En cours au Siège de l'ONU

Soixante-dix-neuvième session,
10e & 11e séances plénières – matin & après-midi
AG/EF/3604

Deuxième Commission: l’harmonie avec la nature au cœur des objectifs de développement durable

(En raison de la crise de liquidités qui affecte l’Organisation des Nations Unies, la Section des communiqués de presse est contrainte de modifier le format de la couverture des réunions.)

« Nous ne pourrons ni vivre ensemble en paix ni atteindre notre objectif de développement durable si nous n’apprenons pas rapidement à respecter et à protéger le monde naturel qui nous permet de vivre ».  Tel est le constat sous forme de sentence du Secrétaire général dans son rapport consacré à l’harmonie avec la nature, présenté à la Deuxième Commission (questions économiques et financières) par Mme Astra Bonini, du Département des affaires économiques et sociales (DESA).

Aujourd’hui, la Commission a fait le point sur les objectifs de développement durable et entendu de nombreux experts de l’ONU présenter des rapports relatifs au Programme 2030 et à ses 17 objectifs de développement durable (ODD).  Et le bilan n’est guère satisfaisant: le monde n’est en voie d’atteindre que 17% des cibles des ODD, a indiqué une autre représentante du DESA, Mme Yongyi Min. Si des avancées modérées ont été enregistrées, force est de constater que les progrès stagnent, voire régressent, pour plus d’un tiers des cibles alors qu’au cours des premières années du Programme 2030, la progression était lente mais constante.

Ensuite, après 2020, les problèmes mondiaux se sont multipliés.  La pandémie de COVID-19, l’escalade des conflits, les tensions géopolitiques, les effets des changements climatiques et les lacunes économiques systémiques ont mis en danger les ODD, touchant de manière disproportionnée les pays en développement et les populations vulnérables du monde entier.  Par exemple, pour ce qui concerne les ODD no 1 (« Pas de pauvreté ») et 2 (« Faim zéro »), Mme Min a comparé les chiffres avec ceux de 2019: 23 millions de personnes supplémentaires vivaient dans une pauvreté extrême en 2022 et 383 millions de personnes supplémentaires étaient en insécurité alimentaire modérée ou grave en 2023.

Les effets des changements climatiques 

Par ailleurs, l’année 2023 a été la plus chaude jamais enregistrée et les dangers liés au climat tels que les canicules, les inondations et les feux de forêt ont gagné en fréquence et en intensité, a fait observer M. Kamal Kishore, Représentant spécial du Secrétaire général, en présentant le rapport sur la Mise en œuvre du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030).  Pire, « des phénomènes récents ont montré que des catastrophes peuvent réduire à néant des décennies de développement en un instant ».

Comme l’ont rappelé le Groupe des 77 et la Chine, les changements climatiques pèsent de manière disproportionnée sur les pays en développement, en particulier sur les plus pauvres et les plus vulnérables. Ainsi, les petits États en développement sans littoral (PDSL) ne contribuent qu’à 1% des émissions mondiales de CO2 mais sont les premiers à subir les catastrophes climatiques comme les sécheresses, la désertification et la fonte des glaciers. En effet, malgré certaines réductions des émissions dans les pays développés, les concentrations de gaz à effet de serre ont atteint des niveaux records en 2022 et continué d’augmenter en 2023, a renchéri Mme Min.  « Nous devons nous débarrasser des combustibles fossiles en accélérant de manière concertée les transitions justes vers les énergies renouvelables », a-t-elle lancé.

À ce propos, M. James Grabert, du Secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), a fait état des résultats de la COP28, qui s’est tenue à Dubaï, aux Émirats arabes unis, du 30 novembre au 13 décembre 2023. Le « Consensus des Émirats arabes unis » auquel cette conférence des Parties a abouti marque le début de la fin de l’ère des combustibles fossiles en jetant les bases d’une transition rapide, juste et équitable, étayée par des réductions d’émissions importantes et un financement accru.  Un « accord historique sur la mise en œuvre des dispositifs de financement » visant à répondre aux pertes et préjudices a été conclu, et la création d’un nouveau fonds dédié « est un symbole important de la solidarité mondiale, qui témoigne de l’urgence climatique et représente une avancée en matière de justice climatique ».

Sécheresse, désertification et dégradation des terres

Les sécheresses pourraient en effet toucher les trois quarts de la population mondiale d’ici à 2050, selon les prévisions transmises par M. Ibrahim Thiaw, Secrétaire exécutif de la Convention sur la lutte contre la désertification.  Le Secrétariat de la Convention a pris un certain nombre de mesures pour faire face à cette situation.  Il soutient par exemple des initiatives de restauration des terres à grande échelle, telles que l’Initiative mondiale du G20 pour la restauration des terres et l’initiative Grande Muraille verte pour le Sahara et le Sahel.

La problématique de la désertification et de l’accès à l’eau a été évoquée à maintes reprises au cours des échanges à la Deuxième Commission.  Les sécheresses plus fréquentes et les événements météorologiques extrêmes accélèrent la dégradation des terres, a expliqué la Mongolie, qui a mis en œuvre une stratégie nationale pour lutter contre la désertification en mettant l’accent sur la reforestation, l’agriculture durable et la protection des écosystèmes.

Le Pakistan a dit figurer parmi les 10 nations les plus touchées par les catastrophes liées au climat malgré sa contribution négligeable aux émissions mondiales de gaz à effet de serre.  Quant au Cameroun, il joue un rôle clef dans l’action climatique, car il est un des pays qui séquestrent le plus de carbone au monde, mais les services écosystémiques qu’il rend ne sont pas encore bien compris ni évalués.

Les initiatives pour l’eau

L’Égypte a mis en avant l’urgence de traiter la rareté de l’eau, un problème existentiel pour de nombreux pays dont elle-même, où la disponibilité par habitant atteint 560 mètres cubes par an, bien en dessous du seuil de pauvreté en eau de 1 000 mètres cubes.  Le Maroc a pour sa part érigé la question de l’eau en priorité nationale et lancé plusieurs initiatives telles que des projets de stations de dessalement, comme la station de Casablanca, le plus grand projet du genre en Afrique et la deuxième installation au monde qui sera alimentée à 100% en énergie propre.  Pleinement consciente de l’importance de concilier le développement de nos économies avec la préservation de nos mers et océans, la Principauté de Monaco accueillera, quant à elle, le Forum sur l’économie bleue et la finance, axé sur la mobilisation des ressources publiques et privées pour l’océan, en juin 2025.

Le Tadjikistan, qui a accueilli en juin la troisième Conférence internationale de haut niveau sur la Décennie internationale d’action sur le thème « L’eau et le développement durable » (2018-2028), a indiqué que les objectifs concernant l’eau et l’assainissement sont loin d’être atteints.  De fait, en 2030, 2 milliards de personnes devraient toujours manquer d’accès à de l’eau potable, 3 milliards à l’assainissement et 1,4 milliard à des services d’hygiène de base.  Face à cette réalité, le représentant tadjik s’est félicité de la nomination d’un envoyé spécial pour l’eau.

Une assemblée de la Terre en vue

Convaincue que l’harmonie entre les êtres humains et la nature est essentielle, la Chine a souligné que le principe des responsabilités communes mais différenciées doit guider les efforts contre les changements climatiques.  L’idée de convoquer une « assemblée de la Terre » lancée par le Président de l’Assemblée générale fait son chemin, et les dialogues interactifs de l’ONU sur l’harmonie avec la nature mettent en avant la nécessité d’une transition vers des modèles de production et de consommation durables. 

« Cette transition suppose de ne plus considérer le profit à court terme et la croissance économique comme les principaux moteurs du développement, mais d’adopter une approche globale du développement durable qui soit en harmonie avec la nature et donne ainsi la priorité au bien-être de la Terre », a souligné Mme Bonini.  En ce sens, « les États Membres doivent continuer à se tenir mutuellement responsables de la protection de la planète pour les générations actuelles et futures ».

Les délégations ont également misé sur la prochaine Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique (COP16), qui se déroulera à Cali, en Colombie, du 21 octobre au 1er novembre, sur le thème « La paix avec la nature ».  Il s’agit en effet de mettre en œuvre le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal, l’ambitieux plan adopté en 2022 lors de la COP15 et qui vise à stopper et à inverser la perte de biodiversité d’ici à 2030.

La Deuxième Commission poursuivra ses travaux relatifs au développement durable demain, mardi 15 octobre, dans l’après-midi, après une réunion conjointe avec le Conseil économique et social (ECOSOC), le matin.

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