Soixante-dix-septième session,
86e et 87e séances plénières – matin & après-midi
AG/12515

L’Assemblée générale adopte les budgets des opérations de paix et examine le rapport 2022 du Conseil de sécurité

Sur recommandation de sa Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, l’Assemblée générale a adopté cet après-midi les budgets des opérations de paix, pour la période allant du 1er juillet 2023 au 31 juin 2024.  Pour financer son retrait, décidé ce matin par le Conseil de sécurité, qui s’achèvera à la fin de l’année, la Mission au Mali reçoit une enveloppe « largement insuffisante » de 590 millions de dollars. 

Dans la matinée, les États Membres ont été invités à se livrer à un « exercice de responsabilité » en examinant le rapport 2022 du Conseil de sécurité après une année marquée par des crises et des guerres, comme l’a décrit le Président de l’Assemblée générale.  Les questions relatives au droit de veto, exercé par quatre fois en 2022, et le constat d’une unité de moins en moins présente au Conseil ont dominé le débat, avec mention toutefois de plusieurs évolutions positives dans les travaux de fond du Conseil.  Les commentaires ont porté également sur la forme que prend cet exercice annuel, qui mériterait d’être améliorée.

Le Président de l’Assemblée, M. Csaba Kőrösi, a souligné que le Conseil de sécurité, sur de nombreuses questions cruciales, a su agir.  Le Conseil a notamment renouvelé avec succès tous les mandats de maintien de la paix et des missions politiques spéciales de l’ONU, « une réalisation qui, si elle ne fait peut-être pas la une des journaux, offre un soutien vital à des millions de personnes vulnérables », a-t-il observé. Le Conseil a également fait d’autres progrès importants en 2022, a noté M. Kőrösi en citant l’exception humanitaire aux régimes de sanctions, ainsi que la première résolution adoptée par le Conseil sur le Myanmar pour mettre en lumière une situation « véritablement désespérée ».

Les nouveautés figurant dans l’introduction du rapport ont semblé satisfaire les délégations.  Il y a eu notamment une forte augmentation du nombre de réunions non programmées du Conseil de sécurité, qui sont passées de 34 en 2021 à 85 l’an dernier, sur un total de 292 séances.  L’introduction parle également du veto, comme l’a constaté avec satisfaction le Portugal, pour le Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (ACT): « Il est important de faire apparaître les cas où le Conseil n’a pas été en mesure d’agir malgré un besoin évident et un mandat ». En 2022, le droit de veto a été utilisé, par un ou plusieurs membres du Conseil, pour empêcher l’adoption de résolutions sur l’Ukraine (deux fois), sur la non-prolifération/République populaire démocratique de Corée et sur la Syrie.

L’Équateur a, pour sa part, apprécié que l’introduction fasse référence au lien entre les conflits et l’insécurité alimentaire, ainsi qu’au Comité des sanctions concernant Haïti (nouveau régime créé en 2022).  « Les régimes de sanctions ont continué de représenter un outil important pour le Conseil » selon le rapport qui précise que 10 d’entre eux ont été renouvelés tandis qu’un a été créé.

Quelques suggestions pour améliorer le processus de préparation du rapport ont été formulées. Ainsi, a suggéré le Groupe ACT, un débat public pourrait être organisé en janvier afin d’évaluer les travaux du Conseil avant la rédaction de l’introduction du rapport.  L’Indonésie a, elle, proposé de publier un rapport à mi-parcours ou de tenir un dialogue informel, qui permettrait une interaction plus substantielle au-delà de la discussion annuelle de routine.

Sur le fond, des critiques sur cet exercice annuel ont été exprimées, par la Suisse notamment, qui a regretté que les 200 pages du rapport ne transmettent qu’imparfaitement l’impact qu’ont eu des bouleversements politiques majeurs, comme l’agression russe contre l’Ukraine, qui ont fait doubler le nombre de réunions tenues à la demande des membres.  Les pays nordiques ont dit qu’ils s’attendaient à une réflexion plus approfondie après une année aussi « complexe et stimulante » pour les travaux du Conseil. Même son de cloche chez le Groupe ACT qui aurait souhaité « un compte rendu plus complet, plus approfondi et plus analytique », y compris des détails supplémentaires sur les projets de résolution qui n’ont pas été adoptés.  Plusieurs ont réclamé un chapitre entier sur le veto et un autre sur les rapports spéciaux traitant de la mise en œuvre de la résolution 76/262 (texte prévoyant une réunion de l’Assemblée à chaque fois qu’un veto empêche l’adoption d’une résolution au Conseil). 

Si les efforts de transparence ont été salués, comme l’organisation de séances récapitulatives par toutes les présidences du Conseil, le Groupe ACT a suggéré que le rapport inclue des informations pertinentes sur les consultations à huis clos et les discussions tenues sous la rubrique « Questions diverses ».  Le Viet Nam a, pour sa part, souhaité que la contribution « inestimable » des membres non permanents soit mieux reflétée dans le rapport.  Plus virulent, Singapour s’est étonnée que seuls huit membres du Conseil aient soumis leur rapport d’évaluation mensuel en 2022, décriant l’attitude de certains membres permanents qui ne font preuve selon lui « d’aucun sens des responsabilités ». 

Les détracteurs du droit de veto se sont également fait entendre à cette occasion, comme le Mexique qui a rappelé l’initiative franco-mexicaine vouée à limiter le « pouvoir excessif de quelques-uns » dans les situations d’atrocités de masse. Même si l’Assemblée se réunit désormais après chaque veto, c’est surtout, de l’avis des Philippines, « un forum pour exprimer des sentiments », sans résultat concret. L’Assemblée a pourtant adopté six résolutions condamnant l’agression russe et ses conséquences multiformes, a fait remarquer la Pologne ainsi que M. Kőrösi. 

L’Assemblée a commencé, ce matin, par prendre note de la liste des 65 questions relatives au maintien de la paix et de la sécurité internationales dont le Conseil de sécurité est saisi.

Cet après-midi, l’Assemblée a également terminé son débat sur la responsabilité de protéger et la prévention du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l’humanité, entamé lundi dernier.

RAPPORT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ POUR 2022- (A/77/2)

Déclaration liminaire 

M. CSABA KŐRÖSI, Président de l’Assemblée générale, a souligné que la réunion du jour était organisée parce que le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale sont des organes complémentaires, destinés à travailler ensemble.  Il s’est ensuite demandé: où réussissons-nous?  Où échouons-nous?  Pour répondre à ces questions que doit se poser l’Organisation, il a invité les États Membres à se livrer un exercice honnête d’auto-examen. Un exercice de responsabilité, a-t-il ajouté, le rapport dont est saisie l’Assemblée décrivant à ce sujet une année marquée par des crises, des conflits violents et des guerres.  Rappelant que le Conseil de sécurité est au fondement des efforts collectifs pour maintenir la paix dans le monde, il a salué le fait que, sur de nombreuses questions cruciales, il ait su agir.  Le Président de l’Assemblée générale a relevé notamment qu’il avait renouvelé avec succès tous les mandats de maintien de la paix et des missions politiques spéciales de l’ONU, une réalisation qui, si elle ne fait peut-être pas la une des journaux, offre un soutien et une stabilité vitaux à des millions de personnes vulnérables à travers le monde.  Le Conseil a également fait d’autres progrès importants cette année, en établissant par exemple un régime d’exception humanitaire aux régimes de sanctions de l’ONU, fournissant ainsi une aide pérenne à des millions de personnes dans le besoin.  M. Kőrösi a également signalé que le Conseil de sécurité avait adopté en 2022 sa première résolution sur le Myanmar pour mettre en lumière une situation « véritablement désespérée ».  C’est ensuite en russe qu’il s’est exprimé en reconnaissant que le Conseil de sécurité avait enregistré de sérieux échecs, suscitant de graves doutes et de l’embarras quant à sa légitimité.  Je ne citerai que le plus douloureux d’entre eux, sur lequel l’Assemblée générale a déjà adopté 6 résolutions: 491 jours après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le Conseil n’a toujours pas adopté une seule résolution attendue par le monde sur cette violation flagrante de la Charte des Nations Unies et le droit international, a-t-il constaté. 

S’adressant aux États Membres, il leur a demandé si le rapport reflétait bien les principaux défis auxquels le monde a été confronté cette année ou encore s’il devait être plus analytique et parler davantage des problèmes émergents. « Nous savons que les crises d’une complexité sans précédent sapent la stabilité de nombreux États Membres et régions ».  « Je vous invite à réfléchir à ces questions et à les aborder dans vos interventions », a-t-il conclu. 

Débat sur la question

M. GERARDO PEÑALVER PORTAL (Cuba) a souligné l’importance accordée par les États Membres à une communication des documents du Conseil de sécurité moins descriptive et formelle et davantage analytique.  Il a ainsi demandé la publication de rapports exhaustifs rendant compte des causes et des conséquences des décisions prises par le Conseil.  Il a par ailleurs déploré de sérieuses lacunes dans la version 2022 du rapport, relevant par exemple l’absence d’analyse des violations des résolutions du Conseil de sécurité par Israël.  Concernant la réforme des méthodes de travail de l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, le représentant a appelé à un renforcement de la transparence, qui pourrait notamment passer par la rédaction de comptes rendus des séances officieuses du Conseil de sécurité et l’adoption d’un règlement permettant in fine une reddition de comptes de tous les États Membres de l’ONU.  « De façon générale, il faut que certains membres permanents arrêtent d’usurper les fonctions d’autres organes de l’ONU pour faire du Conseil un outil de pression contre d’autres États souverains. »

Au nom du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (ACT), Mme BAPTISTA GRADE ZACARIAS (Portugal) s’est félicitée de l’adoption du rapport par le Conseil de sécurité à l’échéance du 30 mai, tout en plaidant pour une amélioration du processus de préparation.  Selon elle, un débat public pourrait être organisé en janvier afin d’évaluer les travaux du Conseil avant la rédaction de l’introduction du rapport.  Elle s’est aussi prononcée pour l’établissement d’un calendrier fixe pour la discussion de l’Assemblée générale sur le rapport annuel, dans la mesure où une date limite interne a été fixée pour le Conseil lui-même.  Cela renforcerait la transparence et la prévisibilité du processus, a-t-elle estimé, avant de se concentrer sur le contenu du rapport.  À cet égard, la représentante a salué l’inclusion de statistiques dans l’introduction, notamment la comparaison du nombre de réunions imprévues tenues à la demande des membres du Conseil, qui est passé de 34 en 2021 à 85 en 2022.  Elle s’est également félicitée de l’inclusion de données désagrégées sur la participation des femmes, notant par exemple que 46% de femmes ont fait des exposés devant le Conseil en 2022, contre 44% en 2021 et seulement 34% en 2020.  Un autre motif de satisfaction concerne l’inclusion dans l’introduction d’informations sur le nombre de fois où un veto a été opposé.  Il est selon elle important de faire apparaître les cas où le Conseil n’a pas été en mesure d’agir malgré un besoin évident et un mandat.  De même, la représentante s’est réjouie de la référence à la soumission de trois rapports spéciaux, conformément à la résolution 76/262, qui donne mandat à l’Assemblée générale d’organiser un débat en cas d’utilisation du veto au Conseil. Elle a par ailleurs salué les paragraphes qui traitent de questions ou de tendances de fond, notamment les références aux discussions sur une série de questions émergentes, telles que le lien entre les conflits et l’insécurité alimentaire, la technologie et la sécurité, ou encore d’informations sur, par exemple, l’établissement d’un régime de sanctions pour Haïti. 

S’agissant du corps du rapport, la représentante a encouragé le Conseil à fournir un compte rendu plus complet, plus approfondi et plus analytique de ses travaux à l’Assemblée générale, y compris des détails supplémentaires sur les projets de résolution qui n’ont pas été adoptés.  D’après elle, le corps du rapport annuel devrait en outre inclure un chapitre sur le veto, avec les cas dans lesquels il a été exercé, des déclarations d’explication des États Membres qui l’ont exercé et des statistiques sur le nombre de fois où il a été exercé dans le passé.  Elle a aussi souhaité qu’un chapitre autonome soit inclus dans les rapports spéciaux, qu’ils résultent ou non de la mise en œuvre de la résolution 76/262.  De plus, a-t-elle ajouté, des informations pourraient être incluses sur la mise en œuvre des résolutions et décisions du Conseil, avec une indication des raisons de tout manque de mise en œuvre.  Le Groupe ACT encourage d’autre part la compilation et l’utilisation des évaluations mensuelles par les présidences du Conseil, qui constituent d’importants documents de référence reflétant les points de vue des membres sur les travaux de l’organe, a poursuivi la représentante.  Enfin, après avoir salué les efforts visant à accroître la transparence, comme par exemple l’organisation de séances de synthèse, elle a suggéré que le rapport annuel mette en évidence les informations pertinentes concernant les consultations à huis clos du Conseil et les discussions tenues sous la rubrique « Questions diverses ». 

Mme MONA JUUL (Norvège), au nom des pays nordiques, a estimé que ce débat représente une occasion importante pour tous les États Membres de l’ONU de s’exprimer sur la mise en œuvre, par le Conseil de sécurité, de son mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Elle a appelé le Conseil et le Président de l’Assemblée générale à explorer les moyens d’intensifier les interactions substantielles entre les deux organes.  En écho à la déclaration du Groupe Responsabilité, cohérence et transparence (ACT), la déléguée s’est félicitée de l’adoption rapide du rapport, tout en soulignant l’importance pour le Conseil de respecter tous les délais impartis et de fournir des comptes rendus analytiques de ses travaux.  Dans l’intervalle, les évaluations mensuelles réalisées par chaque présidence n’ont pas, à son avis, à faire l’objet de consensus de la part des membres du Conseil. De plus, 2022 ayant été une année « complexe et stimulante » pour les travaux du Conseil, les pays nordiques se seraient attendus à une réflexion plus approfondie dans le présent rapport, tant sur le fond que sur la forme.  Depuis l’adoption de la résolution 76/262, le Conseil a produit un rapport spécial pour l’Assemblée générale chaque fois qu’un veto était exprimé, a reconnu la déléguée.  Elle a toutefois regretté que ces rapports ne soient pas reflétés dans une section autonome du rapport annuel.  Enfin, elle a salué l’inclusion du premier rapport annuel du Groupe de travail informel sur la documentation et les autres questions de procédure dans le rapport annuel du Conseil. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a noté que cinq débats publics ont eu lieu en 2022 sur les femmes et la paix et la sécurité, cela pendant les présidences de l’Albanie, du Gabon, de la Norvège, des Émirats arabes unis et du Royaume-Uni.  Ces débats font partie intégrante de l’avancement des discussions sur le rôle crucial des femmes dans la poursuite d’une paix durable, a-t-elle salué, se demandant cependant pourquoi les points de vue divers et les propositions importantes des États Membres ne figurent pas en bonne place dans le rapport.  Nous estimons que le Conseil devrait intégrer dans son rapport une sélection des vues et recommandations des États participants à ces réunions, a-t-elle dit avant de regretter un contenu trop descriptif et insuffisamment analytique sur les questions les plus importantes traitées par le Conseil de sécurité.  Elle a expliqué que les États Membres aurait souhaité connaître le détail des discussions ayant débouché sur la première résolution du Conseil sur le Myanmar, alors que cette dernière a été adoptée un an après le coup d’État dans ce pays.  Pour le Costa Rica, le Conseil pourrait jouer un rôle plus utile en surveillant de manière plus étroite les signes avant-coureurs des coups d’État et utiliser ainsi plus efficacement sa « diplomatie publique » pour aider à la résolution des crises avant que des conflits n’éclatent.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) s’est félicité des progrès réalisés au cours du dernier exercice biennal tant dans le renforcement du rôle de l’Assemblée générale que dans les relations de celle-ci avec le Conseil de sécurité.  Ces avancées doivent continuer à se développer dans le but de parvenir à une ONU plus efficace et plus moderne, a-t-il plaidé, rappelant que son pays, aujourd’hui membre élu du Conseil, a appuyé ce processus. Il a ainsi fait état de l’organisation, le 12 mai, au côté du Portugal, du premier atelier sur la relation du Conseil de sécurité avec l’Assemblée générale.  Le représentant a d’autre part souligné certaines améliorations figurant dans le rapport annuel, en particulier la référence à l’insécurité alimentaire dans l’introduction, ainsi que la mention faite au Comité des sanctions concernant Haïti.  Il a également insisté sur les références aux trois rapports spéciaux soumis en application de la résolution 76/262 de l’Assemblée générale relative à l’usage du veto au Conseil. Le représentant a par ailleurs apprécié l’inclusion de statistiques qui reflètent la dynamique des travaux du Conseil, avant d’appeler à alimenter le rapport annuel avec les évaluations mensuelles de cet organe. 

M. REIN TAMMSAAR (Estonie) a appelé le Conseil de sécurité à adopter un calendrier fixe pour la discussion de l’Assemblée générale sur son rapport annuel afin de renforcer la transparence et la prévisibilité du processus. L’expérience de l’Estonie au Conseil de sécurité a montré que nos efforts en vue d’une plus grande transparence se heurtent à une résistance, a-t-il témoigné.  Le délégué a jugé crucial d’inclure dans le rapport des informations sur les cas où le Conseil n’a pas été en mesure d’agir malgré un besoin et un mandat clairs.  En 2022, un membre permanent du Conseil de sécurité a lancé contre son voisin pacifique une guerre d’agression d’une ampleur inédite depuis la Seconde Guerre mondiale. Selon le rapport, le Conseil s’est réuni 46 fois l’année dernière pour discuter de questions liées à l’Ukraine, et quatre projets de résolution sur l’Ukraine n’ont pas été adoptés par le Conseil, a précisé le délégué.  Sur cette question comme sur celle de la République populaire démocratique de Corée, des membres permanents ont été en mesure de paralyser efficacement les travaux du Conseil dans les cas les plus critiques, a-t-il déploré.  La résolution A/RES/76/262, qui a récemment célébré son premier anniversaire, est un grand pas en avant à cet égard, a-t-il noté, tout en appelant les membres à ne pas abuser de leur droit de veto.  « En cas d’atrocités de masse, y compris le crime d’agression, le veto ne devrait pas être utilisé du tout. » 

M. VATHAYUDH VICHANKAIYAKIJ (Thaïlande) a souhaité un rapport annuel du Conseil de sécurité plus analytique, ce qui permettrait à tous les États Membres d’être tenus au courant de ses travaux de fond et, partant, de contribuer à un multilatéralisme inclusif, représentatif et efficace.  La production d’un tel rapport ne devrait pas attiser les peurs et les inquiétudes, a-t-il estimé.  L’objectif serait plutôt de permettre une meilleure compréhension des dynamiques en cours au Conseil, incitant à soutenir un travail plus transparent et efficace de cet organe.  Le représentant a constaté que les éléments du rapport décrivent un Conseil de sécurité de plus en plus divisé, alors que la communauté internationale a besoin d’être de plus en plus unie.  Il a donc encouragé le Conseil à retrouver cette unité, à renforcer ses outils de paix, à entretenir la culture de la paix et à aider l’ONU à régler les différends entre parties en restaurant la confiance interétatique.  À cette fin, le représentant a estimé que le Conseil devrait mieux impliquer les organisations régionales et sous-régionales dans ses efforts, ces entités pouvant être les gardiennes des intérêts des communautés locales et les premiers pare-feu face aux défis émergents. 

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a indiqué qu’en tant que membre élu du Conseil, son pays a pu constater de visu l’augmentation du nombre de conflits dans le monde, mais aussi les limites du Conseil, surtout en cas de recours au veto par un ou plusieurs de ses membres permanents.  L’an dernier, a-t-il relevé, des veto ont été enregistrés à quatre reprises, soit trois de plus que l’année précédente, empêchant le Conseil d’agir dans des situations d’urgence.  Qualifiant cette tendance de « regrettable et inacceptable », il a constaté que chaque veto conduit à l’incapacité de la communauté internationale de mettre fin ou de prévenir les conflits.  « Chaque veto empêche une réponse rapide à une menace à la paix et à la sécurité internationales. »  De fait, a-t-il préconisé, le droit de veto doit être limité, de manière responsable et solidaire.  Il a rappelé à cet égard que l’initiative franco-mexicaine, qui compte déjà 106 pays signataires, a été conçue pour limiter le « pouvoir excessif de quelques-uns » dans les situations d’atrocités de masse.  Dans ce droit fil, il a souhaité que soient explorés avec la même urgence les moyens de faire appliquer les dispositions de l’Article 27 (3) de la Charte des Nations Unies afin que quiconque étant partie à un différend s’abstienne de voter.  Enfin, afin de renforcer le lien entre l’Assemblée et le Conseil, il a une nouvelle fois proposé qu’à la fin de chaque année, le Président de l’Assemblée générale convoque un dialogue à mi-parcours, au cours duquel seraient examinées les activités et les résolutions du Conseil, sans préjudice des informations contenues dans le rapport. 

M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a déclaré que les membres de l’Assemblée générale ont la responsabilité de demander des comptes aux membres du Conseil de sécurité tant pour leurs actions que pour leur inaction.  Toutefois, bien que le Conseil ait respecté son engagement d’adopter son rapport d’ici au 30 mai, le délai a été repoussé « jusqu’à la onzième heure », a-t-il tancé.  Seuls huit membres du Conseil ont soumis leurs rapports mensuels en 2022, a-t-il relevé en déplorant une « tendance claire ».  Le représentant a jugé profondément décevant que certains membres permanents ne fassent preuve « d’aucun sens des responsabilités » en ce qui concerne les rapports d’évaluation mensuels, ajoutant « qu’ils ne devraient pas tenir leur privilège pour acquis ».  Cette année encore, malgré des demandes répétées des États Membres, le Conseil n’a pas réussi à produire un rapport annuel analytique allant au-delà du nombre de réunions et de décisions adoptées.  Abordant la « désunion croissante au sein du Conseil », le représentant s’est inquiété de l’incapacité de celui-ci à trouver un consensus sur les questions essentielles au maintien de la paix et de la sécurité internationales, notamment s’agissant de l’Ukraine.  Alors qu’en 2021, le Conseil a produit 57 résolutions et 24 déclarations présidentielles, en 2022, ces chiffres sont tombés à 54 résolutions et 7 déclarations présidentielles.  Une tendance qui s’applique également au droit de veto, utilisé une seule fois en 2021, contre quatre l’an dernier.  « Ce manque d’unité du Conseil est le reflet de la fracture géopolitique à laquelle le monde est confronté aujourd’hui », a-t-il constaté, tout en faisant remarquer que les membres permanents sont capables d’unité lorsqu’il s’agit de protéger leurs propres privilèges. 

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a demandé un rapport annuel exhaustif et analytique qui mette en avant les défis émergents pour la paix et la sécurité internationales et montre ce que le Conseil de sécurité a fait pour réduire les menaces.  Le règlement intérieur ne prévoit pas de réunions à huis clos, a-t-il fait remarquer, estimant que la tenue de telles séances sape la transparence et la reddition de comptes en faisant fi de ce que demande la Charte, à savoir que le Conseil de sécurité agisse dans l’intérêt de tous les États Membres.  Après avoir appelé à ajouter 10 ou 11 membres non permanents pour rendre la représentativité du Conseil plus équitable et proportionnée, le délégué a considéré que les dispositifs antiterroristes du Conseil doivent devenir plus complets et équitables, en incluant notamment le terrorisme d’extrême droite.  En outre, le Conseil doit distinguer terrorisme et lutte légitime pour le droit à l’autodétermination, a insisté le représentant, en évoquant à ce propos la Palestine et l’État du Jammu-et-Cachemire.  Sur ce dernier point, il a déclaré que le Conseil de sécurité ayant échoué à faire appliquer ses résolutions sur la question, l’Inde continue d’occuper cet « État » en déployant un soldat pour huit Cachemiriens, « hommes, femmes et enfants ».  Le Conseil de sécurité doit permettre à ce peuple d’exercer son droit à l’autodétermination, il en va de sa légitimité, a-t-il conclu. 

Mme MARISKA DWIANTI DHANUTIRTO (Indonésie) a indiqué qu’en tant qu’important contributeur de troupes et de forces de police aux forces de maintien de la paix de l’ONU, son pays se félicite des réunions régulières concernant l’évolution des situations affectant les opérations concernées.  Elle a également salué l’amélioration de la représentation des femmes au Conseil de sécurité en tant qu’informatrices.  Toutefois, malgré les apports de nombreux États Membres, la présentation du rapport annuel suit les mêmes modalités que les précédents. Selon la déléguée, le rapport ne devrait pas être une simple compilation pour la mémoire institutionnelle, il devrait avoir une composante analytique.  Des améliorations pourraient être apportées tant sur le format que sur le mécanisme du rapport, afin d’améliorer la transparence et l’interaction efficace avec des États Membres.  La déléguée a proposé d’examiner la possibilité d’un rapport à mi-parcours ou d’une séance de dialogue informelle, estimant que cela permettrait une interaction plus substantielle au-delà de la discussion annuelle de routine.  Ces interactions sont cruciales sur les questions où le Conseil est incapable de mettre en œuvre efficacement ses propres résolutions ou lorsqu’un veto est opposé.  À ce sujet, elle a espéré que la résolution de l’Assemblée générale sur l’initiative du veto permettra de construire un travail plus transparent et plus efficace au Conseil.  Enfin, après avoir plaidé en faveur d’un engagement accru du Conseil avec les organisations régionales et sous-régionales, elle a souligné la nécessité d’une réforme du Conseil pour préserver et renforcer le multilatéralisme. 

M. RENÉ ALFONSO RUIDÍAZ PÉREZ (Chili) a reconnu que les événements majeurs de 2022 ont entraîné une forte augmentation du nombre de réunions non programmées du Conseil de sécurité, qui sont passées de 34 en 2021 à 85 l’an dernier. Il s’est dit surpris que le nombre projets de résolution adoptés à l’unanimité ait diminué au cours de cette période, passant de 81,4% en 2021 à 66% en 2022.  À cet égard, il a attiré l’attention sur l’urgence de la situation en Haïti, seul nouveau régime de sanctions établi l’an dernier par le Conseil, tout en notant que celui-ci n’a pas pris d’autres mesures pour soulager les souffrances de ses habitants.  Qui plus est, le rapport annuel aurait dû selon lui être plus analytique et exhaustif.  Le délégué a exprimé son inquiétude et sa déception face au recours au veto à quatre reprises par des membres permanents du Conseil.  Le droit de veto doit être utilisé de manière responsable et circonspecte par les membres permanents, a-t-il insisté, en ajoutant qu’une réforme du Conseil est nécessaire. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) s’est félicité qu’en 2022, après avoir été bloqué par l’utilisation du droit de veto sur la situation de l’Ukraine, le Conseil ait décidé, pour la première fois en quarante ans, de déléguer à l’Assemblée générale la responsabilité principale qui lui avait été conférée en matière de paix et de sécurité, ce qui s’est traduit par l’adoption de cinq résolutions lors d’une session extraordinaire d’urgence.  Selon lui, le dossier de l’Ukraine exemplifie une relation de complémentarité entre les deux instances, qui s’est déjà illustrée sur les dossiers du Myanmar et de la Syrie, entre autres.  Pour permettre une action « rapide et efficace », une grande cohésion du Conseil s’impose de toute urgence, a-t-il toutefois estimé, affirmant attendre avec impatience une prolongation de l’aide transfrontière en Syrie. Il a déploré que, dans d’autres situations, notamment au Soudan, l’action du Conseil soit à peine proportionnée à l’ampleur de la catastrophe sur le terrain.  « Sur les questions thématiques, en particulier le climat, le Conseil n’a pas été en mesure d’agir, tandis que l’Assemblée générale est montée en puissance en faisant de l’environnement sain un droit de l’homme en 2022. »  Le représentant a jugé que d’autres initiatives sont nécessaires pour réduire la présence prépondérante du veto dans les travaux de l’ONU, parmi lesquelles le Code de conduite du Groupe ACT. 

M. AHMAD FAISAL MUHAMAD (Malaisie) a regretté que la présentation du rapport annuel du Conseil de sécurité soit devenue, au fil des ans, un exercice rituel consistant à fournir un simple calendrier des activités du Conseil, « sans évaluation ni analyse ».  L’incapacité du Conseil à parvenir à un consensus sur des conflits de longue date, tels que la question palestinienne, est à ses yeux le reflet de la « profonde division » qui règne en son sein.  Une telle « absence d’action » devrait selon le représentant être intégrée dans le rapport annuel, assortie d’explications des positions respectives des membres du Conseil.  Tout en notant les défis posés par l’exigence d’unanimité, le délégué a encouragé les membres du Conseil à présenter leurs évaluations mensuelles en temps opportun. Il s’est quand même félicité de l’augmentation du nombre de réunions d’information mensuelles de la présidence, de débats publics et de réunions selon la formule Arria.  Le représentant a également salué la tenue du premier débat officiel de l’Assemblée générale sur l’utilisation du droit de veto par les membres permanents du Conseil. 

M. JOCHEN HANS-JOACHIM ALMOSLECHNER (Autriche) a estimé que le rapport est l’un des outils clefs de la collaboration entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale.  Il est l’outil par excellence de la transparence et de la responsabilité vis-à-vis de l’ensemble des pays, a-t-il précisé, prenant note des demandes d’amélioration exprimées au cours du débat.  Un compte rendu plus complet, approfondi et analytique des travaux du Conseil de sécurité, y compris des détails sur les projets de résolution qui n’ont pas été adoptés, serait crucial pour que l’Assemblée générale puisse mieux saisir les dynamiques et processus au sein du Conseil, a souligné le représentant.  Vu les nombreuses crises qui interpellent le monde, notamment en Afrique, au Moyen-Orient et en Ukraine, il a trouvé déplorable, qu’en raison à la fois de la politisation des débats et de l’exercice abusif du droit de veto, le Conseil de sécurité n’ait pas pu réagir ou agir de manière claire. Ces impasses sont inacceptables, a-t-il jugé, saluant toutefois le fait que « le rapport indique noir sur blanc que quatre projets de résolution relatifs à l’acte d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine n’ont pas été adoptés par le Conseil ».  Le délégué autrichien a proposé qu’à l’avenir le rapport comprenne un chapitre complet sur les droits de veto exercés au cours de l’année écoulée. 

Mme SAŠA JUREČKO (Slovénie) s’est dite impressionnée par l’augmentation de la participation des femmes au Conseil de sécurité.  Elle a également souligné l’importance accordée en 2022 par le Conseil aux principales questions thématiques, notamment la protection des civils, la prévention des conflits et le maintien de la paix, les enfants et les conflits armés, ainsi que la coopération avec les organisations régionales.  Elle a cependant souhaité que le Conseil continue de s’attaquer aux facteurs de conflit dans un sens plus large, ce qui, selon elle, peut se faire en axant les discussions sur des sujets horizontaux tels que le lien entre les changements climatiques et la sécurité ou la sécurité alimentaire, ou en intégrant ces questions dans les situations de chaque pays. Pour améliorer la transparence, la représentante a estimé que l’utilisation des différents outils en ligne, comme le programme de travail interactif, serait un pas dans la bonne direction.  Enfin, rappelant l’importance que son pays accorde à l’esprit de compromis, elle a noté que, malgré la chute du nombre d’adoptions consensuelles de résolutions, près de 90% des votes se sont conclus positivement l’an dernier.  Nous espérons que ce fait démontre qu’un niveau de confiance dans les approches multilatérales demeure, a-t-elle ajouté, non sans rappeler que la Slovénie rejoindra le Conseil en janvier prochain en tant que membre non permanent. 

Mme PASCALE CHRSTINE BAERISWYL (Suisse) a regretté que les 200 pages du rapport annuel ne transmettent qu’imparfaitement l’impact qu’ont eu des bouleversements politiques majeurs, comme l’agression russe contre l’Ukraine ou l’escalade de la violence dans un grand nombre de pays, qui ont entraîné le doublement des réunions organisées à la demande des membres. Il a également déploré l’utilisation du veto à quatre reprises en 2022 et le blocage qui en a découlé dans le cas de l’Ukraine et de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), notant que l’Assemblée générale est entrée en action à chaque fois, que ce soit dans le cadre d’une séance extraordinaire d’urgence ou de séances nouvellement mandatées.  Dans le cas de la Syrie, il a salué le fait que le Conseil ait pu, au deuxième essai, renouveler en juillet 2022 la résolution sur l’aide transfrontière.  Au-delà de ces difficultés, le représentant a fait état de progrès, citant en particulier les résolutions 2653 (2022), qui vise les bandes criminelles en Haïti, et 2664 (2022), qui a créé une exemption humanitaire permanente à l’application des régimes de sanctions. S’agissant des méthodes de travail du Conseil, il s’est félicité de la reprise d’un mode de fonctionnement postpandémique en 2022 et a souhaité que l’organe fasse preuve d’une plus grande transparence, par exemple en s’accordant régulièrement sur des éléments à la presse à la suite de réunions à huis clos.  Pour finir, il a appelé tous les États Membres à souscrire au Code de conduite proposé par le Groupe ACT. 

M. MATEUSZ SAKOWICZ (Pologne) a reconnu que l’opinion publique mondiale a du mal à comprendre pourquoi le Conseil de sécurité est incapable de s’acquitter de son mandat de maintenir la paix et de la sécurité mondiales, particulièrement depuis l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie.  La faiblesse apparente des mécanismes de protection de la paix et la sécurité ne fait selon lui qu’exacerber les doutes sur le multilatéralisme.  Il est donc impératif d’appuyer le renforcement de la diplomatie multilatérale, y compris le Conseil de sécurité, en la rendant plus transparente, représentative et responsable.  S’il a souligné que le Conseil a été incapable de réagir face aux atrocités de la guerre en Ukraine, le représentant a fait remarquer le rôle joué par l’Assemblée générale, qui a adopté six résolutions condamnant l’agression russe et ses conséquences multiformes.  Il s’est félicité de l’initiative de la résolution 76/262 sur le droit de veto, estimant qu’elle a contribué à renforcer le rôle de l’Assemblée générale et à accroître la transparence du processus décisionnel. 

Nous devons maintenant accroître la représentation géographique du Conseil de sécurité et améliorer ses méthodes de travail, a considéré le représentant.  Il a par ailleurs regretté les tentatives de la Fédération de Russie d’exploiter le Conseil comme une plateforme de désinformation et de propagande dans le but de « fatiguer » la communauté internationale face à son agression contre l’Ukraine, qui constitue un mépris flagrant de la Charte des Nations Unies.  « En tant qu’États Membres de l’ONU, le fait que le Conseil soit inactif ou incapable de s’acquitter de ses fonctions ne devrait pas nous décourager mais plutôt servir d’impulsion à la défense de la Charte. » 

M. YASEEN LAGARDIEN (Afrique du Sud) a considéré que le rapport dans sa forme actuelle n’est qu’un procès-verbal des travaux du Conseil de sécurité.  Ainsi a-t-il souhaité un document plus analytique qui explique comment procède le Conseil dans l’exercice de son mandat.  Il a constaté que le Conseil échoue toujours, en 2022, à progresser sur le traitement de la question de Palestine ainsi qu’à refléter les réalités contemporaines en matière de paix et de sécurité internationales.  Selon son pays, les membres élus du Conseil de sécurité doivent être en mesure de jouer un rôle plus essentiel afin de rendre le Conseil plus transparent et efficace.  Enfin, il a appelé à l’instauration d’une relation plus étroite entre le Conseil de sécurité et l’Union africaine, conformément à la Déclaration présidentielle adoptée pendant la présidence sud-africaine. 

M. FABIÁN ODDONE (Argentine) a regretté qu’à plusieurs reprises l’an dernier, le Conseil de sécurité ait été divisé et incapable d’apporter des réponses aux nombreuses crises et conflits qui ont nécessité une action immédiate.  Ce faisant, le Conseil a échoué à remplir son mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales, « avec des conséquences dévastatrices et des souffrances humaines indicibles ».  Le présent débat est à ses yeux essentiel car il permet aux États Membres de tenir le Conseil pour responsable de ses actions et, plus important encore, pour responsable des moments où il n’a pas su agir. Constatant que l’examen du rapport annuel du Conseil est devenu un simple exercice rituel, le délégué a encouragé celui-ci à fournir des comptes rendus plus analytiques de ses travaux, y compris des détails sur les projets de résolution qui n’ont pas été adoptés et sur l’utilisation du veto.  En outre, le rapport devrait selon lui analyser l’état de chaque conflit ainsi que l’impact de l’action et des résolutions du Conseil.  Le renforcement des relations entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité sur les questions liées au maintien de la paix et de la sécurité internationales est une avancée positive, tout comme l’adoption de la résolution 76/262 de l’Assemblée sur l’usage du veto par les membres permanents du Conseil. « Pour des millions de personnes dans le monde, le Conseil de sécurité est le visage de l’ONU », a-t-il noté, avant de souligner l’importance que les efforts déployés par le Conseil soient efficaces et conformes aux objectifs de la Charte. 

M. MICHAEL ALEXANDER GEISLER (Allemagne) a notamment soutenu que, bien que le Conseil de sécurité reste trop divisé sur nombre de questions urgentes, « il reste capable d’agir ».  Mais le fait est que sa crédibilité est sapée par l’exercice abusif du veto par la Russie, a-t-il ajouté.  Enfin, le délégué a encouragé les présidents du Conseil à inclure davantage d’informations de fond dans les prochaines éditions du rapport, cela pour le rendre plus analytique et agréable à lire. 

M. NGOC THUY DO (Viet Nam) a salué le fait que, face aux défis multiples auxquels il a été confronté en 2022, le Conseil de sécurité ait continué de faire preuve d’une détermination louable.  Avec 54 résolutions, 7 déclarations présidentielles et 64 communiqués de presse adoptés, le Conseil a réussi à parvenir à des accords sur des questions importantes, allant des questions thématiques aux affaires régionales et au renouvellement en temps voulu des missions de maintien de la paix et des missions politiques spéciales.  Il s’est également félicité que les membres du Conseil se soient accordés sur de nouvelles initiatives importantes, telles que le mécanisme humanitaire établi par la résolution 2664 (2022).  À cet égard, il a souligné la contribution « inestimable » des membres non permanents au fonctionnement du Conseil.  Ils ajoutent de la diversité au sein de l’organe en apportant des perspectives et des idées régionales au processus décisionnel et en veillant à ce qu’un large éventail d’intérêts et de problèmes soient pris en compte et traités, a-t-il fait valoir, souhaitant que cela soit mieux reflété dans les rapports annuels du Conseil.

D’un autre côté, le délégué a constaté que le Conseil n’a pas réussi à trouver des solutions efficaces à divers conflits de longue date ou émergents et à des points chauds dans différentes régions.  Pour contribuer à renforcer l’efficacité du Conseil, il a appelé à une solidarité et une unité accrues entre les membres de l’organe.  Il a aussi demandé au Conseil d’accorder plus d’attention aux questions et défis émergents, en particulier les problèmes de sécurité non traditionnels, comme les changements climatiques et leurs impacts sur la paix et la sécurité.  Il a d’autre part souhaité que le Conseil renforce ses consultations avec les organisations et les pays concernés, notamment ceux liés à l’ordre du jour et ceux qui fournissent du personnel militaire et de police aux missions de maintien de la paix.  Enfin, il a plaidé pour une réforme globale de la composition et des méthodes de travail du Conseil. 

Mme SOPHEA EAT (Cambodge) a souhaité que le rapport annuel du Conseil soit plus analytique et substantiel, qu’il mette en exergue les défis rencontrés, ses recommandations et ses évaluations sur les questions mondiales importantes. Compte tenu des menaces croissantes à la paix et à la sécurité internationales dans un monde en pleine mutation, il est crucial que le Conseil explore les moyens de renforcer ses mandats et sa transparence tout en évitant l’usage « sans issue » du droit de veto. La représentante a demandé au Conseil d’accroître le nombre de ses réunions publiques afin de donner davantage aux États Membres l’occasion de partager leurs points de vue et de proposer des solutions aux problèmes complexes qui nous concernent tous.  Elle a en outre demandé que le Conseil mette davantage l’accent sur les questions relatives à la réalisation des objectifs de développement durable, tout en s’efforçant de renforcer les efforts de prévention des conflits. 

M. ANDREAS HADJICHRYSANTHOU (Chypre), après avoir souhaité un rapport plus analytique, y compris sur l’incidence des mesures prises pour résoudre les conflits, a salué les deux résolutions adoptées par le Conseil de sécurité concernant la situation de son pays qui ont prolongé le mandat de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP), conformément à la résolution 186 (1964).  La question de Chypre est l’un des conflits les plus anciens à l’ordre du jour de l’ONU, a-t-il rappelé.  Ce conflit reste non résolu en raison du « mépris flagrant » de nombreuses résolutions et décisions pertinentes du Conseil, « sans que cela ne donne lieu à la moindre conséquence ».  Dans ce contexte, il est impératif que le Conseil de sécurité fasse preuve de leadership, a estimé le délégué, à la fois en faisant appliquer ses propres résolutions et en tenant pour responsables ceux qui en violent les dispositions. 

M. ABDULAZIZ A. M. A. ALAJMI (Koweït) a regretté que le rapport annuel du Conseil de sécurité ne comporte pas d’analyses ni d’informations reflétant les aspirations des États Membres dans la mise en œuvre des résolutions de l’ONU.  Il a déploré l’inscription pendant de longues périodes de certaines questions à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, dont certaines, comme la question palestinienne, depuis plus de soixante-quinze ans.  Face aux limites qui empêchent le Conseil s’acquitter pleinement de ses responsabilités de maintenir la paix et la sécurité internationales, le délégué a appuyé les efforts déployés par les États Membres en vue d’améliorer ses méthodes de travail et d’entreprendre des réformes.  Dans l’intervalle, il a réaffirmé l’adhésion de son pays à l’initiative franco-mexicaine sur le veto.  Il a salué également les évolutions positives récentes concernant le processus de négociations intergouvernementales en vue de la réforme du Conseil, qui s’est notamment doté d’un site Web. 

M. Bassam Sabbagh (Syrie) a souligné la nécessité de mettre l’accent sur le respect des méthodes de travail du Conseil de sécurité afin d’éviter leur utilisation sélective, fondée sur les intérêts particuliers de certains membres.  Selon lui, le Conseil doit agir de manière décisive pour remplir son mandat de maintenir la paix et la sécurité internationales en ce qui concerne des questions cruciales, comme la question palestinienne et l’occupation par Israël du Golan syrien et du sud du Liban.  Nous devons réformer le Conseil de sécurité afin de parvenir à une répartition géographique équitable et à une représentation adéquate des pays en développement, a ensuite déclaré le représentant.  Selon lui, la composition du Conseil rend impérative une communication professionnelle avec les États non-membres sur les questions les concernant et tenant compte de leurs préoccupations.  La réforme du système des porte-plumes pourrait également contribuer à améliorer l’efficacité des travaux du Conseil de sécurité, a-t-il relevé, et prévenir son utilisation « abusive » dans le but de violer la souveraineté des États. Le représentant a plaidé en faveur d’une rationalisation des sessions répétitives du Conseil sans nécessité urgente, fondées selon lui sur la volonté de certains de ses membres de faire pression sur le pays concerné.  Qui plus est, le Conseil devrait limiter le recours aux sanctions et être attentif à leur impact humanitaire sur les populations vulnérables. 

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a déclaré que le monde a besoin de toute urgence d’un Conseil de sécurité adapté à son objectif: un Conseil qui soit plus représentatif, transparent, efficace, inclusif et responsable devant le plus grand nombre.  Plus la réforme est reportée, plus nous risquons de saper la légitimité du Conseil et de l’ONU dans son ensemble, a-t-il averti.  Le représentant a estimé qu’il manque au rapport le type d’analyse autocritique qui fournirait une base pour améliorer le fonctionnement du Conseil. Il a suggéré que la section narrative introductive soit élargie et vise à évaluer l’efficacité du Conseil dans l’accomplissement de ses tâches.  Il a ensuite appelé à renforcer l’engagement du Conseil avec les organisations régionales, la société civile et les non-membres du Conseil. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a déclaré que depuis le « coup d’État militaire illégal de février 2021 » dans son pays, le Conseil de sécurité a publié sept déclarations à la presse et une déclaration présidentielle.  En outre, en décembre 2022, le Conseil de sécurité a franchi une étape historiquement significative en adoptant la toute première résolution sur le Myanmar, a-t-il ajouté.  Le représentant a cependant noté que si la résolution décrit la détérioration de la situation au Myanmar ainsi que les assauts violents et incessants de la junte militaire contre les civils, elle ne peut changer la donne sur le terrain.  Pire, au cours de ces deux ans et demi, presque chaque déclaration du Conseil a été suivie d’une violence plus brutale de la junte militaire, a-t-il souligné.  Selon lui, face aux brutalités visant les civils, y compris des enfants, « nous avons besoin d’une action décisive de la part du Conseil de sécurité pour tout simplement sauver la vie des habitants du Myanmar ».  Parce que les déclarations et les condamnations sont insuffisantes, il a jugé indispensable que les efforts de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour trouver une issue à la crise soient renforcés par un engagement plus franc du Conseil.  Le délégué a donc appelé celui-ci à prêter une attention particulière aux attentes et aux aspirations du peuple du Myanmar et à prendre des mesures concrètes de suivi de la mise en œuvre de la résolution 2669(2022).  

M. ARIEL RODELAS PEÑARANDA (Philippines) a indiqué que l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité sont des organes complémentaires.  Ils peuvent avoir des mandats différents, mais ils partagent le même objectif, a—t-il souligné, mentionnant le maintien de la paix et de la sécurité internationales et de l’ordre mondial.  Alors que le rapport complet du Conseil de sécurité renforce la responsabilité du Conseil, il reste encore beaucoup à faire pour s’assurer que les contributions des États Membres soient dûment prises en compte, a-t-il estimé.  Au sujet de l’initiative du veto qui veut que les débats soient portés à l’Assemblée générale quand un veto est utilisé, le délégué a relevé que l’Assemblée est ainsi devenue un forum pour exprimer des sentiments, mais aucun résultat concret n’est obtenu. 

Il a souligné que le rapport du Conseil de sécurité peut également servir de plateforme de dialogue, puisque sa présentation permet aux États Membres de poser des questions, de demander des éclaircissements et de proposer des solutions sur les questions de paix et de sécurité internationales.  Il a appelé à continuer d’identifier des moyens de renforcer davantage le rôle, l’autorité, et l’efficacité de l’Assemblée générale, afin qu’elle puisse s’associer au Conseil de sécurité pour la mise en œuvre efficace des résolutions et initiatives, et afin de respecter l’engagement de l’ONU à maintenir la paix, la sécurité et la stabilité internationales.  Il a enfin réitéré le soutien des Philippines à la poursuite d’efforts, par le biais de négociations intergouvernementales, afin de réformer le Conseil de sécurité pour le rendre plus ouvert, représentatif, responsable et qu’il reflète au mieux les réalités et les aspirations géopolitiques de la communauté internationale.

M. EDER ROJAS (Pérou) s’est félicité que le rapport aborde des questions émergentes d’une grande importance, telles que les liens entre les conflits et l’insécurité alimentaire ou encore la technologie.  Il a aussi salué la présence d’informations sur la mise en place d’un régime de sanctions pour Haïti, question à laquelle il a dit attacher une importance particulière compte tenu de sa dimension régionale.  De même, il s’est réjoui de l’inclusion de statistiques, qui font apparaître l’augmentation des réunions imprévues tenues à la demande des membres du Conseil.  En tant que pays engagé en faveur de l’égalité des sexes, le Pérou salue également l’inclusion de données désagrégées sur la participation des femmes, a-t-il ajouté, se disant encouragé de voir qu’en 2022, 46% des présentations informatives ont été effectuées par des femmes, contre 44% en 2021 et 34% en 2020.  Le représentant a relevé avec satisfaction que, pour la première fois, le mot « veto » a été utilisé dans l’introduction et que des informations pertinentes ont été fournies sur le nombre de fois où ce mécanisme a été utilisé.  Regrettant que l’utilisation inappropriée du droit de veto empêche le Conseil d’agir malgré l’existence de besoins pressants, il a souhaité qu’un chapitre sur le veto soit inclus afin de détailler les cas dans lesquels il a été utilisé et présenter des statistiques à ce sujet.  Cela permettrait selon lui de mieux comprendre les obstacles qui entravent la prise de décision et serait une première étape dans les efforts visant à surmonter les divisions et à promouvoir la coopération au sein du Conseil. 

M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (Iran) a déploré que le rapport du Conseil de sécurité ne fournisse pas d’informations substantielles et analytiques sur les tendances en matière de paix et de sécurité internationales. Par conséquent, l’Assemblée générale ne peut pas procéder à une évaluation complète et significative de la performance du Conseil, a-t-il analysé.  La crédibilité du Conseil de sécurité nécessite, selon lui, le rejet ferme de toute tentative de manipulation de celui-ci pour poursuivre des intérêts politiques nationaux.  À cet égard, il a fustigé le fait que le Conseil reste « totalement silencieux » face au « régime d’apartheid israélien » et ses pratiques illégales dans les territoires palestiniens occupés.  Le régime israélien commet des atrocités au vu et au su de la communauté internationale en sachant bien qu’il n’en subira aucune conséquence, a-t-il accusé. De plus, le retrait unilatéral des États-Unis du Plan d’action global commun, en 2018, ainsi que l’imposition ultérieure de sanctions unilatérales contre l’Iran, constituent à ses yeux des violations manifestes de la résolution 2231 (2015).  Enfin, le délégué a souligné l’importance, pour le Conseil, de s’abstenir de traiter de questions qui ne constituent pas une menace pour la paix et la sécurité internationales, notamment s’agissant de l’imposition de sanctions. 

M. MATÍAS ANDRÉS EUSTATHIOU DE LOS SANTOS (Uruguay) a souhaité que le rapport du Conseil soit présenté un peu plus tôt dans l’année, suggérant le mois de janvier.  Il a exhorté la communauté internationale à rechercher les voies et moyens pour rétablir la paix et la sécurité en Haïti.  Il a salué le travail abattu par le Conseil en 2022, mais a dénoncé l’intransigeance des membres de cet organe qui empêche le Conseil d’agir.  Il a souhaité que les prochains rapports soient davantage analytiques que descriptifs. 

Droits de réponse

Le délégué de l’Inde a indiqué au délégué du Pakistan que la seule réalisation dont son pays peut se targuer est « l’exportation de ses terroristes » et ses politiques de relégation au second plan de nombre de minorités ethniques et religieuses.  Le Jammu-et-Cachemire est un territoire indien, quoi qu’en dira le Pakistan dans sa réponse, a-t-il affirmé.

Le délégué du Pakistan a qualifié d’erronée et honteuse la position de l’Inde sur le Jammu-et-Cachemire, ce territoire faisant l’objet d’un litige et qui ne fait pas partie de l’Inde de manière incontestable.  « Des résolutions du Conseil de sécurité sur cet « État » sont en attente de mise en œuvre depuis des décennies. »  Le Conseil doit prendre acte de l’intransigeance de l’Inde et agir dans le sens des intérêts des Cachemiriens, a ajouté le délégué, qui a rappelé que 9 000 forces indiennes sont déployées en permanence sur ce « territoire occupé » pour réprimer leur droit à l’autodétermination.  ´

LA RESPONSABILITÉ DE PROTÉGER ET LA PRÉVENTION DU GÉNOCIDE, DES CRIMES DE GUERRE, DU NETTOYAGE ETHNIQUE ET DES CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ - (A/77/910)

Suite du débat sur la question

Mme MELINDA VITTAY (Hongrie) a plaidé en faveur d’une orientation plus concrète des rapports sur ce sujet, incluant des exemples de bonnes pratiques, ainsi qu’une analyse des tendances en matière de risques afin d’aider les États Membres dans leurs efforts de prévention.  Elle a également appelé de ses vœux une plus grande implication de la Commission de consolidation de la paix dans les questions relatives à la responsabilité de protéger, notamment en aidant les États à passer d’une situation de conflit et de crimes d’atrocité à une paix durable en s’attaquant aux indicateurs de développement sous-jacents et en conseillant le Conseil de sécurité sur ces questions.  La déléguée a également encouragé tous les États Membres à nommer un point focal national pour la responsabilité de protéger et à rejoindre le réseau mondial des points focaux dédiés à cette question, précisant que 61 États et deux organisations régionales l’avaient déjà fait.  En vue de disposer d’un système de prévention efficace, elle a appelé à définir ensemble les signes d’alerte précoce et les mesures à prendre pour y répondre.  Enfin, elle a relevé la corrélation entre la destruction du patrimoine culturel et l’escalade des conflits, encourageant les États à criminaliser les atteintes à ce patrimoine. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a souligné que le peuple du Myanmar a été victime de crimes atroces répétés commis par la junte militaire illégale au pouvoir, l’armée menant sans relâche une campagne de violence voire une campagne de terreur contre ce peuple.  Mais comme la junte est incapable de contenir la résistance à l’échelle nationale, elle a opté pour les assassinats ciblés de civils comme tactique militaire, a-t-il fait savoir en dénombrant près de 3 700 personnes tuées par les forces de la junte. Le délégué a affirmé que le peuple du Myanmar est déterminé à mettre fin à cette junte inhumaine et à reconstruire son pays en rétablissant l’état de droit, la démocratie et le respect des droits humains dans le cadre du système de gouvernance fédéral qui garantit l’autodétermination des peuples autochtones.  Pour réaliser un développement durable dans ce contexte, « nous avons besoin du soutien des États Membres de l’ONU », a-t-il rappelé.  Le représentant a en outre exhorté les États Membres à ne pas vendre d’armes aux « militaires inhumains », à ne pas financer les campagnes de terreur par l’armée du Myanmar contre son propre peuple et à mettre fin à l’impunité militaire au Myanmar en tenant responsables les auteurs de graves crimes internationaux.

M. DAVID ABESADZE (Géorgie) a fait valoir que le débat d’aujourd’hui démontre l’impact positif de l’institutionnalisation du principe de la responsabilité de protéger au sein de l’Organisation.  Compte tenu du lien « inextricable » entre la paix et le développement, il s’est dit convaincu que la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 peut atténuer le risque d’atrocités.  Le délégué a dénoncé les crimes de guerre commis par la Fédération de Russie dans son propre pays ainsi que « les violations des droits humains qui perdurent dans les régions d’Abkhazie et de Tskhinvali illégalement occupées par la Russie ». De même, les souffrances infligées par l’agression à grande échelle de la Russie contre l’Ukraine sont profondément alarmantes et pourraient constituer des crimes de guerre.  Pour sa part, la Géorgie demeure résolue à renforcer son mécanisme national des droits humains et reste attachée à la coopération dans le cadre des instruments internationaux existants.  Le délégué a exprimé en terminant son soutien au Nouvel Agenda pour la paix proposé par le Secrétaire général, y voyant une occasion de promouvoir la paix et de prévenir les conflits.

M. MICHAEL ALEXANDER GEISLER (Allemagne) a estimé que pour intégrer efficacement le développement économique dans les efforts de prévention des atrocités, il faut des stratégies globales contre les moteurs interconnectés de la violence, ce qui pointe sur la nécessité de promouvoir l’état de droit, l’établissement des responsabilités, la protection des droits humains et la lutte contre la corruption.  L’Allemagne, a affirmé le représentant, est la plus grande contributrice à la coopération au développement et en tant que cofacilitatrice du Sommet de l’avenir, elle souligne l’importance de Notre Programme commun et du Nouvel Agenda pour la paix qui offre une occasion de faire mieux en matière de prévention, de compréhension des facteurs de risque et de mise en œuvre de l’objectif 16 du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Investir dans des institutions fortes, des mesures de prévention et des systèmes d’alerte rapide n’est pas seulement un impératif moral mais bien un moyen rentable d’éviter les conflits.  En allouant stratégiquement des ressources à la prévention et au développement durable, l’on peut réduire les coûts humains et économiques de la réaction aux crises. Il faut donc s’améliorer en termes de coopération internationale, de partage des connaissances et de renforcement des capacités pour accroître la faculté commune de prévenir, détecter et répondre aux signes avant-coureurs d’atrocités et ce, en accordant toute l’attention qu’ils méritent aux programme « Femmes et la paix et la sécurité » et « Jeunes et la paix et la sécurité ».

M. YOUSSOUF ADEN MOUSSA (Djibouti) a rappelé que l’Assemblée générale se penchait pour la sixième fois sur la question de la responsabilité de protéger et que cette réunion était la deuxième depuis l’adoption de la résolution 75/277 (2021) qui avait inscrit la question à l’ordre du jour de l’Assemblée. Évoquant le dernier rapport du Secrétaire général sur le sujet, il a souligné le fait que le sous-développement accroissait les risques de crimes de masse.  Liant la souveraineté des États et leur responsabilité de protéger, il a estimé que la mise en œuvre de ce concept requérait une collaboration internationale aux niveaux bilatéral, régional et multilatéral. 

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a estimé que les atrocités commises par l’armée russe dans les villes et villages d’Ukraine rappellent le génocide ukrainien connu sous le nom d’Holodomor, qui a été perpétré par le « prédécesseur » de la Russie en 1932-1933.  Dans un vain effort pour empêcher la contre-offensive de l’Ukraine sur le fleuve Dniepr, les occupants russes ont délibérément détruit le barrage de la centrale hydroélectrique de Kakhovka le 6 juin, a-t-elle dénoncé, causant « la plus grande catastrophe écologique et humanitaire en Europe depuis des décennies ».  La représentante a jugé qu’en refusant à l’ONU l’accès aux résidents inondés et qu’en planifiant « probablement » la destruction de la centrale nucléaire de Zaporijia, la Russie démontre clairement que son objectif, en envahissant l’Ukraine, était l’anéantissement des Ukrainiens de l’Ukraine en tant que nation.  Tandis que nous parlons, la Russie poursuit activement le « génocide du peuple ukrainien », a-t-elle affirmé.  Pour freiner efficacement les actions de la Russie, il est impératif de poursuivre sa démilitarisation et de tenir ses dirigeants militaires et politiques pour responsables de leurs crimes.  Encore une fois, l’Assemblée générale doit assumer ce rôle en créant un tribunal spécial pour tenir la Russie pour responsable du crime d’agression contre l’Ukraine, a insisté la représentante, estimant qu’il ne s’agit pas seulement de sauver des vies ukrainiennes.  « Il s’agit d’éviter des catastrophes mondiales et d’empêcher d’autres génocides, crimes de guerre et crimes contre l’humanité. »

Mme JIANG HUA (Chine) a fait valoir que la mise en œuvre de la responsabilité de protéger est tributaire de la prévention et du traitement des causes profondes des conflits.  La réalisation des ODD et du Programme 2030 constituent selon elle des outils importants à cet égard. Toutefois, la responsabilité principale de la protection des civils incombe aux États, a-t-elle rappelé, avec la coopération de la communauté internationale et sur la base de la Charte des Nations Unies.  Selon la représentante, l’aide au développement fournie par la communauté internationale devrait avoir pour objectif d’aider les pays concernés à mettre en œuvre leur stratégie de développement en mettant l’accent sur leurs besoins spécifiques plutôt que d’attacher des conditions « arbitraires ». 

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a estimé que sans réforme du Conseil de sécurité, la « realpolitik » de l’ordre international va se poursuivre et miner la mise en œuvre du principe de la responsabilité de protéger.  Il a rappelé que selon ce concept, l’État est le premier responsable de ses citoyens et que l’intervention étrangère armée ne vient qu’en dernier recours.  Il a mis en garde contre la tentative de violer la souveraineté nationale en application de ce principe, soulignant que même le Conseil de sécurité ne semble pas souvent unanime sur l’opportunité d’intervenir dans des États tiers.  Pour le représentant, il est toutefois clair qu’il n’y a pas d’excuse justifiant les crimes contre l’humanité ou le génocide.  À son avis, la responsabilité de protéger est un projet ambitieux de la communauté internationale qui ne doit pas se transformer en « permis d’intervenir », a-t-il conclu.

M. PABLO JOSÉ GÓMEZ (Irlande) a rejeté l’idée que la responsabilité de protéger serait un concept « dépassé » et « inapplicable ».  Du Soudan à l’Ukraine, de l’Afghanistan au Myanmar et au Territoire palestinien occupé, a-t-il affirmé, la nécessité de protéger les populations exposées à des crimes de masse est plus impérieuse que jamais.  Si l’objectif envisagé en 2005 est encore loin, l’échec incombe au manque de volonté politique des États Membres de faire primer la sauvegarde des vies humaines sur les intérêts étroits et les considérations géopolitiques, a estimé le délégué.  Soulignant que la pauvreté, les inégalités et la faiblesse des institutions créent des environnements propices aux conflits, il a appelé les États Membres à donner la priorité à la protection des populations vulnérables.  Le délégué a également appelé à la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité afin d’assurer leur pleine participation dans la prévention et la résolution des conflits, ainsi qu’à la reddition de comptes pour les auteurs de violences sexuelles liées aux conflits.  Soulignant l’importance des partenariats régionaux et internationaux, y compris la société civile, dans la défense de la responsabilité de protéger, il a mis en avant le rôle central de l’ONU et appelé au renforcement de ses mécanismes d’alerte précoce et de prévention.  En conclusion, il a exhorté tous les États Membres à adhérer au Code de conduite du Groupe Responsabilité, la cohérence et la transparence (ACT) et à l’initiative franco-mexicaine sur la non-utilisation du droit de veto dans en cas de crimes de masse. 

M. LAMIN FAATI (Gambie) a insisté sur l’importance de renforcer le partenariat entre l’ONU et l’Union africaine dans la recherche de réponses communes aux menaces existantes et émergentes à la paix, à la sécurité et au développement en Afrique.  Se disant conscient des conséquences géopolitiques néfastes des guerres d’influence entre puissances régionales et mondiales, il a souhaité une coopération accrue dans la lutte contre le risque de crimes d’atrocité et au profit de la lutte contre la pauvreté, l’insécurité climatique et les conflits.  Le représentant a indiqué que son pays s’est engagé dans les processus de demande de reddition des comptes pour les crimes d’atrocité perpétrés contre la minorité rohingya au Myanmar.  La communauté internationale ne peut pas continuer d’ignorer le sort des victimes d’atrocités, c’est la raison pour laquelle nous avons le devoir d’assumer notre responsabilité collective de protéger, a-t-il dit.  

Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a rappelé que lors des débats précédents sur la responsabilité de protéger, sa délégation a recommandé que les discussions se concentrent sur la recherche d’une compréhension commune de ce concept.  Elle a noté l’intersection entre le développement et la responsabilité de protéger, avant d’encourager les États Membres à tirer parti des programmes de développement pour renforcer leurs mesures d’alerte précoce et de réduction des risques.  En tant que démocratie constitutionnelle attachée à la dignité de chaque personne, les Philippines entendent la souveraineté comme une « responsabilité » englobant celle de protéger sa propre population, a-t-elle expliqué.  Le respect de la souveraineté et de la bonne gouvernance sont donc des éléments essentiels de l’opérationnalisation des mandats de prévention de l’ONU.  Cependant, la responsabilité de protéger ne doit pas être utilisée à des fins politiques ou comme moyen de justifier une intervention étrangère, a-t-il prévenu, en mettant en garde contre les politiques de deux poids, deux mesures.  En définitive, la responsabilité de protéger doit se fonder sur le Document final du Sommet mondial de 2005 et la Charte des Nations Unies, a-t-elle conclu. 

Mme KATARINA ANDRIĆ (Croatie) a estimé que la responsabilité de protéger est un principe qui peut fédérer la communauté internationale en cas d’atrocités de masse.  Elle a relevé un mépris alarmant pour les piliers du droit international ces derniers temps.  La déléguée a argué que la discussion sur le sujet pourrait permettre de relever ce que les États veulent vraiment.  Elle a encouragé le Secrétaire général à inclure, dans ses rapports, des évaluations qui permettraient de mesurer le chemin parcouru et d’évaluer la mise en œuvre de précédentes résolutions et initiatives.  Et comme le vingtième anniversaire du lancement de ce concept approche, elle a appelé à une analyse profonde de sa mise en œuvre.

M. PAUL BERESFORD-HILL, de l’Ordre souverain de Malte, a rappelé que la responsabilité de protéger reposait sur trois piliers: la recherche de la paix, la justice et la prévention des crimes de masse.  Le premier pilier souligne la responsabilité des États souverains de protéger leurs propres populations contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité, a-t-il expliqué.  Abordant le deuxième pilier, il a évoqué la responsabilité de la communauté internationale d’aider les États à remplir leurs obligations en matière de protection.  Lorsqu’un État ne peut pas ou ne veut pas protéger sa population, la communauté internationale doit réagir rapidement et de manière décisive pour prévenir ou arrêter les crimes de masse et fournir de l’aide à ceux qui en ont besoin, a-t-il précisé.  Détaillant le troisième pilier, il a estimé qu’il reconnaissait la nécessité d’une action collective pour promouvoir des mesures préventives conformément au droit international et à la Charte des Nations Unies. 

Insistant sur le renforcement des stratégies préventives, des mécanismes d’alerte précoce et d’une culture de la responsabilité, le délégué a demandé à chaque État et à chaque organisation représentés à l’Assemblée générale de regarder au-delà de leurs « propres priorités individualistes privatisées et nationalistes repliées sur elles-mêmes ».  En conclusion, il a cité la récente déclaration du pape François devant le Conseil de sécurité, « nous souffrons d’une famine de fraternité », appelant les délégués à porter ce message jusque dans les couloirs du pouvoir. 

Droits de réponse

Reprenant la parole, la République islamique d’Iran a nié la propagande menée par certains pays concernant l’implication de systèmes d’armements iraniens dans le conflit ukrainien, y compris les États-Unis qui disposent du plus grand budget militaire du globe et qui participent à tous les conflits.  Il s’est dit prêt à travailler de façon constructive avec l’Ukraine afin de faire la lumière sur ces accusations infondées. 

La Fédération de Russie a répondu aux nombreux États qui ont établi un lien entre la responsabilité de protéger et la situation en Ukraine en accusant son pays.  Pourtant, a dit son représentant, « l’opération militaires spéciale » est liée au droit à la légitime défense prévu par la Charte des Nations Unies. 

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