Conseil de sécurité: pour l’Envoyé spécial en Syrie, la coopération humanitaire doit servir d’exemple à un processus politique dans l’impasse
Réuni pour sa séance mensuelle sur la situation politique et humanitaire en Syrie, le Conseil de sécurité a pris la mesure, ce matin, des efforts de secours déployés par l’ONU et ses partenaires après le tremblement de terre qui a dévasté les régions frontalières de la Türkiye et de la Syrie et reconfiguré l’aide apportée dans ce dernier pays, lequel entre dans sa treizième année de conflit. Pour l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Geir O. Pedersen, la coopération en ce domaine doit servir d’inspiration à un processus politique dans l’impasse.
Le nombre de victimes recensées ne cesse en effet de s’alourdir, avec plus de 56 000 morts à ce jour, et des dégâts matériels estimés par la Banque mondiale à 5,2 milliards de dollars, très probablement plus, a indiqué le Directeur par intérim de la Division des opérations et du plaidoyer au Bureau de la coordination des affaires humanitaires, M. Tareq Talahma. La moitié des biens détruits sont des bâtiments résidentiels, jetant des millions de personnes dans une précarité que les inondations récentes dans la région n’ont fait qu’aggraver, a-t-il constaté.
En dépit de ces défis, l’ONU a déboursé 40 millions de dollars en l’espace de quelques jours, a fait observer M. Talahma, en précisant qu’avec ses partenaires, l’Organisation a réussi à fournir vivres et argent à 2,2 millions de nécessiteux; des efforts grandement facilités par les approbations des mouvements de personnel ainsi que l’élargissement des passages transfrontaliers dans le nord-ouest de la Syrie. En effet, avec l’aide de sept agences onusiennes, plus de 900 camions y sont parvenus depuis la Türkiye via les trois points de passage opérationnels à Bab el-Haoua, Bab el-Salam et Raaï, s’est félicité le Directeur par intérim.
Pour l’Envoyé spécial, la réouverture par les autorités syriennes des points de passage de Bab el-Salam et Raaï doit donner un nouvel élan pour relever les défis politiques plus larges antérieurs au séisme. Outre la situation sécuritaire, M. Pedersen a évoqué la protection des civils, les questions des terres et biens, des moyens de subsistance, des services de base, des infrastructures énergétiques, et le dossier des personnes en détention, enlevées et portées disparues. Plus tôt ce mois-ci, M. Pedersen a d’ailleurs rencontré des représentants de la Charte pour la vérité et la justice, qui lui ont raconté comment le séisme avait encore exacerbé leur angoisse liée au sort de leurs proches, peut-être victimes des tremblements de terre.
Si plusieurs membres du Conseil de sécurité, dont le Brésil et les États-Unis, se sont félicités de la tenue, le 20 mars dernier, de la conférence des donateurs de Bruxelles, qui s’est soldée par des promesses de contributions d’un montant de 950 millions d’euros en faveur de la population syrienne, il reste cependant beaucoup à faire pour le représentant de l’OCHA, qui a rappelé que le Plan de réponse humanitaire 2023 pour la Syrie, « le plus important au monde », n’est financé qu’à hauteur de 6% actuellement.
La conférence de Bruxelles a d’ailleurs été dénoncée par la République arabe syrienne, qui n’a, selon son représentant, jamais été consultée à ce sujet. En outre, alors que le Ghana (au nom des A3), l’Albanie, Malte et la Suisse ont repris à leur compte les inquiétudes de l’Envoyé spécial au sujet des personnes disparues, le représentant syrien s’est agacé des tentatives de créer un « nouveau mécanisme international politisé », demandé aujourd’hui par l’Albanie et les États-Unis. Mon gouvernement, a-t-il tranché, est déterminé à appliquer les procédures prévues dans la localisation de ces personnes, qu’elles aient disparu à cause des agissements des terroristes ou des forces d’occupation étrangères.
La Fédération de Russie a ainsi blâmé les États-Unis pour la situation désastreuse sur le terrain, Washington et ses « satellites » ayant refusé que soit livré à Damas le matériel nécessaire pour déblayer les zones dévastées dans les territoires contrôlés par le Gouvernement. Même chose pour les engrais destinés à la Syrie, au prétexte qu’il s’agirait d’un produit à « double usage », une « excuse bureaucratique commode », comme du reste les restrictions bancaires, qui dissuadent les entreprises étrangères d’honorer le carnet de commandes de l’ONU, a accusé le représentant russe.
La Fédération de Russie a également mis en cause les frappes aériennes attribuées à Israël contre l’aéroport d’Alep, dont les dernières remontent à hier. Les dégâts causés à ce site ont conduit à sa fermeture, alors qu’il accueillait les vols humanitaires internationaux et les opérations du Service aérien d’aide humanitaire des Nations Unies (UNHAS), en raison de sa proximité avec les zones détruites par le tremblement de terre. La Chine, les Émirats arabes unis ou encore le Japon se sont eux aussi émus de cette fermeture.
Si les A3, Malte et la Türkiye se sont prononcés pour la prolongation du mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière, qui expire le 10 juillet prochain, la Fédération de Russie s’est en revanche interrogée sur sa pertinence. Puisque les « bandits » de l’organisation terroriste Front el-Nosra n’ont aucune intention de fournir un accès aux travailleurs humanitaires en provenance de Damas, la Fédération de Russie s’est dite de plus en plus convaincue que les livraisons de l’aide partout en Syrie doivent se faire avec l’accord des autorités légitimes.
Par ailleurs, le Royaume-Uni et la France se sont alarmés que la Syrie représente désormais 80% de la production mondiale du captagon, un « narcotrafic étatisé » particulièrement lucratif, puisqu’il générerait plus de 57 milliards de dollars de revenus, profitant « à quelques hommes d’affaires proches du régime et aux milices présentes en Syrie », tout en constituant un facteur de déstabilisation régionale.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT
Déclarations
M. GEIR O. PEDERSEN, Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie, a indiqué être tout juste de retour d’Amman, en Jordanie, où il s’est entretenu avec des responsables gouvernementaux de l’Égypte, de la France, de l’Allemagne, de la Jordanie, de la Norvège, du Qatar, de l’Arabie saoudite, de la Turquie, des Émirats arabes unis, du Royaume-Uni, des États-Unis, de l’Union européenne et de la Ligue arabe, à la suite des tremblements de terre tragiques qui ont touché la Syrie et la Türkiye le mois dernier. Il a expliqué que de ces discussions était ressortie l’absolue nécessité de continuer à fournir des ressources pour soutenir la réponse d’urgence aux séismes –tout en continuant, bien sûr, à soutenir la réponse humanitaire plus large- tant en Syrie que dans les pays voisins. Aussi l’Envoyé spécial a-t-il salué les promesses de contributions faites lors de la récente conférence internationale des donateurs, qui s’est tenue à Bruxelles.
L’Envoyé spécial a expliqué qu’un calme durable avait été observé sur le terrain au cours du mois écoulé, en particulier dans les zones touchées par les tremblements de terre. « Brièvement, l’inimaginable est devenu possible, les parties de part et d’autre de la ligne de front s’abstenant largement d’hostilités ». Malheureusement, nous avons assisté depuis à une recrudescence des incidents, a regretté M. Pedersen: bombardements et tirs de roquettes à travers les lignes de front dans le nord-ouest et le nord-est; raids transfrontaliers menés par l’Organisation de libération du Levant (HTS); allégations des États-Unis d’attaques à la roquette visant les troupes américaines basées à Deïr el-Zor; incident à Afrin au cours duquel des combattants armés de l’opposition ont tiré sur des civils; attaques de Daech; et nouvelles frappes aériennes attribuées à Israël, notamment sur l’aéroport international d’Alep, qui ont entraîné sa fermeture, avec des répercussions sur les opérations humanitaires en cours.
M. Pedersen a donc œuvré avec les principales parties prenantes au retour d’un calme durable, en particulier dans les zones dévastées par le tremblement de terre dans le nord-ouest de la Syrie. Ainsi, deux points de passage, longtemps fermés, ont été rouverts, avec un assouplissement des sanctions, démontrant que des gestes constructifs sont possibles, s’est félicité l’Envoyé spécial.
Cette avancée sur le plan humanitaire doit servir d’exemple pour aborder les questions de la réhabilitation post-séisme et les défis politiques plus larges, a estimé M. Pedersen: la situation sécuritaire, la protection des civils, les terres et biens, ainsi que les moyens de subsistance, les services de base, les infrastructures énergétiques sont autant de questions vitales à ses yeux. Il a également cité le dossier des détenus, des personnes enlevées et portées disparues. Plus tôt ce mois-ci, l’Envoyé spécial a rencontré des représentants de la Charte pour la vérité et la justice, qui lui ont raconté comment le séisme avait encore exacerbé leur angoisse liée à l’impossibilité de connaître le sort de leurs proches, qui ont peut-être été victimes des tremblements de terre.
Un certain degré de coopération est donc essentiel pour trouver la marche à suivre, a insisté M. Pedersen, qui a mis en garde contre les approches individuelles, vouées à l’échec. Il a donné l’assurance qu’il continuerait à dialoguer avec un large éventail de Syriens, notamment des représentants de la société civile et du Conseil consultatif des femmes, qui s’est réuni à La Haye il y a deux semaines.
Préoccupé par le fait que la Commission constitutionnelle ne s’est toujours pas réunie depuis 10 mois, l’Envoyé spécial a regretté que la capacité des Syriens à rechercher une solution globale soit prise en otage par des problèmes « sans rapport avec leur pays ». La situation actuelle est si inédite qu’elle exige leadership, idées audacieuses et esprit de coopération. La semaine dernière, a-t-il rappelé, nous avons franchi le cap des 12 ans de guerre en Syrie. Un processus politique contrôlé par les Syriens, dirigé par les Syriens et facilité par l’ONU, soutenu par la communauté internationale, est plus que jamais essentiel, a encore exhorté l’Envoyé spécial.
M. TAREQ TALAHMA, Directeur par intérim de la Division des opérations et du plaidoyer au Bureau de la coordination des affaires humanitaires, a relevé qu’alors que les équipes continuent de déblayer les décombres, le nombre de morts continue d’augmenter, avec plus de 56 000 décès désormais enregistrés. En Syrie, la Banque mondiale estime les pertes à 5,2 milliards de dollars, le montant réel étant probablement beaucoup plus élevé. Les dommages aux bâtiments résidentiels représentent environ la moitié des destructions, laissant des millions de personnes dans des situations de vie temporaires. Les pluies et les inondations récentes n’ont fait qu’aggraver les difficultés auxquelles sont confrontées de nombreuses familles, obligeant de nombreux campements à déménager, encore une fois, dans des endroits jugés plus sûrs, a-t-il indiqué. M. Talahma a affirmé que la catastrophe a mis à rude épreuve l’infrastructure de délivrance de l’aide, ce qui a eu un impact sur l’aide humanitaire déjà disponible sur le terrain.
En dépit de ces défis, quelques heures après les tremblements de terre, l’ONU avait déboursé 15 millions de dollars de son fonds d’urgence, passant à 40 millions de dollars en quelques jours, a fait observer M. Talahma. En collaboration avec des partenaires, nous avons fourni à 2,2 millions de personnes des vivres d’urgence, des rations prêtes à consommer et des transferts monétaires, a-t-il encore expliqué. Les approbations pour les mouvements de personnel et les évaluations ont grandement aidé ces efforts. De même, le passage transfrontalier élargi s’est avéré essentiel dans le nord-ouest de la Syrie. En effet, plus de 900 camions avec l’aide de sept agences des Nations Unies ont maintenant atteint le nord-ouest de la Syrie depuis la Türkiye via les trois postes frontaliers disponibles à Bab el-Haoua, Bab el-Salam et Raaï.
Il reste encore beaucoup à faire dans les semaines à venir, a reconnu M. Talahma. Les abris collectifs doivent être décongestionnés et consolidés. Les retours sûrs, volontaires et dignes doivent être facilités. Les urgences de santé publique doivent être surveillées, en particulier le choléra, dont une épidémie sévit actuellement. Les services de santé, d’orthopédie et de chirurgie doivent être renforcés.
Pour le représentant d’OCHA, la générosité des donateurs est essentielle à ces efforts. Il a salué la conférence des donateurs européens et internationaux qui s’est tenue à Bruxelles en début de semaine. Les 7 milliards d’euros promis pour les efforts de réponse pour la Syrie et la Türkiye seront essentiels pour soutenir les efforts de secours dans les mois à venir, a-t-il expliqué. Il a rappelé qu’environ 15,3 millions de personnes à travers la Syrie, dont beaucoup ont été affectées par le tremblement de terre, ont peu de recours au-delà de l’aide humanitaire pour leurs besoins les plus élémentaires. Les femmes et les filles ont payé le prix le plus élevé, a-t-il déclaré.
M. Talahma a aussi rappelé que le Plan de réponse humanitaire 2023 pour la Syrie est le plus important au monde. Pourtant, il n’est financé qu’à 6% actuellement. Il a souligné que le Secrétaire général adjoint à l’aide humanitaire, M. Martin Griffiths, vient de terminer sa deuxième mission dans la région depuis le tremblement de terre du 6 février. La visite a été l’occasion de reprendre d’importantes discussions avec les responsables gouvernementaux et les partenaires humanitaires sur les questions liées à la préservation de l’espace humanitaire. Les besoins sont grands, mais notre détermination demeure également inébranlable, a-t-il conclu.
M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil), qui s’est exprimé au nom de son pays et de la Suisse, les deux porte-plume sur le dossier humanitaire syrien, a souligné la crise humanitaire multidimensionnelle en Syrie, que le séisme est venu aggraver. Le représentant a salué l’ouverture de deux points de passage supplémentaires pour faire transiter l’aide humanitaire de l’ONU, avant de réclamer que les opérations humanitaires transfrontalières et au travers des lignes de front soient placées entre les mains d’acteurs syriens. Toutes les parties doivent s’acquitter de leurs obligations en vertu du droit international, a-t-il ajouté, en saluant les promesses de dons faites lors de la récente conférence de Bruxelles.
S’exprimant ensuite à titre national, M. de Almeida Filho a indiqué que son pays avait fait parvenir sept tonnes de nourritures déshydratées aux victimes du séisme. Une solution militaire est illusoire, a déclaré le représentant, qui a appelé à la pleine application de la résolution 2254 (2015). Enfin, il a souhaité la reprise des travaux de la Commission constitutionnelle. Le séisme nous a rappelé que la Syrie ne peut rester dans le statu quo, a-t-il conclu.
M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a noté qu’après 12 années de guerre en Syrie, on ne compte plus les victimes, les villes rasées, les personnes assassinées, détenues, déplacés ou réfugiées. Des générations d’enfants n’ont connu que la guerre et la privation, a déploré le représentant, accusant le « régime Assad » de n’avoir jamais aspiré à la paix et d’avoir au contraire commis des atrocités, pour certaines constitutives de crimes de guerre et de crime contre l’humanité, avec le soutien de la Russie et de l’Iran.
Pour trouver une solution politique à ce conflit, neuf réunions de la Commission constitutionnelle ont eu lieu avant que ce processus se heurte à la mauvaise foi du régime, a regretté le représentant, qui s’est néanmoins félicité des efforts déployés par l’ONU pour progresser étape par étape. Mais, selon lui, la participation de toutes les parties exige que le régime syrien rende la pareille et ne reste pas les bras croisés à attendre que la communauté internationale fasse des concessions. Face à ce régime dictatorial qui a utilisé des armes chimiques contre sa population, perpétré des attaques contre des écoles et des hôpitaux et procédé à d’innombrables détentions arbitraires, « seule une réforme exhaustive permettant d’inverser la vapeur pourrait améliorer la situation sur le terrain », a-t-il affirmé.
Constatant que plus de 15 millions de Syriens sont aujourd’hui dans le besoin, une situation encore exacerbée par le tremblement de terre du 6 février, le représentant a rappelé que les États-Unis avaient décaissé 16 milliards de dollars en 12 ans pour leur venir en aide. Les États-Unis ont en outre annoncé leur intention de débloquer 235 millions pour la Syrie et la Türkiye, avec 50 millions supplémentaires promis cette semaine lors de la conférence des bailleurs de fonds accueillie par la Suisse et l’Union européenne, a-t-il ajouté.
Le représentant a plaidé pour que l’aide puisse être acheminée par toutes les moyens, notamment de manière transfrontalière. Le passage de l’aide par les postes frontière sauve des vies, a-t-il insisté, applaudissant l’ONU pour avoir obtenu des voies d’accès supplémentaires à titre temporaire. Toutes les parties doivent s’employer à acheminer une aide efficace et prévisible à la population, sans exploiter le tremblement de terre à des fins politiques, a poursuivi le représentant, dénonçant ceux qui utilisent le prétexte des sanctions pour justifier le non-envoi d’une assistance. Depuis le 6 février, des équipements médicaux et des vivres sont arrivés dans des zones contrôlées par le régime par voies maritimes, aériennes et terrestres, s’est-il félicité, promettant que les États-Unis continueront à appuyer ceux qui envoie de l’aide dans la plus totale légitimité. Enfin, après s’être ému du sort des femmes dans ce conflit, il a appelé à la création d’un mécanisme pour répertorier les personnes détenues arbitrairement ou portées disparues.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a déclaré que la situation humanitaire en République arabe syrienne et dans les pays voisins est déterminée dans une large mesure par les conséquences du tremblement de terre du 6 février. Malheureusement, ce mois-ci, Israël a causé à plusieurs reprises des dégâts supplémentaires, a regretté le représentant, qui a affirmé que, les 7 et 22 mars, des avions de chasse israéliens avaient tiré des missiles sur l’aéroport international d’Alep, le plus proche des zones les plus touchées par le tremblement de terre à la frontière turco-syrienne en février. Non seulement il accueille les vols humanitaires internationaux, mais c’est de là que le Service aérien d’aide humanitaire des Nations Unies (UNHAS) transporte tous les articles de première nécessité dans l’ensemble du pays, a fait observer le représentant russe, qui a déploré la fermeture de cet aéroport.
La situation humanitaire du pays est en outre compliquée par la poursuite de l’occupation américaine de Zaevfrata, a soutenu M. Nebenzia, pour qui cette situation démontre une fois de plus que les États-Unis n’ont cure du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Syrie. Ainsi, alors que la Syrie cherche à mener une politique indépendante, Washington et ses « satellites » lui refusent le droit à un développement autonome, a accusé le représentant. Ils n’ont ainsi pas livré à Damas le matériel de construction lourd nécessaire pour déblayer les zones dévastées par le tremblement de terre dans les territoires contrôlés par le Gouvernement. Même chose pour les engrais destinés à la Syrie, au prétexte qu’il s’agit d’un produit à « double usage », une excuse bureaucratique commode pour Washington et Bruxelles, a ironisé le représentant, qui a précisé que les restrictions dans le secteur bancaire dissuadent aussi les entreprises étrangères de prendre des commandes de l’ONU. Aussi M. Nebenzia a-t-il demandé au Secrétariat de ne pas « couvrir » les États-Unis et l’Union européenne, qui affaiblissent selon lui les efforts entrepris par la communauté internationale.
Depuis le 9 février, plus de 900 camions avec de l’aide humanitaire à bord sont déjà entrés dans le territoire contrôlé par Damas en passant par trois points de contrôle à la frontière turco-syrienne, a rappelé le représentant. L’ONU estime que le nombre de ceux qui traversent quotidiennement la frontière a doublé par rapport à 2022, la grande majorité se dirigeant vers Edleb. Pour la Fédération de Russie, le passage aux trois postes frontière ne pose donc aucun problème et aucun obstacle n’empêche l’ONU de se rendre dans les zones sous contrôle des insurgés dans le nord-ouest de la Syrie. « Il s’avère qu’en raison de la situation humanitaire désastreuse dans la région, les terroristes ont été heureux d’ouvrir leurs portes à tous les représentants de l’ONU, en leur fournissant les garanties de sécurité nécessaires à l’acheminement des convois en provenance de Turquie », a poursuivi le représentant, qui s’est étonné que le Secrétariat dise ne pas disposer de garanties suffisantes pour les convois humanitaires en provenance de Damas.
Pour le représentant, l’ONU détourne le regard et reste impuissante, bien que la nécessité d’accroître les acheminements au travers de la ligne de front soit explicitement stipulée dans la résolution 2672 du Conseil de sécurité. Il a donc appelé les dirigeants de la « branche humanitaire » de l’ONU « à cesser de se cacher derrière des phrases politiquement correctes » et de « flirter » avec les terroristes et leurs commanditaires, et à appeler les choses par leur nom: les « bandits » du Front el-Nosra n’ont aucune intention de fournir un accès aux travailleurs humanitaires en provenance de Damas.
Dans ces conditions, a remarqué M. Nebenzia, il y a de bonnes raisons de questionner la pertinence du mécanisme transfrontalier, dont le mandat doit expirer très bientôt. Nous avons à maintes reprises dénoncé le vice de forme de ce mécanisme, qui viole la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, a-t-il rappelé. L’hypocrisie dont nous sommes témoins en ce qui concerne les livraisons transfrontalières nous convainc de plus en plus que les livraisons partout en Syrie doivent se faire avec l’accord des autorités légitimes, comme c’est le cas de l’ouverture de deux nouveaux points d’entrée à Bab el-Salam et Raaï, a-t-il fait valoir.
M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a appelé à s’éloigner de la polarisation et la division de la communauté internationale pour résoudre la crise syrienne. Ainsi, les positions radicales qui font la distinction entre les Syriens à Damas et les Syriens à Edleb doivent être mises de côté. Le représentant a appelé à une solution définitive à la crise, dénonçant la poursuite des hostilités. À cet égard, il a fermement condamné les frappes aériennes qui ont causé des dommages à l’aéroport international d’Alep. Il a aussi appelé à activer le rôle des Arabes dans la résolution des crises arabes, y compris la crise syrienne. Selon lui, il s’agit d’une condition préalable essentielle pour rétablir la stabilité dans la région. La Syrie est un pays arabe, et elle ne peut être séparée de la région arabe, a-t-il martelé. De même, « les pays arabes doivent embrasser la Syrie et l’aider à guérir ses blessures », comme en témoigne la solidarité arabe manifestée après le tremblement de terre.
En ce qui concerne la situation humanitaire, les Émirats arabes unis continuent de répondre à la situation difficile résultant du tremblement de terre en fournissant des secours et une aide médicale à la Syrie et à la Türkiye, que ce soit par le biais d’hôpitaux de campagne ou en travaillant en étroite collaboration avec les Nations Unies pour alléger les souffrances des personnes touchées. Les Émirats arabes unis ont ainsi fourni une aide de plus de 300 millions de dollars aux deux pays, dont 20 millions de dollars pour soutenir l’appel éclair pour la Syrie. À la suite du tremblement de terre, les Émirats arabes unis ont également accueilli plusieurs survivants de Syrie dans un état critique et nécessitant un traitement médical.
Le représentant a souligné l’importance d’atteindre d’urgence toutes les zones touchées par le tremblement de terre. Malheureusement, a-t-il dit, l’aide humanitaire n’a pas été fournie par le biais de missions transversales depuis le tremblement de terre, ce qui traduit une dangereuse exploitation de la catastrophe actuelle. Il a indiqué que les groupes terroristes refusent arbitrairement l’accès humanitaire à l’intérieur de la Syrie, au mépris flagrant des valeurs et principes humanitaires.
Enfin, le représentant a souligné la nécessité de tout mettre en œuvre pour faciliter le retour sûr et digne des réfugiés syriens dans leur patrie. Ceci doit être pris en considération lors de la mise en œuvre des projets de relèvement rapide et de reconstruction, a-t-il déclaré. Les Émirats arabes unis soutiennent le dialogue entre la Syrie et Türkiye pour réaliser des progrès sur le retour des réfugiés.
M. GENG SHUANG (Chine) a salué l’ouverture de deux points de passage supplémentaires pour faire transiter l’aide humanitaire de l’ONU pour les victimes du séisme. La prochaine étape est la reconstruction des zones détruites, a ajouté le représentant, qui a déploré le manque de progrès en ce qui concerne les opérations d’aide transfrontalières, ainsi que le manque de sécurité dans l’aéroport d’Alep. Il a appelé à la fin des attaques contre cet aéroport et à la préservation de la souveraineté syrienne.
Le représentant a aussi réclamé avec insistance la levée des sanctions contre la Syrie et la réouverture des relations diplomatiques avec ce pays. Tous les pays doivent contribuer à l’instauration d’un environnement propice à la recherche d’une solution politique, a-t-il conclu, en appelant à la fin de la présence des forces étrangères en Syrie.
M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) s’est félicité des efforts déployés par l’ONU et ses partenaires humanitaires sur le terrain, soutenant l’appel du Secrétaire général à réfléchir aux moyens de décaisser rapidement les fonds nécessaires promis le 14 février dernier.
Parallèlement à une situation sanitaire désastreuse, le représentant a fait état d’une situation sécuritaire également très précaire, s’alarmant en particulier du sort des femmes, des filles et des enfants. Il a condamné catégoriquement les attaques menées avec des missiles sur des zones résidentielles de Damas ainsi que celles perpétrées contre l’aéroport international d’Alep, un acte qui a entravé l’acheminement de l’aide humanitaire.
Dans ce contexte, le représentant a exhorté le Gouvernement syrien à pérenniser l’acheminement de cette aide par les points de passage récemment rouverts et à coopérer avec les institutions onusiennes à cette fin. La population syrienne a plus que jamais besoin de la solidarité des pays de la région et de la communauté internationale, a-t-il ajouté.
Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a constaté que, 12 ans après les premières manifestations de mars 2011, la Syrie reste marquée par le conflit. Devant le vide laissé par les disparitions, les cendres et les gravats causés par le conflit et, plus récemment, par les tremblements de terre, une solution politique du conflit syrien reste primordiale, a déclaré la représentante, estimant à cet égard que les Syriennes ont un rôle important à jouer pour améliorer les conditions sociales, matérielles, humaines et politiques de leur pays. Leur participation aux décisions qui engagent leur avenir est conforme au programme pour les femmes et la paix et la sécurité, et à la résolution 2254 (2015), a-t-elle souligné, avant de saluer le caractère inclusif du Comité consultatif des femmes syriennes et ses efforts pour promouvoir le dialogue.
Dans ce contexte, la représentante a exprimé son soutien aux efforts de l’Envoyé spécial visant à rétablir la confiance entre les différentes parties, assurant que la Suisse continuera de mettre à disposition Genève pour accueillir tous les types de pourparlers et d’initiatives destinés à promouvoir une paix durable en Syrie. Face aux violations continues du droit international humanitaire et des droits humains commises depuis 2011, elle a appelé toutes les parties au conflit à respecter leurs obligations afin de mettre fin à la situation désastreuse dans laquelle vivent les civils et les personnes privées de liberté. Jugeant enfin que la justice et la lutte contre l’impunité sont des conditions sine qua non pour permettre une paix durable, elle a réitéré son soutien au travail du Mécanisme international, impartial et indépendant pour la Syrie et a rappelé le rôle que le Conseil de sécurité peut jouer en la matière.
M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a relevé que le tremblement de terre du mois dernier avait ajouté une nouvelle tragédie à la crise syrienne. À la suite du séisme, le Royaume-Uni a annoncé un montant supplémentaire de 52 millions de dollars en faveur de l’assistance humanitaire à la Syrie et la Türkiye pour financer l’alimentation, les fournitures médicales et les abris, a rappelé le représentant. Selon lui, ces ressources doivent atteindre plus de 4,1 millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie de la manière la plus efficace et la plus efficiente, y compris grâce à un accès transfrontalier prévisible. Il a constaté que, malgré le tremblement de terre, les hostilités avaient continué, avec des exemples d’attaques des forces du régime blessant des civils.
La narco-industrie milliardaire de captagon, venue de Syrie, présente un nouveau risque déstabilisant pour la région, a par ailleurs déclaré le représentant. Il a appelé à une solution inclusive et responsable du conflit, en s’appuyant sur la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité. Il a souligné que la semaine prochaine, le Conseil entendra le Secrétaire général parler du sort des familles qui sont toujours à la recherche de leurs proches. C’est un problème qui affecte tous les Syriens, de tous les côtés de ce conflit, a-t-il relevé. Il a dit espérer que les Nations Unies pourront leur donner des réponses.
Mme MITSUKO SHINO (Japon) a rappelé que ce mois marque la douzième année depuis le début de la crise syrienne, ajoutant que le tremblement de terre du 6 février avait été « un cauchemar en plus d’un cauchemar ». La représentante a jugé nécessaire une « approche sans précédent » pour faire face à cette calamité et demandé une « expansion radicale » de l’aide humanitaire et d’une assistance à long terme pour permettre le redressement rapide de la région touchée. Signalant que son pays avait déjà fourni environ 18,5 millions de dollars de secours d’urgence et d’assistance humanitaire, elle a rappelé que le Japon, de par son expérience, était en mesure d’identifier ce qui sera nécessaire à l’avenir.
La déléguée a appelé les donateurs à continuer de soutenir généreusement l’appel éclair pour la Syrie et le plan d’intervention humanitaire, ainsi qu’à renforcer la coordination entre les acteurs humanitaires, y compris les ONG et la société civile. À cet égard, le Japon se félicite de l’accord conclu entre le Gouvernement syrien et l’ONU pour établir deux points de passage transfrontaliers supplémentaires afin de permettre à l’aide d’atteindre le nord-ouest du pays. Il salue également l’approbation générale par le Gouvernement syrien de l’aide au travers des lignes de front.
La représentante a rejeté les actions militaires qui exploiteraient cette situation d’urgence à des « fins égoïstes » et a jugé extrêmement inquiétantes les récentes frappes aériennes dans le nord-ouest de la Syrie et l’attaque de l’aéroport international d’Alep, qui ont entravé les opérations humanitaires. Alors que commence le mois sacré du ramadan, « période de réflexion et de retenue », elle a jugé nécessaire un cessez-le-feu à l’échelle du pays à la fois pour acheminer l’aide et pour promouvoir le dialogue politique entre les parties concernées.
Concernant ce dernier, le Japon est profondément préoccupé par l’absence de calendrier pour la convocation de la neuvième réunion à Genève du Comité constitutionnel, le « seul format qui peut rassembler tous les acteurs pour le dialogue ». Celui-ci ne doit pas être obstrué par un membre du Conseil de sécurité, a averti la représentante, qui a en outre souhaité que l’intensification récente de l’activité diplomatique régionale créera un environnement plus favorable, afin que l’approche progressive de l’Envoyé spécial puisse produire des résultats tangibles. Rappelant que c’est le peuple syrien qui a risqué sa vie pour sauver les personnes ensevelies sous les décombres et que c’est lui qui doit mener le processus politique nécessaire à la restauration de la « Syrie digne et belle qui existait avant 2011 », la représentante a conclu en affirmant qu’il est de la responsabilité de ce Conseil de soutenir ce processus.
M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a indiqué que la France a rehaussé son aide en soutien au peuple syrien lors de la conférence de Bruxelles du 20 mars, en précisant que les engagements des bailleurs internationaux ont atteint 950 millions d’euros pour la population syrienne. Cette aide permettra de répondre aux besoins vitaux des personnes affectées par le séisme en Syrie, a estimé le représentant.
Le drame humanitaire du séisme ne peut néanmoins pas faire oublier les réalités de la guerre, a poursuivi M. de Rivière, qui a ajouté: « Dans l’intérêt du peuple syrien, qui aspire à une paix durable, nous resterons fermes et ne ferons pas évoluer notre position vis-vis du régime tant que des progrès réels et durables vers une solution politique fondée sur la résolution 2254 (2015) n’auront pas été accomplis. » Enfin, il a rappelé que la Syrie représente désormais 80% de la production mondiale du captagon. Ce narcotrafic étatisé dont le montant est estimé à plus de 57 milliards de dollars bénéficie au régime, à quelques hommes d’affaires proches du régime et aux milices présentes en Syrie et constitue un facteur de déstabilisation pour toute la région, a-t-il averti.
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), au nom des A3 (Gabon, Ghana et Mozambique), a estimé que la confluence de 12 années de conflit et d’une catastrophe naturelle aux proportions épiques au milieu de l’hiver rendait plus urgent que jamais le soutien de la communauté internationale à la Syrie. Remerciant les donateurs qui ont fourni une contribution d’environ 312 millions de dollars, sur les 397 millions requis dans le cadre de l’appel éclair pour le tremblement de terre, il a appelé à relever le défi des 85 millions restants, avant de rappeler que le Plan de réponse humanitaire pour la Syrie reste, lui, sous-financé à plus de 90%. Face à cette « tragédie », le représentant a déploré les hostilités militaires incessantes des parties, y compris les attaques terroristes de Daech et de Hay’at Tahrir el-Cham (HTS), le long des lignes de front. Condamnant le ciblage de civils innocents et d’infrastructures civiles, il s’est par ailleurs alarmé des frappes aériennes israéliennes des 7 et 22 mars, qui ont touché l’aéroport international d’Alep et interrompu la distribution de l’aide humanitaire aux victimes du séisme.
Dans ce contexte, la résolution 2254 (2015) reste pour les A3 la principale feuille de route pour parvenir à la solution politique souhaitée, qui prend en compte le plus large éventail de Syriens, y compris les voix des femmes et de la société civile. Après avoir réaffirmé son appui aux efforts de l’Envoyé spécial, le représentant a exhorté les parties à s’entendre sur un cessez-le-feu à l’échelle nationale et à coopérer pour sortir de l’impasse actuelle au sein de la Commission constitutionnelle. Il a également jugé que s’attaquer au problème des détenus et des personnes portées disparues constituerait une mesure de confiance importante.
Revenant à la situation humanitaire, le représentant a indiqué que les A3 appuient l’utilisation de toutes les modalités possibles pour apporter de l’aide à toute personne dans le besoin en Syrie. Dans ce cadre, le mécanisme d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontière et les livraisons au travers des lignes de front restent essentiels pour soulager les souffrances du peuple syrien, a-t-il souligné, appelant les parties à travailler en étroite collaboration avec l’ONU pour étendre le soutien à travers les lignes.
M. DARREN CAMILLERI (Malte) a rappelé les conséquences dévastatrices du tremblement de terre après six semaines. Tout en saluant le travail des Nations Unies et de ses agences, le représentant a jugé nécessaire d’augmenter la quantité d’aide fournie dans le nord-ouest de la Syrie et de veiller à ce qu’elle arrive là où elle est nécessaire le plus rapidement possible. Il a pris note des préoccupations de la Commission d’enquête sur la Syrie à cet égard.
Jugeant que les besoins restent « énormes », le représentant a appelé à un soutien accru aux Nations Unies et aux agences humanitaires en Syrie. Il a noté avec satisfaction de l’augmentation du nombre de camions passant par le nouveau point de passage de Bab el-Salam ces derniers jours, tout en notant que celui de Bab-el-Haoua restait de loin le principal. Il y a vu la démonstration de l’importance durable du mécanisme transfrontalier, qui « doit rester ouvert et opérationnel ». Parallèlement, Malte appelle toutes les parties à soutenir et faciliter l’acheminement de l’aide depuis Damas vers le nord-ouest et le nord-est. Le représentant s’est dit préoccupé par les frappes aériennes qui ont visé l’aéroport d’Alep du fait de leurs implications potentielles sur l’opération humanitaire.
Le délégué a insisté sur le fait qu’il n’y a pas de solution militaire au conflit syrien. En revanche, a-t-il ajouté, il existe de nombreux domaines dans lesquels des progrès peuvent être réalisés conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité, « qui reste la seule voie viable pour sortir du statu quo actuel ». Il a notamment estimé que la libération transparente et vérifiable des personnes détenues arbitrairement, l’obtention d’informations sur le lieu où se trouvent les disparus et sur leur sort, sont à la portée des parties et permettraient une véritable avancée politique. Il a invité les autorités syriennes à autoriser le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme à se rendre dans le pays et à y établir une présence sur le terrain. Il a aussi souhaité une reprise des travaux de la Commission constitutionnelle à Genève, qui « constituerait un signal positif ». Malte, a-t-il rappelé, reste favorable à un « véritable processus politique mené et pris en charge par les Syriens, facilité par les Nations Unies, avec toutes les parties prenantes clefs travaillant de manière constructive et cohérente pour le peuple syrien ».
En conclusion, le représentant a apporté son plein soutien au travail de l’Envoyé spécial et son initiative « pas à pas ».
M. ARIAN SPASSE (Albanie) a relevé que, malgré le tremblement de terre, la Syrie demeure un champ de bataille sur lequel quelque 100 000 Syriens sont portés disparus. La résolution 2254 (2015) reste lettre morte et le « régime d’Assad » est responsable d’atrocités, y compris l’usage d’armes chimiques, a accusé le représentant, qui a appelé à créer un mécanisme pour faire toute la lumière sur le sort des personnes portées disparues, comme l’avait demandé le Secrétaire général de l’ONU. Il a aussi affirmé que l’aide humanitaire ne doit jamais être politisée, ajoutant qu’à travers elle, la communauté internationale devait montrer aux Syriens qu’ils ne sont pas abandonnés.
M. BASSAM SABBAGH (République arabe syrienne) a dénoncé les « trois pays » qui cherchent à s’exonérer de toute responsabilité dans le massacre des Syriens. Ces derniers sont par ailleurs victimes d’un véritable châtiment collectif en raison des sanctions qui leur sont imposées, a ajouté le représentant, qui a dénoncé la mentalité de sélectivité qui est celle des Occidentaux. Ces derniers n’ont rien fait pour mettre un terme aux attaques systématiques d’Israël contre la Syrie, dont la dernière en date a frappé l’aéroport d’Alep, utilisé pourtant dans l’acheminement de l’aide aux victimes du séisme, a-t-il accusé. Il a jugé inacceptable que certains protègent Israël au sein de ce Conseil et empêchent ce dernier de s’acquitter de ses responsabilités.
Le représentant a ensuite dénoncé la politisation de la question des droits humains et l’approche hostile poursuivie au sein de l’ONU par certains pays sur le dossier des personnes disparues en Syrie, en cherchant à créer un « autre mécanisme international politisé », au prix d’une distorsion des faits. Mon gouvernement est déterminé à appliquer les procédures prévues dans la recherche de ces personnes, qu’elles aient disparu en raison des agissements des terroristes ou des forces d’occupation étrangères, et à les localiser, a-t-il assuré. Comme autre exemple de politisation, il a mentionné l’organisation de la conférence de Bruxelles en soutien aux victimes du séisme, qui s’est tenue sans coordination avec le Gouvernement de la Syrie. Enfin, il a déclaré que les exemptions humanitaires aux sanctions ne sont d’aucune utilité et a assuré de l’appui de son gouvernement pour faciliter les opérations humanitaires de l’ONU, en mentionnant l’ouverture, par une décision souveraine, de deux points de passage supplémentaires à la frontière.
Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a jugé que la situation humanitaire en Syrie demeure « complexe », en particulier après le séisme du 6 février. Tout en saluant les efforts de l’ONU et des organisations humanitaires qui fournissent un appui vital à la population, la représentante a déploré d’importantes lacunes en matière de ressources et a appelé les bailleurs de fonds à maintenir leur soutien à la Syrie. Elle a souhaité à cet égard que la visite en Syrie du Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths, donne lieu à un accroissement de l’aide à ce pays.
La représentante s’est félicitée, dans ce contexte, des efforts déployés par la Syrie pour faciliter l’accès de l’aide humanitaire, avant d’appeler à une mobilisation internationale pour renforcer l’acheminement de cette aide à travers les lignes de front. Elle a jugé essentiel que l’aide puisse être fournie de manière impartiale et sans politisation. De même, il est urgent que la communauté internationale se concentre sur la levée des sanctions « inhumaines » imposées à la Syrie, afin de remédier de manière plus efficace à la crise actuelle. En tant qu’amie de la Syrie, l’Iran est solidaire du peuple syrien et continuera de lui fournir l’aide nécessaire en cette période difficile, a-t-elle assuré.
La représentante a ensuite dénoncé le fait que le « régime israélien » poursuive ses agressions contre la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie, comme en témoignent les frappes aériennes lancées le 7 mars contre l’aéroport d’Alep et un attentat perpétré hier. Condamnant ces attaques qui ne font qu’exacerber les souffrances de la population syrienne et constituent une menace pour la sécurité régionale, elle a invité le Conseil de sécurité à s’acquitter de sa responsabilité et à pousser Israël à rendre des comptes.
La représentante s’est par ailleurs déclarée convaincue que, pour trouver une solution pérenne à la crise syrienne, un processus piloté par la Syrie et facilité par l’ONU est la seule approche viable. Avec ses partenaires du processus d’Astana, l’Iran continuera de s’employer à assurer une normalisation en Syrie et dans son voisinage, a-t-elle affirmé, réitérant son appui aux travaux de la Commission constitutionnelle et aux efforts de l’Envoyé spécial pour faciliter la reprise des réunions. Pour finir, après avoir appelé au retrait complet et immédiat de toutes les forces étrangères présentes illégalement sur le sol syrien, elle s’est félicitée des récents contacts diplomatiques renforcés de la Syrie avec ses partenaires régionaux et internationaux, y voyant un pas essentiel pour garantir la sécurité et prospérité du pays.
M. SEDAT ÖNAL (Türkiye) a relevé que le tremblement de terre avait rendu encore plus compliquée une situation humanitaire déjà fragile en Syrie, ajoutant que la poursuite de l’aide humanitaire transfrontière par les Nations Unies reste vitale.
Pour le représentant, la crise en Syrie se poursuit et il ne faut pas se permettre de complaisance. Le processus politique doit être revitalisé, en s’appuyant sur la résolution 2254 (2015) et il faut donc poursuivre la recherche d’une solution politique. Il est en outre important de créer des conditions d’un retour volontaire sûr et digne des réfugiés syriens. Pour sa part, la Türkiye est déterminée à mettre à mal les desseins séparatistes des groupes terroristes présents en Syrie, notamment le groupe YPG/PKK et Daech, a ajouté le représentant.