Une table ronde de la Deuxième Commission rappelle l'urgence de la coopération et de l'action face aux risques sécuritaires liés aux changements climatiques
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Deuxième Commission
Table ronde – matin
UNE TABLE RONDE DE LA DEUXIÈME COMMISSION RAPPELLE L’URGENCE DE LA COOPÉRATION ET DE L’ACTION
FACE AUX RISQUES SÉCURITAIRES LIÉS AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES
Bien que largement débattues depuis l’ouverture, le 15 septembre dernier, de la soixante-quatrième session de l’Assemblée générale, notamment lors du Sommet de haut niveau qui a eu lieu le 23 septembre, les répercussions et les menaces que posent les changements climatiques à l’échelle de la planète étaient, ce matin, l’objet d’une discussion organisée dans le cadre du cinquième des évènements spéciaux de la Commission économique et financière (Deuxième Commission). Présidée par M. Park In-kook (République de Corée), la table ronde a réuni cinq experts panélistes dont les interventions ont abordé les implications, au niveau de la sécurité, des changements liés au climat.
Ouvrant les débats, le Président de la Commission économique et financière a souligné que les changements climatiques peuvent avoir des conséquences négatives sur les enjeux de sécurité de diverses manières: en ralentissant les progrès économiques; en contribuant aux déplacements de population; ou encore, en accentuant les difficultés d’accès aux ressources de base -terre, eau- et les conflits. « Dans biens des cas, a poursuivi Park In-kook, les changements climatiques sont des catalyseurs de menaces face auxquels il faut trouver des solutions, en favorisant un développement durable ». Dans le cadre de la lutte contre ces phénomènes, M. Park a relevé la situation particulière dans laquelle se trouvent les petits États insulaires en développement, ainsi que les pays dont le territoire se situe en dessous du niveau de la mer. Il en est de même en ce concerne les régions de deltas, ainsi que les pays les plus souvent affectés par la sécheresse.
Table ronde sur le thème « Changements climatiques: Répercussions et menaces »
Déclarations liminaires
Mme MARGARETA WAHLSTROM, Sous-Secrétaire générale à la réduction des risques de catastrophe et Représentante spéciale du Secrétaire général pour la mise en œuvre du Cadre d’action de Hyogo, a parlé des obstacles qui se posent aux efforts déployés en matière de réduction des conséquences et des effets des catastrophes dans un monde ou celles-ci se multiplient, affectant davantage les pays pauvres et les couches de populations les plus pauvres vivant dans les pays riches. Ces obstacles sont notamment économiques, mais aussi institutionnels, a-t-elle relevé. Le plus grand obstacle à relever, a-t-elle souligné, est la difficile mise en place d’une nouvelle vision institutionnelle qui considère la question des efforts à mener face aux catastrophes naturelles comme un enjeu de développement. Mme Wahlstrom s’est félicitée des efforts menés dans de nombreux pays pour lesquels les problèmes de sècheresse, d’accès à l’eau, et la fréquence d’évènements extrêmes liés aux changements climatiques sont des questions d’actualité. Les changements climatiques, a-t-elle ajouté, doivent nous pousser à aller au-delà des frontières que nous nous fixons habituellement. Plus de développement et de coopération sont nécessaires, a souligné la Sous-Secrétaire générale à la réduction des risques de catastrophe. Évoquant le Cadre d’action de Hyogo, le principal instrument que les États Membres des Nations Unies ont adopté pour réduire les risques de catastrophe, elle a noté qu’en dépit de ses mérites, ce Cadre n’était pas un plan d’action. C’est à chaque acteur de mettre en œuvre ses actions, a-t-elle relevé. Dans cette optique, elle a estimé que la sensibilisation du grand public aux défis que posent les changements climatiques est importante, de même que la mise en place de vrais plans d’action. La pénurie en eau, a-t-elle par ailleurs noté, représente un problème important dont on parle assez peu. Elle a averti du risque de conflits liés à cette pénurie. Les enjeux liés à l’accès à la terre et la fonte des glaciers, a-t-elle encore précisé, sont des problèmes qui nécessitent davantage de collaboration entre les pays.
M. GEOFFREY DABELKO, Directeur du Programme sur les changements environnementaux et la sécurité au Centre international Woodrow Wilson pour les chercheurs, a souligné, à la suite du Président de la Deuxième Commission, les liens entre les enjeux de sécurité et ceux des changements climatiques. Ces derniers, a-t-il relevé, affectent le développement des sociétés et la vulnérabilité des plus pauvres, causent des déplacements de populations, et attisent l’émergence de nouveaux conflits. Face à ces impacts négatifs, M. Dabelko a appelé à la mise en œuvre d’institutions qui favorisent la bonne gouvernance et la résilience des populations face à la dégradation du climat et de l’environnement. De même, a-t-il ajouté, il faut faire face aux problèmes posés par la raréfaction des ressources en eau, en favorisant la coopération transfrontalière par la mise en place d’institutions dévolues à cette fin. M. Dabelko a, en outre, plaidé en faveur d’une coopération soucieuse d’éviter les conflits dans le cadre des efforts en cours contre les changements climatiques. Enfin, il a contesté l’idée répandue selon laquelle ce sont les pauvres qui sont les plus vulnérables face aux changements climatiques, estimant que les populations des grandes villes côtières des pays développés dotées de bonnes infrastructures sont elles aussi vulnérables. D’où, a-t-il conclu, l’intérêt pour tous d’agir ensemble face aux défis posés par les changements climatiques.
M. ROLPH PAYET, Conseiller spécial auprès du Président de la République des Seychelles,a ouvert son exposé en posant la question de savoir si les changements climatiques relevaient d’une problématique de développement ou d’une problématique de sécurité humaine. Les deux sont en réalité étroitement liées, a-t-il fait observer, rappelant que ce phénomène était caractérisé par le déclenchement d’un effet domino: la dégradation des écosystèmes provoquée par le réchauffement planétaire a en effet un impact sur les infrastructures agricoles et touristiques et les systèmes d’eau et d’assainissement. Les changements climatiques vont inexorablement devenir un problème planétaire, car ils ne connaissent pas de frontière géographique, a fait observer M. Payet, rappelant aussi le nombre croissant de « réfugiés climatiques ». La portée des problèmes créés, a-t-il analysé, entraîne une nécessaire redéfinition du concept juridique de souveraineté des États, à la lumière de celui de la responsabilité des États. En 2008, 140 millions de personnes ont été forcées de quitter leurs logements à cause des inondations, et 146 millions à cause de la sécheresse, a précisé M. Payet, avant d’attirer l’attention sur le cas particulier des petits États insulaires en développement (PEID). Une large majorité d’entre eux ressortent de la catégorie des pays à revenu intermédiaire, mais le coût humain des changements climatiques dans ces pays pourrait s’avérer particulièrement élevé, a-t-il assuré. Cela tient principalement à la fragilité de leurs écosystèmes et à leur vulnérabilité face à la montée du niveau des mers et des océans. Aussi apparaît-il indispensable de repenser les changements climatiques comme un phénomène multidimensionnel et transfrontière, sous peine de ne pas pouvoir relever le défi qu’ils posent aujourd’hui à la communauté internationale, a préconisé le Conseiller spécial du Président des Seychelles.
Abordant l’impact des changements climatiques sur les migrations de populations d’un point de vue empirique, Mme KOKO WARNER, Chef de la Section pour la migration environnementale, la vulnérabilité sociale et l’adaptation, de l’Institut pour l’environnement et la sécurité humaine de l’Université des Nations Unies (UNU-EHS), a estimé que d’ici 2050, plus de 700 millions de personnes seront devenues des migrants par la faute des changements climatiques, ce qui est un chiffre historique. Cependant, elle a relevé que de nombreuses questions relatives aux dynamiques de ces déplacements restent pour l’heure sans réponse. Elle a cependant souligné, à l’instar des autres intervenants, la nécessité d’agir pour prévenir les déplacements massifs de populations. Évoquant les conclusions de 23 recherches multidisciplinaires de grande envergure menées sur près de deux ans à travers le monde grâce à des financements européens, Mme Warner a relayé les inquiétudes de nombreuses victimes, avant d’énoncer les principes qui doivent guider la prise de décisions dans la lutte contre les changements climatiques: prendre en compte la sécurité humaine; investir dans la capacité de résilience; prendre en compte les dynamiques migratoires dans les stratégies d’adaptation; et enfin, combler le fossé entre les populations vulnérables et celles qui le sont moins.
Enfin, de son coté, M. SIMON DALBY, Professeur au Département de géographie de l’Université Carleton, à Ottawa au Canada, s’est étendu sur l’anthropocène, l’ère géologique dans laquelle le monde serait rentré depuis la fin du XVIIIe siècle, marquée par une notable augmentation de la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. M. Dalby a noté que dans ce contexte nouveau, on peut céder au catastrophisme ou faire la politique de l’autruche. Depuis 1958, la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère est passée de 310 à 380 particules par millions, soit 0,0310% à 0,0380% de l’atmosphère terrestre, a-t-il ajouté, suggérant que cette tendance doit être ralentie. Évoquant les recherches menées sur les liens entre la protection de l’environnement et le processus de mondialisation, il a souligné que les êtres humains ont artificiellement changé le monde autour d’eux sans se préparer cependant aux catastrophes que cela pourrait causer. L’impact de l’ouragan Katrina en 2005 aux États-Unis ou celui des inondations de juillet 2005 à Mumbai, en Inde, est d’abord la conséquence du mauvais niveau de préparation de nos sociétés, a-t-il relevé. Dans le futur, a-t-il estimé, de notre niveau de préparation et du choix du développement durable qu’il nous faut faire dépendra la vie. Enfin, Simon Dalby a plaidé pour la mise en place d’institutions capables de faciliter la résilience des populations et la gouvernance des enjeux liés à la gestion de l’eau notamment. Tels sont les défis que doivent relever les Nations Unies notamment, a-t-il conclu.
Dialogue interactif
Ouvrant la discussion interactive, le représentant du Bangladesh s’est inquiété de ce que, dans le contexte actuel de crise, qui donne vie à une recrudescence du protectionnisme, la résolution des problèmes d’accès à l’eau ne soit davantage contrariée.
Le représentant de la Sierra Leone s’est dit « troublé », au terme des exposés des panélistes, notant que d’autres courants de pensée absolvent les humains comme étant responsables des changements climatiques.
Le représentant de la Fédération de Russie a souhaité qu’à l’avenir, les représentants de ces courants discordants soient invités à s’exprimer eux aussi.
Pour sa part, la représentante de la Jamaïque a reconnu, à la suite de M. Dabelko, que si tous les pays sont vulnérables face aux changements climatiques, tous ne sont pas également dotés pour y faire face. Face à cette inégalité, le représentant de la Barbade s’est interrogé sur ce qui est envisagé, dans le cadre des négociations menant à la Conférence de Copenhague, pour aider les pays les plus vulnérables en particulier.
S’exprimant au nom de l’Union européenne, le représentant de la Suède s’est félicité des efforts entrepris au sein des Nations Unies dans la lutte contre les changements climatiques. Il a rappelé la nécessité de rester en dessous du seuil d’augmentation de la température mondiale de l’ordre de 2 C. Enfin, tout comme les représentants du Danemark et de l’Indonésie, il s’est interrogé sur les actions à mener pour y parvenir par les États Membres des Nations Unies.
Réagissant à certains des points soulevés, Mme WAHLSTROM a cité le rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) pour préciser qu’il existe un lien, à court terme, entre l’augmentation des catastrophes naturelles et les changements climatiques.
Sur les actions à mener face aux changements climatiques, M. DABELKO a souligné l’importance d’agir en pensant au long terme. Revenant sur la vulnérabilité des pauvres vivant dans les pays riches, il a regretté que celle-ci ne mobilise toujours pas suffisamment l’attention.
M. PAYET a noté que bien que le débat sur l’influence des humains sur le climat soit très vif, au fil des années, des éléments solides sont venus alimenter le point de vue soutenant la responsabilité des hommes dans le drame que l’on observe en ce moment. Il a surtout souligné l’urgence de l’action dans le contexte actuel, un point de vue sur lequel a aussi insisté M. DALBY.
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