La Sixième Commission poursuit son débat sur l’élévation du niveau de la mer et l’immunité pénale des représentants des États
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La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a presque terminé, cet après-midi, ses discussions sur un premier groupe de chapitres du rapport annuel de la Commission du droit international (CDI): chapitres introductifs I à III, Chapitre VII (Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État), Chapitre X (L’élévation du niveau de la mer au regard du droit international) et Chapitre XI (Autres décisions et conclusions de la Commission).
Les délégations ont poursuivi leurs commentaires sur la continuité de la condition étatique en cas d’immersion partielle ou totale, « une question qui pose de nombreux défis », a rappelé l’Argentine. Le Chili et la Jamaïque ont souligné que la Convention de Montevideo sur les droits et devoirs des États ne mentionne pas la perte de territoire due à l’élévation du niveau de la mer, estimant qu’il ne s’agit donc pas d’un « principe » mais plutôt d’une « présomption » de continuité qui peut, dans le droit fil du rapport, trouver son fondement juridique dans le droit à l’autodétermination des peuples.
Estimant que la condition étatique ne peut être « éteinte », la Micronésie a tenu à préciser que l’élévation du niveau de la mer ne constitue en rien une « menace existentielle » pour la condition étatique une fois celle-ci établie. Entre deux interventions, le Coprésident du Groupe d’étude sur la condition étatique, M. Juan José Ruda Santaloria, a souhaité clarifier cette formulation: l’utilisation de l’expression « menace existentielle » dans le rapport ne s’applique pas à l’existence d’un État mais bien aux menaces à l’existence des personnes, telles que l’extinction de leur accès aux ressources vitales.
Nonobstant l’élévation du niveau de la mer, des pays comme le Guatemala et la Bulgarie ont réitéré qu’il est potentiellement dangereux pour la stabilité et la prévisibilité des relations internationales de modifier les lignes de base et les droits maritimes qui en découlent, tels qu’ils sont déterminés dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.
« Le droit doit évoluer pour affirmer que la montée des eaux n’efface pas les nations », a lancé le délégué des Maldives, estimant que la souveraineté des États ne devrait en aucun cas être dictée par les conséquences des changements climatiques d’origine humaine. « Il s’agirait d’une profonde injustice », a renchéri Chypre, jugeant qu’une application combinée de la Convention de Montevideo et de la Convention sur le droit de la mer serait utile ici.
S’agissant de la question des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, la Guinée a attiré l’attention sur le risque accru d’apatridie. À défaut d’un cadre juridique clair sur la question, le Chili a recommandé de se pencher sur la jurisprudence des droits de l’homme pour identifier les obligations des États dans ce domaine, notamment celle de la Cour interaméricaine des droits de l’homme. À cet égard, quelques pays, comme la Jamaïque, ont souligné l’importance de la coopération internationale en matière de transfert de technologies, de réduction des risques et d’atténuation des effets des changements climatiques sur les populations et les biens culturels. L’Inde, pour sa part, a estimé que seules des mesures concrètes à cet égard et pour remettre en état les terres, permettront d’avancer.
Au cours du débat, les délégations ont également rappelé, à l’instar des jours précédents, l’importance de la question de l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État pour la stabilité des relations internationales et la lutte contre l’impunité. Plusieurs intervenants ont réaffirmé leur accord avec la levée de l’immunité personnelle (ratione personae) des membres de la « troïka » (chefs d’État, chefs de gouvernement et ministres des affaires étrangères) en cas de graves crimes internationaux, en conformité avec le droit international coutumier et le jus cogens. En ce qui concerne l’immunité fonctionnelle (ratione materiae) des représentants de l’État, l’Estonie a été d’avis qu’elle ne peut être invoquée dans le cadre de crimes internationaux graves.
Toutefois, l’Inde et la Guinée équatoriale, notamment, ont appelé la CDI à fournir des orientations complémentaires sur l’extension de l’immunité personnelle aux autres fonctionnaires de haut rang accomplissant des actes à titre officiel. Cette extension serait, en effet, « justifiée par les particularités des systèmes politiques de nombreux pays », selon la Fédération de Russie, appuyée par les Émirats arabes unis.
Le délégué russe a jugé fondamental que les travaux en la matière soient menés avant tout pour la codification du droit international, et non pas dans une perspective « pseudo progressiste », en l’absence de consensus au sein de la communauté internationale. Le but de l’immunité est de protéger les responsables d’États souverains contre les tentatives injustes de poursuites de la part d’autres États, a-t-il insisté. Il a déploré la tendance actuelle à la politisation de la justice pénale qui contribuerait à la « chasse aux représentants de régimes indésirables ». En outre, les tentatives visant à faire adopter par un vote ce que l’on appelle les exceptions à l’immunité feraient inévitablement de l’ensemble du projet d’articles de la CDI « un document mort-né ».
L’Algérie et la Guinée équatoriale ont abondé dans ce sens, rappelant qu’il reste nécessaire de protéger les représentants officiels contre « l’exercice politiquement motivé et illégitime » de la juridiction pénale ayant pour objectif de les empêcher de pratiquer leurs fonctions ou de s’ingérer dans les affaires internes des États.
La Sixième Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 25 octobre, à partir de 10 heures, après la visite traditionnelle du Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), M. Nawaf Salam.
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