AG/COL/3192

L’Espagne et le Chef de l’opposition de Gibraltar confrontent leurs vues sur l’avenir du territoire, administré par le Royaume-Uni

09/06/2009
Assemblée généraleAG/COL/3192
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Comité spécial chargé d’étudier la situation

en ce qui concerne l’application de la Déclaration

sur l’octroi de l’indépendance aux pays

et aux peuples coloniaux

Reprise de session de 2009

4e séance – matin


L’ESPAGNE ET LE CHEF DE L’OPPOSITION DE GIBRALTAR CONFRONTENT LEURS VUES SUR L’AVENIR DU TERRITOIRE, ADMINISTRÉ PAR LE ROYAUME-UNI


Des divergences persistent quant à la décolonisation de Gibraltar, à la lumière des déclarations prononcées ce matin par le chef de l’opposition de ce territoire sous administration britannique et le représentant de l’Espagne, qui en revendique la souveraineté.  Ces interventions ont été faites lors de la réunion du Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, dit « Comité spécial des Vingt-Quatre ».


Gibraltar figure parmi les 16 territoires qui demeurent à ce jour non autonomes, et pour lesquels l’ONU s’est engagée, par le biais notamment du Comité spécial, à mettre en œuvre les conditions nécessaires à l’autonomie.  Selon le Royaume-Uni, Puissance administrante, la superficie de Gibraltar est de 5,8 kilomètres carrés et selon l’Espagne, elle est de 4,8 kilomètres carrés.  La question des eaux territoriales situées au large des côtes de Gibraltar continue de faire l’objet d’un litige*.


Dans son intervention, le représentant de l’Espagne a fait référence à la déclaration détaillée prononcée par son pays lors du dernier Séminaire régional sur la décolonisation, qui s’est tenu à Saint-Kitts-et-Nevis.


M. Alberto Virella a souligné l’engagement de son pays à la décolonisation, en particulier de Gibraltar, seul territoire non autonome qu’un État européen conserve sur le territoire d’un autre État européen.  Il s’agit ici, a-t-il souligné, de deux États membres de l’Union européenne (UE) et d’alliés au sein de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). 


Car pour la délégation, la situation de Gibraltar est de nature coloniale et, de ce fait, incompatible avec les principes de la Charte des Nations Unies.  Le représentant s’est appuyé sur le Traité d’Utrecht de 1713, toujours en vigueur entre l’Espagne et le Royaume-Uni, selon lequel « Gibraltar doit continuer à être britannique ou redevenir espagnol ».


D’un autre côté, a poursuivi le représentant espagnol, le mandat des Nations Unies concernant Gibraltar est clair depuis 1964.  Il a ainsi fait référence aux décisions qui, chaque année, appellent le Royaume-Uni et l’Espagne à maintenir des négociations bilatérales pour trouver une solution qui tient compte des intérêts des habitants de la « colonie ».  Le Gouvernement espagnol souhaite fermement reprendre son dialogue avec le Royaume-Uni dans le cadre du Processus de Bruxelles, a affirmé M. Virella.


Convaincu de la pertinence du travail du Comité spécial, il s’est opposé à toute tentative de supprimer Gibraltar de la liste des territoires en processus de décolonisation, en dénonçant de « prétendues nouvelles relations qui ne sont rien d’autres qu’un colonialisme par consentement ».  Le représentant s’est ensuite félicité du succès du Forum pour le dialogue sur Gibraltar, lancé en 2004, et a espéré qu’il conduira à un environnement favorable permettant de résoudre les questions de souveraineté séparément, dans le cadre du Processus de Bruxelles. 


Joseph John Bossano, chef de l’opposition à Gibraltar, a exprimé un avis bien différent.  Il a commencé par déplorer le fait que lorsqu’il s’agit de se pencher sur la décolonisation de Gibraltar, l’Espagne semble littéralement prisonnière d’un autre âge.  Voilà un pays, s’est-il expliqué, qui voudrait que les Gibraltariens acceptent que leurs droits soient régis par un Traité vieux de près de quatre siècles, plutôt que par les valeurs des droits de l’homme défendues en 2009.


Il s’est, lui aussi, appuyé sur les décisions du Comité spécial des Vingt-Quatre, depuis 1964, qui affirment que « la Déclaration de décolonisation s’applique pleinement à son pays, en relevant à peine l’existence d’un désaccord entre l’Espagne et le Royaume-Uni ».


En tant que voisin le plus proche de Gibraltar, L’Espagne moderne, a poursuivi le chef de l’opposition, devrait accepter le souhait des Gibraltariens et les aider à le matérialiser, plutôt que de « pleurnicher » sur la perte, en 1704, d’une « minuscule portion de territoire » qu’elle a prise aux musulmans qui l’avaient eux-mêmes dirigée pendant 750 ans.


Reconnaissant que l’Espagne avait toujours respecté la souveraineté des eaux territoriales de Gibraltar, y compris lors du siège de 16 ans imposé en 1969, le représentant s’est ému que les autorités espagnoles prétendent désormais à la responsabilité de protéger l’environnement de ces eaux territoriales et aient provoqué, par leurs incursions, une intervention de la Puissance administrante, comme l’exige la Constitution.  M. Bossano a condamné les mesures prises par l’Espagne comme « des actes agressifs et incompatibles » avec l’Article 74 de la Charte des Nations Unies.


Il a en outre rejeté l’idée selon laquelle Gibraltar n’a pas d’autre choix que de rester britannique ou de redevenir espagnol.  L’Espagne dénonce ce qu’elle considère, à juste titre, comme un « colonialisme par consentement », mais la seule alternative qu’elle propose, a estimé le chef de l’opposition, c’est un « colonialisme sans consentement et par imposition ». 


Or, d’après le Comité spécial des Vingt-Quatre, il n’y a pas d’autodétermination sans décolonisation, a fait observer M. Bossano.  Pour lui, l’Espagne recourt à des arguments fallacieux pour plaider sa cause, et use de la relation privilégiée qu’elle entretient avec certaines de ses anciennes colonies.


Selon le Royaume-Uni, a aussi dénoncé le chef de l’opposition, ce qui a été fait dans la nouvelle Constitution transforme Gibraltar en un territoire « décolonisé et autonome ».  Or, il revient au Comité spécial de répondre à ces assertions et de dire s’il est d’accord ou pas.  C’est ce que le Comité doit dire dans son rapport à la Quatrième Commission sur les changements constitutionnels, et ne plus déclarer, une nouvelle fois, que l’examen de la question est reporté à l’année suivante. 


En matière de décolonisation, trois options sont énoncées dans la résolution 1541 (XV) et une quatrième dans la résolution 2625.  Mais il existe aussi l’option espagnole qui, « relevant carrément de la fiction », consisterait à ce que Gibraltar passe sous administration espagnole, tout en gardant tous les privilèges d’un État non autonome sous administration britannique.  C’est une option que le Comité ne peut et ne saurait appuyer, puisqu’elle est en tout point contraire au mandat de décolonisation. 


Comment répondre à une telle option?  En disant clairement que Gibraltar ne cèdera aucun pouce de son territoire, aucune goutte de ses eaux territoriales et aucun morceau de sa baie ou de son espace aérien, a conclu le chef de l’opposition. 


La prochaine séance plénière du Comité spécial des Vingt-Quatre aura lieu le lundi 15 juin, à 10 heures.  Elle sera consacrée à l’examen de la question de Porto Rico.


*     A/AC.109/2009/15


*   ***   *

À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.