En cours au Siège de l'ONU

Dixième session extraordinaire d’urgence (reprise),
44e séance plénière – après-midi
AG/12555

En pleine escalade de la crise au Moyen-Orient, l’Assemblée générale s’impatiente devant l’impuissance de la communauté internationale

Alors qu’une offensive terrestre d’Israël est en cours à Gaza, où la situation humanitaire s’aggrave de jour en jour, l’Assemblée générale a conclu cet après-midi la reprise de sa dixième session extraordinaire d’urgence, consacrée aux mesures illégales prises par les autorités israéliennes dans les territoires palestiniens occupés.  Ce qui a dominé dans les 25 prises de parole du jour —portant leur total à 141, réparties sur cinq séances depuis le 26 octobre- c’est un sentiment d’impuissance, malgré la résolution « Protection des civils et respect des obligations juridiques et humanitaires » adoptée par l’Assemblée générale le vendredi 27 octobre.

Il n’y a pas une délégation aujourd’hui —et il en fut de même les jours précédents, à de très rares exceptions près— qui n’ait pas appelé à la paix: qui à « la plus grande retenue possible » (Brunéi Darussalam), qui à « la nécessité urgente d’une désescalade » (Chypre), qui « au respect du droit humanitaire » (Islande), qui à la « libération sans condition des otages » (Nauru), qui à « la fin des hostilités » (Zambie), ou pour le moins à l’établissement de « pauses » (Émirats arabes unis) ou « de couloirs humanitaires » (Sénégal)… Et pourtant, sur le terrain, aucun de ces appels n’a été suivi d’effets, si bien que « des milliers de vies humaines sont détruites, terrorisées, menacées ou traumatisées quotidiennement dans la chaleur et les décombres des combats en cours entre les forces israéliennes et celles du Hamas », s’est lamenté Kiribati.

À ce jour, ce sont ainsi plus de 9 000 personnes (dont plus de 3 000 enfants) qui ont été tuées dans la bande de Gaza depuis le déclenchement de la crise, le 7 octobre, et plus de 20 000 blessées, selon le dernier bilan établi par le Ministère de la santé de Gaza, repris par un certain nombre de délégations. Plusieurs journalistes, travailleurs médicaux ainsi que 70 employés de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) comptent également parmi les victimes, ont ajouté les Émirats arabes unis, qui ont en outre condamné vigoureusement le bombardement mardi du camp de réfugiés de Jabaliya.  Quant à l’infrastructure civile, elle se dégrade de jour en jour, un nombre croissant d’hôpitaux étant détruits ou fermant faute de matériel, s’est alarmé l’Ordre souverain de Malte. 

À ce macabre constat, a rappelé la Norvège, il convient d’ajouter la mort d’environ 1 400 Israéliens, les blessures de plus de 5 400, et la prise de 200 otages lors de l’attaque terroriste « odieuse » du Hamas.  « Pour le bien des enfants, enfants palestiniens et enfants israéliens, le monde doit faire mieux; la diplomatie doit faire mieux », s’est écriée la déléguée norvégienne.

Or, malgré ce large, ou du moins apparent, consensus, l’ONU ne parvient toujours pas à stopper cette « tragédie qui n’a que trop duré », s’est impatienté le Sénégal.  Ce qui se passe à Gaza est, selon lui, un « déshonneur », qui traduit une « faillite flagrante de la communauté internationale à trouver une solution pérenne à ce conflit ».  Il a visé en particulier le Conseil de sécurité, qui ne peut rester « muet » plus longtemps.  Également las, le Soudan a agité le spectre de la défunte Société des Nations qui, lors des années ayant précédé la Seconde Guerre mondiale, a été « tuée par son incapacité à prendre des décisions solides ».  C’est précisément pour éviter que l’ONU soit « poussée au bord du précipice » que « nous devons travailler ensemble », a enjoint la délégation soudanaise.

« Combien d’êtres humains devront encore mourir avant que le Conseil de sécurité ne considère que l’exercice du droit de veto est moins important que son obligation morale et juridique de préserver les générations futures du fléau de la guerre? » a demandé Saint-Vincent-et-les Grenadines, jointe dans sa critique par le Timor-Leste, qui a rappelé que le Conseil avait « failli à ses responsabilités » à quatre reprises au cours des deux dernières semaines. 

La République arabe syrienne a, quant à elle, nommément accusé les États-Unis de donner le « feu vert » à Israël pour mener impunément son agression, tandis que la Ligue des États arabes a regretté que l’on laisse « carte blanche » à la « Puissance occupante », au risque d’élargir le conflit à toute la région.  La lutte israélo-palestinienne n’ayant pas commencé le 7 octobre, « elle n’est pas et ne sera pas un aspect de la lutte contre le terrorisme », a insisté la Ligue des États arabes, niant ainsi le droit d’Israël à la légitime défense.  Avec un argument proche, la Syrie a attaqué la base juridique de ce droit, y voyant une « dénaturation » de l’Article 51 de la Charte des Nations Unies.

Sur un registre différent, étant donné sa propre situation géopolitique, l’Ukraine a vu dans cette reprise de la dixième session extraordinaire d’urgence, un « signe d’alerte qui montre qu’au lieu de résoudre les conflits existants, nous avons affaire à leur multiplication ».  Justifiant son abstention lors du vote de la résolution du 27 octobre par l’absence dans le texte d’une condamnation explicite du Hamas, la délégation ukrainienne a fait un parallèle entre ce dernier et la Russie, et prévenu que « les groupes et les régimes terroristes sont les seuls bénéficiaires de cette évolution menaçante ». 

Finalement, la plupart des délégations ont mis un point d’honneur à souligner l’importance d’une issue politique, et pas seulement militaire, à ce conflit, avec un appui répété à la solution des deux États.  Mêlant esprit de synthèse et de concorde, l’Union africaine a conclu sur la nécessité pour l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité, le Secrétaire général et le Quatuor (Union européenne, Fédération de Russie, États-Unis et ONU) de s’engager « résolument » à mettre fin à cette situation et à relancer le processus de paix.

Au terme de cette reprise de session, qui s’est déroulée sur cinq séances (26, 27, 31 octobre, 1er et 2 novembre), la dixième session extraordinaire a été suspendue.

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