En cours au Siège de l'ONU

9840e séance – après-midi    
CS/15969

Conseil de sécurité: appels pour que les forces de l’ONU au Liban et dans le Golan syrien puissent opérer sans entrave, et pour qu’Israël se retire de ces territoires

Réuni à la demande de la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité s’est penché cet après-midi sur la question de la sécurité des soldats de la paix dans la région du Moyen-Orient, en particulier ceux déployés dans le cadre de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD), alors que la région a connu un épisode de tensions sans précédent depuis octobre 2023.

Actuellement, l’accord de cessation des hostilités conclu le 26 novembre 2024 entre le Liban et Israël, bien que fragile, continue de tenir, a déclaré le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, M. Jean-Pierre Lacroix, en visioconférence depuis le Liban où il s’est rendu avec le Secrétaire général.  Depuis l’accord, les forces israéliennes ont entamé leur retrait, en même temps que se déploie l’Armée libanaise dans le secteur sud du fleuve Litani.  Mais alors qu’il ne reste que 10 jours avant la fin de la période de 60 jours prévue par l’accord pour le retrait des Forces de défense israéliennes (FDI) du territoire libanais, il a exhorté celles-ci à respecter ce délai, une demande reprise à leur compte par la plupart des membres du Conseil. 

Le retrait nécessaire des forces israéliennes du Sud-Liban

Alors que sept semaines se sont écoulées depuis l’entrée en vigueur de l’accord de cessation des hostilités, les activités militaires des FDI obligent la plupart des contingents de la FINUL à rester confinés dans leur base et parfois à s’abriter dans des bunkers, s’est impatienté M. Lacroix.  Il a dit que la Force avait protesté contre toutes les restrictions de mouvement qui lui ont été imposées, un point sur lequel il entend insister lors de ses réunions avec les responsables libanais cette semaine. Malgré ces difficultés, la Force arrive à augmenter le nombre et l’intensité de ses opérations, a-t-il salué. 

Sur ce point, la Fédération de Russie a tenu à rappeler quelors de la récente invasion terrestre du Liban, les unités des FDI avaient occupé une partie du territoire au nord de la Ligne bleue et avaient attaqué les installations de la FINUL, y compris avec des chars d’assaut.  Au plus fort de la guerre, les dirigeants militaires et politiques israéliens ont même exigé le retrait des forces de maintien de la paix du Sud-Liban, en violation des résolutions 1701 (2006) et 2749 (2024) du Conseil de sécurité, a déploré le représentant russe, ce qui a été corroboré par la déléguée du Liban.

Cette dernière a également reproché à Israël d’avoir mené plus de 681 attaques aériennes et terrestres sur le territoire libanais entre le 27 octobre et le 22 décembre 2024.  Pas plus tard que le 4 janvier 2025, Israël aurait détruit une tour de guet de l’Armée libanaise tandis que ses forces de défense continuent de bombarder les villages frontaliers libanais, de bloquer les routes et de détruire des quartiers résidentiels dans le but d’empêcher le retour des Libanais dans leurs maisons, a dénoncé la représentante libanaise.  Elle a appelé le Conseil de sécurité à condamner ces agissements et à prendre des mesures pour qu’Israël respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale du Liban.  « Ces actions sapent les efforts visant à ramener le calme le long de la frontière. »

Ces violations du cessez-le-feu sont une infraction à la résolution 1701 et menacent de faire dérailler les progrès vers une paix permanente de part et d’autre de la Ligne bleue, s’est inquiétée la République de Corée qui préside le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les opérations de maintien de la paix. Au nom du principe de responsabilité, l’Algérie et la Chine ont demandé des enquêtes impartiales sur les attaques délibérées à l’encontre du personnel de la FINUL et de ses locaux par les mains des Forces de défense israéliennes.

En réponse, le représentant d’Israël s’est prévalu de centaines de lettres envoyées par son pays montrant la montée en puissance du Hezbollah dans le Sud-Liban et dans la zone tampon avec la Syrie.  « Nos appels ont été ignorés », s’est indigné le représentant en faisant remarquer que ce n’est que lorsqu’Israël a réagi que le Conseil a retrouvé sa voix, sans pour autant condamner les agissements du Hezbollah qui a transformé le Sud-Liban en forteresse. 

« Aujourd’hui, le Hezbollah a essuyé des lourdes pertes.  Le Liban a un nouveau président, c’est un pas de géant. »  Et pourtant, ni le Conseil ni la FINUL n’ont fait face aux réseaux terroristes du Hezbollah, a tancé le délégué israélien en faisant observer que c’est Israël qui l’a fait. Ce faisant, Israël a donné la possibilité au Liban de recouvrer sa souveraineté, s’est-il félicité avant de mettre néanmoins en garde ses collègues.  « Une occasion se présente de libérer le Liban, mais cela ne va pas durer », a-t-il prédit en expliquant que le Hezbollah essaye de se reconstituer.  « Nous ne permettrons pas que l’histoire se répète. »

Le respect attendu de l’Accord sur le dégagement 

Pour ce qui est de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD), c’est le général de division Patrick Gauchat, à la tête de l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST), qui a détaillé les conséquences de la chute du Gouvernement Assad pour les activités de la Force, la liaison avec la Syrie en étant affectée.  La Force est en train d’œuvrer à l’établissement de canaux de communication stables avec les autorités de transition, a-t-il indiqué, tout en notant la détermination desdites autorités en faveur de l’application de l’Accord sur le dégagement des forces israéliennes et syriennes, qui date de 1974.

Dans ce contexte, les membres du Conseil ont insisté pour que la Syrie et Israël respectent cet accord, ce qui implique pour Israël de se retirer de la zone tampon et de cesser ses opérations sur le territoire syrien.  La présence et les actions d’Israël dans la zone tampon du plateau du Golan violent l’Accord, a rappelé le général de division Gauchat.

Le délégué de la Syrie a, à ce propos, réfuté la position du Premier Ministre Netanyahu selon lequel l’Accord en question ne vaudrait plus, après avoir rappelé que des incursions récentes d’Israël ont eu lieu sur le territoire syrien.  L’Accord est garanti par les normes du droit international et demeure d’actualité en dépit des changements de régime, a-t-il argumenté.  « Cet accord entre Israël et la Syrie est en effet toujours valide », a confirmé le général de division Gauchat.  Il a ajouté que les mouvements du personnel onusien sont entravés par la présence des forces israéliennes et les obstacles qu’elles opposent. 

Comme l’ont rappelé, entre autres, le Royaume-Uni et la Slovénie, le plateau du Golan est un territoire occupé et son annexion par Israël n’est pas reconnue. Israël a admis que le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie est plus important que jamais alors qu’elle s’engage dans une transition politique vers un avenir plus sûr et plus pacifique.  Il a justifié sa présence dans la zone de séparation en assurant qu’elle était nécessaire pour neutraliser des menaces immédiates en Syrie, tout en assurant qu’elle serait « limitée et temporaire ».  « Ces mesures n’ont pas été prises à la légère, elles étaient nécessaires à la protection de la population israélienne. » 

Israël est attaché à l’accord de 1974, a toutefois assuré son représentant, tout en prévenant que cela ne doit pas être considéré comme un signe de faiblesse. Tout au long de la séance, Israël a été appelé à respecter sa parole et le Royaume-Uni lui a même demandé d’établir un calendrier pour son retrait de cette zone. 

Laisser les missions de l’ONU opérer sans entrave

Ces derniers mois, les trois opérations de maintien de la paix des Nations Unies, la FINUL, la FNUOD et l’ONUST, ont joué un rôle clef pour enrayer le cycle des violences et apaiser les tensions, a constaté la France, qui, aux côtés des États-Unis, a facilité l’accord de cessation des hostilités entre le Hezbollah et Israël.  Il est crucial que ces trois opérations puissent mettre en œuvre leur mandat sans entrave, a insisté la délégation, appuyée en cela par les autres membres du Conseil. Ils ont de manière générale appelé à assurer la sécurité et la liberté de mouvement de ces personnels et à lever toutes les entraves à l’accomplissement de leur mandat. 

« La paix est fragile si les engagements ne sont pas respectés. »  Le moment est venu pour les acteurs de la région de tenir les promesses faites et les accords conclus, qu’ils soient récents ou vieux de plusieurs décennies, a conclu la Slovénie.  C’est aussi le moment pour les acteurs de la région de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale, a souligné la délégation en priant de faire preuve de retenue pour éviter toute nouvelle escalade.

 

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LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Exposés

Le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, M. JEAN-PIERRE LACROIX, a fait le point sur la situation de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), alors qu’il se trouve actuellement sur place au Liban avec le Secrétaire général.  Il a confirmé que la cessation des hostilités entre le Liban et Israël, bien que fragile, continue de tenir. 

M. Lacroix a dit s’être rendu dans la zone d’opérations de la FINUL et avoir rencontré l’Armée libanaise et le Premier Ministre intérimaire à Beyrouth.  Selon ses observations, les autorités libanaises semblent déterminées à respecter les engagements qu’elles ont pris dans le cadre de la cessation des hostilités et de la résolution 1701 (2006).  Pour leur part, les Nations Unies, y compris la FINUL, sont absolument déterminées à soutenir les parties à cet égard, leur a-t-il assuré. 

Au 15 janvier, l’Armée libanaise s’est déployée sur 93 sites au sud du fleuve Litani avec l’aide de la FINUL, a poursuivi M. Lacroix.  Faisant état du plan visant à envoyer 6 000 soldats supplémentaires au sud du Litani, il a indiqué que l’Armée libanaise avait déployé 262 nouvelles recrues dans ce secteur, tandis que 673 autres recrues sont en cours de formation. À cela devrait s’ajouter 600 autres personnes qui font l’objet d’un examen préalable au recrutement. 

Pour faciliter une coordination plus étroite avec l’Armée libanaise, la FINUL a posté un officier de liaison au quartier général de l’Armée libanaise pour le secteur sud du Litani, a indiqué M. Lacroix qui a vu dans ces capacités supplémentaires dans le sud, et dans l’engagement renouvelé de l’Armée libanaise à remplir ses obligations au titre de la résolution 1701, le signe d’une collaboration encore meilleure avec la FINUL à l’avenir.

La poursuite du déploiement de l’Armée libanaise est toutefois subordonnée au retrait préalable des Forces de défense israéliennes (FDI), a-t-il noté.  Quoique encouragé d’apprendre qu’un plan de retrait des FDI et de déploiement de l’Armée libanaise, soigneusement échelonné, a été présenté lors de la réunion du mécanisme de cessation des hostilités, le 6 janvier, le Secrétaire général adjoint a constaté qu’à 10 jours de la fin de la période de 60 jours prévue pour le retrait des forces israéliennes du Liban, les démolitions israéliennes de tunnels, de bâtiments et de terres agricoles se poursuivent, tout comme des frappes aériennes et des violations de l’espace aérien libanais.  Il a demandé aux FDI de se retirer du territoire libanais sans délai, avant la fin de la période prévue. 

L’année écoulée a clairement démontré la présence importante de personnel armé, de biens et d’armes non autorisés liés au Hezbollah et à d’autres groupes armés non étatiques au sud du Litani, a concédé le haut responsable.  Encouragé de constater que l’Armée libanaise a fait preuve d’une plus grande détermination dans la lutte contre ces groupes au cours des dernières semaines, M. Lacroix a précisé que la FINUL a elle-même localisé 116 caches d’armes et de munitions, notamment des lance-grenades propulsés par fusée, des roquettes, des mines antichars et des fusils.  Il est essentiel que les autorités libanaises continuent d’agir de la sorte, a insisté M. Lacroix, ajoutant que le Secrétaire général soulignera ce point lors de ses réunions, à Beyrouth demain, avec le Président de la République nouvellement élu, le Président du Parlement et le Premier Ministre intérimaire. 

Dans le même temps, la FINUL a ajusté et intensifié ses activités opérationnelles pour soutenir la cessation des hostilités, en mettant notamment l’accent sur le déminage, la neutralisation des munitions non explosées et l’ingénierie afin de dégager les routes dans les zones où la situation en matière de sécurité le permet.  Elle s’efforcera d’utiliser des technologies pour renforcer sa capacité de surveillance le long de la Ligne bleue et dans l’ensemble de sa zone d’opérations, et compte sur l’acceptation par les parties du recours à ces technologies. Cela témoignerait de leur engagement continu à faire respecter la cessation des hostilités et à prendre des mesures concrètes en vue de la mise en œuvre intégrale de la résolution 1701, a argué M. Lacroix. 

En attendant, sept semaines après l’entrée en vigueur de la cessation des hostilités, la plupart des contingents de la mission restent confinés à leur base et doivent parfois s’abriter dans des bunkers en raison d’activités militaires des FDI à proximité ou à leur demande.  La mission a protesté contre toutes les restrictions de mouvement imposées aux parties, a signalé M. Lacroix en disant vouloir insister sur ce point lors de ses réunions avec les responsables libanais cette semaine.  Mais il a assuré que, malgré ces difficultés, la mission augmente le nombre et l’intensité de ses opérations.

L’élection d’un nouveau président au Liban et la désignation d’un premier ministre sont des étapes importantes vers le renforcement des institutions de l’État et l’extension de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire libanais, a-t-il enfin relevé.  À cet égard, le soutien politique et matériel sans équivoque des autorités libanaises au déploiement renforcé de l’Armée libanaise au sud du fleuve Litani, de même que leur soutien continu aux actions de la FINUL, sera vital selon le Secrétaire général adjoint qui a conclu en appelant la communauté internationale à renouveler son soutien à ces efforts.

Le général de division PATRICK GAUCHAT, chef de mission et chef d’état-major de l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST), a détaillé les conséquences de la chute du gouvernement Assad pour les activités de la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD), la liaison avec la Syrie étant affectée.  La Force est en train d’œuvrer à l’établissement de canaux de communication stables avec les autorités de transition, a-t-il dit, tout en notant l’engagement desdites autorités en faveur de l’Accord de dégagement des forces de 1974.  Le personnel de la Force continue d’occuper les positions tenues avant décembre 2024 et s’acquitte de ses tâches, y compris la surveillance de la ligne de cessez-le-feu et la conduite de patrouilles dans la zone de séparation, où les forces israéliennes demeurent présentes.  Ces forces se sont d’ailleurs attelées à un travail de construction dans cette zone avec du matériel lourd, a-t-il signalé en mentionnant aussi le matériel de communication qu’elles y placent.  Il a précisé avoir informé Israël que sa présence et ses actions dans la zone de séparation constituent des violations de l’accord précité.  « Cet accord entre Israël et la Syrie est en effet toujours valide. »  De plus, les mouvements du personnel onusien sont entravés par la présence des forces israéliennes et des obstacles qu’elles opposent, a-t-il protesté.

Le général de division a précisé que les résidents de la zone se sont rapprochés de la Force pour demander le retrait des forces israéliennes et le démantèlement des barrages routiers.  Il a fait état d’échanges positifs avec les autorités israéliennes en vue de remédier à ces difficultés.  « Il est capital que les soldats de la paix puissent s’acquitter de leur mandat sans obstruction. »  Aucune force militaire autre que la FNUOD ne doit être présente dans la zone de séparation, a-t-il tranché.  « Il est impératif que toutes les parties s’acquittent de leurs obligations en vertu de l’accord de 1974 et préservent la stabilité du Golan. » En conclusion, il a demandé que la Force soit dotée des moyens nécessaires à l’exécution de son mandat, avant de rendre hommage au général de brigade Jha décédé le 23 décembre dernier dans l’exercice de ses fonctions de commandant adjoint de la Force.

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