9430e séance – après-midi
CS/15432

Haïti: le Conseil de sécurité autorise le déploiement pour douze mois de la Mission multinationale d’appui à la sécurité, une force de police non onusienne

Le Conseil de sécurité a autorisé aujourd’hui la création et le déploiement en Haïti d’une Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), pour une période initiale de douze mois, par des États Membres qui ont informé le Secrétaire général de leur participation.  Adoptée en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, par 13 voix pour et 2 abstentions (Chine et Fédération de Russie), la résolution 2699 (2023) précise que ce déploiement se fera en coopération et coordination étroites avec le Gouvernement haïtien et « dans le strict respect du droit international, notamment du droit international des droits de l’homme ».  L’autorisation sera réexaminée dans neuf mois. 

La résolution autorise les États Membres à fournir un appui opérationnel à la Police nationale d’Haïti (PNH), notamment pour renforcer ses capacités par la planification et la conduite d’opérations communes d’appui à la sécurité, alors que celle-ci s’emploie à lutter contre les bandes et à améliorer les conditions de sécurité dans le pays, où règnent enlèvements, violences sexuelles et fondées sur le genre, traite des personnes, trafic de migrants, contrebande d’armes, homicides, exécutions extrajudiciaires et recrutement d’enfants par des groupes armés et des réseaux criminels.  Le texte autorise en outre la MMAS à fournir un appui à la PNH pour assurer la sécurité des infrastructures critiques et des lieux de transit, tels que l’aéroport, les ports, les écoles, les hôpitaux et les principaux points d’intersection.

Tout en reconnaissant la gravité et l’urgence de la situation, et sans s’opposer frontalement à la résolution, la Fédération de Russie et la Chine ont expliqué leur abstention par le fait que le texte ne prend pas en compte leurs préoccupations, insistant notamment sur le fait que la Mission n’a pas vocation de s’éterniser en Haïti et ne doit pas empiéter sur la souveraineté du pays.  Malheureusement, a résumé la Chine, le texte adopté ne va pas dans ce sens.  Pour la Fédération de Russie, il n’atteint pas un niveau de compréhension satisfaisant sur le fait que la détérioration croissante de la situation en Haïti depuis des décennies est en partie due à l’ingérence étrangère. 

Pour les 13 membres ayant voté en faveur du texte, tout comme pour le pays concerné et les délégations de la Jamaïque, s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), et du Kenya, appelé à prendre la tête de la Mission, le Conseil de sécurité ne fait que répondre à l’appel réitéré du Gouvernement haïtien lui-même, dont la population, en plus de connaître une situation humanitaire catastrophique, est en prise avec une insécurité liée à l’activité des gangs et autres groupes armés. 

De fait, le projet d’une telle mission de police internationale menée en dehors de l’ONU mais autorisée par le Conseil de sécurité remonte à un an.  Face à la triple crise politique, économique et de sécurité dans laquelle le pays s’enfonçait, le Gouvernement haïtien avait lancé un appel en ce sens le 2 octobre 2022, et le Secrétaire général présenté diverses options possible une semaine plus tard.  Le 17 octobre 2022, les États-Unis et le Mexique annonçaient le dépôt conjoint de deux projets de résolution.  Le premier, qui prévoyait un régime de sanctions contre les responsables de la violence et de l’instabilité, aboutissait à l’adoption unanime, le 21 octobre, de la résolution 2653 (2022) qui imposait, pour une durée initiale de douze mois, un régime de sanctions très ciblées sur le renouvellement duquel le Conseil doit se prononcer le 19 octobre.

L’autre projet envisageait déjà l’envoi d’une force d’intervention, mais se heurtait aux réticences de la Chine et de la Fédération de Russie, en raison de l’opposition affichée immédiatement par certains groupes haïtiens.  Les États Membres ont également été longtemps hésitants, malgré les appels réitérés du Gouvernement haïtien et du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH).  Ce n’est que le 29 juillet dernier que le Kenya annonçait sa disposition à prendre la tête d’une opération multinationale de police, lançant un processus qui allait aboutir à la résolution adoptée ce jour, après un mois de négociations.

La plupart des intervenants ont insisté sur le fait que le texte n’est ni une panacée ni une fin en soi.  Les États-Unis l’ont présenté comme « un jalon historique » sur lequel bâtir et qui permettra, dans un premier temps, à la Police nationale d’Haïti de combattre les gangs.  Mais cette assistance est urgente car la moitié de la population du pays a désespérément besoin d’une aide humanitaire et de la restauration de la sécurité, a notamment argumenté la Jamaïque. 

Le Ministre des affaires étrangères d’Haïti, M. Jean Victor Généus, a parlé d’avancée significative avant de la qualifier de « lueur d’espoir », tout en ajoutant que l’emploi de la force, indispensable comme première étape, devra être accompagné de mesures socioéconomiques pour s’attaquer durablement à l’extrême pauvreté, source de tous les maux.  Le Brésil a affiché la même position.  Les membres africains du Conseil ont appelé à également accompagner un processus politique inclusif capable d’aboutir à des élections libres.  À long terme, seule une solution politique permettra au peuple haïtien de bénéficier de la sécurité et de la prospérité qu’il mérite, a également estimé le Royaume-Uni. 

Quant au Japon, il a rappelé que la résolution n’est un premier pas en ce sens qu’elle doit encore être suivie de discussions sur les questions relatives au financement, au commandement ou aux règles d’engagement de la Mission, qui reste à opérationnaliser. 

Pour leur part, Malte, la Suisse ou encore l’Albanie ont mis l’accent sur le respect du droit international par la future Mission.

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI (S/2023/596)

Texte du projet de résolution (S/2023/709)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions et déclarations à la presse sur la situation en Haïti et réaffirmant la résolution 2692 (2023),

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité d’Haïti,

Soulignant que c’est avant tout au Gouvernement haïtien qu’il incombe d’assurer la sécurité, la stabilité et le respect de l’état de droit et des droits humains et de protéger les civils sur l’ensemble du territoire haïtien, et se déclarant très préoccupé par les actions de plus en plus violentes menées par les groupes armés et les réseaux criminels,

Réaffirmant que, pour assurer la sûreté publique, faire respecter les droits humains, consolider la démocratie et revitaliser le système judiciaire haïtien, il importe que la Police nationale d’Haïti soit professionnelle, autonome, pleinement opérationnelle, dotée d’un effectif suffisant, bien structurée, bien équipée et capable d’exercer l’ensemble des fonctions de police, et encourageant Haïti à poursuivre activement ses plans à cet égard,

Condamnant avec la plus grande fermeté l’augmentation des violences, des activités criminelles et des violations des droits humains et des atteintes à ces droits, qui compromettent la paix, la stabilité et la sécurité en Haïti et dans la région, notamment les enlèvements, la violence sexuelle et fondée sur le genre, la traite des personnes et le trafic de migrants, les homicides, les exécutions extrajudiciaires et la contrebande d’armes,

Condamnant fermement les violations et atteintes commises sur la personne d’enfants en Haïti et très préoccupé par leur gravité et leur nombre, et exhortant tous les acteurs, en particulier les bandes organisées et les réseaux criminels, à faire cesser immédiatement et à prévenir toutes les violations et atteintes commises sur la personne d’enfants, notamment les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique, le recrutement et l’utilisation d’enfants, les viols et les autres formes de violence sexuelle et fondée sur le genre, dont sont victimes notamment les filles, les attaques contre les écoles et les hôpitaux, les enlèvements et les refus d’accès humanitaire,

Exhortant tous les acteurs, notamment les bandes organisées haïtiennes et leurs partisans, à cesser leurs activités déstabilisatrices et criminelles, et exhortant également ceux qui ont la capacité d’influencer les bandes à agir pour que les routes permettant le ravitaillement des marchés locaux et l’accès à ceux-ci ne soient plus bloqués et que les sources d’alimentation ne soient plus dégradées, notamment les cultures et le bétail, ainsi que les fournitures médicales et humanitaires, et soulignant le lien qui unit violence et insécurité alimentaire, laquelle a atteint des niveaux sans précédent,

Soulignant qu’il convient d’instaurer en Haïti et dans la région un environnement sûr et sécurisé qui permette de faire respecter les droits humains, en particulier les droits des femmes, et de protéger les enfants, qui favorise l’état de droit, le bon fonctionnement des institutions et une justice efficace et qui facilite l’acheminement, dans un cadre humanitaire, de l’eau, du carburant, de la nourriture et des fournitures médicales indispensables à la survie,

Rappelant la résolution 2653 (2022), dans laquelle il a pris des mesures de sanction face à la menace que font peser sur la paix et la sécurité internationales dans la région l’extrême violence des bandes et d’autres activités criminelles, ainsi que le trafic d’armes et les flux financiers illicites, et rappelant également la résolution 2664 (2022), qui annule et remplace la dérogation au gel des avoirs visée au paragraphe 10 de la résolution 2653 (2022),

Réaffirmant l’engagement pris par la communauté internationale de répondre aux besoins d’Haïti en matière de sécurité et sur le plan humanitaire, notamment en continuant de soutenir le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH),

Insistant sur la nécessité de parvenir à des solutions politiques pour remédier aux causes profondes de l’instabilité en Haïti et soulignant à cet égard qu’il importe de toute urgence d’encourager une plus grande participation au processus politique en forgeant le consensus le plus large possible, l’objectif étant, une fois réunies les conditions de sécurité voulues, de mettre en place un processus électoral transparent, inclusif et crédible, de tenir des élections libres et régulières et de rétablir les institutions démocratiques,

Réaffirmant la nécessité pour toutes les parties prenantes haïtiennes de continuer, notamment avec l’appui du BINUH, de faciliter un processus politique dirigé et contrôlé par les Haïtiens qui permette l’organisation d’élections présidentielle et législatives libres et régulières, avec la participation pleine, égale et véritable, en toute sécurité, des femmes et la participation des jeunes, de la société civile et des autres parties prenantes concernées, au moyen d’un dialogue national associant toutes les parties haïtiennes, et priant instamment toutes les parties prenantes haïtiennes de convenir de toute urgence d’une feuille de route pour les élections qui soit pérenne, assortie de délais et communément acceptée,

Prenant note des visites que le Groupe de personnalités éminentes de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a menées récemment en Haïti et se félicitant que celui-ci demeure résolu à soutenir le dialogue politique,

Conscient du rôle clé que jouent les pays de la région, ainsi que les organisations régionales et sous-régionales comme la CARICOM et d’autres partenaires internationaux, en particulier du rôle clé que jouent la CARICOM et son groupe de personnalités éminentes pour faciliter le dialogue politique, et demandant à la communauté internationale de continuer à appuyer les efforts faits par Haïti pour surmonter l’impasse politique actuelle et remédier à l’insécurité et à la situation humanitaire,

Prenant note de l’appel direct lancé le 6 octobre 2022 par le Conseil des ministres d’Haïti, qui a demandé le déploiement d’une force internationale spécialisée et une assistance technique pour aider la Police nationale d’Haïti à combattre l’extrême violence des bandes et à rétablir la sécurité, et prenant note également de la lettre du Secrétaire général (S/2022/747) en date du 8 octobre 2022, du rapport du Secrétaire général (S/2023/274) en date du 14 avril 2023 et de la déclaration faite le 6 juillet 2023, au nom de la CARICOM, par la Jamaïque, visant à ce qu’une action de sécurité multinationale, assortie du mandat approprié, soit autorisée afin de prêter appui à la Police nationale d’Haïti,

Vivement préoccupé par la situation humanitaire en Haïti qui continue de se dégrader fortement et notamment par le déplacement forcé de personnes, et exhortant toutes les parties à mettre fin immédiatement aux violations et atteintes,

Constatant qu’il convient de se coordonner, selon que de besoin, avec le BINUH et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) pour réduire la violence des bandes et la violence locale, faire respecter les droits humains et renforcer les capacités de protection de l’enfance, et qu’il convient de renforcer encore les activités de formation menées par le BINUH et les partenaires internationaux en vue de développer toutes les capacités de la police nationale, et non uniquement celles nécessaires aux opérations de sécurité, notamment d’accroître les effectifs, de continuer à assurer la vérification des antécédents, d’améliorer les compétences en matière de police de proximité, de renforcer les moyens de prévention et de répression des violences sexuelles et fondées sur le genre, d’assurer la participation et la représentation pleines, égales et véritables des femmes à tous les niveaux, de faire respecter l’état de droit et de remettre en état les postes de police qui ont été détruits dans les zones sous l’emprise des bandes,

Soulignant que, indépendamment des activités menées par la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), une action plus vaste est nécessaire pour remédier durablement aux causes profondes de la violence en bande organisée, qui résultent de l’instabilité politique, institutionnelle et socioéconomique et, à cet égard, rappelant qu’il a demandé à la communauté internationale, y compris aux institutions financières internationales, qu’elles renforcent l’appui qu’elles apportent au développement économique, social et institutionnel à long terme d’Haïti et ce, même après que la stabilité aura été rétablie dans le pays,

Soulignant que la communauté internationale doit s’associer au peuple haïtien dans une action à long terme visant à promouvoir la reconstruction des institutions démocratiques et notamment la tenue d’élections libres et régulières,

Se félicitant que, le 29 juillet, le Gouvernement kényan ait annoncé qu’il envisageait d’accepter de diriger une mission multinationale, à l’invitation d’Haïti et en réponse à l’appel lancé par le Secrétaire général, après consultations avec Haïti et compte tenu du fait que, dans la résolution 2692 (2023), tous les États Membres ont été engagés à apporter à Haïti un appui sur le plan de la sécurité, et se félicitant également que plusieurs États Membres aient dit vouloir y participer,

Prenant note de la lettre datée du 26 septembre 2023 adressée au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général (S/2023/726), exprimant l’ardent désir que le Conseil donne son autorisation en vertu du Chapitre VII et disant l’espoir que, à l’issue de la visite d’évaluation menée par une délégation kényane, la Mission multinationale d’appui à la sécurité contribuerait à assurer la sécurité des infrastructures critiques du pays et pourrait mener des opérations ciblées en étroite collaboration avec la Police nationale d’Haïti,

Conscient qu’il importe de refréner de toute urgence le trafic d’armes et de munitions à destination d’Haïti afin de créer un environnement opérationnel sûr permettant la fourniture d’un appui international à la sécurité, dont le déploiement d’une mission multinationale d’appui à la sécurité,

Prenant note de l’appel lancé le 21 septembre 2023 par le Gouvernement kényan, qui a exhorté l’Organisation des Nations Unies à arrêter de toute urgence un cadre permettant le bon déploiement d’une mission multinationale d’appui à la sécurité, au titre d’une action globale face aux problèmes d’Haïti, et qui a demandé au Conseil d’adopter, en vertu du Chapitre VII, une résolution créant une mission d’appui à la sécurité adaptée aux besoins spécifiques d’Haïti et de son peuple,

Considérant que la situation en Haïti continue de menacer la paix et la sécurité internationales et la stabilité dans la région,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Autorise les États Membres qui ont informé le Secrétaire général de leur participation à constituer et à déployer, dans le strict respect du droit international, notamment du droit international des droits de l’homme, une mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), dont un pays prendra la tête, en coopération et coordination étroites avec le Gouvernement haïtien, pour une période initiale de douze mois à compter de l’adoption de la présente résolution, autorisation qu’il réexaminera neuf mois après l’adoption de la présente résolution, étant entendu que l’exécution de cette opération temporaire sera financée au moyen des contributions volontaires des États Membres et des organisations régionales et avec leur appui, en vue de soutenir l’action menée par la Police nationale d’Haïti pour rétablir la sécurité en Haïti et créer les conditions de sécurité propices à la tenue d’élections libres et régulières et, à cette fin, de:

a)    fournir un appui opérationnel à la Police nationale d’Haïti, notamment renforcer ses capacités par la planification et la conduite d’opérations communes d’appui à la sécurité, alors que celle-ci s’emploie à lutter contre les bandes et à améliorer les conditions de sécurité dans le pays, où règnent enlèvements, violences sexuelles et fondées sur le genre, traite des personnes, trafic de migrants, contrebande d’armes, homicides, exécutions extrajudiciaires et recrutement d’enfants par des groupes armés et des réseaux criminels;

b)    fournir un appui à la Police nationale d’Haïti pour que soit assurée la sécurité des infrastructures critiques et des lieux de transit comme l’aéroport, les ports, les écoles, les hôpitaux et les principaux points d’intersection;

2.    Demande à la Mission multinationale d’appui à la sécurité de contribuer, dans le cadre de l’appui qu’elle apporte à la Police nationale d’Haïti conformément au paragraphe 1, à permettre aux personnes qui reçoivent une assistance d’accéder, sans entrave et en toute sécurité, à l’aide humanitaire;

3.    Décide que, pour prévenir les pertes en vies humaines, la Mission multinationale d’appui à la sécurité peut, comme l’a demandé Haïti dans sa lettre datée du 22 septembre 2023, en coordination avec la Police nationale d’Haïti, adopter à titre exceptionnel, dans les limites de ses capacités et de ses zones de déploiement, des mesures temporaires d’urgence de portée limitée, assorties de délais, proportionnelles et compatibles avec les objectifs énoncés au paragraphe 1 ci-dessus, pour aider la Police nationale d’Haïti à maintenir l’ordre public et la sécurité publique, y compris en procédant si nécessaire à des arrestations et à des mises en détention, dans le strict respect du droit international, notamment du droit international des droits de l’homme, et prie les responsables de la Mission de l’informer de toute mesure qui pourrait être prise à ce titre;

4.    Demande aux États Membres et aux organisations régionales de fournir d’urgence du personnel, du matériel et les moyens financiers et logistiques nécessaires à la Mission multinationale d’appui à la sécurité, compte tenu de ses besoins les plus pressants, et invite ceux qui voudraient apporter leur contribution à informer par écrit les responsables de la Mission et le Secrétaire général de leur intention de participer à la Mission et à l’en informer par écrit lui aussi, et prie Haïti et les responsables de la Mission de l’informer régulièrement, ainsi que le Secrétaire général, des progrès réalisés dans le déploiement du personnel et du matériel;

5.    Autorise les États Membres qui participent à la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti à prendre toutes les mesures nécessaires à l’exécution de son mandat, dans le strict respect de l’ensemble des dispositions du droit international, notamment du droit international des droits de l’homme, selon qu’il convient;

6.    Demande à la Mission multinationale d’appui à la sécurité de prendre pleinement en compte, dans tous les aspects de son mandat et lors de la planification et de la conduite de toutes ses opérations, la question transversale que constitue la protection de l’enfance et des autres groupes vulnérables;

7.    Demande aux États Membres qui participent à la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti de prévoir des compétences spécialisées dans les domaines de la lutte antigang, de la police de proximité, de la protection des enfants et des femmes et de la prévention et de la répression des violences sexuelles et fondées sur la genre selon une approche centrée sur les victimes, de prendre les mesures permettant d’assurer une bonne conduite et la discipline et de prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles, notamment en vérifiant les antécédents de tous les membres du personnel et en prenant les autres précautions d’usage lors du recrutement, en encourageant la représentation des femmes à tous les niveaux de la Mission et en dispensant des formations de sensibilisation aux droits humains, à la protection de l’enfance et aux violences sexuelles et fondées sur le genre avant et pendant le déploiement, de repérer les incidents qui se produisent et, lorsqu’ils sont le fait des membres de leur personnel, de veiller à ce que priorité soit donnée aux victimes et rescapés et à leur sécurité, notamment en mettant en place des mécanismes de plainte sécurisés et accessibles et en diligentant promptement des enquêtes sur toutes allégations de faute, d’amener les auteurs de fautes à en répondre et de rapatrier les unités lorsqu’il existe des preuves crédibles de leur mauvaise conduite, notamment si elles ont commis des actes d’exploitation ou des atteintes sexuelles de manière généralisée ou systématique;

8.    Demande aux responsables de la Mission multinationale d’appui à la sécurité de lui communiquer, en coordination avec le Gouvernement haïtien et les États Membres participant à la Mission, avant le déploiement complet de la Mission, des informations concernant notamment le concept des opérations élaboré en consultation et en coopération avec le Gouvernement haïtien et les États Membres participant à la Mission, le calendrier du déploiement, les buts de la mission et le résultat final recherché, les règles d’engagement, une estimation du montant des ressources à financer au moyen de contributions volontaires et l’effectif qu’il est prévu de déployer;

9.    Rappelle que les règles d’engagement et toute directive sur l’emploi de la force doivent être établies par les responsables de la Mission multinationale d’appui à la sécurité en consultation avec Haïti et les autres États Membres participant à la Mission et qu’elles doivent pleinement respecter la souveraineté d’Haïti et être strictement conformes au droit international, notamment au droit international des droits de l’homme, selon qu’il convient;

10.   Prie les États Membres participant à la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti d’appliquer les normes les plus élevées de transparence, de déontologie et de discipline à leurs contingents affectés à la Mission et d’établir un cadre réglementaire solide pour prévenir toute violation des droits humains ou atteinte à ces droits en rapport avec la Mission, enquêter, prendre des sanctions ou rendre compte à ce sujet;

11.   Demande à la Mission multinationale d’appui à la sécurité de mettre en place un mécanisme de contrôle visant à prévenir les violations des droits humains et les atteintes à ces droits, en particulier l’exploitation et les atteintes sexuelles, et à veiller à ce que la planification et la conduite des opérations pendant le déploiement soient conformes au droit international applicable;

12.   Prie les États Membres qui participent à la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti de prendre les mesures de gestion des eaux usées et de protection de l’environnement qui s’imposent pour éviter l’apparition et la propagation de maladies transmises par l’eau, conformément au document publié en 2001 par l’Organisation mondiale de la Santé et intitulé « Water Quality.  Guidelines, Standards and Health: Assessment of risk and risk management for water-related infectious disease » (Qualité de l’eau.  Lignes directrices, normes et santé: évaluation et gestion des risques liés aux maladies infectieuses transmises par l’eau), en coopération avec les autorités haïtiennes, auxquelles il incombe également de prévenir les maladies transmises par l’eau;

13.   Prie la Mission multinationale d’appui à la sécurité de coopérer avec le BINUH et les organismes compétents des Nations Unies, dont notamment l’ONUDC et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, afin d’aider la Police nationale d’Haïti à rétablir la sécurité dans le pays et notamment à combattre le trafic et le détournement d’armes et de matériels connexes et à améliorer la gestion et le contrôle des frontières et des ports;

14.   Décide de remplacer le paragraphe 11 de la résolution 2653 (2022) par ce qui suit:

« Décide que tous les États Membres doivent, pour une période initiale d’un an à compter de l’adoption de la présente résolution, prendre les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects à Haïti, à partir de leur territoire ou à travers leur territoire ou par leurs ressortissants, ou au moyen de navires battant leur pavillon ou d’aéronefs immatriculés chez eux, d’armes légères et de petit calibre et de leurs munitions, et décide également que cette mesure ne s’applique pas:

a.    À la fourniture, à la vente ou au transfert d’armes légères et de petit calibre et de leurs munitions à l’Organisation des Nations Unies, à toute mission autorisée par l’Organisation des Nations Unies et aux unités de sécurité opérant sous le commandement du Gouvernement haïtien, dès lors qu’elles sont destinées à être utilisées par ces entités ou en coordination avec elles et dans le seul but de promouvoir les objectifs de paix et de stabilité en Haïti;

b.    À la fourniture, à la vente ou au transfert d’armes légères et de petit calibre et de leurs munitions à Haïti ayant été autorisés au préalable par le Comité créé par la résolution 2653 (2022) afin de favoriser les objectifs de paix et de stabilité en Haïti; »

15.   Demande à toutes les parties présentes en Haïti de coopérer pleinement avec la Mission multinationale d’appui à la sécurité dans l’exécution de son mandat et de respecter la sécurité et la liberté de circulation de la Mission;

16.   Prie le Secrétaire général de créer un fonds d’affectation spéciale pour que des contributions volontaires puissent être versées à la Mission multinationale d’appui à la sécurité afin de permettre la bonne exécution du mandat;

17.   Déclare que le Secrétaire général peut fournir à la Mission des moyens d’appui logistique, lorsque la Mission et ses donateurs en font la demande, dans le plein respect de la politique de diligence voulue en matière de droits de l’homme en cas d’appui de l’ONU à des forces de sécurité non onusiennes, à condition que ces moyens soient remboursés en intégralité à l’Organisation des Nations Unies à l’aide des contributions volontaires disponibles;

18.   Prie les responsables de la Mission multinationale d’appui à la sécurité d’appliquer les normes de transparence et de déontologie les plus strictes et, une fois que la Mission sera opérationnelle sur le terrain, à l’occasion des rapports que le Secrétaire général lui fera régulièrement, de rendre compte tous les trois mois de l’exécution de la présente résolution, notamment de la composition de la Mission, des mesures prises pour assurer une bonne conduite et la discipline et prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles et des enquêtes menées en cas d’allégations de faute et d’emploi excessif de la force;

19.   Prie le Secrétaire général de lui présenter, à l’occasion des rapports qu’il lui fera régulièrement et au plus tard neuf fois après l’adoption de la présente résolution, des recommandations concernant une éventuelle adaptation du mandat de la Mission ou, si nécessaire, sa transformation;

20.   Prie les responsables de la Mission multinationale d’appui à la sécurité d’élaborer une stratégie en vue de l’achèvement et du retrait de la Mission et de faire figurer des informations à ce sujet dans les rapports qui lui seront régulièrement présentés;

21.   Souligne que les États Membres, les organes, organismes et institutions des Nations Unies et d’autres organisations internationales, dont les institutions financières internationales, doivent redoubler d’efforts pour favoriser le développement institutionnel, social et économique d’Haïti, en particulier à long terme, afin que le pays puisse retrouver et conserver sa stabilité et faire reculer la pauvreté;

22.   Exhorte les autorités haïtiennes et les autres parties prenantes à coopérer pleinement avec la CARICOM et le BINUH dans l’exercice de leurs bons offices afin de parvenir le plus rapidement possible à un compromis permettant de dégager le consensus le plus large possible;

23.   Décide de rester saisi de la question.

Déclarations

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a déclaré qu’avec l’adoption de cette résolution, le Conseil de sécurité rentre dans l’histoire en répondant à l’appel réitéré d’Haïti et d’autres États.  Le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité permettra à Haïti, qui se trouve aux prises avec des groupes armés, de répondre à court terme à ses besoins sécuritaires et humanitaires, a-t-il estimé.  Constatant qu’il avait fallu un an de négociation pour parvenir à ce résultat, le représentant a souligné que la création de cette mission n’est qu’une étape, qui permettra notamment à la Police nationale d’Haïti de combattre les gangs.  Avec l’adoption de cette résolution, les Nations Unies peuvent œuvrer ensemble, s’est-il félicité, avant de remercier les pays qui ont accepté d’envoyer des troupes dans le pays. 

M. ZHANG JUN (Chine), qui s’est abstenu lors du vote, a rappelé que, ces dernières semaines, plusieurs séries de consultations avaient été menées pour déterminer le cadre de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS). Les débats se sont concentrés sur le Chapitre VII de la Charte, notamment les principes de respect de la souveraineté nationale et non-ingérence dans les affaires intérieures, a noté le représentant, qui a rappelé que le Chapitre VII était souvent invoqué par le Conseil pour autoriser le recours à la force et devait être utilisé avec prudence. 

Affirmant la volonté de la Chine d’être constructive dans l’élaboration du texte adopté, le représentant a jugé important que le Conseil consulte fréquemment les autorités d’Haïti pour que la Mission soit acceptée par la population.  Concernant les modalités d’application, il a demandé qu’on évite d’empiéter sur les compétences du pays et mis l’accent sur la non-ingérence. 

La Mission n’a pas vocation à rester longtemps sur place et les diverses factions haïtiennes devront chercher à s’entendre rapidement, a déclaré le représentant, qui a regretté que le texte adopté n’envoie pas de message fort en ce sens.  Il a néanmoins concédé que la résolution reconnaît les efforts déployés par la Communauté des Caraïbes (CARICOM) pour arriver à une résolution politique de la crise en Haïti.  Cet élément-là, nous l’avons demandé dans le projet de texte, a-t-il souligné, avant de noter qu’avec le soutien d’une grande majorité de ses membres, le Conseil s’était rallié au point de vue de la Chine.  Il fallait couper à la source l’approvisionnement en armes, a encore fait observer le représentant, pour qui, si le Conseil avait agi plus tôt en ce sens, la situation telle que nous la voyons ne se serait sûrement pas développée. 

Les crises multiples d’Haïti sont liées entre elles, a encore déclaré le représentant, qui a estimé que le Conseil de sécurité aurait l’occasion de revenir sur la situation du pays.  Nous réfléchirons alors au régime de sanctions en vigueur et à l’action du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), a-t-il conclu. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré s’être abstenu tout en reconnaissant l’ampleur de la crise de sécurité en Haïti et l’urgence de la résoudre.  Le niveau de violence dans le contexte de l’incapacité du pouvoir et des moyens limités de la Police nationale d’Haïti (PNH) a exigé que l’on envisage la constitution et le déploiement d’une mission multinationale, a-t-il souligné, ajoutant que son pays n’avait aucune opposition à l’initiative tendant à l’envoi d’une force internationale. 

Toutefois, a expliqué le représentant, la planification et la préparation de la mission conformément aux termes de la résolution ne répondent pas aux demandes de la Russie, en particulier en ce qui concerne ses conditions de déploiement et de retrait.  C’est une mesure grave qui vient d’être prise, mais nous n’avons pas l’impression que ce degré de compréhension a été atteint, a-t-il commenté, attribuant la détérioration croissante de la situation en Haïti depuis des décennies à l’ingérence étrangère. 

M. Nebenzia a toutefois mis en relief des éléments positifs dans le texte adopté, comme l’appel à toutes les forces politiques visant à atteindre un large consensus, et l’importance de l’embargo sur les armes, qui permettra d’en réduire les flux illicites.  Une quelconque ingérence extérieure dans un processus politique interne serait intolérable, a-t-il averti, en demandant des informations détaillées sur ce qui est prévu dans la résolution. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), parlant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a espéré que le déploiement de cette mission se fera dans l’intérêt du pays et de sa population.  En envoyant cette mission, le Conseil de sécurité ne fait que remplir son mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il estimé, notant que la mission, qui n’est qu’une première étape, répond à la situation intenable dans laquelle se trouve Haïti aujourd’hui.  Le représentant a ensuite appelé tous les États, partenaires et amis du peuple haïtien à apporter leur appui à ladite mission.  Il faut également accompagner un processus politique inclusif capable d’aboutir à des élections libres et inclusives.  Il est à espérer que cette mission, associée à d’autres mesures, comme les sanctions ou l’embargo sur les armes pesant sur les gangs, permettra de faire éclore un meilleur avenir pour Haïti, a-t-il dit. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a indiqué avoir voté en faveur du texte en raison de la situation catastrophique qui prévaut sur le terrain.  Le Conseil de sécurité doit assumer ses responsabilités et agir, a-t-elle souligné.  Elle a salué l’offre du Kenya de diriger la Mission multinationale d’appui à la sécurité, et remercié tous les États qui ont promis du personnel.  Cette mission devra être exemplaire, et tous les éléments de la résolution devront être appliqués dans le plein respect du droit international, a-t-elle insisté, notant que l’objectif de cette mission sera la protection des populations civiles.  Cette mission ne sera cependant pas la panacée et tous les problèmes ne pourront pas être réglés du jour au lendemain, a-t-elle prévenu, insistant sur l’importance de l’accompagnement de la communauté internationale.  Elle a également appelé les autorités haïtiennes à privilégier le consensus et à organiser des élections libres. 

Mme ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a estimé que l’autorisation d’une mission multinationale témoigne du fait que les appels à l’aide d’Haïti ont été entendus. Dans cette perspective, elle s’est félicitée que le respect du droit international des droits de l’homme fasse partie intégrante du mandat de cette mission.  Elle a appelé tous les acteurs au respect et à la protection des droits humains de chaque individu, et salué l’importance accordée à la protection de l’enfance et à la prise en compte des dimensions relatives aux violences sexuelles et basées sur le genre.  Elle a encouragé la communauté internationale à assurer l’articulation de cette mission avec les autres composantes de l’aide internationale dans le pays, lesquelles ouvriront la voie, par une approche intégrale et holistique, à la mise en œuvre d’un dialogue interhaïtien afin de répondre aux crises complexes qui affectent le pays. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a déclaré avoir voté en faveur de la résolution, en raison de l’escalade de violences qui prévaut dans le pays et de l’appel lancé par le Gouvernement haïtien lui-même.  L’adoption de cette résolution est un premier pas qui intervient avant les discussions sur les questions relatives au financement, au commandement ou aux règles d’engagement, a noté la représentante, qui a souligné que la Mission, à elle seule, ne suffira pas pour relever les défis du pays.  Il reviendra aux parties haïtiennes de répondre, par la voie politique, aux aspirations de la population, a-t-elle souligné. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a déclaré que la Mission multinationale d’appui à la sécurité aura un rôle important à jouer pour aider la Police nationale d’Haïti à faire face à la détérioration de la situation sécuritaire dans le pays.  Elle tracera également la voie pour les efforts qui s’imposent pour traiter des crises interconnectées sur le plan sécuritaire, humanitaire, politique et économique, a-t-il ajouté.  Il a salué le rôle de chef de file du Kenya ainsi que l’engagement des États membres de la CARICOM dans cet effort international, tout en soulignant qu’à long terme, seule une solution politique permettra au peuple haïtien de bénéficier de la sécurité et de la prospérité qu’il mérite.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a insisté sur l’action décisive nécessaire pour appuyer le retour d’Haïti à la paix et à la sécurité.  Elle a souligné que les activités de la Mission se feront en étroite coopération avec les autorités haïtiennes.  Elle a en outre salué le fait que le texte adopté prévoit un calendrier de douze mois, ainsi qu’un examen mandaté tous les neuf mois. Elle a encouragé tous les États Membres à fournir les compétences requises à leurs contingents pour lutter contre des crimes spécifiques.  Elle a appelé à une réponse d’ensemble, intégrée et collective en vue du rétablissement de l’état de droit tant en Haïti que dans la région. 

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a expliqué avoir voté en faveur de la résolution en raison du rôle que la Mission jouera pour rétablir la sécurité et créer les conditions propices à la tenue d’élections.  Il est à espérer que la Mission travaillera en étroite coopération avec les États et respectera les normes internationales et nationales relatives aux droits humains, a dit le représentant. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a espéré que l’adoption de ce texte enverra un message retentissent aux groupes armés en Haïti.  Il a souligné que la communication stratégique est un facteur clef qui précède tout déploiement et a appelé à adopter une approche complète pour régler la crise multidimensionnelle qui sévit en Haïti.  La résolution adoptée aujourd’hui n’est pas une fin en soi, mais un jalon historique sur lequel bâtir, a-t-il estimé.  Notant en outre les dispositions solides de la résolution sur la violence sexuelle et la protection des enfants, entre autres, il a appelé les États Membres à soutenir la Police nationale d’Haïti dans ses efforts visant à protéger les citoyens haïtiens et à garantir leur accès à l’aide humanitaire.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a souligné que, face aux besoins urgents d’Haïti en matière de sécurité, le Conseil a voté pour une résolution complète qui établit un cadre politique et juridique permettant le déploiement de troupes et de matériel et un financement adéquat aux parties intéressées.  Il a insisté sur le fait que l’aide à la sécurité est une étape cruciale, mais que de multiples efforts coordonnés sont essentiels pour une solution durable de la crise haïtienne.  Il a recommandé d’adopter une approche globale qui mobilise le soutien au progrès institutionnel et socioéconomique en Haïti, jugeant d’autre part « absolument impératif » de traiter les causes structurelles sous-jacentes à la violence et à la vulnérabilité du pays.  Un large consensus politique national en Haïti est « urgent et irremplaçable », a-t-il relevé, notant que, sans une solution politique haïtienne, basée sur un processus électoral libre, juste et transparent, aucune assistance en matière de sécurité, d’aide humanitaire et d’aide au développement ne garantira un succès durable.  De même, la solidarité internationale demeurera insuffisante sans le respect de l’embargo total sur les armes auxquelles les gangs et les groupes paramilitaires continuent d’avoir accès impunément. 

M. JEAN VICTOR GÉNÉUS, Ministre des affaires étrangères d’Haïti, a déclaré que le vote de ce texte constitue une avancée significative vers la résolution de la crise multidimensionnelle que traverse son pays.  C’est une lueur d’espoir pour le peuple qui subit, depuis trop longtemps, les conséquences d’une situation politique, socioéconomique, sécuritaire et humanitaire difficile, a-t-il ajouté.  Le Conseil de sécurité a pris la mesure de la crise et a compris la nécessité d’agir en urgence, s’est-il réjoui.

Le Ministre a également déclaré que, si l’emploi de la force, comme première étape, demeure indispensable pour créer un environnement sécuritaire propice au fonctionnement normal des institutions, il n’est pas suffisant.  Le développement socioéconomique doit être pris en compte pour s’attaquer durablement à l’extrême pauvreté, source de tous les maux.  Il est tout aussi nécessaire de soutenir davantage les programmes sociaux du Gouvernement visant à soulager les démunis dans les quartiers défavorisés, terreaux de recrutement des jeunes désorientés et marginalisés, a-t-il ajouté. 

M. BRIAN CHRISTOPHER MANLEY WALLACE (Jamaïque), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a insisté sur l’importance du soutien de la communauté internationale à Haïti.  En raison de la criminalité éhontée perpétrée par les gangs et du niveau élevé d’insécurité qui en résulte, la moitié de la population haïtienne a désespérément besoin d’une aide humanitaire et la situation s’aggrave chaque jour, s’est-il alarmé, insistant sur l’impératif de restaurer la sécurité et contribuer à un environnement politique, social et économique stable capable de favoriser le développement durable en Haïti.

Le représentant a salué l’engagement du Kenya à diriger la Mission, précisant que plusieurs pays de la CARICOM fourniront également du personnel et d’autres soutiens. Il a également exhorté les autres États Membres à fournir du personnel de sécurité ainsi qu’un soutien logistique et financier pour financer les besoins de la Police nationale d’Haïti ainsi que le Plan de réponse humanitaire pour Haïti.  Il a ajouté que la CARICOM continue de jouer un rôle de médiation auprès du Gouvernement haïtien et des parties prenantes dans le but de résoudre l’impasse politique et de rétablir la stabilité dans le pays.

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a déclaré qu’en adoptant cette résolution, le Conseil s’est fait porteur d’espoir pour le peuple haïtien, tant le texte constitue un apport séminal pour la renaissance de la sécurité en Haïti et un catalyseur de la fortification de la gouvernance, de l’amélioration de la situation socioéconomique et de la primauté du droit. 

Le représentant a rappelé que le Kenya avait répondu au clairon des autorités haïtiennes dans un esprit de solidarité et de responsabilité partagée, et manifesté sa volonté de diriger cette initiative mandatée par le Conseil.  Rappelant que le commandement de la Mission multinationale sera confié à plusieurs États Membres et que le Président du Kenya, M. William Ruto, avait imploré le Conseil –lors de son intervention devant la soixante-dix-huitième session de l’Assemblée générale– d’adopter une résolution en vertu du Chapitre VII de la Charte, le représentant a salué la constitution de cette mission.  Il a invité les États Membres à y contribuer activement par la fourniture de personnel, de fonds, d’équipement vital et d’appui logistique.  Il a conclu son propos en réaffirmant l’engagement du Kenya à œuvrer de concert avec les États de la CARICOM pour opérationnaliser la Mission et assuré que le Conseil serait tenu informé des différentes étapes de sa préparation.

Mme RODRIGUES BIRKETT (Guyana) a dit la détermination de son pays à répondre à l’appel lancé par le Conseil de sécurité avec la création de cette mission.  Cette détermination est réelle, a-t-elle insisté, disant espérer qu’à terme, la Police nationale d’Haïti soit à même de remplir ses tâches et recruter pour apporter la sécurité à la population.  En attendant, a-t-elle ajouté, il faut une action internationale coordonnée holistique et pérenne, afin de répondre efficacement aux défis socioéconomiques et humanitaires que connaît Haïti et cela, loin des considérations géopolitiques.

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