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AG/EF/3260

Face à la crise économique et financière, une table ronde de la Deuxième Commission souligne la nécessité d'une nouvelle gouvernance économique mondiale

30/10/2009
Assemblée généraleAG/EF/3260
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Deuxième Commission

Table ronde - matin


FACE À LA CRISE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE, UNE TABLE RONDE DE LA DEUXIÈME COMMISSION SOULIGNE LA NÉCESSITÉ D’UNE NOUVELLE GOUVERNANCE ÉCONOMIQUE MONDIALE


« La crise financière mondiale a mis en lumière les grandes insuffisances du système financier international, et sa revitalisation exige que plusieurs défis soient relevés ».  C’est en ces termes que M. PARK IN-KOOK (République de Corée), Président de la Commission économique et financière (Deuxième Commission), a ouvert ce matin la septième d’une série de tables rondes qui était consacrée, aujourd’hui, à la revitalisation du système financier international.  À sa suite, trois experts panélistes ont pris la parole pour, tout à la fois, analyser les problèmes du système financier mondial et identifier les options pour le sortir de la crise.


Dans son propos introductif, le Président de la Deuxième Commission a jugé qu’il y a un besoin urgent de réforme coordonnée au plan international du système de régulation des marchés financiers.  Le Fonds monétaire international (FMI) doit, en outre, accorder une attention particulière aux pays dont l’importance est centrale pour le système, a encore plaidé M. Park.  Plus fondamentalement, a-t-il poursuivi, il s’agit de parvenir à une profonde réforme des fondations du système financier mondial afin de le rendre plus stable et capable de favoriser les échanges et le financement du développement.  Enfin, trouver une réponse satisfaisante à l’enjeu de la gouvernance économique mondiale est, a conclu M. Park, un prérequis de la revitalisation du système financier international.


Au moment de céder la parole aux experts panélistes, le Président de la Deuxième Commission leur a suggéré de se pencher, entre autres interrogations, sur celles relatives aux moyens de renforcer la coopération et la coordination entre régulateurs financiers nationaux, ainsi qu’à la mise en place d’un mécanisme de régulation multilatéral, à la coopération internationale en matière fiscale et monétaire, ou encore, à la mise en place d’une réserve mondiale.


Table ronde sur le thème « revitaliser le système financier international »


Déclarations liminaires


M. JOMO KWAME SUNDARAM, Sous-Secrétaire général des Nations Unies chargé du développement économique, a jugé que bien avant son déclenchement, on avait les signes annonciateurs de la crise actuelle.  Divers déséquilibres, fondés sur l’idéologie de la dérégulation et l’autorégulation notamment, affectaient la viabilité de l’architecture financière internationale, a-t-il précisé, estimant par ailleurs que face à cette crise qui frappe plus durement les « victimes innocentes » que sont les pays du Sud, les réponses politiques sont inadéquates et font du deux poids deux mesures.  Après avoir proposé une lecture de la politique macroéconomique des États-Unis, M. Sundaram a noté l’impact négatif qu’ont eu leurs politiques monétaires peu rigoureuses et la bulle immobilière sur le déclenchement de la crise financière.  Selon lui, c’est la crise des crédits hypothécaires à risque qui a mené à la crise financière, puis à la dévalorisation des valeurs et des biens et enfin, à la crise des liquidités, engendrant la crise financière et économique globale. 


Poursuivant son analyse, le Sous-Secrétaire général des Nations Unies chargé du développement économique a énuméré diverses conséquences de cette crise pour les pays en développement en particulier: effondrement des marchés boursiers dans les pays; et inversement, des flux de capitaux et augmentation du prix des emprunts notamment.  Tout ceci, a-t-il poursuivi, alors que les transferts financiers du Sud vers le Nord étaient déjà plus importants que ceux du Nord vers les pays du Sud.  Pour ces derniers, la croissance est passée de 4% en 2008 à 0,1% en 2009, alors qu’elle passait de 0,9% à -3,4% au niveau mondial, a encore observé M. Sundaram, expliquant aussi que la baisse du commerce mondial et des exportations affectera encore beaucoup plus les pays en développement, de même que celle de l’aide publique au développement (APD) et des envois d’argent de migrants.  Au plan social enfin, il y a risque de multiplication de crises et de soulèvements, a-t-il relevé.


Abordant les actions à entreprendre face à la crise, M. Sundaram a suggéré qu’il faut contenir la crise, relancer l’économie par des mesures fiscales et monétaires, et mieux réguler au plan national et international.  Il faut encore, a-t-il indiqué, financer le développement et accorder plus de marge de manœuvre aux pays afin qu’ils mettent en œuvre des politiques fiscales qui s’imposent et aient le droit de stimuler leurs économies.  Plus largement, a-t-il conclu, il faut mener une réforme systémique de l’architecture financière des institutions de Bretton Woods qui date de 1944.  L’enjeu, a-t-il souligné, doit être désormais de placer les Nations Unies au centre d’une réforme globale et inclusive qui placerait les institutions financières internationales sur la trajectoire des objectifs internationaux de développement.


M. JEFFREY LEWIS, Conseiller principal et Chef du Groupe de la politique et du partenariat internationaux du réseau Lutte contre la pauvreté et gestion économique de la Banque mondiale, a noté que l’économie mondiale a été victime de trois vagues de crises: en premier, les crises énergétique et alimentaire, ensuite la crise financière, et enfin la récession globale.  Ces vagues de crises ont obligé à repenser les principes qui guident les politiques fiscales et monétaires, de même qu’elles ont restauré les gouvernements dans leur rôle de prêteurs et assureurs de derniers recours, a-t-il ajouté.  La crise, a encore suggéré M. Lewis, a poussé à prêter attention aux déséquilibres structurels du système financier mondial et en particulier à la vulnérabilité du système commercial international ainsi qu’à celle des pays en développement notamment. 


Il apparait dès lors, a expliqué Jeffrey Lewis, qu’une des mesures préventives face à de telles crises est le développement du secteur financier privé qui permettrait une plus grande mobilisation de ressources domestiques, réduisant du même coup la vulnérabilité des économies aux chocs extérieurs.  Afin d’aider le secteur financier privé à se développer, il faudrait notamment recapitaliser les banques en difficulté et soutenir la microfinance, a-t-il encore plaidé.  Les réformes doivent en outre, selon M. Lewis, toucher le système commercial international et soutenir, là aussi, le secteur privé tout en combattant les tendances protectionnistes qui menacent toujours d’apparaître dans les périodes difficiles. 


Constatant, tout comme M. Sundaram avant lui, l’impact de la récession mondiale sur certains pays en particulier, il a souhaité que ceux-ci disposent d’une plus grande marge de manœuvre dans la mise en œuvre de politiques fiscales qui s’imposent.  L’enjeu ultime, a enfin relevé M. Lewis, devant être de retrouver les niveaux de croissance enregistrés avant la crise, car a-t-il prévenu, dans plusieurs pays « une brève période de ralentissement peut avoir des impacts à long terme sur la pauvreté et la croissance économique ».


M. RANJIT TEJA, Directeur adjoint du Département de la stratégie, des politiques et de la révision du Fonds monétaire international, a noté qu’une évolution radicale vers un système économique mondial plus multilatéral avait eu lieu à la faveur de la crise et s’est félicité des réformes en cours qui donneront bientôt un tout autre visage au Fonds monétaire international.  Le Fonds, a-t-il indiqué, a récemment triplé la somme de ses emprunts, permettant ainsi de stimuler l’économie mondiale.  Reste, a noté M. Teja, la question de la dimension qui doit être celle du FMI.  Abordant la question de la gouvernance économique mondiale –elle aussi en suspens– Ranjit Teja s’est interrogé sur la forme qu’elle devrait prendre: celle d’une entité supranationale unique?  Ou alors, celle d’un réseau entre instances nationales?  « La première solution, a-t-il indiqué, remporte ma préférence, bien que la seconde me semble la plus probable dans le contexte actuel dans lequel les États sont peu disposés à céder des pans de leur souveraineté ».  Abordant enfin la question de la monnaie de réserve mondiale, il a jugé que le dollar américain l’est devenu parce que c’est ce que voulaient « les gens et les marchés financiers » et en dépit de la crise, les choses n’ont pas changé, a-t-il ajouté.  Il a souligné, en outre, que le remplacement du dollar en temps que monnaie de réserve s’effectuerait s’il s’avérait nécessaire.  M. Teja a conclu en plaidant pour l’identification d’alternatives en cas d’accumulation excessive de réserves monétaires. 


Dialogue interactif


Lors du débat qui a suivi, plusieurs délégations ont déploré l’impact de la crise mondiale sur les pays en développement.  Un délégué s’est interrogé sur la manière de rendre la gouvernance économique mondiale plus inclusive.


Répondant à cette interrogation, M. SUNDARAM a estimé que la gouvernance des institutions financières internationales était marquée par l’iniquité, et que les États Membres des Nations Unies devaient mettre en place un système financier international plus cohérent et plus responsable.  M. TEJA a, pour sa part, plaidé en faveur d’un financement privé, et non pas public, des mesures destinées à relancer l’économie. 


Réagissant à l’intervention du représentant de l’Éthiopie faisant état du « devoir moral » qu’ont les pays développés d’aider les pays du Sud, victimes d’une crise qu’ils n’ont pas provoquée, M. LEWIS a relevé que l’aide face à la crise pouvait aussi se fonder sur la préservation des intérêts des pays développés.  « Ils y ont intérêt puisque les pays à revenu moyen et certains des pays les moins avancés ont été les moteurs de la croissance mondiale avant la crise, et les relancer aiderait la relance mondiale », a-t-il souligné.  Abordant l’enjeu de la représentativité du G-20 et des institutions de Bretton Woods, il a observé que le premier compte en réalité beaucoup plus que 20 membres, et que le pouvoir de décision au sein des secondes appartient principalement à des pays qui ensemble représentent 85% du produit intérieur brut (PIB) mondial. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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