La Sixième Commission appelle à la prudence concernant les moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international
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La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a terminé, ce matin, ses discussions sur un deuxième groupe de chapitres du rapport annuel de la Commission du droit international (CDI), à savoir le chapitre IV (Règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties) et le chapitre V (Moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international). Elle a ensuite entamé son examen d’un troisième et dernier groupe de chapitres: chapitre VI (Prévention et répression de la piraterie et du vol à main armée en mer), VIII (Les accords internationaux juridiquement non contraignants) et IX (Succession d’États en matière de responsabilité de l’État).
S’agissant du deuxième groupe de chapitres, les délégations se sont principalement prononcées sur les moyens auxiliaires de détermination des règles de droit, revenant sur leur portée et le poids à leur accorder. De l’avis général, la CDI doit faire preuve de « prudence » s’agissant des sources du droit international, les moyens auxiliaires relevant davantage de l’« outil d’aide à la détermination et à l’interprétation des règles du droit international » que des sources primaires. Cette approche prudente a pour but d’éviter la création de règles juridiques de facto qui ne bénéficient pas de l’approbation de tous les États, selon le Mexique.
Si la Türkiye et l’Inde ont émis quelques réserves concernant l’inclusion des décisions des juridictions nationales en tant que moyens auxiliaires, d’autres délégations comme le Mexique et le Royaume-Uni ont refusé que le principe stare decisis, selon lequel les tribunaux doivent s’aligner avec les précédents créés par les jugements et arrêts antérieurs, soit appliqué en droit international.
En appliquant les normes du droit international, les cours et tribunaux internationaux ne créent pas de nouvelles lois mais interprètent leur contenu pour refléter la pratique et l’évolution des coutumes et des principes internationaux, a expliqué la Colombie. La jurisprudence a donc un impact interprétatif et évolutif sur le droit international facilitant ainsi son développement progressif, sans pour autant lui attribuer un pouvoir contraignant. Il en va de même pour les contributions des juges et des universitaires qui ne sauraient être « proclamés en tant que législateurs » du droit international, a précisé l’Égypte, appuyée par plusieurs autres représentants.
Si l’on veut utiliser les décisions des tribunaux nationaux comme moyens auxiliaires, il est nécessaire de prendre en compte la pratique des tribunaux des différentes régions du monde et des différents systèmes juridiques, a estimé la Fédération de Russie, appuyée par la Sierra Leone. La déléguée russe a, néanmoins, rappelé que les tribunaux nationaux peuvent aussi violer le droit international « de manière flagrante » et non seulement l’interpréter, raison supplémentaire pour laquelle il faut rester prudent sur l’inclusion de leurs décisions.
Concernant le règlement des différends auxquels des organisations internationales sont parties, les délégations ont, dans leur ensemble, salué le travail complet et concret de la CDI. Le projet d’articles « jette des bases robustes » sur l’éventail des différends et les types de relations que les entités peuvent entretenir, a ainsi reconnu l’Inde.
Les délégations se sont généralement accordées sur le fait qu’il ne peut y avoir d’exception s’agissant de l’administration de la justice, même pour les États et les organisations internationales. La République islamique d’Iran et la Fédération de Russie ont, d’ailleurs, souhaité que ce sujet soit examiné à la lumière de la question de la responsabilité des organisations internationales. Au vu de la campagne de diffamation et de la violation des privilèges et immunités qu’Israël mène contre l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), il est « crucial » que nous débattions de cette question et disposions de directives utiles, a lancé la Colombie.
S’agissant des aspects techniques du sujet, les délégations ont émis des commentaires sur les définitions des termes « différends » et « organisations internationales » sur l’étendue desquels il n’existe actuellement pas de consensus. Plusieurs délégations, dont Sri Lanka et la Colombie, ont toutefois salué les procédures d’arbitrage et la médiation visant à éviter les coûts et à préserver les relations.
Lors de la session de l’après-midi, les délégations ont abordé l’examen du dernier groupe de chapitres.
« La liberté en haute mer est un principe fondamental du droit international de la mer », a affirmé le délégué slovène à propos du chapitre VI, déplorant que cette liberté soit menacée par l’essor de la piraterie et des vols à main armée. Outre les dangers à la sécurité internationale posés par ces crimes, la poursuite des pirates, leur extradition et l’assistance juridique mutuelle restent des questions d’intérêt, a estimé le délégué portugais. Qu’il s’agisse de prévention ou de répression, l’Union européenne a, pour sa part, réitéré l’importance d’ancrer tout projet d’articles dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.
Toutefois, « la prévention étant plus efficace que la répression », la Finlande, au nom des pays nordiques, a souligné l’importance de criminaliser la piraterie et les vols à main armée en mer dans les juridictions nationales. Selon la Slovénie, chaque crime commis en mer doit bénéficier d’une approche ciblée, tant dans la prévention que dans la répression.
Concernant le chapitre VIII du rapport de la CDI, les délégations ont réaffirmé l’importance des accords internationaux juridiquement non contraignants pour traiter des « problèmes urgents au niveau international », bien que certaines aient émis des réserves sur l’utilisation du terme « accord ». Si ces accords ne sont pas régis par le droit des traités, les parties restent liées par le droit international, y compris le jus cogens, ont tenu à rappeler quelques délégations, dont l’Union européenne et la Finlande.
En outre, ces accords, toujours écrits, doivent être limités au niveau international. Néanmoins, la Finlande, au nom des pays nordiques, a regretté que les accords interinstitutionnels et conclus par des ministères sous-régionaux soient considérés comme non juridiquement contraignants par nature, invitant la CDI à reconsidérer cette question. Les critères essentiels pour déterminer la nature non contraignante d’un instrument devraient seulement résider dans son format et dans l’intention des parties de le rendre non contraignant, ont précisé la Lettonie, au nom des pays baltes, et le Brésil. Quelle que soit la manière dont les parties choisissent de nommer un document, le fait qu’il soit juridiquement contraignant ou non dépend de son contenu et de l’intention des parties, a ajouté Singapour.
La Sixième Commission poursuivra son débat demain, mercredi 30 octobre, à partir de 10 heures.
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