Soudan: le Conseil de sécurité demande le cessez-le-feu pendant le mois du ramadan
Gravement préoccupé par la propagation de la violence et la détérioration de la situation humanitaire déjà catastrophique au Soudan, en particulier au Darfour, le Conseil de sécurité a demandé, cet après-midi, la cessation immédiate des hostilités pendant le mois du ramadan.
En adoptant par 14 voix pour et l’abstention de la Fédération de Russie, la résolution 2724 (2024), il demande également à toutes les parties au conflit de s’efforcer de parvenir à un règlement durable du conflit par le dialogue.
Il exhorte aussi l’ensemble des parties à permettre un accès humanitaire « complet, rapide, durable, sûr et sans entrave, y compris d’un côté à l’autre des frontières et des lignes de front ».
Avant la mise aux voix du texte, la Fédération de Russie a toutefois relevé que la majorité des objectifs énoncés dans la résolution sont déjà en cours de mise en œuvre, l’acheminement de l’aide humanitaire pouvant désormais transiter par la frontière avec le Tchad. Elle a également fustigé la politique « flagrante » du deux poids, deux mesures des pays occidentaux qui retardent, selon elle, l’adoption d’une résolution sur un cessez-le-feu à Gaza, « où un véritable massacre est en cours ».
Expliquant ensuite son abstention, la délégation russe a indiqué qu’elle avait décidé de ne pas faire entrave à l’adoption du texte en raison de la souffrance des Soudanais. Exprimant son plein soutien à l’intégrité territoriale et à la souveraineté du Soudan, elle a espéré que le pays parviendra à déterminer son avenir sans dictat étranger. Les Soudanais doivent déterminer eux-mêmes leur sort, a-t-elle insisté.
Cet appel au respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté du Soudan a été relayé par la Chine qui a par ailleurs appelé les parties à placer les intérêts du pays et de la population au plus haut rang. Le Conseil de sécurité aurait pu être plus uni encore, mais la délégation porte-plume n’a pas déployé les efforts nécessaires à cette fin, a regretté en outre la délégation qui a appelé la communauté internationale à ne pas oublier que la population de Gaza souffre sous les bombes.
« Il faut trouver des solutions soudanaises aux problèmes soudanais, sans ingérence étrangère aucune », a insisté l’Algérie. Intervenant au nom des A3+ (Algérie, Guyana, Mozambique et Sierra Leone), elle a espéré que les acteurs soudanais saisiront l’occasion de déposer les armes pour avancer ensemble sur « la voie d’un avenir de paix ». Accorder la priorité à la coordination des efforts régionaux est essentiel, a-t-elle ajouté, prédisant que la résolution adoptée ce jour ouvrira la voie vers un Soudan pacifique et stable.
Le Royaume-Uni, porte-plume du texte, a salué le message clair envoyé aux Forces armées soudanaises et aux Forces d’appui rapide, les exhortant à tendre vers un règlement durable du conflit, suivi des États-Unis qui ont estimé important que le Conseil de sécurité s’exprime d’une seule et même voix sur cette question. La délégation américaine a par ailleurs pointé l’insuffisance de la voie d’accès humanitaire établie par les autorités soudanaises à la frontière avec le Tchad, notant que d’autres mesures sont nécessaires de toute urgence. De même, elle a rappelé aux Forces armées soudanaises et aux Forces d’appui rapide leur devoir de faciliter l’acheminement de l’aide.
L’adoption de cette résolution fait suite à la tenue, hier, d’un briefing au cours duquel nombre des membres du Conseil de sécurité se sont ralliés à l’appel lancé par le Secrétaire général en faveur d’une cessation des hostilités à l’approche du ramadan.
Réunis quelques jours après le retrait effectif de la Mission intégrée d’assistance à la transition des Nations Unies au Soudan (MINUATS), conformément à la résolution 2715 du 3 décembre 2023, les parties au conflit avait également été appelées à garantir un accès sans entrave de l’aide humanitaire, alors que pointe le spectre de la famine, et à reprendre des négociations en vue d’un règlement politique.
RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD
Projet de résolution (S/2024/223)
Le Conseil de sécurité,
Réaffirmant toutes ses résolutions antérieures, les déclarations de sa présidence et les communiqués de presse concernant la situation au Soudan, et répétant son ferme attachement à la souveraineté, à l’unité, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale du Soudan,
Se déclarant gravement préoccupé par la propagation de la violence et la détérioration de la situation humanitaire déjà catastrophique, notamment par les niveaux critiques ou pires d’insécurité alimentaire aiguë qui sont atteints, en particulier au Darfour, et préoccupé également par les informations qui continuent de faire état de violations du droit international humanitaire ainsi que de violations des droits humains et d’atteintes à ces droits, y compris des cas de violence sexuelle en temps de conflit,
Notant qu’il est indispensable de permettre l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire vers le Darfour à travers les frontières et les lignes de front, et encourageant les parties au conflit à continuer de travailler en étroite collaboration avec le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires et les organisations non gouvernementales internationales afin que cette aide vitale parvienne aux personnes qui en ont besoin,
Jugeant encourageante la décision prise par les autorités soudanaises de faciliter l’accès humanitaire par les points de passage frontaliers de Tina et de Renk et par voie aérienne via les aéroports soudanais d’El-Fasher, de Kadougli et d’El-Obeid,
Préconisant vivement de poursuivre et de renforcer la coordination de l’action menée aux niveaux régional et international pour aider à mettre fin au conflit et revenir à une transition démocratique durable et inclusive conduite par des civils, et se félicitant à cet égard que l’Union africaine ait constitué un groupe de haut niveau pour le Soudan et se soit engagée à œuvrer aux côtés du peuple soudanais pour faire cesser les combats et enclencher un processus permettant de mettre le Soudan sur la voie d’une paix durable et inclusive, de la démocratie et de la justice,
Prenant note des différents communiqués et résolutions publiés depuis le début du conflit au Soudan par le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, le Quatuor de pays pour le règlement de la situation en République du Soudan de l’Autorité intergouvernementale pour le développement et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, dans lesquels ces entités ont notamment condamné la poursuite des combats, appelé à un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel entre les parties belligérantes et demandé d’intensifier l’aide humanitaire au Soudan et dans les États voisins,
1. Demande la cessation immédiate des hostilités pendant le mois de ramadan et demande à toutes les parties au conflit de s’efforcer de parvenir à un règlement durable du conflit par le dialogue;
2. Exhorte l’ensemble des parties à faire en sorte que tous les obstacles existants soient levés et à permettre un accès humanitaire complet, rapide, durable, sûr et sans entrave, y compris d’un côté à l’autre des frontières et des lignes de front, à s’acquitter des obligations mises à leur charge par le droit international humanitaire, notamment celle de protéger les civils et les biens de caractère civil, et à respecter les engagements pris au titre de la Déclaration d’engagement à protéger les civils du Soudan (« Déclaration de Djedda »);
3. Encourage l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Soudan, Ramtane Lamamra, à user de ses bons offices auprès des parties et des États voisins pour compléter et coordonner l’action de paix régionale;
4. Décide de rester activement saisi de la question.