Dixième session extraordinaire d’urgence (reprise)
39e séance plénière – matin
AG/12546

Moyen-Orient: l’Assemblée générale reprend sa dixième session extraordinaire d’urgence dans un climat d’intense émotion et d’appels à la désescalade

Vives émotions, images chocs et fermes condamnations ont marqué la reprise, aujourd’hui, de la dixième session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale consacrée aux mesures illégales prises par les autorités israéliennes, à Jérusalem-Est occupée ainsi que dans le reste du Territoire palestinien occupé, au moment où la région vit l’une des plus graves crises de son histoire moderne. 

Les appels à un cessez-le-feu immédiat et à un accès humanitaire à Gaza, ainsi qu’au droit d’Israël à se défendre dans le respect du droit international, se sont multipliés à la veille de l’examen d’un projet de résolution présenté conjointement par le Groupe des États arabes et l’Organisation de la coopération islamique (OCI), comme l’a annoncé, en ouverture, le Président de l’Assemblée générale, M. Dennis Francis. 

Les délégations favorables à ce texte ont justifié leurs appels par la nécessité d’épargner les populations civiles palestiniennes qui ont déjà payé un lourd tribut avec 7 000 morts en trois semaines.  D’autres ont en outre estimé qu’Israël doit se prémunir après l’attaque « sauvage » du Hamas qui a massacré 1 400 personnes. 

C’est sous des applaudissements nourris que le représentant de l’État de Palestine a prié le monde de se souvenir qu’en ce moment même les Palestiniens de Gaza fuient d’un endroit à un autre sans nulle part où aller en toute sécurité, les bombes israéliennes n’ayant épargné aucun mètre carré dans la bande. 

Il a indiqué que 70% des Palestiniens tués par Israël au cours des deux dernières semaines étaient des femmes et des enfants, ces derniers étant au nombre de 3 000.  « Est-ce là, la guerre que certains d’entre vous défendent? » s’est-il emporté. « Comment les représentants des États peuvent-ils expliquer à quel point il est horrible que 1 000 Israéliens aient été tués et ne pas ressentir la même indignation alors que 1 000 Palestiniens sont désormais tués chaque jour? » 

« Trop c’est trop », a-t-il tonné avant d’appeler l’assistance à « écouter sa conscience » et à voter pour arrêter les tueries.  « Votez pour l’aide humanitaire afin qu’elle atteigne ceux dont la survie même en dépend.  Votez pour arrêter cette folie.  Choisissez la justice et non la vengeance! » a-t-il lancé. 

Se défendant d’être contre le peuple palestinien, le représentant d’Israël a exposé en détail les atrocités commises par le Hamas, qu’il a qualifié de « nazis contemporains » et de « génocidaires ».  Évoquant des corps calcinés ou criblés de balles, il a brandi son iPad depuis la tribune pour montrer la vidéo d’un agriculteur thaïlandais se faisant décapiter avec un outil de jardin.  Contrairement à l’Holocauste, pour lequel nous ne disposons que photos en noir et blanc, nous avons ici les preuves des massacres en haute définition filmées par les terroristes en GoPro, a-t-il fustigé. 

En venant au projet de résolution, le représentant israélien s’est scandalisé que le texte ne fasse pas référence à ces massacres, s’offusquant en outre que le Hamas ne soit pas mentionné une seule fois dans le libellé qui appelle « les deux parties à » — comme si l’on pouvait mettre côte-à-côte « une démocratie respectueuse du droit et des monstres génocidaires », a-t-il dénoncé.  « Cette résolution n’a sa place qu’au rebut de l’histoire », a-t-il lancé, avant d’inviter l’Assemblée à une minute de silence pour toutes les victimes du Hamas. 

C’est également à une minute de silence qu’a invité, au nom du Groupe des États arabes, le Vice-Premier Ministre de Jordanie.  Mais celle-ci n’est pas uniquement destinée aux victimes d’un camp ou de l’autre, a-t-il insisté, mais à tous les civils et innocents qui sont tombés et qui continuent de tomber dans cette guerre aussi terrible qu’abominable. 

Poursuivant sous les applaudissements, il a souligné que la punition collective n’est pas de l’auto-défense, mais un crime de guerre.  « La rage ne doit pas nous rendre aveugle », a-t-il mis en garde.  Bouleversé de savoir que des enfants palestiniens meurent lentement sous les décombres, il a exhorté à ne pas laisser tomber le peuple palestinien, « un peuple occupé dont les jours commencent par la mort et se terminent par la mort ».  « Ne vous laissez pas berner.  Ne les laissez pas vous dire qu’il s’agit d’une guerre entre musulmans et juifs », a-t-il martelé, affirmant valoriser « la vie musulmane.  La vie chrétienne.  La vie juive ». 

Mais la communauté internationale continue de manquer à ses devoirs vis-à-vis de la population palestinienne, a déploré l’OCI, par la voix du représentant de la Mauritanie.  L’Assemblée générale doit rappeler au Conseil de sécurité de s’acquitter de ses obligations, a-t-elle souligné, jugeant irresponsable l’utilisation du veto dans une telle situation de crise. 

N’est-il pas grand temps de régler cette situation qui constitue une violation des valeurs et des principes chers à notre Organisation, s’est demandé le Ministre des affaires étrangères de l’Algérie.  Face aux tensions qui s’aggravent et à cette violence indescriptible, les souffrances atroces doivent cesser maintenant, a exigé le Président de l’Assemblée générale qui a condamné tout ciblage aveugle de civils innocents à Gaza ainsi que l’ampleur de la destruction d’infrastructures critiques par Israël.  Dans le même temps, il a réitéré sa condamnation de l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre et rejeté les meurtres et la prise d’otages civils.   

Sur ce dernier point, la République islamique d’Iran, par la voix de son Ministre des affaires étrangères, a fait part de sa disposition à jouer un rôle constructif dans le cadre de ses efforts humanitaires aux côtés du Qatar et de la Türkiye, informant que les dirigeants du Hamas se sont dits prêts à « nous transmettre les prisonniers non combattants ».  Il a estimé, dans le même temps, nécessaire d’assurer la libération des 6 000 prisonniers palestiniens, détenus en Israël. 

Le Ministre iranien a par ailleurs dit « clairement » à l’adresse des États-Unis, qui « dirigent le génocide en Palestine », que « nous ne souhaitons pas un débordement » de la guerre dans la région.  Mais si le génocide à Gaza se poursuit, alors « ils ne seront pas épargnés par le feu ». 

La dixième session extraordinaire d’urgence avait été convoquée pour la première fois en 1997 et sa dernière réunion datait de 2018.

En vertu de la résolution A/RES/76/262, sa convocation aujourd’hui remplace la séance que la présidence de l’Assemblée générale est tenue de convoquer dans les 10 jours ouvrables suivant l’exercice du droit de veto par un ou plusieurs membres permanents du Conseil de sécurité, afin de tenir un débat sur la situation au sujet de laquelle le veto a été opposé.

Avant d’entamer ce débat, l’Assemblée générale a décidé que les Comores, Sao Tomé-et-Principe et la Somalie pourront voter durant la soixante-dix-huitième session et la dixième session extraordinaire d’urgence, après avoir pris note du document A/ES-10/959 concernant les États Membres en retard dans le paiement de leurs contributions financières à l’ONU. 

Elle a par ailleurs décidé que le Comité de vérification des pouvoirs de sa soixante-dix-huitième session sera également en fonction à la dixième session extraordinaire d’urgence.

L’Assemblée générale poursuivra sa dixième session extraordinaire d’urgence demain, vendredi 27 octobre, à partir de 10 heures. 

 

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