Au Conseil de sécurité, plaidoyer en faveur d’une coopération renforcée entre l’ONU et les organisations régionales dans la lutte contre le terrorisme
À l’occasion d’un débat au niveau ministériel du Conseil de sécurité mené ce matin sous la présidence du chef de la diplomatie de la Fédération de Russie, M. Sergey Lavrov, une trentaine d’intervenants ont souhaité un renforcement de la coopération entre les organisations régionales et les Nations Unies contre le terrorisme et l’extrémisme violent, dans un monde confronté à une multiplicité de menaces favorisées par les technologies numériques.
La présidence russe du Conseil avait dédié plus spécialement la réunion aux contributions de trois organisations régionales œuvrant en Asie centrale -l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), la Communauté d’États indépendants (CEI) et l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC)- à la lutte contre les menaces terroristes et à la stabilité régionale et internationale.
Dans sa lettre de cadrage S/2019/742, la présidence russe avait insisté notamment sur les problématiques soulevées par le retour de combattants terroristes étrangers dans leur pays, « où ils cherchent à diffuser leur idéologie », ainsi que sur le risque que représentent les cellules dormantes de mouvements comme l’État islamique d’Iraq et du Levant ou Al-Qaida, dont nombre d’anciens partisans cherchent désormais à rentrer dans leur pays.
Ouvrant le débat, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, s’est pour sa part inquiété de la « menace sans précédent » en termes d’intolérance, d’extrémisme violent et de terrorisme et de la « nouvelle frontière » créée par le cyberterrorisme pour coordonner des attaques et recruter des combattants. La réponse, a-t-il insisté, réside en partie dans la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Elle réside aussi dans une étroite association des organisations régionales à la lutte contre le terrorisme, ont complété les intervenants nationaux qui, au-delà de l’Asie centrale, ont cité des formes de coopération existant en Europe, en Afrique ou encore en Asie du Sud-Est.
L’ONU a un rôle important à jouer pour encourager cette coopération, comme l’a montré l’organisation d’une conférence régionale du Bureau de lutte contre le terrorisme à Douchanbé, en mai dernier, a également estimé la France.
M. Sergey Ivanov, Secrétaire général adjoint de la CEI, a fait valoir que la coopération entre les membres de cette organisation permettait d’échanger des informations et d’optimiser les efforts de chaque État concernant la surveillance des frontières, la lutte contre la criminalité liée au terrorisme et le financement du terrorisme. Il a par ailleurs cité la situation en Syrie pour affirmer que les opérations militaires conduites avec les services spéciaux donnait de « bons résultats » dans la lutte antiterroriste, insistant sur la coopération avec les ministères de la défense. Mais pour les États-Unis, la Syrie constitue plutôt un contre-exemple quand la violence de la riposte contribue à radicaliser les civils, surtout les jeunes.
Si le Secrétaire général de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC), M. Vladimir Imamovich Norov, s’est félicité que son organisation ait, l’an passé, déjoué plus de 360 actes de terrorisme en cours de préparation et « liquidé » plus de 60 terroristes, M. Guterres et de nombreux intervenants ont rappelé que la lutte contre le terrorisme devait être menée dans le « strict respect » du droit humanitaire, des droits de l’homme et de l’état de droit. Pour l’Allemagne, faire fi de ces valeurs contribuerait à marginaliser certains groupes et à les encourager à rejoindre des réseaux terroristes.
La question des droits de l’homme a provoqué un échange entre les États-Unis, appuyés par le Royaume-Uni, et la Chine, soutenue par la Fédération de Russie. Le représentant américain s’étant dit « profondément préoccupé par la situation au Xinjiang, où plus d’un million de Ouïghours et d’autres musulmans ont été arrêtés arbitrairement sous le prétexte de la lutte antiterroriste », le Ministre des affaires étrangères chinois a rejeté des « allégations infondées », ajoutant que des pays qui se sont faits les « chantres de la lutte antiterroriste » devraient s’expliquer sur les situations de conflits qui perdurent en Libye, en Iraq ou en Syrie.
Plusieurs pays ont par ailleurs évoqué la situation en Afghanistan. L’Union européenne, la France ou encore la Pologne ont réclamé une action harmonisée de la communauté internationale afin de contrer l’imbrication des menaces liées à l’extrémisme violent et au trafic de stupéfiants. Aider au développement et à la stabilité de l’Afghanistan contribuerait à la stabilité de la région et du monde, ont fait valoir aussi bien les dirigeants des organisations régionales que plusieurs intervenants nationaux. Cependant, a nuancé le Royaume-Uni, il ne faut pas non plus « exagérer cette menace » de l’Afghanistan, puisque ce sont d’abord les Afghans qui souffrent des mouvements terroristes opérant sur leur sol.
En tout état de cause, aucun pays ne peut à lui seul faire face aux défis modernes, de plus en plus complexes et interconnectés –terrorisme, criminalité transnationale organisée, trafic de drogue et traite des personnes–, a rappelé le Ministre des affaires étrangères du Koweït, qui a encouragé le Conseil de sécurité à organiser davantage de réunions sur le sujet. C’est d’autant plus nécessaire, a ajouté le responsable de la diplomatie de l’Inde, que la lutte contre le terrorisme doit aussi identifier les États qui encouragent, appuient et financent le terrorisme, et qui offrent un refuge aux terroristes, et prendre des mesures fermes à leur encontre.
COOPÉRATION ENTRE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES ET SOUS-RÉGIONALES AUX FINS DU MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES
Contribution de l’Organisation du Traité de sécurité collective, de la Communauté d’États indépendants et de l’Organisation de Shanghai pour la coopération à la lutte contre les menaces terroristes (S/2019/742)
Déclarations
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé que le monde était confronté à une menace sans précédent d’intolérance, d’extrémisme violent et de terrorisme. Il s’est inquiété de la « nouvelle frontière » qu’est le cyberterrorisme, avec l’utilisation des médias sociaux et de la Toile sombre (« dark Web ») pour coordonner des attaques, diffuser de la propagande et recruter de nouveaux adeptes.
« En réponse à cette menace sans précédent, nous prenons des mesures sans précédent », a poursuivi le Secrétaire général. La Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et les résolutions correspondantes du Conseil de sécurité fournissent un cadre global, a-t-il expliqué.
Pour le Secrétaire général, il est important de compléter les mesures de sécurité par des efforts de prévention qui identifient et corrigent les causes profondes du terrorisme, tout en respectant les droits de l’homme. La plupart des recrues de groupes terroristes ont entre 17 ans et 27 ans, a fait remarquer M. Guterres. « Nous devons proposer des parcours offrant espoir et objectifs à nos jeunes hommes et femmes, notamment en matière d’éducation, de formation et d’emploi. »
Le Secrétaire général a préconisé des approches globales et inclusives, en commençant par la base, où les familles et les communautés sont en première ligne. D’après lui, « la soumission des femmes et des filles est un point commun à de nombreux groupes extrémistes et terroristes, quelle que soit leur idéologie ». L’égalité des sexes et la participation des femmes et des filles doivent donc être au centre des efforts de prévention et de lutte contre le terrorisme. Nous devons également soutenir les victimes du terrorisme, parmi lesquelles figurent les enfants de combattants terroristes étrangers qui auront besoin d’aide pour surmonter les traumatismes et la stigmatisation à mesure qu’ils grandissent, a averti M. Guterres.
« La coopération internationale est la première priorité de notre stratégie antiterroriste », a ensuite souligné le chef de l’Organisation. Il a reconnu que les trois organisations qui font l’objet de ce débat jouent un rôle important dans la promotion de la coopération régionale en matière de lutte contre le terrorisme en facilitant l’échange d’informations et de connaissances cruciales, ainsi que la mise en œuvre d’enquêtes et d’opérations conjointes. L’ONU, a-t-il assuré, renforce ses liens institutionnels avec chacune d’entre elles, conformément aux principes énoncés dans le Pacte mondial de coordination contre le terrorisme.
En particulier, le Secrétaire général s’est félicité de l’engagement du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale (UNRCCA, établi à Achgabat au Turkménistan), concernant le Plan d’action conjoint pour l’application de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies en Asie centrale. « En élaborant un plan d’action commun, la première initiative régionale de ce type, les parties impliquées ont montré ce qui pouvait être accompli avec l’action collective, le leadership et la volonté politique », a-t-il précisé.
M. Guterres a également salué le travail important de l’Assemblée interparlementaire des États membres de la Communauté d’États indépendants visant à harmoniser la législation de ses membres en matière de lutte contre le terrorisme.
La coopération en matière de lutte contre le terrorisme entre l’ONU et l’Organisation du Traité de sécurité collective, la Communauté d’États indépendants et l’Organisation de Shanghai pour la coopération s’intensifie, dans la mesure où elle couvre un nombre croissant de questions, a assuré le Secrétaire général. « J’espère que notre coopération se poursuivra alors que nous travaillons ensemble pour mettre fin à la menace terroriste et bâtir un avenir plus sûr et plus prospère pour tous », a-t-il conclu.
M.VLADIMIR IMAMOVICH NOROV, Secrétaire général de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC), a insisté sur la « fusion » du terrorisme avec le crime organisé et le risque accru de voir des terroristes accéder aux installations nucléaires.
En 2001, trois mois avant les événements de New York, les dirigeants de l’OSC ont signé une convention de lutte contre le terrorisme montrant que leurs pays étaient alors déjà conscients des tendances négatives à l’œuvre, a expliqué M. Norov, avant de rappeler que l’OSC était un mécanisme juridique permettant un travail effectif dans le domaine de la sécurité. Le point important est l’élaboration et la mise en pratique de concepts de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme.
L’an dernier, l’OSC a déjoué plus de 360 actes de terrorisme en cours de préparation et « liquidé » plus de 60 terroristes, s’est félicité M. Norov. L’OSC a aussi renforcé son potentiel de lutte contre les menaces contemporaines, cybernétiques notamment, et a accueilli deux nouveaux venus, l’Inde et le Pakistan.
L’OSC mène régulièrement des exercices antiterroristes mais ce n’est pas un bloc militaire dirigé contre d’autres États, a précisé son Secrétaire général. Pour M. Norov, un des facteurs clefs du renforcement de la sécurité dans la région sera le règlement du conflit en Afghanistan. À cet effet, un groupe de contact a été créé et une feuille de route adoptée à Bichkek pour lutter contre les liens entre terrorisme et trafic de stupéfiants.
Ces dernières années, l’OSC a confisqué près de 40% des stupéfiants découverts en Eurasie et continue de travailler avec la Commission des stupéfiants de l’ONU et les différentes structures de lutte contre le terrorisme de l’Organisation. Elle salue la résolution adoptée le 30 août dernier par l’Assemblée générale sur la coopération entre son organisation et l’ONU, alors que la coopération entre l’OSC et d’autres organisations régionales, ainsi qu’avec l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL), s’est également renforcée.
Cependant, a poursuivi M. Norov, il reste indispensable d’éliminer les causes profondes du terrorisme, d’empêcher le recrutement des jeunes et d’accueillir les personnes qui rentrent des « points chauds ». Enfin, il a appelé la communauté internationale à renforcer la coopération mondiale contre le terrorisme et à parvenir à un consensus autour d’une convention mondiale générale de lutte contre le terrorisme.
M. VALERY SEMERIKOV, Secrétaire général de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), a souligné l’importance de la coopération entre son organisation, les autres organisations invitées ce jour et l’ONU, à l’heure où la menace terroriste ne cesse d’évoluer et de gagner en sophistication dans le monde entier.
L’OTSC, a indiqué M. Semerikov, s’est employée à multiplier les opérations spéciales contre l’immigration illégale, lesquelles ont permis la confiscation de plus de 16 tonnes de stupéfiants et drogues synthétiques et de 487 cargaisons d’armes.
Afin de lutter contre le recours par les terroristes aux technologies de l’information et des communications, notamment pour recruter de nouveaux membres, l’OTSC conduit chaque année une campagne de lutte contre la cybercriminalité, tout en s’efforçant d’unifier les efforts nationaux de ses États membres. Étant donné la menace représentée pour eux par le retour des ex-combattants en provenance du Moyen-Orient, l’OTSC a organisé une opération destinée à neutraliser les canaux de recrutement, qui a été une contribution décisive à la mise en œuvre des résolutions 2178 (2014) et 2393 (2017) du Conseil de sécurité.
Mais les États membres de l’OTSC se heurtent à des tactiques nouvelles de la part des terroristes, a fait observer M. Semerikov, qui s’est dit alarmé face à la vague d’attentats dont l’Asie centrale et l’Afghanistan sont le théâtre. Selon lui, le principal enseignement de la lutte antiterroriste telle que la conduit l’organisation, c’est la nécessité d’intensifier les efforts en s’abstenant de pratiquer le « deux poids, deux mesures » et en s’alignant sur l’initiative du Kazakhstan d’un code de conduite pour présenter un front uni dans la lutte contre le terrorisme.
Par ailleurs, outre l’analyse des problèmes à l’échelle internationale, il convient de ne pas négliger les dynamiques spécifiquement régionales. M. Semerikov a enfin rappelé qu’il avait plaidé auprès des ministres des affaires étrangères des États membres de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) en faveur d’un renforcement de la confiance mutuelle.
M. SERGEY IVANOV, Secrétaire général adjoint de la Communauté d’États indépendants (CEI), a assuré que grâce aux efforts des États participants, la CEI ne cessait d’améliorer sa composante de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, l’échange d’informations et la lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et des communications.
Cette coopération et les documents signés à cet effet permettent un échange d’informations et d’optimiser les efforts des États concernant le maintien de l’ordre dans les pays afin de lutter contre la criminalité liée au terrorisme, a poursuivi M. Ivanov. La CEI agit aussi pour éliminer les conditions favorisant le financement du terrorisme, comme le blanchiment d’argent, et contre la diffusion d’armes de destruction massive, a-t-il ajouté.
Après une première phase 2017-2019, la CEI s’apprête à adopter un programme similaire de coopération pour 2020-2022.
Les efforts se concentrent sur des opérations communes, des opérations spéciales, l’échange d’informations, le transfert d’expérience et la coopération avec les organisations internationales.
Des mesures ont été élaborées pour arrêter les personnes essayant de pénétrer sur les territoires de la CEI après avoir participé à des organisations terroristes et pour suivre les flux financiers liés au terrorisme, a encore expliqué M. Ivanov.
La coopération s’étend aussi dans le domaine des moyens et des équipements de lutte contre le terrorisme, des nouvelles technologies, qui sont largement utilisées pour échanger des informations par les services spécialisés, pour localiser les personnes, les détecter lors du passage des frontières et lutter contre la cybercriminalité, par exemple dans le cadre de grands événements sportifs.
L’expérience en Syrie montre que les opérations militaires conduites avec les services spéciaux donnent de bons résultats dans la lutte contre le terrorisme, d’où l’importance de la coopération avec les ministères de la défense, a estimé le Secrétaire général adjoint de la CEI. La CEI mène d’ailleurs en ce moment un exercice militaire et contribue à la formation de troupes de lutte contre le terrorisme.
La coopération des États membres de la CEI se fait en lien avec les organisations internationales de l’ONU, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l’OTSC, l’OSC et les organisations de lutte contre le cyberterrorisme et le blanchiment d’argent.
Toutefois, on ne peut coopérer avec succès que grâce à un accord sur le plan juridique, a fait observer M. Ivanov. C’est pourquoi la Commission parlementaire de la CEI mène des efforts d’harmonisation des législations au sein de la Communauté.
Alors que la menace terroriste se renforce, il est indispensable de renforcer les mesures de lutte internationale et de renforcer les activités de prospective, a conclu M. Ivanov, en souhaitant que ce débat permette d’élaborer de nouvelles mesures.
M. SERGEY V. LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, s’est félicité de la tenue de cette séance, qui consacre les contributions de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), de la Communauté d’États indépendants (CEI) et de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC) à la lutte contre les menaces terroristes et à la stabilité régionale et internationale.
Le Ministre a ensuite rejeté l’instrumentalisation d’organisations terroristes à des fins politiques, avant de saluer les efforts de l’OTSC, qui met l’accent sur les opérations de neutralisation des ex-combattants qui reviennent dans leur pays d’origine après avoir acquis une expérience militaire et qui le fait en luttant contre l’immigration illégale et la cybercriminalité.
Quant à l’OSC, elle a élaboré de nombreux documents régissant la lutte antiterroriste, a noté M. Lavrov, en rappelant qu’en mars de cette année, elle avait signé un mémorandum d’accord avec la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme. Enfin, M. Lavrov a fait observer que la CEI disposait d’un centre de lutte contre le terrorisme en Asie centrale, qui coordonne les efforts de ses États membres.
M. SABAH KHALID AL HAMAD AL SABAH, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Koweït, a encouragé le Conseil de sécurité à organiser davantage de réunions pour se pencher sur les moyens nécessaires au renforcement de la coopération avec les organisations régionales et pour renforcer la diversité et le dialogue sur la base du Chapitre VIII de la Charte.
Aucun pays ne peut à lui seul faire face aux défis modernes de plus en plus complexes et interconnectés du monde d’aujourd’hui –terrorisme, criminalité transnationale organisée, trafic de drogue et traite des personnes-, a ensuite rappelé le Vice-Premier Ministre. Il faut donc mener des efforts concertés et collectifs, établir des cadres régionaux que les régions peuvent s’approprier pour prévenir les conflits, maintenir, consolider et pérenniser la paix. Car les organisations régionales et sous-régionales ont un rôle décisif à jouer pour comprendre les conflits, étant donné leur connaissance des régions concernées.
L’Asie centrale est une vaste région d’une haute importance géostratégique étant donné sa situation et ses ressources, a noté M. Al Ahmad. Les trois organisations régionales invitées ce jour -OTSC, CEI et OSC- ont des liens étroits avec les pays de la région. Récemment, elles ont joué un rôle important pour mobiliser les forces face aux défis de la région: le terrorisme et l’extrémisme violent, qui présentent l’un des visages les plus laids des menaces à la paix car ils visent les civils, les femmes et les enfants.
L’évolution des menaces, des méthodes et l’augmentation du recrutement, notamment des jeunes, doivent inciter les pays à accroître et renforcer leurs efforts et leurs capacités de lutte contre le terrorisme, a poursuivi le Vice-Premier Ministre, pour qui le nombre croissant de personnes participant à des attentats est une source de préoccupation grave.
À cet égard, les organismes de l’ONU ont tous un rôle vital à jouer pour élaborer des stratégies et ripostes basées sur les cadres internationaux, les traités et conventions internationaux pertinents. Mais il est besoin de davantage de coopération régionale et mondiale.
Pour M. Al Ahmad, il faut notamment renforcer la coopération avec l’Afghanistan dans les domaines de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent et contre le trafic de drogue: le Vice-Premier Ministre a souhaité qu’une telle coopération contribuerait au développement et à la stabilité de l’Afghanistan et donc à celle du monde.
Le Koweït, en tant que membre de plusieurs organisations régionales, estime que celles-ci doivent assumer leurs responsabilités pour lutter contre ces défis dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité. Les organisations régionales, a poursuivi le Vice-Premier Ministre, ont collectivement contribué à l’adoption de stratégies de lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations, et ont mis en place une base de données sur les organisations terroristes et pour traiter les personnes revenant des zones de conflit.
M. ALEXANDER DE CROO, Vice-Premier Ministre et Ministre des finances, chargé de la lutte contre la fraude fiscale, et Ministre de la coopération au développement de la Belgique, a jugé essentiel que les partenariats entre l’ONU et les organisations régionales soient « ancrés dans les cadres onusiens », tels que la Stratégie antiterroriste mondiale et les résolutions du Conseil de sécurité, et « intègrent pleinement les valeurs de l’ONU ». Toutes les mesures prises par les États Membres pour combattre le terrorisme doivent s’inscrire dans le plein respect des obligations en droit international, y compris les droits de l’homme, le droit international des réfugiés et le droit international humanitaire, a ajouté le Vice-Premier Ministre.
M. De Croo a souligné l’importance que la Belgique accorde à la coopération entre l’Union européenne (UE) et l’ONU. L’UE et l’ONU ont ainsi signé, en avril dernier, le Cadre de lutte contre le terrorisme, basé sur la Charte des Nations Unies. Les partenaires, a-t-il précisé, visent notamment à accroître leurs engagements respectifs en Asie centrale, en Asie du Sud et en Asie du Sud-Est. C’est dans un esprit « holistique », que l’UE développe ses efforts de lutte contre le terrorisme avec les États de la région, a encore précisé le Vice-Premier Ministre. Avec le programme « STRIVE ASIA », visant à renforcer la résilience contre la violence et l’extrémisme, l’UE s’attaque aux racines de la radicalisation, a-t-il encore affirmé.
M. WANG YI, Ministre des affaires étrangères de la Chine, a souligné la nécessité d’entreprendre une approche holistique de la menace terroriste, en s’abstenant de pratiquer la sélectivité dans les organisations ou les situations contre lesquelles il faut lutter. Les efforts déployés doivent, selon lui, accorder davantage d’attention au recrutement en ligne et plus généralement à la question de la prévention.
Après s’être déclaré opposé à la notion du « choc des civilisations », le chef de la diplomatie chinoise a jugé nécessaire la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Il s’est enfin lancé dans une justification de la campagne de lutte antiterroriste menée par son pays au Xinjiang, où des « mesures vigoureuses » ont permis d’endiguer la vague d’attentats terroristes qui touchait auparavant cette région autonome. C’est la raison pour laquelle il s’est désolé de la « campagne de diffamation » menée par les États-Unis et les pays occidentaux contre ces efforts, légitimes à ses yeux.
Mme NALEDI PANDOR, Ministre des relations internationales et de la coopération de l’Afrique du Sud, a souligné que son pays n’a jamais cessé d’appeler à un partenariat stratégique renforcé entre les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales, non seulement dans la lutte contre le terrorisme mais aussi dans la prévention et le règlement des conflits.
En tant que membre élu du Conseil de sécurité, l’Afrique du Sud travaille à un rapprochement entre l’ONU et l’Union africaine, compte tenu, en particulier, du nombre de conflits africains inscrits à l’ordre du jour, mais aussi de la menace croissante du terrorisme sur le continent.
L’Union africaine a toujours été très active contre la menace terroriste comme en attestent, a dit la Ministre, la Convention d’Alger de lutte contre le terrorisme, adoptée en 1999 par l’Organisation de l’Unité africaine, et le Protocole adopté en 2004 par l’Union africaine. Au niveau régional, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) n’est pas en reste puisqu’elle a adopté en 2015 une stratégie régionale de lutte contre le terrorisme. Au niveau national, l’Afrique du Sud s’est dotée d’une stratégie dès 2013, assortie d’un plan d’action, a encore énuméré la Ministre.
Mme RETNO LESTARI PRIANSARI MARSUDI, Ministre des affaires étrangères de l’Indonésie, a souligné combien la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales était « vitale » pour lutter efficacement contre le terrorisme, notamment afin d’empêcher sa propagation idéologique. Dans cette perspective, elle a appelé à renforcer les mécanismes régionaux et sous-régionaux de lutte contre le terrorisme, à l’image de la Convention sur la lutte contre le terrorisme adoptée par l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et de la coopération trilatérale instaurée entre l’Indonésie, la Malaisie et les Philippines pour contrer la menace terroriste en mer de Sulu.
Mme Marsudi a en outre insisté sur la nécessité d’aligner les stratégies mondiales, régionales et nationales de lutte contre le terrorisme. À titre d’exemple, elle a indiqué que le Plan d’action du Secrétaire général pour la prévention de l’extrémisme violent avait servi de base à l’élaboration du Plan d’action de l’ASEAN pour prévenir et contrer l’essor de la radicalisation et de l’extrémisme violent de 2018 à 2025, ce dernier ayant à son tour inspiré la formulation d’un projet de plan d’action national en Indonésie.
M. SIMEON OYONO ESONO ANGUE, Ministre des affaires étrangères et de la coopération de la Guinée équatoriale, a déclaré que son pays avait été « victime d’une tentative de déstabilisation terroriste à des fins politiques et économiques en décembre 2017, avec l’aide de l’étranger ». Si cette tentative avait abouti, elle aurait eu des conséquences néfastes pour la sécurité et la stabilité de toute la sous-région de l’Afrique centrale, a-t-il affirmé.
Sur la base de cette expérience, le Ministre a plaidé en faveur du renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales, en particulier l’Organisation de Shanghai pour la coopération, l’Organisation du Traité de sécurité collective et la Communauté d’États indépendants. Il a souligné le rôle moteur du Conseil de sécurité dans la promotion des échanges avec ces dernières, notamment en matière d’informations et de pratiques optimales. Il a également appelé à renforcer la coopération entre organisations régionales pour lutter contre le terrorisme, à l’image de la collaboration instaurée entre l’Organisation de Shanghai pour la coopération et l’Union africaine.
M. MIGUEL VARGAS, Ministre des affaires étrangères de la République dominicaine, a indiqué que son pays travaillait activement avec le Groupe d’action financière d’Amérique latine pour lutter contre le blanchiment de capitaux et avec le Réseau de coopération pour le recouvrement d’avoirs dans la région des Caraïbes. En juillet dernier, la République dominicaine a formellement rejoint le Groupe Egmont des cellules de renseignements financiers.
La lutte contre le terrorisme est également une lutte pour la stabilité politique, la défense des droits de l’homme, le développement et la prospérité, a souligné le Ministre. À cet égard, il a salué le rôle du Comité interaméricain contre le terrorisme, qui fournit aux États membres de l’Organisation des États américains (OEA) une assistance législative en matière de terrorisme et de financement du terrorisme, de sécurité maritime et portuaire, de cybersécurité et de sécurité dans le secteur du tourisme, et dans l’application de la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité sur la non-prolifération des armes de destruction massive. M. Vargas a conclu que les organisations régionales et sous-régionales devaient « toujours avoir pour référence les Nations Unies, le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire ».
M. JEAN-BAPTISTE LEMOYNE, Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a estimé qu’au plan mondial, les Nations Unies avaient un rôle majeur et croissant à jouer dans la lutte antiterroriste et qu’elles avaient rempli jusqu’à présent trois grandes fonctions: la création de normes et d’obligations, afin que les États se dotent de mécanismes robustes de lutte contre le terrorisme; l’adoption de sanctions qui visent à priver les groupes terroristes des moyens de commettre des attentats; et le renforcement de la coopération internationale et régionale, afin d’encourager les États à travailler davantage ensemble et à échanger les bonnes pratiques.
Sur le plan régional, a observé M. Lemoyne, l’Asie centrale est un espace qui continue à faire face à des défis importants, sur les plans économique et politique, mais également sécuritaire. « La situation sécuritaire dégradée et l’incertitude politique en Afghanistan sont des facteurs déstabilisants », a-t-il observé, avant d’estimer que ce contexte fragile requérait la coopération de tous, en particulier des organisations internationales et régionales. L’ONU a, à cet égard, un rôle important à jouer pour encourager cette coopération, comme l’a montré l’organisation d’une conférence régionale du Bureau de lutte contre le terrorisme à Douchanbé, au Tadjikistan, en mai dernier, sur la question essentielle de la lutte contre le financement du terrorisme par le trafic de stupéfiants et la criminalité organisée.
L’Union européenne, a souligné le Secrétaire d’État, prend quant à elle pleinement sa part dans la lutte contre le terrorisme, notamment en Asie centrale, comme en témoignent des programmes importants en matière de gestion des frontières et de lutte contre la drogue. Elle entend poursuivre son action, en étendant à l’Afghanistan certains cadres de dialogue et de coopération mis en place avec les pays d’Asie centrale, a ajouté en conclusion M. Lemoyne.
Pour M. NIELS ANNEN, Ministre adjoint aux affaires étrangères de l’Allemagne, une menace aussi violente que le terrorisme ne peut être vaincue que par une coopération forte et solide entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales, comme le fait d’ailleurs l’Union européenne, qui travaille étroitement avec les Nations Unies, l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) ou l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
Le Ministre s’est aussi inquiété d’une question « urgente » comme celle de l’utilisation des drones pour commettre des attentats. Il a en outre estimé que l’Afrique avait aussi un rôle à jouer dans la lutte contre le terrorisme.
Si nous voulons réussir, a insisté M. Annen, nous ne devons jamais oublier ce qui nous lie, ni le rôle du Conseil de sécurité, faisant référence aux droits de l’homme, « qui doivent être strictement respectés », de même que l’état de droit. Ce n’est qu’en respectant ces principes que nous resterons crédibles et pourrons vaincre les idéologies extrémistes, a-t-il insisté. Si l’on fait fi de ces valeurs, cela contribuera à marginaliser certains groupes et à les encourager à rejoindre des réseaux terroristes.
Le Ministre a enfin invité à réfléchir aux causes profondes du terrorisme: il faut comprendre que la solution n’est pas unique car les causes ne sont pas uniques.
M. MARCIN PRZYDACZ, Ministre adjoint aux affaires étrangères de la Pologne, s’est prononcé en faveur d’une coopération étroite entre les Nations Unies et les organisations régionales en matière de lutte contre le terrorisme. À ses yeux, en raison de leur périmètre géographique plus restreint, les organisations régionales « peuvent parfois » bénéficier d’une meilleure compréhension des défis locaux et de la façon la plus appropriée d’y faire face.
« Il est toutefois de la plus haute importance que l’esprit et les principes de l’ONU demeurent au cœur de toutes les activités et décisions », a mis en garde M. Przydacz, estimant que les agissements des organisations régionales devaient impérativement résulter du consensus entre leurs États Membres, plutôt que de refléter les intérêts d’un nombre réduit d’acteurs régionaux. « L’ONU doit ainsi éviter toute dilution de ses propres règles de base », a—t-il insisté. Au nombre d’entre elles, M. Przydacz a mentionné l’inviolabilité des frontières étatiques, la reconnaissance des frontières existantes et le rejet de l’annexion illégale de territoires. Cela suppose également, a-t-il ajouté, de « ne pas reconnaître les effets juridiques d’actes illégaux » du point de vue du droit international.
Or, pour M. Przydacz, la position de l’Organisation de Shanghai pour la coopération, de l’Organisation du Traité de sécurité collective et de la Communauté d’États indépendants vis-à-vis de l’annexion du territoire ukrainien et du conflit en Géorgie fait malheureusement planer un doute quant à leur impartialité et leur contribution à la promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité. Selon lui, tant que l’Organisation n’aura pas défini une approche globale sur ces questions fondamentales, « la coopération entre les Nations Unies et de tels partenaires pour combattre le terrorisme demeurera contestable ».
Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a commencé par rappeler l’importance de respecter le droit international humanitaire dans le cadre des efforts de lutte contre le terrorisme, avant de se féliciter du renforcement des partenariats avec les organisations régionales et internationales. Elle a également salué l’adoption des résolutions 2462 (2019) et 2482 (2019) du Conseil de sécurité, se déclarant satisfaite que l’OSC accorde davantage d’attention au respect des obligations humanitaires dans le cadre des opérations qu’elle mène. Tout en encourageant les pays d’Asie centrale à continuer d’œuvrer à la stabilisation de l’Afghanistan, Mme Pierce a estimé que la communauté internationale doit y apporter son concours.
La représentante a aussi insisté sur la nécessité de faire en sorte que les considérations relatives à la parité entre hommes et femmes et aux droits de l’homme soient prises en compte, rappelant que les violations en ce domaine ont souvent contribué à l’aggravation de la menace terroriste. Mme Pierce a indiqué en conclusion que le Royaume-Uni était actif en Asie centrale, où il mène des projets dans les domaines de la gouvernance et des droits de l’homme, notamment.
M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a estimé que l’OSC, la CEI et l’OTSC disposaient d’avantages comparatifs indéniables, fondés sur une bonne compréhension des dynamiques politiques, économiques et sociales locales. Ces trois organisations sont, selon lui, « mieux outillées pour élaborer des mécanismes de prévention des conflits et de lutte contre le terrorisme adaptés aux réalités régionales ». S’agissant des crises régionales, notamment le conflit en Afghanistan, le représentant a jugé impérieux d’accorder une attention particulière à la situation politique et sécuritaire.
Dans le domaine de la diplomatie préventive, a poursuivi M. Ipo, l’action de l’OSC, de la CEI et de l’OTSC doit « davantage promouvoir les initiatives d’apaisement et de promotion du dialogue entre les États de la région », notamment entre l’Inde et le Pakistan.
Pour sa part, s’est félicité le représentant, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est dotée d’une stratégie de lutte contre le terrorisme basée sur une approche intégrée privilégiant la coordination et le partage d’informations entre les États Membres. Le 14 septembre dernier, les États de la CEDEAO ont ainsi décidé de franchir un cap dans l’appropriation de leur sécurité collective en adoptant un plan d’action prioritaire d’un milliard de dollars pour la période 2020-2024 pour financer la lutte contre le terrorisme.
M. BALAREZO (Pérou) a souligné le rôle joué par l’Organisation de Shanghai pour la coopération, l’Organisation du Traité de sécurité collective et la Communauté d’États indépendants en matière de lutte contre le terrorisme, notamment afin de promouvoir l’appropriation nationale de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies auprès de leurs États membres. Étant donné l’existence d’un lien entre terrorisme et criminalité transnationale organisée, le représentant a estimé que les organisations régionales et sous-régionales étaient bien placées pour apporter une assistance technique à leurs États membres et renforcer leurs capacités de lutte contre ce phénomène, dans la droite lignée de la résolution 2482 (2019) du Conseil.
Pour M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis), après la défaite territoriale de Daech en Iraq et en Syrie, il faut relever le défi du rapatriement, des poursuites en justice ou de la réhabilitation de nombreux combattants terroristes étrangers d’Asie centrale qui s’étaient expatriés pour combattre dans des groupes terroristes. À ce sujet, il a félicité les gouvernements d’Asie centrale pour les mesures qu’ils ont prises pour assumer la responsabilisation de leurs ressortissants en Iraq et en Syrie et pour les efforts qu’ils déploient pour les rapatrier dans leur pays d’origine.
Rappelant que le Conseil de sécurité avait pris des mesures importantes pour faire face à l’évolution de la menace terroriste et que le régime de sanctions a été élargi, le représentant a toutefois estimé qu’il fallait encore « désigner de nombreux autres affiliés à Daech opérant dans le monde entier ».
L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a aidé les partenaires d’Asie centrale à appliquer les résolutions du Conseil sur les combattants terroristes étrangers en organisant des ateliers pour faire face à cette menace et en lançant de nouveaux programmes de lutte contre l’extrémisme violent dans la région, a noté M. Cohen. Outre les organisations régionales, des plateformes telles que l’initiative C5+1, regroupant les cinq pays d’Asie centrale et les États-Unis, ont permis de renforcer les capacités de lutte contre le terrorisme et de faciliter le dialogue sur les efforts de rapatriement, de réhabilitation et de réintégration des combattants terroristes étrangers. Hier encore, sous les auspices du Forum mondial de lutte contre le terrorisme, les États-Unis ont coorganisé un événement parallèle mettant en lumière les expériences de ceux qui ont rapatrié leurs combattants terroristes étrangers, a fait valoir M. Cohen.
Mais quels que soient l’organisation, le forum ou la plateforme, tous les efforts visant à renforcer la coopération avec les Nations Unies en matière de lutte contre le terrorisme doivent être menés conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, à la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et au droit international applicable, a poursuivi le représentant. « Les efforts de lutte contre le terrorisme qui ne respectent pas les droits de l’homme génèrent finalement du ressentiment et de l’extrémisme violent », a-t-il averti. Et, malheureusement, a-t-il dénoncé, « c’est l’approche dangereuse à laquelle nous assistons en Syrie, où le régime d’Assad et ses alliés justifient comme des opérations légitimes de lutte contre le terrorisme des frappes aériennes sur des civils, des écoles, des ambulances et des hôpitaux ».
De même, M. Cohen s’est dit « profondément préoccupé par la situation au Xinjiang, où plus d’un million de Ouïghours et d’autres musulmans ont été arrêtés arbitrairement sous le prétexte de la lutte antiterroriste ». La Chine, comme toutes les nations, a parfaitement le droit de réagir aux menaces terroristes réelles, mais « la lutte antiterroriste ne peut servir d’excuse pour réprimer les pratiques religieuses pacifiques des musulmans chinois et de tout un groupe minoritaire », a-t-il insisté.
En conclusion, le représentant a exhorté les organisations régionales telles que l’OSC, l’OTSC et la CEI à « examiner de près la manière dont elles abordent le terrorisme, afin de mieux éviter de confondre séparatisme, extrémisme et terrorisme dans leurs documents de base ».
Reprenant la parole, le Ministre des affaires étrangères de la Chine a rejeté les « allégations infondées » portées par les États-Unis contre son pays au sujet du Xinjiang, en leur demandant de ne pas contester la « réalité des faits » dans cette région. Il faut rejeter le « deux poids, deux mesures », a-t-il poursuivi, en rappelant que la crise en Libye avait exposé la communauté internationale à la prolifération de la menace terroriste dans la zone subsaharienne. Ces pays qui se sont faits les « chantres de la lutte antiterroriste » ne devraient-ils pas s’expliquer de cette situation? s’est-il demandé.
La représentante du Royaume-Uni a tenu à dire qu’elle partageait les préoccupations de son collègue américain au sujet de la situation au Xinjiang.
Le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie s’est en revanche rangé auprès de son homologue chinois.
M. MUKHTAR TILEUBERDI, Ministre des affaires étrangères du Kazakhstan, a jugé le monde dangereux en raison de la « flambée » du terrorisme et de l’extrémisme. Son pays a élaboré un code de conduite pour parvenir à la « destruction » du terrorisme d’ici à 2045 –date du centième anniversaire de l’ONU- auquel se sont joints 84 pays et il a appelé les autres États Membres à se joindre à ce code et à la convention.
Le Kazakhstan a également pris l’initiative dans les forums régionaux de forger une liste unifiée d’organisations terroristes et d’unifier les normes juridiques de lutte contre le terrorisme dans les organisations régionales.
La défaite de l’État islamique d’Iraq et du Levant en Syrie et en Iraq a conduit au déplacement de combattants et à leur retour dans leur pays, a rappelé le Ministre. Le Kazakhstan a pour sa part mené une opération pour rapatrier 600 de ses ressortissants, dont une majorité d’enfants: ceux qui ont mené des opérations terroristes ont été traduits en justice, les autres font l’objet d’efforts de réintégration; 12 enfants seront bientôt ramenés d’Iraq où leurs parents ont été condamnés.
M. CHINGIZ AIDARBEKOV, Ministre des affaires étrangères du Kirghizistan, a suggéré, pour faire face à la menace du terrorisme, de se fonder sur une « interaction en chaîne » entre États, organisations et associations. Il a mentionné à cet égard la longue histoire de la coopération entre l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) et l’ONU en soulignant l’attention qu’accorde son pays, dans ce cadre, au problème du retour des combattants terroristes étrangers dans leur pays d’origine et au risque de créer de nouveaux foyers de troubles et conflits armés. D’où son appel à coordonner plus efficacement les mesures prises par la communauté internationale pour faire face à ce problème.
Le Ministre a signalé à cet égard que le Conseil de sécurité collective de l’OTSC avait prévu d’adopter, le 28 novembre à Bishkek, une décision portant sur le plan d’action commun des États membres de l’OTSC pour la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies pour 2019-2020.
Il est important de noter, a poursuivi le Ministre, l’unité d’approches dans la lutte antiterroriste qu’adopte la Communauté d’États indépendants (CEI), avec sa doctrine commune sur la sécurité antiterroriste et son mécanisme concerté de mise en œuvre qui tient compte des intérêts nationaux des parties. Il a cité le Traité sur la coopération des États membres de la CEI sur la lutte antiterroriste ainsi que le Concept pour la coopération de ces mêmes États dans la lutte antiterroriste et autres manifestations violentes de l’extrémisme. Dès le 21 juin 2000, la CEI avait créé son centre antiterroriste, a-t-il ajouté, avant de mentionner aussi la signature, le 31 octobre 2018 à Tachkent, du mémorandum d’accord entre l’ONU, représentée par son Bureau de lutte contre le terrorisme, et le Centre antiterroriste de la CEI.
M. Aidarbekov a enfin mis en avant le solide cadre juridique de lutte antiterroriste de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC) et l’adoption, par l’Assemblée générale des Nations Unies le 30 août 2019, d’une résolution sur la coopération entre l’ONU et l’OSC, où celle-ci est présentée comme la plus importante organisation régionale sur la question de la sécurité dans la région dans tous ces aspects.
L’un des mécanismes de sécurité régionale de cette organisation est la conduite d’activités conjointes par les forces armées des États membres, qui permet de gérer au mieux les capacités militaires pour les opérations et les questions importantes, a poursuivi le Ministre. La « Mirnaya Missiya » (mission de paix), par exemple, a pour but de contrecarrer la pénétration des groupes terroristes sur le territoire des États membres de l’OSC.
En conclusion, le Ministre a plaidé pour que la communauté internationale développe une stratégie mondiale pour faire face aux nouveaux problèmes et menaces, sous les auspices des Nations Unies et en se fondant sur le droit international.
M. VLADIMIR MAKEI, Ministre des affaires étrangères du Bélarus, s’est félicité de la signature d’un mémorandum d’accord entre l’OTSC et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, avant de rappeler que son pays avait aussi conclu un accord de « bon voisinage numérique » avec les États limitrophes. Il a considéré que seuls des efforts communs de la part de tous les États et des organisations régionales et internationales, sous l’égide de l’ONU, seraient de nature à renforcer leur sécurité commune, d’où le soutien de son gouvernement au renforcement des partenariats.
M. SIROJIDDIN MUHRIDDIN, Ministre des affaires étrangères du Tadjikistan, s’est dit convaincu que seuls des efforts communs permettraient de lutter efficacement contre les extrémistes. Il a salué le rôle important de l’OTSC qui, par ses efforts, contribue de manière importante à la lutte contre ces menaces et le trafic de stupéfiants et d’armes mais aussi aide à coordonner la surveillance de la frontière sud du Tadjikistan avec l’Afghanistan, appelant à une solution politique dans ce pays.
Mais l’ONU doit aussi avoir un rôle de coordination des efforts régionaux par ses instruments, comme la Convention de lutte contre le terrorisme, qui restent la base de ce combat, a poursuivi le Ministre. M. Muhriddin a enfin invité les États Membres à participer à une réunion qui aura lieu au Siège des Nations Unies le 27 septembre, à la suite de la conférence tenue en mai dernier à Douchanbé, capitale du Tadjikistan, en coopération avec les Nations Unies, l’Union européenne et l’OSCE et consacrée à la lutte contre le financement du terrorisme par le trafic illicite de drogue et le crime organisé.
M. ELMAR MAMMADYAROV, Ministre des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan, a estimé que la position géographique « sensible » de l’Azerbaïdjan et la persistance de conflits irrésolus dans la région, dont le nettoyage ethnique et l’occupation dans des territoires souverains de son pays, accroissaient le niveau des menaces transfrontalières, en particulier celle du terrorisme. Depuis la fin des années 1980, l’Azerbaïdjan est visé par des attaques terroristes dirigées de l’extérieur, a-t-il déploré.
En tant que membre de la Communauté d’États indépendants (CEI), l’Azerbaïdjan coopère avec les autres membres de la CEI, conformément aux principes d’égalité souveraine et d’intégrité territoriale des États. Dans le même esprit, a expliqué le Ministre, son pays partage les buts et principes de l’Organisation de Shanghai pour la coopération et développe ses relations avec celle-ci en vue de renforcer la sécurité et la stabilité régionale, et de combattre le terrorisme, l’extrémisme et le séparatisme, le trafic de drogue et autres activités criminelles. Les organisations régionales, a toutefois mis en garde M. Mammadyarov, « ne doivent pas être utilisées à mauvais escient par ceux qui violent le droit international et promeuvent une culture de l’impunité ».
M. MOHAMMAD JAVAD ZARIF, Ministre des affaires étrangères de la République islamique d’Iran, a souligné que la coopération régionale était en vigueur de longue date dans la région du détroit d’Ormuz. Dans ce cadre, il a souhaité présenter le Mécanisme d’Ormuz pour les efforts de paix appelé HOPE (Hormuz Peace Endeavor) pour promouvoir la solidarité, l’intégrité territoriale et prévenir les tensions sectaires et les tentatives de déstabilisation, y voyant le moyen de renforcer la coopération entre tous les États de la région, tout en garantissant leurs frontières.
Un autre objectif concerne la sécurité énergétique de la région et la garantie de libre circulation des matières premières entre les États, ainsi que des mécanismes d’alerte précoce, de prévention et de résolution des conflits, a poursuivi le Ministre. Les États partenaires se réuniront régulièrement à différents niveaux et comptent y inviter des chercheurs et le secteur privé, a-t-il ajouté.
M. ABDULAZIZ KAMILOV, Ministre des affaires étrangères de l’Ouzbékistan, a déclaré que le terrorisme recourait constamment à de nouveaux modes opératoires, à de nouvelles méthodes de recrutement et à de nouvelles sources de financement. Pour l’Ouzbékistan, l’assistance de la communauté internationale, et en particulier des membres permanents du Conseil de sécurité, est importante dans le cadre du phénomène du retour des combattants terroristes étrangers. Le Ministre a souhaité attirer l’attention sur la situation en Asie centrale, et en particulier l’Afghanistan, dont il a cependant tenu à dire qu’il ne représentait pas seulement un défi, mais aussi un potentiel. Si nous renforçons les projets d’infrastructures avec ce pays, c’est parce que son développement économique en dépend, et dès lors celui du reste de la région, a conclu M. Kamilov.
M. ZOHRAB MNATSAKANYAN, Ministre des affaires étrangères de l’Arménie, a fait remarquer qu’aucun État n’étant épargné par le terrorisme, la communauté internationale devait travailler main dans la main pour le contrer et que toutes tentatives de justifier l’extrémisme violent ou d’incitation à la haine devaient être fermement condamnées à tous les échelons.
Le Ministre s’est dit vivement préoccupé en particulier par les cas où des communautés sont ciblées en tant que telles, ainsi que par la destruction de sites appartenant au patrimoine mondial de l’humanité, comme en Iraq et en Syrie.
L’Arménie poursuit la mise en œuvre des conventions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme. Elle a notamment mis en place un système de collecte d’informations sur les passagers aériens et travaille étroitement avec la CEI et de l’OTSC: elle applique ainsi le programme de lutte contre le terrorisme de la CEI pour 2017 et 2019 et a participé aux exercices d’entraînement de la CEI.
M. MAKHDOOM SHAH MAHMOOD HUSSAIN QURESHI, Ministre des affaires étrangères du Pakistan, s’est félicité de l’adoption, le 30 août dernier, de la résolution de l’Assemblée générale sur la coopération entre l’ONU et l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC), dont son pays a été l’un des coauteurs. Le Pakistan, a-t-il assuré, a agi fermement pour éradiquer le fléau du terrorisme. Mais des « divergences politiques » viennent alourdir le « fardeau » commun qui échoit aux différents pays de la région, a estimé le chef de la diplomatie pakistanaise, en préconisant de régler les « différends de longue date » pour venir à bout de la menace terroriste. Une coopération plus étroite entre l’ONU et les organisations régionales peut y contribuer, a ajouté le Ministre.
Dans ce contexte, il a estimé que l’ONU et les trois organisations régionales concernées devaient innover face au problème posé par le retour dans leurs pays d’origine des combattants terroristes étrangers, en recourant par exemple à un mécanisme de partage d’informations.
M. TSOGTBAATAR DAMDIN, Ministre des affaire étrangères de la Mongolie, a rappelé que son pays avait prédit en 2007 que les cellules terroristes trouveraient refuge, se renforceraient et se propageraient dans les économies les plus faibles. Cette situation, qui se confirme aujourd’hui, rend donc évidente la nécessité pour les pays développés et les organisations internationales de fournir une assistance technique pour aider les pays vulnérables à mieux combattre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée. Il faudrait en réalité des capacités « uniformisées » dans le cadre d’une juridiction internationale, a estimé le Ministre.
Quant aux efforts visant à empêcher les jeunes de s’embrigader dans l’extrémisme violent et le terrorisme, le Ministre a rappelé la réunion qu’il a organisé avec Facebook, en avril dernier. Il a aussi parlé d’une conférence régionale, tenue en juin dernier à Oulan-Bator, sur le dialogue inter et intrareligieux. Les jeunes de Mongolie ont, pour leur part, lancé en ligne le journal « Peacebook » pour promouvoir la culture de paix et la tolérance mais aussi leur propre rôle dans le processus de prise des décisions liées à la lutte contre le terrorisme.
Pour M. SHRI V. MURALEEDHARAN, Ministre d’État aux affaires extérieures de l’Inde, la lutte contre le terrorisme ne doit pas seulement avoir pour objectif d’éliminer les terroristes et de démanteler les organisations et les réseaux terroristes; elle doit aussi identifier et tenir pour responsables les États qui encouragent, appuient et financent le terrorisme, et qui offrent un refuge aux terroristes, puis prendre des mesures fermes contre ces États. Le Ministre a appelé tous les pays à adopter sans attendre le projet de convention générale sur le terrorisme international.
L’Inde, a précisé M. Muraleedharan, est membre de l’Organisation de Shanghai pour la coopération (OSC) depuis 2017 et se félicite de la « clarté » de l’OSC sur la question du terrorisme. Déterminé à intensifier la coopération de son pays dans ce cadre, il a proposé aux membres de l’OSC de se servir de l’Instance régionale de lutte contre le terrorisme pour mieux coopérer en matière d’échange d’informations, de renforcement des capacités, d’entraide judiciaire et de partage des meilleures pratiques.
M. PETER BURIAN, Représentant spécial de l’Union européenne pour l’Asie centrale, a rappelé que cette région avait été l’une des premières à adopter la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies, préparée avec un financement de l’Union européenne. L’UE a, quant à elle, récemment adopté sa nouvelle stratégie pour l’Asie centrale, dont l’approche est multidimensionnelle. L’un des piliers de cet engagement, a expliqué M. Burian, est la promotion de la résilience, la lutte contre le terrorisme étant liée à d’autres éléments importants comme l’état de droit ou la bonne gouvernance. Pour ce faire, l’Union européenne renforce ses programmes d’aide au développement centrés sur la prévention de l’extrémisme violent, en particulier dans le cadre d’une série de programmes intitulés « STRIVE » (Strengthening Resilience to Violence and Extremism - Renforcer la résilience à la violence et à l’extrémisme).
Le Représentant spécial a rappelé l’importance de la prévention et de la lutte contre le financement du terrorisme, conformément à la résolution 2462 (2019) du Conseil de sécurité adoptée le 28 mars dernier et la Déclaration de Douchanbé. Se référant ensuite à la résolution 2396 (2017), il a jugé crucial de tenir pour responsables de leurs actes les combattants terroristes étrangers, et, à ce sujet, a salué les pays d’Asie centrale qui se sont engagés à rapatrier des membres de la famille de ces combattants, en particulier des enfants. Enfin, M. Burian a indiqué que l’Union européenne avait augmenté le budget de son programme de gestion des frontières pour l’Asie centrale (BOMCA), qui inclut maintenant l’Afghanistan.