Conseil de sécurité: la Fédération de Russie met en garde le « régime de Kiev » et les Occidentaux contre l’emploi de missiles à longue portée contre son territoire
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Réuni ce matin à la demande de la Fédération de Russie pour examiner une nouvelle fois les livraisons d’armes occidentales aux forces armées ukrainiennes, le Conseil de sécurité a entendu la Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, Mme Izumi Nakamitsu, faire état de la poursuite des transferts d’armes et de munitions au profit des deux principaux acteurs de ce conflit. La délégation russe a profité de cette discussion pour mettre en garde le « régime de Kiev » et ses « protecteurs » occidentaux contre l’emploi de missiles à longue portée contre son territoire.
Évoquant les restrictions imposées jusqu’alors par les États-Unis et leurs alliés quant à l’utilisation d’armes capables de frapper le territoire russe en profondeur, le représentant de la Fédération de Russie a averti qu’en cas de levée de ces consignes, « les pays de l’OTAN entreraient directement en guerre contre la Russie et nous serions contraints de prendre les décisions qui s’imposent ». Ce scénario, a-t-il ajouté, est bien compris par les stratèges occidentaux, comme l’attestent « des documents du Département de la défense des États-Unis sur les conséquences d’une guerre nucléaire pour le secteur agricole de l’est de l’Europe ».
Pour le délégué russe, « la faute ne peut être entièrement rejetée sur Kiev » puisque l’emploi de telles armes n’est possible qu’avec l’aide de données de renseignement provenant de satellites américains et européens. De fait, a-t-il avancé, la décision des Occidentaux porte moins sur le fait d’autoriser « le régime de Zelenskyy » à utiliser ces armes à longue portée contre la Russie que sur la détermination des « cibles à frapper ».
Alors que l’Ukraine essuie « défaite sur défaite » sur le terrain, y compris dans la région russe de Koursk, elle et ses « protecteurs » occidentaux « cherchent toujours une arme magique qui permettrait d’inverser la situation », a ironisé le représentant, selon lequel les forces ukrainiennes auraient déjà épuisé leurs réserves en missiles ATACMS américains. À tel point, a-t-il affirmé, que Washington envisagerait de leur livrer des JASSM, plus puissants que les missiles franco-britanniques Scalp/Storm Shadow. Accusant par ailleurs l’armée ukrainienne d’utiliser, avec l’aval occidental, des substances toxiques et chimiques « dans la zone de l’opération militaire spéciale », il a réfuté les « insinuations » du « chef de la junte néonazie » sur la livraison de missiles balistiques iraniens à la Russie.
Dénonçant « la propagande et les mensonges hallucinants » de la délégation russe, les États-Unis ont estimé que le seul « fait nouveau » depuis la dernière réunion sur cette question concerne la livraison à la Russie, début août, du premier lot de missiles iraniens d’une portée de 120 kilomètres. Ces missiles s’ajoutent aux milliers de drones envoyés par l’Iran à la Russie depuis 2022 et utilisés par les forces russes avec des effets dévastateurs sur les civils et les infrastructures civiles de l’Ukraine, a souligné la délégation américaine. Selon elle, ce partenariat russo-iranien menace la sécurité européenne et contribue à déstabiliser le Moyen-Orient et le monde entier.
« Les missiles balistiques iraniens à courte portée atteindront bientôt le sol européen », a renchéri le Royaume-Uni, pour qui le transfert de ces armes à la Russie augmente la capacité de celle-ci à lancer des attaques à courte portée sur les lignes de front, « lui permettant ainsi d’utiliser davantage ses missiles à longue portée pour frapper plus profondément à l’intérieur de l’Ukraine ». De surcroît, a-t-il ajouté, la Russie continue d’acheter des quantités importantes d’armes, notamment des missiles balistiques, à la République populaire démocratique de Corée (RPDC) pour les utiliser contre l’Ukraine, en violation des résolutions du Conseil de sécurité pour lesquelles la Russie elle-même a voté. Une coopération militaire également condamnée par le Japon et la République de Corée, tous deux voisins de la RPDC, ainsi que par Malte et la Suisse.
Même indignation de la part de la France, qui a relevé qu’en contrepartie de ce soutien à sa guerre d’agression, la Russie intensifie sa coopération militaire avec la RPDC, « ce qui pourrait permettre à Pyongyang de développer encore ses programmes balistiques et d’armes de destruction massive, avec des répercussions graves sur la stabilité régionale et internationale ». Quant à l’exportation par l’Iran de missiles balistiques vers la Russie, elle a appelé Téhéran à y mettre fin immédiatement et a annoncé son intention de travailler à la désignation d’individus et d’entités impliqués dans ces transferts.
Accusée par les États-Unis de « prolonger l’agression russe de l’Ukraine » avec des transferts d’armes et de composantes de pièces détachées à la Russie, la Chine a répété qu’elle « n’est pas partie à cette crise », qu’elle « ne fournit pas d’armes » à l’un ou l’autre des belligérants et qu’elle « maîtrise l’utilisation des articles à double usage ». Plutôt que de s’employer à discréditer la Chine, les États-Unis devraient plutôt cesser de faire la « sourde oreille » aux initiatives de paix telles que le consensus sino-brésilien en 6 points ou encore la proposition africaine en 10 points, a-t-elle soutenu.
Avant ces échanges tendus, la Haute-Représentante pour les affaires de désarmement a confirmé, en début de séance, la poursuite d’une assistance militaire et du transfert d’armes et de munitions aux forces armées ukrainiennes ces dernières semaines. Comme précédemment, Mme Izumi Nakamitsu a ajouté que des États « transfèrent ou envisagent de transférer » des armes telles que des drones, des missiles balistiques et des munitions aux forces armées russes et que ces armes « ont été utilisées et seront probablement utilisées en Ukraine ».
Mme Nakamitsu a rappelé que tout transfert d’armes et de munitions doit être conforme au cadre juridique international applicable, y compris aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, qui dans certains cas imposent des sanctions et des mesures restrictives sur de tels transferts. Elle a été appuyée sur ce point par le Mozambique et la Sierra Leone, qui se sont alarmés des risques de détournement. Tout en reconnaissant que l’afflux d’armes est susceptible d’intensifier les combats, la Slovénie a, pour sa part, fait valoir qu’il existe une distinction claire entre l’aide militaire, en soutien à la légitime défense, et les transferts d’armes qui soutiennent l’agression. Dans cette optique, elle a promis de maintenir son aide à l’Ukraine dans le respect du droit international.
MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES
Exposé
Mme IZUMI NAKAMITSU, Haute-Représentante pour les affaires de désarmement, a indiqué que, depuis le dernier exposé au Conseil de sécurité sur ce sujet il y a seulement deux semaines, la fourniture d’une assistance militaire et le transfert d’armes et de munitions aux forces armées ukrainiennes se sont poursuivis dans le contexte de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine lancée par la Fédération de Russie le 24 février 2022, en violation de la Charte des Nations Unies et du droit international. Elle a précisé que, selon les informations provenant de divers gouvernements, ces transferts portent sur des armes conventionnelles lourdes telles que des chars de combat, des véhicules blindés de combat, des avions de combat, des hélicoptères, des systèmes d’artillerie de gros calibre, des systèmes de missiles et des véhicules aériens de combat sans équipage (drones), ainsi que des munitions télécommandées et des armes légères et de petit calibre.
Il a également été signalé que des États transféraient ou envisageaient de transférer des armes telles que des drones, des missiles balistiques et des munitions aux forces armées russes et que ces armes ont été utilisées et seront probablement utilisées en Ukraine, a-t-elle ajouté, rappelant que tout transfert d’armes et de munitions doit être conforme au cadre juridique international applicable, y compris aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, qui dans certains cas imposent des sanctions et des mesures restrictives sur de tels transferts.
La haute fonctionnaire s’est déclarée particulièrement préoccupée par les informations relatives à l’utilisation et au transfert d’armes à sous-munitions depuis le début du conflit et à la contamination généralisée de territoires ukrainiens par des mines et des restes explosifs de guerre. Après avoir appelé tous les États à respecter leurs obligations en matière de droit international humanitaire et à devenir parties en priorité aux traités de désarmement, elle a enjoint les États importateurs, de transit, producteurs et exportateurs à agir de manière responsable à chaque étape de la chaîne de transfert d’armes et de munitions afin de prévenir et de détecter le détournement, le trafic illicite et l’utilisation abusive. Les évaluations des risques, le marquage et la tenue de registres avant le transfert, ainsi que les capacités de traçage et d’enquête, sont de la plus haute importance, a souligné la Haute-Représentante, plaidant également pour une gestion efficace des stocks d’armes et de munitions, ainsi que pour des mesures de contrôle des douanes et des frontières.
Depuis le 24 février 2022, a poursuivi Mme Nakamitsu, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a recensé plus de 11 700 civils tués et plus de 24 600 civils blessés en Ukraine. Selon la même source, août a été le deuxième mois le plus lourd en victimes en 2024 -après juillet- avec au moins 184 civils tués et 856 blessés en Ukraine. Tout en notant que l’utilisation de drones et de missiles par la Fédération de Russie continue de causer des morts et des blessés parmi les civils et d’endommager les infrastructures civiles en Ukraine, elle a fait état d’un certain nombre de frappes transfrontalières utilisant des missiles et des drones menées par l’Ukraine à l’intérieur de la Fédération de Russie, certaines ayant entraîné des victimes civiles et des dommages aux biens de caractère civil. Les drones et les missiles ne doivent pas être utilisés d’une manière incompatible avec le droit international humanitaire, a-t-elle fait valoir, avant d’appeler à éviter l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées et à distinguer les objets civils et les objectifs militaires.
Assurant que l’ONU continuera d’œuvrer en faveur d’une paix globale, juste et durable en Ukraine, elle a formé le vœu que la soixante-dix-neuvième session de l’Assemblée générale des Nations Unies « contribuera à trouver des solutions pour combler les divisions politiques et mettre fin aux conflits qui causent tant de morts et de souffrances ».