9371e séance - matin
CS/15348

Syrie: deux projets de résolution visant à proroger l’autorisation du mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière rejetés au Conseil de sécurité

Deux projets de résolution visant à proroger l’autorisation du mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière en Syrie, présentés respectivement par la Suisse et le Brésil et par la Fédération de Russie, ont été successivement rejetés aujourd’hui au Conseil de sécurité, au lendemain de l’expiration de cette autorisation.  La Fédération de Russie a mis son veto au premier texte, avant que le sien ne recueille que deux voix en sa faveur. 

L’autorisation du mécanisme établi initialement par la résolution 2165 (2014), qui permet d’acheminer de l’aide humanitaire depuis la Türkiye par le point de passage de Bab el-Haoua sans l’autorisation du Gouvernement syrien, a expiré le 10 juillet à minuit. Le Conseil devait initialement se prononcer sur sa reconduction le 7 juillet. La date avait été ensuite reportée au 10 pour tenter de trouver un compromis satisfaisant tous les membres du Conseil. 

Mais c’est sur deux textes alternatifs que les membres du Conseil ont été appelés à se prononcer.  Le premier a été présenté par le Brésil au nom des deux co-porte-plumes humanitaires sur la Syrie. Il visait à reconduire l’autorisation de passage transfrontière « pour une période de neuf mois, à savoir jusqu’au 10 avril 2024, concernant uniquement le point de passage de Bab el-Haoua ».  En outre, le projet de résolution préconisait « un élargissement des activités humanitaires en République arabe syrienne », citant à cet égard « les projets de relèvement rapide relatifs à l’eau, à l’assainissement, à la santé, à l’éducation, à l’électricité, là où c’est essentiel pour rétablir l’accès aux services de base, à la lutte antimines humanitaire et aux abris ».  Le texte demandait en outre à toutes les parties concernées de « permettre l’acheminement de l’aide humanitaire à travers les lignes de front dans toutes les régions du pays ». 

En présentant le texte, le Brésil a précisé qu’il s’agissait d’un texte de compromis, expliquant que les acteurs humanitaires de terrain avaient demandé une prorogation de l’autorisation pour un an. Il l’a qualifié de « compromis équilibré » tenant compte des différentes demandes exprimées au sein du Conseil. Au nom de cet équilibre, le Japon a apporté au texte le soutien des 10 membres élus du Conseil, après avoir salué les efforts considérables déployés par les coauteurs pour rédiger un texte qui « reflète les préoccupations légitimes des délégations et répond aux besoins humanitaires urgents du peuple syrien ». Quatre millions de personnes vivant dans le nord-ouest de la Syrie ont le plus grand besoin de cette bouée de sauvetage cruciale, surtout après les tremblements de terre dévastateurs de février dernier, a-t-il rappelé.  Les 10 membres élus ont en outre salué les efforts des trois membres africains du Conseil, qui se sont exprimés séparément par la voix du Mozambique et des Émirats arabes unis. Comme les États-Unis, les 10 membres élus ont fait savoir qu’ils auraient préféré une autorisation de mandat plus longue, mais ont reconnu l’utilité de maintenir la position unifiée du Conseil, parlant d’« effort diplomatique collectif ». 

Au contraire, la Fédération de Russie, après avoir voté contre le texte, a affirmé que les pays occidentaux n’avaient en fait cherché qu’à la pousser à recourir à son droit de veto. Qualifiant le mécanisme d’anachronisme et de violation de l’intégrité territoriale de la Syrie, elle a affirmé que la fermeture du point de passage de Bab el-Haoua ne signifierait pas un effondrement de l’aide car le Gouvernement syrien a ouvert deux points de passage supplémentaires à la suite du séisme du 6 février. 

Le vote négatif de la Fédération de Russie face à 13 voix en faveur du texte, alors que la Chine s’abstenait, a été très vivement critiqué.  La Suisse s’est dite « très déçue » de ce veto, tout en assurant qu’il n’empêcherait pas de trouver une solution.  Le Conseil de sécurité a la responsabilité de renouveler le mandat du mécanisme d’aide transfrontière, et nous veillerons à ce que nous nous acquittions de cette responsabilité, a-t-elle affirmé. 

Mais les critiques les plus virulentes sont venues des pays occidentaux, en particulier des États-Unis, qui, après avoir parlé d’un « instant triste » pour tout le peuple syrien et pour le Conseil, ont dénoncé un « geste de cruauté » de la part de la Fédération de Russie, également qualifié « d’affront » aux efforts du Conseil.  Il n’existe pas d’argument moral à s’opposer à cette résolution, a déclaré le Royaume-Uni, qui a rappelé que le Secrétaire général avait demandé une prorogation de l’autorisation pour un an et a reproché à la Fédération de Russie de prendre en otage l’aide humanitaire.  La France a en outre rappelé que l’aide humanitaire à la Syrie étaient financée à 90% par l’Union européenne et ses États membres, les États-Unis, le Canada et le Japon, alors que la Russie n’en fournissait « quasiment aucune ».    

Les trois membres occidentaux permanents du Conseil ont ensuite voté contre le projet alternatif présenté par la Fédération de Russie, que seule la Chine a soutenu tandis que les 10 membres élus du Conseil s’abstenaient.  Outre une autorisation limitée à six mois, le texte russe mettait l’accent sur le passage de l’aide à travers les lignes de front en soulignant qu’il « est impératif de maintenir un accès durable et sans entrave à travers celles-ci et entre Damas et toutes les régions » de la Syrie.  Rappelant en outre que les activités humanitaires ne se limitent pas à satisfaire les besoins immédiats de la population touchée et doivent comprendre une aide à des services essentiels au moyen de projets de relèvement rapide « et de développement durable », le texte demandait « d’intensifier davantage » les initiatives en ce sens .  Enfin, il demandait au Secrétaire général de présenter au Conseil avant le 10 décembre « un rapport spécial sur l’impact des sanctions unilatérales sur la situation humanitaire » en Syrie. 

Commentant le double rejet, la Chine l’a regretté et a dit souhaiter le maintien du mécanisme transfrontière, ou en appelant le Conseil à prendre en compte les « incohérences » du système actuel et à y remédier en élargissant le domaine des activités humanitaires.  Les États-Unis avaient annoncé avant même le vote qu’en cas de rejet, ils reviendraient sur la question lors de leur présidence du Conseil en août.  La Fédération de Russie a, elle, affirmé qu’elle n’accepterait aucune prorogation du mécanisme, pour aucune durée, si le Conseil de sécurité n’appuyait pas son propre texte.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Explications de vote avant le vote 

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) au nom de son pays et de la Suisse, a présenté le projet de résolution des deux co-porte-plumes humanitaires sur le dossier syrien, en insistant en particulier sur l’écoute des acteurs humanitaires sur le terrain, lesquels, a-t-il indiqué, ont demandé une prorogation d’un an de l’autorisation du mécanisme d’aide transfrontière. 

Toutefois, la prorogation demandée dans le projet de résolution court pour neuf mois, a fait observer le représentant, expliquant que ce texte tenait compte des différentes demandes exprimées.  Il a qualifié le projet soumis au vote de « compromis équilibré ».  Son adoption montrera l’unité du Conseil sur les questions portant sur les besoins humanitaires en général et en faveur des Syriens en particulier, a-t-il conclu.

Mme SHINO MITSUKO (Japon), qui s’exprimait au nom des 10 membres élus du Conseil de sécurité, a salué les efforts considérables déployés par les coauteurs, le Brésil et la Suisse, pour rédiger un texte équilibré qui « reflète les préoccupations légitimes des délégations et répond aux besoins humanitaires urgents du peuple syrien ».  La représentante a rappelé que le projet de résolution sur la prorogation du mécanisme d’aide transfrontalière garantissait une assistance ininterrompue à 4 millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie, qui, surtout après les tremblements de terre dévastateurs de février, avaient le plus grand besoin de cette bouée de sauvetage cruciale. 

Saluant les efforts de toutes les délégations, notamment des trois membres africains du Conseil -les A3- et des Émirats arabes unis pour leurs propositions constructives, la représentante a affirmé que l’extension de neuf mois proposée dans le projet de résolution offre aux organisations humanitaires une meilleure prévisibilité sous le contrôle strict de l’ONU.  Elle a estimé que le texte reflétait également les questions soulevées par les membres du Conseil et le pays concerné, telles que le financement de l’aide, l’action contre les mines, les livraisons transfrontalières dans toutes les régions de la Syrie et la création de conditions propices à des retours sûrs, volontaires, informés et dignes des personnes déplacées et réfugiées.  Ajoutant que les 10 membres élus auraient préféré une autorisation de mandat plus longue, elle a reconnu l’utilité de maintenir la position unifiée du Conseil et demandé instamment à tous ses membres de voter en faveur du projet de résolution présenté, qui représente un « effort diplomatique collectif ».

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique), s’exprimant au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a dit avoir œuvré tout au long des négociations du projet de résolution sur le mécanisme d’aide transfrontalière à la Syrie en faveur d’un texte équilibré et acceptable par tous les membres du Conseil de sécurité.  Il a regretté que le Conseil soit néanmoins saisi aujourd’hui de deux projets de résolution sur cette question, ayant espéré une résolution consensuelle.  Il a annoncé que les A3 voteraient en faveur du projet de résolution présenté par le Brésil et la Suisse, « qui est orienté par la défense de l’intérêt supérieur du peuple syrien ».  Les A3 se sont engagés à continuer à jouer un rôle constructif pour aider le Conseil à parvenir au consensus sur cette question, a conclu le représentant.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a estimé que le vote à venir serait « lourd de sens ».  Il doit permettre de proroger le mandat d’aide humanitaire.  Si l’un ou l’autre des membres du Conseil ne vote pas en faveur de cette résolution, cela interrompra une ligne de vie critique pour le peuple syrien, a averti la représentante, qui a jugé « inenvisageable » que le flux humanitaire s’arrête au poste frontière de Bab el-Haoua .  Les enjeux de ce vote sont une question de vie ou de mort, a-t-elle insisté.  Si le Conseil ne renouvelle pas le mécanisme d’aide humanitaire, le message que le Conseil enverra est qu’il est prêt à accepter la souffrance et des pertes de vie supplémentaires. 

Ce vote ne devrait pas être controversé, a poursuivi la représentante. Ce mécanisme permet à l’aide de venir à des millions de Syriens par mois.  C’est le mécanisme le plus utile et le plus attendu dans le monde, alors que la situation en Syrie n’a jamais été aussi grave.  Douze années de guerre et le séisme de février dernier ont poussé les Syriens à bout.  Les États-Unis sont les plus grands bailleurs de fonds dans la région, a ajouté la représentante, qui a appelé les autres bailleurs à emboîter le pas de son pays. 

Pour la représentante, l’appel de Damas à utiliser aussi les deux passages frontaliers ouverts à l’initiative du Gouvernement syrien après le séisme n’offre pas de garantie suffisante.  Le régime de Damas a fait des promesses, mais s’il ne les tient pas, les États-Unis présenteront de nouveau la question au Conseil lors de leur présidence, au mois d’août, a-t-elle promis. 

Le projet de résolution présenté ne suffit pas par rapport à la demande humanitaire et aux besoins sur le terrain, a encore déclaré la représentante, qui a rappelé que le Secrétaire général avait proposé une prorogation de douze mois du mécanisme transfrontalier.  Cette résolution ne suffira pas à satisfaire pleinement les besoins d’aujourd’hui, a insisté la représentante, pour qui il n’existe toutefois aucune justification pour voter contre le texte.  Les États-Unis voteront donc pour cette résolution et exhortent tous les membres du Conseil de sécurité à faire de même, a-t-elle conclu. 

Vote sur le projet de résolution présenté par la Suisse et le Brésil

Le projet de résolution obtient 13 voix en sa faveur, une voix contre (Fédération de Russie) et une abstention (Chine).  En raison du vote négatif d’un membre permanent du Conseil, le projet est rejeté.

Explications de vote après le vote 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) s’est dite « très déçue » que le Conseil de sécurité n’ait pas adopté le projet de résolution coprésenté par son pays et le Brésil.  Au cours des dernières semaines, nous avons discuté avec les membres du Conseil et les partenaires de la région en ne ménageant aucun effort pour parvenir à un terrain d’entente, a déclaré la représentante.  Nous avons dialogué de bonne foi afin que des millions de personnes dans le besoin puissent bénéficier de l’aide humanitaire dont elles ont besoin pour survivre, a-t-elle expliqué.  Un mandat de douze mois permettrait aux acteurs humanitaires de disposer de la prévisibilité nécessaire à la planification de leurs opérations, a noté la représentante, en ajoutant qu’un compromis supplémentaire pour une période de neuf mois inclurait les durs mois d’hiver.  Elle a regretté que cette solution ait été rejetée au moyen du veto, lequel, a-t-elle assuré, ne nous empêchera pas de trouver une solution à cette question. Le Conseil de sécurité a la responsabilité de renouveler le mandat du mécanisme d’aide transfrontière, et nous veillerons à ce que nous nous acquittions de cette responsabilité, a-t-elle conclu.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a parlé d’un « instant triste » pour tout le peuple syrien et pour le Conseil, « à l’exception d’un seul de ses membres ».  La représentante a parlé d’un « geste de cruauté » de la part de la Fédération de Russie, demandant pourquoi celle-ci ne s’était pas acquittée de sa responsabilité en tant que membre permanent du Conseil.  Elle a vu dans le veto russe « un affront » aux efforts du Conseil.  Le texte présenté était déjà une solution de compromis, a-t-elle rappelé, ajoutant qu’il représentait « le strict minimum que nous pouvions accepter ».  Les États-Unis ont appuyé ce texte dans un esprit de compromis, ce que la Russie « n’est même pas capable de faire », a-t-elle ajouté.  La représentante a conclu en rappelant que la question devrait désormais être présentée devant l’Assemblée générale et qu’il faudrait poursuivre les efforts. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a profondément regretté que le Conseil n’ait pu adopter le projet de résolution et s’est dite très déçue par l’utilisation du droit de veto aujourd’hui, privant ainsi d’aide humanitaire plus de 4 millions de personnes dans le besoin.  Évoquant la violence, l’aggravation des conditions socioéconomiques, l’épidémie de choléra et les tremblements de terre du 6 février dernier, la représentante a déploré la dégradation de la situation humanitaire.  Estimant que les besoins des Syriens n’avaient jamais été aussi grands depuis le début du conflit, elle a affirmé que l’utilisation du droit de veto allait entraîner une perturbation majeure des activités humanitaires en Syrie et traduisait « le mépris le plus total des souffrances du peuple syrien ».

M. FERIT HOXHA (Albanie) a regretté le résultat du vote sur le projet de résolution, parlant « de l’une des journées les plus tristes aux Nations Unies » et s’inquiétant du sort de « millions de Syriens dans le besoin » qui attendent pourtant cette aide humanitaire au cours des douze prochains mois.  Il a signalé que 42 ONG qui travaillent en Syrie ont décrit Bab el-Haoua comme le point de passage le plus critique pour l’aide humanitaire vitale, avant de s’indigner que ce Conseil de sécurité ait été pris en otage par une nouvelle utilisation à mauvais escient du droit de véto.  C’est l’un des jours où il devient difficile de répondre à celles et ceux qui critiquent l’ONU et l’utilisation du droit de veto, a-t-il conclu. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a dénoncé la volonté des pays occidentaux de pousser la Russie à recourir à son droit de veto, de même que les accusations selon lesquelles elle aurait sonné le glas du mécanisme.  Les partenaires occidentaux ont présenté quelque chose de creux au peuple syrien, et nous avons essayé en toute bonne foi de présenter un compromis, mais ils n’ont pas fait de concessions, a-t-il déploré. Selon le représentant, ces pays cherchent à utiliser le mécanisme pour soutenir les groupes terroristes, tout en prétendant qu’il est essentiel pour aider les populations.  Or, la fermeture du point de passage de Bab el-Haoua ne signifierait pas un effondrement de l’aide car le Gouvernement syrien a ouvert deux points de passage supplémentaires, a-t-il fait observer. 

Le délégué a ensuite affirmé que la Suisse n’a fait que promouvoir les positions des occidentaux en ignorant la position de la Syrie, et que son projet ne permettait pas d’améliorer le mécanisme.  Il a également estimé que s’il était acceptable il y a sept ans, ce mécanisme est à présent un anachronisme, dénonçant une violation de l’intégrité territoriale de la Syrie.  « La Suisse nous a mené à l’impasse », a-t-il déploré.  Pour en sortir, il a appelé à appuyer le projet russe, avertissant que si ce texte n’est pas appuyé, « il faudra clore le mécanisme ».

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a rappelé que le Secrétaire général a demandé au Conseil de sécurité de fournir aux acteurs humanitaires un mandat de douze mois pour acheminer l’aide aux millions de personnes qui en ont besoin, tout comme les pays et les partenaires de la région.  Cependant, la Fédération de Russie a une fois de plus fait usage de son droit de veto pour empêcher l’accès de 4 millions de Syriens à l’aide humanitaire.  Il n’existe pas d’argument moral à opposer à cette résolution, a fait valoir la représentante, en ajoutant que l’aide humanitaire ne doit pas être prise en otage par la Russie.  Elle a appelé ce pays à placer ses responsabilités humanitaires au-delà de la politique et à prioriser les besoins humanitaires du peuple syrien.

Vote sur le projet de résolution présenté par la Fédération de Russie  

Le projet de résolution est rejeté par 2 voix pour (Chine et Fédération de Russie), 3 voix contre (États-Unis, France et Royaume-Uni) et 10 abstentions (les 10 membres élus du Conseil). 

Explications de vote après le vote 

M. ZHANG JUN (Chine) a constaté qu’aucun des deux projets de résolution présentés n’avait pu être accepté par le Conseil et a regretté ces résultats.  Rappelant que le mécanisme d’aide transfrontière était un mécanisme provisoire, il a jugé qu’il était temps maintenant de passer à un acheminement de l’aide humanitaire à travers les lignes de front.  Il a aussi rappelé que le mécanisme avait été contesté et que, lors des derniers renouvellements de son autorisation, la durée n’avait été que de six mois, ce qui a-t-il estimé, offrait « plus de souplesse ». 

Pour la suite, la Chine souhaiterait maintenir le mécanisme transfrontière, a assuré le représentant, qui a toutefois demandé que le Conseil de sécurité prenne en compte les « incohérences » du système actuel et y remédie. En outre, les activités humanitaires devraient être élargies, en particulier en incluant le déminage dans les activités de relèvement rapide et en tenant compte de projets plus durables.  Le représentant a également appelé à lutter contre les effets néfastes des sanctions unilatérales sur l’assistance humanitaire.  Toute mesure du Conseil devrait contribuer à rassembler, a encore estimé le représentant, qui a salué les efforts des deux co-porte-plumes humanitaires sur le dossier syrien ainsi que les contributions d’autres pays, comme le Brésil, les Émirats arabes unis ou la Chine. 

Le consensus n’a pu se matérialiser, notamment sur la question des sanctions unilatérales, a constaté le représentant, pour qui le dialogue et la concertation sont pourtant les seuls moyens de régler les divergences.  Il a donc appelé les membres du Conseil de sécurité à faire preuve de patience et à éviter de politiser l’aide humanitaire. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a regretté que le projet de résolution porté par la Suisse et le Brésil, et soutenu par la quasi-totalité des membres du Conseil, n’ait pas été adopté en raison du veto utilisé par la seule Fédération de Russie.  Il a estimé que ce choix mettait en péril l’appui humanitaire international à la Syrie et la survie de millions de personnes alors que les besoins n’ont jamais été aussi importants depuis 2011.  Soulignant que le séisme du 6 février dernier avait démontré l’importance de cette voie d’acheminement, il a affirmé qu’il n’y avait pas d’alternative pour porter assistance à plus de 4 millions de personnes alors que le régime syrien continuait « d’instrumentaliser l’aide à des fins politiques ». 

Malgré les demandes des Nations Unies d’un renouvèlement d’un an, la Russie n’a cessé de s’opposer à cette durée par cynisme et instrumentalisation politique, a dénoncé le délégué, estimant que le texte qu’elle avait proposé ne tenait pas compte des besoins en Syrie.  Il a rappelé que l’aide humanitaire à la Syrie étaient financée à 90% par l’Union européenne et ses États membres, les États-Unis, le Canada et le Japon, alors que la Russie n’en fournissait quasiment aucune. 

Le représentant a ensuite exposé les raisons du rejet par son pays du projet de résolution russe, rappelant que la communauté humanitaire rejetait un renouvèlement pour seulement six mois, insuffisant en termes de prévisibilité, et qui plongerait le pays dans l’incertitude en pleine période hivernale, au moment où l’aide est la plus nécessaire.  Appelant le Conseil à l’unité et à la responsabilité, il a exhorté à continuer les négociations pour renouveler « un mécanisme indispensable ». 

Mme LINDA THOMAS GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que la poursuite de l’aide humanitaire à la Syrie est un impératif moral.  Après avoir reproché à la Russie de chercher à empêcher l’acheminement de l’aide humanitaire pendant les mois d’hiver, elle a souligné que les 10 membres élus étaient unis, la Fédération de Russie refusant pour sa part de participer en toute bonne foi à ces négociations.  Elle a également accusé la Russie de se comporter comme « un caïd » qui tient à imposer son point de vue, la délégation russe n’ayant pas hésité à parler de la fin du mécanisme transfrontière.  La représentante a appelé la Russie à revenir sur sa position.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a indiqué qu’il s’était abstenu lors de la mise aux voix du projet de résolution russe, car certains éléments du texte figuraient déjà dans le projet présenté par la Suisse et le Brésil.  Le Brésil a travaillé en toute transparence et de façon consensuelle et a pris en compte les besoins humanitaires du peuple syrien, a-t-il indiqué.  Il a fait savoir qu’une importante communauté brésilienne vit en Syrie, et que son gouvernement est donc particulièrement préoccupé par la situation humanitaire, notamment après le dernier séisme.  Il a affirmé que le projet dont il est le coauteur prévoyait une prorogation telle que demandée par les organisations humanitaires et prenait en compte des préoccupations légitimes de la Syrie.  Insistant sur l’impératif que l’aide parvienne à tous les Syriens sans conditions, il a appelé à trouver un terrain d’entente et un compromis.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a expliqué que le mécanisme aurait pu être sauvé en appuyant le projet de résolution présenté par son pays et en prenant des mesures concrètes pour rectifier les problèmes existants.  Il a précisé que la Fédération de Russie n’acceptera aucune prorogation du mécanisme, pour aucune durée, si le Conseil de sécurité n’appuie pas son projet de résolution. 

M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a affirmé que son pays avait toujours adopté un comportement constructif pour satisfaire aux besoins humanitaires, en particulier après le séisme de février dernier. Cette catastrophe a accentué les besoins de solutions durables, a ajouté le représentant, qui a insisté sur la coopération de son pays avec les porte-plumes humanitaires du Conseil sur la Syrie, mais a aussi mis en exergue les faiblesses du mécanisme transfrontalier actuel.  Il a mis en avant la nécessité de faire passer l’aide humanitaire en priorité à travers les lignes de front et d’élargir l’assistance humanitaire aux projets de relèvement rapide, à l’appui au déminage et aux projets de reconstruction. Il a appelé à trouver les conditions nécessaires pour assurer le retour volontaire, digne et en sécurité des réfugiés. Il s’en est pris aux « sanctions unilatérales inhumaines » et a déploré la baisse de l’assistance humanitaire à son pays. Tout en saluant les efforts des co-porte-plumes humanitaires, le représentant a regretté qu’ils n’aient pas, selon lui, pris en compte les intérêts de la population syrienne.  Comment peut-on demander une prorogation de douze mois du mécanisme transfrontière au motif d’une nécessité de planifier l’aide alors même que moins de 12% des fonds demandés pour la Syrie ont été accordés, a-t-il demandé, avant d’estimer que le projet présenté par la Fédération de Russie représentait une solution efficace, et aussi de remercier les Émirats arabes unis pour leurs efforts en vue de parvenir à un consensus. 

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