En cours au Siège de l'ONU

9398e séance – matin    
CS/15387

République populaire démocratique de Corée: vives inquiétudes exprimées au Conseil de sécurité sur les violations inacceptables des droits humains

Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme et la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC) ont exprimé de vives inquiétudes, ce matin, au Conseil de sécurité, quant aux graves difficultés économiques et à la répression sévère des droits humains dans ce pays.  Alors que les membres du Conseil n’ont pas caché leurs divergences sur l’opportunité ou non d’examiner la situation des droits humains en RPDC, M. Il Hyeok Kim, jeune représentant de la société civile nord-coréenne, a directement interpellé son gouvernement en affirmant qu’aucune tyrannie ne pourra durer éternellement.  « Nous, Coréens du Nord, avons le droit de choisir une vie pleine de dignité », a-t-il déclaré. 

M. Volker Türk, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a dénoncé la répression croissante des droits à la liberté d’expression, à la vie privée et à la liberté de circulation ainsi que la pratique généralisée du travail forcé en RPDC.  Il s’est inquiété de l’aggravation de la situation des droits économiques et sociaux due notamment à la fermeture des marchés.  Le haut fonctionnaire a examiné le système de régulation des déplacements à l’intérieur du pays dont la violation peut entraîner, sans procès préalable, des peines d’emprisonnement qui sont purgées dans des camps de travail de l’État. 

Depuis la fermeture de la frontière à cause de la COVID-19, une poignée de personnes ont réussi à quitter la RPDC, a signalé M. Türk en informant aussi que Pyongyang a mobilisé de force hommes, femmes et enfants pour travailler dans la construction, les mines et la production agricole, et ce, sans rémunération.  De plus, les marchés et autres activités génératrices de revenus ont été en grande partie fermés limitant ainsi la capacité des gens à subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille.  En conséquence, a déclaré le Haut-Commissaire, de nombreuses personnes sont confrontées à une faim extrême, ainsi qu’à de graves pénuries de médicaments. 

L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a noté, en mars 2023, qu’une grande partie de la population souffre de faibles niveaux de consommation alimentaire et d’une faible diversité alimentaire, avec de plus une famine qui frappe certaines régions du pays.  Or, les offres d’aide humanitaire de l’ONU ont été rejetées et l’équipe de pays des Nations Unies est interdite d’accès en RPDC.  Aujourd’hui, la population nord-coréenne souffre de graves difficultés économiques et d’une répression sévère de ses droits, a résumé le haut fonctionnaire précisant que certains abus qui ont été reconnus par le Gouvernement ont été répertoriés en détail par la Commission d’enquête il y a dix ans. Les responsables de ces violations doivent rendre des comptes, a exigé M. Türk qui a encouragé la Cour pénale internationale (CPI) à agir.  Le Haut-Commissariat continue quant à lui de surveiller et de documenter les violations des droits humains en RPDC.

La Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en RPDC a attesté le fait que les droits humains dans ce pays continuent de se détériorer.  De plus, les marchés informels font l’objet d’une répression accrue, privant un grand nombre de personnes, les femmes au premier chef, de leurs moyens de subsistance et les empêchant d’acheter de la nourriture. Quelque sept décennies après la signature de l’armistice, en 1953, Mme Elizabeth Salmón s’est désolée que le conflit gelé soit utilisé pour justifier la poursuite de la militarisation de la RPDC, avec des effets dévastateurs sur sa population.  La politique militaire « Songun », qui priorise l’allocation des ressources à l’armée, favorise selon elle l’exploitation systématique de la population et la négation de ses droits humains. 

Qui plus est, les sanctions économiques découlant de telles actions ont un impact préjudiciable sur la population, en particulier les femmes et les enfants, a poursuivi la Rapporteuse spéciale, pour qui la communauté internationale doit réexaminer le recours à ces outils.  Elle a en outre dénoncé la torture et le travail forcé ainsi que la violence sexiste auxquels sont soumises les femmes et les filles.  Mme Salmón, suivie par plusieurs délégations, a enfin incité les pays tiers à s’abstenir de tout rapatriement forcé en RPDC, sur la base du principe de non-refoulement et du droit international coutumier.

Les membres du Conseil ont largement dénoncé ces nombreuses violations des droits humains et ont appelé à respecter ces droits et à rendre justice, tout en prônant le dialogue et l’action diplomatique pour rétablir la paix dans la péninsule. 

Les trois qui avaient demandé la tenue de cette séance -l’Albanie, les États-Unis et le Japon- ont justifié l’opportunité d’examiner la situation des droits de l’homme en RPDC par plusieurs arguments.  D’abord, la dernière réunion sur ce sujet remonte à six ans et, depuis lors, la situation des droits humains dans le pays s’est détériorée.  De plus, cette réunion est un message de solidarité pleine et entière envoyé au peuple nord-coréen: « nous ne vous oublions pas, nous ne vous oublierons pas », a déclaré le représentant albanais encourageant le peuple de la RPDC à s’inspirer de l’exemple de l’Albanie qui a investi dans les droits humains, les libertés et l’ouverture sur le monde. Le Japon a quant à lui fait le lien entre les atteintes aux droits humains perpétrées par ce pays et ses ambitions militaires.  La représentante américaine a dénoncé l’inaction inacceptable du Conseil face à « l’un des États le plus totalitaires au monde ».

Au premier rang de ceux qui étaient opposés à la tenue de la réunion figurait la Chine pour qui la question des droits humains en RPDC ne constitue pas une menace à la paix et la sécurité internationales.  La Chine a jugé cet examen « irresponsable », « non constructif » et y a même vu « un abus du mandat du Conseil ».  Le Brésil, la Fédération de Russie et le Ghana ont dit que cette question devrait être traitée par le Conseil des droits de l’homme.  La Russie a relevé que cette réunion, qui n’a rien à voir selon elle avec l’évolution de la situation « sur le terrain », n’était pas inscrite initialement dans le projet de programme de travail proposé par la présidence américaine au début du mois.

Il faut recentrer les efforts internationaux sur la cessation de l’état de conflit actuel et accorder la priorité aux droits humains, a conclu la Rapporteuse spéciale, tandis que le Haut-Commissaire aux droits de l’homme a encouragé le Gouvernement de la RPDC à répondre positivement à son offre d’assistance technique.

LA SITUATION EN RÉPUBLIQUE POPULAIRE DÉMOCRATIQUE DE CORÉE

Déclarations

M. VOLKER TÜRK, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a demandé aux membres du Conseil de sécurité de réfléchir et d’agir à propos de la situation désastreuse des droits humains en République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Des souffrances humaines d’une telle ampleur engendrent une instabilité interne et ont des implications plus larges, a-t-il mis en garde en notant que la RPDC est plus que jamais hermétiquement fermée au monde extérieur à la suite de la politique d’endiguement de la COVID-19, qui s’est prolongée même après la pandémie. M. Türk a fait part d’une répression croissante des droits à la liberté d’expression, à la vie privée et à la liberté de circulation, la pratique généralisée du travail forcé et une aggravation de la situation des droits économiques et sociaux due à la fermeture des marchés et à d’autres formes de création de revenus.  Quiconque soupçonné de propager des informations provenant de l’étranger, en particulier de la République de Corée, risque une peine d’emprisonnement de cinq à quinze ans ou de réclusion à perpétuité, voire de la peine de mort, a fait savoir le Haut-Commissaire. 

Il a indiqué que le Gouvernement de la RPDC a mis en place un système de contrôle de tous les déplacements à l’intérieur du pays et qu’il impose des peines d’emprisonnement pour les contrevenants pouvant aller jusqu’à trois mois, sans procès, des peines purgées dans un camp de travail de l’État. Durant la pandémie, les gardes-frontières ont reçu l’ordre explicite de recourir à la force létale contre les personnes s’approchant de la frontière sans préavis, a-t-il encore raconté.  Il a également signalé que depuis la fermeture de la frontière, une poignée de personnes ont réussi à quitter la RPDC, ajoutant que l’État a mobilisé de force hommes, femmes et enfants pour travailler dans la construction, les mines et la production agricole, et ce sans rémunération. Les travailleurs du pays envoyés à l’extérieur dénoncent des conditions qui s’apparentent à du travail forcé, a encore relaté M. Türk en précisant que la grande partie de leur salaire est confisquée par l’État.  À l’intérieur du pays, les marchés et autres moyens privés permettant de gagner de l’argent ont été en grande partie fermés.  Ces activités sont de plus en plus pénalisées, ce qui limite la capacité des gens à subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. 

De nombreuses personnes sont confrontées à une faim extrême, ainsi qu’à de graves pénuries de médicaments, a déclaré le Haut-Commissaire prenant à témoin l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) qui, en mars 2023, a noté qu’une grande partie de la population souffre de faibles niveaux de consommation alimentaire et d’une faible diversité alimentaire. Selon d’autres sources, la famine frappe certaines régions du pays.  M. Türk a déploré que les offres d’aide humanitaire aient été largement rejetées ou rendues impossibles en raison de la fermeture des frontières.  L’Équipe de pays des Nations Unies est interdite d’accès au pays, de même que presque tous les autres ressortissants étrangers. Aujourd’hui, la population de la RPDC souffre de graves difficultés économiques et d’une répression sévère de ses droits, s’est-il inquiété.  Les violations chroniques des droits humains, dont certaines ont été reconnues par le Gouvernement, ont été répertoriées en détail par la Commission d’enquête il y a dix ans, a-t-il rappelé. 

Le Haut-Commissionnaire a pointé du doigt l’ampleur de la surveillance exercée par le Gouvernement sur ses citoyens, dans le pays comme à l’étranger. Les voisins et les membres de la famille d’un citoyen sont encouragés à la délation, a-t-il noté avant de se référer aux milliers de disparitions forcées qui ont été perpétrées par l’État au cours des soixante-dix dernières années.  À cela s’ajoutent les enlèvements de Japonais.  « Il faut leur rendre justice avant qu’il ne soit trop tard. »  M. Türk a aussi regretté le blocage depuis 2018 du programme de regroupement familial transfrontalier Nord-Sud.  Les responsables de ces abus doivent rendre des comptes, a exigé le Haut-Commissaire qui a encouragé les autres États Membres ou les instances internationales, notamment la Cour pénale internationale (CPI), à agir.  Selon lui, des formes non judiciaires d’obligation de rendre des comptes doivent également être envisagées, notamment la recherche de la vérité, la récupération des restes et les programmes de réparation. Il a assuré que le Haut-Commissariat continue de surveiller et de documenter les violations des droits humains en RPDC et d’explorer les voies pour la reddition de comptes. 

Informant que des milliers de Nord-Coréens risquent actuellement d’être rapatriés contre leur gré dans leur pays d’origine, M. Türk a exhorté les États à s’abstenir de rapatrier de force les Nord-Coréens et à leur fournir les protections et l’aide humanitaire nécessaires.  Pour lui, les violations des droits humains en RPDC ne peuvent être séparées des questions de paix et de sécurité dans la péninsule et dans l’ensemble de la région.  Ces abus et le travail forcé découlent directement de la militarisation croissante de la RPDC ou la soutiennent.  « La communauté internationale doit se préoccuper de l’ampleur des violations des droits humains en RPDC. »  Une paix durable ne peut être construite qu’en faisant progresser les droits de l’homme, la réconciliation, l’inclusion et la justice, a estimé le Haut-Commissaire qui a regretté que la RPDC ait cessé le dialogue. 

Le Haut-Commissaire a encouragé le Gouvernement à répondre positivement à son offre d’assistance technique, faisant remarquer que le prochain examen périodique universel de la RPDC, en novembre 2024, offre une occasion pour l’engagement, le renforcement de la confiance et le progrès.  Le pays doit s’ouvrir au monde, tandis que le retour de l’Équipe de pays des Nations Unies à Pyongyang et la conclusion d’un nouveau cadre de partenariat seront essentiels pour faire progresser les travaux coordonnés visant à remédier aux souffrances de la population de la RPDC. M. Türk a exhorté les autorités à engager un dialogue constructif et à rétablir les libertés indispensables en tant que fondement d’une paix durable.

Mme ELIZABETH SALMÓN, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC), a attiré l’attention des membres du Conseil sur la douleur du peuple de la RPDC, dont les droits humains continuent de se détériorer alors que le pays se trouve dans un état d’isolement sans précédent.  La fermeture prolongée des frontières depuis 2020 entraîne des difficultés additionnelles, a-t-elle relevé avant de parler aussi des marchés informels du pays qui font l’objet d’une répression accrue, privant un grand nombre de personnes, les femmes au premier chef, de leurs moyens de subsistance et les empêchant d’acheter de la nourriture.  Certaines personnes meurent de faim, a dénoncé Mme Salmón, tandis que d’autres succombent d’une combinaison de malnutrition, de maladies et d’un manque d’accès aux soins de santé.  L’accès à la nourriture, aux médicaments et aux soins de santé reste une préoccupation prioritaire du peuple nord-coréen. 

Quelque sept décennies après la signature de l’armistice, en 1953, il n’existe aucun signe visible de rétablissement de la paix, a poursuivi la Rapporteuse spéciale.  Au contraire, le conflit gelé est utilisé pour justifier la poursuite de la militarisation de la RPDC, avec des effets dévastateurs sur sa population.  La politique militaire « Songun », qui priorise l’allocation des ressources à l’armée, favorise selon elle l’exploitation systématique de la population et la négation de ses droits humains.  Les dirigeants de la RPDC continuent d’exiger que leurs citoyens se serrent la ceinture afin que les ressources puissent être attribuées aux programmes nucléaire et balistique, a noté Mme Salmón.  Une situation qui favorise le travail forcé et l’envoi de travailleurs à l’étranger, ainsi que des enlèvements systématiques de citoyens nord-coréens et d’autres ressortissants, provenant notamment de la République de Corée et du Japon.  En retour, les sanctions économiques découlant de telles actions ont un impact préjudiciable sur la population, en particulier les femmes et les enfants, a noté Mme Salmón, pour qui la communauté internationale doit réexaminer le recours et l’impact de ces outils. 

Pendant ce temps, des femmes sont détenues dans des conditions inhumaines et soumises à la torture, au travail forcé et à la violence sexiste par des agents de l’État, a encore rapporté la haute fonctionnaire.  Les femmes évadées qui sont rapatriées de force dans le pays sont soumises à des fouilles corporelles invasives visant à trouver de l’argent caché dans leurs organes génitaux.  La violence sexiste à l’égard des femmes, y compris la violence domestique et la violence sexuelle, est répandue, s’est-elle encore alarmée en faisant remarquer que l’impunité est acceptée.  Devant un tel constat, Mme Salmón a incité les pays tiers à s’abstenir de tout rapatriement forcé en RPDC, sur la base du principe de non-refoulement et du droit international coutumier. 

La Rapporteuse spéciale a encouragé les membres du Conseil de sécurité à envisager la paix « au-delà de l’absence de violence ou de la peur de la violence », en mettant l’accent sur la justice.  Ils doivent soutenir les victimes et les organisations de la société civile dans leurs efforts de responsabilisation judiciaires et non judiciaires.  Les négociations visant à mettre fin à l’état de conflit devraient selon elle inclure des repères clairs concernant les progrès en matière de droits humains. Les sept dernières décennies ont montré que ni le maintien du statu quo ni l’intensification des activités militaires ne constitue une réponse adéquate à la souffrance des habitants de la RPDC ou à la création d’un environnement propice à une paix durable dans la péninsule coréenne.  Nous devons donc recentrer les efforts internationaux sur la cessation de l’état de conflit actuel, a recommandé la Rapporteuse spéciale, en accordant la priorité aux droits humains. 

M. IL HYEOK KIM, un jeune représentant de la société civile, a raconté ses dures conditions de vie dans son village natal, où il a été forcé de travailler dès son plus jeune âge dans des champs.  L’essentiel des céréales était destiné à l’armée, a-t-il relaté.  Plus tard, les restrictions liées à la pandémie ont rendu la vie encore plus difficile pour les habitants déjà confrontés au règne de la terreur.  « Nous avons faim », a-t-il lancé, et le Gouvernement ne met en place aucune politique pour nous venir en aide, a-t-il déploré.  Il transforme notre sang et notre sueur en missiles, alors que le prix de chacun de ces missiles permettrait de nourrir la population pendant trois mois.  Le Gouvernement n’est préoccupé que par le développement de l’arme nucléaire et la propagande qui justifie son action, a-t-il encore accusé.

Nous sommes privés de droits humains, de liberté d’expression et d’état de droit! s’est-il indigné.  Toute personne qui ose exprimer son désaccord est conduite vers un camp de prisonniers politiques, où elle sera soumise au travail forcé jusqu’à ce que mort s’ensuive ou sera simplement exécutée, a poursuivi le jeune homme.  Lorsque ses parents ont quitté la « Corée du Nord » vers la Corée du Sud, a expliqué l’intervenant, sa tante, alors jeune maman, a été arrêtée et torturée pendant plusieurs mois en punition de ne pas les avoir dénoncés..  Il ne peut concevoir et comprendre que sa tante et ses cousins aient pu subir un tel destin, a-t-il ajouté, exhortant les États Membres à continuer à parler de la situation des droits humains dans son pays. 

S’adressant ensuite dans sa langue au Gouvernement de la RPDC, il a assuré qu’aucune tyrannie ne pourra durer éternellement, car « nous, Coréens du Nord, avons le droit de choisir une vie pleine de dignité ».  Alors cessez de commettre de tels crimes contre notre peuple et choisissez la voie de l’humanité, a-t-il lancé en conclusion.

Mme LINDA GREENFIELD-THOMAS (États-Unis) a rappelé que cette année marque le soixante-quinzième anniversaire de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme, une Charte essentielle à laquelle l’immense majorité des membres du Conseil de sécurité ont souscrit, s’engageant de fait à protéger les droits humains dans le monde.  Si le Conseil n’a pas toujours été à la hauteur de cette mission, quelques avancées sont toutefois notables, a-t-elle relevé, avant de citer la résolution adoptée en avril dernier qui condamne les restrictions imposées aux droits des femmes et des filles par le régime taliban et celle de septembre dernier sur le Myanmar, qui appelle les parties à respecter les droits humains. Malgré cela, le Conseil est resté trop souvent muet sur les atteintes aux droits humains perpétrées par la RPDC, « l’un des États les plus totalitaires au monde ».  Cette inaction est inacceptable, a martelé la représentante, justifiant ainsi la tenue de cette séance à la demande de son pays, de l’Albanie et du Japon.  En effet, a-t-elle souligné, la situation des droits humains en RPDC ne s’est guère améliorée depuis la dernière commission d’enquête des Nations Unies et la publication de son rapport il y a une décennie, lequel faisait état d’atteintes contre la population pouvant relever de crimes contre l’humanité. 

Aujourd’hui, en RPDC, plus de 80 000 personnes sont détenues dans des camps de prisonniers politiques et les exécutions sommaires sont légion, a dénoncé la représentante, évoquant également des pratiques de torture, d’utilisation de la faim et de travail et d’avortement forcés.  Le Gouvernement de la RPDC s’est aussi engagée dans des actes de répression transnationaux contre ses propres concitoyens et des ressortissants étrangers, se livrant à des activités à l’étranger, tels que des assassinats, des enlèvements, des rapatriements forcés et des écoutes illégales, parfois avec la complicité de gouvernements étrangers et sans le consentement des pays où ces faits sont commis.  Ce faisant, le « régime autoritaire et totalitaire » de la RPDC bafoue les droits humains et les libertés fondamentales de concitoyens, a fulminé la représentante, rappelant que pendant ce temps des ressources publiques immenses sont consacrées à des programmes d’armes de destruction massive au lieu d’aller au bien-être de la population.  Dans ce contexte, les soi-disant droits mis en place par le Gouvernement de la RPDC sont de la « poudre aux yeux », a-t-elle poursuivi, signalant que les denrées alimentaires promises à la population vont en fait à l’armée et que les fonds alloués sont réservés aux programmes de missiles balistiques. 

Après avoir accusé le régime de la RPDC de violer les dispositions de la résolution 2397 (2019) prévoyant décembre 2019 comme date butoir pour le rapatriement d’individus, la représentante a dit avoir rencontré des transfuges de RPDC qui lui ont raconté leur tentative de fuite et leur souffrance, notamment parce qu’ils sont séparés de leurs proches.  La déléguée a appelé le Conseil à s’exprimer haut et fort contre ces injustices et l’impact de cette situation sur la paix et la sécurité dans le monde. « Nous avons tous nos défauts, mais dans des sociétés ouvertes, les manifestations sont possibles et font progresser la situation des droits, ce qui n’est pas le cas en RPDC. » Dans ce contexte, la représentante a jugé crucial de faire entendre la voix des personnes forcées au silence, misant sur le témoignage de M. Kim pour résonner dans cette enceinte et au-delà. Enfin, elle a jugé malheureux que certains membres du Conseil continuent de protéger le régime de la RPDC alors que des experts et rapporteurs spéciaux des Nations Unies mettent en lumière ses atteintes et exigent que des comptes soient rendus. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a dit que 25 millions de Nord-Coréens vivent dans la tyrannie au quotidien et qu’il n’y a pas ou peu d’espoir à l’horizon. Il a rappelé qu’alors que la dernière réunion du Conseil sur cette question remonte à six ans, la situation des droits humains en RPDC ne s’est pas améliorée, mais au contraire s’est détériorée.  Cette réunion jette la lumière sur les atrocités d’un « régime » qui refuse le pluralisme, a-t-il noté.  Il s’agit d’un message de solidarité pleine et entière envoyé au peuple nord-coréen: « nous ne vous oublions pas, nous ne vous oublierons pas », a déclaré le représentant pour qui cette réunion est aussi une manifestation de sympathie à tous ceux qui ont réussi à échapper aux camps.  Il a demandé de ne pas rapatrier vers la RPDC ceux qui ont fui, en appliquant le principe du non-refoulement. 

Cette réunion est un message pour les enfants qui souffrent de la faim et qui devraient pouvoir grandir, non pas être forcés à regarder des parades militaires. Cette réunion est un message à toutes les femmes et toutes les jeunes filles qui sont privées de nourriture et parfois envoyées dans des camps, a encore souligné le délégué.  Il a dénoncé « un régime qui appelle à la guerre, alimente les conflits et exige toujours plus d’armes, toujours plus de munitions ».  La réunion d’aujourd’hui doit permettre au Conseil de s’ériger contre des politiques qui menacent gravement la paix et la sécurité dans la péninsule coréenne, a expliqué le délégué avant d’exiger que le « régime nord-coréen » soit contraint de rendre compte.  Le délégué a enfin exhorté la RPDC à s’inspirer de l’exemple de l’Albanie qui a investi dans les droits humains, les libertés et l’ouverture sur le monde. Nos pires ennemis se sont avérés nos meilleurs amis, a-t-il conclu. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a appelé à réfléchir à l’impact des violations des droits humains sur la paix et la sécurité de par le monde, s’inquiétant de la situation catastrophique de ces droits qui ne semble pas s’améliorer.

Réitérant sa préoccupation face à cette « situation inacceptable qui n’a pas d’égal dans le monde moderne d’aujourd’hui », le représentant a expliqué la raison de cette stagnation par les politiques illégales menées dans le cadre du développement du programme de missiles et du nucléaire de la RPDC. Pour lui, il y a un lien inextricable entre les atteintes aux droits humains perpétrés par ce pays et ses ambitions militaires.  De plus, a-t-il ajouté, les nombreuses résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale révèlent un autre visage de la « Corée du Nord » qui est l’exploitation de sa population à l’étranger, envoyée hors du pays pour soutenir les programmes balistiques du « régime ».  Pire encore, il a dénoncé « les crimes du régime à l’égard de sa propre population dans le pays », comme en a témoigné le jeune représentant de la société civile devant le Conseil ce jour.

Le représentant a noté que la RPDC avait lancé 70 missiles l’année dernière, « un record », et déjà quatre missiles balistiques cette année, en violation des résolutions du Conseil de sécurité.  La plupart de ces missiles sont capables d’atteindre l’Asie, l’Europe, l’Amérique du Nord, l’Afrique et parfois même l’Amérique du Sud, a-t-il averti, s’inquiétant de la volonté du « régime » de continuer à poursuivre cette activité illégale et dangereuse.

Il a, par ailleurs, soulevé la question préoccupante des enlèvements, notamment de nombreux ressortissants Japonais, dont une fille de 13 ans.  Ces personnes ont été kidnappées par des agents nord-coréens en violation de la souveraineté de son pays, a-t-il souligné en déplorant que cela constitue une menace au bien-être et à la sécurité de ses concitoyens.  Il s’agit d’un risque grave posé à la communauté internationale, a-t-il martelé.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a fait valoir que les atteintes massives et systématiques aux droits humains en RPDC fragilisent la paix et la sécurité régionales et internationales.  Pendant que le « régime nord-coréen » poursuit ses programmes nucléaire et balistiques à un rythme sans précédent, au mépris des résolutions du Conseil, la situation des droits de l’homme dans le pays demeure très préoccupante, a-t-elle relevé.  La déléguée a cité les mauvais traitements généralisés, les arrestations arbitraires et la séparation des familles, qui se poursuivent de façon systématique, de même que les disparitions forcées, notamment en République de Corée et au Japon.  En outre, la population continue de souffrir d’insécurité alimentaire et de conditions sanitaires désastreuses, quelque 20% des enfants nord-coréens accusant un retard de croissance. 

Or, malgré les appels répétés de la communauté internationale, Pyongyang refuse de s’engager avec les différents mécanismes de protection des droits humains de l’ONU, a déploré la représentante.  À cet égard, elle a salué le travail du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et de la Rapporteuse spéciale, lesquels continuent de documenter les violations commises par le « régime » malgré le manque d’accès au pays.  La déléguée a souhaité que la RPDC cesse ces violations, réengage le dialogue avec la communauté internationale et facilite le retour sur son territoire du personnel humanitaire international et des représentations diplomatiques. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) s’est tout d’abord demandé dans quelle mesure la situation des droits humains dans un pays devrait être observée exclusivement au sein du Conseil des droits de l’homme, alors que le pays en question décide de ne pas se conformer aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité ou de l’Assemblée générale.  Il a ensuite rappelé que, par la résolution 77/226 adoptée le 15 décembre dernier, l’Assemblée générale a condamné la RPDC pour avoir consacré ses ressources à la mise au point d’armes nucléaires et de missiles balistiques au lieu d’assurer le bien-être de son peuple.  Le représentant a en outre rappelé que le Conseil de sécurité a lui-même abordé la question par le biais de ses résolutions 2321 (2016) et 2371, 2375 et 2397 (2017), insistant sur la nécessité pour la RPDC de respecter et d’assurer le bien-être et la dignité intrinsèque des personnes.  À ses yeux, la détérioration continue de la situation du peuple de la RPDC contraste avec la course aux armements et le programme nucléaire qui, à eux seuls, exacerbent les tensions dans la péninsule coréenne et dans le monde. 

À cette aune, le représentant a demandé instamment à Pyongyang de cesser ses violations des droits humains et de mettre fin à ses programmes d’armes de destruction massive et de missiles balistiques de manière complète, vérifiable et irréversible.  Il a également exhorté la RPDC à résoudre le problème des personnes enlevées, en particulier les ressortissants japonais et coréens.  Considérant enfin que les conclusions de la commission d’enquête sur la situation des droits de l’homme en RPDC, créée il y a 10 ans, sont toujours valides, il a jugé nécessaire que le Conseil continue de les examiner en vue de prendre des décisions qui garantissent la responsabilité et favorisent la paix et la stabilité dans la région et dans le monde. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a estimé que la commémoration du soixante-dixième anniversaire de l’armistice coréen devrait être l’occasion de favoriser la paix et de promouvoir la réconciliation: « Assurer le regroupement des familles séparées est un moyen de renforcer la confiance entre le peuple coréen et peut également jouer un rôle important dans la promotion de la réconciliation, de la paix et de la stabilité dans la péninsule coréenne et dans la région en général », a-t-il suggéré.  Aussi a-t-il appelé Pyongyang à remettre en liberté et à renvoyer les 17 ressortissants japonais officiellement reconnus par le Gouvernement du Japon comme ayant été enlevés par la RPDC.  Bien que préoccupé par la situation des droits humain en RPDC, le délégué s’est dit fermement convaincu que ces questions devraient être traitées par les organes compétents de l’ONU chargés, à l’exception étroite et limitée des cas où la violation généralisée des droits aggrave une situation de conflit en cours et où les autorités de l’État sont soit incapables, soit réticentes à traiter la question.

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a encouragé à la reprise d’une coopération entre la RPDC et les mécanismes des droits humains de l’ONU, avant de faire observer que 40% de la population du pays souffre de malnutrition aiguë. 

Faisant remarquer qu’à partir du moment où les organisations humanitaires opèrent dans le respect des principes d’impartialité et de neutralité, la déléguée a donc estimé que celles-ci peuvent contribuer à l’amélioration des conditions de vie des populations civiles.  C’est pourquoi elle a dit espérer que ces organisations pourront revenir en RPDC apporter de l’aide aux nécessiteux.  Pour finir, elle a exhorté Pyongyang à accorder la priorité à la sécurité de sa population et à orienter ses ressources limitées de manière appropriée et ce, afin de garantir la sécurité alimentaire de ses habitants et de répondre à ses besoins de développement.  Il est donc nécessaire de sortir de ce cycle d’escalade par le biais d’un dialogue constructif et d’une diplomatie discrète sans provocation, loin de toute rhétorique provocatrice, a ajouté la représentante en conclusion.

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a estimé que la réunion d’aujourd’hui tombe à point nommé alors que les violations graves et systématiques des droits humains se poursuivent en RPDC, et pourraient constituer des crimes contre l’humanité.  Les ressources allouées aux programmes militaires et nucléaire font cruellement défaut pour répondre aux besoins de la population, qui continue d’être confrontée à une insécurité alimentaire aiguë.  Une situation encore aggravée du fait de l’isolement accru du pays à la suite de la pandémie.  Torture, détentions arbitraires, disparitions forcées, répression de la liberté d’expression et de réunion: la liste des violations graves et systématiques des droits humains est longue en RPDC, a fait observer le représentant.  Il a appelé les autorités de ce pays à mettre un terme immédiat à ces violations et à respecter ses obligations au titre du droit international des droits de l’homme. 

La situation des femmes et de filles nord-coréennes est également préoccupante, a relevé le délégué, en demandant une protection efficace des victimes de violences sexuelles et sexistes, ainsi qu’une politique de prévention.  Seules la justice et la responsabilité peuvent empêcher la répétition de telles violations.  Il a ainsi proposé que le Conseil examine les moyens à sa disposition pour veiller à ce qu’elles ne demeurent pas impunies.  Selon lui, le Gouvernement de la RPDC devrait permettre l’accès à son territoire au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et à la Rapporteuse spéciale.

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a rappelé que, dès sa création, l’ONU a inscrit dans sa Charte la foi collective dans les droits humains fondamentaux. Sur cette base le représentant s’est dit convaincu que la protection des droits humains est de la prime importance pour la paix et la sécurité internationales.  De plus, a-t-il poursuivi, le mandat du Conseil des droits de l’homme engage ce dernier à contribuer, par le biais du dialogue et de la coopération, à la prévention des atteintes aux droits humains et de prévoir une réponse rapide en cas d’urgence.  À la veille du soixante-quinzième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, il a appelé au respect intégral des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de tous les instruments des Nations Unies ayant trait à la protection des droit humains. 

Jugeant que la situation dans la péninsule coréenne mérite toute l’attention du Conseil, le délégué a appelé à des mesures constructives pour mettre fin aux tensions actuelles.  Il est selon lui impératif de jeter des passerelles de dialogue et de confiance mutuelle, afin de relancer le processus de paix.  Dans cet esprit, il a assuré que son pays soutient tous les efforts du Conseil et de l’ONU visant à promouvoir et préserver la paix et la sécurité dans la région, ajoutant que les efforts des membres du Conseil devraient se concentrer sur l’établissement du dialogue par le biais d’actions diplomatiques. 

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a rappelé la position de son pays, qui a toujours été que les débats sur les questions relatives aux droits humains devraient avoir lieu dans les enceintes appropriées, comme c’est le cas du Conseil des droits de l’homme, par exemple.  Reconnaissant que l’article 2 prévoit que la présidence peut convoquer une réunion à la demande de tout membre, le représentant a cependant souligné que l’objet de cette réunion doit relever du mandat du Conseil.

Le Brésil reste préoccupé par les informations persistantes faisant état de violations systématiques des droits humains en RPDC et a participé à des discussions à ce sujet au sein des organes compétents de l’ONU, a-t-il poursuivi. Nous avons également attiré l’attention sur la grave situation humanitaire à laquelle est confrontée la population civile du pays, a précisé le délégué, qui s’est dit tout aussi troublé par les conclusions du Groupe d’experts selon lesquelles le régime de sanctions a eu des effets imprévus sur la crise humanitaire.  Plaidant pour la reprise d’un dialogue, le délégué a ajouté que « l’isolement n’aide pas le peuple de la RPDC, pas plus qu’il ne nous rapproche de notre objectif d’une péninsule coréenne pacifique, stable et exempte d’armes nucléaires ».

M. GENG SHUANG (Chine) a dit être opposé à l’examen par le Conseil de sécurité de la question des droits humains en RPDC, arguant qu’elle ne constitue pas une menace pour la paix et la sécurité internationales.  Le Conseil devrait se consacrer à une situation internationale marquée par toutes sortes de troubles, crises, défis et par l’instabilité et l’incertitude, a-t-il fait valoir.  En cette période complexe, le Conseil devrait jouer un rôle constructif pour permettre la reprise des discussions et pour alléger les tensions, a exhorté le représentant refusant que le Conseil se penche sur la situation des droits humains en RPDC.  À son avis, cela n’aidera pas à améliorer la situation mais risque au contraire d’entraîner une escalade. 

Pour le délégué, cet examen est « irresponsable », « non constructif » et constitue un « abus du mandat du Conseil ». Si l’on se préoccupe vraiment de la paix, de la stabilité dans la région, de la situation de la population en RPDC, alors il faut un ajustement des sanctions contre le pays, notamment dans le domaine des moyens de subsistance, a-t-il recommandé.  Il a ainsi insisté pour que soient levées et allégées les mesures coercitives unilatérales qui viennent détériorer la situation des droits humains dans le pays.  De l’avis du représentant, le fait de s’intéresser autant aux droits humains dans la péninsule dans le cadre du Conseil est une tentative d’exercer des pressions sur le pays.  Cela ne résoudra pas les problèmes et ne fera que causer du tort, a-t-il tranché.  Le représentant a préconisé plutôt de répondre aux préoccupations raisonnables de la RPDC et de créer des conditions qui permettront la reprise des pourparlers. 

Mme FRANCESCA GATT (Malte) a déclaré que les violations des droits humains qui persistent en RPDC sont inextricablement liées aux menaces que fait peser ce pays sur la paix et la sécurité internationales.  Elle a exhorté Pyongyang à respecter ses obligations internationales en vertu des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et à renoncer, de manière vérifiable et irréversible, à ses programmes nucléaire et balistique.  Simultanément, la situation humanitaire reste désastreuse dans le pays, avec de graves niveaux d’insécurité alimentaire et de malnutrition chronique affectant particulièrement les enfants.  Les autorités nord-coréennes doivent permettre aux organisations humanitaires internationales d’apporter une assistance rapide et sans entrave aux groupes vulnérables, y compris les prisonniers.  La représentante a en outre déploré l’utilisation de la nourriture comme méthode de contrôle de l’État, avec le détournement de ressources critiques vers des objectifs militaires.  De même, les arrestations arbitraires, les détentions et les disparitions forcées se poursuivent au moyen de l’utilisation massive des centres de détention par le régime. La déléguée s’est particulièrement inquiétée de la traite des femmes et des filles par le Gouvernement nord-coréen, ainsi que de l’exploitation des enfants. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) s’est élevé en premier lieu contre la nouvelle « tentative éhontée » des membres occidentaux du Conseil de sécurité et de la présidence américaine elle-même d’utiliser le Conseil pour faire avancer leur « agenda politisé ».  Cette réunion n’a rien à voir avec l’évolution de la situation « sur le terrain » et n’était pas inscrite initialement dans le projet de programme de travail proposé par la présidence américaine au début du mois, a-t-il fait valoir, dénonçant une « provocation préparée à l’avance », comme l’atteste selon lui la note conceptuelle qu’ont fait circuler l’Albanie, les États-Unis et le Japon, laquelle était destinée à centrer la discussion sur la situation des droits humains en RPDC dans le contexte des questions de paix et de sécurité internationales.  Ce type de note n’est normalement distribuée par la présidence du Conseil que dans le cadre des événements clefs qu’elle organise, a relevé le représentant, avant d’interroger la Présidente du Conseil sur la vraie nature de cette séance.  « De telles actions de votre part ne sont rien d’autre qu’une violation flagrante de la pratique établie du travail du Conseil », a-t-il tancé, rappelant que la question des droits humains ne relève pas du mandat du Conseil de sécurité et qu’elle est débattue dans des enceintes spécialisées, principalement au sein du Conseil des droits de l’homme et de la Troisième Commission de l’Assemblée générale. 

Qualifiant d’ « absolument artificiel » le lien entre les droits humains et les menaces à la paix et à la sécurité internationales promu par les initiateurs de la réunion d’aujourd’hui, le représentant a estimé que la convocation de cette séance n’est qu’une tentative cynique des États-Unis et de leurs alliés de détourner l’attention de « l’escalade imprudente » de Washington et de ses alliés dans la région.  Ce sont eux qui constituent une véritable menace pour la paix et la sécurité internationales, a-t-il lancé, ajoutant que les États-Unis, le Japon et la République de Corée, dans le cadre du concept de soi-disant « dissuasion étendue », accroissent leur activité militaire dans la région, avec des exercices massifs et la montée en puissance de la coopération dans le domaine militaire.  Il a ainsi fait état de l’apparition récente d’un sous-marin nucléaire américain au large de la péninsule coréenne et de manœuvres aériennes américano-sud-coréennes, outre des projets de déplacement d’une partie de l’infrastructure militaire de l’OTAN dans la région. 

La Russie s’oppose systématiquement à toute activité militaire mettant en danger la sécurité de la péninsule coréenne et des pays de l’Asie du Nord-Est, a souligné le représentant, pour qui ces actions dangereuses vont à l’encontre de la réduction des tensions autour de la péninsule et de la recherche d’un règlement politico-diplomatique de la situation.  Selon lui, cela montre clairement qu’il est impossible de résoudre les problèmes existants autrement que par le dialogue et des actions constructives, en tenant compte des préoccupations légitimes de tous les États concernés, y compris de la RPDC.  De fait, s’abstenir d’actions provocatrices et revenir à la table des négociations est le seul moyen possible de résoudre les problèmes émergents, a-t-il insisté, avant d’attirer à nouveau l’attention du Conseil sur le plan d’action sino-russe pour le règlement global de la situation dans la péninsule coréenne. 

Enfin, le représentant a dénoncé « l’hypocrisie flagrante » des États-Unis et de leurs alliés, qui, tout en parlant des droits humains en RPDC, continuent d’étrangler le peuple nord-coréen avec des sanctions unilatérales inhumaines.  L’absence de réaction sur les souffrances engendrées par ces sanctions démontre l’inanité du débat d’aujourd’hui, dont le seul but est de servir le « deux poids, deux mesures » occidental, a-t-il conclu.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a accusé les autorités de la RPDC de détourner les ressources existantes des besoins économiques fondamentaux de son peuple et ce, afin de financer leur programme illégal d’armes nucléaire et balistiques.  « Ces armes illégales sont financées par le travail forcé, souvent dans des conditions relevant de l’esclavage moderne.  « J’exhorte tous les États Membres de l’ONU, en particulier la RPDC, à mettre pleinement en œuvre la résolution 2397 du Conseil, y compris les dispositions relatives aux travailleurs étrangers, pour mettre fin à cette exploitation », a déclaré le représentant.  Il a également reconnu et condamné les rapatriements forcés, les enlèvements parrainés par l’État et les disparitions forcées.  Il a rappelé à la RPDC que les restrictions liées au COVID-19 doivent être proportionnées et ne pas être utilisées comme un moyen de limiter davantage la liberté de ses citoyens ou la capacité de la communauté internationale à dialoguer avec les autorités de Pyongyang.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a fait valoir que la question des droits humains en RPDC doit être abordée au sein du Conseil des droits de l’homme et de la Troisième Commission de l’Assemblée générale.  Il est cependant nécessaire selon lui de parvenir à un règlement de la situation militaire dans ce pays par les canaux diplomatiques.  Depuis plusieurs mois, le représentant a noté un durcissement et une radicalisation des positions des parties qui se traduisent par une escalade des dissuasions militaires sans précédent, marquée par des tirs de missiles inquiétants.  Ce climat de fortes tensions constitue à ses yeux une menace pour la péninsule coréenne comme pour la paix et la sécurité internationales.  Dans ce contexte, il a appelé les parties à rejeter la « diplomatie des missiles » pour privilégier le dialogue et la négociation, sur la base du droit international, afin de mettre fin à la menace qui pèse sur la région. 

Reprenant la parole, M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a rappelé que son gouvernement n’autorise pas l’entrée d’arme nucléaire sur son territoire et qu’il condamne la possession de ce type d’armement.  Cette politique reste inchangée. 

M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a rappelé qu’au début de cette année, 61 États membres de l’ONU et de l’Union européenne, soit le double du nombre de l’année précédente, ont demandé au Conseil de sécurité de rester saisi de la situation des droits humains en RPDC, dans le but d’organiser une réunion publique sur cette question.  Exprimant la reconnaissance de son gouvernement pour la tenue de cette séance après plus de cinq ans d’attente, il a reconnu la « tâche immense » qui lui incombe pour informer le monde de la sombre réalité à laquelle sont confrontés 25 millions de Nord-Coréens, à savoir des violations systématiques, généralisées et flagrantes des droits humains, « équivalant à des crimes contre l’humanité ».  La RPDC, a-t-il signalé, est un exemple de système totalitaire contrôlant quotidiennement les activités physiques, mentales et intellectuelles de l’ensemble de sa population, ainsi que l’avait décrit le « rapport historique » publié en 2014 par la Commission d’enquête sur les droits de l’homme en RPDC, lequel recommandait de renvoyer la situation des droits de l’homme en RPDC à la Cour pénale internationale (CPI) et demandait également que le Conseil adopte des sanctions ciblées contre les principaux responsables de crimes contre l’humanité.

Hélas, a poursuivi le représentant, depuis sa dernière réunion en 2017, le Conseil n’a pas pu se réunir publiquement pour aborder les droits humains en RPDC alors que la situation reste désespérée, sans aucun signe d’amélioration.  En outre, les graves difficultés économiques et les pénuries alimentaires associées ont été exacerbées par l’isolement auto-imposé du régime de la RPDC pendant la pandémie et par une nouvelle politique de distorsion du marché adoptée l’an dernier interdisant les transactions privées de céréales.  Dans le même temps, a-t-il rappelé, la RPDC s’est engagée ces dix-huit derniers mois dans une escalade de ses programmes d’armes de destruction massive, y compris le lancement de 12 missiles balistiques intercontinentaux, gaspillant ainsi ses maigres ressources au lieu de remédier à ses graves pénuries alimentaires.  Considérant que les violations des droits humains par la RPDC ne constituent pas seulement un problème pour le peuple de la RPDC, mais aussi un problème de sécurité nationale pour la République de Corée, il a vu dans la création par Pyongyang d’un arsenal nucléaire et le contrôle totalitaire qu’il impose à son propre peuple la volonté de perpétuer le règne de son « étrange régime dynastique ».  Par conséquent, faute de nous attaquer à la situation des droits humains, nous ne pouvons pas non plus espérer résoudre la question nucléaire, a-t-il fait valoir, appelant le Conseil à adopter une approche holistique des questions relatives à la RPDC. 

Après avoir relevé qu’environ 100 000 personnes sont encore détenues dans des prisons politiques en RPDC et que le régime applique également un système punissant les citoyens pour des infractions prétendument commises par des membres de leur famille, le représentant a aussi rappelé que Pyongyang commet des violations des droits humains au-delà de son territoire. Il a ainsi évoqué l’enlèvement de 12 ressortissants japonais ainsi que celui de quelque 100 000 civils coréens pendant la guerre de Corée.  De plus, 516 autres personnes ont été enlevées après la guerre et environ 500 prisonniers de guerre survivants ont été détenus en RPDC depuis 1953.  Il a d’autre part dénoncé l’adoption d’une série de lois très oppressives, notamment celles sur le « rejet de l’idéologie et de la culture réactionnaires » en 2020, sur la « garantie de l’éducation des jeunes » en 2021 et sur la « protection de la langue culturelle de Pyongyang » en 2023.  Du fait de cette législation, le simple fait de regarder ou de partager des séries télévisées ou des films sud-coréens est désormais passible de la peine de mort en RPDC, s’est-il ému, y voyant l’une des causes de la fuite de Nord-Coréens, principalement vers la Chine, malgré les ordres donnés de tirer pour tuer à vue. À cet égard, le délégué s’est dit préoccupé par la question des transfuges de la RPDC détenus dans des pays tiers, rappelant aux États Membres que le principe de non-refoulement doit être respecté. 

Dans ce contexte, le représentant a appelé les membres du Conseil à ne pas fermer les yeux sur cette réalité et de cesser de faire croire qu’en discuter risquerait de politiser les droits humains.  « En fait, c’est le régime de la RPDC qui utilise les violations des droits humains comme moyen essentiel de gouvernance pour atteindre ses objectifs politiques », a-t-il martelé, estimant que la négligence du Conseil pourrait mettre davantage en danger la paix et la sécurité internationales.  Rappelant enfin que la République de Corée reste le pays le plus touché par les violations des droits humains de la RPDC et ses attaques violentes, il a assuré que, lors de son prochain mandat au Conseil, son pays continuera de tout mettre en œuvre pour améliorer la situation en RPDC, tant en matière de droits humains que de non-prolifération, en s’appuyant sur l’élan de la réunion d’aujourd’hui. 

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