La Conférence sur les océans célèbre la Journée mondiale de l’océan et se propose de travailler avec « le meilleur de la science » pour aller de l’avant
La célébration de la Journée mondiale de l’océan a donné lieu aujourd’hui à de nombreux appels dont celui du Président de l’Assemblée générale, M. Peter Thomson, à utiliser « le meilleur de la science » pour définir les politiques. Des appels similaires ont été entendus au cours du « dialogue de partenaires » sur l’approfondissement des connaissances scientifiques que la Conférence de haut niveau sur les océans a continué d’organiser. Convoquée depuis le 5 juin, la Conférence vise à soutenir la mise en œuvre de l’objectif 14 du Programme de développement à l’horizon 2030, visant à conserver et à exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines.
Avant de céder la parole aux écologistes, photographes, scientifiques, astronautes, philanthropes, ONG et représentants du secteur privé réunis pour célébrer les océans responsables de la teinte de notre « Planète bleue », le Président de l’Assemblée générale a appelé à utiliser « le meilleur de la science » pour définir nos politiques, renforcer nos partenariats et inspirer le rétablissement d’un équilibre écologique durable dans notre relation avec l’océan.
Le moment est venu de changer les choses, en nous basant sur les connaissances scientifiques, a renchéri une biologiste marine et exploratrice américaine, tandis que le défenseur de l’environnement et petit-fils de l’explorateur et océanographe français Jacques-Yves Cousteau estimait que face aux défis « redoutables » auxquels nous faisons face, il faut recourir à l’innovation pour lutter contre la pollution, la surconsommation et les changements climatiques.
À cause du manque de ressources, nous arrivons à la situation « absurde » où nous en savons plus sur la Lune et l’espace extra-atmosphérique que sur nos propres océans, a fait remarquer le représentant de la Stratégie mondiale intégrée d’observation (IGOS). Dans la mesure, où nous ignorons environ 85% des fonds marins, nous n’avons aucune carte détaillée des zones couvertes par l’objectif de développement durable 14. Les océans sont très difficiles à observer, a reconnu le Cofondateur et Directeur général de l’entreprise privée sud-africaine OLSPS, car il existe une infinité de types de navires, de pratiques de pêche et d’espèces marines. « Tous est complexe, c’est un chaos dynamique. »
La lecture scientifique de ce chaos a un coût, a acquiescé un biologiste et spécialiste des baleines, expliquant qu’un navire scientifique nécessite près de 10 millions de dollars avec un entretien mensuel de 2 millions de dollars. Mais, aujourd’hui, on peut faire des observations et suivre les baleines avec des drones de 2 000 dollars. La science doit être financée de manière durable et pour y parvenir, le représentant du Royaume-Uni a proposé la création d’un mécanisme mondial de financement des systèmes d’observation.
En attendant, les engagements pris en matière de transfert de technologies ont été dûment rappelés. Ce qui freine ce transfert, c’est avant tout le rythme effréné des innovations, a estimé le Directeur et Président de l’ONG Woods Hole Oceanographic Institution. « Non seulement ça va très vite », a-t-il expliqué, mais les innovations technologiques ne viennent pas toujours des grandes entreprises, « elles sortent des petits garages », ce qui fait obstacle à leur diffusion. Le problème est plutôt l’absence de planification stratégique, a contré le Président et Directeur général de l’entreprise privée sud-africaine OLSPS qui, avec le Directeur exécutif de l’Institut pour l’environnement de Stockholm, a appelé à de nouveaux partenariats et à l’implication du secteur privé.
La Conférence des Nations Unies sur les océans terminera ses travaux demain, vendredi 9 juin. Elle devrait adopter son document final intitulé « l’Appel à l’action », non sans avoir rendu publique la liste finale des engagements volontaires en faveur des océans.
MANIFESTATION SPÉCIALE EN VUE DE COMMÉMORER LA JOURNÉE MONDIALE DE L’OCÉAN
Les océans qui ont donné sa teinte à la « Planète bleue » ont été célébrés de manière unique cette année puisque la Journée mondiale de l’océan a coïncidé avec la Conférence de haut niveau que les Nations Unies tiennent pour soutenir la mise en œuvre de l’objectif 14 du Programme de développement à l’horizon 2030, visant à conserver et à exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines.
Avant de céder la parole aux écologistes, photographes, scientifiques, astronautes, philanthropes, ONG et représentants du secteur privé réunis à cette célébration, la Coprésidente de la Conférence et Ministre du développement international de la Suède a demandé: « imaginez une planète sans eau ». « Il n’y aurait pas de vie », a confirmé Mme ISABELLA LÖVIN. « Notre terre est une exception spectaculaire ». Vue de l’espace, c’est « une boule bleue, suspendue dans l’obscurité et sans frontières ». Nous célébrons aujourd’hui, a renchéri le Président de l’Assemblée générale, la beauté de l’océan, celle qui est gravée dans nos musiques, nos poèmes et notre art. Nous célébrons sa richesse et notre conscience naissante de la nécessité de corriger les torts qu’on lui a infligés. L’élan imprimé par cette Conférence bat l’inconscience de la pollution marine et propulse notre rationalité au service du bien et contre les subsides nuisibles à la pêche et les pratiques destructrices de pêche illégale. L’élan nous porte vers une gestion durable de la pêche et la restauration des stocks de poisson.
Nous travaillerons, a dit M. PETER THOMSON, « avec le meilleur de la science » pour définir nos politiques, renforcer nos partenariats et inspirer le rétablissement d’un équilibre écologique durable dans notre relation avec l’océan. La masse critique des nations réunira ses forces autour de l’objectif 14 du Programme 2030 et autour de notre fidélité à l’Accord de Paris sur les changements climatiques. Les pratiques d’automutilation seront abandonnées et nous lèguerons à nos enfants et à nos petits-enfants un océan à l’intégrité restaurée et à la générosité durable.
Nous le ferons, a insisté le Président de l’Assemblée générale, parce que la Conférence sur les océans est le moment où nous commençons à inverser la tendance au déclin sur laquelle nos actes ont fait glisser l’océan. Il s’est félicité des multiples engagements volontaires pris au cours de cette Conférence, des solutions pratiques proposées pendant les dialogues de partenariat et de l’Appel à l’action qui sera lancé à la fin des travaux. Nous nous sommes mis d’accord pour agir avec détermination, mobiliser les moyens nécessaires, respecter le principe de précaution et mettre en œuvre l’objectif 14. À partir d’aujourd’hui, les scientifiques, les décideurs politiques, les pêcheurs, les défenseurs de l’océan, bref quiconque s’inquiète de la santé de l’océan sait que « nous sommes tous dans le même bateau » navigant sur des eaux qui n’appartiennent à personne, qui sont notre héritage commun et que nous devons conserver et gérer de manière durable pour la postérité, a conclu le Président.
« C’est en avançant ensemble que nous pourrons conserver nos océans en tant que havres de paix, de sécurité et de prospérité, et préserver la santé de notre Planète bleue », a insisté M. MIGUEL DE SERPA SOARES, Conseiller juridique de l’ONU, au nom du Secrétaire général de l’ONU. Avancer ensemble? La Coprésidente de la Conférence et Ministre du développement international de la Suède a cité l’exemple de l’Antarctique où les États parviennent à coopérer pour sauvegarder les écosystèmes et la vie. « Les hommes, là-bas, se considèrent comme de simples visiteurs », a dit la Ministre qui a voulu que cette coopération soit étendue au reste de la planète, « cette petite oasis bleue vue de l’espace », a décrit M. FABIEN COUSTEAU, défenseur de l’environnement et petit-fils de l’explorateur et océanographe français Jacques-Yves Cousteau.
« Aucune planète n’est aussi belle », s’est-il ému, rappelant que les océans n’existent nulle part ailleurs dans l’espace. Face aux défis « redoutables » auxquels nous faisons face, le petit-fils du Commandant Cousteau a voulu que l’on exploite toutes les ressources à notre disposition, y compris l’innovation, contre la pollution, la surconsommation et les changements climatiques. Au cours de ma vie professionnelle et lors de mes plongées sous-marines, j’ai vu la mort des océans, s’est en effet alarmé M. BRIAN SKERRY, Photographe au « The National Geographic » et membre de la Fondation Avatar, qui a laissé parler les images de trois courts métrages tournés par la fondation du célèbre cinéaste et réalisateur du film « Avatar », James Cameron. Le premier film parle des menaces qui pèsent sur les océans, le second, des actions prises par une nouvelle génération d’activistes engagés pour la survie des océans et le dernier, d’autres activistes qui posent des questions directes aux décideurs: « si ce n’est pas maintenant, c’est quand? » « Si nous le faisons pas, qui le fera? ».
« Nous, car nous sommes tous ensemble, ici, sur une même station, un même équipage appelé Terre », a semblé répondre Mme CADY COLEMAN, Chimiste et astronaute américaine de la NASA, qui a présenté une série de photos retraçant ses travaux lors d’une mission de six mois sur la station spatiale internationale. Avec mes cinq autres collègues « nous avons mis nos nationalités de côté pour travailler ensemble ». Nous devons changer nos comportements et faire preuve de plus d’audace, d’ouverture et surtout, de coopération. Mme Coleman s’est remémoré une mission spatiale pendant le tsunami qui a frappé le Japon en 2011. Nous pouvions voir que le monde était « un endroit magnifique et spectaculaire », a-t-elle dit, affirmant que depuis l’espace, elle a pu voir sur Terre, le mouvement de solidarité pour secourir le Japon. « Nous devons protéger cette planète et nous protéger les uns les autres. »
« Maintenant que nous avons les moyens d’explorer l’espace, descendons un peu sur Terre et prenons soin de notre planète », a acquiescé M. RICHARD BRANSON, Fondateur du groupe « Virgin » et philanthrope. « Explorons les profondeurs de l’océan et faisons connaissance avec la Terre. » Le philanthrope a invité tout le monde à se mettre ensemble, pour apprendre les uns des autres. Le secteur privé peut contribuer à la mission mondiale d’assainissement des océans, a-t-il dit, livrant là une assertion reprise par M. ERIC LIEDTKE dont la compagnie, Adidas, s’est engagée, il y a deux ans, à produire des chaussures avec du plastique récupéré des océans. L’année prochaine, c’est un million de paires qui seront mises sur le marché. « Il faut absolument que nous mettions fin à notre habitude de réaliser les conséquences de nos actes après coup », a insisté le Fondateur de Virgin qui a demandé un nouveau traité juridiquement contraignant pour les océans et les mers.
« Pour la première fois dans son histoire, l’humanité réalise l’évidence, à savoir que les océans rendent la vie possible sur Terre », s’est réjoui la biologiste marine et exploratrice américaine, Mme SYLVIA EARLE. « Nous savons aujourd’hui que nous avons le pouvoir de nuire et de nous nuire par la même occasion. » Le moment est venu de changer les choses, en nous basant sur les connaissances scientifiques. « Nous savons que chaque bouchée de nourriture, chaque goutte d’eau provient de l’océan. » Or, en quelques décennies, nous avons consommé des énergies fossiles qui ont acidifié et réchauffé les océans. « Nous sommes aujourd’hui à un moment unique, car il n’est pas encore trop tard. »
« La vitesse de nos actions doit être supérieure à celle de la dégradation des océans », a encouragé Mme AULANI WILHELM, Scientifique à la Conservation internationale. Elle a parlé d’un navire que son organisation a construit, avec des matériaux anciens comme le bois, pour explorer les océans. Le périple de trois ans prend justement fin aujourd’hui, à la Journée mondiale de l’océan. Nous avons pu, a-t-elle expliqué, toucher du doigt les problèmes des océans et rencontrer des communautés dépendant de la mer et dévastées par les effets des changements climatiques. Nous devons agir vite pour réparer les dégâts causés aux océans.
« Inspirons-nous de l’espace et prenons conscience que les océans ne sont pas indestructibles », a pressé M. SCOTT BOLTON, Physicien spatial de la NASA, et membre d’une équipe de recherche sur les traces de vie dans l’univers. Jupiter a un océan qui contient plus d’eau que le nôtre mais Vénus et Mars, qui ont déjà perdu les leurs, sont devenues plus vulnérables. Les océans de la Terre sont tout aussi fragiles car ils ne sont pas très profonds. « L’ironie est que nous savons que l’eau est source de vie dans l’univers mais nous continuons à la détruire sur Terre. » Ce serait une honte, a dit le scientifique, d’essayer de trouver une autre planète habitable parce que nous n’avons pas été capables de préserver la nôtre ».
Il faut donc comprendre l’homme et sa nature destructrice et pour le comprendre, étudions les baleines, a lancé M. DOUG AITKEN, Biologiste et spécialiste des baleines. Ces mammifères, s’est-il expliqué, dominent la chaîne alimentaire des océans et ont donc de nombreux points communs avec les hommes, dominateurs de la chaine alimentaire sur Terre. Surveiller les océans coûtait cher, un navire scientifique nécessitant près de 10 millions de dollars avec un entretien mensuel de 2 millions de dollars. Mais aujourd’hui, on peut faire des observations et suivre les baleines avec des drones de 2 000 dollars, ce qui est une évolution encourageante qui mérite que l’on popularise la recherche océanographique. « Il y a un mot que je retiens tout particulièrement quand on parle des océans: vie », a déclaré Mme EELLEN CUYLAERTS, photographe américaine. Elle a dit garder l’espoir dans la capacité de l’humanité de sauver nos océans, avant d’annoncer les lauréats du concours de photos océaniques organisé par les Nations Unies dans le cadre de la Conférence.
Capacité de l’humanité de sauver nos océans? La question est urgente. M. CHRIS JORDAN, Réalisateur et photographe américain, a présenté son dernier film documentaire réalisé dans une île éloignée du Pacifique où l’accumulation de déchets plastiques décime progressivement les seuls habitants, les albatros. M. TERRY TAMMINEN, Directeur de la Fondation de l’acteur américain Leonardo DiCaprio, a aussi plaidé pour les espèces en voie de disparition et a rappelé que l’acteur vient de rencontrer le Président mexicain pour défendre le marsouin du golfe de Californie.
L’acteur est d’ailleurs intervenu par visioconférence. Il a prévenu que l’humanité est en train de détruire des écosystèmes « irremplaçables », sapant une évolution de plusieurs milliers d’années. « Ennemi du scepticisme », il a invité la communauté internationale à agir aujourd’hui, avec des objectifs ambitieux et quantifiables, comme ceux de l’Accord de Paris sur les changements climatiques. « Nous avons déjà touché le fond », s’est alarmé M. DIEGO LUNA, Acteur et cinéaste mexicain. « Nous avons besoin d’inspiration, l’étincelle à l’origine de tous les feux. » Il faut donner la parole aux communautés côtières pour réaliser l’objectif 14 du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a-t-il estimé. Justement au nom des quelque 600 membres de son association de promotion des droits de la femme gambienne, « Oyster Women », Mme FATOU JANHA MBOOB a expliqué que cette association côtière, qui se base sur le principe d’« autonomisation », a commencé avec 14 000 dollars d’aide publique au développement (APD). « C’est peu, mais pour nous ça a fait une différence », a-t-elle dit. Grâce aux efforts de l’association, six femmes ont pu gérer elles-mêmes leur pêche, pour la toute première fois. Les femmes de l’association ont également officialisé des plans de gestion de l’écosystème, en plantant des mangroves. « Oyster Women » a aussi permis d’établir des prix équitables et pérennes pour le commerce des huîtres. « Nous avons compris le pouvoir de l’action collective. »
M. BUDI SETIAWAN a quant à lui créé une association qui replante les récifs coralliens, protège les tortues et finance des entreprises locales soucieuses des écosystèmes marins. Il a dit avoir grandi sur une petite île d’Indonésie où il n’y a plus ni cours d’eau, ni poissons, au point que les pêcheurs doivent aller de plus en plus loin et dépenser de plus en plus pour trouver du poisson. « Bientôt, cela ne vaudra même plus la peine. » M. YOHEI SASAKAWA, Président de la Fondation nipponne, a plaidé pour la création d’une entité mondiale chargée de coordonner l’action de toutes les parties prenantes à la gouvernance des océans.
« Nous faisons déjà des efforts pour améliorer notre planète, mais les actes les plus importants doivent venir de vous, décideurs et hommes d’État », ont déclaré 300 jeunes réunis au siège de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) à Paris. Ces jeunes ont multiplié les appels à la responsabilité des dirigeants: « nous avons confiance en votre volonté d’agir », « notre avenir est en jeu et il est aujourd’hui entre vos mains », « sauvez nos océans ».
« Aimons-nous suffisamment nos enfants pour leur rendre ce que nous avons pris pour argent comptant? » s’est demandé M. Fabien Cousteau. Si la réponse est oui, alors supprimons le mot « impossible » de nos dictionnaires, inversons la tendance actuelle et réaliser l’objectif 14 de développement durable.
Les enfants, comme les hommes et les femmes du monde entier, doivent s’approprier la lutte en faveur des océans, a conclu M. JOSAIA VOREGE BAINAMARAMA, Premier Ministre de Fidji et Coprésident de la Conférence. « Engagez-vous personnellement. Ramassez les ordures sur la plage. Évitez les sacs plastiques. Prenez les devants et agissez pour le changement ». « Nous ne sommes pas les propriétaires de la planète mais seulement les gardiens, en attendant de la léguer aux générations futures », a souligné le Premier Ministre.
Dialogue de partenaires « Approfondissement des connaissances scientifiques, renforcement des moyens de recherche et accélération des transferts de techniques marines »
Les participants au dialogue étaient invités à se pencher sur la nécessité d’approfondir les connaissances scientifiques et d’accélérer les transferts de techniques marines pour améliorer la santé des océans, conformément à la huitième cible de l’objectif 14 du Programme de développement durable à l’horizon 2030 relatif à la conservation et à l’exploitation durable des océans.
« Comprendre les océans, c’est un peu comme faire une croisière sans jamais atteindre les côtes », a déclaré Mme THORGERDU KATRIN GUNNARSDOTTIR, Ministre de la pêche et de l’agriculture de l’Islande et Coprésidente du dialogue, soulignant ainsi le besoin de données scientifiques fiables sur les océans pour formuler des politiques de préservation efficaces.
« Comment protéger quelque chose que nous ne comprenons pas très bien? », s’est en effet interrogé le représentant du Royaume-Uni. La réponse est claire, a répondu M. HECTOR SOLDI, Vice-Ministre de la pêche et de l’aquaculture du Pérou et Coprésident du dialogue. « Il faut accumuler les données car nous n’en aurons jamais assez sur les océans. » « Que faire de ces données quand on n’a pas de stratégie sur la manière de les traiter? » a fait remarquer le Cofondateur et Directeur général de l’entreprise privée sud-africaine OLSPS. Les opérations de collecte de données manquent souvent d’objectifs clairs. Une fois collectée, les données ne disent pas en quoi elles sont utiles.
Avant de collecter les données, il faut d’abord identifier les variables à mesurer, a reconnu un Professeur à l’Université Simon Bolivar et à l’Université de Tasmanie, au Venezuela, prêchant de nouveaux modèles d’analyse. Collecter des données ne suffit pas, encore faut-il s’occuper de leur qualité, a ajouté l’animateur du dialogue, M. JOHAN KUYLENSTIERNA, Directeur exécutif de l’Institut pour l’environnement de Stockholm, en Suède.
Il est donc important de combler le fossé existant entre les observations scientifiques et les utilisateurs finaux, a estimé la professeur à l’Université Simon Bolivar et à l’Université de Tasmanie. Elle a ainsi appelé les chercheurs à mieux articuler les applications pratiques de leurs découvertes, afin d’en expliquer l’utilité aux responsables politiques.
Elle a également appelé la communauté scientifique à réaliser un meilleur suivi des chercheurs des pays en développement formés dans les pays développés. « Lorsqu’ils rentrent chez eux, ils ne trouvent pas les mêmes infrastructures pour travailler, choisissant même de ne pas rentrer du tout. La représentante de l’Université des Nations Unies (UNU) a reconnu le problème et affirmé que l’UNU s’efforce justement d’effectuer un bon suivi des chercheurs qu’elle forme, « pour qu’ils rentrent dans leur pays avec des solutions en main ». Remédier au déficit d’infrastructures en matière recherche océanique, a-t-elle dit, doit passer par un développement des capacités et le transfert des technologies, particulièrement dans les petits États insulaires en développement et dans les États côtiers d’Afrique. Accélérer le transfert de technologies est d’une importance capitale, a acquiescé le représentant du Bangladesh qui a agité le risque de ne pas atteindre les objectifs de développement durable. Cela suppose un renforcement, non seulement de la coopération Nord-Sud, mais aussi de la coopération Sud-Sud, a insisté son homologue du Brésil.
Ce qui freine le transfert de technologies, c’est avant tout le rythme effréné des innovations, a estimé le Directeur et Président de l’ONG Woods Hole Oceanographic Institution. « Non seulement ça va très vite », a-t-il expliqué, mais les innovations technologiques qui permettent d’améliorer la santé des océans ne viennent pas toujours des grandes entreprises. « Elles sortent des petits garages », ce qui fait obstacle à leur diffusion. Par exemple, nous avons désormais des batteries qui utilisent de l’eau de mer et de l’aluminium pour générer de l’électricité. Mais entre l’innovation et l’industrialisation, il y a tout un chemin à parcourir.
Le problème est plutôt l’absence de planification stratégique pour parvenir à un réel transfert de technologies, a estimé le président et directeur général de l’entreprise privée sud-africaine OLSPS. Il faut donc, a suggéré le Directeur exécutif de l’Institut pour l’environnement de Stockholm, créer de nouveaux partenariats et impliquer le secteur privé. Ce secteur privé doit investir davantage, en particulier dans le développement des systèmes d’observation, a ajouté le Secrétaire exécutif de la Commission océanographique intergouvernementale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO). De nouveaux systèmes sont nécessaires pour répondre aux questions actuelles sur les océans et mieux comprendre comment la pollution affecte les espèces marines, s’est-il expliqué, ajoutant qu’il s’agit là d’un nouveau domaine scientifique à développer.
Il y a toutefois une « difficulté structurelle » à la création de ces systèmes d’observation, a prévenu le Cofondateur et Directeur général de l’entreprise privée sud-africaines OLSPS: « Les océans sont très difficiles à observer », car il existe une infinité de types de navires, de pratiques de pêche et d’espèces marines. « Tout est complexe, c’est un chaos dynamique. »
« Le fonds des océans reste particulièrement méconnu », a aussi noté la représentante de la Deep Ocean Stewardship Initiative (DOSI). Pour mieux le comprendre, elle n’a vu que la création d’un système d’observation des eaux profondes « à l’échelle mondiale ». Dans cette perspective, la représentante du Canada a fait savoir que son pays participait à une initiative scientifique prometteuse visant à obtenir des données océanographiques en temps réel pour analyser le fonds des océans.
Une fois sur pied, s’est empressé le directeur et Président de l’ONG Woods Hole Oceanographic Institution, ces systèmes d’observation et ces bases de données doivent impérativement être partagés non seulement avec les scientifiques mais avec l’ensemble des acteurs impliqués dans la préservation des océans. « Nous avons besoins de nouvelles technologies de l’information non seulement pour traiter, mais aussi pour diffuser les données », a-t-il insisté.
Le problème, a déclaré la Ministre de la pêche et de l’agriculture de l’Islande, est que les ressources pour procéder à ce type de recherches font souvent défaut. Ce manque de ressources conduit à une situation absurde, a déclaré le représentant de la Stratégie mondiale intégrée d’observation (IGOS): « Nous connaissons mieux la lune et l’espace extra-atmosphérique que nos propres océans ». Dans la mesure où nous ignorons environs 85% des fonds marins, a-t-il dit, il n’existe aucune carte détaillée des zones couvertes par l’objectif de développement durable 14.
Il est « indispensable » que les États donnent le financement nécessaire pour améliorer les connaissances globales, a déclaré le représentant de Monaco, précisant que son pays parrainait, à cette fin, un certain nombre d’initiatives de pointe. « La science doit être financée de manière durable », a insisté le Directeur et Président de l’ONG Woods Hole Oceanographic Institution. Pour y parvenir, le représentant du Royaume-Uni a proposé la création d’un mécanisme global de financement pour pérenniser l’observation des océans.