Soixante-dix-huitième session,
20e séance - après-midi
AG/12547

Assemblée générale: les délégations entendent la Présidente de la CIJ et affichent leur confiance « totale » en son travail

Les délégations ont été nombreuses, aujourd’hui, devant l’Assemblée générale, à décerner un satisfecit à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour la qualité de son travail et sa contribution « exceptionnelle » à la coexistence pacifique entre les nations et la promotion de l’état de droit.  Comme l’ont noté les orateurs, l’accroissement constant de sa charge de travail est la preuve de la confiance « totale » placée en elle, comme l’a indiqué le Chili, partie à une affaire récemment tranchée par la Cour.

L’Assemblée a d’abord entendu la Présidente de la CIJ, Mme Joan Donoghue, présenter le dernier rapport de la CIJ, pour la période allant du 1er août 2022 au 31 juillet 2023.  Elle a rappelé que 20 affaires sont pendantes devant la Cour, 18 affaires contentieuses et 2 demandes d’avis consultatifs.  Les délégations ont fait part de leur grand intérêt pour ces deux avis portant, respectivement, sur les conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et les obligations des États en matière de changements climatiques.

La Présidente a passé en revue les différends arrêts et ordonnances rendues par la Cour lors de la période de l’examen.  Dans l’affaire opposant l’Arménie à l’Azerbaïdjan, la Cour a ainsi décidé que l’Azerbaïdjan doit, dans l’attente de la décision finale, assurer la circulation le long du corridor de Latchine, a-t-elle rappelé.  La Cour a par ailleurs jugé recevables les déclarations d’intervention présentées par 32 États dans une autre affaire relative à des allégations de génocide entre l’Ukraine et la Fédération de Russie.

Le Règlement de la Cour a été actualisé afin d’user de formulations inclusives en ce qui concerne le genre, a par ailleurs informé Mme Donoghue.  Le langage utilisé est capital pour parvenir à l’égalité de genres, a-t-elle dit, en ajoutant qu’il s’agit d’un « idéal » des Nations Unies.  Enfin, la Présidente, indiquant que les ressources budgétaires à disposition de la Cour ne sont pas en adéquation avec sa charge de travail toujours plus conséquente, a demandé des « ajustements nécessaires. »

Les orateurs n’ont pas tari d’éloges au sujet de la Cour, à commencer par le Président de l’Assemblée générale, M. Dennis Francis, qui a salué la « rigueur et l’impartialité » de la Cour, en espérant que les demandes budgétaires de la Cour seront satisfaites.  Le délégué argentin a, lui, noté le haut-niveau d’application des décisions de la Cour, ainsi que les nouveaux domaines qui lui sont confiés par les États, tels que le droit de l’environnement.  Cela est la preuve de la confiance des États, a-t-il abondé, tandis que le Royaume-Uni a parlé de « l’estime » de ces derniers pour la Cour.

Signe de cette confiance, le Japon a exhorté les États à accepter la juridiction obligatoire de la Cour, seuls 74 États sur 193 l’ayant fait.  « Mon pays peut témoigner du sérieux de la Cour », a appuyé la délégation du Chili, en rappelant le récent arrêt rendu au sujet du différend concernant les eaux du Silala entre le Chili et la Bolivie.  Même son de cloche du côté de la France qui a souligné combien la Cour participe à « l’apaisement des relations entre États », avant de prier ces derniers de respecter les arrêts rendus par la Cour.

À ce titre, l’Union européenne a déploré le non-respect par la Fédération de Russie de l’ordonnance du 16 mars 2022, demandant à ce pays de suspendre immédiatement ses opérations en Ukraine.  Le délégué ukrainien a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle fasse pression sur la Russie afin qu’elle respecte les arrêts contraignants de la Cour.  « Lorsque la Russie s’est appuyée sur de fausses allégations de génocide, nous nous sommes adressés à la CIJ afin de mettre en œuvre correctement la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. »

Le Ministre des affaires étrangères du Guatemala a lui rappelé que, son pays et le Belize ont soumis la revendication territoriale, insulaire et maritime du Guatemala à l’attention de la CIJ, signe de leur pacifisme.  Les parties ayant achevé la phase écrite dans les délais fixés par la Cour, le Ministre a exprimé le souhait de renforcer les relations avec le Belize à l’avenir.  « Nous sommes convaincus que la décision de la Cour apportera des avantages économiques, sociaux et politiques à nos deux pays. »

Les délégations ont suggéré des corrections mineures au travail de la Cour, à l’instar du Chili qui a proposé de traduire en langue espagnole les décisions de la Cour.  Conformément à l’Article 39 de son Statut, les langues officielles de la Cour sont le français et l’anglais, a de son côté, tenu à rappeler la délégation française.  

L’Assemblée générale poursuivra son débat à une date qui sera annoncée ultérieurement.

RAPPORT DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE(A/78/4)

Rapport du Secrétaire général (A/78/194)

M. DENNIS FRANCIS, Président de l’Assemblée générale, a rappelé que la Cour internationale de justice (CIJ) se trouvait au cœur du système des Nations Unies et que son rôle était de faire en sorte que les principes de la Charte ne restent pas « lettre morte » et qu’ils soient non seulement « respectés » mais aussi « appliqués ».  La contribution du travail de la CIJ en faveur de la paix, s’appuie sur des règles et des normes développées sur de nombreuses années, a-t-il expliqué, en soulignant comment cette approche rigoureuse avait permis de faire progresser et d’harmoniser le droit international, en toute indépendance des autres organes de l’ONU et de manière « impartiale et équitable ».  Soulignant que les changements climatiques ou la cybersécurité faisaient actuellement partie des nombreux domaines d’intervention de la CIJ, le Président s’est dit encouragé par la récente décision de l’Assemblée générale de demander un avis consultatif à la Cour sur les obligations des États dans la lutte contre les changements climatiques.  Il a conclu son intervention en appelant tous les États à fournir des financements « prévisibles » à la CIJ afin de garantir un respect total du droit international.

Présentation de la Présidente de la Cour internationale de Justice (CIJ)

Mme JOAN DONOGHUE, Présidente de la Cour internationale de Justice (CIJ), a présenté le dernier rapport de la CIJ, pour la période allant du 1er août 2022 au 31 juillet 2023.  Elle a rappelé que 20 affaires sont pendantes devant la Cour, provenant de toutes les régions du monde, 18 affaires contentieuses, et deux demandes d’avis consultatifs.  Elle a mentionné la demande concernant la restitution de biens confisqués dans le cadre de procédures pénales, opposant la Guinée équatoriale et la France, introduite le 29 septembre 2022.  Autre nouvelle affaire, celle sur la souveraineté sur les cayes de Sapodilla opposant Belize et le Honduras, a-t-elle dit.  Le 8 juin 2023, le Canada et les Pays-Bas ont déposé une requête introductive d’instance conjointe contre la République arabe syrienne au sujet de violations alléguées de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.  Le 27 juin 2023, la République islamique d’Iran a déposé une requête introductive d’instance contre le Canada concernant des allégations de violations des immunités de l’État. 

La Présidente a précisé que 53 États Membres de l’ONU et l’État observateur de Palestine ont formulé des commentaires écrits dans le cadre de la demande de l’avis consultatif sur les conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est. L’autre avis consultatif porte sur les obligations des États en matière de changement climatique.  Elle a ensuite passé en revue les arrêts rendus sur la période, notamment celui rendu le 1er décembre 2022 au sujet du différend concernant le statut et l’utilisation des eaux du Silala (Chili c.  Bolivie), par lequel la Cour a estimé que la demande du Chili était devenue sans objet. 

Mme Donoghue a détaillé l’arrêt rendu le 30 mars 2023 dans l’affaire relative à certains actifs iraniens (République islamique d’Iran c.  États- Unis d’Amérique).  Par cet arrêt, la Cour retient l’exception d’incompétence soulevée par les États-Unis relative aux demandes présentées par l’Iran au titre du Traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1955, dans la mesure où elles portent sur le traitement réservé à la banque Markazi et, en conséquence, dit qu’elle n’est pas compétente pour connaître desdites demandes, a rappelé la Présidente.  La Cour a en revanche dit que les États-Unis ont violé les obligations que leur impose le paragraphe 1 de l’article X dudit Traité.  Les États-Unis ont donc l’obligation d’indemniser l’Iran pour les conséquences préjudiciables découlant des violations desdites obligations internationales, a indiqué la Présidente.  Enfin, elle a précisé qu’au cas où les parties ne pourraient se mettre d’accord sur la question de l’indemnisation due à l’Iran dans un délai de 24 mois à compter de la date de cet arrêt, cette question sera, à la demande de l’une ou l’autre partie, réglée par la Cour. 

Mme Donoghue a abordé ensuite l’affaire relative à l’application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Arménie c.  Azerbaïdjan). Par son ordonnance du 22 février 2023, la Cour a décidé que l’Azerbaïdjan doit, dans l’attente de la décision finale sur cette affaire et conformément à la convention précitée, prendre toutes les mesures nécessaires afin d’assurer la circulation sans entrave des personnes, des véhicules et des marchandises le long du corridor de Latchine dans les deux sens, a indiqué la Présidente.  Elle est revenue sur les évolutions procédurales dans l’affaire des allégations de génocide au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Ukraine c.  Fédération de Russie; 32 États intervenants).  Dans son ordonnance du 5 juin 2023, la Cour a ainsi jugé recevables les déclarations d’intervention présentées au titre de l’Article 63 du Statut par 32 États. 

La Présidente a souligné que le Règlement de la Cour et autres documents ont été actualisés afin d’user de formulations inclusives en ce qui concerne le genre.  Le langage utilisé est capital pour parvenir à l’égalité de genres, a-t-elle dit, en ajoutant qu’il s’agit d’un idéal des Nations Unies.  Ces nouvelles règles sont entrées en vigueur en début de semaine.  Enfin, la Présidente a indiqué que les ressources budgétaires à disposition de la Cour ne sont pas en adéquation avec la charge de travail toujours plus conséquente de la Cour et demandé donc des « ajustements nécessaires. »

Débat général 

M. MARIO ADOLFO BÚCARO FLORES (Guatemala), au nom du Ministre des affaires étrangères du Guatemala, a constaté l’augmentation de la charge de travail de la Cour internationale de Justice (CIJ), qui reflète la confiance que lui témoignent les États Membres pour résoudre leurs différends de manière impartiale et conformément au droit international.  Il a pris note des défis procéduraux, logistiques et financiers découlant de cette charge de travail.  Les décisions de la CIJ contribuent selon lui à assurer le respect des normes du droit international, et sont le résultat de nombreuses années d’évolution dans les modes de résolution des conflits au niveau international.  Le respect des engagements acceptés par les États qui se sont volontairement soumis à sa juridiction doit donc être encouragé.  

Le Guatemala et le Belize ont soumis la revendication territoriale, insulaire et maritime du Guatemala à l’attention de la CIJ, a rappelé le représentant, ce qui reflète le caractère pacifique de son pays.  Conformément à l’accord spécial conclu entre les deux pays, ceux-ci ont tenu des consultations populaires afin de résoudre leur différend devant la Cour.  Il s’agit là, selon lui, d’un « mécanisme de légitimation » destiné à assurer le soutien de la population aux décisions de la CIJ.  Les parties ayant achevé la phase écrite dans les délais fixés par la Cour, le représentant a exprimé le souhait de renforcer les relations avec le Belize à l’avenir.  Il s’est dit convaincu que la décision de la Cour apportera des avantages économiques, sociaux et politiques aux deux pays.  Par ailleurs, le représentant s’est inquiété des difficultés financières auxquelles est confrontée la CIJ, qui pourraient entraver l’exécution de son mandat au cours de l’exercice biennal en cours.  Il a exhorté les États Membres à honorer leurs obligations financières et à envisager d’augmenter le budget de la Cour, plus essentielle aujourd’hui que jamais.

M.  EMIL RUFFER (République tchèque), au nom du Groupe de Visegrad, a souligné les nombreux recours à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour régler des différends de manière pacifique. Le Groupe de Visegrad réitère l’importance fondamentale du caractère universel de la Cour et de l’état de droit pour la justice en ces temps compliqués.  De nombreux États ont fait appel à la CIJ pour le règlement pacifique des différends dans les traités bilatéraux et multilatéraux, a-t-il expliqué, encourageant la CIJ de continuer à inclure des clauses de juridiction dans les traités.  Toutefois, la volonté des États de soumettre les différends à la Cour ne suffit pas, a dit le délégué, exhortant les États à appliquer ses décisions, y compris celles sur les formes de discrimination raciale et sur les allégations de génocide. 

M. DIEGO COLAS (France) a noté le rôle central joué par la présidence de la Cour internationale de Justice (CIJ), à la fois dans l’exercice de ses activités judiciaires, dans la direction de son administration, et dans sa représentation auprès des autres institutions.  Signe de son importance, il a aussi pris note de l’augmentation de l’activité contentieuse de la CIJ ces dernières décennies et a plus généralement rappelé que les décisions de la Cour contribuaient à « l’apaisement des relations entre États » quand les autres moyens de règlement pacifique des différends ne le permettent pas.

Le représentant a souligné que la compétence de la CIJ reposait sur le consentement des États et indiqué que ces derniers étaient tenus de respecter les arrêts rendus par la Cour et les mesures conservatoires prises par elle.  Il a aussi noté le rôle important joué par les avis consultatifs qui permettent d’assurer une meilleure compréhension du droit international et d’en « affermir l’autorité ».  Il a enfin fait part de l’attachement de son pays à la représentation de différentes langues et cultures juridiques au sein de la Cour qui contribue, a-t-il précisé, à la qualité de ses travaux et à l’autorité de sa jurisprudence.  Conformément à l’Article 39 de son Statut, les langues officielles de la Cour sont le français et l’anglais.

M. CLAUDIO TRONCOSO REPETTO (Chili) a salué le rôle indispensable de la Cour internationale de Justice (CIJ) et de sa jurisprudence.  Elle participe à la coexistence pacifique entre les peuples. Il a noté la grande diversité des questions traitées par la Cour.  L’augmentation de ses activités est le signe de la confiance placée en la Cour, a-t-il dit, en soulignant son impartialité et son indépendance.  Son pays peut témoigner du sérieux de la Cour, a poursuivi le délégué, en rappelant le récent arrêt rendu au sujet du différend concernant le statut et l’utilisation des eaux du Silala entre la Chili et la Bolivie. Notre confiance en la Cour est totale, a-t-il assuré en louant aussi la pertinence de ses avis consultatifs.  Deux demandes d’avis sont en cours, a-t-il noté, sur les conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et sur les obligations des États en matière de changement climatique.  « Mon pays participera activement à ces procédures. »  Enfin, le délégué a suggéré de traduire en espagnol les décisions de la Cour, cette langue étant l’une des plus parlées au monde, en sus d’être une langue officielle de l’ONU.

M. MIKANAGI TOMOHIRO (Japon) a souligné la nécessité de promouvoir l’état de droit entre les nations.  La Cour internationale de Justice (CIJ) joue un rôle capital dans l’application des principes de la Charte, dont l’interdiction du recours à la force pour acquérir un territoire, a dit le délégué, en rappelant sa jurisprudence en la matière. Il a souligné la pertinence de la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux de 1982.  Il a rappelé que la compétence de la Cour découle souvent d’une convention, avant d’exhorter les États qui ne l’ont pas encore fait à accepter la juridiction obligatoire de la Cour, conformément à l’Article 36 de son Statut.  Il a noté que seuls 73 États sur 193 ont fait une déclaration reconnaissant une telle juridiction obligatoire.  Il est improbable qu’un État ayant accepté la juridiction obligatoire de la Cour fasse usage de la force dans l’avancement de ses intérêts, cet usage étant difficilement justifiable au regard du droit, a conclu le délégué.

Mme TANIA VON USLAR-GLEICHEN (Allemagne) a estimé que la Cour internationale de Justice (CIJ) et d’autres institutions judiciaires internationales, telles que la Cour pénale internationale (CPI), le Tribunal international du droit de la mer et la Cour permanente d’arbitrage, constituent les « gardiens » essentiels de l’ordre juridique international.  L’augmentation du nombre d’affaires portées devant cet organe montre, selon elle, le prestige de la CIJ, de même que son poids et sa responsabilité.  Ainsi, l’affaire Ukraine c. Fédération de Russie, concernant les allégations de génocide au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, est essentielle pour l’Allemagne qui possède, du fait de son passé, un intérêt particulier quant à l’intégrité de cet instrument.  La participation sans précédent des États à cette affaire témoigne selon la déléguée de l’intérêt des parties à la Convention envers son interprétation par la Cour.  Pour la première fois, a-t-elle aussi noté, l’Assemblée générale a demandé à la CIJ de donner un avis consultatif sur les obligations des États en matière de changements climatiques, une question qui requiert une coopération internationale renforcée.  L’Allemagne suit également de près la mise en œuvre de la Convention sur le génocide dans l’affaire initiée par la Gambie contre le Myanmar, et se félicite de la décision de la Cour de juillet dernier sur la recevabilité de cette affaire.  Bien que l’augmentation du nombre d’affaires portées devant la Cour soit une évolution positive, la déléguée a tenu à souligner que cet accroissement de la charge de travail représente une pression sur les capacités de la Cour. 

Mme SALLY LANGRISH (Royaume-Uni) a reconnu le rôle clef de la Cour internationale de Justice (CIJ) afin d’assurer le respect de l’état de droit, contribuant ainsi au maintien de la paix et de la sécurité internationales.  La capacité de la Cour d’assurer le règlement juste et pacifique des différends est aujourd’hui plus importante que jamais, a-t-elle noté.  La déléguée a relevé qu’au cours de la dernière année, cinq nouvelles affaires contentieuses ont été portées devant la Cour, ainsi que deux demandes d’avis consultatifs.  Des États de toutes les régions du monde continuent de soulever un large éventail de questions juridiques devant la CIJ, qu’il s’agisse de la délimitation maritime et territoriale, de la réparation de faits internationalement illicites, des immunités juridictionnelles ou encore de l’interprétation des traités internationaux. La nature et le nombre d’affaires portées devant la Cour témoignent selon elle de l’estime que lui accordent les États Membres.  La déléguée a encore souligné qu’un certain nombre d’affaires contentieuses et d’avis consultatifs de la Cour impliquent des procédures multipartites, tout en se félicitant de sa gestion de ces processus complexes. 

M. PERREZ (Suisse) a indiqué que le soutien de son pays à la Cour internationale de Justice (CIJ) s’inscrit dans le cadre d’une politique étrangère qui vise à encourager la résolution pacifique des différends.  Selon lui, la possibilité pour l’Assemblée générale de demander un avis consultatif à la Cour constitue un aspect fondamental de la promotion de l’état de droit au niveau international.  De même, la possibilité d’obtenir des clarifications juridiques sur une situation donnée permet à l’Organisation de s’acquitter de ses obligations de manière équitable. Qui plus est, les exposés des États et des organisations internationales permettent à cet organe de tenir compte de l’avis de la communauté internationale sur l’état du droit.  Le représentant a appuyé la position de la CIJ voulant que l’absence de consentement dans le cadre des avis consultatifs ne représente pas un obstacle à l’exercice de sa compétence.  Néanmoins, a‑t‑il rappelé, sa compétence concernant les affaires contentieuses, se fonde sur le consentement des États.  La reconnaissance préalable de la compétence de la Cour est donc une composante indispensable de la promotion de la paix et de la sécurité internationales, a fait valoir le délégué.  Dans cette optique, plusieurs États, dont la Suisse, ont publié en 2014 le Guide pratique sur la reconnaissance de la compétence de la Cour internationale de Justice

M. HERRERA (Argentine) a souligné le rôle majeur de la Cour internationale de Justice (CIJ) dans la préservation de la paix et la promotion de l’état de droit.  Sa charge de travail a augmenté de manière considérable, ce qui montre que la Cour est digne de confiance, a dit le délégué, en notant l’universalité de son Statut.  Il a noté le haut niveau d’application des décisions de la CIJ, ce qui est une nouvelle preuve de la confiance que les États placent en elles.  Par ailleurs, s’est-il félicité, les États lui confient de nouveaux domaines comme le droit de l’environnement.  En conclusion, il a souligné la nécessité de respecter le multilinguisme dans le travail de la Cour et espéré que les demandes budgétaires de celle-ci seront satisfaites.

M. ANTON KORYNEVYCH (Ukraine) a souligné l’importance des questions traitées par la Cour internationale de Justice (CIJ) qui ont des implications pour le droit international.  « Lorsque la Russie a utilisé de fausses allégations de génocide, nous nous sommes adressés à la CIJ afin de mettre en œuvre correctement la Convention sur le Génocide », a-t-il déclaré, soulignant que 33 États ont fait une demande d’intervention dans cette affaire face au risque d’une interprétation trop laxiste de cette Convention.  Réaffirmant que les ordonnances de la CIJ sont contraignantes, le délégué a regretté que tous les États ne les mettent pourtant pas en œuvre de bonne foi.  À ce titre, il a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle fasse pression sur la Russie afin que cette dernière respecte le droit international et les arrêts contraignants de la Cour.  Déjà en 2014, la Russie avait essayé d’annexer des territoires illégalement, a‑t‑il rappelé, condamnant l’envoi d’armes par la Russie à des groupes terroristes qui agissent en Ukraine.  L’absence de redevabilité de la Russie doit cesser, a‑t‑il conclu, qualifiant le conflit de « tournant historique pour la survie de la démocratie ». 

M. XINMIN MA (Chine) a réitéré l’importance de la Cour internationale de Justice (CIJ) pour la promotion des relations pacifiques entre les États.  La Cour joue un rôle fondamental pour sauvegarder les principes de la Charte des Nations Unies et l’ordre international, a-t-il estimé, espérant que le rôle de la CIJ continuera à prendre de l’ampleur.  Malgré la charge de travail élevée, la Cour s’est acquittée de sa mission avec professionnalisme, a-t-il apprécié, soulignant la diversité des affaires qui touchent à la stabilité de l’ordre international et participent au développement à plus long terme du droit international.  Les deux questions soumises à la CIJ pour avis consultatif la même année, l’une concernant les changements climatiques, et l’autre le territoire palestinien occupé, sont « sans précédent », a-t-il fait remarquer. Concernant le conflit israélo-palestinien, la Chine pense que la priorité est de parvenir à un cessez-le-feu et de protéger les civils dans le respect du droit international, a-t-il déclaré, espérant que la Cour sera « impartiale » en rendant son avis.  Concernant les changements climatiques, la Chine souhaite que l’avis de la CIJ soit ancré dans le droit international, y compris le Protocole de Kyoto et l’Accord de Paris, a-t-il expliqué. 

M. CELORIO ALCANTARA (Mexique) a rappelé la grande diversité des thèmes abordés dans les affaires portées devant la Cour internationale de Justice (CIJ) et noté l’intérêt considérable des États et de la société civile pour ses avis consultatifs.  Il a souligné que les problèmes abordés dans ces avis étaient souvent urgents et s’inscrivaient dans « une logique de prévention des crises majeures ».  Cette approche permet selon lui de renforcer la « diplomatie préventive » voulue par le Secrétaire général et doit être soutenue.  La CIJ a été reconnue par le Mexique en 1947, a rappelé le délégué, en soulignant toutefois que moins de la moitié des États Membres de l’ONU ont reconnu la compétence de la Cour, avec une faible représentativité des membres du Conseil de sécurité.  Il a appuyé la déclaration sur la reconnaissance de la compétence de la Cour proposée par la Roumanie et, plus généralement, a souligné l’importance pour son pays de l’introduction de clauses juridictionnelles dans les traités qu’il négociait.  Relevant que des « Mexicains éminents » ont siégé à la CIJ, le délégué a appelé l’Assemblée générale à soutenir l’élection d’un nouveau juge mexicain. 

M. FRANK HOFFMEISTER (Union européenne) a souligné que l’efficacité du travail de la Cour internationale de Justice (CIJ) dépendait avant tout de l’acceptation des arrêts par les parties aux différends.  À ce titre, il a déploré le non-respect par la Fédération de Russie de l’ordonnance du 16 mars 2022 demandant à ce pays de suspendre immédiatement ses opérations militaires en Ukraine.  Il a aussi évoqué l’affaire entre l’Ukraine et la Russie concernant des allégations de génocide au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, qui vise notamment à établir que la Russie « ne dispose pas de base légale » pour une action militaire contre l’Ukraine s’appuyant sur des allégations de génocide « non étayées ».  L’observateur a rappelé que 26 États membres de l’Union européenne (UE) étaient intervenus devant la Cour pour donner leur point de vue sur l’interprétation de la Convention sur le génocide, démarche qu’il a jugée « sans précédent ».

L’observateur a ensuite évoqué les changements climatiques, notant que tous les organes principaux des Nations unies, sauf la CIJ, s’étaient penchés sur la question.  Il a donc jugé « historique » la demande d’avis consultatif soumise à la Cour par une résolution de l’Assemblée générale « coparrainée par tous les États membres de l’UE » qui prie la Cour de clarifier les obligations juridiques des États en matière de changement climatique.  Ce choix d’engager la Cour par le biais d’une procédure non contentieuse est un encouragement à la communauté internationale à prendre des mesures ambitieuses et efficaces pour lutter contre les changements climatiques, a-t-il précisé, en informant que l’UE allait intervenir lors de l’audience, dans la droite ligne de son action « déterminée » en faveur du climat.  L’observateur a ajouté que l’avis consultatif clarifiera les obligations des États et fournira une motivation juridique supplémentaire à tous les pays pour réduire les émissions et protéger les droits de l’homme. Il a enfin rappelé que la jurisprudence de l’UE se référait fréquemment à la jurisprudence de la CIJ pour interpréter le droit international au sein de l’ordre juridique de l’Union, et cité plusieurs arrêts récents de la Cour de justice de l’Union européenne en ce sens. 

Mme VIBEKE PASTERNAK JØRGENSEN (Danemark), au nom des pays nordiques, a réitéré l’importance que sa délégation accorde au rôle central de la Cour internationale de Justice (CIJ), « une véritable cour mondiale », pour le règlement pacifique des différends internationaux.  Elle a souligné l’intensité et la diversité géographique des activités de la CIJ, notamment sur les questions de délimitation des frontières territoriales et maritimes, sur les droits de l’homme et la protection de l’environnement, démontrant ainsi l’intérêt et la confiance portés à la Cour.  Pour maintenir cette confiance, a souligné la représentante, il est primordial que la Cour administre la justice de manière efficace et impartiale.  Les États sont, pour leur part, tenus de respecter les ordonnances et les arrêts de la Cour, et doivent s’engager dans une coopération multilatérale fondée sur le droit international.  Enfin, sa délégation estime que les interventions des États dans le cadre de la requête introductive d’instance déposée par l’Ukraine contre la Fédération de Russie au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide reflètent largement l’importance de la Cour en tant qu’institution pour la promotion et la protection d’un système international fondé sur l’état de droit.

M. ADAM McCARTHY (Australie), au nom du Canada, de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie, a remarqué la confiance générale placée dans la Cour internationale de Justice (CIJ) vu le volume des procédures consultatives et des affaires contentieuses dont la Cour est saisie.  Face à cette charge de travail qui ne cesse d’augmenter, nous devons veiller à ce que la Cour dispose de ressources suffisances pour pouvoir continuer à s’acquitter de sa mission convenablement, a-t-il souligné.  Par ailleurs, le délégué a estimé que la Cour ne peut œuvrer au règlement pacifique des différends efficacement, que si elle jouit d’une large reconnaissance, appelant les États à reconnaître la juridiction obligatoire de la CIJ.  Il a également salué la création récente du fonds d’affectation spéciale pour le programme relatif aux Judicial Fellows, qui permettra d’accroître sa diversité linguistique et géographique, ce qui améliorera in fine la qualité des arrêts de la Cour.  Il a néanmoins davantage de diversité de genres parmi les juges.

M. RENÉ LEFEBER (Pays-Bas) a encouragé tous les États Membres de l’ONU à faire une déclaration d’acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice (CIJ) avec le « moins de réserves possibles ». Il a regretté que beaucoup d’États n’acceptent pas la compétence de la Cour, ou l’acceptent avec des réserves qui limitent beaucoup celle-ci.  Notant que la CIJ faisait face à une charge de travail croissante, le délégué y a vu un défi pour la Cour, tout comme la « complexité factuelle » des affaires.  À ce titre, il a encouragé la Cour à moderniser ses procédures en mettant en place des réunions virtuelles, par exemple.  S’agisssant de l’admission de demandes tardives dans les avis consultatifs, il a suggéré une approche « plus tolérante » lorsque la participation à une procédure de la communauté internationale dans son ensemble était d’un intérêt particulier.  Il a sugggéré de s’inspirer de la pratique « plus souple » du Tribunal international du droit de la mer qui, contrairement à la CIJ, admet la présentation de documents jusqu’à l’examen oral.  Une telle approche permettrait à la Cour, si elle l’adoptait, d’exercer ses fonctions consultatives de manière encore plus remarquable, a-t-il conclu. 

M. RAKOVEC (Slovénie) a considéré que l’augmentation constante de la charge de travail de la Cour internationale de Justice (CIJ) démontre la nécessite d’un mécanisme multilatéral pour examiner les questions juridiques de portée internationale.  La diversité des affaires traitées par la Cour, sur quatre continents, confirme son universalité.  Jusqu’à présent, 74 États Membres ont accepté la juridiction de la Cour comme étant obligatoire, a noté le délégué.  Les arrêts et les ordonnances rendus par la Cour contribuent selon lui, au renforcement de l’état de droit, ainsi qu’au développement et à la clarification du droit international.  Alors que les violations des droits humains affectent des millions de personnes dans le monde, le rôle de la Cour dans les différends entre États demeure fondamental pour préserver la paix et la sécurité internationales.  La Slovénie appuie fermement l’affaire relative aux allégations de génocide au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide initiée par l’Ukraine contre la Fédération de Russie. Le représentant a demandé aux parties de mettre en œuvre intégralement les arrêts de la Cour. 

Mme ALINA OROSAN (Roumanie) a fait état d’une période difficile pour la communauté des juristes internationaux face à la multiplication des violations graves du droit international.  Dans ce climat international extrêmement instable, la représentante a réitéré son attachement au règlement pacifique des différends.  C’est dans ce contexte, a-t-elle expliqué, que la Roumanie est intervenue dans l’affaire relative aux allégations au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.  Elle a également participé à une coalition de 17 États Membres de l’ONU, initiée par Vanuatu, qui a mené à l’adoption unanime par l’Assemblée générale d’une demande d’avis consultatif de la Cour sur les changements climatiques. 

Selon la représentante, l’acceptation prévisible de la compétence de la Cour contribue à la stabilité et à la cohérence indispensables aux relations internationales et à la paix.  Elle a rappelé la Déclaration pour la promotion de la juridiction de la Cour internationale de Justice, lancée par son pays en 2021 afin d’encourager les États à accepter la compétence de la Cour.  Son auteur et ancien Ministre roumain des affaires étrangères, M. Bogdan Aurescu, pose d’ailleurs sa candidature au siège de juge de la CIJ qui revient au Groupe des pays d’Europe orientale.  Enfin, la déléguée s’est inquiétée de la tendance au non-respect des ordonnances contraignantes rendues par la Cour, un problème particulièrement aigu s’agissant de mesures conservatoires cruciales pour sauvegarder les droits des États et protéger leurs populations. 

M. RICHARD VISEK (États-Unis) a salué le travail de la CIJ et le programme relatif aux Judicial Fellows.  La Cour joue un rôle fondamental pour le règlement pacifique des différends internationaux, a-t-il estimé.  Toutefois, la charge de travail ne va faire qu’augmenter, à la hauteur des cas dont elle est saisie, a-t-il mis en garde, citant les cas de l’Ukraine et de la Syrie dans le cadre des allégations de génocide et de torture respectivement.

M. STEFANO ZANINI (Italie) a déclaré que la Cour internationale de Justice (CIJ) était un pilier essentiel pour faire respecter le droit international, comme le montre le nombre croissant d’affaires contentieuses et de procédures consultatives impliquant des États de toutes les régions du monde. La Cour, en tant qu’institution judicaire impartiale et indépendante, joue un rôle crucial dans le règlement pacifique des différends internationaux, a-t-il rappelé.  Le représentant a indiqué que l’Italie intervient dans l’affaire relative à des allégations de génocide au titre de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide afin d’assister la Cour dans l’interprétation des provisions de ladite Convention.  Enfin, il a fait remarquer que l’Italie a reconnu et accepté la juridiction obligatoire de la CIJ, ce qui démontre la confiance accordée par son pays à la Cour. 

M. SEYED ALI MOUSAVI (République islamique d’Iran) a indiqué que son pays est partie à quatre affaires devant la Cour, trois en tant que « demandeur » et une en tant que « défendeur ».  Cette année, l’Iran est devenu le soixante-quatorzième État à accepter la juridiction obligatoire de la Cour, avec des réserves concernant certaines catégories de différends, a-t-il indiqué.  Afin de faire valoir ses droits légitimes, son pays a déposé des requêtes dans l’affaire Certains actifs iraniens (République islamique d’Iran c.  États-Unis d’Amérique), arguant que ce pays a violé ses obligations au titre du Traité d’amitié, de relations économiques et de droits consulaires de 1955.  Le 30 mars dernier, a rapporté le délégué, la CIJ a rejeté l’exception d’irrecevabilité soulevée par les États-Unis concernant le non-épuisement des recours internes par les entreprises iraniennes.  L’Iran a également déposé une autre requête contre les États-Unis concernant l’imposition de sanctions illégales dans l’affaire Violations alléguées du Traité d’amitié, de commerce et de droits consulaires de 1955 (République islamique d’Iran c.  États-Unis d’Amérique).  Il s’agit, a dit le délégué, des faits internationalement illicites, résultant de la réimposition de sanctions et de mesures coercitives unilatérales à la suite du retrait unilatéral de Washington du Plan d’action global commun.  Selon lui, les États-Unis ont violé leur obligation de se conformer à l’ordonnance de la Cour, ce qui engage leur responsabilité internationale.  Le 4 juillet 2023, le Canada, la Suède, l’Ukraine et le Royaume-Uni ont par ailleurs engagé une procédure contre l’Iran en invoquant un prétendu différend au titre de la Convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, suite à l’accident du vol 752 d’Ukraine International Airlines, survenu le 8 janvier 2020.  Des négociations entre les parties se sont tenues à Genève il y a quelques semaines afin d’engager des négociations de bonne foi, a-t-il expliqué. 

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