En cours au Siège de l'ONU

9883e séance – matin
CS/16025

Conseil de sécurité: Israël sommé de respecter la résolution 2334 en cessant toutes activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé

En présentant aujourd’hui au Conseil de sécurité le trente-troisième rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016), Mme Sigrid Kaag, Coordonnatrice spéciale pour le processus de paix au Moyen-Orient par intérim, a rappelé au pays concerné que le texte « exige de nouveau d’Israël qu’il arrête immédiatement et complètement toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et respecte pleinement toutes les obligations juridiques qui lui incombent à cet égard ».

Les membres du Conseil, à l’instar de la France, ont dressé un bilan accablant de l’application des prescriptions de la résolution près de 10 ans après son adoption, tandis que les États-Unis ont considéré que « ce texte nous détourne des véritables menaces à la paix et à la sécurité ».  Mme Kaag a pourtant rappelé la douzaine d’observations formulées par le Secrétaire général pour garantir l’application du texté incriminé. 

Si le rapport fait la part belle à la situation en Cisjordanie occupée, il revient sur la situation à Gaza où, citant le Ministère de la santé de Gaza, au moins 3 860 Palestiniens ont été tués et 5 979 blessés sur la période couverte par le rapport (7 décembre 2024-13 mars 2025).  Mme Kaag a en même temps informé des bienfaits du cessez-le-feu à Gaza, qui est entré en vigueur le 19 janvier, sur la situation humanitaire: il a permis l’acheminement de plus de 57 000 tonnes de nourriture pour satisfaire les besoins de 1,9 million de personnes.

Cisjordanie: déjà plus de 40 000 déplacés cette année

En Cisjordanie occupée, Israël a approuvé la construction d’environ 10 600 logements, dont 4 920 à Jérusalem-Est, et démoli 460 habitations palestiniennes obligeant 576 personnes au déplacement, a poursuivi la haute fonctionnaire.  Elle a fait état des conséquences de la violence dans ce Territoire palestinien occupé où 123 Palestiniens ont été tués et 924 blessés, dont 118 par des colons.  Du côté israélien, elle a cité des sources israéliennes selon lesquelles 10 Israéliens ont été tués et 96 autres blessés par des Palestiniens. 

Le lancement par Israël, le 21 janvier 2025, de la plus grande opération en Cisjordanie occupée a détruit sur son passage des maisons et des infrastructures civiles, provoquant le déplacement de plus de 40 000 personnes.  Les restrictions à la liberté de mouvement entravent l’accès aux services essentiels ainsi que les activités économiques, a noté Mme Kaag.  Elle a aussi informé de la décision du Gouvernement israélien de maintenir la présence de son armée dans certains camps de réfugiés pendant l’année à venir et d’empêcher les résidents d’y revenir. 

Poursuivant, Mme Kaag a cité le rapport de la Banque mondiale, de l’Union européenne (UE) et de l’ONU qui évalue à 5,3 milliards de dollars le coût de reconstruction et des besoins de Gaza et de la Cisjordanie occupée au cours de la prochaine décennie.  Elle a pris note de l’entrée en vigueur des deux lois israéliennes visant à empêcher l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) d’opérer sur le territoire d’Israël et du transfert des 540 millions de dollars sur les 1,2 milliard de dollars de revenus palestiniens retenus depuis octobre 2023 pour payer des dettes de l’Autorité palestinienne au fournisseur d’électricité israélien. 

Outre l’arrêt complet de la colonisation, Mme Kaag a rappelé que la résolution « invite à continuer, dans l’intérêt de la promotion de la paix et de la sécurité, de déployer collectivement des efforts pour engager des négociations crédibles sur toutes les questions relatives au statut final dans le cadre du processus de paix au Moyen-Orient ». 

Parmi les « observations » du Secrétaire général sur le sujet, elle a cité celle qui appelle à une enquête approfondie sur tous les incidents cités dans le rapport, afin que les auteurs de toutes les violations du droit international rendent des comptes.  Le Secrétaire général insiste également sur l’importance d’assurer un traitement humain à toutes les personnes privées de liberté et réitère son appel en faveur d’un cessez-le-feu.

Objections des États-Unis et d’Israël 

« La résolution 2334 (2016) nous détourne des véritables menaces à la paix et à la sécurité », ont affirmé les États-Unis qui, s’agissant de la Cisjordanie, ont apporté leur appui aux efforts des Forces de défense israéliennes et des forces de sécurité de l’Autorité palestinienne visant à éliminer l’extrémisme violent à Jénine.  Plus de 2 000 tentatives d’attentat ont été lancées depuis la « Judée-Samarie » (nom donné par Israël à la Cisjordanie), a relevé le délégué israélien déplorant que personne n’en ait parlé. 

Selon le délégué, des attaques y ont tué 46 personnes et blessé 1 200 autres.  « Ce qui se passe en Judée-Samarie n’est pas qu’une simple question de sécurité interne, il s’agit du nouveau front dans la guerre menée par l’Iran contre le peuple juif. »  Le délégué y a aussi vu une conséquence de « l’incompétence crasse de l’Autorité palestinienne », qui a échoué à démanteler les groupes terroristes qui contrôlent des villes comme Jénine et Toulkarm.  « Il n’y aura aucun sanctuaire terroriste en Judée-Samarie, à Gaza ou au Liban.  Si les terroristes veulent nuire à notre peuple, nous les frapperons », a-t-il promis. 

L’accusation de génocide brandie par la Palestine

« Israël croit avoir trouvé la solution à la question palestinienne, les Palestiniens devront choisir: mourir sur leur terre ou vivre ailleurs », a ironisé l’Observateur permanent de l’État de Palestine.  Selon lui, le génocide en cours à Gaza l’est également en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est.  La dernière et la plus massive campagne de nettoyage ethnique depuis 1967 a déjà déplacé plus de 40 000 personnes en peu de semaines, a-t-il noté.  Selon lui, l’objectif d’Israël a toujours été « un maximum de terres palestiniennes avec un minimum de Palestiniens ». Il a accusé Israël de s’en prendre à la démographie palestinienne pour contrôler la géographie palestinienne. 

Face à cette escalade sans précédent, des mesures internationales doivent être mises en place, a préconisé l’observateur en rappelant aussi l’avis de la Cour internationale de Justice (CIJ). Il a révélé que des États sont prêts à prendre, individuellement et collectivement, dans les prochains jours, des mesures pour soutenir le droit du peuple palestinien à l’autodétermination, rejeter l’acquisition illégale de territoires par la force et préserver les perspectives de paix, de sécurité et de prospérité communes à la région, qui détermineront la suite des événements. 

Ne pas fermer les yeux, ne pas rester silencieux

« Le Conseil ne doit pas détourner les yeux de la poursuite de la colonisation à Jérusalem-Est et en Cisjordanie », a alerté la France tandis que pour la Somalie, « la communauté internationale ne peut pas rester silencieuse face à la poursuite sans relâche des violations de la résolution 2334 ». Ces violations menacent la contiguïté territoriale d’un futur État palestinien, a fustigé la Somalie exigeant un front uni contre le génocide, les changements démographiques forcés, les déplacements de populations palestiniennes ou encore les tentatives d’annexion de territoires à Gaza ou en Cisjordanie.

Israël, en tant que Puissance occupante, a le devoir d’empêcher les violences commises par les colons extrémistes, et de protéger les civils palestiniens, de préserver le statu quo historique sur les lieux saints et d’empêcher tout ce qui rapproche de l’annexion de fait des territoires palestiniens occupés, a sermonné la France, qui a dit travailler avec tous les pays à la recherche d’un mécanisme permettant de réengager le dialogue.  Elle prépare notamment la conférence internationale sur la solution des deux États, qu’elle présidera avec l’Arabie saoudite en juin prochain. 

Israël doit renoncer à son « obsession de l’utilisation de la force », y compris en Cisjordanie où les activités violent le droit international, a conseillé la Chine.  Plus accusatrice, l’Algérie a dénoncé les « tactiques génocidaires d’Israël » dans les territoires palestiniens occupés.  La Puissance occupante vise « l’annihilation de la perspective d’un État palestinien et l’expulsion du peuple palestinien de ses terres natales » pour permettre l’établissement d’une souveraineté israélienne totale sur la Cisjordanie, a-t-elle dénoncé. « S’agit-il là du comportement d’une partie prenante désireuse de faire la paix? » 

« Nous sommes gravement préoccupés par l’ampleur de l’opération militaire israélienne en Cisjordanie et le déplacement de près de 40 000 réfugiés palestiniens », a renchéri le Royaume-Uni appelant Israël à mettre un terme aux colonies illégales qui compromettent la viabilité d’un État palestinien et la sécurité des Israéliens et des Palestiniens.  Le Royaume-Uni a dit avoir pris des sanctions contre la violence des colons et leurs partisans afin de les traduire en justice pour violation des droits humains. 

Déjà plus de 700 000 colons israéliens en Cisjordanie

« Nous ne devons pas ignorer la situation désastreuse en Cisjordanie, qui ne cesse de se détériorer », a aussi plaidé la République de Corée, qui a regretté que le nombre de colons israéliens en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, dépasse déjà les 700 000, selon les données du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR).  Dénonçant à son tour un génocide en cours en Cisjordanie, le Pakistan a lui aussi exigé l’arrêt des opérations militaires israéliennes et de la violence des colons. Le scenario à Gaza risque de se répéter en Cisjordanie, a alerté la Fédération de Russie qui y a vu une tentative de saper la solution des deux États. 

Pour parer à cette éventualité, la Russie a suggéré une mise en œuvre complète et inconditionnelle de la résolution 2334 (2016), l’abandon des plans d’annexion des territoires palestiniens et des déplacements forcés des Palestiniens et la fourniture d’une assistance politique et financière à l’Autorité palestinienne. 

Gaza et la Cisjordanie occupée doivent être traitées comme une seule et même entité politiquement, économiquement et administrativement, a préconisé M. Guterres dans son rapport en insistant sur la nécessité de travailler collectivement à l’établissement d’un cadre politique pour définir des mesures concrètes, irréversibles et assorties d’un calendrier.  L’ONU continuera d’appuyer tous les efforts visant à atteindre la solution des deux États, conclut le Secrétaire général. 

La situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne

Exposé

Mme SIGRID KAAG, Coordonnatrice spéciale par intérim pour le processus de paix au Moyen-Orient, a présenté le trente-troisième rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) qui couvre la période du 7 décembre 2024 au 13 mars 2025.  Ce texte, a rappelé la haute fonctionnaire, « exige de nouveau d’Israël qu’il arrête immédiatement et complètement toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et respecte pleinement toutes les obligations juridiques qui lui incombent à cet égard ».  Toutefois, au cours de la période considérée, Israël a approuvé la construction d’environ 10 600 logements dans les colonies de peuplement de Cisjordanie occupée, dont 4 920 à Jérusalem-Est.  Des appels d’offres ont été lancés pour environ 700 unités dans la zone de la colonie d’Efrat.  Israël a démoli, saisi, scellé ou forcé des personnes à démolir 460 habitations palestiniennes, obligeant 576 personnes au déplacement. 

Citant le Ministère de la santé de Gaza, Mme Kaag a comptabilisé qu’à Gaza, au cours des trois derniers mois, au moins 3 860 Palestiniens ont été tués et au moins 5 979 blessés.  Pendant ce temps, la violence en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est, a tué 123 Palestiniens dans le cadre d’opérations israéliennes dans la zone A, avec un total de 924 Palestiniens blessés, dont 118 par des colons.  Selon des sources israéliennes, a cité Mme Kaag, 10 Israéliens ont été tués et 96 autres ont été blessés par des Palestiniens. 

Elle a ajouté qu’Israël a commencé, le 21 janvier, la plus grande opération menée en Cisjordanie occupée détruisant des bâtiments résidentiels et des infrastructures civiles, et déplaçant plus de 40 000 personnes.  L’armée israélienne a généralisé les restrictions à la liberté de mouvement, ce qui entrave notamment l’accès aux services essentiels et les activités économiques.  Le Gouvernement israélien a décidé que son armée resterait dans certains camps de réfugiés pendant l’année à venir et que les résidents ne pourraient pas y revenir. Par ailleurs, des tirs palestiniens ont tué quatre israéliens et blessé trois autres.

Dans la résolution 2334, le Conseil de sécurité a appelé les deux parties à s’abstenir de toute provocation, incitation et rhétorique incendiaire, a rappelé la Coordonnatrice spéciale regrettant que des responsables du Hamas continuent d’appeler à la violence contre les Israéliens et que ceux d’Israël continuent d’appeler au déplacement des Palestiniens de la bande de Gaza, au retour à la guerre à grande échelle et au rétablissement des colonies de peuplement à Gaza.  Elle a dit que ladite résolution appelle le Quatuor pour le Moyen-Orient à prendre immédiatement des « mesures positives pour inverser les tendances négatives sur le terrain qui mettent en péril la solution des deux États ». 

Mme Kaag a observé que le cessez-le-feu, qui est entré en vigueur le 19 janvier, a permis d’augmenter l’approvisionnement à Gaza et d’améliorer la fourniture de l’aide et des services vitaux à Gaza par les agences de l’ONU et d’autres acteurs humanitaires.  Plus de 57 000 tonnes de nourriture ont été acheminées dans la bande de Gaza au cours du premier mois et plus de 1,9 million de personnes ont reçu des colis alimentaires depuis le début du cessez-le-feu.

Poursuivant, Mme Kaag a cité également le rapport de la Banque mondiale, de l’Union européenne (UE) et de l’ONU qui évalue à 5,3 milliards de dollars le coût de reconstruction et des besoins de Gaza et de la Cisjordanie occupée au cours de la prochaine décennie.  Qui plus est, le 30 janvier, la loi israélienne visant à empêcher l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) d’opérer sur le territoire qu’Israël est entrée en vigueur, a-t-elle rappelé.  Israël a transféré 540 millions de dollars sur les 1,2 milliard de dollars de revenus palestiniens retenus depuis octobre 2023 pour payer des dettes de l’Autorité palestinienne au fournisseur d’électricité israélien.  Le 10 février, a rapporté la Coordonnatrice spéciale intérimaire, le Président Mahmoud Abbas a promulgué un décret annulant les paiements de l’Autorité palestinienne aux familles des Palestiniens tués ou emprisonnés à la suite d’attaques contre des Israéliens. 

Mme Kaag a rappelé que la résolution 2334 (2016) appelle « toutes les parties à continuer, entre autres, à déployer des efforts collectifs pour lancer des négociations crédibles sur toutes les questions relatives au statut final dans le processus de paix au Moyen-Orient » avant d’énumérer les 12 observations du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la résolution dans son rapport.  M. António Guterres appelle notamment à ce que tous les incidents cités dans le rapport fassent l’objet d’une enquête approfondie et que les auteurs de toutes les violations du droit international rendent des comptes.  Il insiste sur l’importance d’assurer un traitement humain à toutes les personnes privées de liberté avant de réitérer son appel en faveur d’un cessez-le-feu durable et d’exhorter les parties à redoubler d’efforts pour mettre fin aux souffrances humaines. 

Parmi ses autres appels, M. Guterres exhorte à reprendre les livraisons de l’aide humanitaire et des marchandises commerciales et demande aux forces de sécurité israéliennes de n’utiliser la force létale que lorsque cela est strictement inévitable pour protéger la vie.  Le Secrétaire général rappelle que, selon les conclusions de la Cour internationale de Justice du 19 juillet 2024, l’État d’Israël a l’obligation de cesser immédiatement toute nouvelle activité de colonisation et d’évacuer tous les colons du Territoire palestinien occupé. 

Gaza et la Cisjordanie occupée doivent être traitées comme une seule et même entité politiquement, économiquement et administrativement, a préconisé le Secrétaire général, en insistant sur la nécessité de travailler collectivement à l’établissement d’un cadre politique pour définir des mesures concrètes, irréversibles et assorties d’un calendrier.  L’ONU continuera d’appuyer tous les efforts visant à atteindre la solution des deux États, a-t-il promis.

 

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