9299e séance, matin & après-midi
CS/15249

Le Conseil de sécurité débat des bienfaits des politiques de développement pour la paix en Afrique, dans l’objectif de faire taire les armes d’ici à 2030

L’effet des politiques de développement sur la mise en œuvre de l’initiative « Faire taire les armes en Afrique », tel était le thème du débat public du Conseil de sécurité tenu aujourd’hui, auquel ont participé une cinquantaine de délégués.  Cette réunion leur a donné l’occasion de rappeler qu’il faut s’appuyer sur des politiques de développement « inclusives, transparentes et efficaces » pour prévenir ou régler les conflits ainsi que pour garantir une paix et une sécurité à long terme.  Une séance qui a permis de mettre en avant l’expérience fructueuse du Mozambique, dont le Chef d’État présidait le Conseil, et de promouvoir l’axe humanitaire-développement-paix tant dans les politiques nationales que dans l’aide extérieure. 

« Nous, les Africains, voulons la paix sur notre continent », a déclaré le Président Filipe Jacinto Nyusi du Mozambique, en invitant les dirigeants africains à croire qu’il est possible d’avoir un continent où les armes sont silencieuses.  Il a cité l’ancien Secrétaire général Kofi Annan selon lequel il ne saurait y avoir de paix sans développement, de développement sans paix, et de paix et développement sans droits humains.  « Faire taire les armes » nécessite une vision à long terme du développement du pays, qui implique la promotion de la justice sociale d’une manière durable et inclusive, a plaidé M. Nyusi.  Il a parlé de son pays qui a par exemple misé sur une réintégration durable des bénéficiaires du programme de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR): même s’ils n’ont pas cotisé, des pensions leur sont versées parce qu’ils n’ont jamais eu l’occasion de travailler. 

Le Mozambique, dont « le cheminement vers la paix et la démocratisation a été tortueux », comme l’explique la note de cadrage distribuée aux délégations, a mené un processus de paix qui est « un exemple de mise en œuvre intelligente et efficace des politiques de développement à l’appui d’un objectif de paix et de sécurité », a estimé la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour l’Afrique.  Mme Cristina Duarte a souligné que cette efficacité est liée à la double approche de l’Accord de paix et de réconciliation de Maputo, qui combine la démilitarisation et la réintégration avec la décentralisation et le transfert des responsabilités. 

Revenant sur les conditions qui ont permis cette évolution, l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Mozambique, M. Mirko Manzoni, a partagé son expérience précédente de médiateur, en 2016, en tant qu’Ambassadeur de Suisse à Maputo.  Il a présenté quatre éléments qui ont conduit au succès de la mise en œuvre de l’accord de paix signé avec la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO): l’appropriation nationale; la promotion de la confiance entre les parties; la flexibilité du processus de paix; et l’approche centrée sur l’humain. 

M. Mohamed bin Chambas, Haut-Représentant de l’Union africaine pour l’initiative « Faire taire les armes », a lui aussi exhorté l’Afrique à miser sur une transformation dont le cœur serait le développement du capital humain, avec la mobilisation des ressources correspondantes.  Il a demandé en particulier de s’atteler à la lutte contre les flux financiers illicites, qui privent le continent d’environ 900 milliards de dollars par an, avant de solliciter les organisations sous-régionales, les gouvernements, ainsi que la société civile, pour qu’ils s’approprient l’initiative « Faire taire les armes ». 

Le Président Nyusi a également insisté sur la nécessaire « appropriation nationale », qui permet d’agir le plus efficacement possible dans l’axe humanitaire-développement-paix.  Cela implique la participation pleine, égale et significative des femmes, a-t-il précisé, comme c’est le cas au Mozambique où les femmes ont pu prendre part au processus de paix.  Les femmes, mais aussi les jeunes et les chefs traditionnels et religieux, ont rajouté certains intervenants au débat en mettant en avant les valeurs morales de ces derniers et la sagesse autochtone.  L’inclusion des femmes a été soutenue par de nombreux intervenants, comme l’Espagne qui a organisé, en collaboration avec ONU-Femmes, un séminaire au Niger sur le rôle des femmes médiatrices.  Les États-Unis ont, quant à eux, l’intention de consacrer 1 milliard de dollars à des initiatives d’autonomisation économique des femmes en Afrique, comme l’a signalé la Sous-Secrétaire d’État à la sécurité civile, à la démocratie et aux droits humains. 

De manière générale, la Croatie, qui s’exprimait au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, a invité à écouter les acteurs de la société civile parce qu’ils jouent un rôle clef dans l’identification des signes précoces lorsqu’il y a un risque de voir perpétrer des atrocités.  Ces signes sont notamment l’accès inégal à la justice et au marché de l’emploi, et donc des produits du manque de développement, ou encore le rétrécissement de l’espace démocratique.  Dans la même ligne, le Liechtenstein a conseillé à l’ONU, et au Conseil de sécurité en particulier, d’encourager au respect des droits humains des minorités.  Nombre de situations dont le Conseil est saisi puisent leur origine dans l’exclusion de ces communautés réprimées, a-t-il fait remarquer avant de faire la promotion de son « Manuel sur l’autodétermination dans le cadre de la prévention et de la résolution des conflits ». 

Les progrès en matière de développement portant sur le secteur de l’éducation sont également indispensables à la paix, a fait valoir l’Équateur, car en plus d’être un instrument de développement, l’enseignement est un vecteur de civisme.  C’est pour cela que le Ghana a demandé un soutien international renforcé et durable pour le « développement générationnel » qu’apporte le pouvoir de l’éducation.  La Suisse a d’ailleurs fait valoir qu’elle soutient un projet de planification de l’éducation au Niger. 

Pour mieux répondre aux enjeux de long terme tels que les défis environnementaux et de développement, la France a recommandé aux États Membres d’établir des partenariats d’égal à égal avec les pays africains.  Elle a notamment évoqué l’organisation, début mars par la France et le Gabon, du One Forest Summit pour lutter contre le dérèglement climatique et préserver la biodiversité.  Plusieurs délégations ont aussi tenu à souligner que certains risques sécuritaires en Afrique sont liés au climat, invitant à intégrer l’action climatique dans les efforts de développement, et donc de paix.  La Pologne a appelé le Conseil de sécurité à reconnaître et à évaluer correctement les implications des changements climatiques sur la sécurité.

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE

L’effet des politiques de développement sur la mise en œuvre de l’initiative Faire taire les armes (S/2023/148/Rev.1)

Déclarations

Mme CRISTINA DUARTE, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour lAfrique, a indiqué que le Plan directeur de l’Union africaine sur les mesures concrètes à prendre pour faire taire les armes en Afrique d’ici à 2020, le Plan directeur de Lusaka, a identifié cinq domaines d’action pour faire avancer ce programme, dont un qui concerne les aspects économiques, sociaux, environnementaux et juridiques.  La « feuille de route de Lusaka » fait une référence directe au Programme de développement durable à l’horizon 2030 et à l’Agenda 2063 de l’Union africaine (UA), a-t-elle précisé, avant de regretter que les perspectives africaines n’aient pas été assez intégrées jusqu’à présent dans les discussions mondiales sur la paix et la sécurité sur le continent.  De son avis, les politiques de développement jouent un rôle important dans la prévention et le règlement des conflits, à condition qu’elles soient inclusives, transparentes, équitables et efficaces. 

La Conseillère a souligné que pour mettre fin aux conflits, il faut tenir compte des facteurs externes et internes.  Or, a-t-elle remarqué, les politiques de développement sont mieux à même de s’attaquer aux facteurs internes.  Elle a regretté qu’en Afrique, la réponse traditionnelle n’ait pas été de s’attaquer aux conflits, mais seulement à leurs symptômes.  Mme Duarte a aussi observé que le colonialisme a souvent été blâmé pour l’exploitation économique du continent africain, alors que son impact sur les lacunes actuelles de la gouvernance a rarement été discuté.  Elle a cité le rapport 2022 du Secrétaire général sur la promotion du développement durable et de la paix durable, selon lequel les pays africains ont accédé à l’indépendance en héritant de structures de gouvernance qui n’ont pas été conçues pour gérer avec succès des États indépendants.  De plus, d’un point de vue économique, les administrations coloniales ne se sont pas concentrées sur la promotion du développement économique, mais plutôt sur l’extraction des ressources et la collecte des impôts. 

Mme Duarte a rappelé ces facteurs historiques pour démontrer que, du point de vue de la gouvernance, les pays africains sont encore confrontés aujourd’hui à « trois géographies » qui entrent en relation avec les conditions gouvernementales d’un pays, leur territoire et leur population.  Elle a expliqué que les chevauchements entre la première et la deuxième géographie (le territoire administratif d’un pays et la géographie socioculturelle) ont conduit à la présence de deux ou plusieurs groupes socioculturels historiques à l’intérieur des frontières administratives des pays, et à des situations dans lesquelles une communauté historique est répartie dans deux pays ou plus.  Ce chevauchement entraîne des conséquences sur la gouvernance, a-t-elle noté en insistant sur la réalité socioéconomique qui transcende les frontières d’un pays. 

Afin de réduire la menace des acteurs non étatiques prenant le contrôle du Sahel et de la Corne de l’Afrique, la Conseillère spéciale a recommandé que les solutions militaires soient complétées par des politiques de développement actives.  Celles-ci doivent contribuer à assurer une fourniture efficace des services publics sur l’ensemble du territoire.  Elle a salué à cet égard le processus de paix du Mozambique, « un exemple de mise en œuvre intelligente et efficace des politiques de développement à l’appui d’un objectif de paix et de sécurité ».  Elle a souligné la double approche de l’accord de Maputo, qui combine la démilitarisation et la réintégration avec la décentralisation et le transfert des responsabilités.  Elle a aussi salué la récente décision du Gouvernement du Mozambique d’inclure les bénéficiaires démobilisés dans le système de retraite.  Le processus de paix et de réconciliation du Mozambique montre que les politiques de développement, lorsqu’elles sont appliquées en complément des efforts de rétablissement de la paix, contribuent à mettre fin aux hostilités et jettent des bases solides pour une paix durable, a conclu Mme Duarte. 

M. MOHAMED IBN CHAMBAS, Haut-Représentant de lUnion africaine pour l’initiative « Faire taire les armes », a indiqué que l’objectif de faire taire les armes d’ici à 2030 est compromis en raison de multiples défis, dont les changements climatiques, le fossé qui se creuse entre pays riches et pauvres et les conséquences de la pandémie.  Plus de 15 pays africains endurent également une crise de la dette, l’Afrique étant endettée à hauteur de 600 milliards de dollars, a-t-il rappelé.  Il a fait plusieurs recommandations afin de réduire les inégalités et les vulnérabilités de l’Afrique et ainsi se rapprocher de l’objectif de faire taire les armes.  Il a exhorté l’Afrique à miser sur une transformation dont le cœur serait le développement du capital humain, avec la mobilisation des ressources correspondantes.  Il a demandé à lutter contre les flux financiers illicites qui privent le continent d’environ 900 milliards de dollars par an. 

M. Chambas a déclaré que le processus de « démondialisation » a commencé en Afrique, puisque sa part dans le commerce mondial est passée de 6% dans les années 70 à 2,7% aujourd’hui.  Il a par ailleurs fait remarquer que, bien que l’Afrique soit le continent le moins émetteur d’émissions, elle est engagée à jouer son rôle dans l’avènement de la transition verte.  Or, a-t-il précisé, l’Afrique aura besoin d’entre 1,18 et 1,45 milliard de dollars par an pour mettre en œuvre ses engagements climatiques.  Il a donc demandé que les fonds adéquats soient déboursés afin que l’Afrique remédie à ses lacunes en termes de financement climatique.  Il a aussi appelé à remédier aux changements anticonstitutionnels de gouvernement et aux coups d’État.  Les organisations sous-régionales, les gouvernements, ainsi que la société civile, doivent s’approprier l’initiative « faire taire les armes », a-t-il conclu, en soulignant la nécessité d’un soutien international. 

M. MIRKO MANZONI, Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Mozambique, a rappelé qu’il exerce cette fonction depuis près de quatre ans et qu’il a ainsi pu accompagner la mise en œuvre de l’accord de Maputo pour la paix et la réconciliation nationale entre le Gouvernement du Mozambique et la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO).  Il a précisé que son implication dans ce processus a commencé en 2016, en tant qu’ambassadeur de Suisse au Mozambique, lorsqu’il a fait partie d’une petite équipe de médiation chargée d’établir la confiance entre les deux parties.  Le succès de cette médiation a reposé selon lui sur plusieurs facteurs, à commencer par l’appropriation nationale, « catalyseur du progrès », qui a encouragé l’adhésion des parties prenantes.  Dans le contexte mozambicain, a-t-il expliqué, l’équipe de médiation a joué un rôle important de facilitation, tandis que le Gouvernement défendait des solutions nationales aux problèmes nationaux en écoutant et en créant une culture de dialogue avec la RENAMO.  L’appropriation nationale implique aussi d’assurer la participation pleine, égale et significative des femmes, a-t-il ajouté, précisant qu’au Mozambique, le processus de paix a fait participer des femmes aux négociations et aux structures de mise en œuvre, conformément aux cadres nationaux et internationaux pertinents sur les femmes, la paix et la sécurité. 

Pour M. Manzoni, une autre raison du succès du processus de paix au Mozambique a été la promotion de la confiance entre les parties.  À la suite du cessez-le-feu annoncé un mois seulement après la reprise des pourparlers entre les dirigeants des deux parties, la confiance mutuelle a encore été renforcée par la mise en œuvre d’accords partiels supplémentaires, alors que les négociations étaient en cours, a-t-il relaté, estimant que cette approche progressive a contribué à donner à chacun un sens de l’objectif à atteindre.  À ses yeux, une troisième raison de cette réussite réside dans la flexibilité du processus de paix.  Tous les obstacles rencontrés en cours de route ont été surmontés par un dialogue direct et ouvert entre les parties et en utilisant une prise de décision et une action « agiles », a fait valoir l’Envoyé personnel, selon lequel la pandémie de COVID-19 aurait pu faire dérailler ce processus si la souplesse nécessaire n’avait pas été apportée par les parties, les médiateurs, les donateurs et la communauté internationale.  « Dans tout processus politique, il y a de nombreuses parties mobiles, et il doit y avoir de la place pour les revers, les délais modifiés et les changements de direction », a-t-il souligné. 

En dernier lieu, M. Manzoni a souligné l’importance de maintenir une approche centrée sur l’humain, citant le cas du Mozambique où les personnes ont été placées au cœur du processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).  « Donner la priorité aux personnes est payant en dividendes de la paix », a-t-il dit en expliquant les efforts d’inclusion déployés.  Outre l’installation de 4 800 bénéficiaires du processus de DDR dans les communautés, il a mentionné l’adoption récente d’un décret étendant les pensions aux personnes démobilisées ; une mesure selon « historique », qui résout non seulement les problèmes en suspens du passé, mais investit aussi dans la durabilité du processus de paix.  « Faire taire les armes et embrasser le dialogue devient une façon mozambicaine de faire les choses, et c’est essentiel pour une paix durable », a-t-il applaudi, assurant que, près de quatre ans après sa mise en œuvre, l’accord de Maputo s’enracine de plus en plus profondément.

« Nous, les Africains, voulons la paix sur notre continent », a déclaré le Président du Mozambique, M. FILIPE JACINTO NYUSI, en se disant conscient de la nécessité pour les dirigeants africains de croire qu’il est possible d’avoir un continent où les armes sont silencieuses.  Faisant siennes les paroles de l’ancien Secrétaire général Kofi Annan, le Président a martelé qu’il ne saurait y avoir de paix sans développement, il ne saurait y avoir de développement sans paix, et il ne saurait y avoir de paix et de développement sans droits humains.  C’est cette triade paix-développement-droits humains qui guide le programme de l’UA visant à faire taire les armes d’ici à 2030, a-t-il expliqué.  Il a fait part de l’expérience de son pays, estimant qu’elle peut servir de référence pour le règlement des conflits armés sous d’autres latitudes, sur le continent africain ou ailleurs.  Après avoir rappelé l’histoire du Mozambique, de la lutte armée pour l’indépendance au conflit avec la Rhodésie et l’Afrique du Sud, ainsi que les différents accords conclus pour y mettre fin, il a assuré avoir fait de la question du maintien de la paix et de la réconciliation nationale la priorité de la gouvernance. 

Le Président Nyusi a pris l’engagement de rester implacable « tant qu’un frère continuera à prendre les armes pour tuer un autre frère, quel qu’en soit le prétexte ».  C’est ainsi qu’il avait entamé un dialogue direct avec le Chef de la Résistance nationale mozambicaine (RENAMO), feu Afonso Dhlakama, qui a conduit à l’Accord de paix et de réconciliation de Maputo en août 2019.  Le Président a expliqué que, grâce à l’engagement de son gouvernement dans le processus de dialogue, il avait été possible d’identifier les aspects clefs devant être abordés dans la décentralisation, d’une part, et dans le processus de DDR des hommes armés de la RENAMO, d’autre part.  Le Chef d’État a ainsi indiqué que, grâce à un accord politique, un amendement de la Constitution nationale a été proposé et un modèle de décentralisation a été mis en place dans lequel les gouverneurs des 10 provinces du pays sont élus démocratiquement depuis 2019.  Le deuxième point de l’accord de Maputo était la composante militaire qui impliquait le DDR et qui avait une relation directe avec « Faire taire les armes »: cela a permis la fermeture de 15 des 16 bases de la RENAMO. 

Conscient du fait que « Faire taire les armes » nécessite une vision à long terme du développement du pays, qui implique la promotion de la justice sociale d’une manière durable et inclusive, garantissant le bien-être de tous, le Mozambique a misé sur une réintégration durable des bénéficiaires du programme de DDR, a signalé le Président.  Ainsi, grâce à un nouveau décret, le paiement de pensions a été étendu aux bénéficiaires du programme de DDR, même s’ils n’ont pas cotisé, parce qu’ils n’ont jamais eu l’occasion de travailler, a-t-il notamment expliqué. 

Le processus de paix en cours et la mise en œuvre de l’accord de paix au Mozambique sont uniques, s’est enorgueilli le Président en faisant valoir qu’ils reposent sur une approche innovante, encouragent la tolérance, soulignent l’importance de l’appropriation nationale, de la confiance et du respect mutuel et placent le dialogue comme première option.  Il a également mis l’accent sur le fait que les interlocuteurs du dialogue, à savoir lui-même et le leader de la RENAMO, M. Afonso Dhlakama, avaient opté pour la supervision directe du processus de mise en œuvre du consensus, une expérience qui a été poursuivie par l’actuel Président de la RENAMO, M. Ossufo Momade.  Il a également salué le soutien significatif à ce processus de paix du Secrétaire général de l’ONU et de son envoyé personnel sur le terrain. 

Si les Mozambicains reconnaissent et apprécient le soutien des partenaires de développement et des experts internationaux, le Président a tenu à rappeler que le processus continue d’être mené par les Mozambicains et que les solutions continuent d’être trouvées par les nationaux.  Il a insisté sur l’importance de l’instauration d’une confiance mutuelle entre les parties prenantes, dès les premières étapes des négociations, ce qui a été un facteur décisif dans le cas du Mozambique et peut servir d’exemple.  Il a parlé d’échanges téléphoniques fréquents avec le Chef de l’opposition, mais aussi de la discrétion dont ils ont fait preuve tout au long des négociations sur les principaux aspects du dialogue, jusqu’à ce qu’un consensus soit atteint sur une question particulière. 

Le Président Nyusi a poursuivi son allocution en soulignant que les Mozambicaines jouent un rôle de premier plan en politique, notamment parce que le pays a atteint la parité hommes-femmes au Conseil des ministres.  Il a aussi reconnu l’importance de la communication avec les chefs religieux et communautaires et de la participation de la jeunesse, pour que la paix que nous construisons soit durable pour les générations à venir.  Enfin, il a parlé des effets néfastes des changements climatiques et du terrorisme sur son pays.  Il ne sera pas possible de faire taire les armes complètement tant que l’extrémisme violent prévaudra sur le continent africain et dans le monde, a-t-il reconnu.  Il a rappelé que les actions de combat se poursuivent à Cabo Delgado, avec l’engagement direct des forces de défense et de sécurité mozambicaines, soutenues par les forces de défense rwandaises et la force d’intervention de la Communauté de développement de l’Afrique australe et indirectement par d’autres pays et organisations tels que l’UA, l’ONU et l’UE.  Mais le Mozambique cherche des moyens complémentaires pour faire face à ce problème, a-t-il dit en précisant chercher à instaurer la stabilité sociale par la création d’opportunités pour le développement du capital humain.  Il a signalé à cet égard la création de programmes innovants et d’adaptation sociale pour s’assurer que les communautés sont impliquées dans les projets en cours dans leurs régions et en bénéficient. 

M. CARLOS MÁRCIO COZENDEY, Secrétaire dÉtat pour les affaires politiques multilatérales du Ministère des relations extérieures du Brésil, a déclaré que la dernière fois que ce Conseil s’est réuni pour discuter du thème « Faire taire les armes en Afrique », deux années plus tôt, l’ambiance était à un optimisme prudent.  Aujourd’hui, la situation au Sahel continue d’exiger l’attention.  Dans la partie est de la République démocratique du Congo, la réémergence du M23 a contribué à la détérioration de la sécurité et de la situation humanitaire.  Des signes positifs existent cependant, illustrant la détermination des gouvernements africains à parvenir à une paix et une sécurité durables sur le continent comme le mécanisme de suivi et d’évaluation de l’Union africaine.  Le Ministre a aussi cité les efforts diplomatiques des pays des Grands Lacs et du G5 Sahel.  L’appui de la communauté internationale est indispensable au succès de ces efforts en commençant par le respect du principe de non-ingérence dans les affaires des États. 

Une Afrique unie, intégrée et prospère fondée sur la bonne gouvernance, la démocratie, l’inclusion sociale et le respect des droits humains, la justice et l’état de droit sont les conditions nécessaires préalables pour un continent exempt de conflit, a poursuivi le dignitaire.  Il a souligné que la sécurité et le développement sont liés et se renforcent mutuellement, ajoutant que bien qu’importante, l’APD demeure une solution temporaire.  L’Afrique a besoin d’une architecture économique, commerciale et financière qui libère son potentiel, a-t-il insisté.  Dans ce contexte, la Commission de consolidation de la paix est bien placée pour mobiliser l’appui international en fonction des priorités nationales en matière de maintien de la paix, de financement et d’expertise.

Mme UZRA ZEYA, Sous-Secrétaire dÉtat à la sécurité civile, à la démocratie et aux droits humains des États-Unis, a annoncé l’intention de son administration de consacrer 1 milliard de dollars à des initiatives d’autonomisation économique des femmes en Afrique.  Comme la Vice-Présidente Harris l’a clairement indiqué lors de sa visite au Ghana cette semaine, les États-Unis sont déterminés à investir dans l’ingéniosité et la créativité africaines afin de stimuler une croissance économique solide et de créer des opportunités en Afrique et au-delà.  La dignitaire a relevé que les sociétés prospèrent davantage lorsqu’elles associent une démocratie solide au développement.  Or le Président Biden a déclaré à plusieurs reprises que nous nous trouvons à un point d’inflexion en ce qui concerne l’avenir de la démocratie, qui a subi de graves revers dans de nombreuses régions d’Afrique, sept transitions non démocratiques du pouvoir ayant eu lieu au cours des deux dernières années en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale.  Cependant, les événements survenus ces dernières années au Nigéria, au Kenya, en Zambie, au Malawi et en Gambie ont montré que la démocratie pouvait encore triompher par la voie des urnes, a nuancé la Sous-Secrétaire d’État. 

Après avoir reconnu le rôle essentiel que jouent les embargos sur les armes décrétés par les Nations Unies dans la limitation des flux d’armes destinées aux zones de conflit, la Sous-Secrétaire d’État a estimé que l’action collective au niveau mondial ne fonctionnera pas sans l’autonomisation au niveau local.  Je l’ai constaté à maintes reprises au cours de mes voyages, notamment lors de ma visite au Mozambique l’an dernier et au début de ce mois en Gambie, en Mauritanie et au Sénégal, a-t-elle indiqué.  De l’Afrique australe à l’Afrique de l’Ouest, les dirigeants locaux et la société civile m’ont dit qu’il était impératif qu’ils aient la capacité de définir leurs propres programmes, d’élaborer des solutions et de recevoir des ressources et un soutien au renforcement des capacités pour ancrer la paix et la sécurité chez eux, a-t-elle témoigné.  Elle a fait savoir que dans le cadre de leur nouvelle stratégie décennale de prévention des conflits et de promotion de la stabilité, les États-Unis travaillent activement avec leurs partenaires pour veiller à ce que des points de vue divers soient pris en compte dans les décisions relatives à la paix et à la sécurité et à ce que les voix et les solutions locales, fondées sur la confiance mutuelle et la responsabilité à long terme, soient au premier plan de la construction d’une résilience inclusive.  Cette stratégie vise à renforcer la sécurité civile à long terme, en particulier au Mozambique et dans les États côtiers d’Afrique de l’Ouest, qui sont confrontés à des menaces extrémistes croissantes à leurs frontières, a ajouté la haute fonctionnaire d’État.

M. SHAKHBOOT NAHYAN AL NAHYAN, Ministre d’État au sein du Ministère des affaires étrangères et de la coopération internationale des Émirats arabes unis, a appelé à utiliser pleinement les outils de résolution des conflits et de consolidation de la paix en Afrique.  Le Conseil doit encourager les efforts de médiation chaque fois que cela est possible et coopérer étroitement avec les organisations régionales.  Il a estimé que l’initiative « Faire taire les armes » doit viser à remédier aux causes profondes des conflits, en luttant notamment contre les idéologies extrêmes.  Il a souligné la nécessité d’identifier précocement les menaces émergentes et complexes qui requièrent des réponses complexes.  Nous ne pouvons pas avoir la paix si nous n’investissons pas dans la paix, a insisté le Ministre, en rappelant que les investissements directs étrangers en Afrique ont atteint le niveau record de 83 milliards de dollars en 2021, tout en ne représentant que 5,2% des investissements mondiaux. 

M. LIU YUXI, Représentant spécial pour les affaires africaines de la Chine, a jugé essentiel de respecter le principe de solutions africaines aux problèmes africains et d’appuyer les choix de développement et de gouvernance des pays africains plutôt que de les critiquer constamment.  Il a appelé à miser sur le renforcement des forces de sécurité africaines, notant que les sanctions imposées à certains pays africains les entravent dans cet effort.  Le développement durable étant essentiel à la paix, il faut également renforcer les infrastructures africaines de développement.  Le représentant a ensuite dénoncé « l’ordre international injuste », en exhortant à régler le problème de l’endettement excessif de l’Afrique.  Il a souhaité voir l’Afrique jouer un plus grand rôle dans la gouvernance internationale. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a constaté que 10 ans après le lancement de l’initiative « Faire taire les armes », l’Union africaine joue aujourd’hui un rôle crucial dans la prévention et la résolution des crises sur le continent et fait preuve de hardiesse dans la capacité d’apporter des perspectives africaines en matière de paix et de sécurité.  L’UA qui a été au centre des accords de paix au Soudan et en Éthiopie, de la restauration de l’État en Somalie, continue d’accompagner le processus de réconciliation en Libye et contribue très largement à apporter des solutions concrètes au Sahel, a-t-il rappelé. 

Toutefois, en dépit de ces progrès, les conflits et crises persistent en Afrique et impactent le quotidien des populations africaines, a noté le représentant pour qui la montée des conflits et leurs relations avec les crises socioéconomiques, rend indispensable une réflexion approfondie sur le nexus sécurité́ et développement.  La mise en œuvre de l’initiative « Faire taire les armes » et les actions à engager doivent donc s’inscrire dans cette perspective.  Il a exhorté la Banque mondiale et le FMI à soutenir la reconstruction en Somalie, au Soudan du Sud, au Mali et dans la région du Sahel.  Ne pas soutenir ces pays fragilisés notamment par le terrorisme, c’est ignorer la menace à l’égard de la paix et la sécurité́ internationales, a-t-il prévenu.  Il a dénoncé les facteurs qui attisent les crises et entravent le développement de l’Afrique, comme la corruption et les flux financiers illicites dont la perte annuelle se chiffre à plus de 88 milliards de dollars.  Le représentant a insisté sur l’impérieuse nécessité de lutter contre ces fléaux afin d’endiguer les conflits et de faire taire les armes.  L’adoption de la Déclaration de Yaoundé montre tout l’intérêt que les pays africains portent sur ces questions, a-t-il ajouté. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a indiqué que la cause des conflits en Afrique est à chercher dans son histoire marquée par l’esclavage et le colonialisme.  Aujourd’hui, ces maux ont été remplacés par des pratiques néocoloniales, a tranché le délégué, en dénonçant les sanctions qui frappent les pays africains.  Il a souligné la nécessité pour les pays africains de disposer des moyens nécessaires pour protéger leurs populations.  Le délégué a reconnu qu’il existe un lien entre efforts sécuritaires et efforts de développement durable, mais a estimé que ce lien est indirect.  Il a accusé les pays occidentaux de piller les ressources naturelles de l’Afrique et de ne pas avoir honoré leurs engagements de consacrer 0,7% de leur revenu national brut (RNB) à l’aide publique au développement (APD).  Il a rejeté la pratique consistant à conditionner l’octroi d’aides à des critères politiques.  Enfin, il a rappelé l’aide précieuse apportée par l’URSS aux pays africains dans la lutte contre le colonialisme, avant de détailler l’aide militaire et économique apportée par la Russie aujourd’hui.  La Russie a ainsi effacé 20 milliards de la dette des pays africains, a-t-il précisé. 

M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a souligné l’importance des politiques de développement dans la mise en œuvre de la campagne « Faire taire les armes » en Afrique.  Dans cet esprit, il a constaté que la vulnérabilité des institutions étatiques et locales est une des causes fondamentales des conflits et du terrorisme.  Jugeant indispensable d’empêcher la création d’un environnement dans lequel les jeunes sont attirés par l’extrémisme, le représentant a rappelé que son pays promeut le renforcement des institutions, de la gouvernance et de la démocratie, qu’il considère indispensables pour la paix, la stabilité et le développement durable en Afrique.  À cet égard, a-t-il dit, une participation publique large, inclusive et démocratique, y compris des femmes et des jeunes, à la gouvernance nationale et locale est essentielle.  Il a ensuite souligné la nécessité de renforcer l’autonomie et la résilience des communautés, y voyant l’un des meilleurs moyens de s’attaquer aux causes profondes des conflits.  Une collaboration entre les communautés et les gouvernements centraux et locaux basée sur la confiance mutuelle est également nécessaire, tout comme il importe de protéger les personnes déplacées de force en aidant les communautés locales à trouver des solutions durables. 

Le délégué a par ailleurs insisté sur l’importance cruciale de l’appropriation par l’Afrique des partenariats internationaux.  Assurant que le Japon aspire à être « un partenaire qui grandit avec l’Afrique », il a fait état du soutien de son pays aux efforts africains en matière de prévention des conflits et de maintien de la paix.  Nous aidons par le biais du renforcement des capacités des opérations de maintien de la paix de l’ONU, tout en appuyant le Fonds pour la paix de l’Union africaine (UA), qui vise à former des ressources humaines pour la paix, la médiation et la réconciliation, a-t-il indiqué.  Après avoir salué les consultations entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’UA, il a exprimé son appréciation du travail de la Commission de consolidation de la paix, notamment son rôle unique de conseil, de liaison et de convocation.  La stabilité, a-t-il dit en conclusion, est une condition préalable si l’Afrique veut libérer le potentiel de son peuple et réaliser le développement qui fera taire les armes.

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a dit être profondément attachée à la protection et à la promotion de l’éducation et de l’alphabétisation pour tous les enfants, pierre angulaire pour construire des sociétés plus résilientes, plus inclusives et plus durables.  L’Afrique étant un continent jeune, elle a estimé qu’en tant qu’acteurs du changement, les contributions des jeunes femmes et hommes aux processus de prise de décisions et de paix doivent être soutenues.  En veillant à ce que les programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion soient adaptés à l’âge et au sexe des participants, et qu’ils bénéficient d’un soutien physique et psychosocial complet, nous pourrons offrir aux jeunes des solutions alternatives à la violence, a fait valoir la déléguée.  Elle a également estimé que les politiques de développement doivent être conçues de manière à promouvoir une approche de proximité lorsqu’il s’agit de s’attaquer aux causes profondes des conflits.  La réalisation de l’agenda « Faire taire les armes » nécessite l’engagement et la coopération de toutes les parties prenantes en Afrique, avec le soutien de la communauté internationale, a martelé la représentante.  Lorsque les gouvernements, les organisations régionales, les partenaires internationaux, la société civile et le secteur privé travaillent ensemble, il sera possible de faire un pas de plus vers une Afrique pacifique et prospère pour tous, a-t-elle affirmé. 

M. ANDRÉS EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) a salué la détermination de l’Union africaine à « Faire taire les armes en Afrique » et a exhorté la communauté internationale à accompagner cet objectif, notamment en s’attaquant aux trafics d’armes avec l’appui de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime.  Il a également souligné le rôle important des opérations de maintien de la paix et des autres entités de lutte contre le trafic illicite d’armes légères et de petit calibre.  Le représentant a ensuite appelé à renforcer la lutte contre le crime organisé, la désinformation et la violence sexuelle et sexiste à l’encontre les femmes et les filles.  Il a insisté sur l’importance de la participation politique des femmes à la prévention des crises et des conflits afin de parvenir à des accords de paix durables.  La participation des jeunes aux efforts d’inclusion et de promotion de l’identité nationale est tout aussi essentielle.  Le respect et la promotion de la diversité et de la tolérance ethnique et religieuse doivent être encouragés, a estimé le représentant pour qui l’éducation, en plus d’être un instrument de développement, est un vecteur de civisme nécessaire à la paix.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a indiqué que son pays est en faveur de partenariats équitables et sur le long terme avec l’Afrique, en précisant que se tiendra à Londres en 2024 un sommet africain-britannique sur les investissements.  Il a plaidé pour des liens plus étroits entre efforts de développement et efforts de paix et sécurité au sein de l’ONU.  Il a aussi souhaité des partenariats renforcés entre l’ONU, l’UA et la Banque mondiale notamment.  Mon pays demeurera un fervent partisan de l’initiative « Faire taire les armes », a ajouté le délégué. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a considéré que, pour faire taire les armes, il est important de renforcer les politiques de développement qui cherchent à s’attaquer aux causes profondes des conflits.  L’Afrique, a-t-il observé, est un continent jeune et les dividendes de la jeunesse ne peuvent être effectivement perçus que si celle-ci est correctement éduquée et mobilisée dans l’innovation bénéfique et la création de valeur, a préconisé M. Agyeman.  Aussi a-t-il demandé un soutien international renforcé et durable pour le « développement générationnel » qu’apporte le pouvoir de l’éducation.  C’est pour cette raison que le continent a établi, dans le cadre de son programme de développement 2063, la Zone de libre-échange continentale africaine afin d’améliorer l’intégration économique et de libérer les potentiels de développement pour les populations du continent, s’est enthousiasmé le délégué. 

Il a ensuite salué le rôle crucial des chefs traditionnels et religieux dans le renforcement de la paix en Afrique, estimant que les valeurs morales et la sagesse autochtone qu’ils défendent leur ont valu d’occuper dans de nombreux pays africains une place qui leur permet d’influer positivement sur le paysage politique, la sécurité et le développement.  Au Ghana, par exemple, la Chambre nationale des chefs, le Conseil national pour la paix, le Conseil d’État et le Conseil chrétien du Ghana, qui comptent tous parmi leurs membres des chefs traditionnels et religieux, ont contribué de manière positive à la paix et à la stabilité de notre pays, a-t-il expliqué.  « Grâce à leurs efforts, le pacte de paix signé par tous les candidats à la présidence depuis les élections nationales de 2012 a renforcé la cohésion sociale et contribué à amplifier l’importance des processus pacifiques et légaux dans le traitement des griefs électoraux. » 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a signalé que l’Afrique est aux prises avec la pression du changement climatique, la persistance du terrorisme, et les chocs économique, sanitaire et géopolitique, sans compter le défi de la gouvernance et de la consolidation des États et l’impératif de traiter les causes profondes des conflits pour mettre en œuvre une paix durable.  Ces enjeux ne sont pas ceux de l’Afrique seule, ce sont des défis communs, a concédé le représentant prônant des réponses globales, coordonnées et solidaires.  Il a appuyé les solutions promues par l’Union africaine pour résoudre les conflits, se félicitant notamment de l’opérationnalisation du Fonds africain pour la paix avant de réitérer son plein soutien à la montée en puissance des opérations africaines de paix.  Il a indiqué que la France est prête à reprendre les discussions au Conseil de sécurité pour assurer un financement durable et prévisible de ces opérations, y compris sur contributions obligatoires. 

Au-delà des menaces sécuritaires, le représentant a appelé à établir des partenariats d’égal à égal avec les pays africains afin de mieux répondre aux enjeux de long terme, en particulier aux défis environnementaux et de développement.  Il a évoqué l’organisation, début mars par la France et le Gabon, du One Forest Summit pour lutter contre le dérèglement climatique et préserver la biodiversité.  Et pour financer des infrastructures durables, l’Union européenne a lancé il y a un an la stratégie Global Gateway.  Il a précisé que la moitié des 300 milliards d’euros mobilisés dans le cadre de cette stratégie sera dédiée à l’Afrique et plus d’un tiers de ses projets sera déployé en Afrique subsaharienne.  Le sommet que la France organisera les 22 et 23 juin à Paris permettra en outre de renforcer l’architecture financière internationale afin de lutter contre les inégalités et financer la transition climatique, a ajouté le représentant.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a appelé à prioriser la lutte contre le trafic d’armes légères et de petit calibre et de leurs munitions.  Pour que cela soit un succès, il faut que tous les partenaires africains signent et deviennent partie au Traité sur le commerce des armes.  Elle s’est inquiétée de l’absence d’institution de gouvernance, y voyant un grave obstacle à la capacité des États africains à faire avancer le développement durable mettant ainsi en danger la paix et la sécurité.  L’absence de gouvernance donne du pouvoir aux terroristes, aux groupes armés, accentuant la violence et l’instabilité, a noté la représentante qui a appelé les États à renforcer leur présence, y compris le long des itinéraires transfrontaliers des trafics. 

La déléguée a encouragé une démarche englobant l’ensemble de la société et la création de réseaux multipartites pour rétablir l’état de droit et renforcer la confiance dans les institutions dans les zones marginalisées et touchées par les conflits.  Pour ce faire, il faut travailler étroitement avec les dirigeants traditionnels et religieux, la société civile, les travailleurs humanitaires et les représentants des femmes et des jeunes.  L’action en faveur des familles et des jeunes grâce à l’éducation, entre autres, est particulièrement importante, a-t-elle ajouté.  La représentante a également appelé les États à investir davantage dans la promotion de la culture de paix et du respect des différences culturelles afin de contrer l’intolérance et toute forme d’extrémisme violent.  De même, elle a exhorté à lutter contre la corruption, et à renforcer la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales. 

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a estimé que les efforts visant à instaurer une paix durable en Afrique doivent s’attaquer aux causes profondes des conflits (pauvreté, prolifération illicite des armes légères et de petit calibre et de leurs munitions).  Il a appelé à mettre l’accent sur la prévention de la violence, en considérant l’ensemble des facteurs politiques, économiques et sociaux des conflits.  Le cycle de la violence ne peut être rompu que si celui de l’impunité l’est aussi, a-t-il ajouté, plaidant pour que la réduction de la violence armée et la reddition de comptes soient intégrées plus systématiquement dans les efforts de consolidation de la paix et de développement.  Il importe aussi, selon lui, de renforcer la capacité des gouvernements locaux à fournir des services publics équitables et durables, en particulier dans les régions périphériques et les zones de conflit, afin d’améliorer la confiance de la population et de restaurer la présence de l’État.  C’est ce que fait la Suisse en soutenant un projet de planification de l’éducation au Niger, notamment dans les situations d’urgence. 

Parallèlement, il faut également que les efforts humanitaires, de consolidation de la paix et de développement soient sensibles aux liens entre les changements climatiques et les conflits, a poursuivi le délégué, avant de souligner l’importance du dialogue pour désamorcer les tensions avant qu’elles n’éclatent en conflit et pour résoudre les conflits déjà existants.  Ce dialogue doit systématiquement inclure les femmes et la jeunesse et, selon le contexte, d’autres acteurs comme les chefs traditionnels et religieux, a-t-il préconisé, évoquant le soutien de son pays à des plateformes de dialogue régionales, telles que le processus de Nairobi, qui vise à faire avancer la paix dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).  À ses yeux, les bureaux régionaux des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel et pour l’Afrique centrale jouent aussi un rôle clef dans ce domaine en favorisant la création d’espaces de dialogue en collaboration avec l’Union africaine et les organisations sous-régionales. 

M. AMERY BROWNE, Ministre des affaires étrangères et de la CARICOM de Trinité-et-Tobago, a souligné que la nécessité de freiner le transfert illicite et l’utilisation abusive d’armes légères et de petit calibre et de munitions est une priorité de la politique étrangère de Trinité-et-Tobago et un objectif stratégique clef de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Par conséquent, a indiqué le Chef de la diplomatie trinidadienne, notre gouvernement a pris un certain nombre de mesures aux niveaux régional et continental pour renforcer le cadre de prévention, de lutte et d’éradication du commerce illicite des armes légères et de petit calibre.  De fait, Trinité-et-Tobago et certains États de la CARICOM ont soutenu une action en justice intentée contre des fabricants d’armes privés américains, dans le but de les tenir responsables dans la facilitation de la libre circulation des armes et munitions illicites dans toute la région, a encore précisé le Ministre. 

Mme KATJA KEUL, Ministre fédérale des affaires étrangères de lAllemagne, a salué les efforts accrus que déploient l’Union africaine (UA) et ses États membres pour s’attaquer aux causes profondes des conflits.  Elle a indiqué qu’en soutien de cet objectif, le Ministère allemand de la coopération économique et du développement a présenté en janvier une nouvelle stratégie pour l’Afrique, centrée sur une transformation sociale et environnementale juste, la création d’emplois pour la jeunesse et l’égalité des sexes.  La Ministre a ensuite estimé que, face à la menace transnationale posée par la prolifération des armes légères et de petit calibre, la réponse de la communauté internationale doit également être transnationale.  Elle a salué à cet égard les approches régionales, telles que le plan d’action de la CEDEAO, avant de préciser que son pays soutient les efforts nationaux et régionaux de renforcement des capacités en Afrique.  Ces mesures visent à lutter contre les flux financiers illicites liés au financement du terrorisme, mais aussi à améliorer la gestion et les capacités nationales de détection et de répression des frontières, a-t-elle relevé, ajoutant que pour la seule année 2022, l’Allemagne a consacré plus de 10 millions d’euros à des projets comme l’Africa Amnesty Month Project

De l’avis de la Ministre, une architecture de paix et de sécurité solide en Afrique est également essentielle pour lutter contre l’utilisation abusive des armes légères et de petit calibre ainsi que pour soutenir les efforts africains visant à résoudre les causes profondes sous-jacentes.  C’est pourquoi, a-t-elle expliqué, l’Allemagne assiste les institutions de l’UA dans la mise en œuvre des instruments économiques régionaux de l’Architecture africaine de paix et de sécurité.  Notre objectif commun est de prévenir les crises, gérer les conflits et construire une paix durable, a-t-elle résumé.  L’Allemagne soutient aussi l’appel au financement durable et prévisible des missions de paix dirigées par l’UA, a poursuivi la Ministre, qui s’est félicitée que l’organisation panafricaine ait trouvé une position commune sur cette question lors du récent sommet d’Addis-Abeba.  Sur un sujet connexe, elle a appelé tous les États Membres de l’ONU à se joindre à la proposition élaborée par le Groupe des États d’Afrique et l’Union européenne en faveur d’un financement adéquat et durable des opérations onusiennes de maintien, y compris par le biais de contributions obligatoires. 

Le Secrétaire dÉtat aux affaires étrangères et à la coopération du Portugal, M. FRANCISCO ANDRÉ, a constaté que l’Afrique connaît des obstacles sociaux, économiques, à la sécurité et au développement en suggérant qu’ils doivent être abordés par le biais d’une appropriation nationale et régionale d’une part, et d’une coopération internationale d’autre part.  Pour cela, le Secrétaire d’État a recommandé une approche multidimensionnelle pour répondre aux causes profondes des conflits, ainsi que des formes concertées de coopération pour lutter contre les menaces transnationales, telles que le terrorisme, l’extrémisme religieux, la piraterie et d’autres formes de criminalité organisée et de trafic illicite.  Les solutions purement militaires ne suffiront pas, a tranché le représentant appelant plutôt à œuvrer à un développement durable et inclusif et, à court terme, garantir une aide humanitaire à ceux qui en ont besoin.  En tant que fervent défenseur d’une relation plus profonde et plus large avec l’Afrique, dans le respect des programmes et priorités de développement du continent, l’approche de longue date du Portugal a toujours été de s’engager « avec » l’Afrique, et non de développer des politiques « sur » l’Afrique. 

Le Portugal a récemment approuvé la stratégie portugaise de coopération au développement à l’horizon 2030, a expliqué M. André, ajoutant qu’elle accorde une attention particulière aux pays en situation de fragilité et qu’elle mise sur des réponses intégrées, en particulier par le biais de l’axe humanitaire-développement-paix.  La stratégie reposant sur trois axes qui se renforcent mutuellement à savoir un soutien à l’intégration économique de l’Afrique, par le biais de la Zone de libre-échange continentale africaine, des organisations économiques régionales et du développement de chaînes de valeur régionales et locales; un soutien aux efforts de stabilisation, et de prévention et de gestion des crises régionales, sur la base du principe de l’appropriation africaine, en intégrant la sécurité au développement économique et la coopération humanitaire; et, en dernier lieu, un soutien au développement de corridors et d’infrastructures stratégiques (routes, chemins de fer, ports, énergie, numérique) pour relier les pays africains entre eux et pour relier l’Afrique au reste du monde, notamment par le biais des océans Atlantique et Indien.  C’est dans cette optique que le Portugal a participé activement aux efforts de coopération entre l’Afrique et l’Europe, a-t-il dit en citant le cas du Mozambique où il a déployé une mission militaire à Cabo Delgado pour renforcer la formation des troupes spéciales mozambicaines. 

M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a considéré que l’imposition artificielle de frontières est l’un des legs les plus problématiques et complexes du colonialisme, l’établissement de celles-ci ayant été motivées par des intérêts géostratégiques qui ne tenaient pas compte des identités et aspirations des peuples autochtones.  En outre, les mécanismes centralisés de gouvernance créés pour faciliter l’exploitation des colonies ont compliqué la tâche des États postcoloniaux désireux d’instaurer des formes durables d’autogouvernance, a encore analysé le délégué. 

« Au milieu des décombres de l’empire », la décision de l’Union africaine d’inscrire dans son acte constitutif le principe du « respect des frontières existant au moment de l’accession à l’indépendance » a sans aucun doute épargné au continent des conflits sécessionnistes, a poursuivi le représentant.  Avec cependant pour conséquence que les États nouvellement indépendants ont été confrontés à des questions complexes sur la relation, « peu étudiée », entre diversité sociale, paix et stabilité.  Un lien peu étudié, a noté le représentant, alors qu’il est essentiel pour garantir une paix durable.  En abordant cette question, l’ONU et le Conseil en particulier, devraient encourager les États à faire respecter les droits humains des minorités afin de renforcer la prévention des conflits, a estimé le représentant.  Il a relevé que nombre de situations dont le Conseil est saisi puisent leur origine dans l’exclusion de ces communautés réprimées de l’accès au pouvoir, aux opportunités, aux services et à la sécurité, « des inégalités qui ont pris racine dans l’État colonial ».  En faisant respecter les droits des minorités, il est possible à la fois de stimuler le développement et de prévenir les conflits, a argué le représentant. 

Le Liechtenstein, a révélé le représentant, a pour sa part rédigé un « Manuel sur l’autodétermination dans le cadre de la prévention et de la résolution des conflits », un ouvrage qui souligne l’importance des structures de gouvernance respectueuses des droits humains des minorités et examine comment le pouvoir peut être exercé le plus localement possible, à la fois comme mesure de prévention des conflits et pour mettre fin à ceux qui existent de manière durable. 

M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) a insisté sur les bonnes perspectives économiques de l’Afrique pour les années 2023-2024, malgré le resserrement des ressources financières mondiales.  Il a estimé que la réalisation de l’objectif « un continent africain exempt de conflits » est entre les mains de l’UA, des pays africains et de leurs populations.  Il a reconnu l’appui important de l’ONU aux efforts de médiation et de paix de l’UA, notamment au Mali ou encore au Soudan.  Enfin, il a rappelé que des Casques bleus philippins sont déployés en Afrique depuis 1963.  Aujourd’hui, un petit contingent philippin est déployé au Soudan du Sud et un autre en République centrafricaine, a indiqué le délégué. 

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a souligné que l’initiative « Faire taire les armes d’ici à 2030 » appartient à l’Afrique, est dirigée par l’Afrique et poursuit une approche globale dans la recherche d’une paix et d’une sécurité durables en Afrique, pour les Africains.  Il a plaidé pour une meilleure compréhension du lien entre la paix, le développement durable et la sécurité humaine pour surmonter les défis du continent africain.  Sans progrès dans la lutte contre la faim, la pauvreté et la maladie, il y a moins de chance pour une paix durable et pour que les armes se taisent, a fait valoir le représentant.  Il a ensuite estimé que l’autonomisation des personnes rend plus probable la pérennité des processus interdépendants de paix, de développement durable et de sécurité humaine, que ce soit au niveau communautaire ou national.  C’est pour cette raison, a-t-il dit, que la Thaïlande, soit par l’intermédiaire de l’agence thaïlandaise de coopération internationale, soit par le biais de ses forces de maintien de la paix dans des missions des Nations Unies, intègre la coopération technique et le renforcement des capacités centrés sur les personnes dans ses programmes avec les pays africains.  Le délégué a enfin souligné l’importance d’une « interface régionale-multilatérale », en complément des efforts nationaux en faveur de la paix et de la sécurité, qualifiant à cet égard de réussites le partenariat UA-ONU, la coopération internationale en appui au Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et les partenariats internationaux avec les organisations sous-régionales en Afrique.

M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a noté que selon une étude présentée au sommet de l’UA le mois dernier, l’Afrique doit maintenir un taux de croissance annuel d’au moins 7 à 10% pour parvenir à un développement durable.  Cela signifie que nous devons de toute urgence trouver de nouvelles approches pour doubler les chiffres actuels, a-t-il souligné.  Il a aussi appelé à renforcer la résilience, arguant que l’un des moyens d’apporter plus de stabilité au continent est de renforcer la connectivité et de rétablir la confiance dans le multilatéralisme et les partenariats internationaux.  Afin d’assurer une meilleure réponse aux chocs potentiels futurs, il est crucial d’investir dans des infrastructures de qualité et résilientes et de soutenir le renforcement des capacités des pays en développement, a fait valoir le délégué, en soulignant la nécessité d’un soutien à long terme pour réduire leurs vulnérabilités aux crises extérieures, telles que les crises alimentaire, énergétique et climatique. 

Passant aux risques sécuritaires liés au climat, le représentant a souligné qu’il ne peut y avoir de réalisation d’une Afrique sans conflit sans reconnaître le lien indéniable entre le climat, la paix et la sécurité, notant que la concurrence pour des ressources naturelles rares, comme l’eau, est un moteur de conflits, de violences intercommunautaires et d’insécurité alimentaire.  Il a appelé le Conseil de sécurité à reconnaître et à évaluer correctement les implications des changements climatiques sur la sécurité arguant que ce n’est qu’à cette condition qu’il sera véritablement possible d’aborder le problème de la rareté des ressources dans une perspective de prévention des conflits.  Il a également souligné l’importance de renforcer les institutions de l’État et les structures de gouvernance, de faire respecter l’état de droit et de promouvoir le dialogue entre les communautés locales.  Des institutions étatiques fortes, capables de fournir des services sociaux de base, de protéger les frontières nationales, de rendre justice et de contrôler les flux d’armes, devraient être considérées comme une condition préalable au retour de la stabilité et à la sauvegarde du développement à long terme.

M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a appelé le Conseil de sécurité à examiner les effets négatifs du trafic et du détournement des armes légères et de petit calibre.  Il a regretté que l’Afrique, l’Amérique latine et les Caraïbes souffrent de ce fléau alors que les principaux producteurs ne se trouvent pas dans ces régions et ne semblent pas être disposés à assumer leur responsabilité.  Le représentant a salué les progrès enregistrés grâce à l’initiative « Faire taire les armes », tout en appelant à davantage de réglementations pour empêcher leur trafic illégal.  Il a rappelé l’adoption des résolutions 2220 (2015) et 2616 (2021) du Conseil de sécurité, la dernière appelant au respect des embargos sur les armes imposées par le Conseil.  Le représentant a aussi attiré l’attention sur la situation qui prévaut aujourd’hui en Haïti informant que son pays a coparrainé la résolution 2653 (2022) pour empêcher la fourniture d’armes aux acteurs responsables de la violence dans ce pays.

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a détaillé les efforts de son pays pour soutenir l’initiative « Faire taire les armes », en mentionnant la création d’une unité de médiation au sein de l’UA.  L’Égypte veille à sauvegarder les efforts de stabilisation en Afrique et accueille le centre pour la consolidation de la paix en Afrique, a-t-il aussi rappelé.  Il a indiqué que son pays veille à renforcer le rôle consultatif de la Commission de consolidation de la paix auprès du Conseil.  Il a par ailleurs souligné les répercussions de la guerre en Ukraine pour la sécurité alimentaire des pays africains.  La stabilité du financement des opérations de paix africaines doit être étudiée de très près, a conclu le délégué égyptien. 

M. OMAR HILALE (Maroc) a estimé que l’initiative « Faire taire les armes » représente un cadre stratégique pour le règlement pacifique des différends et le développement du continent africain.  Se disant convaincu qu’il ne peut y avoir de sécurité sans développement, ni de développement sans sécurité, il a indiqué que son pays a précisément inscrit son action autour du triptyque paix, sécurité et développement.  Dans ce cadre, a-t-il précisé, le Maroc a abrité la première conférence politique de l’Union africaine (UA) sur la promotion du « nexus paix, sécurité et développement » en octobre dernier à Tanger.  L’an dernier, le pays a également organisé, avec le Département des affaires politiques de l’UA, le premier atelier de formation spécialisé pour les observateurs électoraux africains.  Il a indiqué que le Royaume a fait du développement du continent une priorité de sa politique étrangère.  L’Institut Mohammed VI de formation des imams propose en outre des enseignements destinés à contrer la pensée obscurantiste et l’extrémisme violent, a encore relevé le délégué.  Pour faire taire les armes efficacement sur le continent, il est selon lui nécessaire de régler les causes profondes des conflits, notamment la pauvreté, et de mettre en place des mécanismes de contrôle de la prolifération des armes légères et de petit calibre.  Il faut aussi démanteler les structures de recrutement, de financement et d’endoctrinement des terroristes, a-t-il plaidé, avant de saluer la création de la Zone de libre-échange continentale africaine, « cadre idéal pour renforcer le développement en Afrique ».  Enfin, il a appelé à prendre en compte les changements climatiques dans toutes les stratégies nationales, régionales et continentales pour le maintien et la consolidation de la paix.

M.  MAURIZIO MASSARI (Italie) a salué l’initiative « Faire taire les armes » en ce qu’elle se concentre sur les moteurs du conflit en Afrique et reconnaît l’urgence qu’il y a à les supprimer.  Mon pays, a-t-il dit, est prêt à apporter sa contribution, étant donné que l’appui international ne doit pas seulement traiter des urgences mais aussi s’attaquer aux problèmes structurels et aux causes sous-jacentes des conflits, telles que l’insécurité alimentaire, l’exclusion sociale, l’absence d’état de droit et l’extrémisme violent.  Attirant l’attention sur trois questions qui pourraient bénéficier d’une action plus concertée, le représentant s’est d’abord attardé sur le potentiel de la Zone de libre-échange continentale africaine, avant d’annoncer qu’avec les Nations Unies, son pays va organiser une manifestation sur l’évaluation du Sommet sur les systèmes alimentaires, au mois de juillet de cette année. 

Il a ensuite parlé de la nécessité de promouvoir la participation de tous aux processus de prise de décisions, la transparence, la redevabilité et la confiance dans les institutions publiques.  Ici aussi, a-t-il dit, l’Italie déploiera des efforts dans le cadre de la Conférence annuelle sur le seizième objectif de développement durable, à Rome.  S’agissant de la lutte contre l’extrémisme violent, le représentant a indiqué qu’avec le Maroc, le Niger et les États-Unis, son pays préside le groupe de réflexion de la coalition anti-Daech.  L’Italie appuie aussi les liaisons régionales du Bureau de la lutte contre le terrorisme. 

M. KIM SANGJIN (République de Corée) a déclaré que pour que l’Afrique fasse taire les armes, mettre simplement fin aux guerres ou aux conflits ne suffira pas, insistant sur l’importance de mettre en place des institutions résilientes et renforcer la gouvernance.  La réforme du secteur de la sécurité est l’une des mesures essentielles pour renforcer et consolider la paix dans les situations de postconflit, de même que les initiatives de justice transitionnelle qui traitent de la reddition de comptes.  À cet égard, le rôle crucial de la Commission de consolidation de la paix et du Fonds pour la consolidation de la paix ne saurait être surestimé, a-t-il estimé, soulignant l’importance d’utiliser les quotes-parts pour financer ce dernier, ainsi que les opérations de la paix de l’UA autorisées par le Conseil de sécurité.  La République de Corée contribue régulièrement à ce fonds depuis 2006, dont 4,3 millions de dollars cette année.  Nous avons également contribué plus de 17 millions de dollars aux activités de paix et de sécurité de l’Union africaine, a-t-il fait savoir.

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a indiqué que son pays coopère avec l’IGAD en vue de renforcer les systèmes d’alerte précoce dans la Corne de l’Afrique face aux menaces sécuritaires transnationales.  L’Autriche contribue aussi, par le biais du programme DELPAZ, à l’amélioration des conditions de vie des communautés rurales dans les zones touchées par le conflit au Mozambique, ainsi qu’à la restauration de la sécurité dans la région de Cabo Delgado, toujours au Mozambique, par le biais de la mission de l’UE.  Il a indiqué que l’éradication des armes légères et de petit calibre dans le cadre de l’initiative « Faire taire les armes » exige une coopération internationale.  L’Autriche et le Sénégal participent à un projet de ce type, a fait savoir le délégué. 

M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a observé que, compte tenu de sa richesse en ressources naturelles et humaines, le continent africain possède un énorme potentiel de croissance économique et de développement.  Cependant, se concentrer uniquement sur le développement économique sans s’attaquer aux causes profondes des conflits et de la violence ne suffira pas.  Une approche globale et intégrée est, à ses yeux, essentielle et doit s’appuyer sur la construction de sociétés résilientes.  En favorisant la croissance économique, en créant des emplois et en améliorant l’accès à une éducation de qualité, aux soins de santé et à l’eau potable, les politiques de développement contribuent à bâtir des sociétés inclusives et résilientes, a affirmé le représentant, pour qui il importe aussi d’investir dans le dialogue interculturel, l’éducation aux droits humains et la société civile.  Cette approche doit par ailleurs s’appuyer sur l’inclusivité, a-t-il poursuivi, soutenant que le sentiment d’appartenance et d’appropriation nationale ne peut être atteint que lorsque tous les segments de la société ont une voix dans les processus de développement.  Dans ce cadre, les femmes et les jeunes doivent jouer un rôle essentiel dans la promotion du développement durable et de la paix, a plaidé le délégué, avant d’appeler à intégrer les changements climatiques dans cette réflexion.  Face à ce phénomène, facteur de pauvreté, d’insécurité alimentaire, de rareté de l’eau, de déplacements et de conflit, les politiques de développement doivent donner la priorité à l’action, a-t-il dit, en appelant à promouvoir les énergies renouvelables, l’utilisation durable des terres et la gestion des ressources naturelles.

M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne (UE), a voulu que l’on se concentre sur le Programme 2030, soulignant l’importance qu’il y a à investir dans le développement durable pour traiter des causes sous-jacentes des conflits et la nécessité de promouvoir une connectivité et une intégration plus grandes dans tout le continent africain pour améliorer l’accès aux services sociaux de base et aux opportunités économiques.  Dans ces deux domaines, a dit le représentant, l’UE concrétise ses engagements, en collaboration étroite avec l’Union africaine et appuie la réalisation de l’Agenda 2063.  Il a donné l’exemple du Mozambique où l’UE, réunie avec le PNUD, le FNUAP et les autorités locales autour du projet « ResiNorte – Resilience for the North », renforce la cohésion sociale, la paix et la stabilité, dans le cadre du nexus humanitaire-développement-paix. 

Le représentant a aussi donné l’exemple de la stratégie actualisée pour le Sahel qui se concentre sur la nécessité de renforcer la gouvernance et de fournir des services sociaux de base, comme facteurs cruciaux de la stabilisation de la région.  L’UE appuie également les efforts de médiation entre les communautés et les forces de sécurité du Kenya, et offre une formation aux de forces de sécurité du Nigéria dans la protection des civils et l’engagement avec les communautés locales. 

Le représentant s’est félicité du consensus qu’a su dégager la Cinquième Commission sur le financement de la consolidation de la paix.  Il a rappelé, dans son cadre, que l’UE appuie toujours les opérations d’appui à la paix de l’Afrique.  Il a aussi rappelé que l’UE vient d’adopter une stratégie renouvelée pour les Grands Lacs, le but étant de passer des tensions à la confiance, et du trafic des ressources naturelles au commerce et au développement durable.  L’UE va donc contribuer à l’amélioration de la gestion des ressources naturelles ainsi que de la coopération et des infrastructures transfrontalières.  L’UE, a encore rappelé le représentant, est la pourvoyeuse la plus importante d’aide publique au développement (APD) et le premier partenaire commercial de l’Afrique. 

Elle mobilise une somme minimum de 150 milliards d’euros d’ici à 2027 pour les secteurs du transport, de l’éducation, de la santé, de l’énergie et de la numérisation, tout en poursuivant ses efforts pour l’adaptation aux changements climatiques.  Il ne faut pas perdre de vue, a conclu le représentant, que le Programme 2030 est indivisible: la paix et la sécurité vont de pair avec le développement durable, les droits de l’homme et l’égalité des sexes. 

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a raconté une histoire qui s’est déroulée dans les régions de Turkana et de Pokot, au Kenya, où des différends de longue date sur les terres agricoles ont dégénéré en conflit violent lorsque l’industrie sucrière locale, le principal employeur, s’est effondrée en raison de la corruption et du détournement de fonds.  Les changements climatiques et l’extraction des ressources réduisant le stock de terres arables, les choses semblaient devoir empirer.  Les perspectives d’emploi étant limitées, les jeunes hommes ont abandonné l’école et se sont tournés vers le vol de bétail pour payer les dots et fonder des familles.  De plus en plus disponibles, les armes à feu ont remplacé les lances et les flèches, et le vol de bétail est devenu une activité de plus en plus meurtrière.  Depuis, de nombreux jeunes hommes sont morts en essayant de voler du bétail, et de nombreuses jeunes épouses sont devenues veuves.  En réaction, le forum des femmes de POTUMA a été créé en 2016.  Bien que traditionnellement exclues de la prise de décisions politiques, les femmes ont commencé à remettre en question les normes de genre.  Elles ont notamment boycotté les cérémonies qui célébraient les voleurs de bétail et franchi les frontières de leur communauté pour créer des espaces de dialogue.  Bien que l’instabilité persiste, le forum des femmes de POTUMA a résolu des conflits à plusieurs reprises.  

Pour faire taire les armes, a poursuivi la représentante, il faut prévenir et éradiquer le commerce illicite et le détournement des armes classiques par la mise en œuvre effective des instruments internationaux et régionaux de contrôle des armements.  Elle a également insisté sur le besoin de fournir des ressources humaines et financières au niveau local pour atténuer la violence armée, mettre fin aux conflits et parvenir à la paix et au développement durable.  Elle a donc appelé à travailler plus aux niveaux régional et national avec les organisations de la société civile dans la mesure du possible.  Il faut impliquer les jeunes et adopter une perspective à long terme pour faire face aux menaces qui pèsent sur la sécurité, a-t-elle ajouté.  Relevant que l’âge moyen d’un citoyen africain est inférieur à 20 ans en Afrique, il a jugé nécessaire de faire participer les jeunes aux processus de prise de décisions et à la mise en œuvre de l’initiative « Faire taire les armes ».  Il a aussi appelé à garantir la participation pleine, égale et significative des femmes au règlement des conflits et à la consolidation de la paix, arguant que les femmes sont des agents du changement et de la paix dans leurs communautés et au-delà.

M. ANTÓNIO VITORINO, Directeur général de lOrganisation internationale pour les migrations (OIM), a souligné que les conflits et la violence sont les forces motrices du déplacement massif des populations.  À la fin de 2021, on comptait en effet 53,2 millions de personnes, ce qui est un record historique.  Ces déplacés peuvent devenir un facteur de violence puisqu’ils viennent se disputer les ressources, les terres, les services voire la gouvernance dans les pays d’accueil.  Dans ce cadre, le Directeur général a attiré l’attention sur la cruelle ironie selon laquelle ceux qui fuient le terrorisme et les conflits armés sont souvent vus comme des terroristes et des criminels, en raison des politiques et d’un sentiment anti-migrants généralisés.  Or une migration bien gérée, a poursuivi le Directeur général, peut être un moteur pour atténuer les effets combinés des conflits, des changements climatiques et du manque de développement.  Autonomisés, les migrants et les déplacés peuvent contribuer à la stabilité et à la prospérité économiques des pays d’accueil. 

Le Directeur général a plaidé pour l’inclusion des données sur la mobilité humaine dans les analyses des conflits.  Savoir pourquoi les gens partent, les solutions qu’ils proposent à la question des déplacements et les obstacles à leur intégration ou réintégration est essentiel pour la paix et la préservation des gains réalisés dans les objectifs de développement durable.  Les capacités nationales et régionales de prévenir et de trouver des solutions aux déplacements forcés doivent être renforcées pour identifier les causes sous-jacentes et les tendances des conflits.  L’OIM est prête à contribuer au Mécanisme humanitaire africain ainsi qu’au Système africain d’alerte et d’action rapides, a assuré le Directeur général. 

M. IVAN ŠIMONOVIĆ (Croatie), s’exprimant au nom du Groupe des Amis de la responsabilité de protéger, a souligné la nécessité, pour prévenir et remédier aux atrocités, de mieux comprendre les signes d’alerte précoce.  Un accès inégal à la justice et au marché de l’emploi, ainsi qu’un rétrécissement de l’espace démocratique peuvent contribuer à l’instauration d’un environnement propice à la commission d’atrocités, a-t-il fait remarquer.  Il a rappelé la responsabilité de protéger de tous les États, qui passe par l’adoption de mesures effectives visant à remédier aux causes profondes des conflits.  Les acteurs de la société civile jouent un rôle clef dans l’identification des signes précoces de la commission d’atrocités, a-t-il observé.  Enfin, le délégué a souhaité la pleine mise en œuvre du programme femmes et paix et sécurité dans le cadre de l’initiative « Faire taire les armes ». 

M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a jugé essentiel de reconnaître les liens entre toutes les menaces à la paix et à la sécurité en Afrique, citant notamment des défis socioéconomiques et climatiques, combinés aux flux financiers illicites et aux activités criminelles qui alimentent les conflits et l’instabilité sur le continent.  Les flux financiers illicites facilitent les trafics illicites d’armes, en particulier d’armes légères et de petit calibre, vers des acteurs non étatiques, tels que les groupes armés rebelles, les terroristes et les criminels, a-t-il fait valoir en soulignant que l’endiguement des flux financiers illicites rendra plus difficile l’acquisition illicite d’armes légères.  Il a regretté qu’à ce jour, la circulation et le détournement illicites d’armes se poursuivent sur le continent, au mépris des mesures prises par l’UA et les régions, ainsi que des résolutions du Conseil de sécurité.  Cela représente une menace pour le redressement, la reconstruction et le développement à long terme, a insisté le représentant en arguant qu’une plus grande transparence faciliterait la détection et permettrait d’interrompre les flux d’armes illicites.  Il a également demandé à la communauté internationale de s’engager activement dans un partenariat avec l’Afrique en fournissant une assistance dans le domaine de la prévention des conflits et de la consolidation de la paix, y compris leur financement adéquat.

Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a salué les progrès enregistrés depuis le lancement de l’initiative « Faire taire des armes » grâce aux efforts de l’UA et des gouvernements africains, avec la participation de partenaires régionaux et internationaux.  Elle a souligné les impacts des politiques de développement sur la mise en œuvre de l’initiative, lorsque les efforts s’attaquent aux causes des conflits et promeuvent le développement socioéconomique, en contribuant ainsi à la paix, à la sécurité et au développement durable sur le continent.  Tel est l’objectif principal de l’État du Qatar dans ses partenariats bilatéraux et régionaux qui visent à promouvoir la croissance économique inclusive, la réduction de la pauvreté et des inégalités ainsi que l’accès accru aux soins de santé et à l’éducation, a fait savoir la déléguée.  Elle a aussi parlé du soutien apporté par son pays au renforcement de la résilience et des capacités des communautés. 

Selon la déléguée, l’objectif de faire taire les armes et de faire cesser les guerres en Afrique et dans le monde entier relève de la responsabilité de l’ensemble de la communauté internationale et donc du Qatar.  La déléguée a encouragé l’ONU et les États africains à poursuivre cette initiative pour atteindre ses objectifs d’ici à 2030.  Elle a souligné à cet égard l’importance de la diplomatie préventive, de la médiation et du règlement pacifique des conflits.  Alors que son pays a une longue expérience en matière de règlement de plusieurs conflits régionaux et internationaux, la représentante a souligné la nécessité de s’attaquer aux causes des conflits en mettant l’accent sur la consolidation de la paix, la médiation, le dialogue ainsi que la participation des femmes et des jeunes et des personnes vulnérables touchées par les conflits.

S’exprimant au nom des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège), M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a fait part de son appui de longue date à l’UA et à ses communautés économiques régionales et de son soutien à la mise en œuvre de l’architecture africaine de paix et de sécurité.  Il a estimé que l’opérationnalisation du lien entre l’humanitaire, le développement et la paix est essentielle pour définir l’approche globale nécessaire pour faire taire les armes, un objectif que les politiques de développement doivent pleinement intégrer.  Enfin, il a appelé à veiller à ce que les femmes et les autres parties prenantes participent pleinement, sur un pied d’égalité et de manière significative, aux processus de prise de décisions et de consolidation de la paix, afin de tirer parti des connaissances et des solutions locales pour faire taire les armes dans les communautés.

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a appelé à remédier aux causes profondes des conflits, en plaidant pour une approche inclusive.  Soulignant la nécessité d’améliorer tangiblement la vie des Africains, il a appelé à l’élaboration de politiques de développement « positives », avant de prendre l’exemple de son pays.  Depuis la fin de la guerre civile, la Sierra Leone a mis en œuvre trois stratégies de réduction de la pauvreté qui ont permis de consolider la paix.  Enfin, il a appelé à la mobilisation des ressources nécessaires en appui des politiques de développement. 

M. EVANGELOS SEKERIS (Grèce) a estimé que l’initiative « Faire taire les armes » nécessite de regarder au-delà des questions de paix et de sécurité, en se concentrant sur la transformation structurelle de la sphère socioéconomique et en veillant à ce que tous les Africains bénéficient d’économies intégrées et inclusives.  Malgré les défis, le représentant s’est dit optimiste pour l’avenir de l’Afrique: sa population jeune, son abondance de ressources et sa diversité ont le potentiel de transformer le continent en un immense moteur de paix et de prospérité mondiales, a-t-il affirmé, voyant dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine un « modèle utile » à cette fin.  Invitant l’Afrique à créer ses propres institutions, politiques et stratégies pour prévenir les conflits, il a plaidé pour que l’accent soit mis sur le développement humain, notamment dans les services de base, tels que la santé et l’éducation.  Il s’est également prononcé pour une approche sur mesure du financement mixte et des investissements, qui tienne compte des besoins spécifiques et des vulnérabilités des pays africains.  Le délégué a d’autre part jugé essentiel d’assurer des systèmes de prestation de services publics efficaces, afin de garantir que l’État est perçu comme une présence légitime et active, même dans les zones les plus reculées.  Enfin, il s’est dit convaincu que la mise en œuvre efficace de la Zone de libre-échange continentale africaine facilitera le commerce intra-africain pour les microentreprises et petites et moyennes entreprises, élargira l’accès aux marchés et créera de nouvelles opportunités pour améliorer les moyens de subsistance des Africains.

M. CLAVER GATETE (Rwanda) a estimé qu’il faut embrasser les engagements liés à la paix contenus dans le Programme 2030.  Les progrès enregistrés dans les 36 cibles relatives à la paix, à la justice et à l’inclusion doivent être soulignés dans tous les rapports sur la mise en œuvre des objectifs de développement durable, pour insister sur le rôle de la paix comme condition indispensable du développement.  Il faut aussi, a poursuivi le représentant, réaffirmer l’engagement en faveur des droits humains.  Le moment est venu pour tous les États Membres de reconnaître clairement l’importance égale des trois piliers de l’ONU, à savoir le développement, les droits de l’homme, et la paix et la sécurité.  Il faut « penser localement et agir mondialement », a martelé le représentant, expliquant que 40% des cibles de l’objectif de développement durable no 16 exige une mise en œuvre aux niveaux régional et international. 

Mme NIAMH MARY KELLY (Irlande) a reconnu la nécessité de s’attaquer aux facteurs socioéconomiques sous-jacents qui peuvent alimenter les tensions et contribuer au conflit.  « C’était vrai en Irlande du Nord.  Cela reste vrai dans de nombreuses régions d’Afrique aujourd’hui, où les facteurs de conflit sont aggravés par l’héritage de l’esclavage, de la colonisation, de l’imposition de frontières artificielles et de l’exploitation injuste des ressources naturelles », a-t-elle dit.  La représentante a vu dans le Mozambique un exemple de réussite émergente.  Il est remarquable de penser que le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration prévu par l’Accord de paix et de réconciliation de Maputo est sur le point de s’achever, s’est-elle félicitée.  Mais ailleurs, sur le continent, la multiplication des changements anticonstitutionnels de gouvernement est une source d’inquiétude, a remarqué la déléguée.  Dans d’autres contextes, les progrès sont freinés par des lacunes dans la gouvernance et par une convergence de vulnérabilités et de problèmes sécuritaires tels que le terrorisme et l’extrémisme violent, l’afflux de combattants étrangers et de mercenaires, la corruption, la criminalité transnationale organisée et les effets des changements climatiques.  Dans ce contexte, la communauté internationale a un rôle essentiel à jouer, en coordination avec l’Union africaine et les initiatives sous-régionales, a-t-elle estimé. 

M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a dit que son pays a organisé un programme de formation à la stabilisation et à la reconstruction postconflit dont les quatre dernières sessions ont été consacrées à l’Afrique.  Ce programme s’est tenu en 2019 en Éthiopie en coopération avec l’UA, a-t-il précisé.  Il a déclaré que son pays connaît bien les défis que le continent africain doit relever: fuite des cerveaux, prise en compte des coûts de l’économie verte, défi des nouvelles technologies.  Enfin, il a dit que la Roumanie est prête à partager les leçons qu’elle a apprises de l’instauration de la démocratie au cours des 30 dernières années. 

M. JAKUB KULHÁNEK (République tchèque) a appelé à diversifier l’agriculture afin de la rendre plus résistance aux effets adverses des changements climatiques, notant que ce secteur représente l’épine dorsale de l’économie africaine.  Il faut aussi soutenir les petits et moyens producteurs et veiller à ce que les agriculteurs jouissent d’un meilleur accès aux services financiers.  Le représentant a également appelé à prêter attention aux jeunes, et à l’autonomisation économique des femmes et des filles des zones rurales, sans oublier les efforts à déployer pour aider le continent à répondre aux répercussions des changements climatiques.  Avec l’adaptation climatique, il sera possible de renforcer la stabilité dans son ensemble, a-t-il relevé.  L’Afrique ne sera stable et résiliente aux conflits que si elle peut dépendre d’une agriculture efficace et résiliente aux changements climatiques et s’avère encore mieux préparée à faire face aux catastrophes naturelles. 

M. TESFAYE YILMA SABO (Éthiopie) a relevé que l’initiative « Faire taire les armes » stipule clairement que la paix, la sécurité et le développement socioéconomique doivent être poursuivis simultanément.  Cette approche régionale du développement et de la paix repose sur le principe selon lequel la sécurité, la stabilité et le développement de chaque pays africain sont indissociablement liés à ceux des autres pays africains, a-t-il souligné.  Pour que l’Afrique libère son potentiel de développement et récolte le dividende démographique dont elle jouit en raison de la jeunesse de sa population, elle doit être le moteur de son propre développement, grâce à une gestion durable de ses ressources, a affirmé le délégué qui a revendiqué le droit souverain inaliénable des pays africains d’utiliser et de gérer leurs ressources naturelles et de répondre aux besoins de la population africaine.  Pour sa part, l’Éthiopie a intégré cette approche dans ses politiques nationales, a-t-il expliqué, en optant notamment pour une économie verte et la résilience climatique. 

Conscients du fait que le développement économique doit être complété par d’autres efforts, le représentant a appelé à mettre en place des systèmes de gouvernance efficaces et démocratiques adaptés au contexte, ce qui passe, a-t-il précisé, par la bonne gouvernance, l’inclusion sociale et le respect des droits humains, de la justice et de l’état de droit.  Il faut également veiller à ce que les causes profondes de l’extrémisme et de la violence soient traitées de manière concertée et au moyen d’interventions multidimensionnelles, a poursuivi le délégué.  Pour cela, il est indispensable de renforcer la coopération et les partenariats afin d’endiguer les menaces à la paix et à la sécurité émanant non seulement de causes internes mais aussi de sources externes, a-t-il déclaré. 

Promouvoir un agenda du développement est essentiel pour l’appropriation nationale du Programme 2030, a déclaré M. THOMAS NWANKWO CHUKWU (Nigéria) qui a insisté sur des stratégies de relance et de résilience traitant des causes sous-jacentes des conflits.  Il faut aussi, a-t-il poursuivi, garantir un financement adéquat, prévisible et durable des activités de paix et de sécurité, ce qui demeure un défi pour l’Union africaine et ses États membres.  Le représentant a, par exemple, jugé utile de prévoir dans le budget ordinaire de l’ONU un appui financier aux opérations de paix conduites par l’Union africaine.  Il a ensuite plaidé pour le renforcement des capacités de recherche sur les flux illicites d’armes dans sa région.  Le Nigéria, a-t-il indiqué, a créé un centre national de contrôle des armes légères et de petit calibre qui offre des directives et qui suit tous les aspects de la question dans le pays.  L’initiative « Faire taire les armes », a prévenu le représentant, ne se concrétisera jamais si le terrorisme persiste.  Le Nigéria, a-t-il annoncé, va accueillir un sommet régional sur le contreterrorisme cette année à Abuja, pour identifier les moyens de renforcer la riposte régionale.  En l’occurrence, l’appui du Conseil de sécurité serait important pour le succès de cette manifestation, a conclu le représentant. 

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a indiqué que, parmi les défis que l’Afrique doit relever, celui des mercenaires doit recevoir une attention particulière.  Elle s’est inquiétée de la présence accrue en Afrique du groupe Wagner, qui est une organisation internationale criminelle.  Nous disposons d’allégations crédibles faisant état d’atrocités commises par ce groupe, y compris la torture et les meurtres systématiques de civils, a dit la déléguée.  Elle a précisé que ce groupe participe aux combats contre les forces armées ukrainiennes, en recrutant notamment dans les prisons russes des milliers d’hommes, y compris d’ascendance africaine, lesquels sont cyniquement exploités dans cette guerre. 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a estimé que la communauté internationale devrait s’unir pour soutenir les efforts africains visant à faire taire les armes d’ici à la fin de cette décennie.  Alors que les pays du continent font face à des facteurs internes comme externes de conflit, il importe tout d’abord de reconnaître la primauté des autorités nationales dans la conduite des priorités et des stratégies pour soutenir la paix, le développement, et ainsi éviter de retomber dans le conflit, a souligné la représentante.  Il faut aussi, selon elle, accepter que des solutions africaines soient apportées aux problèmes de l’Afrique, car « essayer une solution externe unique est l’échec assuré ».  Il revient, dans ce contexte, au Conseil de sécurité de tirer parti de l’avantage comparatif des organisations régionales et sous-régionales africaines pour résoudre les conflits prolongés, a-t-elle avancé, observant que la collaboration entre l’ONU et l’UA a toujours donné des résultats positifs, de même que les partenariats entre l’ONU et les organisations sous-régionales telles que la CEDEAO, la CEEAC, la SADC et l’IGAD. 

La représentante a par ailleurs jugé essentiel de renforcer les capacités des réponses nationales, régionales et sous-régionales au terrorisme en Afrique, via la formation, l’équipement et un soutien financier durable.  Des initiatives telles que l’AMISOM, la Force conjointe du G5 Sahel et la Force multinationale mixte ont besoin d’un soutien plus solide de la part du Conseil de sécurité et de la communauté internationale, a-t-elle affirmé, avant d’appeler à une intensification des efforts de consolidation de la paix en Afrique.  À cette fin, les principaux donateurs, en particulier les pays développés et les institutions financières internationales, devraient accroître leurs engagements en matière d’aide publique au développement (APD) et éliminer les obstacles au financement concessionnel des économies africaines, a-t-elle plaidé.  Enfin, elle a estimé que pour garantir la crédibilité du Conseil, l’Afrique devrait bénéficier d’une représentation permanente dans sa prise de décisions. 

Mme ANA JIMÉNEZ DE LA HOZ (Espagne) a déclaré que son pays est attaché à la primauté du lien entre sécurité et développement, qui a inspiré les deux présidences successives de l’Espagne à l’Assemblée générale de l’Alliance du Sahel.  Notre coopération a été particulièrement axée sur le soutien au pilier paix et sécurité, visant à promouvoir la paix et la stabilité, la bonne gouvernance, les droits humains et la prévention du terrorisme, a-t-elle poursuivi, en mentionnant l’attention particulière portée à la promotion de l’égalité des sexes et à la participation des femmes dans le domaine de la gouvernance, de la paix et de la sécurité.  Récemment, en collaboration avec ONU-Femmes, l’Espagne a organisé un séminaire au Niger sur le rôle des femmes médiatrices.  En outre, elle a contribué à hauteur de 400 000 euros au programme de la CEDEAO pour les femmes, la paix et la sécurité, et à hauteur de 20 millions d’euros à l’autonomisation des femmes africaines par l’intermédiaire du Fonds Espagne-NEPAD, a encore précisé la représentante. 

M. HARI PRABOWO (Indonésie) a souligné la nécessité au niveau national d’assurer l’autonomisation des communautés locales, y compris les femmes et les jeunes, pour suivre une approche de bas en haut dans la mise en œuvre d’un processus de paix.  L’ONU et le Conseil de sécurité doivent soutenir ces mécanismes centrés sur les populations, a-t-il demandé.  Le représentant a également appelé, au niveau régional, à renforcer les partenariats au nom du principe que les régions savent ce qu’il faut faire en termes de prévention, pour répondre aux défis sécuritaires ainsi que pour mener efficacement les efforts de maintien de la paix.  À cet égard, a-t-il recommandé, l’UA et les organisations régionales doivent améliorer la synergie entre les initiatives sécuritaires comme « Faire taire les armes » et les projets de développement.  Les partenariats entre l’ONU et les entités régionales sont aussi nécessaires pour amorcer un dialogue stratégique et créer des plateformes de collaboration, a ajouté le délégué avant de plaider pour le renforcement des partenariats internationaux en matière de bonne gouvernance, notamment à travers la coopération Sud-Sud.  En outre, il a conseillé de miser sur une stratégie intégrée de maintien de la paix.  La Commission de consolidation de la paix doit renforcer son rôle en apportant un volet sécurité et développement dans les contextes postconflit, a-t-il encore suggéré.  Enfin, le représentant a souhaité voir élargir les sources de financement du développement et des efforts de paix, en partenariat avec les institutions financières internationales et le secteur privé.

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a fait observer que l’initiative « Faire taire les armes » représente un effort majeur visant à mettre fin aux conflits sur le continent africain et qu’elle pourrait jouer un rôle important dans la réduction de ces conflits en limitant la disponibilité des armes illicites.  Au cours des deux dernières décennies, l’UA et ses mécanismes régionaux ont démontré leur capacité à faire face aux situations de conflit et de crise sur le continent, a-t-il relevé en soulignant le soutien et la collaboration des Nations Unies avec l’UA, notamment dans le cadre du partenariat pour la paix et la sécurité, signé le 19 avril 2022.  Cet accord a cimenté la relation entre les deux organisations et leur poursuite commune de la paix et de la sécurité en Afrique, a salué le représentant.  Notant par ailleurs que le terrorisme constitue un obstacle au développement des pays africains, il a jugé essentiel que les complexités de ce phénomène soient abordées dans le cadre d’un effort conjoint multilatéral global entre les agences et les unités compétentes de l’ONU et de l’UA, fondé sur la coordination et la coopération, afin de le prévenir et de le combattre efficacement.  De plus, une action coordonnée est nécessaire entre les États de la région, les organisations sous-régionales et les Nations Unies afin de lutter contre les activités des groupes terroristes tout en s’attaquant au trafic illicite de drogues et d’armes légères et de petit calibre, a insisté le représentant. 

M. BERNARD MABEBA (Afrique du Sud) a vu dans l’initiative « Faire taire les armes » une manifestation de la volonté des peuples africains de mettre fin au fléau des conflits violents sur le continent dans la poursuite d’une prospérité partagée et d’un développement socioéconomique.  Cette initiative est du reste l’un des principaux projets de l’Agenda 2063, le plan directeur du développement socioéconomique de l’Afrique, a-t-il rappelé, en insistant sur le lien étroit entre paix et développement.  Malgré les efforts consentis par l’Union africaine (UA) et les communautés économiques régionales pour aider les pays du continent à atteindre leurs objectifs de développement respectifs, des obstacles subsistent pour faire taire les armes, a cependant constaté le représentant.  Face à la récurrence des conflits dans certaines parties de l’Afrique, il a jugé essentiel de renforcer la résilience des institutions chargées de promouvoir une croissance économique et un développement inclusifs. 

Relevant d’autre part que les politiques de développement nécessitent un financement à long terme, le représentant a exhorté les banques multilatérales de développement, les institutions de financement du développement et le secteur privé à aider les pays africains à mettre en œuvre leurs aspirations de développement en vue d’accélérer la réalisation de l’Agenda 2063 de l’UA et du Programme 2030 de l’ONU.  Il a cependant averti que les sanctions unilatérales et autres mesures économiques coercitives ainsi que les flux financiers illicites se révèlent être des obstacles au développement socioéconomique des pays du continent.  « Ces obstacles doivent être levés efficacement si le continent africain veut réaliser son plein potentiel de développement, de paix et de stabilité », a-t-il lancé, appelant de ses vœux une poursuite de l’évaluation des activités associées à l’initiative « Faire taire les armes », par le biais de la mise en œuvre de la résolution 2457 (2019) du Conseil de sécurité, mais aussi de la feuille de route principale sur les étapes pratiques à franchir.

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