En cours au Siège de l'ONU

9725e séance – matin
CS/15821

Conseil de sécurité: sans volonté et solution politiques, le cycle de la souffrance continuera à Gaza, préviennent les responsables onusiens

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Ce matin, au Conseil de sécurité, la Coordonnatrice de haut niveau de l’action humanitaire et de la reconstruction à Gaza a présenté les travaux de l’équipe du mécanisme mis en place par la résolution 2720 (2023) sur les questions d’accès humanitaire à Gaza, ainsi que des solutions potentielles pour surmonter les obstacles politiques et opérationnels.  Malgré ces efforts, a-t-elle averti, le cycle de la souffrance continuera à Gaza s’il n’y a pas de solution politique.  La plupart des membres du Conseil ont bien entendu déploré les morts parmi les civils, les diverses entraves à l’action humanitaire à Gaza et, plus généralement, le non-respect du droit international humanitaire par les parties en conflit. 

Mme Sigrid Kaag, qui coordonne ce mécanisme dont le but est de faciliter, coordonner, surveiller et vérifier la nature humanitaire de tous les envois de secours acheminés à Gaza, a souligné que les opérations humanitaires n’atteignent pas encore leurs buts en termes de quantité et de qualité des produits.  Elle a en effet regretté les nombreux blocages qui entravent ces opérations, tels que les restrictions administratives, les infrastructures défaillantes et les conditions de travail difficiles pour les humanitaires dont plusieurs ont payé leur engagement de leur vie.  Elle a assuré travailler à corriger la situation, prévenant que tout retard conduira à davantage de pertes en vies humaines. 

La Coordonnatrice de haut niveau n’a pas manqué de condamner les incidents sécuritaires récents « inacceptables », comme les tirs visant les convois humanitaires. Près d’une année après les attaques du 7 octobre, elle a jugé urgent de libérer les 101 otages encore détenus à Gaza, évoquant également les 41 000 Palestiniens tués et les plus de 93 000 blessés dans la bande de Gaza depuis cette date. Elle a appelé toutes les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire. 

Soulignant le succès de la campagne de vaccination contre la poliomyélite à Gaza, Mme Kaag a fait remarquer que même dans les pires circonstances, s’il y a volonté politique, l’action humanitaire reste possible.  Elle a misé de plus sur l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) qui, selon elle, représente « l’ossature des actions humanitaires à Gaza ». 

L’UNRWA met en œuvre « notre volonté collective », a confirmé le Directeur exécutif du Bureau des Nations Unies pour les services d’appui aux projets (UNOPS).  M. Jorge Moreira da Silva a rappelé que l’UNOPS s’est engagé à soutenir la capacité opérationnelle de chaque couloir humanitaire.  Le Bureau a ainsi fourni 280 camions pour le couloir jordanien et 38 à la communauté humanitaire présente à l’intérieur de la bande de Gaza.  Il a salué le soutien généreux des États Membres qui ont appuyé ces efforts pour l’opérationnalisation du mécanisme 2720, ainsi que le travail des partenaires locaux sur le terrain.  Lui aussi a mis en avant le besoin impérieux de volonté politique, sans laquelle la livraison effective de l’aide humanitaire à l’échelle nécessaire sera tout simplement impossible. 

Ce qui manque, a rebondi la Fédération de Russie, « c’est la volonté politique des États-Unis et de leurs satellites ».  La délégation a regretté que le cessez-le-feu intégral prévu par la résolution 2720 (2023) soit resté lettre morte, arguant que la situation abominable qui règne à Gaza est le résultat de la poursuite de l’opération militaire israélienne, couverte par les États-Unis.  Pour l’Algérie également, la « douloureuse vérité » est que le mécanisme 2720 n’a pas eu le résultat escompté et que les acheminements quotidiens ont même diminué depuis l’adoption de la résolution.  La délégation a de plus déploré la mort de six membres de l’UNRWA dans des frappes aériennes, y voyant la preuve de la grave érosion des normes du droit.  Cette agence de l’ONU, dont 240 fonctionnaires ont perdu la vie à Gaza, est pourtant le « pilier de l’action humanitaire dans l’enclave », a aussi mis en avant la Chine qui a, du reste, salué le travail que l’agence continue d’effectuer sur le terrain. 

Israël s’est défendu en faisant observer que les frappes menées par les Forces de défense israéliennes le 11 septembre dernier ciblaient des terroristes opérant à l’intérieur d’un bâtiment qui avait jadis été une école, cette action ayant permis d’« éliminer » trois terroristes.  Le jour, ils travaillaient à l’UNRWA, la nuit pour le Hamas, a expliqué la délégation pour qui l’agence de l’ONU est devenue l’un des acteurs prolongeant les souffrances et la famine à Gaza.  Le représentant d’Israël a par ailleurs déploré que cette discussion sur la situation humanitaire occulte le sort des otages toujours détenus dans les pires conditions imaginables et exécutés de sang-froid par le Hamas.  D’ailleurs, a-t-il dit, Israël est allé largement au-delà de ses obligations pour améliorer le bien-être de la population civile en livrant plus d’un million de tonnes d’aide à Gaza, transportée par plus de 50 000 camions. 

Si Israël s’est engagé à inonder Gaza d’aide, cela ne s’est pas concrétisé, a pour sa part constaté le Royaume-Uni, tandis que la représentante du Japon a dit être « frustrée et profondément déçue » que son appel à la protection du personnel humanitaire et du personnel de l’ONU n’ait pas été entendu.  Le respect du droit international humanitaire est une obligation pour Israël, a-t-elle fait observer, appuyée en cela par les États-Unis qui ont jugé injustifiable les attaques contre le personnel humanitaire.  « Les forces israéliennes sont professionnelles et savent ce qu’elles font; elles doivent changer leur façon d’opérer », a lancé la déléguée américaine qui a en outre rendu hommage à sa ressortissante tuée la semaine dernière en Cisjordanie.  « Nous réclamerons des détails à Israël, ainsi que la vérité », a-t-elle lancé. 

Malgré cette litanie de reproches, plusieurs interventions ont salué la première phase de la campagne de vaccination contre la poliomyélite menée par les Nations Unies à Gaza, avec la collaboration d’Israël qui a consenti à faire des pauses tactiques dans ses opérations militaires. 

Quant à l’avenir de la bande de Gaza, la reconstruction a été sujet d’inquiétude.  « Que restera-t-il de Gaza si l’opération israélienne se poursuit à ce rythme? », a demandé la Fédération de Russie tandis que de nombreuses voix s’interrogeaient sur les perspectives à long terme.  C’est dans cette même veine que la France a appelé la communauté internationale à donner un horizon aux populations civiles de Gaza et à créer les conditions de la reconstruction, avec des projets de relèvement précoce pour rétablir les services de base. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Exposés

Mme SIGRID KAAG, Coordonnatrice de haut niveau de l’action humanitaire et de la reconstruction à Gaza, a relevé que près d’une année après les attaques du 7 octobre, il est urgent de libérer les 101 otages encore détenus à Gaza.  Dans le même temps, 41 000 Palestiniens ont été tués et plus de 93 000 ont été blessés dans la bande à Gaza.  Les infrastructures sanitaires y ont été endommagées et au moins 625 000 élèves ne vont pas à l’école.  Nous avons besoin d’un cessez-le-feu immédiat, la libération des otages et un accès humanitaire sans entrave, a-t-elle plaidé.  Elle a appelé toutes les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire.  Les travailleurs humanitaires doivent bénéficier de protection pour effectuer leur travail, a-t-elle ajouté.  Des maladies comme la poliomyélite sont de retour à Gaza, mais grâce à une coordination avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), une campagne de vaccination a pu être lancée.  La seconde phase de celle-ci devrait commencer dans quatre semaines, a-t-elle dit.  La campagne montre que même dans les pires circonstances, avec la volonté politique, l’action humanitaire reste possible, a-t-elle argué.  Cette campagne montre aussi l’important rôle de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine au Moyen-Orient (UNRWA) comme ossature des actions humanitaires à Gaza. 

Dans le cadre de sa mission en rapport au mécanisme créé par la résolution 2720 (2023), Mme Kaag a assuré poursuivre son travail pour l’approvisionnement de Gaza en passant notamment par l’Égypte ou Chypre.  Les systèmes en place ne sauraient toutefois remplacer une volonté politique nécessaire pour atteindre les civils, a-t-elle estimé.  Elle a signalé que les opérations humanitaires n’atteignent pas encore ses buts en termes de quantité et de la qualité des produits délivrés à Gaza.  Elle a évoqué de nombreux blocages tels que les restrictions administratives, les infrastructures défaillantes et les conditions de travail difficiles pour les humanitaires.  Elle a affirmé travailler à corriger la situation, prévenant que tout retard conduit à la perte d’encore plus de vies.  Il faut se concentrer sur l’accès à Gaza d’une palette de biens, a-t-elle plaidé, avant de condamner les incidents sécuritaires récents, notamment les tirs sur les convois humanitaires. 

La Coordonnatrice de l’action humanitaire a rappelé que plus de 14 000 Palestiniens sont en attente d’évacuation sanitaire, et elle a appelé les États Membres à faire preuve de solidarité.  À l’approche de l’hiver, il faut un plan humanitaire pour Gaza, a-t-elle plaidé.  Selon elle, une paix complète, juste et pérenne au Moyen-Orient ne saurait être effective qu’avec la solution des deux États qui tienne compte de la sécurité d’Israël.  En attendant, il faut répondre aux besoins sanitaires et de reconstruction à Gaza où l’Autorité palestinienne doit reprendre son contrôle.  Mme Kaag a indiqué que l’équipe du mécanisme 2720 a travaillé aux questions d’accès humanitaire à Gaza et a proposé des solutions pour surmonter les obstacles politiques et opérationnels.  Malgré ces efforts, sans solution politique, le cycle de la souffrance continuera à Gaza, a-t-elle averti. 

M. JORGE MOREIRA DA SILVA, Directeur exécutif du Bureau des Nations Unies pour les services d’appui aux projets (UNOPS), a fait le point sur l’opérationnalisation du mécanisme créé par la résolution 2720 (2023) qui a pour vocation de mettre en place une chaîne d’approvisionnement humanitaire unique et exhaustive, ainsi que le système de gestion y afférant en vue de répondre à l’imprévisibilité des différents canaux d’acheminement de l’aide avec leurs points de contrôle et de transbordement ainsi que les inspections dans le souci de rétablir plus de transparence et de confiance dans l’afflux de l’aide humanitaire vers Gaza. 

Ce mécanisme, qui fonctionne depuis mai 2024, gère une base de données intégrée sur les envois humanitaires à partir de Chypre, de la Jordanie, de la Cisjordanie et d’Israël qui permet d’aller au-delà du simple décompte de camions humanitaires entrant à Gaza, en détaillant les biens qui affluent bel et bien dans la bande, a expliqué le Directeur exécutif de l’UNOPS qui a détaillé en tonnes métriques les différents types de biens qui sont entrés à Gaza depuis la mise en place du mécanisme ainsi que les modalités d’inspections des envois humanitaires en fonction des couloirs humanitaires empruntés.  Il a indiqué que l’UNOPS se tient prêt à répondre aux défis logistiques actuels en ce qui concerne le couloir de Chypre en proposant une solution de bout en bout pour garantir la livraison coordonnée et transparente de l’aide.  L’UNOPS facilite notamment l’approbation de tous les convois et les suit jusqu’au stade de livraison, a-t-il précisé en appelant à autoriser plus de biens et d’envois à entrer à Gaza par ce couloir.

En ce qui concerne le couloir égyptien, « planche de salut vital » pour la population civile de Gaza depuis le début du conflit, le Chef de l’UNOPS a dit travailler en étroite collaboration avec les autorités égyptiennes pour intégrer pleinement ce circuit dans le mécanisme 2720 en vue de pouvoir suivre de manière exhaustive et en temps réel tous les convois humanitaires entrant à Gaza.  Son équipe est au Caire cette semaine pour finaliser le processus d’intégration. 

M. Moreira da Silva a rappelé que dans le cadre du mécanisme 2720, l’UNPOS s’est engagé à soutenir la capacité opérationnelle de chaque couloir humanitaire, en précisant avoir fourni 280 camions pour le couloir jordanien et 38 camions à la communauté humanitaire à l’intérieur de Gaza. Il a salué le soutien généreux des États Membres qui ont appuyé les efforts de l’UNOPS pour l’opérationnalisation du mécanisme 2720, en particulier l’Australie, le Danemark, l’Estonie, l’Allemagne, les Pays-Bas, les États-Unis, les Émirats arabes unis et le Canada ainsi que les partenaires locaux sur le terrain.  Toutefois, a fait valoir le Directeur exécutif de l’UNOPS, la livraison effective de l’aide humanitaire à l’échelle nécessaire sera tout simplement impossible sans la volonté politique requise, sans les garanties nécessaires en matière de sureté et de sécurité et sans un environnement propice.  Il n’en demeure pas moins, qu’à l’instar du reste de la famille de l’ONU et en particulier de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) qui met en œuvre « notre volonté collective », l’UNOPS est déterminé à rester sur place et à apporter son aide au peuple de Gaza pour lui apporter l’aide humanitaire requise et soutenir les efforts de reconstruction immenses. 

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