En cours au Siège de l'ONU

Soixante-dix-neuvième session
8e séance plénière – matin
CPSD/808

La Quatrième Commission poursuit son débat général en portant son attention sur les processus de décolonisation dans les territoires insulaires

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Les délégations qui se sont exprimées, ce matin, à l’occasion du débat général sur la décolonisation de la Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, ont centré leurs interventions sur la poursuite des processus de décolonisation dans les territoires insulaires, lesquels forment la vaste majorité des territoires non autonomes toujours inscrits à l’ordre du jour de la Commission. 

Au nom du Groupe des États mélanésiens, les Fidji ont exprimé leur satisfaction envers les références à la Nouvelle-Calédonie contenues dans le rapport du Comité spécial de la décolonisation, tout en soulignant l’importance que l’archipel demeure sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU afin que le peuple kanak puisse réaliser ses aspirations à l’indépendance. Le Forum des îles du Pacifique mènera d’ailleurs une mission de haut niveau en Nouvelle-Calédonie, du 27 au 29 octobre, avec l’appui de ce territoire et de la France, Puissance administrante, afin de favoriser la compréhension et la paix.  « Les troubles qui ont éclaté en mai de cette année ont été un tournant pour la région et ne doivent pas se répéter », a mis en garde le représentant fidjien.

Sainte-Lucie a exprimé sa préoccupation devant le fait que la « promesse de décolonisation » n’ait pas été tenue dans les petits États insulaires en développement (PEID) qui figurent toujours sur la liste des territoires non autonomes.  Après avoir relevé que 7 de ces 17 territoires se trouvent dans la région des Caraïbes, Saint-Kitts-et-Nevis a salué la « marche vers l’autonomie de ceux qui, partout dans le monde, la désirent », en espérant que ses voisins des Îles Vierges britanniques sauront bientôt réaliser leurs aspirations à l’autodétermination.

« Indiscutablement anticolonialiste » et fermement engagée dans les efforts multilatéraux de décolonisation sous les auspices de l’ONU, Saint-Vincent-et-les Grenadines a salué, à ce sujet, la récente mission de visite menée par le Comité spécial de la décolonisation aux Îles Vierges britanniques, et exhorté les parties à parvenir à un accord à même de répondre à la quête d’autodétermination du peuple de l’archipel.

En tant qu’État en développement ayant accédé à l’indépendance en 1978, la Dominique a estimé que les territoires non autonomes doivent toujours prioriser la voie diplomatique dans leur quête d’indépendance.  Pour mettre fin au « fléau » du colonialisme qui reste en vigueur, « sous nos latitudes », dans ses manifestations économiques, politiques, culturelles et territoriales, le Honduras a incité l’ONU à poursuive de manière exhaustive les processus d’autodétermination afin de faire de l’Amérique latine et des Caraïbes un territoire affranchi du colonialisme.

À la veille du bicentenaire de son indépendance, Haïti a annoncé la création d’un comité national pour la restitution et la réparation, en collaboration avec la Communauté des Caraïbes (CARICOM), afin de documenter « l’injustice » de l’indemnité « astronomique » qui lui a été imposée en 1825 pour prix de la reconnaissance de son indépendance.  « La restitution de cette dette, bien plus qu’une question financière, est avant tout un acte de justice morale », a dit son représentant.

En Afrique, les Comores ont salué la récupération des Chagos par Maurice, un moment historique pour le peuple de l’archipel et tous ceux qui luttent pour la justice et le respect des droits souverains dans le cadre du processus de décolonisation.  Cet événement, a relevé son représentant, s’inscrit dans la vision de l’Agenda 2063 de l’Union africaine d’un continent libéré des vestiges de la colonisation et engagé dans l’intégration de ses peuples.

Évoquant le « fardeau du passé » que constitue le colonialisme et les menaces qu’il fait peser sur l’intégrité territoriale de nombreux États, l’Espagne s’est dite victime d’un « anachronisme historique » impliquant le transfert, il y a trois siècles, d’une place commerciale stratégique à l’empire britannique, laquelle s’est étendue depuis par « la force et la mauvaise foi ».  Néanmoins, Madrid demeure prêt à reprendre les négociations avec le Royaume-Uni en vue de mettre fin à la situation coloniale de Gibraltar, comme le prévoient les résolutions pertinentes de l’Assemblée générale.

Au cœur de ce différend se trouve la présence militaire britannique sur le Rocher, en violation des résolutions de l’ONU qui enjoignent les puissances administrantes à éliminer leurs bases militaires dans les territoires non autonomes.  Or, « la Puissance administrante de Gibraltar semble ignorer ce cadre juridique », a déploré l’Espagne.  Cette situation continue de produire des effets indésirables allant au-delà de la « violation de l’intégrité territoriale et de l’occupation illégitime » de l’Espagne, a poursuivi son représentant, pointant le régime fiscal exceptionnel du territoire qui génère de « graves distorsions » dans l’économie régionale.

Pour le représentant, le départ du Royaume-Uni de l’Union européenne a permis d’ouvrir une « fenêtre d’opportunité ».  La conclusion, en 2020, d’un accord concernant Gibraltar devant servir de base à un futur accord entre Bruxelles et Londres a, selon lui, pour objectif ultime de créer un « espace de prospérité partagée ».  Toutefois, a-t-il précisé, aucune disposition de cet accord n’implique une modification de la position juridique de l’Espagne sur cette question.

Réagissant à ces propos, le Royaume-Uni a indiqué qu’il n’accepterait pas de modalités allant à l’encontre des souhaits exprimés démocratiquement par la population de Gibraltar, pas plus qu’il ne participera à des négociations de souveraineté ne répondant pas à ses besoins.  Londres, a-t-il poursuivi, entretient des relations « modernes » avec ses territoires d’outre-mer, sur la base du partenariat, des valeurs partagées et du droit de chaque territoire à faire le choix de demeurer britannique ou non.  Les relations bilatérales avec ces territoires « autonomes » s’incarnent notamment sous la forme de conseils ministériels conjoints permettant d’assurer le suivi des priorités locales.

Le représentant britannique a ensuite abordé la question des Îles Falkland, qui ont manifesté, selon lui, le désir de demeurer un territoire d’outre-mer.  Il a indiqué n’entretenir aucun doute quant à la souveraineté de son pays sur ces îles, pas plus que sur l’exercice du droit à l’autodétermination de ses habitants, tel qu’exprimé lors du référendum de 2013.  La population ne souhaite pas de dialogue sur la souveraineté, a-t-il insisté, un souhait « exprimé librement qui doit être respecté ».  La délégation a néanmoins espéré établir des relations « plus constructives » avec l’Argentine, à l’exemple de l’accord sur la coopération pratique dans l’Atlantique.

Pour sa part, le Chili a réaffirmé son soutien aux droits légitimes de son voisin sur les îles Malvinas, les Îles de Géorgie du Sud et Sandwich du Sud, tout en soulignant la nécessité pour Buenos Aires et Londres de reprendre les négociations dans les meilleurs délais afin de trouver une solution définitive à ce différend de souveraineté.  Les 10 résolutions adoptées par l’Assemblée générale en la matière reconnaissent toutes l’existence d’un différend de souveraineté sur ces territoires, a rappelé l’Argentine.

S’agissant de la question du Sahara occidental, la Guinée-Bissau a jugé essentiel que les parties restent engagées dans un dialogue politique sous les auspices de l’ONU, conformément à la résolution 2703 (2023) du Conseil de sécurité.  Un avis partagé par la Gambie qui a exprimé sa conviction que la question, essentiellement politique, du Sahara ne peut être résolue que par le dialogue et une coopération approfondie entre les parties prenantes, ancrés dans le principe de l’autodétermination en tant que droit humain inaliénable.

Pour le Bénin, une résolution consensuelle de cette question, par le biais de négociations quadripartites entre le Maroc, l’Algérie, la Mauritanie et le Front POLISARIO, permettrait d’asseoir la stabilité au Maghreb dans la durée.  Le Cameroun a considéré à son tour qu’une solution politique à ce différend à caractère régional contribuerait à la sécurité et la stabilité du Sahel.

En fin de séance, le Pakistan, l’Espagne, le Royaume-Uni et l’Argentine ont exercé leur droit de réponse.

La Quatrième Commission conclura son débat général sur la décolonisation demain, mercredi 16 octobre 2024, à partir de 10 heures.

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