9407e séance - matin
CS/15398

Mali: le Chef de la MINUSMA prévient le Conseil de sécurité des difficultés liées au calendrier serré de retrait de la Mission

Le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali a fait le point, ce matin devant le Conseil de sécurité, sur le processus de clôture de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) qui doit être achevé avant le 31 décembre 2023. 

À cette occasion, M. El-Ghassim Wane a prévenu que des difficultés subsisteront en raison du calendrier serré de retrait de la Mission, ainsi que de la cessation immédiate de son mandat substantiel en vertu de la résolution 2690 (2023), qui, a-t-il relevé, n’a pas permis d’envisager une période de transition proprement dite. Dans ce contexte, il est important de reconnaître que certaines tâches ne pourront pas être transférées de manière effective, a-t-il signalé. 

« Fermer une mission construite sur une décennie en l’espace de six mois est une entreprise complexe et ambitieuse », a indiqué le Chef de la Mission qui, outre le rapatriement de 12 947 membres du personnel en uniforme, a évoqué une multitude de contraintes liées à la géographie, au climat, à la logistique et à l’infrastructure, ainsi qu’aux risques sérieux liés à la situation sécuritaire actuelle.

À ce propos, M. Wane a indiqué que la première phase de retrait de la Mission, qui se concentrait sur la fermeture des avant-postes les plus petits et les plus éloignés des camps de l’ONU à Tombouctou, Gao et Mopti, a été émaillée par des incidents sécuritaires lors de la fermeture du camp de Ber, au cours desquels quatre Casques bleus ont été blessés lorsque le convoi de la MINUSMA a été attaqué à deux reprises par des extrémistes non identifiés.  De plus, a-t-il ajouté, ce retrait s’est également avéré difficile sur le plan politique, les autorités maliennes et les mouvements signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali étant en désaccord sur le sort du camp après le départ de la MINUSMA.    

Sur ce dernier point, le Représentant spécial a fait savoir que la Coordination des mouvements de l’Azawad a invoqué les arrangements sécuritaires de 2014 pour objecter au déploiement des forces armées maliennes dans les zones qu’ils contrôlent et insister sur la nécessité d’opérer dans le cadre de l’accord de paix.  Tout en rappelant que les bases de la Mission sont légalement transférées à l’État malien, M. Wane a encouragé les parties à parvenir à un accord pour éviter des incidents inutiles, dont les conséquences, a-t-il prévenu, pourraient compliquer le processus de retrait, et compromettre sérieusement les perspectives de reprise de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. 

On peut déjà constater les conséquences néfastes du retrait précipité de la MINUSMA, s’est inquiété le Japon, tandis que la France a appelé le Conseil de sécurité à apporter son plein soutien aux efforts de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour que la transition politique soit menée à son terme dans les délais agréés et permette l’avènement d’autorités civiles démocratiquement élues. 

Préoccupé par le vide que pourrait créer le retrait de la MINUSMA, le Ghana, au nom des A3, a souligné la responsabilité de la médiation internationale dans le maintien de l’accord de paix, au travers du dialogue et de la coordination entre le Gouvernement de transition et les mouvements signataires. C’est essentiel pour atténuer tout impact négatif que le retrait de la MINUSMA pourrait avoir sur la poursuite de la mise en œuvre de l’accord de paix, a-t-il insisté. 

À ce sujet, les États-Unis ont appelé le Gouvernement de transition et les mouvements signataires à revitaliser leur engagement en faveur de l’accord d’Alger, qui, à leurs yeux, constitue la meilleure solution pour la pérennisation de la paix.  Pour soutenir les efforts de la médiation internationale, la Suisse a conseillé la mise en place d’un mécanisme d’accompagnement, avec « de préférence » une présence permanente sur place.  L’Équateur et Malte ont appelé pour leur part au plein respect de l’accord sur le statut des forces jusqu’au départ définitif de la MINUSMA, tandis que le Royaume-Uni a conseillé au Conseil de sécurité de se tenir prêt à réviser le calendrier du retrait de la Mission.  Un retrait précipité mettrait en péril l’accord d’Alger de 2015, ainsi que la vie des soldats de la paix, et aurait des implications sécuritaires pour l’ensemble de la région, a notamment argué la délégation.

Le représentant du Mali a toutefois souligné que la deuxième phase du transfert des tâches de la MINUSMA à l’État malien, qui commence dès le 1er septembre 2023 et qui, selon le Représentant spécial, sera « extrêmement difficile », doit s’exécuter suivant le chronogramme convenu. Si le Gouvernement malien est ouvert au dialogue pour régler pacifiquement les questions ponctuelles qui peuvent se poser, ce dernier tient au respect strict des délais convenus pour le transfert des camps de Tessalit, d’Aguelhok et de Kidal à l’État du Mali, et n’envisage pas de prolongation du départ de la Mission au-delà de la date du 31 décembre 2023, a-t-il tranché. 

Le délégué a également exprimé sa « surprise » suite aux affirmations « sans fondement » contenues dans le rapport et faisant état de restrictions de vols et de limitations d’importations imposées à la MINUSMA.  Ces affirmations sont contraires à l’esprit constructif et de coopération que le Gouvernement n’a cessé de manifester à l’égard de la MINUSMA, a-t-il regretté.  Il a également soutenu que contrairement à certains passages du rapport d’étape, le Gouvernement du Mali a évalué avec beaucoup de « sérénité » le retrait de la MINUSMA et élaboré les mesures nécessaires pour faire face à tout éventuel vide sécuritaire qui y serait lié.  Les forces armées maliennes sont prêtes à faire face à toutes les situations, y compris la remise anticipée des camps, comme ce fut le cas le 13 août 2023, a-t-il fait valoir.

LA SITUATION AU MALI - S/2023/611

Déclarations

M. EL-GHASSIM WANE, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), a fait le point sur le processus de clôture de la MINUSMA, précisant qu’immédiatement après l’adoption de la résolution 2690 (2023), qui demande que la fermeture de la Mission soit achevée avant le 31 décembre 2023, la MINUSMA a établi un groupe de travail intégré afin d’élaborer un plan de réduction et de retrait de la Mission selon un calendrier et un ordre séquentiel précis.  Des mécanismes de coordination, comprenant à la fois des représentants du Gouvernement de transition et de la MINUSMA ont également été mis en place aux niveaux technique et politique. 

Le Représentant spécial a indiqué que fermer une mission construite sur une décennie en l’espace de six mois est une entreprise complexe et ambitieuse.  Concrètement, a-t-il détaillé, cela implique le rapatriement de 12 947 membres du personnel en uniforme, la séparation de 1 786 membres du personnel civil, le rapatriement et/ou la réinstallation d’un chargement d’environ 5 500 containeurs d’équipements et de près de 4 000 véhicules, ainsi que la fermeture et la passation sous contrôle de 12 camps et d’une base d’opérations temporaire aux autorités civiles maliennes. La tâche est rendue encore plus difficile par une multitude d’autres contraintes liées à la géographie, au climat, à la logistique et à l’infrastructure, ainsi qu’aux risques sérieux liés à la situation sécuritaire actuelle. 

M. Wane a précisé que le retrait et la fermeture de la Mission se déroulent en deux phases, jusqu’au 31 décembre, suivies de la période de liquidation, qui débutera le 1er janvier 2024.  La première phase qui se concentrait sur la fermeture des avant-postes les plus petits et les plus éloignés des camps de l’ONU à Tombouctou, Gao et Mopti et la réduction de 25% de l’empreinte géographique de la MINUSMA, s’est achevée le 25 août avec la fermeture de la base de Ménaka. 

L’expérience de la fermeture du camp de Ber a été révélatrice, a regretté M. Wade expliquant que le dernier convoi de Casques bleus, d’équipements et de matériels qui s’est retiré de ce camp vers Tombouctou a mis 51 heures pour parcourir les 57 kilomètres du trajet en raison de la nature du terrain, aggravée par la saison des pluies mais aussi de l’insécurité.  Le convoi a été attaqué à deux reprises par des éléments extrémistes non identifiés, blessant quatre Casques bleus et endommageant trois véhicules avant d’arriver à Tombouctou.  Et le retrait de Ber s’est également avéré difficile sur le plan politique, puisque les autorités maliennes et les mouvements signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali étaient en désaccord sur le sort du camp après le départ de la MINUSMA. 

Le Représentant spécial a ensuite indiqué que la deuxième phase du processus de réduction des effectifs et de retrait se déroulera jusqu’au 15 décembre et se concentrera sur la fermeture de six bases (Tessalit, Aguelhok et Kidal, au nord, Douentza et Mopti, au centre, et Ansongo à l’est).  Il a prévenu que cette phase sera extrêmement difficile, notamment en raison de la longueur des trajets, et du fait qu’il ne faudra pas moins de 1 050 camions pour transporter tous les équipements et matériels appartenant aux contingents et à l’ONU sur un terrain difficile avec une insécurité omniprésente.  Le Chef de la Mission a aussi fait état de l’impact possible de la situation au Niger sur le plan de retrait qui repose sur l’utilisation des zones de transit de Cotonou et de Lomé. 

Poursuivant, M. Wane a indiqué que les parties ont adopté des positions divergentes sur le sort des camps qui seront libérés par la Mission, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) ayant notamment invoqué les arrangements sécuritaires de 2014 pour objecter au déploiement des forces armées maliennes dans les zones qu’ils contrôlent et insister sur la nécessité d’opérer dans le cadre de l’accord de paix.  Le Représentant spécial a rappelé les paramètres qui sous-tendent la fermeture des camps de la MINUSMA, y compris le fait que les bases sont légalement transférées à l’État malien. 

Il a également encouragé les parties à parvenir à un accord pour éviter des incidents inutiles, dont les conséquences pourraient compliquer le processus de retrait, affecter négativement le travail des entités onusiennes après la fermeture de la Mission, et compromettre sérieusement les perspectives de reprise de la mise en œuvre de l’accord de paix. 

Le Représentant spécial a toutefois prévenu que des difficultés subsisteront en raison du calendrier serré de retrait de la Mission, ainsi que de la cessation immédiate de son mandat substantiel en vertu de la résolution 2690 (2023), qui n’a pas permis d’envisager une période de transition proprement dite. Dans ce contexte, il est important de reconnaître que certaines tâches ne pourront pas être transférées de manière effective, a-t-il signalé. 

Mme BEATRICE ABOUYA, Directrice régionale par intérim de Search for Common Ground, a présenté cette organisation comme étant une ONG établie il y a 40 ans et engagée dans la consolidation de la paix.  Elle a estimé que le retrait de la MINUSMA offre l’opportunité de remodeler les approches de réponse au conflit.  C’est aussi, selon elle, le moment pour l’ONU et les gouvernements de redoubler d’efforts pour soutenir le Mali, ce qui nécessite une planification et une coordination minutieuses pour garantir la protection de la vie, de la dignité humaine et des conditions d’une paix durable.  À cette fin, Mme Abouya a souhaité que le retrait engagé de la MINUSMA ne mette pas en péril les progrès accomplis par les autorités maliennes et la Mission. 

Elle a également appelé l’ONU et la communauté internationale à faire preuve de créativité et de souplesse pour adapter les mécanismes de financement et ainsi maintenir les services de base.  Cela implique que les financements de la MINUSMA destinés aux affaires civiles et aux projets de stabilisation soient maintenus au travers des fonds de consolidation de la paix, a-t-elle souligné, estimant que l’accent doit aujourd’hui être mis sur la manière dont l’ONU investira ces fonds pour poursuivre le soutien au renforcement d’institutions fortes au Mali.  Mme Abouya a d’autre part recommandé que les efforts civils de médiation et de résolution des conflits soient renforcés afin d’établir un dialogue franc au sein des communauté locales.  Considérant que le retrait de la MINUSMA ouvre une nouvelle ère de coopération en matière de sécurité avec le Mali, elle a demandé au Conseil de sécurité de continuer à soutenir le Mali, les décisions prises au sein de cet organe ayant selon elle un impact direct sur vie de la population malienne.   Dans cet esprit, elle a souhaité que toutes les initiatives convergent vers une paix durable pour le Mali et le Sahel dans son ensemble. 

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a rappelé que les autorités de transition maliennes se sont engagées à garantir le retrait en toute sécurité de la MINUSMA, a-t-elle souligné, sans imposer de restrictions à sa liberté de mouvement ou à ses approvisionnements, dans le plein respect de la résolution 2690 (2023) du Conseil de sécurité.  L’accord sur le statut de la Force reste donc en vigueur jusqu’au départ du Mali du dernier élément de la MINUSMA, a souligné la représentante.  Elle a exprimé la préoccupation de son gouvernement vis-à-vis des affrontements qui ont éclaté à Ber, avec la participation de mercenaires de Wagner, y voyant une violation grave du cessez-le-feu.  La France appelle les parties à éviter toute escalade et reprendre des discussions sous l’égide de la médiation internationale, a déclaré la déléguée.  Le Conseil doit donc continuer de suivre la situation au Mali avec une extrême vigilance et apporter son plein soutien aux efforts de la CEDEAO pour que la transition politique soit menée à son terme dans les délais agréés et permette l’avènement d’autorités civiles démocratiquement élues.  Comprenant l’inquiétude des pays de la région vis-à-vis du retrait de la MINUSMA, alors que les chefs d’État de la CEDEAO ont appelé à une réflexion approfondie sur ses conséquences, la représentante a souhaité qu’une attention particulière soit accordée à l’impact de ce retrait pour la population malienne, l’accès à l’assistance humanitaire et la protection des droits humains.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a relevé que l’on peut déjà constater les conséquences néfastes du retrait précipité de la MINUSMA.  Elle s’est inquiétée de la détérioration de la situation sécuritaire près du camp de Ber, et a appelé les parties à l’accord de paix de 2015 à s’abstenir de toute action susceptible de le mettre en péril.  Devant les attaques menées contre les convois de la MINUSMA et les restrictions de mouvement imposées à celle-ci, la représentante a prôné un retrait ordonné et sûr de la Mission.  L’engagement à long terme de l’ONU au Mali étant essentiel à ses yeux, elle a souhaité un transfert harmonieux des tâches de la MINUSMA aux autorités maliennes.  À cette fin, elle a appelé celles-ci, la Mission, l’équipe de pays des Nations Unies et le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) à se coordonner étroitement et à resserrer leur collaboration dans les mois à venir.  Il incombe au Gouvernement de transition et aux forces de sécurité étrangères de respecter les droits humains et le droit international humanitaire dans toutes leurs opérations, a-t-elle rappelé.  Elle a ensuite appelé le Conseil de sécurité à redoubler d’efforts pour favoriser la mise en œuvre de l’accord de paix de 2015 et assurer le retour à l’ordre constitutionnel d’ici à mars 2024. 

Au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a salué le plan de retrait articulé par le Secrétaire général de l’ONU pour le transfert des tâches de la MINUSMA d’ici au 31 décembre prochain.  Notant que ce retrait s’effectue dans un délai très court et dans un contexte difficile, il a rappelé que les attaques terroristes se poursuivent, que la mise en œuvre de l’accord de paix d’Alger reste difficile et que les campagnes de désinformation continuent de compliquer les efforts visant à stabiliser la situation. Le représentant a également constaté que les événements au Niger compliquent la situation sécuritaire et humanitaire dans la région et le processus de liquidation de la MINUSMA.  Il s’est cependant dit confiant dans la capacité de l’ONU à assurer un retrait sûr, ordonné et coordonné de la Mission, tout en préservant un engagement à long terme de l’ONU dans le pays et en atténuant le risque de retombées de cette crise sur les pays voisins. 

Le représentant a estimé qu’en dépit des défis, un retrait d’ici au 31 décembre est « encore possible ».  Il s’est cependant alarmé des tensions croissantes entre le Gouvernement de transition du Mali et la Coordination des mouvements de l’Azawad ainsi que du malaise exprimé par plusieurs autres mouvements signataires.  Exprimant son inquiétude face aux lacunes que pourrait créer le retrait de la MINUSMA, il a exhorté les autorités de transition à renouveler leur engagement auprès des mouvements signataires pour préserver l’accord de cessez-le-feu et leur engagement en faveur du processus de paix.  Il a aussi souligné la responsabilité de la médiation internationale dans le maintien de l’accord de paix, au travers du dialogue et de la coordination entre le Gouvernement de transition et les mouvements signataires. C’est essentiel pour atténuer tout impact négatif que le retrait de la MINUSMA pourrait avoir sur la poursuite de la mise en œuvre de l’accord de paix, a-t-il insisté, jugeant à cet égard que la poursuite des mesures décidées par le Conseil contre les individus qui nuisent au processus de paix constitue une « garantie nécessaire ». 

Le représentant a ensuite noté la détermination des autorités de transition maliennes à assumer, après le retrait, la responsabilité de tâches telles que la transition politique et les élections, le soutien au processus de paix, la restauration de l’autorité de l’État, l’appui à la stabilisation des régions du centre et la protection des civils et des droits humains.  Il a également salué l’engagement du Gouvernement de transition à rétablir l’ordre constitutionnel, conformément aux délais convenus avec la CEDEAO, et la volonté de l’équipe de pays de l’ONU de travailler avec les autorités maliennes.  Soulignant à cet égard le rôle important que l’UNOWAS et l’équipe de pays peuvent jouer pour combler les lacunes, il a souhaité qu’ils bénéficient d’un soutien logistique, opérationnel et financier adéquat.  De même, s’agissant de la protection des civils, le représentant a appelé à une flexibilité dans le transfert des fonds résiduels et à une augmentation du financement des donateurs pour mieux aider les autorités et les agences de l’ONU à contenir les défis auxquels le Mali est confronté, notamment le terrorisme.  Il a ainsi exhorté les donateurs à contribuer à atteindre l’objectif de 751,5 millions de dollars requis pour le plan de réponse humanitaire. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a estimé que le retrait de la MINUSMA est sans précédent et s’inscrit dans un contexte de détérioration de la violence terroriste et des droits humains, y compris les violences sexuelles.  Les récents événements en Fédération de Russie soulignent une nouvelle fois le risque de toute association avec le groupe Wagner, a-t-elle noté.  Le Conseil de sécurité devrait se tenir prêt à réviser le calendrier du retrait de la Mission s’il s’avère que celui-ci ne peut être achevé d’ici au 31 décembre 2023.  Un retrait précipité qui mettrait en péril l’accord d’Alger de 2015 et la vie des soldats de la paix aurait des implications sécuritaires pour l’ensemble de la région, a-t-elle prévenu.  Les violations du cessez-le-feu à Ber démontrent le besoin urgent d’un dialogue structuré entre toutes les parties à l’accord de paix avant la rétrocession des sites de la MINUSMA, en particulier dans la région de Kidal.  Dans l’intervalle, la déléguée a salué le plan de transition du Secrétaire général, y voyant une étape en vue de la préservation du patrimoine de la Mission.  Elle a appelé l’ONU à redoubler d’efforts pour soutenir une médiation efficace entre les parties à l’accord de paix, et exhorté les autorités de transition à adhérer aux propositions d’appui de l’Organisation, dans l’intérêt du peuple malien.

M. DAI BING (Chine) a appelé la communauté internationale à œuvrer pour la paix et la sécurité au Mali alors que la MINUSMA est en train de s’en retirer, notamment en soutenant le processus politique en cours, dans le respect de la souveraineté de ce pays.  Il a exhorté la CEDEAO à renforcer sa communication avec les autorités maliennes pour créer davantage de synergies.  Conscient de la difficulté que pose le retrait de la Mission, il l’a appelée à mettre en œuvre les tâches qui lui ont été confiées par le Conseil pour réduire ses effectifs, équipements et matériels.  La Chine a regretté les attaques récentes perpétrées dans le cadre de la fermeture du camp de Ber, et son représentant a espéré que la Mission sera en mesure d’améliorer ses capacités de sécurité en vue d’assurer un retrait en toute sécurité.  Notant la volatilité de la situation dans la région en raison de la présence de groupes terroristes qui menacent la stabilité régionale, le représentant a exhorté les pays de la région à s’attaquer ensemble à leurs défis communs.  Il a exhorté l’ONU à fournir logistique, financement et renforcement des capacités de lutte contre le terrorisme dans la région et à veiller à la revitalisation des mécanismes de coopération régionaux pertinents. 

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a insisté sur l’importance d’assurer le retrait sûr et ordonné du personnel et des Casques bleus de la MINUSMA.  Elle a appelé à établir des mécanismes coordonnés pour le transfert des tâches et des sites avec le Gouvernement de transition, exhortant en outre à la pleine coopération des groupes armés signataires. Avec le départ de la MINUSMA, de nombreux vides et lacunes seront créés au Mali.  Il est donc crucial que le Gouvernement de transition se concentre sur l’avancement de la transition politique et sur la réalisation de progrès tangibles pour revenir à l’ordre constitutionnel, dans les délais convenus avec la CEDEAO, tout en créant les conditions d’un espace politique et civil inclusif, a-t-elle insisté. 

La représentante a également appelé le Gouvernement de transition à respecter ses obligations internationales de protection des civils et à mener des opérations de sécurité conformément au droit international humanitaire et aux droits de l’homme.  À cet égard, le partenariat avec le groupe Wagner suscite de vives inquiétudes et, a-t-elle prévenu, n’apportera ni paix ni stabilité au Mali.  Elle a ensuite appelé les autorités maliennes à coopérer pleinement avec la MINUSMA pour assurer un retrait sûr et ordonné, tout en respectant pleinement l’accord sur le statut des forces jusqu’au départ définitif. 

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a réitéré l’importance d’un retrait ordonné, sûr et efficace de la MINUSMA, conformément à la résolution 2690 (2023). Elle a salué les mesures rapides déjà prises en vue du transfert des tâches de la Mission, tout en soulignant la nécessité d’assurer la sécurité du personnel de l’ONU durant le processus de retrait.  Qui plus est, la liberté de mouvement de la MINUSMA doit être respectée au cours de cette période, comme le prévoit l’accord sur le statut des forces.  Les importations et exportations requises par la Mission pour son retrait ne devraient faire l’objet d’aucune contrainte, a-t-elle ajouté.  La représentante a exprimé sa vive préoccupation face à l’impact du retrait de la MINUSMA sur l’application de l’accord de paix, avant d’appeler le Gouvernement de transition et les parties à relancer leurs efforts diplomatiques et à éviter de nouvelles confrontations.  Elle a jugé crucial que les autorités maliennes de transition travaillent de concert avec l’ONU pour assurer la protection des civils et le respect des droits humains.  À cet égard, la déléguée a reconnu la nécessité d’allouer des ressources additionnelles afin que l’UNOWAS et l’équipe de pays des Nations Unies puissent accomplir les tâches qui relevaient auparavant de la MINUSMA.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a insisté sur la nécessité de respecter strictement le calendrier fixé dans la résolution 2690 (2023) et a souhaité obtenir d’autres propositions du Secrétaire général visant à optimiser les coûts de fonctionnement de la Mission, jusqu’à son retrait final.  Il a constaté que le retrait de la Mission se déroule dans des conditions difficiles, condamnant les attaques lancées contre les Casques bleus, tout en notant que la première phase de mise en œuvre de la résolution 2690 (2023) s’est déroulée dans son ensemble sans incidents graves.  Il a espéré que la deuxième phase du processus, qui doit débuter le 1er septembre et implique un mouvement à plus grande échelle des Casques bleus vers les trois districts de Gao et de Bamako, se déroulera elle aussi de manière ordonnée et organisée.  Il a appelé l’ensemble des parties maliennes à s’abstenir de toute rhétorique ou provocation armée.  Il a rappelé que la mission de maintien de la paix de l’ONU est autorisée à transférer ses infrastructures exclusivement aux autorités officielles du pays hôte.  En ce qui concerne le transfert de l’autorité de la MINUSMA à l’UNOWAS, il a appelé à obtenir l’accord des Maliens eux-mêmes avant de prendre une décision. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a salué les efforts déployés par la MINUSMA pour mener à bien son retrait du Mali. Dans ce cadre, a-t-elle souligné, il convient d’éviter d’hypothéquer la sécurité du Sahel et de réfléchir à un nouveau rôle de l’ONU dans la région.  Dans l’immédiat, a poursuivi la représentante, la priorité doit être de garantir le retrait sûr et ordonné de la MINUSMA, ce qui dépend de la coordination entre les autorités maliennes, l’ONU et les autres parties prenantes.  Il importe aussi, selon elle, de continuer les consultations avec toutes les parties concernées afin de garantir la mise en œuvre des différentes tâches, contrer les obstacles et permettre la coopération avec les autres partenaires internationaux. 

Dans le cadre du transfert des responsabilités aux autorités maliennes, il convient en outre de garantir le démantèlement sûr des camps, conformément aux procédures en vigueur, afin d’éviter tout incident sécuritaire, a-t-elle ajouté, plaidant pour une approche proactive en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité des personnels de l’ONU.  S’agissant de la désinformation, la représentante a souhaité que cette question soit traitée en concertation avec les autorités maliennes et en coopération avec la population locale.  Observant que ce retrait coïncide avec un moment où la région se heurte à la menace terroriste, elle a exhorté toutes les parties à faire de la sécurité une préoccupation centrale.  Par ailleurs, alors que les besoins humanitaires vont croissant, elle s’est félicitée que l’équipe de pays de l’ONU reste au Mali afin d’épauler les communautés. Enfin, après avoir appelé les parties à un nouvel élan en faveur du dialogue pour mettre en œuvre l’accord de paix, elle a assuré que son pays continuera d’appuyer les efforts de médiation internationaux.

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a fait valoir que le retrait de la MINUSMA aura pour effet d’entraver la mise en œuvre de l’accord de paix.  Il a appelé à renforcer les bureaux nationaux et régionaux de l’ONU, notamment le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), afin qu’ils assument une partie des responsabilités de la Mission et appuient le processus de transition politique et électorale.  Le Gouvernement de transition devra assumer plusieurs fonctions de la MINUSMA, notamment la protection des civils, des droits humains et du droit international humanitaire.  De plus, le rôle de l’UNOWAS en remplacement de la MINUSMA pour les questions de politique préventive et de médiation est à ses yeux essentiel.  Le représentant a appelé l’Algérie à apporter le soutien nécessaire pour engager un dialogue constructif permettant la pleine application de l’accord de paix, notamment le respect du cessez-le-feu lors du retrait de la MINUSMA.  Entre-temps, il a exhorté le Gouvernement de transition à respecter le statut des forces qui reste en vigueur jusqu’au départ du Mali du dernier élément de la MINUSMA.  Enfin, le délégué a demandé la poursuite de l’aide humanitaire afin de renforcer la prévention et la réponse aux violences sexuelles ainsi que la protection des enfants.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a condamné les actes de violence commis à l’encontre du personnel de la MINUSMA lors de son retrait du camp de Ber au début du mois d’août, et exigé que les responsables de ces actes soient tenus de rendre des comptes.  Se félicitant de l’engagement de la Mission auprès des autorités maliennes afin de garantir qu’un soutien adéquat continue d’être apporté au pays tout au long de sa transition politique et des efforts vers la conclusion du processus de paix, il a estimé que la mise en œuvre réussie de ces deux volets est essentielle pour que les autorités maliennes puissent pleinement contrôler le territoire et être en mesure de garantir la sécurité de la réduction et du retrait de la MINUSMA.  Le représentant a réitéré le soutien du Brésil au processus de médiation mené par l’Algérie avant d’exhorter toutes les forces politiques maliennes à engager le dialogue et reprendre la mise en œuvre de l’accord de paix.  Il a salué la stratégie définie pour renforcer les bons offices et les mandats de médiation du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest (UNOWAS), de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union africaine, avant de faire valoir que les accords bilatéraux et régionaux jouent aussi un rôle crucial dans la diplomatie préventive et le règlement des conflits.  Préoccupé par l’aggravation de la situation humanitaire au Mali où, selon l’OCHA, pas moins de 8,8 millions de personnes auraient besoin d’aide cette année, le délégué a jugé impératif que toutes les parties concernées garantissent une assistance humanitaire sûre et sans entrave.  Il a insisté en conclusion sur le fait que le retrait de la MINUSMA ne doit pas entraîner une diminution de l’aide apportée à ces personnes. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a salué la priorité que l’ONU accorde à la planification du retrait de la MINUSMA.  À cet égard, il a exprimé son soutien aux objectifs identifiés par le Secrétaire général, comme la sûreté et la sécurité du personnel, la sauvegarde des acquis de la Mission et la préservation d’un environnement propice à l’engagement à long terme de l’ONU au Mali.  De l’avis du représentant, il faut s’attendre à ce que les risques pour le personnel augmentent, d’autant plus que les campagnes de désinformation contre la MINUSMA adoptent de nouveaux narratifs.  Pour répondre à ces risques, il s’est déclaré en faveur du maintien, pendant la phase de liquidation, d’une unité de gardes dotée, équipée et formée de manière adéquate.  Il a également déclaré compter sur le soutien des forces armées maliennes en matière de protection des abords des infrastructures onusiennes restantes. 

Le représentant a par ailleurs estimé que des mesures de confiance sont indispensables pour remettre le processus de paix sur les rails.  Afin de soutenir les efforts de la médiation internationale pour la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, il a plaidé pour la mise en place d’un mécanisme d’accompagnement, avec de préférence une présence permanente sur place.  Toute réflexion à ce sujet devrait être coordonnée avec les autorités maliennes, les autres parties signataires de l’Accord et la médiation elle-même, a-t-elle ajouté.  S’agissant des discussions sur la reprise des multiples tâches de la MINUSMA, le délégué a proposé que les activités politiques soient transférées au Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS).  Il a cependant averti que certaines activités réalisées précédemment par la MINUSMA ne peuvent être transférées, avec des conséquences sur la protection des civils et l’approvisionnement humanitaire.  Enfin, constatant que ni l’UNOWAS, ni l’équipe de pays de l’ONU, ni le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) ne disposent de ressources adéquates pour assumer des tâches supplémentaires, il a prévenu que des ajustements budgétaires seront nécessaires.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que la décision du Gouvernement de transition de fermer la MINUSMA a déjà entraîné des violences sur le terrain. Elle s’est dite alarmée par la reprise des hostilités dans le nord du pays, y compris les violations du cessez-le-feu dans le camp de Ber et contre un convoi de la MINUSMA.  En outre, le retrait de la Mission limite les capacités de la communauté internationale à protéger les civils face au groupe Wagner dont les activités exacerbent l’insécurité dans le pays.  Elle a condamné les attaques insensées perpétrées contre les Casques bleus, qui risquent d’inverser des années de progrès en faveur de la paix et de la sécurité.  « Soyons clairs: si la guerre venait à éclater, elle entraînerait des souffrances indicibles à la population du Mali qui a déjà tant souffert. »  Une telle instabilité ouvrirait la porte aux groupes terroristes présents sur le territoire malien, s’est alarmée la représentante, y voyant la « recette pour une catastrophe ». 

Elle a appelé le Gouvernement de transition et les mouvements signataires à revitaliser leur engagement en faveur de l’accord d’Alger, qui constitue la meilleure solution pour la pérennisation de la paix.  La représentante a exhorté l’ONU à formuler des recommandations s’agissant du transfert des tâches de la Mission afin d’éviter tout retard dans la mise en œuvre de l’Accord.  Selon elle, la création d’une composante spécialisée au sein de l’UNOWAS pourrait être la meilleure solution pour garantir la continuité des travaux de la Mission.  L’accord sur le statut des forces, qui prévoit la liberté de circulation de la MINUSMA, demeure en vigueur jusqu’au départ des derniers éléments de la Mission, a-t-elle rappelé.

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a assuré que le Gouvernement du Mali travaille en étroite coopération avec la MINUSMA pour un retrait coordonné, sécurisé et ordonné de la mission conformément au délai du 31 décembre 2023, décidé par le Conseil de sécurité.  Il a exprimé sa surprise suite aux affirmations contenues dans le rapport et faisant état de restrictions de vols et de limitations d’importations imposées à la MINUSMA.  Ces affirmations sont sans fondement et contraires à l’esprit constructif et de coopération que le Gouvernement n’a cessé de manifester à l’égard de la MINUSMA, a-t-il regretté.  Il a indiqué que le Gouvernement malien espère recevoir bientôt des informations détaillées concernant l’effectif de la Mission, ainsi que le plan prévisionnel de fermeture graduelle des différents services de la MINUSMA.  Il a également affirmé que contrairement à certains passages du rapport d’étape, le Gouvernement du Mali a évalué avec beaucoup de sérénité le retrait de la MINUSMA et élaboré les mesures nécessaires pour faire face à tout éventuel vide sécuritaire qui y serait lié.  Les forces armées maliennes sont prêtes à faire face à toutes les situations, y compris la remise anticipée des camps, comme ce fut le cas le 13 août 2023, a-t-il fait valoir. 

Le représentant s’est félicité de l’exécution de la première phase du retrait de la MINUSMA, au cours de laquelle quatre camps ont été rétrocédés.  Il a regretté les incidents qui ont émaillé le transfert du camp de Ber, au cours duquel des groupes armés terroristes ont engagé des actions hostiles pour empêcher l’occupation du camp par les forces armées maliennes. Cet incident, qui a causé 6 morts dans leurs rangs et la neutralisation d’au moins 72 combattants terroristes, montre la détermination des forces armées maliennes à assumer leurs missions régaliennes de défense du territoire national, a fait valoir le représentant.  Il a ensuite réitéré l’attachement de son gouvernement à la mise en œuvre « intelligente et diligente » de l’Accord pour la paix et la réconciliation, en collaboration avec les mouvements signataires qui le souhaitent.  Il a par ailleurs encouragé la Mission à renforcer les mesures pour veiller à réduire son empreinte environnementale, lui demandant notamment d’évacuer en lieu sûr les conteneurs de sable contaminés laissés à Ber. 

La deuxième phase du transfert des tâche de la MINUSMA à l’État malien, qui commence dès le 1er septembre 2023, doit s’exécuter suivant le chronogramme convenu, a poursuivi le représentant, appelant au strict respect des délais convenus pour le transfert des camps de Tessalit, d’Aguelhok et de Kidal à l’État du Mali.  Il a souligné que le retrait de la MINUSMA ne signifie pas la fin de la coopération entre le Mali et l’ONU, en particulier ses fonds et programmes déjà présents au Mali. Sur le rôle futur des Nations Unies dans le processus de paix au Mali, il a fait savoir que le Président de la transition entend renforcer l’appropriation nationale de ce processus et donner la priorité au dialogue direct inter-malien.  Souhaitant donner une nouvelle chance aux mesures de confiance, le représentant a réitéré la requête du Gouvernement malien de lever le régime de sanctions, conformément à la lettre en date du 15 août 2023 adressée au Président du Conseil de sécurité. 

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