En cours au Siège de l'ONU

9941e séance – après-midi 
CS/16095

Le Conseil de sécurité se réunit d’urgence au lendemain de frappes aériennes des États-Unis contre trois sites nucléaires iraniens

Cet après-midi, le Conseil de sécurité s’est réuni d’urgence pour la troisième fois cette semaine alors que la guerre entre Israël et la République islamique d’Iran a connu une nouvelle escalade hier soir avec l’entrée en scène d’une tierce partie, les États-Unis, auteurs de frappes aériennes contre trois sites nucléaires iraniens. 

Venu participer à la séance, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, n’a pu que se rendre à l’évidence: son appel à « donner une chance à la paix », lancé vendredi matin, est resté « lettre morte ».  Le bombardement des installations nucléaires de Fordou, Natanz et Ispahan marque, selon lui, un « tournant dangereux » dans une région déjà « sous le choc », l’exposant à un « engrenage de représailles ».  Selon le Ministère iranien de la santé qui a décompté les victimes depuis le début des hostilités il y a 11 jours, le conflit aurait fait 430 morts et plus de 3 500 blessés en Iran, Tel-Aviv faisant état de 25 tués et de 1 300 blessés du côté israélien.

Le conflit risque de plonger la région dans une instabilité et une volatilité accrues, a abondé le Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques.  M. Miroslav Jenča a rappelé les mises en garde de groupes armés non étatiques alliés à Téhéran contre l’implication éventuelle des États-Unis, tandis que le Parlement iranien a exprimé à l’unanimité son soutien à des mesures visant à bloquer le détroit d’Ormuz, une voie maritime vitale pour le transport des hydrocarbures de la région vers le reste du monde. 

« Le régime de non-prolifération nucléaire qui a sous-tendu la sécurité internationale depuis plus d’un demi-siècle est en jeu », a de son côté constaté le Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), M. Rafael Mariano Grossi.  S’il a pu confirmer que les bombes américaines avaient bien touché leurs cibles, personne à cette heure n’est en position d’évaluer les dégâts souterrains causés sur le site de Fordou.  À Ispahan, des infrastructures liées à l’enrichissement de l’uranium ont été endommagées.  Malgré l’ampleur des frappes, l’AIEA n’a détecté aucune augmentation des seuils de radiation, selon les informations disponibles à ce stade, a précisé le haut fonctionnaire.  Les inspecteurs de l’Agence dans le pays restent mobilisés mais ont besoin d’un accès sécurisé pour évaluer les dégâts, a-t-il insisté, en se disant prêt à se rendre immédiatement en Iran et à y déployer, là où ce serait nécessaire, des experts en sûreté et sécurité nucléaires.

L’objectif de ces frappes, se sont justifiés les États-Unis, était de démanteler les capacités de l’Iran en matière d’enrichissement de l’uranium et de mettre un terme à la menace nucléaire que pose le « principal parrain du terrorisme dans le monde ».  Cette opération visait à éliminer une « source d’insécurité mondiale ancienne », mais en « croissance rapide », et à soutenir « notre allié Israël » dans l’exercice de « notre droit inhérent à la légitime défense collective », « conformément à la Charte des Nations Unies », a précisé la représentante américaine.

« Le moment était venu » pour les États-Unis d’agir de façon décisive pour empêcher Téhéran d’acquérir l’arme nucléaire, a-t-elle poursuivi, estimant que le Conseil de sécurité doit de son côté exhorter le régime iranien à mettre un terme à sa volonté d’anéantir l’État d’Israël et d’essayer à obtenir l’arme nucléaire.  Son homologue israélien s’est réjoui de l’initiative américaine, remerciant le Président Trump: « La nuit dernière, l’Histoire a changé », Washington ayant « supprimé la plus grande menace existentielle à laquelle le monde libre fait face ».  « Merci au Président Trump d’avoir agi là où tant d’autres avaient hésité. »

Une implication qu’a dénoncée la République islamique d’Iran, pour qui Washington s’est « laissé entraîner dans une nouvelle guerre coûteuse et infondée ».  Après que le « régime israélien illégitime » a échoué à accomplir le « sale boulot » de l’Occident, Trump s’est donc vu contraint de mener personnellement à bien « la partie la plus sordide de ce programme odieux ».  Citant l’Article 51 de la Charte des Nations Unies, le délégué iranien a promis une riposte proportionnée, à un moment et selon des modalités opportuns. Il a avancé que le programme nucléaire de son pays a toujours été pacifique, soulignant que « l’Iran n’a jamais quitté la table des négociations », contrairement aux accusations portées par les États-Unis.

Accusés par la Fédération de Russie d’avoir ouvert la « boîte de Pandore » radiologique, les États-Unis ont réagi à ce qu’ils ont qualifié d’« hypocrisie ».  Alors que le Conseil de sécurité doit examiner mardi la mise en œuvre de la résolution 2231(2015), qui consacrait le Plan d’action global commun –soit l’accord conclu entre la République islamique d’Iran sur son dossier nucléaire–, les États-Unis se sont réjouis de cette perspective.  « Le récent rapport de l’AIEA sur la vérification et le contrôle du non-respect par Téhéran des garanties nucléaires obligatoires montre clairement que ce régime continue d’accélérer ses activités nucléaires sans aucune justification civile crédible », a soutenu la délégation américaine.

La Fédération de Russie et la Chine ont aujourd’hui annoncé leur intention de présenter un projet de résolution appelant à un arrêt inconditionnel des hostilités, à la protection des civils et au respect du droit international, exhortant les autres membres du Conseil à soutenir ce texte.  Le Conseil de coopération du Golfe, par la voix du Koweït, a abondé dans le sens de ces demandes.  L’Iran a, quant à lui, reproché au Conseil de sécurité son inaction, exigeant qu’il « condamne fermement » les agressions, qu’il impose des « mesures coercitives contre les agresseurs » et qu’il place le programme nucléaire israélien sous supervision internationale.  Devant les violations répétées de son espace aérien par les deux parties au conflit, l’Iraq a dénoncé les opérations militaires sur son territoire qui pourraient porter atteinte à la sûreté et à la sécurité de n’importe quel État de la région.

Alors que les appels des membres du Conseil se sont multipliés aujourd’hui pour demander le retour à une solution négociée, le Royaume-Uni a indiqué avoir, vendredi dernier, aux côtés des dirigeants de l’E3 (Allemagne, France et Royaume-Uni) et de l’Union européenne, rencontré le Ministre des affaires étrangères de l’Iran à Genève, afin de faire pression directement en faveur d’un retour à la diplomatie.  « Téhéran doit coopérer pleinement avec l’AIEA », a ajouté la délégation britannique.  La France n’a pas dit autre chose en encourageant à retrouver le chemin de la négociation en vue d’un accord robuste, vérifiable et durable, un accord indispensable pour permettre à l’AIEA de confirmer que le programme nucléaire iranien est entièrement pacifique.

 

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