Conseil de sécurité : exposé sur la situation au Soudan du Sud
(Le résumé complet de la réunion sera disponible ultérieurement.)
Ce matin, le Conseil de sécurité va entendre un exposé du Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan du Sud et chef de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), M. Nicholas Haysom, sur l’évolution de la situation dans ce pays au cours des trois derniers mois, ainsi que l’intervention d’une représentante de la société civile.
Le Conseil est saisi d’un rapport du Secrétaire général qui présente les faits nouveaux intervenus au niveau politique et sur le plan de la sécurité, ainsi que la situation humanitaire et la situation des droits humains, et fait le point sur les progrès accomplis dans l’exécution du mandat de la Mission. Le Secrétaire général prend note de la décision prise le 13 septembre par les parties à l’Accord revitalisé d’allonger de deux ans la période de transition et de reporter les élections à décembre 2026.
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RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD (S/2024/776)
Exposés
M. NICHOLAS HAYSOM, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Soudan du Sud et Chef de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), a informé le Conseil de sécurité que depuis son dernier exposé sur la situation dans ce pays, la période de transition a été prorogée jusqu’en février 2027, ce qui signifie un report du calendrier des élections jusqu’en décembre 2026.
C’est, a-t-il déclaré, une décision certes « inévitable » mais néanmoins « regrettable » étant donné la « frustration et la lassitude » que ressent le peuple sud-soudanais face à ce qui s’apparente à une « paralysie politique ».
Le Représentant spécial a indiqué avoir tenu des discussions nourries avec les dirigeants politiques, des représentants de la société civile, des groupes religieux, des jeunes, des coalitions de femmes et les partenaires internationaux. Pour lui, le seul moyen d’aller de l’avant consiste pour les dirigeants à trouver urgemment des compromis et à prendre toutes les mesures décisives qui s’imposent pour réaliser les principaux objectifs de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud.
Depuis la prorogation de la période de transition, l’application de l’Accord revitalisé et de sa feuille de route est une fois de plus passée au second plan, a-t-il regretté, alors que les intérêts politiques sont en jeu au niveau national. « Il semble que l’Initiative Tumaini qui vise à ramener des groupes d’opposition réticents dans l’accord de paix soient dans l’impasse. »
À l’invitation du Président du Soudan du Sud, le Président du Kenya s’est rendu hier à Djouba, a informé M. Haysom, et il semble que les deux chefs d’État aient décidé de reconvoquer l’Initiative pour régler les questions en souffrance dans un délai de deux semaines et obtenir par la suite une approbation à l’échelle de la région.
La MINUSS a été claire, a poursuivi son Chef: le décompte s’agissant de la quatrième phase de prorogation par le Soudan du Sud a d’ores et déjà démarré. Il n’attendra pas 2025. « Il a commencé à courir dès maintenant », a-t-il martelé, car il faut éviter « de nous retrouver face aux mêmes difficultés » en décembre 2026, a averti M. Haysom.
Pour les parties à l’accord de paix, l’élite politique, les garants de l’accord de paix ou la communauté internationale, « on ne peut pas continuer comme si de rien n’était », a-t-il insisté, invitant à saisir l’occasion offerte pour faire en sorte que cette prorogation soit la dernière. Dès lors, des compromis s’imposent pour que le processus électoral aboutisse. Il a prévenu que de petites actions ne suffiront pas. « Nous avons besoin de décisions fermes et de réalisme associés à un plan de mise en œuvre. »
Il va falloir faire des concessions par rapport à ce qui est réalisable dans les délais nécessaires, a prévenu le Représentant spécial. Certains processus vont devoir être tronqués ou modifiés, pour que l’harmonisation soit possible, a-t-il noté. Pour parvenir à ces résultats, le Gouvernement devrait convoquer l’équipe spéciale conjointe sur les élections et l’élaboration de la Constitution.
À cet égard, la MINUSS a recensé six objectifs auxquels les parties doivent s’atteler immédiatement, a précisé M. Haysom. Ceux-ci concernent: le déploiement des Forces unifiées nécessaires; l’éducation civique; les travaux préparatoires pour assurer l’enregistrement des électeurs; l’élaboration d’un code politique entre les parties politiques; la société civile; et les médias.
Le Représentant spécial a rapporté avoir rencontré le Président Salva Kiir afin de débattre de l’urgente nécessité de parvenir à des progrès. À cette occasion, il l’a informé des contacts productifs avec toutes les parties prenantes et souligné l’importance qu’il reste associé à ces efforts. La communauté internationale doit aussi soutenir ces tâches qui doivent être réalisées immédiatement, a plaidé le haut fonctionnaire.
Il a insisté sur la participation des femmes, indiquant que la MINUSS œuvre notamment pour assurer la prévention des violences fondées sur le genre. Sur le plan humanitaire, il a évoqué l’arrivée de 830 000 réfugiés du Soudan, soit plus de 7% de la population du pays, et mis en garde contre l’augmentation de la famine et des cas de choléra.
Pour finir, le Représentant spécial a exhorté à agir à l’unisson pour appuyer l’achèvement pacifique de la période de transition, se disant convaincu que « ni le pays, ni la région ne peuvent supporter un autre conflit ».
Mme MEREKAJE LORNA, Secrétaire générale du South Sudan Democratic Engagement, Monitoring and Observation Programme (programme d’engagement démocratique, de suivi et d’observation au Soudan du Sud), a critiqué la gestion politique du pays par une élite restreinte qui, selon elle, néglige les intérêts des citoyens, tout en prolongeant indûment la période de transition politique et en reportant les élections prévues de 2024 à 2026.
Elle a déploré que cette élite dirigeante se concentre sur l’accumulation de richesses personnelles plutôt que sur la mise en œuvre des politiques nationales vitales, telles que la réforme du secteur de la sécurité, le processus électoral et la rédaction d’une nouvelle constitution. Après six années de gouvernance, ces dirigeants n’ont réalisé que 10% des engagements politiques prévus dans les accords précédents, ce qui a profondément déçu les citoyens sud-soudanais, a souligné Mme Lorna, avant d’appeler le Conseil de sécurité à exiger du Gouvernement la fourniture d’un programme détaillé pour les deux prochaines années.
La militante a également fait état d’une détérioration alarmante de la situation économique et d’une escalade de la violence, donnant des exemples récents d’atteintes graves aux droits humains, tels que les meurtres de civils dans différentes régions et l’agression d’un avocat des droits humains. Elle a décrié le manque d’accès à l’eau potable et les conditions de vie précaires exacerbées par l’incapacité du Gouvernement à payer régulièrement les salaires des fonctionnaires depuis plus de 10 mois.
Mme Lorna a par ailleurs critiqué la récente modification de la loi sur le Service de sécurité nationale, qui octroie à ce service le pouvoir d’arrêter sans mandat et qui renforce par conséquent la peur parmi les citoyens de revendiquer leurs droits élémentaires, réduisant encore plus un espace civique et politique déjà restreint.
Abordant la participation politique des femmes, l’intervenante a relevé que, malgré les nombreux défis posés, notamment la violence sexuelle et les obstacles à l’émancipation politique, les actions actuelles sont insuffisantes. Elle a déploré l’exclusion des femmes et des organisations féminines dans la mise en œuvre des projets, comparant les ateliers organisés à des rassemblements sociaux sans véritable impact.
Pour remédier à ces problèmes, Mme Lorna a d’abord recommandé de renforcer la collaboration entre la MINUSS et les acteurs civils pour une participation citoyenne effective au Soudan du Sud, qui ne dépende pas seulement des ateliers. Elle a suggéré de continuer à soutenir l’Initiative Tumaini, seule initiative formelle de paix en cours. Elle a proposé des interactions régulières entre la MINUSS, le Gouvernement et la société civile pour éviter l’extension perpétuelle de la transition. Enfin, elle a demandé une réévaluation du Fonds pour la consolidation de la paix pour améliorer l’inclusion politique des femmes.