux solaires », s’est-il réjoui.  Le pays pense aussi à ses voisins, comme en témoigne son investissement de 500 millions de dollars sur cinq ans pour la promotion des énergies renouvelables dans le Pacifique, un moyen d’action préféré au Fonds vert pour le climat.  « Cela nous permet d’apporter un soutien direct aux nations insulaires du Pacifique et de nous assurer que cette aide leur parvient en temps et en heure », a-t-il expliqué, assurant que sa « généreuse nation » est d’abord soucieuse de préserver « l’avenir commun » de la région. 

Nous avons entendu, cette semaine, des appels à l’action pour un monde plus vibrant et plus résilient.  Mais, a constaté M. JOSAIA VOREQE BAINIMARAMA, Premier Ministre des Fidji, ces appels ne sont pas venus des leaders du monde mais des jeunes gens.  Des jeunes, a-t-il souligné, fatigués de regarder impuissants leur avenir confisqué par des nations trop aveugles pour voir la catastrophe qui se déploie à leurs pieds ou trop impotentes pour faire ce qu’il faut.  Les jeunes, a prévenu le Premier Ministre, vivent dans la terreur de leur avenir mais ils ont le courage de parler alors qu’ils auraient pu avoir la lâcheté de se taire.  Il y a quelques heures, a rappelé le Premier Ministre, les plus grands climatologues ont publié un rapport qui ajoute une nouvelle dimension à « l’horreur » du monde que nous allons léguer à nos enfants et à nos petits-enfants.  Ils prédisent une élévation du niveau de la mer d’un mètre d’ici à 2100, ce qui est une nouvelle « déchirante » pour des dizaines de milliers de Fidjiens dont le Gouvernement réalise, s’il en était besoin, l’urgence de développer le Fonds d’affectation spéciale pour la réinstallation, lancé ici même lundi dernier. 

« Lisez le rapport », a pressé le Premier Ministre.  Vous lisez bien avec empressement toutes les découvertes scientifiques et exploitez avec le même empressement les meilleures recherches disponibles dans tous les autres domaines.  Pourquoi refusez-vous d’écouter les scientifiques quand ils parlent des changements climatiques?  Le moment de vérité a sonné, a tancé le Premier Ministre, un moment déterminant qui définira le cours de l’histoire.  Les générations précédentes se faisaient la guerre pour défendre leurs intérêts mais aujourd’hui, a dit le Premier Ministre, le monde doit s’unir autour de ses intérêts communs pour combattre un ennemi des plus puissants, « un monstre » que nous avons créé nous-mêmes: une planète en surchauffe qui titube sous le poids de nos excès, nous qui avons pris la résilience pour acquis. 

Toutes les nations ont un rôle à jouer, a reconnu le Premier Ministre, mais seules, a-t-il tempéré, les nations industrialisées ont les capacités économiques et des technologies suffisamment sophistiquées pour conduire le monde à la victoire car la défaite n’est pas une option.  Alors, a averti le Premier Ministre, « ceux qui sont venus à New York sans nouveau plan d’attaque contre la crise climatique ou juste par curiosité, s’il vous plaît, analysez les preuves, les faits et pour l’amour du ciel, assumez vos responsabilités ». 

Il n’y a pas d’autres choix, a prescrit le Premier Ministre, que de s’engager en faveur de la neutralité carbone d’ici à 2050, pas d’autres choix que de bloquer l’augmentation de la température mondiale à 1,5 degrés Celsius au-dessus de l’ère préindustrielle, voire moins, pas d’autres choix que de réduire l’utilisation des combustibles fossiles et d’accélérer le développement des énergies renouvelables, pas d’autres choix que de renoncer au charbon.  Parce qu’on ne peut avoir un climat stable sans des océans sains, le Premier Ministre a attiré l’attention sur la « COP Bleue », la vingt-cinquième Conférence des États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, prévue au mois de décembre au Chili. 

Les COP ne sont pas les seuls endroits où les Fidji ont montré leur leadership, a poursuivi le Premier Ministre, qui a rappelé que les soldats fidjiens se déploient depuis 40 ans dans les opérations de paix de l’ONU.  La détermination des Fidji de consacrer du temps et de l’énergie aux appels du monde à l’action, qu’il s’agisse du maintien de la paix, des changements climatiques ou de la préservation des océans, leur a valu un respect sans précédent, s’est enorgueilli le Premier Ministre.  Mais tous ces progrès resteront vains si le monde n’écoute pas la voix des jeunes et refuse de s’attaquer à la menace climatique. 

Suite du débat général

M. LENÍN MORENO GARCÉS, Président Constitutionnel de la République d’Équateur, a axé son discours sur l’importance du multilatéralisme.  Il a rappelé qu’il existe des principes de coexistence universels qui sont en vigueur en temps de paix comme de conflit.  Ces principes, on les retrouve dans la Charte des Nations Unies, a-t-il rappelé, pour ensuite souligner que si les Nations Unies et leurs actions existent c’est parce que ces principes nous sont utiles, car ils garantissent la paix et l’harmonie. 

Le Président a estimé que le multilatéralisme continue d’être un instrument nécessaire, et le règlement pacifique des différends est toujours à l’ordre du jour.  Or, nous assistons à des tentatives visant à affaiblir la coopération internationale et le multilatéralisme, a-t-il dénoncé, pointant les crises diverses qui existent actuellement.

M. Moreno Garcès a souligné que le dialogue est à la base du multilatéralisme, et qu’il faut continuer à l’encourager.  « Sans dialogue, sans multilatéralisme nous ne pouvons pas nous comprendre », a-t-il affirmé, exhortant les États à cesser de se concentrer sur ce qui les sépare et à penser à ce qui les unis.  L’approche multilatérale est le meilleur outil pour construire un monde meilleur que nous souhaitons tous, a-t-il encore dit.

Face aux défis, tels que ceux de l’environnement, des inégalités de richesse, le risque d’utilisation d’armes de destruction massive, le seul outil pour faire face aux manquements, c’est l’action concertée des États, a plaidé le Président équatorien qui a martelé: « les problèmes mondiaux sont notre affaire à tous. »

Il a ensuite mis l’accent sur les droits fondamentaux des êtres humains.  Il a donné pour exemple l’action décidée de son pays pour les enfants et les migrants, l’Équateur ayant accueilli plus de 500 000 Vénézuéliens.  Il a appelé l’ONU à rechercher une solution définitive pour le Venezuela.  Si les Vénézuéliens quittent leur pays, c’est face à un gouvernement despotique, a-t-il accusé pour ensuite appeler au dialogue avec les victimes du conflit. 

Le Président équatorien a également souligné l’importance des droits sociaux, économiques et culturels, ainsi que des droits civils et politiques.

Quant à la protection de la planète, M. Moreno Garcès a appelé à ne pas attendre. 

M. JIMMY MORALES, Président de la République du Guatemala, a initié son allocution par une présentation des progrès réalisés dans son pays dans le domaine électoral tout d’abord avec la mise en œuvre, pour la première fois, du vote de ses citoyens depuis l’étranger.  Dans celui de l’éducation, ensuite avec le quadruplement du budget de l’alimentation à l’école et la scolarisation de plus de trois millions d’enfants supplémentaires.  De plus, le Président Morales a vanté un autre axe de développement réalisé par le plan dit de Gouvernement ouvert 2016-2018 qui a renforcé une culture de transparence, de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption.  Cette initiative a aussi permis la mise en place de la commission présidentielle de gestion publique dont le travail s’harmonise avec le quatrième plan d’action national de Gouvernement ouvert 2018-2020.

Sur la question de la sécurité, le Président a présenté une évolution positive avec la plus favorable tendance à la baisse des homicides jamais enregistrée en 20 ans, grâce à la professionnalisation, l’épuration et l’efficacité des forces de l’ordre, dont les effectifs sont passés de 31 000 agents en 2015 à 42 000 en 2020. 

Le Président Morales a aussi vanté l’amélioration du réseau routier guatémaltèque et particulièrement insisté sur le travail de son gouvernement en matière d’environnement avec le projet de reforestation d’1,2 million d’hectares en 2032 et l’investissement de 200 millions de dollars dans des programmes forestiers ainsi que l’installation de procédés innovants, des barrières spéciales, pour l’épuration des plastiques dans les cours d’eau. 

Dans le domaine des relations internationales, le Président s’est félicité de l’option pacifique choisie par le Guatemala et Belize qui se traduit par la présentation de leur différend territorial devant la Cour internationale de Justice (CIJ).  D’ailleurs, les relations entre les deux pays sont actuellement à leur meilleur niveau. 

Après avoir réitéré son soutien à l’entrée de la République de Chine (Taiwan) à l’ONU, le Président Morales a réaffirmé son engagement pour des politiques migratoires qui placent la personne humaine au centre du développement et de la prospérité, et pour une gouvernance migratoire qui respecte les droits humains des migrants à tout moment.  S’il partage les idéaux d’une migration sûre, ordonnée et légale, il entend aussi prendre en compte, avec d’autres pays, les vraies causes des migrations et promouvoir avec eux une responsabilité partagée. 

Par ailleurs, le Président a regretté en termes virulents que le Secrétariat ait contribué à la polarisation de la société guatémaltèque au travers de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG), qui, a-t-il dit, à lésé les principes de souveraineté nationale, manqué de respect pour les lois de son pays et sapé l’autonomie des institutions, mettant en danger la paix sociale et défiant le Gouvernement.  Il s’est étonné que de tels agissements aient reçu le consentement de l’ONU, et sous le masque de la lutte contre la corruption, « contribué à politiser la justice et judiciariser la politique ».  Le Président a réclamé une enquête approfondie sur cette Commission qui, a-t-il dit, a utilisé l’image de l’ONU à des fins politiques au Guatemala.  Il a notamment accusé M. Iván Velásquez, le dirigeant de cette Commission, d’avoir transformé les poursuites pénales en « instrument de persécution sélective et politique qui viole les droits universels et bafoue la Déclaration universelle des droits de l’homme, la Convention américaine relative aux droits de l’homme et la Constitution du Guatemala ». 

Le Président a notamment dénoncé les atteintes à la présomption d’innocence, au droit à la légitime défense et aux garanties de procédures judiciaires qui ont eu pour conséquence « la mort en prison préventive de plusieurs personnes et l’incarcération de nombreuses autres pendant des années avant leur libération, faute de preuves ». 

Il a également regretté que des fonctionnaires internationaux au service des États se soient activés à discréditer son pays devant la communauté internationale et a demandé qu’un audit par une firme de niveau mondial soit mené au sujet des fonds utilisés ou budgétisés pour cette Commission afin que les donateurs soient informés de l’usage de leurs deniers « dans un effort inédit des Nations Unies qui ont échoué au Guatemala ».  Il a aussi demandé qu’un rapport exhaustif soit entrepris sur les agissements de la CICIG au Guatemala, « car la vérité, dit-il, citant Jésus, nous rendra libres ». 

M. UHURU KENYATTA, Président de la République du Kenya, a prévenu les responsables mondiaux qu’ils étaient face à un choix crucial: bâtir l’avenir ou le détruire.  Il les a appelés à faire preuve d’audace, d’abord en plaçant leurs populations au cœur du développement, notamment en soutenant les jeunes pour qu’ils décident de leur avenir « sans en devenir les victimes ».  Il s’agit pour ce faire d’accélérer la réalisation des objectifs de développement durable.  Au Kenya a-t-il expliqué, la transition entre l’école primaire et secondaire est désormais accomplie « à 100% »: les filles qui ont quitté l’école en raison d’une grossesse y sont réintégrées - et des serviettes périodiques sont distribuées à toutes les écolières.  En moyenne un jeune Kényan suit 10,7 années d’école, soit le taux de scolarisation le plus élevé de la région, s’est-il enorgueilli. 

Mais, a-t-il poursuivi, il ne saurait y avoir de développement sans paix durable, or la Corne de l’Afrique, confrontée à toute une série de défis, a connu depuis trois décennies une succession de menaces, exacerbées par les effets des changements climatiques qui accentuent les vulnérabilités.  Le Président a cependant félicité le Soudan, qui s’est engagé sur la voie de la paix avec l’aide de l’Union africaine et s’est dit encouragé par les progrès enregistrés au Soudan du Sud avec une réduction de la violence depuis la signature de l’Accord de paix revitalisé.  Il a salué Riek Machar pour s’être rendu à Djouba afin de rencontrer face à face le Président Salva Kiir. 

Dans le même esprit, a ajouté M. Kenyatta, le Kenya recherche toujours une issue à l’amiable avec la Somalie concernant le différend sur la frontière maritime commune qui les oppose.

Poursuivant, le Chef d’État Kényan a appelé les responsables à agir ensemble pour protéger les ressources, tout en tenant compte de la pression démographique, de la diminution de ces ressources et des changements climatiques.  Nous devons adopter une gestion durable de nos ressources pour restaurer l’équilibre de nos écosystèmes, a-t-il insisté. 

La Corne de l’Afrique observe en effet une convergence entre la dégradation du climat et les conflits, avec des sécheresses cycliques qui mettent sous pression les ressources alimentaires, alimentent les tensions autour de la terre, de l’eau, et sont susceptibles de déclencher des conflits.

Enfin, le développement appelle à davantage de soutien avec des besoins estimés de 2 500 à 3 000 milliards de dollars annuels pour financer les ODD et l’action en faveur du climat.  Il a appelé à introduire des mécanismes innovants de financement et réorienter les capitaux privés en créant de nouveaux instruments de financement.  La technologie aussi est un vecteur de développement, la révolution digitale offrant de multiples opportunités d’emplois et de services.

Mais tout ceci, a-t-il tempéré, nécessite davantage de coopération internationale, de partenariat et impose de revitaliser le système multilatéral. 

M. HAGE G.  GEINGOB, Président de la Namibie, a parlé des progrès réalisés par son pays pour éradiquer la pauvreté et réduire les inégalités.  Mettant l’accent sur les incidences positives des investissements sociaux, il a expliqué que la pauvreté a décliné de 70% en 22 ans, ce qui a permis à 400 000 personnes de sortir de la pauvreté depuis l’indépendance.  Il a expliqué que le succès de la Namibie dans la réduction de la pauvreté est lié à la mise en place de programmes bien ciblés mettant l’accent sur des aides financières aux segments les plus vulnérables de la population.  « La mise en place de filets de sécurité sociaux a constitué la pierre angulaire de la lutte contre la pauvreté », a indiqué M. Geingob.  Il a assuré que la Namibie, un des pays les plus inégalitaires du monde, travaillait à construire une société plus inclusive, pour ensuite mettre l’accent sur les difficultés particulières des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure.  Il a souhaité que cette classification, qui repose sur le revenu national brut (RNB) par habitant, soit revue.

Passant aux changements climatiques, M. Geingob a indiqué que la Namibie connaissait un état d’urgence en raison d’une sècheresse prolongée qui affecte les personnes et les moyens de subsistance.  Il a expliqué que cette vulnérabilité représentait un obstacle majeur à la réalisation des objectifs de développement durable.  Tout en réaffirmant l’engagement de son pays à mettre en œuvre l’Accord de Paris, le Président de la Namibie a souhaité que le principe de la responsabilité commune mais différenciée guide l’action pour tacler les défis climatiques. 

M. Geingob a ensuite salué les partenariats entre l’Union africaine et l’ONU pour résoudre les conflits, estimant qu’il sera impossible, sans l’avènement de la paix, de réaliser l’Agenda 2063 et l’Accord portant création de la Zone de libre-échange continentale africaine. 

Appelant par ailleurs à ne pas laisser de côté les peuples du Sahara occidental et de la Palestine, le Président de la Namibie a salué l’organisation, par la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) en mars 2019 en Afrique du Sud, d’une conférence de solidarité avec le Polisario et le peuple du Sahara occidental.  Pour ce qui est de la Palestine, il a appelé à l’avènement d’une solution des deux États.  Il a aussi demandé la levée des sanctions contre Cuba et le Zimbabwe et dit sa solidarité à l’égard du peuple du Venezuela.  Enfin, il a souhaité que le soixante-quinzième anniversaire de l’ONU, en 2020, soit l’occasion de conclure la réforme du Conseil de sécurité.  À cet égard, il a réitéré la position commune africaine articulée autour du consensus d’Ezulwini et la Déclaration de Syrte. 

Enfin, « 20 ans après l’adoption le 31 octobre 2000 de la résolution 1325 sous la présidence namibienne du Conseil de sécurité », le Président de la Namibie s’est félicité de la participation croissante des femmes dans les opérations de paix des Nations Unies et de l’Union africaine. 

M. LAURENTINO CORTIZO COHEN, Président du Panama, a fait part de son attachement au multilatéralisme, pour ensuite évoquer la situation géographique particulière du pays, trait d’union entre deux océans, comme un symbole de paix et de concorde.  Remontant aux origines indiennes et afro-antillaises de la nation panaméenne, le Président a rappelé que son pays a jadis bâti la première voie ferrée ayant uni deux océans, l’Atlantique et le Pacifique, y voyant un symbole fort dans le caractère rassembleur de la nation et sa capacité de négoce.  Il a également évoqué le café cultivé par les peuples autochtones, « le meilleur du monde »; ainsi que les efforts de paix, de dialogue et de consensus de la nation panaméenne.  Remontant à Simon Bolivar, le Président a rappelé la lutte de plusieurs générations de dirigeants panaméens pour garantir la liberté de son peuple, notamment Omar Torrijos, qui, suite aux négociations avec l’ancien Président américain Jimmy Carter, est parvenu à un accord historique restituant au pays le canal de Panama, son intégrité territoriale et sa souveraineté. 

S’estimant privilégié de parler pour la première fois depuis la tribune de l’Assemblée générale, M. Cortizo Cohen a proposé son aide pour résoudre les conflits régionaux.  Il a également qualifié la lutte contre la pauvreté et les inégalités de « prochaine conquête ».  Se déclarant soucieux de l’avenir de la jeunesse panaméenne et de celle de toute la planète, il a qualifié d’intolérable l’extrême pauvreté, et s’est insurgé contre le fait qu’il est encore possible, aujourd’hui, de mourir dans l’indifférence. 

« Nos enfants vont à l’école, mais n’apprennent pas.  Ils doivent, au contraire, apprendre à travailler en équipe, à penser, à faire preuve de créativité », a-t-il plaidé.  « L’éducation, c’est la paix sociale, la dignité humaine.  Partager la connaissance est un objectif de développement durable depuis la petite enfance jusqu’à la meilleure université au monde. » 

Partageant « l’urgence climatique » ressentie par la communauté internationale, M. Cortizo Cohen a loué la verdure et la biodiversité tropicale du Panama.  Il a appelé les États Membres de l’ONU à s’unir pour s’éloigner des dangers d’une extinction des espèces, et à respecter les engagements des traités internationaux: « ce qui est signé doit être mis en œuvre », a-t-il martelé. 

Face aux menaces communes, et pour ne pas répéter les erreurs du passé, M. CARLOS ALVARADO QUESADA, Président du Costa Rica, a vanté les bienfaits du multilatéralisme et cité en exemple la Charte des Nations Unies, les objectifs de développement durable et l’Accord de Paris sur le climat.  À ce propos, s’est félicité le Président, le Costa Rica accueillera du 8 au 10 octobre prochain la PreCOP25, pour préparer la COP25 qui se tiendra en décembre au Chili.  En février 2019, le Costa Rica a lancé un plan national de décarbonisation qui doit aboutir à une économie verte, résiliente et inclusive d’ici à 2050.  La couverture forestière du pays est passée de 20% dans les années 80 à 50% aujourd’hui, a encore noté M. Quesada. 

Selon le Président costaricien, la question de la migration en Amérique centrale est liée au développement économique et social des zones rurales.  C’est pourquoi la région doit pouvoir compter sur des marchés internationaux justes qui rémunèrent bien les produits agropastoraux.  M. Quesada a plaidé pour une baisse des dépenses militaires et davantage d’investissements dans la lutte contre la pauvreté, l’inégalité et les changements climatiques. 

Le dirigeant a également jugé impératif de combler le fossé numérique et entre les sexes, de promouvoir des emplois décents et, de façon générale, de préserver le tissu démocratique et social.  Il a proposé une « initiative mondiale d’inclusion et d’alphabétisation numérique ».  Le mois prochain, a annoncé le Président, le Costa Rica accueillera une réunion de haut niveau pour le renforcement de l’action mondiale en faveur des droits des personnes d’ascendance africaine, organisée par la Vice-Présidente du Costa Rica, Mme Epsy Campbell, première femme d’ascendance africaine à occuper un tel poste sur le continent. 

Préoccupé par les violations des droits de l’homme dans les pays de la région, M. Quesada a préconisé un dialogue national et un processus électoral inclusif, transparent et sous supervision internationale au Nicaragua.  De même, il a souhaité que la communauté internationale trouve rapidement une solution pacifique à la situation au Venezuela. 

M. FAIEZ MUSTAFA SERRAJ, Président du Conseil de la présidence du Gouvernement d’entente nationale de l’État de Libye, a déclaré porter sur ses épaules la cause d’un pays qui vit une crise grave due à une ingérence étrangère négative qui sème la discorde et mine les institutions autant que la paix civile.  Il a notamment pointé la dernière attaque menée par le général Khalifa Haftar contre la capitale Tripoli le 4 avril, pour ensuite souligner que la stabilité de la Lybie est essentielle pour la région autant que pour le monde entier.

À cette attaque s’ajoute aussi une tentative de coup d’État, heureusement déjouée, qui visait à bloquer les réformes entreprises pour les populations civiles et militariser le pays.  Il a signalé que le général Khalifa Haftar, « ennemi assoiffé de sang et de victoires » profite de l’appuis de certains pays, citant notamment les Émirats arabes unis, « qui ont servi de base arrière » pour ensuite indiquer que des missiles d’origine française ont été trouvés dans les villages reconquis par les forces gouvernementales. 

L’Égypte peut bien nous donner des leçons sur nos institutions et le partage des richesses dans notre pays, mais nous dénonçons tous ceux qui soutiennent cette tentative de déstabilisation, a-t-il affirmé avant de prévenir: nous vaincrons les agresseurs et ne laisserons personne causer un bain de sang sur notre territoire. 

M. Serraj a indiqué que la contre-offensive militaire « Volcan de colère » avait été couronnée de succès.  Mais le dessein des agresseurs est évident quand on constate le bilan des assassinats et des disparitions forcées, y compris parmi les parlementaires, a-t-il dénoncé, faisant état d’un bilan de 3 000 victimes et de centaines de milliers de personnes déplacées.  Il a également indiqué qu’à Tripoli et Mourzouk, l’attaque s’est accompagnée de crimes de guerre et de bombardement sur des infrastructures civiles, des hôpitaux et des ambulances.  Des enfants ont aussi été recrutés comme soldats.

Mais dans ce conflit, a-t-il accusé, le silence est aussi une arme pour les agresseurs, voilà pourquoi nous souhaitons que le Conseil de sécurité et la Cour pénale internationale (CPI) participent à une mission d’établissement des faits.

Haftar se réclame de la lutte antiterroriste pour justifier son action mais nous poursuivrons notre bataille pour éliminer ce terrorisme, a martelé le Président.  Cet agresseur tente de fomenter une guerre entre l’est et l’ouest du pays, et accroître la tension entre une entité civile et l’autre militaire.  Pour le Chef de l’État libyen, il revient à présent à l’est du pays de se doter d’institutions civiles suffisamment solides pour pouvoir promouvoir un véritable consensus national.  « Car dans ce conflit, seule la Libye est perdante. »

Le Président a également appelé les jeunes à choisir la voie du consensus national en rentrant chez eux pour participer à la vie de la société libyenne.

Il a salué l’adoption de la résolution 2486 (2019) du Conseil de sécurité visant, dans le contexte des évènements du 4 avril, à élaborer une solution politique et constitutionnelle par le biais d’élections.  Dans ce but, a-t-il précisé, nous organisons une conférence nationale rassemblant l’élite intellectuelle du pays, les femmes et la société civile en vue de renforcer les institutions et d’organiser des élections législatives et présidentielles. 

Sur le plan économique, a-t-il enchaîné, le Gouvernement d’entente nationale a pris des mesures pour assurer la décentralisation et les transferts budgétaires vers les municipalités.  Il s’efforce aussi de prévenir la vente irrégulière de pétrole libyen en dehors du circuit de la compagnie pétrolière nationale. 

M. Serraj a aussi abordé le problème de l’immigration.  Il a expliqué que le flot de migrants irréguliers nuit à l’économie et à la société libyenne et sont proies faciles du terrorisme.  Dans le silence assourdissant de la communauté internationale, des centres de migrants ont été directement visés par des bombardements, s’est-il indigné.  Il a plaidé pour une coopération entre les pays de destination d’origine et de transit, appelant notamment à fournir une aide au développement des pays d’origine. 

Pour sa part, la Libye a besoin de plus de moyens, et de moyens proportionnés à l’ampleur de la tâche qui dépasse les capacités du pays.  Pour le Président, seule la sécurité peut apporter une stabilité suffisante pour ses institutions et pour la création d’emplois.  Il a appelé la communauté internationale à coopérer avec le Gouvernement d’entente nationale, car « le sang a assez coulé ».

M. NANA ADDO DANKWA AKUFO-ADDO, Président du Ghana, s’est longuement attardé sur la notion de pauvreté, observant que la définition proposée par les Nations Unies a le mérite d’être acceptée par tous.  Toutefois, a-t-il fait valoir, pour un trop grand nombre de ceux qui vivent dans des pays en développement, il s’agit d’une réalité quotidienne qui les prive du droit à la dignité.  De fait, a-t-il admis, « nous savons que notre performance en tant que gouvernement sera jugée à l’aune de notre capacité à réduire, voire éliminer la pauvreté dans nos pays ».  Fort heureusement, a-t-il noté, les avancées technologiques viennent court-circuiter les chemins permettant de s’extraire de la pauvreté.  C’est ainsi que les téléphones portables, dont on craignait un temps qu’ils ne deviennent les symboles du fossé entre pays riches et pauvres, sont aujourd’hui partout dans le monde.  « Aujourd’hui, la plus pauvre des personnes, vivant dans la région la plus reculée du plus pauvre des pays dispose d’un téléphone portable, et même souvent d’un smartphone », a-t-il observé. 

« Ce phénomène a largement transformé nos vies », a poursuivi le Chef de l’État ghanéen, notant que son pays compte à présent 41 millions d’abonnés au téléphone mobile, contre seulement 90 000 en l’an 2000.  Si cette évolution a changé le niveau des communications à l’intérieur du pays et vers le reste du monde, elle a aussi ouvert une partie de la population au secteur bancaire formel.  Selon lui, l’application de la technologie peut mener à la prospérité, notamment en permettant de moderniser le secteur agricole.  Il faut pour cela que les jeunes soient associés à ce processus, a-t-il plaidé en louant leurs capacités d’innovation. 

Pour M. Akufo-Addo, cette bataille vers le progrès serait facilitée par des pratiques commerciales justes et équitables.  Reste à savoir si les nations riches sont disposées à rendre possible un tel ordre économique mondial, ce qui, à ses yeux, n’est pas encore le cas.  Bien que le sous-sol africain regorge de minerais utilisés par l’industrie mondiale, le continent reste pauvre, a-t-il déploré.  « Non seulement nous ne touchons pas les dividendes de cette richesse, mais nos terres, notre environnement et nos océans sont dévastés par le processus d’extraction, tandis que la compétition qui règne pour le contrôle des minerais est souvent facteur d’insécurité dans nos pays », a-t-il dénoncé avec force.  Il a ensuite constaté que l’iniquité de l’ordre économique mondial sape la lutte contre la pauvreté en Afrique puisque, selon un récent rapport sur la question, le continent perd chaque année plus de 50 milliards de dollars de recettes en raison de flux financiers illicites.  Il s’est félicité à cet égard de la création d’une zone africaine de libre-échange qui permettra, selon lui, une intensification des échanges commerciaux entre les pays du continent, au bénéfice de leurs peuples. 

Le Président ghanéen a ensuite jugé que la lutte contre la pauvreté est intrinsèquement liée à la qualité de l’éducation.  Conscient de l’importance que constitue une population éduquée et qualifiée pour rivaliser dans l’économie mondiale, le Ghana consacre à cette question une large part de sa richesse nationale, à savoir un tiers du budget de la nation, a-t-il souligné.  À cet égard, il a estimé que l’emploi à bon escient de la technologie permettrait d’accélérer la fourniture d’une éducation de qualité au plus grand nombre.  Mais pour pouvoir bénéficier des opportunités qu’offre la technologie, il faut d’abord pouvoir s’appuyer sur une infrastructure de base, a-t-il souligné.  Il convient donc de fournir une électricité fiable et des services Internet aux habitants de nos villes et villages afin de leur donner la possibilité de tirer profit de cette technologie, vecteur d’éducation de qualité, a-t-il ajouté.  « Nous pourrons, alors, compter de manière réaliste sur un avenir prospère. »

L’histoire, a dit M. GITANAS NAUSEDA, Président de la Lituanie, est un bon professeur.  Elle nous apprend à ne pas répéter les erreurs du passé et nous encourage à viser toujours plus haut.  Il y a quelques mois à peine, a-t-il rappelé, nous avons commémoré le quatre-vingtième anniversaire du fameux Pacte Molotov-Ribbentrop, ce « complot criminel » qui a conduit à la Deuxième Guerre mondiale et à l’occupation des trois pays baltes.  Le même jour, nous avons célébré aussi un grand moment de triomphe: le jour où il y a 30 ans, les peuples de l’Estonie, de la Lettonie et de la Lituanie ont déployé un cordon humain sur les 650 kilomètres de la Voie balte, pour dénoncer le Pacte.  C’était une étape importante de notre lutte pour la liberté et nous ne l’oublierons jamais, a assuré le Président.

Aujourd’hui, en cette ère de grandes incertitudes, nous avons plus que jamais besoin de mécanismes multilatéraux, a-t-il poursuivi, en appuyant fermement la réforme de l’ONU lancée par le Secrétaire général.  Mais dans ce monde qui ploie sous les crises, l’Europe n’est plus une exception: la Fédération de Russie, un membre permanent du Conseil de sécurité, encouragée par la faible réaction internationale à son agression en Géorgie, en 2008, tente désormais de déstabiliser les autres États de son proche voisinage.  Les opérations militaires « odieuses » contre l’Ukraine durent depuis cinq ans maintenant, s’est impatienté le Président.  Nous ne reconnaîtrons jamais, a-t-il prévenu, l’annexion illégale de la Crimée et l’occupation de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud.  La mise en œuvre des accords de Minsk est la condition préalable et incontournable à la normalisation des relations avec la Russie, a martelé le Président. 

Certains leaders politiques, s’est-il étonné, agitent l’idée de créer un nouvel espace géopolitique de l’océan Atlantique à Vladivostok lequel engloberait donc la Russie.  L’idée n’est pas inintéressante mais, s’est demandé le Président, avons-nous une base commune?  Partageons-nous les mêmes valeurs? La réponse est non, a-t-il tranché.  Souvenons-nous de l’histoire, a-t-il plutôt conseillé, rappelant le temps où « certains intellectuels de gauche » saluaient l’accession au pouvoir de Lénine pendant la révolution russe ou encore celui où on demandait aux pays baltes de freiner un peu leurs velléités d’indépendance pour ne pas compromettre la perestroïka de Mikhail Gorbatchev.  Les deux fois, a souligné le Président, le sang des innocents a coulé.  Arrêtons, s’est-il énervé, de promouvoir des unions où certains sont les sujets de l’histoire et les autres, les objets.  À ce jour, la Russie n’a rien fait pour inspirer la confiance.  La situation peut-elle changer? Bien sûr, a répondu le Président, et nous serions les premiers à nous féliciter d’une Russie démocratique et respectueuse du droit international et de la souveraineté des autres. 

Entre-temps, a poursuivi le Président, la Lituanie attend toujours qu’on lui rende justice après les évènements brutaux de 1991 quand les chars soviétiques ont attaqué des manifestants pacifiques dans une Lituanie nouvellement indépendante, faisant 14 morts et plus de 800 blessés.  Aujourd’hui, la Russie protège toujours les auteurs de ces actes et elle n’hésite pas à lancer des procédures pénales contre les juges et procureurs lituaniens qui ont enquêté sur l’affaire.  C’est, s’est emporté le Président, une ingérence « intolérable » dans le système judiciaire d’un État souverain. 

Prouvant son attachement aux droits de l’homme, il a annoncé la candidature de son pays au Conseil des droits de l’homme pour la période 2022-2024.  Pour la Lituanie, a-t-il affirmé, les violations de l’ordre international, la transformation de l’espace en une piste de course à l’armement, le mépris des normes écologiques et de sécurité nucléaire et le déni des changements climatiques doivent être considérés comme des crimes graves.  Pour la quatrième fois consécutive, la Lituanie compte d’ailleurs présenter un projet de résolution sur les risques liés aux armes chimiques jetées dans la mer. 

M. MICHAEL D.  HIGGINS, Président de l’Irlande, a remarqué qu’à l’heure où se tient ce débat, l’ONU et ses agences sont sous le feu des critiques, sous-financées, privées de certains soutiens notamment de la part des plus puissants qui, a-t-il accusé, défendent leurs intérêts propres aux dépends du multilatéralisme.

L’ONU et le multilatéralisme ont pourtant généré des avancées majeures pour les peuples à travers le monde en conduisant des programmes d’atténuation de la pauvreté, de soins médicaux et d’éducation ou de renforcement de la position des femmes, a-t-il indiqué.  Le multilatéralisme, a encore dit M. Higgins, a permis d’adopter des mécanismes de résolution des conflits, de maintien et de consolidation de la paix, sans compter les progrès en matière de droit international.  L’Irlande voit l’ONU comme une enceinte qui a donné une voix aux sans voix, aux marginaux et à ceux privés de pouvoir et de richesse.  L’ONU est aussi à ses yeux un vaste projet dédié au développement juste et durable, à la résolution des conflits, à l’accueil des persécutés qui fuient la guerre, la famine et les désastres.

Hélas, l’idée même d’une gouvernance fondée sur la règle est remise en cause et sapée, a-t-il regretté.  Le partenariat, la coopération, la confiance mutuelle et le respect qui figurent au cœur du multilatéralisme sont enracinés dans l’état de droit.  Le multilatéralisme se fonde, dans sa meilleure pratique, sur le compromis, la vision partagée, la capacité à se retrouver dans un langage commun, la prise en compte des idées et des préoccupations de « l’autre ».

Or, jamais plus qu’aujourd’hui, les défis mais aussi les menaces ont été aussi mondiaux et nous ont appelés à reconnaître notre responsabilité collective.  Rejeter une action collective pour lui préférer une attitude individuelle et agressive, une rhétorique guerrière, ne promet qu’instabilité, déséquilibres, inégalités sociales et chaos, a-t-il prévenu.

Pour M. Higgins, il n’y a pas de conflit qui ne saurait être résolu par un véritable engagement.  Il a rappelé que l’Irlande a connu un conflit prolongé et a souligné que le compromis ouvre la voie à un règlement. 

Il a notamment parlé d’Israël et de la Palestine, se disant convaincu que les besoins des deux peuples ne peuvent être assurés que par deux États souverains.  Les deux peuples ont tout à y gagner « et nous le disons de notre propre expérience », a-t-il insisté, avant d’engager la communauté internationale de demander aux leaders des deux côtés de s’assoir face à face, sans délai. 

Le Président de l’Irlande s’est ensuite inquiété du fait que les changements climatiques avancent plus vite que les efforts déployés pour s’y préparer.  Une action rapide est indispensable pour parvenir à la réalisation des objectifs de développement durable, prévenant que le coût de l’inaction serait catastrophique.  Le Nord et le Sud doivent trouver le courage d’agir, a-t-il affirmé, évoquant l’appel des jeunes générations. 

M. Higgins a aussi relevé que si les nouvelles technologies ont rendu le monde mieux interconnecté, elles peuvent aussi être mal utilisées pour répandre la xénophobie et la haine.  Face à ce phénomène, il a appelé à une action efficace globale au niveau institutionnel et multilatéral. 

Poursuivant, le Premier Ministre a annoncé que l’Irlande a lancé une nouvelle politique de développement centrée sur quatre priorités: égalité de genre, action climatique, bonne gouvernance et lutte contre la pauvreté.  Elle continuera par ailleurs à répondre aux besoins urgents des pays en situation de conflit en République centrafricaine, Palestine, Soudan du Sud, Syrie, Yémen et ailleurs et reconnait à cet égard la générosité des nombreux États qui, se trouvant sur la ligne de front, accueillent un grand nombre de personnes déplacées par les conflits.

Enfin le Président irlandais a plaidé pour des politiques migratoires intégrées, car les migrations irrégulières coûtent trop chères en vies humaines perdues, en mer ou dans les déserts.  Il a en outre rappelé que 10 à 12% du PIB mondial est assuré par des migrants.

M. IBRAHIM BOUBACAR KEITA (Mali) a indiqué que son pays fait la douloureuse expérience, depuis janvier 2012, d’une menace terroriste quotidienne « ne visant rien de moins qu’à saper ses fondements », mais ne manque pas d’amis en ces moments difficiles, via un appui multiforme, politique, diplomatique et militaire de la part de la communauté internationale pour « combattre la barbarie de hordes terroristes ou reconstruire notre unité mise à mal ».

C’est dans une large mesure grâce à ces appuis qu’existe l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger, auquel le Président demeure particulièrement attaché.  Il a expliqué que l’un des acquis majeurs de cet accord est l’absence de belligérance entre les Forces de défense et de sécurité maliennes et les mouvements signataires, ainsi que le retour progressif de la confiance entre les parties maliennes.  « S’y ajoutent la réintégration de plus de 500 combattants dans les Forces de défense et de sécurité maliennes et l’enregistrement de près de 2 000 ex-combattants, membres du mécanisme opérationnel de coordination, dans le cadre du processus de Désarmement, Démobilisation et Réintégration (DDR) accéléré », a détaillé le Président. 

M. Keita a toutefois souligné que, si ces progrès constituaient des préalables au rétablissement de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire, le chemin à parcourir restait long pour parvenir à une paix durable.  Dans cette optique, le Mali se prépare à la tenue, « dans les meilleurs délais », d’un dialogue national inclusif devant conduire à la réconciliation nationale et à l’approfondissement de la démocratie dans le pays.

Le Président a ensuite détaillé deux mesures importantes prises au plan intérieur: la prorogation, jusqu’au 2 mai 2020, du mandat des députés de l’Assemblée nationale « pour lui permettre d’adopter les réformes politiques et institutionnelles qui en viendraient à être préconisées lors du dialogue national inclusif », et la promulgation, en juillet, de « la Loi d’entente nationale ».  Cette loi exonère de poursuites pénales engagées ou envisagées les personnes ayant commis ou ayant été complices de crimes durant les « évènements douloureux survenus au Mali à partir de janvier 2012 ».  La loi exclut cependant de son champ d’action les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, les viols et « les crimes réputés imprescriptibles », a précisé M. Keita.  Elle prévoit des compensations pour les victimes directes ou collatérales de ces crimes, en s’appuyant sur le « travail remarquable » déjà accompli par la Commission vérité justice et réconciliation qui, à ce jour, a auditionné plus de 14 000 Maliennes et Maliens.

Dans ce même esprit, M. Keita a célébré la création du Fonds de développement durable (FDD) « doté de 72 millions de dollars américains », et conçu comme l’instrument financier de la stratégie de développement du nord du pays, notamment dans les régions de Kidal, Ménaka, Tombouctou et Gao. 

Rendant un vibrant hommage à l’action de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), M. Keita a ajouté qu’au sein du G5 Sahel, les pays étaient conscients qu’une stratégie « tout sécuritaire » ne saurait apporter une paix durable dans la région.  L’environnement demeure volatile; les tensions intercommunautaires ont endeuillé le Mali, le conduisant à prendre « une série de mesures pour rétablir l’ordre et la sécurité » dans régions affectées.  Le Président a aussi évoqué un programme de récupération d’armes et un programme d’assistance sanitaire.

Dédiant son second mandat à la promotion de la jeunesse, M. Keita s’est dit engagé dans la promotion de l’emploi des jeunes, et a célébré l’octroi, en 2018, de 3 000 logements sociaux pour personnes à revenus intermédiaires et faibles.  Le Président a enfin évoqué les impératifs de développement industriel dans le pays, déplorant que le Mali, grand producteur de coton, ne transformait que 2% du total de son coton produit. 

Préoccupé par la situation en Libye qui continue d’impacter toute la région du Sahel, le Mali suit aussi avec attention la situation dans les territoires palestiniens occupés, et appelé à la fin des conflits en Syrie et au Yémen, et appelle au respect du droit des migrants prévu dans le Pacte de l’ONU sur les migrations.  

Touché de plein fouet par les conséquences du changement climatique, « la montée du désert », l’impact sur la faune et la flore, l’assèchement des fleuves et cours d’eau, le Mali appelle de plus à la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur le climat et à déclencher « une vague accélérée d’investissements pour parvenir à la neutralité carbone », et travaille d’ailleurs en ce sens au sein de Union africaine. 

M. TANETI MAAMAU BERETITENTI, Président de la République de Kiribati, a tout d’abord présenté ses condoléances aux Bahamas pour les pertes causées par l’ouragan Dorian et a noté que les « avertissements » vont devenir de plus en plus fréquents, tout comme les impacts.  C’est un appel urgent à l’action et à la mise en œuvre transformative, a-t-il déclaré.

Il a ensuite indiqué que face aux défis que représentent la pauvreté et les inégalités, le Gouvernement de Kiribati a fait de substantiels investissements, de plus de 31 millions de dollars australiens, en subventionnant le copra, ciblant ainsi les ménages et les producteurs de noix de coco.  Renforcer l’inclusion des segments marginalisés de la communauté figure au cœur de notre culture égalitaire, a aussi déclaré le Président kiribatien, donnant l’exemple d’un programme de subvention pour personnes âgées et aux besoins spéciaux de son pays.  Toujours dans l’idée de ne laisser personne de côté, des investissements sont en cours pour améliorer les infrastructures des îles périphériques.  Ces projets d’investissement répondent au problème d’isolement de Kiribati en favorisant les échanges et la mobilité des personnes, des biens et des services, et en renforçant la fourniture de services publics, tout en réduisant les coûts d’accessibilité.  De même, un projet permettra de fournir de l’eau potable 24 heures sur 24 à tous les résidents de Tarawa Sud pour la première fois dans l’histoire, en exploitant l’eau des océans. 

Poursuivant, le Président de Kiribati a souligné l’importance de conduire une éducation inclusive, en améliorant l’accès à l’éducation et en assurant une éducation de qualité pour tous.

Ces investissements changeront la donne en matière de développement de Kiribati, a souligné son Président, qui a reconnu le support de ses partenaires au développement tels que la Banque mondiale, la Banque asiatique de développement ou encore le Fonds mondial en faveur du climat.

Quant aux changements climatiques, ils sont, selon le Président Beretitenti, un dilemme alarmant de la plus grande importance pour Kiribati et le Pacifique, pour sécuriser le futur des jeunes et des générations à venir.  De même, les négociations en cours sur le projet d’accord sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale sont d’une importance capitale pour cette région.

Il a souligné que la publication du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), faisant état d’une montée significative du niveau des mers, doit servir de catalyseur à une action urgente et informée de la part des gouvernements.  Il a aussi averti du risque que représente l’excès dans la technologisation du développement des petits États insulaires en développement.  Il a également indiqué que Kiribati vit dans un paradoxe, faisant face à une situation précaire due à son état de vulnérabilité, tout en ayant un revenu per capita relativement élevé. 

Le Président Beretitenti a, par ailleurs, parlé des séquelles de l’exploitation du phosphate et des essais nucléaires sur les habitants de son pays qui voient leur santé affectée et leur terre détruite.  Il a estimé que certaines violations des droits de l’homme méritent réparations.

M. EMMERSON DAMBUDZO MNANGAGWA, Président du Zimbabwe, a indiqué que son gouvernement est déterminé à surmonter la réalité d’une économie en difficulté et les conséquences des sanctions illégales imposées au pays, dont il a d’ailleurs réclamé la levée immédiate.  Il a indiqué que beaucoup de choses ont été accomplies depuis son accession au pouvoir, à commencer par la bonne reprise de l’économie et la stabilisation de la croissance.  Il a aussi cité les progrès significatifs en matière macroéconomique et de stabilisation fiscale, en plus de projets à forte incidence sur l’initiative privée.  Il y a également une forte volonté d’éradiquer la pauvreté, de fournir une éducation de qualité aux populations, de créer des emplois pour les femmes et les jeunes en plus d’atténuer les effets négatifs des changements climatiques, a-t-il ajouté. 

De plus, le ferme engagement du retour du Zimbabwe dans le concert des nations connaît un progrès notable et nos bras sont grands ouverts pour tous ceux qui souhaitent se joindre à cette aventure passionnante de la renaissance du pays.  Le Président a parlé de l’ouverture de l’espace démocratique où tous les partis politiques sont invités à un franc débat, et des multiples réformes mises en œuvre en faveur de la prospérité des citoyens en droite ligne de leurs aspirations.  Et ces réalisations sont accomplies en dépit des sanctions illégales imposées à notre pays.  Celles-ci constituent, à son grand regret, un déni des droits humains et un frein pour le développement du pays, en plus d’appauvrir les plus vulnérables. 

M. Mnangagwa a applaudi la position de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), l’Union africaine (UA) et tous ceux qui ont soutenu son pays pour demander de lever ces sanctions punitives.  Il a invité ceux qui sont à l’origine de ces sanctions, à écouter cet appel et à agir en conséquence « maintenant ».  La coopération repose sur une approche gagnant-gagnant par opposition aux sanctions, a-t-il dit.  Le Zimbabwe mérite bien un « nouveau départ », a-t-il insisté, énumérant toutes les réformes menées par son administration à tous les niveaux, notamment le renforcement des institutions, la transparence et la reddition de comptes, la liberté de la presse et l’accès à l’information.

« Laissez-nous accélérer notre quête pour éradiquer la pauvreté à l’horizon 2030 », a-t-il plaidé, rappelant l’impact du récent cyclone Idai qui a frappé l’Afrique australe.  « Nous sommes encore en train de nous relever du désastre dont le coût de la reconstruction est estimé à quelque 600 millions de dollars pour le seul Zimbabwe », a-t-il indiqué.  Il a expliqué que l’impact de la catastrophe sur l’ensemble de l’économie du Zimbabwe, basée essentiellement sur l’agriculture qui contribue entre 15 à 20% du PBI, avait amené son gouvernement à décréter l’état de catastrophe nationale. 

SHEIKH JABER AL-MUBARAK AL-HAMAD AL SABAH, Premier Ministre de l’État du Koweït, a indiqué qu’alors que son mandat de deux ans en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité touche à sa fin, le Koweït est devenu plus sensible à l’importance du renforcement du dialogue et du pluralisme pour faire face aux grands défis mondiaux.

Cette année, a-t-il enchaîné, la région arabe du Golfe a été secouée par une série d’actes terroristes et subversifs qui ont menacé la liberté de navigation dans cette région vitale et mis en danger le flux de l’approvisionnement énergétique.  Il a notamment cité la récente attaque contre le Royaume frère d’Arabie saoudite et qui a ciblé en particulier les installations vitales dans les provinces de Abqaiq et Hijrat Khurais.  À cet égard, il a appelé la communauté internationale à assumer sa responsabilité en veillant à faire respecter la libre navigation dans cette importante partie du monde ainsi que le respect du droit de la mer.

S’agissant de la question palestinienne, le Premier Ministre a estimé important de poursuivre les efforts pour la relance de négociations sérieuses afin de parvenir à une paix juste et globale, conforme au processus de paix, aux résolutions internationales et à l’Initiative de paix arabe. 

Il a également parlé de la crise syrienne, qui rentre dans sa neuvième année, et a réaffirmé la ferme position du Koweït selon laquelle il n’y a pas de solution militaire à cette question.  Il a encouragé à œuvrer pour la réalisation d’un règlement politique conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment la résolution 2254 (2015) et le Communiqué de Genève de 2012. 

Sur le volet yéménite, la persistance de la crise dans ce pays demeure, selon lui, un indicateur de la réalité à laquelle est confrontée la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Ici aussi, la solution militaire est à écarter, a-t-il dit renouvelant son appui aux efforts des Nations Unies pour faciliter le processus politique.  À cet égard, il a annoncé que le Koweït est prêt à accueillir « nos frères yéménites » pour abriter un nouveau cycle de négociation sous les auspices des Nations Unies. 

À l’Iran, le Premier Ministre koweitien a proposé de mettre en œuvre de sérieuses mesures de rétablissement de la confiance pour inaugurer un dialogue sur le respect de la souveraineté des États et de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures, en plus d’œuvrer à la réduction des tensions dans la région du Golfe et au maintien de la sécurité de la navigation maritime. 

Abordant la question du terrorisme, l’un des défis les plus dangereux qui a frappé le cœur du système international, il a rappelé que c’est la région du Moyen-Orient qui a payé le plus lourd tribut, pointant notamment le groupe Daech qui, a-t-il accusé, se sert de l’Islam comme couverture pour mener ses sombres desseins.  À la lumière de l’exacerbation de ce danger qui plane sur plusieurs pays de la région, notamment le Yémen, la Libye, la Syrie, la Somalie et l’Afghanistan, le Premier Ministre a voulu mettre en avant l’expérience de l’Iraq qui, à la faveur de l’appui de la communauté internationale, a pu purger son pays de la nébuleuse terroriste. 

M. NIKOL PASHINIAN, Premier Ministre de l’Arménie, a rappelé le succès des dernières élections parlementaires de décembre 2018, les premières depuis 25 ans à se dérouler sans contestation de leurs résultats par le public, ni par aucun parti politique.  Ce scrutin décrit comme libre, juste et transparent par les observateurs internationaux constitue un succès de la révolution de velours de 2018, qui vaut à l’Arménie l’approbation de la communauté internationale et des médias, s’est-il enorgueilli.

Le Premier Ministre a regretté néanmoins que la transformation démocratique et la politique de zéro tolérance de son pays contre la corruption rencontre la résistance d’une ancienne élite corrompue.  Alors que la presse est libre de toute interférence du Gouvernement, cette élite s’immisce dans les médias pour propager des « fake news » et miner la confiance du public dans les objectifs de notre révolution, a-t-il dénoncé.

Le Premier Ministre a aussi déploré que l’on puisse voir autre chose dans la révolution de velours que la volonté du peuple de rejeter la corruption, les abus et la monopolisation du pouvoir, et que ce dernier se voit accusé d’être le produit de l’influence de puissances étrangères concurrentes dans la région.  Cette révolution pacifique, a soutenu le Premier Ministre, n’était que le début de notre mission et sans doute sa phase la plus facile, car il s’agit maintenant de prouver que la transformation démocratique est durable.

M. Pashinian a ensuite expliqué que sur le plan économique, la croissance est fondée sur une très importante transformation idéologique, qui privilégie dorénavant l’effort individuel des citoyens.  Les institutions sont réformées et renforcées par l’établissement d’une justice indépendante; d’institutions anticorruption et d’un terrain égal pour tous les acteurs économiques et politiques du pays.

Il a salué la coopération internationale dont bénéficie l’Arménie, notant que celle-ci lui permet de gagner un temps précieux et d’éviter les erreurs commises par d’autres démocraties. 

Malheureusement, des tensions persistent, a—t-il enchaîné, précisant que deux des quatre frontières internationales de l’Arménie, sont toujours fermées, dont celle avec la Turquie qui l’est depuis trois décennies.  Il a affirmé qu’en refusant de nouer des relations diplomatiques avec l’Arménie, et en soutenant ouvertement l’Azerbaïdjan contre l’Arménie et le Nagorno-Karabakh, la Turquie représente toujours un danger sérieux pour la sécurité de l’Arménie et de son peuple, « victime de la profonde tragédie du génocide et toujours en butte à la négation de la vérité et de la justice ». 

Poursuivant, M. Pashinian a indiqué que la résolution du conflit au Nagorno-Karabach est cruciale pour la stabilité de la région.  Malheureusement, a-t-il déploré, les autorités azerbaïdjanaises ne souhaitent pas trouver une solution et préfèrent miser sur la défaite du peuple du Nagorno-Karabakh.  Il les a accusés de rechercher une revanche pour leurs tentatives « ratées » d’agression contre le Nagorno-Karabakh en 1990 et en 2016; et de tenter de ramener le statut du Nagorno-Karabakh à celui qu’il subissait durant l’ère soviétique. 

Le Premier Ministre de l’Arménie a ensuite appelé le Président de l’Azerbaïdjan, M. Ilham Aliev à accepter les conditions d’une avancée du processus pacifique et une solution qui soit acceptable pour les peuples de l’Armenie, du Nagorno-Karabach et de l’Azerbaijan.  « Nous devons travailler ensemble à faire de cette formule une réalité », a-t-il affirmé. 

M. ANDREJ BABIŠ, Premier Ministre de la République tchèque, a célébré « avec fierté » les 30 ans de la Révolution de velours ainsi que la mémoire de Vaclav Havel, « symbole de la révolution ». 

Encore « contrôlé par un empire étranger en 1989 », avec une industrie en berne, un paysage et une nature détruits, et un système politique sans réponse face aux attentes de ses citoyens, la République tchèque a, 10 ans plus tard, intégré l’Otan, avant de devenir membre de l’Union européenne en 2004, a rappelé son Premier Ministre, passant d’un système communiste à « une société civile en plein essor » et à « une économie forte ».

Célébrant ses racines manufacturières du début du XXe siècle et les réussites industrielles comme Skoda, Bata ou Jawa, M. Babiš a regretté que l’inexpérience des élites du pays au sortir du communisme les ait conduits à des « erreurs » et « à un gâchis de temps et de ressources », aujourd’hui « en voie d'être réparées », a-t-il pointé. 

Se réjouissant d’être « la septième nation la plus sûre du monde », la République tchèque a aussi le meilleur taux d’emploi de l’Union européenne, et se classe septième dans des pays classés dans l’index des objectifs de développement durable.  Rappelant par ailleurs l’étymologie du mot « robot », aux racines tchèques, le Premier Ministre a souhaité que son pays devienne un leader européen en matière d’innovation et d’intelligence artificielle. 

Concernant l’Union européenne (UE), M. Babiš a préconisé davantage de dynamisme et d’activité en matière de politique étrangère, de commerce international, et de politique migratoire.  Concernant notamment l’immigration en provenance d’Afrique et du Moyen-Orient, il a souhaité une « reprise de contrôle des flux migratoires ».

Les changements climatiques préoccupent également la République tchèque au plus haut point, a poursuivi le Premier Ministre.  Le pays, qui soutient l’Accord de Paris, s’est engagé à fortement réduire ses émissions de CO2 pour atteindre la neutralité carbone.  Il a cependant expliqué que l’Union européenne ne pouvait être la seule à réduire ses émissions et adapter son économie.  « L’Europe ne peut pas rester seule à agir de manière ambitieuse dans la bataille contre les changements climatiques.  Il n’y a qu’une planète pour chacun d’entre nous.  Tous ceux responsables des changements climatiques doivent trouver le courage politique de faire partie de la solution.  Mais en même temps, nous ne pouvons et ne voulons pas faire de mal au meilleur de notre économie. »

Il a indiqué que réduire de 80% les émissions d’ici à 2050 devrait couter 140 000 milliards de dollars parce que le monde est complètement dépendant des énergies fossiles, et que les énergies propres ne sont pas encore efficaces.  « Les lycéens manifestants ont donc raison: le monde échoue face aux changements climatiques. »  Mais leur approche, selon M. Babiš, est mauvaise.  Leurs revendications trop ambitieuses de réduction des émissions ne fonctionneront pas, « puisque les énergies vertes ne sont pas encore arrivées à maturité », a-t-il expliqué.  « L’éolien et le solaire ne contribuent qu’à 1% de la production d’énergie mondiale mais reçoivent 129 milliards de dollars de subventions annuelles, a argumenté le Premier Ministre.  De son avis, le monde devrait donc davantage investir dans la recherche et le développement des énergies vertes pour que leur prix baisse en-deca du prix des énergies fossiles. 

Qualifiant l'intervention, lundi dernier, de la militante suédoise de l’environnement Greta Thunberg d’intéressante, mais critiquant sa théâtralité « hystérique », « agressive » et contreproductive, M. Babiš a trouvé injuste et faux de prétendre que personne ne faisait rien.  « En tant que membres des Nations Unies, nous avons une responsabilité commune envers notre planète.  Cependant, en tant que dirigeants de nos pays, nous avons une responsabilité envers nos citoyens.  Nous avons un mandat pour les assurer d’une économie prospère et de la protection de l'environnement », a-t-il résumé.

Concernant la politique migratoire, M. Babiš a appelé à éliminer les causes migratoires à la racine: « les réfugiés doivent être motivés de rentrer chez eux, et cela arrivera seulement quand leur foyer leur donnera de nouveau de l’espoir.  C'est pourquoi nous soutenons le Programme de développement durable à l’horizon 2030, qui aidera à éliminer les causes de la fuite de populations de zones de guerre ou de fuir des économies incapables de leur procurer une vie décente. »

Engagée en Afrique et particulièrement au Mali, partisane d’un corridor sécurisé en Syrie, la République tchèque a surtout appelé l’Union européenne à trouver un langage commun avec la Turquie pour régler le problème des réfugiés syriens, et de parvenir à la paix dans la région pour construire des appartements, des hôpitaux et des écoles au lieu de camps de réfugiés.  « La situation ne s’améliorera que si l’Union européenne parle davantage avec le Président Erdogan », a-t-il conclu.

M. JAVIER ESPOT ZAMORA, Chef du Gouvernement de la Principauté d’Andorre, a remarqué que les 17 objectifs de développement durable ont eu le grand mérite d’harmoniser les priorités de la communauté internationale.  Afin d’y parvenir, tous les acteurs doivent être mobilisés, c'est pourquoi Andorre a adopté récemment un plan stratégique national. 

Il a soutenu sans réserve l’action de la Cour pénale internationale et a célébré l’élargissement de sa juridiction il y a un an, pour ensuite résumer les quatre défis mondiaux: l’éradication de la pauvreté, l’accès à une éducation de qualité, l’action pour le climat et l'inclusion.  Tous les défis mondiaux sont liés à la pauvreté, a remarqué le Chef de Gouvernement.

Petit pays disposant de peu de ressources naturelles, Andorre sait à quel point une éducation de qualité peut avoir un impact positif.  Société multilingue prête à prendre la mondialisation à bras le corps, on y parle dès le plus jeune âge espagnol, catalan, français, anglais, et même, plus récemment, portugais, suite à l’apport de l’immigration, a-t-il expliqué.  En outre, pour relever les défis du monde actuel, Andorre a promu des politiques éducatives inclusives, et réitéré son engagement en faveur d’une éducation de qualité pour promouvoir l’égalité des chances.

Concernant les changements climatiques, M. Espot Zamora a jugé impossible de parvenir à une efficacité sans multilatéralisme.  Il a indiqué que la fonte des glaces menace le secteur du ski en Andorre, et « ni Andorre, ni aucun autre pays du monde, grand ou petit, puissant ou faible, n'y pourra rien.  « Évoquant la crise financière de 2008, qui a amené de profondes réformes de transparence fiscale en Andorre, il a fait le parallèle entre les efforts fournis par Andorre dans le domaine de la transparence financière et ceux que doivent aujourd’hui fournir les principaux pays pollueurs du monde.  Jugeant le débat sur la réalité des changements climatiques clos, le Gouvernement s’est attaqué aux deux principales sources de pollution en Andorre: les transports et le chauffage.  Un plan de mobilité partagée a été lancé.  Le pays a aussi refondé le système de transports et repense actuellement les systèmes de chauffage des bâtiments, dans le but de parvenir à une baisse drastique des émissions de gaz à effet de serre de 50% d’ici à 2050.

Fidèle à son histoire démocratique vieille de plus de 600 ans, Andorre a en conclusion plaidé pour un multilatéralisme éclairé, dirigé vers un développement durable et inclusif.

« La durabilité est plus qu’un terme de marketing pour l’Élite post matérielle », a plaisanté M. HEIKO MAAS, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne.  Il a souligné qu’une politique durable, implique d’apporter des solutions durables aux conflits qui reposent sur des accords durables et non sur des accords conclus à la hâte.   Une politique étrangère durable est par essence une politique étrangère multilatérale, a-t-il souligné.

Prônant une stratégie des petits pas et de la collaboration, il a donné pour exemple la situation au Moyen-Orient.  Il a averti que l’attaque en Arabie saoudite nous montre à quel point les choses peuvent s’accélérer, affirmant dans la foulée que l’Iran en porte la responsabilité « comme l’ont dit clairement les Européens au Ministre des affaires étrangères iranien ».  Il a estimé que le seul moyen de réduire les tensions entre les États-Unis et l’Iran est d’organiser des pourparlers.  Mais cela n’aura lieu, a-t-il insisté, que si l’on n’impose pas des préconditions impossibles à ce dialogue.  Pour l’Allemagne, l’objectif est un Iran dépourvu d’armes nucléaires.  Mais cela implique que nous attendons que l’Iran respecte ses obligations envers la communauté internationale.

Tournant son attention à la situation en Afghanistan, il a déploré la « terrible » attaque par les Taliban qui ont saboté les négociations de Doha auxquelles l’Allemagne croyait beaucoup.  Il a considéré que la seule solution durable au conflit passe par des compromis politiques, garants d’une solution à long terme.  M. Maas a jugé qu’un accord avec les Taliban ne peut être qu’une première étape qui précède les dialogues intra-afghans que soutient l’Allemagne, dans l’espoir d’un ordre constitutionnel, d’un minimum de stabilité, et d’un respect des droits de l’homme, particulièrement ceux des femmes et des jeunes filles.

Sur le dossier ukrainien, le Ministre a refusé d’accepter le blocage du processus de Minsk, au regard des 13 000 victimes de ce conflit, et s’est réjoui des « petits pas importants » réalisés au niveau local comme la reconstruction du pont de Stanytsia Luhanska.

En Syrie, M. Haas a vu dans la création d’un comité constitutionnel un pas important du processus politique et a exhorté à appliquer rapidement la résolution 2254.  Il a estimé que l’impunité dont jouissent les tourmenteurs de milliers de Syriens réduit la crédibilité du processus de paix.  Il a proposé de créer une alliance contre l’impunité qui renforcerait la juridiction criminelle internationale.

« Autant que l’énergie et la résilience, une politique étrangère durable implique une collaboration, a rappelé le Ministre, comme le prouvent les progrès au Soudan et au Mali, où 1000 Casques Bleus allemands participent au maintien d’une paix fragile.

M. Haas a également parlé de l’expérience allemande après neuf mois de présence au Conseil de sécurité.  Il a relevé que les conflits n’y sont pas abordés avant les premiers coups de feu et les premiers morts.  D’où le souhait de son pays de placer des sujets importants, tel le climat et la sécurité, en tête de l’ordre du jour du Conseil, de même que le thème du rôle des femmes et la violence faite aux femmes en tant que tactique de guerre.

Plus que tout autre pays, l’Allemagne, qui, a dit le Ministre, « a déclenché le feu et la destruction en Europe il y a 80 ans », assume sa responsabilité pour un ordre mondial qui garantisse la paix, et affirme que la coopération ne constitue pas une trahison de son pays, mais plutôt la condition préalable à la sécurité et la prospérité. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sommet sur les ODD: les dirigeants du monde présentent des mesures pour la décennie d’action, sous le regard des jeunes qui « demanderont des comptes »

Soixante-quatorzième session,
Forum politique de haut niveau - matin & après-midi
AG/12188

Sommet sur les ODD: les dirigeants du monde présentent des mesures pour la décennie d’action, sous le regard des jeunes qui « demanderont des comptes »

En clôturant le Sommet sur le suivi de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, le Président de l’Assemblée générale a rappelé que les objectifs de développement durable (ODD) visent à « garantir aux personnes du monde entier d’avoir les mêmes chances non seulement de survivre, mais également de prospérer ». 

Alors qu’il mettait fin au premier Forum politique de haut niveau pour le développement durable placé sous les auspices de l’Assemblée générale, M. Tijjani Muhammad-Bande a estimé que l’engagement exprimé par les dirigeants du monde à cette occasion, matérialisé par une Déclaration politique adoptée hier, n’est que le début des efforts que le monde attend.  En parlant de la « décennie d’action » à venir, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohammed, a promis que l’ONU allait y mettre du sien pour la concrétisation des objectifs. 

« Nous n’allons plus prendre vos promesses pour argent comptant », a toutefois prévenu Mme Trisha Shetty, une jeune représentante de la société civile, en expliquant que sa génération attend désormais des actions.  « Nous demanderons des comptes », à la fois aux dirigeants et aux jeunes qui entendent s’engager, a-t-elle dit, car pour l’instant, les jeunes considèrent que les dirigeants du monde ont échoué dans la tenue de leurs engagements ambitieux de 2015.  Il est, selon Mme Shetty, important de changer dès à présent de cap.  C’est aussi le message transmis par un jeune poète, M. Ameer Brown, qui a déclamé un texte empreint de lyrisme dans lequel il a recensé les problèmes d’aujourd’hui et évoqué les espoirs d’un monde meilleur.

Pour convaincre de leur détermination à réaliser le Programme 2030, les dirigeants ont, à travers une succession de « dialogues », présenté les mesures prises ou envisagées pour pouvoir atteindre les ODD dans les temps voulus.  En plus du « plan mondial » qu’il est nécessaire de suivre, comme recommandé par le roi des Pays-Bas, de nombreux dirigeants et notamment la Première Ministre de l’Islande, ont insisté sur le fait que le développement durable ne pourra être une réalité sans « coopération entre toutes les parties prenantes ».  Le Président du Kenya a souligné, par exemple, l’importance du partage d’expériences, des financements et des transferts de technologies.

Cet appel à des partenariats a été maintes fois repris, même si le Président des Seychelles a souligné que la multiplicité des partenariats peut aussi constituer un obstacle quand il faut mobiliser plusieurs acteurs pour un projet commun, alors que chacun d’eux a des priorités qui lui sont propres.  C’est pourquoi « il faut s’écarter des solutions habituelles et trouver des approches innovantes », a proposé la Présidente de la Géorgie en rappelant la nécessité de combler le fossé des 37 000 milliards de dollars qui manquent pour la mise en œuvre des ODD. 

C’est dans ce sens qu’a été lancé le « Global Deal », a expliqué le Premier Ministre de la Suède qui a parlé d’une initiative visant, entre autres, à renforcer le dialogue social, à créer des emplois décents et à réduire les inégalités.  Cette solidarité internationale a permis de mobiliser 2 100 chambres de commerce du monde entier et donc 10 millions d’entreprises pour investir dans le développement durable, a souligné le Secrétaire général de la Chambre de commerce internationale (CCI), même s’il a déploré les cadres politiques et réglementaires dissonants qui constituent un obstacle à l’implication du secteur des affaires dans les questions de développement durable au niveau local.

L’appropriation locale des ODD est pourtant cruciale, ont fait remarquer les orateurs.  Pour l’Administrateur du PNUD, réaliser les objectifs au niveau local est la clef pour la réussite de tout le Programme 2030.  Les « ODD appartiennent à tous », a relevé le Président de l’Assemblée générale, en souhaitant que les ODD soient davantage intégrés dans les plans nationaux de développement et que la mobilisation de ressources et des investissements engendre une accélération des progrès. 

Parlant des financements, la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) a insisté sur la mobilisation des ressources nationales par les pays du Sud, tout en appelant les pays du Nord à lutter contre les flux financiers illicites.  Le Président du Kazakhstan a demandé que les ressources financières dédiées aux ODD soient dépensées « de manière raisonnable », et que l’on accorde davantage d’appui aux pays à revenu intermédiaire qui comptent près de 5 milliards d’habitants. 

Le Premier Ministre d’Antigua-et-Barbuda a, pour sa part, mis l’accent sur l’importance de l’aide publique au développement (APD), en plaidant pour le développement de nouveaux instruments financiers adaptés au contexte de la crise climatique.  À ce propos, dans un plaidoyer émouvant en faveur des petits États insulaires en développement (PEID), le Président de Saint Vincent-et-les Grenadines a demandé qu’une attention spéciale soit accordée à ces pays, rappelant aux dirigeants du monde que « nous nous sommes de la même famille ».  C’est aussi parce que les gens sont au cœur des ODD que l’Égypte, comme l’a expliqué son Président, a adopté une stratégie nationale de développement qui s’appuie sur des « investissements dans l’être humain ».

Avant la séance de clôture, le Forum a entendu des dizaines de dirigeants dans le cadre d’un débat général entamé hier.  Le Forum a décidé que le Président de l’Assemblée générale préparerait un rapport sur ces travaux.

Le prochain Forum politique de haut niveau pour le développement durable, placé sous les auspices de l’Assemblée générale, aura lieu dans quatre ans. 

FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE (Suite)

Dialogues des dirigeants

Accélérer la réalisation des objectifs de développement durable: les points d’entrée importants

Après avoir énuméré les réalisations du Gouvernement islandais pour intégrer le Programme de développement durable à l’horizon 2030 dans le programme d’action national, Mme KATRÍN JAKOBSDÓTTIR, Première Ministre de l’Islande, co-modératrice de la discussion, a mis en garde que les Objectifs de développement durable (ODD) ne seront pas atteints sans coopération ni sans coordination entre toutes les parties prenantes.  Elle a fait valoir à cet égard l’exemple de son pays, l’Islande, qui œuvre en ce sens.  Pour sa part, le Président du Costa Rica, M. CARLOS ALVARADO QUESADA, l’autre modérateur de ce dialogue, a insisté sur l’importance d’accélérer la mise en œuvre des ODD pour arriver, avant 2030, à ne laisser personne sur le bord de la route.  Le Président a invité les pays à donner des exemples concrets des actions qu’ils mènent pour accélérer la réalisation des ODD.

M. ABDEL FATAH EL-SISI, Président de l’Égypte, tout en reconnaissant que beaucoup reste à faire dans son pays sur les plans économique et social, a fait valoir la stratégie nationale égyptienne basée sur des programmes très ambitieux qui ont permis d’améliorer la situation des Égyptiens de façon générale, « parce que nous investissons dans l’être humain », a précisé le Chef d’État.  Pour accélérer la réalisation des ODD, il faut des financements qui correspondent aux aspirations du pays et qui ne soient pas soumis à des conditions politiques ou autres, a-t-il recommandé.  Le Président el-Sisi a aussi souligné l’importance du renforcement des capacités nationales et humaines.  

Planifier les activités de développement avec soin et faire place aux nouvelles idées, sont les grandes lignes proposées par le Président du Monténégro, M. MILO DUKANOVIĆ, qui a énuméré plusieurs « points d’entrée », dont la réforme de la gouvernance, les échanges de données fiables entre l’ONU et les services statistiques nationaux, l’adoption d’une approche stratégique sectorielle et horizontale, et l’élaboration d’un modèle de développement national.

Pour sa part, le Président de la Sierra Leone, M. JULIUS MAADA BIO, a dit que son gouvernement se concentre d’abord sur les objectifs 4 et 16, qui ont trait respectivement à l’éducation de qualité gratuite et l’accès à la justice.  Il a précisé que 21% du budget sont consacrés à l’éducation et que 2 millions d’enfants ont été scolarisés en Sierra Leone.  La réforme économique menée dans le pays vise à augmenter les revenus nationaux par l’inclusion financière, l’accès aux crédits, la réforme du secteur commercial, a-t-il ajouté.  Il a toutefois souligné la nécessité pour la communauté internationale de mettre en œuvre une plus grande coopération afin de mieux combattre le blanchiment d’argent et les évasions fiscales à l’échelle mondiale. 

M. UHURU KENYATTA, Président du Kenya, a indiqué que son pays ambitionnait de devenir à moyen terme un pays à revenu intermédiaire.  Pour y parvenir, le Gouvernement fait de l’éducation gratuite pour tous une priorité nationale, a dit le Président en signalant les partenariats solides noués avec toutes les parties prenantes nationales et internationales.  M. Kenyatta a notamment souligné l’importance du partage d’expériences, des financements et des transferts de technologies, insistant pour que celles-ci soient largement diffusées pour accélérer la mise en œuvre des ODD. 

Pour M. TANETI MAAMAU, Président de Kiribati, accélérer la réalisation des ODD exige un plan d’action détaillé avec des indicateurs, en particulier des indicateurs pour mesurer les besoins de financement.  C’est aussi l’idée développée par le Roi WILLEM-ALEXANDER des Pays-Bas pour lequel réaliser les ODD nécessite un « plan mondial ».  Ce plan devrait prévoir de faire diminuer la consommation mondiale et de redoubler d’efforts pour être inclusif, a-t-il précisé.  Notant que plus de 5 milliards de personnes n’ont pas accès à la justice dans le monde, le souverain a indiqué qu’avec l’Argentine, les Pays-Bas ont lancé un projet d’accès à la justice, en particulier pour les femmes, pour que celles-ci puissent jouir de leurs droits, notamment les droits sexuel et procréatif. 

M. MARTÍN VIZCARRA CORNEJO, Président du Pérou, a de son côté misé sur la lutte contre la corruption pour accélérer la réalisation des ODD.  La Colombie et le Pérou ont signé un mémorandum de lutte contre ce fléau, a-t-il signalé, avant de rappeler que la lutte contre la corruption doit se faire dans le cadre de l’état de droit. 

Dans un plaidoyer émouvant en faveur des petits États insulaires en développement (PEID), M. RALPH GONSALVES, Président de Saint Vincent-et-les Grenadines, a décrété qu’on ne pouvait plus continuer comme par le passé.  Les PEID souffrent de vulnérabilités spécifiques qui demandent une attention spéciale et non des actions isolées, a-t-il expliqué.  Il a demandé « une sorte de loi internationale » pour aider ces pays à faire face à la situation car, a-t-il argué, « c’est dans l’intérêt de tous, du monde entier et de chacun de nous ».  Il faut faire face à ces menaces, ensemble, a prêché le Président en soulignant que « nous sommes de la même famille ».  De l’avis du Président Gonsalves, « être un PEID n’est pas un cadeau ».  Il y a des solutions à leurs problèmes, a-t-il assuré, en citant les initiatives climatiques et en reconnaissant que le Programme 2030 offre de nouvelles possibilités « pour nous transformer, pour travailler ensemble ». 

Dans la même ligne que le roi des Pays-Bas, le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), M. QU DONGYU a préconisé de transformer le mode de production et de consommation actuel pour assurer notre alimentation.  La FAO travaille pour faire face aux besoins alimentaires de 2 milliards de personnes, a-t-il indiqué.  Dans le même temps, nous devons aussi faire face à toutes les difficultés écologiques, les changements climatiques, la durabilité, sinon beaucoup de personnes resteront sur le côté, a-t-il prévenu.  Il a souligné l’importance d’améliorer le sort des agriculteurs, d’où la nécessité d’adopter des méthodes au niveau mondial pour faire face aux problèmes rencontrés par les agriculteurs du monde entier. 

Au nom de la société civile, Mme PAULA GIOIA, La Via Campesina, a parlé en tant qu’éleveur d’abeilles.  « Nous sommes quelque 200 millions de personnes dans le monde et nous sommes un maillon essentiel pour réaliser les ODD. »  Ce secteur offre des possibilités pour accélérer le développement durable, en particulier pour atteindre l’objectif « faim zéro » et l’autosuffisance alimentaire, a-t-elle fait remarquer.  Mme Gioia a donc plaidé pour la protection de la production d’abeilles, notamment en mettant en oeuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et autres personnes travaillant dans les zones rurales (DNUDP).  La représentante a aussi demandé de défendre les familles d’agriculteurs et de considérer les personnes et la nature avant la recherche du profit. 

« Accélération » semble être le mot du jour, a dit la Première Ministre de l’Islande pour résumer ce premier dialogue de la journée.  Elle a souligné que cela nécessite des actions concrètes.  Il faut aussi « avoir le peuple avec nous », a-t-elle dit: le peuple doit savoir que les ODD sont un outil public essentiel de développement, et de changement.  « Il faut avoir la volonté de changer », a conclu le Président du Costa Rica.

Mesures permettant de favoriser les progrès dans la réalisation des objectifs de développement durable

Ce dialogue a permis aux dirigeants d’examiner comment la gouvernance, l’économie et les finances, l’action individuelle et collective, ainsi que la science et la technologie, peuvent être utilisés dans des alliances et des partenariats stratégiques pour conduire à des transformations en faveur du développement durable.

Le Président de la Finlande, M. SAULI NIINISTÖ, a assuré que la présidence de l’Union européenne que son pays assume en ce moment est justement placée sous le signe de la « durabilité ».  Le Président, l’un des animateurs du dialogue, a déclaré que l’objectif de la Finlande est clair: intégrer les Objectifs de développement durable (ODD) dans le budget national et mettre en œuvre les priorités nationales, notamment la neutralité en carbone d’ici à 2035. 

Le second animateur de la discussion, le Premier Ministre d’Antigua-et-Barbuda, M. GASTON BROWNE, a estimé pour sa part que les partenariats sont essentiels pour réaliser les ODD.  Dans ce contexte, il est important, a-t-il dit, de reconnaître l’importance de l’aide publique au développement (APD) et de créer de nouveaux instruments financiers adaptés au contexte de la crise climatique. 

Une mesure similaire a été proposée par le Président du Kazakhstan, M. KASSYM-JOMART TOKAYEV, qui a demandé que les ressources financières dédiées aux ODD soient dépensées « de manière raisonnable », et que l’on accorde davantage d’appui aux pays à revenu intermédiaire qui comptent près de 5 milliards d’habitants.  Il a également appelé à la création d’un centre interrégional des Nations Unies au Kazakhstan, afin notamment de servir de plateforme de mise en œuvre des ODD en Asie centrale. 

Au-delà de cette approche sous-régionale, le Président du Gouvernement de la Macédoine du Nord, M. ZORAN ZAEV, a insisté sur des partenariats impliquant tous les pays et toutes les parties prenantes.  Son propre pays a déjà défini cinq priorités de développement et entend réduire les inégalités en assurant le financement des municipalités, a-t-il indiqué.  Même approche pour l’Espagne dont le Chef du Gouvernement, M. PEDRO SÁNCHEZ PÉREZ-CASTEJÔN, a expliqué que les autorités ont identifié des actions pouvant favoriser la réalisation des ODD au niveau national, avec au centre des efforts la lutte contre la pauvreté, les changements climatiques, entre autres.

Le Premier Ministre du Tadjikistan, M. KOKHIR RASULZODA, a quant à lui insisté sur un véritable partenariat mondial, piloté par l’ONU avec l’ambition d’arriver à un développement durable pour tous.  En attendant, le Premier Ministre d’Irlande, M. LEO VARADKAR, a promis que son pays allait poursuivre son soutien aux pays les moins avancés (PMA), notamment ceux en proie aux effets néfastes des changements climatiques.  Il a fait le vœu de garder ce cap si son pays était élu au Conseil de sécurité l’an prochain. 

M. ANDREW HOLNESS, le Premier Ministre de la Jamaïque, s’est réjoui du fait que son pays ait réduit sa dette publique de 40%.  Néanmoins, du fait de son statut de PEID, la Jamaïque reste vulnérable aux effets des changements climatiques, a-t-il rappelé. 

Après les interventions des chefs d’État, la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Mme VERA SONGWE, s’exprimant au nom des cinq commissions économiques de l’ONU, a insisté sur la mobilisation des ressources nationales par les pays du Sud.  Elle a également demandé que les pays du Nord s’engagent à lutter contre les flux financiers illicites et contribuent aux efforts pour récupérer les fonds indûment sortis des pays du Sud: ces fonds doivent pouvoir servir au financement des programmes sociaux.  Mme Songwe a aussi mis l’accent sur les jeunes du monde en tant que facteur clef de développement, à condition de les outiller avec les technologies adéquates.  Ensuite, Mme Songwe a mis l’accent sur l’égalité des genres, avant de terminer en insistant l’importance du numérique comme levier de mise en œuvre des ODD.

La représentante du grand groupe des affaires a justement clamé que son groupe apporte la technologie et l’innovation aux sociétés du monde.  Elle est aussi revenue sur l’égalité des sexes, « afin de faire contribuer toute l’humanité et non pas seulement la moitié ». 

Réaliser les objectifs de développement durable à l’échelle locale

La comodératrice, Mme KOLINDA GRABAR-KITAROVIĆ, Présidente de la Croatie, a partagé l’expérience de son pays où la collaboration est systématique entre le Gouvernement et les collectivités locales.  C’est ce qui explique, selon elle, le rythme différent du développement entre la Croatie et les pays de la région.  La Présidente a aussi vanté les mérites de la forte décentralisation mise en place en Croatie où environ 1 400 projets sont menés dans le cadre d’un programme de développement communautaire.  En outre, a-t-elle fait valoir, le pays a adopté le « développement intelligent » pour les 1 246 îles du pays qui ne sont pas toutes habitées.  L’autre défi est la sensibilisation des jeunes générations, a-t-elle indiqué. 

Pour la comodératrice, Mme SHEIKH HASINA, Première Ministre du Bangladesh, réaliser les ODD à l’échelle locale nécessite des stratégies et des efforts au niveau local ainsi que des approches inclusives au niveau local.  Quels sont les défis que rencontrent les collectivités pour réaliser les objectifs de développement durable?  Comment adapter les stratégies nationales pour les personnes marginalisées?  C’est à ces questions que les participants devaient répondre. 

Le Roi Mswati III d’Eswatini a assuré que 60% des ODD avaient été intégrés dans le plan national de développement, mais que pour réaliser tous les objectifs, il faut encore mobiliser les ressources.  Le roi a saisi cette occasion pour inviter l’assistance à participer à la prochaine conférence des donateurs en vue de lever des fonds pour financer la mise en œuvre du Programme 2030 à Eswatini. 

Abordant le sujet de l’appropriation au niveau local, nécessaire pour la réalisation locale des ODD, le Président des Palaos, M. THOMAS ESANG REMENGESAU JR., a estimé qu’il fallait des données ventilées pour y parvenir et donc un renforcement des capacités et institutions chargées des statistiques dans chaque pays.  Le Président a fait appel aux pays partenaires du sien pour qu’ils fassent preuve de plus de solidarité afin de permettre aux habitants des Palaos de « réaliser leurs rêves ».

C’est d’ailleurs le « bonheur national » qui est mesuré dans mon pays, a dit le Premier Ministre du Bhoutan, M. LOTAY TSHERING, en expliquant que la politique à cet égard se fonde sur les valeurs nationales et, en particulier, l’accès de tous à l’éducation et la santé de qualité.  Par exemple, les enseignants bhoutanais sont payés 60% de plus en moyenne par rapport aux autres professions.  Le Premier Ministre a aussi mentionné l’existence de la Commission du bonheur national qui travaille dans 13 domaines pour réaliser les objectifs fixés d’ici à 2023.  Le Premier Ministre a demandé à l’ONU d’accorder une attention particulière à l’objectif 17 relatif aux partenariats, « au moment où le Bhoutan va entrer dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire ». 

M. TUILAEPA AIONO SAILELE MALIELEGAOI, Premier Ministre de Samoa, a dit que, pour accélérer la mise en œuvre des ODD au niveau local, le Samoa se base sur les synergies existantes et utilise au mieux les ressources disponibles.  Comme les intervenants précédents, le Premier Ministre a souligné l’importance d’une approche centrée sur l’être humain et fondée sur les droits de l’homme et l’inclusion.

C’est un appui prévisible et durable de la société civile et du secteur privé qu’il faut pour réaliser les ODD à l’échelle locale, a ensuite prôné l’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), M. ACHIM STEINER, pour qui réaliser les objectifs au niveau local est la clef pour la réussite de tout le Programme 2030.

La Présidente de l’Union interparlementaire, Mme GABRIELA CUEVAS BARRON, a plaidé avant tout pour l’inclusion des femmes, des jeunes et des personnes marginalisées.  Elle a également mis l’accent sur l’allocation de ressources budgétaires suffisantes aux projets de développement locaux, avant de soutenir le rôle des parlementaires, en particulier les femmes qui occupent ces fonctions.

Partenariats pour le développement durable

Au cours de cette session, les dirigeants prenant part à ce premier Forum politique de haut niveau sous les auspices de l’Assemblée générale ont discuté des progrès accomplis et des perspectives dans le cadre des partenariats pour le développement durable.

En effet, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 avait appelé à un partenariat mondial revitalisé, travaillant dans un esprit de solidarité mondiale, en particulier avec les plus pauvres et les plus vulnérables.  Les gouvernements du monde entier s’emploient ainsi à mobiliser les moyens nécessaires à sa mise en œuvre, appuyés par les politiques et actions concrètes décrites dans le Programme d’action d’Addis-Abeba et dans le Programme 2030.  C’est ainsi qu’un nombre croissant de partenariats multipartites ont été créés entre les gouvernements, le secteur privé, la société civile, le système des Nations Unies et d’autres parties prenantes concernées, afin de s’acquitter de cette responsabilité collective.

Comme l’a dit l’animatrice en début du dialogue, « le temps est à l’action et aux résultats et on a besoin de partenariats cohérents ».  Mme SAHLE-WORK ZEWDE, Présidente de l’Éthiopie , a ainsi évoqué la « stratégie verte » choisie par son pays pour se projeter vers l’avenir.  Et pour mettre en œuvre cette vision, le pays a besoin de fonds et du soutien des partenariats internationaux, a-t-elle réclamé. 

Dans le cas des Seychelles, son Président, M. DANNY FAURE, a indiqué que l’accent avait été mis sur l’« économie bleue ».  Le pays entend également tirer parti d’une bonne gestion de l’environnement, notamment les milieux marins.  Le Président Faure a souligné l’importance de la multiplicité des partenariats, tout en reconnaissant que cela peut aussi constituer un obstacle quand il faut mobiliser plusieurs acteurs pour un projet commun alors que chacun d’eux a des priorités qui lui sont propres. 

C’est pourquoi « il faut s’écarter des solutions habituelles et trouver des approches innovantes », a proposé la Présidente de la Géorgie, Mme SALOME ZOURABICHVILI.  Elle a rappelé la nécessité de combler le fossé des 37 000 milliards de dollars qui manquent pour la mise en œuvre des ODD.  Lui emboîtant le pas, le Premier Ministre de Cabo Verde, M. JOSÉ ULISSES CORREIA E SILVA, a plaidé pour des partenariats qui aident justement à mobiliser les fonds en faveur des pays en développement.  C’est dans ce sens qu’a été lancé le « Global Deal », a expliqué le Premier Ministre de la Suède, M. STEFAN LÖFVEN, qui a souligné que cette initiative vise, entre autres, à renforcer le dialogue social, promouvoir des emplois décents et réduire les inégalités.  Il a aussi rappelé avoir lancé, il y a deux jours, avec le Premier Ministre de l’Inde, une initiative de dirigeants en faveur de la transition industrielle.  Il sera question de renforcer le partage des technologies entre le Nord et le Sud.

De son côté, M. IGOR DODON, Président de Moldova, a choisi de parler de la stabilité politique, comme condition du développement durable.  Il a salué le fait que la population du pays ait désormais un Gouvernement qu’il a lui-même choisi pour mener à bien la gestion des affaires publiques.  Il a plaidé pour que le pays puisse désormais se focaliser sur son développement en réglant au préalable le conflit de Transnistrie. 

Le Président de la Roumanie, M. KLAUS WERNER IOHANNIS, a parlé des partenariats bénéfiques conclus entre son gouvernement et le secteur privé dans le cadre de la mise en œuvre des ODD, alors que le Premier Ministre de la Tchéquie, M. ANDREJ BABIŠ, a présenté une plateforme en ligne qui favorise la participation de toutes les parties prenantes à la mise place des ODD.  Il a affirmé à cette occasion que la pierre angulaire du partenariat international est le multilatéralisme.

Le Premier Ministre de Madagascar, M. CHRISTIAN NTSAY, a pour sa part mentionné les projets que les autorités entendent mettre sur pied dans les prochaines années, avant de préciser que le pays compte sur la solidarité internationale pour atteindre les ODD.  Cette solidarité internationale a permis de mobiliser 2 100 chambres de commerce du monde entier, a souligné le Secrétaire général de la Chambre de commerce internationale (CCI), M. JOHN DENTON.  Ainsi, s’est réjoui M.  Denton, ce sont plus de 10 millions d’entreprises qui peuvent investir dans le développement durable.  Il a néanmoins déploré les cadres politiques et réglementaires dissonants qui constituent un obstacle à l’implication du secteur des affaires dans les questions de développement durable. 

Dans la même veine, la Secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale (CSI), Mme SHARAN BURROW, a dénoncé un modèle économique mondial qui délaisse les travailleurs, ceux-ci devant évoluer dans un contexte déshumanisant.  Mme Burrow a en effet rappelé que 60% des travailleurs du monde sont employés dans le secteur informel.  C’est pour « arranger le système » qu’elle a plaidé pour « un nouveau contrat en faveur des travailleurs », appuyé par l’ONU.  Ainsi, on aura des emplois décents et des programmes de protection sociale qui prennent en compte les femmes et les jeunes, a-t-elle espéré, tout en mettant en garde les gouvernements qui s’escriment à museler la voix des travailleurs, créant ainsi des frustrations qui peuvent dégénérer en conflits sociaux.

Pour le Président de la Banque africaine de développement (BAD), M. AKINWUMI ADESINA, le monde est pris dans une véritable « course contre la montre pour réaliser les ODD et l’Afrique ne doit pas échouer ».  C’est dans ce contexte que M.  Adesina a indiqué comment la BAD entendait accompagner le continent, par exemple en soutenant les efforts pour assurer la connexion de 16 millions de gens à l’électricité, ou encore en doublant son financement climatique qui atteindra les 25 milliards de dollars d’ici à 2025.  Il est aussi question d’augmenter les fonds destinés à soutenir les initiatives féminines, car « quand les femmes gagnent, c’est toute l’Afrique qui gagne ».  Selon le Président de la BAD, « nous avons encore le temps d’atteindre les ODD si l’on agit maintenant ». 

La Vision 2020-2030

Le modérateur de ce dernier dialogue, M. MUHAMMAD JUSUF KALLA, Vice-Président de l’Indonésie, a déclaré que les 10 prochaines années devraient voir l’accélération de la réalisation des ODD après avoir énuméré les réalisations de son pays.  « Nous devons commencer aujourd’hui », a-t-il exhorté.  L’autre modérateur, M. CARMELO ABELA, Ministre des affaires étrangères et de la promotion du commerce de Malte, a recommandé de prendre des mesures dès maintenant pour ne laisser personne sur le côté.  L’Union européenne, a ajouté le Ministre, a décidé par exemple de mener une politique économique à faible émission de carbone.  Il s’est dit convaincu que la voie du succès repose sur la coopération entre les gouvernements, le secteur privé et la société civile dans de nombreux domaines.  Dans ce contexte, « quelles mesures complémentaires doivent être prises pour aller plus vite » ?

De l’avis du Président de la Lettonie, M. EGILS LEVITS, il faut bien concevoir ce qui peut être fait durant la « décennie d’action » et éviter de surestimer les possibilités.  L’Estonie travaille en vue de réaliser quatre changements fondamentaux: réduire les émissions de gaz à effet de serre, réorienter l’éducation en fonction des besoins du futur, réduire l’exclusion d’ici à 2028, en particulier chez les groupes marginaux, les femmes et les personnes handicapées, et enfin, renforcer la confiance dans le système judiciaire et les médias.  Pour être développé, on a besoin de pensée critique et de l’état de droit, a ajouté le Président. 

Le Premier Ministre de la Malaisie, M. MAHATHIR BIN MOHAMAD, s’est, de son côté, plaint de devoir dépenser beaucoup d’argent pour lutter contre la pollution et nettoyer la masse de déchets envoyés par d’autres pays.  Les nations riches ne doivent pas envoyer leurs déchets, en particulier les déchets plastiques, dans les pays pauvres car le nettoyage coûte très cher, a-t-il insisté.  « C’est injuste », a dénoncé le Premier Ministre.  « De plus, c’est dangereux pour la santé et l’environnement. »  M. bin Mohamad a donc espéré que les scientifiques trouveront un moyen de détruire la quantité de plastique utilisée dans le monde.  Toujours dans le domaine de l’environnement, M. bin Mohamad s’est prévalu du fait que 54% du territoire de la Malaisie est couvert de forêts. 

Réaliser les ODD demande l’élaboration de plan stratégique de développement, a plaidé le Chef du Gouvernement d’Andorre, M. XAVIER ESPOT ZAMORA, en mentionnant celui dont l’Andorre vient de se doter.  Il faut assurer que le monde soit toujours habitable dans 10 ans, a souhaité M. Zamora, avant de signaler que son pays accueillerait, en 2020, le prochain sommet ibéro-américain sur le développement durable.  Notre vision est de résoudre les grands problèmes actuels, en particulier la crise climatique, a-t-il dit en expliquant que, sur le plan national, le Gouvernement a fait adopter la loi de transition énergétique.

M. AZALI ASSOUMANI, Président de l’Union des Comores, a lui aussi dévoilé l’objectif de la stratégie de développement des Comores qui vise la croissance économique durable et inclusive et la stabilité financière.  La société civile doit avoir un rôle important dans la réalisation des ODD, a-t-il ajouté.  Le Président a également souligné l’importance de la lutte contre la corruption en vue notamment du développement du secteur privé. 

Le Président de la Hongrie, M. JÁNOS ÁDER, a pour sa part estimé qu’aucun objectif de développement durable ne peut être atteint sans une bonne gestion de l’eau.  La Hongrie est touchée par les « trois drames de l’eau »: trop d’eau à cause des inondations, ou peu d’eau car 10% du territoire du pays est menacé par la sécheresse, et une eau polluée à 90% en Hongrie.  C’est pourquoi la Hongrie organise la troisième édition du Sommet de l’eau, en octobre prochain, afin de trouver des solutions pour prévenir la crise de l’eau à l’échelle mondiale. 

Le Premier Ministre de l’Arménie, M. NIKOL PASHINYAN, qui a vigoureusement plaidé en faveur des investissements privés nationaux et internationaux pour stimuler l’économie, dans les secteurs des mines et du tourisme par exemple, a estimé que l’exclusion est l’un des principaux obstacles au développement.  Il a ainsi défendu le rôle et la participation des femmes dans l’administration et le secteur privé comme facteur de développement. 

Un sujet cher à la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, Mme PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA, qui a exhorté les dirigeants à prendre des mesures en vue d’éliminer toutes les lois discriminatoires contre les femmes et les autres groupes marginalisés.  Les politiques sociales doivent être renforcées, a-t-elle aussi exigé.  La responsable a ensuite préconisé d’utiliser la science et la technologie pour réaliser les ODD, tout en demandant aux dirigeants mondiaux de se poser des questions, notamment sur les dépenses militaires. 

Toujours sur la question de l’inclusion, M. JOSÉ VIERA, Directeur général de l’Union mondiale des personnes malvoyantes, a déclaré que la première étape dans la réalisation des ODD est de veiller à inclure effectivement tous les groupes sociaux, y compris des personnes malvoyantes.  Le développement n’est pas durable s’il n’est pas inclusif et ouvert à tous, a-t-il jugé.  M. Viera a demandé des mesures concrètes garantissant les droits des personnes handicapées comme des mesures fiscales et l’allocation de ressources en faveur du développement des personnes handicapées.  L’inclusion et l’accessibilité sont deux composantes essentielles des ODD, a-t-il renchéri.

Dans sa conclusion, le Ministre des affaires étrangères de Malte a déclaré que le rapport mondial sur le développement durable du groupe des 15 éminents scientifiques et spécialistes conclut que l’espoir est encore possible pour réaliser le bien-être et éradiquer la pauvreté.  Cela demande un changement fondamental et urgent dans les relations entre les peuples et la nature et la réduction significative des inégalités sociales et de genre entre les sociétés et en leur sein.

Comme nous entamons la « décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable », nous devons élever notre ambition et intensifier nos efforts pour atteindre ceux qui sont laissés sur le côté, a recommandé M. Abela.  La science doit éclairer nos politiques de développement, nos motivations et nos actions, a-t-il aussi préconisé.  Pour l’avenir, a-t-il ajouté, nous devons poursuivre un Programme 2030 axé sur la résilience et en tenant compte des risques.  Il ne faut pas en effet que les catastrophes naturelles inversent la tendance au progrès dans les pays touchés par les changements climatiques, a dit le Ministre qui a invité à tirer parti du multilatéralisme inclusif qui a conduit à l’adoption du Programme 2030.  Il a en même temps appelé à mobiliser les gouvernements, à tous les niveaux, et à suivre une approche centrée sur la société tout entière.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Au Conseil de sécurité, plaidoyer en faveur d’une coopération renforcée entre l’ONU et les organisations régionales dans la lutte contre le terrorisme

8626e séance – matin
CS/13963

Au Conseil de sécurité, plaidoyer en faveur d’une coopération renforcée entre l’ONU et les organisations régionales dans la lutte contre le terrorisme

À l’occasion d’un débat au niveau ministériel du Conseil de sécurité mené ce matin sous la présidence du chef de la diplomatie de la Fédération de Russie, M. Sergey Lavrov, une trentaine d’intervenants ont souhaité un renforcement de la coopération entre les organisations régionales et les Nations Unies contre le terrorisme et l’extrémisme violent, dans un monde confronté à une multiplicité de menaces favorisées par les technologies numériques.

La présidence russe du Conseil avait dédié plus spécialement la réunion aux contributions de trois organisations régionales œuvrant en Asie centrale -l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), la Communauté d’États indépendants (CEI) et l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC)- à la lutte contre les menaces terroristes et à la stabilité régionale et internationale.

Dans sa lettre de cadrage S/2019/742, la présidence russe avait insisté notamment sur les problématiques soulevées par le retour de combattants terroristes étrangers dans leur pays, « où ils cherchent à diffuser leur idéologie », ainsi que sur le risque que représentent les cellules dormantes de mouvements comme l’État islamique d’Iraq et du Levant ou Al-Qaida, dont nombre d’anciens partisans cherchent désormais à rentrer dans leur pays.

Ouvrant le débat, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, s’est pour sa part inquiété de la « menace sans précédent » en termes d’intolérance, d’extrémisme violent et de terrorisme et de la « nouvelle frontière » créée par le cyberterrorisme pour coordonner des attaques et recruter des combattants.  La réponse, a-t-il insisté, réside en partie dans la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Elle réside aussi dans une étroite association des organisations régionales à la lutte contre le terrorisme, ont complété les intervenants nationaux qui, au-delà de l’Asie centrale, ont cité des formes de coopération existant en Europe, en Afrique ou encore en Asie du Sud-Est.

L’ONU a un rôle important à jouer pour encourager cette coopération, comme l’a montré l’organisation d’une conférence régionale du Bureau de lutte contre le terrorisme à Douchanbé, en mai dernier, a également estimé la France.

M. Sergey Ivanov, Secrétaire général adjoint de la CEI, a fait valoir que la coopération entre les membres de cette organisation permettait d’échanger des informations et d’optimiser les efforts de chaque État concernant la surveillance des frontières, la lutte contre la criminalité liée au terrorisme et le financement du terrorisme.  Il a par ailleurs cité la situation en Syrie pour affirmer que les opérations militaires conduites avec les services spéciaux donnait de « bons résultats » dans la lutte antiterroriste, insistant sur la coopération avec les ministères de la défense.  Mais pour les États-Unis, la Syrie constitue plutôt un contre-exemple quand la violence de la riposte contribue à radicaliser les civils, surtout les jeunes. 

Si le Secrétaire général de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC), M. Vladimir Imamovich Norov, s’est félicité que son organisation ait, l’an passé, déjoué plus de 360 actes de terrorisme en cours de préparation et « liquidé » plus de 60 terroristes, M. Guterres et de nombreux intervenants ont rappelé que la lutte contre le terrorisme devait être menée dans le « strict respect » du droit humanitaire, des droits de l’homme et de l’état de droit.  Pour l’Allemagne, faire fi de ces valeurs contribuerait à marginaliser certains groupes et à les encourager à rejoindre des réseaux terroristes. 

La question des droits de l’homme a provoqué un échange entre les États-Unis, appuyés par le Royaume-Uni, et la Chine, soutenue par la Fédération de Russie.  Le représentant américain s’étant dit « profondément préoccupé par la situation au Xinjiang, où plus d’un million de Ouïghours et d’autres musulmans ont été arrêtés arbitrairement sous le prétexte de la lutte antiterroriste », le Ministre des affaires étrangères chinois a rejeté des « allégations infondées », ajoutant que des pays qui se sont faits les « chantres de la lutte antiterroriste » devraient s’expliquer sur les situations de conflits qui perdurent en Libye, en Iraq ou en Syrie.

Plusieurs pays ont par ailleurs évoqué la situation en Afghanistan.  L’Union européenne, la France ou encore la Pologne ont réclamé une action harmonisée de la communauté internationale afin de contrer l’imbrication des menaces liées à l’extrémisme violent et au trafic de stupéfiants.  Aider au développement et à la stabilité de l’Afghanistan contribuerait à la stabilité de la région et du monde, ont fait valoir aussi bien les dirigeants des organisations régionales que plusieurs intervenants nationaux.  Cependant, a nuancé le Royaume-Uni, il ne faut pas non plus « exagérer cette menace » de l’Afghanistan, puisque ce sont d’abord les Afghans qui souffrent des mouvements terroristes opérant sur leur sol.

En tout état de cause, aucun pays ne peut à lui seul faire face aux défis modernes, de plus en plus complexes et interconnectés –terrorisme, criminalité transnationale organisée, trafic de drogue et traite des personnes–, a rappelé le Ministre des affaires étrangères du Koweït, qui a encouragé le Conseil de sécurité à organiser davantage de réunions sur le sujet.  C’est d’autant plus nécessaire, a ajouté le responsable de la diplomatie de l’Inde, que la lutte contre le terrorisme doit aussi identifier les États qui encouragent, appuient et financent le terrorisme, et qui offrent un refuge aux terroristes, et prendre des mesures fermes à leur encontre.

COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUS-RÉGIONALES AUX FINS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Contribution de l’Organisation du Traité de sécurité collective, de la Communauté d’États indépendants et de l’Organisation de Shanghai pour la coopération à la lutte contre les menaces terroristes (S/2019/742)

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé que le monde était confronté à une menace sans précédent d’intolérance, d’extrémisme violent et de terrorisme.  Il s’est inquiété de la « nouvelle frontière » qu’est le cyberterrorisme, avec l’utilisation des médias sociaux et de la Toile sombre (« dark Web ») pour coordonner des attaques, diffuser de la propagande et recruter de nouveaux adeptes.

« En réponse à cette menace sans précédent, nous prenons des mesures sans précédent », a poursuivi le Secrétaire général.  La Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et les résolutions correspondantes du Conseil de sécurité fournissent un cadre global, a-t-il expliqué. 

Pour le Secrétaire général, il est important de compléter les mesures de sécurité par des efforts de prévention qui identifient et corrigent les causes profondes du terrorisme, tout en respectant les droits de l’homme.  La plupart des recrues de groupes terroristes ont entre 17 ans et 27 ans, a fait remarquer M. Guterres.  « Nous devons proposer des parcours offrant espoir et objectifs à nos jeunes hommes et femmes, notamment en matière d’éducation, de formation et d’emploi. »

Le Secrétaire général a préconisé des approches globales et inclusives, en commençant par la base, où les familles et les communautés sont en première ligne.  D’après lui, « la soumission des femmes et des filles est un point commun à de nombreux groupes extrémistes et terroristes, quelle que soit leur idéologie ».  L’égalité des sexes et la participation des femmes et des filles doivent donc être au centre des efforts de prévention et de lutte contre le terrorisme.  Nous devons également soutenir les victimes du terrorisme, parmi lesquelles figurent les enfants de combattants terroristes étrangers qui auront besoin d’aide pour surmonter les traumatismes et la stigmatisation à mesure qu’ils grandissent, a averti M. Guterres.

« La coopération internationale est la première priorité de notre stratégie antiterroriste », a ensuite souligné le chef de l’Organisation.  Il a reconnu que les trois organisations qui font l’objet de ce débat jouent un rôle important dans la promotion de la coopération régionale en matière de lutte contre le terrorisme en facilitant l’échange d’informations et de connaissances cruciales, ainsi que la mise en œuvre d’enquêtes et d’opérations conjointes.  L’ONU, a-t-il assuré, renforce ses liens institutionnels avec chacune d’entre elles, conformément aux principes énoncés dans le Pacte mondial de coordination contre le terrorisme.

En particulier, le Secrétaire général s’est félicité de l’engagement du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale (UNRCCA, établi à Achgabat au Turkménistan), concernant le Plan d’action conjoint pour l’application de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies en Asie centrale.  « En élaborant un plan d’action commun, la première initiative régionale de ce type, les parties impliquées ont montré ce qui pouvait être accompli avec l’action collective, le leadership et la volonté politique », a-t-il précisé.

M. Guterres a également salué le travail important de l’Assemblée interparlementaire des États membres de la Communauté d’États indépendants visant à harmoniser la législation de ses membres en matière de lutte contre le terrorisme.

La coopération en matière de lutte contre le terrorisme entre l’ONU et l’Organisation du Traité de sécurité collective, la Communauté d’États indépendants et l’Organisation de Shanghai pour la coopération s’intensifie, dans la mesure où elle couvre un nombre croissant de questions, a assuré le Secrétaire général.  « J’espère que notre coopération se poursuivra alors que nous travaillons ensemble pour mettre fin à la menace terroriste et bâtir un avenir plus sûr et plus prospère pour tous », a-t-il conclu. 

M.VLADIMIR IMAMOVICH NOROV, Secrétaire général de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC), a insisté sur la « fusion » du terrorisme avec le crime organisé et le risque accru de voir des terroristes accéder aux installations nucléaires.

En 2001, trois mois avant les événements de New York, les dirigeants de l’OSC ont signé une convention de lutte contre le terrorisme montrant que leurs pays étaient alors déjà conscients des tendances négatives à l’œuvre, a expliqué M. Norov, avant de rappeler que l’OSC était un mécanisme juridique permettant un travail effectif dans le domaine de la sécurité.  Le point important est l’élaboration et la mise en pratique de concepts de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme.

L’an dernier, l’OSC a déjoué plus de 360 actes de terrorisme en cours de préparation et « liquidé » plus de 60 terroristes, s’est félicité M. Norov.  L’OSC a aussi renforcé son potentiel de lutte contre les menaces contemporaines, cybernétiques notamment, et a accueilli deux nouveaux venus, l’Inde et le Pakistan.

L’OSC mène régulièrement des exercices antiterroristes mais ce n’est pas un bloc militaire dirigé contre d’autres États, a précisé son Secrétaire général.  Pour M. Norov, un des facteurs clefs du renforcement de la sécurité dans la région sera le règlement du conflit en Afghanistan.  À cet effet, un groupe de contact a été créé et une feuille de route adoptée à Bichkek pour lutter contre les liens entre terrorisme et trafic de stupéfiants.

Ces dernières années, l’OSC a confisqué près de 40% des stupéfiants découverts en Eurasie et continue de travailler avec la Commission des stupéfiants de l’ONU et les différentes structures de lutte contre le terrorisme de l’Organisation.  Elle salue la résolution adoptée le 30 août dernier par l’Assemblée générale sur la coopération entre son organisation et l’ONU, alors que la coopération entre l’OSC et d’autres organisations régionales, ainsi qu’avec l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL), s’est également renforcée.

Cependant, a poursuivi M. Norov, il reste indispensable d’éliminer les causes profondes du terrorisme, d’empêcher le recrutement des jeunes et d’accueillir les personnes qui rentrent des « points chauds ».  Enfin, il a appelé la communauté internationale à renforcer la coopération mondiale contre le terrorisme et à parvenir à un consensus autour d’une convention mondiale générale de lutte contre le terrorisme.

M. VALERY SEMERIKOV, Secrétaire général de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), a souligné l’importance de la coopération entre son organisation, les autres organisations invitées ce jour et l’ONU, à l’heure où la menace terroriste ne cesse d’évoluer et de gagner en sophistication dans le monde entier. 

L’OTSC, a indiqué M. Semerikov, s’est employée à multiplier les opérations spéciales contre l’immigration illégale, lesquelles ont permis la confiscation de plus de 16 tonnes de stupéfiants et drogues synthétiques et de 487 cargaisons d’armes. 

Afin de lutter contre le recours par les terroristes aux technologies de l’information et des communications, notamment pour recruter de nouveaux membres, l’OTSC conduit chaque année une campagne de lutte contre la cybercriminalité, tout en s’efforçant d’unifier les efforts nationaux de ses États membres.  Étant donné la menace représentée pour eux par le retour des ex-combattants en provenance du Moyen-Orient, l’OTSC a organisé une opération destinée à neutraliser les canaux de recrutement, qui a été une contribution décisive à la mise en œuvre des résolutions 2178 (2014) et 2393 (2017) du Conseil de sécurité. 

Mais les États membres de l’OTSC se heurtent à des tactiques nouvelles de la part des terroristes, a fait observer M. Semerikov, qui s’est dit alarmé face à la vague d’attentats dont l’Asie centrale et l’Afghanistan sont le théâtre.  Selon lui, le principal enseignement de la lutte antiterroriste telle que la conduit l’organisation, c’est la nécessité d’intensifier les efforts en s’abstenant de pratiquer le « deux poids, deux mesures » et en s’alignant sur l’initiative du Kazakhstan d’un code de conduite pour présenter un front uni dans la lutte contre le terrorisme. 

Par ailleurs, outre l’analyse des problèmes à l’échelle internationale, il convient de ne pas négliger les dynamiques spécifiquement régionales.  M. Semerikov a enfin rappelé qu’il avait plaidé auprès des ministres des affaires étrangères des États membres de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) en faveur d’un renforcement de la confiance mutuelle.

M. SERGEY IVANOV, Secrétaire général adjoint de la Communauté d’États indépendants (CEI), a assuré que grâce aux efforts des États participants, la CEI ne cessait d’améliorer sa composante de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, l’échange d’informations et la lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et des communications.

Cette coopération et les documents signés à cet effet permettent un échange d’informations et d’optimiser les efforts des États concernant le maintien de l’ordre dans les pays afin de lutter contre la criminalité liée au terrorisme, a poursuivi M. Ivanov.  La CEI agit aussi pour éliminer les conditions favorisant le financement du terrorisme, comme le blanchiment d’argent, et contre la diffusion d’armes de destruction massive, a-t-il ajouté.

Après une première phase 2017-2019, la CEI s’apprête à adopter un programme similaire de coopération pour 2020-2022.

Les efforts se concentrent sur des opérations communes, des opérations spéciales, l’échange d’informations, le transfert d’expérience et la coopération avec les organisations internationales.

Des mesures ont été élaborées pour arrêter les personnes essayant de pénétrer sur les territoires de la CEI après avoir participé à des organisations terroristes et pour suivre les flux financiers liés au terrorisme, a encore expliqué M. Ivanov.

La coopération s’étend aussi dans le domaine des moyens et des équipements de lutte contre le terrorisme, des nouvelles technologies, qui sont largement utilisées pour échanger des informations par les services spécialisés, pour localiser les personnes, les détecter lors du passage des frontières et lutter contre la cybercriminalité, par exemple dans le cadre de grands événements sportifs.

L’expérience en Syrie montre que les opérations militaires conduites avec les services spéciaux donnent de bons résultats dans la lutte contre le terrorisme, d’où l’importance de la coopération avec les ministères de la défense, a estimé le Secrétaire général adjoint de la CEI.  La CEI mène d’ailleurs en ce moment un exercice militaire et contribue à la formation de troupes de lutte contre le terrorisme.

La coopération des États membres de la CEI se fait en lien avec les organisations internationales de l’ONU, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’OTSC, l’OSC et les organisations de lutte contre le cyberterrorisme et le blanchiment d’argent.

Toutefois, on ne peut coopérer avec succès que grâce à un accord sur le plan juridique, a fait observer M. Ivanov.  C’est pourquoi la Commission parlementaire de la CEI mène des efforts d’harmonisation des législations au sein de la Communauté.

Alors que la menace terroriste se renforce, il est indispensable de renforcer les mesures de lutte internationale et de renforcer les activités de prospective, a conclu M. Ivanov, en souhaitant que ce débat permette d’élaborer de nouvelles mesures.

M. SERGEY V. LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, s’est félicité de la tenue de cette séance, qui consacre les contributions de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), de la Communauté d’États indépendants (CEI) et de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC) à la lutte contre les menaces terroristes et à la stabilité régionale et internationale. 

Le Ministre a ensuite rejeté l’instrumentalisation d’organisations terroristes à des fins politiques, avant de saluer les efforts de l’OTSC, qui met l’accent sur les opérations de neutralisation des ex-combattants qui reviennent dans leur pays d’origine après avoir acquis une expérience militaire et qui le fait en luttant contre l’immigration illégale et la cybercriminalité. 

Quant à l’OSC, elle a élaboré de nombreux documents régissant la lutte antiterroriste, a noté M. Lavrov, en rappelant qu’en mars de cette année, elle avait signé un mémorandum d’accord avec la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme.  Enfin, M. Lavrov a fait observer que la CEI disposait d’un centre de lutte contre le terrorisme en Asie centrale, qui coordonne les efforts de ses États membres. 

M. SABAH KHALID AL HAMAD AL SABAH, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Koweït, a encouragé le Conseil de sécurité à organiser davantage de réunions pour se pencher sur les moyens nécessaires au renforcement de la coopération avec les organisations régionales et pour renforcer la diversité et le dialogue sur la base du Chapitre VIII de la Charte.

Aucun pays ne peut à lui seul faire face aux défis modernes de plus en plus complexes et interconnectés du monde d’aujourd’hui –terrorisme, criminalité transnationale organisée, trafic de drogue et traite des personnes-, a ensuite rappelé le Vice-Premier Ministre.  Il faut donc mener des efforts concertés et collectifs, établir des cadres régionaux que les régions peuvent s’approprier pour prévenir les conflits, maintenir, consolider et pérenniser la paix.  Car les organisations régionales et sous-régionales ont un rôle décisif à jouer pour comprendre les conflits, étant donné leur connaissance des régions concernées. 

L’Asie centrale est une vaste région d’une haute importance géostratégique étant donné sa situation et ses ressources, a noté M. Al Ahmad.  Les trois organisations régionales invitées ce jour -OTSC, CEI et OSC- ont des liens étroits avec les pays de la région.  Récemment, elles ont joué un rôle important pour mobiliser les forces face aux défis de la région: le terrorisme et l’extrémisme violent, qui présentent l’un des visages les plus laids des menaces à la paix car ils visent les civils, les femmes et les enfants.

L’évolution des menaces, des méthodes et l’augmentation du recrutement, notamment des jeunes, doivent inciter les pays à accroître et renforcer leurs efforts et leurs capacités de lutte contre le terrorisme, a poursuivi le Vice-Premier Ministre, pour qui le nombre croissant de personnes participant à des attentats est une source de préoccupation grave. 

À cet égard, les organismes de l’ONU ont tous un rôle vital à jouer pour élaborer des stratégies et ripostes basées sur les cadres internationaux, les traités et conventions internationaux pertinents.  Mais il est besoin de davantage de coopération régionale et mondiale. 

Pour M. Al Ahmad, il faut notamment renforcer la coopération avec l’Afghanistan dans les domaines de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent et contre le trafic de drogue: le Vice-Premier Ministre a souhaité qu’une telle coopération contribuerait au développement et à la stabilité de l’Afghanistan et donc à celle du monde.

Le Koweït, en tant que membre de plusieurs organisations régionales, estime que celles-ci doivent assumer leurs responsabilités pour lutter contre ces défis dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité.  Les organisations régionales, a poursuivi le Vice-Premier Ministre, ont collectivement contribué à l’adoption de stratégies de lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, et ont mis en place une base de données sur les organisations terroristes et pour traiter les personnes revenant des zones de conflit.

M. ALEXANDER DE CROO, Vice-Premier Ministre et Ministre des finances, chargé de la lutte contre la fraude fiscale, et Ministre de la coopération au développement de la Belgique, a jugé essentiel que les partenariats entre l’ONU et les organisations régionales soient « ancrés dans les cadres onusiens », tels que la Stratégie antiterroriste mondiale et les résolutions du Conseil de sécurité, et « intègrent pleinement les valeurs de l’ONU ».  Toutes les mesures prises par les États Membres pour combattre le terrorisme doivent s’inscrire dans le plein respect des obligations en droit international, y compris les droits de l’homme, le droit international des réfugiés et le droit international humanitaire, a ajouté le Vice-Premier Ministre.

M. De Croo a souligné l’importance que la Belgique accorde à la coopération entre l’Union européenne (UE) et l’ONU.  L’UE et l’ONU ont ainsi signé, en avril dernier, le Cadre de lutte contre le terrorisme, basé sur la Charte des Nations Unies.  Les partenaires, a-t-il précisé, visent notamment à accroître leurs engagements respectifs en Asie centrale, en Asie du Sud et en Asie du Sud-Est.  C’est dans un esprit « holistique », que l’UE développe ses efforts de lutte contre le terrorisme avec les États de la région, a encore précisé le Vice-Premier Ministre.  Avec le programme « STRIVE ASIA », visant à renforcer la résilience contre la violence et l’extrémisme, l’UE s’attaque aux racines de la radicalisation, a-t-il encore affirmé. 

M. WANG YI, Ministre des affaires étrangères de la Chine, a souligné la nécessité d’entreprendre une approche holistique de la menace terroriste, en s’abstenant de pratiquer la sélectivité dans les organisations ou les situations contre lesquelles il faut lutter.  Les efforts déployés doivent, selon lui, accorder davantage d’attention au recrutement en ligne et plus généralement à la question de la prévention. 

Après s’être déclaré opposé à la notion du « choc des civilisations », le chef de la diplomatie chinoise a jugé nécessaire la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Il s’est enfin lancé dans une justification de la campagne de lutte antiterroriste menée par son pays au Xinjiang, où des « mesures vigoureuses » ont permis d’endiguer la vague d’attentats terroristes qui touchait auparavant cette région autonome.  C’est la raison pour laquelle il s’est désolé de la « campagne de diffamation » menée par les États-Unis et les pays occidentaux contre ces efforts, légitimes à ses yeux.

Mme NALEDI PANDOR, Ministre des relations internationales et de la coopération de l’Afrique du Sud, a souligné que son pays n’a jamais cessé d’appeler à un partenariat stratégique renforcé entre les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales, non seulement dans la lutte contre le terrorisme mais aussi dans la prévention et le règlement des conflits. 

En tant que membre élu du Conseil de sécurité, l’Afrique du Sud travaille à un rapprochement entre l’ONU et l’Union africaine, compte tenu, en particulier, du nombre de conflits africains inscrits à l’ordre du jour, mais aussi de la menace croissante du terrorisme sur le continent. 

L’Union africaine a toujours été très active contre la menace terroriste comme en attestent, a dit la Ministre, la Convention d’Alger de lutte contre le terrorisme, adoptée en 1999 par l’Organisation de l’Unité africaine, et le Protocole adopté en 2004 par l’Union africaine.  Au niveau régional, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) n’est pas en reste puisqu’elle a adopté en 2015 une stratégie régionale de lutte contre le terrorisme.  Au niveau national, l’Afrique du Sud s’est dotée d’une stratégie dès 2013, assortie d’un plan d’action, a encore énuméré la Ministre. 

Mme RETNO LESTARI PRIANSARI MARSUDI, Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, a souligné combien la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales était « vitale » pour lutter efficacement contre le terrorisme, notamment afin d’empêcher sa propagation idéologique.  Dans cette perspective, elle a appelé à renforcer les mécanismes régionaux et sous-régionaux de lutte contre le terrorisme, à l’image de la Convention sur la lutte contre le terrorisme adoptée par l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et de la coopération trilatérale instaurée entre l’Indonésie, la Malaisie et les Philippines pour contrer la menace terroriste en mer de Sulu. 

Mme Marsudi a en outre insisté sur la nécessité d’aligner les stratégies mondiales, régionales et nationales de lutte contre le terrorisme.  À titre d’exemple, elle a indiqué que le Plan d’action du Secrétaire général pour la prévention de l’extrémisme violent avait servi de base à l’élaboration du Plan d’action de l’ASEAN pour prévenir et contrer l’essor de la radicalisation et de l’extrémisme violent de 2018 à 2025, ce dernier ayant à son tour inspiré la formulation d’un projet de plan d’action national en Indonésie.

M. SIMEON OYONO ESONO ANGUE, Ministre des affaires étrangères et de la coopération de la Guinée équatoriale, a déclaré que son pays avait été « victime d’une tentative de déstabilisation terroriste à des fins politiques et économiques en décembre 2017, avec l’aide de l’étranger ».  Si cette tentative avait abouti, elle aurait eu des conséquences néfastes pour la sécurité et la stabilité de toute la sous-région de l’Afrique centrale, a-t-il affirmé. 

Sur la base de cette expérience, le Ministre a plaidé en faveur du renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales, en particulier l’Organisation de Shanghai pour la coopération, l’Organisation du Traité de sécurité collective et la Communauté d’États indépendants.  Il a souligné le rôle moteur du Conseil de sécurité dans la promotion des échanges avec ces dernières, notamment en matière d’informations et de pratiques optimales.  Il a également appelé à renforcer la coopération entre organisations régionales pour lutter contre le terrorisme, à l’image de la collaboration instaurée entre l’Organisation de Shanghai pour la coopération et l’Union africaine.

M. MIGUEL VARGAS, Ministre des affaires étrangères de la République dominicaine, a indiqué que son pays travaillait activement avec le Groupe d’action financière d’Amérique latine pour lutter contre le blanchiment de capitaux et avec le Réseau de coopération pour le recouvrement d’avoirs dans la région des Caraïbes.  En juillet dernier, la République dominicaine a formellement rejoint le Groupe Egmont des cellules de renseignements financiers. 

La lutte contre le terrorisme est également une lutte pour la stabilité politique, la défense des droits de l’homme, le développement et la prospérité, a souligné le Ministre.  À cet égard, il a salué le rôle du Comité interaméricain contre le terrorisme, qui fournit aux États membres de l’Organisation des États américains (OEA) une assistance législative en matière de terrorisme et de financement du terrorisme, de sécurité maritime et portuaire, de cybersécurité et de sécurité dans le secteur du tourisme, et dans l’application de la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité sur la non-prolifération des armes de destruction massive.  M. Vargas a conclu que les organisations régionales et sous-régionales devaient « toujours avoir pour référence les Nations Unies, le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire ». 

M. JEAN-BAPTISTE LEMOYNE, Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a estimé qu’au plan mondial, les Nations Unies avaient un rôle majeur et croissant à jouer dans la lutte antiterroriste et qu’elles avaient rempli jusqu’à présent trois grandes fonctions: la création de normes et d’obligations, afin que les États se dotent de mécanismes robustes de lutte contre le terrorisme; l’adoption de sanctions qui visent à priver les groupes terroristes des moyens de commettre des attentats; et le renforcement de la coopération internationale et régionale, afin d’encourager les États à travailler davantage ensemble et à échanger les bonnes pratiques. 

Sur le plan régional, a observé M. Lemoyne, l’Asie centrale est un espace qui continue à faire face à des défis importants, sur les plans économique et politique, mais également sécuritaire.  « La situation sécuritaire dégradée et l’incertitude politique en Afghanistan sont des facteurs déstabilisants », a-t-il observé, avant d’estimer que ce contexte fragile requérait la coopération de tous, en particulier des organisations internationales et régionales.  L’ONU a, à cet égard, un rôle important à jouer pour encourager cette coopération, comme l’a montré l’organisation d’une conférence régionale du Bureau de lutte contre le terrorisme à Douchanbé, au Tadjikistan, en mai dernier, sur la question essentielle de la lutte contre le financement du terrorisme par le trafic de stupéfiants et la criminalité organisée. 

L’Union européenne, a souligné le Secrétaire d’État, prend quant à elle pleinement sa part dans la lutte contre le terrorisme, notamment en Asie centrale, comme en témoignent des programmes importants en matière de gestion des frontières et de lutte contre la drogue.  Elle entend poursuivre son action, en étendant à l’Afghanistan certains cadres de dialogue et de coopération mis en place avec les pays d’Asie centrale, a ajouté en conclusion M. Lemoyne.

Pour M. NIELS ANNEN, Ministre adjoint aux affaires étrangères de l’Allemagne, une menace aussi violente que le terrorisme ne peut être vaincue que par une coopération forte et solide entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales, comme le fait d’ailleurs l’Union européenne, qui travaille étroitement avec les Nations Unies, l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) ou l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Le Ministre s’est aussi inquiété d’une question « urgente » comme celle de l’utilisation des drones pour commettre des attentats.  Il a en outre estimé que l’Afrique avait aussi un rôle à jouer dans la lutte contre le terrorisme.

Si nous voulons réussir, a insisté M. Annen, nous ne devons jamais oublier ce qui nous lie, ni le rôle du Conseil de sécurité, faisant référence aux droits de l’homme, « qui doivent être strictement respectés », de même que l’état de droit.  Ce n’est qu’en respectant ces principes que nous resterons crédibles et pourrons vaincre les idéologies extrémistes, a-t-il insisté.  Si l’on fait fi de ces valeurs, cela contribuera à marginaliser certains groupes et à les encourager à rejoindre des réseaux terroristes.

Le Ministre a enfin invité à réfléchir aux causes profondes du terrorisme: il faut comprendre que la solution n’est pas unique car les causes ne sont pas uniques.

M. MARCIN PRZYDACZ, Ministre adjoint aux affaires étrangères de la Pologne, s’est prononcé en faveur d’une coopération étroite entre les Nations Unies et les organisations régionales en matière de lutte contre le terrorisme.  À ses yeux, en raison de leur périmètre géographique plus restreint, les organisations régionales « peuvent parfois » bénéficier d’une meilleure compréhension des défis locaux et de la façon la plus appropriée d’y faire face.

« Il est toutefois de la plus haute importance que l’esprit et les principes de l’ONU demeurent au cœur de toutes les activités et décisions », a mis en garde M. Przydacz, estimant que les agissements des organisations régionales devaient impérativement résulter du consensus entre leurs États Membres, plutôt que de refléter les intérêts d’un nombre réduit d’acteurs régionaux.  « L’ONU doit ainsi éviter toute dilution de ses propres règles de base », a—t-il insisté.  Au nombre d’entre elles, M. Przydacz a mentionné l’inviolabilité des frontières étatiques, la reconnaissance des frontières existantes et le rejet de l’annexion illégale de territoires.  Cela suppose également, a-t-il ajouté, de « ne pas reconnaître les effets juridiques d’actes illégaux » du point de vue du droit international. 

Or, pour M. Przydacz, la position de l’Organisation de Shanghai pour la coopération, de l’Organisation du Traité de sécurité collective et de la Communauté d’États indépendants vis-à-vis de l’annexion du territoire ukrainien et du conflit en Géorgie fait malheureusement planer un doute quant à leur impartialité et leur contribution à la promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité.  Selon lui, tant que l’Organisation n’aura pas défini une approche globale sur ces questions fondamentales, « la coopération entre les Nations Unies et de tels partenaires pour combattre le terrorisme demeurera contestable ».

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a commencé par rappeler l’importance de respecter le droit international humanitaire dans le cadre des efforts de lutte contre le terrorisme, avant de se féliciter du renforcement des partenariats avec les organisations régionales et internationales.  Elle a également salué l’adoption des résolutions 2462 (2019) et 2482 (2019) du Conseil de sécurité, se déclarant satisfaite que l’OSC accorde davantage d’attention au respect des obligations humanitaires dans le cadre des opérations qu’elle mène.  Tout en encourageant les pays d’Asie centrale à continuer d’œuvrer à la stabilisation de l’Afghanistan, Mme Pierce a estimé que la communauté internationale doit y apporter son concours. 

La représentante a aussi insisté sur la nécessité de faire en sorte que les considérations relatives à la parité entre hommes et femmes et aux droits de l’homme soient prises en compte, rappelant que les violations en ce domaine ont souvent contribué à l’aggravation de la menace terroriste.  Mme Pierce a indiqué en conclusion que le Royaume-Uni était actif en Asie centrale, où il mène des projets dans les domaines de la gouvernance et des droits de l’homme, notamment.

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a estimé que l’OSC, la CEI et l’OTSC disposaient d’avantages comparatifs indéniables, fondés sur une bonne compréhension des dynamiques politiques, économiques et sociales locales.  Ces trois organisations sont, selon lui, « mieux outillées pour élaborer des mécanismes de prévention des conflits et de lutte contre le terrorisme adaptés aux réalités régionales ».  S’agissant des crises régionales, notamment le conflit en Afghanistan, le représentant a jugé impérieux d’accorder une attention particulière à la situation politique et sécuritaire. 

Dans le domaine de la diplomatie préventive, a poursuivi M. Ipo, l’action de l’OSC, de la CEI et de l’OTSC doit « davantage promouvoir les initiatives d’apaisement et de promotion du dialogue entre les États de la région », notamment entre l’Inde et le Pakistan. 

Pour sa part, s’est félicité le représentant, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est dotée d’une stratégie de lutte contre le terrorisme basée sur une approche intégrée privilégiant la coordination et le partage d’informations entre les États Membres.  Le 14 septembre dernier, les États de la CEDEAO ont ainsi décidé de franchir un cap dans l’appropriation de leur sécurité collective en adoptant un plan d’action prioritaire d’un milliard de dollars pour la période 2020-2024 pour financer la lutte contre le terrorisme.

M. BALAREZO (Pérou) a souligné le rôle joué par l’Organisation de Shanghai pour la coopération, l’Organisation du Traité de sécurité collective et la Communauté d’États indépendants en matière de lutte contre le terrorisme, notamment afin de promouvoir l’appropriation nationale de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies auprès de leurs États membres.  Étant donné l’existence d’un lien entre terrorisme et criminalité transnationale organisée, le représentant a estimé que les organisations régionales et sous-régionales étaient bien placées pour apporter une assistance technique à leurs États membres et renforcer leurs capacités de lutte contre ce phénomène, dans la droite lignée de la résolution 2482 (2019) du Conseil. 

Pour M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis), après la défaite territoriale de Daech en Iraq et en Syrie, il faut relever le défi du rapatriement, des poursuites en justice ou de la réhabilitation de nombreux combattants terroristes étrangers d’Asie centrale qui s’étaient expatriés pour combattre dans des groupes terroristes.  À ce sujet, il a félicité les gouvernements d’Asie centrale pour les mesures qu’ils ont prises pour assumer la responsabilisation de leurs ressortissants en Iraq et en Syrie et pour les efforts qu’ils déploient pour les rapatrier dans leur pays d’origine.

Rappelant que le Conseil de sécurité avait pris des mesures importantes pour faire face à l’évolution de la menace terroriste et que le régime de sanctions a été élargi, le représentant a toutefois estimé qu’il fallait encore « désigner de nombreux autres affiliés à Daech opérant dans le monde entier ».

L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a aidé les partenaires d’Asie centrale à appliquer les résolutions du Conseil sur les combattants terroristes étrangers en organisant des ateliers pour faire face à cette menace et en lançant de nouveaux programmes de lutte contre l’extrémisme violent dans la région, a noté M. Cohen.  Outre les organisations régionales, des plateformes telles que l’initiative C5+1, regroupant les cinq pays d’Asie centrale et les États-Unis, ont permis de renforcer les capacités de lutte contre le terrorisme et de faciliter le dialogue sur les efforts de rapatriement, de réhabilitation et de réintégration des combattants terroristes étrangers.  Hier encore, sous les auspices du Forum mondial de lutte contre le terrorisme, les États-Unis ont coorganisé un événement parallèle mettant en lumière les expériences de ceux qui ont rapatrié leurs combattants terroristes étrangers, a fait valoir M. Cohen.

Mais quels que soient l’organisation, le forum ou la plateforme, tous les efforts visant à renforcer la coopération avec les Nations Unies en matière de lutte contre le terrorisme doivent être menés conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, à la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et au droit international applicable, a poursuivi le représentant.  « Les efforts de lutte contre le terrorisme qui ne respectent pas les droits de l’homme génèrent finalement du ressentiment et de l’extrémisme violent », a-t-il averti.  Et, malheureusement, a-t-il dénoncé, « c’est l’approche dangereuse à laquelle nous assistons en Syrie, où le régime d’Assad et ses alliés justifient comme des opérations légitimes de lutte contre le terrorisme des frappes aériennes sur des civils, des écoles, des ambulances et des hôpitaux ». 

De même, M. Cohen s’est dit « profondément préoccupé par la situation au Xinjiang, où plus d’un million de Ouïghours et d’autres musulmans ont été arrêtés arbitrairement sous le prétexte de la lutte antiterroriste ».  La Chine, comme toutes les nations, a parfaitement le droit de réagir aux menaces terroristes réelles, mais « la lutte antiterroriste ne peut servir d’excuse pour réprimer les pratiques religieuses pacifiques des musulmans chinois et de tout un groupe minoritaire », a-t-il insisté. 

En conclusion, le représentant a exhorté les organisations régionales telles que l’OSC, l’OTSC et la CEI à « examiner de près la manière dont elles abordent le terrorisme, afin de mieux éviter de confondre séparatisme, extrémisme et terrorisme dans leurs documents de base ». 

Reprenant la parole, le Ministre des affaires étrangères de la Chine a rejeté les « allégations infondées » portées par les États-Unis contre son pays au sujet du Xinjiang, en leur demandant de ne pas contester la « réalité des faits » dans cette région.  Il faut rejeter le « deux poids, deux mesures », a-t-il poursuivi, en rappelant que la crise en Libye avait exposé la communauté internationale à la prolifération de la menace terroriste dans la zone subsaharienne.  Ces pays qui se sont faits les « chantres de la lutte antiterroriste » ne devraient-ils pas s’expliquer de cette situation? s’est-il demandé. 

La représentante du Royaume-Uni a tenu à dire qu’elle partageait les préoccupations de son collègue américain au sujet de la situation au Xinjiang. 

Le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie s’est en revanche rangé auprès de son homologue chinois.

M. MUKHTAR TILEUBERDI, Ministre des affaires étrangères du Kazakhstan, a jugé le monde dangereux en raison de la « flambée » du terrorisme et de l’extrémisme.  Son pays a élaboré un code de conduite pour parvenir à la « destruction » du terrorisme d’ici à 2045 –date du centième anniversaire de l’ONU- auquel se sont joints 84 pays et il a appelé les autres États Membres à se joindre à ce code et à la convention.

Le Kazakhstan a également pris l’initiative dans les forums régionaux de forger une liste unifiée d’organisations terroristes et d’unifier les normes juridiques de lutte contre le terrorisme dans les organisations régionales.

La défaite de l’État islamique d’Iraq et du Levant en Syrie et en Iraq a conduit au déplacement de combattants et à leur retour dans leur pays, a rappelé le Ministre.  Le Kazakhstan a pour sa part mené une opération pour rapatrier 600 de ses ressortissants, dont une majorité d’enfants: ceux qui ont mené des opérations terroristes ont été traduits en justice, les autres font l’objet d’efforts de réintégration; 12 enfants seront bientôt ramenés d’Iraq où leurs parents ont été condamnés.

M. CHINGIZ AIDARBEKOV, Ministre des affaires étrangères du Kirghizistan, a suggéré, pour faire face à la menace du terrorisme, de se fonder sur une « interaction en chaîne » entre États, organisations et associations.  Il a mentionné à cet égard la longue histoire de la coopération entre l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) et l’ONU en soulignant l’attention qu’accorde son pays, dans ce cadre, au problème du retour des combattants terroristes étrangers dans leur pays d’origine et au risque de créer de nouveaux foyers de troubles et conflits armés.  D’où son appel à coordonner plus efficacement les mesures prises par la communauté internationale pour faire face à ce problème. 

Le Ministre a signalé à cet égard que le Conseil de sécurité collective de l’OTSC avait prévu d’adopter, le 28 novembre à Bishkek, une décision portant sur le plan d’action commun des États membres de l’OTSC pour la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies pour 2019-2020. 

Il est important de noter, a poursuivi le Ministre, l’unité d’approches dans la lutte antiterroriste qu’adopte la Communauté d’États indépendants (CEI), avec sa doctrine commune sur la sécurité antiterroriste et son mécanisme concerté de mise en œuvre qui tient compte des intérêts nationaux des parties.  Il a cité le Traité sur la coopération des États membres de la CEI sur la lutte antiterroriste ainsi que le Concept pour la coopération de ces mêmes États dans la lutte antiterroriste et autres manifestations violentes de l’extrémisme.  Dès le 21 juin 2000, la CEI avait créé son centre antiterroriste, a-t-il ajouté, avant de mentionner aussi la signature, le 31 octobre 2018 à Tachkent, du mémorandum d’accord entre l’ONU, représentée par son Bureau de lutte contre le terrorisme, et le Centre antiterroriste de la CEI.

M. Aidarbekov a enfin mis en avant le solide cadre juridique de lutte antiterroriste de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC) et l’adoption, par l’Assemblée générale des Nations Unies le 30 août 2019, d’une résolution sur la coopération entre l’ONU et l’OSC, où celle-ci est présentée comme la plus importante organisation régionale sur la question de la sécurité dans la région dans tous ces aspects. 

L’un des mécanismes de sécurité régionale de cette organisation est la conduite d’activités conjointes par les forces armées des États membres, qui permet de gérer au mieux les capacités militaires pour les opérations et les questions importantes, a poursuivi le Ministre.  La « Mirnaya Missiya » (mission de paix), par exemple, a pour but de contrecarrer la pénétration des groupes terroristes sur le territoire des États membres de l’OSC. 

En conclusion, le Ministre a plaidé pour que la communauté internationale développe une stratégie mondiale pour faire face aux nouveaux problèmes et menaces, sous les auspices des Nations Unies et en se fondant sur le droit international.

M. VLADIMIR MAKEI, Ministre des affaires étrangères du Bélarus, s’est félicité de la signature d’un mémorandum d’accord entre l’OTSC et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, avant de rappeler que son pays avait aussi conclu un accord de « bon voisinage numérique » avec les États limitrophes.  Il a considéré que seuls des efforts communs de la part de tous les États et des organisations régionales et internationales, sous l’égide de l’ONU, seraient de nature à renforcer leur sécurité commune, d’où le soutien de son gouvernement au renforcement des partenariats.

M. SIROJIDDIN MUHRIDDIN, Ministre des affaires étrangères du Tadjikistan, s’est dit convaincu que seuls des efforts communs permettraient de lutter efficacement contre les extrémistes.  Il a salué le rôle important de l’OTSC qui, par ses efforts, contribue de manière importante à la lutte contre ces menaces et le trafic de stupéfiants et d’armes mais aussi aide à coordonner la surveillance de la frontière sud du Tadjikistan avec l’Afghanistan, appelant à une solution politique dans ce pays.

Mais l’ONU doit aussi avoir un rôle de coordination des efforts régionaux par ses instruments, comme la Convention de lutte contre le terrorisme, qui restent la base de ce combat, a poursuivi le Ministre.  M. Muhriddin a enfin invité les États Membres à participer à une réunion qui aura lieu au Siège des Nations Unies le 27 septembre, à la suite de la conférence tenue en mai dernier à Douchanbé, capitale du Tadjikistan, en coopération avec les Nations Unies, l’Union européenne et l’OSCE et consacrée à la lutte contre le financement du terrorisme par le trafic illicite de drogue et le crime organisé.

M. ELMAR MAMMADYAROV, Ministre des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan, a estimé que la position géographique « sensible » de l’Azerbaïdjan et la persistance de conflits irrésolus dans la région, dont le nettoyage ethnique et l’occupation dans des territoires souverains de son pays, accroissaient le niveau des menaces transfrontalières, en particulier celle du terrorisme.  Depuis la fin des années 1980, l’Azerbaïdjan est visé par des attaques terroristes dirigées de l’extérieur, a-t-il déploré. 

En tant que membre de la Communauté d’États indépendants (CEI), l’Azerbaïdjan coopère avec les autres membres de la CEI, conformément aux principes d’égalité souveraine et d’intégrité territoriale des États.  Dans le même esprit, a expliqué le Ministre, son pays partage les buts et principes de l’Organisation de Shanghai pour la coopération et développe ses relations avec celle-ci en vue de renforcer la sécurité et la stabilité régionale, et de combattre le terrorisme, l’extrémisme et le séparatisme, le trafic de drogue et autres activités criminelles.  Les organisations régionales, a toutefois mis en garde M. Mammadyarov, « ne doivent pas être utilisées à mauvais escient par ceux qui violent le droit international et promeuvent une culture de l’impunité ». 

M. MOHAMMAD JAVAD ZARIF, Ministre des affaires étrangères de la République islamique d’Iran, a souligné que la coopération régionale était en vigueur de longue date dans la région du détroit d’Ormuz.  Dans ce cadre, il a souhaité présenter le Mécanisme d’Ormuz pour les efforts de paix appelé HOPE (Hormuz Peace Endeavor) pour promouvoir la solidarité, l’intégrité territoriale et prévenir les tensions sectaires et les tentatives de déstabilisation, y voyant le moyen de renforcer la coopération entre tous les États de la région, tout en garantissant leurs frontières.

Un autre objectif concerne la sécurité énergétique de la région et la garantie de libre circulation des matières premières entre les États, ainsi que des mécanismes d’alerte précoce, de prévention et de résolution des conflits, a poursuivi le Ministre.  Les États partenaires se réuniront régulièrement à différents niveaux et comptent y inviter des chercheurs et le secteur privé, a-t-il ajouté. 

M. ABDULAZIZ KAMILOV, Ministre des affaires étrangères de l’Ouzbékistan, a déclaré que le terrorisme recourait constamment à de nouveaux modes opératoires, à de nouvelles méthodes de recrutement et à de nouvelles sources de financement.  Pour l’Ouzbékistan, l’assistance de la communauté internationale, et en particulier des membres permanents du Conseil de sécurité, est importante dans le cadre du phénomène du retour des combattants terroristes étrangers.  Le Ministre a souhaité attirer l’attention sur la situation en Asie centrale, et en particulier l’Afghanistan, dont il a cependant tenu à dire qu’il ne représentait pas seulement un défi, mais aussi un potentiel.  Si nous renforçons les projets d’infrastructures avec ce pays, c’est parce que son développement économique en dépend, et dès lors celui du reste de la région, a conclu M. Kamilov.

M. ZOHRAB MNATSAKANYAN, Ministre des affaires étrangères de l’Arménie, a fait remarquer qu’aucun État n’étant épargné par le terrorisme, la communauté internationale devait travailler main dans la main pour le contrer et que toutes tentatives de justifier l’extrémisme violent ou d’incitation à la haine devaient être fermement condamnées à tous les échelons.

Le Ministre s’est dit vivement préoccupé en particulier par les cas où des communautés sont ciblées en tant que telles, ainsi que par la destruction de sites appartenant au patrimoine mondial de l’humanité, comme en Iraq et en Syrie.

L’Arménie poursuit la mise en œuvre des conventions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme.  Elle a notamment mis en place un système de collecte d’informations sur les passagers aériens et travaille étroitement avec la CEI et de l’OTSC: elle applique ainsi le programme de lutte contre le terrorisme de la CEI pour 2017 et 2019 et a participé aux exercices d’entraînement de la CEI.

M. MAKHDOOM SHAH MAHMOOD HUSSAIN QURESHI, Ministre des affaires étrangères du Pakistan, s’est félicité de l’adoption, le 30 août dernier, de la résolution de l’Assemblée générale sur la coopération entre l’ONU et l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC), dont son pays a été l’un des coauteurs.  Le Pakistan, a-t-il assuré, a agi fermement pour éradiquer le fléau du terrorisme.  Mais des « divergences politiques » viennent alourdir le « fardeau » commun qui échoit aux différents pays de la région, a estimé le chef de la diplomatie pakistanaise, en préconisant de régler les « différends de longue date » pour venir à bout de la menace terroriste.  Une coopération plus étroite entre l’ONU et les organisations régionales peut y contribuer, a ajouté le Ministre. 

Dans ce contexte, il a estimé que l’ONU et les trois organisations régionales concernées devaient innover face au problème posé par le retour dans leurs pays d’origine des combattants terroristes étrangers, en recourant par exemple à un mécanisme de partage d’informations. 

M. TSOGTBAATAR DAMDIN, Ministre des affaire étrangères de la Mongolie, a rappelé que son pays avait prédit en 2007 que les cellules terroristes trouveraient refuge, se renforceraient et se propageraient dans les économies les plus faibles.  Cette situation, qui se confirme aujourd’hui, rend donc évidente la nécessité pour les pays développés et les organisations internationales de fournir une assistance technique pour aider les pays vulnérables à mieux combattre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée.  Il faudrait en réalité des capacités « uniformisées » dans le cadre d’une juridiction internationale, a estimé le Ministre. 

Quant aux efforts visant à empêcher les jeunes de s’embrigader dans l’extrémisme violent et le terrorisme, le Ministre a rappelé la réunion qu’il a organisé avec Facebook, en avril dernier.  Il a aussi parlé d’une conférence régionale, tenue en juin dernier à Oulan-Bator, sur le dialogue inter et intrareligieux.  Les jeunes de Mongolie ont, pour leur part, lancé en ligne le journal « Peacebook » pour promouvoir la culture de paix et la tolérance mais aussi leur propre rôle dans le processus de prise des décisions liées à la lutte contre le terrorisme. 

Pour M. SHRI V. MURALEEDHARAN, Ministre d’État aux affaires extérieures de l’Inde, la lutte contre le terrorisme ne doit pas seulement avoir pour objectif d’éliminer les terroristes et de démanteler les organisations et les réseaux terroristes; elle doit aussi identifier et tenir pour responsables les États qui encouragent, appuient et financent le terrorisme, et qui offrent un refuge aux terroristes, puis prendre des mesures fermes contre ces États.  Le Ministre a appelé tous les pays à adopter sans attendre le projet de convention générale sur le terrorisme international. 

L’Inde, a précisé M. Muraleedharan, est membre de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC) depuis 2017 et se félicite de la « clarté » de l’OSC sur la question du terrorisme.  Déterminé à intensifier la coopération de son pays dans ce cadre, il a proposé aux membres de l’OSC de se servir de l’Instance régionale de lutte contre le terrorisme pour mieux coopérer en matière d’échange d’informations, de renforcement des capacités, d’entraide judiciaire et de partage des meilleures pratiques. 

M. PETER BURIAN, Représentant spécial de l’Union européenne pour l’Asie centrale, a rappelé que cette région avait été l’une des premières à adopter la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies, préparée avec un financement de l’Union européenne.  L’UE a, quant à elle, récemment adopté sa nouvelle stratégie pour l’Asie centrale, dont l’approche est multidimensionnelle.  L’un des piliers de cet engagement, a expliqué M. Burian, est la promotion de la résilience, la lutte contre le terrorisme étant liée à d’autres éléments importants comme l’état de droit ou la bonne gouvernance.  Pour ce faire, l’Union européenne renforce ses programmes d’aide au développement centrés sur la prévention de l’extrémisme violent, en particulier dans le cadre d’une série de programmes intitulés « STRIVE » (Strengthening Resilience to Violence and Extremism - Renforcer la résilience à la violence et à l’extrémisme). 

Le Représentant spécial a rappelé l’importance de la prévention et de la lutte contre le financement du terrorisme, conformément à la résolution 2462 (2019) du Conseil de sécurité adoptée le 28 mars dernier et la Déclaration de Douchanbé.  Se référant ensuite à la résolution 2396 (2017), il a jugé crucial de tenir pour responsables de leurs actes les combattants terroristes étrangers, et, à ce sujet, a salué les pays d’Asie centrale qui se sont engagés à rapatrier des membres de la famille de ces combattants, en particulier des enfants.  Enfin, M. Burian a indiqué que l’Union européenne avait augmenté le budget de son programme de gestion des frontières pour l’Asie centrale (BOMCA), qui inclut maintenant l’Afghanistan. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Sommet sur les ODD: les États s’engagent à accélérer le rythme durant la « Décennie d’action » pour réaliser le développement durable d'ici à 2030

Soixante-quatorzième session,
Forum politique de haut niveau - après-midi
AG/12185

Sommet sur les ODD: les États s’engagent à accélérer le rythme durant la « Décennie d’action » pour réaliser le développement durable d'ici à 2030

« Nous nous engageons à intensifier nos efforts communs » pour concrétiser la vision du monde que nous voulons d’ici à 2030, ont déclaré les chefs d’État et de gouvernements réunis cet après-midi, à New York, pour l’ouverture du Sommet des Objectifs de développement durable (ODD), en se disant convaincus que « les objectifs restent à portée de main si nous acceptons volontiers la transformation et accélérons leur réalisation ».

Le Forum politique de haut niveau pour le développement durable, qui se tient pour la première fois sous les auspices de l’Assemblée générale, se réunit aujourd’hui et demain sous forme de sommet après quatre sessions placées sous la houlette du Conseil économique et social (ECOSOC) depuis l’adoption, en 2015, du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

La bonne nouvelle, a déclaré le Secrétaire général de l’ONU, c’est que « le Programme 2030 se concrétise »: les gouvernements ont intégré les objectifs à leurs stratégies nationales, le secteur privé mise davantage sur l’économie verte, tandis que les villes, les entreprises, le monde de la finance, la société civile, la jeunesse et bien d’autres encore se mobilisent et passent aux actes.

Tout en soulignant cet élan pris depuis l’adoption du Programme en 2015, M. António Guterres a prévenu cependant que « nous ne sommes pas sur la bonne voie », citant, entre autres, le chômage, la faim et les inégalités de genre. 

En effet, selon le Rapport 2019 sur les progrès des ODD, le rythme n’est pas assez rapide pour atteindre les objectifs d’ici à 2030.  De même, le Rapport mondial sur le développement durable du groupe des 15 éminents scientifiques et spécialistes souligne que « malgré les efforts initiaux, le monde n’est pas en passe d’atteindre la plupart des 169 cibles qui composent les ODD ».  Quatre faits inquiètent surtout les experts: les inégalités croissantes, les changements climatiques, la perte de biodiversité, ainsi que les quantités croissantes de déchets de l’activité humaine. 

« Profitons de l’élan de ce Sommet pour aller plus loin et plus vite », a donc lancé M. Guterres.  « Le temps est venu de prendre des décisions audacieuses, tant sur le plan individuel que collectif », a-t-il dit, en appelant notamment les États Membres à respecter leurs engagements en matière d’aide publique au développement.  Une autre de ses recommandations a été de favoriser des solutions ayant un véritable impact sur le développement durable, comme les obligations à impact social et les financements verts.

Les 10 prochaines années doivent être une « période d’action accélérée », a confirmé le Président de l’Assemblée générale, M. Tijjani Muhammad-Bande, en recommandant aux pays d’intégrer le Programme 2030 dans leurs budgets et plans de développement.  La Présidente de l’ECOSOC, Mme Mona Juul, n’a pas dit autre chose en invitant à « passer à la vitesse supérieure » pour promouvoir une croissance économique durable et inclusive.

Donnant l’exemple, le Secrétaire général a fait part de son intention de convoquer une plateforme annuelle pour piloter la Décennie d’action, dont la première rencontre aura lieu en septembre 2020.

Dans la Déclaration politique adoptée par acclamation, les dirigeants du monde disent rester « résolus, d’ici à 2030, à mettre fin partout à la pauvreté et à la faim », avant de couvrir tous les autres domaines d’action où des progrès sont attendus: les inégalités, les sociétés pacifiques et justes, les droits de la personne, l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et des filles, la protection durable de la planète et de ses ressources naturelles, la croissance économique durable, inclusive et soutenue, la prospérité partagée et le travail décent pour tous.

La Déclaration, intitulée « Préparatifs pour une décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable », sera soumise à l’Assemblée générale pour approbation au cours de la présente session.  Dix domaines d’action y sont énumérés en commençant par l’objectif de « ne pas faire de laissés-pour-compte », le principe fondamental du Programme 2030.  Le Programme d’action d’Addis-Abeba, sur le financement du développement, « fait partie intégrante du Programme 2030 », précise le texte.  Mais de nombreux problèmes dans le monde sont dus au manque de compassion plus qu’au manque de ressources, a estimé le Président de la Turquie, M. Recep Tayyip Erdoğan, en rappelant que son pays offre l’asile à des millions de réfugiés. 

La Déclaration reconnaît aussi les « synergies » entre la mise en œuvre du Programme 2030 et l’Accord de Paris sur le climat.  Au lendemain du Sommet Action Climat convoqué hier par le Secrétaire général, la Première Ministre de la Norvège, Mme Erna Solberg, a souligné que les changements climatiques risquent de saper tous les progrès effectués en faveur des ODD, tandis que la Coprésidente du caucus mondial de la jeunesse autochtone, Mme Jessica Ortega, a présenté la crise climatique comme une question existentielle pour la plupart des populations autochtones.  La Présidente de l’ECOSOC a, quant à elle, insisté sur le vœu des jeunes d’hériter d’une planète durable. 

« Au moment où nous nous engageons dans une décennie décisive du Programme 2030 », rappelle la Déclaration, les gouvernements, la société civile, le secteur privé et les autres parties prenantes doivent être encouragés à trouver des solutions et à accélérer les mesures visant à combler les lacunes systémiques décelées dans la mise en œuvre du Programme 2030.  Le Premier Ministre du Japon, M. Shinzo Abe, a donné à cet égard le témoignage de ce que fait son gouvernement qui a créé un prix spécial pour récompenser l’engagement des municipalités, du secteur privé et de la société civile en faveur du développement durable.

Le Forum politique de haut niveau réuni sous les auspices de l’Assemblée générale se poursuivra demain, mercredi 25 septembre, à partir de 10 heures, avec notamment cinq séances de dialogue.

FORUM POLITIQUE DE HAUT NIVEAU POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Adoption de la Déclaration politique issue du Forum politique de haut niveau pour le développement durable organisé sous les auspices de l’Assemblée générale (A/HLPF/2019/L.1)

Dans cette Déclaration, les chefs d’État et de gouvernement et hauts représentants réunis au Siège de l’ONU à New York, pour deux jours de sommet sur les objectifs de développement durable, s’engagent à « intensifier leurs efforts communs » pour « concrétiser la vision du monde que nous voulons d’ici à 2030 », convaincus que « les objectifs restent à portée de main si nous acceptons volontiers la transformation et accélérons leur réalisation ».

Ils sont « résolus, d’ici à 2030, à mettre fin partout à la pauvreté et à la faim; à combattre les inégalités qui existent dans les pays et d’un pays à l’autre; à édifier des sociétés pacifiques et justes, où chacun a sa place; à respecter, protéger et réaliser les droits de la personne et à parvenir à l’égalité des sexes et à l’autonomisation de l’ensemble des femmes et des filles; à protéger durablement la planète et ses ressources naturelles ».  Ils disent aussi demeurer « résolus à créer les conditions d’une croissance économique durable, inclusive et soutenue, d’une prospérité partagée et d’un travail décent pour tous, compte tenu des différents niveaux de développement et des capacités nationales ».

« Notre engagement, « notre monde aujourd’hui » et « notre appel à une action accélérée » sont les trois thèmes de la Déclaration intitulée « Préparatifs pour une décennie d’action et de réalisations en faveur du développement durable », qui sera soumise à l’Assemblée générale pour approbation au cours de sa soixante-quatorzième session. 

Les dix domaines d’action, pour dès à présent et pour la décennie à venir, sont énumérés ainsi: « Ne pas faire de laissés-pour-compte; Mobiliser un financement adéquat et bien ciblé; Renforcer la mise en œuvre au niveau national; Renforcer les institutions en vue de solutions plus intégrées; Renforcer l’action locale pour accélérer la mise en œuvre; Réduire les risques de catastrophe et renforcer la résilience; Relever les défis par la coopération internationale et renforcer le partenariat mondial; Exploiter la science, la technologie et l’innovation en mettant davantage l’accent sur la transformation numérique au service du développement durable; Investir dans les données et statistiques relatives aux objectifs de développement durable; Renforcer le Forum politique de haut niveau ».

Le Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement « fait partie intégrante du Programme 2030 », précise le texte de la Déclaration politique en reconnaissant aussi les « synergies entre la mise en œuvre du Programme 2030 et l’Accord de Paris sur le climat ».  La Déclaration souligne en effet la nécessité d’une « action concertée » entre toutes les grandes conférences et réunions au sommet des Nations Unies dans les domaines économique et social et les domaines connexes.

« Au moment où nous nous engageons dans une décennie décisive du Programme 2030 », rappelle la Déclaration, les gouvernements, la société civile, le secteur privé et les autres parties prenantes doivent être encouragés à trouver des solutions et à accélérer les mesures visant à combler les lacunes systémiques décelées dans la mise en œuvre du Programme 2030.

Déclarations d’ouverture

M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE, Président de l’Assemblée générale, s’est dit encouragé par les discussions qui ont eu lieu au sujet des ODD (Objectif de développement durable) au cours des quatre dernières années: de nombreux forums sur ces objectifs ont été organisés, les activités de plaidoyer ont augmenté et les pays intègrent de plus en plus le Programme de développement durable à l’horizon 2030 dans leurs plans de développement nationaux.  Il s’est également félicité de voir que de nombreux pays avaient présenté avec succès un rapport pour leur « examen national volontaire », dans le cadre du suivi de la mise en œuvre du Programme 2030, avant de rappeler la nécessité de redoubler d’efforts pour atteindre les objectifs fixés.

Le Président a ensuite félicité les pays qui déploient des efforts considérables pour réaliser les ODD, parfois dans des conditions difficiles, tout en appelant à trouver des moyens d’accélérer l’action en faveur de ces objectifs pour ceux qui demeurent en retard dans leur réalisation.  Il a notamment appelé à approfondir les partenariats pour débloquer les milliards de dollars nécessaires au financement des ODD.  Il a aussi invité la communauté internationale à se pencher sur le sort des pays en situation particulière et à se focaliser sur plusieurs domaines: l’éradication de la pauvreté, l’éducation et d’autres questions fondamentales pour la réalisation des objectifs et cibles arrêtés dans le Programme 2030.

Fort de ces constats, M. Muhammad-Bande a encouragé les dirigeants du monde à prendre la résolution de faire des 10 prochaines années une période d’action accélérée et à intégrer le Programme 2030 dans les budgets et plans de développement nationaux.  Même si les gouvernements ont la responsabilité première de mettre en œuvre le Programme 2030, le Président de l’Assemblée générale a également plaidé pour l’établissement de partenariats mutuellement bénéfiques avec le secteur privé, les jeunes et la société civile.  Pour lui, l’inclusion est essentielle pour renforcer la paix et la sécurité internationales, promouvoir l’état de droit et les droits de l’homme, ainsi que mettre en place des institutions efficaces, responsables et inclusives à tous les niveaux.

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré qu’il n’avait jamais vu autant de personnes enthousiastes sur les Objectifs de développement durable (ODD) que ces trois derniers jours.  Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est au cœur de chaque événement de cette semaine de haut niveau, a-t-il d’ailleurs noté.  Évoquant un voyage commencé en 2015 qui a pour cap l’élimination de l’extrême pauvreté et de la faim, l’égalité pour les femmes et les filles et l’autonomisation des jeunes, entre autres, il a souligné que « notre ambition est celle d’une mondialisation équitable ».  La bonne nouvelle, a continué le Secrétaire général, est que « le Programme 2030 se concrétise »: les gouvernements ont entrepris d’intégrer les objectifs à leurs plans et stratégies au niveau national, le secteur privé se rend compte que l’économie verte est une économie prospère, tandis que les villes, les entreprises, le monde de la finance, la société civile, la jeunesse et bien d’autres encore se mobilisent et passent aux actes.  « Nous avançons », a constaté le Secrétaire général.  Ce Sommet qui nous réunit est une preuve sans équivoque de l’engagement mondial en faveur du Programme 2030. 

« Mais soyons clairs: nous sommes encore bien loin du compte.  Nous nous sommes écartés du chemin », a prévenu M. Guterres.  Les conflits meurtriers, la crise climatique, la violence fondée sur le genre et les inégalités qui persistent mettent en péril les efforts faits pour atteindre les objectifs de développement durable, s’est-il inquiété.  En outre, il a fait remarquer que « ceux qui se partagent aujourd’hui la moitié de la richesse mondiale pourraient se tenir autour d’une table ».  À cela, s’ajoutent une croissance irrégulière, l’augmentation du niveau de la dette, de pics de tensions dans le commerce mondial qui créent de nouveaux obstacles à la mise en œuvre du Programme 2030.  En outre, le chômage des jeunes atteint des niveaux alarmants.

Malheureusement, la faim dans le monde gagne du terrain, s’est encore alarmé le Secrétaire général.  Il a aussi noté qu’aucun pays n’est en passe d’atteindre l’objectif de l’égalité des sexes dont pourtant tous les autres dépendent.  En réalité, l’écart se creuse dans plusieurs pays, a-t-il alerté, en signalant en outre qu’un million d’espèces sont menacées d’extinction.  Au rythme actuel, près de 500 millions de personnes pourraient toujours être dans une situation de pauvreté extrême à l’horizon 2030, a-t-il mis en garde.  « Il nous faut redoubler d’efforts, et ce, dès maintenant », a-t-il exhorté, en appelant à regagner la confiance des populations et à répondre aux sentiments d’isolement et d’instabilité, vécus ou perçus, et qui est le résultat du modèle actuel de mondialisation. 

« Le Programme 2030 est la meilleure solution.  C’est notre plan vers une mondialisation équitable. »  Nous devons évoluer vers une économie neutre en carbone, c’est-à-dire atteindre l’objectif zéro émission nette d’ici à 2050, a rappelé le Secrétaire général.  M. Guterres a appelé à multiplier les perspectives de développement des pays les plus vulnérables et des personnes les plus marginalisées.  Et nous ne devons pas voir le Programme 2030 à travers le prisme de l’économie des 10 dernières années, mais à travers celui des 10 prochaines, a-t-il lancé: il faut exploiter le potentiel de la quatrième révolution industrielle tout en se protégeant des dangers qu’elle entraîne.

Voilà pourquoi, comme demandé par votre Déclaration politique, je lance aujourd’hui un appel mondial en faveur d’une décennie d’action pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable à l’horizon 2030, a déclaré le Secrétaire général dont l’appel est guidé pour trois domaines.  Tout d’abord, l’action à l’échelle mondiale: le temps est venu de prendre des décisions audacieuses, tant sur le plan individuel que collectif.  « Nous devons mettre fin aux conflits d’aujourd’hui et prévenir les violences de demain », a invité M. Guterres.  Plaidant pour davantage de ressources, il a souhaité que les États Membres respectent leurs engagements en matière d’aide publique au développement (APD) et demandé de reconstituer intégralement les fonds mondiaux pour le climat et la santé, d’augmenter le financement de l’éducation et des autres objectifs de développement durable, ainsi que de soutenir des formes innovantes de financement.  Il a cité à cet égard les obligations à impact social et préconisé que les pays les plus vulnérables aient davantage accès aux technologies et aux financements verts et à taux réduits. 

Dans le même temps, a poursuivi M. Guterres, nous devons amplifier les investissements privés à long terme en faveur du développement durable et réaliser de vrais progrès dans la lutte contre les flux illicites de capitaux, le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale afin de mieux soutenir les pays en développement dans la mise en œuvre de leurs réformes politiques et économiques.  Il a également demandé de privilégier les solutions qui auront le plus d’impact sur le Programme 2030 dans son ensemble, comme l’égalité des sexes, une économie juste et inclusive, des systèmes énergétiques et alimentaires durables, des villes durables et la lutte contre la crise climatique.

Le Secrétaire général a parlé, en deuxième lieu, de la nécessité d’agir sur le plan local: nous devons faire davantage au niveau national, afin d’obtenir des résultats là où cela importe le plus, c’est-à-dire dans la vie des gens.  Il faut donc aligner les politiques et engagements nationaux sur le Programme 2030, élaborer des cadres de financement nationaux intégrés, renforcer les mécanismes de gouvernance du développement durable, créer des systèmes de données utiles et inclusifs et bâtir des plans climatiques ambitieux en 2020.  Enfin, le Secrétaire général a plaidé pour la création d’un environnement qui permette aux villes et aux autorités locales d’exploiter tout leur potentiel, un environnement dans lequel les droits de la personne et l’espace public soient protégés, qui favorise le développement d’un secteur privé durable et qui attire les investissements étrangers directs.

Enfin, prêchant pour l’action individuelle, M. Guterres a appelé la société civile, les associations locales, les médias, le secteur privé, les syndicats et les universités, entre autres, à plus que jamais travailler main dans la main vers des objectifs communs.  Il a invité les innovateurs et les entrepreneurs à adopter de nouveaux modèles économiques qui répondent aux besoins du Programme 2030.  Il a demandé au monde de la science et de la recherche de faire en sorte que les nouvelles technologies servent à réduire les fractures numérique et technologique et soient mises au service du bien commun.  Il a enfin exhorté les jeunes et les membres de la société civile à demander des comptes à leurs dirigeants. 

En concluant son discours, le Secrétaire général a indiqué vouloir convoquer une plateforme annuelle pour piloter la décennie d’action dont la première rencontre dans ce cadre aura lieu en septembre 2020 à l’occasion du soixante-quinzième anniversaire de l’Organisation des Nations Unies. 

Mme MONA JUUL (Norvège), Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), a rappelé que, depuis 2016, le Forum politique de haut niveau pour le développement durable, placé sous les auspices de l’ECOSOC, s’était réuni chaque année afin de faire le point sur la mise en œuvre des ODD, avec un message toujours très clair: « nous avons besoin de faire davantage d’efforts et de viser plus haut ».  Elle a noté que les inégalités demeurent élevées, notamment à l’intérieur des pays et entre eux.  De même, le Sommet sur le climat d’hier et le Sommet de la jeunesse sur l’action pour le climat de samedi ont permis de mettre en exergue les défis considérables à relever et de lancer des appels urgents à l’action, en demandant plus d’ambition.  Ainsi Mme Juul a invité les délégations, « en tant que propriétaires » du Programme de développement durable à l’horizon 2030, à « passer à la vitesse supérieure » pour promouvoir une croissance économique durable et inclusive et garantir un emploi productif et un travail décent pour tous.  Une transformation juste et participative nécessite, a-t-elle précisé, la paix, la justice et des institutions transparentes et responsables.  De même, une ONU efficace et adaptée à ses objectifs est essentielle pour faire une réelle différence dans la vie des gens. 

La Présidente de l’ECOSOC a aussi souligné quelques avancées depuis 2015, comme les « examens nationaux volontaires » qui ont montré que les gouvernements sont proactifs dans la mise en œuvre du Programme 2030.  De même, a-t-elle noté, le secteur des affaires et la société civile sont à l’avant-garde de ce mouvement.  Mme Juul a ensuite appelé à de nouveaux partenariats inclusifs et innovants, ainsi qu’à une collaboration internationale qui, selon elle, devrait renforcer l’engagement de la société civile.  Elle a aussi recommandé de réduire le déficit d’investissements en faveur des ODD, en tenant dûment compte du Programme d’action d’Addis-Abeba.  Elle a terminé en prônant l’innovation et l’utilisation des progrès scientifiques et de la technologie en faveur du bien commun.  Il faut tenir compte des appels des jeunes, a-t-elle enfin demandé, en insistant sur le vœu des jeunes d’hériter d’une planète durable. 

Présentation du rapport du Groupe de scientifiques indépendants sur les objectifs de développement durable

La modératrice de ce segment, Mme JOANNIE MARLENE BEWA, Jeune Leader aux Nations Unies pour les objectifs de développement durable et fondatrice de Young Beninese Leaders Association, a assuré que le rapport était étayé par des preuves et orienté vers l’action, avant de poser la question importante de savoir « où en sommes-nous dans la réalisation des objectifs de développement durable? ». 

« Nous nous trouvons dans une situation alarmante », n’a pas hésité à dire M. PETER MESSERLI, Directeur du Centre pour le développement et l’environnement (CDE) de l’Université de Berne (Suisse), en présentant en même temps les trois messages du rapport qui invitent à l’action.  Le rapport, tout d’abord, explique ce qu’il faut faire pour renverser cette tendance.  Puis, il trace la voie et envisage les moyens de mettre en œuvre efficacement le Programme 2030, en soulignant combien les objectifs de développement durable sont liés entre eux.  Le rapport insiste d’ailleurs pour dire que tous les objectifs doivent être mis en œuvre ensemble.  Le troisième message est qu’il faut un plan pour avancer, en renforçant notamment la relation entre les personnes et la nature, l’accès à l’énergie, et les capacités à assurer le bien-être et préserver l’environnement. 

On ne peut pas mettre en œuvre les 17 objectifs « l’un après l’autre », a enchaîné Mme ENDAH MURNININGTYAS, ancienne ministre adjointe des ressources nationales et de l’environnement au Ministère de la planification du développement national et à l’Agence nationale du plan et du développement de l’Indonésie, en invitant les dirigeants du monde à appliquer le Programme 2030 de manière plus systématique et systémique.  Elle a jugé également important de mettre en œuvre le Programme 2030 par une politique fondée sur des faits.  L’éducation scientifique à tous les niveaux, en particulier au niveau universitaire, est essentielle, a ajouté l’experte.  À son avis, les gouvernements, le secteur privé et la société civile doivent repenser leurs liens et leur collaboration.  Ils doivent aussi améliorer les méthodes pour permettre la pleine réalisation du Programme 2030.  Celui-ci doit être comme une boussole pour les gouvernements, la société civile et pour toutes les parties prenantes qui doivent revoir leur partenariat pour arriver à une véritable transformation et atteindre les objectifs à temps. 

Mme EUN MEE KIM, Doyenne de la Graduate School of International Studies, Ewha Womans University de Séoul (République de Corée), a mis en relief certaines des principales conclusions du rapport, soulignant que les inégalités croissantes avaient empêché de nombreuses personnes de profiter des fruits du développement économique et social.  « Cela a conduit à une pauvreté multidimensionnelle touchant en particulier les femmes et les filles, les personnes handicapées et les peuples autochtones », a-t-elle relevé.  Les inégalités entre les sexes sont souvent aggravées par d’autres formes d’inégalité, empêchant les femmes et les filles d’échapper à la pauvreté et aux inégalités intergénérationnelles, a aussi noté Mme Kim qui a souligné la nécessité de renforcer la résilience par l’éducation et de promouvoir l’enseignement des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques.  Le Nord a la responsabilité d’aider le Sud, a-t-elle rappelé tout en affirmant que les peuples des pays en développement doivent assumer leur propre destin. 

Pour M. DAVID SMITH, Coordinateur de l’Institut pour le développement durable de l’Université des Indes occidentales, il faut agir à tous les niveaux de gouvernance pour toucher rapidement les plus nécessiteux.  Il faut que tout le monde travaille ensemble pour atteindre les objectifs en particulier dans les petits États insulaires en développement (PEID) qui manquent de ressources, a-t-il dit en appelant aussi à partager les connaissances permettant de régler les problèmes.  M. Smith a souhaité que l’ONU montre l’exemple dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable, et que les gouvernements réinventent leurs politiques de développement dans le cadre d’une plateforme d’échanges avec les parties prenantes.  La science peut aider à trouver des solutions pour le développement durable, a-t-il estimé mais il faut aussi que les pays en développement aient accès plus facilement aux données. 

Rapport mondial sur le développement durable du groupe des 15 éminents scientifiques et spécialistes 

Ce rapport de 288 pages, dont plus de 150 pages de revue de littérature et d’annexes, est le tout premier produit par le groupe des 15 éminents scientifiques et spécialistes, créé en 2017 par le Secrétaire général de l’ONU.  Le rapport rendu public, ce jour, souligne que la mise en œuvre du Programme 2030 a pris du retard.  Comme les objectifs de développement durable sont liés les uns aux autres, il serait judicieux de les mettre en œuvre de manière synergique, préconisent les scientifiques qui, dans le même temps, identifient des leviers ou des catalyseurs de changements rapides: la science et la technologie; la bonne gouvernance; l’économie et la finance; et enfin l’engagement personnel et collectif.  Les experts préconisent aussi que les parties prenantes fassent montre d’innovation et que la science soit au service des missions urgentes en vue de renforcer la mise en œuvre du Programme 2030.

En outre, le rapport indique que toutes les initiatives de mise en œuvre doivent être contextualisées pour tenir compte des réalités nationales.  Si la science est vue comme un moyen d’identifier les nouveaux problèmes et obstacles à la mise en œuvre des objectifs de développement durable, les scientifiques notent que cela nécessite la transformation des institutions scientifiques, la mobilisation des connaissances existantes et le renforcement de l’éducation au développement durable.  Sur le plan national, le rapport suggère la formation d’équipes interdisciplinaires de scientifiques qui auraient pour rôle central d’appuyer le travail des décideurs.

Le rapport est sans appel, car il relève que « malgré les efforts initiaux, le monde n’est pas en passe d’atteindre la plupart des 169 cibles qui composent les ODD ».  Le succès limité des progrès accomplis dans la réalisation des objectifs suscite de vives inquiétudes et sonne l’alarme pour la communauté internationale.  Quatre faits inquiètent surtout les experts: les inégalités croissantes; les changements climatiques; la perte de biodiversité; et les quantités croissantes de déchets de l’activité humaine.  En effet, des évaluations récentes montrent que, compte tenu des tendances actuelles, les systèmes biophysiques naturels et sociaux du monde ne peuvent soutenir les aspirations à un bien-être humain universel ancré dans les objectifs de développement durable.  Il ne reste qu’un peu plus de 10 ans pour réaliser le Programme 2030, mais aucun pays n’est encore en mesure de répondre de manière convaincante à un ensemble de besoins humains fondamentaux à un niveau d’utilisation des ressources durables à l’échelle mondiale. 

Pour les éminents scientifiques, la transformation universelle vers un développement durable au cours de la prochaine décennie dépend de la réalisation simultanée de voies novatrices propres à chaque pays.  Néanmoins, il y a des raisons d’espérer, car les connaissances scientifiques permettent d’identifier les voies critiques qui brisent ce modèle, et de nombreux exemples du monde entier montrent que c’est possible.  De ce fait, le moyen le plus efficace -ou parfois le seul- de progresser sur un objectif donné est de tirer parti des synergies positives avec d’autres objectifs tout en résolvant ou en améliorant les compromis négatifs avec d’autres encore.  De même, des partenariats innovants et puissants peuvent résulter de collaborations entre les acteurs traditionnels et les acteurs émergents.  Le succès du Programme 2030 dépend donc de la coopération des gouvernements, des institutions, des agences, du secteur privé et de la société civile dans divers secteurs, lieux, frontières et niveaux, souligne le rapport.

Afin de trouver l’équilibre requis entre les objectifs au cours du processus de mise en œuvre, le rapport mondial sur le développement durable définit six points d’entrée offrant les perspectives les plus prometteuses pour réaliser les transformations souhaitées dans les proportions et à la vitesse voulue.  Ces points d’entrée sont: le bien-être humain et les capacités; des économies durables et justes; des systèmes alimentaires durables et une nutrition saine; la décarbonisation de l’énergie et un accès universel; le développement urbain et périurbain; et enfin la prise en compte d’un environnement commun mondial. 

Le rapport identifie également quatre leviers qui peuvent être déployés de manière cohérente à travers chaque point d’entrée pour apporter les transformations nécessaires: la gouvernance; l’économie et les finances; l’action individuelle et collective; et la science et la technologie.  Si chaque levier peut contribuer individuellement à un changement systémique, le rapport affirme que ce n’est que par leurs combinaisons, en fonction du contexte, qu’il sera possible de réaliser les transformations nécessaires pour équilibrer les dimensions du développement durable et réaliser le Programme 2030.

Ce rapport mondial sur le développement durable est distinct et complémentaire du rapport annuel sur l’état d’avancement des objectifs de développement durable préparé par le Secrétaire général, lequel suit l’évolution des objectifs et des cibles à l’aide des indicateurs du cadre d’indicateurs mondiaux.  Le rapport des experts s’appuie sur une base de connaissances étendue et diversifiée, notamment de nombreux articles publiés dans la littérature scientifique, et des évaluations internationales, telles que le rapport d’avancement des objectifs de développement durable du Secrétaire général (2019); les évaluations régionales de l’Avenir de l’environnement mondial 6 (GEO-6) (2019); le rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) (2018); entre autres. 

La préparation du rapport a bénéficié de cinq consultations régionales avec des milieux universitaires, des responsables des politiques, des entreprises et de la société civile.  Ce rapport est le premier d’une série quadriennale et a bénéficié de l’appui d’une équipe spéciale présidée par le Secrétariat de l’ONU, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) et la Banque mondiale.

Dialogue des dirigeants: Les grandes tendances ayant une incidence sur la réalisation des objectifs de développement durable

Le premier dialogue des dirigeants du monde du Forum politique placé sous les auspices de l’Assemblée générale a permis de débattre des grandes tendances mondiales qui ont un impact sur la réalisation de multiples objectifs et cibles du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Pour l’animateur du dialogue, M. NANA ADDO DANKWA AKUFO-ADDO, Président de la République du Ghana, les choix que nous faisons et les décisions que nous prenons en rapport avec des grandes tendances majeures, telles que la croissance démographique et les changements climatiques, pourront orienter durablement la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD).  Lui emboîtant le pas, la seconde animatrice, Mme ERNA SOLBERG, Première Ministre de la Norvège, a souligné que les changements climatiques, par exemple, risquent de saper tous les progrès effectués en faveur des ODD.  Elle a aussi noté que les jeunes et leur esprit d’innovation étaient cruciaux pour la réalisation du Programme 2030. 

Parlant de population justement, M. MUHAMMADU BUHARI, Président du Nigéria, a relevé que son pays connaît une croissance de population qui freine la mise en route de certains ODD.  Étant donné la taille importante de la population nigériane, les autorités entendent établir des programmes adaptés, notamment pour la promotion des logements sociaux.

En Slovénie, a indiqué son Premier Ministre, M. MARJAN ŠAREC, les autorités ont pris l’engagement de protéger l’environnement.  M. Šarec s’est félicité du fait que son pays était désormais reconnu comme une « destination verte ». 

Mme KERSTI KALJULAID, Présidente de l’Estonie, a expliqué pour sa part comment son pays avait fait le pari de la technologie du numérique pour faire d’énormes avancées.  Le numérique permet, par exemple, aux enfants d’être scolarisés malgré des problèmes comme l’éloignement des écoles ou les violences sexistes ciblant les jeunes filles, a-t-elle témoigné. 

Son homologue, M. RUMEN RADEV, Président de la Bulgarie, a pour sa part mis en garde contre les concurrences technologiques et a dit privilégier une « science au service de tous ».  Il a par ailleurs estimé que le développement durable ne pouvait être atteint en dehors d’un environnement mondial pacifique qui privilégie le dialogue.  La question de la sécurité était également au cœur du propos de M. VOLODYMYR ZELENSKYY, Président de l’Ukraine, qui a indiqué que son pays ne pouvait prétendre au développement durable dans un contexte d’attaques militaires des territoires de l’est du pays.  Cette situation a fait perdre à l’Ukraine 15% de son produit intérieur brut (PIB) et des milliers de ressortissants, s’est-il plaint.  Pour l’Ukraine, la priorité est donc de retrouver la souveraineté sur ces zones occupées, afin de pouvoir œuvrer en faveur du développement durable, à l’instar des autres Membres de l’ONU. 

De nombreux problèmes dans le monde sont dus au manque de compassion plus qu’au manque de ressources, a observé pour sa part M. RECEP TAYYIP ERDOĞAN, Président de la Turquie, en mentionnant que son pays offre l’asile à des millions de réfugiés.  Il a aussi fait valoir les actions que son gouvernement a engagées pour venir en appui aux nécessiteux.  En Colombie, a expliqué à son tour M. IVÁN DUQUE MÁRQUEZ, le Président de la République, en plus des questions de sécurité, le plan national de développement vise surtout l’éradication de la pauvreté et la promotion de la justice sociale à travers la réduction des inégalités. 

M. SHINZO ABE, Premier Ministre du Japon, a déclaré que son pays s’attèle à autonomiser des millions de femmes à travers le monde.  Pour promouvoir les ODD, le Gouvernement japonais a créé un prix spécial pour récompenser l’engagement des municipalités, du secteur privé et de la société civile.  Un nouveau modèle de mise en œuvre des ODD sera présenté par le Gouvernement japonais d’ici la fin de l’année, a-t-il promis.

M. DAVID MALPASS, Président du Groupe de la Banque mondiale, a replacé le débat dans le contexte des tendances de l’économie mondiale, parlant ainsi d’une croissance qui ralentit et des risques de voir la pauvreté augmenter au cours des prochaines années.  Les ajustements sont possibles mais des réformes sont nécessaires, a-t-il dit.  Il a invité les pays en développement à établir des programmes qui suscitent davantage d’investissements de la part du secteur privé, tout en mettant l’accent sur les infrastructures.  La Banque mondiale, a-t-il assuré, restera disposée à poursuivre sa tâche d’accompagnement des pays les moins avancés (PMA).

Pour ce qui est de la société civile, Mme JESSICA ORTEGA, Coprésidente du caucus mondial de la jeunesse autochtone, a fait remarquer que la crise climatique est une question existentielle pour la plupart des populations autochtones.  Elle a déploré le fait que les États foulent au pied le multilatéralisme, alors que, dans le même temps, le capitalisme néolibéral accentue les inégalités.  Mme Ortega s’est également insurgée contre diverses discriminations qui vont à l’encontre de la promesse de ne laisser personne de côté.  De même, la criminalisation des défenseurs des droits des autochtones prend de l’importance, mais, a-t-elle promis, les populations autochtones sont décidées à résister et veulent continuer à se battre. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’ouverture du débat de l’Assemblée générale voit une nouvelle fois s’opposer tenants d’un multilatéralisme rénové et défenseurs du « patriotisme »

Soixante-quatorzième session,
3e et 4e séances - matin et après-midi
AG/12183

L’ouverture du débat de l’Assemblée générale voit une nouvelle fois s’opposer tenants d’un multilatéralisme rénové et défenseurs du « patriotisme »

L’avenir appartient-il aux « patriotes, aux nations souveraines, indépendantes et qui protègent leurs citoyens et respectent leurs voisins », comme l’affirme le Président des États-Unis Donald Trump?  Est-il au contraire dans les mains des tenants d’un « multilatéralisme fort », marqué par la coopération entre les États et d’autres acteurs internationaux, comme l’a plaidé le Président français Emmanuel Macron en appelant au « retour du courage » pour bâtir la paix et assumer ses responsabilités?  L’ouverture du débat de haut niveau de l’Assemblée générale a, cette année encore, donné lieu à l’affrontement des deux conceptions. 

D’ici au 30 septembre, les dignitaires des 193 États Membres –dont 100 chefs d’État, 3 vice-présidents et 49 chefs de gouvernement- ainsi que du Saint-Siège, de l’État de Palestine et de l’Union européenne, prendront la parole devant le principal organe plénier des Nations Unies.  Les thèmes discutés seront multiples, allant de questions bilatérales aux crises mondiales, à un moment où le Secrétaire général, M. António Guterres, a fait état dans son rapport annuel d’une double crainte.  La première serait que se crée une « grande fracture » et que se mettent en place deux mondes dépendant chacun de l’une des deux grandes économies mondiales, aux dépens d’un monde multipolaire certes mais relevant d’un système universel.  La seconde vient du constat que, si les peuples continuent de croire dans les idéaux des Nations Unies, se pose la question de savoir s’ils croient encore en ceux qui les y représentent. 

Ce mardi, ce sont 34 chefs d’État et trois premiers ministres qui se sont exprimés à la suite du Secrétaire général et du Président de la soixante-quatorzième session de l’Assemblée générale, M. Tijjani Muhammad-Bande, du Nigéria.

Alors que la Charte des Nations Unies appelle à placer au-dessus de tout l’être humain et ses droits inhérents et inaliénables, beaucoup de gens voient aujourd’hui que les machines ont pris leur travail; les trafiquants leur dignité; les démagogues, leur droits; les seigneurs de guerre, leur vie; et les combustibles fossiles, leur avenir, a déploré M. Guterres. 

De fait, beaucoup de choses pourraient inciter au pessimisme, ont fait observer plusieurs des intervenants, comme le Président de la Confédération suisse, M. Ueli Maurer, qui a regretté que des valeurs qui servaient de repères depuis longtemps à l’humanité soient remises en question, à l’image des violations de plus en plus nombreuses du droit international humanitaire.  Les orateurs ont aussi mis en avant les défis auxquels se heurte la réalisation des objectifs de développement durable. 

Mais c’est sur le climat, la biodiversité ou encore les océans que les inquiétudes et le sentiment d’urgence se sont le plus souvent exprimés.  Le Prince Albert II de Monaco a jugé « accablant » le dernier rapport sur les océans.  Face à ces défis, il faut changer, et dès maintenant, ont affirmé les dirigeants.  Ainsi, les Maldives « ne peuvent attendre les échéances fixées par l’Accord de Paris sur le climat », du fait de la menace que les changements climatiques font peser sur leur existence même.

Les appels à la coopération ont donc été nombreux, en premier lieu celui du Président de l’Assemblée générale, au nom de l’intérêt commun, du respect mutuel et de l’empathie.  Les États africains ont également largement salué la coopération au développement ou encore en matière de lutte contre le terrorisme, par exemple au Sahel. 

M. Muhammad-Bande a également mis l’accent sur le courage, une valeur convoquée par le Président français dans tout son discours.  Pour répondre aux différents défis, M. Macron a estimé que le monde dispose de « tout »: la connaissance, la science, le financement, une « capacité d’innovation inégalée », une « conscience inédite des maux contemporains », notre jeunesse, nos opinions publiques et « un cadre, celui des États qui se reconnaissent mutuellement et sont censés travailler ensemble pour le bien mutuel ».  Pour le Président français, ce qui manque, c’est « le courage d’essayer de faire », en opposition aussi bien à « l’habitude du cynisme et au confort de l’inaction » et à la « rhétorique de dénonciation », utile mais dépassée.  Il a aussi vu dans cette attitude une « œuvre de réconciliation ». 

Pour la France, les crises actuelles ne pourront se régler par le « repli nationaliste ».  En réponse au Président américain, pour qui la principale opposition se trouve entre « ceux qui se croient destinés à gouverner les autres, et les personnes et peuples qui n’aspirent qu’à se gouverner eux-mêmes », M. Macron a dit croire à la souveraineté « en tant qu’autonomie pour soi-même et nécessité de coopérer ».  Nous les patriotes, a renchéri le Président du Portugal, M. Marcelo Rebelo de Sousa, nous savons qu’il faut plus de Nations Unies et pas moins de Nations Unies.

Mais la coopération ne saurait prendre n’importe quelle forme.  Le Président Jair Messias Bolsonaro du Brésil a dénoncé l’esprit « colonialiste » de ceux qui voudraient remettre en cause la souveraineté du Brésil sur l’Amazonie, « dont nous ne pouvons pas dire qu’elle appartient au patrimoine de l’humanité ».  Son homologue Abdel Fattah Al Sisi d’Égypte a insisté sur le respect de la maîtrise nationale des problèmes nationaux comme « impératif absolu » pour assurer l’efficacité du système multilatéral et le Président Macky Sall du Sénégal a averti que l’Afrique n’a « pas besoin de tutelle; l’Afrique a besoin de partenariats ».

C’est aussi la confiance dans les relations et les institutions internationales, érodées ces dernières années, qu’il faudrait rétablir, a estimé le Président de la Finlande, M. Sauli Niinistö.  S’il a soutenu la réforme des Nations Unies à cette fin, d’autres dignitaires ont demandé des réformes plus profondes à l’image du Président turc Recep Tayyip Erdoğan, qui a réclamé une réforme du Conseil de sécurité en lançant: « Le monde est plus grand que cinq pays. » 

Un bon exemple de confiance a en revanche été apporté par le Président de la République de Corée, M. Moon Jae-in, qui a détaillé l’amélioration des relations entre son pays et la République populaire démocratique de Corée.

L’Assemblée générale poursuivra son débat général demain, mercredi 25 septembre, à partir de 9 heures.

RAPPORT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR L’ACTIVITÉ DE L’ORGANISATION – A/74/1

Ouverture du débat général

La Charte des Nations Unies nous envoie un message clair: placer l’être humain au-dessus de tout, a rappelé le Secrétaire général de l’ONU, M. ANTÓNIO GUTERRES.  Les gens, a-t-il souligné, ont des droits qui ne sont pas des faveurs à leur accorder ou à leur retirer.  Ces droits sont inhérents à chaque humain.  J’ai vu, a dit le Secrétaire général, partout dans le monde, des gens menacés par la montée des eaux, des jeunes réfugiés espérant retourner à l’école et chez eux, des survivants d’Ebola faisant tout pour reconstruire leur vie, des femmes réclamant égalité et opportunités.  Beaucoup de gens, a-t-il rappelé, craignent aujourd’hui d’être bafoués, voués à l’échec, abandonnés, laissés de côté.   Les machines ont pris leur travail, les trafiquants, leur dignité, les démagogues, leur droits, les seigneurs de guerre, leur vie, et les combustibles fossiles, leur avenir. 

Pourtant, a souligné le Secrétaire général, ces gens croient toujours dans l’esprit et les idées qui nous réunissent tous ici.  Ils ont foi dans les Nations Unies mais croient-ils en nous?  Malgré les progrès politiques, s’est expliqué le Secrétaire général, les conflits persistent, le terrorisme se propage et les risques d’une nouvelle course aux armements s’accentuent.  Les ingérences extérieures, souvent en violation des résolutions du Conseil de sécurité, rendent encore plus difficiles les processus de paix.  Le Secrétaire général a pointé le doigt sur le Yémen, la Libye, l’Afghanistan mais aussi Israël et la Palestine, le Venezuela, l’Asie du Sud ou encore la région du Golfe.  Dans un contexte où le moindre mauvais calcul peut conduire à une confrontation majeure, nous devons tout faire pour faire prévaloir la raison et la retenue.

Depuis le premier jour, a dit le Secrétaire général, j’ai mis l’accent sur la prévention des crises, la médiation et la diplomatie pour la paix.  M. Guterres a parlé des quelque 100 000 Casques bleus déployés dans le monde, de l’initiative Action pour le maintien de la paix, du travail louable des agents humanitaires.  Il a souligné que cette année seulement, au moins 80 de ces personnes ont perdu la vie.  Il a aussi parlé des efforts pour renforcer l’architecture de lutte contre le terrorisme et du nouvel agenda pour le désarmement qu’il a promu.

M. Guterres a pourtant dit craindre la « grande fracture »: un monde coupé en deux, avec les deux plus grandes économies créant des mondes séparés et en concurrence, chacun d’eux avec sa propre monnaie, ses propres règles commerciales et financières, son propre Internet, son propre système d’intelligence artificielle et ses propres stratégies géopolitiques et militaires à somme nulle.  Nous devons, a-t-il pressé, tout faire pour empêcher cela et maintenir un système universel, une économie universelle avec un respect universel du droit international, un monde multipolaire avec des institutions multilatérales fortes.

Le Secrétaire général a insisté sur le droit des gens à la sécurité, ajoutant que toute mesure pour promouvoir le respect des droits de l’homme contribue au développement durable et à la paix.  Au XXIsiècle, nous devons voir ces droits comme une vision qui parle à chaque être humain et qui comprend tous les droits: économiques, sociaux, culturels, politiques et civils.  Les droits de l’homme sont universels et indivisibles.  On ne peut choisir et privilégier certains au détriment des autres.  Ces droits sont partout dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et ce sont nos meilleurs outils pour prévenir les conflits.  Pourtant, s’est lamenté le Secrétaire général, les inégalités explosent.  Le Sommet sur le développement durable qui se tient aujourd’hui et le dialogue, prévu pour jeudi, sur le financement du développement doivent être l’occasion de hisser les ambitions, y compris en exploitant la technologie et l’innovation.

Comme on l’a dit hier au Sommet Action Climat, a rappelé le Secrétaire général, l’urgence climatique est une course que nous perdons mais c’est une course que l’on peut gagner si nous changeons dès maintenant notre façon de faire et même de parler.  Ne parlons plus de changements climatiques mais de crise climatique et ne parlons plus de réchauffement de la planète mais d’une planète en surchauffe.  Exploitons l’élan imprimé par le Sommet d’hier, a encouragé le Secrétaire général.

Le Secrétaire général a ensuite plaidé pour que l’on tienne les promesses de partage des responsabilités du Pacte mondial sur les réfugiés et que l’on poursuive sur la lancée du premier Pacte mondial sur les migrations.  Il est aussi revenu sur les deux initiatives qu’il a lancées: une stratégie à l’échelle du système des Nations Unies pour lutter contre les discours de haine et un plan d’action pour soutenir la protection des sites religieux et la défense de la liberté de culte.  Le Secrétaire général a aussi rappelé le lancement de la première Stratégie des Nations Unies pour l’inclusion des personnes handicapées, se réjouissant par ailleurs de son travail sur la parité hommes-femmes.  Aujourd’hui, a-t-il affirmé, nous avons atteint la parité dans mon Conseil de direction et parmi les coordonnateurs résidents, c’est-à-dire celles et ceux qui pilotent le travail des Nations Unies dans chaque pays.

Le Secrétaire général a promis de poursuivre ces efforts, prévenant qu’au rythme actuel, il faudra deux siècles pour combler le fossé de l’émancipation économique.  Nous ne pouvons, s’est-il révolté, accepter un monde qui dit à nos petites-filles que l’égalité attendra les petites-filles de leurs petites-filles.  En poursuivant ce travail vital et autres, j’ai lancé, a encore dit le Secrétaire général, des réformes ambitieuses pour rendre les Nations Unies plus efficaces.  Je compte sur vous pour placer notre Organisation sur une base financière solide. 

Dans un monde plus divisé que jamais, a-t-il conclu, nous avons besoin d’une Organisation forte.  L’année prochaine, nous fêterons le soixante-quinzième anniversaire de l’ONU, un moment critique pour renouveler notre projet commun.  Les problèmes sont réels mais les espoirs aussi, et en s’efforçant de servir les peuples du monde, nous pouvons aussi nous en inspirer.  Nous sommes ici, a martelé le Secrétaire général, pour servir.  Nous sommes ici pour promouvoir l’intérêt commun dans le respect de notre humanité et nos valeurs communes.  C’est la vision des fondateurs de l’ONU et en ces temps de divisions, nous devons nous invoquer cet esprit.  Rétablissons la confiance et l’espoir et avançons ensemble, a encouragé le Secrétaire général.

M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE (Nigéria), Président de la soixante-quatorzième session de l’Assemblée générale, a déclaré que nous sommes restés longtemps au carrefour du développement humain, et si nous voulons que l’humanité exploite pleinement ses capacités, nous devons unir nos efforts pour trouver des solutions aux problèmes des conflits violents, du terrorisme, des catastrophes naturelles et du trafic de drogue, de la traite des êtres humains, et l’analphabétisme et autres dont souffrent des millions de personnes dans le monde. 

Notre plus récente réalisation a été l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en 2015 et la mise en œuvre de ses objectifs doit être notre priorité et leur réalisation exige une coopération dans les financements et le partage d’expériences.  La promotion de la paix et de la sécurité, a poursuivi le Président, est au cœur de l’œuvre de l’ONU.  Nous devons continuer de renforcer l’Organisation, en veillant à ce que l’architecture de paix et de sécurité soit adaptée au XXIsiècle, en particulier en faisant de la prévention une priorité.  Les facteurs de conflits comme la pauvreté, les inégalités, les violations des droits de l’homme, le manque d’éducation et d’opportunités d’emplois doivent être traités et en partageant les idées et en mettant en place des partenariats fonctionnels, nous pourrons y mettre fin. 

L’éradication de la pauvreté reste un défi majeur sur le plan mondial.  Le Président a exhorté les pays à travailler aux systèmes de protection sociale et à consacrer une part plus importante des dépenses publiques aux groupes marginalisés et exclus.  Nous devons coopérer sur le développement des capacités entrepreneuriales et sur la modernisation de l’agriculture.  Nous devons aussi déployer les connaissances et les technologies disponibles pour ne pas condamner nos enfants dans un monde irréparable, à cause des changements climatiques, a souligné M. Muhammad-Bande, en appelant au respect des engagements de l’Accord de Paris en 2015 et à la recherche de nouveaux moyens pour combler les énormes lacunes financières et techniques nécessaires à un impact significatif. 

Le Président a aussi mis l’accent sur l’accès à une éducation primaire et secondaire de qualité et sur l’intégration dont celle des jeunes, des femmes et des personnes handicapées.

Compte tenu de ces défis, gardons-nous, a imploré le Président, de retomber dans les rivalités amères du passé.  Donnons la priorité à la coopération, à l’intérêt commun et au respect mutuel.  Il a insisté sur les coopérations Sud-Sud et triangulaire mais aussi sur le courage, la constance et l’empathie.  Le Président a convoqué le Mahatma Ghandi, la jeune Greta Thunberg, Nelson Mandela, Malala Yousafzai, Martin Luther King Jr. ou l’imam nigérian Abubakar Abdullahi, pour illustrer le courage et la générosité qu’il faut. 

M. JAIR MESSIAS BOLSONARO, Président du Brésil, a d’abord « remercié Dieu d’être en vie », avant d’indiquer qu’il représente un nouveau Brésil qui renaît du socialisme et qui se reconstruit sur la base des aspirations du peuple.  Le socialisme a plongé mon pays dans une corruption généralisée, une récession grave et une criminalisation qui a sapé les fondements même de la famille, a-t-il affirmé.

Le Président a dénoncé un accord passé en 2013 avec Cuba pour faire venir des médecins « sans qualification » dont la plupart ont quitté le pays à son arrivée au pouvoir.  Ces agents du régime cubain continuent de contrôler aujourd’hui la société vénézuélienne: ils sont 60 000 à contrôler la vie et l’économie du Venezuela, un pays autrefois prospère qui vit aujourd’hui les réalités cruelles du socialisme.  Nous travaillons avec d’autres pays comme les États-Unis pour y rétablir la démocratie, a souligné le Président.

Il ne peut y avoir de libertés politiques, a-t-il poursuivi, sans libertés économiques et inversement.  Libre-échange, concessions et privatisations sont aujourd’hui des réalités au Brésil dont l’économie se redresse et se libère des entraves du passé.  L’appareil d’État était gangréné par la corruption mais aujourd’hui nous ouvrons notre économie et nous nous intégrons dans les chaînes d’approvisionnement mondiales.  En huit mois, s’est enorgueilli le Président, nous avons conclu deux accords commerciaux, l’un avec le Marché commun du Sud (Mercosur) et l’autre avec l’Union européenne.

Nous sommes également prêts, a-t-il annoncé, à lancer le processus d’adhésion à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).  Nous sommes, s’est-il réjoui, en bonne voie et avons adopté les meilleures pratiques dans tous les domaines, dont l’environnement.

S’agissant de l’Amazonie, le Président a affirmé que son gouvernement s’est fermement engagé en faveur de la préservation de la forêt.  Le Brésil est l’un des pays les plus riches au monde en termes de biodiversité et de ressources minérales.  Notre forêt est plus grande que l’Europe occidentale et reste quasi intacte car nous sommes l’un des pays qui protègent le mieux l’environnement.

Cette année, a-t-il déploré, nous avons dû faire face à des vents qui ont provoqué des incendies mais aussi à des incendies criminels.  Les populations locales utilisent aussi les feux pour leur survie et malgré cela, s’est étonné le Président, nous avons essuyé les attaques des médias internationaux, des attaques, a-t-il prévenu, qui ont suscité encore plus de patriotisme chez nous.

Nous ne pouvons pas dire, a-t-il prévenu, que l’Amazonie appartient au patrimoine mondial, accusant certains pays d’avoir tout simplement relayé les mensonges des médias et fait des déclarations irrespectueuses, dans un esprit « colonialiste » qui remettait en cause la souveraineté du Brésil.  Merci aux pays qui ont refusé d’appuyer la proposition « absurde » faite lors du Sommet du G7 en France.  Merci, a poursuivi le Président, à M. Donald Trump, qui a réaffirmé l’importance qu’il y a à respecter la liberté de chacun.  Aujourd’hui, a-t-il dit, 14% du territoire brésilien est dédié à l’agriculture et aux peuples autochtones.  Je le dis clairement, le Brésil ne va pas augmenter cette part.

Le Président a plaidé la divergence des vues entre dirigeants autochtones et a accusé le chef Rahoni et d’autres d’être manipulés par des gouvernements étrangers et des ONG dans une guerre qui vise à servir des intérêts particuliers en Amazonie.  Hélas! « certains » insistent pour que l’on traite les peuples autochtones comme des hommes des cavernes.  Ceux qui nous attaquent aujourd’hui ne sont intéressés que par les richesses minérales et la biodiversité dont regorgent ces territoires.

Une nouvelle politique autochtone doit être mise en œuvre au Brésil, a estimé le Président.  Si les bonnes décisions sont prises, il sera possible d’envisager un nouveau modèle, une nouvelle ère pour ces populations qui vivent dans une pauvreté extrême les privant de dignité et de développement.  L’« écologie radicale » est en contradiction avec les aspirations des peuples autochtones et les marginalise, a tranché le Président.

L’ONU a joué un rôle clef dans la lutte contre la colonisation et on ne peut accepter que cet esprit « colonialiste » revive aujourd’hui dans ses couloirs.  La France et l’Allemagne, a argué le Président, consacrent plus de la moitié de leur territoire à l’agriculture alors que le Brésil n’y consacre que 8%, sans compter que 61% de notre territoire est préservé et que nous pratiquons la tolérance zéro contre toutes les formes de crimes dont les crimes écologiques.

Toute initiative visant à contribuer à la préservation de l’Amazonie ou autre écosystème doit être organisée, dans le plein respect de la souveraineté du Brésil, a prévenu le Président, qui a rejeté l’instrumentalisation de la protection de l’environnement et des peuples autochtones au profit d’intérêts économiques étrangers.

Les présidents socialistes qui m’ont précédé, a-t-il dit, ont détourné des centaines de millions de dollars.  Ils ont été jugés et condamnés pour avoir transféré des sommes gigantesques vers d’autres pays pour promouvoir des projets régionaux.  Mais leurs sources se sont asséchées et ces dirigeants ne viendront plus ici chaque année s’exprimer sur des questions qui ne contribuent en rien aux intérêts du Brésil ni à la stabilité mondiale. 

Les choses sont en train de changer: des mesures ont été prises pour réduire la criminalité et déjà le nombre des assassinats a chuté de 20% en six mois.  Aujourd’hui le Brésil est plus sûr, plus accueillant.  Des exemptions de visas ont été accordées à plusieurs pays dont le Canada et les États-Unis et l’on envisage de faire de même pour la Chine et l’Inde, qui pourront ainsi « admirer les beautés du Brésil et de l’Amazonie ».  N’hésitez pas à venir dans mon pays, a lancé le Président, en promettant que le Brésil est très différent de ce qu’en disent les médias.

Cette année, a-t-il ajouté, le Brésil s’est efforcé de renouer ses relations avec des partenaires clefs, dont le Chili, avec la mise en place de l’initiative PROSUR pour le progrès et le développement en Amérique du Sud.  Le Brésil est ouvert et cherche à nouer des partenariats avec tous ceux qui le souhaitent, au Moyen-Orient ou en Afrique.  Le Brésil, s’est vanté le Président, se relève et retrouve sa confiance politique et économique.  Il est prêt à assumer ses responsabilités dans le système international. 

Il a tout de même regretté que ces dernières années, l’idéologie ait imprégné l’éducation, la culture et les médias pour dominer les universités et les écoles, envahissant les foyers et s’efforçant de démanteler la famille.  Cette idéologie cherche même à corrompre l’identité fondamentale des enfants, leur identité biologique.  Elle envahit l’âme humaine et cherche à l’éloigner de Dieu et de la dignité qu’il incarne.  Nous ne sommes pas ici pour effacer le principe de souveraineté au nom d’un intérêt mondial « abstrait ».  Cette Organisation est celle des « nations unies » et elle doit le rester.

M. DONALD TRUMP, Président des États-Unis, a longuement défendu la souveraineté des États face aux « mondialistes » et à toutes les forces qui entendent exercer « un contrôle » sur la souveraineté des peuples.  Pour M. Trump, la division principale dans le monde est celle qui oppose ceux qui aspirent au contrôle, qui se croient destinés à gouverner les autres, et les personnes et peuples qui n’aspirent qu’à se gouverner eux-mêmes.  Il s’est ainsi présenté comme le « dirigeant élu d’une nation qui aspire à la liberté et au gouvernement autonome ». 

Rappelant que grâce aux ressources qu’il lui a consacrées, les Forces armées américaines sont « de loin les plus puissantes au monde », M. Trump a dit espérer que son pays n’aurait jamais à utiliser cette puissance.  Mais les États-Unis défendent farouchement les traditions et coutumes qui ont fait « de nous ce que nous sommes », a affirmé le Président, insistant sur le fait que chaque pays a « une histoire qui lui est chère, une culture, un patrimoine à défendre et à honorer ».  « Soyez fiers de votre pays.  Si vous voulez la paix, aimez votre nation », a-t-il lancé, faisant de ce thème un élément récurrent de son discours.

Pour M. Trump, ces fondements doivent être respectés et on ne doit pas chercher à les remplacer.  À ses yeux, « l’avenir n’appartient pas aux mondialistes, il appartient aux patriotes, aux nations souveraines, indépendantes et qui protègent leurs citoyens et respectent leurs voisins ».

M. Trump a défendu le « programme passionnant du renouveau national » mis en place par son administration.  Il a notamment mentionné une politique économique favorable à la croissance et à la baisse des impôts, qui a permis une création d’emplois « à un rythme historique » et le taux de chômage le plus bas depuis 50 ans.  Il a fait état d’une hausse des salaires et des revenus et affirmé que 2,5 millions d’Américains ont pu sortir de la pauvreté depuis trois ans qu’il dirige le pays.

M. Trump a ensuite expliqué que les États-Unis mènent une « campagne ambitieuse » visant à réformer le commerce international, exploité selon lui pendant des décennies par des nations qui ont fait preuve de mauvaise foi.  Les États-Unis ont pris des mesures décisives pour parvenir à des échanges commerciaux « équilibrés, équitables et réciproques », a affirmé M. Trump.  S’il a mentionné le Mexique, le Canada et le Royaume-Uni, avec lequel les États-Unis sont prêts à passer un accord commercial « exceptionnel, extraordinaire » après sa sortie de l’Union européenne, M. Trump a surtout mis en avant la « grande différence dans nos relations avec la Chine » qu’il a imposée depuis son arrivée à la présidence.  Il a ouvertement accusé la Chine de « dumping » et de « vol de propriété intellectuelle », dénonçant les erreurs de ses prédécesseurs qui avaient ignoré de tels agissements, voire les avaient encouragés dans un mondialisme qui leur a fait oublier les intérêts nationaux des États-Unis.  Cette époque est révolue, a affirmé M. Trump, qui s’est félicité des milliards de dollars de taxes douanières imposées par son administration et des bienfaits de cette politique pour le peuple américain.  Jamais je ne cesserai de défendre les intérêts des États-Unis, a poursuivi M. Trump, qui a affirmé son désir de voir un accord commercial « juste » avec la Chine.

M. Trump a également dit attendre de la Chine qu’elle respecte l’accord conclu avec le Royaume-Uni concernant Hong-Kong.  Les États-Unis comptent à cet égard sur le Président Xi, « un grand dirigeant ».  M. Trump s’en est ensuite pris au « régime oppressif iranien », « premier parrain du terrorisme », dont il a dénoncé notamment l’antisémitisme et la haine d’Israël et qu’il a accusé de semer « mort et destruction ».  Jamais les États-Unis n’accepteront que l’Iran accède à l’arme nucléaire, a poursuivi le Président, qui a de nouveau justifié le retrait de son pays du « très mauvais » Plan d’action global commun.  Après les attaques récentes qu’il a imputées à l’Iran, M. Trump a expliqué qu’il avait pris les sanctions « les plus dures jamais imposées à l’encontre de la Banque centrale iranienne ».  Il a menacé de les durcir encore et a demandé à toutes les nations d’agir dans le même sens.

En même, temps, M. Trump a dit ne pas croire au « mythe de l’ennemi permanent ».  Pour lui, les citoyens iraniens « méritent un gouvernement qui cherche à éradiquer la pauvreté et qui ne leur vole pas leur argent » pour financer des massacres à l’étranger.  Il a donc appelé les dirigeants iraniens à « cesser de menacer d’autres pays et à enfin donner la priorité au peuple iranien. » 

Déclencher une guerre est aisée mais « seuls les plus courageux font le choix de la paix », a poursuivi M. Trump, qui a ainsi justifié sa « diplomatie audacieuse » dans la péninsule coréenne, insistant sur le « potentiel immense » de la Corée du Nord, qui « doit toutefois se dénucléariser ».

De même, l’Amérique ne souhaite pas « des guerres sans fin », a poursuivi M. Trump.  C’est pourquoi les États-Unis « aspirent à un avenir radieux en Afghanistan ».  Tout en dénonçant les « attaques barbares » des Taliban, le Président a affirmé qu’il ne renoncerait pas à ramener la paix et la stabilité dans la région.

M. Trump a ensuite dénoncé l’immigration irrégulière massive qui déchire les sociétés.  Elle n’est pas tenable et ne garantit la sécurité ni des pays d’origine, qui « se vident à un rythme effréné », ni les pays de destination, « débordés » par des migrants qu’ils ne peuvent plus accepter.  Affirmant qu’un tiers des femmes qui traversent la frontière sont victimes d’agressions sexuelles en cours de route, M. Trump s’est adressé aux militants qui défendent l’ouverture des frontières pour leur dire: « vos politiques ne sont pas justes, elles sont cruelles et mauvaises et donnent le pouvoir à des organisations criminelles.  Vous sapez la dignité humaine et les droits de la personne ».  Aux migrants, il a demandé de ne pas donner de l’argent à « ces coyotes » que sont les passeurs qui ne cherchent qu’à les exploiter et de ne pas mettre en danger ni eux-mêmes ni leurs enfants car, a-t-il affirmé, il ne changera pas sa politique migratoire.

Défendant le « droit absolu de chaque État de protéger ses frontières », M. Trump a d’ailleurs remercié le Mexique d’avoir renforcé le contrôle de la sienne, témoignant ainsi aux États-Unis « un grand respect » qu’il mérite lui-même en retour.  M. Trump a au contraire appelé les candidats à la migration à œuvrer pour leur pays, avant de dénoncer les régimes de Cuba, du Nicaragua et surtout du Venezuela.  Concernant ce dernier, il a rappelé l’assistance humanitaire de grande ampleur « prête à être livrée quand la liberté l’aura emporté ».  L’une des plus grandes menaces est le spectre du socialisme, qui détruit nations et sociétés, a affirmé M. Trump.  Pour lui, le socialisme n’a rien à voir avec la justice, l’égalité, l’éradication de la pauvreté et l’intérêt de la nation.  Son seul objectif, selon M. Trump, est de « donner le pouvoir à la classe dirigeante ».  L’Amérique ne sera jamais un pays socialiste, a-t-il lancé, justifiant par ce fait sa volonté de contrôler certaines technologies étrangères. 

Il faut toujours se méfier de ceux qui appellent au contrôle, a encore affirmé le Président, qui a dit vouloir défendre la liberté d’expression face aux « réseaux sociaux, qui ne peuvent être autorisés à bâillonner le peuple libre ».  Il a ensuite dénoncé les campagnes des Nations Unies « d’appui à l’avortement », estimant que tout enfant né ou à naître est un don de Dieu ».  Au nom du droit à la légitime défense, il a affirmé que jamais les États-Unis ne ratifieraient le Traité sur le commerce des armes qui menace, selon lui, les droits constitutionnels des citoyens américains dont les pères fondateurs ont doté le pays.

Répétant une nouvelle fois son soutien aux « patriotes » face à tous ceux qui veulent imposer « un contrôle », M. Trump a défendu l’amour de la nation et conclu en appelant les dirigeants du monde à chérir leur culture, honorer leur histoire et la dignité de leur peuple, préserver leurs ressortissants, ce qui ouvrira la voie à des partenariats plus forts et permettra de repousser les ennemis de la liberté.  « La voie d’un avenir meilleur pour l’humanité commence chez vous », a-t-il conclu.

Pour M. ABDEL FATTAH AL SISI (Égypte), le respect de la maîtrise nationale des problèmes nationaux est un impératif « absolu » pour assurer l’efficacité du système multilatéral.  Assumant actuellement la présidence de l’Union africaine (UA), l’Égypte a eu à cœur, a-t-il dit, de consolider ce principe essentiel: celui « des solutions africaines aux problèmes africains » afin de formuler une approche globale posant les bases d’une vision continentale basée sur notre histoire commune.  À cette fin, un nouveau mécanisme a été lancé au Caire, qui mettra l’accent sur la reconstruction après les conflits, appelé « Le Centre de l’UA pour la reconstruction et le développement ».

Le principe de la maîtrise nationale a été ainsi appliqué avec succès dans plusieurs situations notamment en Afrique centrale ou au Soudan pour gérer la phase de transition qui s’annonce.  Les pays africains sont pleinement conscients de l’importance de nouer des partenariats efficaces avec les organisations nationales et internationales pour relever les défis auxquels ils sont confrontés et pour mobiliser les ressources nécessaires à la réussite des objectifs de l’Agenda de l’UA pour le développement.  C’est pourquoi j’en appelle aux institutions continentales et internationales pour qu’elles assument leur part dans le financement du développement en Afrique: ce continent offre à l’économie mondiale de nombreuses opportunités de croissance.

À cet égard, l’Égypte vient de lancer le « Forum d’Aswan pour une paix et un développement durables » dont la première réunion se tiendra en décembre.  Il permettra d’instaurer le dialogue entre les acteurs régionaux et internationaux – responsables politiques, institutions financières, société civile et secteur privé.

Mais le règlement des conflits prolongés reste la condition sine qua non à tout effort sérieux de renforcement du multilatéralisme.  L’exemple le plus flagrant étant la situation au Moyen-Orient et la cause palestinienne, a tranché le Président.  Sans une solution juste basée sur la création d’un État palestinien indépendant avec Jérusalem-Est pour capitale, les souffrances du peuple palestinien continueront ainsi que l’épuisement des ressources des populations du Moyen-Orient.  Or je veux le redire ici, les Arabes sont ouverts à la réalisation d’une paix juste et globale, a-t-il affirmé.  L’Initiative de paix arabe est toujours sur la table, mais elle nécessitera des décisions audacieuses pour rétablir les Palestiniens dans leurs droits et ouvrir la voie à de véritables changements dans la région.  Cela concerne le monde entier.

Il est impératif de s’attaquer aux racines profondes des crises internationales pour réussir.  Ceci concerne également, a précisé le Président, la Libye dont le peuple souffre d’un conflit armé prolongé qui doit cesser.  Il est temps de s’attaquer à cette crise dans son ensemble, ce qui ne peut être fait qu’en appliquant le plan de paix des Nations Unies adopté par le Conseil de sécurité en octobre 2017, en remédiant aux graves inégalités de pouvoir et de richesses ainsi qu’à l’absence flagrante de contrôle démocratique sur les institutions politiques et financières.  Il faut éviter que les milices sèment le chaos et bloquer l’ingérence des acteurs extérieurs.

De la même façon, la crise en Syrie demeure une urgence, a poursuivi le Président.  Nous ne pouvons nous permettre de perdre encore du temps avec ce que subit la Syrie depuis huit ans.  L’Égypte, a-t-il dit, appelle le Comité constitutionnel qui vient d’être créé à se mettre au travail sans tarder, pour avancer vers un règlement politique global, conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité.

La même logique doit présider au règlement de la situation au Yémen, grâce à la mise en œuvre d’une solution politique fondée sur des paramètres bien connus.  Il faut faire face à ces menaces sans précédent qui pèsent sur la région du Golfe et sur sa navigation.  Le Président s’est attardé sur les attaques qui ont visé les installations pétrolières en Arabie saoudite.  L’Égypte, a-t-il souligné par ailleurs, a continuellement défendu une approche globale pour combattre le terrorisme.  À la lumière de son expérience, elle se tient prête à intensifier sa coopération avec les pays amis et les Nations Unies et souligne ainsi l’importance de mettre en œuvre la résolution 2354, adoptée sur la base d’une initiative égyptienne pour défendre les valeurs de tolérance et assurer un renouveau du discours religieux.  Nous devons faire face aux déséquilibres dans la composition du Conseil de sécurité et aux déséquilibres de ses décisions, a ajouté le Président, plaidant pour que l’on corrige l’injustice historique que subit l’Afrique depuis si longtemps.

Le Président a conclu sur l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations sur le barrage de la renaissance et ses conséquences possibles sur la région et sur l’Égypte en particulier.  L’Égypte aspire à la conclusion d’un accord respectant les intérêts communs de son peuple mais aussi de ceux du Nil Bleu, de l’Éthiopie et du Soudan.  Si l’Égypte reconnaît l’importance du barrage pour le développement de l’Éthiopie, pour elle-même, les eaux du Nil sont une question de survie, ce qui fait peser une lourde responsabilité sur la communauté internationale qui doit jouer un rôle constructif et conduire toutes les parties à un accord satisfaisant pour tous.

M. RECEP TAYYIP ERDOĞAN, Président de la Turquie, a estimé que ni les droits ni les responsabilités ne sont aujourd’hui répartis de manière adéquate, ce qui provoque crises, luttes de pouvoir et troubles.  Les Nations Unies ont été créées avec l’objectif d’éradiquer les injustices mais la communauté internationale perd peu à peu sa faculté de trouver des solutions pérennes au terrorisme, à la faim, à la pauvreté et aux changements climatiques, a-t-il déploré.  Jugeant inacceptable qu’une petite minorité « chanceuse » puisse débattre de la technologie numérique, des robots, de l’intelligence artificielle ou de l’obésité pendant que le reste du monde souffre de la pauvreté, de la faim et de l’analphabétisme, M. Erdoğan a rappelé qu’il dit, depuis des années, à la tribune de l’Assemblée générale, qu’on ne peut pas laisser le sort de l’humanité entre les mains d’un petit nombre.  « Le monde est plus grand que cinq pays », a-t-il lancé sous les applaudissements, avant de dénoncer l’inégalité entre les États nucléaires et les autres qui, à elle seule, suffit à saper les équilibres mondiaux.

Alors que la pollution atmosphérique et les changements climatiques menacent notre existence, il faut renforcer les capacités et l’efficacité des Nations Unies, a affirmé le Président, qui a demandé à l’Organisation des réformes fondamentales en faveur de la justice et de l’équité, en particulier au sein du Conseil de sécurité.  Affirmant la volonté de son pays d’œuvrer en faveur de Nations Unies plus justes, et notamment d’un Conseil de sécurité réformé, M. Erdoğan a annoncé le souhait de son pays de présider l’Assemblée générale des Nations Unies à sa soixante-quinzième session.

M. Erdoğan s’est ensuite étendu sur la situation en Syrie, devenue à ses yeux un symbole d’injustice qui heurte la conscience de l’humanité.  La crise syrienne doit cesser une fois pour toutes, a-t-il affirmé, estimant que la Turquie est le pays le plus durement touché par les activités de Daech mais aussi celui qui a infligé à l’organisation terroriste les premiers et les plus violents coups en Syrie.

Le Président a également affirmé que la Turquie est le pays le plus généreux en termes d’aide humanitaire par rapport à son PIB, rappelant que le nombre de demandeurs d’asile dans son pays, soit cinq millions, est supérieur à la population de 29 États des États-Unis.  Faisant état des 40 milliards de dollars dépensés par son pays au profit des demandeurs d’asile en huit ans et d’un demi-million d’enfants syriens nés en Turquie pendant la même période, le Président a rappelé que la Turquie offre non seulement des logements, mais aussi des services sociaux, notamment en matière d’éducation et de santé.

Malheureusement, a ajouté M. Erdoğan en présentant à l’Assemblée la photo de petit Aylan, mort sur une plage turque et dont la photo avait ému le monde, le monde a oublié trop vite des millions de victimes, ceux dont la quête de sécurité s’est achevée dans les eaux de la Méditerranée ou contre des barrières de sécurité.  Affirmant que la Turquie a, à elle seule, sauvé de la noyade 32 000 migrants irréguliers depuis le début de cette année, il a affirmé que son pays a été laissé seul dans ses efforts de solidarité. 

Pour le Président turc, il faut pour résoudre la crise humanitaire en Syrie traiter trois problèmes.  Le premier concerne la mise en place d’un Comité constitutionnel efficace, car une solution politique permanente permettra en soi à la Syrie de retrouver son intégrité territoriale.  Le deuxième consiste à éviter un massacre à Edleb.  À cet égard, M. Erdoğan a estimé que, malgré des revers, l’Accord de Sotchi reste valable et a demandé qu’on soutienne les efforts de son pays.  Enfin, pour M. Erdoğan, il faut éliminer les « structures terroristes du PKK-YPG » à l’est de l’Euphrate, qui « occupent un quart de la Syrie et tentent de trouver une légitimité sous le nom de Forces démocratiques syriennes ».  À ses yeux, il n’y aura pas de solution permanente pour la Syrie si on ne traite pas « toutes les organisations terroristes de la même manière ».  Enfin, M. Erdoğan a rappelé les efforts de son pays pour obtenir la mise en place d’un corridor de paix destiné à permettre la création en Syrie d’une zone de sécurité pour quelque deux millions de Syriens et a réclamé la mise en œuvre effective des Pactes mondiaux sur les migrations et sur les réfugiés adoptés sous l’égide des Nations Unies.

M. Erdoğan a ensuite abordé d’autres crises dans le bassin méditerranéen. Accusant les Chypriotes grecs d’empêcher toute solution à la crise chypriote depuis plus de 50 ans, il a estimé que les ressources énergétiques de la région pourraient offrir des chances de coopération mais a réaffirmé la volonté de son pays de « protéger jusqu’au bout les droits et intérêts légitimes de la Turquie et des Chypriotes turcs ».

Après avoir cité rapidement les crises en Libye, mais aussi au Yémen et au Qatar du fait de leurs conséquences à la fois humanitaires et économiques, M. Erdoğan a rappelé que la seule solution à la crise palestinienne est la création immédiate d’un État palestinien avec un territoire contigu sur la base des frontières de 1967 et avec Jérusalem-Est comme capitale.  Présentant des cartes, il s’est demandé où étaient aujourd’hui les frontières d’Israël et si le « Deal du Siècle » -le plan américain pour la région, dont l’aspect politique n’a pas encore été dévoilé– vise à « éliminer complètement la présence de l’État et du peuple de Palestine ».  Il a aussi rappelé combien il est important que l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) puisse continuer de travailler efficacement.

Enfin, M. Erdoğan a plaidé en faveur des territoires azéris du Haut-Karabakh, du peuple kashmiri et des musulmans rohingya.  Dénonçant la xénophobie, le racisme et l’islamophobie, M. Erdoğan a demandé à tous les hommes et femmes d’État de tenir des discours publics de tolérance et de prendre des mesures concrètes.  Il a également demandé que le 15 mars, date de l’attaque contre la mosquée de Christchurch en Nouvelle-Zélande, soit proclamé par les Nations Unies « journée internationale de solidarité contre l’islamophobie ».

M. MUHAMMADU BUHARI (Nigéria) a rappelé que cette année marque le premier anniversaire de la Journée internationale du multilatéralisme et de la diplomatie au service de la paix et le centième anniversaire de la création de la Société des Nations (SDN) qui a jeté les bases de cette Organisation.  Le multilatéralisme a sauvé des vies, en préservant paix et stabilité et en générant des progrès socioéconomiques dans de nombreux pays.  Mais nous devons admettre qu’à mesure que le monde s’enrichit, l’économie mondiale et l’ordre politique se dégradent.  Des millions d’Africains demeurent ainsi dans une pauvreté abjecte.

Le racisme, la xénophobie, le nationalisme, le populisme ressurgissent, sans oublier les tendances au protectionnisme et à l’unilatéralisme.  Les principes des Nations Unies sont compromis.  L’exemple du Plan Marshall, catalyseur important pour revitaliser l’Europe et le Japon qui avait aussi bénéficié aux USA, peut être reproduit en Afrique aujourd’hui, une Afrique développée, a pronostiqué le Président, ne contredira pas les pays industrialisés.  Une Afrique prospère c’est davantage de prospérité pour le reste du monde, tandis qu’une Afrique plus pauvre est un fardeau.

Le Président a donc plaidé pour un partenariat concerté et multilatéral pour optimiser les ressources du continent.  « Nous avons les compétences mais dans bien des cas, nous n’avons pas les capacités » a-t-il expliqué, en appelant les pays qui le peuvent à développer des partenariats avec le continent.  Mais il faut aussi garantir l’inclusion de tous les membres de la communauté internationale.  Au Nigéria, pays de 200 millions d’habitants, la diversité est une force et l’accent est mis sur le rôle des femmes dans les programmes nationaux.  Les progrès sont mesurés, même si nous savons qu’il n’y a pas de solution rapide aux défis complexes.

Après le massacre de Christchurch en Nouvelle-Zélande, a conclu le Président, les grands médias doivent assumer leurs responsabilités et empêcher la propagation de la haine qui risque de déstabiliser des sociétés entières, d’autant que les réseaux criminels profitent également de ces communications sans frontières.

Après l’élection présidentielle organisée il y a un an, s’est félicité M. IBRAHIM MOHAMED SOLIH, Président des Maldives, mon pays est reparti sur la voie de la démocratie, déterminé à impliquer les citoyens dans le processus de prise de décisions.   « Nous avons l’intention d’être un bon partenaire international », a déclaré le Président.  Préoccupé par le terrorisme et l’extrémisme violent, il a rappelé les attentats de Pâques dernier à Sri Lanka, le plus proche voisin des Maldives, et appelé à une action concertée pour contrer cette menace.

Pour les Maldiviens, l’urgence climatique représente « le combat de toute une vie », parce que c’est notre existence en tant que nation qui est menacée, s’est impatienté M. Solih.  « Cela fait plus de 30 ans que nous le disons. » 

Bien qu’elles ne soient pas responsables de ce problème, les Maldives ne peuvent et n’attendront pas les échéances fixées par l’Accord de Paris sur le climat, a averti le Président.  Il s’est engagé à augmenter les contributions déterminées sur le plan national pour répondre aux changements climatiques et à œuvrer de concert avec les petits États insulaires en développement et avec l’Alliance des petits États insulaires.  Hier, lors du Sommet sur le climat organisé par le Secrétaire général, les Maldives ont présenté un plan intitulé « Climate Smart Resilient Islands » qui préconise des solutions naturelles et promeut l’innovation et les nouvelles technologies.  Le pays éliminera progressivement le plastique à usage unique d’ici à 2023, a en outre annoncé le Président. 

Les Maldives sont constituées à 99% d’océan: l’océan Indien est « notre maison », a insisté M. Solih.   Vous ne pouvez pas protéger les océans sans résoudre les changements climatiques et vice-versa, a-t-il assuré.  C’est pourquoi le pays s’apprête à rejoindre cette semaine la coalition « Blue Prosperity » en vue de protéger les ressources océaniques pour des modes de subsistance viables et pour les générations futures.  Enfin, regrettant que l’océan Indien reste « l’une des régions les moins intégrées du monde », notamment en Asie du Sud, le Président maldivien s’est engagé à promouvoir l’intégration régionale à travers une coopération accrue avec ses voisins, et ce, pour la paix et la prospérité.

Pour Cheikh TAMIM BEN HAMAD AL-THANI, Émir du Qatar, l’importance stratégique de la région du Golfe fait de sa stabilité un impératif régional et international.  Rappelant la position du Qatar qui consiste à protéger la région par des moyens pacifiques comme le dialogue fondé sur les intérêts communs et le respect de la souveraineté des États, l’Émir a estimé que stimuler des tensions et dicter la volonté en ayant recours au blocus et aux sanctions ne sert l’intérêt d’aucun de ces États. Il a donc insisté sur la nécessité d’œuvrer pour la mise en place d’un système de sécurité régionale.  À ce titre, il a rappelé que le blocus « injuste, illégal et injustifié » imposé à son pays se poursuit, le Conseil de coopération du Golfe étant la deuxième victime puisqu’il est paralysé et a perdu son rôle.  Quoique « victime » de cette situation, le Qatar souhaite une sortie de crise par le dialogue et fondée sur le respect mutuel et la levée de ce blocus « injuste ».  L’Émir a réitéré sa profonde gratitude pour les « efforts sincères » de l’Émir du Koweït, Cheikh Sabah Al-Ahmed Al-Jaber Al-Sabah, et pour les initiatives des pays frères et amis.

Abordant le conflit israélo-palestinien, il a estimé que la paix durable est celle qui repose sur la justice.  Cela signifie le respect des droits du peuple palestinien dont la patrie a été usurpée.  Le Qatar demande donc un État palestinien dans les frontières de 1967 et avec Al-Qods-Est comme capitale ainsi que la fin de l’occupation de tous les territoires occupés, y compris le Golan syrien et les territoires libanais.

La tragédie du peuple syrien et la persistance de ses souffrances pour la huitième année sont devenues un « scandale et une honte pour l’humanité », s’est indigné l’Émir, pour lequel le fait qu’une solution politique n’ait toujours pas vu le jour est imputable à l’incapacité du Conseil de sécurité de protéger les civils et d’adopter la résolution nécessaire pour mettre fin à l’effusion de sang et à l’intransigeance du régime syrien qui rejette toutes les initiatives régionales et internationales.  « Tous ceux qui m’écoutent maintenant savent que lorsque nous nous référons au Conseil de sécurité, nous entendons les grandes puissances », a précisé l’Émir.  Le temps est venu pour les Syriens, a-t-il estimé, de retrouver la sécurité, des conditions de vie décentes et la justice.  Cela passe, a dit l’Émir, par une solution politique qui réponde aux aspirations du peuple syrien dans toute sa diversité.  En attendant, le Qatar continuera de s’acquitter de son obligation humanitaire envers le peuple syrien.

En ce qui concerne le Yémen, le Cheikh a rappelé l’attachement du Qatar à son unité, à son intégrité et à sa souveraineté territoriale, ainsi qu’à la nécessité de mener à bien le processus politique conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, et en particulier la résolution 2216.  En Libye, les derniers développements laissent présager, selon lui, des risques pour l’unité et la stabilité du pays.  Les dernières opérations militaires contre Tripoli ont empêché la convocation de la conférence nationale, ce qui est en soi « un nouvel échec du système de sécurité collective au Moyen-Orient ».  S’ajoute à cela la politique de « deux poids, deux mesures » et la sélectivité puisque certains pays soutiennent les milices militaires qui s’opposent au Gouvernement légitime.  Pour le Cheikh, l’échec du processus de paix en Libye s’explique par le fait que « certains pays font ce qu’ils ne disent pas, et disent ce qu’ils ne font pas ».  Ils soutiennent les efforts internationaux en apparence et les sapent par derrière, avec l’appui de seigneurs de la guerre et de milices terroristes, et tout ceci, pour servir des intérêts étroits.

L’Émir a ensuite passé en revue les efforts du Qatar en faveur de consensus autour de « solutions rationnelles et équitables aux crises de la région », et notamment les négociations qu’il a organisées entre les États-Unis et les Taliban.  Il a également fait remarquer que si certains régimes de la région avaient opté pour des réformes, ils auraient pu éviter des pertes énormes et d’innombrables victimes.  Dans ce contexte, il a salué les mesures prises et les accords conclus entre les parties soudanaises, et, dans la foulée, a demandé aux États-Unis de retirer le Soudan de la liste des États qui parrainent le terrorisme.  Le terrorisme et l’extrémisme violent exigent une approche globale qui tienne compte de leurs racines politiques, économiques et sociales.  Il a appelé à ne pas tomber dans le piège d’associer le terrorisme à une religion donnée et a demandé que les crimes d’État contre des civils soient traités comme du terrorisme d’État.  L’Émir a rappelé l’accord de partenariat passé avec le Bureau de lutte contre le terrorisme ainsi que l’allocation de 75 millions destinée pour en renforcer la capacité.

Avant de conclure, l’Émir a renouvelé une proposition qu’il a faite l’an dernier visant à organiser une conférence internationale sur les moyens de règlementer l’utilisation des nouvelles technologies de communication dans le contexte du droit international.  Il a réaffirmé la volonté du Qatar d’organiser cette conférence sous les auspices des Nations Unies et de tout mettre en œuvre avec les partenaires internationaux pour en faire un succès. 

M. UELI MAURER, Président de la Confédération suisse, a déploré que des valeurs qui servaient de repères depuis longtemps à l’humanité soient remises en question: à quoi se raccrocher si rien ne dure? s’est-il demandé.  Peut-on encore faire confiance à la politique, à l’économie et aux organisations internationales?  Il faudra ici, dans le cadre de l’Assemblée générale, commencer à trouver des réponses, a-t-il jugé.

La Charte des Nations Unies constitue une boussole en affirmant l’égalité des nations et les relations entre États devraient être régies par ces valeurs partagées, a voulu le Président.  Or, a-t-il reconnu, nous sommes plusieurs petits pays à constater que le principe d’égalité est trop souvent violé et cette tendance inquiétante fait que souvent la force des grands prime sur le droit des petits.  Je ne suis pas venu ici pour me plaindre, a-t-il assuré, mais pour rappeler que cette réalité nous concerne tous quand il s’agit du bon fonctionnement de la communauté internationale.  Les petits États n’ont pour eux que le droit, que la communauté internationale se doit de protéger pour son bien.

Alors que les Conventions de Genève fêteront cette année leurs 70 ans, l’engagement humanitaire est au cœur de la politique extérieure suisse, a-t-il poursuivi.  Mais la liste des violations du droit humanitaire est chaque année trop longue et il appartient à tous de faire en sorte que ces valeurs deviennent réalité.  Agir contre la faim, assurer les besoins en eau, en énergie, et donner une formation à tous, combattre les changements climatiques et réduire les conflits armés sont quelques-uns des défis qui se posent à nous.  Des phases d’espoir succèdent à celles de désespoir.

Dans le passé, les efforts ont été récompensés quand nous avons su mettre à profit les progrès technologiques pour le bien commun, a poursuivi le Président, estimant qu’investir dans la recherche et dans la formation, c’est créer les conditions d’un monde qui offre davantage de chances à tous.  Si nous voulons avoir dans le futur assez de ressources pour tous, lutter contre les changements climatiques, les professions de foi ne suffiront pas, a averti le Président.  Nous aurons besoin d’innovation technique.

Le partage des connaissances sans frontière, le progrès technique doivent être encouragés, pas combattus.  Le développement des technologies numériques peut rapidement apporter des bénéfices considérables et permettre d’atteindre les objectifs de développement durable.  La Suisse s’est engagée pour que son secteur financier soit exemplaire.  Avec une utilisation avisée des nouvelles technologies, elle peut développer des produits innovants.  Ayons le courage de nous ouvrir à la nouveauté et de dire oui aux promesses de demain, a encouragé le Président.

Mais, a-t-il reconnu, les nouvelles technologies peuvent aussi favoriser la criminalité.  La protection des sphères privées est aussi un droit fondamental et il revient à la sphère politique de garantir la protection des données.  La Suisse a lancé une initiative pour défendre les valeurs et la sécurité du numérique et elle veut que la nouvelle société numérique se donne des règles communes, qu’elle soit encadrée par des règles claires en accord avec les valeurs communes.

Enfin, la Suisse veut une ONU forte car elle est la seule plateforme d’échanges susceptible d’aider à relever les défis.  Mais l’institution doit être réformée « sur les points que nous savons », a insisté le Président.  L’ONU vit de la confiance qui lui est accordée, une confiance qui est notre « capital ».  Vantant les mérites de Genève, plateforme de choix, étant depuis des décennies la capitale de l’humanitaire comme en attestent la présence de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et de plus de 400 ONG, le Président a demandé le respect de l’égalité des droits de tous, individus et États, car le droit doit l’emporter sur la force.

Mme KOLINDA GRABAR–KITAROVIĆ, Présidente de la Croatie, a dénoncé l'usage de la peur comme stratégie politique: « la peur nous inhibe, nous empêche d'aller dans la bonne direction, entrave notre potentiel ».  Louant un leadership par l'exemple, la Présidente a appelé à la créativité pour régler les maux du siècle: changements climatiques, développement durable, migrations, terrorisme, armes de destruction massive et nouvelles technologies.  « Comment éviter les scénarios défavorables et récolter les bénéfices?  Comment mobiliser les États et mettre nos ressources en commun pour répondre adéquatement aux menaces? »  Pour Mme Grabar-Kitarović, la solution réside dans le multilatéralisme, et dans les réformes actuellement menées au sein de l'Organisation, que la Croatie soutient en tous points. 

Réitérant son engagement en faveur du Programme 2030 et de l’Accord de Paris sur le climat, la Présidente a vu dans les objectifs de développement durable, « une matrice pour un avenir commun » et « une obligation pour nos citoyens et la communauté internationale ».  Appelant à revigorer le Programme 2030, la Présidente a affirmé que son pays s'engage à devenir un leader en matière de développement durable.  Son focus est de devenir une république « verte », en renforçant sa cohésion territoriale, dont le développement durable de plus d'un millier de ses îles de l'Adriatique. 

La Présidente a consacré la seconde partie de son discours à la pollution des mers par le plastique, « une des plus graves menaces contre l'humanité », une plaie qui frappe les côtes croates, menaçant sa faune et sa flore et déséquilibrant son écosystème délicat.  Les côtes croates, « parmi les plus propres et les plus belles du monde », sont parfois détériorées à cause d'une mauvaise gestion des déchets par nos voisins du sud, a déploré Mme Grabar-Kitarović.  

Pointant les dégâts de la pollution plastique sur la chaîne alimentaire en général et sur l'homme en particulier -cinq grammes par semaine pourraient être ingérés en moyenne par chaque terrien-, la Présidente a loué les efforts de l'Institut océanographique de Split, qui travaille à la conservation et à la surveillance des côtes du pays.  Un programme de collecte des déchets plastiques dans les fonds marins, mis en place en collaboration avec les pêcheurs, a déjà permis de ramasser 50 tonnes de déchets, s’est réjouie la Présidente.  Elle a également cité l'exemple de l'île de Zlarin qui, avec ses 300 habitants et l'impulsion de jeunes écologistes, est devenue la première île de l’Adriatique sans plastique à usage unique, et sans déchet plastique d’aucune sorte, et ce, en l'espace de moins d'un an.  Depuis, les habitants et les commerçants sensibilisent les touristes.  « Nous n'avons aucune excuse pour ne pas réaliser l'objectif accompli par Zlarin à l'échelle globale », a conclu la Présidente.

Nous observons avec préoccupation l’effondrement du système multilatéral, en raison des mesures unilatérales prises par certains États, qui ont décidé d’ignorer à dessein « le compromis, la bonne foi et les structures internationales » en vigueur, a déploré M. Evo Morales Ayma, Président de la Bolivie.  Pour prendre le contrepied de la tendance actuelle, M. Morales Ayma a invité les États Membres à élaborer des réponses communes aux menaces qui pèsent sur l’humanité tout entière, en tête desquelles les changements climatiques.

Si nous persistons dans la voie actuelle, la température de la planète risque d’augmenter de 3 degrés Celsius d’ici à l’année 2100, a mis en garde M. Morales Ayma.  En l’absence de solutions, les effets des changements climatiques condamneront des millions de personnes à la faim, à la pauvreté, au manque d’accès à l’eau potable et au déplacement.  J’en veux pour preuve, a-t-il poursuivi, les feux de forêt qui ont ravagé ces dernières semaines l’Amazonie, l’Océanie et l’Afrique.  La Bolivie a également été touchée par ces catastrophes, a indiqué M. Morales Ayma, précisant que son gouvernement a d’ores et déjà alloué 15 millions de dollars pour combattre les incendies.  Face à ces coûts élevés, l’aide apportée a par la communauté internationale s’est avérée précieuse, a-t-il souligné.

À l’instar des changements climatiques, le système financier international a suscité l’ire du Président bolivien, qui en a dénoncé la nature « antidémocratique, inique et instable ».  En donnant la part belle aux paradis fiscaux et au secret bancaire, ce système ne fait qu’assujettir les pays les plus faibles, en les contraignant à accepter des conditions financières conçues pour prolonger leur dépendance.  M. Morales Ayma a ainsi jugé inacceptable que 1,3 milliard de personnes dans le monde vivent dans la pauvreté, pendant que, de leur côté, 1% des plus riches se partagent 82% des richesses de la planète. 

Le Président bolivien a plaidé en faveur de solutions communes pour répondre au défi de la pauvreté, notamment par le biais du partage des technologies.  Or, à l’heure actuelle, s’est-il insurgé, « le monde est contrôlé par une oligarchie globale », en vertu de laquelle « seule une poignée de multimillionnaires » décide du destin politique et économique de l’humanité.  Selon lui, la racine du problème réside dans le système capitaliste, les modes de production et de consommation des sociétés contemporaines, ainsi que les droits de propriété exercés sur les ressources naturelles et la distribution inégale des richesses.

À l’opposé de ce système, M. Morales Ayma a appelé à jeter les bases d’un monde « multipolaire », « plus juste et plus humain », basé sur des règles communes.  À ses yeux, la Bolivie a entrepris de nombreux efforts en ce sens, notamment dans le cadre de la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Le Président a justement rappelé l’importance de l’accès à la mer pour la réalisation du développement des peuples.  « C’est pour cette raison que la Bolivie ne renoncera pas à son droit d’accès souverain à l’océan Pacifique », a-t-il martelé, avant de citer plusieurs arrêts rendus par la Cour internationale de Justice (CIJ) entre 2015 et 2018, dans une affaire opposant son pays au Chili sur « l’obligation de négocier un accès à l’océan Pacifique ». 

En premier lieu, a-t-il indiqué, dans son arrêt du 1er octobre 2018, la Cour a reconnu que « la Bolivie possédait un littoral de plus de 400 kilomètres le long de l’océan Pacifique ».  En second lieu, M. Morales Ayma a rappelé que, selon un arrêt rendu par la CIJ le 24 septembre 2015 dans la même affaire, « les questions en litige ne sont ni réglées au moyen d’une entente entre les parties, ou d’une décision arbitrale ou d’une décision d’un tribunal international, ni régies par des accords ou traités en vigueur ».  Enfin, le Président a rappelé le dernier paragraphe de l’arrêt de la CIJ du 1er octobre 2018: « La conclusion de la Cour ne doit cependant pas être comprise comme empêchant les Parties de poursuivre leur dialogue et leurs échanges dans un esprit de bon voisinage, afin de traiter les questions relatives à l’enclavement de la Bolivie, dont la solution est considérée par l’une et l’autre comme relevant de leur intérêt mutuel.  Avec la volonté des parties, des négociations ayant un sens seront possibles. » 

Selon M. Morales Ayma, cet arrêt, dans lequel la CIJ a estimé que le Chili n’était pas obligé de négocier un accès souverain à l’océan Pacifique pour la Bolivie, ne saurait aucunement signifier la fin de la controverse.  Au contraire, cet arrêt laisse la possibilité au Chili et à la Bolivie de négocier une solution, a estimé le Président, appelant les Nations Unies à appuyer les deux pays en ce sens.

M. ABDALLAH II IBN AL HUSSEIN, Roi de Jordanie, a entamé son discours par un plaidoyer en faveur de l’action collective, seul instrument, selon lui, capable de lutter contre l’exclusion des jeunes, les inégalités économiques et technologiques, les changements climatiques, les déplacements de masse et les discriminations religieuses.  « C’est là toute la promesse des Nations Unies », a-t-il déclaré. 

L’action collective, a poursuivi le souverain, est également vitale pour mettre fin aux crises.  « Et aucune crise n’a fait plus de dégâts au niveau mondial que le principal conflit dans ma région, le conflit israélo-palestinien », a-t-il affirmé.  À ses yeux, le fait qu’un conflit perdure depuis si longtemps sur une terre sainte partagée par trois grandes religions, dont chacune prêche l’amour du prochain, procède d’une « ironie terrible ».  Le souverain jordanien a ainsi estimé que la ségrégation, les déplacements forcés, la violence et la méfiance n’ont pas leur place dans ce lieu « foulé par les prophètes », où des générations de musulmans, de chrétiens et de juifs se sont efforcés de « vivre dans l’obéissance à Dieu », en enseignant à leurs enfants la compassion, le pardon et le respect.

Rappelant que feu son père, le Roi Hussein de Jordanie, avait dénoncé l’occupation israélienne de la Palestine dans cette même enceinte, il y a de cela 40 ans, le Roi Abdallah II a qualifié la poursuite de cette occupation de « tragédie morale ».  Rien ne saurait déposséder le peuple palestinien de son droit international à l'égalité, à la justice et à l'autodétermination, a-t-il affirmé.  Selon lui, la défense de ce droit commence en premier lieu par la nécessité de faire respecter le caractère sacré des lieux saints à Jérusalem-Est et par le rejet des tentatives de remettre en cause le « statut juridique et le caractère authentiquement historique » de la Ville sainte.  « Quelle leçon entend-on enseigner aux jeunes, quand du personnel en arme pénètre au sein de la mosquée Al-Aqsa/Haram el-Charif alors même que les fidèles musulmans se rassemblent pour prier », s’est-il insurgé.

En tant que garant des lieux saints, le Roi Abdallah II a rappelé qu’il a le devoir de protéger les sites musulmans et chrétiens de Jérusalem.  Mais, a-t-il ajouté, la responsabilité de la défense des libertés religieuses et des droits de l’homme incombe à tous les États Membres.  « Alors, sauvegardons la Ville sainte pour toute l'humanité, en tant que ville unifiée de la paix », a appelé le souverain.  Il a en outre exhorté la communauté internationale à redoubler d’efforts pour faire avancer la solution des deux États, qu’il a jugé conforme au droit international et aux résolutions de l’ONU.  Cette solution, a-t-il insisté, est la seule capable de mettre fin au conflit, tout en répondant aux aspirations légitimes des Palestiniens à vivre au sein d’un État indépendant délimité par les frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.  « Quelle est l’alternative: un État, ségrégué, pourvu de lois iniques, dépendant de la force et trahissant les valeurs fondamentales des bonnes gens des deux côtés ?», s’est-il interrogé.  « C’est une formule pour faire durer le conflit et non une voie menant à la stabilité, à la sécurité et à la paix », a conclu le souverain.

M. MOON JAE-IN, Président de la République de Corée, a débuté son intervention en rappelant que son pays fait partie de ceux qui ont « immensément » bénéficié des Nations Unies, après avoir été libéré du « joug colonial » l’année même de la naissance de l’Organisation.  Investie d’un sens des responsabilités à la mesure des progrès qu’elle a accomplis, la Corée œuvre maintenant avec la communauté internationale pour rétablir la paix et la prospérité en Asie de l’Est et dans le monde entier.  « La trêve olympique adoptée en novembre 2017 sous la forme d’une résolution de l’ONU a été à nouveau d’une aide précieuse pour notre pays.  Conformément à cette résolution, les exercices militaires conjoints entre la République de Corée et les États-Unis planifiés pour le printemps 2018 ont été suspendus, contribuant à mettre en place un environnement qui a permis à la délégation olympique nord-coréenne de participer aux Jeux, s’est félicité le Chef d’État, en affirmant que ce rendez-vous sportif a été celui de la paix car il a facilité la reprise du dialogue entre les deux Corée, les pourparlers intercoréens ayant ensuite ouvert la voie à un dialogue bilatéral entre les États-Unis et la Corée du Nord. 

Les décisions prises par le Président Donald Trump et le Président Kim Jong Un ont imprimé l’élan nécessaire pour faire advenir les changements à l’œuvre dans la péninsule coréenne.  « Il est toujours possible de prendre place à la table des négociations pour la paix dans la sous-région », a affirmé le dirigeant.  Les deux Corée n’ont pas seulement pour objectif de parvenir à la dénucléarisation, mais aussi à la coopération économique qui, en retour, renforcera la paix, dans le cadre d’un cercle vertueux, a-t-il ajouté.  S’il a reconnu que la paix dans la péninsule demeure un défi, M. Moon a assuré que son pays continuerait le dialogue avec la Corée du Nord et se fraierait un chemin jusqu’à la dénucléarisation et la paix durable, tout en maintenant sa coopération avec les États Membres de l’ONU.  Des résultats déjà significatifs ont été enregistrés: Panmunjom, autrefois symbole de divisions, est désormais une zone totalement démilitarisée, et pas une seule confrontation n’a eu lieu depuis la signature de l’accord global intercoréen le 19 septembre 2018, a salué le Chef d’État. 

« Je voudrais vous informer en particulier qu’un total de 177 restes humains ont été retrouvés jusqu’à présent sur le site d’Arrowhead, théâtre de l’un des affrontements les plus violents entre la Corée du Sud et les troupes onusiennes d’un côté, la Corée du Nord et la Chine de l’autre », a annoncé le Président.  Tous ces efforts ont permis à Donald Trump de devenir le premier Président américain à franchir la ligne de démarcation et à poser le pied sur le sol nord-coréen, a-t-il observé, en se félicitant que l’allégement des tensions militaires et la confiance profonde entre les dirigeants des deux Corée et les États-Unis aient ouvert la voie à la réunion trilatérale de Panmunjom.

Aussi a-t-il tenu à proposer aujourd’hui à l’ONU l’idée de faire de la zone démilitarisée (ZDM) qui coupe la péninsule coréenne en deux, « une zone internationale de paix ».  La ZDM, devenu un « véritable trésor écologique », est le legs de l’humanité tout entière et doit être partagée avec le reste du monde, a poursuivi le Chef d’État: « Une fois que la paix aura été rétablie, j’œuvrerai de concert avec la Corée du Nord pour faire inscrire la ZDM au patrimoine mondial de l’humanité ».  M. Moon a souligné que la coopération de la communauté internationale et de l’ONU pour mener à bien le déminage de la zone, qui devrait prendre 15 ans, sera nécessaire, non seulement pour garantir la transparence des opérations, mais aussi pour faire de la ZDM une zone de « coopération internationale ».

M. ROCH MARC CHRISTIAN KABORÉ, Président du Burkina Faso, a mis l’accent sur le terrorisme et la pauvreté.  Depuis janvier 2016, a-t-il rappelé, le Burkina Faso fait face à des attaques terroristes « persistantes et d’une ampleur sans précédent », dont les impacts sont lourds de conséquences.  L’escalade de la violence et l’insécurité ont provoqué une crise humanitaire, faisant de nombreuses victimes civiles et au sein des Forces de défense et de sécurité, des centaines de milliers de déplacés internes, et fermant des écoles et des infrastructures de santé.

Le Président burkinabé a saisi cette occasion pour saluer l’accompagnement des Nations Unies face à cette situation et l’ouverture d’un centre régional en dehors de la capitale, au plus près des populations.  Son gouvernement, a-t-il précisé, a demandé une mission d’évaluation de la prévention et de la consolidation de la paix à la Banque africaine de développement, l’Union européenne et la Banque mondiale, qui s’est déroulée en juillet dernier, et dont les recommandations sont en cours de mise en œuvre. 

Plus que jamais, a poursuivi M. Kaboré, la communauté internationale doit intensifier la lutte pour l’élimination de la pauvreté.  Elle doit aussi soutenir les pays du G5 Sahel dans leur lutte contre le terrorisme.  À ce sujet, le Président a salué l’Initiative d’Accra et le Sommet de la Communauté économique des États de l'Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur la sécurité, qui s’est tenu le 14 septembre. 

S’il s’est félicité du renouvellement récent du mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), il a toutefois constaté le « caractère inopérant » de la Mission face à la menace terroriste au Mali en raison des limites de son mandat.  Or, a-t-il souligné, « il apparaît inconcevable qu’avec 12 000 hommes et des moyens substantiels, cette force ne puisse pas contribuer efficacement à la lutte contre le terrorisme dans ce pays ».  À l’instar de ses pairs de la CEDEAO et en tant que Président en exercice du G5 Sahel, le dirigeant a donc lancé un appel pour un mandat « plus robuste et plus offensif » de la MINUSMA.  De même, il a appelé le Conseil de sécurité à accorder à la Force conjointe du G5 Sahel un mandat en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, afin de lui assurer des ressources pérennes et prévisibles.

Le Président a rappelé que, lors du Sommet de Biarritz des pays du G7, il a proposé, avec la France et l’Allemagne, la mise en place d’un partenariat international en faveur de la stabilité et de la sécurité au Sahel.  « La paix et la stabilité au Sahel sont aussi celles de l’Afrique et du reste du monde », a-t-il prévenu.  « Il n’y aura de stabilité dans notre espace que si nous trouvons une solution à la crise libyenne », a-t-il ajouté.  Sur ce point, le Burkina Faso, a-t-il dit, salue la médiation de l’ONU et recommande « fortement » une implication de l’Union africaine.  

Par ailleurs, a expliqué M. Kabore, le Gouvernement poursuit la mise en œuvre de son programme dans le sens de la satisfaction des besoins fondamentaux des populations, du renforcement de la démocratie et de la consolidation de l’état de droit.  En matière de lutte contre le réchauffement climatique, le Burkina Faso a pris d’importantes initiatives, dont un plan quinquennal de reforestation, une loi pour réduire les effets des catastrophes et des crises humanitaires et un plan régional 2016-2020 pour la réduction des risques et la préparation à la réponse aux urgences.  Enfin, le dirigeant burkinabé a félicité le Secrétaire général pour le lancement, hier, de l’Alliance mondiale des investisseurs pour le développement.  Il y a vu « une lueur d’espoir au moment où les financements se font de plus en plus rares ».

M. SEBASTIÁN PIÑERA ECHEÑIQUE, Président du Chili, a tout d’abord souligné que chaque génération fait face à ses propres défis.  Cependant, aucune n’a fait face à un défi aussi urgent et immense que celui des changements climatiques et du réchauffement de la planète.  De prestigieux magazines ont présenté en couverture des images de la Terre, exhortant les gens à sauver la planète.  Ils ont tort: ce qui est en jeu, c’est la survie de la race humaine, a martelé le Président.

La planète a 4,5 milliards d’années et a souffert, résisté et survécu à toutes sortes d’évènements climatiques.  En revanche, 99% des espèces ont disparu et nous ne voulons pas que les humains soient les prochains sur la liste.  Les preuves scientifiques sont claires et définitives.  Nous sommes affectés par d’intenses vagues de chaleur, de graves inondations, des sécheresses, des ouragans, l’effondrement des glaciers, l’élévation du niveau de la mer et d’autres phénomènes.  Au cours des 30 dernières années, nous avons détruit 50% des récifs coraliens qui abritent 25% de la vie et de la diversité marine.  Nous avons brûlé ou déboisé une grande partie de nos forêts et nous avons pollué plus que jamais auparavant la terre, l’air et la mer.

Mère nature nous demande de la protéger pour qu’elle puisse nous protéger en retour.  Il est temps d’écouter, il est temps d’agir, a conjuré le Président chilien, qui a souligné que l’existence et la nature des changements climatiques ne sont pas une question d’opinion, d’idéologie ou de foi.  Les preuves scientifiques sont là et nous avons un peu plus d’une décennie pour changer le cours des choses et éviter des dommages irréversibles.

Que pouvons-nous faire? a-t-il demandé.  Nous pouvons attendre et voir ce qu’il se passe, ou nous pouvons agir.  Le Chili a choisi la seconde option, ce pourquoi il a accepté d’accueillir en décembre la vingt-cinquième Conférence des États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 25).

Le Président chilien a présenté les objectifs de cette COP: des objectifs plus ambitieux et applicables pour combattre les changements climatiques et le réchauffement de la planète; la mise en œuvre de meilleures initiatives pour prendre soin de nos océans; l’engagement des exécutifs régionaux et communaux, des ONG, des entreprises privées, de la société civile et des citoyens dans cette noble cause; l’acceptation de la mise en œuvre de la taxe carbone.

Le Président chilien a appelé à l’abandon de la culture du jetable et à embrasser plutôt celle du recyclage.  Il faut passer d’une économie linéaire à une économie circulaire qui recycle les déchets.  Il a également souhaité que des ressources soient mobilisées pour collaborer avec les pays les plus vulnérables qui rejoindraient cette cause.

Chaque pays et l’humanité tout entière doivent se joindre à ce défi, le plus grand de notre génération, la bataille dont nos vies dépendent.  Changer le cours de l’histoire et assurer notre survie: « Si pas maintenant, quand?  Si pas nous, qui? » s’est interrogé le Président.  Il est revenu sur la crise environnementale qui a affecté les communautés de Quintero et de Puchuncavi, au Chili, menaçant d’empoisonnement ces communautés.  Un plan de décontamination a été mis en œuvre, le réseau de suivi en ligne a été amélioré, et un audit environnemental minutieux a été réalisé.

Concernant l’eau et la pénurie d’eau à laquelle fait face son pays depuis 10 ans, le Président chilien a cité les mesures adoptées par son gouvernement, dont des décrets sur la pénurie d’eau et l’urgence agricole, l’intégration de technologies modernes pour un meilleur usage des ressources en eau, la construction de barrages, de zones aquifères, de plants de désalinisation et d’installations de traitement des eaux usées; ainsi que des recherches et des évaluations d’aqueducs et autres « autoroutes de l’eau » vers les régions qui en manquent.

Le Président s’est ensuite penché sur l’affaiblissement et l’état jugé inquiétant de l’économie mondiale, et notamment la guerre des prix que se mènent deux puissances économiques majeures.  Il a appelé à un ordre économique basé sur des règles respectées, promouvant le libre-échange, l’intégration et les flux d’investissement.  Il faut, a-t-il martelé, s’opposer au protectionnisme, supprimer les barrières commerciales, harmoniser les réglementations, établir des règles universelles, interdire et sanctionner les comportements unilatéraux.  Pour ce faire, il a appelé à la réforme de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour permettre un meilleur dialogue et une coopération rapprochée au sein de la communauté internationale.  Dès lors, il a jugé urgent et nécessaire de mettre fin à cette guerre des prix nuisible.

Pour finir, le Président Chilien a plaidé, en parlant en particulier de sa région, pour une société du savoir et de l’information, la quatrième Révolution industrielle, le combat contre la corruption et le populisme, l’amélioration de l’éducation, l’investissement dans la science, les technologies et l’entrepreneuriat.  Il a réservé ses derniers mots à la situation au Venezuela où la dictature a provoqué une crise humanitaire. La solution, a-t-il dit, c’est un gouvernement de transition et des élections libres et démocratiques.

M. EMMANUEL MACRON, Président de la France, s’est réjoui de s’adresser à l’Assemblée générale au lendemain de la manifestation convoquée par le Secrétaire général sur la lutte contre les changements climatiques.  Selon lui, la communauté internationale n’est pas au rendez-vous des exigences dans ce domaine, sur fond de regain de tensions au Moyen-Orient ou au Sahel.  Outre la connaissance –« jamais la science n’a été aussi avancée pour nous aider à formuler les réponses »–, nous avons le financement, une capacité d’innovation « inégalée », la « conscience inédite des maux contemporains » et un cadre multilatéral.  Alors, qu’est-ce qu’il nous manque? s’est demandé le dirigeant français.  « À y réfléchir, je me remémorais un texte qui m’a souvent accompagné, celui qu’Alexandre Soljenitsyne a prononcé en 1978 à l’Université de Harvard: il nous manque le courage », a-t-il répondu.  « Le retour du courage, le courage de savoir bâtir la paix et le courage des responsabilités ».

Dans toutes les régions du globe, s’est-il expliqué, bâtir la paix, c’est prendre le risque du dialogue et du compromis.  Il faut des concertations exigeantes avec un « suivi transparent ».  Évoquant à cet égard la crise iranienne, le Chef d’État s’est dit convaincu que le durcissement des sanctions ne peut qu’aggraver les tensions dans le Golfe et au-delà.  Les attaques lancées récemment contre l’Arabie saoudite ont changé la donne, avec des « risques d’embrasement » à tout moment.  Plus que jamais selon le Président français, le temps est à la reprise des négociations entre les États-Unis, l’Iran, les autres pays signataires du Plan d’action global commun (JCPOA) et les pays de la région.  Nous devons nous assurer, a-t-il poursuivi, que jamais l’Iran ne se dote de l’arme nucléaire, que la sécurité régionale soit garantie, y compris pour les flux maritimes et économiques.  « Je crois au courage de bâtir la paix », a insisté M. Macron. 

Abordant la situation humanitaire à Edleb, qu’il a déclaré suivre « avec vigilance et exigence », le dirigeant a dit être engagé dans la recherche collective d’une « solution politique durable et inclusive » en Syrie, qui passe par le retour de tous les réfugiés et un processus électoral libre qui tienne compte de la volonté de tous les Syriens.  M. Macron s’est également dit convaincu que la paix durable en Libye ne pourra être réalisée qu’au travers de la réconciliation de toutes les parties libyennes, plaçant ses espoirs dans la tenue prochaine d’une conférence interlibyenne de réconciliation et dans l’engagement de l’ONU.  S’agissant du Mali, il a recommandé que le mandat de la Mission des Nations Unies (MINUSMA) soit placé sous le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies et que toutes les forces de sécurité concernées dans la lutte antiterroriste soient mobilisées. 

« Autant de situations où le dialogue et la construction de solutions politiques sont nécessaires », a résumé le Président français, qui a également annoncé la tenue, dans les prochaines semaines, du Sommet Normandie au niveau des chefs d’État et de gouvernement pour relancer le règlement de la crise ukrainienne.  « Je ne crois pas que les crises se règlent par un repli nationaliste », a-t-il dit.  « Je crois dans le patriotisme », qui est « l’amour de la patrie et de l’universel ».  Il faut, d’après lui, réinventer un « multilatéralisme fort », en actant le fait qu’« aucune solution n’existe dans le repli ».  Si nous nous sommes affaiblis, a argué M. Macron, c’est parce que nous avons « remis la vérité en cause », et qu’une « perte de sens » s’est installée.  Les inégalités ont augmenté dans notre monde sous l’effet des « dysfonctionnements » du capitalisme contemporain, a-t-il ajouté, en citant précisément les inégalités dans l’accès aux opportunités économiques, de genre, dans l’accès aux soins et à l’éducation.  Pour y mettre fin, il a cité en exemple l’Initiative pour favoriser l’accès des femmes au financement en Afrique (AFAWA), avec le soutien de la Banque africaine de développement.

On a donné un « cadre » à l’« impatience » de notre jeunesse, a analysé Emmanuel Macron.  En matière de lutte contre les changements climatiques et de préservation de la biodiversité, il faut revoir à la hausse nos ambitions, si nous voulons limiter à moins de deux degrés la hausse des températures.  Il s’est félicité que l’Inde ait indiqué sa volonté de rejoindre la Coalition des États déterminés à parvenir à la « neutralité carbone ».  À cet égard, la COP 25 et 26 seront des étapes essentielles, a-t-il estimé.  « On ne peut pas continuer à prétendre que l’on fait des efforts tout en continuant à dépendre du charbon. »  « On ne peut pas continuer à développer des installations polluantes dans les pays en développement. »  « On ne peut continuer de faire des déclarations à cette tribune tout en important des produits nocifs. »  Il a précisé qu’il n’était pas en train de dire que « tout va bien en France », et « qu’on en fait assez », « loin de là ».  Mais il faut s’engager ensemble et maintenant, a-t-il lancé.

Face aux inégalités, il a considéré que la bonne réponse n’est pas un « agenda fiscal » pour chaque pays, mais un programme international assumé.  C’est la raison pour laquelle il a encouragé chacun, dès à présent, à changer ses habitudes de consommateur et de gouvernance, en faisant preuve du courage de la responsabilité.  « Nous n’avons pas d’autre choix », a-t-il tranché.

M. ŽELJKO KOMŠIĆ, Président de la Présidence de la Bosnie-Herzégovine, a espéré pouvoir soumettre son pays, cette année, à l’examen volontaire du Forum de haut niveau pour le développement durable. I l a aussi souligné que le processus d’intégration euro-atlantique est au centre des développements politiques de son pays.  La Bosnie-Herzégovine, a-t-il avoué, devra passer par un processus de maturation pour pouvoir mener les réformes nécessaires sans provoquer de tensions sociopolitiques.  Mon pays, a insisté le Président, est un pays fiable, sérieux et un partenaire déterminé des Nations Unies, de l’Union européenne et de l’OTAN.  Il a aussi inscrit au rang de ses priorités de bonnes relations bilatérales avec ses voisins.  Malheureusement, a regretté le Président, compte tenu des politiques spécifiques, nous voyons parfois nos voisins poursuivre leurs intérêts politiques au sein même de notre territoire, causant des troubles et un certain degré de déstabilisation.

Mon pays, a aussi assuré le Président, coopère pleinement avec le Mécanisme international résiduel appelé à exercer les fonctions des Tribunaux pénaux.  Nous sommes déterminés à faire en sorte que toutes les personnes soupçonnées de crimes de guerre sur le territoire de l’ex-Yougoslavie soient traduites en justice.  Concluant sur la réforme du Conseil de sécurité, le Président s’est dit déterminé à rechercher une solution de compromis.  Mais comme le nombre des pays d’Europe de l’Est a doublé, il a dit compter sur un Conseil élargi qui donnera plus de sièges non permanents au Groupe des États d’Europe orientale.

M. JOÃO MANUEL GONÇALVES LOURENÇO, Président de l’Angola, a rappelé la nécessité d’un effort commun pour régler les menaces à la paix, telles que la pauvreté, les maladies endémiques, l’exploitation des êtres humains, le trafic de drogue et le terrorisme.  Clef de la paix et de la sécurité internationales, le multilatéralisme, a-t-il souligné, implique une réforme profonde de l’Organisation, laquelle doit augmenter le nombre de membres permanents au Conseil de sécurité, pour y inclure des pays d’Afrique et d’Amérique du Sud et atteindre un meilleur équilibre géostratégique que celui hérité de la Deuxième Guerre mondiale. 

Le Président a rappelé que son continent est ravagé par le terrorisme, qui affecte, entre autres pays, le Mali, le Niger, le Nigéria et le Cameroun, le Burkina Faso, le Tchad, la République centrafricaine et la Somalie.  Il a mentionné la contribution de l’Angola à la prévention et au règlement des conflits, comme en témoigne le protocole d’accord entre le Rwanda et l’Ouganda signé à Luanda.  Venant aux changements climatiques, il s’est associé à ceux qui dénoncent « l’irresponsabilité » des acteurs internationaux qui persistent à ignorer les signes patents et qui « continuent de soutenir les industries polluantes ».

Saluant les récentes initiatives et les manifestations organisées dans le monde entier, comme une « véritable ligne de défense pour l’environnement et notre planète, notre maison commune », il a appelé à travailler à la protection des forêts encore relativement préservées comme celles du bassin amazonien et du fleuve « Congo ou Zaïre », essentielles pour le renouvellement de l’oxygène de la planète.

Le Président s’est dit conscient de ce que les objectifs de développement durable, certes nobles et justes, ne peuvent être atteints sans un « débat d’idées sur des projets alternatifs prenant en compte la situation politique et la réalité concrète des pays qui en ont le plus besoin ».  Il a prôné, pour combattre la faim, la misère et les maladies, plus que des solutions politiques ou bureaucratiques, une meilleure gouvernance, une lutte contre la corruption et autres maladies sociales, la protection de l’environnement et le renforcement des valeurs comme la dignité humaine, la citoyenneté responsable et inclusive, la justice sociale et l’égalité des chances.  Ces objectifs exigent l’appui de la jeunesse, seule force capable de surmonter ces défis, et dont il est impératif d’approfondir l’éducation tant du point de vue technique que culturel.

« Quelle heureuse coïncidence de succéder, à ce podium, au Président João Lourenço, du pays frère de l’Angola », s’est exclamé M. MARCELO REBELO DE SOUSA, Président du Portugal, soulignant la force du lien qui unit les membres de la Communauté des pays de langue portugaise.  Il est revenu sur la création, il y a presque 100 ans, de la Société des Nations (SDN), rappelant que le Congrès américain de l’époque, à tendance isolationniste, avait alors refusé de ratifier le traité.  Quant à l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS), elle n’avait pas non plus souhaité intégrer l’ancêtre de l’ONU pour des raisons idéologiques, avant de se raviser en 1934. 

La SDN, a encore rappelé le Président, ne s’est jamais remise du manque d’engagement des deux puissances.  Fragilisée par la montée de l’unilatéralisme, de l’isolationnisme et du nationalisme, elle a été incapable d’empêcher la Deuxième Guerre mondiale.  « Ce qui semblait en 1919 une promesse, quoique fragile, était devenu en 1939 une hécatombe », a déclaré le Président, appelant à tirer les leçons de l’histoire pour éviter qu’elle ne se répète.  Cela suppose, a-t-il estimé, redoubler d’efforts pour tenter de résoudre en commun les problèmes de l’humanité tout entière, grâce à une « vision multilatérale partagée par tous, y compris les plus puissants ».  Personne, a-t-il prévenu, ne peut faire cavalier seul face aux défis mondiaux de plus en plus complexes.  Ne confondons pas « puissance transitoire » avec « leadership éternel ».

En effet, s’est alarmé le Président, le monde a profondément changé au cours de ces 40 dernières années, passant de deux superpuissances à « une superpuissance absolue ».  Dans ce monde changeant, il faut « résister à la tentation du nombrilisme ».  Nous devons cesser de nous focaliser sur notre pouvoir ou sur nos prochaines élections, prétendant que le reste du monde n’existe pas ou qu’il n’existe que s’il nous ressemble. 

Le Président a au contraire lancé un appel en faveur du multilatéralisme, sous la houlette du Secrétaire général, à savoir l’investissement dans les organisations internationales, la mise en œuvre des objectifs de développement durable, le paiement en temps et en heure par les États Membres de leur contribution obligatoire au budget de l’Organisation, la mise en œuvre de l’Accord de Paris, la conclusion d’un traité sur la biodiversité marine, la participation aux opérations de maintien de la paix de l’ONU et la réforme des Nations Unies.  Sur ce dernier point, il a appelé à la restructuration du Conseil de sécurité pour y garantir la présence, au minimum, de l’Afrique, du Brésil et de l’Inde. 

Le Président s’est enorgueilli de la participation du Portugal à huit missions de maintien de la paix de l’ONU, dont six sont déployées sur le continent africain.  Il s’est également dit fier d’organiser, aux côtés du Kenya, la prochaine Conférence sur les océans en juin 2020, à Lisbonne, et d’avoir lancé une feuille de route nationale pour la neutralité carbone d’ici à 2050. 

Le Président a également dit soutenir les Pactes mondiaux pour les migrations et les réfugiés.  Nous sommes, a-t-il rappelé, un pays de migrants depuis notre naissance, il y a 900 ans.  Appelant à lutter contre la xénophobie et l’intolérance, il a ajouté que c’est en investissant dans l’éducation que nous pourrons vaincre le terrorisme, la radicalisation et la traite des êtres humains.

Appelant également à persévérer en faveur du multilatéralisme et du patriotisme, le Président a précisé qu’être patriote, c’est être fier de ses origines et de son histoire, comme les autres sont fiers des leurs.  « Dans cette salle, fort heureusement, nous sommes tous des patriotes », a-t-il déclaré.  « Nous les patriotes, nous le savons: il faut plus de Nations Unies et pas moins de Nations Unies », a insisté M. Rebelo de Sousa, exhortant les États Membres à ne pas commettre les mêmes erreurs qu’au temps de la SDN.

M. PAUL KAGAME, Président du Rwanda, a estimé que 2020 sera un tournant pour le multilatéralisme.  Le potentiel de transformation de la couverture sanitaire universelle, a-t-il poursuivi, est désormais une priorité mondiale, grâce au rôle de chef de file joué par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).  Il a fait valoir qu’au Rwanda, 80% de la population en bénéficie.  Il s’est aussi enorgueilli des possibilités de l’Afrique et a cité l’entrée en vigueur, cet été, de l’Accord de libre-échange continental.  M. Kagame a tout de même reconnu les obstacles qui continuent de se dresser devant le développement de son continent qui compte pourtant sept des économies à la croissance la plus rapide dans le monde.  Le Président a donc engagé la communauté internationale à honorer les engagements qu’elle a pris. 

Une des leçons que l’on peut tirer du Sommet Action Climat organisé hier à l’initiative du Secrétaire général de l’ONU, c’est que l’innovation technologique peut permettre de réaliser le développement durable sans porter atteinte à la compétitivité économique des États.  Dans les semaines à venir, a-t-il poursuivi, le Rwanda accueillera de nouveaux réfugiés africains en provenance de centres de détention en Libye.  D’autres pays devraient faire de même, a estimé le Président, avant de conclure sur les droits des femmes et des filles, et d’annoncer la tenue, en novembre prochain à Kigali, du quatorzième Sommet mondial contre les inégalités entre les sexes.

M. SAULI NIINISTÖ, Président de la Finlande, s’est félicité d’avoir entendu le Président de l’Assemblée générale mentionner le manque de confiance comme un problème crucial, car la confiance est une condition préalable au bon fonctionnement de la communauté internationale.  Sans la confiance, a dit le Président, la meilleure des institutions serait incapable de fonctionner.

Cette question essentielle de la confiance était au cœur des sommets tenus cette semaine, à New York, sur le développement durable, en général, et le climat, en particulier.  Dans les deux cas, le cadre formel nécessaire était déjà là et pourtant, malgré les engagements pris en faveur du Programme 2030 et de l’Accord de Paris, les résultats restent maigres. 

Cette incapacité à tenir les promesses sur des sujets aussi graves ne manque pas d’éroder la confiance des citoyens dans leurs leaders.  Hier, le Secrétaire général a réclamé des actes, pas des paroles, a rappelé le Président, ajoutant qu’il nous faut des résultats pour réellement bâtir la confiance en l’avenir.

L’objectif 13 du Programme 2030 relatif à l’action en faveur du climat, est l’un des plus urgents, a souligné le Président, car l’impact des changements climatiques se fait déjà ressentir et rend tous les objectifs de développement durable plus difficiles à atteindre.  Même si nous cessions totalement d’émettre du CO2 demain, nous subirions encore les effets des changements climatiques pendant des décennies, a-t-il rappelé.  Des résultats sont aussi indispensables dans le domaine de l’adaptation, mais cela ne doit pas nous détourner des efforts visant à prévenir de nouveaux dégâts et de réduire les émissions.  « Nous ne pouvons attendre que d’autres bougent les premiers », a-t-il insisté.

L’autre sujet de préoccupation concerne la confiance dans les institutions, qui s’est diluée ces dernières années.  Se lamenter passivement de la crise du multilatéralisme ne va pas nous aider, a jugé le Président.  C’est à nous de restaurer la confiance dans les institutions; à nous de donner forme à l’ordre international et l’ONU doit d’ailleurs montrer qu’elle mérite la confiance de ses États Membres.  La Finlande, a dit le Président, soutient donc sans réserve les réformes du Secrétaire général mais là encore, seuls les résultats comptent. 

La perte de confiance dans les institutions et les cadres internationaux est particulièrement inquiétante quand il s’agit du contrôle des armes, notamment des armes nucléaires, avec l’effondrement du Traité sur les missiles de portée intermédiaire et les incertitudes sur l’avenir du nouvel Accord START.  « Nous perdons nos instruments de contrôle », s’est alarmé le Président. 

La confiance entre les États et entre les individus reste la base élémentaire de la paix et de la sécurité, sinon les risques de conflit augmentent et une fois qu’un conflit a éclaté, il faut de nouveau rétablir la confiance avant de pouvoir le résoudre.  Le Président a donc exhorté à des efforts pour trouver une sortie de crises au Moyen-Orient, en Afrique et en Ukraine.  La Finlande est toujours prête à prêter ses « bons offices », a-t-il affirmé.

À l’approche du vingt-cinquième anniversaire de la Déclaration de Beijing, « le document le plus progressif » en matière de promotion des droits des femmes, il n’y a guère matière à se réjouir, s’est lamenté le Président, constant « avec inquiétude » la remise en cause des droits à la santé reproductive et sexuelle.

Le Prince ALBERT II de Monaco s’est d’abord attaché à la question des changements climatiques en insistant sur l’appel que vient de nouveau de lancer la jeunesse du monde et sur « l’angoisse sans précédent, mais surtout l’immense espoir » face à l’avenir dont elle est porteuse et qui doit « nous pousser à un véritable changement ».  Il nous faut transcrire ces messages dans nos politiques pour y répondre de façon courageuse et déterminée, a-t-il ajouté. 

Monaco s’est engagé sur la voie de la neutralité carbone et se donne les moyens d’y parvenir car seule une politique volontariste permettra de surmonter les contraintes d’un territoire qui accueille chaque jour plus du double de sa propre population, a ajouté le Prince Albert II, qui a notamment précisé que son pays vient de rejoindre la Coalition des ministres des finances pour l’action climatique et entend assumer sa part en participant à la première reconstitution du Fonds vert pour le climat.  Monaco entend en outre accorder « le même degré d’urgence » à la préservation de la biodiversité et à la lutte contre les changements climatiques.  Le Prince a également mis l’accent sur le rôle des forêts et plus encore sur celui de l’océan, jugeant « accablant » le rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’océan et la cryosphère dans le contexte des changements climatiques.  Monaco a « historiquement fait le choix de soutenir la science », a-t-il ajouté, jugeant essentiel que les politiques à mettre en œuvre puissent se fonder sur les connaissances scientifiques les plus fines possibles. 

Albert II a ensuite défendu le multilatéralisme, affirmant que « nous relèverons ensemble les nombreux défis auxquels nous sommes confrontés, ou nous les perdrons individuellement ».  Il a rappelé que l’avenir commun passe par le développement durable.  Estimant que le premier cycle de mise en œuvre des objectifs fixés avait montré des progrès dans des domaines clefs et des évolutions favorables, notamment dans la lutte contre la pauvreté, il a toutefois rappelé que l’environnement se dégrade « à un rythme alarmant », que le nombre de personnes souffrant de la faim augmente et que plus de la moitié de la population mondiale reste privée de soins de santé essentiels.  Monaco, a-t-il expliqué, agit dans le cadre des exigences du développement durable, ce qui suppose une société plus inclusive. 

Le Prince a rappelé la nécessité d’appréhender de manière globale les espoirs mais aussi les risques que portent la quatrième révolution industrielle et l’intelligence artificielle, notamment en matière de sécurité et de développement des inégalités.  Il a cité en exemple le lancement, en avril dernier, du programme « Extended Monaco » qui engage la Principauté sur la voie d’une « transition numérique d’une ampleur inégalée tout en accordant une attention particulière à la notion de responsabilité et de durabilité ».

Albert II a conclu en réaffirmant la foi de son pays dans les institutions multilatérales, auxquelles les États doivent leur « capacité à transcender les antagonismes et établir des normes pour gérer les interdépendances ».  Qu’il s’agisse de la préservation de l’environnement, de la lutte contre le terrorisme ou du développement social, les nouveaux défis nécessitent des changements de paradigme et des financements qui sont hors de portée de chaque État Membre mais ne sont pas irréalisables si nous nous y attelons dans la solidarité au service de l’humanité, a-t-il conclu.

M. MAHAMADOU ISSOUFOU, Président du Niger, a estimé que le multilatéralisme ne progresse qu’à l’issue de conflits sanglants comme le montrent les traités de Westphalie (1648), de Vienne (1815) et la création de la Société des Nations et de l’ONU après les deux guerres mondiales.  Il s’est livré à un plaidoyer en faveur du multilatéralisme qu’il a conclu en affirmant que « les intérêts nationaux sont mieux défendus dans la coopération que dans l’affrontement ».

Il a brossé le portrait inquiétant d’une situation internationale dominée par « la course aux armements, les tensions commerciales, la montée des populismes et de la xénophobie, l’accroissement des inégalités, l’augmentation spectaculaire des flux migratoires », menaces auxquelles viennent s’ajouter celles des organisations terroristes et criminelles ainsi que le réchauffement climatique.

Pour y faire face, le Président a insisté sur la nécessité de réformer l’ONU et en particulier le Conseil de sécurité, mais aussi l’Assemblée générale et l’ECOSOC.  Il a aussi prôné une réforme de la gouvernance économique mondiale et de ses principales institutions –Organisation mondiale du commerce (OMC), Fonds monétaire international (FMI) et Banque mondiale– sans laquelle la réalisation des objectifs de développement durable ne sera pas atteinte à l’horizon 2030.  Il a rappelé que l’Afrique a besoin de 600 millions de dollars par an pour réaliser ces objectifs et estimé que pour l’instant, les efforts sont insuffisants.

Le Président a également insisté sur la nécessité pour l’Afrique de réaliser son Agenda 2063 et s’est réjoui du lancement à Niamey, le 7 juillet dernier, de la phase opérationnelle de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf).  Il a souligné la nécessité d’une réponse multilatérale aux défis lancés par les organisations terroristes et criminelles au Sahel et dans le bassin du lac Tchad.  « La sécurité est un bien public mondial », a-t-il estimé.  « En mettant en place des coalitions fortes de lutte contre le terrorisme en Afghanistan, en Iraq et en Syrie, la communauté internationale l’a bien compris », a-t-il constaté, regrettant dans le même souffle un manque de mobilisation face à la crise au Sahel et dans le bassin du lac Tchad, des crises « amplifiées » par la crise libyenne, dans laquelle la communauté internationale porte selon lui « de graves responsabilités ».

Il exhorte la communauté internationale à trouver une solution urgente à la crise libyenne en désignant un envoyé spécial conjoint ONU-Union africaine (UA), en renforçant les armées, les services de renseignement des États Membres, la Force mixte multinationale contre Boko Haram et la Force conjointe du G5 Sahel qu’il a souhaité voir placée sous le Chapitre VII de la Charte.

Le Président a salué l’initiative franco-allemande pour la mise en place du Partenariat pour la stabilité et la sécurité au Sahel et a remercié les partenaires internationaux qui soutiennent le Niger, notamment au sein de l’Alliance Sahel dédiée au développement.  Il a cependant appelé à une harmonisation des efforts afin d’obtenir de meilleurs résultats.

M. Issoufou a enfin exhorté tous les États Membres à appliquer les conclusions du Sommet Action Climat tenu hier.  « Nous n’avons pas de planète bis », a-t-il martelé.  « Nos engagements immédiats conditionnent la survie de l’humanité. »  Il a évoqué les actions mises en place par le Niger et appelé au soutien de la communauté internationale. 

Il a aussi formulé le vœu qu’en 2022, au moment du Forum d’examen de la mise en œuvre du Pacte sur les migrations, « des décisions hardies » seront prises pour s’attaquer « aux causes profondes » des migrations: « pauvreté, changements climatiques et insécurité ».

Rappelant la célébration à venir du soixante-quinzième anniversaire de la libération de son pays du joug de l’oppression et de la tyrannie, le Roi WILLEM-ALEXANDER des Pays-Bas a expliqué que sa liberté est à jamais liée à la coopération avec d’autres pays.  Il s’est d’ailleurs dit convaincu qu’une collaboration rapprochée avec un partenariat d’États offre les meilleures garanties de liberté, de sécurité et de prospérité pour tous.  La lutte contre la pauvreté est servie au mieux en joignant les forces au niveau international.  Et nous sommes convaincus qu’il est essentiel de le dire clairement, ici, à l’Assemblée générale, au vu de la pression exercée sur cette coopération, a affirmé le Roi, qui a appelé à « chérir » le système multilatéral ainsi que ses accords et règlements internationaux.

Le Chef d’État a ensuite appelé à écouter la voix des jeunes, qui appellent de leurs vœux un monde équitable, propre et durable, libre de violence et d’oppression et à l’abris du besoin, jugeant essentiel de consacrer « toutes nos énergies » pour le réaliser.  Le Roi Willem-Alexander s’est cependant inquiété du fait que dans certains pays et régions, les jeunes risquent de perdre espoir dans l’avenir, citant notamment la situation au Venezuela, « pays voisin de la partie caribéenne de notre Royaume ».  Il a appelé à sortir de l’impasse par l’intermédiaire d’élections libres et équitables.

Le Roi Willem-Alexander s’est aussi inquiété du manque de respect pour la diversité, les droits des minorités et l’égalité entre les sexes.  Il a fait part de son attachement à la liberté de religion et de pensée, pour ensuite se féliciter du fait que les droits des LGBTI et autres communautés minoritaires sont prescrits par la loi dans de plus en plus de pays.  Mais au final, a-t-il tempéré, les mots doivent se traduire en actes.

Il a aussi souligné que la réalisation des objectifs de développement durable dépend de la protection des droits de l’homme et a rappelé la candidature des Pays-Bas au Conseil des droits de l’homme pour la période 2020-2022.  Appelant au respect du droit à la vie de chacun, il a de plus plaidé pour l’abolition de la peine de mort dans le monde.

Tournant ensuite son attention sur les souffrances des victimes de la guerre et de la violence, le Roi Willem-Alexander a fait part de son appui à l’initiative Action pour le maintien de la paix et a appelé à une action effective pour combattre le terrorisme et ses causes.  Les Pays-Bas sont également déterminés à combattre l’impunité et organiseront cette semaine un événement visant à encourager la poursuite pénale des combattants de l’EIIL, « de préférence dans les régions où ils ont commis leurs atrocités ».  Le Chef d’État a en outre souligné qu’en vertu de la résolution 2166 (2014) du Conseil de sécurité, tous les pays, « y compris la Russie », doivent coopérer avec les efforts visant à établir la vérité sur le crash du vol MH17, le 17 juillet 2014.

Poursuivant, le Roi Willem-Alexander a prévenu qu’au rythme actuel, les Objectifs de développements durables ne seront pas atteints d’ici la date butoir de 2030.  Il ne s’en est pas moins enorgueillie de l’énorme bond en avant réalisé en l’espace d’une génération pour combattre la pauvreté extrême.  Il a aussi parlé des changements climatiques, « une des plus grandes menaces à la réalisation des objectifs de développement durable ».  La coopération internationale n’a jamais été aussi urgente pour préserver l’avenir de la planète, a souligné le Roi pour qui les changements climatiques ne pourront être combattus qu’en « travaillant ensemble ».

Il a reconnu que la transition à une économie durable et circulaire ne sera pas aisée et a appelé les États à unir leurs forces et partager leurs savoirs et expériences.  Il a expliqué que l’ensemble de la société des Pays-Bas s’était unie pour atteindre l’objectif de diviser par deux les émissions d’ici à 2030, et qu’un partenariat avait été lancé avec le Costa Rica pour aider les pays en développement qui souhaitent revoir à la hausse leurs ambitions climatiques.  Il a ensuite fermement exhorté le secteur privé à faire de l’écologisation une priorité.  Il a aussi mis en avant l’expérience de son pays en matière de gestion de l’eau qui en fait un « partenaire expert » pour quiconque cherche à améliorer la protection contre les inondations.

Évoquant la célébration, l’an prochain, du soixante-quinzième anniversaire de l’ONU, le Roi Willem-Alexander s’est interrogé sur la manière d’assurer sa pertinence.  « Après les horreurs de deux guerres mondiales, nous avons créé un système multilatéral sur la base du dialogue et de la coopération.  Un système qui place les accords et règlements internationaux au-dessus de l’ultranationalisme et des sphères d’influence basées sur le pouvoir ».  Et ainsi, s’est-il félicité, nous avons amélioré la vie de milliards de personnes et fait de notre monde un monde plus sûr.  À ses yeux, un système multilatéral effectif est la meilleure garantie pour la paix, la stabilité et le développement durable.

Le Roi Willem-Alexander n’en a pas moins reconnu que des réformes sont nécessaires pour empêcher que le système ne s’enlise et ne perde sa crédibilité et a appelé à mettre en œuvre d’urgence les réformes lancées par le Secrétaire général.  Mais pour ce faire, a-t-il ajouté, il est essentiel que les États Membres honorent leurs engagements financiers, que les organisations de l’ONU améliorent leur coopération et que les ressources financières soient dépensées « intelligemment et efficacement ».

« L’ONU aura un avenir inclusif ou pas d’avenir du tout », a-t-il lancé, appelant à faire entendre la voix des petits États insulaires « dont les préoccupations sont trop souvent tombées sur de sourdes oreilles ».  Ravivons l’ONU pour qu’elle soit adaptée au monde actuel, a-t-il conclu.

M. MAURICIO MACRI, Président de l’Argentine, a tenu à décrire dès le début de son allocution la nouvelle direction prise par son pays dans les relations internationales.  Une direction, a-t-il précisé, marquée par un rôle constructif face aux défis mondiaux, une recherche du consensus animée par la conviction que le monde représente bien plus une opportunité qu’une menace pour l’Argentine, un pays, a dit le Président, qui revendique sa place dans l’ordre international du XXIe siècle. 

Pour illustrer ses propos, le Président a invoqué la contribution de son pays au multilatéralisme, dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), du Groupe des Vingt (G20) et de la coopération Sud-Sud, dont les sommets ou conférences se sont tenus en Argentine ces trois dernières années.  Ce rôle positif est visible dans notre ferme engagement en faveur de la non-prolifération, « pilier du consensus démocratique en Argentine ».  Le Président, qui a rappelé que son pays présidera la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en 2020, présentera son candidat au poste de directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). 

Rappelant l’organisation, cette année, par son pays, de la seconde Conférence ministérielle de l’hémisphère Sud sur la lutte contre le terrorisme, le Président Macri a mis en avant les mesures nationales contre le financement du terrorisme, comme le gel des avoirs suspects qui a permis de bloquer des fonds à des personnes liées au Hezbollah.  Motivée par les plaies encore ouvertes du terrible attentat de 1994, l’Argentine demande, une nouvelle fois, à l’Iran de coopérer avec ses autorités judiciaires et prie les pays amis de priver les suspects de l’immunité diplomatique. 

De même, a ajouté le Président Macri, l’Argentine poursuit sans hésitation sa lutte contre le trafic de drogues et le blanchiment d’argent: des réseaux de narcotrafiquants ont été démantelés et une somme de 8,5 milliards de dollars a été gelée.  Le pays travaille aussi à la création d’un organisme juridique régional capable d’affronter la criminalité transnationale organisée en Amérique du Sud et dans les Caraïbes. 

Outre la lutte contre les changements climatiques et les campagnes spécifiques sur des questions de société comme l’égalité entre les sexes et la prévention de la violence envers les femmes, l’Argentine entend faire valoir ses valeurs dans ses relations internationales.  C’est dans ce cadre qu’elle dénonce la très grave situation des droits de l’homme au Venezuela.  Le Président n’a pas manqué de réaffirmer les droits imprescriptibles de l’Argentine sur les îles Malvinas, les Îles Géorgie du Sud et Sandwich du Sud et les espaces maritimes avoisinants.  Il s’est dit prêt à des négociations bilatérales avec le Royaume-Uni et a décrit les divers domaines de coopération comme la pêche et l’exploration scientifique. 

M. EGILS LEVITS, Président de la Lettonie, a fait un bref rappel historique de la lutte de son pays aux côtés des deux autres États baltes, la Lituanie et l’Estonie, pour recouvrer leur indépendance en 1991, saluant les États qui n’ont jamais reconnu la légitimité de l’occupant.  Nos indépendances ont été le fruit des mouvements de masse dont la lutte était enracinée dans le droit international.  C’était le résultat d’une lutte non violente pour la liberté, un fait rare dans l’histoire, s’est-il félicité.  C’était, ni plus ni moins, le triomphe du droit international. 

Pour cet ancien juge qui a exercé pendant 25 ans à la Cour européenne des droits de l’homme et à la Cour de justice européenne, tôt ou tard, la justice prévaut toujours.  C’est pourquoi, a-t-il expliqué, la justice et les règles de droit aussi bien au niveau national qu’international sont si importantes pour la Lettonie.  Le Président a d’ailleurs annoncé le dépôt aujourd’hui de la déclaration d’adhésion de son pays au Statut de Rome, un autre signe, s’il en est, du ferme engagement de la Lettonie aux règles de l’ordre international.  Le Président letton a insisté sur la nécessité d’un ordre multilatéral fort, inclusif et basé sur les règles pour le maintien de la paix et la sécurité internationales. 

Cela doit être notre responsabilité partagée et les Nations Unies doivent demeurer au centre de cet ordre, car, a-t-il expliqué, l’expérience a montré que nos objectifs ne peuvent vraiment être atteints qu’avec une coopération dans les enceintes multilatérales.  L’ordre multilatéral exige également le respect par tous les États de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale tels que le dit la Charte des Nations Unies.  Le Président a donc pointé du doigt le non-respect par la Fédération de Russie des principes du droit international, alors que la violation de l’intégrité territoriale de l’Ukraine et de la Géorgie se poursuit.  Un tel mépris du droit international ne doit pas être accepté comme la « nouvelle norme ». 

Le Président Levits a aussi évoqué les menaces hybrides qui pèsent sur les démocraties, comme en attestent les ingérences dans les processus électoraux, le chantage énergétique ou encore les cyberattaques.  Il a fait part, à cet égard, de la disposition de son pays à partager son expérience dans la promotion d’un cyberespace responsable.  Il a souligné la nécessité de développer des technologies dans un cadre responsable avec l’obligation d’être comptable de ses actes.  Il a dès lors, encouragé l’ONU à promouvoir des discussions sur la protection des données personnelles dans le cyberespace, du point de vue éthique et normatif.  Il a souligné l’importance du rapport du Groupe de haut niveau sur la coopération numérique et programme du Secrétaire général sur le désarmement qui traitent des préoccupations principales en matière de sécurité technologique.  Il y a vu un moyen pertinent pour faire avancer les idées. 

Le Président letton a également abordé la problématique des changements climatiques et a appelé une coopération par-delà les frontières.  Les technologies et l’innovation peuvent jouer un rôle majeur pour protéger la planète et la connectivité peut permettre de consommer moins de ressources tout en étant plus efficace.  La Lettonie a déjà réduit ses émissions de gaz à effet de serre de près de 60% par rapport aux niveaux de 1990.  Mais ce n’est pas assez et elle soutient l’objectif d’une neutralité carbone totale.  La Lettonie, a conclu le Président, demeure un fervent défenseur du Programme 2030 et a modifié sa Stratégie nationale de développement à long terme.  Dans cette perspective, l’égalité des genres et la promotion des droits des femmes ne sont pas seulement des choses à faire mais un objectif pertinent pour le développement économique.  La Lettonie est d’ailleurs un des rares pays à avoir comblé le fossé entre les hommes et les femmes dans les domaines de la santé et de l’éducation. 

Mme ZUZANA ČAPUTOVÁ, Présidente de la Slovaquie, qui s’exprimait pour la première fois devant l’Assemblée générale, a tenu à saluer les grandes réalisations des Nations Unies lesquelles reposent toutes sur le respect des règles et des principes, qui doivent être accompagnés de la confiance et de la responsabilité.  Pour elle, la confiance mutuelle permet de maintenir nos sociétés ensemble. 

Elle a identifié, à cet égard, deux défis à relever: d’abord le fait que les règles et principes soient soumis à une pression considérable.  En tant qu’avocate et activiste de la défense de la justice, la Présidente s’est s’inscrite en faux contre ceux qui, sous couvert de la liberté d’expression, sèment la haine et la désinformation.  Mais lutter contre les extrémismes ne signifie pas supprimer le droit des minorités. 

La Présidente a donc défendu une ONU forte, gardienne des règles et de « notre confiance ».  Elle a reconnu les difficultés à s’accorder sur de nouvelles règles, comme sur les changements climatiques, les nouvelles technologies ou encore l’intelligence artificielle.  En ces temps difficiles, les gouvernements responsables doivent tirer leur légitimité de la confiance de leur peuple.  Il nous faut des responsables qui agissent loin de tout populisme et qui maintiennent leur « égo » sous contrôle.  En somme, des gouvernants qui donnent l’espoir que la justice existe toujours, a-t-elle dit.  Aux leaders qui parlent de mettre l’intérêt national avant l’intérêt général, elle a dit: être patriote repose moins sur un nationalisme égoïste que sur la coopération. 

La Présidente s’est montrée, dans ce contexte, particulièrement préoccupée par le déni des changements climatiques.  Les faits scientifiques sont clairs, a-t-elle rétorqué.  Les changements climatiques sont là et nous manquons de temps.  Mais si nous agissons maintenant, nous pouvons réduire les émissions de gaz à effet de serre.  Si nous pouvons réussir dans nos pays, grâce notamment aux activistes et ONG, il n’y a pas de raison d’échouer à l’échelle mondiale. 

Il faut se départir de cette peur et renoncer à « nos vieilles mentalités » selon lesquelles l’approche écologique est coûteuse et non rentable, a-t-elle dit, partageant l’expérience concluante de son pays qui a décidé de fermer toutes ses mines de charbon dans ce qui est une mesure impensable pendant des années par peur du coût politique.  Mais, s’est réjouie la Présidente, nous avons finalement eu le courage de prendre cette difficile décision.  La Slovaquie, a-t-elle annoncé, réaffirme son ferme engagement d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. 

M. KASSYM-JOMART TOKAYEV, Président du Kazakhstan, a tout d’abord salué le rôle important que joue l’ONU pour garantir le développement des relations entre les civilisations.  De son point de vue, cependant, une nouvelle réalité mondiale se fait jour, influencée par quatre facteurs principaux, à commencer par le nombre croissant des conflits non résolus.  Ces conflits font revivre d’anciennes divisions et en créent de nouvelles, entraînant les puissances mondiales dans une escalade militaire.  En deuxième lieu, a-t-il observé, nous souffrons tous du manque de confiance entre les acteurs mondiaux et régionaux, ce qui conduit à une érosion de l’architecture actuelle de sécurité et, par voie de conséquence, à une nouvelle course aux armements.  La situation est encore aggravée par les sanctions, les guerres commerciales et l’intense rivalité qui règne dans les domaines de l’espace, de la cybertechnologie et de l’intelligence artificielle, a déploré le Chef de l’État. 

Troisième facteur majeur, selon lui, la combinaison des inégalités sociales, économiques et technologiques croissantes, des disparités entre le Nord et le Sud ainsi que la crise émergente de la dette mondiale provoquent une grave altération du paysage économique mondial.  De fait, a-t-il souligné, nous assistons à la montée du protectionnisme et des mesures nationalistes qui sapent les partenariats et la coopération entre nations.  Quatrièmement, a poursuivi M. Tokayev, la dégradation de l’environnement est devenue l’un des principaux facteurs de déstabilisation mondiale.  L’impact des changements climatiques en Asie centrale est tel que la région fait face à des défis dramatiques comme la désertification, la fonte des glaciers et la raréfaction de l’eau potable et d’irrigation, a-t-il averti, assurant que, dans cet environnement complexe, son pays mène une politique fondée sur le développement inclusif et durable, le dialogue et l’action pacifique.

Soulignant ensuite que parvenir à un monde exempt d’armes nucléaires demeure la priorité du Kazakhstan, M. Tokayev s’est déclaré convaincu que ces armes ne constituent plus un atout mais un danger pour la paix et la sécurité mondiales.  Malheureusement, a-t-il déploré, « certains pays s’en remettent encore à des calculs stratégiques de défense en matière d’armement nucléaire, ce qui force leurs rivaux à développer des ripostes asymétriques ».  Sous le leadership de son premier Président, M. Nursultan Nazabayev, le Kazakhstan a fermé le site d’essais nucléaires de Semipalatinsk et a volontairement renoncé au quatrième arsenal nucléaire de la planète, devenant depuis un champion du désarmement et de la non-prolifération nucléaire, s’est enorgueilli M. Tokayev. 

Parmi les contributions de son pays à cette « noble cause », il a cité la création de la seule zone exempte d’armes nucléaires d’Asie centrale, l’accueil sur son sol de la Banque d’uranium faiblement enrichi de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), l’adoption d’une résolution de l’Assemblée générale établissant une Journée internationale contre les essais nucléaires et la récente ratification du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.  À cet égard, il a estimé que les questions liées au Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien et à la dénucléarisation de la péninsule coréenne ne devraient être réglées que par des moyens politiques. 

S’agissant des « développements alarmants » de la situation au Moyen-Orient, le Président kazakh a, là aussi, plaidé pour des actions bilatérales et multilatérales pour renforcer la confiance et le respect entre les parties.  En guise d’exemple de cet engagement en faveur du dialogue inclusif, il a rappelé que le Kazakhstan fournit une plateforme aux négociations intersyriennes.  Grâce au processus d’Astana, qui vient compléter les négociations de Genève, une cessation des hostilités a pu être effective dans ce pays, a-t-il souligné, saluant également la création de zones de désescalade.  Relevant que les conflits génèrent le terrorisme et l’extrémisme, il a estimé que ces défis ne peuvent être surmontés que par une action commune via le Réseau mondial de lutte contre le terrorisme, sous les auspices de Nations Unies. 

Pour M. Tokayev, la capacité de l’ONU à accomplir sa mission se heurte aujourd’hui à de graves difficultés.  Il importe, selon lui, de soutenir la « vision claire et audacieuse » du Secrétaire général en faveur d’une réforme de l’ONU.  Il a aussi dit prêter une attention particulière à la mise en œuvre du Programme 2030, tout en souhaitant « éviter le piège des pays à revenu intermédiaire ».  Les objectifs de développement durable sont intégrés à 80% dans les programmes stratégiques du Gouvernement kazakh, a-t-il assuré, avant de conclure sur sa volonté de poursuivre la transformation de son pays sous le triple prisme de « la continuité, la justice et le progrès ».  Il s’est dit convaincu qu’un président « ferme et visionnaire », un parlement influent et un gouvernement responsable constituent pour le Kazakhstan la garantie d’un avenir « pacifique et durable ». 

M. ANDRZEJ DUDA, Président de la Pologne, a souhaité centrer son message sur trois concepts, qui devraient aussi servir de ciment à toute la communauté internationale: la paix grâce au respect de la loi, la protection de l’environnement grâce à la coopération et à la coresponsabilité, et l’aide sociale grâce à l’engagement en faveur du développement durable.

Le Président a rappelé que le 1er septembre, Varsovie a commémoré le quatre-vingtième anniversaire du déclenchement de la Deuxième Guerre mondiale, avec l’attaque de son pays par deux États totalitaires et deux idéologies criminelles.  En dépit de cette terrible leçon et des progrès de la civilisation, nous voyons encore, aujourd’hui, au XXIe siècle, des actes d’une barbarie incompréhensible: nettoyages ethniques, meurtres de masse et même génocides.  De plus, a-t-il souligné, des atteintes à la souveraineté et à l’intégrité territoriale des États ont toujours lieu et des frontières sont toujours déplacées par la force. 

Le Président a relevé certaines analogies historiques: il y a toujours la tentation « de gagner du temps » dans la passivité et la soumission, parfois même des pourparlers avec l’agresseur.  Le Président a dit se méfier de ces pourparlers qui ne sont que la défense d’intérêts particuliers, souvent économiques, et de ces marques de solidarité avec les victimes d’une agression à l’aide de mots grandiloquents.

Personne n’a retenu la cruelle leçon de la Deuxième Guerre mondiale et le principe qui a guidé la création des Nations Unies: « Plus jamais ça. »  Malheureusement, a déploré le Président, ces dernières années ont montré que la même tentation de négocier avec l’agresseur est toujours là.  Il est temps, s’est-il impatienté, de sortir de la léthargie, d’apprendre du passé et d’arrêter de répéter les mêmes erreurs.

Soulignant que chaque pays a un droit égal à l’autodétermination, le Président veut voir en son pays un champion de l’indépendance, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, que ce soit en Ukraine ou en Géorgie.  La Pologne ayant été si gravement affectée au siècle dernier, elle s’oblige au devoir moral de s’exprimer clairement sur cette question, ce qu’elle fait aujourd’hui, au nom de la paix et de la liberté, a dit le Président.

Alors que cette année met fin aux deux ans de la Pologne au Conseil de sécurité, le Président a déploré que pendant cette période, le droit international ait été autant défié et désavoué, alors même que c’est ce droit international qui est la base des principes tels que l’égalité souveraine des États, la justice, la responsabilité et la sécurité.  Les responsables de violations de ces principes doivent être tenus pour responsables.  Le droit international est l’outil le plus fort dont disposent les nations civilisées pour assurer une paix durable.  Il ne peut y avoir de paix sans droit, a martelé le Président.

La Pologne, a-t-il insisté, se veut immuablement du côté du droit et des victimes de la violence.  Le Président a souligné tout particulièrement quatre points et tout d’abord, le rôle indiscutable du droit international dans le maintien de l’architecture de sécurité globale et la protection des civils dans les conflits armés.  Il s’est ensuite attardé sur les droits de l’enfant, groupe le plus vulnérable face aux conséquences des conflits.  Il a aussi cité l’amélioration de la protection des personnes handicapées dans les conflits.  Le Président a d’ailleurs rappelé que c’est à l’initiative de son pays que le Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité sa toute première résolution sur cette question.  Enfin, il s’est attardé sur la protection des droits des minorités religieuses et la liberté de religion, face à la poussée de la violence et de la haine religieuse, dénonçant la propagation de la violence contre les chrétiens.

Le Président polonais a attiré l’attention sur la contribution significative de son pays au deuxième défi clef du monde contemporain, la protection de l’environnement, citant la COP24 qui s’est tenue à Katowice.  Les ambitions doivent être exprimées ensemble, c’est la seule façon de leur donner vie.  Après le Sommet Action Climat d’hier, le Président polonais a dit avoir déposé cinq initiatives visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre des ménages et des transports publics, à accélérer le reboisement, à adapter les villes aux changements climatiques et changer le profil économique d’une des régions les plus fortes économiquement de la Pologne, la Silésie.  Pour la Pologne, la politique environnementale doit être comprise comme une politique sociale.

Le Président a d’ailleurs prôné une discussion internationale sur le modèle moderne de la politique sociale, qui devrait, selon lui, se fonder sur le Programme 2030, à savoir responsabilité, solidarité et justice.  Il a ajouté que le concept de richesses communes doit être introduit dans le débat économique.  La responsabilité partagée doit être le point de départ des efforts pour assurer un meilleur avenir aux générations futures, a conclu le Président. 

Le Prince héritier ALOIS du Liechtenstein, a indiqué qu’en près de 300 ans d’existence, son pays n’a connu que la paix, des relations de bon voisinage et la stabilité politique.  Selon lui, la diplomatie « active » du Liechtenstein, l’un des États les plus petits d’Europe, a fortement contribué à sa survie.  « Sans nos connexions internationales, nous n’aurions jamais pu être reconnus en tant qu’État souverain », a insisté le Prince héritier, en référence à l’adhésion de son pays aux Nations Unies, en 1990, en tant qu’État Membre à part entière. 

Il y a 60 ans, a-t-il rappelé, le Liechtenstein était un pays pauvre d’émigration agraire, pourvu d’une économie faible et offrant des opportunités d’emploi limitées.  L’accès progressif du pays au rang de nation industrialisée, dotée d’une économie « diversifiée et innovante », a été rendu possible par l’ouverture des marchés mondiaux. 

Cependant, face à l’avènement d’un ordre mondial « plus instable et multipolaire », l’essor du protectionnisme, l’affaiblissement de la coopération internationale et l’érosion de l’état de droit, nous devons, a dit le Chef d’État, prôné le respect du droit international, pierre angulaire des Nations Unies.  En tant que petit État, a-t-il promis, nous serons toujours du côté de l’état de droit et contre la loi du plus fort.  Le Prince héritier a voulu que l’on tire les leçons de son pays, à savoir que les investissements dans la diplomatie, notamment au sein du forum onusien, bénéficient aussi aux États Membres sur le plan national.

Le souverain a souligné l’engagement du Liechtenstein en faveur des objectifs de développement durable, comme en témoignent les multiples initiatives innovantes impliquant le secteur privé.  Il a notamment cité la création, le 27 septembre prochain, d’un plan pour permettre au monde de la finance de lutter contre l’esclavage moderne et la traite des êtres humains. 

À l’heure où des normes communément admises, telles que les Conventions de Genève, sont régulièrement bafouées, le Prince héritier a estimé que la Cour pénale internationale (CPI) demeure la pierre angulaire de la lutte contre l’impunité.  « La performance de la Cour n’a pas toujours été à la hauteur de nos attentes », a-t-il toutefois reconnu, ajoutant que cette dernière pâtit de la montée de l’isolationnisme et du nationalisme.  Dans ce contexte, le souverain liechtensteinois a appelé les États Membres à aider la CPI à améliorer ses performances, pour qu’elle soit « moins vulnérable aux attaques politiques ».  Il a également souligné les efforts de son pays dans la lutte contre l’impunité pour les crimes commis durant le conflit syrien.  Il a notamment salué la création du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables.

M. MARTÍN VIZCARRA CORNEJO, Président du Pérou, a rappelé que, l’an dernier, dans cette même enceinte, il était venu s’exprimer sur la crise politique et institutionnelle que traversait alors son pays.  « À cette occasion, j’avais mis l’accent sur le fait que la corruption s’était érigée en cancer », s’est remémoré le Président.  Depuis lors, a-t-il indiqué, son gouvernement a lancé une réforme judiciaire et politique pour rétablir l’efficacité, le prestige et la légitimité des institutions nationales.  Il y quelques semaines à peine, a poursuivi le Chef de l’État, le Pérou a promulgué quatre « réformes clefs » sur le financement des partis politiques, la vie démocratique au sein des partis, la parité des élus et l’alternance des candidats à des mandats législatifs.  Au cours des 18 derniers mois, le Gouvernement a réussi à opérer une sortie de crise ordonnée et à lancer une « attaque frontale » contre la corruption enkystée à tous les niveaux de l’État, s’est-il enorgueilli, affirmant que son gouvernement respecte scrupuleusement le principe de la séparation des pouvoirs, l’état de droit, la liberté de la presse et l’indépendance de la justice. 

Le Président a en outre dit avoir soumis au Parlement un projet de loi pour avancer d’un an les élections générales.  « Je suis confiant que nous y parviendrons, pour le bien du pays », a-t-il déclaré.  Il a par ailleurs dénoncé la « rupture de l’ordre constitutionnel » et « l’enracinement d’un régime illégitime » au Venezuela.  Cette crise politique, institutionnelle et humanitaire a engendré un exode de plus de quatre millions de personnes, dont 900 000 ont trouvé refuge au Pérou.  Le Président a dit son intention de contribuer aux efforts internationaux pour rétablir la démocratie au Venezuela.  Il a toutefois estimé que la communauté internationale n’a toujours pas pris la pleine mesure de l’exode vénézuélien et a appelé les États Membres à remédier à cette situation.

Il s’est, à son tour, dit très attaché à la réalisation des objectifs de développement durable, en particulier l’objectif 16, qui vise à créer des sociétés plus pacifiques et ouvertes, dotées d’institutions transparentes et responsables.  L’essor économique du Pérou au cours de ces 20 dernières années nous a permis de réduire la pauvreté, a-t-il déclaré.  En tant que l’un des pays touchés par les feux de forêt des dernières semaines, le Pérou est également investi dans la lutte contre les changements climatiques, a poursuivi le Président, affirmant son intention de réduire la déforestation de 20% d’ici à 2021 et de 30% d’ici à 2030.  Il a aussi réaffirmé l’attachement du Pérou à la paix et à la sécurité internationales, en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité et Président du Comité contre le terrorisme.  Il a notamment salué l’adoption par le Conseil, durant la présidence péruvienne de juillet dernier, de la résolution 2482 (2019), qui précise la nature des liens entre terrorisme international et criminalité organisée. 

M. MACKY SALL, Président du Sénégal, a dit que cette session de l’Assemblée générale devait nous inviter à dynamiser les efforts multilatéraux pour l’éradication de la pauvreté, l’éducation de qualité, l’action contre les changements climatiques et l’inclusion.  Mais pour des millions de victimes de la guerre et du terrorisme, se pose d’abord la question existentielle de vivre en paix et en sécurité, a estimé le Président.  Au Sahel, s’est-il expliqué, des groupes terroristes continuent de semer la mort au quotidien, de provoquer des réfugiés et personnes déplacées par milliers et de détruire des services sociaux de base.  Parce que les périls transcendent les frontières, leur prise en charge ne saurait donc être fragmentée.  Le Président a appelé le Conseil de sécurité à doter la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) d’un mandat robuste et d’équipements adéquats pour la lutte contre le terrorisme au Sahel. 

Le Président a annoncé que le Sénégal s’est joint à l’initiative de la France et de la Nouvelle-Zélande pour l’appel à l’action de Christchurch pour éradiquer le contenu terroriste et extrémiste en ligne.  Il a invoqué le proverbe africain « l’arc-en-ciel doit sa beauté aux tons variés de ses couleurs » pour dire que la paix est aussi diversité et qu’il ne saurait pas y avoir de centre civilisationnel supérieur dictant aux autres la façon d’être et d’agir.  Toutes les cultures, toutes les civilisations sont d’égale dignité, a martelé M. Sall, expliquant que c’est la raison pour laquelle son pays a décidé de réaliser le Mémorial de Gorée en souvenir de la période sombre de l’esclavage mais aussi pour la coexistence pacifique des peuples, dans le respect de leur diversité. 

La paix n’est pas que l’absence de guerre, c’est aussi l’état d’esprit qui apaise et accommode, a poursuivi le Président.  Il a appelé, dans ce contexte, à la réconciliation entre les peuples palestinien et israélien.  Le dialogue est l’essence des Nations Unies et face aux menaces, face aux enjeux qui dépassent l’État-nation, c’est ici que s’expriment nos préoccupations, que se croisent nos idées et nos propositions pour résoudre nos problèmes communs, que convergent nos espoirs de compromis pour parvenir à nos fins communes. 

La foi dans le multilatéralisme, a dit le Président, ne prospère que dans le respect des règles et des engagements convenus.  Il a donc renouvelé son attachement au multilatéralisme et à une gouvernance mondiale réformée et inclusive, par une représentation plus équitable de l’Afrique au Conseil de sécurité.  Président en exercice du Comité d’orientation du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), M. Sall a voulu une autre vision du paradigme relationnel avec le continent, débarrassée des préjugés et fondée sur des partenariats rénovés et mutuellement bénéfiques.  « L’Afrique n’a pas besoin de tutelle.  L’Afrique a besoin de partenariats », a martelé le Président.  Il a dit vouloir des échanges plus équitables qui n’« exagèrent » pas la perception du risque de l’investissement, qui rémunèrent à leur juste prix les matières premières, qui protègent les droits des pays d’accueil comme les intérêts des investisseurs et qui favorisent la création de chaînes de valeurs locales. 

Le Président a demandé la réforme du système fiscal international pour que l’impôt soit acquitté là où l’activité crée de la richesse et du profit.  Il a aussi demandé une action plus ferme contre la fraude et l’évasion fiscales et contre le blanchiment d’argent et autres flux financiers illicites qui font perdre à l’Afrique plus de 100 milliards de dollars par an.  Il a invité à la mise en œuvre de l’Accord de Paris, dont l’objectif de 100 milliards de dollars par an, et au respect des engagements convenus à la troisième Conférence de reconstitution du Fonds du Partenariat mondial pour l’éducation de 2018 pour mobiliser 3,1 milliards de dollars. 

« Cette semaine de haut niveau nous met face à des défis importants », a observé M. GIUSEPPE CONTE, Président du Conseil des ministres de l’Italie, à l’entame de son intervention.  Ces défis, a-t-il dit, confirment qu’il nous faut « investir dans le multilatéralisme ».  À cet égard, le rôle des Nations Unies est « irremplaçable », tant en matière de lutte contre les changements climatiques, que de défense des droits de la personne ou de règlement des conflits et des différends commerciaux.  Ces questions, qui ont en commun le thème de l’inclusion, nous rappellent que l’être humain est au cœur de l’action de l’ONU, a poursuivi le dirigeant, plaidant en faveur d’efforts coordonnés pour faire face aux défis multiples auxquels nous sommes confrontés et corriger les dysfonctionnements de la mondialisation.  « Ce qui doit nous guider, c’est le respect de chaque individu.  Sans ce socle, le multilatéralisme devient une simple technique qui ne peut guider les valeurs fondamentales », a-t-il analysé, assurant que cet humanisme distingue l’action de son gouvernement.  « Notre objectif est d’avoir une démocratie véritablement humaine », a insisté M. Conte.

Sur le plan international, a-t-il dit, l’Italie préconise de régler les conflits en traitant les causes profondes de la déstabilisation.  Elle s’emploie également à promouvoir le développement durable, qui est au cœur de son programme productif.  « Quatre ans après l’adoption du Programme 2030, nous devons être ambitieux », a souligné M. Conte, avant de réaffirmer son engagement avec l’aide du secteur privé et de la société civile.  De l’ambition, il en faut aussi pour répondre aux changements climatiques, a-t-il poursuivi, appelant de ses vœux « une action collective urgente ».  Évoquant le risque d’effondrement d’un glacier du Mont-Blanc, du côté italien, il y a vu « une catastrophe à laquelle nul ne peut rester indifférent ».  C’est pourquoi, a-t-il souligné, « j’encourage la mobilisation des citoyens, et singulièrement des jeunes ».  À ses yeux, l’Accord de Paris est « un point de départ essentiel » mais nous devons surtout être « conscients du devoir moral que nous avons à l’égard de nos enfants, pour leur transmettre une planète en bon état ».  L’Italie, a-t-il fait remarquer, a déjà atteint les objectifs de l’Union européenne en matière d’émissions de gaz à effet de serre et entend parvenir à l’objectif « zéro émission » d’ici à 2050. 

Malgré ces efforts, « nous sommes bien conscients que tout cela ne peut suffire », a concédé M. Conte.  Il faut, selon lui, un changement radical dans nos modèles culturels.  C’est la raison pour laquelle la défense de la biodiversité et le développement durable sont désormais inscrits dans les principes fondamentaux de la Constitution italienne, a-t-il indiqué.  Ceci implique de renoncer au « concept de propriété » qui nous donne l’illusion que nous pouvons agir de manière exclusive alors que « nous ne sommes que les gardiens d’une planète que nous devons céder aux générations à venir ».  Cette vision des choses implique un partage des responsabilités au niveau international et il en va de même avec les migrations, entre les pays d’origine, de transit et de destination.  Cet objectif ne peut devenir concret que s’il est guidé par un « principe de répartition entre les pays ».  Dans la phase d’urgence que connaît l’Union européenne, l’Italie appelle à un « partenariat entre tous les États Membres » car, si elle a toujours joué son rôle en matière d’accueil et de réinstallation, elle « ne peut plus être seule ». 

En tant que membre du Conseil des droits de l’homme, l’Italie est particulièrement inspirée par le modèle des droits de l’homme pour la paix, a assuré le Président du Conseil des ministres.  Dans cet esprit, l’Italie participe aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies en apportant sa technologie et ses personnels.  Elle estime cependant que la communauté internationale devrait avoir recours, de façon plus systématique, à des moyens pacifiques pour régler les conflits, notamment via la médiation et la participation de toutes les composantes de la société, notamment les femmes et les jeunes.  Dans la Méditerranée, a relevé le Président du Conseil, l’Italie soutient des solutions pacifiques propices au développement de la région.  C’est ce qui anime son action à l’égard de la Libye, a-t-il dit, renouvelant son engagement en faveur d’une « Libye démocratique », ce qui ne deviendra possible que si le cessez-le-feu et l’embargo sur les armes sont respectés. 

De même, l’emplacement de l’Italie dans la Méditerranée implique un engagement fort de sa part, a poursuivi M. Conte, soulignant la contribution de son pays et de l’Union européenne au développement socioéconomique du continent africain, du Sahel à la Corne de l’Afrique.  Cela passe également par une action collective et déterminée pour combattre le terrorisme et l’extrémisme violent, a-t-il affirmé, appelant tous les États à prendre en priorité les mesures nécessaires pour empêcher la propagation de la haine.  Soucieux de la stabilité mondiale, le Président du Conseil a considéré le Plan d’action global commun sur le nucléaire iranien comme « un instrument clef de la non-prolifération ».  Pour le dirigeant, il est dans l’intérêt de l’ensemble de la communauté internationale de « laisser ouvertes les voies du dialogue avec Téhéran ».  Un autre objectif commun devrait être de diminuer les tensions dans le Golfe, a-t-il renchéri. 

Dans ce contexte mondial, les Nations Unies sont « le seul point de référence » qui peut aider l’humanité à faire face aux défis complexes auxquels se heurte la communauté internationale aujourd’hui, a constaté le Chef du Gouvernement italien.  Se disant favorable aux plans de réforme de l’Organisation défendus par le Secrétaire général, M. Conte a jugé que la communauté internationale ne réussira que si elle ne commet pas « l’erreur d’agir en recherchant des consensus à court terme ».  À ses yeux, il faut construire un avenir et s’appuyer pour cela sur la voix des jeunes.  « Notre devoir est de l’entendre et de la transformer en mesures concrètes. » 

Au moment même où je m’adresse à vous, une femme enceinte originaire du Sahel est à bord d’une embarcation de fortune risquant sa vie pour traverser la mer, à la recherche d’un avenir meilleur, a d’emblée déclaré M. PEDRO SÁNCHEZ PÉREZ-CASTEJÓN, Président du Gouvernement d’Espagne.  Cette femme, qui fuit la faim et la sécheresse, sait pertinemment bien que la fin de son expédition est loin d’être assurée, car la Méditerranée est devenue le plus grand cimetière marin au monde.  Mais elle n’a pas d’autre choix!

De l’autre côté de l’Atlantique, une famille du Guatemala traverse à pied la frontière nord du Mexique, car elle est si désespérée qu’un mur, aussi haut soit-il, ne peut se mettre en travers de sa quête de paix, de nourriture et d’un abri pour ses enfants.  Alors que je vous parle, a dit le Président, un robot est en train d’opérer avec une très grande précision un patient dans un hôpital à Tokyo, le sauvant aujourd’hui d’une mort qui était certaine, il y a quelques années.  À quelques pas de là, dans la salle d’attente, ses proches regardent à la télévision une famille waiapi inconsolable, pleurer sa maison et son village détruits par les flammes qui ravagent la forêt amazonienne.  Dans l’agitation des villes, de Manhattan à Londres, en passant par Madrid, un livreur parmi des milliers vient de recevoir une commande lancée à partir d’un téléphone portable.  Il recevra en échange de sa livraison quelques pièces mais il n’a pas d’autre choix. 

Ce que je viens de décrire, s’est expliqué le Président, peut ressembler à des extraits de séries télévisées.  Mais malheureusement, c’est la réalité quotidienne des gens et cette réalité nous presse d’agir.  C’est l’ampleur des défis mondiaux auxquels nous faisons face aujourd’hui: l’urgence climatique, la faim, la pression migratoire, la révolution technologique et numérique, les inégalités et les discours de haine.  Le Président a lancé un message simple: il faut agir car notre terre est en train de saigner.  Reprenant à son compte les propos du Secrétaire général, il a appelé à remplacer les mots par des engagements.  Nous savons d’ores et déjà quel monde nous voulons laisser à nos enfants: un monde viable, juste et équitable et une communauté internationale engagée dans un nouveau contrat social, des gouvernements responsables engagés en faveur de la préservation de la planète et champions de la démocratie.  L’Espagne a bien identifié son rôle pour être à l’avant-garde de ces grands changements.  Bien que n’ayant pas participé à la création de l’ONU, car sous le joug de la dictature franquiste, l’Espagne a su émerger en l’espace de 40 ans, en tant que pays prospère, décentralisé, figurant parmi les pays les plus sûrs dotés d’un système de santé exemplaire. 

Aujourd’hui, s’est réjoui le Président, l’Espagne est une démocratie solide qui vient de clore l’un des chapitres les plus noirs de son histoire, avec la décision de la Cour suprême d’autoriser l’exhumation du corps du général Franco exposé jusqu’alors dans un mausolée car « aucun ennemi de la démocratie ne mérite les honneurs ».  Le Président a évoqué, par ailleurs, les avancées en matière d’égalité des sexes.  La voix des femmes espagnoles est entendue partout dans le pays et au-delà et la communauté LGBT a donné une vraie leçon en matière de droits de l’homme.  Il a ensuite évoqué l’Accord de Paris sur le climat et le Programme 2030, deux instruments importants qui ont posé le diagnostic, défini les objectifs et établi une feuille de route. 

S’attardant sur la nécessité d’une mobilisation générale face à l’urgence climatique, le Président a rappelé l’annonce faite par son pays lors du Sommet Action Climat de contribuer à hauteur de 150 millions d’euros au Fonds vert pour le climat.  L’Espagne compte également donner une enveloppe de 100 millions d’euros sur cinq ans au Fonds d’affectation pour le Programme 2030.  La même somme sera allouée au Fonds d’affectation pour le VIH/sida sur une période de trois ans. 

Quant aux migrations, le Président a appelé à une réponse commune et coordonnée à ce défi humanitaire et à l’abandon des solutions à court terme.  Préoccupé par les conflits et les tensions à travers le monde, il a tout de même estimé que l’Afrique demeure un motif d’espoir car six pays africains figurent parmi les 10 au monde qui ont réalisé les taux de croissance les plus élevés.  C’est pourquoi, l’Espagne contribuera au renforcement des capacités de l’Afrique pour en faire une région d’opportunités et un continent de paix. 

S’agissant en particulier du Sahara occidental, le Président a défendu le rôle central des Nations Unies et affirmé la volonté de son pays de contribuer aux efforts du Secrétaire général, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité.  Il a conclu sur le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne qu’il a espéré ordonnée, tout en en craignant les conséquences pour Gibraltar. 

Au fil du temps, nous sommes devenus de plus en plus interdépendants et nous voyons que les décisions nationales ont presque toutes des ramifications internationales, a constaté Mme JACINDA ARDERN, Première Ministre de la Nouvelle-Zélande.  Elle a cité les fuites de pétrole qui ne connaissent pas de frontières, et les accidents et les tests nucléaires dont l’impact n’est jamais confiné à un seul endroit.  Mais notre interconnexion va bien plus loin et l’expérience de ces dernières années nous a conduit à nous demander si nous avons un jour vraiment travaillé dans l’isolement.  C’est une question que se pose depuis longtemps la Nouvelle-Zélande, cette nation éloignée et pourtant connectée. 

Nous les Néozélandais, a plaisanté la Première Ministre, sommes connus pour nos vallées verdoyantes où peuvent se cacher les hobbits et s’alimenter les moutons.  Nous sommes aussi connus pour notre « manaakitanga » ou la fierté que nous tirons de notre sens de l’hospitalité que nous n’hésitons pas à appliquer à nos rivaux sportifs les plus féroces.  Mais depuis le 15 mars, a-t-elle rappelé plus sérieusement, nous sommes connus pour autre chose: l’attaque terroriste la plus horrible contre un lieu de culte qui a tué 51 innocents, dévasté la communauté musulmane et mis au défi notre identité.  Les gens qui ont apporté des fleurs dans les mosquées, montré leur solidarité et observé une minute de silence ont tous décidé, avec la communauté musulmane qui n’a répondu que par son amour, que la Nouvelle-Zélande ne sera jamais réduite à un acte de brutalité et de violence mais elle sera portée par la compassion et l’empathie. 

Mais attention, a reconnu la Première Ministre, nous ne sommes pas une nation parfaite.  Nous avons plus de 200 ethnies différentes mais nous connaissons le racisme et la discrimination et nous soignons toujours les plaies des premières rencontres entre Maoris et Européens, il y a 250 ans.  Mais depuis l’attaque terroriste, nous avons dû nous poser des questions difficiles.  En 10 jours, a rappelé la Première Ministre, nous avons pris la décision de changer nos lois sur le port d’armes, interdit les armes semi-automatiques et les fusils d’assaut.  Nous avons entamé une deuxième série de réformes au registre des armes et changé le régime de port d’armes. 

Se souvenant qu’après l’attaque, un enfant lui avait demandé s’il serait dorénavant en sécurité, la Première Ministre a admis que la peur d’un enfant ne disparaît pas avec des lois et des décrets.  Pour un enfant, se sentir en sécurité, c’est de ne pas avoir peur.  Or, dans un monde technologiquement connecté, les commentaires sur la race, la discrimination basée sur la religion, le genre, la sexualité et l’ethnie ne restent pas derrière des frontières.  Ils sont là. 

Nous devons parler non seulement comme si le monde nous écoutait mais comme si un enfant écoutait aussi.  Le terroriste du 15 mars, a souligné la Première Ministre, n’a pas seulement pris la vie de 51 personnes, il l’a fait en direct sur Facebook.  Il s’est servi des médias sociaux comme d’une arme et a montré comment Internet peut être perverti et devenir l’outil des terroristes.  Ce qui s’est passé à Christchurch est une profonde tragédie mais aussi un problème complexe du monde d’aujourd’hui.  La Première Ministre s’est félicitée du travail effectué avec les sociétés de technologie, les pays et la société civile. 

Mais il n’est de meilleur exemple de notre interdépendance absolue que les changements climatiques, a-t-elle poursuivi.  « Sauver le Pacifique, c’est sauver notre planère », a-t-elle dit en paraphrasant le Secrétaire général lors de sa visite dans la région cette année.  Ces deux dernières années, a indiqué la Première Ministre, la Nouvelle-Zélande a élaboré sa propre législation sur la neutralité carbone.  Quelqu’un milliard d’arbres ont été plantés et un fonds vert de 100 millions de dollars a été créé.  Les permis d’exploitation offshore et d’exploitation du gaz ont été gelés et un plan de 100% d’énergie renouvelable a été lancé tout comme des subsides pour un système de transport à faible émission de carbone.  La Nouvelle-Zélande aide aussi ses pays voisins mais certaines réponses sont plus faciles que d’autres. 

En effet, le gros des émissions de gaz à effet de serre ne vient pas du transport, de l’énergie ou des déchets mais d’une production agricole dont la Nouvelle-Zélande est très fière.  En conséquence, dans les cinq prochaines années, le pays compte collaborer avec ses fermiers pour mettre en place des systèmes où chaque exploitant agricole pourra mesurer, gérer et réduire ses propres émissions.  La Nouvelle-Zélande ne produira jamais toute la nourriture du monde quel que soit le nombre de moutons que vous lui prêtez, a encore plaisanté la Première Ministre.  Mais, a-t-elle affirmé, nous pouvons produire les idées et la technologie dont le monde a besoin pour que chacun puisse exploiter et cultiver de la manière la plus durable possible.  C’est la raison pour laquelle nous continuons à dénoncer les milliards de dollars que les pays dépensent tous les ans pour subventionner les combustibles fossiles.  La Nouvelle-Zélande, a-t-elle annoncé, va aussi lancer avec d’autres une nouvelle initiative pour faire du commerce une force du bien au service de l’action climatique.  Vous joindrez-vous à nous? a demandé la Première Ministre. 

M. SHINZO ABE, Premier Ministre du Japon, a ouvert son intervention en rappelant au Président de la soixante-quatorzième Assemblée générale que, sous sa mandature, les Nations Unies marqueront l’an prochain leur soixante-quinzième anniversaire.  Il a souligné que son pays s’est toujours efforcé de défendre les principes de l’ONU et s’emploie à en réaliser les objectifs.  Se prononçant pour une réforme structurelle de l’Organisation, à commencer par son Conseil de sécurité, il a confirmé que le Japon, fort du soutien de nombreux pays, entend redevenir membre non permanent de cet organe en 2022. 

Recentrant son propos sur son pays, M. Abe a noté qu’un nouvel Empereur a accédé au trône et qu’une cérémonie aura lieu le 22 octobre en présence de dignitaires du monde entier.  Si la planète a les yeux tournés vers le Japon au début de cette « nouvelle ère », a-t-il dit, c’est aussi parce que le pays est sorti de la récession et qu’il est plus que jamais ouvert sur le monde, comme en témoignent les compétitions sportives qui s’y déroulent: la Coupe du monde de rugby aujourd’hui, les Jeux olympiques et paralympiques de Tokyo en 2020. 

Le Chef du Gouvernement japonais a par ailleurs évoqué la tenue à Kyoto, en avril prochain, du quatorzième Congrès des Nations Unies sur la prévention du crime et la justice pénale.  La première édition de cette rencontre organisée tous les cinq ans par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) avait eu lieu en 1970 au Japon, s’est-il enorgueilli, y voyant un symbole de l’engagement constant de son pays à l’égard du monde. 

M. Abe a ensuite rappelé qu’il a accueilli Malala Yousafzai en mars à Tokyo.  À cette occasion, la jeune prix Nobel de la paix lui a fait observer que « quelque 100 millions de filles manquent de qualification pour maîtriser la technologie moderne parce qu’elles ne bénéficient pas d’une éducation minimum de 12 ans », a-t-il relaté.  Selon la militante des droits des femmes, a poursuivi le Premier Ministre, les filles pourraient pourtant contribuer à l’économie mondiale à hauteur de 30 000 milliards de dollars si elles allaient au bout de l’éducation secondaire.  « J’ai invité Malala au Japon, avant le G20 que j’ai présidé en juin, dans l’espoir de mettre en exergue les politiques d’autonomisation des femmes et des filles », a-t-il dit, qualifiant de « vérité évidente » l’éclat que représenterait pour le monde la pleine réalisation du potentiel des femmes. 

Dans le même ordre d’idées, M. Abe a souligné le fait que le Japon s’est engagé à promouvoir une éducation de qualité et inclusive pour toutes les filles et les femmes.  Un engagement dont il a souhaité donner des illustrations concrètes.  Il a ainsi cité en exemple le lancement en 2017 de la première compétition d’athlétisme féminin en République-Unie de Tanzanie, fruit de la collaboration entre une Japonaise et une ancienne marathonienne tanzanienne, qui permet de fournir aux jeunes filles qui y assistent du matériel pour prévenir les grossesses précoces.  Dans ce même pays, une école pour filles a ouvert en 2016 grâce aux efforts d’ONG japonaises et locales.  Ces initiatives éducatives ne s’arrêtent pas à l’Afrique puisque des projets du même genre sont menés au Cambodge, a-t-il précisé, assurant que, ces trois prochaines années, le Gouvernement du Japon fournira une éducation enrichie à au moins neuf millions d’enfants et de jeunes en Afrique subsaharienne et en Asie.  Il a ainsi parlé de « e-learning » dans des écoles primaires de Sri Lanka et des cours de sciences par Internet au Rwanda. 

Avant de conclure sa septième intervention consécutive devant l’Assemblée générale, le Premier Ministre a réitéré son soutien à l’approche des États-Unis concernant la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Le dialogue entre les dirigeants de ces deux pays, avec pour objectif un avenir meilleur, a « changé la dynamique qui entourait la Corée du Nord », a-t-il relevé.  Dans ce contexte, il s’est dit déterminé à rencontrer sans condition le Président Kim Jong Un en vue d’une normalisation des relations entre la RPDC et le Japon.  Il a ensuite fait part de son inquiétude quant à la situation au Moyen-Orient, jugeant que les attaques « méprisables » perpétrées contre des installations pétrolières saoudiennes « retiennent l’ordre économique mondial en otage ».  Rappelant l’engagement pris devant lui par le Guide de la Révolution islamique d’Iran, M. Ali Khamenei, contre la possession, la production et l’utilisation d’armes nucléaires, il a indiqué avoir rencontré dans la matinée le Président iranien Hassan Rouhani, lors de ce qui était leur neuvième rencontre.  Il a dit compter de la part de l’Iran sur des « actions ancrées dans la sagesse qui découle de sa riche histoire ». 

Enfin, M. Abe a affirmé que le Japon s’appuierait sur des cadres multilatéraux pour réduire les disparités internationales.  Dans la foulée de l’Accord de partenariat économique transpacifique (TPP) et de l’Accord de partenariat économique Japon-Union européenne, le Partenariat économique régional global (RCEP) va devenir une réalité, s’est-il enthousiasmé, prédisant « un monde plus connecté, qui permettra à davantage de personnes d’échapper à la pauvreté ».  De même, à la suite de la dernière Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD), il s’est dit confiant dans le potentiel de croissance de l’Afrique et encouragé par les changements de ce continent. 

M. BORIS JOHNSON, Premier Ministre du Royaume-Uni, a voulu rompre avec le discours traditionnel qui défend et promeut les règles d’un monde pacifique, évoque les conflits en cours ou encore la solution des deux États.  Non, le Premier Ministre a préféré parler des nouvelles percées technologiques.  Pourquoi?  Tout simplement, a-t-il expliqué, parce que le Royaume-Uni est à l’avant-garde de l’intelligence numérique.  Il a donc lancé une invitation au sommet que Londres accueille, l’année prochaine.  Nous avons le secteur le plus avancé, que ce soit en matière de nanotechnologies ou de technologies vertes ou de pointe, s’est-il enorgueilli.  Aucun pays ne doit être exclu de ces technologies, a professé le Premier Ministre, en appelant à un équilibre entre liberté de création et libération, entre contrôle gouvernemental et vie privée. 

Expliquant les enjeux de son sommet, il a prévenu que l’on ne peut ignorer une force qui change.  Aujourd’hui vous pouvez cacher des choses à vos amis, vos parents, vos enfants et même votre médecin, mais pas à Google.  Les technologies peuvent être utilisées pour surveiller chaque citoyen 24 heures sur 24 et demain, votre réfrigérateur pourra décider pour vous du choix de votre menu.  Un orage va éclater, a prédit le Premier Ministre, et nous ne savons pas comment le maîtriser.  Nous ne savons pas qui va utiliser les ressources et les algorithmes.  Nous ne savons pas si ces machines ont été programmées pour nous mentir, d’autant que, dans certains cas, l’autoritarisme numérique est déjà une réalité? Il s’agit donc de savoir si demain, nous vivrons dans un monde orwellien ou dans un monde émancipé de débat et d’accès au savoir.

M. SAAD-EDDINE EL OTHMANI, Chef du Gouvernement du Royaume du Maroc, a commencé par présenter son pays comme « un espace de rencontre et de coopération » entre l’Afrique, le monde islamique et le reste du monde, en raison notamment de sa stabilité dans un monde en ébullition mais aussi de sa politique d’ouverture démocratique et de son engagement international.  Observant que cette session de l’Assemblée générale s’inscrit dans une conjoncture internationale marquée par les conflits, il s’est dit convaincu de l’efficacité de l’action multilatérale.  En effet, a-t-il dit, les défis contemporains empêchent les pays d’y faire face, seuls.  Le Chef a cité parmi ces défis les changements climatiques, le développement durable, les migrations ou encore le terrorisme.  « Tout ceci nécessite une approche multilatérale », a insisté le dirigeant, avant d’appeler de ses vœux un système novateur s’appuyant sur les Nations Unies et les organisations régionales pour garantir un avenir meilleur à l’humanité. 

Un tel système doit garantir à l’Afrique la place qu’elle mérite en tant qu’acteur de la scène internationale, a poursuivi M. El Othmani, ardent partisan d’un cadre africain de coopération dans les domaines de l’économie, du développement et de la lutte contre les problèmes sécuritaires.  À cet égard, a-t-il relevé, le Royaume du Maroc consacre les deux tiers de ses investissements étrangers à l’Afrique.  Le Chef du Gouvernement s’est d’ailleurs dit favorable à la zone africaine de libre-échange, y voyant l’espoir d’un nouvel horizon pour le continent. 

Pour lui, le multilatéralisme nécessite de s’adapter aux différents défis, le premier d’entre eux étant la menace sécuritaire, y compris le terrorisme.  Il a ainsi évoqué l’action menée par le Forum mondial de lutte contre le terrorisme, dont le Maroc assure la présidence avec les Pays-Bas depuis 2016.  Cette responsabilité, a-t-il souligné, est une reconnaissance des efforts déployés par le Royaume dans ce domaine, notamment à travers le développement d’une stratégie globale et multidimensionnelle, qui englobe les aspects culturels, sociaux, sécuritaires et religieux.  Sur ce dernier point, le Maroc a mis son expérience à la disposition des États amis qui ont demandé à bénéficier de son expertise en matière de formation des imams. 

Le deuxième défi consiste à s’attaquer à la question des migrations par des interactions entre pays, sachant qu’aucun pays ne peut apporter, à lui seul, une réponse globale à cette problématique.  Assurant que le Maroc propose en la matière une politique « humaine et responsable », M. El Othmani a rappelé que c’est sur son territoire, à Marrakech, qu’a été ratifié le Pacte mondial sur les migrations en décembre 2018.  Le troisième défi, a-t-il poursuivi, est lié aux changements climatiques.  C’est pourquoi le Maroc s’est engagé à faire face aux menaces contre l’environnement, à commencer par le réchauffement du climat, comme en témoigne son action dans le cadre de la COP22 qu’il a abritée.  Le quatrième défi concerne le développement humain et durable, en harmonie avec le Programme 2030, a-t-il indiqué, insistant sur la nécessaire efficacité de la coopération Sud-Sud. 

Le système multilatéral auquel nous aspirons œuvre pour la sécurité internationale que symbolise l’ONU, a souligné M. El Othmani.  Saluant les opérations de maintien de la paix que mène l’Organisation sur quatre continents, il a noté que la participation marocaine s’est manifestée par l’envoi de troupes en République démocratique du Congo et en République centrafricaine.  Il a ajouté qu’en tant que Président du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine pour le mois de septembre, son pays n’épargnera aucun effort pour répondre aux attentes africaines.  Il s’est par ailleurs déclaré préoccupé par l’absence d’horizon dans le processus de paix palestino-israélien.  Solidaire du peuple palestinien, le Maroc refuse tout changement dans le statut de la ville sainte de Jérusalem, a-t-il martelé.  Le Maroc refuse en outre la politique de colonisation que subit le peuple palestinien, convaincu qu’aucune paix juste ne peut se réaliser si celui-ci ne jouit pas de ses droits. 

Dans le même ordre d’idées, le Chef du Gouvernement a assuré que son pays s’efforce de trouver une « solution sérieuse » au conflit sur le « Sahara marocain ».  Cette question s’inscrit dans le cadre de la souveraineté et l’intégrité territoriale du Maroc, a-t-il dit, rappelant que chaque pays a le droit de protéger son territoire et ses citoyens.  Il a réitéré l’attachement du Royaume à l’initiative d’autonomie, qu’il a qualifiée de « sérieuse et crédible » et qui est, à ses yeux, la seule solution pour « mettre fin à ce conflit artificiel ».  Saluant les efforts du Secrétaire général de l’ONU pour faire avancer la solution politique, conformément à résolution 2468, il s’est dit inquiet de la situation dans le camp de Tidouf et a souhaité que la communauté internationale appelle « l’État hôte » à prendre ses responsabilités humanitaires afin d’en recenser les habitants. 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale entérine une Déclaration politique sur la couverture sanitaire universelle « l’accord le plus global jamais passé sur cette question »

Soixante-quatorzième session,
Réunion de haut niveau sur la couverture sanitaire universelle, matin et après-midi
AG/12181

L’Assemblée générale entérine une Déclaration politique sur la couverture sanitaire universelle « l’accord le plus global jamais passé sur cette question »

Alors que 100 millions de personnes s’enfoncent dans la pauvreté, chaque année, à cause de dépenses de santé exorbitantes, l’Assemblée générale a entériné, aujourd’hui, par acclamation une Déclaration politique sur la couverture sanitaire universelle, par laquelle les États Membres s’engagent à mettre en œuvre des politiques « à haut impact » pour protéger la santé des personnes et à cibler des politiques de financement efficace dans le domaine de la santé.

Cette Déclaration est « non seulement l’accord le plus global jamais passé sur la santé universelle », mais aussi « une vision pour la couverture sanitaire universelle d’ici à 2030 », s’est félicité à cette occasion le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres.

Intitulé « Couverture sanitaire universelle: Agir ensemble pour bâtir un monde en meilleure santé », ce texte, qui a été adopté au cours d’une réunion de haut niveau, engage également les États Membres à fournir des financement adéquats et durables pour appuyer les efforts déployés au niveau national pour atteindre la couverture sanitaire universelle, mais aussi à assurer, d’ici à 2030, l’universalité de l’accès aux soins de santé sexuelle et reproductive.

Pour le Secrétaire général, l’accès aux services de santé de qualité, à un coût abordable, apportant bien-être physique et mental et répondant aux besoins de chacun, est un droit international universel.  « Pourtant tristement, près de la moitié des habitants de la planète ne peuvent toujours par exercer ce droit international », a-t-il déploré, alertant que cela a des conséquences graves pour l’humanité tout entière. 

Il a vu dans l’adoption de cette Déclaration une réalisation très importante qui stimulera le progrès au cours de la prochaine décennie pour traiter des maladies transmissibles, notamment le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme, mais aussi les maladies non transmissibles et la résistance aux agents antimicrobiens à travers des systèmes de santé de base robustes et résilients. « Investir dans la santé pour toutes et tous, c’est investir dans l’humanité et œuvrer pour le bien-être et la prospérité de chacun », a-t-il notamment déclaré.

Outre la prévention des maladies, le Président de l’Assemblée générale a appelé à mettre l’accent sur l’accessibilité aux médicaments et aux vaccins, s’inquiétant par ailleurs de l’impact de nouveaux phénomènes comme la résistance aux antibiotiques et l’émergence de superbactéries.  M. Tijjani Muhammad-Bande a également estimé qu’une véritable couverture sanitaire universelle ne pourra être réalisée qu’en améliorant les infrastructures de transport pour permettre aux malades d’accéder facilement aux centres de santé. 

Arguant que la couverture sanitaire universelle n’est pas seulement un impératif moral, mais aussi un impératif économique, le Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a souligné, pour sa part, que les problèmes d’accès aux soins ne sont pas le monopole des pays en développement et a appelé les États à augmenter de 1% du PIB les moyens consacrés aux soins de santé primaire.  « Si nous consacrons 200 milliards de dollars par an au niveau mondial à la santé primaire, 60 millions de vies seront sauvées chaque année et l’espérance de vie augmentera de 3,5 ans d’ici à 2030 », a affirmé le M. Tedros Adhanom Ghebreyesus.  « Et si nous ne changeons rien, cinq milliards de personnes n’auront toujours pas accès aux services sanitaires d’ici à 2030 », a-t-il prévenu.

Face aux appels du Secrétaire général à modifier d’urgence le modèle de financement dans la santé pour tous, le Président du Groupe de la Banque mondiale, M. David Malpass, a invité à réfléchir à de nouveaux modèles de financement, alertant que l’écart de financements des soins de santé dans les 54 pays les plus pauvres se situe toujours autour de 176 milliards de dollars annuels.  Mettant également en garde contre le coût « énorme » du « non investissement », ce dernier a d’ailleurs jugé essentiel de travailler avec le secteur privé en vue d’identifier de nouveaux modèles de financement du secteur de la santé.

De nombreux intervenants ont cependant récusé toute perspective de « privatisation » de la santé, à l’instar de la Championne de haut niveau pour la couverture sanitaire universelle et ancienne Première Ministre de la Norvège, Mme Gro Brundland, qui a insisté sur l’impératif des financements publics.  « Si nous laissons les soins de santé aux marchés, les pauvres en seront exclus », a-t-elle notamment prévenu.

Pour parvenir à un système de santé équitable et efficace qui réponde aux besoins des plus vulnérables, les gouvernements doivent donc, selon elle, faire en sorte que les ressources soient affectées de manière efficace.  Elle a également appelé à établir un consensus universel sur les financements progressifs de la santé. 

Outre les interventions liminaires, cette réunion de haut niveau était structurée autour de deux tables rondes, l’une consacrée à « La couverture maladie universelle en tant que moteur de l'équité, du développement inclusif et de la prospérité pour tous » au cours de laquelle il a été souligné que la couverture médicale universelle est une question éminemment politique.

La deuxième, qui avait pour thème « Accélérer l’action et les investissements multisectoriels et multipartites pour réaliser la couverture maladie universelle », a été marquée par l’intervention du PDG de Medtronic, une entreprise de technologie médicale, qui a prévenu que le « modèle » préconisé par la Déclaration politique n’est pas viable car il n’engage aucune responsabilité financière.  Il importe par conséquent, selon M. Omar Ishrak, de créer un système où les frais s’appuient sur la valeur de la prestation fournie au patient et qui permette de rembourser les parties prenantes, qu’il s’agisse des fournisseurs, des médecins ou d’organisations de technologie médicale.

RÉUNION DE HAUT NIVEAU - COUVERTURE SANITAIRE UNIVERSELLE

Déclarations liminaires

La séance a débuté avec l’adoption, par acclamation du projet de Déclaration politique sur la couverture sanitaire universelle, une adoption dont s’est félicité M. TIJJANI MUHAMMAD-BANDE, Président de la soixante-quatorzième session de l’Assemblée générale.  D’emblée, il a souligné que l’accès à la santé est un droit et non un privilège et a appelé les États Membres à faire tout leur possible pour que tous les pays du monde puissent réaliser la couverture sanitaire universelle d’ici à 2030 qui, a-t-il rappelé, est indispensable pour pouvoir réaliser les objectifs de développement durable.  « Nous devons mettre l’accent sur la prévention des maladies ainsi que sur l’accessibilité aux médicaments et à des vaccins » a-t-il insisté.  À cet égard, il a estimé que seule une coopération internationale robuste permettra aux pays de répondre aux besoins de la couverture sanitaire universelle.  Il a aussi mis l’accent sur le financement des soins de santé, ainsi que sur l’importance de la coopération entre États. 

M. Muhammad-Bande a indiqué que l’éradication de la variole reste un des plus grands triomphes de l’humanité, pour ensuite parler des solutions communautaires qui permettent plus de souplesse.  Il a aussi alerté que de nouveaux défis compliquent la situation, dont les changements démographiques, le vieillissement de la population, ainsi que l’impact des facteurs sociaux environnementaux sur la fourniture de soins de santé.  Le Président de l’Assemblée générale s’est particulièrement inquiété de nouveaux phénomènes comme la résistance aux antibiotiques et l’émergence de super bactéries, autant de phénomènes face auxquels, a-t-il souligné, il est urgent d’agir. 

Par ailleurs, M. Muhammad-Bande a estimé qu’une véritable couverture sanitaire universelle ne pourra être réalisée qu’en améliorant les infrastructures de transport pour permettre aux malades d’accéder facilement aux centres de santé.  Notant que l’adage « Mieux vaut prévenir que guérir est plus vrai que jamais », le président de l’Assemblée générale a conclu en insistant sur la nécessité de continuer à investir dans la recherche. 

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré d’emblée que l’accès aux services de santé de qualité, à un coût abordable, apportant bien-être physique et mental et répondant aux besoins des femmes et des hommes, des filles et des garçons, est un droit international universel. 

« Pourtant tristement, près de la moitié des habitants de la planète ne peuvent toujours par exercer ce droit international », a-t-il déploré, alertant que cela a des conséquences graves pour l’humanité tout entière.  Chaque année, ce sont quelque 100 millions de personnes qui s’enfoncent dans la pauvreté à cause de dépenses de santé exorbitantes.  Même lorsque des services de santé existent, a-t-il poursuivi, ils sont souvent inadaptés pour répondre à l’étendue des souffrances humaines.  Les conditions de santé mentale, négligées et stigmatisées depuis bien trop longtemps, sont un facteur d’angoisse indescriptible pour celles et ceux qui en souffrent et leurs proches.  « Cette injustice doit cesser », s’est impatienté le Secrétaire général. 

Il a également prévenu que des systèmes de santé dysfonctionnels posent des risques qui ne s’arrêtent pas aux frontières nationales.  « Investir dans la santé pour toutes et tous, c’est investir dans l’humanité et œuvrer pour le bien-être et la prospérité de chacun. » 

Selon le Secrétaire général, la couverture sanitaire universelle est un moteur de croissance économique pour les particuliers, les familles, les entreprises et les sociétés dans leur ensemble.  La santé est à la fois facteur et conséquence du progrès économique et social, a souligné le Secrétaire général, expliquant que c’est pour cela qu’elle est au cœur du Programme 2030 « une opportunité sans précédent d’agir sur les facteurs sociaux indispensables à la santé et au bien-être ».  Il a notamment expliqué que grâce à des systèmes alimentaires durables, une nourriture équilibrée et l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, le Programme 2030 contribuera à prévenir des maladies. 

M. Guterres a estimé que la Déclaration politique est « non seulement l’accord le plus global jamais passé sur la santé universelle », mais aussi « une vision pour la couverture sanitaire universelle d’ici à 2030 ».  Il s’agit, a-t-il dit, d’une réalisation très importante qui stimulera le progrès au cours de la prochaine décennie pour traiter des maladies transmissibles, notamment le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme, mais aussi les maladies non transmissibles et la résistance aux agents antimicrobiens à travers des systèmes de santé de base robustes et résilients.  Le Secrétaire général a expliqué avoir constaté le besoin pour de tels système de première main lorsqu’il s’était rendu en République démocratique du Congo où il a rencontré du personnel de santé et des patients touchés par Ébola.

Sous les applaudissements de la salle, M. Guterres a aussi attiré l’attention sur le fait que la Déclaration politique affirme la nécessité d’assurer l’accès universel à la santé sexuelle et reproductive.  Cela est essentiel pour protéger le bien-être et la dignité des femmes et des filles, a-t-il affirmé.

Constant ensuite que de nombreux pays doivent accélérer leurs efforts pour ne laisser personne de côté, le Secrétaire général a appelé à modifier d’urgence le modèle de financement et d’accélérer les investissements dans la santé pour tous.

Il a attiré l’attention sur l’appui que peut fournir l’ONU à travers le Plan d’action mondial pour des vies saines et le bien-être de tous, et l’initiative Toutes les femmes, tous les enfants.  Des partenariats multipartites seront nécessaires, mais c’est avant tout du leadership national que dépendra la réalisation de la couverture sanitaire universelle d’ici à 2030, a souligné M. Guterres.  « Votre présence ici confirme votre attachement à la cause, alors soyons les champions de la santé pour tous », a-t-il conclu. 

M. TEDROS ADHANOM GHEBREYESUS, Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a expliqué qu’il s’était récemment rendu à plusieurs reprises en République démocratique du Congo (RDC) pour suivre l’évolution de la lutte contre Ebola.  Il a expliqué qu’il lui avait été reproché d’avoir mis l’accent sur Ebola, alors que le paludisme et la rougeole tuent plus de monde que cette maladie, pour ensuite arguer qu’Ebola mérite toute l’attention qu’on lui accorde car cette question est liée avant tout au problème de l’accès limité aux soins. 

Il a rappelé que les problèmes d’accès aux soins ne se limitent pas aux pays en développement, notant que de nombreuses personnes n’ont pas accès aux soins offerts dans des pays développés.  Illustrant son propos, il a raconté l’histoire d’un ami, diagnostiqué avec un cancer dans un pays développé, qui avait choisi de se laisser mourir en renonçant aux soins, plutôt que de risquer de dilapider les économies qu’il avait faites pour assurer l’avenir de sa famille.  « Cette triste réalité est la réalité pour des millions de personnes chaque jour », a-t-il déploré.  Et si nous ne changeons rien, cinq milliards de personnes n’auront toujours pas accès aux services sanitaires d’ici à 2030 » a-t-il prévenu. 

« Assurer une couverture sanitaire universelle n’est pas seulement un impératif moral, c’est aussi un impératif économique », a-t-il martelé avant de préciser que le monde dépense 7 500 milliards de dollars en matière de santé, soit 7% du PIB mondial.  Il a appelé à examiner si ces moyens sont bien utilisés, notant que trop de pays consacrent trop de moyens à la gestion des hôpitaux plutôt qu’à la prévention des maladies.  « Nous devons mettre l’accent sur la protection de la santé et pas uniquement sur l’acte de soigner la maladie », a-t-il dit avant d’appeler les États à augmenter de 1% du PIB les moyens consacrés aux soins de santé primaire. 

« Si nous consacrons 200 milliards de dollars par an au niveau mondial à la santé primaire, 60 millions de vies seront sauvées chaque année et l’espérance de vie augmentera de 3,5 ans d’ici à 2030, notamment parce que nous aurons sauvé les vies de nombreux enfants et de nombreuses femmes », a-t-il indiqué.  Notant que les pays les plus pauvres continueront d’avoir besoin du soutien des bailleurs de fonds internationaux pour pourvoir développer leurs programmes de soins de santé primaire, il a souligné l’importance que revêt la coopération internationale à cet égard. 

« Réaliser la couverture sanitaire universelle est un choix politique que vous pouvez faire » a-t-il lancé aux États Membres avant de les exhorter à développer un système sanitaire basé sur des soins de santé primaire robustes.  « Nous ne voulons pas la santé pour un petit nombre mais la santé pour tous, riches comme pauvres, urbains comme ruraux » a conclu le Directeur général de l’OMS pour qui « la santé est aussi un moyen de parvenir à la prospérité ». 

M. DAVID MALPASS, Président du Groupe de la Banque mondiale, a expliqué que le Groupe agit essentiellement dans le domaine de la couverture sanitaire universelle par le truchement de son Fonds pour les pays les plus pauvres qui, a-t-il précisé, est l’un des outils les plus importants pour financer les soins de santé dans ces pays, y compris des vaccinations.  Ce financement est essentiel mais est cependant loin d’être suffisant, a-t-il regretté, pour ensuite indiquer que l’écart de financement des soins de santé dans les 54 pays les plus pauvres est estimé à 176 milliards de dollars chaque année. 

Dès lors la Banque mondiale a identifié quatre domaines prioritaires d’intervention à commencer par l’augmentation des informations relatives aux soins de santé primaires abordables.  À ce sujet, M. Malpass a mis en garde contre le coût du « non-investissement » qui est « énorme » comme l’illustre le cas de la République démocratique du Congo (RDC) où la Banque mondiale s’est engagée à hauteur de 365 millions de dollars pour lutter contre Ébola. 

Il faut également miser sur l’octroi de soins de santé de qualité et abordables, a-t-il poursuivi, et il est essentiel de redoubler d’effort pour travailler avec le secteur privé en vue d’identifier de nouveaux modèles de financement du secteur de la santé.  À titre d’exemple, il a parlé de la collaboration de la Banque mondiale avec des institutions de santé privées pour la détection et l’élimination de la tuberculose.  Il a également évoqué le succès des plateformes de santé mobiles financées par le Groupe de la Banque mondiale qui devraient couvrir 10 millions de personnes sur les trois prochaines années.

Autre domaine prioritaire pour la Banque mondiale: l’amélioration de l’accès à la santé pour tous.  À ce sujet, M. Malpass a insisté sur la nécessité d’aider les communautés en améliorant aussi l’éducation, en créant des emplois et en améliorant les réseaux de santé au niveau national.

Pour le Président du Groupe de la Banque mondiale, il importe à présent de changer la façon dont on finance la santé, ce qui nécessite, à ses yeux, de mettre en conformité l’appui et les investissements.  Le leadership des pays est indispensable dans ce domaine puisqu’il s’agit d’assurer un avenir plus prospère et plus sain aux populations, a-t-il indiqué, précisant que la Banque mondiale est prête à travailler à leurs côtés.

Mme GRO HARLEM BRUNDLAND, Championne de haut niveau pour la couverture sanitaire universelle, ancienne Première Ministre de la Norvège, a déclaré que la mise en place d’une couverture sanitaire universelle est le meilleur moyen de réaliser les objectifs de développement durable liés à la santé.  Citant Nelson Mandela, elle a souligné que l’accès aux soins est un droit universel et ne peut dépendre des revenus.  « Si nous laissons les soins de santé aux marchés, les pauvres en seront exclus » a-t-elle prévenu avant de s’inquiéter des écarts observés au niveau mondial en matière de couverture sanitaire. 

« Si une leçon doit être retenue » a dit Mme Brundland, « c’est qu’on ne peut arriver à la couverture sanitaire universelle sans financements publics ».  Elle a appelé à établir un consensus universel sur les financements progressifs de la santé. 

Mme Brundland a ensuite regretté qu’il y a encore 35 ans, certains États développés faisaient pression sur les pays en développement pour qu’ils réduisent leur budget de santé.  « Cela a été une immense erreur, qui a contribué à priver des millions de personnes de soins » a-t-elle déploré.  « Priver une personne de soins est une violation des droits de l’homme », a-t-elle souligné, pour ensuite regretter que ces violations demeurent d’actualité dans trop de pays. 

Elle a exhorté les Chefs d’État à interdire la pratique consistant à demander aux malades de payer leurs soins.  Elle a cité en exemple l’initiative du Président du Kenya qui, grâce à une augmentation des financements publics, a mis en place la couverture sanitaire universelle dans quatre comtés du pays.  Elle a aussi parlé de l’expérience de l’Afrique du Sud « qui a appris que l’on ne peut pas parvenir à la couverture sanitaire universelle avec des assurances privées sur la base du volontariat ».  « Pour parvenir à un système de santé équitable et efficace qui réponde aux besoins des plus vulnérables, les gouvernements doivent faire en sorte que les ressources soient affectées de manière efficace », a-t-elle insisté.  Elle a appelé les États Membres à investir dans la santé afin de faire la couverture sanitaire universelle une réalité mondiale  

Table Ronde 1 – « La couverture maladie universelle en tant que moteur de l’équité, du développement inclusif et de la prospérité pour tous »

Cette première table ronde a permis aux intervenants de réaffirmer d’une part que la santé est un droit humain fondamental, et, d’autre part, que la couverture sanitaire universelle est le meilleur moyen de le garantir.  Pour y parvenir, l’impératif d’un leadership national a été souligné à maintes reprises, dans la mesure où la couverture médicale universelle est une question avant tout politique.  S’agissant du financement de ce système « couteux », il a été suggéré, entre autres, d’augmenter le budget de la santé publique par des recettes fiscales supplémentaires, de mettre sur pied un partenariat mondial à l’intention des pays en développement, mais aussi de solliciter les plus grandes fortunes.  L’idée d’un contrat social liant les pays à leur population a également été défendu à plusieurs reprises. 

Déclarations des coprésidents

Cette table ronde était coprésidée par Mme SHEIKH HASINA, Première Ministre du Bangladesh, qui a rappelé, dans un premier temps, que malgré les promesses faites dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, la moitié de la population mondiale n’a toujours pas accès aux services de santé de base.  De même, environ 100 millions de personnes sont poussées dans l’extrême pauvreté chaque année à cause des dépenses de santé, et 800 millions d’autres consacrent au moins 10% ou plus de leurs revenus familiaux à des dépenses de santé.  Selon elle, l’égalité dans les services de santé peut être assurée à travers la couverture sanitaire universelle et en offrant des services de santé abordables et efficaces aux couches les plus pauvres de la société.  Mais pour ce faire, il faut mettre en œuvre des modèles de financement de la santé équitables, avec des mesures de protection sociale solides pour tous les membres de la société. 

Relevant que 90% des besoins sanitaires pourraient être réglés par des soins de santé primaires, Mme Hasina a estimé que l’établissement de systèmes de santé primaire solides doit donc être une priorité afin d’en faire la première ligne de défense contre les maladies transmissibles et non transmissibles.  Elle a également vu dans les soins de santé communautaires un moyen inclusif et efficace d’atteindre les gens vivant en marge.  Au Bangladesh, les autorités ont d’ailleurs établi 14 000 cliniques communautaires à travers le pays, chacune d’entre elles étant fréquentée en moyenne par 40 patients par jour, dont 90% sont des femmes et des enfants. 

Mme Hasina a cependant constaté que la mobilisation des ressources pour financer la couverture sanitaire universelle demeure un obstacle fondamental dans de nombreux pays.  De ce fait, elle a appelé à l’établissement d’un partenariat mondial efficace afin d’établir, pour chaque pays, une stratégie de financement pour les soins de santé.  Elle y a vu un outil important pour atteindre la couverture sanitaire universelle et, en définitive, les objectifs de développement durable d’ici à 2030.  Au Bangladesh, le Gouvernement a d’ailleurs établi un fonds d’affectation spéciale afin d’assurer un financement continu des soins de santé primaire aux populations. 

Lui emboitant le pas, l’autre coprésident de cette table ronde, M. PEDRO SÁNCHEZ, Président du Gouvernement espagnol, a lui aussi souligné que la santé est un droit humain fondamental, et que la couverture sanitaire universelle est le meilleur moyen de le garantir.  C’est également un outil fondamental pour avancer dans la réalisation d’autres objectifs du Programme 2030 comme l’élimination de la pauvreté, la réduction des inégalités et le développement inclusif, a-t-il dit.  Il a également vu un égalisateur social et un moteur de la redistribution des richesses, de la croissance économique, de la cohésion sociale, de la création d’emploi et de l’innovation. 

Toutefois, le chemin sera difficile pour atteindre cet objectif, a -t-il reconnu, tout en soulignant, à la lumière de l’expérience espagnole, que les bénéfices à tirer de la mise en place d’un système de couverture médicale universel, sont incalculables, que ce soit du point de vue social, économique ou politique.  Il a indiqué que l’Espagne s’est engagée sur cette voie depuis 1986, pour ensuite parler de l’impact négatif qu’a eu la crise économique de 2012 sur le système de couverture médicale en Espagne.  Mais « il n’a pas été question de revenir sur un droit qui est désormais considéré comme inaliénable par les Espagnols », et c’est pourquoi l’une des premières priorités de son Gouvernement a été, en 2018, le recouvrement de cette couverture.  « Les résultats de cette expérience sont évidents », s’est-il félicité, puisqu’aujourd’hui l’Espagne a la deuxième espérance de vie la plus longue au monde et l’un des systèmes de santé publique les plus accessibles, efficaces et de qualité.  Or, le financement de ce système ne représente pourtant que 6% de son PIB.

Déclarations des panélistes

Rappelant sa profession de médecin, Mme MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a souligné que les sociétés saines sont indispensables au développement durable, un lien clairement réaffirmé dans le Programme 2030.  Cependant, s’est-elle inquiétée, près de la moitié de la population mondiale n’a toujours pas accès aux soins de santé de base: « elle lutte pour survivre ».  Reconnaissant que le coût reste un obstacle majeur à l’accès à la santé, Mme Bachelet a plaidé pour l’extension de la couverture sanitaire universelle, soulignant que la santé, ce n’est pas seulement l’absence de maladie mais aussi la possibilité de se réaliser et de travailler. 

« Le cadre du droit à la santé est une base fondamentale de la promotion de la couverture sanitaire universelle », a-t-elle poursuivi.  Elle a exigé que les lois et politiques garantissent l’égalité de tous les membres de la société, soulignant que l’accès à la santé sexuelle et reproductive en fait intégralement partie.  De nombreux pays œuvrent déjà à la mise en œuvre de la couverture sanitaire universelle, a remarqué Mme Bachelet, encourageant les autres États à intégrer des engagements contraignants dans leurs législations et politiques en vue de garantir ce droit à la santé à tous.

Mme MAHA TAYSIR BARAKAT, Présidente du Conseil d’administration du Partenariat « Faire reculer le paludisme », a souligné que les soins contre le paludisme devraient occuper une place majeure dans la couverture sanitaire universelle, car toutes les deux minutes, un enfant meurt des suites de paludisme.  Elle a indiqué qu’en 2016, 556 millions de dollars avaient été dépensés par des populations démunies pour se soigner, ce qui avait contribué à les appauvrir davantage.  Pour améliorer cette situation, elle a appelé à assurer l’accès aux soins de santé « de la naissance à la mort ».  Il faut aussi des soins de santé de qualité, a-t-elle souligné, indiquant que de nombreux pays manquent jusqu’aux médicaments les plus basiques.  Autre priorité: la disponibilité des personnels de santé bien formés et bien rémunérés.  Elle a aussi appelé à établir des mécanismes de préparation pour faire face aux catastrophes qui s’accompagnent souvent de flambée d’épidémies.  Elle a de plus estimé que la bonne gouvernance doit être de mise afin d’éviter la corruption au sein des systèmes de santé. 

« Dans un monde où il y a autant de richesses, méritons-nous d’avoir un milliard de personnes sans les moyens d’accéder aux soins de santé de base? », a demandé Mme WINNIE BYANYIMA, Directrice exécutive d’Oxfam International.  Comment peut-on accepter de vivre dans un monde où une personne riche à 25 années de plus d’espérance de vie qu’une personne pauvre?  Excédée par de tels constats, elle a appelé à rejeter les modèles de santé qui donnent la priorité au profit.  Elle s’est également opposée à toute mise en avant du secteur privé dans la médecine, alors que ce sont les soins de santé publics qui sont à même de garantir le succès d’une couverture sanitaire universelle.  Elle a appelé à assurer la gratuité des soins de santé pour tous, comme l’a fait la Thaïlande dès 2002.  Et le fait que ce pays n’est doté que de faibles richesses, comparées à un pays comme les Etats-Unis, prouve que cela est possible, a-t-elle affirmé.

Mme Byanyima s’est ensuite interrogée sur le fait qu’à l’heure actuelle, un enfant est vacciné à un coût 60 fois supérieur qu’en 2001.  Elle a fait observer que le mouvement de lutte contre le VIH/sida avait su démontrer ce qui est possible d’accomplir « quand on est uni contre l’industrie pharmaceutique ».  Dès lors, la Directrice d’Oxfam s’est félicitée des dispositions en faveur de la transparence des prix des médicaments prévues par la Déclaration politique adoptée aujourd’hui.  Elle a exhorté les gouvernements « à faire preuve de leadership en investissant dans les soins de santé publics pour tous », une demande qui a été accueillie par les applaudissements de la salle.

M. JEFFREY SACHS, Directeur du Centre pour le développement durable de l’Université de Colombia (États-Unis), a indiqué que sauver la vie des pauvres est devenu une question d’argent.  Il a expliqué que les pays pauvres ne peuvent financer seuls leur système de santé, et que cela se fait depuis fort longtemps.  Alors que le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme a besoin de 10 milliards de dollars pour financer son action, M. Sachs a rappelé que les 13 premières fortunes du monde sont évaluées à 1 000 milliards de dollars, avec des revenus annuels de plus de 50 milliards de dollars.  Avec le cinquième de leurs revenus annuels, ces super riches pourraient financer le fonds mondial, a-t-il commenté.  Il a également pointé les deux milliards de dollars dépensés chaque jour par le Pentagone, relevant que cinq jours de dépenses militaires des États-Unis pourraient de ce fait également constituer le budget annuel du Fonds mondial.  Il s’est insurgé de constater à quel point l’argent fait défaut, alors qu’il est pourtant bien disponible.  « Assez avec les fraudes fiscales et les paradis fiscaux.  Il faut sauver cinq millions d’enfants de la mort », a-t-il conclu sur un ton de colère. 

Débat interactif

C’est surtout l’immense défi éminemment politique que représente la couverture sanitaire universelle, que les intervenants du débat interactif ont mis en exergue.  Il n’y a pas de question plus politique que la couverture médicale universelle, a estimé la France, pour qui celle-ci revient en premier lieu aux gouvernements.  Il s’agit concrètement de transformer l’engagement pour la couverture sanitaire universelle en engagement politique sur le plan national, a indiqué le Ministre de la santé de la Slovaquie.  De son côté, l’Union interparlementaire a fait savoir qu’elle devrait adopter sous peu une résolution sur l’accès universel à la santé, « une première mondiale au niveau parlementaire ».

Appelant à considérer la santé comme un bien public universel, la Vice-Ministre de la coopération internationale de l’Italie a estimé, pour sa part, que cette question doit devenir l’une des priorités de la coopération multilatérale.  Appuyant ces propos, la Ministre de la santé de la Russie a insisté sur l’importance de la volonté politique nationale et de la coopération internationale, notamment pour ce qui est de l’accès aux médicaments à un coût abordable.  Des épidémies comme Ébola hantent la mémoire collective de la communauté internationale, mais ne doivent pas faire perdre de vue le fait que la lutte contre des maladies comme le VIH/sida, le paludisme ou la tuberculose exige aussi la solidarité mondiale, a-t-elle notamment estimé.

Déjà engagés sur la voie de la couverture sanitaire universelle, les Ministres de la santé de l’Uruguay et du Brésil ont insisté sur l’impératif de gérer efficacement les dépenses de santé publique, mais ont surtout défendu l’idée du contrat social qui les lie à leur population.  Il s’agit, à leurs yeux, d’un investissement avant tout économique et social mais aussi financier avec des retombées positives à court et long termes pour la société.  En misant sur une population en bonne santé, des pays comme la France, l’Italie, le Canada, la Russie ou la Slovaquie ont eux aussi souligné que ce n’est pas une logique de rentabilité privée qui permettra de réaliser le droit à la santé de tous, puisqu’il existe toujours d’énormes écarts entre riches et pauvres dans ce domaine. 

En Russie, l’adoption de la couverture sanitaire universelle il y a 90 ans s’est traduit par une augmentation de l’espérance de vie de plus de huit ans ces 20 dernières années, s’est enorgueillie la Ministre qui a également évoqué l’importance des projets nationaux de développement consacrés à la pharmacie et la médecine de pointe.  Alors que la réforme de la santé en Uruguay ne remonte qu’à 11 ans, elle s’est également traduite par une forte réduction des inégalités en termes d’accès et en une forte diminution de la mortalité infantile et maternelle, ainsi que des maladies transmissibles et non transmissibles. 

Le Ministre de la santé du Brésil a également défendu l’intérêt de la couverture médicale universelle par le coût énorme du « non-investissement » dans la santé, notamment pour ce qui est des maladies cardio-vasculaires ou liées au tabagisme, ou encore de la prévention et détection des cancers.  Il s’est d’ailleurs indigné du fait que des maladies comme la rougeole refassent surface au XXIème siècle dans des villes comme New York, et a fait un vibrant plaidoyer en faveur de la vaccination.  À l’instar de son homologue de Singapour, il a suggéré que le succès des politiques de santé publique axées sur l’universalité, l’intégralité et l’équité dépend en large mesure des investissements dans les structures de santé ainsi que dans la formation du personnel médical pour pouvoir assurer une présence partout sur le terrain.  Comme l’a résumé le Ministre du Canada, un système de santé universel doit être équitable, à l’abri de la discrimination et fournir des services de santé de qualité à tous.  Il s’agit d’un but progressif et chaque pays devra tracer sa propre voie, a-t-il dit. 

La Première Ministre du Bangladesh a parlé du succès des dispensaires communautaires établis dans son pays, et a expliqué que ceux-ci sont au premier plan des soins de santé de base et financés à la fois par le Gouvernement et un Fonds d’affectation spéciale.  Le Nigéria a lui aussi misé sur le développement du système de santé primaire, et, parallèlement, sur un élargissement de son assiette fiscale pour pouvoir financer les investissements dans la santé publique pour tous.

Réagissant aux commentaires de la salle, l’expert de Columbia University est revenu à la charge pour appeler au financement du Fonds mondial de lutte contre le paludisme, la tuberculose et le VIH/sida.  Il nous manque 17 milliards de dollars pour les trois années à venir, « alors par souci de pragmatisme, contactez les plus riches de ce monde, et mettez à profit ces mégamilliardaires », a proposé le panelliste, en estimant qu’il n’appartient pas qu’aux gouvernements de financer ces efforts de santé.

Tout en appuyant ce point de vue, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme a insisté sur le rôle du leadership public national dans les politiques de santé.  Il revient aussi aux gouvernements d’assumer leurs responsabilités auprès de leurs propres populations, a-t-elle tranché. 

Allant dans le même sens, la Directrice exécutive d’Oxfam international a récusé toute privatisation de la santé et a appelé à taxer davantage les plus riches, individus et sociétés, afin de financer un système de couverture médicale universelle pour tous.  Reconnaissant cependant que même avec une imposition graduelle et en luttant contre la fraude fiscale, il y aura toujours des pays qui n’auront pas les moyens de financer leurs politiques de santé publique, elle a appelé à continuer à miser sur la solidarité internationale et à financer des initiatives multilatérales comme le Fonds mondial.

Table ronde 2 – « Accélérer l’action et les investissements multisectoriels et multipartites pour réaliser la couverture maladie universelle »

Cette deuxième table ronde de la journée a été l’occasion de mettre l’accent sur la dimension « multisectorielle et multipartite » des investissements pour garantir l’efficacité du système de santé indispensable pour parvenir à une couverture sanitaire universelle. 

Déclaration des coprésidents

M. ADOLFO RUBINSTEIN, Ministre de la santé de l’Argentine, a exhorté les pays à mobiliser davantage de ressources intérieures et institutionnaliser l’adoption de mesures multisectorielles pour parvenir à la couverture sanitaire universelle d’ici à 2030.  « Si la pauvreté produit des maladies, la mauvaise santé est aussi un moteur de la pauvreté » a-t-il ajouté, avant de rappeler que la dernière réunion du G20, tenue à Osaka, avait permis de rassembler des ministres de la santé et ministres de la finance pour discuter de la couverture sanitaire universelle.  « Pour convaincre nos homologues financiers d’investir, nous devons modifier nos façons de les aborder » a-t-il dit.  « Outre notre jargon médical, nous devons inclure les chiffres que les donateurs potentiels s’attendent à entendre pour pouvoir comprendre les rendements attendus. »  Mettant l’accent sur l’importance des partenariats, le Ministre de la santé a cité la mise en place, en Argentine, d’un programme de 650 millions de dollars, financé à part égale entre la Banque mondiale et le Gouvernement argentin, pour financer 13 lignes de soins prioritaires et 70 prestations prises en charge pour la première fois. 

À son tour, M. DON PRAMUDWINAI, Ministre des affaires étrangères de la Thaïlande, a déclaré que la couverture sanitaire universelle n’est pas seulement un rêve mais peut devenir une réalité si elle s’appuie sur trois piliers que sont l’équité, l’efficacité et la participation.  Il a expliqué que la couverture sanitaire universelle ne concerne pas seulement le secteur de la santé mais toutes les parties prenantes intéressées.  « Une population saine est un élément fondamental pour mener un pays vers la prospérité et la stabilité », a-t-il affirmé, avant de suggérer de permettre aux communautés locales de gérer leurs propres fonds en faveur de la santé.  Il a jugé que la participation multisectorielle est déterminante pour trouver des partenariats. 

Déclarations des panélistes

Mme HELEN CLARK, Présidente de « Partnership for Maternal, Newborn & Child Health », (Partenariat pour la santé maternelle, néonatale et infantile) a rappelé la référence que constitue l’adoption, en 1978, de la Déclaration d’Alma-Ata sur les soins de santé primaire.  Elle a souligné qu’investir dans la santé primaire permettrait de sauver 60 millions de vies et de réduire les inégalités entre les populations.  Par ailleurs, elle a jugé indispensable d’établir des partenariats pour parvenir à la couverture sanitaire universelle.  « Les partenariats sont au cœur de cet objectif », a-t-elle souligné.  Elle a aussi insisté sur la nécessité de nouer des dialogues entre différents secteurs, en prévenant de l’impact qu’auront les changements climatiques sur la santé des personnes.  Elle a aussi estimé que les partenariats peuvent améliorer la représentation et donner une voix aux personnes qui ont besoin d’être entendues.  « Les partenariats peuvent aussi nous aider à mettre en œuvre le principe de responsabilisation par rapport aux engagements pris » a-t-elle ajouté. 

M. OMAR ISHRAK, Président Directeur général de Medtronic, une entreprise de technologie médicale opérant dans 150 pays, a estimé que l’ONU a une idée remarquable, en vertu de laquelle chacun devrait avoir accès aux services sanitaires sans risquer d’encourir la faillite financière ou la pauvreté.  Cette déclaration onusienne demande avec raison que soit mis au point un modèle de paiement durable et cela passe par une infrastructure globale, du personnel qualifié et des hôpitaux bien équipés, a-t-il relevé.  Mais dans la plupart des cas, il n’y pas de responsabilité financière.  Ce modèle n’est donc pas viable, a-t-il tranché. 

De fait, a poursuivi M. Ishrak, si nous ne créons pas un système durable, la couverture sanitaire universelle ne verra pas le jour dans un grand nombre de pays.  Il importe par conséquent, a-t-il estimé, de créer un système où les frais s’appuient sur la valeur de la prestation fournie au patient et qui permette de rembourser les parties prenantes, qu’il s’agisse des fournisseurs, des médecins ou d’organisations comme Medtronic.  Il faut aussi qu’un partenariat efficace s’instaure entre les parties prenantes, a-t-il souligné, appelant également de ses vœux des résultats quantifiables permettant de comprendre les coûts auxquels sont confrontées ces dernières.  Pour ce faire, il est essentiel de pouvoir disposer des données appropriées, a relevé le PDG de Medtronic, appelant les pays en développement à bâtir leur système de santé de cette manière. 

Concrètement, a-t-il ajouté, Medtronic et le secteur privé peuvent aider à l’amélioration des approches thérapeutiques avec de nouvelles méthodes et permettre d’élargir l’accès aux soins en veillant à élaborer des produits novateurs.  Nous pouvons aussi mettre notre puissance technologique au service d’une plus grande efficacité des hôpitaux, a-t-il souligné.  Les défis devant nous sont immenses mais les opportunités sont plus grandes encore pour faire de la santé un moteur économique et non pas une charge financière. 

Mme NGOZI OKONJO-IWEALA, Présidente de l’Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination (GAVI), a présenté les buts de son organisation consistant à sauver la vie des enfants, protéger la santé des populations en élargissant l’accès à la vaccination dans les pays pauvres.  « Aucun investissement n’est plus rentable que l’investissement dans la vaccination » a martelé Mme Okonjo-Iweala avant de préciser que chaque dollar investi dans la vaccination rapporte 40 dollars à l’économie.  « Mais augmenter les dépenses nationales pour la santé ne suffit pas si nous ne garantissons pas l’efficacité de l’utilisation de ces moyens », a-t-elle tempéré.  Illustrant son propos, elle a cité un rapport de 2010 montrant que 6% des dépenses de santé sont perdues en raison de la corruption. 

M. KEIZO TAKEMI, Ambassadeur de bonne volonté de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur la couverture sanitaire universelle, s’est dit encouragé par le large soutien politique dont bénéficie la couverture sanitaire universelle au-delà du secteur de santé conventionnel.  Il s’est aussi déclaré ravi d’observer que la coopération étroite entre les autorités de la finance et de la santé, pour parvenir à la couverture sanitaire universelle, ait été mentionnée dans la déclaration politique de la réunion ministérielle du G20 à Osaka.  Il importe, par conséquent, que chaque pays développe sa propre feuille de route en la matière, en prenant en compte ce mouvement mondial, a-t-il souligné, espérant que ces discussions continueront de progresser lors du prochain G20 en Arabie saoudite. 

Évoquant ensuite sa propre expérience, le docteur Takemi a rappelé qu’au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la tuberculose représentait le principal problème sanitaire au Japon.  Le pays a alors décidé de réaliser des investissements préventifs contre cette maladie à haut coût, en s’appuyant sur la ressource publique.  Cela a permis d’atténuer le poids financier des soins de santé et d’élargir graduellement la couverture sanitaire dans l’ensemble de la nation japonaise, a-t-il précisé, ajoutant qu’au bout du compte, la couverture sanitaire universelle a été atteinte au Japon en 1961.  Le cercle vicieux de la maladie et de la pauvreté a ainsi pu être contrecarré, le niveau de vie des Japonais s’est amélioré et la croissance économique a été au rendez-vous, s’est-il félicité, évoquant un « cercle vertueux » liant santé et croissance économique.  Selon lui, il convient pour les pays de prendre ce type de mesures à un stade précoce du développement économique afin de créer les infrastructures pour une croissance économique et un développement social durable. 

Pour le docteur Takemi, il est essentiel, pour parvenir à la couverture sanitaire universelle, d’établir un système de financement durable basé sur des fonds nationaux, avec le soutien stratégique de fonds externes.  Un autre défi est celui de l’accès insuffisant aux technologies de pointe dans le domaine sanitaire en raison de la disparité réglementaire entre les différents pays.  Pour y remédier, il a plaidé pour une harmonisation des règles en vigueur au niveau international.  Il a également appelé à un meilleur accès aux services de santé pour les personnes vulnérables afin de garantir une équité en matière sanitaire.  Mais pour que cette couverture sanitaire universelle devienne réalité d’ici à 2030, il est indispensable de mettre davantage l’accent sur le renforcement des systèmes de santé que sur les approches actuelles basées sur les pathologies, a-t-il insisté.  Il faut aussi des efforts multisectoriels, a-t-il plaidé. 

Dialogue interactif

Pour parvenir à un système sanitaire solide, les intervenants ont été nombreux à insister sur la nécessité d’un système de soins abordables, efficace et bien géré, mais aussi d’un accès aux médicaments et technologies médicales qui tienne compte des besoins des plus vulnérables.  L’importance d’un personnel de santé en nombre suffisant, bien formé et motivé a aussi été cité.

Faisant le lien entre santé et développement, plusieurs intervenants ont aussi souligné la pertinence d’investissements complémentaires.  « Les investissements dans la santé sont plus efficaces s’ils sont doublés d’investissements dans l’eau et l’assainissement » a expliqué la Présidente de l’Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination (GAVI).  Elle a aussi appelé à faire preuve de créativité fiscale en taxant l’alcool, le tabac et autres articles qui nuisent à la santé pour financer la couverture sanitaire universelle. 

« La conception des services est un processus inclusif qui inclut toute une collection de partenariats » a noté la Présidente de « Partnership for Maternal, Newborn & Child Health » avant d’appeler à des démarches prenant en compte les attentes des plus marginalisés, de la société civile et du monde professionnel.  Elle a également souligné que le monde aura besoin de 40 millions de personnels de santé supplémentaires d’ici à 2030, et a appelé à faire de la santé des femmes et des enfants une priorité. 

En la matière, la Ministre de la santé de la Sierra Leone a fait le lien entre « santé et éducation » pour éviter les mariages et grossesses précoces synonymes de mortalité maternelle.  En écho à cette intervention, le Royaume-Uni a mis l’accent sur les liens entre droits génésiques et santé, dénonçant le fait que 800 femmes meurent chaque jour en raison de complications liées à des grossesses non désirées.  Le Royaume-Uni a d’ailleurs mis en œuvre un programme visant à faire respecter les droits reproductifs dans les pays en développement et éviter cinq millions de grossesses non désirées chaque année jusqu’en 2025. 

De son côté, l’Ambassadeur de bonne volonté de l’OMS a estimé que réaliser la couverture sanitaire universelle n’est pas un objectif en soi, mais une étape pour garantir une société plus saine, en tenant compte des groupes socialement les plus défavorisés dont les handicapés, les migrants et les réfugiés.  Le PDG de Medtronic a appelé pour sa part à des résultats quantifiables sur les coûts de chaque intervention, prévenant dans la foulée que la couverture sanitaire universelle ne pourra se faire sans un modèle de paiement « reposant sur la responsabilité en fonction des résultats » 

En matière de financement, la Suède a qualifié les investissements publics d’indispensables pour réaliser l’objectif de la couverture sanitaire universelle, tout en appelant à des incitations aux investissements privés et à lutter contre la corruption.  Il ne faut pas pour autant négliger l’investissement dans la science et la technologie comme moyen d’améliorer l’accès aux services de santé, a opiné le Ministre des affaires étrangères de l’Estonie

« Avec un milliard de dollars d’investissements annuels dans les systèmes de santé, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme est le grand bailleur de fonds des systèmes de santé, s’est félicité son représentant, tandis que le Forum économique mondial a mis l’accent sur la contribution du service privé pour atteindre l’objectif de la couverture sanitaire universelle. 

Le représentant du Burkina Faso a, quant à lui, présenté l’expérience engagée par son pays depuis trois ans pour couvrir les soins de santé des femmes et des enfants de moins de 5 ans, estimés à 54 millions de dollars « Grâce à cet investissements public, les fonds des ménages ne sont plus la première source de financement des soins et se retrouvent dans le pouvoir d’achat », a-t-il expliqué. 

Dans la même veine, le Vice-Ministre de la santé de la Thaïlande a expliqué que les investissements dans la couverture sanitaire universelle avaient permis une augmentation considérable des revenus les plus faibles.  Même son de cloche du côté de l’Indonésie qui vise l’objectif de la couverture sanitaire universelle par une mobilisation des ressources nationales doublée de partenariats publics-privés pertinents afin de répondre aux besoins sanitaires des populations les plus marginalisées.  Le Nicaragua a expliqué que sa population bénéficie d’un système de santé gratuit grâce à une volonté politique au plus haut niveau, tandis que les Philippines se sont félicitées de l’adoption, il y a sept mois, d’une loi instaurant la couverture sanitaire universelle à l’échelon national. 

Déclarations de clôture

Les conversations d’aujourd’hui ont montré que nous voulons faire de ce qui aurait pu être « juste un slogan » une véritable stratégie, s’est félicité Mme Melinda Gates, coprésidente et mandataire de la Fondation Bill et Melinda Gates.  Forte de l’expérience de sa fondation, elle a cité les déboires d’une jeune femme enceinte en Afrique frappée du paludisme qui n’a pas pu être soignée, en dépit du fait qu’elle avait dépensé tout son argent à la recherche d’un diagnostic et de soins.  « Cette histoire est celle de millions de personnes confrontées à des systèmes de santé publics inefficaces », a dénoncé Mme Gates avant de plaider pour un monde dans lequel chacun pourrait être reçu par un professionnel de la santé et bénéficier d’un diagnostic fiable et de soins sans pour autant être ruiné.  C’est un monde qui se verrait doté de systèmes sanitaires primaires de qualité, a-t-elle affirmé, ajoutant qu’il s’agit là de la première étape sur la voie de la couverture sanitaire universelle.  Cette entreprise exige de la part des gouvernements de dépenser davantage pour la santé publique a-t-elle reconnu, « mais les soins primaires sont des investissements efficaces pour les gouvernements ».

Mme Gates a ensuite jugé irréaliste d’affirmer que tous les services de santé sont essentiels, et a conseillé aux responsables publics de fixer des priorités sur la base de données fiables.  Elle a noté que même si tout le monde a des perspectives un peu différentes, l’objectif final reste le même pour tous: une population en bonne santé. 

« Nous avons écrit l’histoire », s’est félicité M. TEDROS ADHANOM GEBREYESUS, Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).  « Ensemble, nous nous sommes engagés à réaliser un monde où personne n’est exempté de service de santé de qualité parce qu’il ne peut se le permettre », a-t-il souligné.  Le Directeur général de l’OMS a notamment déclaré voir dans le Japon un « exemple frappant du potentiel de transformation que peut avoir cette couverture ».  Adoptée par ce pays alors qu’il était encore en reconstruction, la couverture sanitaire universelle est devenue le socle de la puissance économique du Japon, a-t-il souligné. 

Pour parvenir à terme à la couverture sanitaire universelle, il n’existe pas de solution unique, a poursuivi M. Gebreyesus.  Mais pour tous les pays, les soins de santé primaire doivent constituer le point de départ.  Il a également relevé que si la Déclaration politique appelle à une hausse des dépenses publiques en matière de santé, cela ne peut suffire.  Selon lui, promouvoir la santé et prévenir les maladies méritent le soutien de tous les secteurs: énergie, transports, commerce, agriculture et environnement, notamment.  De plus, il existe de nombreuses mesures juridiques, fiscales et réglementaires qui peuvent être prises pour aider à promouvoir la couverture sanitaire universelle. 

Toutefois, a-t-il tempéré, tout commence par un choix politique.  Car la santé est un droit humain fondamental, une fin en soi et un outil du développement.  En ce sens, a-t-il ajouté, la Déclaration politique adoptée aujourd’hui est « puissante », même si « aucune maladie ne peut être prévenue par une simple déclaration ».  Soulignant que l’engagement des États ne veut rien dire tant qu’il n’est pas traduit dans la réalité quotidienne des personnes, il a appelé à agir avec un sentiment d’urgence, rappelant que l’objectif principal de l’OMS est d’aider les pays à transformer leur système de santé pour parvenir à un monde « plus sain et plus juste ».      

Lui emboitant le pas, le Premier Ministre du Japon, M. SHINZO ABE, s’est félicité de l’élan impulsé par le Groupe des amis de la couverture sanitaire universelle (CSU)à la réunion d’aujourd’hui.  Rappelant que le Japon avait opté pour la CSU au lendemain de la guerre, le Ministre a indiqué que cette initiative se traduit aujourd’hui par une société vieillissante en bonne santé.  Pourtant, près de la moitié de la population mondiale n’a toujours pas accès aux soins de santé de base, a regretté M. Abe avant de mettre l’accent sur l’importance de la prise en main nationale de la couverture sanitaire universelle.  Il a indiqué que le Japon apporte une assistance aux pays à cette fin et cherche par ailleurs à promouvoir une démarche intersectorielle ainsi que la coopération avec le secteur privé dans ces efforts. 

M. Abe a aussi insisté sur l’importance d’assurer un financement adéquat de la couverture sanitaire universelle dans les pays en développement, mais aussi d’établir un cadre de suivi et de reddition de comptes.  Le Sommet sur la nutrition, qui se tiendra à Tokyo en 2020, est un premier rendez-vous pour cela.  Concluant, le Premier Ministre du Japon a déclaré que la Déclaration politique entérinée aujourd’hui représente un grand pas en avant.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

L’Assemblée générale adopte les 174 questions de son ordre du jour dont « la responsabilité de protéger », à l’issue d’un vote

Soixante-quatorzième session
2e séance plénière - matin
AG/12180

L’Assemblée générale adopte les 174 questions de son ordre du jour dont « la responsabilité de protéger », à l’issue d’un vote

L’Assemblée générale a pris note, ce matin, du premier rapport de son bureau sur l’organisation de sa soixante-quatorzième session ordinaire, l’adoption de l’ordre du jour et la répartition des 174 questions*.  Ce faisant, elle a dû, à la demande de la Syrie, procéder à un vote sur la question relative à « la responsabilité de protéger ».

À la clôture de la soixante-treizième session, le 16 septembre dernier, l’Assemblée générale avait déjà adopté à l’issue d’un vote l’inscription à son ordre du jour de la question relative à « la responsabilité de protéger et la prévention du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l’humanité ».  Aujourd’hui, elle a voté sur la proposition de son Bureau d’inscrire ce point sous le titre « questions d’organisation, questions administratives et autres questions ». 

Soixante-dix-neuf États Membres ont dit oui, 13** ont dit non et 17 se sont abstenus.  Nous avons demandé le vote, a expliqué la Syrie, parce que certaines délégations continuent de vouloir inscrire cette question à l’ordre du jour sans tenir compte des méthodes de travail de l’Assemblée.  C’est tout simplement une tentative de contourner le principe agréé du consensus, a accusé la Syrie qui, appuyée par Cuba, a rappelé, une nouvelle fois, qu’à ce jour, il existe toujours des divergences sur la définition, les modalités et le champ d’application de la notion de « responsabilité de protéger ». 

Dans le flou actuel, l’application de cette notion, a estimé la Syrie, a piétiné la souveraineté de certains pays.  Soutenue aussi par l’Iran, elle s’est interrogée sur le bien-fondé de débattre de cette notion à la plénière de l’Assemblée générale, préférant un cadre plus informel.  L’année dernière, a confié Singapour, nous avons voté pour l’inscription de la question.  Mais cette année, nous nous sommes abstenus parce que nous ne sommes pas convaincus de la faculté de l’Assemblée de parvenir au consensus.  Il a, à son tour, prôné un dialogue informel pour « aplanir nos divergences ». 

La Syrie a également relevé la différence avec les paragraphes 138 et 139 du Document final du Sommet mondial de 2005 qui parlent de « protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l’humanité ».  Or l’intitulé de la question en discussions se lit « la responsabilité de protéger et la prévention du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l’humanité », a-t-elle fait observer.  Sur quelle base juridique se fonde cet intitulé? a-t-elle demandé, avant que la Fédération de Russie ne fasse de même, « très déçue » devant la « réécriture » du Document de 2005. 

Membre des six délégations qui ont demandé l’inscription de la question à l’ordre du jour, le Danemark a souligné qu’après les votes du 16 septembre et d’aujourd’hui, la « voix de l’Assemblée générale a été entendue et doit être respectée ».  Au nom de l’Union européenne, la Finlande s’est également levée contre la mise en cause d’une décision de l’Assemblée.  Cette dernière s’est prononcée dans son immense majorité pour des discussions formelles sur le fond du concept, ont martelé les États-Unis. 

L’inscription à l’ordre du jour du point sur « la situation dans les territoires ukrainiens temporairement occupés » a été qualifiée d’« erreur » par la Fédération de Russie qui s’est alarmée de son « aspect destructif ».  Les Accords de Minsk ne sont mêmes pas mentionnés, a-t-elle dénoncé, et face à « cette initiative inacceptable », elle s’est dissociée du consensus, non sans rappeler que 71 États se sont opposés à cette initiative, dont la Syrie qui l’a elle-même confirmé aujourd’hui.

Les 174 questions de l’ordre du jour sont réparties entre la plénière de l’Assemblée générale et les six grandes commissions.  Si la soixante-quatorzième session doit être clôturée le 14 septembre 2020, elle sera suspendue le 16 décembre 2019: la Première Commission chargée des questions de désarmement et de la sécurité internationale achèvera ses travaux le 8 novembre; la Quatrième Commission chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, le 15 novembre; la Sixième Commission chargée des questions juridiques, le 20 novembre; la Troisième Commission chargée des questions sociales, culturelles et humanitaires, le 21 novembre; la Deuxième Commission chargée des questions économiques et financières, le 27 novembre; et la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, le 13 décembre. 

Ce lundi 23 septembre, l’Assemblée tiendra à partir de 9 heures sa Réunion de haut niveau sur la couverture sanitaire universelle.  Le débat général des chefs d’État et de gouvernement commencera le lendemain, mardi 24 septembre à partir de 9 heures

 

*     A/74/250

**    Bolivie, Chine, Cuba, Égypte, Érythrée, Fédération de Russie, Iran, Myanmar, Nicaragua, République populaire démocratique de Corée, Syrie, Venezuela et Zimbabwe

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Moyen-Orient: le Coordonnateur spécial et une majorité de membres du Conseil de sécurité mettent en garde Israël contre ses projets d’annexion

8625e séance – matin
CS/13959

Moyen-Orient: le Coordonnateur spécial et une majorité de membres du Conseil de sécurité mettent en garde Israël contre ses projets d’annexion

Venu présenter, ce matin, au Conseil de sécurité le onzième rapport du Secrétaire général portant sur l’application de la résolution 2334 adoptée en 2016, le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient n’a fait état d’aucun progrès susceptible d’inverser les « tendances négatives » sur le terrain.  Il s’est, en revanche. élevé contre les plans d’annexion de la vallée du Jourdain et du nord de la mer Morte annoncés par Israël pour étendre sa souveraineté en Cisjordanie occupée, y voyant, comme un grand nombre de délégations, un grave danger pour les négociations israélo-palestiniennes aujourd’hui dans l’impasse.

« Ce serait là une violation grave du droit international mais aussi un facteur dévastateur pour la relance des négociations de paix et la stabilité régionale, sans compter que ce serait un obstacle à la viabilité de la solution des deux États », a martelé M. Nikolay Mladenov, appelant Israël à renoncer à ce projet et à mettre fin à sa politique de colonisation qui n’a pour effet que d’alimenter la colère et les désillusions parmi la population palestinienne. Rappelant que la résolution 2334 exhorte toutes les parties à « s’abstenir de tout acte de provocation et d’incitation à la violence et de toute déclaration incendiaire », il a également dénoncé les propos de groupes radicaux palestiniens, notamment l’appel à « attaquer tous les juifs de la planète » lancé le 12 juillet par un dirigeant du Hamas aux Palestiniens partout dans le monde.

Pour une grande majorité des délégations, la nouvelle dégradation observée sur le terrain et l’absence de tout espoir de reprise des négociations sont largement imputables à la promesse faite par le Premier Ministre Benyamin Netanyahu d’appliquer, s’il sortait victorieux des élections du 17 septembre, la souveraineté israélienne à toutes les implantations juives de Cisjordanie.  Ce n’est pas en construisant des colonies illégales, en confisquant les biens des Palestiniens ou en annexant la vallée du Jourdain que nous parviendrons à la paix, a fait valoir le Ministre des affaires étrangères de la Jordanie, M. Ayman Safadi, selon lequel « c’est plutôt comme cela que l’on tue les perspectives de paix ».

Qualifiée de « contre-productive » par la Chine et d’équivoque par l’Indonésie, la proposition israélienne a également été dénoncée par la France, laquelle a estimé que la mise en œuvre de telles mesures d’annexion constituerait non seulement « une violation grave et sans précédent du droit international », mais alimenterait en outre l’instabilité de la région en exacerbant les tensions et en nourrissant toutes les formes d’extrémisme.  La Fédération de Russie a, elle aussi, mis en garde contre les risques d’escalade qu’implique ce plan israélien, non sans ajouter qu’il en va de même de la reconnaissance par les États-Unis de Jérusalem comme capitale d’Israël et de l’annonce de la souveraineté d’Israël sur le Golan.

Regrettant l’absence de dissuasion exercée sur Israël pour le contraindre à mettre fin à sa politique de peuplement illégale, le Ministre des affaires étrangères de l’État observateur de Palestine, M. Riad Malki, a quant à lui accusé la Puissance occupante de vouloir « changer la nature de la réalité sur le terrain », au mépris de tous les traités et accords, « de façon à ce que les Palestiniens acceptent ce qui reste, c’est-à-dire une réalité pratique qui n’est pas acceptable », une réalité, selon lui, « fondée sur l’apartheid ».  Dans ce contexte, s’est indigné le Ministre, la solution des deux États « n’est pas envisageable aujourd’hui », toute négociation sérieuse devant s’appuyer sur la fin de la colonisation israélienne, y compris à Jérusalem-Est, dans des délais prescrits et dans le cadre juridique arrêté à l’échelle internationale.

« Nous n’avons pas le contrôle de la vallée du Jourdain », a répondu Israël à ce concert de critiques, tout en insistant sur le fait que la sécurité des frontières israéliennes est la « condition sine qua non » d’une paix durable. À cet égard, a relevé le représentant israélien, on présente Israël comme le « méchant » dans la région, « mais en réalité nous essayons simplement d’éradiquer le danger iranien », qui représente le « principal défi » auquel se heurte le Moyen-Orient.  « Nous n’accepterons jamais que l’Iran menace notre existence », a-t-il encore martelé, jugeant cette position parfaitement compatible avec les résolutions du Conseil de sécurité sur la question, ainsi qu’avec le droit d’Israël à la légitime défense, tel que le garantit la Charte des Nations Unies. 

Face au « négativisme » dont fait l’objet Israël, les États-Unis ont à leur tour condamné l’acharnement injustifié dont font preuve, selon eux, de « nombreux États Membres » qui multiplient les plaintes et résolutions à l’encontre de cette « démocratie accomplie », refuge depuis sa création pour ceux qui fuient la répression.  « Israël n’aura pas de meilleur ami que Kelly Craft », n’a pas hésité à lancer la nouvelle représentante permanente américaine auprès des Nations Unies, répétant par deux fois que les États-Unis ont toujours soutenu Israël par le passé et qu’ils continueront de le faire aujourd’hui et à l’avenir.  Elle n’a cependant évoqué ni le plan d’annexion israélien ni les propositions de son administration pour relancer le processus de paix.  Des propositions que son homologue britannique a souhaité voir prochainement formulées pour parvenir à sauvegarder la solution des deux États, seule issue viable au conflit à ses yeux.

Devant ce que le Koweït a qualifié d’« inaction internationale » permettant à Israël de « persister dans le mépris du droit international », l’Indonésie a appelé le Conseil de sécurité à  « réaffirmer son autorité » lorsqu’il y a violation de ses décisions, comme c’est le cas pour la résolution 2334 (2016).  La Côte d’Ivoire l’a invité à « faire preuve d’approches innovantes », jugeant impératif la création d’un cadre approprié de négociations et de relance du processus politique.  Un avis partagé par la Fédération de Russie, qui, à l’instar de l’Afrique du Sud, s’est prononcée en faveur d’un déplacement du Conseil dans la région.  Une telle mission renforcerait la confiance et contribuerait à relancer les discussions, a-t-elle argué, rappelant que la base juridique établie par le Conseil est la seule qui puisse être utilisée dans le cadre d’un règlement, toute mesure unilatérale étant « vaine » selon elle.  

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

Présentant le onzième rapport sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) qui couvre la période allant du 11 juin au 11 septembre 2019, le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, M. NICKOLAY MLADENOV, n’a pas mâché ses mots: la période à l’examen ne peut être dissociée du contexte plus large.  Il a cité l’occupation militaire israélienne du Territoire palestinien, les activités de peuplement et la menace d’annexion, le contrôle du Hamas sur Gaza et ses activités militaires, les mesures unilatérales qui compromettent les efforts de paix et la viabilité fiscale de l’Autorité palestinienne, et le risque persistant d’une escalade militaire dans la région. 

Dans sa résolution, a rappelé le Coordonnateur spécial, le Conseil de sécurité « exige de nouveau d’Israël qu’il arrête immédiatement et complètement toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est ».  Rien n’a été fait pendant la période à l’examen, a tranché M. Mladenov, en énumérant les derniers exemples, dont la construction de 3 000 logements en Cisjordanie, y compris 400 à Jérusalem-Est.  Les autorités israéliennes, a-t-il ajouté, poursuivent les démolitions et les confiscations des structures palestiniennes. 

La résolution « demande que des mesures immédiates soient prises pour prévenir tous les actes de violence visant des civils, y compris les actes de terreur, ainsi que tous les actes de provocation et de destruction ».  Or, pendant la période à l’examen, a alerté le Coordonnateur spécial, l’on a vu des niveaux de violence alarmants, dans tout le Territoire palestinien occupé alors que les tensions dans la vieille ville de Jérusalem ont continué.  À Gaza, le niveau général de la violence a baissé mais les tensions sont toujours palpables.  Les Forces de sécurité israéliennes ont tiré à balles réelles sur les manifestants, toujours mobilisés, de la « Grande Marche du retour » alors qu’Israël a signalé moins de lancers de cerfs-volants enflammés mais tout de même 140. 

Dans sa résolution, le Conseil appelle aussi toutes les parties à « s’abstenir de tout acte de provocation et d’incitation à la violence et de toute déclaration incendiaire ».  Malheureusement, a constaté le Coordonnateur spécial, de telles actions se poursuivent.  Le 12 juillet par exemple, un dirigeant du Hamas a appelé les Palestiniens partout dans le monde à « attaquer tous les juifs de la planète ».  Il a été condamné par l’Autorité palestinienne qui a qualifié ces propos de « répugnants ».  De l’autres côté, des politiciens israéliens de renom ont publiquement minimiser l’attachement des Palestiniens à leur terre ancestrale, appelé à l’annexion de la Zone C de la Cisjordanie et rejeté la notion d’un État palestinien. 

La résolution, a poursuivi M. Mladenov, réitère les appels du Quatuor soulignant que « des mesures importantes doivent être prises de toute urgence en vue d’inverser les tendances négatives sur le terrain qui ne cessent de fragiliser la solution des deux États ».  Une évolution positive a été constatée pendant la période à l’examen mais elle a été assombrie par les tendances négatives, a dit le Coordonnateur spécial.  Il a, par exemple, cité le fait que le 22 août dernier, Israël et l’Autorité palestinienne ont conclu un accord au terme duquel cette dernière a reçu une somme de 568 millions de dollars comme part du remboursement des taxes collectées par Israël sur le carburant.  Malheureusement, a-t-il ajouté, près de deux ans après l’accord sur la réconciliation facilitée par l’Égypte, les divisions interpalestiniennes restent fortement ancrées. 

Le Coordonnateur s’est tout de même félicité de ce que la générosité des États ait permis à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient (UNRWA) de réduire son déficit de 211 à 120 millions de dollars, en janvier dernier. 

La résolution du Conseil de sécurité, a encore rappelé le Coordonnateur spécial, « demande à tous les États de faire une distinction, dans leurs échanges, entre le territoire de l’État d’Israël et les territoires occupés depuis 1967 ».  Il a noté les procédures enclenchées par la Cour européenne de justice et la Cour fédérale du Canada.  En revanche, aucun effort sérieux n’a été fait pour que « toutes les parties continuent de déployer collectivement des efforts pour engager des négociations crédibles ». 

En conclusion, le Coordonnateur spécial a appelé à la fin des colonies de peuplement au motif qu’elles alimentent la colère et les désillusions parmi la population palestinienne et qu’elles compromettent sérieusement la perspective d’un État palestinien contigu et viable avec Jérusalem comme capitale des deux États.  Il a aussi relayé les préoccupations du Secrétaire général après les déclarations sur l’annexion de la vallée du Jourdain et du nord de la mer Morte comme première étape de la souveraineté israélienne sur toutes les colonies de peuplement et dans d’autres zones de la Cisjordanie occupée. 

Ce serait là, a dénoncé M. Mladenov, une violation grave du droit international mais un facteur dévastateur pour la relance des négociations de paix et la stabilité régionale, sans compter que ce serait un obstacle à la viabilité de la solution des deux États.  Le Coordonnateur spécial a aussi invoqué le droit international pour demander à Israël de cesser les démolitions et les confiscations des structures palestiniennes.  S’agissant de Gaza, il a appelé les Forces de sécurité israéliennes à faire preuve de retenue mais aussi le Hamas et le Jihad islamique, à cesser les tirs de roquette et de mortier contre la population civile israélienne. 

M. Mladenov n’a pas oublié de relayer les appels au statu quo dans les Lieux saints, conformément au rôle spécial et historique du Royaume de Jordanie, comme gardien des sites musulmans et chrétiens de Jérusalem.  Il a demandé à Israël et à l’Autorité palestinienne de discuter, de manière constructive, pour rétablir le transfert des revenus, conformément au Protocole de Paris sur les relations économiques.  Il a demandé à toutes les factions palestiniennes de s’engager activement avec l’Égypte sur la réconciliation. 

Trois ans après l’adoption de la résolution 2334, il est difficile, a avoué le Coordonnateur spécial, de tolérer la détérioration d’un statut quo déjà difficile.  Cette situation, a-t-il tranché, reflète l’échec collectif des leaders, des politiciens et de la communauté internationale à concrétiser la vision selon laquelle la paix entre l’État d’Israël et de l’État de Palestine ne peut être réalisée que par des négociations pacifiques avec l’appui international, et sur la base des lignes de 1967, du droit international, des résolutions pertinentes des Nations Unies et des accords antérieurs.  Il n’y aucune autre solution viable pour mettre fin au conflit.  Ceux qui continuent à appuyer la solution des deux États doivent savoir que faire dérailler cette perspective c’est projeter les Israéliens et les Palestiniens dans un avenir sombre d’occupation perpétuelle, de violence sans fin et de menaces à la stabilité régionale. 

M. RIAD AL-MALIKI, Ministre des affaires étrangères de l’État observateur de Palestine, a constaté que le dixième exposé du Coordonnateur spécial sur la mise en œuvre de la résolution 2334 « contient encore plus de violations, de crimes et d’agression de la part de la Puissante occupante que les précédents ».  Et comme dans les exposés précédents, « la situation est alarmante », a-t-il dit, s’interrogeant sur la nécessité de ces examens périodiques, alors que les rapports insinuent clairement que les perspectives de paix ne font que s’amenuiser et que les activités de peuplement d’Israël s’intensifient.  Selon lui, il n’y a « pas de progrès à attendre » tant qu’il n’y aura pas de dissuasion à l’égard d’Israël pour le contraindre à mettre fin à sa politique coloniale, de façon à ce que la solution des deux États sur les frontières de 1967 soit possible, « ce qui n’est pas envisageable aujourd’hui ».  

Israël, a poursuivi le Chef de la diplomatie palestinienne, n’a jamais reconnu le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et continue de bafouer les résolutions du Conseil de sécurité en toute arrogance, considérant qu’il bénéficie d’un « statut extraordinaire ».  Le mépris d’Israël à l’égard des droits des Palestiniens a, selon lui, atteint un tel niveau que les autorités de cet État « donnent des terres aux électeurs pour gagner leurs voix.  Il a ainsi rappelé que le Premier Ministre israélien Benyamin Netanyahu avait déclaré que « le territoire colonisé au nord de la mer Morte serait annexé », ce qui constitue selon lui « un aveu ».  Les tentatives d’Israël visent à changer la démographie des terres colonisées depuis 1967 mais cela ne changera rien au statut juridique du Territoire palestinien, a souligné le Ministre.

Dénonçant les violences commises par la Puissance occupante dans le Territoire palestinien, M. al-Maliki a vu dans ces pillages et expulsions forcées une « violation flagrante du droit international humanitaire » mais aussi des « crimes de guerre », en vertu du Statut de Rome.  Il s’est également élevé contre le « blocus illégal » imposé à Gaza, le mur construit pour permettre un plus grand contrôle israélien, les mesures prises en faveur de colons en Cisjordanie, les provocations autour des lieux de culte et les points de contrôle imposés sur tout le Territoire palestinien.  De plus, a-t-il renchéri, des personnes innocentes sont emprisonnées, nos ressources naturelles sont pillées et Israël refuse obstinément toute critique.  De fait, « la Puissance occupante est en train de changer la nature de la réalité sur le terrain, elle cherche à faire céder le peuple palestinien et bafoue l’ensemble des traités et accords de façon à ce que les Palestiniens acceptent ce qui reste, c’est-à-dire une réalité pratique qui n’est pas acceptable », a-t-il observé, demandant aux membres du Conseil s’ils peuvent « accepter une telle réalité ». 

Dans ce contexte, s’est indigné le Ministre, la solution des deux États est bafouée puisque les décisions internationales sont méprisées par Israël.  En effet, a-t-il souligné, toute négociation sérieuse doit s’appuyer sur la fin de la colonisation israélienne, y compris à Jérusalem-Est, dans des délais prescrits et dans le cadre légal arrêté à l’échelle internationale.  Il ne s’agit pas là d’une condition palestinienne, a insisté M. al-Maliki, répétant qu’il existe un cadre international qui doit être respecté et auquel les Palestiniens entendent se conformer.

Bien que ce se soit important, a-t-il encore argué, il n’est pas suffisant de proclamer l’absence de plan B.  Il nous faut, au contraire, identifier les conditions permettant au plan A de prévaloir.  Il nous faut aussi nous méfier de la « réalité alternative » qu’Israël crée sur le terrain, a-t-il ajouté, évoquant « une réalité fondée sur l’apartheid ».  Pour le Ministre, la volonté des faiseurs de paix doit triompher de celle des bulldozers.  Il a souhaité, à cet égard, saluer les positions fermes exprimées par des membres du Conseil de sécurité et de la communauté internationale qui, selon lui, démontrent la « solidité du consensus » en faveur d’une paix juste et durable.  Il a aussi remercié tous ceux qui appuient le peuple palestinien ainsi que les réfugiés par le biais de l’UNRWA. Il a par ailleurs salué la réponse apportée par le monde arabe, et notamment par l’Organisation de la Coopération islamique (OCI), à la provocation dont a fait preuve Israël en annonçant des mesures d’annexion.

Avant de conclure, le Ministre a rappelé que le Conseil de sécurité, par le biais de sa résolution 2334 (2016), souhaitait que la paix et la sécurité soient maintenues par l’exécution de son mandat.  « Il nous faut trouver les moyens d’agir pour que ce droit soit respecté », a-t-il dit, appelant les États Membres à contribuer aux efforts de paix en appuyant les droits inaliénables du peuple palestinien,  en ne reconnaissant pas les actions illégales prises par Israël, en n’apportant pas d’aide aux activités de colonisation illégales, en faisant la distinction entre le territoire de l’État d’Israël et les territoires occupés depuis 1967 et en assurant la reddition des comptes.

Le principal défi auquel se heurte la région est la République islamique d’Iran, a affirmé à l’entame de son discours M. DANNY BEN YOSEF DANON (Israël), soulignant également que ce pays représente un « danger » pour la sécurité et la stabilité du monde entier.  On présente Israël comme le « méchant » dans la région, a poursuivi le représentant, « mais en réalité nous essayons simplement d’éradiquer le danger iranien ».  En fin de semaine dernière, a-t-il rappelé, des installations pétrolières saoudiennes ont été prises pour cible par des attaques, ce qui a déstabilisé l’approvisionnement énergétique mondial et causé une chute vertigineuse des cours pétroliers.  « Ces attaques portent la marque de l’Iran, cela ne fait aucun doute », a-t-il affirmé. 

Poursuivant, le délégué a indiqué que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), la semaine dernière, avait indiqué avoir trouvé des traces d’uranium sur l’un de ses sites de vérification iranien.  Il a estimé que cette découverte démontrait les « véritables intentions » du régime iranien, lancé selon lui dans une « entreprise de déstabilisation » à l’échelle de la région.  « L’Iran est le plus grand danger à la sécurité internationale », a insisté le représentant, appelant la communauté internationale à agir pour mettre un terme aux violations perpétrées par ce pays « aux ambitions génocidaires » qui, selon lui, dépense des millions de dollars pour financer le terrorisme dans le monde entier.

Nous savons en effet que l’Iran est actif en Syrie et au Liban, où le Hezbollah, « son organisation terroriste désignée », planifie des incursions dans le nord d’Israël, a poursuivi le représentant.  « Il y a quelques semaines, l’Iran a transféré des roquettes transformées en missiles sophistiqués au Hezbollah », a-t-il affirmé, fustigeant l’existence d’installations au Liban, y compris à Beyrouth, dont le seul but est d’attaquer Israël.  « Tout pays qui autorisera des attaques contre Israël depuis son territoire devra en payer le prix », a-t-il mis en garde.

Le représentant a dit attendre avec impatience la déclaration de son homologue jordanien dans le cadre de cette réunion, afin de bien prendre connaissance de la position du pays.  Quant à nous, a-t-il précisé, notre position est la suivante: garantir des frontières que nous pouvons défendre.  « Nous n’avons pas le contrôle de la vallée du Jourdain », a-t-il déclaré, insistant sur le fait que la sécurité des frontières israéliennes était la « condition sine qua non » d’une paix durable.  « Nous n’accepterons jamais que l’Iran menace notre existence », a martelé le représentant, estimant que cette position était parfaitement compatible avec les résolutions du Conseil de sécurité sur la question, ainsi qu’avec le droit d’Israël à la légitime défense, tel que le garantit la Charte des Nations Unies.  Dans ce cadre, le représentant s’est dit prêt à dialoguer de manière constructive avec la Jordanie.

Tout en remerciant les efforts des États-Unis pour relancer le processus de paix, il a également invité, une nouvelle fois, les Palestiniens à engager un dialogue bilatéral avec Israël.  « Il faut une demi-heure pour aller de Ramallah à Jérusalem et vice versa », a-t-il déclaré.  Le représentant a enfin appelé la communauté internationale à inviter les Palestiniens à s’assoir à la table des négociations avec Israël.  « Nous sommes dans l’attente d’un partenaire qui souhaite regarder vers l’avenir et non vers le passé », a-t-il conclu.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a rappelé que le paragraphe 2 de la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité demande à Israël d’arrêter toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé.  Or, a constaté le représentant, Israël, Puissance occupante, continue de construire des colonies illégales sur ce territoire, y compris à Jérusalem-Est, ce qui revient, selon lui, à lancer « un message clair de défiance à la communauté internationale ».  Regrettant que « l’inaction internationale » permette à Israël de « persister dans le mépris du droit international », il a estimé que l’annexion par cet État de nouveaux territoires en Cisjordanie et à Jérusalem-Est sape les possibilités de créer un État palestinien conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et dans le cadre d’un accord négocié. 

Après avoir condamné l’annonce récente par le Gouvernement israélien de la construction de 2 300 nouveaux logements dans le Territoire palestinien, il a fait valoir que les plans d’annexion et la hausse du nombre des colons ont pour effet d’augmenter le nombre des attaques criminelles à l’encontre de civils palestiniens.  Face à ces violences, aux campagnes de confiscations de bâtiments, aux arrestations arbitraires et à la décision de priver l’Autorité palestinienne de recettes fiscales, la communauté internationale est responsable « plus que jamais » de la protection du droit international, a martelé le délégué, jugeant que certains faits reprochés à Israël pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.  Il a conclu en affirmant toujours croire que le règlement global de ce conflit devra passer par les éléments de référence contenus dans les résolutions du Conseil de sécurité et la Feuille de route afin que le peuple palestinien puisse créer un État sur son territoire avec Jérusalem-Est pour capitale. 

Permettez-moi de clarifier la nature des relations entre les États-Unis et Israël, a déclaré à l’entame de son discours Mme KELLY CRAFT (États-Unis).  Les États-Unis ont toujours soutenu Israël par le passé, continuent de soutenir Israël aujourd’hui et soutiendront le pays à l’avenir, a-t-elle indiqué.  « Israël n’aura pas de meilleur ami que Kelly Craft », a affirmé la nouvelle représentante permanente des États-Unis auprès des Nations Unies, avant de condamner l’acharnement injustifié dont font preuve, selon elle, de « nombreux États Membres » qui multiplient les plaintes et résolutions à l’encontre d’Israël.

« Depuis sa création, Israël a été un refuge et un sanctuaire pour ceux qui fuient la répression », a affirmé Mme Craft, qualifiant le pays de « démocratie accomplie » et pérenne, en dépit des menaces qui continuent de peser sur sa sécurité.  Aux yeux de la représentante, Israël défend en effet la liberté de la presse, l’économie de marché et l’état de droit.  « Je pense que nous avons beaucoup à apprendre des Israéliens », a-t-elle affirmé, mentionnant les succès du pays en matière d’innovation, y compris via des investissements dans de nombreuses start-ups à travers le monde. 

« Le monde à beaucoup à apprendre d’Israël », a insisté la représentante.  « Mon intervention n’a pas pour but de dire que la violence et la terreur du Hamas à Gaza sont sans importance », a-t-elle ajouté.  Mais il était important de dire ici qu’aucun pays ne devrait être confronté, comme c’est le cas pour Israël, à un tel « négativisme ».  Mme Craft a indiqué qu’une de ses priorités serait de s’opposer aux déclarations et initiatives qui visent à « clouer au pilori » Israël et à « miner sa légitimité et sa sécurité ».  Elle a ainsi jugé « inexcusable » qu’un « parti pris anti-Israël » subsiste de la sorte au sein des Nations Unies. 

La représentante a conclu son intervention comme elle l’avait commencée, par un éclaircissement quant à la nature des relations entre son pays et Israël.  Les États-Unis ont toujours soutenu Israël par le passé, continuent de soutenir Israël aujourd’hui et soutiendront le pays à l’avenir, a-t-elle réitéré.  « Israël n’aura pas de meilleur ami que Kelly Craft », a insisté la représentante.

M. RUDDYARA (Indonésie) a rappelé qu’il y a un mois, le Conseil de sécurité s’était réuni pour aborder les défis à la paix au Moyen-Orient.  Les membres du Conseil avaient alors souligné la « primauté du multilatéralisme » pour favoriser l’émergence d’une solution de paix dans la région.  Entre-temps, a indiqué le représentant, le Premier Ministre d’Israël a annoncé que s’il était réélu, il procéderait à l’annexion d’une partie de la Cisjordanie.  « Nous devons dénoncer tout acte minant le multilatéralisme », a insisté le délégué indonésien.  Estimant qu’il est des moments où il est « dangereux de jouer sur les mots », il a fermement condamné la « déclaration équivoque » de M. Netanyahu.  À ses yeux, ce « projet » ne servira qu’à enterrer les chances d’une solution négociée en faveur des deux États, solution que soutient la communauté internationale et sur laquelle s’est appuyé de longue date le travail du Quatuor. 

Le représentant a encore noté que la récente réunion extraordinaire des ministres des affaires étrangères de l’Organisation de la Coopération islamique (OCI) avait débouché sur un rejet unanime des intentions affichées par M. Netanyahu.  De fait, a-t-il poursuivi, le Conseil de sécurité doit « réaffirmer son autorité lorsqu’il y a violation de ses résolutions, comme c’est le cas notamment pour la résolution 2334 (2016).  Ce Conseil a d’ores et déjà affirmé que la mise en place de colonies par Israël constitue une violation du droit international et débouche sur une insécurité permanente, a ajouté le délégué. Avant de conclure, il a souhaité rappeler que la souffrance du peuple palestinien est aussi celle des réfugiés.  Réitérant le soutien de sa délégation à l’UNRWA, il a appelé la communauté internationale à maintenir son soutien au peuple palestinien pour renforcer sa capacité à s’auto-administrer. 

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a dénoncé le manque de respect constant envers le processus de paix au Moyen Orient, citant notamment les récentes annonces « par Israël » d’une possible annexion de larges pans de territoires en Cisjordanie.  Il s’est aussi préoccupé de l’expansion des colonies de peuplement en territoire palestinien occupé.  Des milliers de Palestiniens vivent dans la peur de voir leurs maisons et écoles détruites, leurs propriétés confisquées et leur liberté, déjà très réduite, encore davantage limitée, a-t-il fait remarquer.  Évoquant la séance du Conseil de sécurité qui s’est tenue hier au sujet de la protection des civils et de la situation humanitaire en Syrie, il a voulu savoir quand le Conseil allait se pencher sur ces mêmes préoccupations eu égard au peuple palestinien.  Il a ensuite appelé à la pleine mise en œuvre de la résolution 2334 (2016).

M. Matjila a également engagé le Conseil à redoubler d’efforts pour rétablir la confiance dans le processus de paix « légitime » et prévenir toute évolution de l’antagonisme entre les parties.  Il s’est inquiété de l’échange d’hostilités à Gaza et a appelé le Conseil à encourager des « gestes d’espoir » pour rétablir la confiance entre les parties.  Le représentant de l’Afrique du Sud a par ailleurs appelé le Conseil de sécurité à envisager de nouveau d’effectuer son déplacement « longtemps retardé » dans la région.  Il a suggéré que si certains de ses membres s’avéraient indisposés à y participer, le Conseil pourrait envisager d’effecteur une « mini-session » avec les membres souhaitant s’y rendre.  Une visite dans la région démontrerait clairement que la communauté internationale ne se lave pas les mains du conflit le plus ancien et le plus central au Moyen-Orient, a-t-il dit.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a déclaré que les menaces qui pèsent sur la solution des deux États sont très préoccupantes, citant notamment les annonces relatives à une possible annexion de certaines zones en Cisjordanie.  Si elles étaient mises en œuvre, a-t-il prévenu, ces annonces constitueraient non seulement une violation grave et sans précédent du droit international, mais alimenteraient également l’instabilité de la région en exacerbant les tensions et en nourrissant toutes les formes d’extrémisme.  Le représentant s’est également inquiété que la poursuite de la colonisation et condamné, entre autres, la décision par le Gouvernement israélien, le 15 septembres, de légaliser une « colonie sauvage » de la vallée du Jourdain.  Il a rappelé que la colonisation est illégale en droit international.  M. de Rivière s’est aussi soucié de la détérioration de la situation au cours des dernières semaines à Gaza, qui fait craindre une nouvelle escalade.  Il a condamné les tirs depuis Gaza vers les zones habitées d’Israël, de même que l’usage disproportionné de la force contre les manifestants palestiniens.  Il a également évoqué l’impasse de la réconciliation interpalestinienne et la dégradation de la situation humanitaire.  Le soutien de la communauté internationale à l’UNRWA est indispensable, a-t-il insisté.

Le délégué a voulu que la session plénière de l’Assemblée générale des Nations Unies soit l’occasion de réaffirmer l’attachement collectif aux paramètres agréés par la communauté internationale et aux résolutions du Conseil de sécurité.  L’objectif doit rester celui d’un État palestinien vivant dans la paix et la sécurité, a-t-il souligné, avant d’avertir que toute tentative de s’écarter de ces paramètres internationalement agréés et définis collectivement sera condamné à l’échec.  Elle serait également porteuse de risques de déstabilisation régionale car il n’existe aucune alternative viable à la solution des deux États, a-t-il dit, estimant qu’aucun des deux peuples ne peut durablement satisfaire ses aspirations au détriment de l’autre.

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a insisté sur la nécessité de respecter l’état de droit et le droit international dans le cadre du conflit israélo-palestinien, y compris la résolution 2334 (2016), « qui fait partie du droit international » et a été adoptée « sans la moindre opposition » il y a trois ans.  « Imaginons un instant que nous ayons appliqué cette résolution au cours des trois dernières années », a poursuivi le représentant.  Il n’y aurait plus d’acte de terrorisme ou de colonisation, a-t-il affirmé, et nous serions en train d’assister à des négociations censées mener à la création des deux États, en vertu de paramètres définis internationalement.  Le représentant a par conséquent appelé à redoubler d’efforts pour mettre en œuvre ce texte, seule voie, selon lui, capable de déboucher sur une résolution du conflit.

Mme NIAMKE (Côte d’Ivoire) a invité le Conseil de sécurité à faire preuve d’approches innovantes devant la complexité de la situation, pour permettre la résolution pacifique des différends conflits dans la région.  Concernant le conflit israélo-palestinien, Elle a jugé impératif la création d’un cadre approprié de négociations et de relance du processus politique ainsi que le respect des résolutions sur la question palestinienne et du droit international.  Elle a déploré qu’aucun compromis n’ait pu être trouvé en vue de satisfaire les aspirations des deux parties au conflit, à savoir, le droit des Palestiniens à l’autodétermination et à l’indépendance, et le droit d’Israël d’assurer sa sécurité.  Faisant référence au rapport du Secrétaire général des Nations Unies du 26 août 2019, le représentant a invité la communauté internationale à redoubler d’efforts pour relancer, dans les meilleurs délais, le processus politique en vue d’un règlement global, juste et durable de cette crise.  Il a appelé à mettre en œuvre les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment la résolution 2334 (2016), pour parvenir à la solution des deux États coexistant pacifiquement dans le cadre des frontières de 1967. 

Par ailleurs, le représentant a appelé les autorités palestiniennes et israéliennes à veiller au respect des droits des toutes les personnes vulnérables, notamment les enfants.  Il a appuyé toutes les actions qui pourraient favoriser une réconciliation intrapalestinienne, notamment entre le Fatah et le Hamas, dans le but de permettre à l’Autorité palestinienne de répondre aux demandes sociales et humanitaires des populations palestiniennes et d’exercer ses fonctions régaliennes à Gaza et en Cisjordanie.  Il a appelé à l’assouplissement des restrictions, aussi bien pour l’acheminement de l’aide humanitaire que pour la circulation des personnes.  Il a aussi salué le rôle primordial de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a déclaré que la poursuite de la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est sape les fondements même et la faisabilité de la solution de deux États.  Il a dénoncé l’arsenal d’initiatives législatives qui encourage la politique de colonisation et facilite les démolitions, les expulsions et les déplacements forcés.  « C’est avec inquiétude, que nous notons que 51 écoles sont menacées de destruction, dont l’école de Um Sedra, dans le gouvernorat d’Hebron », a dit le représentant avant d’ajouter que cette politique compromet gravement l’exercice des droits fondamentaux des Palestiniens et est illégale au regard du droit international, notamment la résolution 2334.  Il a exigé que les autorités israéliennes mettent fin aux démolitions et octroient des réparations ou compensations pour les dégâts encourus. 

Notant que la résolution 2334 appelle les États à faire une distinction dans leurs échanges, entre le territoire de l’État d’Israël et les territoires occupés depuis 1967, le délégué a rappelé que l’Union européenne s’était dotée de plusieurs mesures et instruments destinés à opérer cette différenciation.  Il a précisé que la viabilité d’un État palestinien implique aussi le retour à la stabilité à Gaza.  C’est pourquoi, il a appelé toutes les parties à faire preuve de retenue en rappelant les impératifs que sont la protection des civils et le respect du droit international humanitaire, notamment les principes de proportionnalité et de distinction.  Le représentant a aussi appelé toutes les parties à garantir un libre accès humanitaire à tout moment, en tenant compte aussi de la dimension du genre et des besoins spécifiques des femmes et des filles.  Enfin, il a rappelé que la résolution de la crise de Gaza implique un changement fondamental, qui comprend notamment la levée du blocus et l’ouverture complète des points de passage, tout en tenant compte des préoccupations légitimes d’Israël quant à sa sécurité. 

« Pour la Belgique, il n’y a pas d’alternative à la solution des deux États, à l’intérieur de frontières sûres et reconnues tracées sur la base des lignes de 1967, et Jérusalem pour capitale des deux États » a-t-il insisté avant de prévenir que son pays ne reconnaîtra « aucun changement aux frontières antérieures à 1967, y compris en ce qui concerne Jérusalem, si ce n’est ceux convenus par les parties ». 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déclaré suivre la situation du conflit israélo-palestinien avec inquiétude.  La rigidité des positions, l’absence de dialogue entre les parties et la multiplication des épisodes violents ont entraîné une stagnation du processus de paix, a-t-il déploré.  En dépit de l’impasse actuelle, la communauté internationale doit continuer à condamner les attaques perpétrées par des acteurs radicaux palestiniens et la réponse disproportionnée des forces de sécurité israéliennes ainsi que les déclarations incendiaires de dirigeants de cet État.  Il convient d’appeler les responsables des deux parties à se conformer à leurs obligations au regard du droit international, du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme, a-t-il plaidé, concédant toutefois que « les chances d’une solution politique sont de plus en plus minces ». 

Pour le représentant, les actions relevées par le Coordonnateur spécial peuvent dégénérer et mener à plus de violences encore.  Si Israël a le droit d’assurer sa protection, il ne saurait ignorer les droits dont doit pouvoir bénéficier le peuple palestinien, a-t-il martelé, appelant le pays à mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité.  À ses yeux, les expulsions et les mesures d’annexion sont autant de pratiques contraires au droit international qui, de surcroît, minent la possibilité d’une solution basée sur deux États.  Concluant sur une note plus positive, il s’est félicité de la poursuite des projets d’infrastructures de développement, jugeant important de prendre des mesures pour que les Palestiniens puissent reprendre le contrôle de la zone. 

M. JOSUÉ ANTINOE FIALLO BILLINI PORTORREAL (République dominicaine) a déploré que depuis l’adoption de la résolution 2334 (2016) l’occupation illégitime a pris de l’ampleur sans aucune conséquence, pointant notamment l’expropriation de 12 000 domiciles en territoire palestinien occupé.  Il a appelé le Conseil à œuvrer au côté de toutes les parties pour parvenir à la solution des deux États.  Le représentant s’est ensuite inquiété de la détérioration de la situation humanitaire et sécuritaire à Gaza, notant que le système de santé est sur le point de s’effondrer, étant dépassé par les milliers de victimes des manifestations de la Grande Marche du retour.  Il a averti du risque d’une nouvelle escalade des hostilités, pour ensuite insister sur l’importance du travail effectué par l’UNRWA.

Le délégué a par ailleurs appelé le Hamas à mettre un terme à tous les actes de violence et de provocation.  De leur côté, l’Autorité palestinienne, Israël et les organisations régionales et internationale doivent formuler des propositions durables pour résoudre la menace que représente Hamas pour la sécurité d’Israël, a-t-il ajouté.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a rappelé que son pays avait toujours considéré les activités de peuplement israéliennes comme « illégales », tout comme « l’annexion unilatérale de tout ou partie de la Cisjordanie ».  Le représentant s’est également dit préoccupé par la poursuite des démolitions de biens palestiniens, qui cause des « souffrances inutiles » à la population palestinienne.  « Mais les colonies et les démolitions ne sont pas les seuls obstacles à la paix », a indiqué le représentant, appelant à mettre fin aux incursions et attaques terroristes contre Israël, y compris les tirs de roquette.

Le représentant a salué l’Égypte et la Jordanie, qui s’efforcent, selon lui, de parvenir à un règlement du conflit, sur la base d’une solution juste et durable.  Il a en outre encouragé l’Administration américaine à formuler des propositions détaillées en vue de parvenir à un accord viable, par le biais notamment de « négociations substantielles » entre les deux parties, pour parvenir à sauvegarder la solution des deux États, seule issue viable au conflit à ses yeux.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) s’est inquiétée des récents propos portant sur une possible annexion de certaines zones de Cisjordanie, dont la vallée du Jourdain et le littoral nord de la mer Morte.  Elle s’est aussi préoccupée de la situation à Gaza qui demeure désespérée et continue d’alimenter l’extrémisme et de nourrir l’instabilité selon elle.  Elle a appelé les parties à prendre des mesures urgentes pour opérer un changement « fondamental » à Gaza sur les plans humanitaire, politique, sécuritaire et économique.  Elle a également réclamé l’ouverture des points de passage importants pour la vie quotidiennes des Gazaouis.

Soyons franc, a-t-elle poursuivi.  Sur le plan politique, le processus est presqu’entièrement bloqué et les divisions intrapalestiniennes ne font qu’exacerber la situation à Gaza et affaiblir les aspirations nationales des Palestiniens.  Elle a jugé urgent de relancer le processus de réconciliation intrapalestinien et d’appuyer les efforts déployés par l’Égypte à cette fin.  Selon elle, la négociation d’une solution à deux États est la seule manière d’aller de l’avant.  Mme Wronecka a appelé à rétablir l’horizon politique pour permettre la reprise d’un véritable processus de paix.  Elle a ensuite alerté que l’expansion des colonies israéliennes risquait de rendre difficile, « si ce n’est impossible », d’établir un État palestinien viable.  Elle a, par ailleurs, salué les efforts déployés par la communauté internationale pour assurer la viabilité de l’UNRWA.

M. VICTOR MANUEL ELÉ ELA (Guinée équatoriale) a déclaré que l’absence d’une solution politique durable et la détérioration constante de la situation dans le Territoire palestinien occupé continue d’être une source profonde d’inquiétude pour son pays.  Après un demi-siècle d’occupation, la population civile n’en peut plus et la communauté internationale n’a « plus de marges de manœuvre », a déploré le représentant.  Rappelant que la résolution 2334 (2016) appelle Israël à s’abstenir de prendre des mesures susceptibles de modifier la démographie des territoires qu’il occupe depuis 1967, il a constaté que ce pays continue de « faire des plans sur la comète », au mépris des résolutions du Conseil.

De l’avis du représentant, il importe aujourd’hui que les membres du Conseil de sécurité restent unis et exigent des parties au conflit qu’elles respectent les résolutions qu’ils ont adoptées, ce qui constitue, selon lui, la condition sine qua non d’un règlement du conflit.  Le délégué a reconnu qu’on ne peut dénier à Israël le souci d’assurer sa sécurité, d’autant plus que l’insécurité à Gaza en fait un terreau fertile pour l’activité terroriste.  Dans le même temps, il convient de prendre en compte les droits du peuple palestinien et d’encourager les efforts d’unification autour de l’Autorité palestinienne, a-t-il dit, saluant la médiation de l’Égypte pour favoriser le dialogue intrapalestinien.  Il s’est également félicité de l’accord trouvé entre Israël et l’Autorité palestinienne pour la restitution des recettes fiscales de cette dernière.  Enfin, il a rendu hommage au travail de l’UNRWA, qui déploie des efforts inlassables pour alléger les souffrances des réfugiés palestiniens.  Il a invité la communauté internationale à lui maintenir son soutien, notamment sur le plan financier.

M. HAITAO WU (Chine) a déploré la poursuite de la « dynamique négative » au Moyen-Orient, notamment en raison des « déclarations belliqueuses » de la part des parties.  « Le processus de paix est dans l’impasse », a tranché le représentant, jugeant essentiel, pour inverser cette tendance, de mettre en œuvre la résolution 2334 (2016).  Il a ensuite appelé à mettre fin à la politique israélienne de colonisation, qui porte selon lui préjudice à la solution des deux États.  Il a également appelé à faire cesser les violences contre des civils.  La communauté internationale devrait prendre des mesures pour favoriser des négociations entre Palestiniens et Israéliens, a-t-il aussi estimé, soulignant que toute initiative en ce sens devrait respecter le principe de la création des deux États indépendants, selon le tracé des frontières d’avant 1967.

« La loi du talion et les déclarations belliqueuses les unes après les autres ne nous mèneront à rien », a estimé le représentant.  Il a notamment jugé « contreproductives » les déclarations israéliennes concernant « l’annexion de la vallée du Jourdain ».  Le représentant a, par ailleurs, appelé à la levée du blocus qui pèse sur Gaza.  À la communauté internationale, il a demandé de continuer de financer et d’appuyer les travaux de l’UNRWA.  Il a enfin indiqué que son pays tenterait, comme il l’a toujours fait, de peser positivement sur la résolution du conflit.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a rappelé que son pays entretient avec le Moyen-Orient, théâtre d’une multitude de crises anciennes et nouvelles, des relations de longue date, fondées sur des intérêts communs. Toutefois, a-t-il constaté, l’équilibre dans la région « a été détruit et continue de l’être » à force de « manœuvres géopolitiques et d’ingérences dans les affaires intérieures ».  Le représentant s’est déclaré inquiet de ce processus, à l’œuvre selon lui dans le conflit israélo-palestinien, comme en témoigne la politique de colonisation, les destructions de bâtiments et les destructions dans le Territoire palestinien.  Il s’est notamment dit très inquiet des annonces récentes d’Israël, qui a dit vouloir étendre sa souveraineté sur la vallée du Jourdain.  Pour M. Nebenzia, « cela aurait pour effet une escalade dans la région et compromettrait les espoirs de paix ».  Il en va de même, a-t-il dit, de la reconnaissance par les États-Unis de Jérusalem comme capitale d’Israël et de l’annonce de la souveraineté d’Israël sur le Golan.

Fustigeant par ailleurs les « tentatives de règlement alternatif », il a jugé ces initiatives contre-productives.  Pour le représentant, « aucune mesure unilatérale ne nous rapprochera d’un règlement dans la région ».  De fait, a-t-il fait valoir, la seule sortie possible de ce conflit passe par une intensification des efforts internationaux, avec un rôle central alloué au Conseil de sécurité.  Le Quatuor pour le Moyen-Orient, en tant que mécanisme unique en son genre, peut lui aussi accompagner utilement ce processus, a-t-il dit.  Pour sa part, la Fédération de Russie apporte une contribution à l’ensemble des questions de paix par le biais d’une « instance potentielle de dialogue » à laquelle elle invite les dirigeants israéliens et palestiniens sans conditions préalables.

Le représentant s’est par ailleurs prononcé en faveur d’un déplacement du Conseil de sécurité dans la région.  Une telle mission renforcerait la confiance et contribuerait à relancer les discussions entre les parties, a-t-il souligné, rappelant que la base juridique établie par le Conseil est la seule qui puisse être utilisée dans le cadre d’un règlement, toute mesure unilatérale étant « vaine » selon lui.  Après avoir estimé que l’action de l’UNRWA stabilise la situation sur le terrain et que les questions relatives au statut final doivent faire l’objet de négociations directes entre les parties, M. Nebenzia s’est dit inquiet des tensions dans le Golfe persique, où tout incident pourrait entraîner un conflit.  Il a donc appelé toutes les parties à faire montre de retenue pour permettre une désescalade.

M. AYMAN SAFADI, Ministre des affaires étrangères de la Jordanie, a rappelé les efforts déployés de longue date pour parvenir à une paix durable dans la région.  « Mais aujourd’hui ces efforts sont au bord du gouffre », a estimé le Ministre.  Selon lui, en effet, la solution des deux États, « seule issue viable à ce conflit », est compromise par des « mesures israéliennes unilatérales » qui violent les résolutions du Conseil de sécurité.  « On ne peut pas rester silencieux face à cette situation », s’est indigné le Ministre, appelant à « sauvegarder le peu qui reste de d’espoir » de trouver une solution au conflit. 

Parvenir à une paix globale et durable est le « choix stratégique » fait par les nations arabes, a affirmé le Ministre, estimant que toute solution acceptable devait passer par la création d’un État palestinien indépendant, selon les frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.  Mais au lieu de s’engager dans cette voie, Israël continue de prendre des mesures unilatérales illégitimes, a déploré le Ministre avant de déclarer que « la paix et la sécurité sont un droit pour tous les pays de la région ».  Or, ce n’est pas en construisant des colonies illégales, en confisquant les biens des Palestiniens, en étouffant l’UNRWA ou en annexant la vallée du Jourdain que nous parviendrons à la paix, a-t-il affirmé.  « C’est plutôt comme cela que l’on tue les perspectives de paix », a déploré le Ministre, estimant que la voie empruntée par Israël était vouée à l’échec.

Le Conseil a un rôle capital à jouer pour préserver le droit international et garantir le respect de ses propres résolutions, a ensuite déclaré le Ministre.  Il a appelé la communauté internationale à agir pour mettre fin aux activités de peuplement « illégales » et pour empêcher de se concrétiser l’annonce par le Gouvernement israélien de son annexion d’un tiers de la Cisjordanie occupée, au mépris du droit international. 

Il faut également empêcher Israël de remettre en cause le statut quo concernant les lieux saints à Jérusalem, a exhorté le Ministre, rappelant que, du point de vue du droit international, Jérusalem-Est fait partie intégrante des Territoires palestiniens occupés depuis 1967.  Pour M. Safadi, les États Membres ont la responsabilité collective de faire face aux provocations israéliennes. 

Le conflit israélo-palestinien est à l’origine de l’instabilité et des troubles qui frappent tout le Moyen-Orient, a souligné en conclusion le Ministre.  « La Jordanie ne ménagera aucun effort pour parvenir à une paix durable et juste », a-t-il assuré, appelant à inverser la tendance actuelle pour éviter qu’il ne soit trop tard.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de l’Équipe chargée de recueillir des preuves concernant les crimes commis par l’EIIL (Daech) sur le territoire iraquien

8624e séance – matin
CS/13958

Le Conseil de sécurité proroge d’un an le mandat de l’Équipe chargée de recueillir des preuves concernant les crimes commis par l’EIIL (Daech) sur le territoire iraquien

Le Conseil de sécurité a décidé, ce matin, à l’unanimité de ses 15 membres, de proroger jusqu’au 21 septembre 2020, le mandat du Conseiller spécial et de l’Équipe chargés de recueillir des éléments de preuve concernant des actes susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes de génocide commis par l’EIIL (Daech) sur le territoire iraquien, conformément à sa résolution 2379 (2017). Il répond ainsi à la demande formulée par le Gouvernement iraquien dans sa lettre* datée du 19 septembre 2019.

La résolution 2490 (2019), adoptée ce matin, rappelle que le Gouvernement iraquien avait, le 9 août 2017, demandé au Secrétaire général l’aide de la communauté internationale pour s’assurer que les membres de l’EIIL (Daech) répondent des crimes qu’ils ont commis en Iraq, y compris lorsque ces crimes étaient susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité. 

Par la résolution 2379 du 21 septembre 2017, le Conseil de sécurité avait ainsi prié le Secrétaire général de constituer une équipe d’enquêteurs, dirigée par un conseiller spécial, à l’appui des efforts engagés à l’échelle nationale pour amener l’EIIL (Daech) à rendre des comptes.

Le mandat de l’ Équipe d’enquêteurs est de recueillir, conserver et stocker des éléments de preuve en Iraq d’actes susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des crimes de génocide perpétrés par le groupe terroriste EIIL (Daech) en Iraq.  L’Équipe doit être « impartiale, indépendante et crédible » et agir « conformément au présent mandat, à la Charte des Nations Unies et aux meilleures pratiques des Nations Unies, ainsi que dans le respect du droit international applicable, notamment le droit international des droits de l’homme ».

Dans le texte adopté ce matin pour renouveler le mandat de l’Équipe, le Conseil a décidé que toute nouvelle prorogation sera décidée à la demande du Gouvernement iraquien « ou de tout autre gouvernement qui prierait l’Équipe de recueillir des éléments de preuve concernant des actes susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes de génocide commis par l’EIIL (Daech) sur son territoire, conformément à sa résolution 2379 (2017) ».

Le Conseil reste bien évidemment saisi de la question et le Conseiller spécial devra continuer à lui présenter, tous les 180 jours, un rapport sur les activités de l’Équipe.

*S/2019/760

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES (S/2019/760)

Texte du projet de résolution (S/2019/761)

Le Conseil de sécurité,

Réaffirmant ses résolutions 1265 (1999), 1325 (2000), 1368 (2001), 1373 (2001), 1624 (2005), 1894 (2009), 2106 (2013), 2150 (2014), 2170 (2014), 2178 (2014), 2199 (2015), 2242 (2015), 2249 (2015), 2253 (2015), 2322 (2016), 2331 (2016), 2341 (2017), 2347 (2017), 2354 (2017), 2367 (2017), 2368 (2017) et 2370 (2017) et les déclarations de sa présidence sur la question,

Réaffirmant son respect pour la souveraineté, l’intégrité territoriale, l’indépendance et l’unité de l’Iraq, conformément aux buts et principes consacrés dans la Charte des Nations Unies,

Rappelant la menace mondiale que représente pour la paix et la sécurité internationales l’État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL, également connu sous le nom de Daech), par ses actes de terrorisme, son idéologie extrémiste violente, les attaques flagrantes, systématiques et généralisées qu’il continue de mener contre des civils, ses violations du droit international humanitaire et ses atteintes aux droits de l’homme, en particulier celles commises contre des femmes et des enfants, y compris pour des motifs religieux et ethniques, et son recrutement de combattants terroristes étrangers dont il assure la formation et qui font peser une menace sur toutes les régions et tous les États Membres,

Condamnant les actes de violence dont se rend coupable l’EIIL (Daech), en commettant notamment des meurtres, des enlèvements, des prises d’otages, des attentats-suicides à la bombe, et en se livrant à la réduction en esclavage, à la vente ou à d’autres pratiques aux fins du mariage forcé, à la traite des êtres humains, au viol, à l’esclavage sexuel et à d’autres formes de violence sexuelle, au recrutement et à l’utilisation d’enfants, à des attaques visant des infrastructures essentielles, ainsi qu’à la destruction du patrimoine culturel, y compris les sites archéologiques, et au trafic de biens culturels,

Conscient que la commission de tels actes susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes de génocide, fait partie intégrante de l’idéologie et des objectifs stratégiques de l’EIIL (Daech) et est utilisée par l’EIIL (Daech) comme une tactique terroriste, et qu’amener à répondre de leurs actes les membres de l’EIIL (Daech), en particulier ceux qui portent la responsabilité la plus lourde, notamment ceux qui dirigent les opérations, qui peuvent inclure des chefs régionaux ou chefs de rang intermédiaire, et ceux qui commandent et commettent des crimes, contribuera à exposer la situation et pourrait faciliter la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent qui peut mener au terrorisme, notamment en endiguant le financement du groupe terroriste EIIL (Daech) et l’afflux ininterrompu de recrues venues du monde entier dans ses rangs,

Saluant les efforts considérables que déploie le Gouvernement iraquien pour vaincre l’EIIL (Daech), et rappelant la lettre que celui-ci lui a adressée, ainsi qu’au Secrétaire général, le 9 août 2017, dans laquelle il demandait l’aide de la communauté internationale pour s’assurer que les membres de l’EIIL (Daech) répondent des crimes qu’ils avaient commis en Iraq, y compris lorsque ces crimes étaient susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité (S/2017/710),

1.    Réaffirme sa résolution 2379 (2017), par laquelle a été créée l’Équipe d’enquêteurs, dirigée par un Conseiller spécial, et rappelle le mandat qu’il a approuvé (S/2018/119);

2.    Prend note de la demande formulée par le Gouvernement iraquien dans sa lettre datée du 19 septembre 2019 (S/2019/760) et décide de proroger jusqu’au 21 septembre 2020 le mandat du Conseiller spécial et de l’Équipe, toute nouvelle prorogation devant être décidée à la demande du Gouvernement iraquien ou de tout autre gouvernement qui prierait l’Équipe de recueillir des éléments de preuve concernant des actes susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes de génocide commis par l’EIIL (Daech) sur son territoire, conformément à sa résolution 2379 (2017);

3.    Prie le Conseiller spécial de continuer à lui présenter tous les 180 jours un rapport sur les activités de l’Équipe;

4.    Décide de rester saisi de la question.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.