Commission de la condition de la femme: pour qu’advienne la « justice numérique », les femmes et les jeunes doivent défendre leurs droits
Les représentants de la jeunesse ont fait part des défis multiples et des stratégies innovantes pour faire de la « justice numérique » une réalité, ce matin, à l’occasion d’un dialogue interactif inédit de la Commission de la condition de la femme consacré à l’innovation et l’éducation à l’ère du numérique aux fins de la réalisation de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles. En après-midi, les délégations ont poursuivi leur discussion générale sur le thème prioritaire de la soixante-septième session.
Si la technologie crée de nouveaux espaces de prise de décisions, « les femmes y brillent par leur absence », a notamment regretté Mme Alison Adriana Berbetty Omiste, ingénieure et avocate de la Bolivie. Or, leur voix est pourtant essentielle dans les domaines de la cybersécurité, de l’intelligence artificielle, de la gouvernance électronique et de l’analyse de données. Cette sous-représentation des femmes montre le besoin de redoubler d’efforts afin de promouvoir l’égalité des sexes dans le secteur technologique, a estimé à son tour Mme Hawa Yokie, Directrice générale du Kamara Yokie Innovation Center, de Sierra Leone, en particulier dans les pays en développement et en milieu rural.
Développeuse de tests dans une société informatique internationale, Mme Milica Nežević a constaté de son côté que l’écart entre les sexes en matière d’accès à la technologie, combiné au « risque de préjudice numérique » pour les femmes et les filles handicapées, conduit à une fracture numérique exacerbée par « l’intersection du genre et du handicap ». L’accessibilité numérique doit donc devenir une priorité des secteurs public et privé, a plaidé Mme Nžević, au moyen de programmes spécifiques englobant les femmes des zones rurales et des pays les moins développés. ¸
Cependant, les menaces en ligne, surtout envers celles qui font valoir leurs droits en tant que membres de la communauté LGBTQI, demeurent « omniprésentes », a déploré la Conseillère spéciale de l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse. Un rapport mondial de son bureau portant sur la protection des jeunes dans les espaces civiques montre d’ailleurs que 18% des jeunes défenseurs des droits humains font ou ont fait face à des menaces en ligne.
Venu témoigner en tant que militant intersexué et transgenre, M. Oscar Fitzpatrick a d’ailleurs constaté de première main l’impact de la désinformation anti-LGBTQI. Selon ses recherches, les deux principaux problèmes auxquels sont confrontés les citoyens numériques transgenres, non conformistes, non binaires et de genre différent sont la rhétorique anti-LGBTQI et la désinformation en ligne, qui affectent plus de 90% des utilisateurs. Les comportements transphobes sont encore aggravés selon lui par les biais algorithmiques et le manque de formation.
Pour favoriser l’intégration des femmes, nous devons en outre comprendre les différences entre les sexes en matière d’accès à la technologie, a fait valoir Mme Aïsha Mehmood, du Pakistan, fondatrice de Baithak - Challenging Taboos. Elle a souligné, par exemple, l’importance de protéger la vie privée des filles qui doivent partager un téléphone portable avec des membres de leur famille, souvent des hommes, ou encore de privilégier les fonctionnalités hors ligne, considérant que les filles ont un accès plus limité à Internet que les garçons. Toutefois, a-t-elle prévenu, le « voile numérique » que constituent les normes culturelles traditionnelles subsistera tant que les normes et stéréotypes sexistes continueront d’exister dans le monde physique.
Pour que les femmes et les filles soient au centre de l’innovation technologique et que celle-ci contribue à l’amélioration de leur situation économique, « il faut que les armes se taisent » a affirmé la République démocratique du Congo à l’occasion de la reprise de la discussion générale.
Une situation similaire à celle qui prévaut du Mali où les problèmes d’accès aux outils numériques, à Internet et à l’électricité sont exacerbés par la « destruction des installations numériques par des terroristes », ce qui réduit d’autant l’accès des femmes et des filles au numérique, selon la Ministre de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille.
La Commission de la condition de la femme poursuivra ses travaux demain, mardi 14 mars, à partir de 10 heures.
SUITE DONNÉE À LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET À LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIE SIÈCLE
Réalisation des objectifs stratégiques, mesures à prendre dans les domaines critiques et autres mesures et initiatives (E/CN.6/2023/3, E/CN.6/2023/4, E/CN.6/2023/5)
Thème prioritaire: innovation et évolution technologique, et éducation à l’ère du numérique aux fins de la réalisation de l’égalité des sexes et de l’autonomisation de toutes les femmes et de toutes les filles
Mme MILICA NEŽEVIĆ, de la Serbie, développeuse de tests dans une société informatique internationale, a constaté que si les innovations technologiques permettent d’accéder et de partager des informations dans le monde entier, les avantages apportés par la technologie ne sont pas à la portée de tous. Ainsi, bien qu’elles constituent le groupe minoritaire le plus important au monde, avec plus d’un milliard de personnes, les personnes en situation de handicap continuent d’être confrontées à des barrières socioéconomiques, au manque d’accès, à la discrimination et à la stigmatisation, défis, a-t-elle noté, qui se traduisent également dans le monde technologique. L’écart entre les sexes en matière d’accès à la technologie, combiné au risque de préjudice numérique pour les femmes et les filles handicapées, conduit selon elle à une fracture numérique exacerbée par l’intersection du genre et du handicap. Les femmes et les filles handicapées sont aussi parmi « les plus pauvres des pauvres », d’où l’importance que la technologie contribue à leur inclusion à l’éducation et à l’emploi, et que les gouvernements contribuent à la rendre abordable et accessible à toutes. Afin que les femmes handicapées puissent bénéficier pleinement des avantages et des opportunités que présentent les avancées technologiques, nous devons soutenir et encourager les femmes handicapées à développer leurs compétences numériques au moyen de programmes spécifiques, a plaidé Mme Nežević, y compris à l’intention des femmes des zones rurales et des pays les moins développés. L’accessibilité numérique doit devenir une priorité des secteurs public et privé, en s’appuyant sur des changements législatifs et stratégiques, a-t-elle conclu.
Mme HAWA YOKIE, cofondatrice et Directrice générale du Kamara Yokie Innovation Center en Sierra Leone, s’est inquiétée des défis importants pour l’égalité des sexes dans la filière de la technologie numérique, où les femmes restent sous-représentées dans de nombreux domaines de l’industrie. Citant des chiffres de l’UNESCO, elle a indiqué que seuls 28% des chercheurs dans le domaine de l’intelligence artificielle dans le monde sont des femmes. De plus, selon le rapport de Trust Radius « Women in Tech », les start-up dirigées par des femmes ne reçoivent que 2% des financements en capital-risque. Ces statistiques démontrent le besoin urgent d’efforts concertés pour promouvoir l’égalité des sexes dans ce secteur, a fait observer l’intervenante, relevant que l’inégalité entre les sexes dans l’espace numérique et l’espace d’innovation est particulièrement prononcée dans les pays sous-développés, notamment en Afrique subsaharienne, où la plupart de ces défis ne sont pas documentés. Elle a néanmoins constaté des améliorations prometteuses, notamment une augmentation du nombre de femmes poursuivant une carrière dans les domaines des STIM.
La panéliste a exhorté à un effort collectif pour institutionnaliser l’égalité des sexes dans la « technovation » et autonomiser les filles en Afrique. Pour ce faire, elle a recommandé d’améliorer l’accès des femmes et des filles à l’éducation et à la formation en matière de STIM grâce à des bourses, des programmes de mentorat, des stages, des clubs et des concours axés sur la technologie. Elle a, ensuite, appelé à concevoir des programmes d’enseignement numérique qui répondent aux besoins des femmes, notamment en matière de sûreté et de sécurité en ligne, ainsi qu’au potentiel de la technologie pour l’autonomisation économique et sociale des femmes. Ces programmes doivent être accessibles aux femmes de toutes les régions du monde, a-t-elle insisté.
Enfin, elle a conseillé d’encourager les entrepreneuses dans le domaine de la technologie et de l’innovation en leur fournissant des fonds, un mentorat, une formation et des réseaux de collaboration et de connaissances. Il faut s’attaquer aux obstacles systémiques qui empêchent les femmes d’accéder aux financements et aux ressources, notamment en luttant contre les préjugés sexistes dans les cercles d’investissement et de financement, a-t-elle exhorté.
La panéliste ensuite expliqué qu’elle avait commencé, il y a trois ans, à sensibiliser les jeunes filles à la nécessité d’apprendre le codage et la robotique à l’école afin qu’elles puissent résoudre les problèmes de société. Aujourd’hui, ses efforts ont abouti à la création du Kamara Yokie Innovation Center (KYIC), un centre de réflexion sur la conception, le codage et la robotique destiné aux filles. « Rejoignez-moi en investissant dans des start-up et des initiatives dirigées par des femmes », a-t-elle lancé avant de conclure.
Mme ALISON ADRIANA BERBETTY OMISTE, ingénieure système et avocate en Bolivie, qui a formé plus de 500 femmes en zones périurbaines et a eu un impact sur plus de 2 000 personnes à travers ses programmes d’inclusion numérique, a constaté que la pandémie a accru les inégalités, notamment l’écart numérique entre les sexes. Les stéréotypes qui limitent la capacité des femmes et des filles à se développer se sont approfondis, en particulier dans les zones rurales où l’accès aux technologies est encore plus difficile, a-t-elle observé. Si la technologie a créé de nouveaux espaces de prise de décisions, les femmes y brillent par leur absence, a regretté l’ingénieure, pour qui leur voix est pourtant essentielle dans des domaines tels que la cybersécurité, les entreprises technologiques, les cryptomonnaies, l’intelligence artificielle, les technologies appliquées à la gouvernance électronique et l’analyse de données. Face à cette réalité, des actions citoyennes appelées « communautés technologiques » cherchent à encourager les filles et les femmes à utiliser et à appliquer la technologie en toute sécurité, a souligné l’avocate, avant d’inviter les responsables publics et privés à prendre en compte les besoins et les perspectives des filles et des femmes pour générer une production technologique qui irait de pair avec le développement social. Dans cet esprit, elle a recommandé de concentrer les efforts sur des stratégies transversales pour appuyer le développement des compétences technologiques des personnes de tous âges, avec une attention particulière pour les femmes et les filles rurales et autochtones. Elle a également exhorté les États à promouvoir les actions d’initiatives civiles qui travaillent pour l’inclusion des femmes, des filles et des populations vulnérables dans l’utilisation des technologies.
M. OSCAR FITZPATRICK, activiste multidisciplinaire et consultant irlandais, a indiqué être venu témoigner en tant que militant intersexué et transgenre qui a constaté de première main l’impact de la désinformation anti-LGBTQI. Ses propres recherches, menées à l’université d’Amsterdam, ont révélé que les deux principaux problèmes auxquels sont confrontés les citoyens numériques transgenres, non conformistes, non binaires et de genre différent sont l’exposition à la rhétorique anti-LGBTQI et à la désinformation en ligne. Ces informations erronées peuvent provenir de diverses sources et des acteurs individuels peuvent les amplifier dans le but de répandre l’intolérance à l’égard des personnes LGBTQI. En outre, les biais algorithmiques peuvent faire apparaître des contenus antitransgenres dans les résultats de recherche avec une préférence hiérarchique, ce qui peut conduire à radicaliser certains individus, s’est-il alarmé. Dans le cadre de son étude, plus de 90% des utilisateurs ont déclaré qu’ils étaient directement exposés au quotidien à une rhétorique antitransgenre en ligne, allant d’attitudes transphobes à une rhétorique génocidaire. Les personnes visées ont souvent fait état des conséquences négatives de la violence en ligne sur leur bien-être, a-t-il souligné estimant qu’il n’est donc pas étonnant que les jeunes transgenres, non conformistes, non binaires ou de genre différent soient presque huit fois plus susceptibles de s’automutiler ou de se suicider. Il a déploré le manque d’action significative pour soutenir le bien-être des jeunes utilisateurs vulnérables sur les plateformes de médias sociaux, relevant en outre que les politiques des plateformes en matière de modération humaine et algorithmique manquent de formation sur les données relatives à la violence transphobe.
Pour lutter contre les discours de haine, l’activiste a indiqué que les systèmes de surveillance et de modération doivent être conçus pour repérer la rhétorique antitransgenre dans toutes ses complexités linguistiques. Des stratégies telles que les législations allemande et française sur les discours de haine exigent la suppression des discours de haine dans les 24 heures suivant la réception d’une plainte, a-t-il rappelé, et la France a également mis en place une plateforme nationale de signalement des discours de haine afin de rendre le processus de signalement clair pour les utilisateurs. Il a également cité le code de conduite de l’Union européenne (UE) sur la lutte contre les discours de haine en ligne qui encourage les plateformes et les entreprises à retirer ces discours de leurs plateformes après avoir reçu des plaintes. L’éducation à la citoyenneté numérique est un autre facteur déterminant pour permettre aux jeunes transgenres, non conformistes, non binaires et de genre différent d’acquérir les connaissances et les outils nécessaires pour naviguer dans la sphère numérique en toute sécurité et de manière responsable. Elle devrait devenir un principe de base de l’éducation civique, a souhaité M. Fitzpatrick.
Mme AÏSHA MEHMOOD, fondatrice de Baithak - Challenging Taboos au Pakistan, a attiré l’attention sur la situation des filles et des femmes rurales, alertant que lorsqu’on ne figure pas sur les radars des espaces numériques, on n’existe malheureusement pas dans le monde d’aujourd’hui car on ne peut pas avoir accès aux opportunités et aux ressources. Or, les filles et les femmes des communautés marginalisées représentent le groupe le plus absent des espaces numériques, a-t-elle fait remarquer. Elle a constaté un besoin énorme d’investissements dans des politiques et des solutions permettant de localiser la technologie et de la rendre disponible dans des langues que les gens comprennent, tout en tirant parti de l’audio et du visuel pour les utilisateurs ayant un faible niveau d’alphabétisation. Elle a également appelé à tirer les enseignements de la pandémie en matière d’espace technologique inclusif, en pensant de manière à la fois simple, innovante et transformatrice.
Pour mettre au point des solutions techniques favorisant l’intégration des femmes, il faut comprendre les différences entre les sexes en matière d’accès à la technologie et aux produits numériques, de niveaux de culture numérique et de besoins liés au genre, a-t-elle indiqué. Par exemple, a-t-elle détaillé, les filles sont plus susceptibles de partager un téléphone potable avec des membres de leur famille, en particulier les hommes, d’où l’importance d’assurer la protection de la vie privée de l’utilisateur. En outre, les filles ont un accès plus limité à Internet que les garçons, de sorte que les fonctionnalités hors ligne peuvent mieux servir les populations féminines. La panéliste a également évoqué une étude menée par un chercheur de la London School of Economics qui a utilisé le terme « purdah numérique » (voile numérique), pour désigner les femmes pakistanaises dont la participation à la sphère numérique est dictée par des normes sociales traditionnelles. Cet exemple nous apprend que les espaces numériques resteront inexistants et inaccessibles aux femmes et aux filles tant que les espaces hors ligne resteront dangereux pour elles et tant que les normes et stéréotypes sexistes toxiques existeront dans les espaces physiques.
Mme MARIJA VASILEVA-BLAZEV, Conseillère spéciale de l’Envoyée du Secrétaire général pour la jeunesse, a estimé que les nouvelles technologies doivent être développées en tenant compte des droits humains, et notamment des droits des filles et des femmes. Certaines catégories de femmes, en particulier celles en situation de handicap, continuent de faire face à des obstacles structurels et à des atteintes à leur vie privée. Nous ne parviendrons pas à surmonter ces obstacles si nous n’incluons pas les jeunes dans la recherche de solutions, a-t-elle prévenu. Le nombre de femmes qui œuvrent à développer les technologies et l’intelligence artificielle demeure en effet très faible, a déploré la panéliste. Pendant ce temps, les menaces en ligne sont omniprésentes, surtout pour celles qui font valoir leurs droits en tant que membres de la communauté LGBTIQ. Un rapport mondial de son bureau sur la protection des jeunes dans les espaces civiques montre que 18% des jeunes défenseurs des droits humains disent faire face ou avoir subi des menaces en ligne, a-t-elle noté, en demandant la mise en place de mesures de protection adéquates.
La participation des femmes et des jeunes est en outre insuffisante, une situation qui doit changer pour qu’advienne la « justice numérique », a-t-elle poursuivi. Pour ce faire, la participation des secteurs public et privé ainsi que de la société civile est à ses yeux essentielle. Elle a souligné que le pacte numérique mondial doit être mis en œuvre avec la participation de l’ensemble des parties prenantes, y compris les jeunes et les femmes. L’Assemblée générale a en outre approuvé la création d’un bureau pour les jeunes dont le mandat principal est de se pencher sur l’innovation, l’inclusion et l’engagement effectif des jeunes, a-t-elle ajouté. Son bureau s’efforce par ailleurs d’améliorer la protection de la participation des jeunes en ligne, avec la collaboration de l’Union internationale des télécommunications (UIT) et de la Représentante spéciale chargée de la question de la violence contre les enfants.
M. LUIS JUAN CHUQUIHUARA CHIL, Président de la Commission de la science et de la technique au service du développement (CSTD), a relevé que la période actuelle est marquée par des avancées rapides dans le domaine des STIM. Hélas, les femmes sont sous-représentées dans ces secteurs, le ratio étant d’une femme pour quatre hommes, a-t-il constaté, y voyant un problème de l’ensemble de la société, qui s’accompagne de discriminations de genre, de salaires moins élevés et de promotions moindres pour les femmes. Appelant à appuyer les femmes et les filles tout au long de la chaîne éducative et à créer une culture qui apprécie leur contribution à sa juste valeur, il a indiqué que la commission qu’il préside s’emploie à renforcer les capacités en matière de STIM pour atteindre l’ODD 5. Pour combler le fossé entre hommes et femmes dans ce domaine, il faut selon lui mener des changements profonds, surmonter les stéréotypes et faire en sorte que plus de femmes et de filles suivent des carrières dans les sciences. Il est donc essentiel de promouvoir des pratiques innovantes qui permettent aux femmes et aux filles de développer leur potentiel dans les STIM, a-t-il préconisé.
Dialogue interactif
Au cours des échanges qui ont suivi, de nombreuses délégations se sont félicitées de cette discussion sans précédent avec les jeunes et de l’« occasion unique » qui leur est offerte de contribuer au cadre normatif mondial sur l’égalité des sexes, la technologie, l’innovation et l’éducation à l’ère numérique.
La plupart des intervenants ont attiré l’attention sur les crises multiples qui se sont juxtaposées et ont amplifié le « rythme inégal » de la transformation numérique au sein et entre les pays, tout en augmentant les obstacles structurels et systémiques pour les femmes et les filles. Dans le monde entier, les femmes et les jeunes filles ont moins de chances que les hommes d’être connectées de manière significative à un niveau qui leur permette de vivre une expérience en ligne sûre, satisfaisante et productive à un coût abordable, a constaté la Vice-Présidente de la Commission, Mme Chimguundari Navaan-Yunden.
Mais la réalité est plus criante lorsqu’il s’agit des pays en développement, a fait remarquer l’Érythrée qui a alerté que le fossé numérique entre les sexes risque de s’y creuser davantage. De fait, a fait savoir la Vice-Présidente, même si 76% de la population vivant dans les pays les moins avancés est couverte par un signal mobile à haut débit, seuls 25% sont en ligne, les hommes ayant 52% plus de chances de l’être que les femmes.
Il s’agit purement et simplement d’une forme de discrimination intersectionnelle, a dénoncé le Mexique, appuyé par le Liban qui a appelé, en outre, à combler le fossé numérique entre zone rurale et urbaine. « Il faut rendre ces populations visibles », a renchéri la maire autochtone d’une localité rurale au Chili.
Les États et gouvernements doivent prendre des initiatives car ils sont les mieux à même de connaître les besoins spécifiques des différentes régions de leur territoire, a fait valoir l’ingénieure système et avocate en Bolivie, tandis que la Directrice générale du Kamara Yokie Innovation Center en Sierra Leone a appelé à renforcer les financements dans les infrastructures technologiques pour favoriser un accès abordable. Constatant que les solutions qui existent bénéficient en général aux personnes d’un niveau économique élevé, la fondatrice de Baithak - Challenging Taboos au Pakistan a appelé à inclure les femmes dans les programmes, la planification et la conception des solutions.
À son tour, la Guinée équatoriale a voulu partager ce que qu’elle fait pour réduire certaines de ces préoccupations, évoquant en particulier un programme dont l’objectif est de proposer des outils numériques pour permettre aux filles de diverses sphères d’identifier les problèmes dans leur communauté et d’élaborer des solutions. Les États fédérés de Micronésie ont, pour leur part, mis en place des plateformes qui sont devenues des espaces d’échanges pour dialoguer sur de nombreuses problématiques, telles que les changements climatiques, ou encore de sujets tabous comme la menstruation. L’Arabie saoudite a évoqué divers programmes visant à préparer les jeunes au marché du travail à travers les compétences numériques.
Lors de ce dialogue, il s’est aussi agi d’examiner les mesures à mettre en place pour aborder et suivre les risques sexospécifiques des technologies émergentes, y compris la protection de la vie privée et des données, et pour améliorer les systèmes de transparence et de responsabilité afin que les garanties nécessaires soient en place pour protéger les jeunes femmes et les filles de la discrimination et de la violence.
S’appuyant sur les résultats d’une enquête menée entre juillet et septembre 2022, l’Équateur a notamment signalé que 334 femmes politiques, dirigeantes ou œuvrant dans le domaine social, ont été victimes de harcèlement politique orchestré, l’objectif étant de « sortir ces femmes » de ces espaces. C’est un coup dur porté à la démocratie, a déploré la délégation.
Il faut aussi se pencher sur la conception des algorithmes, a conseillé une déléguée de la jeunesse des Pays-Bas. Une mesure également défendue par l’activiste multidisciplinaire et consultant irlandais, pour qui il est essentiel d’agir avec plus d’engagement, notamment à l’égard des communautés LGBTQI qui sont prises pour cible en raison de leur identité. Quels investissements peut-on recommander pour s’assurer que les jeunes femmes et les filles ne sont pas laissées pour compte dans la transformation numérique, se sont interrogés d’autres intervenants, à l’instar de la République-Unie de Tanzanie.
Si nous voulons parler d’inclusion, il faut déjà permettre à tous de prendre part à cette session, et pourquoi ne pas l’organiser dans les pays du Sud, a critiqué une jeune activiste du Kenya qui intervenait en visioconférence, car n’ayant pas obtenu son visa pour prendre part aux travaux en personne. Un point sur lequel se sont également accordées les délégations de la jeunesse du Japon et de la Norvège qui ont regretté que beaucoup de jeunes n’ont pas pu faire entendre leur voix aujourd’hui en raison du manque de moyens financiers ou de visas.
Questions nouvelles, tendances, domaines d’intervention et approches novatrices des questions ayant une incidence sur la situation des femmes, notamment sur l’égalité entre femmes et hommes
Prise en compte des questions de genre, situations et questions intéressant les programmes (E/CN.6/2023/2, E/CN.6/2023/7, E/CN.6/2023/10)
Suite de la discussion générale
Mme WADIDIE FOUNÈ COULIBALY, Ministre de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille du Mali, a indiqué qu’un ministère coordonne l’action du Gouvernement dans le domaine du numérique dans le cadre de la politique nationale et du plan stratégique national des technologies de l’information et de la communication, avec l’aide de différents partenaires. Elle a fait état de la mise en œuvre de projets en vue de parvenir à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes et des filles, en particulier le projet « acheter auprès des femmes », système d’information qui s’adresse aux agricultrices; le Centre d’accès universel, qui forme et finance de l’équipement informatique à l’intention des femmes; de même que le Fonds d’appui à l’autonomisation de la femme et l’épanouissement de l’enfant, qui finance des activités de formation aux technologies de l’information. Toutefois, a reconnu la Ministre, le Mali continue d’être confronté à des défis en termes d’accès aux outils numériques, à Internet et à l’énergie. La situation sécuritaire entraîne également la destruction des installations numériques par des terroristes, ce qui réduit l’accès des femmes et des filles au numérique.
Mme OGERTA MANASTIRLIU, Ministre de la santé et de la protection sociale de l’Albanie, a déclaré que plus de 60% des membres du Parlement albanais sont des femmes et qu’elles occupent aujourd’hui de nombreux postes de direction de haut niveau. À cet égard, l’innovation et la technologie sont des priorités de son pays, comme le démontrent les investissements réalisés par le Gouvernement dans la transition numérique des services publics, qui placent l’Albanie au huitième rang européen. Une plateforme numérique permet aux citoyens d’accéder aux services publics, ce qui a pour effet d’accroître l’accès aux services de développement et un meilleur accès des femmes vulnérables et victimes de violence aux ressources à leur intention. « La technologie est un catalyseur du développement », a poursuivi la Ministre, en ajoutant que l’inclusion d’une perspective fait partie d’une politique stratégique visant l’intégration des femmes et des filles dans toute leur diversité, notamment en ce qui concerne les formations STIM. L’Albanie a récemment tenu des consultations avec ONU-Femmes et ses voisins des Balkans afin de promouvoir l’emploi des femmes dans les domaines technique et scientifique, a fait savoir la Ministre.
Mme AMINA PRISCILLE LONGOH, Ministre du genre et de la solidarité nationale, a informé que son pays a entamé l’exécution de son plan d’action national de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), notamment le pilier relatif à l’amélioration des connaissances et de l’accès des femmes et des filles aux technologies de l’information et de la communication. La Ministre a également parlé d’un plan national de maillage national en fibres optiques, en cours d’exécution afin d’améliorer la participation des populations aux TIC. Au niveau opérationnel, elle a évoqué la baisse de 50% des tarifs d’accès à Internet par réseau mobile ainsi que la défiscalisation des matériaux numériques. Bien que n’ayant pas encore ratifié la Convention de Budapest, son gouvernement a, d’ores et déjà, créé une agence nationale de sécurité informatique et de certification électronique pour lutter contre la cybercriminalité.
Mme GISELE LUSEBA NDAYA, Ministre du genre et de la famille de la République démocratique du Congo, a mentionné le Programme d’appui au développement des micro, petites et moyennes entreprises, dont un volet important est consacré à la numérisation des textes de lois en faveur des femmes. Elle s’est dite profondément convaincue que le numérique contribuera à l’amélioration de la performance économique des femmes et à l’augmentation de la lutte contre la pauvreté. « Il s’agit d’une véritable chance. » Cependant, pour faire en sorte que les femmes et les filles soient au centre du changement dans l’innovation technologique et que l’économie numérique inclusive soit réalisée en RDC, nous demandons la paix, a-t-elle déclaré. « Il faut que les armes se taisent en RDC, les femmes de mon pays ont besoin de votre soutien et action dans ce plaidoyer », a-t-elle conclu, en appelant à des investissements dans l’infrastructure numérique pour combler le clivage entre les sexes.
Mme MARIA DA CONCEIÇÃO DA SILVA ÉVORA, Ministre de la femme, de la famille et de la solidarité sociale de la Guinée-Bissau, a rappelé que l’égalité entre citoyens est consacrée par la Constitution de son pays. Une loi en 2018 prévoit un quota de 36% de femmes pour les postes à responsabilité. Elle a mentionné la prochaine adoption d’un plan pour l’autonomisation des femmes s’appuyant sur le Programme 2030. Elle a insisté sur la gravité des changements climatiques, en appelant à une pleine participation des femmes aux efforts visant à y remédier. Bien que la Guinée-Bissau ait rejoint plusieurs instruments internationaux de promotion de l’égalité des genres, les violences contre les femmes perdurent, y compris les mutilations génitales, a-t-elle reconnu, en soulignant la volonté politique de son pays d’y remédier.
Mme SAVIA MINT N’TAHAH, Ministre de l’action sociale de la Mauritanie, a évoqué les progrès réalisés en termes de statut de la femme, de renforcement de sa participation politique et de son accès aux centres de prise de décisions ou encore de proximité des services de base pour les femmes et filles les plus vulnérables. Afin de promouvoir leur accès à ces services, une série de programmes de développement ont été mis en place. Ils portent notamment sur la distribution de crédits destinés à financer les activités génératrices de revenu pour les femmes en situation précaire, la sensibilisation familiale et pour le changement des stéréotypes, ou encore des formations professionnelles, a indiqué la Ministre. Par ailleurs, un projet de loi-cadre a été mis en place pour lutter contre la violence faite aux femmes et aux filles, et ce texte doit être soumis au parlement sous peu, a précisé la Ministre. Elle a également parlé de l’inauguration d’une chaîne de télévision dédiée à la famille et de la Banque de la famille. Quant à l’accès des Mauritaniennes aux centres de prise de décisions, elle a expliqué qu’elles représentent 6 ministres sur un total de 27, 20% de parlementaires, ou encore 42% des conseillers régionaux, soit 99 femmes. En dernier lieu, la Ministre a annoncé la création d’un ministère de la numérisation qui contribuera grandement à faciliter l’accès des femmes aux technologies.
Mme AICHA NANETTE CONTE, Ministre de la promotion féminine, de l’enfance et des personnes vulnérables de Guinée, a reconnu que l’accès limité à la technologie et à Internet pour les femmes et les filles est l’un des défis clefs de son pays. Elle a ainsi relevé que, selon les données de l’Union internationale des télécommunications (UIT), seulement 33% des femmes en Guinée ont accès à Internet, ce qui signifie qu’un grand nombre d’entre elles ne peuvent suivre une formation ou accéder à des informations en ligne. En termes d’accès à la technologie, les femmes continuent également à être sous-représentées dans les domaines comme l’ingénierie et les métiers techniques en Guinée, a-t-elle indiqué, précisant que les jeunes filles représentaient 32% de l’effectif total des étudiants en technologies de l’information et de la communication (TIC) lors de l’année universitaire 2021-2022. Sur la même période, les femmes ne représentaient que 8,4% des enseignants-chercheurs spécialisées dans le domaine des sciences informatiques, a déploré la Ministre, avant d’énumérer une série de mesures d’incitation destinées à attirer les filles vers les filières techniques et les TIC. En dépit de ces efforts, l’accès des femmes et des filles aux TIC reste très limité, tant sur le plan formel qu’informel, et surtout en zone rurale, a-t-elle admis, imputant cet échec à l’absence de stratégies de sensibilisation et d’élimination des stéréotypes de genre, ainsi qu’à la faible promotion de modèles féminins et à l’inexistence de politique de formation des formateurs. Pour y remédier, le Gouvernement de transition guinéen entend soutenir la scolarisation des filles et promouvoir leur orientation vers les filières scientifiques et techniques; élaborer une politique nationale de l’innovation; proposer des programmes de formation pour faciliter l’accès et l’apprentissage des élèves et étudiantes à travers des espaces numériques de travail; mettre à disposition 19 000 tablettes pour l’apprentissage des élèves; former annuellement 200 filles et femmes aux outils informatiques; sensibiliser les femmes et filles aux risques liés à la cybercriminalité et former des groupes de femmes à l’utilisation des TIC dans le développement de leurs activités.
Mme SOFIA LOREUS, Ministre à la condition féminine et aux droits des femmes d’Haïti, a indiqué que son gouvernement a déployé des efforts constants pour mettre en œuvre des programmes traduisant de manière concrète les résolutions du Plan d’action de Beijing de 1995. Le phénomène des filles mères prend de l’ampleur, tandis que les médias de communication de masse continuent de véhiculer des images dévalorisantes des femmes. « Il s’agit de questions préoccupantes pour mon pays et il convient d’en donner une réponse urgente et adéquate. » Elle a plaidé pour de nouvelles stratégies plus prometteuses pour que les questions d’inégalités de genre soient traitées de manière substantielle et qu’elles soient un axe prioritaire dans les grandes décisions nationales et mondiales. L’État haïtien demeure convaincu que l’égalité entre les femmes et les hommes représente un pilier fondamental sur lequel repose la réalisation d’un État démocratique, les ressources demeurant un facteur essentiel pour l’atteinte de résultats durables en la matière, a conclu la Ministre.
Mme TEKEA TESFAMICAEL, Présidente de l’Union nationale des femmes érythréennes, a souligné que le développement ne peut se réaliser sans la pleine participation des femmes et des filles et que cela passe par leur accès aux nouvelles technologies et à Internet, mais également aux programmes éducatifs. Alors que l’Érythrée cherche à utiliser ces technologies pour améliorer l’éducation des femmes et des filles, la représentante a reconnu que des défis importants restent à relever, en particulier en termes de coût des équipements. Elle a dénoncé l’importance de la fracture numérique entre les pays développés et en développement, ainsi que les inégalités que cela suscite au sein même des sociétés, appelant à créer des structures de pouvoir pour lutter contre ces inégalités entre le Nord et le Sud global. À ce titre, elle a mis l’accent sur l’importance des transferts de technologies vers les pays en développement et sur l’expansion de projets comme les bibliothèques.
Mme BETTY AMONGI ONGOM, Ministre du genre, du travail et du développement social de l’Ouganda, a déploré que les femmes soient actuellement 18% moins susceptibles que les hommes de posséder un smartphone, ce qui a notamment un impact sur leur utilisation des services d’argent mobile. Faute de tels avantages, les femmes et les filles risquent d’être exclues non seulement des services numériques mais aussi des services de base en ligne, a-t-elle argué, précisant que cette situation n’épargne pas son pays. L’Ouganda est en effet aux prises avec un faible accès au réseau, en particulier en zones rurales, un coût élevé de la connexion, une utilisation d’Internet qui ne concerne que 3,7% des hommes et 1% des femmes, un accès limité aux technologies d’enseignement en ligne et aux téléphones portables, et par voie de conséquence, un accès limité aux informations et aux services d’argent mobile. Pour changer cet état de fait, a-t-elle indiqué, le Gouvernement ougandais prévoit, au cours des cinq prochaines années, d’étendre la couverture des TIC pour soutenir la prestation de services électroniques; de réduire les coûts d’Internet; et de développer une infrastructure TIC sensible au genre. Elle a également cité le soutien à l’innovation basée sur les connaissances autochtones en médecine et les technologies appropriées à l’agriculture; la promotion de l’utilisation des plateformes numériques dans les affaires, le marketing et le commerce; et la lutte contre la cyberviolence et l’exploitation économique des femmes et des filles. L’Ouganda est conscient que pour combler les lacunes en matière d’innovation, de changement technologique et d’éducation, il convient de promouvoir l’autonomisation économique des femmes en mettant l’accent sur l’accès au crédit et à la numérisation du commerce, a souligné la Ministre. Il importe aussi selon elle d’améliorer les infrastructures dans le domaine des STIM et de promouvoir la planification et la budgétisation en matière de genre pour garantir que les femmes et les filles bénéficient équitablement des programmes financés par le budget national. Enfin, a-t-elle plaidé, il faut accroître l’engagement des hommes dans la poursuite de l’égalité des sexes, y compris dans toutes les interventions visant à lutter contre la violence basée sur le genre.
Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a relevé que la fracture numérique est le reflet des inégalités dans le monde, les habitants des pays en développement et des zones rurales ayant un accès plus limité aux technologies. Les femmes et les filles sont, selon elle, confrontées à des obstacles particuliers en termes d’accès sûr aux compétences numériques, à la protection des données et à la confidentialité. Afin d’assurer un environnement numérique sûr et accessible, l’égalité d’accès à la justice est un élément clef, a fait valoir la représentante. Le Liechtenstein a lancé un laboratoire interactif STIM afin d’aider les enfants, et en particulier les filles, à approfondir leurs connaissances dans ce domaine. La déléguée s’est ensuite inquiétée des atteintes aux droits des filles et des femmes à l’éducation, à l’emploi et aux espaces publics depuis la prise de contrôle de l’Afghanistan par les Taliban en 2021. Elle a condamné le « meurtre » de Mahsa Amini et des participants à des manifestations pacifiques pour les droits des femmes en Iran, estimant qu’en expulsant ce pays de la Commission, la communauté internationale avait clairement indiqué qu’un tel comportement est intolérable.
M. KIM SONG (République populaire démocratique de Corée) a souligné les initiatives axées sur les personnes prises par son gouvernement afin d’assurer les droits et le bien-être des femmes. Selon lui, les femmes exercent « en toute confiance » leurs droits politiques accordés par la Constitution socialiste et la loi sur la protection et la promotion des droits de la femme. Les femmes sont ainsi impliquées dans des activités professionnelles « fières et valorisantes » tout en bénéficiant des avantages sociaux de l’État dans tous les domaines de la vie sociale, a assuré le délégué. Il a vu pour preuve l’augmentation constante du nombre de travailleuses inscrites au système de téléenseignement dans les universités, ainsi que la modernisation des maternités dans chaque province. « Il n’existe nulle part des femmes aussi heureuses que celles de notre pays qui jouissent pleinement de leur dignité et de leurs droits en tant qu’êtres humains sociaux grâce aux politiques du système socialiste supérieur », a affirmé le représentant.
M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a indiqué que malgré l’avancement des technologies qui a permis de faire évoluer les perceptions négatives vis-à-vis des femmes et des filles, se posent, dans le même temps, un certain nombre de défis. Il a préconisé d’accroître l’accès des femmes et des filles à la technologie et de combler les lacunes afin d’en promouvoir un usage avisé. Poursuivant, il est revenu sur le tremblement de terre qui a frappé son pays en février dernier, lequel a exacerbé les effets négatifs de 10 ans de guerre contre le terrorisme, l’occupation étrangère ainsi que les mesures coercitives unilatérales. Ces mesures et évènements représentent une difficulté supplémentaire pour son gouvernement, notamment s’agissant de l’autonomisation des femmes, a-t-il déploré.
M. THI MINHTHOA, Directeur général du Département de l’égalité entre les hommes et les femmes du Viet Nam, a mentionné l’adoption par son pays d’un programme national de transformation numérique allant jusqu’en 2025, avec une vision à l’horizon 2030. Le Viet Nam a également proclamé, l’année dernière, la Journée nationale de la transformation numérique, observée le 10 octobre, pour montrer sa détermination à accélérer son processus de numérisation, a ajouté l’intervenant. D’ores et déjà, s’est-il félicité, les efforts déployés par son pays au fil des ans ont porté leurs fruits, citant le Rapport 2022 sur l’écart entre les sexes dans le monde, qui classe le Viet Nam quatre-vingt-troisième sur 146 pays et trente et unième dans l’indice de participation des femmes aux activités économiques. Le taux de participation des femmes à la population active au Viet Nam est actuellement de 62,5%, a-t-il informé, un taux assez élevé par rapport à la moyenne mondiale, a-t-il soutenu. De plus, a ajouté l’intervenant, la technologie numérique est désormais bien implantée dans toutes les industries, l’agriculture et les services. Par conséquent, les entreprises, en particulier celles dirigées par des femmes, bénéficient de nombreuses conditions favorables à une numérisation rapide, a-t-il conclu.
Mme LACHEZARA STOEVA (Bulgarie) a prôné une intégration de la perspective de genre dans les mesures législatives et politiques afin que les femmes puissent participer pleinement et de manière significative aux processus décisionnels en ligne et hors ligne. En Bulgarie, la Stratégie nationale pour la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes est le principal document d’appui aux politiques de participation égale des femmes et des hommes à tous les domaines. Des efforts sont également déployés pour promouvoir l’enseignement des STIM auprès des filles et des femmes. La Bulgarie se classe d’ailleurs au premier rang de l’Union européenne pour la proportion de femmes employées dans les technologies de l’information, soit 28,2%, a-t-elle noté, et la moitié de ses scientifiques, ingénieurs et chercheurs sont des femmes. Alors que le secteur des technologies de l’information représente à lui seul 6,6% du PIB de la Bulgarie, il est prévu qu’il atteigne plus de 11% du PIB d’ici à la fin de l’année prochaine. La représentante s’est dite animée d’un sentiment d’urgence pour que s’accélèrent les efforts au niveau national afin qu’ils aillent de pair avec le développement des technologies, notamment en ce qui concerne l’éducation.
M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a déploré que tous les progrès réalisés au cours de la décennie écoulée dans son pays ont été réduits à néant par le coup d’État militaire illégal de février 2021. Depuis, la junte militaire a brutalement tué plus de 3 120 personnes, dont plus de 440 femmes. Plus de 145 personnes ont été tuées lors d’interrogatoires et plus de 840 personnes ont été tuées en détention, a-t-il détaillé. Le diplomate a décrit des attaques systématiques, généralisées et coordonnées de la junte militaire contre les populations civiles, y compris les femmes et les jeunes filles. La nature et l’ampleur de ces actions inhumaines constituent des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, a-t-il affirmé.
Le représentant a ensuite indiqué que des femmes défenseuses des droits humains du Myanmar ont pris la parole lors de plusieurs événements parallèles de la Commission de la condition de la femme la semaine dernière. Des appels forts et urgents ont été lancés à la communauté internationale pour qu’elle prenne des mesures décisives contre la junte militaire et qu’elle apporte un soutien efficace aux groupes vulnérables, a-t-il dit.
Mme ISALEAN PHILLIP, Ministre des affaires de genre de Saint-Kitts-et-Nevis, a souligné les progrès réalisés par son pays dans le domaine des TIC, faisant notamment état d’un accès à Internet généralisé et gratuit dans les centres communautaires polyvalents. Elle a également indiqué que le développement du haut débit progresse partout dans le pays et que 80% des logements ont désormais leur propre connexion. Reconnaissant que la pandémie a mis à l’épreuve l’accessibilité des services numériques pour les groupes les plus vulnérables, elle a indiqué que le Gouvernement de Saint-Kitts-et-Nevis s’est engagé à élargir les connexions à toutes les écoles publiques et à fournir des tablettes à tous les élèves jusqu’au niveau secondaire. Grâce aux efforts de sensibilisation, la proportion de femmes ayant des compétences dans le domaine des STIM a augmenté et davantage de filles que de garçons sortent du lycée avec cette spécialité, s’est enorgueillie la Ministre. Mais si le Gouvernement s’emploie à autonomiser les femmes et les filles en mettant l’accent sur leur sous-représentation dans les STIM et en augmentant leur espace de représentativité, il dispose des capacités limitées d’un PEID de 50 000 habitants, a-t-elle fait observer, appelant à plus de solidarité avec les pays en développement pour les aider à tirer parti des technologies numériques.
Mme DÚNIA ELOISA PIRES DO CANTO (Cabo Verde) a mentionné le lancement dans son pays de l’initiative « Internet comme bien essentiel » visant à garantir le plus large accès possible à la toile. L’initiation aux nouvelles technologies est également devenue un module obligatoire dans les écoles primaires. Ces technologies sont un allié de choix dans la lutte contre les violences en fonction du genre, a dit la déléguée, en mentionnant le renforcement des services concourant à cette lutte. Enfin, elle a appelé à l’adoption de cadres juridiques clairs afin de réguler ces nouvelles technologies et de concilier liberté d’expression et lutte contre les discours haineux.
M. LJUBOMIR DANAILOV FRCHKOSKI (Macédoine du Nord) a concédé que malgré les progrès réalisés dans l’harmonisation des cadres avec la Convention d’Istanbul, il reste encore des lacunes à combler, notamment en termes de lutte contre la violence faite aux femmes et de l’application du code pénal en la matière. Il a appelé à adopter des lois pour combattre le harcèlement en ligne et amender les protocoles pour mener systématiquement des enquêtes en cas de plaintes déposées par des femmes, même si elles sont retirées plus tard, a-t-il estimé. En outre, il a encouragé la création d’unités spéciales pour protéger les femmes au sein de la police et de la justice. Il faut également disposer de statistiques ventilées et financer des études sur les différentes formes de violences faites aux femmes, a ajouté le représentant.
M. DIEGO PARY RODRÍGUEZ (Bolivie) a constaté que le manque d’accès des femmes à Internet, sur un pied d’égalité avec les hommes, non seulement creuse l’écart entre les sexes mais entrave également leur développement personnel et le développement des sociétés. Pour des raisons liées aux infrastructures de connectivité ou aux conditions socioéconomiques, les femmes sont moins susceptibles de bénéficier de services numériques et cette situation est particulièrement marquée pour les femmes autochtones et les femmes vivant en zones rurales, a-t-il relevé. Le représentant a ensuite noté que ces nouvelles technologies peuvent aussi représenter un risque pour les femmes, en raison de la violence croissante et du harcèlement perpétrés en ligne par des utilisateurs souvent anonymes. Face à ces menaces, a-t-il dit, la Bolivie considère important d’informer sur les questions de cybersécurité, afin que les femmes et les adolescentes soient en mesure de se protéger et d’appliquer des mécanismes de prévention. Il a par ailleurs rappelé que, lors de la dernière session de l’Assemblée générale, son pays a proposé la création d’une « décennie de la dépatriarcalisation » afin de lutter contre la violence faite aux femmes et aux filles. Sur le plan national, a-t-il poursuivi, un diagnostic des lacunes numériques a été préparé en mettant l’accent sur les questions de genre et la pleine participation des femmes et des filles aux nouvelles technologies. En outre, pour lutter contre les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, différentes mesures ont été mises en œuvre, telles que le lancement d’une stratégie de prévention pour le contrôle et l’utilisation responsable des plateformes numériques, a encore indiqué le délégué.
M. TAREK LADEB (Tunisie) a indiqué que, en ligne comme hors ligne, les droits acquis des femmes sont une priorité de son pays, comme l’illustre leur évolution depuis l’indépendance. Il a ajouté que la Tunisie s’est associée à tous les instruments internationaux en la matière et participe aux efforts menés collectivement pour les femmes et les filles, à l’instar de sa participation au Comité spécial sur l’innovation en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. La Tunisie a également lancé un plan d’action 2021-2026 qui ambitionne de combler le fossé numérique entre les sexes en permettant l’accès généralisé des femmes aux TIC, a-t-il précisé, avant de rappeler que son pays a organisé la dix-huitième réunion de la Francophonie sur les technologies numériques. Soucieux de progresser vers la réalisation de l’ODD 5, le Gouvernement tunisien travaille à ces questions sous l’angle de la formation, de la protection juridique et de l’appui aux activités sociales et politiques, a expliqué le représentant. Le Gouvernement s’engage en particulier à aider les femmes et les filles à acquérir des connaissances et des compétences dans le domaine des STIM, a-t-il poursuivi, faisant observer que 66% des étudiants, plus de 50% de ceux qui acquièrent un doctorat et 66% des personnes travaillant dans le secteur technologique en Tunisie, sont des femmes.
Mme ALYSON CALEM-SANGIORGIO (Monaco) a déclaré que les femmes sont malheureusement plus exposées au harcèlement en ligne et à la cyberintimidation. À Monaco, une loi de 2021 tend à protéger les jeunes filles contre le cyberharcèlement, particulièrement en milieu scolaire et sanctionne tous les participants à ce type de harcèlement et ce, même s’ils n’ont fait que quelques mails, tweets, ou messages sur les forums ou réseaux sociaux. Cette loi sanctionne également le contenu sexuellement explicite publiquement partagé en ligne sans le consentement de la personne visée, dans le but d’en faire une forme de vengeance, a-t-elle poursuivi. « La sensibilisation à ce problème devient essentielle. » Elle a enfin appelé à traiter les causes profondes de la violence en ligne, telles que les stéréotypes et le sexisme, et à promouvoir le respect et l’empathie en ligne.
M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a indiqué que la Roumanie a récemment adopté un nouveau cadre juridique et une stratégie nationale de prévention et de lutte contre la violence sexuelle pour la période 2021-2030. Des efforts considérables ont également été entrepris pour lutter de façon proactive contre la traite des êtres humains, y compris les crimes commis en ligne. Le Gouvernement a par ailleurs augmenté ses capacités nationales afin de faire face à l’afflux de 3,6 millions d’Ukrainiens qui ont fui la guerre, en grande majorité des femmes et des enfants qui sont particulièrement vulnérables à la traite. Un plan national de protection et d’inclusion des réfugiés ukrainiens a été mis en place avec la collaboration d’instances régionales et internationales telles que les Nations Unies, une première en son genre au sein de l’Union européenne, a expliqué le représentant. En outre, la Roumanie soutient la législation contre les abus en ligne qui sanctionne la cyberviolence et fait en sorte que les auteurs soient tenus pour responsables. Pour éviter que la technologie perpétue le sexisme, les stéréotypes de genre et la cyberviolence, l’Agence nationale pour l’égalité des chances pour les femmes et les hommes assure une coordination de tous les ministères afin d’intégrer une perspective de genre dans l’ensemble des politiques et programmes du pays.
M. SAMUEL ISA CHALA (Éthiopie) a estimé que malgré les avancées rendues possibles par la technologie numérique, le manque de connectivité et la profonde fracture numérique au sein des pays et entre les pays ont empêché les femmes et les filles de tirer pleinement parti de l’innovation et des changements technologiques. La technologie présente également des risques pour les femmes et les filles qui y ont accès, qu’il s’agisse de harcèlement en ligne, de la publication d’informations personnelles ou de discours haineux. Afin que la technologie appuie nos efforts de lutte contre les normes discriminatoires, elle doit répondre aux besoins des femmes et des filles les plus vulnérables, a-t-il argué, citant notamment les femmes rurales, les handicapées, les migrantes et les femmes âgées. Le plan de développement de l’Éthiopie reconnaît le renforcement des capacités technologiques, l’économie numérique et l’inclusion sociale en tant que piliers essentiels. De plus, le Gouvernement s’efforce d’élargir l’accès numérique aux marchés et aux services de soutien aux entreprises pour les femmes entrepreneurs.
Mme MARKOVA CONCEPCIÓN JARAMILLO (Panama) a indiqué que l’accès à Internet s’est grandement généralisé dans son pays ces dernières années. Cependant, l’utilisation d’Internet par les femmes panaméennes est inférieure à celle des hommes, a-t-elle dit, en soulignant le défi que constitue la connectivité des populations exclues. Elle a détaillé la politique suivie par son pays pour y remédier en mentionnant l’adoption d’un agenda numérique stratégique national, renouvelé en 2022. Cet agenda prévoit notamment une formation pour les femmes en vue d’une spécialisation dans le secteur de la cybersécurité. Une transformation numérique inclusive articulée autour d’une approche de genre est une condition essentielle pour parvenir à une véritable inclusion sociale et économique, a souligné la déléguée.
Mme SAMAR BASHIR YOUNIS AL-KAISI (Iraq) a indiqué que le programme gouvernemental appliqué en Iraq comprend des aspects consacrés à l’autonomisation des Iraquiennes et à la lutte contre les violences perpétrées contre ces dernières. Elle a indiqué que l’Iraq compte 97 femmes parlementaires, un chiffre sans précédent. Trois ministères, dont un régalien, sont en outre dirigés par des femmes. La déléguée a estimé qu’il serait impossible de combler le fossé numérique entre les genres tant que ne sera pas comblé le fossé numérique entre les pays. Elle a enfin détaillé la récente stratégie nationale pour la femme iraquienne qui vise à inclure dans les programmes scolaires des enseignements de sensibilisation aux droits des femmes.
Mme SARAH AHMED AHMED AL-MASHEHARI (Yémen) a affirmé que la femme yéménite jouit de tous les droits stipulés dans la Constitution qui se base sur l’égalité entre les sexes. Sa participation à la prise de décisions est essentielle, a souligné la représentante, notamment pour parvenir à une citoyenneté égale. Ainsi, huit femmes siègent au Conseil présidentiel et une femme juge a été nommée au Haut Conseil de la justice. En outre, des mesures ont été prises pour lutter contre les violences faites aux femmes, ainsi qu’un registre numérique pour enregistrer ces cas. La représentante a reproché aux milices houthistes actives au Yémen de violer les droits des Yéménites et d’imposer des mesures et des obstacles pour les étouffer dans les régions placées sous leur contrôle, notamment en termes de liberté de mouvement et de droit à l’éducation. Elle a terminé en remerciant les donateurs pour leur soutien à la promotion de l’autonomisation des Yéménites.
Mme THILMEEZA HUSSAIN (Maldives) a mentionné la loi sur l’égalité des sexes promulguée en 2016 dans son pays qui interdit la discrimination directe et indirecte fondée sur le sexe. La mise en œuvre de cette loi a été renforcée par le plan d’action national pour l’égalité des sexes lancé en 2022, a-t-elle détaillé. La représentante a, de plus, indiqué que le code pénal des Maldives a été modifié pour y inclure des dispositions relatives aux abus et au harcèlement en ligne, ajoutant que la loi a été renforcée pour y inclure la violence facilitée par les technologies. Les Maldives ont investi dans l’amélioration de la connectivité numérique, de l’accessibilité financière et de l’infrastructure, afin de réduire la fracture numérique. Pour accélérer les efforts en matière d’inclusion numérique des femmes et des filles, des programmes d’alphabétisation numérique ont été mis en œuvre en association avec la société civile, a conclu la déléguée.
M. NACIM GAOUAOUI (Algérie) a dit que l’autonomisation des femmes et leur meilleure participation au secteur du numérique sont une priorité de son gouvernement. Il a rappelé les divers articles de la Constitution algérienne consacrant les droits des femmes. Il a ensuite jugé encourageant l’accès des femmes aux nouvelles technologies, en indiquant notamment que 48% des Algériennes utilisent un ordinateur portable. Le délégué a également précisé que 60% des diplômés sont des femmes. Celles-ci représentent enfin 40% des ingénieurs, ce qui place l’Algérie au premier rang mondial, a conclu le représentant.
Mme GLORIA THOMAS, Ministre d’État chargée du développement social et des affaires liées au genre de Grenade, a reconnu que les sciences et la technologie ont joué un rôle important dans la réponse à la pandémie. Les TIC sont désormais un aspect central de nos vies mais les femmes n’y ont encore qu’un accès limité, a-t-elle déploré, avant d’appeler à poursuivre le combat de l’égalité de genre également sur ces questions. La réalité des statistiques montre que cette égalité bénéficiera aussi aux hommes et aux garçons, a-t-elle fait valoir, souhaitant que les objectifs en matière de genre restent d’actualité. Appelant ensuite la communauté mondiale à aider les PEID comme la Grenade à combler leurs lacunes numériques, elle a indiqué que son gouvernement s’emploie à améliorer les infrastructures existantes et à encourager l’essor de l’économie numérique. Toutefois, a-t-elle observé, si les femmes et les filles ne disposent pas des compétences nécessaires pour agir dans les espaces numériques, leurs capacités resteront limitées. Il importe donc, selon elle, de mettre en place des solutions permettant de lutter contre les stéréotypes de genre et de faire participer des femmes aux activités technologiques sur un pied d’égalité avec les hommes, tout en répondant aux dangers auxquels elles font face dans l’espace numérique. À cette fin, les pays qui créent ces technologies doivent faire en sorte que des mécanismes de protection existent, a plaidé la Ministre.
Mme RAKOTONIRINA MIARISOA PATRICIA, Directrice générale de la promotion de la femme, Ministère de la population, de la protection sociale et de la promotion de la femme de Madagascar, a expliqué que dans son pays, la fracture numérique frappe surtout les femmes en milieu rural où seulement 29,9% ont accès au téléphone portable, 2,6% à Internet, et 1,4% à l’ordinateur, alors que la part de femmes exerçant dans les domaines scientifiques reste encore très faible. Elle a rappelé l’importance du financement du développement et l’urgence de multiplier les partenariats et la coopération dans le rehaussement des capacités des femmes et des filles dans le domaine des TIC. Le soutien aux investissements dans les infrastructures numériques est essentiel, ce que la pandémie de COVID-19 a mis en évidence puisque les retards et les lacunes dans ce domaine pouvaient se payer extrêmement cher, a souligné la représentante pour laquelle la place des TIC au cœur de la poursuite des ODD n’est plus à démontrer. Elle a pris note du rapport du Secrétaire général et en particulier de ses recommandations relatives à la mise en place d’environnements d’apprentissage numérique, tenant compte de la dimension de genre et empêchant l’utilisation de la technologie comme de nouvelles formes de discrimination et de comportement abusif et violent envers les femmes et les filles.
M. CEDRIC ALEPENDAVA, Secrétaire permanent au Ministère de la femme, de la jeunesse, de l’enfance et de la famille des Îles Salomon, a reconnu le véritable défi que représentent les technologies numériques dans son pays, où 86% des femmes et des filles dans les zones rurales et isolées sont privées de cet outil, en raison d’importantes barrières culturelles, géographiques et structurelles. Les Îles Salomon comptent deux sociétés de télécommunications et bien que l’introduction du câblage sous-marin ait quelque peu amélioré l’accès et la connectivité, les infrastructures dans les zones rurales et isolées sont largement inexistantes, a-t-il déploré. Nation d’environ 900 à 1 000 petites îles, dont les moyens de subsistance dépendent fortement de l’agriculture, de la pêche et de la sylviculture, les Îles Salomon restent très sensibles aux chocs internes et externes qui affectent le plus les femmes, les filles, les enfants et d’autres groupes vulnérables. C’est pourquoi la garantie de l’égalité entre hommes et femmes tout en répondant à ces chocs a été un véritable défi, compte tenu de la longue liste de difficultés que connaît le pays, détaillant notamment des ressources et des budgets limités. Il a mentionné les progrès significatifs de son pays dans la lutte contre les inégalités entre les sexes au cours de la dernière décennie, assurant que son pays a jeté les bases nécessaires pour accélérer la lutte contre la pauvreté numérique ou le fossé numérique pour les femmes et les jeunes filles.
Mme ANTONINA MIKO MIKUE, sénatrice de la Guinée équatoriale, a mentionné la création de salles informatiques dans tous les établissements scolaires. L’Administration se numérise, a dit la déléguée. Elle a aussi évoqué l’organisation de la Journée des filles dans le secteur des nouvelles technologies, avec la tenue de manifestations sur tout le territoire. Elle a précisé que 41% de la population active utilise ces technologies, les femmes représentant 18% de cette proportion. Une femme vient d’être nommée Première Ministre de notre gouvernement, a ajouté la déléguée en conclusion.
Mme JAN BEAGLE, Directrice générale de l’Organisation internationale de droit du développement (IDLO), a souligné qu’en temps de crise, l’inégalité entre les sexes augmente, et que cela touche surtout les femmes et les filles. Elle a mis en garde contre les délais importants escomptés jusqu’à ce que les femmes puissent jouir d’une égalité de droit. Expliquant que l’IDLO est la seule organisation mondiale consacrée à la promotion de la justice et qu’elle œuvre, entre autres, à protéger la dignité des femmes à travers la loi, notamment en éliminant les lois discriminatoires, la représentante a précisé que le droit à l’accès aux nouvelles technologies est au cœur de son plan stratégique. Cependant, il faudra veiller à ce que le fossé numérique ne se creuse pas davantage, a-t-elle mis en garde, sachant que dans les pays les moins avancés, seule 1 femme sur 5 a accès à Internet. Il reste d’énormes défis à relever, a-t-elle concédé, en insistant notamment sur la mise en place de lois visant à garantir la participation des femmes et des filles dans tous les espaces numériques et en termes de protection de leurs droits en ligne et hors ligne.
M. ISLAM ABDULLAH HASSAN AL-AMRI, de la Ligue des États arabes, s’est dit convaincu que l’égalité femmes-hommes devrait être une priorité dans le domaine des technologies, compte tenu notamment de l’importance des compétences numériques dans le monde actuel. C’est important pour le développement des sociétés et pour la réalisation de progrès dans le domaine de la recherche, a-t-il fait valoir, assurant à cet égard que la Ligue met en œuvre sa déclaration ministérielle et son programme 2022-2028 adoptés en novembre dernier. Ce programme, a rappelé le représentant, vise à améliorer la condition des femmes arabes en luttant contre l’analphabétisme numérique, en particulier chez les femmes déplacées et réfugiées. La Ligue s’emploie également à améliorer l’accès des femmes et des filles aux technologies numériques en vue de garantir un emploi égal et de promouvoir la participation des femmes à ces activités. Constatant que beaucoup reste à faire si l’on applique le Programme d’action de Beijing à l’informatique, le représentant a indiqué que la Ligue s’efforce d’intégrer une perspective de genre dans l’amélioration des infrastructures et de la connectivité, ainsi que dans la lutte contre les stéréotypes sexuels. Par ailleurs, a-t-il poursuivi, alors que la coopération internationale se concentre sur l’économie numérique sans prendre en compte les différences entre les femmes et les hommes, la Ligue adopte une approche centrée sur l’être humain et sur les besoins spécifiques des femmes et des filles. Il a relevé à cet égard que plusieurs États arabes ont enregistré des progrès notables en matière de parité dans le domaine des STIM, avec un pourcentage croissant de femmes sortant des universités et des instituts de technologie. Il a enfin souligné le fait que la Ligue s’est dotée d’une vision régionale qui lui permet d’intégrer les femmes dans des groupes à technicité élevée.