En cours au Siège de l'ONU

Soixante-dix-neuvième session
33e & 34e séances plénières – matin & après-midi
AG/J/3734

La Sixième Commission se penche sur les relations avec le pays hôte et sur les sanctions du Conseil de sécurité

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

Journée menée tambour battant à la Sixième Commission, chargée des questions juridiques, puisque celle-ci a conclu ses discussions sur trois points de son ordre du jour: la protection des missions diplomatiques et consulaires, puis l’examen des rapports du Comité sur les relations avec le pays hôte et du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation

Le débat sur les relations avec le pays hôte a donné lieu à des interventions tranchées, certaines délégations continuant de reprocher aux États-Unis d’entraver leur participation aux activités de l’ONU.  La question des sanctions du Conseil de sécurité a dominé l’examen du rapport du Comité spécial.

La fin du débat sur l’examen de mesures propres à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentantes et représentants diplomatiques et consulaires a été marquée par l’intervention de la Fédération de la Russie, qui a dénoncé les violations désormais « systématiques » de ses missions.  Parmi ces violations, la délégation a fait état de menaces téléphoniques, d’actes terroristes, de vandalisme ou encore des vols à main armée.  Certaines attaques se sont soldées par la mort de fonctionnaires, a déploré ce pays.

Les échanges ont été acrimonieux entre les Émirats arabes unis et le Soudan, le premier pays reprochant au second l’attaque contre la résidence de son ambassadeur au Soudan.  Usant de son droit de réponse, le délégué soudanais a accusé les Émirats arabes unis de soutenir les Forces d’appui rapide et de commettre des crimes au Soudan. Son homologue des Émirats arabes unis a rejeté avec force ces allégations et regretté la politisation des débats de la Commission.

La Présidente du Comité des relations avec les pays hôtes et représentante de Chypre, Mme Marisa Michail, a présenté son dernier rapport, en rappelant tout d’abord que le Comité est une structure « transparente et flexible » à laquelle toute délégation peut participer.  Elle a souligné le besoin de régler rapidement les questions en suspens, lesquelles ont été abondamment détaillées par la République islamique d’Iran, le Venezuela ou encore la Fédération de Russie dans leurs interventions.

La Présidente a rappelé que le Comité a pris note des graves préoccupations exprimées par un État Membre concernant le fait que plusieurs de ses hauts fonctionnaires et d’autres représentants ont fait l’objet d’un traitement inapproprié et de contrôles injustifiés de la part d’agents des douanes et de la protection des frontières du pays hôte.  Ce dernier doit prévenir toute atteinte à la dignité et à l’honneur des représentants des États Membres, a-t-elle rappelé.

La Présidente a également relayé les préoccupations des nombreux cas de non-délivrance ou de refus d’octroi de visas d’entrée.  Enfin, elle a rappelé la possibilité de recourir aux mesures au titre de la section 21 de l’Accord entre l’Organisation des Nations Unies et les États-Unis d’Amérique relatif au Siège de l’Organisation (Accord de Siège) si certaines questions n’étaient toujours pas réglées dans un délai raisonnable. Dans son rapport, le Comité demande en effet une nouvelle fois au Secrétaire général d’envisager, « dès à présent et avec le plus grand sérieux », l’adoption et la mise en œuvre de telles mesures et de redoubler d’efforts pour régler rapidement lesdites questions.

Le Venezuela, au nom du Groupe des Amis pour la défense de la Charte, a rappelé qu’il y a plus de cinq ans l’Assemblée avait demandé avec insistance le règlement des questions en suspens et recommandé que le Secrétaire général prenne des mesures au titre de la section 21 précitée.  Le pays hôte pose en effet des obstacles délibérés en vue d’entraver la capacité de membres de s’acquitter de leurs responsabilités, a noté ce pays.  « Une poignée de membres sont affectés, avec lesquels le pays hôte –ce n’est pas une coïncidence–a des différends bilatéraux. »

Les différends ne doivent pas conduire à une application sélective de l’Accord de Siège, a tranché ce pays, en estimant que le recours à la section 21 est désormais la seule solution.  Même son de cloche du côté de l’Iran, qui a insisté sur le rôle central du Secrétaire général.  Le pays hôte doit s’abstenir de toute considération bilatérale et assurer un traitement égal pour toutes les délégations, et le Bélarus et la Chine l’ont exhorté à respecter les dispositions de l’Accord de Siège.

S’agissant du refus ou des retards pour délivrer des visas aux représentants des États Membres, le Mouvement des pays non alignés est très préoccupé et réitère que les considérations politiques ne doivent pas s’immiscer dans ces procédures, a déclaré l’Iran, au nom du Mouvement.  Ce dernier se dit également très préoccupé par les restrictions arbitraires de déplacement imposées aux fonctionnaires des missions de certains États Membres par le pays hôte, en violation flagrante de l’Accord de Siège et du droit international.

« D’année en année, les délégations s’expriment sur les mêmes défis et ces défis ne sont pas réglés », a appuyé la Fédération de Russie, estimant qu’il est temps d’avoir une autre approche. Les violations flagrantes perpétrées par le pays hôte de ses obligations juridiques consistent en des retards dans la délivrance des visas ou des restrictions de mouvements pour les représentants russes, a précisé le délégué.  Il a appelé le Secrétaire général à lancer la procédure d’arbitrage visée par l’Accord de Siège.

Comme Singapour, la Russie a déploré que les retards dans la délivrance de visas aient ralenti le travail de la Première Commission chargée des questions de désarmement lors de la présente session.  Le Secrétaire général devrait demander les preuves d’accusations d’espionnage avancées par les États-Unis, a dit la Russie, en les jugeant « infondées ».  « Nous nous trouvons dans une situation absurde ou les États-Unis accusent la Russie sans preuve et appliquent ensuite des violations à l’Accord de Siège. »

« Depuis quand les États-Unis décident eux-mêmes qui les États Membres incluent dans leurs délégations »? s’est insurgé le délégué russe.  La Russie a exhorté le Secrétaire général à agir, faute de quoi, cette situation absurde va se poursuivre.  La République arabe syrienne a aussi estimé que le recours à l’arbitrage conformément à la section 21 de l’Accord est le seul moyen de lutter contre les pratiques sélectives du pays hôte.  Cuba a déploré que les procédures du Comité permettent aux États-Unis d’être « juge et partie », ce qui empêche le Comité d’effectuer son travail objectivement.

L’Union européenne s’est en revanche dite convaincue que le dialogue dans un esprit de bonne foi, au sujet de toutes les questions évoquées par le Comité, est le meilleur moyen de parvenir à des solutions acceptables conformément au droit international.  Tout en rappelant que le Secrétaire général continue de miser sur l’engagement du pays hôte, le délégué de Singapour a estimé que le processus actuel ne peut se poursuivre indéfiniment.  « Toutes les options sont sur la table. »

« Les États-Unis sont très fiers d’être le pays hôte de l’ONU », a déclaré la déléguée de ce pays, en insistant sur sa détermination à s’acquitter de ses obligations.  Nous essayons d’améliorer nos processus et de régler les questions en suspens, a-t-elle dit. « Notre travail paye. »  Elle a précisé que son pays, pour la semaine de haut niveau de l’Assemblée générale en septembre dernier, a délivré environ 99% des visas demandés.  La déléguée a rappelé aux États Membres de s’abstenir de demander des visas diplomatiques pour se livrer à des activités non autorisées qui n’ont aucun rapport avec les activités de l’ONU. 

« L’abus de visas de l’ONU est un affront à l’Organisation et compromet son travail essentiel », a tranché la déléguée, avant de louer le dialogue constructif avec le Bureau des affaires juridiques de l’ONU.  À cette aune, elle a estimé que les appels à un règlement plus formel sont « inappropriés, injustifiés et contreproductifs ».  La déléguée des États-Unis a salué l’adoption par consensus des recommandations du Comité et invité la Commission à s’en remettre à sa pratique habituelle. 

Le débat sur le rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, présenté par M. Michael Hasenau, de l’Allemagne, a été dominé par la question des sanctions imposées par le Conseil de sécurité et la non publication de certaines parties dudit rapport.  Le débat s’est ouvert sur un exposé du Chef du Service de la recherche sur la pratique du Conseil de sécurité et sur la Charte du Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix, M. Ahmed Ghanem-Ali, sur les progrès accomplis par le Secrétariat dans la mise à jour du Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité.

À son tour, le Directeur de la Division de la codification, M. Arnold Pronto, a fait le point sur le Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies.  Il a appelé les États Membres à contribuer au fonds d’affectation spéciale pour ce Répertoire.  Au 30 juin 2024, il présentait un solde de 89 265 dollars, a dit le Directeur.

Les délégations ont été nombreuses à dénoncer les sanctions, qui sont « source de souffrances pour les populations », comme l’a déploré le Bélarus, tandis que l’Ouganda, au nom du Groupe des États d’Afrique, les a jugées contraires aux principes régissant les relations entre les États.  La représentante du Venezuela a réitéré les graves préoccupations du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies au sujet des menaces de certains gouvernements cherchant à exercer une domination sur des nations indépendantes et souveraines, y compris par le biais de « pratiques néocoloniales ».  Dans ce droit fil, Cuba a dénoncé le blocus que lui imposent les États-Unis.

Il est urgent de progresser sur les orientations proposées par l’Iran sur « les moyens de prévenir, éliminer, réduire et corriger les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales », a déclaré le Venezuela, en déplorant le manque de volonté de certains États Membres de participer à de véritables discussions sur le sujet.  Le Mouvement des pays non alignés souhaite des informations sur l’évaluation objective perçue des conséquences économiques et humanitaires, à court terme et à long terme, de telles mesures, a déclaré en son nom l’Iran. 

Il a invité le Secrétariat à mettre en place des capacités pour une évaluation idoine des effets délibérés des sanctions imposées par le Conseil.  « L’imposition de sanctions doit être examinée en dernier recours, et seulement lorsqu’il existe une menace à la paix et à la sécurité internationales ou une agression, et non à titre préventif, quelles que soient les circonstances. »  Une position partagée par l’Inde qui a invité le Conseil à trouver des solutions pour les États qui subissent les effets des sanctions, tandis que la Chine a appelé le Conseil à la « prudence » dans ce domaine.

Les États-Unis ont, en revanche, estimé que les sanctions « ciblées » du Conseil sont un instrument vital à sa disposition pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  « Nous continuons d’appuyer un engagement international sur la mise en œuvre des sanctions. »  Elle a ajouté que les sanctions prises par son pays respectent le droit international.  « Certains pays qui dénoncent de telles sanctions les imposent également. »  Les États-Unis ne ménagent aucun effort pour prévenir toute conséquence non voulue des sanctions, a assuré la déléguée.

Dans le même esprit, l’Union européenne a regretté que de nombreuses délégations utilisent régulièrement le débat au sein du Comité de la Charte comme une plateforme supplémentaire pour promouvoir leur discours sur ce qu’elles appellent les « mesures coercitives unilatérales ».  Son délégué a rappelé que les sanctions du Conseil et celles de l’Union européenne sont assorties d’exemptions humanitaires. Il a déploré qu’en mars dernier, la Fédération de Russie ait opposé son veto à la prolongation du mandat du Groupe d’experts chargé d’étudier les violations des sanctions imposées à la République populaire démocratique de Corée (RPDC) par le Conseil de sécurité. 

En outre, l’Union européenne se dit « profondément alarmée » par les informations selon lesquelles la RPDC envoie des troupes participer à « la guerre d’agression illégale de la Russie contre l’Ukraine ».  De son côté, l’Ukraine, au nom de la Géorgie, de la République de Moldova et de l’Ukraine, a dénoncé l’impunité de la Fédération de Russie dans l’escalade de ses agressions contre ces trois pays.

Enfin, l’Ukraine a regretté que, pour la troisième année consécutive, le Comité spécial n’ait pas été en mesure d’adopter une partie de son rapport, en raison notamment de « l’obstruction » de la Russie.  Un regret partagé par les États-Unis, qui ont exhorté le Comité spécial à revenir à la tradition bien établie d’une présentation rigoureuse des échanges de vues entre ses membres.  « Certaines délégations ont adopté une attitude de confrontation au cours du débat sur le règlement pacifique des différends, ce qui a empêché l’adoption de chapitres du rapport », a expliqué Cuba.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 4 novembre, à partir de 10 heures.

NOUVEAU - Suivez la couverture des réunions en direct sur notre LIVE

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.