La Sixième Commission salue l’adoption par la CNUDCI de quatre textes législatifs renforçant le commerce international
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La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, s’est penchée aujourd’hui sur le rapport annuel de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI), présenté par sa Présidente, Mme Vilawan Mangklatanakul (Thaïlande). La Sixième Commission a, auparavant, clos son débat sur les crimes contre l’humanité avec l’intervention du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). En fin de journée, elle a entamé sa discussion sur la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies.
Lors de sa « très productive » cinquante-septième session, qui a eu lieu entre le 24 juin et le 12 juillet 2024, la CNUDCI a parachevé quatre textes législatifs: Loi type CNUDCI-UNIDROIT sur les récépissés d’entrepôt; Clauses types de la CNUDCI sur le règlement express spécialisé des différends; Statut du Centre consultatif sur le règlement des différends relatifs à des investissements internationaux (adopté en principe); Loi type de la CNUDCI sur les contrats automatisés.
À l’entame de son propos, la Présidente de la CNUDCI s’est félicitée de la session qui a permis de « démontrer l’unité de tous afin de bâtir un cadre juridique plus efficace ». Les textes législatifs présentés aujourd’hui sont « la preuve des capacités de production de la CNUDCI et de sa flexibilité », a notamment loué la Finlande, au nom des pays nordiques. Outre ces textes, la Commission a confirmé le programme des activités législatives en cours menées par ses groupes de travail.
Concernant les futurs travaux de la CNUDCI, la Présidente a attiré l’attention sur la nécessité de procéder à un inventaire de tous les textes de la Commission qui traitent des aspects électroniques, et notamment à une enquête sur la manière dont les États ont incorporé ces textes dans leur droit interne et dont ils sont pris en compte dans les engagements pris à l’échelle internationale au sujet du commerce sans papier. Des travaux seront également engagés concernant la reconnaissance des sentences arbitrales électroniques, une initiative saluée par la France. Afin que la CNUDCI puisse rester pertinente, le Canada lui a demandé de se concentrer sur des projets qui posent des problèmes juridiques bien définis.
S’exprimant après la Présidente, une quarantaine de délégations ont, dans l’ensemble, salué les avancées réalisées par la CNUDCI. Plusieurs pays, dont Cuba et l’Afrique du Sud, ont néanmoins rappelé que ses travaux doivent bénéficier au développement de toutes les économies et « soutenir la participation de tous les pays afin de garantir une acceptation universelle ». Tout en tenant compte des spécificités régionales, l’élimination des obstacles juridiques au droit commercial constitue un pas important afin que tous les pays puissent profiter du commerce international, a insisté le Bélarus.
Les délégations ont applaudi la finalisation de la Loi type sur les récépissés d’entrepôt, « un effort réussi de coordination et de coopération entre la CNUDCI et UNIDROIT », ont remarqué Les États-Unis. Ces récépissés permettront l’échange des marchandises entreposées dans les entrepôts et leur utilisation comme gages, tout en garantissant la sécurité juridique pour les créanciers et la réduction des coûts financiers pour les petits producteurs, a expliqué la Présidente de la CNUDCI. Pour la déléguée américaine, cette loi type est « nécessaire pour garantir le bon fonctionnement du système et l’accès aux financements, particulièrement pour les petits agriculteurs ».
S’agissant des Clauses types de la CNUDCI sur le règlement express spécialisé des différends, elles fourniront aux entreprises des moyens rapides de règlement des différends afin de réduire les délais et les dépenses, a encore assuré la Présidente. Elles permettront d’adopter des procédures spécialisées qui s’inspirent des règles d’arbitrage accélérées de la CNUDCI afin d’éviter les retards ou les pertes financières dans les projets, ont également apprécié quelques délégations.
Le Royaume-Uni, à l’instar de plusieurs autres pays, a témoigné de sa volonté de respecter les normes internationales en matière de règlement des différends en rappelant son adhésion à la Convention de Singapour sur la médiation, « une pratique qui n’est pas assez répandue aujourd’hui » selon le Japon. Appuyée par l’Arabie saoudite et la Chine, l’Union européenne a rappelé l’importance de la Convention de Beijing sur la vente judiciaire de navires qui apporte une protection aux acquéreurs tout en préservant les intérêts des parties dans le respect des règles nationales. Elle a également attiré l’attention sur la Convention de Maurice sur la transparence dans l’arbitrage entre investisseurs et États, démontrant ainsi « l’engagement politique de l’Union européenne envers les efforts menés par la CNUDCI ».
Nombre de délégations, dont celles du Mexique et de la Chine, ont également salué l’adoption de la Loi type de la CNUDCI sur les contrats automatisés, portant notamment sur les contrats utilisant l’intelligence artificielle et des traductions automatisées. Dans une économie numérique en constante évolution, cette loi type renforcera la confiance et permettra aux économies de mieux se préparer pour faire face aux changements, ont estimé plusieurs intervenants. Il s’agit aussi d’un instrument supplémentaire pour promouvoir le commerce électronique, a noté Singapour.
Néanmoins, certaines délégations, dont la Sierra Leone et la République islamique d’Iran, ont insisté sur le nécessaire renforcement des capacités dans les pays en développement afin que ceux-ci puissent également bénéficier des avancées en droit commercial international. Les États-Unis ont, en outre, insisté sur l’importance d’adapter les modalités aux préférences des parties prenantes afin de préserver leurs relations mutuelles.
Enfin, la CNUDCI a été félicitée pour l’adoption « en principe » du Statut du Centre consultatif sur le règlement des différends relatifs à des investissements internationaux. Pour la Présidente, ledit Centre représente « un jalon important dans les efforts de réforme » afin d’aider les États à accélérer le règlement de leurs différends. Certaines délégations ont, par ailleurs, appelé à ce que les solutions élaborées par le Centre soient adaptées au États et à leurs spécificités. D’autres, comme la Malaisie, ont souhaité qu’il développe des activités de renforcement des capacités en matière de règlement des différends pour les États. Favorable également à ce Centre, l’Iran a toutefois posé comme condition de garantir son indépendance, notamment vis-à-vis de ses bailleurs de fonds.
Le choix du siège du Centre restant à définir, plusieurs États se sont portés candidats. Si la Thaïlande a proposé de l’accueillir à Bangkok, la France a informé que Paris refléterait parfaitement « l’approche multipolaire de partenariat Nord-Sud adoptée depuis le début des travaux ». De son côté, l’Afrique du Sud, appuyée par la Sierra Leone, a tenu à souligner que l’augmentation constante des procédures d’arbitrage lancées par des pays d’Afrique sub-saharienne et leur coût « exorbitant » justifieraient que le siège revienne à l’Afrique. La Côte d’Ivoire, le Ghana et l’Arménie ont également souhaité endosser cette responsabilité. Le délégué du Panama a, quant à lui, estimé qu’il faudrait créer des bureaux régionaux en sus du siège central.
À l’issue de son examen du rapport de la CNUDCI, la Sixième Commission a entamé son débat sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies. Une quinzaine de délégations se sont exprimées sur les deux rapports* du Secrétaire général: l’un décrit les politiques et procédures adoptées par le Secrétariat de l’ONU, les fonds et programmes ainsi que d’autres entités des Nations Unies pour le traitement des allégations crédibles d’infraction imputable à un fonctionnaire ou expert en mission des Nations Unies; l’autre résume des informations communiquées par divers États Membres à ce sujet.
Les rapports contiennent également des recommandations visant à garantir la cohérence, la systématisation et la coordination de ces politiques et procédures, un point apprécié par les délégations. Celles-ci ont unanimement réaffirmé leur engagement en faveur de la politique de « tolérance zéro », en particulier pour les actes d’exploitation et d’atteinte sexuelle. À ce sujet, l’Iran, au nom du Mouvement des pays non alignés, a salué la stratégie d’assistance et de soutien aux victimes qui permettra de fournir des soins médicaux et des conseils juridiques.
S’il est « crucial de sauvegarder la confiance en l’ONU », a estimé l’Ouganda, au nom du Groupe des États d’Afrique, il reste néanmoins des lacunes et des disparités dans les juridictions qui empêchent la poursuite pénale de manière systématique. Appuyé par l’Iran et l’Australie, au nom également du Canada et de la Nouvelle-Zélande, l’Ouganda a rappelé que les États de nationalité ont ici le devoir d’exercer leur compétence en ce qui concerne les infractions commises par leurs ressortissants, appelant à renforcer les capacités des États en matière d’enquête, de poursuite et d’extradition.
Les États doivent prendre les mesures législatives nécessaires, en toute transparence, pour que leurs ressortissants qui se sont rendus coupables d’une infraction grave puissent être poursuivis, a dit la Norvège, au nom des pays nordiques. À cette fin, il est important que les États coopèrent avec les Nations Unies afin de faciliter l’échange d’informations sur des allégations d’infractions imputables au personnel onusien.
Abondant en ce sens, l’Union européenne a mis l’accent sur la nécessité de mettre fin à l’impunité des fonctionnaires et experts coupables d’infractions alors qu’ils sont « le visage de l’ONU sur le terrain ». Les privilèges et immunités doivent être levés dans ce cas, a plaidé le délégué, insistant sur l’importance de la protection des victimes et des lanceurs d’alerte contre les représailles et de la coopération pour permettre les poursuites. « Personne n’est au-dessus de la loi. »
Accusant l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) d’avoir été infiltré par le Hamas avant les attaques du 7 octobre 2023, Israël a battu en brèche la réponse de l’ONU, estimant « choquant » que l’Organisation n’ait pas enquêté officiellement et qu’aucune poursuite n’ait été lancée. « C’est la sombre réalité de l’ONU aujourd’hui », a-t-il asséné.
La Sixième Commission se réunira demain, mardi 15 octobre, à partir de 10 heures, afin de poursuivre le débat en cours.