En cours au Siège de l'ONU

9734e séance – après-midi
CS/15836

Conseil de sécurité: les délégations mettent en garde contre un embrasement régional au Moyen-Orient et multiplient les appels pour un cessez-le-feu

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, 
la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Le Conseil de sécurité a tenu cet après-midi, une réunion consacrée à la situation dans les territoires palestiniens occupés, l’occasion pour les délégations de tirer la sonnette d’alarme sur un risque d’embrasement de la région du Moyen-Orient, et d’exiger un cessez-le-feu immédiat face au bilan humain désastreux. 

En deux mandats, « je n’ai jamais vu autant de morts et de destruction à une telle échelle et à une telle vitesse à Gaza », s’est alarmé le Secrétaire général dès l’ouverture de ce débat initié à la demande de l’Algérie.

M. António Guterres a dit « appuyer pleinement » la proposition de cessez-le-feu temporaire, afin de permettre l’acheminement de l’aide humanitaire et d’ouvrir la voie à la reprise de négociations sérieuses en vue d’une paix durable.  Il a imploré une nouvelle fois d’éviter à tout prix une guerre régionale, notant que les frappes d’envergure d’aujourd’hui le long de la Ligne bleue « pourraient conduire à une nouvelle escalade impliquant des puissances étrangères ».

Une crainte partagée par la majorité des intervenants, dont les pays de la région qui, à l’instar des Chefs de la diplomatie de la Jordanie et de l’Arabie saoudite, ainsi que de la Chine, ont averti des effets dangereux d’une prolongation de cette crise.  Le Moyen-Orient est à nouveau au bord d’une guerre majeure, a prévenu le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie qui a relevé qu’en un an, la guerre de Gaza a fait plus de morts qu’en 10 ans des deux côtés du conflit autour de l’Ukraine.

« Nous avons une mission: éliminer la terreur.  Où qu’elle se manifeste: à Beyrouth, à Jénine ou à Gaza », a opposé le représentant d’Israël, dont l’intervention a été boycottée par le Premier Ministre de l’État de Palestine.  « Le Ministre est parti, mais je voudrais lui demander: comment pouvez-vous garder le silence face à une telle barbarie? » s’est insurgé le délégué israélien, évoquant le massacre du 7 octobre. 

Le délégué a également douté de la capacité de l’Autorité palestinienne à faire partie d’un avenir coopératif et fonctionnel pour Gaza si « elle ne parvient même pas à garder le contrôle sur les zones qu’elle gouverne actuellement ».  « À Jénine, à Ramallah, vous ne pouvez même pas entrer, de peur de vous confronter aux terroristes radicaux qui contrôlent ces villes.  Comment pouvez-vous vous attendre à gouverner Gaza alors que vous avez laissé prospérer ses bastions terroristes dans votre arrière-cour? » 

« Israël se comporte comme un État voyou qui se croit au-dessus des lois », a dénoncé le Premier Ministre palestinien qui a exhorté le Conseil de sécurité à utiliser les outils à sa disposition pour obliger Israël à respecter ses décisions.  « Malgré la solidarité avec le peuple palestinien qui s’exprime aux Nations Unies, les massacres se poursuivent et le Conseil de sécurité ne prend toujours pas de mesures qui pourraient forcer le Gouvernement israélien à mettre fin à cette guerre », a regretté le Premier Ministre. 

Pour le dirigeant palestinien, le statu quo n’est pas tenable, et il n’est pas possible d’attendre que les parties soient prêtes à négocier pour parvenir à un règlement global.  En effet, a-t-il souligné, « l’une des parties refuse de négocier et elle a le temps pour elle, alors que l’autre partie perd chaque jour tout ce qui lui est le plus cher ».  Il a exhorté à des mesures concrètes pour mettre un terme à l’occupation et faire advenir la solution des deux États , laquelle ne peut rester éternellement une « simple vision politique ». 

« Maintenir le statu quo est un pari très dangereux, c’est faire le pari de l’hégémonie », a renchérit le Ministre des affaires étrangères et de la communauté nationale à l’étranger de l’Algérie qui a appelé à éviter toute situation de procrastination ou d’atermoiement : « le Conseil doit agir et faire respecter ses résolutions et le droit international ». 

Le Sous-Secrétaire d’État aux affaires étrangères, au Commonwealth et au développement du Royaume-Uni a tout de même plaidé en faveur d’un cessez-le-feu et de la libération des otages à Gaza, un appel relayé par les États-Unis qui ont également appelé à l’instauration d’un cessez-le-feu de 21 jours entre le Hezbollah et Israël. De même, un accord de normalisation entre l’Arabie saoudite et Israël permettrait de marginaliser les terroristes armés, financés et soutenus par l’Iran, a ajouté la délégation américaine.

L’inaction n’est pas une option, a tranché la France qui a appelé à ne pas perdre de vue la Cisjordanie, en proie à une instabilité préoccupante et où l’accélération de la colonisation éloigne la perspective d’y établir un futur État palestinien viable et contigu. 

Même son de cloche du côté du Ministre des affaires étrangères, de l’émigration et des expatriés de l’Égypte qui a appelé à obliger Israël à accepter un cessez-le-feu immédiat, meilleur moyen, selon le dignitaire, d’arrêter l’effusion de sang et les attaques au Liban, et d’assurer l’ouverture des passages pour l’aide humanitaire.  Un cessez-le-feu complet doit être mis en place immédiatement, via des postures constructives, afin d’éviter les dangers de l’escalade du conflit, comme on peut le voir au Liban, a asséné la Chine.

De son côté, le Ministre des affaires étrangères de la Norvège a exhorté les États Membres à collaborer à la reconnaissance universelle de l’État de Palestine et a suggéré de lancer une alliance mondiale à cette fin, estimant qu’il faut profiter de cette crise profonde pour passer à la vitesse supérieure. « Et nous voulons une seule Palestine, pas plusieurs Palestine. »  Si Israël ne veut pas de la solution des deux États, alors quelle autre solution propose-t-il, a lancé à son tour le Haut Représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. 

Par ailleurs, la prise pour cible, aujourd’hui même, par Israël, de zones résidentielles dans la banlieue sud de Beyrouth a été dénoncée par plusieurs délégations, à commencer par le Ministre des affaires étrangères et des expatriés de la Syrie. 

Pas plus tard que ce matin, Israël a utilisé plusieurs bombes de 5 000 livres qui lui avaient été offertes par les États-Unis pour frapper des zones résidentielles à Beyrouth, a indiqué le Ministre des affaires étrangères de l’Iran, selon qui le Premier Ministre israélien Netanyahu s’efforcerait de pousser les États-Unis à entrer en guerre contre l’ensemble de la région afin de se maintenir au pouvoir et d’influencer le résultat des prochaines élections américaines.

Si les caïds du régime israélien doivent répondre des crimes atroces qu’ils commettent en Palestine occupée et au Liban, on ne peut ignorer la complicité des États-Unis dans ces crimes, a-t-il ajouté. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Exposé

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a réitéré sa « condamnation absolue » des horribles actes de terreur perpétrés, le 7 octobre dernier, par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens, ainsi que de la prise d’otages.  « Rien ne peut justifier de tels actes », a-t-il martelé.  Il a aussi déclaré au Conseil qu’il avait tenu, cette semaine, deux autres réunions dans le cadre d’une série de rencontres avec les familles des otages, appelant à nouveau à leur libération immédiate et inconditionnelle. 

Depuis le 7 octobre, les bombardements et les hostilités israéliens incessants ont tué des dizaines de milliers de Palestiniens à Gaza, dont de nombreuses femmes et de nombreux enfants, a poursuivi M. Guterres.  La rapidité et l’ampleur du massacre et de la destruction à Gaza sont sans précédent depuis que je suis Secrétaire général, a-t-il ajouté, affirmant: « rien ne peut justifier le châtiment collectif infligé au peuple palestinien ».

Au cours de l’année écoulée, la quasi-totalité de la population de Gaza a été déplacée –une large part à plusieurs reprises– sans nulle part où aller en toute sécurité, a détaillé le Secrétaire général, qui a dénoncé des conditions de survie « épouvantables ».  Le système humanitaire ne tient qu’à un fil, a-t-il poursuivi, parlant d’un accès « très limité » à la nourriture, à l’eau, à l’assainissement, aux abris et aux soins de santé, avant de rappeler que 225 collègues des Nations Unies ont été tués, souvent avec leurs familles.  Le Secrétaire général a demandé des enquêtes pour que les responsables de ces meurtres rendent des comptes.

Dans le même temps, le Chef de l’ONU a souligné que la violence se poursuit en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est, où quelque 700 Palestiniens et 14 Israéliens ont été tués depuis le 7 octobre, soit le nombre le plus élevé des deux côtés depuis plus de 20 ans.  Il a dénoncé la construction de nouvelles colonies, les expropriations, les démolitions et les violences commises par les colons qui se poursuivent, y opposant l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice, qui a conclu que la présence continue d’Israël dans le territoire palestinien occupé était illégale. 

Le Secrétaire général a également dénoncé les entraves apportées par les autorités israéliennes aux médias internationaux cherchant à rendre compte de la situation dans le territoire palestinien occupé et a insisté pour que les journalistes puissent faire leur travail. 

« Les ondes de choc qui irradient des morts et des destructions sans précédent à Gaza menacent maintenant de précipiter toute la région dans l’abîme », a averti le Secrétaire général, pour qui la guerre au Liban pourrait conduire à une nouvelle escalade impliquant des puissances étrangères.  C’est pourquoi il a dit « appuyer pleinement » la proposition de cessez-le-feu temporaire, afin de permettre l’acheminement de l’aide humanitaire et d’ouvrir la voie à la reprise de négociations sérieuses en vue d’une paix durable. 

« Nous avons besoin de ce cessez-le-feu maintenant.  Nous ne pouvons pas nous permettre des négociations sans fin, comme c’est le cas à Gaza », a plaidé le Secrétaire général, qui a demandé « d’éviter à tout prix une guerre régionale ». 

Gaza est le lieu le plus dangereux sur la planète pour l’acheminement de l’aide humanitaire, a ensuite constaté le Secrétaire général, qui a rappelé que ses collègues humanitaires continuaient toutefois à faire tout leur possible pour remplir leur mission humanitaire.  Il a ensuite déploré que les points de passage vers Gaza restent limités ou inaccessibles, dénonçant une intensification des attaques et des interdictions imposées par les forces d’Israël.  Citant plusieurs incidents sérieux, il a parlé de « harcèlement » à l’encontre du personnel humanitaire.  Appelant à ne pas saper le travail indispensable de l’UNRWA, M. Guterres a demandé instamment aux autorités israéliennes de faire tout leur possible pour mettre fin aux attaques contre le personnel et les biens de l’ONU et de cesser de diffuser des informations erronées sur les fonctionnaires et les entités de l’ONU. 

En conclusion, le Secrétaire général a exhorté le Conseil à s’unir pour soutenir un cessez-le-feu immédiat menant à une solution viable à deux États, y voyant le seul moyen de mettre fin au cycle de la tragédie. 

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