9609e séance – après-midi  
CS/15670

« Honte éternelle » au Conseil de sécurité après le rejet de la demande d’admission de l’État de Palestine à l’ONU

« Honte éternelle », avait prévenu cet après-midi l’Algérie au Conseil de sécurité en craignant que son projet de résolution soit rejeté.  Et ce qu’elle redoutait est arrivé puisque son texte s’est heurté au veto des États-Unis, alors que le Royaume-Uni et la Suisse se sont abstenus.  Le Conseil de sécurité a ainsi rejeté un projet de résolution recommandant que l’État de Palestine devienne membre de l’ONU, malgré le soutien des 12 autres membres.

Avant le vote, le délégué de l’Algérie a présenté ce texte comme une chance de réparer une « injustice historique » faite au peuple palestinien.  Le 8 avril dernier, le Conseil de sécurité avait renvoyé le réexamen de la demande d’admission de l’État de Palestine à son Comité d’admission de nouveaux Membres, qui n’est pas parvenu à une recommandation unanime.

Selon l’Article 4 de la Charte des Nations Unies, l’admission comme membre se fait par décision de l’Assemblée générale sur recommandation du Conseil de sécurité.  La Palestine est pour l’heure État observateur permanent non membre. 

Les États-Unis ont justifié leur veto en expliquant qu’ils appuient vigoureusement le statut d’État de la Palestine dans le contexte d’un accord de paix global qui règlerait de manière permanente le conflit israélo-palestinien. « Il n’y a pas d’autres moyen de garantir la sécurité d’Israël à l’avenir, la dignité du peuple palestinien ou encore de favoriser l’intégration régionale entre Israël et ses voisins. »

Il n’y a pas d’unanimité au sein du Comité d’admission quant aux critères requis pour obtenir le statut d’État, a tranché le délégué.  « Le Hamas a élargi son pouvoir et son influence, ce qui contrevient à ces critères, c’est pourquoi les États-Unis ont voté non. »  Ce vote n’est pas une opposition au statut d’État, mais une affirmation que cela ne pourra provenir que d’une négociation entre les parties, a tranché la délégation.

Israël a, lui, « remercié les États-Unis et plus particulièrement le Président Biden d’être en faveur de la morale et de la vérité face à l’hypocrisie et au jeu politique ».  L’Autorité palestinienne ne répond pas aux plus simples critères pour que la Palestine soit admise en tant qu’État, elle n’a aucun contrôle sur son territoire et de surcroît elle appuie une entité terroriste, a-t-il déclaré.  « Comment pouvez-vous dire que les Palestiniens sont pacifistes alors qu’ils paient des terroristes pour nous massacrer? »

De son côté, le Royaume-Uni a expliqué que la reconnaissance de l’État de Palestine ne doit intervenir ni à la fin ni au début d’un processus.  « Il faut d’abord régler la crise à Gaza et s’assurer que le Hamas n’y gouverne plus et ne soit plus en mesure de lancer des attaques. »  Même son de cloche du côté de la Suisse qui a estimé qu’à l’heure actuelle, cette étape n’est pas propice à la détente et à une solution pacifique au vu de la grande instabilité qui persiste sur le terrain. 

La déception a en revanche dominé les interventions des autres délégations. Pour le Guyana la réponse du Conseil n’a pas été à la hauteur, tandis que la Chine a regretté que le rêve des Palestiniens ne se soit pas réalisé.  Il est erroné de penser qu’il faut plus de temps, a dit le délégué chinois, en disant que l’admission de la Palestine est, au contraire, urgente.  « L’État de Palestine répond aux critères d’admission. »

La Fédération de Russie a regretté que cette journée ne soit pas entrée dans l’Histoire en corrigeant l’injustice historique faite à la Palestine et en répondant aux aspirations légitimes de son peuple « héroïque ».  « Pour la cinquième fois depuis le début de la crise à Gaza, les États-Unis ont démontré leur véritable égard par rapport aux Palestiniens qui ne sont qu’un obstacle sur la voie de la réalisation des intérêts d’Israël. » 

Le délégué russe a rappelé que l’écrasante majorité de la communauté internationale appuie la demande de la Palestine, en pointant l’isolement des États-Unis après ce veto.  La France a jugé essentiel que le Conseil s’engage dans la résolution politique du conflit, tout en renforçant encore son action sur le volet humanitaire.  « C’est pourquoi la France a proposé un projet de résolution abordant tous les volets de la crise », a-t-elle rappelé.

De son côté, l’Algérie a estimé que l’appui remarquable en faveur de la demande d’admission de la Palestine fait passer un message haut et fort: l’État de Palestine mérite d’occuper la place qui lui revient légitimement parmi les membres de l’ONU.  « Nous reviendrons sur la question plus forts et plus déterminés encore, et nous seront appuyés par la majorité écrasante de l’Assemblée générale », a assuré le représentant algérien. 

Une position partagée par le délégué de l’État de Palestine, qui a estimé que le droit des Palestiniens à disposer d’un État est éternel.  « Ce droit ne doit pas être soumis à des manipulations, surtout pas celles d’Israël, Puissance coloniale et génocidaire. »  Il a alerté sur les dangers d’une paix injuste pour la région, sans un règlement pérenne de la question palestinienne, avant d’appeler à la tenue d’une conférence internationale pour la paix. 

Le délégué palestinien a accusé Israël de tout faire pour s’opposer à un État palestinien, pourtant « inévitable », et à la solution des deux États.  « Qui aime la paix et qui est un ennemi de la paix »? a-t-il lancé.  Il a rappelé que l’admission à l’ONU rendrait irréversible la légitimité palestinienne et ferait avancer la paix.  « Le peuple palestinien s’accroche à la vie comme tous les autres peuples au monde, il ne cessera pas d’exister », a conclu le délégué palestinien, les larmes aux yeux.

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