En cours au Siège de l'ONU

Soixante-dix-neuvième session
18e & 19e séances plénières – matin & après-midi
AG/J/3725

La Sixième Commission termine son débat sur l’état de droit, appelant à une plus grande inclusivité et une application unifiée du droit international

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La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a terminé, aujourd’hui, son débat sur l’état de droit auquel ont participé près d’une centaine de délégations.

Réaffirmant leur attachement à l’état de droit, de nombreux intervenants, ont, à l’instar de l’Algérie, tenu à souligner l’importance de respecter la souveraineté des États et leurs systèmes juridiques nationaux.  Garantir l’état de droit au niveau national incombe aux gouvernements, a martelé le Soudan, en appelant les États à mettre leurs systèmes nationaux en conformité avec les normes internationales.  La Tunisie a, d’emblée, prévenu qu’elle ne permettrait à personne de s’immiscer dans ses affaires intérieures. 

L’Inde et le Pakistan ont, à ce titre, prôné une approche qui tienne compte des besoins et spécificités des systèmes juridiques nationaux.  Le fait que certains États « dits civilisés » imposent des règles en l’absence de consensus ne peut être que source de division, a assené le délégué de la Chine.  Dans la même veine, le Pakistan a mis en garde contre la reconnaissance au niveau international de normes adoptées par des enceintes restreintes. Le droit international doit être développé dans des forums inclusifs, ont demandé plusieurs délégations, mettant en avant la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et le récent Accord portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. 

Afin de refléter les différents points de vue, la plupart des intervenants ont estimé que seule la participation « pleine et équitable » de tous les États Membres permettra de bâtir un système international fondé sur la justice et la bonne gouvernance.  L’Argentine et l’Inde ont, par exemple, préconisé une plus grande inclusion des États Membres au sein des organisations internationales et du système multilatéral, y compris au Conseil de sécurité, alors que l’Uruguay et le Togo ont mis en avant la nécessaire participation des femmes dans les processus juridiques, notamment pénaux.  « La diversité au sein des institutions juridiques et multilatérales est une tâche en souffrance », a regretté le Costa Rica, préconisant à son tour de prendre en compte les perspectives des femmes, des populations autochtones et des personnes handicapées. 

À cet égard, les nouvelles technologies peuvent permettre un accès simplifié et plus inclusif à la justice, via la numérisation des dossiers, pour un traitement efficace des affaires criminelles.  Face au risque d’exacerber les inégalités, l’Argentine a rappelé qu’il est nécessaire de réduire la fracture numérique.  Il s’agit également de veiller à ce que l’utilisation de la technologie respecte les droits humains, tels que le droit à une procédure régulière ou à la confidentialité des données. 

Pour d’autres délégations, comme la Côte d’Ivoire, les programmes et l’assistance technique des Nations Unies restent la pierre angulaire du renforcement et de la consolidation des systèmes judiciaires et de l’état de droit au niveau national.  Plusieurs États d’Afrique et d’Amérique du Sud ont, d’ailleurs, rapporté les efforts réalisés sur le plan national en matière de lutte contre la corruption, le blanchiment d’argent et le terrorisme, réitérant l’importance du renforcement des capacités, notamment en matière d’éducation et de sensibilisation au droit international. 

Quelques délégations se sont néanmoins alarmées des « défis majeurs » posés à l’état de droit par les conflits.  Haïti, en proie aux gangs criminels, a dit faire face à l’insécurité, la corruption et aux ingérences politiques qui compromettent l’indépendance judiciaire et l’accès équitable à la justice.  Au Myanmar, « la junte militaire a démantelé l’état de droit » qui ne pourra être rétabli qu’avec l’aide d’une justice transitionnelle et d’une gouvernance civile, selon le délégué de ce pays. 

« Ma région est devenue le lit de mort du droit international », s’est lamenté le représentant du Liban, estimant qu’une culture de l’impunité a remplacé la primauté de l’état de droit.  C’est l’adhésion partielle aux règles du droit international qui en a fissuré le socle alors que beaucoup se tournent encore vers la Charte des Nations Unies comme étant la seule voie juste et viable, a-t-il ajouté, regrettant « les répercussions du deux poids, deux mesures » sur son pays.

D’autres États, comme le Koweït et les Maldives, n’ont pas manqué non plus de condamner « les nombreuses violations du droit international commises par Israël qui continue à défier les ordres d’un tribunal mondial ». « Nous sommes témoins de la destruction de l’état de droit au niveau international », a déploré le Pakistan. 

La Chine a abondé en ce sens, regrettant que certains pays aient fait du droit international « un outil politique pour leurs propres intérêts », et appelant à promouvoir la coopération plutôt que « des jeux à somme nulle ».  In fine, « le problème n’est pas notre attachement à l’état de droit mais bien sa mise en œuvre », a tranché l’Éthiopie.

Malgré les critiques et la difficulté de préserver l’état de droit en période de conflit, Israël a affirmé veiller au respect du droit international et de la justice dans ses opérations militaires, ses efforts humanitaires ou encore son traitement des détenus.  « Les commandants quittent les champs de bataille pour expliquer devant les tribunaux ce qui s’est réellement passé sur le terrain et répondre aux fausses informations qui circulent dans l’espace public », a dit le délégué israélien. Il a battu en brèche la mauvaise utilisation des tribunaux internationaux par certains États qui, selon lui, foulent au pied l’état de droit.

Exerçant son droit de réponse, l’État de Palestine a dit qu’il était sûrement « plus facile pour Israël de larguer des bombes sur des enfants palestiniens que d’être sous le feu des critiques dans cette salle ». Appuyée par la République islamique d’Iran et l’Iraq, la déléguée palestinienne a jugé l’impunité d’Israël « déplorable » au regard du droit international. 

Si l’état de droit permet de promouvoir les droits de l’homme, la paix et la prospérité, il faudra néanmoins rétablir la confiance entre les gouvernements pour remédier à son déclin, a conclu l’Organisation internationale de droit du développement (IDLO), en proposant quelques lignes directrices à cet effet.  Pour l’Organisation européenne de droit public (EPLO), il s’agira également d’intégrer au niveau international des notions provenant des différents systèmes juridiques pour que l’état de droit soit un « instrument de toutes les nations ». 

Lundi 21 octobre, à 10 heures, la Sixième Commission entamera l’examen du rapport annuel de la Commission du droit international (CDI) qui coïncide traditionnellement avec la Semaine du droit international. 

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