En réponse aux « ventes d’esclaves » en Libye, le Conseil plaide pour une intensification de la lutte contre la traite des personnes
Profondément préoccupé par les informations faisant état de la vente de migrants comme « esclaves » en Libye, le Conseil de sécurité a exhorté, ce matin, l’ensemble des États Membres à mettre efficacement en œuvre le Plan d’action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes afin de répondre à ces « atroces » violations des droits de la personne « susceptibles d’être constitutives de crimes contre l’humanité ».
Dans une déclaration présidentielle prononcée trois semaines après l’adoption à l’unanimité de la résolution 2388 (2017) portant sur le trafic des êtres humains en contexte de conflit, le Conseil appelle d’autre part l’ONU à intensifier ses efforts, notamment par l’intermédiaire du Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes.
Il considère, à cet égard, que la prévention et la protection des victimes de la traite, notamment à des fins d’esclavage, doivent être placées au centre de toute réponse nationale et internationale.
À cette même fin, il préconise le renforcement des mesures d’identification, d’enregistrement et d’assistance adaptée au sexe et à l’âge, des services de réadaptation physique, psychologique et sociale et des soins apportés aux victimes. Il enjoint en outre les États Membres et l’ONU de mener, chaque fois que nécessaire, une « évaluation systématique de la vulnérabilité à la traite des personnes », et encourage par ailleurs les États de transit et de destination à élaborer et à mettre en place des mécanismes d’alerte et de dépistage précoces.
De surcroît, le Conseil engage les États Membres à redoubler d’efforts pour « désorganiser et démanteler » les réseaux qui se livrent à la traite des personnes dans les zones touchées par les conflits armés et à mener des enquêtes à leur sujet. Il convient, précise son président, de « prendre toutes les mesures appropriées pour recueillir, conserver et stocker les éléments de preuve de la traite d’êtres humains et aider à en punir les auteurs ».
Soucieux de pouvoir compter sur une « Libye stable », il réaffirme, enfin, son appui au Plan d’action des Nations Unies en faveur de ce pays et engage, de nouveau, tous les Libyens à travailler ensemble, dans le cadre du processus politique ouvert à tous, facilité par le Représentant spécial du Secrétaire général, M. Ghassan Salamé, tout en encourageant l’Union européenne, l’Union africaine et l’ONU à coopérer pour protéger la vie des migrants sur les routes migratoires.
Prenant la parole après la lecture de cette déclaration, le représentant de la Fédération de Russie a indiqué que sa délégation avait apporté son soutien à ce texte, se ralliant à la voix de ceux qui sont préoccupés par la vente de migrants sur des marchés aux esclaves en Libye.
Mais les auteurs de ce texte, a-t-il regretté, ont écouté certains membres du Conseil en refusant d’intégrer un élément demandé par la Fédération de Russie, une « référence au chaos qui prévaut en Libye », consécutif, selon lui, à l’intervention militaire lancée en 2011 dans ce pays.
MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES
Déclaration du Président du Conseil de sécurité
Le Conseil de sécurité exprime sa profonde préoccupation face aux informations indiquant que des migrants seraient vendus comme esclaves en Libye. Il condamne ces atroces violations des droits de la personne, qui sont aussi susceptibles d’être constitutives de crimes contre l’humanité. Il demande à toutes les autorités compétentes d’enquêter sans retard sur ces agissements pour traduire les coupables en justice et amener les responsables à répondre de leurs actes.
Le Conseil accueille à cet égard avec satisfaction la déclaration que le Conseil de la présidence du Gouvernement d’entente nationale de la Libye a faite pour condamner la traite des personnes, y compris à des fins d’esclavage, en Libye ou ailleurs, et il note que le Gouvernement d’entente nationale a ouvert une enquête sur les faits signalés et s’est engagé à amener les responsables à répondre de leurs actes. Le Conseil accueille également avec satisfaction les déclarations faites par l’Union africaine pour demander qu’il soit mis fin immédiatement à de telles pratiques et il se félicite que le Secrétaire général de l’ONU ait demandé à tous les acteurs des Nations Unies concernés de continuer d’étudier la question.
Le Conseil réaffirme son appui au Plan d’action des Nations Unies en faveur de la Libye, il engage de nouveau tous les Libyens à travailler ensemble, dans un esprit de compromis, dans le cadre du processus politique ouvert à tous facilité par le Représentant spécial du Secrétaire général, Ghassan Salamé, et souligne que le seul moyen d’améliorer les conditions de vie de tous les habitants, y compris les migrants, est de pouvoir compter sur une Libye stable.
Le Conseil se déclare de nouveau préoccupé par le trafic de migrants et la traite de personnes par le territoire libyen, et salue le travail accompli par la MANUL pour coordonner et soutenir la fourniture d’une aide humanitaire pour les réfugiés et les migrants par l’intermédiaire de l’équipe de pays des Nations Unies, en particulier du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et de l’Organisation internationale des migrations,
Le Conseil souligne en outre la nécessité de coordonner les efforts engagés pour s’attaquer, de manière globale et détaillée, aux causes profondes des déplacements massifs de population, y compris les déplacements forcés, les migrations incontrôlées et la traite des personnes, pour empêcher l’exploitation des réfugiés et des migrants par les passeurs et les trafiquants, ainsi que la nécessité d’appliquer le Programme 2030.
Le Conseil souligne qu’il importe d’apporter une solution globale au problème de tous les migrants en Libye et de renforcer la coopération de la communauté internationale avec les autorités libyennes.
Le Conseil affirme avec insistance que les migrants doivent être traités avec humanité et dignité et dans le plein respect de leurs droits et, à cet égard, exhorte les autorités libyennes et tous les États Membres à s’acquitter de leurs obligations en vertu du droit international, notamment du droit international des droits de l’homme et du droit international des réfugiés, selon qu’il convient.
Le Conseil souligne qu’il est nécessaire de transférer les détenus aux autorités de l’État et engage les autorités libyennes à renforcer leur coopération avec les organisations internationales et les organismes des Nations Unies pour garantir l’accès humanitaire aux centres de détention.
Le Conseil rappelle sa résolution 1970 (2011) et constate que les individus et entités qui préparent, donnent l’ordre de commettre ou commettent, en Libye, des actes contraires au droit international des droits de l’homme ou au droit international humanitaire, ou constituant des atteintes aux droits de l’homme, peuvent faire l’objet d’une désignation par le Comité des sanctions créé par la résolution 1970 (2011).
Le Conseil de sécurité se déclare de nouveau préoccupé par les implications que la criminalité transnationale organisée et les activités illicites, telles que la traite des personnes et le trafic de migrants, ont pour la stabilité régionale, et engage les États Membres à intensifier leurs efforts pour désorganiser et démanteler les réseaux qui se livrent à la traite des personnes dans les zones touchées par les conflits armés et mener des enquêtes à leur sujet, et à prendre toutes les mesures appropriées pour recueillir, conserver et stocker les éléments de preuve de la traite d’êtres humains et aider à en punir les auteurs, et à cet égard, prie l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, dans le cadre de son mandat, de fournir une assistance technique aux États Membres à leur demande.
Le Conseil de sécurité rappelle en outre ses résolutions 2331 (2016) et 2388 (2017) sur la traite d’êtres humains dans les situations de conflit dans lesquelles il se dit conscient que la traite peut servir à différentes formes d’exploitation, notamment l’esclavage ou les pratiques analogues. Il demande de nouveau aux États Membres d’envisager, à titre prioritaire, de ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et ses protocoles additionnels, en particulier le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants et le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer.
Le Conseil de sécurité exhorte, d’une part, tous les États Membres à mettre efficacement en œuvre le Plan d’Action mondial des Nations Unies pour la lutte contre la traite des personnes, d’autre part, l’ONU à intensifier ses efforts, notamment par l’intermédiaire du Groupe interinstitutions de coordination contre la traite des personnes.
Le Conseil de sécurité encourage l’Union européenne, l’Union africaine et l’ONU à coopérer pour protéger la vie des migrants et des réfugiés sur les routes migratoires et particulièrement en Libye.
Le Conseil de sécurité réaffirme en outre que la prévention et la protection des victimes de la traite, notamment à des fins d’esclavage, doivent être placées au centre de toute réponse nationale et internationale, notamment grâce au renforcement des mesures d’identification, d’enregistrement et d’assistance adaptée au sexe et à l’âge, des services de réadaptation physique, psychologique et sociale et des soins apportés aux victimes, et qu’il importe que les États Membres et l’ONU mènent, chaque fois que nécessaire, une évaluation systématique de la vulnérabilité à la traite des personnes, et encourage par ailleurs les États Membres, en particulier les États de transit et de destination, à élaborer et à mettre en place des mécanismes d’alerte et de dépistage précoces.
Le Conseil de sécurité salue les efforts que font actuellement les États Membres et les organisations régionales pour aider la Libye, à sa demande, à renforcer les moyens dont elle dispose, notamment pour sécuriser ses frontières et pour prévenir les actes de trafic de migrants et de traite des personnes, enquêter à leur sujet et en poursuivre les auteurs sur son territoire et dans ses eaux territoriales, et encourage les États Membres et les organisations régionales à continuer dans cette direction, en partenariat avec le Conseil de la présidence du Gouvernement d’entente nationale de la Libye et en appui à l’équipe de pays des Nations Unies, en particulier le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), tout en réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Libye.