En cours au Siège de l'ONU

Soixante-seizième session, Conférence sur les océans,
1re séance plénière – matin
MER/2143

La Conférence des Nations Unies sur les océans s’ouvre sur des appels pressants à préserver cette ressource, « la plus fondamentale et la plus négligée »

LISBONNE, 27 juin--La Conférence des Nations Unies sur les océans s’est ouverte ce matin à Lisbonne, au Portugal, par des appels pressants à préserver les océans, ressource aussi vitale que négligée.  Pollution plastique, destruction des barrières de corail, pêche intensive, conséquences des changements climatiques, piraterie, les intervenants n’ont pas fait mystère de l’acuité de « l’urgence océanique » et de l’effort financier qui sera nécessaire pour y remédier.  Le Secrétaire général de l’ONU, le Président du Kenya ou bien encore le Président des Palaos ont en effet rappelé que l’objectif de développement durable 14 sur la conservation et l’exploitation durable des océans est le moins financé de tous les objectifs.

C’est le Président du Portugal, nation maritime par excellence, qui a ouvert la Conférence.  « Le Portugal est une passerelle entre les océans, les cultures et les civilisations et il le montre aujourd’hui avec cette coopération avec le Kenya pour la tenue de cette conférence », a déclaré M. Marcelo Nuno Duarte Rebelo de Sousa, en rappelant que cette conférence avait été repoussée de deux années, en raison de la pandémie de COVID-19.  Heureux de retrouver son pays, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a aussitôt tenu à souligner la dimension existentielle des défis à relever. 

La crise climatique fait que les océans sont plus acides, les barrières de corail blanchissent et meurent, 80% des eaux usées et 8 millions de tonnes de plastique sont rejetées chaque année dans les océans, a-t-il déclaré.  « Sans une action drastique, la quantité de plastique pourrait dépasser la quantité de poissons dans les océans d’ici à 2050 », a averti M. Guterres, en ajoutant qu’il ne peut y avoir de planète saine sans des océans en bonne santé.  « Les océans sont donc la ressource la plus négligée sur notre planète, alors même qu’ils sont fondamentaux pour la survie de notre espèce », a constaté le Président du Kenya, M. Uhuru Kenyatta. 

Le Président kényan a en effet rappelé que trois milliards de personnes en dépendent pour leur survie et « qu’ils produisent 50% de l’oxygène que nous respirons ».  Nous ne pouvons pas exister sans les océans, a renchéri le Président de l’Assemblée générale, M. Adulla Shahid, qui a confié, qu’en tant que ressortissant des Maldives, « la mer coule dans ses veines ».  Le Président kényan, à l’instar du Secrétaire général, a aussi rappelé qu’avec une gestion plus durable des océans, ces derniers pourraient produire six fois plus de denrées alimentaires et 40 fois plus d’énergies renouvelables. 

Si les intervenants se sont félicités de certains progrès comme la mise sur les rails d’un traité sur la pollution plastique, ils ont unanimement souligné l’insuffisance de l’action entreprise jusqu’à présent.  « Ne nous faisons néanmoins pas d’illusions, nous devons en faire beaucoup plus », a déclaré M. Guterres, en demandant un niveau de financement accru sur le long terme.  Le Président du Kenya a souhaité que les participants quittent Lisbonne avec des idées précises, « notamment en matière de financement ».  Les lacunes dans le financement doivent être urgemment comblées, a renchéri le Premier Ministre des Fidji.

Dans ce droit fil, le Président de l’Angola, M. João Manuel Gonçalves Lourenço, a demandé le renforcement des capacités des pays confrontés au fléau de la piraterie, notamment dans le golfe de Guinée et dans la Corne de l’Afrique.  La protection de l’écosystème marin passe par une lutte énergique contre les pirates, a déclaré le Président angolais, qui s’est aussi inquiété des pêches illégales menées dans les eaux de son pays.  Le Président de la Colombie, M. Ívan Duque Márquez, a, lui, dénoncé les dégâts causés par la pêche au chalut, « l’équivalent en mer du déboisement sur terre ».

L’importance de la science a également été soulignée à plusieurs reprises.  Le Président de l’Assemblée générale a notamment plaidé pour une action océanique basée sur la science, en prenant l’exemple des sargasses dont la croissance excessive affecte les écosystèmes marins, les plages et la reprise économique des pays fortement tributaires du tourisme.  De son côté, M. Guterres a appelé à réaliser l’objectif de cartographier 80% des fonds marins d’ici à 2030 et exhorté le secteur privé à appuyer la recherche scientifique.  Le Président des Palaos, M. Surangel Whipps, a, lui, souhaité que les connaissances traditionnelles des peuples autochtones complètent les sciences océaniques. 

CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES DE 2022 VISANT À APPUYER LA RÉALISATION DE L’OBJECTIF DE DÉVELOPPEMENT DURABLE NO 14: CONSERVER ET EXPLOITER DE MANIÈRE DURABLE LES OCÉANS, LES MERS ET LES RESSOURCES MARINES AUX FINS DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

Déclarations d’ouverture

M. CARLOS MOEDAS, Maire de Lisbonne, a souhaité que cette conférence marque un avant et un après et qu’elle soit la preuve du courage du monde pour préserver les océans.  Il a appelé à la mobilisation de tous les acteurs, en particulier les acteurs locaux.  Le maire a précisé que Lisbonne va mettre à disposition des transports gratuits pour ses habitants.  Comptez sur les villes, comptez sur Lisbonne pour être ambitieuses et protéger les océans, a conclu le maire.

M. MARCELO NUNO DUARTE REBELO DE SOUSA, Président de la République du Portugal et Coprésident de la Conférence, a souligné que le Portugal est ce qu’il est aujourd’hui grâce aux océans.  Le Portugal est en effet une passerelle entre les océans, les cultures et les civilisations.  Et ce fut le cas dans le passé et c’est encore le cas aujourd’hui, comme le prouve cette coopération avec le Kenya pour la tenue de cette conférence.  Il a estimé que cette conférence se tient à un moment crucial après deux ans de renvoi du fait de la pandémie de COVID-19.  Il a souligné que les océans sont fondamentaux pour les générations à venir, et a noté au cours du forum sur la jeunesse et l’innovation qui a eu lieu hier, les jeunes ont dit espérer que leurs voix seront entendues.  Le Président a ensuite souligné que la pandémie et la guerre ne doivent pas faire oublier les problèmes relatifs aux océans, appelant à faire de la conférence un moment de déconfinement et d’ambition.

En tant que coprésident de la conférence, M. UHURU KENYATTA, Président du Kenya, a rappelé que cet événement était initialement prévu pour 2020, avant d’être reporté pour cause de pandémie.  Remerciant les délégations pour leur patience et leur présence à Lisbonne, il a également rappelé que la première Conférence des Nations Unies sur les océans, organisée en 2017 par la Suède et les Fidji, avait tiré la sonnette d’alarme et montré l’urgence à agir en faveur de l’objectif de développement durable 14 pour protéger et conserver les ressources marines.  J’espère que cette conférence permettra de passer à l’action concrète, sur la base de solutions techniques et scientifiques, a-t-il déclaré, souhaitant que les participants quittent Lisbonne avec des idées précises, notamment en matière de financement.  En effet, a-t-il relevé, l’ODD 14 est le moins financé des 17 ODD.  Les océans sont donc la ressource la plus négligée sur notre planète, alors même qu’ils sont fondamentaux pour la survie de notre espèce, a constaté le Président kényan.  Les océans représentent 70% de la superficie de la planète, trois milliards de personnes en dépendent pour leur survie et ils produisent 50% de l’oxygène que nous respirons.  Mais l’action humaine fait peser une forte pression sur les systèmes océaniques, a-t-il déploré, avant de souligner que 10 millions de tonnes de plastique sont déversées dans les océans chaque année et que 600 espèces marines sont aujourd’hui en danger, en particulier les poissons, compte tenu des bouleversements que subissent les écosystèmes marins.  La gestion non durable des océans les empêche de s’autorétablir, a averti le Chef d’État.  Pourtant, en renforçant notre résilience économique et environnementale, nous pourrions tirer des océans six fois plus de denrées alimentaires et 100 fois plus de sources d’énergie, a-t-il fait valoir.  À cet égard, la récente conférence sur l’économie bleue, coorganisée par le Kenya, a fait comprendre au monde la nécessité d’accroître la recherche scientifique pour faire avancer la gestion des océans, a relevé le Président kényan.  Affirmant parler aussi en tant que membre du Groupe de haut niveau sur l’économie des océans, il a estimé que la lutte contre la pollution et l’utilisation rationnelle des océans va de pair avec la prospérité.  Nous avons besoin de toute urgence d’ériger une économie océanique basée sur des modes de production et de consommation durables.  De même, une gestion équitable de nos ressources aquatiques dépend de notre capacité à travailler ensemble.  Il faudra donc de la volonté politique pour progresser, ici comme à la COP27 en Égypte, a-t-il conclu. 

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a rappelé que la Terre est bleue et que les océans nous unissent tous.  Malheureusement, nous faisons aujourd’hui face à une urgence océanique, a-t-il indiqué, en soulignant la hausse des températures et du niveau des océans.  La crise climatique fait que les océans sont plus acides, tandis que les barrières de corail blanchissent et meurent.  Près de 80% des eaux usées et 8 millions de tonnes de plastique sont rejetées dans les océans.  Sans une action drastique, ces déchets pourraient dépasser la quantité de poissons présents dans les océans d’ici à 2050, a averti le Secrétaire général, pour qui « nous ne pouvons pas avoir une planète en bonne santé sans des océans en bonne santé ».  Il a souligné dans le même temps les progrès significatifs en ce qui concerne l’élaboration d’un instrument juridique pour la préservation de la diversité biologique hors des zones de compétence nationale, tandis qu’un nouveau traité est sur les rails afin de remédier à la crise mondiale du plastique.  En protégeant les océans, nous agissons pour régler la crise climatique, a poursuivi M. Guterres.  « Ne nous faisons néanmoins pas d’illusions, ensemble nous devons en faire beaucoup plus. »

Le Secrétaire général a ainsi formulé quatre recommandations.  Premièrement, il a exhorté toutes les parties prenantes à investir dans des océans durables sur les plans alimentaire, énergétique et économique, ce qui requiert un niveau de financement sur le long terme.  Rappelant que l’ODD 14 est le moins financé de tous, le haut fonctionnaire a rappelé qu’une gestion durable des océans pourrait permettre de produire six fois de plus de nourriture et 40 fois plus d’énergies renouvelables.  Deuxièmement, il a estimé que les océans pourraient devenir un modèle dans la manière dont le monde gère les biens publics au bénéfice de tous, ce qui « signifie prévenir la pollution et renforcer les mesures de préservation ».  Troisièmement, il a appelé à protéger les océans, et les personnes qui en dépendent économiquement, des conséquences des changements climatiques.  Toutes les nouvelles infrastructures côtières devraient être climato-résilientes et le secteur du transport maritime devrait parvenir à une cible de zéro émission d’ici à 2050.  Quatrièmement, il a souligné la nécessité de davantage d’innovations et de connaissances scientifiques afin d’ouvrir un nouveau chapitre de l’action mondiale pour les océans.  M. Guterres a exhorté tous les acteurs à parvenir à l’objectif de cartographier 80% des fonds marins d’ici à 2030 et invité le secteur privé à rejoindre les partenariats qui appuient la recherche et la gestion durable des océans.  « J’appelle les gouvernements à revoir leur ambition à la hausse en ce qui concerne le relèvement des océans », a ajouté M. Guterres.  Après avoir ouvert son intervention par une citation de Fernando Pessoa, il a conclu par un proverbe swahili: « les océans nous conduisent partout ».  Ensemble, agissons pour les océans, a conclu le Secrétaire général. 

M. ABDULLA SHAHID, Président de l’Assemblée générale, a commencé par rappeler qu’il vient des Maldives, petite île et « grand État océanique ».  Il a confié que l’océan « coule dans ses veines » et ponctue le récit de sa vie, tant personnelle que professionnelle.  En tant que Maldivien, je sais que les océans sont un élément essentiel de la vie sur cette planète et que nous ne pouvons exister sans eux, a-t-il dit, affirmant parler au nom des habitants des petites îles, des populations côtières, des travailleurs du tourisme, des protecteurs des récifs coraliens et des pêcheurs.  Mais au-delà d’eux, nous dépendons tous des océans pour la moitié de l’oxygène que nous absorbons, a-t-il insisté.  À ses yeux, cette Conférence des Nations Unies sur les océans se tient à un moment à la fois critique et opportun.  D’une part, les océans font face à une myriade de menaces, des changements climatiques à la pollution plastique, en passant par la surpêche et l’acidification.  D’autre part, « nous avons l’élan et le vent avec nous ».  En effet, a-t-il salué, le quarantième anniversaire de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer a réitéré notre responsabilité partagée pour les océans.  De plus, de récents efforts, tels que l’accord historique sur la fin de la pollution plastique et le nouvel accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les subventions à la pêche, donnent de l’espoir.  Et l’optimisme est de mise quant à l’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine dans les zones situées au-delà de la juridiction nationale.

Cette conférence peut donner le ton de ce qui doit être fait, a souligné M. Shahid.  Elle peut aider à identifier et définir les domaines clefs de l’action océanique basée sur la science, tout en traçant les politiques à mettre en œuvre par les gouvernements pour donner lieu au changement.  Elle peut aussi renforcer les liens entre les efforts que nous menons ici et ceux sur les changements climatiques, la biodiversité, la dégradation des terres et la sécheresse, qui, tous, ont un impact sur les océans, « et vice versa ».  Pour illustrer son propos, le Président de l’Assemblée générale a pris l’exemple des sargasses.  Selon les scientifiques, a-t-il expliqué, le réchauffement climatique, la hausse des températures de l’eau et la pollution favorisent leur croissance excessive, affectant ensuite les écosystèmes marins, les plages et la reprise économique des pays fortement tributaires du tourisme. 

Ce problème complexe, ainsi que les nombreux autres défis auxquels sont confrontés les océans, exige une approche holistique, a plaidé le haut fonctionnaire, avant de se féliciter sur l’accent mis sur la science et l’innovation lors de cette conférence.  Observant que l’ingéniosité humaine a rendu possibles de grandes avancées, il a dit en voir la preuve dans la médecine, dans l’espace et dans les profondeurs des océans.  Un avenir est possible où le tourisme océanique durable pousserait les économies sans faire de dégâts, où les énergies renouvelables réduiraient les émissions de carbone et protègeraient les écosystèmes vitaux, où les économies circulaires prospéreraient et où notre production et notre consommation ne dégraderaient pas l’environnement.  Investissons dans la science et agissons en conséquence, a-t-il lancé en conclusion.  « Protégeons l’océan, tirons parti de sa puissance, savourons sa beauté, chérissons sa diversité et assurons sa santé et sa longévité. » 

M. COLLEN VIXEN KELAPILE, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a rappelé que cet organe se soucie de tous les objectifs de développement durable (ODD).  Il s’est félicité que cette conférence donne l’occasion de se focaliser sur l’ODD 14 relatif à la conservation et à l’exploitation durable des océans, les mers et les ressources marines, permettant de cibler à la fois les crises des changements climatiques, de la perte de la biodiversité et de la pandémie de COVID-19.  Après avoir rappelé que les océans sont mis à mal par les activités anthropiques comme le déversement en mer des déchets plastiques par exemple, le Président s’est déclaré cependant optimiste, annonçant que le forum politique de haut niveau sur le développement durable de l’ECOSOC examinera en juillet la mise en œuvre de l’ODD 14.  Et cette conférence impulsera l’élan nécessaire à cet exercice.  La pratique des examens nationaux volontaires va également donner l’occasion de partager les pratiques optimales au niveau national, s’est-il félicité d’avance.

M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général de la Conférence et Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a formé le vœu que cette deuxième Conférence des Nations unies sur les océans permettra d’accélérer l’action au service des partenariats pour le rétablissement de la santé océanique.  Comme le précise le thème central de cette conférence, il s’agit pour nous de favoriser l’objectif de développement durable 14, a-t-il souligné, avant de féliciter les délégations pour l’accord intervenu sur le document final.  Toutefois, a ajouté M. Liu, nous sommes non seulement en retard pour la réalisation de l’ODD 14 mais aussi toujours en train de souffrir des effets et des incertitudes de la pandémie de COVID-19.  Assurant que toute crise est porteuse de possibilités, il s’est dit confiant quant à la promotion d’une économie bleue dans cette période difficile.  Il a notamment encouragé les États Membres à s’engager en faveur du fonds de contributions volontaires, qui se révèle fondamental pour rétablir la santé des océans.  Nous devons aussi saisir cette occasion pour accroître le soutien à la recherche océanique, notamment dans le domaine des sciences sociales afin d’alimenter les politiques sociales des pays.  Au cours de cette semaine de travaux, neuf réunions plénières permettront aux responsables de s’exprimer et huit dialogues interactifs auront lieu pour aborder les questions prioritaires de la conférence.  Ces dialogues ont aussi pour but de favoriser la participation de tous les acteurs et porteront sur les moyens de faire progresser l’ODD 14, a encore expliqué le Secrétaire général adjoint, qui a souhaité que les délégués puissent quitter Lisbonne « la tête pleine d’idées de partenariats », en vue de donner un nouvel élan à l’action océanique. 

Débat général

M. JOÃO MANUEL GONÇALVES LOURENÇO, Président de l’Angola, a indiqué que son pays vise à étendre les limites de sa zone économique exclusive, en lien avec les entités onusiennes compétentes, afin de protéger les ressources halieutiques pillées par des flottes de pêches étrangères non autorisées.  Il a rappelé que protection des océans et lutte climatique sont étroitement liées, soulignant l’importance de prendre les mesures nécessaires pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.  Il a détaillé les mesures prises par son pays pour réduire les énergies fossiles, avec notamment le lancement d’une production d’hydrogène vert.  Le Président a rappelé que la protection de l’écosystème marin passe par une lutte énergique contre les pirates, qui sévissent notamment dans le golfe de Guinée et la Corne de l’Afrique.  Le Président a appelé à une expansion de la coopération internationale avec les pays de ces régions en vue du renforcement de leurs capacités face à cette menace mondiale.  Il a déclaré que le blocus des ports de la mer Noire en Ukraine cause une crise alimentaire mondiale, exigeant un cessez-le-feu immédiat.  Enfin, il a mentionné les efforts déployés par la Communauté des pays de langue portugaise pour la protection des océans, notamment une lutte contre les pêches illicites.

M. SURANGEL WHIPPS, JR., Président des Palaos, s’exprimant au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, a indiqué que les États du Pacifique ne produisent que 3% des déchets plastiques se trouvant dans les océans, mais qu’ils sont parmi les plus affectés par le fléau.  Il a rappelé que les prédictions laissent voir qu’il y aura plus de déchets plastiques que de poissons dans les océans d’ici l’année à 2050, avant d’appeler à réguler davantage la navigation dans le Pacifique.  Il a également plaidé pour la mise en exergue des connaissances traditionnelles des peuples autochtones qui complètent les sciences océaniques.  Le Président a noté que l’ODD 14 est le moins financé de tous les objectifs de développement durable.  Pour pallier cet état de fait, il a espéré un apport conséquent du secteur privé et des investissements étrangers directs (IED).  Il a aussi insisté sur la préservation de la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales, appelant à l’avènement d’un instrument international juridiquement contraignant sur la question. 

Sur le plan national, il a relevé qu’aux Palaos, la biodiversité marine ne cesse de diminuer.  Le pays entend se tourner vers des énergies renouvelables à 100%.  Pour ce faire, les Palaos attendent le soutien de pays technologiquement avancés pour parvenir à « la prospérité bleue ».  Il a estimé que toute l’humanité fait partie de la solution, y compris les 3 millions d’habitants de Taiwan.  « Cessez d’utiliser les océans comme poubelle », a-t-il lancé.

M. IVÁN DUQUE MÁRQUEZ, Président de la Colombie, a rappelé que la Colombie est l’un des plus touchés par la crise climatique, avant de souligner l’engagement de son pays à parvenir à zéro émission d’ici à 2050 et à réaliser l’ODD 14.  Nous avons augmenté de 16 millions d’hectares les aires marines protégées, et la Colombie est en passe de parvenir à l’objectif de 30% de zones marines protégées, a dit le Président, en parlant de « réalisation historique ».  Il a également détaillé l’action de la Colombie pour protéger les barrières de corail et lutter contre la pollution plastique, avant de mentionner les projets de préservation menés avec le Panama notamment.  Enfin, il a dénoncé les dégâts causés par la pêche au chalut, l’équivalent en mer du déboisement sur terre. 

M. MOHAMED YOUNIS MENFI, Président du Conseil présidentiel du Gouvernement d’unité nationale de la Libye, a rappelé que, depuis l’aube de l’humanité, les êtres humains font partie des écosystèmes naturels.  Longtemps, a-t-il observé, les besoins humains ont été limités par des modes de production et de consommation qui ne menaçaient pas les écosystèmes.  Mais, au cours du siècle dernier, l’avènement de la production de masse, le recours aux pesticides et l’utilisation de carburants fossiles ont réduit nos ressources naturelles à une cadence sans précédent.  N’oublions pas que près des deux tiers des ressources planétaires sont issues des mers et des océans, a-t-il lancé, avant de faire remarquer que son pays a le plus long littoral de la mer Méditerranée, avec quelque 1 700 km de côtes qui abritent 90% de la population nationale, particulièrement tributaire de l’économie marine.  De fait, la menace d’élévation du niveau de la mer induite par les changements climatiques est une source de grande préoccupation pour la Libye.  En outre, les écosystèmes sont endommagés en raison de la situation sécuritaire du pays et nos plages sont polluées, utilisées pour la traite de migrants ou la contrebande d’armes, a souligné le Chef de l’exécutif libyen, avant d’appeler la communauté internationale à aider la Libye à s’impliquer davantage dans la protection marine.  Nous approchons tous d’un « point de non-retour », a-t-il averti en conclusion.  Nous devons protéger notre planète bleue, comme cela a été mis en exergue dans l’Accord de Paris pour le climat.

M. ÚMARO SISSOCO EMBALÓ, Président de la Guinée-Bissau, a rappelé que les océans sont le premier écosystème de la planète.  Il a indiqué que son pays suit un modèle de développement durable, en dépit de difficultés.  Il a souligné la vulnérabilité de la Guinée-Bissau aux changements climatiques, en particulier l’érosion côtière, et appelé à mettre en œuvre l’Accord de Paris.  Le Président a également souligné l’importance des partenariats noués avec l’ONU et l’Union européenne notamment. 

M. NANA ADDO DANKWA AKUFO-ADDO, Président du Ghana, a décrit son pays comme un État côtier situé sur la façade atlantique de l’Afrique.  Un pays dont la population côtière compte plus de 2 millions d’individus, sur un total national de 31 millions d’habitants.  À l’échelle planétaire, a-t-il fait valoir, l’océan est une source de denrées alimentaires pour plus de trois milliards de personnes.  Les océans sont aussi le poumon de notre planète puisqu’ils fournissent 50% de l’oxygène que nous respirons et absorbent 25% du CO2 dû aux activités humaines.  De surcroît, les océans sont des moteurs de l’économie mondiale, à laquelle ils contribuent à hauteur de 4%.  Mais ils sont menacés par la pollution marine, la surexploitation et la perte de diversité biologique.  Dans la foulée du sommet « One Ocean » organisé en février dernier, la Conférence de Lisbonne doit permettre de renforcer la sensibilisation mondiale et de réduire la pression infligée aux océans, a plaidé le Président ghanéen.  En septembre 2021, a-t-il rappelé, l’Équateur, l’Allemagne et le Viet Nam se sont joints au Ghana pour combattre la pollution plastique.  Un projet de résolution a ainsi pu être présenté sur cette question, lors de l’Assemblée sur l’environnement à Nairobi, en vue d’appuyer l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant à l’échelle internationale sur la pollution plastique en milieu marin.  Se disant partisan d’une approche basée sur le cycle complet du plastique, le Chef d’État a par ailleurs indiqué que son pays a mis en œuvre un plan d’action national pour lutter contre la pêche illicite et non réglementée, tout en veillant à la sûreté de la navigation marchande.  Avant de conclure, il a invité participants à cette deuxième Conférence des Nations Unies sur océans à se réengager en faveur de la réalisation de l’ODD 14. 

M. TEODORO OBIANG NGUEMA MBASOGO, Président de la Guinée équatoriale, a affirmé que la crise climatique est également une crise des océans, puisque ces derniers absorbent environ 20 à 30% du carbone produit par les hommes.  Pour lui, la piraterie dans le golfe de Guinée a un impact néfaste sur les échanges commerciaux dans la région.  Son pays entend par ailleurs mettre sur pied des usines de recyclage des déchets plastiques afin de prévenir leur déversement dans les océans.  De même, dans sa stratégie de lutte contre la pauvreté, la Guinée équatoriale entend se tourner résolument vers l’économie bleue.  Le Président a appelé à renforcer le cadre de coopération existant dans des domaines de la biodiversité marine et à s’engager à résoudre le fléau de la piraterie. 

M. PHILIP ISDOR MPANGO, Vice-Président de la République-Unie de Tanzanie, a indiqué que l’exploitation de la zone maritime de son pays est compromise par la pollution, la perte de biodiversité, les changements climatiques et l’érosion des plages.  Des mesures ont été prises pour interdire les sacs en plastique à usage unique et 6,5% des zones côtières sont devenues des zones marines protégées.  En outre, près de 99% des pêches à l’explosif sont contrôlées et la surveillance des pêches dans les grands fonds marins a été renforcée.  Il a également indiqué que la loi de 2015 sur les pêcheries nationales vise à créer un secteur robuste et efficace qui contribue à la sécurité alimentaire et à la croissance économique tout en protégeant l’environnement marin et côtier.  Le Vice-Président a par ailleurs appelé à investir dans les technologies novatrices pour combattre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.  Des efforts supplémentaires s’imposent en outre en matière de planification de l’espace marin et d’élevage en cage dans les zones maritimes, a-t-il ajouté.

M. JOSAIA VOREQE BAINIMARAMA, Premier Ministre et Ministre des affaires iTaukei, de l’industrie du sucre, des affaires étrangères et des forêts des Fidji, qui s’exprimait au nom du Forum des Îles du Pacifique, a rappelé le danger de la montée des eaux pour les pays du Pacifique, qui ne doit pas signifier de moindres droits économiques sur les mers pour ces nations.  Il a ensuite condamné le rejet de déchets radioactifs et appelé à œuvrer lors de la prochaine COP en Égypte pour limiter la hausse des températures.  Il a rappelé que l’objectif de développement durable 14 sur la conservation et l’exploitation durable des océans est le moins financé de tous les objectifs.  Nous avons besoin de davantage de financements, a conclu le Ministre, en demandant que les lacunes dans le financement soient urgemment comblées.

M. ANTÓNIO COSTA, Premier Ministre du Portugal, a appelé à élaborer un programme mondial pour les océans axé sur des solutions pratiques fondées sur la science et dotées des ressources financières nécessaires.  La connaissance scientifique doit être au centre de notre action, et c’est dans cette optique que le Portugal a mis en place l’initiative « AIR Centre », un réseau de collaboration scientifique entre les pays et les instituts de recherche.  Il a indiqué que le Portugal a la plus importante biodiversité marine d’Europe, et vise à ce que 100% de l’espace maritime sous sa juridiction soit classé comme environnementalement sain, et que d’ici à 2030, 30% des zones maritimes nationales soit des aires protégées.  Le pays entend en outre transformer la pêche nationale en une activité durable et à faible impact environnemental. 

Le Premier Ministre a par ailleurs jugé urgent de reconnaître le lien déterminant entre le climat et les océans, ces derniers étant le principal régulateur climatique et puits de carbone.  Il a indiqué que le Portugal entend produire 10 gigawatts d’électricité d’ici à 2030 à partir des océans.  Il a également fait savoir que l’économie bleue est un élément central de la stratégie nationale de développement de son pays.  Le Portugal entend en effet promouvoir l’entrepreneuriat, l’emploi et l’innovation, notamment dans la bioéconomie de la mer, et avec l’objectif de doubler le nombre de startups de l’économie bleue, ainsi que le nombre de projets soutenus par des fonds publics.  Il a annoncé que le Forum sur l’économie bleue et l’investissement, prévu demain à Estoril, a déjà battu les records en inscriptions pour ce genre de rencontre dédié à l’économie bleue.  Le Portugal entend tenir un évènement similaire l’an prochain, a-t-il ajouté.  Avec la même ambition avec laquelle nous avons cherché à atteindre la lune ou Mars, « il est temps de descendre sur Terre, la planète bleue, notre planète », a-t-il dit, espérant que cette conférence marque une étape importante dans « les retrouvailles entre l’humanité et les océans ». 

Mme KATRIN JAKOBSDÓTTIR, Première Ministre de l’Islande, a dit constater les effets des changements climatiques avec l’inquiétant recul des glaciers qui entourent son île.  Face à cette crise, l’Islande défend des objectifs ambitieux, notamment la neutralité carbone d’ici à 2030 et le non-renouvellement des licences expirées d’exploitation pétrolière.  En Islande, a-t-elle témoigné, les pêcheurs affirment assister au quotidien aux changements climatiques.  Dans la région arctique, le réchauffement est plus important qu’ailleurs, ce qui a des conséquences dévastatrices sur les chaînes alimentaires, tandis que l’élévation du niveau de la mer menace les populations côtières, en particulier les peuples autochtones.  Elle a rappelé qu’outre la crise climatique et les effets persistants de la pandémie de COVID-19, une guerre fait désormais rage au cœur de l’Europe, laquelle menace d’engendrer une crise alimentaire extrêmement grave.  Le conflit en Ukraine nous éloigne des promesses faites en matière de climat et de développement durable, s’est-elle inquiétée.  Notant en outre qu’il reste un long chemin à parcourir pour réaliser l’ODD 14, elle a appelé à progresser dans l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine dans les zones situées au-delà de la juridiction nationale.  Enfin, après avoir rappelé que son pays s’est fait le chantre de l’alimentation bleue, elle a appelé à mettre un terme à la pêche illégale, non réglementée et non déclaré, ce qui, selon elle, favorisera le combat pour le climat et aidera à soutenir les plus démunis. 

 

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