Conseil de sécurité: l’ONU fait état de développements diplomatiques importants sur fond d’escalade dangereuse en Ukraine
La Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix a indiqué ce matin, devant le Conseil de sécurité, que l’Ukraine fait face depuis un mois à une recrudescence brutale et à grande échelle des attaques russes qui fait suite à des développements diplomatiques importants. Mme Rosemary DiCarlo a notamment cité la réunion, le 16 mai à Istanbul, des délégations ukrainienne et russe pour les premières négociations directes depuis trois ans.
Bien que les pourparlers n’aient pas abouti au cessez-le-feu complet, immédiat et inconditionnel, il est encourageant que les parties aient, selon les informations disponibles, convenu de poursuivre le processus. L’espoir que les parties puissent s’asseoir à la table des négociations est toujours vivant, mais il est très faible, a-t-elle toutefois ajouté, notant par ailleurs que la vague massive d’attaques perpétrées ce week-end est un avertissement clair quant à la rapidité avec laquelle cette guerre peut atteindre de nouveaux niveaux de destruction.
De son côté, la Directrice de la Division du financement et des partenariats du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), Mme Lisa Doughten, a fait état d’un bilan « colossal » en pertes civiles et d’une aggravation de la situation humanitaire, les attaques occasionnant de graves dommages contre les infrastructures civiles. Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), plus de 200 attaques ont été perpétrées en 2025 en Ukraine contre des centres de soins, du personnel soignant et des patients. La semaine dernière, plus de 5 000 personnes ont été nouvellement déplacées en raison de l’escalade de la violence. Le nombre de civils tués au cours du premier trimestre de cette année est supérieur de 59% à celui de la même période en 2024, a comptabilisé la Secrétaire générale adjointe qui a également fait état de victimes civiles dans les régions russes limitrophes de l’Ukraine.
La protection des civils et des infrastructures civiles est fondamentale, a insisté Mme Doughten, qui a également appelé à faciliter un accès humanitaire pérenne et à financer la réponse humanitaire. « Chaque dollar nous permet d’aider des familles sous les bombes. »
L’écrasante majorité des membres du Conseil et d’autres délégations ont dénoncé les attaques de missiles de longue portée et de drones russes de ces derniers jours en Ukraine. La Fédération de Russie a décrié, pour sa part, qu’on passe sous silence les bombardements massifs lancés par l’Ukraine sur des « villes russes pacifiques ».
En seulement trois jours, la Russie a lancé plus de 900 drones d’attaque, ainsi que des missiles balistiques et de croisière, a dénoncé l’Ukraine, tout en soulignant que la livraison rapide de systèmes de défense aérienne sauve des vies. La délégation a également demandé que les sanctions à l’encontre de la Russie soient étendues et renforcées. Le pétrole russe, sa flotte de pétroliers fantômes, ses réseaux financiers et son industrie militaire doivent tous être ciblés, a-t-elle insisté. Elle a également rappelé que le Président Zelenskyy s’était rendu en Türkiye le 15 mai pour participer à des pourparlers, ce à quoi s’était refusé le Président Putin qui y a envoyé une délégation de bas niveau dépourvue de pouvoir décisionnel. Ce ne sont ni l’Ukraine ni les dirigeants occidentaux qui compromettent les négociations, comme le prétend la Russie. C’est la Russie qui envoie une délégation sans mandat décisionnel, annulant ainsi toute perspective de diplomatie, a déploré la délégation.
Après plus de trois ans de conflit actif, il apparaît de plus en plus clairement qu’une solution militaire est irréalisable, a estimé la Sierra Leone, pour laquelle seuls un cessez-le-feu négocié et un accord de paix global, prenant en compte les préoccupations légitimes de toutes les parties, ouvriront la voie à une paix durable. La recherche d’un cessez-le-feu immédiat doit être la priorité, a également estimé la Grèce. « Les parties doivent régler les causes profondes du conflit en vue d’une paix pérenne et un cessez-le-feu est essentiel », a également pressé la Chine, tambourinant son appel au dialogue et au respect de la Charte des Nations Unies.
L’Union européenne a d’ailleurs réclamé l’instauration d’un cessez-le-feu complet et inconditionnel d’au moins 30 jours afin d’offrir un espace pour des discussions constructives visant à mettre fin à la guerre d’agression russe et à parvenir à une paix globale, juste et durable. Cette pause dans les hostilités pourrait aussi constituer une étape essentielle pour réduire les souffrances des civils et permettre de nouveaux échanges de prisonniers ainsi que le retour des enfants, a-t-elle ajouté, soulignant qu’il appartient à la Russie de démontrer sa volonté de parvenir à la paix.
« La Russie n’est pas crédible en prétendant négocier de bonne foi tout en intensifiant ses frappes contre le territoire ukrainien », a renchéri la France, qui a souligné qu’une paix juste, solide et durable impliquera des garanties de sécurité robustes et crédibles pour l’Ukraine. La délégation française s’est également opposée à faire de la démilitarisation de l’Ukraine un objectif des pourparlers de paix.
« Les plans de Zelenskyy et de ses complices sont cousus de fil blanc », a brocardé la Fédération de Russie, selon qui l’objectif de l’Ukraine serait de tromper et de désorienter le Président américain « qui prend des mesures décisives en faveur de la paix ». Tant que l’Ukraine tentera de prolonger la guerre et de provoquer la Russie en frappant des infrastructures résidentielles et civiles sur notre territoire, « nous poursuivrons notre opération militaire nationale et détruirons les installations liées au potentiel militaire du régime de Kiev », a-t-elle mis en garde.
« Le sérieux de la Russie sera jugé à l’aune de ses propositions et de ses actions », a recadré le délégué des États-Unis qui a souligné que les discussions de paix doivent être menées de bonne foi. Si la Russie poursuit cette guerre catastrophique, les États-Unis devront envisager de se retirer des efforts de négociation pour mettre fin au conflit, a-t-il mis en garde.
Selon lui, l’accord sur la table est la meilleure solution pour la Russie, et des sanctions potentielles sont encore à envisager. Cette guerre est une erreur stratégique qui n’aurait jamais dû être commise, a-t-il ajouté.
« Est-ce que la Russie de Putin est prête à mettre un terme aux morts et aux souffrances qu’elle a infligées à l’Ukraine? » a demandé la République tchèque. Alors que l’Ukraine s’est dite prête à un cessez-le-feu, la Russie ne cesse de gagner du temps. Les récents jours qui se sont écoulés montrent encore ce que sont les véritables intentions de la Russie. La paix ne peut être dictée par l’agresseur, a conclu ce pays.
Maintien de la paix et de la sécurité de l’Ukraine
Exposé
Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a indiqué que l’Ukraine fait face depuis un mois à une recrudescence brutale et à grande échelle des attaques russes après une relative diminution des attaques suite à la trêve unilatérale de 72 heures déclarée par la Fédération de Russie du 8 au 11 mai. Le week-end dernier, a énuméré la haute fonctionnaire, les forces armées russes ont attaqué des villes ukrainiennes avec un nombre record de missiles à longue portée et de drones, tuant et blessant des dizaines de civils. Selon les autorités ukrainiennes, avec 355 drones, l’attaque de lundi dernier a été la plus importante depuis le début de l’invasion de la Russie. Au total, depuis le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en février 2022, au moins 13 279 civils, dont 707 enfants, ont été tués. Le nombre confirmé de civils blessés s’élève à 32 449, dont 2 068 enfants. En outre, la situation sécuritaire globale en 2025 est nettement pire qu’à la même période l’année dernière. Le nombre de civils tués au cours du premier trimestre de cette année est supérieur de 59% à celui de la même période en 2024, a regretté Mme DiCarlo. Les régions russes limitrophes de l’Ukraine ont également fait état de victimes civiles.
Mme DiCarlo a indiqué que cette escalade dangereuse fait suite à des développements diplomatiques importants, citant la réunion, le 16 mai, entre les délégations ukrainienne et russe à Istanbul pour les premières négociations directes depuis trois ans. Bien que les pourparlers n’aient pas abouti au cessez-le-feu complet, immédiat et inconditionnel, il est encourageant que les parties aient, selon les informations disponibles, convenu de poursuivre le processus. Elle a également salué l’achèvement des échanges de 1 000 prisonniers de guerre de chaque côté. Le sort des enfants ukrainiens qui auraient été expulsés vers la Fédération de Russie reste en revanche une source de profonde préoccupation.
Selon Mme DiCarlo, la vague massive d’attaques perpétrées ce week-end est un avertissement clair quant à la rapidité avec laquelle cette guerre peut atteindre de nouveaux niveaux de destruction. Plus la guerre se prolongera, plus ses répercussions régionales et mondiales se feront sentir et plus il sera difficile de trouver une solution pacifique, a-t-elle averti. Elle a rappelé que la résolution 2774 (2025) recommande une fin rapide du conflit et appelle à une paix durable.
L’espoir que les parties puissent s’asseoir à la table des négociations est toujours vivant, mais il est très faible, a estimé la Secrétaire générale adjointe, réitérant la nécessité d’efforts sérieux, tangibles et sincères « dès maintenant » pour revenir sur la voie d’une paix juste. Un cessez-le-feu complet, immédiat et inconditionnel est nécessaire. Le processus de paix ne sera pas facile et prendra du temps. Mais il ne peut attendre. Le peuple ukrainien, en particulier, ne peut attendre, a dit Mme DiCarlo.
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